Constructions traditionnelles en vendée

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En terre et végétaux constructions traditionnelles de Vendée


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Centre de documentation du patrimoine culturel immatériel EthnoDoc-Arexcpo

En terre et végétaux constructions traditionnelles de Vendée

par

Jean-Pierre BERTRAND Ethnographe

Les Cahiers d’ethnographie n° 2 Éditions Mémoire des Vendéens-Arexcpo et Vendée Patrimoine 2006


Déjà édités dans la collection « Monographie » Mignet Jean, Le Poiré-sur-Vie de 1900 à 1935, Le Poiré-sur-Vie, édition Vendée Patrimoine Mémoire du Canton du Poiré, 1993. Chevolleau Gaston, Aizenay des origines à 1950, Le Poiré-sur-Vie, édition Vendée Patrimoine Mémoire du Canton du Poiré, 2003. Bertrand Jean-Pierre, Saint-Jean-de-Monts et le Pays de Monts de 1890 à 1930, Le Poiré-sur-Vie, éditions Vendée Patrimoine - Mémoire des Vendéens-Arexcpo, 2003.

Études ethnographiques Livres Bertrand Jean-Pierre, Maisons traditionnelles du Marais Breton vendéen, Saint-Jean-de-Monts, éditions Vendée Patrimoine - Mémoire des Vendéens-Arexcpo - Siloë, 1995. Bertrand Jean-Pierre, Pains et gâteaux traditionnels de Vendée, La Roche-sur-Yon, éditions Siloë, 1999. Études ethnographiques dans la collection « Les cahiers d’ethnographie » Bertrand Jean-Pierre, Cahier n° 1, Les modes vestimentaires en Vendée, 1750-1950, Saint-Jeande-Monts, éditions Vendée Patrimoine - Mémoire des Vendéens-Arexcpo - Siloë, 2005.

CD-Roms Mignet Jean, Le moulin à Élise, Le Poiré-sur-Vie, éditions Vendée Patrimoine - Mémoire des Vendéens, 2002. Bertrand Jean-Pierre, La bourrine, une maison traditionnelle du Marais Breton vendéen, animation Bertrand Friconneau, Saint-Jean-de-Monts, éditions Vendée Patrimoine - Mémoire des Vendéens, 2002.

Les Cahiers d’ethnographie représentent une collection qui a l’ambition de tenter de répondre, sommairement certes, à l’intérêt que notre société porte à son histoire, à ses racines, à sa culture, etc. Les initiateurs de cette collection souhaitent que celles et ceux qui s’intéressent à l’un des phénomènes qu’a développé la société vendéenne puissent, par l’intermédiaire de cette collection, partager ce savoir. Faites-vous connaître auprès de Vendée Patrimoine : 02 51 31 82 60 ou EthnoDoc : 02 28 11 42 51 ou 08 75 31 79 06, courriel : arexcpo.envendee@wanadoo.fr, site : www.arexcpo.org


Sommaire

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Habitations primitives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Quelques notes historiques sur la construction en terre et végétaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 Généralités sur le bâti ancien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Les matières premières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 Les techniques de construction en terre et végétaux . . . . . . . . . . . . . . . . 51 Les us et coutumes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Quelques informations pour... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86 voir des constructions rustiques en terre et en végétaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86 entretenir ou restaurer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87 participer à l’enrichissement des connaissances de la Vendée . . . . . . . . . . . . . . 88

Bibliographie, pour en savoir plus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89 Iconographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90 Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91


Quelques termes… La maison (cuisine, chambre, salle à manger...) Exemple d’une unité agro-pastorale au pont des Pajottes, Saint-Jean-de-Monts, en 1943.

La gal’rie (souillarde, buanderie)

La gal’rie de fresti remise, bûcher

Tétt’ à gorett’, porcherie

Dépendance dénommée loge, à Bel-air, Grues, en 1942.

Une loge, côté de l’entrée

Vue de côté : poteau comme montant, perches pour traverses

Croquis de Jean Debarre, architecte, ingénieur des Arts et Manufactures, extraits des enquêtes dirigées par le musée des Arts et Traditions populaires, entre 1942 et 1946.


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Introduction

Maison de terre, du même grain que le socle dont elle surgit, elle fait corps avec les champs, elle fait corps avec les gens. Elle dit l’art de composer avec un lieu, l’art de vivre en symbiose avec son milieu : avec le vent quand on est une bourrine du Marais Nord, longue, basse, tapie au sol dans une épaisse couverture végétale ; avec l’eau quand on est une hutte de marais inondable, hissée sur la levée. Modelage de l’homme sur une nature avec laquelle il collabore sans le brutaliser… un beau message d’humilité à une époque où pour être dans le vent il faut être en rupture. Maison paysanne sans vanité qui répond d’abord à une nécessité et reproduit par imitation, par contagion, le bon modèle, celui qu’à force d’ajustements, d’observations et d’expériences, les hommes ont mis en place au cours des siècles. Discrète et réservée mais sûre d’elle, parce qu’elle a fait ses preuves, elle dit, avec bon sens et bonhomie, la vérité d’un savoir-faire et par delà, d’un savoir-être. Modeste mais toujours digne, elle n’est jamais vulgaire et relève moins d’un inconfort à déplorer que d’un art de vivre à comprendre et à retrouver… Retrouver le peu d’intention et de techniques perdues. Collaborer avec le temps, saisir le passé pour mieux servir l’avenir. Vertu de ces vieilles maisons qui nous obligent à nous cultiver, avec la matière et avec nous-mêmes, qui nous remettent à notre juste place et nous rappellent que, même à l’âge de la technologie avancée, nous sommes d’abord reliés à l’ordre du monde. « Même là où j’aimais avant tout me sentir un continuateur du monde » fait dire Marguerite Yourcenar à un héros des Mémoires d’Hadrien. Difficile de mettre au goût du jour les maisons primitives : l’identité très forte de leur architecture, leur alliance intime avec un petit pays laissent peu de liberté à qui veut les restaurer sans les dénaturer. Comment restaurer sans figer ? Comment transformer sans tuer ? Merci à Jean-Pierre Bertrand de nous donner, avec ce livre, fruit d’une longue expérience d’homme de terroir et peutêtre, plus encore, de son intimité avec un terroir, des clefs pour, entre le pastiche et l’écomusée, retrouver la poésie vivante de choses faites pour durer.

Claudine Schnepf Présidente de Maisons paysannes de France


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Préambule

Un merci tout particulier aux adhérents vendéens de Maisons paysannes de France pour m’avoir incité à rééditer mon travail sur l’architecture traditionnelle de Vendée. Mais le sujet est si vaste que j’ai préféré ne traiter, et encore bien sommairement, que les constructions rustiques pour lesquelles les Vendéens utilisaient la terre comme matériau unique de maçonnerie et les végétaux comme moyen de couverture. Bien entendu, cette limitation n’est pas sans connaître l’existence de ce phénomène bien au-delà de nos terroirs, puisqu’il est universel. Cet intérêt pour cette mémoire du logement de nos aïeux est né dès 1977, lorsque, revenant d’une tournée au Danemark, une poignée de Tap Dou Païe, ayant pris conscience de la valeur patrimoniale que représentait notre architecture rustique, décide de bâtir un projet. En 1979, il est devenu Le Daviaud. De 1980 à 1989, j’ai donc dirigé, avec la collaboration de la Conservation départementale des musées et la restauration et la reconstruction des différents bâtiments, de ce qui est devenu le « Centre de découverte du Marais Breton vendéen », à La Barre-de-Monts. Cette compétence fut également mise au service de la commune de SaintHilaire-de-Riez pour la bourrine du Bois-Juquaud, lors de son rachat et de sa restauration. Si le Marais Breton vendéen est encore riche de ses bourrines et gal’ries, il devient presque impossible de visiter une auge, une loge, une hutte… dans le reste du département 1. Et pourtant, l’observation de clichés anciens nous prouve leur existence, les mémoires presque aussi vieilles que ces images s’en souviennent encore. Sans doute est-il urgent de motiver des amoureux de l’architecture rustique pour que les derniers témoins fournissent assez d’informations pour en reconstruire quelques-unes. Par devoir de mémoire nous devons, faute d’écrits, recueillir les bribes de connaissances véhiculées par l’oralité pour permettre à nos descendants de mieux savoir d’où ils viennent. 1

Olonne-sur-Mer (2005) : une loge (abri à bois) construite dans les années 1950 par Armand Mornet.

Constructions observées depuis 2000 à Champ-Saint-Père, La Boissière-des-Landes et Olonne-sur-Mer, sur des clichés d’avant 1950 à La Guérinière, l’Hermenault, Luçon, Saint-Benoîst-sur-Mer, Saint-Vincent-sur-Jard et Triaize.


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Habitations primitives

Avertissement préalable Le sujet de cet ouvrage étant résolument limité à l’architecture rustique et faisant appel à des matériaux naturels que l’homme emploie pour construire sommairement un abri, nous écartons les autres principes d’habitat tels que les grottes, les souterrains… mais aussi les constructions en minéraux maçonnés et recouverts de tuiles, de pierres plates, d’ardoises… auxquelles nous consacrerons ultérieurement un autre Cahier d’ethnographie. Nous insistons sur le terme « construire sommairement un abri » parce que, depuis déjà fort longtemps, l’homme espère, sa vie durant, habiter une maison, mieux encore, la posséder. Une maison c’est la richesse, le bien-être, l’élévation sociale… Cette espérance a perduré jusqu’à nos proches parents. Quitter la bourrine, la cabane, la loge, la hutte… pour des murs en pierre et une toiture de tuiles ou d’ardoises était ambitionné par toute une catégorie de petites gens, ceux des bords de charrauds, des dunes blanches, des « creux de maison »… Nous ne traiterons dans ce Cahier que des constructions dont l’origine est la cabane ou la hutte et dont l’architecture repose sur l’utilisation de bois comme ossature et moyen d’assemblage, de végétaux comme moyen de couverture.

La cabane serait à l’origine de l’architecture Selon l’architecte Alain Douangmanivanh : « Le mythe de la cabane primitive est cette légende qui permet d’expliquer comme « éternel présent » toute production architecturale. C’est à travers le récit du mythe sans cesse renouvelé du mythe de la maison primitive que se donne la définition de l’architecture. Le théoricien de l’architecture cherchera avant tout à démontrer les rapports qui lient sa théorie au mythe fondateur. À travers cette démonstration s’exprime en fait la position de l’architecte. » Il en est ainsi de Vitruve à Le Corbusier. Toujours du même auteur : « On comprend davantage l’importance du mythe en architecture lorsque l’on perçoit que le mythe de la cabane primitive apporte en fait une réponse aux trois questions permanentes de la construction : celle des ressources, celle des activités et celle du contrôle. » Faisant référence au paragraphe précédent, relevons que Vitruve, il y a déjà plus de deux mille ans, avait la même appréciation : « […] que la construction d’un abri résulte d’une œuvre spécifiquement humaine conditionnée par la maîtrise du feu par les hommes, le rassemblement en société et l’habitat en un même lieu. »


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Nos ancêtres sont représentés dans l’imagerie moderne souvent fort dévêtus, mais possédant un abri fait de branchages et de matériaux de remplissage tels que des peaux, des feuillages, des mottes de terre herbées… cependant peu de dessinateurs prennent le risque du détail tant les sources sont floues sur le sujet.

Les logements rustiques de nos ancêtres Les historiens de l’architecture attribuent à Marcus Vitruvius Pollio (Vitruve) la plus ancienne analyse de la cabane de chaume, cela il y a environ deux mille cents ans. Ce théoricien romain a écrit un traité de dix livres intitulé De architectura. D’autres sources précisent que les Romains entretenaient sur le mont Palatin une cabane de chaume sous le nom de « cabane de Romulus ». Des fouilles effectuées en 1948 ont effectivement confirmé l’existence de cette construction.Mais, il faut rechercher plus anciennement le besoin de se protéger des intempéries, des bêtes sauvages, et peut-être du regard des autres. Selon Gideion : « Il semble que les premiers habitats reconnaissables étaient des dépressions dans le sol en forme d’auge ou de soucoupe. La forme primitive de la hutte était un cercle, forme qui est à la base de tant de symboles préhistoriques. Ainsi, les huttes circulaires ou ovales apparaissent comme le type d’habitat primitif dans le monde entier. La maison de plan rectangulaire, telle que la figure le plus souvent l’architecture mineure, est le résultat final de tentatives les plus variées. » Au XVIIIe siècle, Marc-Antoine Laugier dans son Essai sur l’architecture, aux éditions Duchesne, à Paris, 1755, a décrit sa perception de l’idée qui fit naître la cabane : « Quelques branches abattues dans la forêt sont les matériaux propres à son dessein. Il en choisit quatre des plus fortes qu’il élève perpendiculairement et qu’il dispose en carré. Au-dessus, il en met quatre autres en travers : et sur celles-ci, il en élève qui s’inclinent et qui se réunissent en pointe des deux côtés. Cette espèce de toit est couvert de feuilles assez serrées pour que ni le soleil ni la pluie ne puissent y pénétrer : et voilà l’homme logé. »


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Quelques notes historiques sur la construction en terre et végétaux Des mots d’abord Cabanes, bourrines, huttes, loges, mais aussi cabeurnons, caloges, galeries, mazurias, taètes… autant de mots précis pour certains, sonnant bien français au premier abord, mais ayant une signification différente ou venue de fort loin pour d’autres. Loin d’être exhaustif, ce lexique tient compte d’usages qui sont encore connus par les personnes âgées qui ont bien voulu nous les révéler lors d’entretiens. Les mots nouvellement introduits sont écartés.

Bourrine – Pierre Rézeau 2, linguiste, qui a présenté l’œuvre de Mourain de Soudeval (1800-1879), donne au mot bourrine : chaumière dans le Marais septentrional dont les murs sont en simple terre détrempée durcie sur place et dont le toit est couvert de chaume ou plutôt de rouche. Bourrine vient sans doute de bourré, c’est-à-dire du nom que l’on donne en général à une litière de paille et qui pourrait être appliqué ici au chaume ou à la rouche qui recouvre la toiture. Bourrine peut cependant venir aussi du vieux français buron « petite maison », mot qui dérive du saxon bur « chaumière ». Précisons ici que le mot bourrine ne s’applique qu’à la construction qui abrite des humains. Les autres constructions, les dépendances en quelque sorte, portent des noms correspondant généralement à leur servitude : galerie, cabeurnon, log’ritt’, taète à ouaïlles… même si elles sont construites selon les mêmes techniques. Pour Éloi Guitteny 3, au Pays de Retz, si bourrine « est la maison basse du pays maraîchin », il complète son information en précisant : « Se dit aussi de tout bâtiment en piètre état ». Nous le verrons plus loin, ce mot était aussi usité au-delà du Marais septentrional. Le Petit Robert ignore le mot bourrine.

Cabane – Si « cabane est une maison en mauvais état » pour Louis Gaignet 4, Marais Poitevin, il relève aussi, et cela est paradoxal : « cabane. – Exploitation importante du marais desséché (grande ou petite cabane), de trente ou cent hectares. » Comme pour la hutte de cette région, c’est la survivance du nom d’un mode architectural remplacé par de la maçonnerie « pierre - tuiles » ? Il existait également un type de cabanes dans le Marais Nord vendéen, plus exactement dans les dunes de la Côte de Monts. Les résidants étaient appelés des cabaniers. La construction faite de bois de récupération : échouage, démo2

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Charles Mourain de Sourdeval, Premier dictionnaire du patois de la Vendée, édition présentée par Pierre Rézeau, Centre vendéen des recherches historiques, La Roche-sur-Yon, 2003. Éloi Guitteny, Le vieux langage du Pays de Retz, Siloë, Nantes, 2003. Louis Gaignet, « Lexique patois-français et français-patois », Les mots qui racontent la vie d’autrefois dans le Marais Sud vendéen, Lacour/REDIVIVA, Nîmes, 1997.


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lition, bois abandonnés… était accotée à une dune. La couverture, très sommaire, était constituée d’algues et de végétaux prélevés dans les fossés du proche marais. Le mot cabane existe en 1387 d’après Le Petit Robert qui lui donne pour signification : « petite habitation grossièrement construite ».

Cabeurnon – Il faut sans doute y voir la forme vernaculaire du mot cabanon. Se dit aussi cabornon, cabernott’, cabornett’…

Caloge – « Petite loge que l’on construit pour se mettre à l’abri dans les marais salants. Aussi calorge : trou creusé au bord des marais et dissimulé par des branchages où se loge le chasseur à l’affût », d’après Lydia Gaborit 5. Les mots calogea, calog’ritt’ correspondent à une petite calorge.

Marais de la Sèvre, selon Octave de Rochebrune, vers 1860. Rare exemple d’une hutte du Marais Poitevin.

Chaumère – « L’équivalent en plaine de la hutte ou de la bourrine mais couverte en chaume, c’est-à-dire de paille. La plaine était cultivée en céréales. », d’après Louis Gaignet. Forme dialectale de chaumière, en cela, rien ne détourne le mot chaumère de sa signification en langue française.

Huttes – « En ce qui concernait les véritables huttes de notre marais [Marais du Sud Vendée, NDLR], précise Louis Gaignet 6, elles étaient construites, toit compris, uniquement en panneaux de roseaux. Le nom spécifique est resté même si depuis fort longtemps les premières huttes ont disparu. Même construites en tuiles et pierres, les habitations de notre marais sont restées des huttes… et les habitants et résidants du marais des huttiers. » Si ce mot, d’origine allemande d’après Le Petit Robert et qui apparaît dans la langue française dès le début du XIVe siècle, est donné pour : « abri rudimentaire fait principalement de bois, de terre, de paille », convenons qu’il ne devrait pas apparaître dans les ouvrages relatifs au patois si ce n’est pour qualifier les conditions sociales des occupants. 5 6

Lydia Gaborit, Littératures orales et populaires de l’île de Noirmoutier, thèse de troisième cycle soutenue à la Sorbonne, Paris. Cf. note 1, p. 8.


Quelques notes historiques sur la construction en terre et végétaux

Marais de la Sèvre, selon Octave de Rochebrune, vers 1860. Rare exemple d’une hutte du Marais Poitevin.

Loges – Selon les sources de Louis Bonnaud, de Saint-Hilaire-des-Loges, le mot loge, dans le parler vernaculaire du Sud vendéen, correspond à une catégorie de logements dont celui des hommes de petite condition. Un hameau conservant toujours le nom toponymique de Les loges regroupait les familles démunies. La plupart des hommes se louaient comme tâcherons pour les travaux agricoles et forestiers. Une vache et quelques volailles étaient entretenues par l’épouse.

Hangar appelé localement loge à Chaillé-les-Marais, 1979.

En bordure de la Vendée Nord, au Pays de Retz, selon Éloi Guitteny, le mot loge, qui y est couramment employé, désigne « un hangar ou l’on recueille en fait tout ce qui doit être épargné par les intempéries, hormis l’homme et l’animal. La loge est si simple qu’elle n’a ni porte ni fenêtre. L’ossature de la loge est constituée par quatre poteaux

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d’environ 2 mètres placés à chaque angle du rectangle… Pour couvrir la charpente et définir la couverture, le constructeur utilise de la paille de blé. » Nous reviendrons plus en détail sur ce type de construction dans le chapitre consacré aux techniques. Les mots logea, log’ritt’, logère… correspondent à des petites loges. Toutefois, Lars-Owe Svenson 7, dans Les parlers du Marais vendéen, limite le mot loja à « une maison malsaine, sans air, ni lumière, taudis. » Signalé en 1138, le mot loge correspond à : « Abri de branchages, de feuillages », dans Le Petit Robert. Gal’ries – Noté galri par Lars-Owe Svenson, le mot correspond, dans le Marais Nord vendéen, selon cet auteur et nos informateurs à : « hangar, remise aux voitures, charrettes, outils, etc. ». Les galeries de cette région faites de piliers de pierre ou de poteaux de bois supportant une charpente, mais sans mur, bénéficient de la description du Petit Robert qui donne ce mot comme étant issu du latin médiéval, existant en 1316. Taètes – Forme dialectale de toit, caractérise une sorte de petite construction qui, souvent, ne s’applique qu’aux abris d’animaux : taète aux poules, taète aux ouailles...

La bourrine existait déjà au

XIV

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siècle

À ce jour, si des recherches pour connaître l’histoire des constructions rustiques ont été engagées dans le Nord-ouest vendéen, à notre connaissance, ce type de travaux n’a pas encore été entrepris dans le reste du département. Mais nous nous suffirons des quelques notes relatées ci-dessous, prouvant, s’il le fallait, de l’ancienneté de ce type de construction en Vendée. Rappelons que ce type d’architecture était le plus répandu en Gaule, qu’il l’est encore durant tout le Moyen Âge, que son déclin ne s’amorcera qu’au lendemain de la Révolution française. La Vendée, excepté pour les zones marécageuses, connaîtra cette même évolution. De très rares documents du XIVe siècle font apparaître des noms qui nous permettent d’attester la présence de bourrines à cette époque-là. Elles sont certainement plus anciennes, voire préhistoriques, mais leur forme, les matériaux employés, leur présence antérieure au XIXe siècle, nous sont inconnus. La bourrine, et quelques rares loges dans le Marais Poitevin telles qu’elles se présentent à nos yeux, sont vraisemblablement la survivance de types primitifs d’architecture. Une bourrine dans les marais de Longeville, Vendée, d’après Octave de Rochebrune.

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Lors-Owe Svenson, Les parlers du Marais vendéen, Romanica Gothoburgensia, Göteborg, 1959.


Quelques notes historiques sur la construction en terre et végétaux

Quelques dates et lieux En 1354, au Château-d’Olonne : « affermons a Geoffroy Syon, demeurant au Chastea d’Olonne et es siens une maison borrine et ung appentiz teublin tenans et appartenans a lad. Maison, o ses ruages, cayruages davant et darrere et le cortil tenant à lad. Maison, lesquelles choses sont assises en la ville du Chastea d’Olonne. », selon les archives historiques du Poitou (AHP6, 235). En 1388, à Saint-Jean-de-Monts et à Notre-Dame-de-Monts 8 : « Le 22 mars 1388, en particulier, le prieur d’Olonne, frère André de Léonard, baillait et affermait à Katherine Audossarde de Guéyrin, femme de feu Pierrot Gabin et à Nicolas Gabin, fils dudict deffunct, une maison rouchère (ou rouchine) et son fons (fontaine), cayreux, cortil, jart (grand abreuvoir) ruage et appartenance quelconque... et, tous les héritages et domaines dépendant de la dite maison, soit prés, terres arables et non arables... le tout sis dans le fief du prieur de Sallerteyne, en la paroisse de Saint-Jean et Nostre-Dame-de-Mont pour le prix de 4 livres, payables en chaque feste de Saint-Michel Archange en cymentière de l’église de Nostre-Dame-de-Rié, à l’heure de tierce... » En 1395, à Saint-Jean-de-Monts 9, le « 26e jour du moys de mai 1395, en particulier, le prieur d’Olonne, au religieux homme et honeste frère Jean Dujon, une maison bourryne, sise paroisse de Saint-Jehan de Monts, et ses appartenances de ruage, cayruage, vergers, cortillages et le jart tenant au dit cayruage... ; trois journaux de prés : la Loyre à la Regnaude, deux journaux : le Tréchange, tenant aux Banchis et à la Bochère ; deux journaux à la Griffaignelle, quatre journaux tenant à l’Abbé Blanche de Noirmoutier; le tout situé dans le fief du prieur de Sallerteyne et affermé pour le prix et la somme de cent sols, en deniers, et d’un jallon de beurre et de six fromages, d’annuelle et perpétuelle rente, payables en la feste de Toussaint... » Ce dernier ensemble immobilier est important par sa surface et nous amène à croire qu’à cette époque il s’agissait d’une exploitation type. Ceci laisserait supposer qu’au Moyen Âge et au moins durant toute la Renaissance, voire sans doute au XVIIe siècle, la bourrine fut l’unique habitat des paysans et artisans du Nord-ouest bas-poitevin et sans doute celui de tous les habitants des marais. En 1603, à Noirmoutier-en-l’île, des « maisons bourrynes » sont signalées aux villages du Vieil et de l’Herbaudière. « Une maison basse bâtie de terre » en 1736, « maison couverte à bourre, de pailles et de rouches » en 1734, sont mentionnées dans la Déclaration du terrier de Noirmoutier. En prenant exemple sur la situation de Saint-Jean-de-Monts à la fin du XVIIIe siècle où demeurent 3 680 habitants, 720 maisons sont recensées, mais n’apparaissent que 91 maisons sur un plan dressé par Masse d’après un relevé ancien du Dr Julien Rousseau 10. Si on y rajoute les constructions dont nous avons la certitude de l’existence, soit une soixantaine en acceptant quelques oublis, un calcul simple fait apparaître qu’environ 500 maisons pourraient être des bourrines.

Ce croquis extrait de À l’ombre des châteaux forts représente l’aménagement spatial au Moyen Âge. On notera l’absence de maisons recouvertes de tuiles ou autre matériau minéral.

Bulletins paroissiaux de Notre-Dame-de-Monts. Cf. note 7, p. 14. 10 Dr Julien Rousseau, À travers le Marais Breton vendéen, Saint-Cénéré, édition Saint-Michel, 1968. 8 9

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Bourrines, huttes ou loges : où se situaient-elles ? Anciennement, pas dans les marais proprement dits puisque ceux-ci étaient en cours de formation et sujets à des recouvrements fréquents par les eaux de l’océan ou des bassins versants des massifs anciens. On peut avancer qu’au fur et à mesure d’assèchements durables, les colonisateurs installaient des hommes vraisemblablement pour protéger d’autres convoitises, les terrains nouvellement conquis. Limitons-nous à un exemple qui vaut vraisemblablement pour l’ensemble des marais de Vendée : selon les descendants Artus, de la Grande Blanchère, à Notre-Dame-de-Monts, leurs aïeux auraient été installés par les « poldérisateurs », qui étaient hollandais, sur l’îlot calcaire que représente aujourd’hui l’exploitation. Les Artus, comme leur nom le laisse croire, seraient eux-mêmes des émigrés néerlandais. Cela se serait passé au début du XVIIe siècle. Bassompierre, en avril 1622, en Bas-Poitou aux côtés de Louis XIII, décrit la région entre Challans et Saint-Hilairede-Riez, via le Perrier « comme formée de grands marécages, lesquels, en basse mer, sont secs, hormis les canaux où passent les eaux et, en haute mer, sont inondés, hormis plusieurs mottes où il y a des maisons bâties en quelques unes et les autres servent à retenir le bétail jusqu’à ce que le flux soit retiré... ». Confirmant ces situations, la lecture des cartes de Masse ou de Cassini, fin XVIIIe siècle, nous rappelle l’occupation des buttes par les colons dans les marais, les défricheurs dans le bocage et la plaine. Les grandes exploitations y sont implantées. Il faut donc chercher les endroits d’aucun intérêt agricole pour y trouver les logements des petites gens, ceux qui habitaient des huttes, des loges, des mazurias, ou des bourrines. Si l’on se réfère aux études du Dr Julien Rousseau, nous pouvons conforter ces appréciations pour le Marais Breton vendéen : « les étiers étaient-ils plus nombreux et plus larges et l’écoulement des eaux encore plus défectueux alors, puisque certaines cartes anciennes indiquent des quartiers de marais constamment inondés, mais, dans l’ensemble, le marais était ce qu’il est de nos jours... (1968) ». Ceci laisse supposer que les sites habitables sont occupés par des constructions en pierres prélevées sur place ; les bords d’étiers sont mouvants, les charrauds quasi inexistants donc inhabitables. Tout laisse à penser que les petites gens sont regroupées le long des dunes, en des sites fréquemment recouverts par les sables mouvants, là où les cultures sont difficiles, là où le terrain ne vaut rien, là où, à peu de distance, se trouvent l’argile et le sable, matériaux de base de ces constructions. Nous savons aussi que la dune était habitée par des indigents appelés cabaniers, donc résidant dans des cabanes. Nous sommes tentés de proposer le peuplement du Marais Breton durant le XIXe siècle par les habitants des bourrines, installation amplifiée avec le repli des cabaniers chassés des dunes. Restons-en aux hypothèses.

Si l’on compare l’extrait de la carte de Cassini, XVIIIe, à gauche, avec celle IGN, au XVIIIe, on relève l’absence d’habitations à proximité de La Grande Cheminée. À droite, la présence de bourrines au début du XXe siècle qui sont signalées par o sur la carte IGN. Signalons une particularité dans le Marais Poitevin. Il y avait des huttes réparties autour des communaux qui étaient propriétés seigneuriales jusqu’à la Révolution. Pas moins d’une trentaine de logements bordait chacun d’entre eux. Les huttiers étaient vachers. Malheureusement, aucune description précise avant 1900 ne nous est parvenue sur les caractéristiques de ce type d’architecture, si ce ne sont les gravures d’Octave de Rochebrune réalisées vers 1860. Mais nous doutons de leur fiabilité.


Quelques notes historiques sur la construction en terre et végétaux

Jusqu’à la Révolution, pour les zones de bocage et de plaine, les habitants des « creux d’maison » comme ceux des marais ne sont pas propriétaires du sol qu’ils occupent, pas plus, généralement, du logement qui les abrite. Le seigneur dont ils dépendent met à disposition le bâti et le lopin de terre dont ils ont la charge d’entretien. Les changements de propriétaires qui suivent la période révolutionnaire ne modifient pas cette situation. Il faut attendre la moitié du XIXe siècle pour que s’opèrent les premières transactions qui permettront aux exploitants d’acquérir leur logement et les terres qui l’environnent. Il en est de même pour ceux de petite condition, mais plus tardivement. Si l’on reste dans la catégorie architecturale traitée dans cet ouvrage, la construction d’un logement relève donc de la complaisance du propriétaire foncier. L’usage en cours fixe les principes : les matériaux de construction sont prélevés sur place, sans incidence financière pour les parties. À charge pour le futur occupant d’assumer seul la construction. Celui-ci doit accepter cette charge sachant que les matériaux ainsi prélevés restent le bien du propriétaire foncier et qu’il ne pourra réclamer aucune contrepartie s’il venait à quitter son logement.

Bourrine de la rive de Notre-Dame-de-Monts, vers 1890. Une pièce pour le logement de l’occupant et des dépendances pour une vache, son élève et quelques rustiques outils.

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Marcel MĂŠchain, bourrineur Ă Orouet, Saint-Jean-de-Monts, sa mule et son chargement de roseaux, 1986.


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Généralités sur le bâti ancien

L’économie des petites gens Nous l’avons vu, l’habitat rustique s’est installé en des lieux économiquement peu rentables. Les logements ne sont entourés que du strict nécessaire pour y stocker les combustibles et souvent d’un petit potager. Aucune terre cultivable n’est directement attachée à la propriété. Les seuls pâturages presque libres sont les bordures des chemins et des routes. La catégorie sociale qui y réside survit grâce au travail fourni à d’autres par les hommes, souvent aussi par les enfants, et selon leurs compétences reconnues : bonne laveuse, lingère, cuisinière, etc. par les femmes. Très peu d’argent entre dans le foyer, c’est plutôt le principe d’échange et de troc. Cela vaut pour des salaires en blé, de différentes céréales, rarement en viande, pour le travail des hommes, au nourrissage et des vêtements pour les enfants. Les femmes sont également nourries lors des tâches assurées. Quelque menu argent complète les gains. Les ressources du foyer s’appuient donc essentiellement sur l’autoproduction : jardinage, cueillette, braconnage, élevage de volailles, de caprins et d’ovins selon les possibilités d’approvisionnement de nourriture et, pour une bonne partie des petites gens, sur l’élevage d’une vache et de son élève. Les ventes d’animaux pour subvenir aux gros besoins pour l’entretien des bâtiments, la vente des surplus de beurre et de volaille pour les besoins domestiques devaient s’équilibrer. Ainsi, le peu d’importance de l’économie agricole directe a conditionné le nombre et la surface des bâtiments. Une maison, une grange-étable, quelques toits et abris suffisaient.

Coiffée de sa cabanière, Alexandrine Grasset près d’une loge, à la Taillée, vers 1950. La vaiselle est à sécher.


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La distribution dans l’espace La distribution spatiale des bâtiments était irrégulière même si elle s’articulait généralement autour du logis. Pour l’implantation de la grange-étable, trois facteurs déterminants étaient recherchés par les éleveurs : la surélévation contre l’humidité, la recherche de l’eau pour les animaux et la lumière. Les autres constructions s’élevaient là où le terrain s’y prêtait le mieux, au plus proche des stocks alimentaires, là où l’on faisait l’économie de matériaux en s’adossant à une construction plus ancienne. La promiscuité avec les animaux n’était pas prise en compte, pourtant on évitait les relations directes. Généralement, la distribution du bâti formait une cour ou se faisait autour. En principe, cette cour était entretenue. Elle pouvait aussi être l’aire de battage. Les murs d’enclos protégeant et délimitant ces cours ou la propriété étaient inexistants dans les marais et sur les rives, rares dans le bocage. Les clôtures étaient naturellement assurées par des fossés dans les marais, des talus ou bouchaïes sur les rives, des buissons dans le bocage.

Les îlots dans les marais ne dépassent souvent que de quelques centimètres le niveau général. Le bâtisseur construit sur les parties les plus élevées sa maison, puis la grange-étable, puis le grenier qui possède souvent un plancher, puis les gal’ries, les tétt’s... Ici, à Soullans en 1937, le marais blanc, ou inondé.

Généralités sur la distribution spatiale Qu’elles soient bourrines, huttes, loges, chaumères, mazurias, toutes sont du type maison-bloc. La base est un volume construit pour répondre aux besoins de logement d’une famille servant à la fois pour la cuisine, les repas, les activités domestiques et le couchage. Généralement, une seule ferme soutenait la toiture. Parfois, par pauvreté extrême, le volume était réduit afin d’éviter un entrait qui nécessitait des pièces de bois importantes et les compétences d’un charpentier. Alors, deux pannes et une panne faîtière supportaient chevrons, lattis et couverture. D’autres volumes bâtis pouvaient compléter le logement en s’appuyant à l’un des pignons. En général, s’il y avait lieu, la grange-étable s’y adossait du côté ouest ou sud-ouest, la buanderie, le four à pain, le poulailler, le pondoir s’y établissaient à l’est, nord-est. Comme pour les constructions en pierre, l’architecture rustique se distingue par ses rajouts successifs répondant à de nouvelles fonctions. Nous ne décrirons pas ici tout ce qui concerne les caractéristiques liées à l’habitat et son confort puisque nous reproduirions les informations fournies pour l’architecture en pierre. S’y reporter page suivante.


Généralités sur le bâti ancien

De gauche à droite : le tett’ à poules, derrière une gal’rie, puis la grange-étable, puis la belle chambre, puis la t’chusine, puis la boulangerie et le four, à Saint-Jean-de-Monts, dans les années 1920.

L’endroit où on loge, où on habite C’était la première construction d’un site. L’unique pièce permettait d’abriter la famille, plutôt restreinte chez les petites gens. Cette pièce était l’épicentre de toutes les activités domestiques mais aussi, lors des veillées, des menus travaux pratiques : vannerie, petite menuiserie, fabrication et réparation des outils, etc. On y cuisinait, cuisait, mangeait, dormait, engendrait... on y faisait ses ablutions, s’y reposait, bricolait, raccommodait... accueillait les visiteurs, discutait et prenait les décisions. On y mettait les enfants au monde, on y veillait ses morts... La surface au sol permettait d’y installer le mobilier et les ustensiles nécessaires pour les services énumérés au paragraphe précédent et de répondre au confort des déplacements qu’ils réclamaient. Deux portes, placées en face l’une de l’autre sur chacune des façades, permettaient l’accès au logement. L’une d’elles était laissée ouverte pour signifier la présence mais surtout, selon le vent, pour assurer le bon tirage de la cheminée. Dans l’île de Noirmoutier, plus particulièrement à la Guérinière, cette orientation revêtait une certaine importance lors de l’implantation d’un logement : la porte principale était appelée Porte du sud, l’autre Porte du nord, selon François Ganacheau 11. Une fenêtre, dont les dimensions variaient selon les moyens financiers, donnait la lumière à cette pièce. Elle était percée dans la façade la mieux exposée au soleil. En général, la table ou la maie (utilisée comme table) était installée sous cette source de lumière. Le foyer occupait le tiers de la largeur de l’un des pignons, celui situé au nord généralement. Le vent dominant poussait la fumée hors du toit. De chaque côté, un lit occupait l’espace. Des bancs de bois ou de maçonnerie et des coffres servaient de sièges et de marches pour accéder aux lits. D’autres coffres pouvaient être placés à leurs pieds. 11

Notice sur l’intérêt architectural de l’île de Noirmoutier pour servir à l’étude de constructions nouvelles, bulletin de l’association des Amis de Noirmoutier.

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Ci-dessus, distribution du mobilier d’après les indications, en 1994 de M. Chartier, à La Barre-de-Monts, croquis d’Isabelle Milcent, cabinet Monts-Toit, à Saint-Jeande-Monts À droite, plan de la pièce commune de la bourrine de M. Naullet, au pont des Pajottes, à Saint-Jean-de-Monts, en 1943, relevé par Jean Debarre. 1.2 - porcherie 1.3 - maison 1.3.1 - âtre 1.3.2 - lit 1.3.3 - table 1.3.4 - armoire 1.4 - buanderie-débarras

La belle table, s’il y en avait une, était perpendiculaire au pignon et placée dans l’alignement du foyer. Les meubles de rangement occupaient le pignon opposé. Si la surface au sol le permettait et selon les besoins, ces meubles formaient une cloison. Deux, voire trois autres lits étaient installés. Cette description est très générale mais elle est la base de tous les ameublements.

En 1993, l’intérieur de la pièce commune de la bourrine du Bois-Juquaud, à Saint-Hilaire-de-Riez, devenue antenne de l’écomusée de la Vendée. Les deux lits encadrent l’âtre qui, de chaque côté, est bordé de bancs de terre : les poérons. À gauche, de forme ovale, une petite excavation appelée boae pour y mettre les chandelles de résine à sécher et, plus récemment, y ranger les bougies et la boîte d’allumettes.


Généralités sur le bâti ancien

Selon les moyens, une seconde pièce de logement pouvait être construite, souvent ultérieurement. Cet agrandissement permettait l’installation de deux lits, voire plus. Cette pièce était dénommée la belle chambre. Une fenêtre fournissait la lumière puisqu’une seule porte pleine, souvent fermée, donnait accès au dehors et l’autre communiquait avec la pièce commune. Une cheminée très rarement utilisée séparait les deux lits. Les moins riches se contentaient d’un agrandissement qui se traduisait par la construction d’une seconde pièce partagée entre le couchage et l’activité de boulangerie. La pièce commune, dotée dès l’origine de la construction d’une seconde pièce pour le couchage, était très rare.

Rajouts et dépendances Nous nous sommes permis de différencier les constructions et pièces annexes indépendantes de celles rattachées au logement. Nous ne traiterons dans ce chapitre que des rajouts réalisés à partir de la maison-bloc. L’autre principe sera traité plus loin. Ce choix est animé par la volonté de rendre pratique l’observation première de l’architecture traditionnelle telle qu’elle nous apparaît aujourd’hui, c’est-à-dire le logement et ses appendices, style wagon, auxquels s’appuient souvent des appentis. Cette situation est valable tant pour l’architecture en pierre que pour celle en terre, plus encore pour celle qui mixe les deux. Dans la majorité des cas, l’ensemble de ces rajouts a été bâti dans le prolongement du logement. La fermette tant convoitée comme résidence secondaire était généralement une borderie : exploitation agricole sans animal de trait et sans matériel aratoire nécessitant une traction animale. D’autres servitudes existaient, telles la buanderie et la souillarde. Mais cette situation est trop rare pour qu’elle entre dans le cadre de cette étude.

Ce cliché des années 1910 est un bon exemple de rajouts. La grange-étable, bien qu’elle soit dissimulée par la belle chambre reconnaissable à son volet et à une toiture qui semble en bon état, est dans son prolongement avec, à proximité, son pailler et la meule de foin. La brouette est située devant la t’chusine ou pièce commune. Dans le même prolongement, reconnaissable à sa toiture plus basse, la boulangerie, puis s’y appuyant, une gal’rie. Au premier, une autre gal’rie, ou tett’, sans doute le joukritt’. Tout contre, on aperçoit un tas de bouses séchées. Au fond, à gauche, le puits. Devant la bourrine, l’aire à battre semble bien entretenue.

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La grange-étable est plutôt implantée côté ouest. Elle abrite une vache et son élève sur une sorte de pavage appelé pierri. Au poteau de soutènement de l’assemblage de la croupe est fixé le barri, traverse à laquelle on attache les animaux. Une porte permet l’accès aux bovins, une lucarne, la boëte, permet le rejet de la litière souillée vers l’extérieur. L’autre partie est réservée au stockage du fourrage du jour. Les outils de culture y sont également rangés. Une porte donne accès vers l’extérieur, très rarement vers le logement. À proximité se serrent le tas de fumier, le pailler et la meule de foin. Traditionnellement, les grangesétables n’étaient occupées que durant les mois d’hiver, exceptionnellement durant la belle saison pour assurer des soins particuliers à des animaux malades ou à des vaches lors du vêlage.

Préparation du pierri, dans l’étable du Daviaud, à l’écomusée. La Barre-de-Monts, 1987.

Bien que dernièrement recouverte de tôles ondulées, cette bourrine, sise à La Barre-de-Monts, conserve toutes les caractéristiques de la petite exploitation agricole. Au premier plan, le pignon de la grange-étable et la porte d’accès des bovins, sur la façade, celle des hommes. Un poteau de soutènement de la panne faîtière a été installé pour soulager le mur qui semble menacé d’éboulement. On notera, au fond à droite, une gal’rie de construction des années 1950 dont les parois sont faites de planches délignées.


Généralités sur le bâti ancien

Sur cette carte postale datant des années 1920, le cul du four et son toit sommaire, à Fromentine, quartier de La Barre-de-Monts.

Le four, pour cette catégorie sociale, est de construction relativement récente, sans doute à partir de la moitié du e XIX siècle. Dans tous les cas, il n’existe que depuis l’abrogation des droits seigneuriaux sur les fours banaux, à la fin du XVIIIe siècle. N’oublions pas que ces petites gens ne peuvent produire des céréales, ou si peu. Ils ne détiennent que ce qu’ils gagnent en se louant. Si l’on prend en compte également la part prélevée du meunier, les quantités panifiables sont nulles. Le pain se mendie pour beaucoup, il est cuit chez un voisin mieux doté pour les autres. Force est de constater aujourd’hui que la plupart des constructions rustiques sont, ou étaient, complétées d’un four, aussi préciserons-nous que celui-ci est adossé au pignon le plus au nord, sans doute pour bénéficier des rayons du soleil levant. La gueule donne dans l’âtre de la pièce commune, ou dans une pièce appelée boulangerie. Ce petit appendice est toujours recouvert d’une charpente sommaire et d’une toiture de végétaux. La boulangerie, si elle permettait la fonction pour laquelle elle avait été construite, servait aussi souvent de chambre et de grenier. Dans ce cas, un lit, voire deux, étaient installés de part et d’autre d’un meuble en bois appelé grenère ou arche. Deux portes servaient l’accès à cette pièce mais surtout permettaient de réguler les appels d’air pour le bon fonctionnement de la cheminée, donc du four. Le nid des poules pouvait être aménagé contre la sole du four, côté nord, ou être indépendant. Les nids, eux-mêmes, étaient construits en terre. Dans le Marais Breton, deux pondoirs se superposaient : l’un pour les poules, celui de dessus, l’autre pour les canes, en dessous. Une seule porte toujours pleine, mais dotée d’une trappe au ras du sol pour le franchissement des volailles, servait cette petite dépendance qui n’excédait jamais plus de deux Nids de poules et, en dessous, nids de cannes, au Daviaud, à La Barre-de-Monts. mètres carrés.

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L’intérieur du jourkrit’, bourrine du Bois-Juquaud. Saint-Hilaire-de-Riez, 1993.

Le toit des poules pouvait aussi être aménagé dans un coin d’une gal’rie ou de la grange, ou représentait une construction spécifique. Le taèt à poules, ou joukritt’, lorsqu’il était flanqué contre la paroi d’une construction l’était du côté sud. Des échelles et clayonnages pour perchoirs occupaient tout l’espace. Une porte pleine donnait l’accès. Le sol était toujours en terre battue. Il n’y avait pas de bassecour, les volailles étaient laissées libres de picorer partout, même hors de la propriété. Le nid de canes, qui peut être accoté contre un mur ou flanqué au bord même d’un fossé est à considérer comme forme d’architecture qui rappelle les huttes primitives. Installés sur des cerceaux faits de branches, les roseaux sont fixés à l’aide de liens de foin, appelés trolles ou liaïes.

Les deux principes représentés à l’écomusée du Daviaud, à La Barre-de-Monts, ne sont plus exploités en Vendée. Ils sont l’œuvre de Maurice Bodin, de Notre-Dame-de-Monts, qui les a construits selon les méthodes traditionnelles. Le savoir-faire est donc menacé. En haut, les nids sont réalisés avec des roseaux (phragmite) récoltés en milieu d’eau douce ; en bas, avec du pavao, suboe ou rouche ronde (scripus maritime). Les liens sont faits de foin choisi pour leur longueur.


Généralités sur le bâti ancien

Les dépendances indépendantes Les gal’ries, loges, auges… Pour la facilité de lecture, nous n’utiliserons que le mot gal’rie même à la place d’auge, loge, tét’, etc., parce que ce terme est encore le plus répandu pour nommer la plupart des constructions faites de poteaux supportant une charpente, même sommaire, et dont les parois peuvent être constituées de panneaux mobiles, fixes ou sans remplissage. Restant dans le sujet de la terre et des végétaux comme matériaux de base, nous distinguerons trois sortes de gal’ries : celles avec des piliers en bois, celles avec des piliers en maçonnerie, celles avec murs maçonnés. Nous avons relevé maintes fois pour ces deux derniers types de bâtiments que l’ancienne couverture de végétaux avait été remplacée par des tuiles. Ces trois types de gal’ries étaient utilisés sur l’ensemble de la Vendée, bien que disparus prématurément dans le Haut-Bocage. Elles ont fonction de hangars ou de remises. Cette destination conditionne leur importance. Toutes celles retenues pour cette étude ont été couvertes de végétaux, aujourd’hui, beaucoup le sont de tôles ondulées. La gal’rie était le hangar pour abriter le matériel aratoire et les moyens des transports agricoles. Pour l’abri du véhicule hippomobile, une autre gal’rie lui était construite. Certaines d’entre elles abritaient des servitudes multiples. Sortes de reproductions de la gal’rie à une échelle moindre, ne mesurant pas plus de 1,50 mètre de haut, des petites gal’ries dénommées en parler maraîchin : cabernon, cabornon ou cabornett’, log’rit’, ailleurs logea, té… assuraient l’abri des petits animaux : moutons, chèvres, lapins, dindons, pintades... La gal’rie avec des piliers en bois, sans doute de concept plus ancien, très commun, de toutes dimensions, en plusieurs exemplaires dans toutes les exploitations, était vraiment la remise pour tous les services. Elle était souvent construite pour répondre à de nouveaux besoins, avec des matériaux de récupération ou de simples branchages. Elle est toujours couverte en végétaux et les parois étaient constituées de fagots de roseaux ou de brandes fixés sur une armature en branchage. Certaines comportaient une porte.

Une gal’rie, à la Parée du Jonc, à Saint-Jean-de-Monts, 1962. Rails de chemin de fer pour poteaux, crôutes de sciage pour traverses et roseau pour le remplissage des parois et la toiture.

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Loges et téts du Sud vendéen

Vers 1920, plusieurs loges, à La Tranche-sur-Mer.

La scène n’a pu être localisée mais date des années 1970.

Champagné-les-Marais. 1979.


Généralités sur le bâti ancien

Autres loges et téts du Bocage vendéen

Ossature d’une loge. Réaumur, 1901.

Bœufs devant un tét à la Goichonnière, au Poiré-sur-Vie, vers 1910.

Une loge, à La Caillère-Saint-Hilaire, au Vraud, vers 1900.

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La gal’rie avec des piliers en maçonnerie Ce type n’existe que dans les exploitations dont les bâtiments sont en pierre. Les piliers peuvent être de section cylindrique ou carrée. Généralement, un mur ferme le pignon supportant la croupe avec parfois des retours sur les côtés. Couramment, entre les piliers, on installait des pierres sèches, des planches ou des végétaux fixés sur des traverses.

La gal’rie de la Basse-Épine, en Orouet. Saint-Jean-de-Monts, 1962. On peut voir sa réplique à l’écomusée du Daviaud, à La Barre-de-Monts. Ce type de bâtiment était courant dans les fermes et les métairies du Marais Breton vendéen.

La gal’rie de murs maçonnés, soient uniquement de terre, soient de pierres ou de parpaings, dont on retrouve leur présence ou leur trace dans presque toutes les exploitations, est la plus courante aujourd’hui, parce que la plus solide. Dans la plupart des cas, elles sont maçonnées en terre et recouvertes de végétaux. Trois murs porteurs sans ouvertures supportent une charpente constituée d’un entrait et souvent d’une croupe. Un arbre courbé, équarri sommairement, sert d’entrait. L’unique ouverture prévue dans le pignon peut être fermée par un portail plein ou fait de végétaux. Le sol est en terre battue. Quelques-unes sont élevées en pierres maçonnées : c’est rare.

La gal’rie du Daviaud, reconstruite en 1983, selon les informations des derniers habitants, est recouverte de scirpt maritime.


Généralités sur le bâti ancien

Les tés ou tétt’s, auges Le toit à cochons. Toutes les familles rurales vendéennes, sauf les plus indigentes, élevaient un, voire deux porcs par an. Les grandes exploitations dépassaient largement ces chiffres. Les pourceaux étaient achetés aux foires à des commerçants s’approvisionnant en Normandie. L’élevage se limitait à la consommation familiale. Les souques à gorett’s étaient prolongées d’une courette entourée d’une murette.

Le lieu de ce cliché, à partir d’une plaque de verre des années 1900, est situé à Saint-Gervais, près de Beauvoir-sur-Mer. Il reflète une situation courante qui alliait la maçonnerie de pierre à celle de la bauge.

La bergerie est aujourd’hui un bâtiment rare à observer puisqu’il n’était déjà pas courant dans les exploitations moyennes, inexistant dans les « petites maisons ». Les moutons étaient souvent élevés au piquet. C’étaient des animaux rustiques et peu fragiles. Leur nombre était limité. Un té ou tett’, ou un cabernon, pour les grands froids de l’hiver, était réquisitionné pour les mettre à l’abri.

Rare témoignage d’une bergerie : celle qui existait au Daviaud, à La Barre-de-Monts. Selon les informations révélées par son constructeur, Francis Artus, de la Grande Cheminée, elle fut construite à son retour d’incorporation en Algérie.

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Le stockage des combustibles. Pour les fagots et les bûches, bien que rarement en excédent, il pouvait être assuré sur l’aire en mouches (tas de fagots) ou en buch’liers mais, pour les bouses sèches, les bousats ou les crotats, une construction sommaire était réservée à leur protection contre les intempéries. Appelées bousatère, ou gal’rie aux bousats, dans le Marais Breton, tét ou loge aux bouses, dans le Marais Poitevin, ces réserves étaient soit constituées d’une charpente avec couverture et cloisons généralement de végétaux, soit de panneaux de végétaux posés directement sur le tas de combustible. Exemple d’un bousatère, au Daviaud, La Barre-de-Monts, 1995. Les parois sont en roseau (phragmite), la couverture de paille de fèves est maintenue par un ensemble de liens de foin torsadé, des trolles.

Tout le long du littoral vendéen, là où des forêts de résineux fournissent des aiguilles de pins maritimes, le fruit du ramassage, bien qu’interdit mais toléré pour les indigents, était stocké dans les mêmes conditions que la bouse sèche.

La laiterie était une petite pièce n’excédant pas 2 mètres carrés. Une porte pleine donnant du côté opposé aux rayons chauffants du soleil et une lucarne faite de deux tuiles étaient les deux seules baies. La laiterie avait un sol en terre battue. Un muret intérieur servait d’étagère. Cette pièce était le domaine des femmes. Elles y transformaient les produits laitiers et y entreposaient leurs ustensiles.

La laiterie de la bourrine du Bois-Juquaud, Saint-Hilaire-de-Riez, 1991. Elle a été reconstruite selon les conseils des derniers usagers.

Ce rajout est certainement récent. Il peut être daté de la fin du XIXe siècle, voire du début du XXe. Auparavant, cette activité était réalisée dans la pièce commune : l’obtention de la crème du lait était accélérée par réchauffement sous le foyer, le sous-âtre ; le fornéa, dans le Marais ; la cornère, en l’île de Noirmoutier. Le barattage était fait manuellement. Des meubles appelés laiteries, installés dans le logement, permettaient d’y ranger les accessoires liés à cette activité. Dans le secteur de Beauvoir-sur-Mer et Bouin, pour la Vendée, et de Bourgneuf-en-Retz, pour la Loire-Atlantique, ces meubles étaient omniprésents. La pièce dite laiterie n’y existait donc pas. Cette construction correspondait à l’acquisition d’une écrémeuse. Elle pouvait être accolée au four et adossée au pignon du logement et ne comportait qu’un versant.


Généralités sur le bâti ancien

La cave, jusqu’à une période récente, était inexistante pour les petites gens. Son ajout, dans tous les cas, est lié à l’arrivée de la production de vin. Nous ne nous étendrons pas sur cette servitude plutôt rare dans les marais et sans particularité dans la région bocagère. Si elle existait, la seule baie était la porte d’accès qui était orientée vers le nord ou l’est. Le sol était en terre battue. Mentionnons un phénomène récent avec l’apparition de caves aux murs maçonnés mais dont la couverture est faite d’une épaisse couche de végétaux. Les amateurs de vin connaissent les vertus isolantes des fagots de roseaux ou autres végétaux et en profitent. Cette énumération n’est pas exhaustive. D’autres constructions comme les salorges, les calorges, les cabanes de pêcheurs, de sauniers, de gabelous... méritent d’être mentionnées. Nous nous limiterons à ne les montrer qu’en photos puisque rien ne les diffère des types déjà présentés sur le plan technique de la construction. Seuls les volumes et fonctions qui leur sont attribués définissent leurs dimensions. Cabane d’un gabelou vers 1900, dans les marais d’Olonne-sur-Mer.

À gauche, le monticule enherbé du premier plan est la cabane semi-enterrée du saunier André Raffin, l’île d’Olonne, 2004. Charpente de bois recouverte de terre argileuse en guise de toit.

Nous l’avons vu, chacun de ces volumes pouvait faire corps avec le logis ou en être indépendant. Avec l’avènement du tourisme, bon nombre des rajouts ont été utilisés pour améliorer le confort sanitaire et ont même parfois été transformés en logements temporaires. Dans les années 1950-1970, on a pu constater que des résidants louaient leur logement et se repliaient sur ces nouveaux aménagements, dans leurs anciens tét’s ou gal’ries !

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Une loge à Talmont-Saint-Hilaire, vers 1970. Cette dépendance agricole représentait l’ancienne technique de la construction en végétaux. Elle est considérée comme un archétype pouvant représenter les savoirs de la charpente en vigueur à la Renaissance, voire au Moyen Âge.


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Les matières premières

On le comprendra aisément, les matériaux, globalement, ne doivent rien coûter en numéraire aux candidats à la construction. La société rurale n’est pas avare de son temps et de sa sueur. Elle connaît de génération en génération chaque recoin de son paysage. Elle sait cueillir, récolter, prélever, emprunter… juste ce dont elle a besoin, et encore le fait-elle avec précaution, ménagement… toujours inquiète des lendemains. Les us et coutumes locaux qui fixent depuis pratiquement le Moyen Âge les règles de prélèvement des biens qu’offre la nature sont encore de mise. Dans tous les cas, les habitudes prises perdurent. Que ce soit pour le bois et les végétaux, le principe est le même : par moitié pour les deux intéressés, propriétaire et utilisateur. Développée dans le chapitre « Les us et coutumes », une autre règle fixe le principe du prélèvement de la terre de construction, comme celui de la pierre de maçonnerie. Les matériaux restent l’unique bien du propriétaire foncier. S’il a fourni le bois de charpente, le même principe s’applique. Le partant ne peut donc vendre sa charpente que dans le cas où il a engagé la dépense préalable.

Le bois Les bois locaux En principe, le bois sur pied appartenait au propriétaire du terrain. Depuis fort longtemps, les seigneurs se partageaient le territoire. Chacun possédait des terres cultivables, mais aussi des bois, des chaumes et des marécages où poussent les végétaux recherchés pour les couvertures. À la Révolution, pour une partie d’entre eux, les biens changèrent de mains pour devenir la propriété de bourgeois, de notables, de riches commerçants… très rarement de paysans. Seuls les us et coutumes en vigueur traversèrent la période révolutionnaire sans modification notoire. Même à partir du milieu du XIXe siècle, avec la vente de fermes aux exploitants agricoles, les principes sont maintenus. Le métayage, comme son étymologie le laisse croire, fonctionnait selon les mêmes règles, et cela jusqu’à une époque relativement récente. Aussi, lors de l’abattage d’un arbre, le fût revenait au propriétaire foncier, les grosses branches comme les branchages étaient « faits à moitié ». Une part pour le propriétaire, une part pour celui qui découpait et mettait en fagots. Dans tous les cas, on portait une grande attention au bois qui procurait de substantielles ressources, tant financières directes par la vente, qu’économiquement comme moyen de troc et d’échange.


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Comme pour la pierre, le propriétaire devait fournir le bois nécessaire à la réalisation de la charpente au candidat bâtisseur sur l’une de ses propriétés. Il s’approvisionnait dans ses propriétés et le faisait acheminer vers le chantier. Selon les milieux, le bois était plus ou moins présent. Si le bocage en était riche, ce n’était pas le cas pour les marais, le littoral et la plaine, pas plus que dans les territoires de rive. Les vents marins empêchaient cette exploitation. Les défrichages entrepris par les moines dès le Moyen Âge n’y ont pas laissé de forêts dignes de ce nom. Ce ne sont pas les quelques grands feuillus autour de sites anciens ou de propriétés de notables qui peuvent répondre aux besoins.

Bel exemple de charpente construite avec des branches de pible pour les grosses pièces, de jeunes pousses de pins maritimes pour les chevrons et les liteaux. Reconstruction de la bourrine à Chartier, au Daviaud, La Barre-de-Monts, 1986.

Dans le Marais Breton vendéen, puisque le foncier appartenait pour une bonne partie à des propriétaires nantais depuis plusieurs siècles, les pièces principales de bois de charpente étaient importées du bocage ou par mer du port de Nantes. Elles provenaient des bois qu’ils possédaient dans la région nantaise et dans le bocage du Nord vendéen. Cette nécessité de matière première a contraint les Maraîchins à planter quelques arbres près de leurs bâtiments. Sur les rives et le champ bocager, ce fut la même situation. Ces plantations devaient répondre à plusieurs besoins : celui de la protection du vent, des rayons ardents du soleil, de la fourniture de bois de charpente et de chauffage. Pour cette dernière fonction, les arbres étaient étêtés. Les vents dominants donnaient naturellement la courbe au tronc dont on profitait pour profiler les entraits. Selon des informations orales, lorsqu’un enfant naissait, on plantait un arbre pour lui fournir l’entrait du foyer espéré. Peu d’essences étaient entretenues. Nous avons relevé, pour le fût qui forme l’entrait, la présence de pibles ou peupliers argentés torses et d’ormes dans le Marais Breton vendéen et sur ses rives, auxquels il convient d’ajouter, en zone bocagère, le chêne et le frêne pour les plus communs.


Les matières premières

Entrait de la gal’rie en pible, Les Fournées à Saint-Jean-de-Monts, 1987.

Dans les marais du Sud Vendée, le peuplier de marais, surtout le pible ner cyprès, dit pointu d’Italie, était le plus utilisé. Le frêne et le chêne que l’on arrachait pour gagner près de cinquante centimètres fournissaient la pèce ou poutre. Pour les chevrons et les pannes, on utilisait de grosses branches des mêmes essences auxquelles pouvaient s’ajouter de l’aubier, de l’ormeau… D’autres essences existaient mais elles n’étaient qu’occasionnellement utilisées en charpente (chênes verts, acacias, fruitiers...). Dans le Bocage on retrouve les mêmes caractéristiques qu’ailleurs pour le bois des maisons. Pour le logement des animaux, les tés, on utilisait des perches de châtaignier de douze, quinze voire vingt ans d’âge pour les poteaux et la charpente. « Quand fallait un nouveau té, pour pas agacer le propriétaire, on prenait des pieds de vieux châtaigniers de 15 à 20 centimètres de diamètre pour les poteaux. D’autres moins gros pour les pannes. Avec le reste, on faisait les chevrons et les tasseaux. De mon temps, on couvrait déjà avec de la tôle. Les parois, c’était pareil, de la tôle », se souvient Ernest Baty, de Saint-Hilaire-de-Voust, né en 1923. Le pin maritime, aujourd’hui si présent, n’a été planté qu’à partir de 1848 pour maintenir les dunes. Son abattage était et reste toujours protégé. Les indigents pouvaient obtenir des bons de prélèvements fournis par les mairies, mais cela ne concernait que l’enlèvement de bois mort. Lors d’éclaircissement de nouveaux boisements, les jeunes pousses écartées étaient cédées comme bois de charpente. Cette activité ne remonte pas au-delà de la fin XIXe.

Le bois de récupération Il y avait des chênes et des châtaigniers provenant des grandes forêts bretonnes et angevines importés pour les logis et les maisons de maîtres. Lors de la démolition de ce type de construction, le bois était mis à la disposition des fermiers ou des métayers pour des réemplois. Ces derniers pratiquaient de la même façon lorsque des modifications étaient apportées à leur bâtiment. Ainsi, il nous a été donné la possibilité de voir dans des maisons de terre des

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entraits, des poinçons et des arbalétriers portant de fines ciselures et des sculptures d’origine ancienne. On utilisait rarement le sapin, bois du Nord, importé d’Europe septentrionale, ou bien de même origine que les bois nobles mentionnés précédemment.

Triage de la cargaison de bois de sciage provenant du cargo norvégien Martha qui échoua à la pointe du Pont-d’Yeu, Notre-Dame-de-Monts, 1905.

Le bois d’échouage était recherché. Il s’agit de cargaisons de bois de sciage, de mâts et de vergues, de bordages de bateaux naufragés... portés sur l’estran par les flots. Plusieurs charpentes de la Vendée du littoral maritime en sont constituées. Le chêne, le frêne, le pin maritime et surtout le pitchpin sont les essences reconnues. Le commerce de bois d’échouage est attesté depuis fort longtemps. Pour l’exemple, reportons-nous à un extrait du registre des comptes (daté de 1759) du négociant en bois noirmoutrin Corneil Gislain Jacobsen 12 : « perte de planches causée par le naufrage du bateau norvégien La Concorde en provenance de Christiania. » Comme nous le verrons plus loin, les bois de charpente se vendaient d’occasion lorsque la construction était abandonnée. Aujourd’hui, très peu de charpentes anciennes présentent un assemblage homogène. Plus qu’ailleurs, chez les petites gens, le réemploi de bois de charpente est banal. Cette habitude est très ancienne. Pour preuve cet extrait d’un procès-verbal 13 de visite d’une maison à l’Épine, en l’île de Noirmoutier, datant de 1715 : « Bastye de meschantes pierres avecq une mainze (mince) cherpante compossée de meschants tirrans (entraits) aucunnement garny (sans poinçon), pour fillière (faîtage) d’une vieille esquille de charrette, les chevrons, de bouts de tenant et d’esclys de vieux bordages ; tandis que le voligeage est partiellement constitué de douelles de baricque... ».

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Éric Coutureau et Hubert Maheux, Yeu et Noirmoutier, îles de Vendée, éditions de l’Inventaire, Nantes, 1994. Cf. note 11, p. 21.


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Le charpentier L’artisan charpentier était aussi menuisier, ébéniste, parfois scieur de long, souvent croque-mort... Mais pour la catégorie de bâtiments à laquelle s’intéresse cette étude, son intervention se limitait, dans le meilleur des cas, à l’équarrissage de l’entrait, parfois à la fabrication de la ferme. Cette ferme était posée par le bâtisseur lui-même, comme le reste de la charpente. Le professionnel était souvent demandé pour la production des menuiseries de la pièce commune, forcément pour celles de la belle chambre.

La terre Rappelons sommairement les techniques d’exploitation de la terre pour la construction. Pour un mur mixte : - la terre-paille : paille avec un coulis de terre, mise en œuvre dans un coffrage, non porteur ; - le torchis : terre humide mêlée à de la paille et appliquée dans et sur une ossature en bois. Pour un mur appareillé : - l’adobe (cairon) : briques crues moulées, non compactées et séchées au soleil ; - la brique compressée : (bloc) de terre moulée, damée et compressée par une presse ; - le carreau : brique crue moulée légèrement compactée ; - la motte de gazon : bloc de terre engazonnée découpée à la bêche. En parler local, se dit une laêche. Les murs monolithiques : - la banche-coulée : terre à l’état liquide coulée dans un coffrage ; - la bauge : mélange de terre et de paille monté sans coffrage formant un mur porteur ; - le béton de terre stabilisé (BTS, géobéton) : se dit d’un apport de liant dans la terre à pisé ; - le façonnage direct (atakwa) : variante africaine de la bauge ; - le pisé : se dit d’un mur monolithique de terre damée dans un coffrage.

Deux étapes du séchage de la bauge : argile du marais et sable, au Daviaud, 1986. Du scirpe maritime a été introduit lors du pétrissage du mélange.

En Vendée, nous n’avons connaissance que de l’emploi de la motte de gazon pour une construction rapide, du torchis dans le Bocage et de la bauge, assimilable à la technique dénommée dans le Marais Breton vendéen, à bigots.

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Le matériau terre pour la construction Curieusement, les auteurs vendéens semblent ne pas avoir porté grand intérêt aux matériaux utilisés pour les constructions rustiques, si ce n’est à la charpente et au chaume de la couverture. Cela nous prive de sources qui auraient permis une publication plus précise. Sans doute cela peut s’expliquer par le fait que l’on prélevait naturellement sur place la terre nécessaire à une construction. C’est ce que confirme Louis Barbarit, des Herbiers : « Pour construire une auge, on prenait de l’argile, la même que pour faire des tuiles. Il y avait des lieux comme ça, que les gens connaissaient. Sans doute qu’autrefois les maisons des malheureux étaient faites pareil. Chez nous, autrefois, au Grand Bignon, il y avait du bousiage entre les chevrons. C’était du vieux foin que l’on tressait avec de la terre glaise. C’était solide. On avait du carrelage comme plancher au-dessus. Ça faisait de la poussière à la fin. » Les mots bousiage et torchis sont employés dans le Bocage. Nous-mêmes avons constaté cette technique dans une maison ancienne à Beaurepaire. Mais nous étions loin d’une maison rustique. Fasse que cette lacune soit comblée. La technique employée dans cette région mériterait quelques égards mais il semblerait que les sources deviennent rares car recherchées trop tard sans doute.

Terre avec de la chaume comme assise des tuiles sur un lattis de roseaux, à La Taillée, 2001.

Louis Gaignet, déjà cité, parle également de torchis pour la construction des huttes du marais du Sud Vendée. Voici ses propos : « Le torchis était autre chose : un mélange de terre argileuse ou de fumier détrempé et mêlé à de la paille ou à de courtes pailles. Séché, cet amalgame formait des panneaux plus rigides que les panneaux de roseaux. On en montait ce qui pouvait être considéré comme des murs des taudis ou masures de la plaine et recouverts ensuite de paille et de seigle, quand cela était possible : d’où le nom de chaumière. »

Les observations menées sur quelques pans de murs souvent en ruine laissent croire à une généralisation de la technique de la bauge. Même si les terres argileuses employées représentent des caractéristiques géologiques sensiblement différentes, l’apport de végétaux est omniprésent dans les échantillons étudiés. Nous nous limiterons donc à la description de notre terrain de prédilection : le Marais Breton vendéen.

Récupération de la terre d’une bourrine de Notre-Dame-de-Monts et de celle qui existait sur place pour la construction de la gal’rie du Daviaud, La Barre-de-Monts, dans les années 1980.


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La terre argileuse était prélevée des bossis, renflements constitués de terre récupérée lors d’anciens curages de fossés. C’était un mélange d’argile, de décomposition de végétaux et de terre lavée par les ruissellements successifs. En tout cas, on évitait le vif, la terre fraîche du fond des fossés qui comportait des risques d’évolution ingérables dus à sa richesse organique. Cette argile trop collante aux outils n’était utilisée que pour le faîtage. Sur le promontoire que forme la presqu’île de Beauvoir-sur-Mer et selon l’étude de Gilles Perraudeau 14 : « l’argile extraite du marais était mélangée à de la terre ». À Bois-de-Cené, « sous la couche arable épaisse d’une dizaine de centimètres au maximum se trouve une terre gris-bleu dont la structure est compacte et imperméable. Cette terre grise était impropre à la culture ; d’ailleurs les labours ne devaient pas l’atteindre. Elle constituait cependant un excellent matériau de construction en raison de ses propriétés : son imperméabilité et sa dureté quand elle séchait et se rétractait. Elle n’enfondait pas après, disaient les Maraîchins : elle n’était pas pénétrée par l’humidité... ».

Le betane, argile et sable, prélevé sur du sol des zones « tampon » entre la dune et le marais, donne une couleur plus grisâtre. Ici, préparation de bigots (boules de terre) à la bourrine du Bois-Juquaud, Saint-Hilaire-de-Riez, 2002.

Selon le milieu géologique, les proportions des ingrédients pour la construction des murs variaient. Généralement, sur toute la frange littorale, à un volume d’argile on mélangeait trois volumes de sable de dune ; plus loin, dans le Marais proprement dit, un volume de terre était mélangé à deux volumes de sable. Mais, et cela était préféré dans bien des cas, les bâtisseurs récupéraient les matériaux d’une bourrine effondrée, tant la bauge que les pièces de charpente. Les végétaux de la toiture étaient réemployés pour la fabrication des bigots.

Lorsque le site d’implantation d’une bourrine était décidé, l’emplacement de la future construction était bêché dès l’automne à la fraïe, pelle étroite. Ce choix se portait par principe sur un endroit très légèrement surélevé : un bossis. Cette terre était la première employée. Ce labour avait deux fonctions : le pourrissement des herbes et l’aération de la terre. Les pluies fréquentes à cette saison entamaient le détrempage. 14

Gilles Perraudeau, Les bourrines du marais Nord vendéen, Séquences, 1988.

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La bourrine de François Dupont, Notre-Dame-de-Monts, vers 1980.

Au cours de l’hiver, tout en brassant et mouillant la terre, on formait une couronne qui était arrosée régulièrement si les conditions climatiques ne répondaient pas aux espérances. C’était le détrempis. « Dès la fin de l’hiver, se souvient Francitt’ (François) Dupont 15, on faisait une grande couronne tout près de la future construction. Autour, on préparait une rigole et, comme aux quatre points cardinaux, on creusait quatre bassins. Un autre bassin était aménagé près du fossé. De là partait une petite tranchée qui amenait l’eau jusque dans les quatre bassins. On remplissait le premier avec une essainse. L’eau était à portée de main et puis, avec la rigole autour, on perdait pas d’eau. Avec des boguettes ou mouillettes, sortes de pelles en bois formées de hauts bords, on arrosait le tas de terre. C’est à ce moment-là que le sable était jeté dessus la foulaïe... Il fallait aller le chercher à la rive. » « À t’chou moument-là, tot l’sabe que l’vent emportaitt’ d’sus les jardranes bedon les paraïes, fallaitt’ l’enl’vère. Le monde peur s’en débarassère vous l’dounnaite. Et pi ou l’avaitt’ dou carrières de sabe, mais là ou fallaitt’ payère... Peur bé mélangère t’chou sabe avec la terre, y fesiant passère d’ssus un bourriquett’ bedon in ch’vaô, chez les grous, dou beïes. Y disiant qu y fesiant en rondère... » Ce pétrissage se faisait quasiment tous les jours, jusqu’à ce que le mélange soit collant ; « devait bien se tenir. Ou devait coller à la fraïe... », précise Monsieur Joseph Bodin 16 de Notre-Dame-de-Monts. La plupart des indigents réalisaient ce malaxage, le poétri, à la pelle et le foulaient aux pieds. Ceux qui pouvaient proposer leurs services en échange bénéficiaient de la mise à disposition d’une paire de bovins. Ceux-ci étaient préférés aux chevaux qui n’appréciaient pas ce piétinement dans la boue. Les femmes étaient chargées du retournement du mélange avec une sorte de fourche en bois dénommée graïe. Le bois était préféré à l’acier parce que la matière ne s’y accrochait pas. Cette action était appelée le détrempis. Vers 1950, les demi-barriques, les baillettes, remplaçaient les bassins et l’approvisionnement en eau se pratiquait avec des seaux. Au début du printemps, les gelées passées, la veille du jour fixé pour le début des travaux de construction, on malaxait toute la journée le matériau qui devait être tout en patt (très mou). C’était la pétrure ou foulaïe. Ensuite, seulement, on engageait la maçonnerie. 15 16

François Dupont, Le Sumion, à Notre-Dame-de-Monts, archives sonores, Arexcpo, 1983 Joseph Bodin, La Grande-Croix, Notre-Dame-de-Monts, archives sonores, Arexcpo, 1983


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Le sable Dans le Bocage ou la Plaine, le choix du matériau de construction se portait sur des terres naturellement dosées en argile et en sable de diverses origines. Dans le Marais, l’argile devait être associée à du sable. Dans les marais d’Olonne, de la Gachère et tout le Marais Breton, pays de Retz compris, on trouvait ce sable dans les dunes du littoral. Ces prélèvements n’étaient pas libres. Là encore, il fallait l’autorisation du propriétaire. Nous avons étudié la situation à Saint-Jean-de-Monts, sans doute vaut-elle pour les autres communes. Les parées, enclos aménagés dans les dunes grises, étaient la propriété de petites gens à l’origine. Seules les dunes gérées depuis le milieu du XIXe siècle par les Eaux et Forêts et les terrains communaux permettaient ce prélèvement particulièrement contrôlé. Des autorisations devaient être obtenues. Le cas du quartier dénommé Bethléem est intéressant à ce titre puisque, après avoir été une carrière de sable communale, il est devenu un site où ont été admis à se loger des indigents. Ils y construisaient leurs bourrines qu’ils ont dû quitter lors du réaménagement pour la construction du collège, dans les années 1960.

Bel exemple d’échantillons de matériaux pour cette bourrine de Saint-Jean-de-Monts, vers 1910. Roseaux pour les toits et les parois du tett’ au premier plan, puis maçonnerie de galets de côte maçonnés à la terre. Enduits de terre chaulé.

La pierre La situation n’est pas différente pour le prélèvement de la pierre entre la maçonnerie des artisans et celle des bricoleurs. Rappelons toutefois que le choix d’implantation d’une maison et de ses dépendances était souvent conditionné par la possibilité de prélever sur place les matériaux de maçonnerie. « Les masures de ceux des creux d’maisons étaient faites de pierres dépareillées, de ce qu’ils avaient sur place mais aussi provenant d’années de ramassage de droite et d’gauche, de récupération quoi… et maçonnées avec de la glaise détrempée. Y avait pas de ciment, bien sûr », a constaté Ernest Baty, de Saint-Hilaire-de-Voust. Notons toutefois l’emploi de galets ramassés sur les plages. Cette possibilité était réglementée et une autorisation devait être obtenue auprès du service de l’Équipement : Extraction sur le rivage de la mer, circulaire du 20 novembre 1906. Lors des grandes marées, garde-côtes et gardes champêtres devaient être vigilants.

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Sous l’œil du garde-côte, les charrettes remontent les galets, au Pont-d’Yeu, Notre-Dame-de-Monts, vers 1910.

Les végétaux de couverture et des parois Tout peut être utilisé pour couvrir, serions-nous tentés d’avancer. Mais les qualités recherchées : étanchéité, isolation, longévité, légèreté, et surtout gratuité, sont des facteurs qui écartent une bonne partie de ce que la nature nous offre. Le chaume : tige des céréales, partie de la tige qui reste après la moisson. La paille de seigle était préférée. Le foin : herbes sélectionnées et fauchées pour la longueur de leur tige. Le jonc : rouche en langage vernaculaire, vit en eau douce. La massette : ou typha, noue, rouche (dans le bocage) ou quenouille, dans le langage vernaculaire vendéen, est prélevée en eau douce. Le roseau commun : (phragmite) est le plus utilisé sur l’ensemble du territoire en eau douce. Le scirpe maritime : suboe, pavoe, rouche ronde, pousse dans les marais subsaumâtres.

Le chaume était réservé pour la couverture dès la récolte. Les gerbes étaient faites avec précaution pour ne pas briser les tiges, tout comme le battage qui n’exposait que les épis qui étaient présentés au dépiqueur lorsque celui-ci existait (première forme de battage mécanique, vers 1850), ou qui étaient frappés par poignées sur le ventre d’une barrique, ou séparés de la tige puis soumis aux fléaux. On l’a compris, il fallait beaucoup de temps pour préparer les poignées qui étaient fixées à la charpente. Pour des couvertures sommaires, la paille résultant du battage était simplement déposée sur la charpente formant une couche épaisse.

Le foin. La paille de blé n’entrant que très rarement dans la maçonnerie, nous complétons cette description par la présence de foin. En principe, la terre des murs était liée avec les déchets des végétaux que l’on avait préparé en bottes ou en fagots. Dans le cas d’une reconstruction, les végétaux de l’ancienne couverture étaient ainsi recyclés. Le foin, pour le nourrissage des animaux, était employé pour la construction de la hotte et de la souche de la cheminée. Il était réputé moins combustible que la paille.


Les matières premières

Le jonc était récolté en pleine croissance, de juillet à septembre. On formait des gerbes qui étaient entreposées en tas que l’on appelait des mules. Par précaution pour l’esthétique (conservation de la couleur), les tiges destinées à former la parure, sorte de lattis, étaient rangées à l’abri du soleil et des intempéries. La massette, typha était coupée avant les pluies d’automne. On en faisait des gerbes. Son utilisation pour la couverture est connue dans toute la Vendée. Le roseau commun donnait lieu à une véritable industrie. Il y avait des spécialistes de cette récolte et de cette commercialisation. Des terres basses étaient entretenues pour cette fourniture, elles étaient appelées roselières. La coupe annuelle favorisait la qualité des tiges qui devaient être longues et bien droites. La fauche se faisait après les gelées afin que les feuilles sèches et le plumet soient réduits presque naturellement. Les roseaux étaient mis en fagots, souvent entreposés en piles, ou mules. Durant l’hiver, les utilisateurs débarrassaient les tiges des feuilles et en formaient des fagots prêts à l’emploi. Depuis les années 1970, le roseau utilisé par les couvreurs professionnels est importé de la Brière et de Camargue. Ce dernier est préféré. Le scirpe maritime était récolté par fauchage dans des rouchères, généralement d’anciens marais salants entretenus pour cette fourniture. La récolte se faisait à partir de septembre, lorsque l’eau stagnante était évaporée pour faciliter l’accès et avant les pluies qui détrempaient le fond argileux de ces dénivellations.

Fixation d’un lien de terre sur l’ossature de la hotte d’une cheminée de la bourrine à Chartier, par Maurice Bodin, au Daviaud de La Barre-de-Monts, 1986.

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Hier : suboe, noue, qu’noille, rouche, rouséa…

Coupe et tri de roseaux. Saint-Jean-de-Monts, vers 1930.

Récolte du scirpe maritime dans une rouchère. La Barre-de-Monts, vers 1930.

Chargement de bottes de roseaux. Chaillé-les-Marais, vers 1939.


Les matières premières

Aujourd’hui : massette, typha, phragmite, scirpe, jonc…

Coupe de scirpe maritime pour le Daviaud, 1984.

Récolte de roseau pour la bourrine du Bois-Jucquaud. Saint-Hilaire-de-Riez, 1999.

Stockage de roseau pour lattis. La Taillée, 2001.

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Les lattis Les logements destinés aux hommes sont en général propres malgré la rusticité des matériaux environnants. Chaque résidant portera une attention particulière aux techniques utilisées pour la confection du plafond. Il doit être facile d’entretien bien sûr, mais, surtout, devra empêcher les infiltrations de déchets que produit l’épaisse couche de végétaux qui en font la couverture. Aussi, différentes techniques ont été employées pour préparer des sortes de tapis posés directement sur les lattes. Nous n’avons relevé qu’une seule fois un témoignage relatant un nattage fait d’épaisses rifles de bois, sortes de fines lamelles de peuplier 17. Ce principe est donc rare.

Plafond natté de la bourrine à Marie Magnian. Orouet, Saint-Jean-de-monts, 1984.

La pose directe des roseaux bien débarrassés de leurs feuilles était plutôt rare dans la pièce commune mais l’unique moyen pour les dépendances habitées, comme la boulangerie ou la laiterie. Des joncs nettoyés de leurs feuilles desséchées étaient comme tissés. Permettons-nous une comparaison avec le textile : la chaîne est constituée des tiges de jonc, la trame de fils de lin passés avec une aiguille à travers les tiges. Les extrémités de ce tapis étaient tranchées en tenant compte de la distance entre les points de jointement sur les lattes. Le nattage fait de roseaux aplatis était le plus apprécié. Nous nous sommes souvent interrogés sur la provenance de ce produit. Selon les botanistes, cette variété de roseau ne pouvait exister dans la région étudiée. La reconstitution de la tige présente un végétal dont la texture nous est inconnue. Nous avons tenté d’émettre une hypothèse. Peut-être qu’un chercheur ou un érudit confirmera ou démentira ces réflexions. Nous pensons qu’il s’agit d’un matériau provenant d’emballages. Diverses gravures représentant les quais des bords de Loire, à Nantes, montrent d’énormes balles de coton emballées dans une matière dont les caractéristiques visuelles nous rappellent l’apparence des nattes de certaines toitures. Il nous a été donné la possibilité de constater de visu, dans une maison cubaine et dans une distillerie à La Réunion, le même type de nattage. Nous le savons, depuis la Révolution française, la plupart des propriétés immobilières maraîchines appartenaient à des commerçants, industriels et bourgeois nantais. Selon les usages, le propriétaire devait fournir à son locataire les matériaux de construction. Là s’arrête notre réflexion. 17

Léon Pineau, Saint-Jean-de-Monts, enquête Jean Debarre, 1943.


Les matières premières

Les courtines Préalablement, rendons hommage à la Société d’histoire de Saint-Jean-de-Boiseau 18 qui a fait un travail remarquable sur le sujet. L’ensemble de nos informations a été puisé dans leurs travaux. La production de courtines est attestée au XVIIe siècle à Saint-Jean-de-Boiseau. La légende attribue la naissance de cette production à un marin qui l’aurait découverte lors d’un voyage et, à la retraite, aurait travaillé la technique pour lui-même, puis pour ses voisins. Les armateurs nantais s’intéressaient à cette production pour l’emballage de marchandises à bord des navires et comme nattes de protection des biens et meubles. Nous pouvons rapprocher cette information du phénomène développé précédemment. Avant l’effondrement total de cette production, au milieu du XIXe siècle, les estimations avancent quelque soixante-dix à quatre-vingt mille paquets de six nattes, courtines, fournies annuellement aux armateurs. Cette industrie fut rentable. La fabrication des courtines ne nécessitait pas une maind’œuvre qualifiée, ni de force physique, pas plus de matériel et d’outils manufacturés. Aussi, des enfants aux vieillards, tous les membres d’une famille étaient recrutés durant les veillées. Même si une part revenait aux propriétaires des roselières où étaient récoltés les roseaux, la matière première ne coûtait que la sueur, la fatigue et le temps des faucheurs et des botteleurs. Au temps de cette industrie, les roseaux étaient réellement cultivés. La plantation s’effectuait lorsque le niveau de l’eau des marécages des bordures de Loire était au plus bas. La pousse s’étalait entre trois à cinq années. Jugés de taille adulte, les roseaux étaient récoltés après les fenaisons car le niveau de l’eau était au plus bas. La coupe était assurée par des faucheurs qui coupaient à l’aide d’une faucille spéciale. Ils fauchaient au plus près du sol, de l’eau à mi-jambes. Les poignées flottaient puis étaient rassemblées par d’autres travailleurs qui les hissaient sur les berges et les mettaient en bottes. Elles étaient entreposées en grands cônes d’environ 3 mètres de hauteur.

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Site Internet : www.boiseau.free.fr

Roseaux destinés à la production de courtines, Saint-Jean-de-Boiseau (44).

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La fabrication de courtines commençait avec la sélection des meilleurs brins. Les autres étaient recyclés pour la couverture de bâtiments, les déchets comme litière. Les feuilles et résidus étaient entreposés dans la rue provoquant une certaine insalubrité, causant même une épidémie de choléra en 1854. Obier était le verbe qui désignait cette fonction à la charge des enfants.

2 1 1 - Fendre le roseau 2 - Ouvrir le roseau 3 - Aplatir le roseau

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Une fois les roseaux obiés, ils étaient fendus sur toute leur longueur avec un fendoue, lame d’acier emmanchée. Puis, à l’aide du pouzier, tube métallique, les tiges étaient ouvertes et débarrassées de leur duvet. La tige était aplanie à l’aide d’un maillet. Les lamelles ainsi obtenues devaient être encore assouplies pour être aptes à leur emploi. Pour cela, elles étaient disposées à même le sol, côte à côte, et les Le fandoue enfants qui y prenaient plaisir, sautaient et dansaient en sabots sur le tapis provisoire : ils torpaient. Courtiner était réservé aux femmes. C’était une tâche pénible parce qu’assurée accroupi. Il s’agissait, à partir de trois tiges de roseau aplaties, de les croiser alternativement pour en former la natte. Le tressage terminé, les bords étaient égalisés par retournement des bouts des tiges. La natte mise à sécher prenait une belle teinte dorée.

De nos jours, un club dénommé Les courtines. Ses membres sont attachés à cette gestuelle et entretiennent le savoir-faire de leurs aïeux.Saint-Jean-de-Boiseau (44).


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Les techniques de construction en terre et végétaux

Des mots d’abord Nous devons nous contenter, malheureusement pour l’histoire vendéenne, de la description de la construction de la bourrine, faute d’étude précise sur les techniques de maçonnerie des loges, auges, huttes, etc. Mais, nous l’avons évoqué plusieurs fois dans ces pages, il semblerait que le torchis et le pisé, mots connus des informateurs sans réelle définition de leur part, aient été employés en Vendée. Si nous convenons des origines étymologiques du mot bourrine, nous compléterons cette approche avec l’action de bourrer : introduire la bourre, remplir complètement en tassant... Cette notion est bien connue des Maraîchins qui prélevaient leurs besoins en végétaux le long des cours d’eau tout proches et les disposaient sur une charpente sommaire ; ils les y maintenaient par la pose de branchages liés aux bois de dessous. Cette technique était celle des cabaniers qui s’adossaient à une butte de sable, y enfonçaient des pièces de bois récupérées au bord de l’océan et garnissaient cette ossature de végétaux récoltés sur place ou dans les marais. Elle a perduré avec les garlattes dans les marais saumâtres de La Barre-de-Monts et de Beauvoir-sur-Mer, là où les vents dominants ne sont pas freinés par de la végétation. Dérivant de burra, citée au XIIIe siècle. Bourrine : construction couverte en végétaux ; bourre : fagot de végétaux destinés à la couverture ; bourraïe : fibre végétale ; bourrinour ou bourrineur : couvreur avec des végétaux ; bourriner : couvrir en végétaux ; bourrinage : action de couvrir, la toiture d’une bourrine ; bourrinon ou bourrinou : petite bourrine. Le mot ne s’applique qu’aux constructions couvertes en végétaux. La matière des murs n’entre pas dans cette appellation puisque l’on disait bigoter, pour maçonner à bigots, lorsque les murs étaient élevés en terre crue.

La maçoune à bigots En principe, la maçonnerie était entreprise au printemps pour profiter de la chaleur estivale ou après les travaux de récolte d’été, souvent après la Saint-Michel, jour d’aboutissement et début des baux. Le chantier d’élévation des murs devait être terminé et la terre séchée avant les premières gelées. Un mur gelé devenait friable et devait être repris. Les prévisions s’appuyaient donc sur ces contraintes.


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Le jour de la maçonnerie, tous les proches étaient réquisitionnés dès le lever du jour. Pas moins de cinq travailleurs étaient nécessaires pour mener à bien le chantier. Trois hommes formaient les bigots, un les distribuait aux deux autres qui montaient le mur.

Préparation de bigots, au Daviaud, 1981.

Le bigot était une motte de terre d’environ 3 kilogrammes prélevée de la foulaïe et associée à des brins de végétaux (scirpe, paille, aiguilles de pin...). Pour le confectionner, on déposait la motte de bauge sur un lit de paille ou de rouche et, à l’aide d’une fourche à trois doigts appelée fourche à bigoter, on triturait terre et brins jusqu’à l’obtention d’un mélange parfait. La paille était préférée. Mais dans bien des cas, l’absence de terrains cultivables ne permettait pas cet emploi. D’autres conservaient la paille pour la litière. Les indigents se repliaient sur la rouche. Le foin était réservé à la construction de la hotte de cheminée. Contrairement à la paille, il ne brûlait pas. Selon Gilles Perraudeau 19 : « À proximité des pinèdes de Monts, on utilisait également des ajoncs, des aiguilles de pin, des grainettes, comme l’appelaient les Maraîchins ». Remarquons que la pratique de l’apport de grainette ne peut être que relativement récent puisque les premiers plants de pins n’ont été piqués qu’à partir de 1848. Les fondations n’existaient pas. Une première couche de bigots était déposée dans une rigole ou sur le terrain constructible que l’on avait préalablement pelé. Cette première pose sur le pourtour de la future assise permettait de constater et modifier, s’il le fallait, les dimensions de la maison, le positionnement de l’entrait et l’emplacement des baies.

Des débris de tuiles accéléraient le séchage et favorisaient l’accroche de l’enduit. Mur au Daviaud, 1995.

Un mur avait pour épaisseur 60 centimètres environ. Trois bigots bien liés étaient nécessaires. L’élévation commençait alors. Le chantier débutait à la hauteur d’une porte. Déposés en quinconce pour éviter les ruptures (parfois fixés entre eux par des fines chevilles de bois à Bois-de-Cené 20), les bigots étaient liés à l’aide de la fourche à bigoter. Le bord tranchant des doigts d’acier permettait au maçon de couper les brins qui débordaient. Selon la fonction de la construction, le mur était laissé brut ou préparé pour recevoir un enduit : dans le premier cas, les traces de doigts étaient appuyées, dans le second, le maçon devait lisser.

Dans le pays de Monts, une levée correspondait au quart de la hauteur des murs. À Bois-de-Cené, la bourrine était montée par levée de 20 à 30 centimètres. Ceux qui possédaient de la pierre, des galets, des morceaux de tuiles... les incrustaient au fur et à mesure de l’élévation pour favoriser un enduit de chaux : le piatrage 21. Cf. note 14, p.41. Cf. note 14, p.41. 21 Maurice Bodin, Notre-Dame-de-Monts, enquête Arexcpo, 1984. 19 20


Les techniques de construction en terre et végétaux

Lorsque le pourtour était terminé, on attendait quelques jours le séchage pour un raffermissement de la bauge. La seconde levée était menée en sens inverse de la première. Certains armaient ou liaient les deux épaisseurs par l’apport de chevilles, de bouts de tuiles, de verres ou vaisselles brisés... et reliaient les angles avec des gaules de saule. On disait alors entoyère les cornères. Cette technique est inconnue de nos informateurs résidant à Notre-Dame-deMonts.

Croquis d’élévation des murs, d’Isabelle Milcent. Deux hommes s’entraident pour la mise en œuvre des bigots sur de la seconde levée d’un mur. Menuiseries, manteau de cheminée et ferme sont posés en même temps que l’avancement de la maçonnerie.

C’était durant cette seconde élévation que l’on posait les portes et les fenêtres, que l’on formait le foyer, que l’on préparait le rattachement du four. Même cheminement pour la troisième levée et l’élévation du ou des pignons. Toutes les réserves pour d’ultérieurs aménagements étaient prévues durant la construction, la gueule du four, la tablette du foyer, d’éventuelles niches et les boaes, trous placés de part et d’autre du manteau de la cheminée, formés de deux tuiles bords à bords. Comme nous l’avons vu, ces excavations étaient destinées au séchage et au rangement des chandelles de résine. Bien plus tard, on y rangea les boîtes d’allumettes. Le maçon se tenait sur le mur en construction. Il y recevait les bigots et les disposait au fur et à mesure sur le mur en les écrasant sur et contre ceux préalablement posés. Pour donner de l’assise et de la force aux murs, ils étaient construits plus larges en bas qu’en haut et montés avec du fruit. Généralement, les murs avaient une hauteur qui variait entre 1,50 et 1,80 mètre. La construction en terre devait être terminée aux beaux jours. La canicule estivale assurait le séchage. Pas moins d’un mois était nécessaire à l’élévation des murs d’une bourrine moyenne. Des informations sur les traditions orales concernant la construction en une nuit sont fournies au chapitre « Les us et coutumes ».

Malaxage moderne de la terre et du sable.

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Scène à l’écomusée du Daviaud, à La Barre-de-Monts, lors de la construction à l’identique du train de bourrine et gal’ries à Chartier, entre 1982 et 1986. Si des moyens mécaniques ont soulagé le maçon à bigots, la technique a été scrupuleusement respectée. Des prises de vue photographiques et cinématographiques ont été réalisées pour conserver une trace de cette forme du patrimoine gestuel. Dans le cadre du Comité d’usagers du Daviaud, section d’Arexcpo, Jean Thiéry, photographe professionnel, a suivi l’évolution de ce vaste chantier durant près de vingt ans. L’Arexcpo a largement contribué à ce sauvetage.

Pose de bigots.

Liage des bigots entre eux lors de la première levée.

Les deux levées en cours de séchage.


Les techniques de construction en terre et végétaux

Près d’un siècle sépare ces deux situations ! On remarquera, sur la carte postale du haut de page (cliché vers 1900) que l’huisserie est en place comme ce fut le cas au Daviaud, bas de page, lorsqu’une porte est prévue. L’entrait, installé sur des poteaux qui seront ôtés lorsque la ferme reposera sur les murs secs, est posé dès le début de la construction, fixant la largeur de la pièce habitable. Cliché datant de 1986.

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Cette technique de maçonnerie de bigots est originale. Nous ne connaissons qu’un seul autre exemple en France, en Ille-et-Vilaine. Généralement, c’est la technique du pisé coffré ou banché qui est utilisée. Jean Debarre révèle 22, à la lecture de l’une de ses monographies consacrées à la bourrine du Delhy, à La Barre-deMonts, que son locataire de l’époque (1945) avait été le constructeur de son logement et de ses annexes. Celui-ci précise : « C’est son métier secondaire. Au printemps, on fait un trou duquel on extrait de la terre. Cette terre est malaxée avec des brins de paille et mise Train de bourrines et gal’ries. Saint-Jean-de-Monts dans les années 1960. L’aggloméré de parpaing de ciment fait son apparition. en forme de gros moellons. Ce sont ces gros moellons qui formeront les murs. À peine secs, ils seront jointoyés entre eux avec de la terre très humide. Le tout est enduit de terre mouillée et sèche très doucement... ». C’est une technique relevée nulle part ailleurs dans la région étudiée. Mentionnons ici que des bourrines ont été construites en pierres maçonnées au mortier de chaux, d’autres en pierre et en terre, d’autres ont un soubassement de pierres maçonnées et une élévation en bigots. Depuis l’apparition des parpaings, des murs de terre menaçant de s’écrouler ont été remplacés par cet aggloméré particulièrement disgracieux dans de telles constructions. Généralement et anciennement, les murs des constructions en terre étaient laissés à l’état naturel. Depuis une soixantaine d’années, ils sont chaulés. Une remarque tout de même concernant le blanchissage et là, nous nous démarquerons sensiblement des différents témoignages des auteurs traitant de la blancheur des maisons du marais. Trop souvent, on assimile maison basse de pierre et bourrine. Qui n’a pas entendu parler de « coquettes petites chaumières » pour décrire des maisons basses couvertes en tuile ! Nous nous permettons d’insister, mais ne peuvent être appelées bourrines que les habitations couvertes à bourre, c’est-à-dire de végétaux. Le chaulage des murs en terre n’était pas systématique, loin de là. On peut même dire qu’il était quasi inexistant. Les différents témoins que nous avons rencontrés nous rapportent que cette pratique est récente, en tout cas ne remonte pas au-delà du début du siècle. La chaux était un produit qu’il fallait acheter, aller chercher chez un maçon ou aux fours, il fallait un outillage pour la répandre. Autant de dépenses qu’un Maraîchin, résidant d’une bourrine, ne pouvait assumer. Insistons en précisant Bourrine aux jambages chaulés entre Le Perrier et Challans, 1937.

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Jean Debarre, architecte, extrait des enquêtes dirigées par le musée des Arts et Traditions populaires, entre 1942 et 1946.


Les techniques de construction en terre et végétaux

que, même l’achat de pointes et de fil de fer, était économisé au profit de chevilles et de liens de bois fabriqués par le constructeur. Le blanchissage, lorsqu’il a fait son apparition chez les habitants des bourrines, a été réservé aux murs intérieurs et aux embrasures des baies, plus tard, à toute la construction. Signalons également l’entretien annuel des murs par un badigeonnage d’argile et de sable fortement détrempés : le piatrâge. Pour assurer la protection de ces murs contre la pluie battante, des claies mobiles étaient construites en végétaux, comme ceux du toit. Leur nom local est fresti.

Détail du fresti en roseau de la bourrine à Chartier, au Daviaud, 1995.

L’armature de la hotte de la cheminée de la bourrine de la famille Bourry, à Notre-Dame-de-Monts, relévée par des étudiants de l’école d’architecture, de Nantes, en 1897. Les baguettes sont de coudrier, les liens de chiendent. Cette armature à duré plus de cent ans.

La construction de la hotte de la cheminée suivait celle des murs. Deux trous pratiqués dans le pignon recevaient les deux traverses qui supportaient le manteau. Une armature faite de branchages entrelacés et noués était assemblée avec le manteau et se terminait en haut du conduit. Cette armature était constituée de branches de coudrier noir, la saoss, ou d’ormeau, et liée avec du singe, du chiendent, ou de la lie, de l’osier. La hotte était maçonnée en bauge amalgamée à du foin. Deux personnes étaient nécessaires pour assurer le remplissage. Se faisant face, elles formaient manuellement des petites boules de matière terreuse qui se confondaient dans l’armature.

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Les bouts du manteau saillant servent de supports et de contre-balancement à un poteau fourchu qui soutient la panne faîtière qui traverse la cheminée de la bourrine des Sertouzes. Saint-Jean-de-Monts, 1986.

Maurice Bodin, maçonnant à bigots de foin au Daviaud, en 1986.

La charpente Le plafond n’existait pas. Dans tous les cas la charpente était apparente. Les bois de charpente des bourrines et de leurs annexes sont essentiellement en branches pour les petites pièces et, généralement, le résultat de réemploi pour les grosses. Nous l’avons dit, le bois était quasi inexistant dans le marais si l’on excepte les quelques bosquets d’ormes ou de pibles près des fermes ou des métairies. L’indigent ne pouvait entreprendre la construction de sa bourrine que s’il avait trouvé l’entrait. D’ailleurs, la longueur de celui-ci conditionnait la largeur de la pièce. L’entrait ne devenait nécessaire que si la longueur de la pièce dépassait les 6 mètres. Nous sommes également témoins d’une charpente constituée de pièces récupérées de mâture de bateau. « Le bois nécessaire était abattu ou prélevé en vieille lune de septembre, époque où la sève ne monte plus, évitant ainsi aux vers de s’y introduire et mis dans l’eau... », révèle François Dupont 23. Pelage d’une jeune pousse de pin maritime.

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Cf. note 15, p. 42.


Les techniques de construction en terre et végétaux

Lien pour la fixation des lattes sur le chevron.

Préparation des chevilles de bois.

L’entrait pouvait être un pible, c’est le plus courant. Il est omniprésent dans la région et réputé réfractaire aux parasites du bois, un orme, un jeune chêne (dans ce cas-là, c’était toujours du bois de récupération). L’entrait était préparé à partir d’un arbre légèrement incurvé. Cette courbe augmentait la hauteur de passage sous elle et accusait mieux le poids de la charpente. La ferme était appuyée sur les murs n’excédant pas 1,70 mètre. À portée de main, elle servait de tablette. Chaussures et galoches s’y côtoyaient. Elle supportait le « flambeau de noce », gage de bonheur pour le ménage. Le poinçon provenait souvent du même tronc que l’entrait. Il était doté d’un tenon s’installant librement dans la mortaise de l’entrait et d’une fourche, ou d’un tenon, supportant la panne faîtière. Quatre mortaises assemblaient les deux arbalétriers et les deux jambes de force. Le montage de cet ensemble, appelé la ferme, était généralement confié à un professionnel : le charpentier. Il n’est pas rare d’y trouver ses signes conventionnels d’assemblages, son empreinte, une date, marqués par des incisions faites au ciseau à bois. La ferme était chevillée. En principe, les pièces de bois entrant dans sa construction étaient sommairement équarries. Les autres pièces de la charpente étaient surtout des grosses branches de pible dégagées de leur écorce. Le pin fut également utilisé. Avant leur emploi, les branches étaient immergées dans l’eau douce durant plusieurs mois. Cette technique facilitait le décollement de l’écorce et répondait à une précaution supplémentaire : conserver la sève dans la texture du bois. Cette présence, selon les utilisateurs, évitait celle des parasites. La charpente ne recevait aucun traitement.

Aperçu de la charpente de la bourrine du Bois-Juquaud. Saint-Hilaire-de-Riez, 1989.

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Lexique des mots français et leur correspondance en parler local Un entrait : in tirant, in faïe ; un arbalétrier : ine arbalète ; un poinçon : in poésson ou bouhoumme (Bois-deCené) ; une jambe de force : in lien ou liane ; une échantignole : une échantignole (pièce travaillée), ine cheveuille (branche taillée) ; une panne : ine filère ; un chevron : pièce équarrie, in barron (branche brute) ; un liteau : un liteau équarri ; une latte : ine garlatte. Si la charpente se complétait d’un troisième versant, la croupe ou la corpe, les petits chevrons étaient appelés dou ampanons. Pour une étable, on trouvait d’autres pièces : le po forche (pilier doté en tête d’une fourche) pour soutenir la charpente et le ou les baris, traverses auxquelles étaient attachés les animaux. Comme on le constate, en parler local, les mots correspondant à des pièces ouvragées conservent, avec une sensible déformation, leur dénomination. Ceux qui sont sujets à des prélèvements directs et sans préparation professionnelle, portent des noms locaux. La pose de la charpente se faisait à la fin de l’été. Avant la saison des pluies, la couverture devait être posée.

La couverture La toiture d’une bourrine était forcément en végétaux. Selon le milieu naturel d’implantation, les végétaux récoltés à proximité étaient utilisés en priorité. Dans le Marais Breton vendéen, la paille très recherchée comme litière n’était pas utilisée pour la couverture. Aussi, le mot chaume, trop généraliste, ne peut s’appliquer à la majorité des bourrines et aux dépendances couvertes en végétaux. Nous ne reviendrons pas sur ces végétaux puisque le sujet a déjà été abordé en pages 44 et 45.

Le bourrinage Le bourrineur ou bourrinour était devenu un artisan spécialisé dans la réalisation de couvertures en végétaux. Deux anciens couvreurs ont confié : « Au début, c’était pour rendre service, ça faisait une petite rogne (bénéfice) 24 », « Avec la demande, j’ai dû laisser un peu la culture et donner de plus en plus au bourrinage. » Ils partageaient cette activité saisonnière avec une exploitation agricole. Plusieurs informateurs précisent que cette « profession est nouvelle » (vers 1920). « Qu’autrefois, selon les informations détenues de leurs parents, c’était des journaliers doués pour cela à qui on rendait du temps. Pas question de payer à ce moment-là 25. »

24 25

Cf. note 7, p. 14. François Thomazeau, La Barre-de-Monts ; enquête Arexcpo.

Les outils du bourineur 1 - échelle, 2,50 à 3 mètres 2 - agueil, aiguille de fil de fer 3 - tenaille

4 - palette 5 - couteau 6 - koe, pierre à aiguiser

D’après Jean Debarre, extrait de l’enquête de 1943-1946.


Les techniques de construction en terre et végétaux

Le bourrineur artisan se louait seul. Il était payé à la tâche. La main-d’œuvre complémentaire et les matériaux lui étaient fournis par le client. Le bâtisseur réservait ce professionnel très tôt, dès l’établissement du projet. La négociation du chantier se déroulait sur le site de la construction projetée. Le bourrineur faisait part de son évaluation en fagots. L’outillage était rudimentaire. Il se composait d’une échelle de 2,50 à 3 mètres de long, d’une palette (planchette de bois taillée ou douelle d’un tonneau dont l’une des extrémités a été biseautée, l’autre taillée en forme de poignée), d’un couteau (faux préparée spécialement ou serpe dont le bec était éliminé), d’une pierre à aiguiser : la koe, d’un baquet et de chevilles. Vers 1920, le fil de fer et les pointes métalliques remplacèrent progressivement les liens de bois : les rortes ou rotes. La panoplie du bourrinour s’enrichit d’une paire de tenailles et d’une aiguille (longue tige d’acier pointue percée d’un chas).

Étapes préalables du bourrinage 1

3

4

2

5 1. À l’aide de la forche à bigoter, garnissage entre les lattes, au Bois-Juquaud. 2. Le peigne fabriqué pour la circonstance. 3. Stockage du roseau récolté. 4. Peignage du roseau pour l’élimination des feuilles et du plumet, par Robert Cornevin. 5. Piles de roseau prêt à l’emploi. En 1998-1999, ces travaux à la bourrine du Bois-Juqaud, antenne de l’écomusée de la Vendée, ont été entrepris par la ville de Saint-Hilaire-de-Riez, en collaboration avec le Comité d’usagers de la bourrine du Bois-Juquaud.

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Les bourrineurs commençaient leur saison vers la fin septembre ou début octobre, au retard, et la terminaient au printemps, avant les premières grandes chaleurs. L’humidité ambiante de cette longue période rendait les végétaux moins cassants. L’activité était entrecoupée de périodes consacrées à l’exploitation agricole.

La première couche est celle de la parure faite de masette ou typha, les poignées en cours de pose sont du scirpe maritime. Le geste ici représenté est la fixation par écartèlement de la menoille sur une latte. Daviaud, 1986.

Quelques jours avant le démarrage de la couverture, le bâtisseur préparait les poignées. Il débarrassait les tiges des feuilles superflues, des graines et des herbes. Puis, il les liait avec un lien de foin ou quelques brins de rouche. Il disposait ces poignées, ces menoïlles, tout autour de la construction. Au jour convenu, le bourrineur débutait le chantier par la distribution d’une quantité de menoïlles sur la charpente. La pose commençait par le bas, près d’un pignon, puis se poursuivait latéralement. Les poignées étaient disposées avec beaucoup de fermeté. Le pied des tiges était dirigé vers le bas. Si la toiture était dotée d’un troisième versant, la croupe, la pose des poignées se poursuivait tout le tour, jusqu’à l’autre côté du pignon. Dans le cas d’une bourrine à deux versants, on les couvrait l’un après l’autre. Une seconde passée était installée. Cinq rangées de poignées étaient nécessaires pour progresser jusqu’au faîtage. Les menoïlles étaient fixées au lattis et aux chevrons par des liens préparés avec du chiendent, du foin long, des brins d’ormeau... depuis soixante-dix ans, avec du fil de fer. Le retour de la ligature obligeait à la présence d’une aide. Généralement, c’était le bâtisseur qui assurait ce travail ainsi que l’approvisionnement en fagots. Le bourrineur travaillait sur son échelle posée bien à plat sur le versant. Les sabots de bois étaient choisis pour le confort qu’ils apportaient au travailleur juché qui ne quittait son échelle que pour s’appuyer d’un genou sur la poignée en cours de fixation, la liure.

Une palette de 0,60 mètre, faite d’une douelle de barrique, coll. F.-A.P.-Arexcpo.

Lorsqu’une surface définie par le déplacement du corps humain sur l’échelle était couverte, le bourrineur, à l’aide de la palette, frappait le pied des tiges pour les remonter en épousant la pente du toit. La palette permettait d’uniformiser la surface des végétaux. Les brins devaient être très serrés, la bonne imperméabilité de la couverture en dépendait. Avec le couteau, il égalisait plus finement et biseautait l’ensemble. L’échelle était déplacée et une nouvelle surface était entreprise. Certains bourrineurs renforçaient les bords de la toiture avec des bourrelets faits des mêmes matériaux. Ce renfort se préparait au sol. Des poignées de végétaux étaient enserrées, en spirale, par un lien de foin long. Plus récemment, un fil de fer serrait la bordure contre le reste de la toiture. L’ensemble était fixé à la charpente et associé aux matériaux en place.


Les techniques de construction en terre et végétaux

La pose du bourrel’tt’ (poignée de rouche enserrée dans une trolle, un lien de foin).

Les dernières gerbes avant le faîtage. Le Daviaud, 1986.

L’épaisseur d’une bonne couverture devait être de 35 centimètres environ. Pour les remises, 25 centimètres étaient jugés suffisants. Selon l’importance des poignées, il n’en fallait pas moins de quatre à cinq pour réaliser cette épaisseur. En général, la hauteur d’un rempant était de 3,75 mètres. Pas moins de six cents grosses gerbes fournissant chacune une douzaine de poignées étaient nécessaires pour une bourrine aux dimensions classiques. Au faîtage, la tête des tiges était repliée sur l’autre versant et entremêlée avec les autres. La dernière opération consistait à la confection de la traïe, le faîtage. Au début du siècle, la bauge était l’unique matériau employé pour assurer l’étanchéité du faîtage. Une bande de terre d’une vingtaine de centimètres, épousant de part et d’autre les versants, imprégnait les végétaux. Souvent, ce même matériau était étalé sur les bords des rampants, en tête de pignon(s). Depuis 1920, un bourrelet de végétaux enserré dans un grillage a remplacé la terre trop vite délavée. Aujourd’hui, un béton de chaux et de ciment assure l’étanchéité.

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La souche de cheminée En principe, le bourrineur assurait la réalisation du solin, parfois celle de la souche. La cheminée d’une bourrine dépassait de très peu du faîte, de 30 à 40 centimètres. Elle était en terre. Depuis la généralisation de la brique, certaines rivalisent avec celles des toits de tuiles. Bernard Artus et Maurice Bodin s’activant à la confection de la traïe. Trois compagnons sont nécessaires : celui au sol pose les bigots sur le haut de l’échafaudage, un second les transmet au troisième qui maçonne. Le Daviaud, 1987.

Détail du faïe (faîtage de terre) et de la souche de cheminée de la bourrine à Thomazeau. On distingue également les liens de fixation de la rive et les garlattes, vers 1980.

Les menuiseries Le nombre des baies était très limité : deux portes et une fenêtre pour la pièce commune, une porte par annexe. La fenêtre était à quatre vitres, elle était dénommée la croésaïe. « Des bourrines n’avaient pas de fenêtres à l’origine ; elle ont été rajoutées par la suite. Mesure d’économie ? Cela faisait moins à payer chez le menuisier. Mais le Maraîchin savait aussi que dans le rôle d’imposition du XIXe siècle figurait une dernière colonne avec le nombre d’ouvertures imposables. L’absence de fenêtre réduisait l’impôt local 26. » Vers 1980, l’unique croésaïe de la bourrine du Bois-Juquaud, avant restauration. 26

Cf. note 14, p. 41


Les techniques de construction en terre et végétaux

La hauteur de passage n’excédait pas 1,50 mètre sous le linteau : le palâtre. Il fallait se courber pour accéder au logis. Nous l’avons vu, les huisseries, lorsqu’elles existaient, étaient placées durant l’élévation des murs. Elles étaient généralement constituées de deux forts madriers et d’un linteau épais assemblés par enfourchement. Les portes et la fenêtre s’y fixaient par des paumelles. Primitivement, les ouvertures étaient montées sur pivots. Un trou dans le linteau et une pierre creusée et scellée dans le sol assuraient cette rotation. Les portes pleines étaient constituées de planches de largeur variable, mais délignées, clouées sur deux, voire trois écharpes. Une lucarne était parfois découpée, c’était le lussète, à Bois-de-Cené. À Notre-Dame-de-Monts, le lussète est une chatière. Cette économie d’ouverture ne fragilisait pas la maçonnerie, elle permettait d’éviter les pertes de chaleur l’hiver et de conserver la fraîcheur l’été. Les volets étaient généralement absents. Les plus démunis taillaient dans du bois les différents accessoires ordinairement achetés en quincaillerie, soit les loquets, verrous et poignées. Loquet et troïe de la bourrine à Chartier, reconstitués en 1987. Le Daviaud.

Le foyer La hotte, nous l’avons vu précedemment, s’élevait durant la construction des murs, de toute façon, avant la pose de la charpente. Souvent, la panne faîtière traversait la hotte de la cheminée. Afin de soulager le poids de cette pièce de charpente sur le mur de pignon affaibli par le conduit, à l’extérieur, un madrier était posé sur les traverses du manteau. Un poteau au bout fourchu supportait cette charge. L’âtre. Avec des dimensions sensiblement inférieures à celles des logis en maçonnerie de pierres, le foyer était surélevé par rapport au sol d’une trentaine de centimètres, pour une profondeur de 1,20 mètre environ, et une largeur de 1 mètre. La plupart n’étaient qu’une masse de terre. On trouvait aussi des aménagements permettant le rangement de récipients destinés à la transformation laitière. Ces pots de grès, appelés trasses, contenaient du lait cru. Cette présence des produits laitiers près de la source de chaleur accélérait Croquis d’un foyer type, d’après Jean Debarre, 1943-1946. la formation de la crème destinée à la fabrication du beurre. Cet aménagement s’appelait le fourneau ou fornéa. Il s’agissait d’un espace de la profondeur de l’âtre, de la hauteur de la masse de l’âtre et d’une largeur variant entre 40 et 50 centimètres. Une plaque foyère recouvrait l’ensemble. Un portillon fermait ce petit local.

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De part et d’autre du foyer, deux blocs en bauge étaient confectionnés pour servir de sièges. D’une épaisseur d’environ 40 centimètres, d’une hauteur d’environ 60 centimètres à partir du sol et de la profondeur de l’âtre, ils étaient généralement recouverts d’un tapis de rouche tressée, d’un coussin ou d’une planche. Ces bancs rustiques étaient appelés poérons. Parfois, des coffres ou des bancs de bois les remplaçaient.

Le sol Il était réalisé en dernier lors d’une construction. Ceux des bourrines étaient en terre battue. On utilisait de l’argile bleue largement amendée et enrichie par des apports importants de sable. Dans presque tous les cas ils étaient plus bas que le niveau extérieur. Une marche devait être franchie. La construction d’une bourrine, comme celle des autres maisons, se terminait par la préparation de la place. Nous avons relevé, au pied du seuil, côté pluies dominantes, l’existence d’une cavité recouverte d’une planchette de bois. Cet aménagement évitait un détrempage incontrôlé du sol.

Le four La possession d’un four signifiait la récolte de froment et des réserves de farine. Malheureusement, au XIXe siècle, ce n’était pas le cas des habitants des bourrines dépourvus de terres arables. Sa construction correspondait à une évolution financière. Malgré tout, la présence de fours est prouvée par le grand nombre existant encore aujourd’hui.

Quatres branches servent d’armature à la terre de construction pour former la gueule du four. Le Daviaud, 1987.

Sur la masse du four, du sable de dune humidifié est déposé pour former la voûte du four, bourrine à Chartier. Le Daviaud, 1987.

Ceux que nous avons visités sont construits en bauge mélangée à du foin. Leur gueule est souvent protégée par un arceau constitué de briques. La sole est de même terre que la masse et la voûte. La construction du four n’était organisée que lorsque le logement était terminé, voire habité. La masse du four était élevée en bigots jusqu’au niveau de la base de la gueule du four. Du sable sec remplissait le volume. La sole était réalisée, puis, lorsqu’elle était parfaitement sèche, on commençait la construction de la voûte. Une forme faite avec du sable détrempé supportait les apports de terre de maçonnerie. Certains, lorsque la voûte était formée d’une première couche, y installaient une armature faite de branchages entrelacés : une plonée de saoss (branches cintrées de coudrier noir) qui était installée sur le dôme. De nouveaux bigots étaient graissés sur ce renfort afin d’obtenir une cara-


Les techniques de construction en terre et végétaux

pace épaisse et surtout parfaitement étanche. Il fallait attendre un bon séchage pour en extraire le sable par la gueule du four. Le sable de moulage retiré, on procédait à la cuisson du four. C’était une opération jugée délicate et toujours appréhendée. « Ou fallait poé s’loupère, chiett’ (cuit) trop dur et trop vite, tott’ ataitt’ perdu 27 » La paille de fève, le fava, ou des aiguilles de pin étaient les combustibles jugés adéquats. Lors de la construction de la voûte, certains plaçaient une pierre de granit achetée à la foire ou récupérée de délestage : le grisou. Cette pierre de four, lorsque le four avait été chauffé, indiquait au boulanger la température. Trop blanche, la cuisson était trop rapide, rosée, la température était excellente. Les indigents se contentaient d’une plume. « Si elle brûlait, le pain brûlerait, si elle frisait, le pain dorerait. » La charpente, très sommaire, ne reposait pas sur la voûte. Tous les fours étaient recouverts d’une toiture.

La voûte formée est recouverte d’une épaisse couche de terre qui constitue, une fois cuite, la carapace du four. Le sable, une fois la terre séchée, est retiré. Après un nouveau temps de séchage, la cuisson peut s’effectuer. Le four de la bourrine du Bois-Juquaud, après restauration. Saint-Hilaire-de-Riez, vers 1990.

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Cf. note 15 p. 42

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Construction des annexes Elles ne diffèrent pas pour les techniques de construction mais moins de soin et moins de matériaux leur étaient consacrés.

Ci-dessus, une gal’rie en contruction à la bourrine du Bois-Juquaud. Saint-Hilaire-de-Riez, 1989. Ci-contre, relevé d’une loge, à La Germaine, à Grue, entre 1943 et 1946, par Jean Debarre, enquête.

Construction d’une gal’rie au Bois-Juquaud. 1989.

Couverture du toit à poule, du Daviaud. La Barre-de-Monts, 1985.


Les techniques de construction en terre et végétaux

L’entretien Il ne sera question ici que des implantations datant des XIXe et XXe siècles dans le Marais Breton vendéen dont nous avons connaissance. Il est évident que la nature du sol a une influence forte sur l’entretien de l’architecture en terre. La longévité des murs dépend notamment des infiltrations d’humidité du sol, celle des toitures de leur exposition au vent, mais, surtout, de la présence d’arbres. Les témoignages photographiques du début du siècle relatent bien les trois milieux dans lesquels on retrouvait ce type d’habitat.

Dans les dunes À la fin du XIXe siècle, l’impôt fut exigé de tous les propriétaires et/ou de tous les occupants de terrains. Certains, les cabaniers surtout, ne purent s’en acquitter et furent contraints d’abandonner les espaces où ils résidaient. Les autres s’y sont maintenus et ont créé des quartiers curieusement éparpillés dont l’économie reposait sur la pêche côtière pour les hommes et l’élevage d’une vache pour les femmes. Ces quartiers sont dénommés parée, sans doute ayant la même étymologie que préparer. Dans ce cas, il s’agit de terrains dont on a enlevé une partie du sable et importé de la terre pour les rendre cultivables. Pour retenir de nouveaux sables éoliens, de hauts talus, les bouchaïes, entouraient ces espaces. Il est vraisemblable qu’au XIXe siècle, cette population habitait des bourrines. Nous avons remarqué que ce sont précisément les bourrines de ces zones-là et leurs annexes qui étaient améliorées d’un soubassement maçonné avec de la pierre de côte. Le sable, dans la maçonnerie, y est plus présent et donc plus sensible à la pluie mais moins propice aux fissures. Elles ont disparu avec l’aménagement touristique. Seules quelques ruines et des gal’ries, ainsi que de rares photographies témoignent de cette présence.

Une parée. Saint-Hilaire-de-Riez. Vers 1900.

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Sur la rive Le bâti couvert de végétaux est encore très présent sur toute la frange littorale dont le sol est un mélange de sable rapporté par les forces éoliennes et de l’argile du sous-sol, premiers apports dus au colmatage. Cette terre douce, propice au maraîchage, à l’abri des inondations, est appelée sur la frange littorale le betane. C’est un matériau apprécié pour la construction. Un petit apport d’argile était nécessaire. Il suffisait de creuser sur place pour la retrouver à quelques dizaines de centimètres. Elle était généralement prélevée lors du curage d’un abreuvoir ou d’une mare. De toute façon, le marais tout proche complétait les besoins. Cette présence devait être comparable sur la rive bocagère mais nous manquons de témoignages pour l’étayer.

Dans les marais Dans tous les cas, si l’on se réfère au cadastre de 1936 et aux quelques constructions encore debout, l’implantation des exploitations et logements bâtis en terre et couverts en végétaux se situe sur le bord de chemins de terre, les charrauds. La plupart de ces installations relèvent de la charité publique et ce sujet mérite un développement proposé au chapitre « Les us et coutumes ».

Bourrine du marais. Beauvoir-sur-Mer, vers 1910.

Comme dans toutes les règles, il y a forcément quelques exceptions dues à des legs charitables, des héritages, des acquisitions. Jean-Christophe Moncis-Martel 28 rapporte deux situations particulières obtenues auprès d’informateurs témoins : « La présence de maisons sur les grands prés communaux de La Barre-de-Monts et, à Beauvoir-sur-Mer, sur le communal, au siècle dernier, l’existence de treize bourrines distantes d’environ 150 à 200 mètres les unes des autres ». Ces faits sont rares. Ce sont les résidants de ces bourrines que l’on peut réellement qualifier de Maraîchins. Hommes des espaces peu hospitaliers, ne possédant pas de terre à exploiter, ni pour y construire, ils étaient contraints d’obtenir tout des autres. Donnant leur force et leur courage comme journaliers, les hommes se louaient aux métayers ou aux fermiers tandis 28

Jean-Christophe Moncis-Martel, Vivre au pays maraîchin, Pardès, 1983.


Les techniques de construction en terre et végétaux

que l’épouse, les jeunes enfants et parfois les vieillards, s’ils étaient à charge, gardaient une vache et une grouée de canards, seules sources de revenus. Tous les témoins rapportent l’extrême pauvreté de ces indigents, contraints d’abandonner leur progéniture dès l’âge de huit ans pour les confier à des maîtres et patrons, quêtant encore, dans le premier quart de ce siècle, pain, viande et marc de café... Témoin de cette pauvreté, Charles Mourain de Sourdeval en 1864, publie : « L’indigent est un parasite assez heureux des fossés du marais ; il se bâtit une cabane en terre compacte sur une parcelle possédée à titre de rente ou même plus souvent usurpée sur des anciens chemins, qui étaient d’autant plus larges qu’ils étaient impraticables ; autour de sa chétive demeure, il élève des bandes de canards, d’oies, de dindons, que les hydrophytes et les insectes des fossés ou les graines de la prairie voisine nourrissent en grande partie. Ces volatiles, amenés sur le marché de Challans ou de Machecoul, y représentent souvent le revenu d’une ferme. L’abus de cette industrie a été de tout temps poussé si loin que, le 21 mars 1782, un arrêté du Parlement de Paris, auquel ressortissait notre province, ordonna que les huttiers habitant dans les marais du Poitou ne pourraient avoir que la quantité d’oies fixée par les officiers de justice des lieux. La disposition de ce sage arrêté est tombée en désuétude et le parasitisme de la volaille est plus prospère que jamais. Au profit du canard domestique s’ajoute celui du gibier d’eau qui, pendant l’hiver, est capturé en grand nombre sur les prairies inondées et est présenté avec avantage sur les marchés voisins, d’où il s’écoule vers Nantes et Paris... ».

Les enduits ne se faisaient que sur les murs du logement, parfois, selon la disponibilité, sur les murs des dépendances abritant les denrées. Enduit au Daviaud, 1988.

Nous n’y reviendrons pas : hormis le chaulage, le badigeonnage de terre détrempée ou le rajout de terre au sol, le Maraîchin devait particulièrement surveiller l’évolution de la couverture de ses constructions. Les principaux agents perturbateurs étaient le vent, la mousse, les herbes, les oiseaux et les souris. Ces dernières y installaient leur progéniture et pour cela y creusaient des galeries. Les oiseaux recherchaient les petits vers et les graines. La mousse et l’herbe alimentaient les premiers et retenaient l’humidité provoquant la pourriture. Par précaution, chaque famille récoltait des végétaux pour assurer l’entretien de ses toitures. Les piles permettaient une bonne conservation. D’autres trouvaient en cette récolte et sa vente, ou son échange, un complément de revenu. Il n’existait pas de commerçant en matériaux végétaux.

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Le vent était redouté dans ce pays plat et dénudé. Pour fixer les végétaux, les branchages ou garlattes étaient disposés sur la toiture. Depuis une soixantaine d’années, du grillage est déroulé sur les versants. Nous avons remarqué sur une gal’rie des fourches usées plantées dans les végétaux, ailleurs des pierres ; sur des photographies anciennes, des bourrelets de terre.

Une bourrine de rive dont la toiture est recouverte de mousse,c’est l’une des issue fatales. Vers 1950.

Des piles de roseaux en prévision de réparation aux Sertouzes, en Orouet, Saint-Jean de-Monts. 1986.

Pour maintenir le faîtage, de la joubarbe était repiquée dans la traïe. Des tamaris étaient plantés pour briser les assauts du vent. Les végétaux pourris ou endommagés devaient être arrachés de la toiture et remplacés par des poignées de tiges nouvelles conservées dans la pile. L’achat de peinture n’était pas à la portée des indigents. Pour protéger leurs menuiseries, ils disposaient des clayonnages de végétaux qu’ils confectionnaient eux-mêmes : les frestis.


Les techniques de construction en terre et végétaux

Clins d’œil au Marais Poitevin

Installation des roseaux d’un lattis, pour une couverture de tuiles. La Taillée. 1993.

Lattis de roseaux. La Taillée. 2001.

Lattis de roseaux. Chaillé-les-Marais. 2001.

Lattis au moulin de Vignault. Nieul-sur-l’Autise. 2005.

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La bourrine aux Chartier, hier et aujourd’hui

Vers 1975

Vers 1990


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Les us et coutumes

La maison d’une nuit Dans le courant du XIXe siècle, globalement, les bourrines ne s’implantaient qu’en des sites inexploitables économiquement et/ou sur des terrains de propriété publique. La mise à disposition ou l’appropriation sauvage de ces lopins de terre résultant des redressements de chemin par rapport aux sinuosités des fossés était tant bien que mal admise des gens lotis. Ces tolérances devaient inciter des « sans domicile fixe » à utiliser ces avantages. « Notre aïeul était roulier installé dans le marais entre Challans et Le Perrier, au Fenouil. C’était vers 1850. Il faisait faire du bois à Saint-Christophe-du-Ligneron pour l’échanger ou le vendre aux Maraîchins et dans l’île de Noirmoutier. Au retour, il transportait de la cendre pour la vendre aux boucagerons (bocains : habitants du bocage). Il prenait souvent en pitié les pauvres gens, ceux qui n’avaient pour dormir que les granges des autres, une sorte de baladanes (errants) si on veut, ceux qui n’avaient pas réussi à s’installer. On les appelait des journaliers quémandeurs de pain. C’était souvent des familles nombreuses. Quand ils avaient repéré un délaissé de charraud où ils auraient pu s’installer, ils essayaient d’y construire leur maison. À cette époque-là, si au matin la fumée sortait au-dessus du pignon, on devenait locataire de fait. Bé oui mais, si les voisins Hutte au Fougerais, d’après O. de Rochebrun, vers 1860. les voyaient teurvirer autour de ce bout de charraud, ils prévenaient le garde champêtre. Et puis ouste, fallait partir plus loin. C’était pas facile pour s’installer comme ça. Fallait vraiment que ce soit dans un coin tranquille, sans voisin, sans rapporteur. Alors, lui, il les embauchait pour faire des fagots et en échange, leur permettait de faire des festis, des clayonnages de roseaux sur une ossature de branches. Quand il y avait la quantité nécessaire, un soir, ils partaient tous en charrette là où ils avaient repéré un bout de terrain et que personne ne les avait remarqués avant.


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« Toute la nuit ils travaillaient. D’abord, avec des fraïes, ils pelaient la terre pour faire des sortes de croûtes, des laêches. Puis, comme dans les bourrines, il y avait toujours une marche pour descendre, ils creusaient pour faire des mottes, c’était des bigues. Avec tout ça, ils faisaient le pignon. Après, pour faire le tour, ils installaient debout les festis faits chez le grand-père. Au matin, le tour était joué. Ils pouvaient rester là. Notre aïeul les logeait encore le temps qu’ils construisent une vraie maison bourrine. C’était notre arrière-arrière-grand-père, Henri Naulleau, né en 1812 29. »

La bourrine et les gal’ries du couple Chartier, près du pont Angelier. La Barre-de-Monts, vers 1980. Nous sommes en présence d’une charraud, ancien sentier de sommet de digue. On distingue l’utilisation du sol classé délaissé de charraud qui devient disponible pour l’implantation des constructions, mais aussi pour le stockage des fourrages et combustibes.

Empruntons à Gilles Perraudeau 30 un autre témoignage qui lui fut fourni par Étienne Véronneau, poète et conteur patoisant très populaire dans le Marais Breton vendéen. « Les parents de l’un de ses voisins avaient dû construire dans une nuit une maison sur un délaissé de charraud. Au chant du coq, à l’aube, elle devait être terminée et la fumée sortir du toit... En réalité, ce n’était pas une bourrine qui était construite. La technique des murs en terre ne pouvait être appliquée l’espace d’une nuit. Cette maison était purement symbolique. Elle était faite de plaingnes, croûtes de terre et d’herbe. Avec la fraïe, la bêche du marais, longue, étroite et coupante, ces plaingnes étaient aisément détachées du sol humide puis entassées entre quatre montants de bois. Une charpente rudimentaire était couverte de roseaux. Puis on faisait du feu au centre. On signifiait alors à toute la collectivité que le lieu serait désormais vivant, habité. Le conseiller municipal le plus proche venait constater le fait. » Les témoignages oraux divergent un peu selon le lieu de collecte. Ainsi, selon les révélations recueillies de Monsieur Henri Massonneau, du Perrier, par Jean-Christophe Moncis-Martel 31 : « N’importe qui pouvait faire sa bourrine. La nuit, il allait sur les terrains de la commune avec une perche et la plantait là où il voulait construire sa maison. Une bourrine était impossible à construire en une nuit. » Gustave Dronet, Beauvoir-sur-mer, enquête Arexcpo, 1994. Cf. note 14, p. 41. 31 Cf. note 28, p.70. 29 30


Les us et coutumes

Le « village de Bethléem », à Saint-Jean-de-Monts, est l’un des témoignages de l’appropriation d’un site à la suite du désintérêt économique. Il a disparu vers 1960 pour laisser place au collège public (qui lui-même a été détruit pour la construction de la nouvelle Poste). À l’origine, c’était une carrière de sable. Lorsque les prélèvements ont menacé d’effondrement les constructions des alentours, on a fermé l’exploitation. Ces évènements peuvent être situés entre 1850 et 1880. Ce trou était profond de 4 à 5 mètres. Les indigents ont été autorisés à y construire leur bourrine. En 1957, quelques familles y résidaient encore. « C’était devenu une sorte de dépotoir [...] Il y a des jours où ça ne sentait pas bon. Nous les gosses, à la sortie de l’école, on jetait des pierres dans le contrebas, sur les bourrines. Quand quelqu’un sortait, on déguerpissait... », se souviennent les anciens élèves de l’école publique toute proche. Les indigents de ce village, quelques personnes âgées, durent être relogés aux frais de la commune.

Bethléem, ancienne carrière de sable. Saint-Jean-de-Monts, vers 1900.

Ces installations sauvages n’étaient pas toujours appréciées du voisinage, on les redoutait même. Nous l’avons compris, ces malheureux extrêmement démunis n’avaient pas bonne réputation. On craignait d’éventuels chapardages, la promiscuité, la concurrence pour les avantages acquis : travail, générosité du voisinage, rétrécissement des espaces de pâturage que fournissaient les bas-côtés des chemins... Pour preuve, cette délibération municipale de la commune du Perrier : « [...] Prenant ensuite un fait d’intérêt général, M. le président a donné connaissance au conseil, d’une lettre de M. le sous-préfet en date du 20 de ce mois, par laquelle il l’invite à émettre son avis sur une réclamation adressée à sieur André Thibaud, habitant la commune du Perrier, qui se plaint que le né Michaud, habitant la commune de Saint-Jean-de-Monts, aurait bâti une maison bourrine dans un terrain communal, touchant sa propriété. Cette maison, prétend-il, détériore sa pièce de terre et il demande à ce que la maison soit enlevée sans retard. Le conseil, après examen, déclare que la bourrine en question se trouve à 6 mètres de distance de la pièce de terre du réclamant, dont elle est séparée par un fossé d’une largeur de 4 mètres et assez profond ; que le sieur Michaud ne cause pas assez préjudice au sieur Thibaud et qu’il est le seul qui se plaint ; quoiqu’il y ait trois ou quatre propriétaires qui aient des terrains avoisinant la maison sus-dite ; que du reste le sieur Michaud est un malheureux, sans asile et sans aucune ressource, père de quatre enfants en bas âge et qu’il serait pénible et inhumain de mettre cette pauvre famille sans abri. Fait et délibéré en séance le jour, mois... » date illisible (vers 1870, NDLR). En général, selon les sources fournies par les archives municipales des communes maraîchines, cela se passait de manière fort simple lorsque le demandeur de terrain à bâtir était un autochtone. L’indigent, sans abri et nécessiteux de loger sa famille, sollicitait un emplacement auprès du maire de la commune. Celui-ci confiait l’enquête à un agent voyer. Le demandeur devait trouver un arrangement avec cet officier chargé des voies publiques.

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Ces générosités publiques étaient encore légalisées en 1926. Pour preuve, cet extrait de bail relevé à la mairie de La Barre-de-Monts. Il fixe les usages locaux : « Monsieur Thibaud Pierre […] ne pourra céder son droit au présent bail ni sous-louer en tout ou en partie. En cas de décès ou de départ du locataire le contrat sera résilié de plein droit... » Autre exemple : « L’an 1894, le 12 décembre, nous Armand Renoir, maire de la commune de Saint-Jean-de-Monts. Vu la demande de sieur Généreux Pineau, menuisier à Saint-Jean-de-Monts, en date du 15 novembre 1894, demandant l’autorisation d’ouvrir au devant de sa maison une croisée donnant sur le terrain communal, vu le rapport de l’agent voyer cantonal […] Arrêtons. Article 1er. Le sieur Généreux Pineau est autorisé à ouvrir une fenêtre dans le mur de sa maison donnant sur le terrain de la commune. Article 2. Mais attendu que cette maison a été construite sur le terrain communal, sans autorisation, le propriétaire devra acheter le terrain ou démolir la construction à la première injonction... » L’application de ce contrat est un peu la cause de la disparition des bourrines. Puisque le terrain est communal, la terre nécessaire à la construction prélevée sur place est communale, ne pouvait être vendue que la charpente. C’est ce qui se passa au profit des communes qui, pour des sommes souvent symboliques, en firent l’acquisition auprès des héritiers. Ces maisons et leurs dépendances furent laissées à l’abandon et s’effondrèrent discrètement. D’autres furent détruites pour l’élargissement des charrauds devenant chemins. Quelques-unes furent cédées à leurs occupants. Les indigents sollicitaient les maires pour que ces logements soient mis à leur disposition. Dans le Marais Poitevin, selon Louis Gaignet 32, cet usage avait également cours : « La construction d’une hutte, autrefois, selon certaines conditions, exécutée de nuit dans une partie de marais entourée de fossés, donnait la propriété du sol sur lequel elle avait été bâtie à l’exécutant, après reconnaissance de la solidité relative de la hutte, totalement construite en roseaux et bois du marais… en une seule nuit. »

Le bris d’assiette Nous n’avons pu obtenir auprès des personnes âgées de la région que de vagues informations concernant cette coutume. Nous avons maintes fois constaté des morceaux de vaisselle insérés dans les murs, mais l’utilisation de tous les déchets de terre cuite était systématique lors de l’élévation des murs. Signalés par le Dr Marcel Baudoin, vers 1910, le bris d’une pièce de vaisselle et son inclusion dans la construction d’une maison, tant de pierre que de terre, étaient une cérémonie qui avait un objectif de favoriser la présence quotidienne de nourriture. Selon les rares témoins, ce rite se pratiquait sur le site lorsque le choix définitif d’implantation était arrêté. On pourrait rapprocher cette coutume de celle de la cheville dans le Bocage vendéen : le jour des fiançailles, la famille, principalement la jeunesse, plantait une cheville de bois dont l’une des extrémités était taillée en forme de gobelet. Cette implantation réalisée à coups de masse fixait l’emplacement du foyer de la future demeure. À chaque coup manqué, le malhabile devait boire une lampée.

Ne pas faire saigner la terre Nous avons relevé maintes fois cette précision qui avait une importance capitale dans toute la région étudiée et à laquelle nul n’aurait osé déroger. « Enfoncer un outil métallique dans la terre durant les jours saints la faisait saigner », confiait madame Joséphine Naulleau 33 de Saint-Jean-de-Monts, c’était « rouvrir la plaie de Jésus ». Nous devons en déduire que l’on ne maçonnait pas la terre durant les jours précédant Pâques. 32 33

Cf. note 2, p.11. Joséphine Naulleau, née Barbereau, agricultrice, Saint-Jean-de-Monts, enquête Arexcpo, 1985.


Les us et coutumes

Les végétaux de faîtage La plupart des faîtages de bourrines étaient surmontés de plantes grasses, souvent de la joubarbe, parfois voisinant avec des pieds de misère. La plantation de ces végétaux répondait à deux nécessités. La première, qui ne crée pas d’équivoque : le renforcement et le maintien du faîtage fait de bauge par le faisceau dense des racines, la seconde qui répond aux croyances populaires : la protection de l’habitation contre la foudre. La joubarbe (Jovis barba : barbe de Jupiter) était très souvent installée parce qu’elle était censée épargner la maison des feux du roi des dieux chez les Romains : Jupiter, le lanceur de foudre.

Faîtage d’une bourrine de Notre-Dame-de-Monts, vers 1950. La joubarde est censée la protéger de la foudre, selon la croyance populaire.

Le bouquet de faîtage Une tradition tombée en désuétude depuis une dizaine d’années dans la région, étudiée alors qu’elle est encore vivante dans le Bocage vendéen, est celle de l’installation du bouquet de faîtage. « Quand le pignon était à hauteur, on juchaitt’ un bouquet de ce qu’on avait sous la main. Ça symbolisait l’honneur d’avoir bien travaillé. Le patron de la maisounaïe payait un coup à boire aux travailleurs... À leur tour, lorsque la charpente était installée, les artisans cueillaient des branches de tamaris et en formaient un bouquet qu’ils fixaient en tête du poinçon. À nouveau, le futur résidant se devait d’offrir une tournée 34 ». Lorsque ces traditions subsistent encore, cette petite cérémonie est repoussée en fin de journée, à la débauche des compagnons. Les chefs d’entreprise d’aujourd’hui nous ont informés que « cette coutume disparaissait parce qu’ils n’avaient plus à faire avec le futur résidant ou le propriétaire. Les réceptions de chantier se font par le maître d’œuvre ou l’architecte. Ce qui est nouveau pour la fin d’un chantier, ce sont les pénalités de retard... » Nous n’avons pas relevé de poterie de faîtage ou épi de faîtage dans la région étudiée, excepté à La Garnache où un pot de fleur domine un bâtiment imposant auprès de la mairie. Est-ce l’un des derniers signes de cette coutume disparue ailleurs ? 34

Cf. note 15, p. 42.

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Une belle cheminée Nous avons constaté qu’un soin particulier était apporté à la construction des cheminées. Mémorisons l’importance que l’on attachait à la hauteur et à l’esthétique des cheminées, c’était une démonstration bien visible de moyens. Il n’était pas rare qu’elles soient factices. Même sur certaines bourrines, à priori maisons de pauvres, la cheminée pouvait être en briques, obligeant le propriétaire à s’entourer des compétences d’un professionnel qu’il lui fallait payer. C’était un luxe !

Carte postale indiquant Notre-Dame-de-Riez pouvant dater des années 1910 si l’on se réfère aux vêtements des personnages. On remarque, fait relativement rare à cette époque-là, une cheminée construite en briques.

Nous avons remarqué, à la lecture de photographies du début du siècle, des éléments architecturaux concernant les cheminées de certaines bourrines. Il s’agit de quatre boules de terre, d’un diamètre d’environ 10 centimètres, fixées par une cheville plantée à chacun des angles du conduit. Personne n’a pu en donner l’explication excepté monsieur Léon Chaigneau 35 : « On faisait ça parce que les angles étaient fragiles et que, soi-disant, ces boules empêPose des boules de terre sur les quatre angles de la bourrine à Chartier. Le Daviaud, 1987. chaient l’eau de pluie de s’infiltrer ». Cette raison ne nous suffit pas et nous croyons voir dans cette coutume la survivance d’une croyance beaucoup plus ancienne : celle de la protection des habitations contre la foudre par la hache polie ou pierre de tonnerre. 35

Léon Chaigneau, maçon, Saint-Jean-de-Monts, enquête Arexcpo, 1993.


Les us et coutumes

Détail de la cheminée avec ses quatre boules.

La bourrine du Pont de l’Arche, Saint-Hilaire-de-Riez, vers 1890.

Le crochetage de la trémaillère C’est une coutume connue ailleurs sous l’appellation : pendaison de la crémaillère. C’était vraiment une marque de prise de possession, d’occupation officielle d’un lieu. On pouvait suspendre les récipients pour la cuisson des aliments et ceux réservés à l’eau de vaisselle et de lessive, symboles de la vie domestique. À cette occasion, beaucoup de familles invitaient le prêtre à bénir la nouvelle maison. Cette petite cérémonie avait pour but de placer la maison sous la protection de Dieu et de repousser les tentations du démon. Une veillée rassemblait la famille, les bâtisseurs et les voisins. Notons ici la révélation par plusieurs informateurs du fait suivant : les plus démunis taillaient leur crémaillère dans une branche de bois dur, d’obier par exemple.

La bénédiction de la maison La pendaison de la crémaillère ne correspondait pas forcément à la bénédiction de la maison. Lorsque le prêtre se déplaçait, il formulait les prières rituelles pour la protection du logement, de la famille, puis était invité à parcourir les différentes dépendances et à bénir la grange-étable. C’était, pour les plus pratiquants, l’occasion de faire bénir une statue et un crucifix qui étaient installés dans un petit meuble suspendu près de la porte d’entrée. Mais, dans la plupart des cas, le symbole de cette protection était un crucifix plaqué contre un mur auquel était accolé le rameau béni ou, depuis une centaine d’années, un rosaire imposant suspendu sur la hotte de la cheminée.À plusieurs reprises, lors de la restauration de charpentes anciennes, les artisans ont découvert des médailles clouées sur celles-ci.

Les croix blanches Selon le réputé Dr Marcel Baudoin 36, dans un article extrait du Bulletin et mémoires de la société d’anthropologie de Paris, 1908, « Les croix blanches étaient la christianisation d’un culte préhistorique. Le visiteur attentif remarque, en cette fin du XXe siècle, un grand nombre de traces de cette coutume en voie d’extinction. 36

Dr. Marcel Baudoin, La croix blanche des fermes du Bocage, Bulletin et mémoires de la société d’anthropologie de Paris, 1908.

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« Ces croix blanches étaient de formes variées et pouvaient être peintes indifféremment sur le mur ou sur une porte pleine, aussi bien sur un enduit de mortier de chaux que sur celui de bauge. Elles rappellaient la croix du Christ, les calvaires avec leur socle, les croix de carrefour ». Notons également la présence de cercles et de cœurs relevée par l’archéologue. Le savant médecin de Saint-Gilles-sur-Vie a constaté que ces signes ne se retrouvaient que sur les constructions d’exploitants agricoles ; il n’en a trouvé « aucune sur celles d’ouvriers, d’artisans, de commerçants ou de bourgeois ni sur les maisons de grands catholiques reconnus, ni sur les presbytères, couvents et autres maisons bien pensantes. De très rares exemples ont été relevés sur les moulins, mais là, dit-il, les fariniers touchent de près aux agriculteurs. »

Croix blanche en pignon. La Barre-de-Monts, vers 1910.

Le blanchissage Nous pensons qu’il faut voir dans le blanchissage, hormis le rôle protecteur et de confort, une tradition liée à la résurrection de Jésus-Christ. Cette préparation de propreté, de blancheur extrême pour l’arrivée de Pâques correspond sans doute à ce retour de la mort à la vie. Cet empressement, cette volonté d’avoir achevé ses travaux pour la fin du carême... tels qu’ils sont avoués par les derniers témoins de ces pratiques, ne pouvaient être que commandés par un ordre divin. Nous reprendrons la définition d’Émile Boutin 37 : « Blanchissage et non blanchiment. Blanchissage est le terme usuel pour toutes les corporations du bâtiment parce qu’il implique l’idée de nettoyage comme dans le blanchissage du linge, et c’est bien dans ce sens qu’il est employé en Vendée. » Cette remarque nous permet de compléter notre hypothèse, puisque les descriptions entourant les préparations pascales que nous ont confiées nos interlocuteurs englobent dans ce blanchissage celui de l’intérieur des logements, des rideaux, des nappes. L’exposition au soleil de la literie, des vêtements, l’ouverture des meubles. Il fallait résolument changer d’air, installer la blancheur pour sa démonstration de propreté, son renvoi de la lumière. C’est une sorte de résurrection. En 2002, scène aujourd’hui devenue rare et qui pourtant fut pratiquée par toutes les familles il y a moins de Notons que ces mêmes travaux y soixante-dix ans : l’exposition de la literie au soleil durant la semaine pascale. Avec le blanchiment du logis ou chaulage, toute une symbolique qui est vouée à sa disparition dans la décénnie en cours. Abriures : paillasses, auraient gagné en efficacité s’ils couetti, tétt’s d’oreilère, couvertes, devant la bourrine du Bois-Juquaud, à Saint-Hilaire-de-Riez. C’est une iniavaient été mis en œuvre quelques tiative du Comité des usagers de la bourrine du Bois-Juquaud, association qui assure, entre autres, l’animation semaines plus tard. du site depuis sa fondation dans le cadre de l’écomusée de la Vendée.

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Émile Boutin, La maison vendéenne, extrait de la Revue du Bas-Poitou, 1925.


Les us et coutumes

Que faut-il faire pour la mémoire ? Dans la mesure du possible, respectez les caractéristiques techniques. Roseaux posés en éventail, technique particulière au Marais de Bouin. La gal’rie du P’tit Moulin de Châteauneuf. 1986.

Une suggestion gratuite et fort utile, c’est d’abord de prendre des clichés de tout ce qui existe de nos jours, avec des détails, des croquis, des témoignages... Pour que les techniques soient mémorisées. Hangar à La Montagne, en Loire-Atlantique, qui a mérité un reportage photo de l’association Sant-Yann, de Saint-Jean-de-Boiseau, en 2000. Depuis, ne cherchez plus, la tôle a fait son oeuvre sur l’ensemble.

Laissez faire, ça vieillit pas si mal que cela, seul vrai souci : les parasites.

L’une des fermes du Casino d’Orouet. Saint-Jean-de-Monts, 2005. L’un des rares endroits où l’on peut se ressourcer.

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Bourrineurs hier

M. Chartier, dit le chatt’, de La Barre-de-Monts, vers 1970.

M. Maurice Baudin, de Notre-Dame-de-Monts, vers 1980.

M. Michel Trichereau, de Saint-Jean-de-Monts, en 2001.


Les us et coutumes

Chaumiers aujourd’hui

Les chaumiers de l’entreprise artisanale Christian Le Pennec sur le toit de la bourrine de La Motte, en Orouet, Saint-Jean-de-Monts, 1995.

Robert Cornevin, chargé de mission auprès de la ville de Saint-Hilaire-de-Riez, à la bourrine du Bois Juquaud, antenne de l’écomusée de la Vendée. Saint-Hilaire-de-Riez, 1999.

Philippe L’Hériteau, artisan, sur un chantier, route des Fontenelles, Saint-Jean-de-Monts, 2001.

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Quelques informations pour... ... voir des constructions rustiques en terre et végétaux Il faut être attentif en parcourant la Vendée. Mais trois sites visitables en recèlent.

L’écomusée du Daviaud La Barre-de-Monts, avec deux bourrines caractéristiques des marais subsaumâtres : celle aux Thomazeau qui est restée dans son état et qui représente l’une des étapes de la modernisation de ce type de logement dans les années 1960, et celle aux Chartier, reconstruite à l’identique, représentant les années 1900. Une salorge de Bouin, la gal’rie des Fornées, celle de la Basse-Épine complètent la collection.

La bourrine du Bois-Juquaud à Saint-Hilaire-de-Riez, avec son unité agro-pastorale caractéristique de la zone appelée rive. La bourrine a été restaurée et les dépendances : gal’ries, laiterie, joukritt’… reconstruites d’après enquêtes. Une exposition sur l’architecture en terre avec film vidéo est présentée à l’accueil.


Les us et coutumes

La bourrine à Rosalie à Sallertaine, qui est également une unité agro-pastorale de marais doux animée par une association.

... entretenir ou restaurer Le conseil général de la Vendée a créé une ligne budgétaire pour venir en aide aux propriétaires pour la réfection au titre du patrimoine rural bâti et non protégé des petites communes. La communauté de communes Océan-Marais de Monts, place de la Paix, à Saint-Jean-de-Monts, entretient un service qui participe à la constitution de dossiers pour la restauration des toits de végétaux. Des aides financières peuvent être obtenues.

Le CAUE de la Vendée peut guider et conseiller les candidats à la restauration, voire la construction. L’association Maisons paysannes de France, possède de la documentation. Un contact : la présidente Madame Claudine Schnepf, Le Fief Mignoux, 85120 Saint-Maurice-le-Girard. Le maître-d’œuvre Monts-Toit, à Saint-Jean-de-Monts, peut vous aider dans votre démarche.

Loge, à Mortevieille, en La Boissière-des-Landes, construite dans les années 1990. La couverture de paille d’origine a été remplacée en 1996 par des roseaux.

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... participer à l’enrichissement des connaissances de la Vendée

Les images de cet ouvrage proviennent de mises à disposition de plusieurs centaines de personnes, simples détentrices d’images familiales et de collectionneurs. Ces documents sont empruntés le temps de leur numérisation puis restitués. En 2006, pas moins de 70 000 images constituent le patrimoine rassemblé et conservé par EthnoDoc, section d’Arexcpo en Vendée (Association de recherche et d’expression de la culture populaire). Grâce à l’intérêt que les Vendéens portent à leur histoire et à leur patrimoine, d’autres clichés complèteront ce fonds inestimable par la valeur culturelle qu’il représente. À ces images fixes sont associées les images animées que produisent le cinéma et la vidéo. Pour participer à cette démarche, il suffit de contacter :

Centre de documentation du patrimoine immatériel EthnoDoc Place Louis-de-La-Rochejacquelein 85300 Le Perrier par courriel : arexcpo.envendee@wanadoo.fr

Une partie de ces images est consultable en des lieux publics : bibliothèques, cybercentre, archives départementales, cédéthèques… mais aussi par Internet : Images-de-Vendee (site en cours de réalisation). Pour tous renseignements, voir l’adresse ci-dessus. Plusieurs dizaines de milliers de témoignages sonores parlés ou chantés, enregistrés auprès des Vendéens, sont également gérés par EthnoDoc-Arexcpo. Pas moins de 8 800 pièces musicales et 17 000 témoignages parlés sont accessibles à la consultation auprès des mêmes services que ceux énumérés ci-dessus.


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Bibliographie, pour en savoir plus… AIZAC Alain d’, Les bourrines du Marais de Monts, La vie à la campagne, Noël, 1924. BAUDOIN Marcel, Les croix blanches des fermes du Bocage, Bulletin et mémoires de la société d’anthropologie de Paris, 1908. BOUTIN Émile, La maison vendéenne, Revue du Bas-Poitou, pp. 39-45, 1925. BERTRAND Jean-Pierre, Maisons traditionnelles du Nord-ouest vendéen, Saint-Jean-de-Monts, Mémoire des Vendéens Arexcpo, 1995. CAVOLEAU J.-A., Statistiques ou description générale de la Vendée, Fontenay-le-Comte, Robuchon, 1844. COUTUREAU Éric et MAHEUX Hubert, Yeu et Noirmoutier, îles de Vendée, Nantes, Éditions de l’Inventaire, 1994. DAZELLE Anne, LEMOINE Jean, Regarder et comprendre les maisons de notre région, La Roche-sur-Yon, CAUE de la Vendée, 1980. DEBARRE Jean, enquêtes sur l’architecture rurale, chantier 1425, Paris, musée national des Arts et Traditions populaires, 1942-1945 (archives inédites, coll. Arexcpo). FAUCHEUX Paul, La typologie de l’habitat vendéen et Méthodes traditionnelles et pratiques modernes de restauration, Usagers Partenaires (s.d.) FILLON Benjamin et ROCHEBRUNE Octave de, Poitou et Vendée, études historiques et artistiques, Niort, H. Clouzot, 1887. FLORENCE Jean, « La bourrine, maison du Marais Breton, en Vendée », BT, École moderne française, n° 754, 1972. GAIGNET Louis, Lexique patois-français, les mots qui racontent la vie d’autrefois, Nîmes, Lacour, 1997. GAUTHIER Joseph-Stany, Les maisons paysannes des vieilles provinces françaises, Paris, Librairie Ch. Massin & Cie, 1944. GUITTENY Éloi, Le vieux langage du Pays de Retz, Nantes, Siloë, 2000. JEAN Suzanne, L’architecture rurale française, Poitou, pays charentais, Paris, Berger-Levrault, 1981. MONCIS-MARTEL Jean-Christophe, Vivre au pays maraîchin, Paris, Pardès, 1983. PERRAUDEAU Gilles, Les bourrines du Marais Nord vendéen, Séquences, 1988. MOURAIN de SOURDEVAL Charles, Premier dictionnaire du patois de la Vendée, édition présentée par Pierre RÉZEAU, La Roche-sur-Yon, Centre vendéen de recherches historiques, 2003. ROUSSEAU Julien, À travers le Marais Breton vendéen, Saint-Cénéré, éditions Saint-Michel, 1968. SVENSON Lors-Owe, Les parlers du Marais vendéen, Göteborg, Romanica Gothoburgensia, 1959. Articles sur l’architecture en terre crue, série d’articles par Jean-Pierre Bertrand, Presse-Océan, 1983-1984. Construire en Vendée, direction départementale de l’équipement, La Roche-sur-Yon, et Michel DUCHARME, architecte conseil, conseil général de la Vendée, 1975. Les courtines, une spécialité boiséenne, Société d’histoire de Saint-Jean-de-Boiseau, http//boiseau.free.fr. « Maisons en terre hier et aujourd’hui », BT, École moderne française, n° 1002, 1988. Terre d’architecture, regards sur les bourrines du Marais de Monts, édition communauté de commune Océan-Marais de Monts, 2004.

Sources sonores : enquêtes Arexcpo BODIN Joseph, 1905-1915 agriculteur, Notre-Dame-de-Monts, 1983. BODIN Maurice, né en 1939, agriculteur, puis chargé de mission pour la construction en terre au Daviaud, 1981- 1997. CHAIGNEAU Léon, né en 1907, artisan maçon, Saint-Jean-de-Monts, 1993. DRONET Gustave, né en 1935, Beauvoir-sur-Mer, 1993. DUPONT François, 1914-1992, agriculteur, Notre-Dame-de-Monts, 1983. NAULLEAU Joséphine, 1899-1991, agricultrice, Saint-Jean-de-Monts 1984.

Un CD-Rom : La bourrine, une construction traditionnelle du Marais Breton vendéen comportant entre autres des séquences filmées de construction et de couverture en roseau, en vente à la bourrine du Bois Juquaud et à l’écomusée du Daviaud ou sur commande : www.arexcpo.org.


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Iconographie Clichés de couverture : Jean Thiéry • Page 6, croquis Jean Debarre, coll. Arexcpo • Page 8, cliché Alain Corthier, fonds TGV • Page 10, dessin anonyme, Album de l’industrie • Pages 12, 13 et 14, gravures d’Octave de Rochebrune • Page 13, cliché Guy Barbot, coll. Parc interrégional du Marais Poitevin • Page 15, dessin extrait de A l’ombre des châteaux forts, Gallimard-Larousse • Page 16, extraits de la carte de Cassini et de la carte IGN • Cliché E. Phélipeau, coll. F. Garret, * Cliché J.-P. Bertrand, page 18 * Cliché anonyme, coll. L. Grasset, page 19 * Cliché P. Bertrand, coll. Bertrand-Gruneberg, page 20 * Carte postale Jehly-Poupin, coll. P. Averty, page 21 * Croquis I. Milcent, Monts-Toit, et J. Debarre, page 22 * Cliché et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du Bois-Juquaud, page 22 * Carte postale Jehly-Poupin, coll. A. Retureau, page 23 * Cliché et coll. Jean Thiéry, page 24 * Carte postale Poupin, coll. P. Averty, page 25haut, cliché J.-P. Bertrand, page 25bas * Cliché et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du Bois-Juquaud, page 26haut, J. Thiéry, page 26bas * Cliché J. Launois, page 27 * Carte postale, Maindron tabac, coll. Parc Interrégional du Marais Poitevin, page 28haut, carte postale Artaud frères page 28centre et cliché Guy Barbot page 28bas * Cliché E. Phélipeau, coll. F. Garret, page 29haut, cliché anonyme, coll. J. Mignet, page 29centre, carte postale C.L., coll. M. Moreau, page 29bas * Cliché J. Launois, page 30haut, cliché J.-P. Bertrand, page 30bas * Cliché anonyme, coll. B. Perraudeau, page 31haut, cliché et coll. J. Thiéry, page 31bas * Cliché et coll. J. Thiéry, page 32haut, cliché et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du Bois-Juquaud, page 32bas * Carte postale Nouvelles Galeries, coll. A. Retureau, page 33haut, cliché J.-P. Bertrand, page 33bas * Cliché anonyme, coll. X. Chauvière, page 34 * Cliché et coll. J. Thiéry, page 36 * Cliché J.-P. Bertrand, page 37 * Cliché anonyme, coll. M. Bodin, page 38 * Cliché et coll. J. Thiéry, page 39 * Cliché J.-P. Bertrand, page 40haut, cliché et coll. J. Thiéry, page 40bas * Cliché et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du Bois-Juquaud, page 41 * Cliché Y. Tenailleau, coll. Mémoire des Olonnes, page 42 * Carte postale, Artaud-Nozais, coll. P. Averty, page 43 * Carte postale E. Breteau, coll. Photo-club de Notre-Dame-de-Monts, page 44 * Cliché et coll. J. Thiéry, page 45 * Cliché C. Buchou, coll. Briaud, page 46haut, cliché anonyme, coll. R. Berjonneau, page 46centre, cliché anonyme, coll. L. Vrignaud, page 46bas * Cliché J. Thiéry, page 47haut, * Cliché et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du BoisJuquaud, page 47haut, cliché et coll. J. Thiéry, page 47centre, cliché J.-P. Bertrand, page 47bas * Cliché J.-P. Bertrand, page 48 * Carte postale Vasselier, coll. J. Bertet, fonds Sant-Yann, page 49 * Croquis Société d’histoire de Saint-Jean-de-Boiseau, cliché T. Herfray, page 50bas * Cliché et coll. J. Thiéry, page 52 * Croquis I. Milcent, MontsToit, page 53haut, cliché et coll. J. Thiéry, page 53bas * Cliché et coll. J. Thiéry, page 54 * Carte postale ArtaudNozais, coll. P. Averty, page 55haut, cliché et coll. J. Thiéry, page 55bas * Carte postale Jehly-Poupin, coll. P. Averty, page 56haut, cliché P. Bertrand, coll. Bertrand-Gruneberg, page 56bas * Cliché J.-P. Bertrand, page 57haut, croquis Ecole d’architecture de Nantes, coll. Arexcpo, page 57 bas * Cliché et coll. J. Thiéry, page 58haut gauche et bas, cliché J.-P. Bertrand, page 58haut-droite * Cliché et coll. J. Thiéry, page 59 haut, cliché et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du Bois-Juquaud, page 59bas * Croquis J. Debarre, page 60 * Cliché et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du Bois-Juquaud, page 61 * Cliché et coll. J. Thiéry, page 62haut, cliché J.-P. Bertrand, page 62bas * Cliché et coll. J. Thiéry, pages 63 et 64 * Cliché J.-P. Bertrand, page 65haut, croquis J. Debarre, page 65bas * Cliché et coll. J. Thiéry, pages 66 et 67 * Croquis J. Debarre, page 68haut-gauche, clichés et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du Bois-Juquaud, page 68haut-droite et centre, cliché et coll. J. Thiéry, page 68bas * Carte postale non-mentionné, coll. P. Averty, page 69 * Carte postale Foucher, coll. J. Péraud, page 70 * Cliché et coll. J. Thiéry, page 71 * Carte postale Gaby Artaud, page 72haut, cliché J.-P. Bertrand, page 72bas * Cliché S. Berger, coll. Parc Interrégional du Marais Poitevin, page 73haut, cliché J.-P. Bertrand, page 73centre et bas * Cliché et coll. J. Thiéry, page 74 * Gravure d’O. de Rochebrune, page75 * Cliché et coll. J. Thiéry, page 76 * Carte postale Poupin, coll. P. Averty, page 77 * Carte postale Gaby Artaud, coll. A. Retureau, page 79 * Carte postale non-mentionné, coll. J.-M. Viaud, page 80, cliché et coll. J. Thiéry, page 80bas * Carte postale J. Robuchon, Coll. G. Paroi, page 81 * Carte postale Jehly-Poupin, coll. A. Retureau, page 82haut, cliché et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du BoisJuquaud, page 82bas * Cliché G. Blin, coll. Sant-Yann, page 83haut, cliché J.-P. Bertrand, page 83centre et bas * Cliché et coll. J. Thiéry, page 84haut et centre, cliché J.-P. Bertrand, page 84bas * Cliché J.-P. Bertrand, page 84haut et bas, cliché et coll. Comité des Usagers de la Bourrine du Bois-Juquaud, page 84centre * Cliché et coll. J. Thiéry, page 86haut, cliché B. Perraudeau, page 86bas * Clichés et coll. Jean Thiéry, page 87haut, cliché et coll. TGV, page 87bas * La plupart de ces images sont extraites des fonds confiés à EthnoDoc. Elle sont consultables à partir des bases de données Racine&mémoires gérées dans le cadre du RADdO, par EthnoDoc, pour Arexcpo.


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Remerciements

La mise en page de cet ouvrage a été confiée aux étudiants de l’IUT de La Roche-sur-Yon, département Information et communication, sous la direction de Marijo Pateau, enseignante en édition. Pour la mise en page, nous adressons notre gratitude aux étudiants suivants : Delphine Bonneau, Elsa CasanovaRocard, Claire Lemaître, Céline Thorez ; à Astrid Tordeux pour l’achèvement de cet ouvrage concernant la mise en page, les corrections orthographiques et typographiques et la couverture. La relecture, pour l’auteur, a été réalisée par Michèle Micheau, Philippe Côme et Serge Teillet. La parution est l’œuvre de passionnés de l’histoire de la Vendée : Yves Batard, Guillaume Blin, Xavier Chauvière, Alain Corthier, Pierre-Marie Dugué, Bertrand Friconneau, Jean Mignet et Marie-Gabrielle Renaudineau ; de témoins directs et de tous les possesseurs de documents. L’auteur tient à remercier l’ensemble des personnes citées précédemment et Mesdames Madeleine Cormery-Debarre, Roselyne Florence, Isabelle Bertrand et Claudine Schnepf, Messieurs Maurice Bodin, Francis Ribémont et Jean Thiéry.



Achevé d’imprimer en juin 2006 Par l’imprimerie IGO, Rue de la à machin, 85xxx pour le compte de Vendée Patrimoine N° d’éditeur xxxxxxxxx Dépôt légal : juin 2006

Adresses pour la correspondance Centre de documentation du patrimoine culturel immatériel EthnoDoc Place Louis de La Rochejacquelein, 85300 Le Perrier Tél. 08 75 31 79 06 ou 02 28 11 42 51 par courriel : arexcpo.envendee@wanadoo.fr Vendée Patrimoine Chez le trésorier M. Jean Mignet La Gendronnière 85170 Le Poiré-sur-Vie



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