Agir pour l'avenir

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Agir pour l'avenir Bilan annuel de l’impact du commerce Êquitable 2010 - 2011 Organisations de petits producteurs


Sommaire

Groupement de producteurs de Thiekouthian, Sénégal

Introduction..................................................................................p.3 Le commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar.....p.4 Le commerce équitable : un levier d’action................................p.6 L’impact du commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar...........................................................p.8 Les producteurs de coton d’Afrique de l’Ouest et du Centre.....p.10 De réelles opportunités de développement pour les producteurs..................................................................p.12 Organisations renforcées, moteur du développement rural.....p.14 Un renforcement de la place et du rôle des femmes................p.16 Une sensibilisation aux problématiques environnementales...p.18 Une attention particulière portée à la qualité...........................p.20 Des résultats pour construire l’avenir.........................................p.22

Crédits photos : Didier Gentilhomme, François Guénet, Frédéric Raevens, Kennet Havgaard, Max Havelaar France, Simon Romain, Stefan Lechner, Tabitha Otwori

En couverture : Didier Gentilhomme, François Guénet, Max Havelaar France

Maquette : www.emilieroudier.com

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Introduction

Abainenamar Yorokamu, Président du Conseil d’Administration du réseau Fairtrade Africa

En Afrique, être producteur signifie être petit agriculteur ou être travailleur agricole, chacun faisant face aux conditions difficiles du marché. Les producteurs, agriculteurs ou travailleurs, sont au cœur du système Fairtrade / Max Havelaar, comme principaux bénéficiaires. Ils sont la raison d’être du commerce équitable Fairtrade / Max Havelaar. Estce la théorie ou la réalité ? Le producteur en a-t-il connaissance ? Au fil des années, le commerce équitable s'est développé tant sur le plan du marché que de la diversité des produits certifiés. L’impact positif sur le bien-être des producteurs est un bénéfice attendu d’une telle croissance. Pour cela, l’évaluation de l’impact doit être régulière et les résultats des études doivent être partagés avec les partenaires autant qu’avec les producteurs. C’est avec grand plaisir que nous accueillons ce bilan d’impact qui répond à cette attente et apporte des informations aux partenaires et au public sur la contribution de Fairtrade / Max Havelaar au développement des producteurs africains. Pendant notre lecture de ce document, nous gardons en tête la vision du commerce équitable, « un monde dans lequel tous les producteurs bénéficient de conditions de vie sûres et durables, optimisent leur potentiel et décident de leur avenir ». Les changements globaux en cours, tels que la crise économique, le changement climatique et la concurrence toujours plus forte, doivent nous rappeler sans cesse la nécessité de travailler ensemble pour nous rapprocher de cette vision.

Dans le contexte africain, les enjeux d’un commerce équitable bénéfique incluront, dans un futur proche : • la maîtrise par les producteurs de la planification de leur développement, • une amélioration de la qualité et de la quantité des produits, ce qui passe par une démarche globale d’accompagnement des producteurs, • un engagement et un renforcement des capacités des producteurs et des communautés, qui garantissent la réussite et la durabilité de nos programmes en permettant aux producteurs de les prendre en charge, • et la mise en place de partenariats incluant les partenaires-clés, les ONG, les bailleurs et les gouvernements. Au sein du réseau Fairtrade Africa, nous souhaitons jouer un rôle majeur dans le processus de développement. D’abord par le renforcement de nos capacités, par nos partenariats locaux et régionaux et surtout, par l’exploration de toutes les voies possibles pour améliorer les conditions de vie des producteurs. Les producteurs africains, particulièrement les producteurs de coton, sont les plus marginalisés et participent très peu à l’économie mondialisée. Ils sont perçus comme de simples bénéficiaires du système, des receveurs de dons et non comme des producteurs de richesse qui devraient avoir leur place dans les débats. Les affaires tournent, personne ne porte clairement leur détresse à l’attention générale. Ainsi leurs problèmes demeurent irrésolus. Nous considérons ce document comme une contribution significative pour soulever ces questions. Nous devons continuellement chercher les meilleures voies pour que le système Fairtrade / Max Havelaar impulse des changements positifs et durables sur les conditions de vie de nos populations. Nous devons également continuer à collaborer pour identifier les aires de changements les plus significatives pour les producteurs africains ainsi que les indicateurs les plus pertinents pour évaluer ces changements. Je recommande ce document à chacun d’entre vous.

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Le commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar

Le commerce équitable : pour qui ? Pour quoi ?

Le commerce équitable : comment ça marche ?

Aujourd’hui, parmi le milliard de personnes qui souffrent de la faim dans le monde, les trois quarts sont des agriculteurs ou des ouvriers agricoles d'Amérique latine, d’Afrique et d’Asie. Isolés et en bout de chaîne, ils n’ont souvent pas les outils nécessaires pour transformer, vendre et exporter leurs produits. Ils manquent aussi d’informations sur les prix et les marchés. Les travailleurs ont, quant à eux, rarement la possibilité de défendre leurs droits.

Pour atteindre les objectifs qu’il s’est fixé, le système Fairtrade / Max Havelaar met en place des standards. Ces cahiers des charges sont définis au niveau international, en concertation avec les producteurs et tous les acteurs impliqués. Loin de figer une réalité vertueuse, ces cahiers des charges jalonnent les étapes d’un développement durable.

C’est pourquoi il apparaît indispensable qu’ils se regroupent pour s’organiser et être légitimement reconnus par les autorités politiques et les acteurs économiques. Le label Fairtrade / Max Havelaar assure des conditions commerciales plus justes aux producteurs du Sud. Regroupés au sein de collectifs gérés démocratiquement, ils sont en mesure de combattre la pauvreté par eux-mêmes, de renforcer leur capacité de négociation et de prendre en main leur propre avenir. De cette façon, ils sont également de moins en moins dépendants des aléas du marché et peuvent se construire une vie meilleure.

Dans le système Fairtrade / Max Havelaar, il existe des standards génériques auxquels s’ajoutent des standards spécifiques par produit. Révisés en 2010, les standards génériques, qui comportent à la fois des critères centraux et des critères de développement, s’organisent en quatre chapitres (voir graphique n° 1 et pour plus d’informations http://www.fairtrade.net/generic_standards.0.html). Les standards spécifiques au coton, incluant les prix minimum garantis et la prime de développement, ont été révisés en 2011. L’application des standards sur le terrain et les flux de marchandises sont systématiquement contrôlés par FLO-cert, organisme de certification indépendant, agréé ISO 65.

De gauche à droite : Récolte de cannes à sucre. Coopérative Asocace, Paraguay / Séchage des fèves de cacao dans l’un des centres de traitement et de stockage de la coopérative Fedecade, Equateur / Contrôle qualité des échantillonnages de lot de café. Coopérative Cesmach, Mexique.

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Graphique 1. Les critères du commerce équitable labellisé, leurs objectifs et portée

Critères généraux

Garantir la transparence des transactions commerciales

Commerce

Production

Activités commerciales et développement

Equilibrer les relations commerciales, stabiliser les revenus des producteurs et accroître leurs capacités d'investissement

Gérer de façon raisonnée et durable les ressources (gestion des pratiques de production, conditions de travail, gestion environnementale)

Renforcer les organisations de producteurs et développer leurs capacités

Critères repris dans d'autres systèmes de certification

Spécificité du système Fairtrade / Max Havelaar

Le commerce équitable : quelle statégie globale pour les producteurs ? Fairtrade / Max Havelaar a mis en place une stratégie globale pour renforcer l’impact du commerce équitable, accroître les bénéfices pour les producteurs du système et augmenter le nombre de bénéficiaires. Cela implique : au Sud, de développer l’offre de services d’appui aux producteurs, grâce au travail des représentants de Fairtrade International et à la mise en place de partenariats forts au niveau local, régional et international ; au Nord, de stimuler la croissance des ventes de produits labellisés Fairtrade / Max Havelaar et de communiquer autour des valeurs du commerce équitable (sensibilisation des consommateurs, engagement de nouvelles entreprises) pour multiplier les débouchés.

Consultation au sein du réseau de producteurs Fairtrade Africa à l’occasion de la révision des Standards Fairtrade / Max Havelaar de 2010.

Action de sensibilisation pour le commerce équitable. Quinzaine du Commerce Equitable, Paris.

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Le commerce équitable : un levier d’action

Pourquoi les producteurs de coton d’Afrique de l’Ouest et du Centre ont-ils besoin du commerce équitable ? Au cours des dernières années, la production mondiale de coton a considérablement augmenté. Ainsi, l’Afrique de l’Ouest et du Centre représente aujourd’hui un poids réduit face aux gros producteurs tels que la Chine, l’Inde ou les Etats-Unis avec lesquels elle se trouve en compétition sur les marchés internationaux. Dans ce contexte concurrentiel, l’instabilité des cours de la fibre1, libellés en dollars, place les producteurs ouest-africains dans une situation aléatoire. La situation est d’autant plus difficile pour eux qu’ils subissent aussi la faiblesse actuelle du dollar vis-à-vis de l’euro sur lequel leur monnaie, le franc CFA, est indexée à parité fixe. Cette crise ne doit pas faire oublier que le coton africain possède de nombreux atouts (récolte manuelle2, qualité, coût de production…) qui peuvent être valorisés sur le marché mondial. Dans les pays du Nord, les entreprises textiles sont de plus en plus interpellées par les consommateurs sur leurs responsabilités sociales et environnementales. Le label Fairtrade / Max Havelaar répond à ces demandes et constitue une réelle opportunité pour améliorer le niveau et le cadre de vie des producteurs. Pour eux, la vente du coton-graine est la principale, voire la seule, source de revenus.

Tri du coton pour extraire les débris et parasites. Groupement de producteurs Santan Koutou, Mali.

Le commerce équitable peut être un puissant levier d’amélioration de la compétitivité et de la durabilité des filières coton. De plus, il renforce les organisations de producteurs et accroît leur rôle au sein des filières.

es producteurs commercialisent du coton-graine au prix négocié avec les sociétés cotonnières en début de campagne. Après égrenage, ces dernières L commercialisent la fibre de coton selon la cotation sur les marchés mondiaux. 2 Le coton-graine peut être récolté manuellement ou mécaniquement. Dans le premier cas, le coton-graine contenu dans chaque capsule est prélevé à la main et plusieurs passages sont effectués pour récolter le coton à maturité. Dans le second cas, le coton-graine est récolté à la machine, par aspiration, et en un seul passage. Ce procédé prélève le coton, qu’il soit à maturité ou non, mais aussi des résidus de capsules, des débris de feuilles ou de branches. 1

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Quels sont les outils du commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar ? Les standards du commerce équitable Fairtrade / Max Havelaar offrent des garanties dans différents domaines : > Les exigences pour la vente des produits labellisés Fairtrade / Max Havelaar apportent des garanties économiques aux producteurs, contribuent à l’amélioration de leur niveau de vie et à la stabilisation de leurs revenus. Exemples : contractualisation, prix minimum garanti, prime de développement (voir encadré).

> Les exigences pour la production représentent des garanties environnementales. Elles contribuent à l’amélioration de la durabilité de la production et aussi à assurer aux producteurs des conditions de travail respectueuses de leur santé et de leur sécurité. Exemples : réduction de l’utilisation des produits chimiques, non utilisation de semences OGM.

> Les exigences pour le fonctionnement des organisations représentent des garanties sociales et contribuent à l’autonomisation des producteurs et au renforcement de leurs capacités. Exemples : non-discrimination, liberté d’association et de négociation collective, structure démocratique, administration transparente et participative.

Le prix minimum garanti est établi pour couvrir les coûts de production durable3 et assurer un niveau de vie décent aux producteurs et à leurs familles. Pour un même produit, il varie selon les régions, les modes de production et les variétés cultivées. La prime de développement est établie pour doter les organisations de producteurs d'une capacité d'autofinancement et d'investissement de base tant dans le domaine social (dispensaires, scolarisation, adduction d’eau…) que dans celui de la production (matériel de stockage, de séchage ou de transformation, formation…).

Le coton africain labellisé Fairtrade / Max Havelaar aujourd’hui La certification Fairtrade / Max Havelaar pour la production de coton a été introduite dans 4 pays d'Afrique de l’Ouest et du Centre au cours de la campagne4 2003-2004 : Burkina Faso, Cameroun, Mali et Sénégal. Aujourd’hui, 13 organisations de producteurs, soit plus de 40 000 agriculteurs, bénéficient du commerce équitable dans la région. Mali

Burkina Faso

Près de 200 organisations de base certifiées au travers de quatre unions régionales dans le sud du pays Un potentiel de 5 000 tonnes de fibre Fairtrade / Max Havelaar pour 2011-2012

Plus de 230 organisations de base certifiées au travers d’une union régionale et situées dans le sudouest du pays Un potentiel de près de 900 tonnes de fibre Fairtrade / Max Havelaar pour 2011-2012

Sénégal

Cameroun

Près de 100 organisations de base certifiées au travers de six unions situées dans l’extrême sud-est du pays Un potentiel de 2 000 tonnes de fibre Fairtrade / Max Havelaar pour 2011-2012

Près de 200 organisations de base certifiées au travers de deux unions régionales situées dans l’extrême nord du pays Un potentiel de 4 000 tonnes de fibre Fairtrade / Max Havelaar pour 2011-2012

I l s’agit de l’ensemble des coûts auquel l’organisation de producteurs doit faire face pour assurer une production viable sur le long terme, tant d’un point de vue économique qu’environnemental. Cela regroupe les coûts depuis l’établissement de la production (prix et amortissement du terrain et du matériel utilisé, main d’œuvre, semences, engrais, etc.) jusqu’à la transformation, l’emballage et l’exportation le cas échéant. 4 Campagne agricole : Il s’agit de la période à cheval sur deux années civiles et qui couvre l’ensemble des opérations depuis le semis jusqu’à la commercialisation. 3

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L’impact du commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar

Pourquoi évaluer l’impact du commerce équitable ? Le commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar vise à contribuer à la réduction de la pauvreté et s’inscrit dans une démarche de développement durable. L'évaluation de l'impact du commerce équitable a pour buts de : > comprendre les changements qu’induit participation au commerce équitable pour producteurs, leurs familles, leurs organisations plus largement, l’environnement dans lequel évoluent (voir graphique n° 2) ;

la les et, ils

> évaluer l’efficacité du commerce équitable au regard de ses objectifs ;

> analyser l’impact global du commerce équitable, c’est-à-dire vérifier en quoi il peut être un levier de développement durable dans ses 3 dimensions : écologique, économique et sociale (voir graphique) ; > améliorer le fonctionnement du système Fairtrade / Max Havelaar au service des producteurs.

Graphique 2. L'impact du commerce équitable labellisé Développement local et national

Dimension économique

Stabilisation et amélioration du revenu des familles

Dimension sociale

Dimension environnementale

Structuration et renforcement des organisations de producteurs

Actions du commerce équitable : des producteurs aux consommateurs

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Meilleure gestion des ressources naturelles


Comment évaluer l’impact du commerce équitable ? Un cadre méthodologique commun5 a été mis en place dès 2005 au sein de la fédération Fairtrade International. Chaque année, des études cofinancées par différentes associations nationales représentant le label Fairtrade / Max Havelaar, sont réalisées pour évaluer l’impact du commerce équitable sur une ou plusieurs filières, dans un ou plusieurs contextes géographiques. En 2010, quatre études ont été réalisées sur les filières coton en Afrique de l’Ouest et du Centre. Menées au niveau des organisations, les analyses procèdent d’une approche participative qui suppose des dialogues croisés avec les représentants des organisations, les groupes-cibles et les producteurs interrogés individuellement.

Réunion des membres du groupement de producteurs d’Afia, Sénégal.

Vrai ou faux ? L’impact du commerce équitable se limite au prix. FAUX. Un des principaux impacts du commerce équitable est la stabilisation des revenus. Cet objectif est atteint au travers d’un prix minimum garanti mais aussi d’autres outils économiques (prime de développement, préfinancement des récoltes). Avant tout, le commerce équitable s’inscrit dans une dynamique plus globale de renforcement des capacités des organisations de producteurs à négocier, à s’insérer sur les marchés internationaux et à choisir leur voie de développement (diversification de la production et des sources de revenus, amélioration de la qualité…). Le commerce équitable bénéficie uniquement aux producteurs. FAUX. La prime de développement, versée à l’organisation de producteurs, est très souvent investie dans des infrastructures sociales auxquelles ont accès tous les membres de la communauté (éducation, santé, etc.). Par ailleurs, le pouvoir de négociation commerciale et la crédibilité de ces producteurs bénéficient, par effet d’entrainement, à l’ensemble des producteurs de la filière, parfois jusqu’au niveau national. L’impact du commerce équitable est uniquement social et économique. FAUX. Les standards du commerce équitable Fairtrade / Max Havelaar comprennent des exigences environnementales avec des critères centraux tels que l’interdiction d’utiliser certains pesticides chimiques ou le respect des aires protégées, et des critères de progrès tels que la formation des membres à l’utilisation appropriée des engrais, à la lutte contre l’érosion des sols…

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n dispositif d’évaluation de l’impact du commerce équitable, a été mis en place. Il repose sur l’exploitation des données de suivi des organisations de proU ducteurs, la réalisation d’entretiens avec les producteurs, d’enquêtes afin d’analyser et d’attribuer les effets et impacts observés sur le terrain. Ce dispositif est utilisé pour toutes les filières et les contextes géographiques existants dans le système Fairtrade / Max Havelaar.

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Les producteurs de coton d’Afrique de l’Ouest et du Centre

Les organisations de producteurs étudiées Dans chacun des pays africains étudiés, les producteurs sont regroupés en organisations de base puis en groupements qui fournissent des services aux producteurs : distribution des produits de traitement pour les cultures vivrières, gestion des crédits, appui à l’organisation de la collecte du coton et du stockage dans les villages, etc. Les groupements sont fédérés en unions de différents niveaux géographiques, le niveau national étant celui de la structure faîtière6. Selon les cas, ce sont les groupements ou les unions qui sont porteurs de la certification. Plusieurs organisations de producteurs de coton en Afrique de l’Ouest et du Centre ont été choisies pour évaluer l’impact du commerce équitable. L’objectif était de comprendre les changements induits par le commerce équitable, au niveau des producteurs, de leurs familles, des organisations et plus largement du territoire.

Cinq organisations cibles au Sénégal, membres de l’US-GPC de Kédougou

Havelaar remonte à 2004, année au cours de laquelle trois groupements ont été certifiés, rapidement suivis par d’autres. Aujourd’hui, près d’une centaine de groupements sont engagés dans le commerce équitable, parmi lesquels Thiokétian, Wali Diala, Mithiou, Mako et Ndébou. Etude réalisée en 2010 par IDS et NRI, et étude réalisée en 2011 par Karine Laroche.

Abdulaye Sagna, Président du groupement de producteurs d'Afia, Sénégal.

L’Union de secteur des groupements de producteurs de coton (US-GPC) de Kédougou regroupe plus de 4 000 producteurs et intervient dans l’appui à l’organisation et à la professionnalisation des producteurs. L’engagement de l’US-GPC dans le commerce équitable labellisé Fairtrade / Max

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Productrices membres du groupement de producteurs d’Afia, Sénégal.

rganisation formée dans le cadre d’une structuration autonome des producteurs et qui regroupe des organisations professionnelles de base qui travaillent O dans une même filière ou d’un même secteur. Elle a pour but de faciliter les échanges, d’élargir les actions des organisations agricoles et de participer à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques de développement.


Quatre organisations cibles, membres de Mobiom, au Mali Le Mouvement Biologique Malien (Mobiom) est une société coopérative à but non lucratif créée en 2002 sous l’impulsion de l’ONG suisse Helvetas. Structure faîtière, cette union de plus de 70 organisations de base rassemble quelques 8 000 producteurs. En 2004, devant l’effondrement des prix du coton, le Mobiom opte pour le commerce équitable et obtient la certification Fairtrade / Max Havelaar. Faragouaran et Yanfolila, deux organisations historiques ainsi que Samanguéla et Faso Kanu, deux organisations plus récemment engagées dans le commerce équitable, ont été retenues pour l’étude.

Les principales missions du Mobiom sont l’appui aux producteurs dans la recherche de marchés et l’obtention des certifications équitable et biologique pour leur coton. Le mouvement s’est également fixé pour mission d’offrir aux producteurs les moyens de diversifier leurs activités avec la production et la commercialisation de mangues, de sésame, de beurre de karité ou encore de fonio. Etude réalisée en 2010 par IDS.

Tri du coton. Groupement de producteurs de Yanfolila, Mali.

Récolte manuelle du coton. Groupement de producteurs de Faragouaran, Mali.

Trois organisations cibles, membres de la CNPC, au Cameroun Créée en 2010 pour remplacer l’Organisation des producteurs de coton du Cameroun (OPCC), la Confédération nationale des producteurs de coton du Cameroun (CNPC) rassemble près de 1 600 groupements d’initiative commune. Parmi ces organisations se trouvent Dziguiléo, Héri et Mbor Moundang sur lesquels a porté l’étude et qui ont obtenu la certification Fairtrade / Max Havelaar en 2005 et 2006.

Les missions de l’OPCC étaient d’assurer la représentation des producteurs auprès des autorités publiques, de défendre leurs intérêts et de favoriser les échanges avec les autres organisations paysannes, au niveau national et international. La CNPC reprend ces fonctions mais a pour objectif principal la professionnalisation des producteurs. Pour ce faire, elle dispose d’un département technique qui joue un rôle majeur au niveau de la formation et de l’accès au matériel agricole et aux intrants. Etude réalisée en 2010 par NRI et IDS.

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De réelles opportunités de développement pour les producteurs L’agriculture, encore très souvent tournée vers la production vivrière, reste l’activité principale de la plupart des populations des zones rurales d’Afrique subsaharienne. En dépit d’une apparente amélioration des indicateurs sociaux-économiques, l’incidence de la pauvreté y reste forte. Ceci s’explique en partie par la structure de l’agriculture, sa faible productivité et, par conséquent, la difficile satisfaction des besoins de base.

Une amélioration des revenus des producteurs Le coton est cultivé dans le cadre de petites exploitations familiales, de 2 à 3 hectares, au sein desquelles il ne représente en moyenne que 40 % des surfaces cultivées. Le reste des terres est consacré aux cultures vivrières. Parce que c’est une culture commerciale, le coton permet une amélioration des revenus des producteurs. Le commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar renforce cette tendance. En effet, depuis le lancement du coton certifié Fairtrade / Max Havelaar dans chacun des trois pays étudiés, le prix minimum garanti (voir encadré) a toujours été supérieur au prix payé aux producteurs pour du coton non certifié et cela dans des proportions significatives : de 22 à 49 % au Sénégal, de 26 à 36 % au Cameroun et de 36 à 76 % au Mali (pour du coton bio et équitable). Les ventes en commerce équitable garantissent donc des revenus plus élevés aux producteurs.

Une amélioration du niveau de vie des producteurs La culture du coton améliore directement et indirectement la situation alimentaire des producteurs. Conséquences positives directes, on observe dans les exploitations cotonnières une diversification des activités agricoles et surtout, une hausse des rendements céréaliers. Cultivés en rotation avec le coton, maïs, petit mil, sorgho bénéficient

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Le prix du coton graine En général, le prix du coton-graine est renégocié chaque année entre les producteurs et les sociétés cotonnières7, en tenant compte des résultats de la campagne précédente. Au sein du système Fairtrade / Max Havelaar, le prix minimum garanti est fixé par zone géographique de production, par variété produite et, le cas échéant, par longueur de fibre. Les prix établis en 2004, ont été révisés en 2008. Pour les producteurs d’Afrique de l’Ouest et du Centre, ils s’élèvent à 0,42 €/kg pour le coton équitable et à 0,50 €/kg pour le coton biologique et équitable. A ces prix s’ajoute une prime de développement de 0,05 €/kg.

ompagnie nationale ou privatisée qui est responsable, dans sa zone d’activité, de l’approvisionnement des producteurs en semences et en intrants agricoles C pour la culture du coton, de leur accompagnement technique, de l’achat, du transport et de l’égrenage du coton-graine et de la commercialisation de la fibre.


des engrais utilisés pour le coton et voient leurs rendements majorés de 30%. De plus, grâce aux revenus supplémentaires du commerce équitable, les producteurs disposent de liquidité pour compléter et diversifier leur alimentation. Cela leur permet de mieux supporter la difficile période entre deux récoltes, généralement de juin à octobre. L’accroissement des revenus permet également aux producteurs de faire face aux dépenses de santé,

de financer la scolarité des enfants, de rembourser leurs crédits, d’améliorer l’équipement du foyer et de financer les cérémonies familiales. Au Sénégal, l’étude d’impact a montré que le commerce équitable participe à accroitre le nombre d’enfants scolarisés et la durée de la scolarisation. En effet, la prime de développement est notamment investie dans l’achat de fournitures scolaires, la construction ou la réfection d’écoles.

Une capitalisation progressive En améliorant leurs revenus, le commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar renforce le processus de capitalisation des producteurs et leur permet d’étendre leur cheptel, de se doter de moyens de transport ou d’investir dans d’autres activités comme un petit commerce.

Groupement de producteurs d’Afia, Sénégal / Groupement de Ndébou, Sénégal.

« Grâce au commerce équitable, mes revenus ont augmenté et je peux payer les frais de scolarité de mes enfants. Il améliore aussi notre vie de tous les jours car avec l’argent du coton, je peux acheter des céréales pour compléter mes récoltes ». Sekhon Cissé, producteur à Afia (Sénégal)

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Des organisations renforcées, moteur du développement rural Les producteurs de coton de la région de Kédougou au Sénégal, de la province du Nord au Cameroun ou de la région de Sikasso au Mali, où ont été réalisées les études, se trouvent dans des zones enclavées, en situation d’isolement. Ils souffrent du faible accès aux services sociaux de base (santé, eau potable, éducation, routes).

Des organisations consolidées, plus légitimes et plus autonomes

Une amélioration des services de base qui profite à la communauté

Les organisations de producteurs préexistaient au commerce équitable mais celui-ci a renforcé la solidarité entre les producteurs, au sein des organisations, et les échanges entre les organisations. Il a également accru leur budget de fonctionnement permettant la mise en place de services tels que la formation technique des producteurs, la fourniture de crédit et de matériel. Cela renforce la légitimité des organisations vis-à-vis de leurs membres.

Les assemblées générales qui impliquent tous les producteurs membres favorisent les prises de décision démocratiques et transparentes, sans aucune discrimination (minorité, genre, âge…).

Les exigences des standards Fairtrade / Max Havelaar, en termes de démocratie et de transparence, confèrent aux organisations de meilleures capacités de gestion. De plus, le versement de la prime de développement leur permet d’acquérir une plus grande autonomie financière.

Chacune des organisations met en œuvre les projets correspondant à ses choix et répondant à ses besoins. Elle porte la responsabilité et en assure le suivi durant la phase de réalisation.

C’est ainsi que les producteurs proposent des investissements à réaliser et que tous ensemble, par un vote, décident de l’utilisation de la prime de développement.

« Avant le commerce équitable, les gens ne se donnaient même pas la peine de venir aux réunions. Maintenant, les décisions sont prises par vote avec l’avis de tous les producteurs et productrices ». Assan Ba, gestionnaire du groupement à Afia (Sénégal)

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Quelques exemples d'investissements communautaires Les projets financés avec la prime de développement du commerce équitable profitent à l’ensemble de la communauté et non pas uniquement aux producteurs certifiés. Les producteurs témoignent de résultats concrets, d’amélioration de la vie au sein de la communauté et d’une plus grande solidarité entre les producteurs. C’est souvent avec fierté qu’ils montrent chacun des investissements réalisés.

Le moulin à grains acheté pour le village permet de faciliter les taches quotidiennes des femmes. Groupement de producteurs d’Afia, Sénégal / Très souvent, les producteurs décident de financer les fournitures scolaires. Groupement de producteurs de Boundoukony, Sénégal / Les femmes ont la possibilité d’être suivies au sein de leur village grâce à la construction d’une case de santé. Groupement de producteurs de Faragouaran, Mali / Construction de puits au sein des villages réduit la distance à parcourir pour se ravitailler en eau potable. Groupement de producteurs de Faragouaran, Mali.

Au Mali, en 2009, 25 projets ont été initiés dans les 20 organisations de base : maternité, magasins de stockage des produits agricoles, silos de céréales, moulins, puits, matériels et fournitures scolaires et centre d’alphabétisation. Au Cameroun et au Sénégal, des investissements similaires ont été réalisés, avec davantage d’efforts portés sur la santé (construction de cases de santé et formation de sages-femmes) et des investissements pour l’électrification des villages. Si la contribution du commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar reste modeste en termes de développement, les investissements réalisés

par les organisations de producteurs améliorent indéniablement l’accès aux services sociaux de base. Fairtrade / Max Havelaar contribue donc à la hausse des revenus des producteurs et à l’amélioration de leur niveau de vie, à la fourniture de services techniques et financiers et à l’amélioration des services sociaux de base. Dans ce sens, le commerce équitable contribue à renforcer l’implication des producteurs dans le développement de leur territoire, à réduire les migrations saisonnières, voire même à limiter l’exode rural.

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Un renforcement de la place et du rôle des femmes Dans les campagnes d’Afrique de l’Ouest et du Centre, le quotidien des femmes est traditionnellement partagé entre des activités comme la participation aux travaux des champs et les tâches domestiques que le contexte rend longues et difficiles.

Des femmes productrices Par leur participation active aux travaux des champs, les femmes ont toujours contribué à la culture du coton. Les standards Fairtrade / Max Havelaar exigent qu'elles soient considérées comme des productrices et membres des organisations à part entière et c’est en cela que le commerce équitable fait évoluer significativement les choses.

La préparation du repas en milieu rural africain Dévolue aux femmes, la préparation du repas repose sur le pilage du mil ou du maïs dont la farine sert d’aliment de base, et sur la collecte de feuilles ou de légumes. Ces tâches peuvent accaparer les femmes plusieurs heures durant. Elles s’assortissent du ravitaillement en eau potable et de la collecte de bois de chauffe, travaux d’autant plus pénibles que les points de collecte sont éloignés du village. Cela les empêche d’accorder davantage de temps aux activités qui pourraient leur procurer des revenus, qu’il s’agisse du maraîchage, de la vente de produits sur les marchés locaux ou de la pratique d’une culture commerciale comme le coton.

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Elles reçoivent, directement et en toute transparence, le paiement pour le coton-graine qu’elles produisent. L’étude menée au Sénégal a montré que cette rémunération leur donne une certaine indépendance et leur permet de prendre en charge des dépenses familiales telles que les cérémonies, l’équipement du foyer, mais aussi de développer d’autres activités économiques comme le maraîchage, le petit élevage ou le commerce.


De nouvelles voix dans les prises de décision

De nouveaux acteurs des organisations et de la communauté

Membres des organisations, les femmes participent aux assemblées générales, prennent la parole et influent sur les décisions. Tout cela aboutit à une meilleure prise en compte de leurs besoins.

Avec l’arrivée du commerce équitable, les femmes ne sont pas seulement membres des organisations ; elles y occupent aussi des postes à responsabilité et des fonctions d’assistance dans les domaines de l’administration, de la gestion ou même de la production.

Si la plupart des investissements bénéficient à toute la communauté, certains comme la construction de puits ou l’acquisition de moulins à grains sont largement plébiscités par les femmes, comme l’a montré l’étude réalisée au Sénégal. Ils représentent pour elles un progrès considérable : dispensées de certaines activités longues et pénibles comme la collecte de l’eau ou le pilage des céréales, les femmes peuvent ainsi dédier davantage de temps à la culture du coton.

« Depuis que nous vendons le coton en commerce équitable, je peux regarder mon ticket à chaque fois et savoir combien j’ai reçu exactement ». Marie Diallo, productrice à Ségou (Sénégal)

Au Sénégal, une conseillère rurale, la trésorière d’une organisation et la vice-présidente d’une autre organisation, expliquent avec fierté qu’elles ont bénéficié de formations grâce auxquelles elles peuvent se rendre utiles à l’ensemble de la communauté. Fatou Sow, sage-femme, témoigne quant à elle de la formation aux premiers soins et en nutrition qu’elle a reçue et qui lui permet de venir en aide aux femmes de la communauté.

« Avant il y avait des choses qui étaient décidées uniquement par les hommes et d’autres ouvertes aux femmes. Avec le commerce équitable, les femmes sont associées à toutes les décisions ».

« Avant, même pour une injection, les femmes devaient faire des kilomètres. Maintenant, il suffit de m’appeler ». Fatou Sow, matrone à Afia (Sénégal)

Kadijatou Diallo, productrice à Bondoukony (Sénégal)

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Une sensibilisation aux problématiques environnementales Le climat des régions d’Afrique subsaharienne, où est cultivé le coton, favorise une érosion hydrique des sols tandis que des pratiques, comme les feux de brousse ou l’utilisation de certains produits chimiques, constituent une réelle menace pour l’environnement. En outre, l’exploitation de plus en plus intensive des terres et la disparition progressive de la pratique de la jachère ont pour conséquence une baisse de la fertilité des sols, remettant en cause la durabilité des systèmes de production

Une amélioration des pratiques culturales Dans le système Fairtrade / Max Havelaar, les critères environnementaux imposent aux organisations de producteurs de fournir à leurs membres des formations et de mettre en place un accompagnement technique (voir encadré). Les organisations se dotent ainsi de comités environnementaux dont les délégués assurent la sensibilisation et la formation des producteurs sur les pratiques préconisées par les standards. Cela aboutit à l’abandon de certaines pratiques très largement décriées telles que l’utilisation de l’Endosulfan, un insecticide très dangereux pour la santé humaine, dont l’utilisation est interdite en Europe. Autre exemple, l’adoption de bonnes pratiques de fertilisation et de protection phytosanitaire avec l’usage de produits biologiques comme le neem, le respect de zones tampons autour des points d’eau, le stockage des produits chimiques dans des locaux sécurisés et la destruction des bidons après usage. Les études ont par ailleurs montré que l’amélioration de la gestion des produits chimiques s’est accompagnée d’une réduction des problèmes de santé chez les producteurs.

Un cadre pour protéger l'environnement Les critères environnementaux visent à ce que les producteurs respectent des pratiques agricoles et environnementales durables et qu’ils participent à la préservation de la biodiversité. Ils préconisent ainsi une réduction de l’utilisation des pesticides et la mise en place de méthodes alternatives de gestion des nuisibles. Les critères listent les pesticides interdits et ceux dont l’usage est déconseillé et devra progressivement être abandonné. Les standards rappellent les règles de sécurité en matière d’utilisation et de stockage des produits. Ils établissent en outre des recommandations pour la mise en œuvre de pratiques visant à limiter ou réduire l’érosion des sols, à restaurer ou maintenir leur fertilité, à améliorer la gestion des déchets et à respecter les écosystèmes. Pour chacune des thématiques, l’organisation est tenue de fournir une formation à ses membres.

« Tout vient de la brousse, l’alimentation de l’homme, celle des animaux, les matériaux de construction, il faut la préserver. Grâce au commerce équitable, les gens font plus attention et aujourd’hui il y a moins de feux de brousse. Nous avons donc des pâturages proches et des matériaux disponibles » Ngapere Diallo, producteur à Ségou (Sénégal)

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Une gestion durable des ressources Au Sénégal, au Mali et au Cameroun, comme dans toute la sous-région, des règlementations pour le respect et la préservation de l’environnement existent. Pourtant, elles sont souvent très peu respectées, faute d’information, de sensibilisation, de formation et d’appui technique des populations. Dans ces trois pays, les producteurs de coton certifiés Fairtrade / Max Havelaar ont changé leurs pratiques. D’abord, pour se mettre en conformité avec les exigences des standards, mais aussi et surtout, parce qu'ils ont pris conscience de ce que de mauvaises pratiques (feux de brousse, surexploitation des ressources naturelles, défrichements inutiles, abandon de la jachère…) mettent en péril leur avenir. Accompagnés par le comité environnemental, les producteurs mettent en place des programmes de lutte contre l’érosion (voir encadré) et de gestion de la fertilité, avec un usage plus généralisé de la fumure organique. Ils participent également à la préservation de la biodiversité avec la réduction des feux de brousse et le maintien de la rotation des cultures.

La lutte contre l’érosion hydrique A Ndébou (Sénégal), Usmane Ba explique que le comité environnemental, mis en place dans le cadre du commerce équitable, joue un vrai rôle de sensibilisation auprès des producteurs. Par exemple, les conseillers ruraux aident les producteurs à identifier les zones de ruissellement et les conseillent dans le choix des solutions à mettre en œuvre. Ainsi, un cordon pierreux a été édifié pour stopper l’érosion hydrique qui entraînait la dégradation d’un champ de coton. Grâce à cette mesure, les producteurs ont pu irriguer un verger de mangues situé en aval.

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Une attention particulière portée à la qualité La concurrence internationale impose d’être compétitif autant en termes de qualité que de coûts. Même s’il reste compétitif, le coton d’Afrique de l’Ouest souffre de la concurrence en raison de coûts de production en augmentation ces dernières années et de rendements qui stagnent par rapport à d’autres régions du monde.

Une amélioration des techniques de production La qualité du coton africain est garantie par la récolte manuelle, plus minutieuse. En effet, le prélèvement concerne exclusivement les fibres à maturité et les débris végétaux sont enlevés systématiquement. Elle est également plus respectueuse de l’environnement, de par l’absence d’usage de défoliants. Parce que le commerce équitable labellisé Fairtrade / Max Havelaar n’est ouvert qu’au coton de premier choix (voir encadré), les producteurs sont extrêmement vigilants sur la qualité, ce qui nécessite davantage de soins apportés à la culture et de temps passé à la récolte. Des formations proposées aux producteurs leur permettent de mieux maitriser la qualité de leurs récoltes : > s emer et récolter au bon moment afin de réduire le risque de manque d’eau des plants ou, au contraire, de pourrissement du coton. >p révenir tout risque de contamination lors des opérations de récolte, stockage et pesée. Il en résulte une augmentation du pourcentage de la production classée en premier choix, susceptible d’être commercialisée en commerce équitable et de

Les étapes de la récolte du coton, de gauche à droite : Récolte manuelle, aire de stockage dans le village, usine d’égrenage, fermeture manuelle d’une balle de coton et salle de classement du coton dans l’usine d’égrenage. Union de groupements de producteurs de Kédougou, Sénégal et la société cotonnière Sodefitex, Tambacounda, Sénégal.

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bénéficier du prix minimum garanti et de la prime de développement. L’attention portée à la qualité est devenue collective puisqu’un producteur qui n’effectuerait pas un tri approprié de son coton pourrait compromettre le classement en premier choix du coton de l’ensemble du groupement.

Le classement du coton-graine Un coton-graine de premier choix est un coton blanc, sans impureté ni mélange avec des corps étrangers (capsules immatures ou parasitées, débris végétaux) et suffisamment sec (humidité inférieure à 10 %). Le coton deuxième choix est légèrement jauni sous l’effet de l’humidité mais il a été trié afin d’être débarrassé des débris et des capsules immatures ou parasitées. Le troisième choix est un coton jaune mal trié qui comporte plus de 15 % d’impuretés. Le prix payé au producteur varie évidemment selon le classement.


Une préoccupation partagée par les sociétés cotonnières La recherche de qualité est menée conjointement avec les sociétés cotonnières, notamment lors de l’égrenage (réglage des machines, contrôle du taux d’humidité…) pour préserver les propriétés qui font la qualité du coton, comme la longueur de la fibre. Les sociétés cotonnières distribuent des sacs de cotonnade aux producteurs et conditionnent les balles dans des toiles en coton. Cette méthode permet d’éviter l’altération de la qualité du coton par le polypropylène avec lequel sont fabriqués les sacs et les bâches traditionnellement utilisés pour la récolte et le conditionnement. En effet, le stockage des balles au soleil est propice à la contamination de la fibre par des débris de polypropylène qui posent problèmes lors du filage et de la teinture. Ces pratiques se sont généralisées à l’ensemble de la production cotonnière du pays. Par ailleurs, des chartes de qualité sont élaborées et appliquées, comme c’est le cas au Mali. Elles renforcent les démarches vertueuses promues par le commerce équitable. La recherche de qualité est constante, au niveau de tous les acteurs de la filière. Elle passe notamment par un contrôle rigoureux à chaque étape de production et de transformation, mais également par des pratiques respectueuses de l’environnement et de la sécurité des producteurs.

« Les producteurs sont eux-mêmes les gardiens de la qualité. Quand le coton d’un d’entre eux n’est pas de la meilleure qualité, nous lui disons : ton coton n’est pas bon, nous le séparons du reste ». Habidou Diallo, président de Bondoukony (Sénégal)

Le commerce équitable promeut ainsi une qualité totale, c’est-à-dire une qualité renforcée, au-delà de la qualité intrinsèque du produit, dans toutes ses dimensions : économique, environnementale et sociale.

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Des résultats pour construire l’avenir

Les études de cas réalisées en 2010 dans des groupements de producteurs de coton ouest-africain nous montrent la diversité des impacts du commerce équitable : >S tructuration et renforcement des organisations. >S tabilité économique des producteurs et de leurs familles. >M ise en place d’une dynamique de développement local. >R enforcement de la place des femmes. >S ensibilisation aux problématiques environnementales et changement de pratiques. >A mélioration de la qualité. Le système Fairtrade / Max Havelaar évalue les impacts du commerce équitable depuis plus de 5 ans. Les contextes géographiques et les filières étudiés ont varié mais on retrouve les mêmes axes de développement. Cependant, chaque organisation de producteurs, en fonction de son plan de développement et des choix qu’elle fait, notamment sur l’utilisation de la prime de développement, va mettre l’accent sur un ou plusieurs de ces axes. Au cours de son histoire et de son parcours dans le commerce équitable, elle va successivement renforcer certains des aspects de son organisation afin d’atteindre les objectifs de développement qu’elle s’est fixés. Par exemple, certaines coopératives choisissent en priorité d’investir dans des infrastructures de transformation, des formations, de l’assistance technique afin d’améliorer leurs pratiques agricoles et la qualité de leurs produits. C’est le cas de la

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Conacado, organisation de producteurs de cacao en République Dominicaine. D’autres préfèrent investir notamment dans l’amélioration du système de santé et d’éducation pour leurs communautés, comme les organisations de producteurs de coton en Afrique de l’Ouest. Ces études montrent que les outils (économiques, organisationnels, environnementaux) mis à disposition par le système Fairtrade / Max Havelaar permettent aux coopératives d’amorcer ces dynamiques renforçant ainsi leur rôle de moteur du développement territorial. Le système Fairtrade / Max Havelaar n’agit jamais seul. Il fait partie d’une palette de solutions innovantes dont les coopératives peuvent se saisir pour se construire un meilleur accès au marché, améliorer la qualité et accroître la valeur ajoutée de leurs produits. Cela leur permet de mieux maîtriser les négociations commerciales et de mieux se positionner dans les filières internationales. Cependant, pour que les mécanismes de développement initiés par le commerce équitable fonctionnent, il faut que les organisations de producteurs aient des débouchés commerciaux suffisants pour leurs produits. En effet, les impacts du commerce équitable pourraient être renforcés si les ventes étaient plus importantes. Il importe à chacun des acteurs d’agir tout au long des filières. Et c’est en choisissant de consommer équitable ici, que nous agissons là-bas.


Le commerce équitable ne se fera pas sans vous !

Comment agir ? Devenez consom’acteur : • Changez vos habitudes, consommez

des produits labellisés Fairtrade / Max Havelaar.

• Demandez à vos commerçants de référencer

plus de produits équitables.

• Demandez à votre employeur, commune,

école ou université de soutenir le commerce équitable de quelque manière que ce soit.

• Demandez à vos amis et votre famille de faire

de même.

Devenez une entreprise ou une collectivité partenaire du commerce équitable : • Engagez-vous en offrant des produits labellisés

Fairtrade / Max Havelaar.

• Changez vos pratiques internes :

> Équipez-vous de tenues de travail fabriquées en coton équitable.

> Optez pour des distributeurs de produits labellisés Fairtrade / Max Havelaar.

> Intégrez le commerce équitable dans votre restauration collective.

> Sensibilisez vos équipes et vos partenaires • Engagez-vous auprès d’une association locale

de promotion du commerce équitable et participez à leurs actions. Retrouvez toutes les informations du mouvement FAIR[e] un monde équitable : www.faire-equitable.org

La question de l’impact du commerce équitable est récurrente. Combien de fois sommes-nous interpellés chaque année : « Oui, les principes que vous défendez sont très bons. Mais est-ce que votre système est vraiment efficace sur le terrain ? ». Un de nos soucis permanent est de nous assurer que nos valeurs sont respectées et que nos actions sont suivies d’effets concrets pour les producteurs, leurs familles et leurs communautés. C’est ce qui nous anime au quotidien et c’est ce qui justifie la mise en place d’un système d’audits réguliers et d’études d’impact rigoureuses. Les enseignements de ces études nous sont très précieux : ils permettent de vérifier si les résultats attendus sont au rendez-vous, mais aussi de détecter les points faibles ou les insuffisances de notre système afin de l’améliorer constamment. Bien sûr, de temps en temps, des écarts à la règle sont relevés et parfois mis en lumière par les média. Comment en serait-il autrement dans un système qui compte plusieurs milliers d’acteurs au Sud et au Nord ? Lorsqu’ils sont avérés, ces cas donnent lieu à des sanctions, voire à des expulsions du système pour les cas les plus graves. Mais dans leur immense majorité, les organisations de producteurs et les entreprises engagées à nos côtés respectent les principes et

aux enjeux du commerce équitable et de la consommation responsable et faites vous accompagner par l’association Max Havelaar France dans votre démarche.

les cahiers des charges élaborés en concertation entre acteurs du Sud et du Nord. Dans ce contexte, les études d’impact sont donc un outil indispensable pour vérifier qu’au-delà du respect des règles, le commerce équitable a un effet positif sur l’amélioration des conditions de vie des petits producteurs du Sud, sur leur environnement et, plus largement, sur leurs territoires. Elles permettent aussi de constater comment le commerce équitable joue un rôle fondamental sur la prise en main par les producteurs de leur propre développement. Le document que vous avez entre les mains est l’un de ceux qui nous permettent d’effectuer un constat de la réalité du commerce équitable sur le terrain à un instant donné. Nous espérons qu’il aura répondu à vos questions et qu’il vous aura convaincu du bien-fondé et de l’efficacité de notre démarche. Mais pour développer l’impact au Sud, la croissance des achats équitables au Nord est indispensable : nous comptons sur vous ! Christophe Roturier, Directeur délégué Max Havelaar France

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Association Max Havelaar France TĂŠl. +33 (0)1.42.87.70.21 / info@maxhavelaarfrance.org

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www.maxhavelaarfrance.org


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