paperJam Economie & Finance- Février 2009

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Spiece

Les mains dans le cambouis D’abord spécialisée dans la télémesure pour le secteur public,  la société concentre aujourd’hui ses efforts vers l’industrie.

Nicolas Raulot (texte), Julien Becker (photo)

En rencontrant Bernard Laurent dans les locaux de Spiece à Esch-sur-Alzette, on comprend tout de suite qu’on a affaire à un entrepreneur. Un vrai. De ceux qui relèvent les manches tous les jours, non pas pour faire fortune en quelques années, mais pour préserver leur indépendance, rester à l’équilibre et poursuivre l’aventure. Ingénieur agro­ nome reconverti dans l’informatique, ce Belge est tout le contraire d’un spéculateur, d’un Warren Buffett, si le richissime américain incarne l’action­ naire qui s’enrichit en dormant ou perd quelques milliards quand la Bourse déprime. Spiece a été créée en janvier 2003 par Gabriel Bechoux, aujourd’hui à la retraite, Bernard ­Laurent et quelques transfuges du département électronique de Solelec, une société luxembourgeoise du groupe Suez spécialisée dans la construction d’installations électriques. «Comme nous étions livrés à nous-mêmes dans un groupe qui n’avait pas l’intention de développer cette activité, l’équipe a décidé de voler de ses propres ailes», explique le quadragénaire. Le passage par le Technoport ne dure que six mois. «Nous avons été jusqu’à six à travailler dans notre bureau du Technoport qui est vite devenu trop étroit avec nos machines, nos ordinateurs», raconte-t-il. Aujourd’hui installée dans la zone industrielle Lankelz, Spiece compte neuf collaborateurs et envi­sage d’étoffer ses effectifs jusqu’à douze ou quinze personnes. Il est en revanche bien difficile de résumer d’un mot les métiers aussi techniques que diversifiés de l’entreprise. Le site Internet est un peu fouillis et on n’est guère plus avancé lorsqu’on apprend le sens de l’acronyme: Société de Projets Internationaux, Engineering, Communication, Environnement (Spiece). «Spiece, c’est de l’informatique sur mesure dédiée aux besoins des clients», avance néanmoins Bernard Laurent.

Un vivier d’entreprises La télémesure pour l’environnement, qui re­pré­ sente encore 35% d’un chiffre d’affaires de 800.000 euros par an, constitue l’activité historique: «Nous fournissons notamment un réseau de télémesure hydrologique pour la gestion des crues de la Région Wallonne. Nous nous chargeons du domaine informatique de 250 stations équipées de capteurs». Au Grand-Duché, Spiece équipe égale-

«Spiece, c’est de l’informatique sur mesure dédiée aux besoins des clients». Bernard Laurent

ment les stations météorologiques du ministère de l’Agriculture. Les données récoltées (précipitations, température, humidité, ensoleillement, vitesse du vent…) sont mises à disposition sur le site Internet de l’Asta (Administration des services techniques de l’agriculture). Mais ce domaine s’est avéré difficile à développer, faute de débouchés suffisants dans les pays voisins, comme espéré lors de la création de la société. Tout comme celui des panneaux routiers, qui pèse seulement 5% des revenus. Aujourd’hui et depuis 2005, la priorité, c’est l’industrie (60% du chiffre d’affaires). L’implantation de Spiece au Luxembourg lui donne accès à un vivier d’entreprises, et en premier lieu à ArcelorMittal, qui fait partie d’un portefeuille de clients déjà étoffé. «Cette diversification a limité notre dépendance au secteur public et aux collectivités locales, dont les contrats peuvent être rapidement remis en cause par de nouveaux appels d’offres. Par ailleurs, l’industrie nous procure des revenus récurrents grâce aux contrats de maintenance que nous mettons en place».

Le contrôle qualité est l’une des spécialités maison. Exemple? «Pour son usine d’Arlon, Ferrero (le confiseur) nous a demandé en 2007 de contrôler une production d’œufs en chocolat. Une caméra prend l’image des œufs lorsqu’ils sont en chute libre à raison de 15.000 pièces à la minute». Les points communs entre les chocolats et la mesure hydrologique? Il n’y en a guère. Spiece sait simplement acquérir de nouveaux savoir-faire et compétences, pour s’adapter à la demande et au marché. Spiece travaille aussi avec la Société Mosellane des Pistons à Yutz en Moselle. «Il s’agit là aussi de contrôle qualité par l’image, au rayon X cette fois». Mais davantage encore que le développement commercial, la préoccupation majeure de Bernard Laurent reste la trésorerie. Et ce depuis les débuts de l’entreprise. Faute du soutien des banques, «qui ne prêtent que lorsqu’on a déjà de l’argent», comme il dit en souriant, Spiece a dû faire des sacrifices et même refuser de travailler avec certains clients. Grâce à un capital augmenté à deux reprises par la vingtaine d’actionnaires et des fonds propres de 240.000 euros, la petite société luxembourgeoise se sent désormais les reins plus solides. Malgré la crise.

paperjam  | Février 2009 | ÉconomIE & Finance

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