TheBlindMagazine#2

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INTERVIEWS EXCLUSIVES STANLEY WEBER LITTLE MIX LARA FABIAN ALEYSSA BILLY TALENT JEREMIE DUVALL J.-C. de CASTELBAJAC MS MR MAI 2013 #2 ISSUE

JARED LETO

DOSSIER SPECIAL CANNES LEO DICAPRIO TOBEY MAGUIRE CAREY MULLIGAN BAZ LUHRMANN KEN LOACH CLIVE OWEN THOMAS VINTERBERG

THIERRY NEUVIC + Audrey Dana + Le Mummy porn + la pole dance + FRANCIS HUSTER


CONTRIBUTEURS

FRANCOIS BERTHIER

WALLENDORFF

Après une carrière de journaliste dans la presse où il a dirigé un grand magazine de rock, François Berthier se dirige vers la photographie. 6 mois après avoir quitté son poste de rédacteur en chef, il shoote Lady Gaga. Puis enchaîne les séries mode, les pubs et les célébrités. Il met toute sa science de l’image et de la presse au service de TheBlindMagazine.

Un peu journaliste et très photographe, Wallendorff hante depuis 10 ans les salles obscures et les ruelles sombres pour la presse et le web. Moins provocateur que capteur, conscient que le bon moment arrive surtout lorsqu’on ne l’attend pas, il ne sort que l’appareil scotché au doigt, au cas où.

DINE DELCROIX

MARIE JIMENEZ

Journaliste et passioné de musique, Dine Delcroix et François Berthier se sont rencontré lorsqu’ils collaboraient à Lizmagazine. fort de leur expérience, ils décident de monter leur propre magazine. TheBlindMagazine est né

Passionnée par l’univers des cosmétiques et de la parfumerie, Marie a fait ses premiers pas chez Guerlain et Yves Saint Laurent Beauté. Toujours à l’écoute du marché, elle livre ses trouvailles beauté sur son blog (www.lesrendezvouscles.com) et débusque avec plaisir les dernières nouveautés tendances dans sa chronique en exclusivité pour les lectrices de TheBlindMagazine.

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EDITO #2 Tout d’abord merci à tous pour le succès du 1er numéro de TheBlindMagazine qui comptabilise près de 25000 vues à ce jour. Nous sommes très heureux de ce joli succès et nous sommes d’autant plus motivés pour vous apporter le meilleur dans les mois à venir. Après ce lancement réussi, TheBlindMagazine revient ce mois-ci avec un numéro qui fait la part belle au festival de Cannes. Nos journalistes se sont penchés sur l’événement qui fera l’ouverture du Festival cette année: « Gatsby le Magnifique ». Retrouvez également nos éditos modes, nos pages beautés, nos reportages, nos interviews exclusives (Jared Leto, Lara Fabian, Little Mix...), nos portraits (Ken Loach, Leonardo DiCaprio, Clive Owen…) toujours illustrés par ce qui fait notre spécificité : des photos fortes et inédites des personnalités que nous rencontrons. On se retrouve très bientôt pour le N°3 et d’ici là, vous pouvez également nous suivre sur Facebook etTwitter. facebook.com/Theblindmagazine twitter.com/Blind_Magazine Bonne lecture ! FONDATEUR, DIRECTEUR DE LA REDACTION, REDACTEUR EN CHEF CINEMA & DIRECTEUR DE LA CREATION FR A NCOIS BERTHIER REDACTEUR EN CHEF REDACTEUR EN CHEF MUSIQUE DINE DELCROIX RÉDACTRICE EN CHEF BEAUTE & NEWS AUR IA NE BESSON JOUR NALISTES Auriane Besson, Ben Callens, Dine Delcroix, Riyad Gimp, Léona Perrot, Thomas Mafrouche, Justin Kwedi, Boyd van Hoeij Wallendorff, Marie Jimenez, Morgan Le Bervet, Martin Lagardère, Audrey Jehanno, Florian Augustin. PHOTOGR APHES Stephane Pironon, Karolina Trawinska, François Berthier, CONTACT R EDACTION/PUB theblindmagazine@gmail.com

The BlindMagazine est édité par la société Ten Feet Under / Tous les textes et photos sont soumis par leurs auteurs qui acceptent leur publication, et n’engagent que leur responsabilité.


SOMMAIRE

MAI 2013

6 Blind Beauty

44 Gatsby le Magnifique

12 Blind News

50 Leonardo DiCaprio

16 Blind Beauty

58 Toby Maguire

22 Edito Beauté

62 Carey Mulligan

28 New Faces

64 Castelbajac

32 L’instant Live

74 Little Mix

34 Aleyssa

82 Billy Talent

38 Jeremie Duvall

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86 Jared Leto


92 Le Mummy Porn

140 Ms Mr

102 Clive Owen

144 MODE

106 Thomas Vintenberg

202 The Naked Truth

110 Francis Huster

210 Blind Test Stanley Weber

114 Ken Loach 120 La Pole Dance 126 Lara Fabian 134 Thierry Neuvic

216 La fille qui rend Blind Audrey Dana 218 Automobile 222 Chroniques CD-DVD

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BLIND BEAUTY mascara Volume Effet Faux Cils Baby Doll Yves Saint Laurent

Yves Saint Laurent Beauté a lancé le 29 avril son nouveau mascara Volume Effet Faux Cils Baby Doll. Grâce à sa formule unique et à sa brosse doublement brevetée, les cils sont allongés et galbés de la racine à la pointe. Une épaisseur parfaite des cils sans jamais les alourdir, la matière se répartit parfaitement. Le regard est illuminé, et naturellement sophistiqué. Le nouveau must-have de la griffe ! Mascara Volume Effet Faux Cils Baby Doll Yves Saint Laurent Disponible en 4 teintes : Noir Fétiche, Brun Enjôleur, Bleu Audacieux et Violet Indiscret 29,50€

Le Gommage douceur pour le visage Mademoiselle Gabrielle

La nouvelle marque Mademoiselle Gabrielle 100% naturelle nous propose une gamme de produits sains et élégants, élaborés et fabriqués en Provence. Sylvie Moreau la créatrice, a souhaité puiser dans la richesse des produits locaux de sa région pour mettre à l’honneur les bienfaits de la nature. On vous conseille le gommage douceur à base d’enzymes de papaye et d’aloe vera qui rééquilibre le pH cutané. Conçu pour les peaux sensibles, la peau est tout de suite lisse, soyeuse et parfumée ! Gommage douceur - Mademoiselle Gabrielle Pot de 50 ml, 24€ Disponible en pharmacies, instituts de beauté, et sur www.mademoiselle-gabrielle.fr

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BLIND BEAUTY L’huile illuminatrice Pivoine Flora l’Occitane

L’Occitane sort pour le printemps une huile beauté scintillante parfaite pour les beaux jours. Cette huile sèche et vaporeuse adoucit, nourrit et sublime la peau grâce à ses micro paillettes dorées très discrètes, son huile végétale, et sa vitamine E. On aime aussi l’odeur délicate de la pivoine, avec des notes fruitées de bergamote et de pamplemousse, qui laisse une sensation de fraicheur instantanée. Multifonction, les plus convaincues pourront l’utiliser sur les cheveux et le visage, pour de subtils reflets dorés et une mise en lumière instantanée ! L’huile illuminatrice Pivoine Flora - L’Occitane 28€ - 75ml Disponible depuis avril 2013 fr.loccitane.com

LIPIKAR Gel fluide La Roche-Posay

La Roche-Posay sort ce mois-ci le gel fluide Lipikar, un soin apaisant et réparateur. Spécialement conçu pour les peaux sensibles voir allergiques, ce gel fluide favorise la reconstruction de la barrière cutanée pour aider à la protection contre les agents externes. Sa texture ultra-légère gel permet une application fluide et une absorption quasi instantanée. Et contrairement à nombre de soins de parapharmacie, celui-ci à l’avantage olfactif : aux notes de pommes vertes, de fleurs blanches, de bambou, se mêlent des accents aquatiques et musqués. Un moment de fraîcheur et de bien-être immédiat. Lipikar Gel fluide - La Roche-Posay Flacon-pompe 200 ml – 10,30€ Flacon-pompe 400 ml – 14,50€ Disponible en mai 2013 en pharmacie. www.laroche-posay.fr

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BLIND BEAUTY La collection maquillage «Pretty Naughty» Estée Lauder

Estée Lauder présente Pure Color Pretty Naughty, une collection en édition limitée pour le printemps 2013. Des couleurs pastelles et très sophistiquées, cette gamme make up nous apporte de la fraîcheur et de la fantaisie à notre vanity tout au long du printemps. Pour le teint, le Blush Pure Color gelée poudrée effet lumière Tease à la texture inédite, entre gel, poudre et fluide, apporte un confort et un éclat subtil sur la peau. Pour le regard, la palette Pure Color ombres à paupières Pretty Naughty contient 5 fards aux couleurs tendres et ultra lumineuses, dans un écrin or grand luxe. Coup de cœur particulier pour l’Eyeliner Kajal intense duo Black & Blue : ce crayon crémeux est à double embout : d’un côté un bleu turquoise et de l’autre un noir ultra-pigmenté pour une mise en beauté immédiate du regard. Enfin, les nouveaux rouges à lèvres Pure Color Rouge semi-velours existent en quatre teintes, du rose pâle au corail vif. Des rouges mats mais au rendu satiné, leurs formules permettent d’obtenir un fini pur et onctueux, rendant les lèvres douces et souples dès l’application.

Pure Color Palette ombres à paupières cinq couleurs Pretty Naughty, 48€ Pure Color Eyeliner Kajal intense duo Black & Blue, 24€ Pure Color Blush gelée poudrée effet lumière Tease, 49€ Pure Color Rouge semi-velours, 4 teintes (Naked, Rock Candy, Rebel, Demure) 25€ La collection Pure Color Pretty Naughty est disponible depuis le 4 mars 2013 en exclusivité et édition limitée dans tous les stands Estée Lauder des grands magasins, chez Sephora Champs Élysées et sur www.esteelauder.fr


BLIND BEAUTY La collection pour le bain Ambre Vanillé Laura Mercier Laura Mercier excelle dans les produits spéciaux pour le bain et la douche. Elle réuni dans cette collection deux de ses notes préférées pour imaginer une ligne pour le bain féminine, chic et sophistiquée. Après le gommage corporel, le bain de miel et le gommage lancés en décembre 2012, Laura Mercier présente ce mois-ci sa collection ambre vanillée avec une crème de douche, un beurre corporel, une crème pour les mains et une eau gourmande. On a testé le beurre corporel à la texture particulièrement riche. Elle offre une qualité d’hydratation maximale grâce au beurre de karité et au beurre d’illipé et pénètre rapidement dans la peau. Une peau nourrit et protégée, un parfum vanillé délicieux et gourmand, c’est le soin parfait.

Beurre corporel ambre vanille, 150g, 37€ Crème de douche ambre vanillé, 200 ml, 42€ Crème mains ambre vanille, 50 g, 19€ Eau Gourmande, 50 ml, 60€ Disponible dès mai 2013 au Bon Marché - Printemps Haussmann - Printemps Parly 2 Printemps Lille - Printemps Lyon - Printemps Nancy - Maison de Beauté Laurent Decreton


BLIND BEAUTY LA CHRONIQUE DE MARIE

Une manucure à tout prix : zoom sur la folie des vernis

Les vernis se sont imposés sur les podiums et dans les foyers, jusqu’à devenir l’accessoire de mode phare de cet été ! Dans un contexte économique plutôt morose, cette petite star est bien le seul produit qui ne connaît pas la crise. Le maquillage pour les ongles a donc la vedette et commence sérieusement à faire de l’ombre. Pour preuve, les vernis gagnent chaque jour un peu plus de terrain dans les grands magasins. Les bars à ongles explosent dans les villes, les « nailistas » battent des records d’audience sur la toile et les boîtes aux lettres ne sont pas en reste. Le magazine Be vient justement de lancer sa Nail Box en exclusivité pour ce printemps. Depuis le vernis à ongles opaque Revlon des années 30, les marques ont parcouru du chemin. Néanmoins, depuis quelques mois, les enseignes de vernis nous donnent le tournis. Une seule couleur sur les mains ne suffit plus : on nous propose de mixer les teintes et de multiplier les couches. La démocratisation des manucures graphiques nous force à jouer les apprentis artistes. Les vernis deviennent outils d’expression et reflets de la personnalité. « Montre moi tes mains et je te dirai qui tu es » semble être le nouvel adage de l’année. Mais serez-vous prêtes à tout porter ? Petit tour d’horizon sur les vernis dernier cri... L’année dernière, les célèbres « top coat à effets » (craquelé, python, croco, matte, gel, carat, milky ou smoky), vous permettaient d’apporter 1 un style singulier à votre couleur préférée. En 2013, les vernis sablés effet 3D (OPI, Kiko, Zoya), ou béton, graffitis, cuir et plumes de Nails Inc., associent couleur et effets, dans le même flacon. Tout comme l’invention des vernis magnétiques, relancée par les marques Essie et Kiko pour l’été. Effet « waouh » assuré lorsque les particules métalliques, contenues dans le vernis, formeront lignes, ronds, damiers ou effets « repstyle » sur vos ongles. Et la dernière tendance innovante ? Les vernis thermo-réactifs d’Alessandro, Claire’s ou Bys, qui changent de couleur en fonction de la température extérieure. Pour les plus créatives et patientes d’entre vous, les kits et tutoriels ont explosé. Après les ma2 nucures caviar et velours, Ciaté lance l’effet ardoise 10


BLIND BEAUTY

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ou kaleidoscope, à 22€. Agnès B, Revlon et Bourjois, quant à eux, nous facilitent la vie grâce aux supers pinceaux « nail art » et au « dotting tool », un stylo magique pour faire des pois. Les beaux jours s’annoncent donc ludiques, voire même régressifs. Ainsi, si les vernis marchent autant, c’est parce qu’à partir de 2,50€ seulement, on peut prendre son temps et laisser libre cours à son inspiration. Attention cependant à ne pas oublier de toujours appliquer une base nourrissante et protectrice. Et mon conseil pour les demoiselles encore timides ou sceptiques, commencez par essayer le tout dernier top coat « effet Tie and Dye » de Sephora. Sans grande difficulté d’application, il intensifiera progressivement la couleur de votre vernis. Un dégradé chic-issisme et subtil…. Maintenant, c’est à vous de tester ! Par Marie Jimenez

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1. Vernis Concrete, Effet «Béton», Nails Inc. (2 teintes) 15€ - 10ml 2. Vernis Top coat Nail designer, Sephora (8 teintes) 4,90€ - 5ml 3. Vernis magnétique collection Repstyle, Essie (6 teintes) 14,90€ 4. Vernis « Nail Lacquer », Collection Mariah Carey, O.P.I (4 teintes) 13,90€ - 15ml 5. Vernis Thermo réactifs Go Magic, Alessandro (4 teintes) 11


THE BLIND NEWS La maison Bucherer vient d’ouvrir son concept multimarques à Paris

Le Paris des montres haut de gamme possède désormais un nouveau centre de gravité : entre la Place Vendôme et les grands magasins du boulevard Haussmann, Bucherer a ouvert, le mois dernier son concept-store au 12 boulevard des Capucines à Paris. Cet horloger, joaillier et revendeur suisse créé en 1888, est le premier distributeur de montres de luxe en Europe avec 25 boutiques multimarques situées en Suisse, en Allemagne et en Autriche. Pour sa première implantation en France, la maison Bucherer dispose donc de 2.200 mètres carrés sur trois étages et propose un éventail de marques prestigieuses : La marque éponyme Carl F. Bucherer, les montres du groupe Richemont (Piaget, Baume & Mercier, Montblanc, Jaeger-LeCoultre…) Rolex, les marques du groupe Swatch (Rado, Tissot), ainsi que des maisons indépendantes comme Chopard ou Oris. C’est désormais le plus grand magasin consacré à la haute horlogerie au monde. Bucherer Paris, 12 boulevard des Capucines, Paris, 9ème arrondissement Ouvert de 8H à 20H du lundi au samedi (21H le jeudi)

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THE BLIND NEWS Jusqu’au 18 août prochain, la Cité de la musique propose l’exposition « Musique et cinéma, le mariage du siècle ? » Pour ceux qui n’ont pas la chance de partir sous le soleil du Festival de Cannes, les parisiens peuvent se consoler facilement. De quelle façon la musique s’inscrit dans la conception et l’histoire de l’œuvre cinématographique ? Comment la musique sert-elle le film ? Qui rend possible cette alchimie du son et de l’image ? Comment se passe ce parcours créatif ? C’est tout l’enjeu de cette belle rétrospective aussi ambitieuse que novatrice qui propose de décrypter le rapport réalisateur – compositeur et explique les étapes de ce processus créatif. Extraits de films, interviews, extraits sonores, photos, jukebox géant, cette exposition nous plonge dans l’univers cinématographique de façon intime et pédagogique. De l’arrivée de la musique dans le cinéma aux plus beaux duos réalisateurs /compositeurs, en passant par les compositions les plus cultes, cet éclairage véhicule autant d’émotions que seul le cinéma et la musique peuvent en apporter.

Exposition «Musique et cinéma, le mariage du siècle ? « La Cité de la musique, 221, avenue Jean Jaurès, 75019 Paris Jusqu’au 18 août 2013 Du mardi au jeudi de 12h à 18h - le dimanche de 10h à 18h Nocturnes les vendredis et samedis jusqu’à 22h. Entrée : 9 € - Tarif réduit : 7,20 € www.citedelamusique.fr

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THE BLIND NEWS Le Palais de Tokyo accueille l’exposition N°5 CULTURE CHANEL Le mythique Chanel n°5 est mis à l’honneur au Palais de Tokyo du 5 mai au 5 juin 2013.

Jean-Louis Froment, commissaire des précédents volets de Culture Chanel, replace le parfum mythique dans son époque en mettant en lumière les courants artistiques qui ont pu inspiré le N°5. Au travers de nombreux objets, on découvre l’histoire de cette fragrance iconique, créée par Ernest Beaux dans les années 20. L’exposition rassemble donc des photographies, des films, des œuvres d’art, d’anciennes publicités et beaucoup d’autres archives rendant visibles les liens qui rattachent le parfum culte à son temps et aux courants d’avantgarde qui le traversent. Le seul souhait de Gabrielle Chanel était d’obtenir un «parfum de femme à odeur de femme». Depuis, cette odeur mystérieuse traverse les siècles et continue de séduire toutes les générations sans jamais se démoder. Une fresque qui raconte autant l’essence artistique, intemporelle et iconique du parfum N° 5 qu’une époque tout entière. Exposition «N°5 Culture Chanel» Jusqu’au 5 juin 2013 Palais de Tokyo, 13 avenue du Président Wilson, Paris 16ème. www.5-culturechanel.com

Sephora s’associe avec Zadig & Voltaire pour la bonne cause Sephora renforce son engagement auprès de « Toutes à l’école » et propose un duo de trousses dessiné par Zadig & Voltaire. Couleurs printanières et design 100% tendance, l’intégralité des bénéfices de la vente sera reversée à l’association « Toutes à l’école » qui milite pour la scolarisation des petites filles au Cambodge. Une jolie idée cadeau ! Duo trousses Zadig & Voltaire : 10 € www.sephora.fr 14


THE BLIND NEWS Le Brésil s’invite au Bon Marché à Paris Esthète et précurseur, Le Bon Marché Rive Gauche aime depuis toujours faire découvrirles cultures du monde entier. Cette année, c’est le Brésil qui sera à l’honneur dans tout le magasin autour d’une grande exposition qui présente le meilleur de la créativité au pays du « Tudo bem », façon Rive Gauche. L’inspiration ? La cool attitude des Cariocas et la sophistication design très urbaine des Paulistas. Résultat : une sélection pointue en mode, beauté, design, objets pour la maison et gastronomie, 5 pop up stores de marques emblématiques ou confidentielles... au total plus de 120 marques méconnues de ce côté de l’Atlantique, des événements culinaires à La Grande Épicerie de Paris qui fleurent bon cette terre solaire, festive et colorée, ainsi que trois expositions culturelles... de quoi enchanter les parisiens accros au Brésil, les «Pariocas» comme on les surnomme là-bas ! « Le Brésil Rive Gauche » du 10 avril au 22 juin 2013 Le Bon Marché Rive gauche, 24, rue de Sèvres, 75007 Paris www.lebonmarche.com

Le Vogue britannique lance Miss Vogue Inspiré du magazine américain Teen Vogue, le groupe Condé Nast lance Miss Vogue pour ses éditions UK. Destinée aux 15-24 ans il met en scène Cara Delevingne, nouvelle égérie de la teen coolitude made in London, en couverture de son premier numéro du mois de juin. La ligne éditoriale du nouveau magazine est simple. Il s'agit de garder la qualité rédactionnelle de Vogue en ciblant les teenagers. Un esprit plus jeune avec un ton plus "frais" selon la directrice de publication Alexandra Shulman : « Le magazine Vogue s'adresse à tous les âges mais je voulais produire une édition qui cible les jeunes lecteurs, élaboré en accord avec leur mode de vie". Les pages de publicité s’adaptent elles aussi. Pas de campagnes de créateurs ultra luxe mais des marques pour jeunes femmes comme Bershka, Forever 21, River Island ou encore Topshop. Le mensuel sera disponible en kiosque ainsi que sur Ipad. 15


THE BLIND NEWS La A. Galerie de Paris accueille le meilleur de Patrick Demarchelier

Exposition « Desire » Patrick Demarchelier A. Galerie, 12 rue Léonce Reynaud, 75116 Paris Jusqu’au 22 juillet 2013 Du lundi au vendredi, de 11h00 à 13h00 et de 15h00 à 19h00. Le samedi, de 12h00 à 19h00.

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© Patrick Demarchelier / A. Galerie

© Patrick Demarchelier / A. Galerie

Exposant notamment les œuvres de Martin Schoeller, Albert Watson ou encore Rankin, la A.Galerie a décidé de collaborer avec le photographe Patrick Demarchelier le temps d'une exposition estivale. Une rétrospective qui met en avant ses plus belles photos réalisées au cours de ces trente dernières années. Intitulée "Desire" l'exposition dévoile une vingtaine de sublimes tirages en noir et blanc (la signature de l'artiste) et quelques-uns des plus beaux clichés des mannequins stars de Kate Moss à Gisele Bündchen en passant par Christy Turlington dans des mises en scène épurées réalisés à l’occasion d’éditos pour des magazines tels que Vogue US ou France, mais également pour des campagnes de fragrances de grandes maisons de luxe : Allure de Chanel, J’adore de Dior ou Acqua di Gio. Une sélection délicate et intimiste, véritable ode à la beauté féminine.


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BIJOUX

Bijoux de famille Par Audrey Jehanno

Il y a toujours une histoire cachée derrière un bijou. Chargé de symboles, il matérialise et immortalise ces souvenirs que nous espérons transmettre à notre descendance. Il en va de même pour ses créateurs. La plupart des ateliers de bijoux et de Maison de Joaillerie tiennent leur savoir faire et leur passion d’un héritage familial, qu’ils perpétuent de génération en génération.

Pasquale Bruni Pasquale Bruni est un créateur de Joaillerie qui a appris très jeune toutes les ficelles du métier en plein cœur de la production italienne, à Valence. Il crée la maison Pasquale Bruni en 1976, avec une petite équipe d’artisans et a su se développer en étant toujours à l’écoute de la Femme, de ses envies. Il se fait rapidement connaître en développant des lignes fortes en symboles, en couleurs, mettant toujours en avant la nature et

l’autre avec de l’onyx, du kongolong et des diamants blancs. Les formes sont les

mêmes, mais les pierres choisies représentent deux caractères très différents. La première, douce et romantique, est inspirée de la nature, des feuilles, du

vent ; la seconde contrastée de blanc et noir inspire la force et la féminité.

Alexander Fuchs l’amour. C’est maintenant sa fille Eugenia Bruni qui est la directrice artistique de la maison. Elle réussit avec beaucoup d’élégance à perpétuer la philosophie du joailler et son savoir faire. La collection Ghirlanda existe en deux versions, l’une avec des diamants et aigues marines, et 18

Alexander Fuchs est une maison de joaillerie qui travaille les pierres les plus précieuses, les diamants. C’est aussi une histoire de passion, de famille. Alexander Fuchs est devenu diamantaire en 1930, et depuis, la tradition est restée dans la famille. En 2010 Daniel Fuchs, son petit fils, crée la marque Alexander


Fuchs, en hommage à son grand-père. Il bouleverse véritablement les codes de la joaillerie en supprimant la monture. Ses bijoux magnifient le diamant. Pour les puristes de la pierre, il n’y a aucun doute, le diamant ne peut pas être mieux mis en valeur qu’à même la peau. D’ailleurs, le créateur le dit lui-même : « Si j’avais pu, j’aurais incrusté le diamant directement sur la peau ». Dans les collections Formes et Jonquille chaque bijou est un diamant, monté sur un fil fluorocarbone transparent avec un fermoir en or blanc ou jaune. Le bijou se résume alors au diamant, pour notre plus grand plaisir.

lisent des matières naturelles telles que la soie, la laine de lama, des pierres semi-précieuses, du bois, du cuir, des métaux… Les colliers Cocoon sont inspirés des cocons de chenille. Lorsque le tissage est terminé, le collier est plongé dans l’or. A l’origine des bijoux de Gabriela Horvat, on retrouve souvent un objet insolite : un morceau de bois flotté trouvé sur une plage donne naissance à un assemblement de perles, de pierres précieuses, de cuir… Chacune de leurs créations est une histoire unique.

Gucci Joaillerie Gucci, maison italienne connue avant tout pour ses sacs, possède également un grand savoir faire en Joaillerie. Les bijoux sont fabriqués à la main à partir de matériaux choisis avec soin. La mai-

Gabriela Horvat Gabriela Horvat, c’est une marque de bijoux pour le travail de deux femmes : l’artiste Paula Di Pierro, et sa fille Gabriela, conceptrice de la marque. Gabriela étant plasticienne il était inévitable qu’une collaboration avec sa mère aboutisse à une marque de bijoux unique. Elles ont commencé par ouvrir un atelier boutique en plein cœur de Buenos Aires et leurs créations sont maintenant vendues et exposées à Paris, Londres, New York, Tokyo et au Brésil. Mélangeant techniques artisanales (elles utilisent des techniques très anciennes de tissages) et inspirations modernes, leurs créations sont de véritables œuvres d’art. Elles s’inspirent de la nature et uti-

son Gucci est chargée d’histoire : créée en 1920 par Guccio Gucci, elle est reprise par ses quatre fils en 1953. Portée par les grands d’Hollywood dans les années 60, c’est aujourd’hui une maison incontournable. Gucci s’appuie sur ses années d’Histoire pour se différencier des autres joaillers. La collection Bamboo, en or rose, jaune ou blanc, prend la forme du bois de bambou, ce matériau utilisé pendant la deuxième Guerre Mondiale pour contrer la pénurie de matières premières. Utilisé à nouveau par la marque en 1970 pour la bagagerie, on retrouve aujourd’hui la

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forme du bambou dans cette collection phare de Gucci Joaillerie. La collection Diamantaire tient son nom de la toile diamante, et non pas des diamants comme on pourrait le penser. La toile diamante, qui a pour motif des croisillons, était utilisée en bagagerie pendant l’entre deux guerres pour faire face à la pénurie du cuir. Ce motif a également été repris sur les bijoux de la maison avec beaucoup de raffinement.

Cartier En 1847, Louis François Cartier reprend l’atelier de bijoux de son maître et crée ainsi la maison Cartier. Il deviendra très vite le fournisseur officiel de plusieurs royautés dans le monde entier. Parti d’un simple atelier, il a crée un empire grâce à une clientèle royale et aristocratique. C’est encore une histoire de famille : de père en fils, les hommes de la famille travaillent au sein de la maison. Rapidement, Cartier se fait connaître pour son originalité et sa créativité. En 1903, le joailler présente les premiers bijoux Art-Déco, aux formes

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géométriques et abstraites. En 1933, Cartier dépose le brevet pour la monture invisible qui met en valeur les pierres précieuses. Très vite, apparaissent des bijoux phares qui deviendront les déclencheurs des collections classiques de la maison. En 1914, apparaît le premier décor panthère, ornant la lunette d’une montre-bracelet ronde pour femme, en onyx et pavage de brillants. En 1924, c’est l’apparition de la première bague à trois anneaux d’or différents, Trinity. Depuis, la Maison Cartier n’a de cesse de nous étonner en se renouvelant constamment avec un savoir-faire incomparable.


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beauté

Photographe : FRANCOIS B Maquillage : CAMILLE LUTZ


BERTHIER






NEW FACES Chaque mois, retrouvez les plus belles new face shootées par nos photographes

Charlène@Vip France 175cm 90B / 62 / 93 Maquillage : Camille Lutz


Christina J@Mademoiselle BrĂŠsil 179 83-60-88 Maquillage : Aline Macouin


NEW FACES Kassia@Free agent BrĂŠsil 178cm 80 / 60 / 90

Make up : Camille Lutz


Joanne@free agent Irelande 179cm 93 / 61 / 83


L’INSTANT LIVE Photo : Wallendorf

Trail of Dead



DÉCOUVERTE

ALEYSSA

Nouvelle

diva des dancefloors, Aleyssa enflamme déjà le milieu de la nuit avec les productions efficaces de « Live A Million Lives », son premier EP. Anciennement mannequin, c'est avec beaucoup d'aisance que la séduisante franco-brésilienne a pris la pause devant notre objectif. Et autant vous dire qu'il faisait très chaud dans le studio photo...

Interview : Dine Delcroix / Photos : François Berthier

Il paraît que tu as vécu plusieurs vies ? Oui. Je voyage énormément. J'ai parcouru les quatre coins du globe. J'ai vécu en Afrique, au Brésil, dans les Caraïbes... J'ai ainsi eu plusieurs vies dans ces pays et j'ai également connu plusieurs vies professionnelles puisque j'ai été dentiste avant d'être mannequin et même danseuse dans une troupe de samba (rires). Tu as donc beaucoup vécu au soleil mais pourrais-tu vivre dans un pays froid ? Non. Le soleil et moi ne formons qu'un. Je ne suis pas compatible avec le froid et j'ai besoin de chaleur pour vivre. Comment passe-t-on du milieu dentaire au monde du mannequinat ? J'ai fait des études pour être dentiste et j'ai exercé pendant quelques années au Brésil mais mon âme artistique voulait émerger alors j'ai fait en sorte qu'elle s'exprime. Et comment la musique est entrée dans ta vie ?

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C’est arrivée un peu comme par magie. Je n'avais pas du tout de projet. Je suis partie l'année dernière au Brésil pour le carnaval et, pendant le vol, je ne parvenais pas à dormir. J'ai eu envie d'écouter de la musique et une mélodie m'est alors venue en tête, celle de "Live A Million Lives". J'ai ainsi découvert que j'avais le don de composer. Je suis revenue du Brésil avec beaucoup de rythmes dans la tête et, depuis un an, je compose sans m'arrêter. Pourquoi avoir choisi de t'illustrer dans la dance ? La dance correspond à mon côté énergique. C'est une musique qui me fait vibrer mais cela ne veut pas dire que je ne changerai jamais de rythme. J'intègre toute ma culture musicale dans mes compositions. Ton premier EP s’intitule «Live A Million Lives». Est-ce une référence spirituelle ? Oui, il y a une part de moi qui est très spirituelle. Je crois que nous pouvons vivre plusieurs vies, pas seulement sur la terre mais aussi après.



Tu chantes en anglais et en portugais. Était-ce important, pour toi, d'écrire dans ces deux langues ? Oui, car cela correspond à mon parcours de vie et aussi parce que je cible un public international. Ton parcours a été marqué par ta rencontre avec David et Cathy Guetta. En quoi ont-ils compté pour toi ? C'est un couple que j'admire beaucoup. J'ai rencontré les Guetta en soirée et j'ai pu les revoir plusieurs fois à Ibiza lors des célèbres soirées "Fuck Me I'm Famous". J'ai même eu l'occasion de rejoindre David aux platines. J'ai été touchée par cette rencontre et c'est aussi pour cela que j'ai intégré de la dance dans mon travail. Pour finir, quels sont tes DJs préférés ? J'aime beaucoup Tiësto et la Swedish House Mafia. Et si tu devais justement vivre une autre vie, laquelle serait-ce ? Ce ne serait pas une vie terrestre. J'aimerais avoir l'expérience d'une vie "ailleurs". Tu prépares actuellement une tournée en Chine. Pourquoi ce pays ? J'ai été contactée par la Chine car c'est un des premiers pays à avoir été réceptif à ma musique. C'est un lieu émergeant au niveau musical, notamment en ce qui concerne la musique dance. Que réponds-tu aux personnes qui affirment que les chanteuses de dance ne sont pas vraiment des artistes ? Le fait de composer de la musique est un art. La création de sons et de mélodies n'est possible que si l'on est artiste. 36


LA FILLE QUI VALAIT UN MILLION DE VIES

Maquillage : Sess@mademoiselle Mu 37


DÉCOUVERTE

Jeremie Duvall Acteur,

scénariste mais aussi réalisateur, Jeremie Duvall fait parti des espoirs du cinéma français. Les plus attentifs ont déjà pu le voir dans « mon père est femme de ménage » aux côtés de François Cluzet tandis que les moins casaniers peuvent actuellement l’applaudir sur la scène parisienne du Théâtre Comédia dans la comédie musicale « The full monty ». En attendant de dévoiler « Obsession », son troisième court-métrage qu’il a co-écrit et co-réalisé avec Oscar Dorby, le jeune homme s’est confié à notre rédaction

Inteview: Dine Delcroix / Photos: François Berthier

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Qu’est-ce qui t’a orienté vers les métiers du septième art ?

je me suis donc orienté vers le cinéma.

C’est venu tôt. J’ai commencé à prendre des cours de théâtre dès l’âge de 8 ans et j’ai très vite emprunté les appareils photos numériques de mes parents pour faire des vidéos dans lesquelles je mettais en scène mes copains. Je faisais même mes propres montages... Puis, mon professeur de théâtre m’a conseillé de passer des castings à l’âge de 13 ans. Avec l’aide de mes parents, j’ai fait mon premier casting à 14 ans et j’ai décroché mon premier rôle à 15 ans. J’ai toujours regardé beaucoup de films. J’avais besoin de canaliser mon énergie qui était assez débordante et

Quel genre de films a bercé ton enfance ? J’ai été bercé par le cinéma de mon père qui regardait les films de Louis de Funès, Bourvil et Jean Gabin. Ces références font-elles de toi un bon comique ? Je ne sais pas si je suis un très bon comique dans la vie de tous les jours. En tout cas, c’est un cinéma que j’aime beaucoup. Mes courts-métrages, eux, sont de moins en moins comiques. Lorsque tu étais plus jeune, te sentais-tu incompris à cause de tes passions artistiques ?

Incompris, non, parce que j’enrolais mes amis avec moi. Par contre, mes parents m’ont toujours dit qu’il fallait que j’assure mes arrières en faisant des études. Quel est ton réalisateur préféré ? Stanley Kubrick. Pourquoi ? J’adore l’incroyable diversité de sa filmographie. Il a tout fait dans sa carrière, du film historique au film de guerre en passant par l’érotisme, l’horreur et la science fiction. Tous ses films sont des références. Des cinéastes reconnus comme Steven Spielberg ou George Lucas ne seraient pas ce qu’ils sont aujourd’hui sans lui.


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Te considères-tu plutôt cinéphile ou cinéaste ? Je suis cinéphile parce que j’ai envie de devenir cinéaste. On est un apprenti toute sa vie donc je suis un apprenti cinéaste (rires). Quand tu étais enfant, quel est le film que tu revoyais le plus souvent ? « La Soupe Aux Choux » de Jean Girault (1981). Et lorsque tu étais adolescent ? Quand j’étais adolescent, j’ai tout de suite adoré le cinéma d’Olivier Nakache et Éric Toledano avant qu’ils ne fassent «Intouchables» et j’ai dû regarder «Nos Jours Heureux» au moins une quinzaine de fois. Ce film n’est pas forcément une référence parmi les classiques mais il transporte la joie de vivre et c’est une très bonne comédie sur les colonies de vacances. Tu es actuellement à l’affiche de la comédie musicale «The Full Monty». Comment t’estu retrouvé à travailler sur ce projet ? J’ai eu la chance de croiser le producteur du spectacle qui m’avait déjà repéré dans des films. J’ai ensuite fait des essais avec les autres comédiens et le courant est passé. C’est un beau projet.

Cette expérience te donne-telle envie de faire davantage de théâtre ? Oui et c’est marrant parce que j’ai d’abord fait 8 ans de théâtre avec des petites représentations à chaque fin d’année dans des salles plus ou moins grandes avant de passer au cinéma et à la télévision et je reviens aujourd’hui au théâtre qui est ma première expérience professionnelle. J’ai un trac fou tous les soirs quand je monte sur scène mais c’est incroyable de retrouver ce rapport direct avec le public. Le cinéma, c’est super pour le rapport avec les partenaires et l’équipe mais le contact avec le public ne s’y établit que lors des avant-premières. La qualité du spectacle varie-t-elle chaque soir en fonction du public présent ? Oui. Un show peut être très bon mais si les comédiens sont portés par le public, il peut devenir exceptionnel. On est finalement dépendant des spectateurs. Les premiers mots balancés par le premier comédien vont définir la suite du spectacle. Les spectacles appartiennent au public et, d’une certaine manière, on lui appartient sur scène. Dans ce spectacle, tu es l’un des seuls membres de la

troupe qui ne chante pas et ne danse pas. Pourquoi ? Mieux vaut ne pas chanter tant que je n’ai pas encore pris de cours de chant (rires). Le rôle ne nécessite pas de danser mais cela ne m’aurait pas dérangé de le faire. J’ai eu l’occasion de danser dans un téléfilm pour France 2 qui n’est pas encore sorti et qui s’appelle «Parle tout bas si c’est d’amour». J’adore danser ! En général, comment prépares-tu tes rôles ? Quand j’ai commencé, je recevais le scénario et j’apprenais mon texte de mon côté mais, au fur et à mesure des expériences, j’ai eu la chance d’avoir de très beaux partenaires qui m’ont appris. Je me suis beaucoup nourri de ce que je voyais et de ce que j’entendais. Aujourd’hui, ma méthode, c’est de décrypter tout le scénario, scène par scène et réplique par réplique. J’ai commencé à le faire avec François Cluzet pour «Mon père est femme de ménage». François m’a appris à recopier chaque réplique plusieurs fois pour bien apprendre le texte. C’est très scolaire mais cela permet de maîtriser totalement une scène. Le fait de s’accrocher à son texte et de penser à sa phrase pendant


le jeu peut être dommageable dans une scène. Il est aussi nécessaire de parler du personnage avec le metteur en scène. Pour moi, il y a une évolution du personnage tout au long du scénario avec une intention de jeu différente à chaque scène. Quelle est la chose la plus difficile dans le métier de comédien ? De se voir (rires). C’est insupportable ! Et dans celle de réalisateur ? Je crois que c’est le fait d’abandonner son projet aux autres, à l’imprévu. C’est dur de se nourrir des autres et de s’ouvrir à ce que peut nous proposer un comédien, par exemple. Comment vis-tu le fait que certaines personnes puissent te reconnaître dans la rue, aujourd’hui ? C’est une chose qui me fait plaisir mais qui me gène aussi beaucoup. La reconnaissance, je pense que tout acteur la recherche. C’est agréable d’être reconnu pour son métier. Si des gens se souviennent de nous, cela signifie qu’ils gardent un bon souvenir du film ou de la pièce de théâtre.

Le mois de mai est celui du Festival de Cannes. Que t’évoque cet événement ? C’est un événement qui fait découvrir des films de tous les horizons. Cannes, c’est aussi la Croisette et des marches mythiques. Tu viens de réaliser un court-métrage intitulé «Obsession». As-tu essayé de l’emmener à Cannes ? J’ai tenté mais il n’a pas été retenu. Il y a seulement un ou deux courts-métrages français en sélection officielle. De quoi parle ce film ?

Pourquoi ce thème dramatique ? Parce que la mucoviscidose est une maladie qui me touche. J’étais allé voir «Drive» au cinéma avec Oscar Dorby et, après la projection, nous avons eu envie d’écrire à propos d’un homme qui ne parvient pas à se défaire de quelque chose. Selon toi, quels sont les points positifs du Festival de Cannes ? Le Festival de Cannes permet de voir des films qu’on ne voit pas ailleurs, de partager avec des cinéphiles et de rencontrer des professionnels.

C’est mon troisième court-métrage. Je l’ai Et ses points négatifs ? co-écrit et co-réalisé avec Oscar Dorby. J’ai Certaines personnes vont eu le chance d’être très à Cannes pour faire la fête bien entouré. On y re- et je trouve que cela ne trouve Xavier Maly qu’on sert à rien d’y aller si on a pu voir à Cannes dans n’a pas de film à défendre. «Des hommes et des dieux» de Xavier Beau- Toi qui est à la fois acteur, vois ainsi que Jacky Ne- scénariste et réalisateur, cerssian qui a joué dans pour quelle fonction préférerais-tu être récompensé ? «Adèle Blanc-Sec» de Luc Besson. L’histoire ra- J’aimerais être récomconte la perte d’un enfant pensé en tant que réalisapour un père qui en fait teur. À Cannes, la Palme une obsession parce qu’il d’or est le meilleur prix. se sent coupable alors que son enfant souffre Pour toi, quel film méritait de la mucoviscidose. davantage la Palme d’or que «Amour» de Michael Haneke, l’année dernière ?


« De rouille et d’os » de Jacques Audiard.

Christopher Reeve et «Les Gremlins» de Joe Dante.

Peux-tu me citer des films qui ont mal vieilli à tes yeux ?

Pour finir, peux-tu me citer une réplique que tu aimes bien et qui est issue d’un film récent ?

Les « Superman » avec

«Il ne faut jamais s’arrêter de rêver car si on arrête de rêver, on meurt. Et moi, je veux pas arrêter de rêver !». C’est dans «La Cité Rose» de Julien Abraham, sorti cette année.


dossier

GATSBY LE M Dossier réalisé par Justin Kwedi / Photos : Dr

Baz Luhrmann ou le romantisme post-moderne

Le fantasque réalisateur australien présente sa dernière folie en ouverture du festival de Cannes. Le nom de Baz Luhrmann est prompt à faire lever au ciel les yeux des chantres du bon goût tout comme illuminer ce même regard chez la midinette romantique qui sommeille en chaque spectateur. Baz Luhrmann aura ainsi toujours su manier imagerie moderne novatrice et tapageuse qu’il allie à une tradition romanesque classique. Plus qu’un simple mélange des genres hasardeux, cette optique obéit à une approche post-moderne du romanesque pour Luhrmann qui amène une distance consciente des codes du genre tout en les transcendant avec une vraie candeur et sincérité. Sa formation artistique inspirée de ses parents adeptes de la danse professionnelle et ses études à Institute of Dramatic Art de Sydney l’amène tout naturellement lors 44


MAGNIFIQUE

de son passage au cinéma à exprimer sa sensibilité par un mélange des arts. Ce sera à travers sa « trilogie du rideau rouge » où romantisme s’entremêlent constamment avec romance et ode au monde du spectacle, les deux se nourrissant pour atteindre un firmament esthétique et émotionnel. La première approche se fera avec « Ballroom Dancing » (1992) où un pitch sirupeux à la Dirty Dancing est élevé à des hauteurs insoupçonnées par Luhrmann. Il nous plonge dans les concours de danse amateurs australien où son jeune héros surdoué est bridé par les juges peu friands de ses chorégraphies novatrices. Plutôt que de se plier à leurs exigences et se renier, il s’associera liera à une jeune danseuse inexpérimentée qui lui apprendra à communier à deux plutôt que de faire son numéro en soliste égocentrique. Loin du brouillon, ce premier essai était un petit joyau où Luhrmann mêle romance et réflexion sur


l’intégrité artistique qui annonce en tout point « Moulin Rouge » (2001) notamment le final quasi identique où les danseurs amoureux défient l’autorité pour un numéro splendide où il ne font plus qu’un. Le recyclage de tubes pop s’amorce déjà là aussi avec ces versions revues et corrigées de «Time After Time » de Cindy Lauper. Dans « Roméo + Juliette» (1996), c’est le film en lui-même qui constitue un spectacle bariolé et pop donnant une énergie juvénile contagieuse à la pièce de Shakespeare totalement respectée dans le texte. Luhrmann y révèle Leonardo Di Caprio qui forme un couple merveilleux avec Claire Danes et dévoile le sens de la tragédie dont il est capable avec la mort de Mercutio et bien sûr le flamboyant final sacrificiel. L’apothéose sera atteinte avec « Moulin Rouge » (2001) qui exprimera avec une plénitude totale ces velléités post modernes. Cette comédie musicale n’est ni une adapta-


tion d’un standard de Broadway, ni une création complètement originale (hormis le superbe morceau Come what may) les chansons brassant un éventail très large allant des standards oubliés (et référentiels comme « Complainte de la Butte » écrit par Jean Renoir pour son French Cancan et ici repris par Rufus Rainwright) à l’hommage à d’autres comédies musicales comme « La Mélodie du Bonheur » et surtout une réinvention complète de 40 ans de musique pop à travers les réorchestrations de tubes connus de tous. Le scénario mêle lui le mythe d’Orphée (avec Christian s’enfonçant et se perdant dans «les bas-fonds» du monde du spectacle/enfer par amour pour Satine/ Eurydice), l’opéra « La Traviata » (et plus précisément le livre de Dumas fils «La Dame au Camélia » qu’il adaptait et où on retrouve une histoire entre un poète pauvre et une courtisane atteinte de phtisie) et pour revenir au cinéma Les Chaussons Rouges de Powell / Pressburger dont il reprend la trame en se l’appropriant. « Moulin Rouge »



est ainsi un film total transcendant les genres, les supports et les époques pour un résultat évitant l’indigeste pour magnifier autant la romance tragique entre Nicole Kidman et Ewan McGregor que célébrer cet idéal de vie bohème du monde du spectacle. Après ce sommet, Luhrmann décide d’imprimer cette approche dans des intrigues au classicisme plus affirmé et éloigné de la facette spectacle de la trilogie du rideau rouge. Il tente ainsi de ressusciter les épopées à la David Lean ou encore « Autant en emporte le vent » avec « Australia » (2008). Le dépaysement des grands espaces australiens rencontre ainsi la mise en scène folle et anticonformiste de Luhrmann. Le réalisateur raconte le passé douloureux de son pays (et ses jeunes aborigènes arrachés de leurs tribus) et ses traditions (c’est une des plus belles descriptions du Walkabout, rite initiatique des aborigènes) tout en poursuivant ses expérimentations visuelles (l’ouverture est typique de son style) et narrant une belle histoire d’amour entre le rustre Hugh Jackman et une pétillante Nicole Kidman. « Gatsby le Magnifique » poursuit cette volonté de Luhrmann d’abandonner les récits patchworks à la « Moulin Rouge» pour administrer sa vision à des récits classiques établis. Le roman de F. Scott Fitzgerald va lui offrir un écrin idéal pour cela puisque sa folie visuelle va illuminer la frénésie des années folles et un usage certainement déroutant de la 3D. Et bien évidemment la liaison tragique entre Gatsby et Daisy interprétée par Leonardo Di Caprio et Carey Mulligan devrait atteindre des sommets de tragique. Glamour et mélodrame, un film parfait pour ouvrir le prochain Festival de Cannes.


Les albums cultes de David Bowie Par Thomas Mafrouche

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LEONARDO DI CAPRIO

Romantique et torturé Du débutant à l’icône Leonardo Di Caprio retrouve dix-sept ans après Baz Luhrmann, le réalisateur qui fit de lui une star avec la pétaradante relecture de Shakespeare « Roméo + Juliette » (1996). Si son talent précoce avait déjà éclaté dans de plus modestes productions indépendantes (Blessures Secrètes en ado malmené par son beau-père et Gilbert Grape en attardé où Johnny Depp et Robert De Niro saluèrent le potentiel du gamin) c’est bien le succès de l’objet bariolé de Luhrmann qui en fit une icône. Les traits angéliques et la rage de Leo en faisait un Roméo parfait dans cette version entre respect du texte et imagerie MTV, formant un couple idéal avec une Claire Danes douce et innocente Juliette. Le succès rajeunit l’imagerie de la pièce (dont la dernière adaptation marquante était signé Zeffirelli dans les 60‘s avec des quarantenaires pour incarner le couple mythique) et fait de Di Caprio l’idole des adolescentes du monde entier. Ce n’est pourtant rien à côté de la Leo mania qui s’enclenche avec le triomphe de la romance aquatique de James Cameron, Titanic. Cameron y réutilise le mélange d’espièglerie et de grâce exploité par Luhrmann avec ce personnage d’artiste vagabond libre de toute attache qui va enflammer le cœur de l’aristocrate jouée par Kate Winslet. Objectivement la pure émotion du film était véhiculée par cette dernière, Di Caprio incarnant à nouveau un ange protecteur venu éveiller sa conscience et les sentiments d’une jeune fille. L’acteur devient ainsi une icône, au risque de se perdre dans des films oubliables mais qui remportent un grand succès en pleine folie post Titanic avec la médiocre adaptation de Dumas L’Homme au masque de Fer où il tient un double rôle, le mélo Simples Secrets (tourné avant mais sorti après le Cameron en France) et la caution destroy un peu superficielle du Celebrity de Woody Allen. Di Caprio semble basculer bien malgré lui dans cette prison de bellâtre de poster et va devoir se réinventer pour rappeler à tous qu’il est un grand acteur.

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De l’icône au héros torturé Roméo + Juliette et Titanic avaient fini par occulter les choix audacieux et les rôles borderline précédemment choisis par le jeune acteur. Dans Rimbaud Verlaine (1995), il est un formidable Rimbaud juvénile, surdoué, gay et manipulateur. C’est encore dans un autre biopic (celui de l’écrivain et poète Jim Caroll) qu’il montre une facette plus sombre avec Basketball Diaries (1995) en ado toxicomane. Pas des films marquants mais des prestations marquantes qui annoncent un futur bien plus trouble pour celui que l’on aura un peu trop vite rangé dans la case « minet ». Hormis Attrape- moi si tu peux (2002) où Spielberg donne à son héros mythomane une allure séduisante, Di Caprio n’aura de cesse désormais à salir et écorner cette beauté et grâce qui l’ont fait star. Ces tentatives s’affineront au fil de la confiance accumulée de Leo qui s’endurcit et grandit sous nos yeux. L’écornage des idéaux hippies de Danny Boyle La Plage est assez maladroit mais Di Caprio y perd magnifiquement les pédales le temps d’une scène le transformant en personnage de jeux vidéo. La mue s’effectuera véritablement chez Scorsese dont il deviendra le nouvel acteur fétiche après un certain Robert De Niro. Gangs of New York (2002) où il joue une figure vengeresse en quête de modèle paternel est tout à fait représentatif de ce changement, Di Caprio étant un personnage dur à cuire mais encore trop mal dégrossi et fragile pour faire face à Daniel Day Lewis terrifiant Bill le Boucher dans ce New York XIXe où se bousculent natifs et émigrants. L’acteur va par la suite brillamment exprimer son anxiété et ses fêlures dans des figures emblématiques (Howard Hughes rongé de TOC dans Aviator, le paranoïaque patron du FBI dans J. Hoover) et assumer une masculinité et virilité de plus en plus affirmées. Les traits se sont durcis, le visage épaissit et dans son regard bleu se disputent désormais la menace et la folie. L’ancien adolescent frêle colle donc une rouste au colosse Djimon Hounsou dans l’excellent Blood Diamond où il est plus que crédible en mercenaire traquant des diamants. Il en va de même en flic sous tension dans Les Infiltrés (2006) et en espion dans Mensonges d’Etats (2008). Nombreux sont ceux ayant regretté qu’il renonce à être le gangster Dillinger en lieu et place d’un peu convaincant Johnny Depp dans Public Enemies (2008) de Michael Mann. Le symbole de ce virage et des temps ayant bien changés est bien sûr le couple de Titanic reformé avec son amie Kate Winslet dans des Noces Rebelles dont la réalité cruelle représente le pendant inversé de l’idéal romantique du film de Cameron.


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Enfin Glamour ? Leonardo Di Caprio est aujourd’hui confronté à la même impasse qu’à l’époque de la doublette Roméo + Juliette/Titanic. Cela apparu au grand dans deux de ces meilleurs films, Shutter Island (2010) de Scorsese et Inception de Christopher Nolan où à quelque mois d’écart il pourchassait l’image de sa femme défunte dans un asile ou dans le méandre des rêves. Di Caprio, arrivé au bout de la logique de ce personnage torturé et obsessionnel devait donc une nouvelle fois se réinventer. A ces débuts, son attrait physique fut autant un atout qu’un poids mettant à mal sa crédibilité et qu’il dû mettre à mal. Aujourd’hui sûr de sa force et de son talent, Léo peut de nouveau ouvertement jouer de son charme, en le teintant de l’aura trouble de ses rôles des années 2000. On en a eu un premier aperçu avec le mémorable méchant qu’il campe chez Tarantino dans Django Unchained. Di Caprio y est élégant, précieux et suave en esclavagiste sudiste, façade qui dissimule un dangereux psychotique où il laisse éclater sa folie. Ce changement va s’avérer passionnant avec ce Gatsby le Magnifique, le héros éponyme du roman de de F. Scott Fitzgerald s’armant de luxe et de strass pour attirer l’attention de son aimée. Di Caprio peut désormais avancer masqué pour exprimer le mal-être de ses personnages. Sa beauté n’est plus un poids mais un atout de plus à son magnétisme à l’écran. Et ce n’est pas un hasard s’il succède à une des stars les plus séduisantes et photogénique de l’histoire du cinéma en Gatsby (Robert Redford dans l’adaptation de Jack Clayton en 1974). Il est une star complète, enfin glamour.

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Tobey Maguire The Boy next door

Les années 2000 auront grandement redéfinis la figure du héros de cinéma. Les 80’s et les 90’s prolongent de façon hypertrophiée, caricaturales et fascinantes les grande figures cinématographiques d’héroïsme masculin d’antan (Charles Bronson, Clint Eastwood, John Wayne…) avec le règne des bodybuildés Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger. Véritables forces de la natures capables des exploits surhumains les plus improbables, ils triomphent de tous les obstacles et ne connaissent pas le doute. Le héros d’action est alors un être qu’on aime à admirer, auquel on rêve de ressembler. La tendance change dans les années 2000 avec le déclin des montagnes de muscles indestructibles et laisse place à des personnages plus vulnérables, on ne fantasme plus sur le héros mais on s’identifie à lui. On ne rêve plus d’être lui mais pour que l’on adhère à ses aventures on doit désormais avoir de l’empathie et c’est à lui de nous ressembler. La tendance à fait des émules avec un Jason Bourne rongé par le doute et son passé flou entre deux empoignades, James Bond plus faillible et perdant de sa belle assurancve ou encore le Batman introspectif et en plein doute de Christopher Nolan. Personne n’illustre mieux cette tendance que Tobey Maguire et ce n’est pas un hasard s’il accède au statut de star à ce moment charnière. Maguire trouve donc ce qui reste son rôle le plus emblématique dans les Spider-Man de Sam Raimi, où le super-héros adepte de la voltige dissimule un adolescent mal dans sa peau, un étudiant poissard connaissant les mêmes soucis quotidien que nous


et surtout un amoureux transi et timide de la belle Mary Jane Watson. Maguire, par sa touchante maladresse, ses airs ahuris et sa simplicité contribua grandement à l’équilibre entre spectaculaire et intimisme qui fit tout le sel de la trilogie de Sam Raimi. Il incarne avec autant de talent le visage d’une Amérique modeste transcendant son talent dans le beau « Pur-Sang, la légende de Seabiscuit » (2003 de Gary Ross en un jockey traversant les obstacles de l’hippodrome et de la vie. C’est d’ailleurs ce même Gary Ross qui le révéla à cet emploi de quidam emprunté dans le culte Pleasantville (1998) où Maguire était déjà un adolescent introverti transporté dans un soap opera conformiste des années 50. L’acteur se trouvait là enfin après de longues années de galères où il vit son ami et compère de casting Leonardo Di Caprio devenir star alors qu’il végétait encore. Il mena alors une existence de fêtard invétéré et sombra dans l’alcoolisme pour oublier ces échecs professionnels qui ne s’arrangèrent guère. Maguire conscient de gâcher son avenir décide donc de faire le ménage dans sa vie, devient végétarien et s’inscrit aux Alcoolique Anonyme.

Retour sur un acteur “normal”.

Par ses actions fortes, il retrouve une forme de pureté et d’innocence qui en font un potentiel James Stewart moderne et le gendre idéal de l’Amérique. Il n’a pas encore tout à fait confirmé tous les espoirs placés en lui, notamment à cause du coup d’arrêt de l’annulation de Spider-Man 4 le studio préférant relancer la franchise que de produire une suite onéreuse. Pourtant son dernier rôle marquant en date, Brother (2009) le voyait exploiter avec brio une facette plus sombre avec sa formidable composition de vétéran d’Afghanistan, reflet cette fois plus trouble et coupable de l’Amérique (pendant de sa composition de jeune soldat engagé dans la Guerre de Sécession sur Le Chevauchée avec le diable d’Ang Lee en 2001). Gatsby le Magnifique constitue son grand retour au cinéma et ses retrouvailles avec Di Caprio (avec qui il n’a finalement partagé l’affiche que sur le précoce Blessures Secrètes en 1993) où il sera Nick Carraway, observateur lointain des amours tumultueuses de Gatsby et Daisy. Quiconque a lu le roman de F. Scott Fitzgerald sait que le rôle est taillé pour lui et qu’il y sera forcément excellent comme souvent.




Carey Mulligan

De la fragilité à la séduction Carey Mulligan fêtera en ce mois de mai si palpitant pour elle ses 27 ans. Déjà 27 ans ou seulement 27 ans ? On ne sait laquelle de ces questions se poser à l’évocation de son âge tant l’actrice aura su brouiller les pistes entre fragilité toute juvénile et douleurs contenues plus rattachées à l’âge adulte tout au long de sa filmographie. C’est d’ailleurs dans un rôle jouant de cet entre-deux qui lance définitivement sa carrière avec le formidable « Une éducation » (2009) où elle joue une adolescente entretenant une liaison avec un adulte. L’actrice hésite constamment entre fébrilité enfantine et le masque contractée de celle qui en a déjà trop vu, qui a déjà trop vécue. Les réalisateurs ont bien compris comment user de cette ambiguïté qui peut la rendre aussi attachante que dangereuse à l’écran. En frêle mère de famille en danger, cette vulnérabilité séductrice parvient à dérider le monolithique Ryan Gosling qui va tout risquer pour la sauver des griffes de malfrats dans « Drive » (2011). Au contraire dans Shame, c’est l’élément déclencheur de la névrose de Michael Fassbender qui se réfugie dans une overdose de sexe sans plaisir pour oublier le désir coupable qu’il a pour sa sœur. Là encore l’attitude provocante (cette première apparition en full frontal…) se marie à une souffrance palpable, le personnage ne cherchant dans ses excès rien d’autre que l’amour de son frère. Carey Mulligan, c’est tout à la fois la girl next door, la demoiselle en détresse ou la petite sœur que l’on a envie de protéger. Dans tous les cas, elle se doit d’exprimer ou de propager une souffrance, ses traits se prêtant toujours idéalement à la crispation, à une mélancolie laissant l’impression qu’elle est toujours au bord des larmes. Son plus beau rôle à ce jour est donc forcément le plus résigné dans le chef d’œuvre mésestimé de Mark Romanek « Never Let Me Go » (2010). Mulligan y est un clone dont l’existence est en sursis, créée pour servir au don d’organe. Le film dégage un spleen qui offre un écrin idéal pour laisser s’exprimer l’océan de tristesse que semble abriter le cœur de Carey Mulligan. Dans Gatsby le magnifique, l’actrice va surprendre. Jusqu’ici condamnée à observer de loin les amours des autres (« Never Let Me Go ») ou à vivre les siennes dans la douleur (« Une éducation »), elle gagne là ses galons d’héroïne romanesque. Objet de tous les rêves et désir de Gatsby (Leonardo Di Caprio), Carey Mulligan y gagne enfin le droit d’être belle, frivole et séductrice. L’intrigue révèlera bien sûr un être bien plus passionné qu’il n’y parait mais elle n’aura plus désormais besoin de sembler porter tout le poids de la misère du monde sur ses épaules et pourra avancer masquée. Un nouveau registre s’ouvre à elle, passionnant….


Jean-Charles de Castelbajac

LE PASSEUR Interview : Audrey Jehanno / Photos : François Berthier

Jean-Charles de Castelbajac, l’homme qui a habillé la planète avec Mickey, Bambi ou Snoopy est un homme épanoui, aux multiples projets. Il a accepté de se livrer avec beaucoup de passion et de gentillesse. Votre mère Jeanne Blanche de Castelbajac a fondé Ko and Co, est-ce elle qui vous a donné le goût de la mode ? Mon père était ingénieur textile, ma mère était modéliste. Il y a toujours eu en moi cette dualité entre la dimension militaire de ma famille et la dimension textile. Je voulais faire les beaux arts à Limoges, et c’est ma mère qui m’a poussé et m’a donné envie de faire ce métier. C’était assez propice, je sortais de pension, je sortais d’un milieu enfermé, et la mode me semblait un territoire d’expérience, absolument sans fin.

Vous aviez besoin de liberté ? Oui. J’ai revu une interview de l’INA que j’avais faite quand j’avais vingt ans, et j’avais déjà une sorte d’aplomb, de certitude sur ce que je voulais faire, et la manière dont je voulais le faire. Lorsque j’ai commencé la mode en 1968-69, c’était un territoire avec des créateurs qui faisaient des choses très féminines, en aucun cas il n’y avait de second degré, d’implication politique ou de lien avec l’art dans leur travail. Tout était à faire, il y avait une vraie possibilité. Moi j’ai vu la mode comme un espèce d’exutoire de toutes ces idées que j’avais accumulées en pension, qui venaient d’une espèce de résistance.

La pension vous a-t-elle laissé de mauvais souvenirs ? Je suis rentré en pension à l’âge de six ans, et c’était à l’époque un milieu très dur. Ma première vocation n’était pas d’être créateur de mode, mais militaire, je voulais être commando de marine. La pension c’était la source du manque, le manque d’affection, de filles… C’était une pension de garçons, c’est pour ça que j’ai essayé de me rattraper après. Ce véritable état de solitude a forgé mon imaginaire : j’ai développé en pension toute une espèce de production d’idées, à partir de petits riens. Je dis tou64


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jours qu’une boîte d’allumettes devenait un bateau au long cours. J’avais rendez-vous avec moi-même tous les soirs quand je m’endormais, je découvrais un nouveau monde sur mon oreiller, et ces nouveaux mondes, je les ai appliqués en devenant créateur de mode et en faisant de l’art aujourd’hui. Je pense que c’est de ma vie de pensionnaire que vient le fondement de toutes mes idées, tous mes codes. Que ce soient les couleurs primaires qui m’ont été inspirées par les vitraux de la chapelle où j’allais tous les matins à sept heures pour prier, la croix rouge que j’ai utilisée avec récurrence, les couvertures de pensionnaires ou encore les petites étiquettes qu’on met dans les vêtements d’enfants. Ce sont des codes qui sont restés inscrits en moi et qui sont devenus un peu des jalons de mon style. Je n’avais pas de jouet, de peluche ou de cartoon à lire. Je n’avais qu’une seule passion à l’époque, c’était l’histoire de France et de ses héros. D’ailleurs plutôt des perdants, que je préférais aux gagnants. Je trouvais plus flamboyants les beautiful losers.

Eprouvez-vous une nostalgie de l’enfance ? Je n’éprouve aucune nostalgie, plutôt une espèce d’élan. Je pense que c’est ma force. Aujourd’hui j’aurais plutôt une espèce de mélancolie proactive. Récemment j’ai fait une interview sur Keith Haring, et je me remémorais les moments qu’on a passés ensemble avec mes enfants, avec lui. Mais tout ça je le transforme, en allant vers demain. L’enfance est toujours décrite comme quelque chose de très joyeux, moi je le vois plutôt comme quelque chose d’un peu sombre. En fait, je n’ai pas eu d’enfance. Quand j’étais enfant, j’ai du devenir adolescent. Quand j’étais adolescent, j’ai dû devenir un homme. Et quand je vois ma légèreté aujourd’hui, ma manière d’être sur Instagram, Facebook ou d’utiliser mon iPhone, je pense qu’il y a définitivement toujours une part d’enfant en moi.

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Dans vos créations vous faîtes référence à Disney, quel est votre Disney préféré ? J’en ai deux : Mickey Mouse, que j’ai utilisé au moins 100 fois dans ma carrière, et même dans mon travail pictural en ce moment, et Bambi. Par exemple, je vais passer des extraits de films pendant un concert électro avec Mr. Nô à Montréal et à Clermont-Ferrand. Et j’ai sélectionné la mort de la mère de Bambi. Il y a quelque chose de spectral dans ces premiers dessins animés. C’est l’avant 3D, ce sont des héros de celluloïde. J’ai une vraie fascination pour ces personnages, je les utilise dans mon travail comme des blasons. Je crois que seuls les artistes trip hop, hip-hop ou rap l’ont compris. C’est comme ça que je suis devenu ami avec Jay-Z, Mark Ronson, Kanye West, LL Cool J., Dizzie Rascal. Ils ont portés mes pulls très très tôt. C’est surtout parce que ces personnages sont chargés de sens. J’ai commencé à faire des pulls cartoon en 1979, à une époque où il n’y avait même pas de copyright. Maintenant je vois que Bambi est de retour dans les collections de beaucoup de designers, je pense que c’est le retour du sens. C’est ce que je vois chez une jeune génération de créateurs comme Jacquemus et Jean-Paul Lespagnard.

Comment définissez-vous la femme Castelbajac ? La femme Castelbajac est une femme forte, elle est plurielle. Sur quarante ans de création, l’esthétisme des femmes qui ont aimé mon travail est très différent, ça va de Marguerite Duras à Farah Fawcett. Donc c’est très troublant. Mais ce sont toujours des femmes de caractère, qui ont une autre beauté, particulière. J’ai toujours aimé la flamboyance de la beauté accidentelle, du caractère, de la différence, de l’affirmation. L’endroit où j’ai le plus vu mes vêtements portés récemment, c’était aux biennales d’art contemporain : sur les galeristes, les artistes. Ce sont en général des êtres qui ne sont pas là pour répondre à des questions, mais plutôt pour poser des questions. Il y a une femme Castelbajac qui me plait particulièrement, c’elle qui est arrivée avec la génération JCDC. Il m’est arrivé de rencontrer trois générations de femmes Castelbajac ensemble. Quand j’avais 17 ans, j’avais des clientes comme Marguerite Duras ou Françoise Sagan, qui avaient déjà 40 ans. Elles se sont appropriées une petite partie de moi-même, comme leurs filles et leurs petites filles par la suite. Je ne serais absolument rien sans les femmes. Dans le sud Ouest, d’où je viens, il y a une devise qui dit : « Mon Dieu, mon Roi et ma Dame ». Les femmes jouent un rôle très important dans ma vie. Dans la première étape de ma vie, je voulais les protéger, alors que maintenant je préférerais les fragiliser un peu. La femme Castelbajac c’est une femme qui a du caractère, de l’esprit, et qui a une forme d’audace. C’est une femme qui utilise les armes de l’esprit, les armes de l’humour, les armes du décalage pour 68


être forte. Edmonde Charles-Roux par exemple, qui était très proche de François Mitterrand, arrivait toujours à l’Elysée avec une robe sur lequel il y avait un texte du Fantôme de Robert Malaval. Et cette robe avait le don de mettre en colère François Mitterrand, parce qu’il y avait écrit « Le fantôme est-il de droite ou de gauche ? ». Et Mitterrand lui disait : « le fantôme doit choisir ». Je crois que ma mode et les femmes qui la portent ont un rôle à jouer dans cette société. Il s’agit de poser les questions. On entre dans une dimension peut-être plus personnelle, de l’ordre du manifeste. Ce n’est pas simplement porter de jolis vêtements. Même si depuis trois ans, je prends la mode pour la mode, peut-être parce que ma vie d’artiste est épanouie. Alors qu’avant j’avais toujours le sentiment d’être à la frontière de l’art et de la mode. Maintenant j’ai une directrice de collection, qui vient de grandes maisons, et qui fait que mes vêtements deviennent de vrais vêtements. Et j’aime bien cette idée.

Vous avez créé des costumes pour le cinéma, ainsi que pour beaucoup de séries télévisées, entre autres pour « Drôles de Dames ». Que gardez-vous comme souvenir de votre rencontre avec Farrah Fawcett ? Farrah, je ne voulais pas la rencontrer. C’est son manager qui voulait absolument que je la rencontre, il m’a appelé des dizaines de fois. Je lui ai répondu que je ne savais pas qui était Farrah Fawcett. Il m’a dit « c’est vraiment la femme qui peut incarner l’idée d’une femme forte et conquérante ». Ca m’a convaincu et je suis arrivé au Georges V où elle logeait, il y avait une émeute de femmes. J’ai fendu la foule, j’avais un perfecto, les cheveux très longs, j’étais très mince, j’avais une Harley Davidson rouge pailletée. C’est son mari Lee Majors, « L‘Homme qui valait 3 milliards », qui m’ouvre la porte. J’étais plus grand que lui, plus baraqué, c’était très étrange. Il me demande : « What do you want ? » Je lui réponds : « Vous m’avez demandé de venir. Je suis fashion designer. » Et il répond : « Ce n’est pas possible tous les fashion designers sont des shrimps [des crevettes] ». Quand je rentre dans la pièce je vois une femme indienne magnifique, Shakira, la femme de Michael Caine. Je m’assois, j’attends, c’était une ambiance particulière. Une double porte s’ouvre, et je vois Farrah, elle était totalement éblouissante, rayonnante. On est devenu très


amis. L’idée que j’ai eu sur cette série, c’était de reprendre les codes de la garde robe sportswear américaine, que j’ai réduite au format XXS. Les mini-jupes sont devenues ultra mini, les sweatshirts exploitaient le pouvoir de la poitrine, c’est devenu le look Farrah Fawcett. C’était une magnifique rencontre, on est resté amis jusqu’au bout. C’était vraiment quelqu’un de formidable.

Vous avez créé des vêtements liturgiques pour le pape Jean-Paul II, auriez-vous envie de le faire à nouveau pour le pape François? Pour François oui, je serais ravi, le précédent non. J’y ai vraiment pensé, parce que c’est un bel homme, au sens de l’âme. C’est très drôle car j’ai fait ce rêve récemment, où il était dans la foule à laquelle il venait donner sa bénédiction. J’avais accès à sa tribune et je pouvais lui parler, je lui disais : « J’aimerai bien mettre mon talent au service de votre œuvre. »

Parmi les nombreuses collaborations que vous avez faites, laquelle vous a le plus inspiré ? La première : j’avais créé une ligne de jeans qui s’appelait Jésus. Le nom de Jésus n’était pas déposé à l’époque, donc je l’ai déposé, ce qui a fait un scandale. J’avais fait des jeans avec Oliviero Toscani. Mais ce sont des choses qu’on fait quand on est très jeune…De toutes les rencontres, il y a eu le K-Way, que j’ai adoré, parce que j’aimais bien l’idée de faire des vêtements extrêmement démocratiques à un prix accessible, il y a quelque chose de très touchant dans cette idée de proximité. Et puis Courrèges. Quand je suis arrivé à Paris, ma première idée c’était de travailler pour André Courrèges, ou avec lui. D’abord parce qu’il aimait les femmes, et ensuite parce qu’il avait un bel accent du Sud-Ouest et parce que j’aimais bien sa vision, c’était un visionnaire. Mais je suis allé le voir un peu tard en fait, car j’avais déjà eu une couverture de Women’s Wear, après mon premier défilé, qui disait que j’étais le nouveau Courrèges des années 70. Il m’a dit « si vous êtes les Courrèges des années 70 pourquoi vous travailleriez avec moi ? » Mais dans les années 90, il m’a appelé et m’a demandé de venir à ses côtés, et j’ai adoré. C’était deux saisons de collections magnifiques. Ce qui m’a plu dans ces collaborations, c’est de travailler avec d’autres hommes, d’autres talents, de rencontrer Malcom Mac Laren, Keith Haring… C’est de faire des choses à quatre mains. C’est ça qui est le plus émouvant dans la vie en fait, ce n’est pas de faire son petit chemin tout seul, c’est de partager les choses. 70


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Quand vous voyez vos créations copiées et réutilisées pendant des années, comme les graffitis sur les vêtements, est-ce que ça ne vous agace pas un peu ? Je suis très gâté avec les cartoons partout… Mais non, ça ne m’agace pas. En fait je n’ai jamais été un très bon communiquant. Dans ce 21ème siècle, la science du karaoké, c’est presque un art. Copier, trouver des images sur le net ou dans l’Histoire, c’est élevé au rang de l’art. Pour moi en fait ça a toujours été un moteur pour continuer à créer, pour créer d’autres choses. Je vais sortir un très beau livre avec Rizolli, Thames and Hudson et Le Chêne sur 40 ans de création. C’était assez émouvant pour moi, de me replonger dans mon histoire, dans toute cette aventure humaine.En revanche, un jour j’ai posté sur mon Instagram une image, mais je n’avais pas mis la date. Et puis j’ai reçu un commentaire disant que j’avais copié un jeune créateur américain, qui travaillait avec Adidas. Alors que c’était une création qui existait 20 ans avant. Ce qui m’embête c’est le manque de culture. C’est Malcom Mac Laren, qui disait : « Ce siècle, c’est un peu le combat entre l’authenticité et le karaoké ». Et comme j’aime les deux… Mais enfin, j’adore ce siècle, et tout va bien quant à l’idée d’être une source d’inspiration. Le but d’une vie c’est un peu d’être un passeur.

Vos collections sont souvent liées à la nature. Vous sentez-vous concerné par les questions environnementales ? Totalement. Je me souviens que dans les années 90 j’avais créé une parka avec K-Way pour le chef Raoni et pour l’Amazonie, avec les dessins de Charles Schulz, le dessinateur de Snoopy. Il avait inventé cette phrase magnifique : « save the world is always inside ». Ca devrait être un slogan universel. Malheureusement, aujourd’hui, l’idée de consommation a complètement déjoué tous les principes de protection de la nature.

Que pensez-vous de la mode éthique ? J’en adore le principe. Mais en dehors de marques comme Misericordia, elle est rarement esthétique. J’adorerais que la mode éthique soit aussi esthétique, que ce ne soit pas simplement une cause. Il manque cette dimension qui est très importante dans le pouvoir de séduction à l’égard du public. Je pense qu’il est fondamental que les créateurs s’ y intéressent. Par exemple en architecture, l’ architecte Shigeru Ban utilise des matériaux recyclés, et en fait des choses totalement fonctionnelles, c’est formidable.

Y a-t-il un projet fou, qui vous tient à cœur, que vous n’avez pas encore pu réaliser ?

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Je suis à un moment de ma vie, où je touche à tous mes projets, c’est assez magique. Je suis monté sur scène avec Mr. Nô à Lille 3000, là je pars faire un concert à Clermont-Ferrand à Europavox, ensuite à Montréal. J’ai mon expo de tableaux qui arrive. J’ai une installation à Lyon au Stade des Lumières qui s ‘appelle Knock on Heaven’s Door, donc je suis un homme plutôt épanoui. Maintenant je ne sais pas… Je ne voudrais pas être ministre de quoi que ce soit, mais conseiller artistique d’un pays, pourquoi pas. C’est une utopie… J’ai rarement eu des projets qui n’ont pas abouti, donc avec vous j’en ai deux : travailler pour le Pape François et être conseiller artistique d’un pays… Voilà !


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ARRIVEES TOUT DROIT D’ANGLETERRE OÙ ELLES ONT REMPORTÉ LA HUITIÈME SAISON DE L’ÉMISSION « X-FACTOR », LES QUATRE LITTLE MIX ÉTAIENT DE PASSAGE EN FRANCE POUR PRÉSENTER LEUR PREMIER ALBUM, « DNA » DONT LES SINGLES SONT D’ORES ET DÉJÀ DES TUBES. L’OCCASION POUR BLIND DE RENCONTRER LE GIRLS BAND. Interview : Dine Delcroix / Photos : François Berthier Textes : Morgan le Bervet / Photos : Dr


LITTLE MIX L’ADNAUFÉMININ


Lorsque vous étiez plus jeunes, de quel girls-band auriez-vous aimé faire partie ? Jade : Spice Girls Jesy : Spice Girls Leigh-Anne : Destiny’s Child Perrie : Cleopatra Vous êtes beaucoup comparées aux Spice Girls. Estce gênant ? Perrie : Non. Quand les gens nous le disent, nous le prenons comme un grand compliment parce qu’elles étaient incroyables. Nous aimons ce qu’elles représentent ainsi que leur individualité. Elles sont formidables en tant que groupe. Quelle est votre Spice préférée ? PERRIE: Quand j’étais plus jeune, je me prenais 76


toujours pour Emma dans la cour de récréation parce je lui ressemble de par mes cheveux blonds et mes yeux bleus mais, ma préférée, c’est Victoria. Je la trouve drôle. Jesy : La mienne, c’est Geri Halliwell. Leigh-Anne : Melanie B. Jade : Moi, c’est Emma. Si l’une d’entre vous était amenée à quitter le groupe, que deviendraient les Little Mix ? Leigh-Anne : Les Little Mix resteront les Little Mix jusqu’à ce que nous marchions avec des cannes (rires). Perrie : Et si quelqu’un essaye de partir, nous la rattraperons par les cheveux (rires).


Votre public est en majorité féminin. Comment le vivez-vous ? Jade : Nous voulions une prédominance féminine dans notre fanbase et c’est agréable de l’avoir à nos côtés. Perrie : Nos fans se sentent un peu comme des sœurs qui peuvent compter les unes sur les autres et c’est super de constater qu’elles se lient d’amitié à travers le monde grâce à notre musique. Le fait que l’une d’entre vous soit en couple avec un membre des One Direction peut-il justifier cet engouement féminin ?

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Jade : Lorsque nous étions dans l’émission «X-Factor», beaucoup de nos fans étaient déjà des fans de One Direction. Je pense que les filles s’identifient à nous car nous sommes


quatre filles et nous véhiculions l’amitié entre filles. Quelle direction musicale souhaitez-vous emprunter pour votre second album ? Leigh-Anne : Nous ne voulons pas aller vers le bas alors nous allons essayer de garder cette harmonie ‘old school’ avec des sonorités modernes et faire des textes auxquels les gens peuvent s’identifier. Nous commençons à en parler... Perrie : Nous voulons surpasser «DNA», ce qui va être difficile car nous aimons beaucoup cet album. Vous venez de lancer une collection de faux-ongles pour la marque New Look. Pourquoi avoir choisi ce produit ? 79


Perrie : Parce que nous aimons nos ongles. En ce moment, je n’ai rien sur les miens et je me sens nue (rires). Nous sommes obsédées par les ongles alors nous avons décidé de créer les nôtres. Jesy : Toutes ces choses à notre effigie, c’est un rêve devenu réalité. Nous avons nos propres poupées, nos couvre-lits, nos lunch box... Quels sont vos produits de beauté indispensables ? Perrie : Les produits Lancôme, Chanel, Bobbi Brown, le mascara et le rouge à lèvres de MAC. Leigh-Anne : Le shampooing sec. Jade : Le shampooing sec, le rouge à lèvres et la poudre. 80


Jesy : Les faux cils. Avant d’aller quelque part, laquelle d’entre vous est la plus lente à se préparer ? Jade, Leigh-Anne, Perrie : Jesy ! En référence au mouvement ‘Girl Power’, y a-t-il un ‘Little Mix Power’ ? Jade, Jesy, Leigh-Anne, Perrie: Oui ! Leigh-Anne : Nous avons un pouvoir... Jade : Et nos fans sont notre force. Jesy : Alors il ne faut pas les embêter ! (rires). 81


Les trois premiers albums du groupe s'intitulent « Billy Talent » puis « Billy Talent II » et « Billy Talent III ». Pourquoi avoir abandonné les chiffres pour ce quatrième album ? Pour cet album, nous voulions changer parce que nous avons pris une nouvelle direction. C'est la première fois que nous

produisons un disque et nous voulions marquer ce nouveau départ. C'est donc « Dead Silence » qui a été choisi comme titre. À quoi fait-il référence ? La chanson parle du fait d'être une victime innocente de la guerre et nous avons trouvé qu'elle collait

bien au dessin post-apocalyptique qui avait été fait par l'artiste australien Ken Taylor pour la pochette de l'album. Quelles sont les meilleures conditions de travail pour l'écriture et la composition ? Il n'y a pas vraiment de conditions idéales. La


BILLY TALENT

UN SILENCE DE MORT Interview: Dine Delcroix / Photos: Vincent Lignier

En tournée pour promouvoir leur nouvel album « Dead Silence », les quatre acolytes du groupe de rock canadien Billy Talent étaient récemment en France pour un concert complet au Bataclan. La rédaction de Blind en a profité pour s’introduire dans les coulisses de la salle parisienne et poser quelques questions à Ian D’Sa, le guitariste de la bande.

composition et l'écriture sont des choses totalement spontanées pour ma part. Cela peut venir dans un taxi, sous la douche ou quand je marche dans la rue. Parfois, je peux être dans un bar en train de boire un coup et entendre une chanson qui va me m'en inspiré une autre en

plein milieu d'une conversation. Il m'arrive aussi de me réveiller à 4H30 du matin pour m'enregistrer chanter sur mon téléphone. Ces choses se produisent naturellement. Avant un concert, de combien de temps avez-vous besoin pour répéter ?

Nous n'avons pas besoin de répéter toutes les chansons en entier car nous les maîtrisons bien avant la tournée mais, avant le spectacle, nous faisons généralement 10 à 15 minutes de balance. Après une tournée, ressens-tu le besoin de cesser voir les reste du groupe pendant un moment ?


Oh oui ! (rires). Après avoir passé plusieurs jours dans un bus pendant un tournée, j'ai l'impression de voir les autres membres du groupe plus que certaines personnes ne voient leur mari, leur épouse ou leurs enfants. Il est donc important, après une année de concert, de faire une petite pause. Vous avez fait beaucoup de premières parties de concerts. Laquelle t'a le plus marqué ? Je crois que c'est les Foo Fighters. Nous avons fait la première partie du groupe lors de deux festivals et j'ai une super photo de moi avec Pat Smear, le guitariste du groupe qui a aussi joué pour Nirvana. En fin de soirée, nous avons bu des Margaritas en coulisses ensemble. Le chanteur du groupe, Dave Grohl, était venu nous parler. Le groupe est vraiment sympa et très simple. Quelle est la première chose que tu fais quand tu sors de scène ? Sur scène, je transpire beaucoup donc, généralement, après un concert, je me sèche totalement et j'enfile des vêtements secs

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avant de fumer une cigarette (rires). Quel est le plus beau concert auquel tu as assisté ? Je dirais celui des Sound Garden au festival Lollapalooza en 1992. J'avais 16 ans et j'étais en fosse. C'était incroyable ! Que penses-tu de l'évolution de la musique punk, aujourd'hui ? Le punk a évolué au début des années 2000 et j'ai l'impression que beaucoup de groupes punk ne reçoivent pas l'attention qu'ils méritent. L'accent est mis davantage sur des musiques légères et acoustiques. Je pense que les prochaines années connaîtront un nouveau genre de punk même si ces dernières ont apporté des choses formidables.

Depuis ses débuts, votre groupe a aussi beaucoup évolué. Comment décrirais-tu votre musique actuelle ? Aujourd'hui, avec ce quatrième album, nous revenons justement au punk que nous avions propo-

sé sur nos deux premiers disques. Le troisième album était différent car nous avons travaillé avec un autre producteur, Brendan O'Brien, qui a vraiment donné un côté heavy rock aux chansons.

Que penses-tu des groupes qui continuent les tournées à tout âge ? Les choses changent lorsque nous vieillissons et il devient physiquement difficile de jouer après 60 ans ou de crier pendant un set d'1h30. Cela doit dépendre du type de musique. Un groupe doit évoluer et intégrer à son travail des choses qui reflètent l'âge de ses membres car ils ne peuvent pas faire ce qu'ils faisaient lorsqu'ils avaient 15 ou 20 ans, ce serait vivre dans le passé. Certains groupes sont arrivés au stade où leurs membres ne se parlent plus et n'écrivent donc plus de musique ensemble. La tournée est alors juste un moyen de se faire de l'argent et je trouve cela regrettable .


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JARED LETO,

SPACE MAN Interview : Dine Delcroix / Photos : François Berthier

Ce mois-ci, les 30 Seconds to Mars reviennent dans les bacs avec un nouvel album intitulé « Love, Lust, Faith and Dreams » dont le premier single, « Up In The Air » a été envoyé dans l’espace par la NASA en mars dernier. En attendant leur concert parisien au Grand Palais prévu le 9 Juillet 2013, Jaed Leto, le chanteur/ acteur a répondu à nos questions et pris la pose en exclusivité. Rencontre avec la légende !



Le nouvel album du groupe s'intitule "Love, Lust, Faith and Dreams" ("Amour, Luxure, Foi et Rêves"). Lequel de ces éléments est le plus important pour toi ? Je crois que ces éléments sont tous essentiels car ils forment un ensemble indispensable à la vie. Je ne pourrais pas vivre sans l'un d'eux. Qu'est-ce qui a influencé l'écriture de cet album ? Je n'ai pas écouté beaucoup de musique pour cet album. Je me suis surtout tourné vers la photographie, le cinéma et la littérature mais je n'ai pas été directement inspiré. Les livres ont toujours eu une grande influence sur moi et je pense que cela se ressent dans l'album au niveau du récit car il est chapitré avec des dialogues en guise d'élément lyrique. Quelle a été la difficulté majeure de ce quatrième opus ? Je pense que le défi majeur était de finir dans les temps. J'ai travaillé dessus pendant deux ans et c'est beaucoup pour un album. Cet album est-il plus personnel que les précédents ? Je ne sais pas s'il est plus personnel mais il est, en tout cas, certainement plus réfléchi. Le précédent album a été clairement influencé par la bataille qui nous opposait à notre maison de disques. Qu'y a-t-il de sexuel dans ce disque ? Il traite de la luxure et du désir qui sont des thèmes importants à explorer. Certaines paroles sont donc très sexuelles. C'est une part considérable de ma vie, tout comme les rêves, la foi et l'amour. Quelle est la signification du zèbre que l'on peut voir dans le clip ainsi que sur la pochette du premier single, "Up In The Air" ? Pour moi, il y a quatre animaux qui représentent le titre de l'album: le lion représente l'amour, la serpent est la luxure, le loup signifie la foi et le zèbre est associé aux rêves. Qui a eu la formidable idée d'envoyer ce premier extrait de l'album dans l'espace ? C'était moi, merci. Je voulais faire quelque chose d'impossible. C'était inoubliable ! Tellement grand, tellement cool... Envoyer un single dans l'espace, être dans la tour de contrôle et parler à l'astronaute, c'était vraiment une célébration pour ce nouveau chapitre. Quel est l'atout de ce nouveau chapitre ? Ce n'est pas seulement un disque de rock. C'est plus immersif, plus atmosphérique.



Je pense qu'il surprendra beaucoup de gens qui pensent connaître le groupe. À quand un concert dans l'espace ? Nous y avons déjà pensé mais il y aurait un peu trop de monde pour le vaisseau Soyouz qui est, pour l'instant, le seul moyen pour les gens d'aller dans l'espace. C'est intense mais pas impossible et cela finira par arriver. Quelqu'un a déjà probablement prévu de le faire, j'en suis sûr. De la musique a déjà été jouée depuis une station spatiale avant l'envoi de notre single dans les airs. Les gens font toutes sortes de choses démentes. La dernière piste de l'album s'intitule "Depuis le début". N'est-ce pas un titre curieux pour une fin de tracklist ? J'aime l'idée de terminer un album par une chanson qui fait référence au recommencement. Pourquoi avoir choisi de lui donner un titre français ? Pourquoi pas ? (rires). C'est un langage d'amour. Aimerais-tu chanter en français ? Oui, j'aimerais. C'est une belle langue pour le chant. Que fais-tu lorsque tu as des désaccords avec les deux autres membres du groupe ? Il faut se donner mutuellement de l'espace et je pense que nous savons comment tirer profit d'un désaccord. Nous avons appris à travailler les uns avec les autres


depuis le temps et nous avons acquis une grande expérience. Nous nous traitons avec respect et gentillesse. Quelle bande originale de film aurais-tu adoré composer ? Je ne voudrais pas avoir à composer une bande originale. Pourquoi ? Je ne fournirai jamais autant de travail pour le film de quelqu'un d'autre (rires). Il faut beaucoup de temps pour faire un album... Peut-être que si David Fincher me le demandait ou si Stanley Kubrick revenait d'entre les morts, je le ferais. Et si c'était pour ton propre film ? Si c'est pour mon propre film, peut-être. C'est bien de mettre des sons sur des images mais je préfère créer des images pour des sons. Je suis sans doute meilleur dans ce sens mais c'est une question intéressante. Quels sont tes meilleurs souvenirs de scène ? J'ai passé tellement de bons moments à Paris... Est-ce une réponse type que tu prononces dans tous les pays ? Non, j'y repense maintenant parce que je suis assis à t'en parler mais c'est vrai que nous avons fait de bons shows, ici. Nous avons joué à Bercy et c'était incroyable. La dernière fois que nous sommes venus, nous avons enchaîné deux bonnes dates au Zénith. Nous serons au Grand Palais l'été prochain et je suis sûr que ce sera bien aussi. À quels artistes détestes-tu être comparé ? Les gens doivent cesser de nous comparer à Dolly Parton ou à Grateful Dead car c'est très bizarre (rires). Nous ne sommes pas vraiment comparés à d'autres groupes. Nous avons notre propre truc. "Life On Mars" a été un des premiers pseudonymes du groupe en hommage à une chanson de David Bowie. Qu'as-tu pensé de son récent retour ? J'ai trouvé cela merveilleux. C'est génial qu'il puisse chanter ce qu'il veut, quand il veut. Visiblement, il le fait par amour pour la création et non par obligation donc c'est agréable.


LE MUMMY PORN Véritable

raz-de-marée sur les étales des librairies, les titres érotiques à vocation sentimentale pseudo pornographique, selon le terme à la mode, se multiplient. Entre tumulte médiatique et réalité du genre, cette littérature ne se joue-t-elle pas plus de ce qu'elle provoque que de ce qu'elle est ? Qui avouera s'être laissé prendre au piège de ces lectures plus stimulantes en dessous de la ceinture qu'au-dessus ? Enquête

Par Léona Perrot

Avant, il y avait Anaïs Nin… Derrière ce nom, une femme dont les doigts courant sur la Remington sont une caresse intrigante et taquine, le corps un fantasme cosmopolite au parfum de scandale évaporé dans l’air bohême de Paris et d’ailleurs et, la vie un tourbillon d’aventures passionnantes et de rencontres étincelantes. Marginale et avant-gardiste, Anaïs Nin est une des premières femmes à se frotter au genre de la littérature érotique. Elle y excelle, même si ce genre méprisé lui oppose le refus des éditeurs, elle fait les délices des cercles d’intellectuels et d’universitaires qui la révèlent. Anaïs Nin donne à la littérature érotique ses lettres de noblesse avec sa Vénus erotica (1977), considéré comme un chef d’œuvre en son genre. Anaïs Nin et ses liaisons sulfureuses, entre autres avec Henry Miller que relate leur Correspondance passionnée (La Cosmopolite, Stock, 2007)… Anaïs Nin, une figure de proue du féminisme.

Place au « porno soft » ! Dorénavant, il y a Cinquante nuances de Grey et tutti quanti. Autant vous dire qu’on a franchi un abîme. En effet, ce que l’on nomme désormais le « mummy porn » - paternité du terme revendiquée

par l’américaine Sylvia Day - a la côte… Les histoires sensuelles pour desesperate housewives en mal d’aventures et fleur bleue tendance SM sont à la mode… « Porno pour mamans » ?! N’y a-t-il aucun mâle qui n’ait eu la faiblesse de feuilleter ce que lisait l’autre moitié du lit avant de sombrer dans des rêves torrides et fiévreux dont il était exclu, ne serait-ce que pour lui souffler des idées sur ce qui pouvait la contenter ? Veut-on réellement nous faire croire ça ? Ne soyez pas jaloux, messieurs ! Quand le lectorat sera fatigué qu’on lui rabatte les oreilles avec le « mummy porn », on fera le buzz autour du « daddy porn ». Les éditeurs auraient bien du remords de ne pas épuiser le filon. Haro au sexisme et vive la parité ! Au comble de l’esthétisme et de la suggestion, loin des rentrées littéraires de septembre aseptisées et simplement estampillées d’un bandeau, la conception graphique et éditoriale soigne la matière livre par un travail léché sur le toucher et la vue : jeu contrasté de noir et de rouge en général, motifs sans ambiguïtés, brillant ou mat… Alléchantes, les premières de couverture émoustillent par ce qu’elles éveillent en nous de plus inavoué et de plus inavouable, du moins dira-t-on qu’elles annoncent la couleur : un nœud de cravate, un masque, des menottes, des draps froissés, des boutons de manchette,


un ruban rouge qui glisse sur une épaule dénudée, une boucle de ceinture, une clé suspendue à une chaîne, une pomme… Dès lors, comment empêcher son cerveau de faire des recoupements littéraires et culturels et son imagination galopante de faire affleurer des fantasmes quand ces symboles de masculinité ou de luxure excitent la libido ? La ceinture de chasteté, la pomme du jardin d’Eden, les entraves de la domination, le secret gardé sous clé, le mystère de l’inconnu, les signes des ébats passionnés… Quant aux quatrièmes de couverture, elles font craindre une galerie de personnages stéréotypés, tous plus naïfs et mièvres les uns que les autres, dans une trame narrative où se succèdent clichés et poncifs. Sociologiquement et anthropologiquement, le « mummy porn » s’est-il donné l’objectif d’explorer nos vices les plus viles, de fouiller nos pratiques sexuelles, de dévoiler nos perversions secrètes et de

décliner nos fantasmes le plus abjectes ? Petit pêle-mêle. Qui ? Une femme mise en état de manque : Alice dont le mari, 10 ans plus vieux, est devenu impuissant ; Nora Sutherlin en quête d’intrigues pour ses romans érotiques ou Alexandra Beckamm dite X enquêtant sur la Camorra et un homme riche, dominateur et mystérieux : Knight of Pleasure, patron d’Ultimate Submission, une chaîne câblée de films porno chic tendance SM, Lord Marcus Roscarick, aux airs de petit garçon dans un corps d’adulte, de prédateur animal, charnel, sexuel ou un éditeur extrêmement dur et exigeant. Quoi ? Toute une série d'étapes initiatiques, vouées à la découverte « des plaisirs de la soumission et du sexe extrême », multipliant « les expériences qui solliciteront chacune des inhibitions [de l’héroïne]», en y mêlant quelques « dangereux secrets » et quelques « sombres desseins ». Où ? « Aux confins du plaisir », « là où l'amour et le sexe ne


connaissent pas de bornes », « dans un « roman pornographique » pour qualifier monde où douleur et plaisir sont intime- son œuvre et la revendique à corps et à ment liés », « vers les plus folles orgies ». cris comme « histoire d’amour », AnasEn tête des ventes et modèle du genre, Fif- tasia a toutes les raisons de se sentir ofty Shades of Grey (Cinquante nuances de fusquée lorsqu’elle se rend à l’évidence : Grey) de E.L. James (de son vrai nom Eri- « I don’t make love, I fuck… hard », auka Mitchell), déclinées en « plus sombres » trement dit Monsieur préfère la baise et en « plus claires ». Cette fiction narre la violente. Le petit secret de Grey tient en relation tortueuse et torturée d’une jeune quatre lettres : BDSM. Va-t-elle renoncer étudiante vierge de 22 ans, sans adresse à cet amour languissant et profond, vieux mail ni ordinateur, féru de lecture et dont d’une semaine, ou bien cèdera-t-elle, elle l’auteur favori est Thomas Hardy – en- la vierge, en signant le contrat d’initiation core une qui est atteinte de bovarysme ! au « vanilla sex », motivée par le secret – répondant au nom d’Anastasia Steele, espoir de le guérir de ses blessures et le et d’un homme d’affaires et milliardaire, changer, si ce n’est du moins le réconciséduisant, mystérieux et à qui rien ni per- lier avec lui-même ? Quel dilemme ! Entre sonne ne résiste, Christian Grey, sur fond raison et passion, le cœur balance… longde sado-masochisme. Quelle meilleure temps, d’ailleurs. proie que cette effarouchée innocente, manquant d’assurance et absolument indemne du toucher masculin ! Alors quand au prétexte d’un remplacement, elle s’offre à la visière du chasseur, jouant l’indifférente, il n’y a plus qu’à dégainer ! Bien que l’auteur se garde du terme de

Un best-seller au succès doux-amer. 70 millions d’exemplaires vendus dans le monde, dont un million en France. Pour une auteur britannique, dont la parution originale s’est faite à New York, reconnaissons-lui cet exploit indéniable d’avoir contribué à populariser le e-book : dans l’Amérique puritaine, aucun doute qu’il est moins stigmatisant de lire Cinquante nuances de Grey en version e-book plutôt que de se faire surprendre en pleine lecture de ce livre à la couverture équivoque. Tablettes et liseuses en tête, le roman fait un carton. Une prudence légitime, si l’on se fie à la critique, qui n’a pas beaucoup fait preuve de tendresse à l’égard de ce numéro 1 des ventes. Cà et là, on lit à propos de Cinquante nuances de Grey, « le livre à éviter » ou encore, « 5 raisons de ne pas le lire ! Le verdict est sans appel ». L’œuvre a été passée au crible : un manuel d’éducation sexuelle faussé par une initiation invraisemblable où on se demande encore comment une vierge innocente qui ne s’est jamais masturbée peut éprouver un orgasme dès le premier rapport, écrit dans un style médiocre aux dialogues in-



sipides et répétitions affligeantes de pauvreté, qui a profité d’une hypermédiatisation hypocrite, ce que dénonce Anne Bert dans sa lettre ouverte aux médias. Pour l’intrigue, Carole Behn du magazine Elle y voit le « livre le plus cucul de l’année » recensant les pires clichés sur la sexualité féminité, les rapports sado-maso et dominants-dominés – évidemment, à la place du dominé, la femme – mais que demander de mieux à ces personnages, façon Princesse et Prince Charmant, quand l’une est « une oie blanche d’un niveau de maturité proche de celui de Bécassine » et l’autre « un faux pervers milliardaire, jeune, beau et blessé par la vie et qui va faire de son mieux pour lui faire croire qu’il a des goûts sexuels déviants », dixit Bérengère Viennot.

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Toujours est-il qu’une version cinématographique des Cinquante nuances verra le jour prochainement sur les écrans des salles obscures… De fait, Universal qui en a acheté les droits d’adaptation, a fait du long-métrage la « priorité absolue » et ambitionne de le diffuser en salle pour l’été 2014, a confié le producteur Adam Fogelson au Hollywood Reporter. Quant au casting, les rumeurs vont bon train… En attendant, les trailers fleurissent sur les sites web d’hébergement vidéo. Non contente de ses exploits - certains corrigeront : son « désastre » littéraire -, E.L. James remet ça : Fifty Shades of Grey : Inner Goddess (traduisez : Cinquante nuances de Grey : déesse intime), dont la sortie est prévue pour le 1er mai aux Etats-Unis, aux éditions Vintage Books, devrait offrir l’opportunité à n’importe quel(le) fanatique de E.L. James de la singer. Sous la référence à ce qu’Anastasia appelle sa déesse intérieure, qui n’est rien de plus qu’une sorte de conscience lui témoignant de ses sentiments et émotions, et sous la forme d’un journal « gainé de

cuir », où des pages vierges favoriseront l’expression de son imagination et de ses fantasmes en alternance avec des conseils d’écriture, augmentés d’une préface de E.L. James herself et d’extraits des trois volumes de Cinquante nuances de Grey, sans compter la playlist qui a inspiré l’auteur durant la rédaction de la trilogie, le quatrième volet doit s’envisager comme un guide offrant « aux lecteurs et aux apprentis auteurs un endroit où ils pourront coucher sur le papier leurs pensées les plus intimes ». Le doux rêve de s’épanouir à travers l’écriture ?! La recette d’une fortune future ?! La promesse de devenir le prochain auteur phare du mummy porn ?! Etant donné le peu d’enthousiasme de la critique versus le succès fulminant de ce roman, doit-on s’inquiéter d’un abrutissement du lectorat en mal de rapports de force, quand dans nos sociétés contemporaines et dites civilisées, les femmes sont toujours en guerre pour faire valoir leurs


droits, leur égalité à l’homme en matière de salaire, de savoir-faire et de pouvoir. A croire, sans m’attirer les foudres des féministes, qu’au jeu des dominants-dominés, rien n’est encore irréversible…

La déferlante. On ne compte plus les trilogies, les séries et les auteurs qui surfent sur la vague ! Qu’on en fasse un roman de gare ou un roman de plage, le « porno soft » est une littérature bon marché pour les migrants pendulaires, qui doivent épuiser leur temps dans les transports en commun sans épuiser leur méninges, ou pour les vacanciers en mal de lecture la moins intellectuelle possible. Tandis que les lecteurs se laissent prendre au piège, ce genre qui pullule est une véritable manne pour les éditeurs. Surtout qu’il semblerait que les titres aillent par trois, assez pour fidéliser un lectorat sans l’asservir. La preuve avec Sylvia Day et Anne Rice. Sylvia Day est l’auteur du phénomène mondial Crossfire, dont le premier tome Dévoile-moi est paru en novembre 2012 chez J’ai Lu et affiche « Il me possède, il m’obsède… », le deuxième tome Regarde-moi (mars 2013) « Il est ma drogue, je suis son obsession… »… Quant au troisième, Enlace-moi, prévu pour août 2013, réserve encore quelques secrets. Crossfire relate la vie d’Eva, jeune employée d’une agence de pub qui succombe au charme de son patron, Gideon Cross. Evidemment, ce boss est un apollon fortuné. Faut-il encore ajouter qu’il est dominateur ? Heureusement, Sylvia Day est plutôt lucide : « Nos héroïnes sont jeunes et tombent amoureuses d’un type très riche et très beau », expliquait-elle récemment dans la presse française, « Tout ça n’est pas réaliste, évidemment. La romance relève du fantasme, c’est même sa raison d’être. » On a envie de soupirer d’aise, d’autant

qu’Anne Rice force un peu plus le trait de la vision Disney tendance SM. Les Infortunes de la Belle au bois dormant, d’Anne Rice, édité chez Michel Lafon est un roman divisé en trois volets : 1. Initiation, 2. Punition et 3. Libération. Un bandeau annonce, péremptoire : « Si vous avez aimé Cinquante nuances de Grey, vous adorerez la sulfureuse trilogie d’Anne Rice ». La Belle, initiée aux délices de la chair par un Prince venu d’un royaume lointain, le suit dans son pays où elle rentre au service de la mère de son amant. « Dans ce monde de luxe et de luxure, elle devra assouvir tous les fantasmes de la reine et de sa cour, avant de reconquérir la liberté. Au fil de son troublant apprentissage, la Belle découvrira l’extase du plaisir dans la douleur, et l’ivresse de la soumission. » Le genre prépare-t-il sa succession en posant quelques principes de base ? L’Etreinte de la nuit, écrit par Sadie Matthews et paru chez Milady en ce mois d’avril 2013, ne semble pas démentir le fait que ces his-

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toires s’étalent sur trois volumes, puisqu’il du club de lecture se réunissent autour est le premier tome de la trilogie Fire after du dernier best-seller à la mode, une romance érotique décrivant les ébats musdark. Où que vous posiez vos yeux sur les clés d’un jeune couple, leurs vies sexuelles étales de l’espace culturel des supermar- ne leur paraissent que plus lamentables chés ou les rayons des librairies, les titres et ennuyeuses et leurs maris de piètres et s’alignent rivalisant de sensualité… Les médiocres amants. Elles se risquent alors effets d’annonce en première de couver- à transposer la fiction à la réalité. Mais les ture ne jouent pas la demi-mesure. Tous déconvenues s’enchaînent : un ascenseur sortis en février-mars 2013. De Cuir & de qui tombe en panne, le facteur qui vous Soie, de Lysa S.Ashton, chez Presses du découvre en tenue d’écolière ou la voisine Châtelet. Sur la première de couverture qui s’interroge sur ce drôle de canard en qui dévoile le lacet probablement d’une plastique… Nos cinquante ménagères de robe corsetée si l’on se fie au bombé de Gray devront apprendre qu’en matière la fesse, un encart communication sou- de libération sexuelle, rien n’est jamais ligne : « Enfin… la 51e nuance ! » Le Jeu comme dans les livres ! des tentations, d’Indigo Bloome, chez City Editions : « Avec lui, elle ose tout. Un jeu de désir et d’amour, de confiance et de trahison. » Sans limites, de Tiffany Reisz, aux Editions Harlequin : « Dans le monde des initiés, c’est elle qui fixe les règles… » Délivre-moi, de Julie Kenner, chez Michel Lafon : « Seule sa passion peut la libérer ». Ou encore Une proposition, de A.J. Molloy, chez Kero. Pour les plus avertis, dans le registre BDSM, les auteurs s’appellent Seth Daniels ou Caralyn Knight.

Une œuvre qui fait des émules ! Avec ou sans dérision ? Les 50 Ménagères de Gray, de James Lee, chez City Editions, avril 2013. Un roman qui ne cache pas sa filiation par sa première de couverture, où sous un costume trois pièces et une cravate nouée autour du cou d’un anonyme, se laisse deviner une parodie subtilement drôle, voire acerbe : « Fascinées par 50 nuances de Grey, elles veulent toutes tester. Plus facile à lire qu’à faire… ». Au cœur de Gray Town, tranquille bourgade de 7000 âmes sans histoire, souffle un vent de révolution sexuelle. Lorsque les cinquante femmes 98

Journal intime d’une Femme Soumise, de Sophie Morgan, chez City Editions, février 2013. Entre deux mains menottées, une rose fraîche et épanouie. Côté cour, cette journaliste londonienne est une jeune femme à qui tout sourit : belle, indépendante, brillante, drôle… Côté jardin, Sophie joue la soumise et se laisse dominer par les hommes pour leur plaisir mutuel. Confession sans masque ni voile, Sophie raconte la première fessée jusqu’aux punitions faisant perler les larmes. En équilibre entre plaisir et douleur, ce livre-témoignage tente de répondre à la question suivante : comment ne pas renier sa liberté de femme sûre d’elle et assumer une sexualité extrême ? Quand elle rencontre James, son véritable C. Grey, elle comprend ce que soumission signifie réellement… Les 50 nuances de Grey, elle en parle en toute connaissance de cause et en livre un témoignage unique. Devenu best-seller dans une dizaine de pays, Sophie en écrit la suite. Cent facettes de M. Diamonds, de Emma Green, (tome 1 : Lumineux, tome 2 : Eblouissant, tome 3 : Flamboyant…), chez Editions addictives, mars 2013. M.


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Diamonds tiendra-t-il ses promesses ? « Une saga torride qui fera oublier toutes les autres : Cinquante nuances de Grey, comme Tout ce qu’il voudra ! » Hormis la surenchère, on est en droit de se demander ce que réserve cette saga, surtout quand l’éditeur expose : « La relation entre le ténébreux Gabriel Diamonds et la douce Amandine prend une tournure inattendue ! La tension monte, la machine est lancée et rien ne semble pouvoir l'arrêter... » Une trame narrative aux allures de déjà vu. A en croire les avis d’internautes lecteurs, on est loin d’atteindre les ambitions fixées : « des personnages inintéressants, une histoire plus que banale, des scènes de sexe torrides mais qui n’emballent pas, une fin sans fin… Une lecture sans intérêt. » Le contrat n’est pas rempli : « Pas meilleur que Cinquante nuances de Grey, moins vulgaire que Tout ce qu’il voudra. » Reste à savoir si l’auteur tiendra la distance des 100 volumes avant que l’éditeur ne décrète : « on arrête là les dégâts ! ».

On a lu, pour vous… Sans se vautrer littéralement, à défaut de dire littérairement, les sens épuisés de fantasmes, dans les pages de Cinquante nuances de Grey (ça aurait été tellement facile de tomber dans ce piège !), dont tout le monde parle si bien qu’il n’est plus 100

possible de se faire son propre avis sans avoir qui bourdonne à votre oreille tout ce que vous avez pu en lire ou en entendre dans la presse, (on attendra – peut-être – que la passion qui entoure ce roman s’essouffle pour s’en faire une idée plus objective !), on a lu pour vous Tout ce qu’il voudra de Sara Fawkes, publié en intégralité en février 2013 chez Red Velvet . Cette saga en cinq volets a d’abord paru séparé-

ment, façon roman-feuilleton. Exception faite à la règle de la trilogie. Lucy Delacourt est une employée novice, temporairement rattachée à une grande entreprise familiale. Pleinement consciente qu’il ne s’agit pas du job de ses rêves, la vision de ce bel inconnu avec qui elle prend l’as-


censeur chaque matin lui fait supporter plus légèrement son statut, en plus de lui permettre de payer ses factures. Quand elle cède, sans opposer aucune résistance ni connaître le nom de cet homme, sa vie monotone basculera. Elle apprend que cet amant mystérieux n’est autre que Jeremiah Hamilton, le PDG milliardaire de la compagnie qui l’emploie, et ce dernier lui propose alors un contrat singulier :

qui ne gâchent pas les passages dosés d’adrénaline, même si l’intrigue n’est pas transcendante. Une lecture plaisante, sans originalité de genre ou de style, qui a tendance à se diluer au fil des pages à mesure que la fin approche. De fait, demeurent quelques énigmes et incertitudes sur l’identité du tueur et le commanditaire du meurtre qui perdent le lecteur, à moins que ce ne soit une ruse pour mieux pré-

devenir son assistante très personnelle en se soumettant à tout ce qu’il voudra… En acceptant, elle ignorait encore qu’elle se retrouverait mêlée à des secrets de famille dangereux au point qu’ils pourraient lui être fatals… Sans que le sexe soit une obnubilation, quelques passages fiévreux,

parer la suite... En deux mots : sans plus. L’auteur de cet article décline toute responsabilité concernant la valeur des romans cités, si la curiosité vous faisait céder à la tentation !

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CLIVE OWEN

L’homme qui ne voulait pas être une star Par Justin Kwedi / Photos : François Berthier

Physique avantageux, charisme et talent dramatique certain, avec tous ses atouts Clive Owen devrait déjà être une star majeure. Il n’est pourtant qu’un acteur populaire et reconnu mais pas la vedette à laquelle les qualités précitées le destinaient. Que ce soit par les circonstances ou ses propres choix de carrière, Clive Owen aura toujours raté de peu le coche du star-system. Le fait le plus représentatif de cet état est son échec face à Daniel Craig pour le rôle de James Bond en 2005 alors qu’il était le successeur tout désigné pour le smoking de 007. Mais en fait doit ont vraiment s’en désoler pour Owen ? Pas vraiment. Clive Owen exprime un surprenant paradoxe tout au long de sa carrière. Il est capable d’amener une vulnérabilité et une fragilité étonnante lorsqu’il incarne des héros « d’action » tandis qu’à l’inverse les personnages plus faillibles se voient do-

tés d’une résistance et force de caractère inattendue. L’acteur sait jouer de son physique avantageux pour rehausser les paumés et les sans grades (l’accro au jeu dans « Croupier » de Mike Hodges qui le révéla en 1997, le valet de chambre de l’excellent « Gosford Park » de Robert Altman). Ses rôles musclés sont plus menaçants que séducteur à l’image du redoutable tueur de « La Mémoire dans la peau » (2002), le braqueur d’« Inside Man » ou plus récemment le barbouze de « Killer Elite » (2012) et sinon versent dans l’outrance parodique tel « Shoot ‘Em Up » (2007). De même son rôle le plus Bondien dans « Duplicity » verse plus dans la comédie romantique que le film d’espionnage tendu. Quand Clive Owen joue les gros bras, c’est pour rire ou alors de façon tellement glaciale qu’il n’attire aucune sympathie pour ses personnages. Il est finalement logique que Bond lui ait échappé, au fond il n’en voulait sans doute pas vraiment et le débraillé et écorché vif Daniel Craig convenait sans


doute plus à ce moment-là que le détachement d’Owen. Clive Owen n’a jamais su finalement glisser dans ce culte de l’égo et du narcissisme et est donc logiquement plus convaincant quand il s’agit d’incarner les quidams ordinaire, les héros malgré eux ou les être ancrés dans une réalité quotidienne. C’est le malfrat plongé dans le Londres gris et sordide de « Seule la mort peut m’arrêter » (2003) où il retrouve Mike Hodges (et prend symboliquement la succession du Michael Caine de « Get Carter »), l’amoureux de « Closer » (2004) ou le père meurtri de « Trust » (2012).

Clive Owen ne s’impose pas en étant un héros à l’écran mais en le devenant. Ce fut le cas avec « Le Roi Arthur » (2004) où le personnage n’a jamais paru plus humain assumant progressivement son statut et surtout « Les Fils de l’homme » (2006) chef d’œuvre de science-fiction le voyant jouer un dépressif devenu le dernier espoir d’un futur plongé dans le chaos. Les deux films seront des échecs cinglant alors qu’ils auraient dû contribuer à son ascension. Clive Owen une star ?

Pas encore et sans doute jamais vraiment.




THOMAS VINTERBERG

Le parcours cannois de Thomas Vinterberg

Fondateur, avec Lars von Trier, du mouvement danois Dogme 95, réalisateur des films cannois Festen (Prix du jury en 1998) et La Chasse (prix d’interprétation masculine l’année dernière pour Mads Mikkelsen), Thomas Vinterberg, 43 ans, présidera le jury Un certain regard à Cannes cette année. Un portrait. Par Boyd van Hoeij / Photos : François Berthier

Né le 19 mai 1969 à Copenhague, Vinterberg est l’un des plus connus réalisateurs danois contemporains, aux côtés de ses compatriotes Lars von Trier (« Dancer in the Dark », Palme d’Or en 2000, « Melancholia ») et Susanne Bier (l’Oscarisé « After the Wedding », le récent « Love Is All You Need » avec Pierce Brosnan). Les trois réalisateurs sont issus du mouvement Dogme 95, cofondé par von Trier et Vinterberg en 1995 et dont « Festen » (« La Fête »), le premier film en compétition à Cannes de Vinterberg, était le premier long-métrage entièrement réalisé selon les dogmes très stricts du nouveau mouvement cinématographique (dont la règle, très rarement appliqué par la suite, de ne pas faire figurer au générique le nom du réalisateur). Avant ce drame familial vif, brutal et extrêmement réaliste, Vinterberg avait déjà réalisé le road-movie The Biggest Heroes, plusieurs courts-métrages, dont le très remarqué « Last Round » (primé à Munich et à Tel Aviv) et un drame pour la télévision danoise.

L’année de la sortie de « Festen », 1998, le co-auteur du manifeste Dogme 95, Lars von Trier, a aussi fait sortir son premier long-métrage dogme : Les Idiots. Cependant, son Breaking the Waves, qui suivait pas tout à fait les règles établis par le duo Vinterberg-von Trier, avait déjà fait des vagues au festival de Cannes en 1996. Ensemble avec Susanne Bier, à qui on doit l’un des films dogme 95 les plus simples et plus beaux, Open Hearts, ils ont étés responsable pour une vraie renaissance du cinéma danois — pas évident quand on sait qu’il s’agit d’un pays avec un peu plus de 5 millions d’habitants — et dans un sens plus large, une renaissance du cinéma nordique. Des gros projets à succès comme la trilogie suédoise Millenium n’aurait jamais pu exister sans la réussite des films Dogme 95 et les aides financières, les infrastructures de production et les réseaux de ventes à l’internationale qui se sont créés grâce aux films dogme dans les pays scandinaves. D’ailleurs, le réalisateur et les


scénaristes du premier film Millenium, respectivement Niels Arden Oplev, Nikolaj Arcel et Rasmus Heisterberg, étaient tous des danois malgré le sujet extrêmement suédois de l’adaptation cinématographique du roman de Stieg Larsson. Les films anglophones que Vinterberg a tourné après le grand succès à l’internationale de Festen — le méconnu film canadien The Third Lie, le mélo fantastique It’s All About Love avec Claire Danes et Joaquin Phoenix sur patins à glace et Dear Wendy, un film schématique sur la violence et les armes aux Etats-Unis avec Jamie Bell et coécrit par von Trier (qui y laisse entrevoir l’origine de ses films Dogville et Manderlay) — n’obtiennent pas le succès espéré et le réalisateur rentre finalement au pays en 2006 pour y faire un nouveau film dans sa langue maternelle: la comédie dramatique au titre auto-explicatif Un homme rentre chez lui. C’est pour son prochain projet, Submarino, qu’il retrouve ensuite un collaborateur de haut niveau qui fait arriver un nouveau souffle et surtout une nouvelle force dans son travail: Tobias Lindholm, un scénariste (la série danoise Borgen, ses propres longs-métrages R et Hijacking) aussi rigoureux que Lars von Trier mais beaucoup moins misanthrope.

Même si « Submarino », l’histoire de deux frères qui vivent dans la même ville mais qui se sont séparés à jamais par les blessures de l’enfance, est d’une noirceur effrayant, les émotions et la violence des personnages sont respectées plutôt qu’exploitées. Leur seconde collaboration, « La Chasse », n’est pas uniquement un retour, sous un autre angle, à un thème déjà présent dans « Festen », l’abus des enfants, mais aussi, par la suite, un retour à Cannes pour Vinterberg, qui y décroche un deuxième prix cannois, cette fois pour son comédien magistral Mads Mikkelsen. Le film devint ensuite le plus grand succès du réalisateur depuis Festen et est vendu partout dans le monde. Au Danemark, « La Chasse » accumule plus de €6m — dans un pays de 5 million d’habitants ! — et reste en tête du box-office même la troisième semaine de sa sortie, devançant ainsi le nouveau titre « Django Unchained » de Quentin Tarantino avec Christoph Waltz et Leonardo DiCaprio en tête d’affiche. Cette année, Thomas Vinterberg fêtera de nouveau son anniversaire sur la Croisette et présidera le jury Un certain regard aux côtés de le star chinoise Zhang Ziyi, la comédienne française Ludivine Sagnier, la directrice artistique du festival de Rio, Ilda Santiago, et le producteur et exploitant espagnol Enrique Gonzalez Macho.




L’AFFRONTEMENT « Depuis que le Roi ne va plus [au théâtre], écrit la Princesse Palatine en 1702, c’est devenu un péché. » Curieux raccourci. Néanmoins, ce serait un doux euphémisme de dire, qu’à travers les siècles, entre le théâtre et la religion, ça a toujours été les grandes amours. Par Léona Perrot / Photos : François Berthier

Sur le texte de l’américain Bill C. Davis, adapté par Dominique Piat et son père Jean, et dans la mise en scène de Steve Suissa, s’affrontent Tim Farley et Mark Dolson. Un duo improbable pour un duel implacable. Le premier est un prêtre d’origine irlandaise, fin connaisseur et pas uniquement de théologie, puisqu’il sait apprécier à sa juste valeur le whisky, surtout à la faveur de la générosité de ses paroissiens… dont il est très aimé. Aucun doute là-dessus, si l’on se fie au décor ingénieux de Stéfanie Jarre. Sous ses airs désabusés et le titre « mon père », dont il assène l’aspirant à la prêtrise pour le rappeler à l’ordre et lui inspirer l’autorité, se cache un homme bienveillant et sensible incroyablement interprété par Francis Huster. Entre éclats de voix menaçants, bravades de débauché et élans de faiblesse compatissante, le comédien joue de toutes les nuances jusqu’à ce que la vision de son

personnage soit étonnamment infléchie. Quant au second, Mark Dolson, pour un jeune séminariste, qui a flirté avec ce que la nature humaine a de plus vile et de plus pervers, il a le verbe opiniâtre, le zèle révolutionnaire et les illusions passionnées de la jeunesse. Brillamment incarné par Davy Sardou, qui ne manque pas de fraîcheur et d’humour dans ce rôle, alors même que les ambitions de réforme de son personnage, lui font pointer du doigt des questions épineuses avec une pertinence déconcertante, il a la mesure juste. Entre les deux hommes, dans un équilibre instable et en perpétuel mouvement, se joue un combat d’une férocité acre dosé d’un humour acerbe et d’une tendresse toute paternelle. Le spectateur n’y est que plus attentif… Pour des questions maintes fois posées, toujours actuelles et sans réponses définitives, sur le mariage des prêtres, la

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place de la femme au sein de la foi et les relations homosexuelles, la prouesse des comédiens mérite d’autant plus d’être saluée que le génie du metteur en scène n’est pas seulement de placer le spectateur en tant qu’observateur légèrement déstabilisé dans ses convictions par la pertinence des répliques qui fusent entre bon sens et trait d’humour, mais bien plus encore de le placer en position d’acteur. Le public, même s’il est invité à respecter le silence religieux qui sied aussi bien à un sermon qu’à une pièce de théâtre, encore qu’il ne soit pas bridé dans ses réactions de spectateur, participe à l’argument de la pièce par la configuration de l’espace scénique. Ce n’est pas simplement un fauteuil de spectateur qu’il va occuper en pénétrant dans le Théâtre Rive gauche. Peut-être davantage une chaise bigote, allez sa-

voir ! Tour à tour, église austère de nudité et solennelle de dogmes, ou bureau ecclésiastique cachant en son sein les surprises les meilleures ou les vices les plus bas, par un jeu savant et soigné de lumières signées Jacques Rouveyrollis et des artifices de translations et rotations de mobilier, tous les sens du spectateur sont mis en état d’alerte… Au moins autant que ses émotions, tandis que résonne le Hallelujah de Jeff Buckley… Bien loin du folklore religieux donneur de leçons, qui pourrait rebuter, l’Affrontement est une pièce époustouflante d’intelligence, d’humour et de modernité. De quoi redonner foi en une humanité, comme le dit si bien le metteur en scène Steve Suissa, partagée « entre le pas si bien et le pas si mal », mais toujours en quête de perfectionnement, de tolérance et de communion.

Mise en scène : Steve Suissa, Assistant mise en scène : Denis Lemaître Costumes : Edith Vesperini Son : Alexandre Lessertisseur Décor : Stéfanie Jarre Lumières : Jacques Rouveyrollis Du 28 avril au 2 juin 2013, du mardi au samedi à 19h et en matinée le dimanche à 17h30. Théâtre Rive Gauche, 6 rue de la Gaîté, Paris 14 Résas : 01 43 35 32 31 ou http://www.theatre-rive-gauche.com/theatre-l-affrontement.html Maquillage : Emilie Peltier

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Nicola, oli, Boris, Mr Shoes, Marc et Mathieu ont démarré depuis le 21 février une tournée à travers la France, annoncée comme « la plus longue jamais faite par le groupe». Nous sommes allés à la rencontre du son d’indochine depuis 15 ans, Olivier Gérard, également coréalisateur de l’album. Interview : Auriane Besson / Photos : François Berthier

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KEN LOACH Par Justin Kwedi / Photos : François Berthier

Ken Loach

montre encore une énergie intacte dans son activisme avec la sortie du documentaire L’Esprit de 45 le 8 mai dernier.

Le combat continue


La Part des anges, son excellent dernier film récompensé à Cannes (et son plus positif depuis longtemps) l’an dernier est encore frais dans les esprits que Ken Loach revient déjà avec le documentaire L’Esprit de 45. Ce documentaire évoque la période charnière de l’immédiat après-guerre en Angleterre où un pays vainqueur mais dévasté avait tout à reconstruire. La population sortait de d’années difficiles entre les bombardements allemands et les privations diverses mais à force de d’abnégation et de solidarité avait su tenir le choc et contribuer à l’effort de guerre (les femmes contribuant à la fabrication d’armes en usines tandis que les hommes étaient au front) pour maintenir le pays hors de l’eau. C’est ce même élan de solidarité qui allait permettre de le pays à partir de cette année 1945 où le cauchemar prenait fin et la vie pouvait reprendre. Loach mélange donc image d’archives nationale et régionale, témoignage d’époque et contemporain pour dépeindre cette période tout en y apposant son point de vue puisque malgré les difficultés L’Esprit de 45 représente une forme de paradis perdu pour lui. Ken Loach avait récemment ironisé sur la mort de Margaret Thatcher dont il proposa de privatiser les funérailles. Le réalisateur n’eut de cesse tout au long de sa carrière de fustiger la politique de la Dame de Fer (comme par exemple The Navigators et les conséquences de la privatisation des chemins de fers plaçant les cheminots dans une situation critique) car c’est avec elle que disparait définitivement cet idéal d’une Angleterre unie, se retroussant les manches et avançant collectivement pour faire évoluer sa so cio-économique. Avec ses réformes radicales et sans états d’âmes faisant voler en éclats certaines industries emblématiques comme les mineurs, Margaret Thatcher intronisa le libéralisme économique froid et pragmatique ne se préoccupant plus de l’humain. L’œuvre de Ken Loach court ainsi constamment après cet idéal de fraternité passée. Dans ses premiers films (et ses productions pour la télévision britannique), Loach marcha tout d’abord sur les traces des chantres du Free Cinema du début des années 60. Ce fut une génération de jeunes réalisateurs (comme Karel Reisz, Lindsay Anderson, Tony Richardson ou John Schlesinger) qui ruèrent dans les brancards pour évo

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quer le mal être de la jeunesse d’alors bloquée vers une existence conformiste par cette même génération usée qui vécut la guerre et s’accommodait d’une vie médiocre après les privations d’antan. Cela donna quelques classiques du cinéma anglais comme La Solitude du Coureur de Fond (1962), Billy le menteur (1963) ou Samedi soir, dimanche matin (1960). Suivant ce modèle, les premiers films de Loach s’attèlent alors ainsi souvent à des destins individuels comme la jeune femme paumée de Pas de larmes pour Joy (1967), le petit garçon de Kes (1969) ou l’héroïne brisée par son séjour en hôpital psychiatrique dans Family Life (1971). La faillite vient alors autant du mode de pensée dépassé des adultes que de la société mais avec l’intronisation de Thatcher Loach ira en fustigeant les le système et ses institution de manière de plus en plus virulente. Ce sont les services sociaux inhumains du bouleversant Ladybird (1994), le travail précaire dans Raining Stones (1993) ou Riff Raff (1990), les conditions de travail intenables des cheminots dans The Navigators (2001). Le désespoir total est pourtant souvent évité grâce à cet esprit de 1945 que Loach instaure dans sa descriptions chaleureuse des communautés pauvres où cette solidarité et esprit d’entraide s’est maintenu, à défaut de l’être en plus haut lieu. On retrouve également cette lueur dans les poignantes histoires d’amour capable de naître dans cette adversité comme Carla’s Song (1995) ou plus récemment Just a kiss (2004). Une volonté de s’élever et réussir difficile mais pas forcément inaccessible comme on pouvait le voir dans La Part des anges (2012) justement qui débutait dans la pure violence pour devenir une comédie pleine d’espoir. Pour Loach l’esprit de 1945 doit revenir au centre des préoccupations sans que l’on ait besoin d’une nouvelle guerre pour se soucier du sort de son voisin. Le combat continu.


LA POLE DANCE Par Léona Perrot

A l’occasion

de la sortie de « The Bling Ring » de Sofia Coppola, dont la sortie est prévue en France le 12 juin et qui sera présenté en ouverture « Un certain regard » au Festival de Cannes 2013, TheBlindMagazine revient sur un phénomène en plein essor, la pole dance.

Ce film est l’histoire vraie d’un groupe d’adolescents californiens, incarnés par Taissa Farmiga, Erin Daniels, Israel Broussard, Halston Sage et Katie Chang, qui cambriolèrent les maisons de plusieurs célébrités hollywoodiennes entre octobre 2008 et août 2009. Parmi leurs victimes : Megan Fox, Orlando Bloom ou encore Paris Hilton… Pour les besoins du film, Emma Watson fait de la pole dance. Aucun striptease, juste quelques poses lascives. Une occasion pour l’actrice de révéler, lors d’un entretien pour GQ, qu’elle a longtemps manqué de fluidité dans ses mouvements avant de prendre quelques leçons pendant ses études de littérature à Oxford, ajoutant à Virginia Woolf la pole dance. Avant elle, Eva Longoria, avait fait une démonstration pour le moins renversante sur l’épisode 2 de la huitième saison des Desesperate Housewives. Et récemment invitée sur le plateau de The Wendy Williams Show, Susan Sarandon admettait avoir pris un cours privé en compagnie de sa fille Eva Amurri Martino, qui elle préparait un rôle sur Californication. Et Susan d’ajouter : « J’ai fini avec des contusions et très découragée […] Il faut être vraiment fort. Ils devraient faire une compétition olympique de pole dance ». Si c’est Susan qui le dit…

en savoir, et ce qu’on en dit, parfois faussement, TheBlindMagazine a enquêté au sujet de cette discipline émergente qu’est la pole dance. Comment comprendre l’enthousiasme curieux et l’effervescente controverse qu’elle motive ? Discipline en vogue, mondialement répandue, qui se trouve des affinités avec des pratiques ethniques et culturelles ancestrales, la pole dance traine dans son sillage bien des idées reçues… quand bien même les différentes compétitions tendent à faire évoluer favorablement la légitimité de ce sport. Basiquement, il s’agit de danse acrobatique sur une barre (« pole », en anglais) en rotation sur elle-même. Mystifié par l’empreinte de la vie by night dans l’imaginaire collectif, jusqu’à quel point l’amalgame avec le lap dance, la parenté avec la barre de striptease et les préjugés tenaces sur ses adeptes, tout âge confondu, homme ou femme, nous font tout ignorer de la pole dance ? Aux cris d’excitation et/ou d’admiration, faut-il décider si la pole dance est une pratique sensuelle ou sportive, sulfureuse ou formatrice ?

TheBlindMagazine est allé à la rencontre de Patrick Mignon, sociologue du sport à l’INSEP (Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance), pour comprendre ce qui fonde la légitimité et la reconnaissance d’un sport en tant que tel, et l’interroger sur la question de la Entre ce qu’on en sait, ou plutôt : pense sexualisation fortement marquée par rap-



port à la pratique de la pole dance. La sportivisation, c’est-à-dire ce qui fonde la légitimité d’une pratique physique en tant que sport, repose sur plusieurs critères : la première dimension est l’engagement physique, la deuxième est l’établissement de règles qui donnent un cadre aux compétitions, et enfin la troisième dimension est la représentation de ce sport sous forme de fédération. Quant à devenir un sport olympique, il faut que le Comité International Olympique puisse juger de l’impact de ce sport du point de vue économique comme le fait que ce sport soit en phase avec son temps, nous expliquait Patrick Mignon. Ce n’est pas tant la sexualisation qui soit problématique que la dévirilisation qui est dénoncée. De fait, comme pour le patinage artistique ou la gymnastique aérobic, les strass et le costume font partie intégrante du décorum. Or, pour le moins que l’on puisse dire, on s’éloigne du modèle grec de l’athlète au corps d’Apollon. Au passage, est-il besoin de rappeler aux détracteurs de la pole dance que le marathonien courrait nu ? (sic). Pour ce qui est de la pole dance, son origine « connue » - et pas moins biaisée dans la mesure où la pole dance est née dans le milieu circassien - est largement représentée dans les séries télévisées.

Etablissant un parallèle avec la boxe, le sociologue nous faisait remarquer qu’il s’agit de la même bataille, opposant professionnels et amateurs. Si chacun s’accorde pour voir dans la boxe, le plus beau et le plus barbare des sports, là où les amateurs valoriseront son aspect éducatif, les autres auront soin de rappeler que la boxe est liée aux bas-fonds, aux règlements de compte entre mafieux dans les quartiers chauds. Autrement dit, le phénomène de sexualisation des sports semble inévitable. Patrick Mignon soulignait encore que le sport n’est pas un fait de culture, que celui-ci soit caché ou exprimé. Le sport est un univers réglé, opposé à un univers des passions - comprenez l’environnement de vie - et qu’il s’agit surtout de maintenir cette mince frontière par le respect des règles, notamment en faisant en sorte que cette frontière soit la moins poreuse possible, au pouvoir corrupteur de l’argent par exemple. L’univers réglé du sport doit être indemne des marques de dérives sociales ; c’est valable aussi pour la dimension sexuée de la vie sociale : plus le sport sera investi de passions fortes, plus on aura de difficultés à le déclarer « sport ».


Le collectif Girls Drawin’Girls, auquel appartient l’illustratrice et pole danceuse Leen Isabel (http://pole-dancing-adventures.blogspot.fr/), expose à la galerie Arludik entre le 7 et le 25 mai.


TheBlindMagazine a également recueilli le témoignage de Manuela Carneiro, professeur de pole dance, chorégraphe et performeuse.

Manuela C. - Un épanouissement corporel et moral, une possibilité d'expression différente de la danse car l'aspect physique et le dépassement de soi sont très TheBlindMagazine : En quali- intenses… té de quoi pratiques-tu la pole dance ? Est-ce que tu peux préciser : que pensais-tu trouver dans Manuela Carneiro. – Pro- la pole dance et pas dans une fesseur depuis 2008/2009, autre activité ? je pratique la pole dance depuis 6 ans. En tant que Sincèrement, je n'attenperformeuse sur les compé- dais rien en particulier hortitions, j’ai plusieurs titres mis de me défouler dans à mon actif : Vice Cham- quelque chose de nouveau. pionne d’Europe 2008, 2nde Je ne savais pas à l'époque runner Up au Championnat le nom de cette discipline… d’Europe 2010, Vice Cham- J'ai vu un vieux clip hiphop pionne de France 2011 et un jour, avec une femme en 5ème place au Pole Art 2011 arrière-plan qui faisait des (Compétition internationale) trucs incroyables sur cet accessoire, je me suis posée Quels événements, dans ton la question de savoir si ça cheminement, ton histoire per- s'apprenait, s'il existait des sonnelle, t’ont emmenée jusqu’à cours sur Paris… J'ai fait la pole dance ? ma recherche sur le net, et j'ai trouvé des infos sur un C’était pendant une période forum féminin… qui m'ont de ma vie où j’étais très en amenée à apprendre les colère, à cause d’événe- bases en quelques cours ments personnels difficiles puis je me suis perfectionà gérer émotionnellement… née par Youtube en visionJ’avais 27 ans et un besoin nant le peu de vidéos qu'il y de retrouver ma féminité, avait à cette époque. une confiance en moi, une liberté de mouvement, de D’après toi, qu’est-ce qui fonde canaliser une énergie exces- la spécificité de ce sport et mosive et surtout une nouvelle tive un tel engouement ? passion… Cela a été mission réussie ! (Elle affiche un Je dirais que l'on fait une aclarge sourire.) Je n’ai plus tivité physique sans le sentir jamais quitté cette activité à proprement parlé… C'est qui fait partie intégrante de bien souvent le lendemain ma vie aujourd’hui et qui qu'on le sent !!! L'aspect me rend si heureuse et épa- artistique et aérien nous nouie. pousse toujours à essayer d'avoir la beauté du mouQuels attraits a eu cette disci- vement, son aspect techpline sur toi ? nique est très précis et nous oblige à prendre conscience

de notre corps, on découvre rapidement avec surprise ce qu'on est finalement capable de faire avec ce dernier si on passe le cap de la sensibilité à la douleur. Je parle de fatigue musculaire, pincement, brûlure superficielle, ampoule, bleus dus au frottement de la peau contre la barre… Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter, pour toi personnellement, par rapport à la pratique de ce sport ? De continuer à transmettre mon savoir avec autant de passion qu'aujourd'hui, de monter sur scène le plus longtemps possible et de continuer à vivre mes rêves car il en reste quelques uns ! Et pour cette discipline sportive à l’avenir ? Qu’elle ne soit plus jugée… mais juste acceptée, assumée et respectée à sa juste valeur. C’est une discipline qui demande un mental d’acier et une rigueur de travail incroyable ! Ce n’est pas seulement une discipline sportive… Elle a un aspect thérapeutique inimaginable sur le corps et l’esprit, c’est ce qui fait toute la magie de cette activité, on peut la pratiquer de différentes façons et pour des raisons différentes. Alors, je lui souhaite d’être aussi riche et libre qu’elle l’est aujourd’hui.


Photos Pole dance : StĂŠphane Pironon



LARA FABIAN Absente des bacs français pour répondre à l’engouement de son public des pays de l’est, Lara Fabian est aujourd’hui de retour avec un album original, le premier dans la langue de Molière depuis 8 ans. Mère épanouie d’une petite Lou de 5 ans, elle livre dans ce nouvel opus les secrets de son bonheur intérieur à l’issue d’un important chemin parcouru. Pour nos lecteurs, la chanteuse a accepté de revenir sur ce voyage de vie très personnel en répondant avec la plus grande humanité

Interview : Dine Delcroix /

Photos: François Berthier


Vous revenez avec un nouvel album. Réconciliée avec votre image, vous n’apparaissez pourtant pas sur la pochette de celui-ci. Pourquoi ? L’un n’a rien à voir avec l’autre. C’était pertinent de voir un sigle qui symbolise le bonheur intérieur sur la pochette et de faire d’autres choses en promotion par ailleurs. Quelle est la différence entre le bonheur intérieur et le bonheur extérieur ? Vous avez quelques jours (rires) ? Le bonheur intérieur, c’est ce qui nous met en phase et nous réconcilie avec nousmême, qui tend à nous faire retrouver des espaces intérieurs où on lâche prise, où on est peut-être un peu moins dans la réflexion, moins en train de cogiter. On est alors juste dans un espace de silence et de simplicité et c’est un vrai bonheur à vivre quand on a fait le chemin qui nous permet d’en être capable. Le reste qui fait que l’on s’agite, qui fait parfois que l’on se retrouve un peu décentré par rapport à qui l’on est en général ne crée pas vraiment de lien au bonheur intérieur. Ce disque raconte en musique continue votre chemin vers le bonheur retrouvé. Quand l’avez-vous perdu ? On ne perd pas le bonheur. Simplement, on ne naît pas forcément avec tous les éléments qu’il faut pour comprendre que c’est une action dans laquelle on joue un véritable rôle. On ne perd rien dans la vie, on arrive avec tout. N’y avait-il pas une notion de perte avant le recouvrement ? Non, il y avait plutôt une notion d’inconfort général avec plein d’étages et d’étapes. On ne perd pas le bonheur quand on a conscience que c’est une action dont un est créateur. 128

Que faîtes-vous dans les moments où le bonheur vous semble justement un peu loin ? Dans un premier temps, comme tout le monde, je m’agite à l’extérieur de moi, je ne comprends pas très bien comment je peux faire en pratique pour retrouver réellement dans mon quotidien une simplicité ou une forme de lâcher-prise. Ensuite, je trouve des moyens pour sortir de ces moments de retranchement, des moyens pour me réconcilier avec ce qui me fait douleur. Certaines personnes font du pilates ou du yoga, d’autres prennent des cours de chant ou d’art dramatique, moi, j’ai trouvé un intérêt dans la voix et le son qui restent vraiment ma pratique principale pour évacuer ces choses qui font partie du chemin. L’album s’intitule «Le Secret» et s’ouvre sur le titre éponyme qui traite de l’inceste. Comment est née cette chanson ? C’est la narration de l’expérience que fait une femme sur trois. Cette chanson est née de ma mise en contact avec cette douleur, avec des femmes qui l’ont subie, en voyant à quel point c’était parfois inextricable pour elles, à quel point il n’y a peut-être pas d’issue quand on est meurtri aussi fort à cet endroit-là. Cela ne m’est pas arrivé, grâce à Dieu, mais c’est arrivé à des gens que j’aime suffisamment pour avoir envie de le raconter, de choisir ce thème-là comme un des thèmes les plus souffrants d’une vie. L’inceste fait malheureusement partie des impacts très fréquents de la vie d’un être, garçon ou fille. En étayant ces impacts, celui-là était un des plus douloureux dont je voulais faire la narration à ma façon. Depuis 2007, vous êtes mère d’une petite fille. Dans l’éducation que vous lui donnez, en quoi ressemblez-vous à votre maman ?


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Certainement au sens de la protection que je propose à Lou, au sens du passeur de valeurs que je suis. Dans ma vie, ma maman a été capitale sur les fondations de mon éducation.

saire. J’ai eu un vrai désaccord artistique avec cet homme.

Le fait d’être mère diminue-t-il la part d’enfance en vous ?

Oui et je le cris haut et fort. Je ne me suis pas privée d’essayer de lui faire changer son fusil d’épaule pendant 3 ans.

Pas du tout ! Je dirais même que quand on est maman, la petite fille en nous resurgit et elle nous permet de jouer à quatre pattes avec l’enfant.

N’avez-vous pas tourné ce film en toute âme et conscience ?

La petite fille en vous a resurgi lorsque vous avez chanté devant Barbra Streisand à l’occasion du mariage de David Foster, le 11 Novembre 2011. Quelle chanson avez-vous interprété devant votre idole ?

Êtes-vous toujours en désaccord avec le rendu final de la vidéo ?

Comme vous pouvez le remarquer, je ne suis jamais dans les scènes les plus violentes. Ces séquences qui vous gênent ont donc été tournées presque à votre insu...

Totalement à mon insu, d’où ce conflit. Quand j’ai vu les 3 mois de tournage parallèle au mien, je me suis assise avec lui Les pays de l’Est viennent de découvrir votre film et je lui ai dit «Mais tu délires ! Qu’est-ce musical «Mademoiselle Zhivago» d’Alan Badoex que tu fais ?». Il me répondait que c’était qui retrace les souffrances de l’âme à travers 8 vies. sa vision. Et bien ce n’est pas la mienne ! Était-il nécessaire d’y inclure autant de violence ? C’est mon plus grand conflit avec le Cette vision apocalyptique présente la mort de réalisateur et je peux vous dire que vous l’âme comme une délivrance... J’ai chanté «The Prayer» avec Andrea Bocelli lors de la cérémonie.

avez été épargnés parce qu’il y avait 12 vies au départ avec une intro au film et une outro de 40 minutes. C’est sa vision. Je me souviens, le jour de la conférence de presse du film, il a dit cette phrase hallucinante: «Pourquoi l’homme devrait-il être heureux ?». Je me suis levée et je suis partie. Est-ce pour cette raison que la sortie du film a été retardée ? Oui. Ce film va totalement à l’encontre de qui je suis. Dans le segment «Mademoiselle Hyde», il y a plein de plans à enlever, par exemple. Le plan du cœur avec la seringue, celui de l’explosion de sang dans la baignoire... Tout comme vous, je ne comprends pas en quoi c’est néces-

C’est ce qu’il dit, oui. Selon lui, quand elle souffre, l’âme devient meilleure. Qu’est-ce qui la rend meilleure, selon vous ? Je pense que certaines souffrances et douleurs créent une réflexion et nous aident à appréhender et à aborder la vie de sorte que parfois, on s’enrichit de paix, de sérénité et d’une volonté de se libérer justement de ce qui fait mal. Pour moi, c’est la manière dont on appréhende la douleur qui nous rend meilleurs. Ces divergences d’opinions empêchent-elles l’exploitation du film en France ? Absolument ! Ne pouviez-vous pas vous opposer à son ex-


ploitation à l’étranger ? Non, c’était diplomatiquement très difficile. Selon vous, que devient l’âme après la mort ? Elle passe au vaisseau suivant. Vous croyez donc en la réincarnation... Oui, j’en suis convaincue. C’est ma vision tout à fait personnelle et totalement subjective des choses. Quel est, pour vous, le sentiment le plus fort chez l’être humain ? Le besoin d’être utile à l’autre, de servir à quelqu’un. Les joies les plus grandes se manifestent en nous quand on sait qu’on appartient à une humanité, à un groupe sur lequel on peut compter. Pour beaucoup, le sentiment le plus fort est la peur... Je suis persuadée que les sensations les plus fortes ne sont pas négatives. Que faîtes-vous pour oublier les choses négatives ? J’ai un data qui efface automatiquement, c’est très impressionnant. Si c’est vraiment négatif, cruel, inutile ou gratuit et que cela ne me sert pas à rentrer dans les espaces de solution, j’oublie. Ainsi, vous ne connaissez pas la rancune... Non, c’est une grande chance. Qu’est-ce qu’une femme élégante à vos yeux ? Une femme élégante, c’est une femme sobre qui sait mettre en valeur ce qu’elle a de joli et cacher ce qui est moins joli. Êtes-vous une fashion victim ?

Non, je ne suis pas une fashion victim. Je ne crée ni tendances, ni styles. Quels sont vos créateurs de mode préférés ? Il y a Karl Lagerfeld. J’adore tout ce qu’il fait, du concept store à Chanel même si Chanel n’est pas toujours ce qui me va le mieux à l’exception de certaines robes du soir. Il y a également Stella McCartney. J’aime la personne, je trouve que c’est une femme hors du commun qui fait des choses vraiment magnifiques. Quand j’ai envie d’être très féminine, une petite robe Dolce & Gabbana est toujours très agréable. J’adore Jean-Claude Jitrois aussi. Il fait d’incroyables robes en cuir dans lesquelles on se sent très à l’aise. Aimez-vous les chaussures ? Oui, beaucoup. J’aime énormément les chaussures de Michel Perry qui sont très confortables à porter au niveau de la cambrure. J’aime aussi les Derby. J’adore les chaussures d’homme ! Qu’aimez-vous porter lorsque vous n’êtes pas en promotion ? Chez moi, j’ai une partie de l’armoire qui est dédiée aux vêtements pour la maison avec des chandails très confortables et de bonne qualité. Je préfère acheter un pull que je vais porter longtemps et pas 10. J’aime bien les choses sobres, les t-shirts noirs, les t-shirts blancs, les jolis jeans bien coupés et les chaussures très confortables. Et si je devais vous croiser sortant de chez vous pour aller faire vos courses ? Vous me verriez alors porter un jean avec un joli chandail et une belle paire de chaussures, les cheveux lisses et pas trop maquillée.


On raconte qu’il y a quelques années, votre service de presse demandait à voir les questions des journalistes avant vos interviews. Est-ce vrai ?

et pas vulgaire. Le résultat est vraiment le reflet de mon état d’âme, aujourd’hui. Il y a 10 ans, je n’aurais pas pu le faire et, dans 10 ans, je ne pourrais plus.

Je sais que Sony le faisait en 1999/2000 avec mon album en anglais et je n’étais absolument pas au courant, mais je l’ai découvert par la suite. Sinon, moi, en tête à tête, je ne l’ai jamais exigé. Cela brime la personne qui vient vous rencontrer et cela vous enlève le droit de dire vous-même que vous n’avez pas envie de répondre à quelque chose. C’est beaucoup plus simple de dire a quelqu’un qui vous pose une question à laquelle vous ne voulez pas répondre «Joker» ou bien «Je n’ai pas envie de parler de ça !».

Qui était présent durant la séance ?

Lors des journées de promotion durant lesquelles vous enchaînez les interviews, quel genre de journaliste attire votre attention de façon positive ? En général, celui qui n’est pas condescendant mais qui est bienveillant, celui qui a préparé, qui a écouté, qui s’est vraiment assis pour se pencher sur le travail qu’on a mis des années à faire et qui, quand il n’aime pas un truc, le dit avec la plus grande simplicité, qui n’essaye pas de me mettre en défaut en permanence, qui ne cherche pas la petite bête... Le journaliste que je trouve particulièrement intéressant et agréable à recevoir, c’est celui qui vient rencontrer un être humain. On a pu récemment vous voir posant nue en couverture du magazine «Gala». Qui a eu l’idée de ces photos ? C’était une demande de la rédactrice en chef adjointe et je trouvais cela très juste par rapport à mon état d’âme. Connaissant la photographe, je savais très bien où nous allions. C’était tendre, très sensuel

Mon équipe était là pour la coiffure et le maquillage mais j’étais seule avec la photographe au moment de prendre la pose. Le magazine en question a publié ces photos de vous en précisant qu’elles n’ont pas été retouchées. Avez-vous personnellement exigé cette mention ? Pas du tout ! Cette mention est juste d’une part mais incohérente de l’autre. Je n’ai effectivement pas été amincie ou allongée. En revanche, vous savez très bien que les photos sont passées à travers un filtre qui unifie automatiquement le grain de peau. Dans un magazine, une photo à plat qui n’est pas retouchée au sens du filtre n’existe pas. Voilà pourquoi je n’aime pas la mention «sans retouche». L’animateur Yann Barthès a repris cette couverture de manière satirique. Cela vous fait quoi ? C’est son travail. Le fait qu’il reprenne cette couverture ne m’étonne pas du tout. Cela me fait rire. Avez-vous fait l’objet de railleries à cause de ces images ? Non. Il y a eu deux tweets négatifs de médias mais le reste était totalement positif. La rédaction a battu des records de vente. Mes fans ont aimé et mon père a trouvé cela super joli. Le mensonge, le détournement et le cynisme ambiant m’énervent.



Thierry neuvic FOU DE MONTRES Photos : Franรงois Berthier

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Montre Jaeger-Lecoultre


Montre Breitling

Maquillage : Julie Villanova


Montre Jaeger-Lecoultre


Montre Hublot


Ms Mr : LA RÉVÉLATION NEW-YORKAISE

Interview : Dine Delcroix / Photos : François Berthier

Après avoir présenté leur travail en septembre 2012 avec l’ep « candy bar creep show », les deux new-yorkais de ms mr livrent enfin « second hand rapture », un premier album aux accents dark wave et aux influences pop alternative qui ont su séduire notre rédaction. Rencontre avec la miss et le mister qui forment ce duo coup de cœur. Comment vous êtes-vous rencontrés, tous les deux ? Lizzy: Nous étions ensemble à l'université à New York mais nous ne nous connaissions pas vraiment. Nous avons tissé des liens après avoir décroché notre diplôme. Max a fait une école de danse et il il était à la recherche de nouveaux artistes pour travailler. Il a envoyé e-mail au label pour lequel je travaillais. Je lui ai alors répondu par une liste d'artistes que nous avions et j'y ai joint quelques sons sur lesquels je chantais. Trois mois plus tard, c'est à dire en Décembre 2010, nous nous sommes mis à collaborer. Max : Le plus drôle dans cette histoire, c'est que chacun de nous faisait de la musique de son côté avant la collaboration. Nous n'étions pas amis et nous n'avions pas passé du temps ensemble... C'est venu tout seul. Avez-vous besoin de faire des compromis sur certaines choses au fur et à mesure que vous passez du temps ensemble ? Lizzy : Quand tu fais les choses en équipe, tout est une question de compromis. Le meilleur exemple, c'est lorsque nous sommes amenés à partager une chambre car chacun a sa propre routine du ma140

tin. Max a pour habitude de se lever tôt, de boire son café, de prendre sa douche et d'aller à la gym. Moi, j'aime dormir et me réveiller cinq minutes avant de partir. Du coup, nous parvenons à coexister tous les deux dans le même espace car Max essaye de ne pas faire de bruit pour me laisser dormir. Max : J'ouvre quand-même les rideaux (rires). Votre œuvre a quelque chose d'anonyme. Cultivez-vous le mystère autour de votre travail ? Lizzy : Nous avons volontairement tenu nos visages et nos noms à l'écart du projet lorsqu'il a démarré. Max : Ce n'était pas dans le but de créer un buzz ou de bâtir un mystère. C'était important que l'oeuvre soit séparée de l'identité pour que les personnes qui l'écoutent puissent le faire pour les bonnes raisons. Pour nous, la musique est ce qu'il y a de plus primordial dans ce projet. Qui écoute votre musique ? Lizzy : Nous n'en savons rien ! C'est bizarre de se retrouver devant un écran d'ordinateur et de voir des personnes ai-



mer notre page FaceBook ou nous suivre sur Twitter parce que nous ne connaissons pas ces gens. Jusqu'à présent, nous avons fait beaucoup de premières parties donc nous nous sommes surtout retrouvés face aux fans d'autres groupes mais nous allons bientôt faire notre propre tournée et nous saurons alors qui est notre public.

té qui nous intéresse. Nous aimons aller dans des directions opposées.

Max : Il paraît que tu ne sais pas qui tu es tant que tu ne connais pas tes fans (rires). D'un autre côté, tu ne peux pas choisir tes fans. En tout cas, nous sommes excités à l'idée de partir à la rencontre de notre public.

Sur quoi est basée l'esthétique de votre travail visuel ?

L'univers musical que vous proposez est plutôt sombre contrairement à vos visuels. Ce paradoxe est-il voulu ? Lizzy : Absolument ! Nous avons des chansons sombres dont l'habillage est effectivement coloré et c'est cette duali142

Max : Les meilleurs moments pour l'inspiration sont ceux durant lesquels nous cherchons à concilier deux choses complètement opposées. C'est dans ces moments-là que tu grandis le plus en tant qu'artiste.

Lizzy : Nous sommes obsédés par la notion de collage et de mélange. Nos références sont justement toutes les choses que voyons et que nous écoutons quotidiennement, qui nous saisissent. Dans chacun de nos clips, nous avons essayé de mettre en avant une facette de notre personnalité. Max : Nous ne pouvons pas mettre toutes nos idées dans une seule et même boite


donc chaque séance photos, chaque clip, et chaque pochette est une opportunité pour nous d'explorer un esthétisme différent. C'est aussi valable pour la musique. Votre premier album s'intitule « Second Hand Rapture ». Quelle est cette seconde main ? Max : À notre époque, tu as cette irrésistible opportunité d'expérimenter tout ce que tu veux dans le monde à partir d'un simple ordinateur. Cela crée une sorte de fausse intimité lorsque tu te sens proche d'une chose qui est en réalité lointaine et c'est à cela que la seconde main fait référence. L'idée de l'enchantement née de l'euphorie du fait d'avoir cette opportunité. Parmi toutes les chansons présentes sur ce premier album, laquelle conseilleriez-vous d'écouter à quelqu'un qui ne connaît pas encore votre travail ? Lizzy : Je choisirais "Hurricane". Elle n'est pas meilleure que nos autres chansons mais je trouve qu'elle donne un aperçu honnête et direct du reste du projet. Max : Il y a aussi "Bones" qui représente notre première écriture et qui a posé les fondations de notre travail. Si vous deviez changer de sexe, quelle personnalité seriez-vous ? Max : C'est trop dur... Beyoncé ! Lizzy : Julian Casablancas ou Jack White. En référence à votre chanson "No Trace", quel genre de trace aimeriez-vous laisser ? Lizzy : J'aimerais laisser une trace musicale. L'idée que, dans 40 ans, nous puissions rouler en voiture avec nos enfants

et entendre nos chansons passer à la radio me rend dingue ! J'adorerais que notre musique puisse toujours porter les mêmes émotions et les mêmes messages, qu'importe l'époque à laquelle elle est écoutée. Max : Je pense qu'une bonne chanson est intemporelle en ce sens, qu'importe son style. Tu peux écouter une bonne chanson 50 ans après sa naissance et la trouver toujours bonne même si elle sonne vieille ou datée. Moi, j'aimerais pouvoir avoir une discographie continue avec un album tous les deux ou trois ans, environ. Notre magazine s'appelle « BLIND ». Si vous deviez vous passer d'un sens, lequel serait-ce ? Lizzy : C'est une bonne question parce que c'est une chose à laquelle je pense beaucoup... Je choisirais l'odorat. Max : Moi aussi car je n'accorde pas beaucoup d'importance à l'odorat. Le problème, c'est qu'en perdant l'odorat, on perd aussi le goût et j'y suis très attaché.


MODE


R r U e i O M erth bas

B r A s a i L o G ranç ione H F m r r a e P le : H Sty

Robe, ELIE SAAB. Boucles d’oreille, BURMA 145


Manteau, SPRUNG FRÈRES. Boucles d’oreille, BURMA.



Pull Over, GÉRARD DAREL. Culotte, ERÈS. Lunettes de soleil, THIERRY LASRY. Escarpins, GIUZEPPE ZANOTTI. Collier, BURMA.

Swimsuit Thapelo / BO Isabelle Michel / Shoes Zara


Culotte et sandales, SONIA RYKIEL. Collants, WOLFORD. Bague, BURMA.


Robe, ZUHAIR MURAD. Boucles d'oreille et bracelet, BURMA.


Robe, ZUHAIR MURAD. Boucles d’oreille et bracelet, BURMA.


Body coupé en top, WOLFORD. Jupe, SONIA RYKIEL. Boucles d’oreille et bague, BURMA.

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Haut de pyjama, EQUIPMENT. Boucles d’oreille, collier, bracelet, bague, BURMA. Culotte, ERES.

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Manteau, GERARD DAREL. Soutien-Gorge, ERES. Jupe, CARVEN. Collier, BURMA, Escarpins, CHRISTIAN LOUBOUTIN

Skirt Moschino / Milla bra by Lascivious at Mise en Cage www.misencage.com / Shoes Zara / Trench Eric Tibusch / BO Anne Thomas


Maquillage : EMILIE PELTIER Coiffure : RIMI URA Mannequin : MICHAELA T@ FORD


THE GARDEN Par Karolina Trawinska Style : Aurore Donguy

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Combinason BALENSI chez l`ECLAIREUR Collier ON AURA TOUT VU Chaussures – UNITED NUDE


Bijoux sur cheveux PANAME Veste HOTEL PARTICULIER Top FIFI CHACHNIL Short DEBY DEBO Bijoux MARION GODART


Veste PATRIZIA PEPE Lingerie FIFI CHACHNIL Pantalon – NUE chez CARNET DE MODE Gants – GLOVE STORY Bracelets – SYLVIA TOLEDANO chez l`ECLAIREUR


Combinaison PATRIZIA PEPE Collier MAWI chez l`ECLAIREUR Gants GLOVE STORY Chaussures UNITED NUDE


Robe DIRK BIKKEMBERGS Boucles d orreille CHANAEL K Sac ON AURA TOUT VU


Veste ELEVEN Top ZUCCA Jupe SYLVIA RIELLE Sac MARION GODART


Chapeaux PANAME Veste DIRK BIKKEMBERGS Combinaison FIFI CHACHNIL Collier MARION GODART Pantalon GIORGIO&MARIO Chaussures BESSON


Robe GOLD HAWK chez l`ECLAIREUR Veste ELEVEN Veste AURELIE DEMEL chez l`ECLAIREUR Bague SYLVIA TOLEDANO chez l`ECLAIREUR Collier ON AURA TOUT VU

Maquillage : ANNE SISSOKHO Coiffure : MIHA OSHIMA Mannequin : FRANCES @ MAJOR PARIS Assistant JASMIN DEROME


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Babylikestopony
















Maquillage : ANGIE DESIGN Coiffure : MARCEL KHOURY Mannequins : KATIE, NEO@ Fivetwenty Model Management



Par Sarah Cazeneuve / Photos : Franรงois Berthier

COLD AS ICE


Manteau de cuir vernis GUY LAROCHE. Pantalon blanc ALEXANDRE VAUTHIER.


Veste et Jupe en python vernis AZZEDINE ALAIA , Ceinture en cuir ajourée AZZEDINE ALAIA, Boucles d’oreilles et bague SWAROVSKI.




Veste et jupe : AZZEDINE ALAIA, chemisier de soie RYNSHU , Chaussures YAN TAMINIAU boucles d’oreilles SWAROVSKI


Pantalon blanc ALEXANDRE VAUTHIER, Manteau en cuir vernis GUY LAROCHE, Chaussures YAN TAMINIAU, Collier GUY LAROCHE, manchette BCBG MAX AZRIA.



Veste, top , jupe et gants MASHA MA, Pendentif SWAROVSKI.




Robe CLAUDINE IVARI, Ceinture en cuir ajourée AZZEDINE ALAIA, Boucles d’oreilles SWAROVSKI.


Robe JAN TAMINIAU, Parure SWAROVSKI, Gants en cuir LANVIN, Chaussures WALTER STEIGER.


Pantalon de cuir ETIENNE JEANSON, cape ALEXANDRE VAUTHIER, ceinture MANGO, chaussures WALTER STEIGER.


ARIEL

Photos : Franรงois Berthier Stylisme : Benjamin Orion


MODE



Maquillage & coiffure : Camille Lutz Mannequin : Ariel@ Mademoiselle


THE NAKED TRUTH Victorienne

Tous les mois retrouvez les images de la série The Naked Truth Par François Berthier


Camilla


Cindy


Betty


Klaudia


Cindy


Kim


Clementine


BLIND TEST

Stanley Weber Actuellement à l’affiche du film «Cheba Louisa», l’acteur Stanley Weber répond à notre blind test.

Propos reccueillis par Dine Delcroix / Photos : François Berthier

Ta Madeleine de Proust ? La voile. Le film qui raconte ta vie ? «Les Goonies». Ton livre de chevet ? «Cent ans de solitude» de Gabriel García Márquez. Ton secret de beauté ? Je ne me rase jamais. Ton antistress ? Le rugby. La tendance mode que tu détestes ? Les jeans slim. Le détail chic pour toi ? Une belle cravate.

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Ta série du moment ? «Game Of Thrones» («Le Trône De Fer»). Ta chanson pour te sentir bien ? « Kiss You On The Cheek » par Desmond And The Tutus. L’insulte que tu préfères ? «You fucking cunt !». Le compliment qui t’énerve le plus ? «Vous êtes trop beau !». Le pays où tu pourrais immigrer ? L’océan. Un autre métier qui t’aurait plu ? Rugbyman professionnel. Qui inviterais-tu à ton dîner idéal ? François Gabart, Corinne Masiero, Jonny Wilkinson, Romain Gavras et Tom Fontana. Le défaut que doit avoir une femme pour te séduire ? Un côté bordélique. Le cadeau que tu rêves d’offrir ? Une armure complète d’Iron Man à un de mes meilleurs amis qui est un grand fan.

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Libé ou le Le Figaro ? Libé, cent fois ! Ton proverbe fétiche ? «Le baiser est la plus sûre façon de se taire en disant tout» - Guy de Maupassant. Le disque que tu as honte d’avoir acheté ? «Amants Poétiques» des Poetic Lover. Le talent que tu aimerais avoir ? J’aurais aimé avoir plus de mesure et être moins instinctif car je suis trop souvent dans les extrêmes. La question qu’on ne doit pas te poser ? Rien ne me gène.



LA FILLE QUI REND BLIND

AUDREY DANA Photo : Franรงois Berthier



AUTOMOBILE

Toyota ME.WE Ras le bol de la morosité ambiante ? En s’associant au designer industriel français Jean-Marie Massaud, le constructeur japonais a réfléchi à une voiture plaisir en phase avec notre conscience. Par Florian Augustin


Concept


L’avenir de l’automobile passera-t-il par l’acceptation de concepts passés aujourd’hui ignorés ? Cette pensée, qui fait notamment référence à la Citroën Méhari, se renforce par la multiplication de réalisations non vouées hélas à la commercialisation, mais qui prouvent que l’idée d’un retour aux valeurs simples fait son chemin dans un paysage automobile sinistré. Que veut le client ? La question peut paraître stupide, mais les designers se mettent-ils encore à la place de leur cible ? Aussi, Toyota Europe a voulu casser son mode de réflexion en faisant entrer dans la danse Jean-Marie Massaud, architecte de renom dont le mode de pensée consiste à replacer l’humain au centre d’un processus de plaisir « éco responsable ». La ME.WE est le résultat de ce travail. Ce cube à la bouille sympathique est la vision moderne d’un objet mobile dénué du superflu. Sa mécanique est électrique quand sa carrosserie faite d’éléments interchangeables en polymères ne pèse que 14 kg (celle d’une Toyota Yaris en avoue 170 !) et est 100% recyclable. Posée sur un châssis en aluminium abritant les batteries, cette peau plastique réalisée elle aussi à partir du recyclage offre une infinité de formes et de couleurs possibles pour que chaque ME.WE colle à la personnalité de son conducteur. À bord, les sièges banquettes peuvent servir de mobilier de pique-nique, tandis que les matériaux font là encore la part belle à la nature. Le bambou, matériau végétal abondant, résistant et facile à entretenir, a ainsi envahi la planche de bord, le plancher et le toit. Enfin, le plaisir de conduite est renforcé par la sensation de rouler au vent en abaissant toutes les surfaces vitrées, y compris le pare-brise. Vous l’aimez ? À Toyota de la produire. En attendant, Citroën a pris les devants et devrait présenter sous peu la version civile de son concept C-Cactus dévoilé au salon de Francfort 2007, vision moderne de la mythique 2CV. Motorisation 1 moteur électrique par roue Carrosserie Éléments polymères recyclés Longueur 3440 mm Largeur 1750 mm Hauteur 1600 mm Poids 750 kg



CHRONIQUES CD

Par Dine Delcroix et Morgan Le Bervet

La Femme - « PSYCHO TROPICAL BERLIN » (8 avril) J’aime assez les groupes que l’on aime détester. Si La Femme a tout d’abord intrigué (look, graphisme, nom, morceaux livrés avec parcimonie…) rapidement, elle a énervé. Faut dire, en France, on aime mal nos artistes. Suffit qu’ils soient précieux, snobs, référencés, maniérés (Lescop, BB Brunes, Shades, Fauve s’en sont souvent pris pleins les dents…). Forcément, le mystérieux collectif français à la géométrie variable, aux pays de Zaz ou Christophe Maé, dénote. Cultiver la distance, jouer la carte de l’attente, voire de la frustration (les singles ou EP aux comptes goutes depuis 2 ans) est un jeu dangereux mais au combien excitant à l’heure de la consommation musicale à outrance. Et enfin, l’album. Qui concrétise les efforts. Qui synthétise les questions. Et cristallise autour de lui un renouveau de la pop et du rock français décomplexé – devant les anglais notamment, qui ne proposent rien de passionnant ces temps-ci – avec des groupes comme Franz Is Dead, Frustration, Grandville, Aline par exemple. Signé chez Barclay (encore un moyen d’attirer les critiques !) mais également chez l’écurie Born Bad pour la version vinyle (pochette d’Elzo Durt magnifique), Psycho Tropical Berlin aligne 15 titres classieux, intrigants, drôles, hypnotiques. Meilleur exemple, le triptyque « La Femme / Interlude / Hypsoline » enivrant, explorant la dualité féminin / masculin, clair / obscur, sous un récit déclamatoire proche de la sorcellerie, et du spoken word cher à Gainsbourg, époque « Melody Nelson ». Textes cryptiques, naïfs et sexuels, La Femme séduit. Quelques titres plus anecdotiques mais jamais désagréables parsèment l’album mais l’homogénéité de l’ensemble (claviers baroques, boucles inquiétantes, ambiance crépusculaire) donne un disque totalement passionnant. Prenant son temps. Et parfois, des orgasmes sonores : « It’s Time To Wake Up (2023) », amoureux et cotonneux réveil américain. D’ailleurs le groupe parle souvent de destination, de voyage (Welcome America, From Tchernobyl With Love, Packshot). Autre réussite, « La Femme Ressort » petite ritournelle proche d’Eli Et Jacno, influence évidente. Et bien sur leur «tube» remanié : « Sur La Planche », qui allie ambiance coldwave, synth-pop française et surf-music. De second degré, d’humour et d’humeur, la Femme ne manque pas. Certains leur reprocheront leur approche amusée, peut-être puérile de la musique. Au contraire, voici un groupe décomplexé et complexe, volontairement déroutant mais rarement sarcastique. Quelques clins d’œil appuyés, des emprunts assurés, des jeux de mots osés, une ambiance sensuelle et sexuelle...Comme Stinky Toys, Niagara, Bashung ou Gainsbourg finalement. Oui La Femme reste mystérieuse, insouciante, insaisissable, évanescente et diaboliquement attachante. MLB


VANESSA PARADIS - « LOVE SONGS » (13 MAI) Il aura fallu attendre 6 ans pour retrouver Vanessa Paradis dans les bacs. Le successeur du mémorable «Divinidylle» est un double-album conceptuel dont la production artistique a été assurée par Benjamin Biolay qui n’a pas lésiné sur les cordes et les cuivres pour ornementer la voix suave de la chanteuse. Auteur de 7 titres sur les 20 proposés (22 pour l’édition ‘deluxe’), cet héritier spirituel de Serge Gainsbourg a su sublimer le travail de Carla Barât (ex leader des Libertines), Adrien Gallo (chanteur des BB Brunes), Mathieu Boogaerts ou encore Ben Ricour, tous unis dans la composition de ce disque aux allures désenchantées. Fascinante et fascinée, la chanteuse de 40 ans nous régale d’une douceur groovy, parfois rock-folk et même latino en livrant un disque très mature sur l’amour en dépit de sa récente séparation avec l’acteur Johnny Depp qui a co-composé le titre «New Year» avec leur fille aînée, Lily Rose. Un retour irréprochable !

VAMPIRE WEEKEND - « MODERN VAMPIRES OF THE CITY » (13 MAI) Troisième essai pour les new-yorkais de Vampire Weekend sur lequel les membres du groupe ont travaillé sans pression de délai avec l’intention de décoller l’étiquette que véhiculaient les deux premiers opus de leur discographie. Le son de «Modern Vampires Of The City» a effectivement quelque chose d’expérimentale dans les variations de fréquences qu’il propose. Sa tonalité mélancolique ne dissimule pas la période de réflexion rencontrée par le quatuor à la fin de sa précédente tournée et c’est au profit de pianos tendres et d’orgues presque religieux que les guitares passionnées sont sacrifiées. Bien que l’énergie de la bande semble être canalisée par des textes plus profonds que d’habitude, les chansons restent toutefois entêtantes et nous emmènent dans une pop évolutive, celle de la raison.

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CHRONIQUES CD DJ RAVIN - «BUDDHA BAR XV» (29 Avril) Le célèbre Buddha Bar sort son quinzième volet. Véritable retour à l’essence des premières compilations de l’établissement, ce double-album propose une évasion paradoxale aux couleurs de la Russie, orchestrée par le DJ résident Ravin qui a soigneusement sélectionné les sonorités lounge les plus atmosphériques sur le premier disque et assemblé les morceaux électroniques les plus émouvants sur le second. Les instruments du Grand Est se sont unis à de nombreux langages pour faire de ce nouveau volume un voyage sensuel et sans fosse note durant lequel le mysticisme symphonique des voix traditionnelles rencontre les basses modernes des nuits russes. Un assortiment d’exotisme convoquant Bliss, Yasmine Hamdan, Thor, Dim Vach ou encore Sean Bay qui place cet opus parmi les meilleurs de la collection.

PHOENIX - «BANKRUPT !» (22 AvrIL) Annoncé par le groupe comme une dérogation aux sonorités pop de « Wolfgang Amadeus Phoenix » (2009), ce cinquième album studio de Phoenix n’ignore pourtant pas les mélodies poignantes auxquelles la bande semble être restée fidèle. Il gravite autour des synthés magnétiques qui ont fait le succès des versaillais et permet une renaissance à la hauteur des quatre années de spéculations qui ont entouré le projet. Principalement mid-tempo, «Bankrupt !» propose des airs pop-rock et énergiques, soutenus par des arrangements solidement équilibrés. Un disque peu pragmatique à l’exception peut-être de son titre éponyme mais nous ne nous plaindrons pas d’entendre Phoenix faire du Phoenix, surtout si c’est bien fait. Il ne reste plus qu’à écouter ce que cela va donner sur scène...


THE GREAT GATSBY - BANDE ORIGINALE DU FILM (3 Mai) Attendue autant que le film si c’est n’est davantage, la bande originale de «Gastby Le Magnifique» réunit les plus grands noms de la scène musicale actuelle. Sous la direction artistique de Jay-Z, l’album offre une playlist taillée sur mesure pour le film de Baz Lhurmann avec quelques reprises inattendues. On y retrouve notamment le phénomène anglais Emeli Sandé chantant le «Crazy In Love» de Beyoncé, ellemême reprenant «Black To Black» de la regrettée Amy Winehouse en duo avec Andre 3000 du groupe Outkast sur cette compilation qui trouve ses sons les plus up-tempo dans les chansons de Kanye West, Frank Ocean, will.i.am mais aussi de Fergie en featuring avec Q-Tip et GoonRock. Les amateurs de vocalises chaleureuses seront aussi gâtés par des titres inédits de Florence and the Machine, The xx ou encore Lana Del Rey dont le troublant «Young And Beautiful» justifierait à lui seul l’acquisition de ce disque. L’Australie est également à l’honneur avec Gotye et Sia, voix indispensables à toute bande originale qui se respecte.

LITTLE BOOTS - «NOCTURNES» (5 Mai) Quatre ans après l'exceptionnel "Hands" qui est probablement l'un des meilleurs albums pop de la décennie, l'anglaise Victoria Christina Hesketh alias Little Boots revient avec un deuxième opus intitulé "Nocturnes". Avec ce titre clairement relatif à la nuit, cette nouvelle galette rend hommage à la house de années 90, au disco des années 70 et à l'electro futuriste. La chanteuse avait dévoilé les deux premiers singles de ce bijou ("Shake" et "Every Night I Say A Prayer") via des mixtapes parues en Octobre 2011 et Mars 2012 avant de proposer le single "Motorway" en Février 2013 en téléchargement gratuit sur son site officiel et d'annoncer "Borken Record" comme quatrième single en Mars 2013. Un album optimiste, représentatif d'un génie artistique qui s'est fait attendre mais qui a tenu ses promesses d'excellence.

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