L'Officiel-Levant February/March Issue 88

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N° 88 FÉVRIER-MARS 2019

KAREN WAZEN EN BODY JONATHAN SIMKHAI ET BOUCLES D’OREILLES ELLERY.

WWW.LOFFICIEL.COM

MIROIR , MON BEAU Karen Wazen · Youssef Chahine · Comme des sœurs · Blu Fiefer
















D I O R . C O M - 0 1 9 9 1 1 1 1 E X T. 5 9 2







PHOTOGRAPHED BY NICK KNIGHT ALLENBY STREET, BEIRUT SOUKS AÏSHTI BY THE SEA, ANTELIAS



MAXMARA.COM AÏSHTI BY THE SEA, LEVEL 2, SEASIDE ROAD, ANTELIAS AÏSHTI DOWNTOWN BEIRUT, AÏSHTI VERDUN DUNES (FRANCHISEES MAX MARA)








MOSCHINO.COM



Valentine






L’OFFICIEL

SOMMAIRE

p.114

p.148

p.188

p.100 44 L’édito

94 Dina Kamal, archi-joaillère

164 Milia aime…

46 News

100 Oh, pétales !

166 Ces regards, ces mains

52 Tendances

104 Néo-boyish

56 Le cycliste, deux siècles en un coup de pédale

106 Tendre est la nuit

170 À la recherche du khatt perdu

60 Politique de la meringue 62 Happy birthday Posh p.192

68 La somme des éléments 84 Starch, dix ans et un hiver

108 Sur mes lèvres 110 Green power

178 Liane Mathes Rabbath roule son papier à visions

114 Karen Wazen, blog à part

180 Tout sur Chahine !

130 Nabil Nayal dans le vestiaire élisabéthain

184 Portraits de femmes

132 Comme des sœurs

90 Buccellati, l’or du temps

144 Lumineuse et audacieuse Semsem

92 Un fil à l’oreille

148 Convulsif ! 36

186 Freya Mavor 188 Blu, entre deux pôles 192 Pomme rouge, la révélation électro de la scène beyrouthine

PHOTOS DR

58 Hermès, l’été des navigatrices

174 Blatt Chaya, artisanat d’hier, décor d’aujourd’hui



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SOMMAIRE

p.218

p.94

218 Sous la crémaillère de Aïshti Home Solutions

198 Maggie Rogers

222 De l’art à lire

200 Le B018 fait peau neuve

224 Pension complète

202 L’art d’enfourner selon Albert Massaad

228 Élémentaire

204 L’asiat’ du coin 208 Un champignon s’il vous plait 210 Un « Taqa bar » pour la route 212 La maison des cookies 214 Anfeh branchée 216 Le pub chez soi 38

229 Le club 5* luxe 230 Quand Tatiana rencontre Alessandra 232 Eldorado carnivore 234 Adresses 236 Attentions intentions PHOTOS DR

p.68

196 Crys Nammour, l’âme d’une guerrière



N ° 8 8 F E V R I E R- M A R S 2 019

ÉDITEUR

TON Y SALAME GROUP TSG SAL

Rédaction RÉDAC TRI CE EN CH EF

FIFI ABOU DIB R É D A C T R I C E E T C O O R D I N AT R I C E

SOPHIE NAHAS

Département artistique D I R E C T R I C E D E C R É AT I O N

MÉLANIE DAGHER DIRECTRICE ARTISTIQUE

SOPHIE SAFI Contributeurs PH OTO

BACHAR SROUR, MICHÈLE AOU N, R AYA FAR HAT, R AYAN NOHR A RÉDAC TI O N

JOSÉPHINE VOYEUX, LAUR A HOMSI, MAR IA LATI, MAR IE ABOU KHALED, MYR IAM R AMADAN, NASR I SAYEGH, PHILIPPINE DE CLER MONT-TONNER R E STYLISME

AMINE JR EISSATI I L L U S T R AT I O N E T G R A P H I S M E

MAR IA KHAIR ALLAH, MAR ION GAR NIER Production DIRECTRICE

ANNE-MAR IE TABET Retouche numérique

FADY MA ALOUF Publicité et Marketing DIREC TEUR GÉNÉR AL COM MERCIAL ET M ARKETIN G

MELHEM MOUSSALEM C O O R D I N AT R I C E C O M M E R C I A L E

R AWAN MNEIMNE CO O R D I N AT R I CE M A R K E T I N G

M AGA LY MOSLEH, NOOR M ER EBY Directeur Responsable

AMINE ABOU KHALED Imprimeur

53 DOTS DAR EL KOTOB



Directrice de la publication et de la rédaction Marie-José Susskind-Jalou Rédactrice en chef mode Vanessa Bellugeon

Directeur de création Jean-Marie Delbès

Rédactrice en chef magazine Adrienne Ribes

MODE

CASTING Jennifer Eymère j.eymere@jaloumediagroup.com Joshua Glasgow j.glasgow@jaloumediagroup.com

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Market editor Laure Ambroise l.ambroise@jaloumediagroup.com Responsable shopping Samia Kisri s.kisri@jaloumediagroup.com Tél. 01 53 01 10 30 JOAILLERIE/HORLOGERIE Emily Minchella emilyminchella@gmail.com Hervé Dewintre hervedewintre@hotmail.com BEAUTÉ Mélanie Mendelewitsch melanie.mendelewitsch@gmail.com Rédactrice parfum Antigone Schilling aantigone3@aol.com DÉPARTEMENT ARTISTIQUE

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PRODUCTION Joshua Glasgow j.glasgow@jaloumediagroup.com Éléonore Jalou e.jalou@jaloumediagroup.com

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CORRESPONDANTS

CONTRIBUTEURS Photographes Julia Andréone Marine Billet Sarah Blais Sergio Corvacho Clark Franklyn Zoey Grossman Alexei Hay Nathan Perkel Julien Roux Rédacteurs et collaborateurs Sophie Abriat Eugénie Adda Marguerite Baux Virginie Beaulieu Mathilde Berthier François Blet Gabriela Cambero Chrystèle Dessoy Marie-Anne Faure Lachaud Simon Liberati Juliette Michaud Sophie Rosemont Violaine Schütz Stylistes Laëtitia Mannessier Donatella Musco

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AÏSHTI, DOWNTOWN BEIRUT, T.01.991 111 AÏSHTI BY THE SEA, ANTELIAS, T. 04 717 716 EXT. 243

ALBERTAFERRETTI.COM


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EDITO

MIROIR, MON BEAU Rarement notre dépendance à l’image aura été aussi tyrannique. Est-ce un phénomène libanais, beyrouthin, latin, oriental, asiatique ? Il est clair que certaines cultures y adhèrent plus que d’autres, et que celles-ci fleurissent de préférence au soleil. De plus en plus, le moment selfie est une évidence. Oublier de capturer l’instant précis où la lumière nous flatte, ou cette activité de la journée qui pourrait nous valoir quelques réactions publiques -gym, cuisine, repas, maquillage, habillage - serait consentir à l’effacement, voire la non-existence. On exagère à peine. Le quart d’heure de célébrité que nous promettait Warhol est largement dépassé. Certains et certaines en arrivent même à rêver d’un quart d’heure d’anonymat pour baisser un peu la garde, mais l’engrenage est trop violent pour y échapper. L’image est un accélérateur de reconnaissance et de succès. Certaines nouvelles stars d’Instagram s’en servent avec talent et des résultats gratifiants. Leur célébrité peut même aider à promouvoir des causes d’intérêt public. La vie de chacun est un roman qui n’a plus besoin de langues pour se raconter. Au bavardage a succédé le cadrage, ouvrant toute une époque focalisée sur la nourriture, la forme et la beauté. En ce presque printemps de l’ère du Miroir, voici quelques mots pour donner du poids aux photos.

Fifi Abou Dib

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AÏSHTI BY THE SEA, AÏSHTI DOWNTOWN, AÏSHTI VERDUN

etro.com


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NEWS

PAR F.A.D

V R A I - FA U X Attachée à n’introduire dans ses créations aucune matière d’origine animale, Stella McCartney s’impose ce qu’on appellerait en littérature un lipogramme, un exercice -comme les textes sans « e »- où l’on essaie d’obtenir un résultat cohérent en s’abstenant d’employer des éléments considérés indispensables. Cela donne une collection joliment excessive où le plastique et le cuir végétalisé ont la part belle, si belle que les baskets et les plateformes en sont surdimensionnés, et la silhouette suit : tenues inspirées du survêtement sportif, mais interprétées en pantalons palazzo touchant terre, ou bouffants, ou encore à sage taille haute et coupe fuselée. Les robes réinterprètent les franges Charleston ou volent leur chemise aux cosaques pour mieux les transformer, avec une petite ceinture, en ensembles légers et rafraichissants. Stella McCartney Stella McCartney, Rue Fakhry Bey, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 911 111 ext.575 Aïshti by the Sea, Antelias, L2, +961 4 717 716 ext.250

DOUBLE JOIE Fondée en 2015 par J.J. Martin, La DoubleJ s’attache, depuis son expérience réussie dans la promotion et le commerce de pièces vintage en ligne, à véhiculer le meilleur de la production italienne. Vêtements, bijoux, objets d’intérieur, tout est cool, vintage et singulier, y compris les projets éditoriaux, les boutiques éphémères et le showroom milanais de la marque avec son décor déjanté. Autant de créations distillées en joie pure, adressées aux grandes filles magnifiques que nous sommes et qui déploient leur énergie avec style.

PHOTOS DR

La Double J Aïshti, 71 Rue El Moutrane, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.130 Aïshti by the Sea, Antelias, L2, +961 4 717 716 ext.121

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L A S C A L A A U F E S T I VA L A L B U S TA N Pour sa 26ème édition, le Festival Al Bustan invite le meilleur de la scène italienne sous le thème « Crescendo ». Du 12 février au 17 mars 2019, le Festival invite plus de 200 artistes, 5 orchestres différents, un opéra, un ballet et une chorale. Au programme : l’opéra La Traviata en version concert, les six concertos pour violon de Paganini, un concert dédié à la musique des plus beaux films italiens, le Stabat Mater de Pergolesi, l’Agitata de Vivaldi et bien d’autres pièces de grande qualité. Parmi les grands noms invités cette année au Festival Al Bustan figurent les ténors Joseph Calleja et Javier Camarena, la très célèbre pianiste Khatia Buniatishvili, les violonistes Sergey Krylov, Yury Revich, Gabriele Pieranunzi et Kevin Zhu qui vient de remporter le concours Paganini pour violon. L’Académie de La Scala est invitée pour 3 soirées dont une avec ses chanteurs étoiles, une autre de ballet, et un concert de clôture avec les Quatre Saisons de Vivaldi et les Quatre Saisons de Buenos Aires de Piazzolla. Créé au cœur de la saison froide sur les hauteurs de Beit Méry, à une encablure de Beyrouth, le Festival Al Bustan se déroule dans le cadre charmant d’un hôtel des années 1960 entouré de jardins. Rendez-vous des mélomanes depuis 1994, le Festival affiche depuis 26 ans un succès jamais démenti. Al Bustan Festival Al bustan hotel, Beit Mery, +961 4 870 400

UN PETIT AIR HIPPIE Pour sa deuxième collection chez Chloé, Natasha Ramsay Levi, venue de chez Balenciaga et succédant à Karl Lagerfeld ainsi qu’à plusieurs créateurs britanniques à la tête de la direction artistique de la très féminine maison parisienne, a imaginé un printemps été 2019 tout en poésie bohème et esthétique New Age. Modernisme hippie et contreculture sont réinterprétés dans un style épuré et gorgé de soleil. La collection raconte un voyage sur les bords de la Méditerranée à travers une palette de blanc, bleu et terre cuite. Les jupes jouent les paréos, les broderies sont en nacre et les imprimés sagement psychédéliques. On retrouve avec bonheur l’identité gracieuse d’une maison éthérée qui a toujours privilégié confort et délicatesse. Chloe Chloe, Rue Fakhry Bey, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.580 Aïshti by the Sea, Antelias, GF, +961 4 717 716 ext.215

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SCIENCE ET SORTILÈGES Rarement la directrice artistique Sarah Burton se sera aussi intimement rapprochée de l’esprit et de l’âme d’Alexander McQueen que dans cette collection pré-printemps été 2019. Prenant source dans l’Angleterre victorienne, adaptant les volumes à la silhouette mid-century, elle emprunte les ornements des sacs et des vêtements à la paléontologue Mary Anning. Cette femme du 18e siècle qui est à elle seule une légende, collectionneuse de coquillages et de fossiles sur les plages sauvages, a fourni la preuve de l’extinction des espèces, concept impensable à l’époque. Tout est là, tout est Alexander, dans cette brillante anthologie : le pouvoir des femmes, les vanités, les citations historiques. Et comme toujours, depuis la disparition du fondateur, un sans-faute qu’on va encore adorer. Alexander McQueen Aïshti, 71 Rue El Moutrane, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.130 Aïshti by the Sea, Antelias, L2, +961 4 717 716 ext.251

LE NOUVEAU H I LT O N D E BEYROUTH

Hilton Hilton Beirut Downtown, Rue Mir Majid Arsalan, Centre-Ville, Beyrouth, +961 951 111

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Le dernier né de la chaine hôtelière Hilton vient d’ouvrir ses portes au centre-ville de Beyrouth. Idéalement situé à l’intersection de la rue Patriarche el Hoyek et de l’avenue du Parc, juste en face du centre commercial conçu par Zaha Hadid, à moins de 10km de l’aéroport et à un jet de pierre de Beirut Souks, cet hôtel élégant compte 158 chambre et suites dont plusieurs bénéficient de balcons et donnent sur la mer. Une salle de conférences de presque 600m2, une piscine sur le toit, un spa et une salle de gym, tout y est prévu pour un séjour travail et détente idéal et une immersion voluptueuse dans l’énergie de la ville.


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U N AUTOM N E À N E W- Y O R K A la veille de présenter en mai, à New-York, la collection Louis Vuitton croisière 2019, le directeur artistique Nicolas Ghesquière dont on a aimé, chez Balenciaga, le style futuriste, s’essaye à une esthétique plus terrienne dans la perspective de l’automne prochain. En guise de « prefall », il vient de faire appel à 17 stars hollywoodiennes pour choisir dans la collection des pièces qui répondent à leurs divers styles respectifs et composer un look-book « été indien » devant l’objectif de Collier Schorr, le photographe fétiche de la marque. Léa Seydoux porte, à titre d’exemple, un fourreau sirène à imprimé floral avec un décolleté plongeant en V, Kelela superpose une veste à carreaux sur une robe à fleurs et un pantalon à fleurs contrastées, Doona Bae arbore un pull oversize à carreaux et une jupe à imprimé animalier. Les silhouettes sont cintrées, les volumes généreux, et l’ensemble respire un je-ne-sais-quoi de newyorkais dont Ghesquière a saisi l’essence. Louis Vuitton Louis Vuitton, Rue Allenby, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 966 810

MON NOUNOURS OÙ JE VEUX Invasion de glitter, de logos, de lettres d’or, d’énormes semelles moulées avec un joyeux nounours qu’on jure ne pas avoir écrasé… On aura reconnu sans le voir le style échevelé de Moschino décliné jusqu’au délire par le tout aussi inénarrable Jeremy Scott. La collection de chaussures printemps été 2019 de la marque italienne nous habille au point de nous dispenser de vêtements. D’ailleurs, qui a besoin de vêtements ? Moschino Aïshti, 71 Rue El Moutrane, Centre-Ville, Beyrouth, GF, +961 1 99 11 11 ext.130 Aïshti by the Sea, Antelias, L2, +961 4 717 716 ext.240

EN FIL DE SOLEIL Oaxaca, Mexique. Ses ruelles dallées, bordées d’arbres en fleurs, ses façades multicolores… Cette ville baignée de soleil et de joie tranquille attire les touristes sans perdre son authenticité. Depuis des siècles y travaillent des tisserands sur des métiers antiques à doubles pédales. Amoureuse des lieux, la créatrice espagnole Jacqueline Lopez a eu l’idée de contribuer à la prospérité du savoir-faire local en fondant Jaline une marque dont le luxe est lié à la transmission et au travail de la main. Caftans raffinés, ensembles légers rehaussés de broderies typiques, tout un art de vivre dans un vêtement. Jaline Resort Aïshti, 71 Rue El Moutrane, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.130

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I M M O B I L E É M O U VA N T Fondé pour offrir une plateforme aux expositions et débats dédiés à l’image, tout en proposant au grand public des accrochages inédits, le Mina Image Center frappe fort avec un premier événement autour d’Irving Penn. Secteur du Port, dans un immeuble contemporain aux façades de ciment texturées comme une photo argentique, la fondation dirigée par Manal Khader propose, sous l’intitulé « Untroubled », une exposition des œuvres les plus représentatives du photographe fétiche de Vogue US, célèbre pour ses clichés vivants, vibrants, insolites et impertinents. Natures mortes inspirées des vanités flamandes, mégots de cigarettes traités comme des natures mortes, Hell’s Angels au repos, main de Miles Davis qui semble coulée dans le bronze, traitement sensuel et sensoriel des tissus dans les photos de mode, autant de merveilles issues de la Collection Pinault, accrochées à Beyrouth jusqu’au 28 avril 2019. Irving PENN “Untroubled Irving PENN”, Du16 Janvier au 28 Avril 2019, Mina Image Centre, Immeuble Stone Gardens, Rue Darwich Haddad, Port, Centre-Ville, Beyrouth, +961 70 90 70 11

L’ A R T D E L A R O S A C E Les boutiques des musées beyrouthins rivalisent en créativité et proposent des objets de plus en plus attachants, audacieux et pleins de sens. Cette émulation a poussé la joaillère Nada G. à s’inspirer des vitraux à rosaces du 19e siècle du musée Sursock pour créer des bagues, boucles d’oreilles, pendentifs et bracelets stellaires dont le sertissage dégage une jolie lumière discrète et nuancée. Cette collection fascinante s’appelle « Power of Light » et se décline en formes pleines ou évidées et divers combinaisons de gemmes et pierres précieuses sur or jaune et or rhodié. Nada G Nada G, Beirut Souks, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 983 443

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C’E ST B EAU C O M M E C’E ST F O U ! Il aurait fallu les inventer, ces pompons, ces sangles délirantes, ces chaussures dépareillées, ces tirettes de zip si longues et nombreuses que leur répétition donne un effet de frange, ces asymétries, ces clins d’œil ethniques (mais à quelle sorte d’ethnie ?), ces sacs qui se transforment en animaux ou en bras enveloppants avec, naturellement, une main au bout !... Depuis sa résurrection, Loewe joue la carte du luxe souriant et promeut un savoir-faire éblouissant sans jamais se prendre au sérieux. La collection Loewe croisière 2019 révèle le secret absolu de la séduction. Loewe Aïshti, 71 Rue El Moutrane, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.130 Aïshti by the Sea, Antelias, L2, +961 4 717 716 ext.121

KAIA, OH KAIA !

PHOTOS DR

Elle est belle et son style séduit toutes les générations, surtout les Millenials. La campagne Jimmy Choo printemps/été 2019 met en vedette Kaia Gerber dans une série d’images saisissantes capturées par le célèbre photographe de mode Steven Meisel. Les photos intemporelles de Meisel illustrent la beauté éthérée du mannequin et actrice américaine, fille de Cindy Crawford et de Rande Gerber, dans une série de portraits fascinants qui capturent l’esprit frais du nouveau sac Helia et des baskets Raine du maroquinier anglais. La campagne présente un tee-shirt et un sweat à capuche Jimmy Choo en édition limitée, conçus en collaboration avec les directeurs de la création, Mathias Augustyniak et Michael Amzalag de M/M Paris. Le K-tee et le K-hoodie seront vendus exclusivement en ligne sur jimmychoo.com. Jimmy Choo Jimmy Choo, Rue Fakhry Bey, Beirut Souks, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.595 Aïshti by the Sea, Antelias, L2, +961 4 717 716 ext.123

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TENDANCES

TACHES DE NAISSANCE On a beau essayer de reproduire un « tie and dye », on n’obtient jamais exactement le même résultat. À l’arrivée, chacun son ciel, chacun son nuage et chaque vêtement sa pigmentation singulière.

Proenza Schouler

PAR MARION GARNIER TEXTE FIFI ABOU DIB

Jimmy Choo

Stella McCartney

Gucci

Gucci

MSGM Dsquared

2

Chloé Hermès Stella McCartney

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MSGM

Photos DR

Prada


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TENDANCES

DE LA PLUME On veut du marabout, on veut de l’engoulevent, de l’autruche, un peu de cette matière magique qui nous prête sa sensuelle légèreté. Un tout petit peu, pour se sentir voler.

Gucci

Staud Loewe

Miu Miu

Miu Miu

Valentino

Hermès Valentino

Chloé

Burberry 53

Prada

Prada


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TENDANCES

SORTIES DU TUBE Rouge Valentino, bleu Klein, rose Schiaparelli, toutes les couleurs sont-elles prises ? Nommer, c’est s’approprier ; mais le spectre est immense. Que chacun signe sa nuance. Balenciaga Saint Laurent

Hermès

Max Mara

Saint Laurent

Off White

Prada

Balenciaga

Prada Valentino Valentino

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Photos DR

Balenciaga


the arabesque deco collection

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RALPHMASRI.COM

TEL. +961-1-566-538

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FOCUS

LE CYCLISTE, DEUX SIÈCLES EN UN COUP DE PÉDALE

Depuis l’été dernier, le cycliste revient en force dans les collections des grands créateurs et se répand dans les vestiaires ordinaires comme une trainée de poudre. Quel est donc le secret de ce retour ? PAR F.A.D. 56

Photos DR

Stella McCartney


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FOCUS

Chanel

Fendi

Qui dit cycliste dit bicyclette. En ces jours où l’émancipation féminine connaît son apogée, le moment est venu de rendre hommage à la « P’tite Reine » grâce à laquelle les femmes ont quitté le « p’tit train ». Dès 1860 et les premiers vélocipèdes, grande roue devant, petite derrière, confort des pneus en caoutchouc, les femmes de la haute société qui peuvent se le permettre (l’engin coûte à ses début l’équivalent de plusieurs mois de salaire), acquièrent les premières le pouvoir magique de franchir plusieurs kilomètres seules en quelques coups de pédales. Évidemment, le phénomène est mal vu, d’abord parce que celles qui ont la possibilité de s’offrir une telle machine vivent déjà, à la base, une certaine émancipation. Demi-mondaines ou carrément prostituées, veuves ou gagnant de quelque manière leur propre argent, elles n’ont de comptes à rendre à personne et c’est mieux ainsi. Car déjà les hommes s’affolent de les voir ainsi voler, si l’on peut dire, de leurs propres ailes. La médecine s’en mêle et jette l’anathème sur l’innocent véhicule, l’accusant de réduire la fertilité des femmes, d’avoir une incidence négative sur leur appareil reproductif et le soupçonnant à demi-mots de trop les « exalter » par le frottement de leur sexe sur la selle qui, contrairement à celle du cheval, ne s’enfourche pas en amazone. Toujours est-il que les femmes, heureusement pour leur descendance qui ne s’en porte que mieux (merci), s’accrochent. Déjà autorisées à porter le pantalon « uniquement pour monter à cheval », il leur faut inventer un nouveau costume pour monter à bicyclette. Et c’est ainsi que naît l’ancêtre du cycliste : le bloomer qui se porte sous 57

la jupe ou carrément seul et permet déjà de jeter aux orties corset et crinoline. Les hommes et les lois ont beau interdire le port du pantalon et le « travestissement des femmes » (loi française de 1800 abrogée en…2012 !) rien n’y fait, et dans un premier temps, les femmes peuvent être vues en bloomer uniquement si elles tiennent le guidon d’une bicyclette. Tout un symbole ! Voilà que la bicyclette joue le rôle actif de chaperon auprès du sexe faible devenu sexe libre. Le pantalon restera très longtemps mal vu, et jusqu’aux années 1980 la jupe restera obligatoire pour les femmes dans de nombreuses entreprises. Le retour du cycliste n’est donc qu’un juste retour des choses, un hommage à toutes ces femmes qui, bravant leur époque, leurs sociétés et la domination des hommes se sont débarrassées de costumes qui, pour être somptueux, n’étaient taillés que pour mieux les enfermer. Avec le tournant du « me too » et de la dénonciation devenue spontanée du comportement abusif des mâles tout puissants dans le milieu du travail, il y a désormais pour les femmes un avant et un après. Il s’exprime entre autres à travers une fréquentation de plus en plus massive des salles de gym et un engouement confirmé pour le spinning. La mode nous écoute, qui en doute ? Après avoir libéré nos aïeules, le cycliste se libère du cyclisme et s’offre une entrée en gloire sur les podiums. Du bloomer romantique et bouffant, la culotte gainante en tissu technique garde un petit air rétro qui fait son charme et se prête à toutes les interprétations stylistiques. A vos cyclistes donc, la chose a de bien beaux jours devant elle !


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STYLE PAR F.A.D

HERMÈS, L’ÉTÉ DES NAVIGATRICES

Blouson à basques en mélange de cuir matelassé et coton soie blanc cassé. Pull sans manches, détails techniques et maille sportive soie stretch blanc cassé. Short en veau grainé, laqué, traité nappa, curcuma. Sac Verrou Mini en veau Barénia fauve (bandoulièresangle orange Hermès et marron).Sandales montantes Tamara en veau vert foncé et toile technique kaki. 58

PHOTOS DR

À la belle saison, Hermès nous invite à quitter la terre ferme pour enfourcher Pégase, le cheval ailé, et nous élancer avec lui à l’assaut des mers et des horizons bleus. Pour caracoler avec grâce au-dessus des vagues, voici des matières protectrices et des tenues sportives qui n’oublient pas de rester éminemment féminines. Le cuir gold et caramel fait un tandem heureux avec la soie écrue, le corail et le kaki et se décline en shorts, minirobes ou tablier de palefrenier transformé en jupe. Les fermoirs sont des mousquetons pour capitaines au long cours. Les lignes de fuite des surpiqûres jouent les roses des vents. On largue les amarres.


Mini robe tressée en agneau fin traité nappa, curcuma et marron alezan. Combinaison short zippé en jersey technique rouge cornaline. Manchette Cavalerie en cuir Swift couleur Gold. Sandales montantes Tamara en nubuck et toile technique beige. 59


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TENDANCE

POLITIQUE DE LA MERINGUE Réac ou rêveuse, c’est selon, la mode de l’été met le sportswear au tapis et réhabilite les frou-frous. PA R M ATH I LD E B E RTH I E R

Le vêtement n’est pas une science exacte. Alors que le sac le plus googlé de l’année 2018 est une banane – Gucci – et l’accessoire le plus couru, une paire de sneakers montés sur ressorts, 2019 s’annonce prompte à réhabiliter une féminité de conte de fées, biberonnée aux drapés, aux ruchés, aux plissés… Bref, la quadrature du cercle couture, adaptée peu ou prou aux pratiques urbaines. Fraîchement débarqué chez Celine (sans é), Hedi Slimane s’attelle à ce vestiaire d’apparat citadin dans les mots et dans les actes. La sorbonnarde, archétype cher à l’ex-directeur artistique de Saint Laurent, a troqué son jogging contre un bibi, une robe-boule et des tiags – dans un monde régi par l’image, on n’irait pas jusqu’à balader sa néo-corbeille sur une valse de Johann Strauss. Ce sens de la fête, pulsé par des baffles rock-psychédéliques, fait verser toutes les extravagances du côté du cool. Marc Jacobs, Alessandro Michele, Clare Waight Keller ou encore Matty Bovan, petit génie de la mode anglaise : chez beaucoup, l’usage du frou-frou passe par des détournements cocasses et/ou bankable des pratiques de modélisme. Ainsi, pour Virgil Abloh, d’Off-White, la mariée était en T-shirt Néoprène sur jupe à traîne – le jaune fluo en prime. N’allons pas enterrer le sportswear. Saluons plutôt l’ère du syncrétisme.

Photo Marcio Madeira

Une silhouette du défilé Celine printemps-été 2019.

celine.com

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EN VUE

HAPPY BIRTHDAY POSH ! Après un défilé à Londres pour fêter les dix ans de sa marque, Victoria Beckham lance sa chaîne YouTube. L’ex-Spice Girl, reine du minimalisme aux 23,6 millions de followers, a su opérer sa transition numérique.

Cela fait une décennie que Victoria Beckham s’est érigée en designer, laissant derrière elle sa vie de Posh Spice. Dix ans pour changer de style, dix ans pour convaincre et surtout dix ans pour réussir. Elle s’est laissé le temps et fête aujourd’hui les choses en grand. Les réjouissances ont commencé par une campagne de pub signée Juergen Teller, dans laquelle Victoria a repris la même pose qu’elle avait adoptée pour Marc Jacobs en 2008, à un détail près : le sac oversize dans lequel elle est cachée et dont seuls ses pieds dépassent porte le nom de sa marque et plus celui d’un autre. Son show anniversaire a suivi,

pour lequel Victoria a défilé dans sa ville de cœur, Londres, devant tous ses amis et sa famille au grand complet. Sa collection printemps-été 2019 mixe des coupes franches avec des couleurs fortes et des imprimés minimaux, pour une dégaine nineties qui joue la carte de la superposition. La star de la soirée était un pantalon ouvert en V inversé sur le devant de la cheville. Apparu onze fois sur le podium, en plusieurs couleurs, il est déjà culte. Quant à son casting multigénérationnel allant de l’icône anglaise Stella Tennant à la nouvelle star des podiums Rianne van Rompaey, il a montré que la mode 62

VB pouvait s’adapter à toutes. La surprise étant le mot d’ordre de Victoria Beckham cette année, la créatrice n’en est pas restée là et a annoncé le lancement de sa chaîne YouTube au côté du très connecté journaliste de mode de CNN Style Derek Blasberg, qui a été nommé l’an dernier directeur mode et beauté de la plate-forme de vidéos. Victoria y dispense ses conseils en tous genres à travers de nombreux tutos. L’ex-star de la pop reconvertie en papesse de la mode minimale et désormais star des réseaux sociaux, qui l’eût cru ? @victoriabeckham

Photo DR

PAR LAURE AMBROISE







LA SOMME DES ÉLÉMENTS L’eau, l’air, la terre, le feu font vibrer nos sens. Tout objet qui nous attire dialogue secrètement avec les éléments et, à travers eux, parle à nos mains, caresse nos yeux, réjouit notre peau. C’est ainsi que l’accessoire devient indispensable.

Photographie Bachar Srour Direction de Création Mélanie Dagher Direction Artistique Sophie Safi

Sac, ROCIO.




Page de gauche: Robe, BURBERRY. Sac, STAUD. Sandales, HERMÈS.



Combinaison, SONIA RYKIEL. Escarpins, MAX MARA.


Pantalon, FENDI. Mules, CHLOÉ.




Pantalon, PRADA.


Sac, ROCIO.




Chemise, FENDI. Sac, CULT GAIA.


Robe, ALEXANDER MCQUEEN. Sac, 324 NEW YORK.



STARCH, DIX ANS ET UN HIVER Ce ne sont plus des novices. Plus de huit mois après avoir intégré Starch, les six talents de la promotion 2018 de l’incubateur libanais ont présenté leur collection automne/ hiver à Beyrouth, dans le majestueux immeuble Karagulla, avenue du Parc, en bord de mer. Les jeunes pousses de la création beyrouthine se rapprochent de la ligne d’arrivée et semblent fin prêtes à se lancer dans le grand bain.

Fondée en 2008 par le couturier Rabih Kayrouz et la consultante en communication Tala Hajjar, Starch est une association à but non lucratif qui s’est fixé pour mission d’aider à lancer la carrière de jeunes designers. Dix ans après sa création, la fondation libanaise se montre toujours à la hauteur de ses ambitions et continue d’accompagner ses talents, dont la sélection est triée sur le volet, tout au long de la préparation de leurs projets professionnels. Starch fournit à sa couvée outils et connaissances, ainsi que les clés pour affronter la réalité du monde professionnel de la création. « La plupart d’entre eux n’avaient jamais été confrontés aux difficultés

économiques du marché, confirme Tala Hajjar, cofondatrice et directrice de la fondation Starch. Lancer une collection, c’est aussi évaluer les capacités de production, les coûts. Il est nécessaire de s’adapter, de savoir quel type de tissu on peut utiliser, combien on peut en stocker…etc ». Le challenge est de taille pour ces jeunes designers, dans un pays comme le Liban, qui ne bénéficie pas (encore) de chaînes de production, et en proie à une profonde crise économique. Mais cela ne saurait décourager les ambitieux et très prometteurs talents de la dixième promotion de la fondation Starch. Tour d’horizon.

starchfoundation.org 84

Photos: Salim Cherfane, © Tarek Moukaddem; Yasminn Saleh, © Fouad Tadros

PAR JOSÉPHINE VOYEUX


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TALENTS

Salim Cherfane, ‘Bubble Boy’ Pour sa deuxième collection au sein de Starch, Salim Cherfane n’a rien perdu de son côté farceur et taquin. Mais le jeune homme a gagné en maturité. Les coupes des pièces automne/hiver sont plus nettes, affirmées audacieuses et toujours aussi hautes en couleurs. Si Salim Cherfane a abandonné sa coloration bleue capillaire, ses créations, elles, restent tout aussi vives. Résultat : Bubble Boy est une collection rafraichissante, légère et originale. Elle offre une véritable parenthèse enchantée et réconfortante au cœur de la rugosité de la saison hivernale. « Cette collection de Salim Cherfane confirme sa patte, estime Tala Hajjar, son attrait pour les imprimés, la géométrie et le graphisme. Les silhouettes sont épurées, les imprimés audacieux ». Prometteur et surtout atypique.

Yasminn Saleh, ‘Unfiltered’ D’une collection à l’autre, Yasminn Saleh reste fidèle à ses valeurs et son premier amour : l’artisanat. La styliste, diplômée de la LAU et du London College of Fashion, présente une seconde collection tout aussi authentique que la première avec un travail de couture sur-mesure et des tissus feutrés à la main auxquels la jeune femme a su apporter une touche de modernisme en ayant recours à une technique de tricot en 3D pour s’adapter à la logique et à la célérité du marché. Inspirée des garde-robes de nos grands-mères, la collection Unfiltered embrasse tout aussi bien la tradition – avec notamment plusieurs pièces pour hommes et des chandails tricotésque la contemporanéité. Le résultat est chaleureux, subtil, et luxueux. Sans oublier d’être 100% authentique.

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TALENTS

Rafah Seoud, ‘Sighting’ A l’image de Yasminn Saleh, Rafah Seoud porte de puissants messages dans ses créations. Après avoir imaginé, dans sa première collection sous le sceau de Starch, une allégorie de notre société future où tous les êtres vivants sont égaux et en totale harmonie avec l’univers, la jeune artiste libanaise, formée auprès du créateur Elie Saab, s’est inspirée pour sa collection automne/hiver 2018 des moines tibétains qui s’immolent par le feu en signe de protestation politique. « Yasminn et Rafah font passer un message derrière chacune de leur collection, que ce soit en faveur de l’environnement, de l’artisanat ou pour la défense du droit des femmes », confirme la directrice de la fondation Starch. La collection Sighting est donc une ode à ces soldats pacifiques du Tibet, dont la seule arme est leur pleine conscience d’eux-mêmes. Porter une pièce de la collection homme de Sighting est un acte militant en soi-même. C’est prendre part au combat, et affirmer son identité ainsi que ses prises de positions. « Pour s’offrir un meilleur monde, demain », assure Rafah Seoud.

Le jeune graphiste de 24 ans propose un premier livre d’illustrations visuelles : un ouvrage qu’il a écrit, dessiné et mis en page. Un travail colossal empreint d’un message universel très empathique dans lequel le jeune homme prône le recours aux énergies renouvelables et rappelle la nécessité de la douceur dans les relations humaines. Touchant, délicat et remarquablement illustré, ce premier essai de Rafik Hariri s’adresse à tous les âges. Après « Petites choses », son projet de journal intime dans lequel il avait raconté sa vie et son quotidien avec des mots et croquis simples, l’artiste confirme le talent de sa plume conduite, one le devine, par une très grande sensibilité.

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Photos: Rafa Seoud, © Mohamad Abdouni; Rafik Hariri, DR

Rafik Hariri, ‘Indigo’


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TALENTS

Tarek Raffoul, ‘Leaving Home’ C’est le photographe/réalisateur de la bande. Déjà primé pour son travail, à seulement 28 ans, Tarek Raffoul s’intéresse avec son projet Leaving Home au départ du foyer que doit vivre la jeunesse libanaise et à la nostalgie que celui-ci engendre. Après Ashes To Nature qu’il avait présenté en début d’année, le jeune photographe présente ici un travail épuré et bien plus mûr. Le poids de l’héritage est omniprésent mais amené avec beaucoup de finesse et avec un sens très affirmé de l’esthétisme. « Tarek Raffoul est un rêveur, il a la tête dans les nuages, son travail, très recherché, est très surréaliste », confirme Tala Hajjar. A découvrir, indéniablement.

Photos: Tarek Raffoul,DR; T&T, © Joe Khoury studio

T&T, ‘1000 Lira w Lira’ Le duo d’architecte de la promo Starch 2018 travaille sur la longueur. Théa Hallak et Thomas Billas ont réalisé depuis leur intégration à la fondation en début d’année un projet de boutique imaginaire, 1000 Lira w Lira, à travers lequel l’hyperbole du nombre « 1000 » met en exergue le pouvoir incontesté de l’argent dans notre société moderne. Ils ont tous deux débuté leur carrière professionnelle à PSLab, célèbre atelier de création de luminaires, où ils se sont rencontrés. Pour ne plus jamais se quitter.

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JOAILLERIE

BUCCELLATI, L’OR DU TEMPS Les doigts experts des artisans subliment l’or depuis cent ans pour donner forme aux créations de la maison Buccellati. Petite incursion dans les coulisses de l’atelier du joaillier milanais.

Du temps, il en faut, pour réaliser chacune des pièces de la maison qui a fait de l’or blanc, jaune ou rose, son matériau de prédilection. Les bijoux sont fabriqués à la main, ce qui crée entre eux d’imperceptibles différences que seul l’œil de l’artisan qui les a façonnés peut distinguer. Sur un pupitre, des mains habiles manient un burin tout en finesse pour graver dans l’or un gracieux motif de feuilles grâce à la technique du Modellato. Sertie de diamants, cette flore ciselée dans le précieux métal vient orner de ses reliefs la collection Bracelets de Rêves. Chaque extrémité de feuille prend la forme d’une fleur de lys, blason de la ville de Florence, à peine visible à la loupe, délicatement ébauchée dans le métal. De l’autre côté de l’atelier, des paires de fils d’or sont enroulées sur un pivot, puis torsadées en forme d’anneaux qui sont ensuite enchainés les uns aux autres pour créer les colliers aux cent cinquante anneaux de la collection Hawaii. Sur les bracelets de le collection Macri, de fins traits sont gravés dans l’or selon la technique Rigato qui rend le matériau encore plus résistant et lui permet de capter la lumière sous un autre angle. Cet effet

est exalté dans les bracelets en or noir où les gravures intensifient la couleur sombre. Les apprentis artisans passent plusieurs années en atelier à parfaire leur savoir-faire. Ils aiguisent d’abord leur technique sur du laiton avant de pourvoir graver l’or. Ce n’est qu’après huit à dix ans de travail minutieux qu’ils commencent à se pencher sur les pièces les plus recherchées de la haute joaillerie. Renaissance italienne et design intemporel Pour célébrer ses cent ans depuis l’ouverture de la toute première boutique à Milan en 1919, la maison a choisi de s’ancrer dans la modernité, à l’image de sa collaboration avec l’influenceuse digitale Noonoouri, créée par l’artiste Joerg Zuber basé à Munich. Ainsi, Noonoouri s’infiltre dans la dentelle d’un collier de haute joaillerie pour dévoiler le savoir-faire de la technique dite nid d’abeille transmise entre les générations d’artisans de la maison. Les motifs sont d’abord dessinés sur la plaque d’or avant d’être percés car une seule erreur suffirait pour recommencer la pièce à zéro. Ce résultat 90

couture, tout en transparence, confère une légèreté aux pièces inspirées du baroque, même les plus extravagantes. Mais c’est surtout dans la richesse artistique de la Renaissance italienne que les bijoux puisent leur design intemporel. Les rosaces qui ornent la façade du palais des Doges à Venise sont reprises dans la ligne Opéra qui se pare de nouvelles couleurs lumineuses introduites par les pierres comme la malachite, la turquoise et l’opale rose. Des cercles de jade ou d’onyx viennent s’insérer entre les anneaux d’or des boucles d’oreilles et bracelets de la ligne Hawaii, dessinée dans les années 1930 par Mario Buccellati, fondateur de la maison. Depuis, trois nouvelles générations se sont succédé. Andrea, le petit-fils de Mario, qui dirige l’atelier, est secondé par sa sœur Maria Cristina qui s’occupe de la communication et par Lucrezia, sa fille, qui dessine avec lui les collections. Baignée dans un savoir-faire artisanal centenaire transmis de père en fils, où l’or filé, gravé ou ciselé se fait tissu imprimé ou dentelle, la maison Buccellati se pare d’ores et déjà pour un deuxième siècle de splendeur. Disponible dans les boutiques Aïshti

Photos DR

PA R M A R I A L ATI COLLAGE MARION GARNIER


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JOAILLERIE

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BIJOUX

Un fil à l’oreille 1. BUCCELLATI Boucle d’oreille “Hawaii” en or jaune. 2. BVLGARI Mono boucle d’oreille en or rose. 3. REPOSSI EN VENTE CHEZ SYLVIE SALIBA Boucle d’oreille “Blast” en or rose pavé et serti de diamants. 4. GEORGE HAKIM Boucle d’oreille composée de deux ovales, l’un en or rose et l’autre en or blanc orné de diamants blancs. 5. DIOR JOAILLERIE Boucle d’oreille “Rose des vents” en or jaune, diamants et nacre blanche. 6. RALPH MASRI Mono boucle d’oreille en or jaune. 7. NADA G Boucle d’oreille ‘Power of Light’ en or jaune. 8. TABBAH Boucle d’oreille “B-Glam” en or rose, sertie de diamants.

La symétrie, c’est bien joli, mais de la singularité surgissent souvent force et beauté. Adoptez ces boucles solo à ne porter que d’un côté. R É A LI S ATI O N N O O R M E R E BY ET R AWA N M N E I M N E 1

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Photos DR

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Aïshti Downtown Beirut Tel 01 991 111 ext 130


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BIJOUX

DINA KAMAL, ARCHI-JOAILLÈRE

PAR F.A.D

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Photos DR

Elle a gardé de son enfance les boucles brunes et le regard étonné. Architecte, entre deux projets Dina Kamal dessine des bijoux et des objets, histoire de « jouer avec les échelles». Un exercice qui devient très vite un métier parallèle et enfin un engagement à part entière.


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BIJOUX

Fraiche émoulue de l’Université de Washington, Dina Kamal revient au Liban armée d’une longue formation d’architecte et prête à participer à la reconstruction d’après-guerre. Son sens des volumes et des proportions, son goût pour la précision, l’efficacité, et la beauté qui se passe de discours et de fioritures fait merveille. Pour garder l’inspiration en alerte, elle s’amuse durant ses rares plages de temps libre à imaginer des constructions à échelle réduite qui, très vite prennent l’aspect d’ornements précieux. Un ensemble de déconvenues la pousse enfin à franchir le pas vers la création de bijoux et d’objets design sans pour autant renoncer à l’architecture, sa vocation fondamentale. 95


DESIGN

Au culot, à Dover Street Passionnée d’histoire de l’art, la créatrice s’attache à concevoir des objets qui font sens, s’inscrivent dans une lignée et révèlent un ADN ancestral. Son premier projet abouti est une étude de la chevalière, cet anneau gravé d’un sceau personnel ou d’armoiries familiales qui se porte au petit doigt. Baptisée « PNKRNG collection », cette série de bagues aux lignes pures, aplaties sur le dessus pour recevoir -ou pasce pour quoi elles sont faites : une signature personnalisée, fait aussitôt le succès d’une jeune marque dont personne n’a encore entendu parler : Dina Kamal DK01. Nous sommes en 2010 et la créatrice décide de prospecter en premier le marché de Londres où elle a vécu un certain temps avant de s’installer au Liban. Elle se rend au culot à Dover Street Market et demande à voir le directeur pour lui montrer son travail. Elle se dit alors que si elle est retenue, c’est qu’elle est sur la bonne voie. Ses bijoux sont pris ; mieux, ils font du bruit. On en parle dans le Telgraph et dans Financial Times. La chanteuse Katy Perry craque pour ces chevalières si bien conçues, si sobres et contemporaines, et se fait photographier la bague au doigt. Aussitôt, Harrods veut passer commande, mais Dina Kamal fait une halte. Elle ne veut pas verser dans la production de masse. Soucieuse de préserver dans ses créations la touche artisanale et la vibration de l’âme et de la main, elle consent à les exposer dans une galerie de design où ils sont mis en valeur comme des objets d’art. La galerie Fumi, à Porto Cervo, les traite elle aussi comme tels. La créatrice a gagné : les connaisseurs, au moins, ont compris son message et vu sa singularité.

Brave petit soldat En décembre dernier, en plus de nouvelles déclinaisons de la ligne PNKRNG réinterprétée en formes rondes, or beige-signature ou noir, gris, blanc, jaune et rose, brossé ou poli, sertie de brillants ou de pierres de couleurs ; en plus de la nouvelle collection de colliers « Tork » inspirée des « anneaux de cou » ouverts que portaient les hommes des civilisations antiques, Dina Kamal présentait son petit dernier : une butée de porte baptisée « Standing Silent ». Dans son atelier et showroom situé au rez-de-chaussée d’un bel immeuble des années 1950 à la saignée de la rue du Liban, on se bousculait pour voir ce mystérieux prodige. Le petit objet a, comme tout ce qui sort de la boîte à idées de Dina Kamal, une histoire de réhabilitation et d’anoblissement tardif. Une butée de porte est après tout ce brave petit soldat aussi invisible qu’inconnu sans lequel, par temps venteux, on sursauterait plus souvent qu’à son tour. La créatrice en a fait un objet précieux, douillettement couché dans un écrin de cuir crème, orné de picots de métal contrasté ou de caoutchouc. A lui seul une sculpture miniature qui signe le raffinement de notre époque. Et quand Dina Kamal raconte son coup de foudre, lors d’un voyage au Japon, pour une petite boîte en bois sans aucune autre particularité que celle de l’avoir séduite par les bonnes ondes qui s’en dégagent, on comprend que toute l’entreprise de la créatrice consiste en une seule exigence : celle de mettre dans les objets qu’elle forme cette invisible valeur ajoutée qui s’appelle tout simplement l’amour.

dinakamal.com 96

Photo DR

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OH, PÉTALES ! Rien de plus sensuel et langoureux que ces parfums floraux qui, dès la belle saison, ouvrent en chaque femme la porte d’un jardin. Une romantique pluie de pétales se mêle à l’air, embaume boudoirs et salles de bain et répand dans les lieux publics l’idée d’une présence douce et mystérieuse dont on cherche la forme.

Photographie Raya Farhat Direction de création Mélanie Dagher Direction artistique Sophie Safi


Eau de parfum, "Twilly d'Hermès", HERMÈS.


Eau de parfum, "The only one", DOLCE & GABBANA. Page de droite: Eau de parfum "Her", BURBERRY.



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BEAUTÉ

NÉO-BOYISH Sophistiquée et accessoirisée, la coupe courte millésime 2019 joue la carte de l’élégance minimaliste. PAR MÉLANIE MENDELEWITSCH

Défilé Prada printempsété 2019.

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Photo Marcio Madeira

rangés et couronné de couvrechefs cloutés chez Prada, décolorés chez Marc Jacobs, accessoirisés de headbands doubles aux teintes nude chez Dior, les cheveux courts signent un comeback remarqué. Androgyne et empreinte d’un soupçon de militantisme, la coupe boyish nouvelle génération s’affranchit des diktats dans sa version effilée chez Alexander Wang ou chez Max Mara, où elle s’impose rasée et ultra-courte. Buzz beauté incontournable de la saison, la coiffure ébouriffée d’Edie Campbell imaginée par le hair guru Guido Palau à quelques minutes du coup d’envoi du défilé Versace promet de faire des émules, de même que la tête rasée rose flashy de Dree Hemingway, repérée sur le défilé House of Holland. 104


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BEAUTÉ

TENDRE EST LA NUIT Avec son dernier-né, Moonlight Shadow, Prada redéfinit les contours de la fragrance orientale. PAR MÉLANIE MENDELEWITSCH PHOTOGRAPHIE JULIA ANDRÉONE

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it unisexe annoncé de l’hiver 2019, Moonlight Shadow est l’un des quatre jus à rejoindre la collection Olfactories Les Mirages de Prada, voyage onirique qui révèle les multiples facettes de l’Orient. Rencontre au sommet entre Miuccia Prada et l’illustre parfumeuse Daniela Andrier, ces cocktails d’ingrédients bruts ultra-sensoriels s’imposent comme autant d’invitations au songe. Le parfum Une balade nocturne envoûtante qui vient réchauffer l’hiver ; les accords fruités de figue mûre y fusionnent avec la sensualité du cèdre, auxquels viennent s’ajouter de subtiles notes de cacao. L’écrin Délicatement lovés dans des pochettes de soie aux couleurs emblématiques de la maison Prada, ces flacons noir et or à l’élégance intemporelle se voient glissés dans des coffrets d’exception à la robe de cuir saffiano. Moonlight Shadow (100 ml), collection Olfactories les Mirages de Prada.

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SUR MES LÈVRES Mat, métallique ou ultra-brillant : le lipstick cuvée 2019 revient aux fondamentaux et décline des camaïeux de rouge vif. PAR MÉLANIE MENDELEWITSCH PHOTOGRAPHIE JULIA ANDRÉONE

De haut en bas : confortable au point de se faire oublier, sa matière ultra-légère s’impose comme la meilleure alliée de la tendance lourde mat métallique. Tatouage Couture The Metallics, Yves Saint Laurent Beauté. Enrichi en actifs nourrissants, ce tout-en-un conjugue le confort d‘un baume à lèvres

et l’éclat d‘un vrai rouge à la brillance miroir laquée. Ecstasy Shine, Giorgio Armani. Le secret de ce semi-mat éclatant qui semble accrocher la lumière ? Une texture light façon encre à lèvres, pour des couleurs toujours plus saturées. Rouge Dior Ultra Rouge. Une texture crémeuse au fini mat qu‘on 108

applique du bout des doigts pour un effet lèvres mordues, signature beauté de sa créatrice, Jeanne Damas. Le Rouje de Paris. Un mat intense qui tient sans dessécher ? Pari tenu grâce à sa formule enrichie en poudres légères et ultra-pigmentées. Absolu Rouge Drama Matte, Lancôme.


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GREEN POWER Petite-fille d’Estée Lauder, Aerin Lauder a lancé, au sein du groupe familial, une marque qui porte son prénom. Elle nous présente Éclat de Vert, son dernier parfum.

De l’histoire personnelle d’Aerin Lauder, autour de la beauté et de sa passion pour les parfums, est né un univers art de vivre. Éclat de Vert rend hommage au sud de la France à travers une senteur qui rappelle “la lumière qui filtre à travers la cime des arbres et la beauté de la Côte d’Azur”. De passage à Paris, elle parle du dernier opus de sa collection de fragrances. D’où vient l’inspiration d’Éclat de vert ? Aerin Lauder : Ce parfum très vert et très frais a été inspiré par mes souvenirs du sud de la France, où ma grand-mère se rendait souvent. Originaux, les parfums verts composent une magnifique famille, mais sont beaucoup moins populaires que les floraux. Ma grand-mère a lancé Aliage en 1972, c’était déjà un vert, une senteur magnifique, mais pas commerciale, une fragrance particulière, unique. Notre collection ne doit pas forcément être commerciale. Quelles sont ses caractéristiques de ce parfum composé par Honorine Blanc chez Firmenich ? Pour la facette verte, deux ingrédients

typiques de cette note, une combinaison de lentisque et de galbanum. C’est le point de départ du parfum. Ensuite, en fleur principale, un magnolia frais et un lys, très citrus. Aujourd’hui la tendance en parfumerie est aux gourmands. Oui, actuellement, avec les odeurs fruitées, ce sont les plus populaires. Hibiscus Palm, avec de la noix de coco, est notre interprétation de cette tendance. Mais elle va sans doute changer. Vos parfums préférés ? Rose de Grasse et Mediterranean Honeysuckle. Et, en dehors de la maison, Diorissimo, c’est le premier parfum que j’ai découvert quand j’étais adolescente. Et les parfums que vous n’aimez pas ? Je n’aime pas les odeurs de cuir, les odeurs fumées. Je n’apprécie pas trop les odeurs masculines. Je ne pense pas que je pourrais m’occuper d’un parfum masculin, Aerin est une marque vraiment féminine. Comment répartissez-vous votre travail entre Estée Lauder et Aerin ? Aujourd’hui, Aerin occupe 80 % de mon temps, mais je demeure très concernée par Estée Lauder, les campagnes, les

Aerin Lauder en plein travail.

nouveaux lancements. Nous sommes présents dans cinquante-trois pays, cela me prend beaucoup de temps. Vous avez choisi de donner votre prénom à votre marque. On avait différents noms et finalement le choix s’est porté sur Aerin. Je voulais donner des conseils, partager mes essentiels de beauté, c’était l’occasion de le faire. Je souhaitais un concept moderne et féminin. Quels sont vos produits favoris ? J’aime les parfums et les crèmes. Le parfum peut modifier une humeur, c’est quelque chose de très intéressant. Votre marque ne se limite pas aujourd’hui à la seule beauté. Nous avons commencé par créer la beauté, puis le style s’est étendu à des tissus, des sacs, et tout un univers autour de la maison. Que considérez-vous comme le plus important dans votre vie ? La chose la plus importante, ce sont mes enfants, mes deux garçons. Quand je développais Private Collection avec la tubéreuse, un professeur m’a appelée pour me dire qu’un de mes fils sentait très bon chaque jour, c’était mon Tuberose Gardenia. Aujourd’hui encore cette histoire nous fait rire. Vous êtes très active sur Instagram. J’aime Instagram, cela me détend. Mon plus jeune fils pense que je poste trop, et trop de fleurs. J’aime découvrir des choses. Je m’intéresse au pouvoir de l’ère numérique, même s’il est aussi dangereux. Mon Instagram relève vraiment du domaine professionnel, je n’y mêle pas mon mari et mes enfants. Quelles sont vos fleurs préférées ? J’adore le muguet et le gardénia. J’ai un jardin avec beaucoup de fleurs, des roses, des dahlias, des pivoines, mais pas de légumes ! aerin.com

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Photo Nick Krasznai

PAR ANTIGONE SCHILLING PHOTOGRAPHIE JULIA ANDRÉONE




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COVER

K A R E N WA Z E N , B L O G À PA R T Avant Instagram, on les appelait « bloggers » en référence à ces sites personnels qui fleurissaient sur la Toile et où chacun racontait ses voyages, sa vie, ses passions, jusqu’à l’avènement de l’application hors de laquelle point de salut. Karen Wazen fait partie de l’élite du nouveau star-system digital. Elle raconte son parcours.

Par F.A.D Photographie Rayan Nohra Stylisme Amine Jreissati Direction de création Mélanie Dagher Direction artistique Sophie Safi Coiffure Eddy et maquillage Dina - Aïshti Spa by the sea Lieu Aïshti by the sea


Robe, STELLA MCCARTNEY. Boucles d'oreilles, BALENCIAGA. Bracelets, CARTIER.


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“Je mène une vie très normale et je ne laisse jamais la « renommée » ou la « popularité » me nuire.”

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quelle carrière vous destiniez-vous au départ ? Je n’aurais jamais imaginé faire carrière dans les médias sociaux. J'ai une maîtrise en psychothérapie et je me voyais thérapeute. A quel moment êtes-vous devenue officiellement « bloggeuse » ? J'ai toujours aimé partager des moments de ma vie, mes pensées, mes inspirations avec d'autres. Lorsque j’étais étudiante en maîtrise à Londres, j’avais l’habitude de me promener avec une caméra (les caméras des téléphones n’étaient pas au point à l’époque). De même, lors de mes voyages avec mon mari (Ndlr Elias Bakhazi dit Luch) nous emportions toujours un appareil photo reflex numérique et un trépied pour pouvoir capturer nos meilleurs moments. À ce stade, les plateformes sur lesquelles partager ces photos étaient limitées. Je me souviens avoir posté des albums sur Facebook et très souvent reçu de nombreux retours positifs sur le type de photos et d’histoires que ces photos

décrivaient. La transition vers Instagram s’est faite naturellement. J’ai commencé par y télécharger certaines de mes images préférées, et la progression s’est faite de manière très organique. Instagram était presque comme un journal intime où je partageais mes tenues quotidiennes, mes repas préférés, mes sorties, avec mes amis. J’ai eu ensuite l’idée de documenter ma grossesse, les difficultés et les beaux moments de cette aventure. Mon public a commencé à s’élargir, toujours de manière très organique. Ce que j’ai toujours entendu dire, c’est qu’on se référait à moi comme à "la fille d’à côté". Les gens s’identifiaient à ma vie de mère ou d’épouse, mais aussi à mon style et mes inspirations vestimentaires. Pour être franche, je n’avais jamais imaginé que cela se transformerait en un travail, principalement parce que j’ai tant de plaisir à le faire que cela me semblait trop beau pour être vrai. Un jour, j'ai reçu un appel d’une personne chargée des relations publiques chez Promod. C’était une jeune femme très aimable qui m'avait fait beaucoup


Chemisier et jupe, VALENTINO. Boucles d'oreilles, BALENCIAGA. Bottines, GIANVITO ROSSI.


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Veste et chemisier, PHILOSOPHY DI LORENZO SERAFINI. Page de gauche: 1. Boucles d'oreilles, ELLERY. Manteau et bracelets, HERMÈS. 2. Robe, STELLA MCCARTNEY. Boucles d'oreilles, BALENCIAGA. 3. Body, BALMAIN.


Body, JONATHAN SIMKHAI. Boucles d'oreilles, ELLERY.


de compliments sur mon compte Instagram et m'avait dit qu'elle avait vraiment aimé suivre mes récits. Elle m’a donc proposé une collaboration avec Promod. Celle-ci consistait principalement à publier 5 photos de moi habillée avec différents styles de la nouvelle collection et animer une séance de shopping avec certains de mes abonnés. C’est à ce momentlà que j’ai eu l’impression qu’un glissement s’opérait d’un passetemps et d’une occupation que je considérais comme amusante à quelque chose de plus sérieux, d’officiel, de professionnel. J'ai accepté les conditions, organisé mon premier événement et voilà où nous en sommes, quatre ans plus tard… Aujourd'hui, je suis fière de ce à quoi je suis parvenue. Je suis fière d’être restée «la fille d'à côté» et je me considère très chanceuse de travailler dans une domaine où je me suis lancée simplement par plaisir et amour, sans aucun calcul. Quelles sont les contraintes que vous vous imposez pour augmenter votre audience ? Augmenter mon audience n’a jamais été mon but principal. Les obstacles auxquels je suis confrontée sont plutôt liés au fait de tenter constamment de me recréer, de me renouveler, de trouver de nouvelles dimensions en moi, de ne pas être répétitive, de sortir des sentiers battus, de me développer en tant qu'être humain et de garder les pieds sur terre. Je crois que lorsqu’on se concentre sur ce genre d’objectifs, les choses se développent en conséquence. Est-ce un travail d’équipe ? Combien êtes-vous dans cette « entreprise » ? Qui prend les photos ? Quel rythme ? Je prends des photos tous les jours et je n'ai pas de photographe assigné. Cela n'aurait aucun sens pour moi. Ma stratégie et la manière dont je m'occupe de cette entreprise consistent à documenter ma vie en temps réel et de la manière

la plus naturelle possible. Je demande à toute personne qui se trouve là au moment même de prendre une photo de moi. Je sais ce que je veux, j’ai une idée précise de la perspective de la photo, je demande à quelqu'un de cliquer. Cependant, au quotidien, je travaille avec une excellente équipe sur la stratégie, la planification, la croissance de ma marque, la négociation de contrats. À ce stade, nous formons une équipe de 4 personnes. Vos trois jeunes enfants figurent souvent sur votre compte Instagram. Comment vivent-ils cette exposition à leur âge ? Quelles sont leurs réactions ? Mes enfants ont 4 ans et 3 ans. Ils mènent la vie très normale des enfants de leur âge. Ils vont à la crèche et jouent au parc. Ils ont beaucoup d'amis et le plus important est qu’ils sont entourés de beaucoup d'amour et d'attention. Je dirais que, comme beaucoup d'enfants de cette génération, ils sont exposés à être filmés et photographiés, simplement parce que photographier avec un téléphone portable est devenu un réflexe et qu'ils sont si mignons (du moins la plupart du temps). On a spontanément envie de capturer ces moments et créer des souvenirs sur lesquels on peut revenir. La différence est que je partage certaines de ces photos et vidéos avec ceux que je considère comme ma famille en ligne. Je suis une personne positive qui voit de préférence le verre à moitié plein. Ainsi, au lieu de penser que leur "exposition" pourrait avoir des répercussions négatives, je me concentre sur les aspects positifs. Je crois que mes enfants sont entourés de beaucoup d’amour de la part de personnes qui ne les ont même pas rencontrés. Je crois et espère que mes plateformes sur les médias sociaux pourraient un jour ouvrir des portes à leurs rêves et espoirs. Je crois que mes enfants sont toujours montrés



Boucles d'oreilles, ELLERY. Manteau et bracelets, HERMÈS.


sous un jour très naturel, innocent et approprié, et tant que je vois ces grands sourires sur leur visage, l'amour qu'ils ont à offrir, la gentillesse qu'ils projettent, c'est tout ce qui compte pour moi comme pour mon mari. Comment se répercute votre célébrité sur votre vie quotidienne ? Je mène une vie très normale et je ne laisse jamais la « renommée » ou la « popularité » me nuire. Je vais toujours dans tous les endroits où j'aime aller. Je sors sans maquillage si je ne suis pas d'humeur à me maquiller. La seule chose qui a changé, c’est qu’au lieu de se contenter de réagir sur les médias sociaux, des gens m’arrêtent et demandent à se photographier avec moi, ce qui me rend tellement heureuse. J'aime rencontrer les gens qui suivent mon compte et j’engage souvent des conversations avec eux, je leur demande leur avis sur mon travail et j'apprends et prends beaucoup de leurs observations. Malheureusement, je suis aussi un peu plus exposée à la haine, que ce soit de la part de personnes en colère qui ne me connaissent pas personnellement mais qui ont un problème avec la façon dont je fais les choses ou même de personnes

qui me connaissent mais qui ont aussi leur propre opinion… et c’est bon, je prends très bien la critique constructive, mais quand il y a malveillance, j’ignore et je continue ma vie. Y a-t-il une solidarité dans la communauté des « Igers » de la région ? Si oui, comment se manifeste-t-elle ? Je pense que quelques-unes d'entre nous ont eu la chance d'avoir été des amies très proches avant l'avènement des médias sociaux, et cela n'a évidemment pas changé. Le fait que nous ayons tant à partager a renforcé notre relation. Après tout, il y a de la place pour tout le monde dans ce secteur, ce n’est pas une compétition, c’est une simple manière d’être, à la seule différence que celle-ci est partagée sur les réseaux sociaux. Il y a 7 milliards d’êtres humains dans ce monde et chacun y a sa place. Je me suis également fait dans ce métier de nouveaux amis qui se soutiennent mutuellement avec force. Je l’ai constaté lorsque j'ai lancé ma marque de lunettes : presque tous les blogueurs de la région m’ont manifesté leur soutien, chacun à sa manière, et je leur en suis très reconnaissante. Vos films et photos ciblent-ils une catégorie d'âge ou une




Body, JONATHAN SIMKHAI. Boucles d'oreilles, ELLERY. Jupe, PHILOSOPHY DI LORENZO SERAFINI.



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COVER

catégorie sociale particulière ? Je n’ai pas le sentiment de communiquer avec un groupe d'âge particulier. J'aimerais que toutes sortes de femmes se retrouvent dans les histoires que je propose : la femme qui travaille, la femme au foyer, la mère, l'étudiante, la passionnée de mode… Quelles sont vos marques fétiches ? Parmi les marques internationales, mes préférées sont en ce moment Attico, Dior, Isabel Marant, Valentino, Alexandre Vauthier et Saint Laurent. De quand date votre envie de créer une ligne de lunettes et comment celle-ci a-t-elle finalement vu le jour ? Cela fait un an que je travaille sur ce projet. Le jour du lancement (le 5 décembre) a été surréaliste. J’attendais ce moment avec une telle excitation, c’était un tel rêve que je croyais qu’il ne se réaliserait jamais. En cours de route, il m’est souvent arrivé de pleurer de stress, presque de peur, et ce jourlà j’ai pleuré tant j’étais submergée de bonheur… mais c'était tellement beau, ça a été une aventure incroyable.

Quelle est l’inspiration derrière l’esthétique de vos lunettes ? Est-ce vous-même qui les dessinez ? J’ai eu beaucoup de chance de pouvoir travailler avec ma sœur Andrea Wazen sur la marque de lunettes. Elle est designer et c'est elle qui conçoit les modèles. Nous réfléchissons ensemble sur les styles, les couleurs et l’ambiance de la collection, puis elle réalise les dessins. La collection, à l’image de ma plateforme, s’inspire de toutes les femmes et leurs divers styles. Les lunettes Karen Wazen s’adressent autant aux femmes leaders qu’aux femmes aventureuses, aux femmes actives comme aux créatives, aux romantiques, aux femmes libres comme à celles qui recherchent une touche de glamour. Comment se déroule une journée de Karen Wazen ? Je ne dirais pas qu'il y a une journée typique dans ma vie car mes journées varient. Certaines sont occupées par des enchaînements de réunions et de séances de photos, d’autres par les voyages de presse et les fashion weeks. La seule constante est la qualité des moments passés avec ma famille et, toujours, la documentation de tout ce qui peut être intéressant pour ma plateforme et ceux qui la suivent. @karenwazenb


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STYLE

Nabil Nayal dans le vestiaire elisabéthain A la tête de sa marque de prêtà-porter éponyme, Nabil Nayal a présenté cet automne sa collection printemps-été 2019 dans l’enceinte de l’illustre British Library, la bibliothèque nationale britannique. Une première, au Royaume-Uni et dans le monde de la mode, qui atteste de l’envergure du jeune designer, tout juste âgé de 33 ans.

Nabil Nayal est ce que l’on appelle un jeune prodige. Avant-gardiste et audacieux, le jeune créateur syrobritannique multi-récompensé est une figure montante de la hautecouture. Avec son attrait pour le style élisabéthain qu’il qualifie « d’obsession », il révolutionne le monde de la mode. C’est la toute première fois, depuis son ouverture en 1973, que la British Library accueille un défilé de mode. L’heureux créateur qui a eu l’opportunité de dévoiler sa nouvelle collection haute couture dans l’enceinte d’une des plus importantes bibliothèques de référence au monde, n’est autre que Nabil Nayal. Le jeune

artiste, qui est né et a grandi en Syrie avant de suivre sa famille, à l’âge de 14 ans, dans le nord de l’Angleterre, a toujours cultivé un intérêt profond pour l’histoire des Tudor et plus spécifiquement l’ère élisabéthaine, synonyme, en Grande-Bretagne, d’âge d’or artistique et culturel. Une machine à remonter le temps Depuis son plus jeune âge, Nabil Nayal conjugue cette passion avec celle de la couture et des tissus. Il en résulte un style qui n’appartient qu’à lui et qui lui vaut aujourd’hui son succès : Plissés et manches larges et allongées, décolletés en tulle, bas de jupes cerclés 130

d’anneau d’osier, une construction toujours puissante. Pour sa toute dernière collection, le jeune créateur a eu l’opportunité de se replonger dans les archives élisabéthaines, qu’il avait déjà consultées dans le cadre de sa thèse à la Manchester Metropolitan University. A l’arrivée, les différentes pièces vestimentaires sont une véritable invitation au voyage et fonctionnent comme une sorte de machine à remonter le temps. Plusieurs robes de cette série conçue pour la saison printemps-été 2019, comportent des fragments de citations de la reine Elisabeth 1ere, prononcés en 1588, en réaction à la menace d’invasion.

Photos DR

PAR JOSÉPHINE VOYEUX


Tout ce qu’il touche se transforme en or Le potentiel de Nabil Nayal s’est manifesté dès son plus jeune âge. Lui qui a grandi entouré de beaux textiles - son père tenait une boutique de tissus en Syrie-, a toujours été fasciné par la couture. Il se rappelle avoir conçu sa première robe à l’âge de 13 ans. Réalisée à partir de rideaux, celle-ci était destinée à sa mère qui, dans son souvenir, en fut ravie. Dès son arrivée en Europe, son talent est repéré par ses pairs. Nabil Nayal gagne de nombreux prix : le Women’s wear Award et celui de la Royal society of Arts, avant de décrocher la bourse du British Fashion Council qui lui permettra de suivre le cursus du Royal College of Art. Tout ce que le créateur touche semble se transformer en or. Quand il crée une collection capsule pour la célèbre marque de prêt-à-porter River Island, celle-ci se vend en trois jours. En 2010, l’ensemble de sa collection est acheté par le géant Harrods. La même année, il est invité à Buckingham Palace où il rencontre la reine Elizabeth II, la descendante directe de son ultime idole et modèle féminin – Elizabeth 1ere. En 2010 toujours, à 25 ans seulement, il est le premier créateur de mode à utiliser l’impression 3D… La révolution est amorcée. Le cadeau de Karl La machine s’emballe rapidement pour Nabil Nayal. Il est un des créateurs les plus prometteurs de sa génération. En 2015, alors qu’il est sélectionné parmi les finalistes du prix LVMH 2015, Karl Lagerfeld le remarque… et devient son client ! Il lui achète en effet un top qu’il offre à l’écrivaine et rédactrice de mode Amanda Harlech. C’est la consécration pour le jeune créateur. Ses modèles sont aujourd’hui portés par de nombreuses célébrités telles que Lady Gaga, Rihanna, Claudia Shiffer ou encore Victoria Beckham et ce rêve, Nabil Nayal voudrait le poursuivre en Angleterre. S’il espère avoir bientôt l’opportunité de voyager au Moyen-Orient et notamment en Syrie, le jeune créateur ne s’imagine pas quitter son pays d’adoption et ses têtes couronnées… L’histoire ne semble que commencer pour le jeune homme. À défaut de pouvoir remonter le temps et d’habiller Elisabeth 1ere, le talentueux designer aura peut-être l’opportunité un jour de vêtir les duchesses Kate Middleton et Meghan Markle affaire à suivre ! nabilnayal.com 131


COMME DES SŒURS Entre sœurs, le lien est toujours intense, émotionnel, passionnel, conflictuel, tissé de tendresse et de jalousie, d’attachement et de reproches, de complicité et de contrastes. Voici des sœurstandem, génies à deux têtes, fusionnelles et opposées.

Par F.A.D Photographie Michèle Aoun Direction de création Mélanie Dagher Direction artistique Sophie Safi Coiffure et maquillage Aïshti Spa by the sea et ïDay Spa

Âges : Jessica 31 ans, Monika 29 ans. Activités : Jessica est créatrice de mode, fondatrice et directrice artistique des marques Jessika K et Little Bluffers, sportive et passionnée d’arts. Monika dirige avec son mari le restaurant Aline of Lebanon à Londres. Elle adore le ski, les sports et ne manque pas une session de pilates. Ressemblances : Même silhouette, même style, même générosité, même esprit positif. Différences : Jessica n’a pas froid aux yeux, elle est sociable et hyperactive. Monika est plus timide mais peut parfois surprendre en révélant sa face rebelle ! Souvenirs d’enfance : Elles ont grandi en partageant la même chambre aux murs ornés de posters de Leonardo di Caprio et Enrique Iglesias (elles en rient aujourd’hui !). Jessica : « Je me souviens de notre papa aux fourneaux, les enfants installés à la table de la cuisine et obligés de goûter à chaque plat ». Monika : « Jessica a toujours veillé sur moi, elle a toujours été très protectrice et je l’ai toujours prise en exemple. »


Total look, ATTICO.


Total look, CHLOÉ. Boucles d'oreilles, CULT GAIA.


Âges : Nour 31 ans, Sarah 25 ans. Activités : Sarah est designer environnementale et de produits, joueuse d’ukulélé, dessinatrice, marcheuse dans la nature et grande lectrice. Nour est coach de développement personnel et spécialiste en marketing, par ailleurs passionnée de grands débats, de voyages et de rencontres avec d’autres cultures et de longues marches au grand air. Ressemblances : Partagent les mêmes valeurs intellectuelles, adorent s’approprier les idées les unes des autres, ont le même sens de l’humour, savourent tout ce qui est relatif à la nature. Différences : Sarah est plutôt introvertie, Nour l’inverse. Souvenirs d’enfance : Les arbres escaladés et les tentes improvisées avec leurs deux frères dans le jardin de la maison familiale. La solidarité de la fratrie face aux interdictions des parents, au point d’arracher à ces derniers l’autorisation de passer des nuits sous la tente. Un débat qui revenait toutes les semaines.


Âges : Mia 31 ans, Reem 29 ans. Activités : Mia est dans la publicité. Elle aime les sorties en bande, le yoga et les blagues. Reem est dans le marketing, et adore les voyages, le pilates et le fastfood. Ressemblances : Mêmes valeurs, mêmes humeurs, même regard. Différences : Pas le même style. Souvenirs d’enfance : Reem punie et enfermée dans la salle de bain et Mia, inquiète pour elle, lui glissant de la nourriture par petits bouts à travers le trou de la serrure.


Total look, BALENCIAGA.


Total look, OFF-WHITE.


Âges : Nour a 24 ans, Farah 23 ans. Activités : Nour est scénographe, mannequin et designer. Farah est étudiante en marketing et styliste. Ressemblances : Mêmes valeurs, même caractère trempé, même attachement à la famille et même amour de l’art. Différences : Enfant, Farah était la fauteuse de troubles toujours chassée de la classe. Nour était au contraire la bonne élève calme et timide. A l’adolescence, les rôles se sont inversés, Farah grandissant en sagesse et Nour en excentricité. Elles ne se ressemblent pas, et l’on prend souvent Farah pour l’aînée. Souvenirs d’enfance : Jouer à la guerre avec les enfants du voisinage, volets fermés, avec des stocks de provisions et la peur de sortir à cause des obus, parce que les récits de la famille tournaient autour des souvenirs de la guerre et de la vie dans l’abri. Le Collie de la famille, Lassy, à qui leur papa avait appris à sauter pour ouvrir la porte. Un jour Nour s’est retrouvée enfermée dans la chambre de jeu, et seule Lassy a pu la libérer.


Âges : Shermeen 33 ans, Soraya 30 ans. Activités : Shermeen est créatrice et professeur de mode. Soraya est acheteuse de mode. Ressemblances : On dit qu’elles ont le même rire et la même façon de parler. Elles partagent le même goût pour la bonne cuisine ainsi que pour la musique, le cinéma et les arts. Différences : Sur un menu, Soraya choisirait les options les plus saines et Shermeen tout le contraire. Souvenirs d’enfance : Les weekends à la plage, à Lagos, au Nigéria. Les étés à Faqra avec les amis et cousins.


Blazers, BLAZÉ. Robe, top et jupe, DION LEE. Boucles d'oreilles, SAINT LAURENT.


Total look, EMILIO PUCCI.


Âges : Pam 27 ans, Sally 25 ans. Activités : Pam est réalisatrice de films, Sally créatrice et spécialiste en stratégie de marques. Ressemblances : Sally est rationnelle, Pam émotive. Elles partagent un même amour l’une pour l’autre ainsi qu’un tempérament impatient. Toutes deux aiment aider et mettre leur potentiel au service d’autrui. Différences : Non signalées. Souvenirs d’enfance : Quand elles avaient respectivement 7 et 5 ans, elles ont réalisé un album de photos à l’intention de leurs parents pour la Saint Valentin. Pendant des heures, elles ont posé ensemble dans tous les coins de la maison, imitant un couple d’amoureux. Ces photos leurs sont aujourd’hui infiniment précieuses. Elles en disent long sur ce qu’elles sont devenues.


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LUMINEUSE ET AU DACI E US E SEMSEM PAR JOSÉPHINE VOYEUX

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ZOOM

La marque de prêt-à-porter de luxe Semsem a présenté en novembre dernier sa collection printemps/été 2019 à l’hôtel Abou Dhabi Edition, aux Emirats arabes unis. C’est à l’unanimité qu’un parterre de stars a salué l’élégance et le glamour de la toute dernière ligne de la talentueuse et surprenante Abeer Al Otaiba.

La collection printemps/été 2019 de Semsem se présente comme une ode aux racines, comme un hommage d’Abeer Al Otaiba à ses origines égyptiennes. A travers ses vestes en sequins, ses robes en mousseline et ses tenues aussi colorées que lumineuses, la fondatrice et directrice artistique de la griffe, qui a grandi à Alexandrie, fait une révérence au pays de son enfance. La palette de couleurs de ses pièces de prêt-àporter printemps/été 2019 – du jaune sable au doré scintillant en passant par le rouge luxuriant, les drapés blancs ainsi que le vert sapin, évoque effectivement la brise estivale égyptienne. « Je me suis inspirée d’une oasis au cœur du désert égyptien, confie Abeer Al Otaiba. Je me suis nourrie autant que je l’ai pu de ses myriades de couleurs qui évoluent tout au long de la journée entre le lever et le coucher du soleil, entrecoupées d’intenses notes vert- émeraude ». Résultat : chaque pièce de la nouvelle collection Semsem semble baignée de lumière. Ces créations sont le reflet tantôt des rayons du soleil, tantôt du clair de lune avec leurs franges, leurs plis, leurs motifs géométriques, léopard ou graphiques. Elles invitent au voyage, voire à une échappée dans un monde imaginaire, loin de tout pragmatisme. « Cette année, nous avons imaginé un monde dans lequel les femmes peuvent rêver, réfléchir et se retrouver. Un monde qui serait en quelque sorte le reflet de leur oasis personnel, poursuit Abeer Al Otaiba. J’aime toute la collection mais une de mes pièces préférées est une robe en mousseline plissée sur plusieurs étages. Avec son dégradé de couleurs, cette tenue qui a nécessité 80 heures de travail est une véritable expression de l’évolution du soleil, de l’aube au crépuscule ». Glamour et responsabilité Le clin d’œil aux racines égyptiennes de la fondatrice de SemSem ne se limite pas à ses sources d’inspirations. La talentueuse directrice artistique a notamment accompagné son tribut à la civilisation de ses ancêtres d’un partenariat avec la 147

société KOTN, qui soutient les petits producteurs de coton égyptiens. Car, comme Abeer Al Otaiba aime à le souligner, SemSem est une marque de prêt-à-porter responsable. « Nous sommes une marque consciencieuse, dit-elle. En tant que mère, il est très important pour moi de sensibiliser autant que je le peux à la cause des femmes. Nous choisissons pour chaque collection un partenariat avec un organisme philanthropique spécialisé dans l’éducation ou encore le mentorat… ». La femme SemSem 2019 est ainsi un savant mélange d’élégance, de style et de détermination. Elle s’affranchit des codes et creuse le chemin de sa propre réussite pour faire de ses rêves une réalité et trouver le courage de respecter ses engagements. « Elle est indépendante, forte, autonome et s’efforce chaque jour de rendre notre monde meilleur. C’est une femme accomplie qui sait s’appuyer sur son entourage et son environnement dont elle tient son inspiration », résume la fondatrice de la marque. Cette femme transmet aussi ses valeurs à sa descendance, et Semsem propose des tenues mère/fille pour permettre au tandem de s’accorder, voire se compléter dans l’expression de la féminité sans jamais se copier. Le mariage des textiles et des coupes de ce double vestiaire renforce le puissant lien qui unit la mère à la fille. La créatrice Abeer Al Otaiba, dont l’icône fashion n’est autre que la chanteuse et actrice franco-britannique Jane Birkin, fait ainsi l’apologie, à travers sa nouvelle ligne de vêtements, d’une beauté à la fois forte et fragile - en utilisant des couleurs contrastées, des mouvements de tissus contradictoires et un savant mélange de matières. La recette fonctionne, et à merveille et la designer américaine Lorraine Schwartz, les comédiennes Tiffany Haddish et Olivia Palermo ainsi que les stylistes Law Roach et Eric McNeal, présentes au défilé, l’ont confirmé avec enthousiasme.

semsem.com


CONVULSIF ! Brouillé au petit-matin d’une nuit de fête, juste pour s’en souvenir, parfait au dernier coup de brumatiseur qui donne bonne mine, plus fort sur les yeux, ou plus appuyé sur les lèvres, électrique pour conjurer ce diable au corps, le maquillage nous raconte.

Photographie Michèle Aoun Direction de création Mélanie Dagher Direction artistique Sophie Safi

Body, AZZEDINE ALAÏA. Ceinture, ROBERTO CAVALLI. Escarpins, MIU MIU. Lunettes, STELLA MCCARTNEY.




Page de gauche: Sac, EMILIO PUCCI. Maillot de bain et foulard, EMILIO PUCCI. Sandales, HERMÈS.


Body, AZZEDINE ALAÏA. Ceinture, ROBERTO CAVALLI. Escarpins, MIU MIU. Lunettes, STELLA MCCARTNEY.


Sandales, GIANVITO ROSSI.


Veste, BALMAIN. Pantalon, SARA BATTAGLIA. Collier, ROBERTO CAVALLI. Page de droite: Body, ALEXANDRE VAUTHIER.



Veste, BLAZÉ. Boucles d'oreilles ELLERY.





Top, BALENCIAGA, bottes STELLA MCCARTNEY.



Robe, ALEXANDRE VAUTHIER. Page de droite: Robe, DION LEE. Boucles d'oreilles, ROBERTO CAVALLI.


MODÈLE MARTA MARCZEWSKA @ AGENTS MODEL MANAGEMENT S.R.O. COIFFURE EDDY & MAQUILLAGE CHRISTIAN ABOU HAIDAR @ AÏSHTI SPA BY THE SEA.


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CONCEPT

MILIA AIME… PA R N A S R I S AYE G H

Milia M la mode, les arts, la musique. Elle aime aussi tout ce qui fait voyage, tout ce que fait Louise Bourgeois ou encore l’enivrante langueur d’un Leonard Cohen. Incurable rêveuse, Milia Maroun fait beau. Rencontre.

Milia Maroun, du plus loin qu’elle vous revienne, à quand remonte votre toute première émotion artistique? Un cours de dessin avec Greta Nawfal. J’étais alors élève au Collège protestant français de Beyrouth ; je devais avoir dix ou onze ans. Greta nous initiait alors aux techniques de la sérigraphie. Je me souviens d’un obsessionnel sentiment de bonheur et d’un vaste champs de possibles qui soudain s’offrait à moi… Milia Maroun, quelle est la philosophie de Milia M. ? Malgré le caractère évolutif de mon travail, la philosophie reste constante. Imbriqués dans la contemporanéité, les vêtements que je crée sont intemporels. La notion de temps est essentielle, qu’il soit perçu ou vécu ; le temps qui passe, le temps que l’on prend pour parfaire, le temps qui ne s’arrête pas. Une réflexion constante sur l’éphémère des choses. La répétition, le geste répété fait partie intégrante de mes recherches: le tissage, le cycle des collections, une fin qui au final n’est qu’un début... Temps et répétition ; deux notions interdépendantes, qui sont

-consciemment ou pas- une réflexion au cœur de mes travaux. Constance et inconstance. Après des années passées en vitrine et sur les podiums, vos créations défilent aujourd’hui sur les cimaises des musées. Que s’est-il passé, comment ce changement de cap est-il survenu? Le système de la mode qui, par ailleurs, est lui-même en train d’évoluer, était devenu vain à mes yeux. Je n’arrivais plus à justifier mon engagement. Il me fallait absolument intégrer d’autres valeurs dans mon approche, changer ma vision, mon rythme et mon mode de fonctionnement. Faire moins pour dire plus. La réponse était toute prête, même si la transition s’est faite lentement. La Kimabaya – ce mariage entre le kimono et la abayaporte une histoire très forte qui fait rêver et qui permet une approche toute autre par rapport au vêtement purement mode. Les Kimabayas sont des pièces uniques faites de tissus 164


antiques, de kimonos vintage, de tissages et de broderies qui racontent des savoir-faire perdus, ou peu connus. Ce vêtement attire aujourd’hui les musées, amoureux du textile ou tout simplement les collectionneurs de beau. Justement, d’ou vient votre désormais si emblématique Kimabaya ? C’était en 2001 lors d’un voyage au Japon, plus précisément sur l’ile de Naoshima. Ce périple très inspirant m’a donné envie de joindre deux passions. Pour le Japon d’une part - les maîtres de la mode nippone étaient déjà au centre de ma réflexion - et pour mon identité levantine de l’autre. La première pièce « Soi Soie » est née du désir de raconter la Route de la Soie.

Photos Juliette Cassidy

Vos recherches se situent souvent entre le monde de la mode et celui de l’art. Quelles sont vos sources d’inspiration Milia ? L’objet. Fétichiste que je suis, j’éprouve un amour particulier pour la matière, pour le tissu. Le vêtement donne corps à ce dernier en lui offrant une intégrité forme/matière. Ce corps dans mon imaginaire devient un objet porteur d’idées, de poésie et d’histoires qui narrent mes voyages, mes émotions, mon vécu. Dans l’histoire de la mode et de l’art, qui sont vos maîtresses et maîtres à faire et à penser ? Louise Bourgeois et Alexander Calder. Tous deux m’inspirent et convergent, chacun à sa manière, à la source de mes idées. Dans la mode Yohji Yamamoto, Rei Kawakubo et Martin 165

Margiela sont pour moi de véritables écoles. Que présentez-vous à « Nomadic Traces » Abu Dhabi ? « Nomadic Traces » aborde la fluidité et la flexibilité de l’écrit. Sur une Kimabaya, deux alphabets aux similitudes frappantes seront retranscrits: le phénicien et le japonais - le Katakana précisément. Les mots « Orient » « Temps » et « Voyage » seront brodés au fil d’or sur une Kimabaya en lin antique. Encore un nouveau voyage ! Beyrouth, Paris, Londres, Damas, Istanbul… une vie au pluriel des géographies. Que représente le voyage pour vous ? Quelles traces ces villes vous ont-elles légué? Je ne perçois jamais mes voyages comme un départ ou comme un exil. Ils sont mus par une permanente envie de découverte. Même si je finis par créer des bases sédentaires, l’envie de déambuler me reprend à chaque fois que je sors de chez moi. Chaque destination représente cet « Autre-Chose », toujours exotique, que j’ai envie d’explorer en guettant la surprise. Même si je m’approprie chacune de ces villes à ma façon, j’y reste étrangère. A Beyrouth aussi d’ailleurs. C’est ce sentiment d’appartenance ou de non appartenance qui, je crois, me plait le plus. Un état nomade/sédentaire. Enfin, quel morceau de musique vous accompagne dans votre studio de création ? Cela change en fonction des jours. J’écoute tant du Tchaïkovski que du Leonard Cohen et son langoureux « A thousand kisses deep »…

@miliamaroun


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ART

CES REGARDS, CES MAINS

PAR MARIE ABOU KHALED

Photos DR

Il y a quelque chose d’un prodige chez cette jeune artiste libre et sans concession. La série d’autoportraits puissamment expressionnistes réalisée par Serene Ghandour surprend par sa force et son audace. A seulement 22 ans, son sens de l’autodérision révèle en elle une âme mûre. Conversation dans son atelier.


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Comment avez-vous commencé à peindre ? J’ai commencé très jeune, j’ai toujours aimé créer. Mais je ne prenais pas de cours, parce que ma mère avait peur qu’on m’impose un style et que cela me formate à vie. Je me souviens qu’à l’école, je voyais certains camarades capables de dessiner de manière très réaliste. Moi, j’en étais incapable. C’est ma grand-mère, Grace Hitti, qui m’a beaucoup encouragée. Elle a enseigné le design à la LAU pendant 35 ans et connaissait donc beaucoup d’artistes qu’elle me présentait. J’ai commencé à peindre sérieusement vers 16 ans, et puis ma formation universitaire m’a beaucoup fait évoluer. Comment vous êtes-vous orientée vers les beaux-arts ? Était-ce un choix évident ? Je savais que je voulais aller vers un domaine artistique. Au début j’essayais de me convaincre de faire quelque chose qui me permettrait une plus grande

stabilité financière, comme le design graphique, mais après réflexion je ne voulais pas me limiter à concevoir des boîtes de médicaments ou des menus de restaurants. Je voulais juste peindre. Quel est votre sujet préféré et pourquoi? Moi-même ! Tout a commencé lors de mon 3e cours de peinture. J’avais toujours aimé peindre des portraits, mais je ne m’étais jamais peinte moi-même. J’avais beaucoup d’appréhensions, l’autoportrait ayant la réputation d’être un exercice extrêmement difficile, tant au niveau technique que de l’auto-confrontation. Il s’agit d’aller à la rencontre de soimême, se voir tel qu’on est et puis repousser les limites de l’autodérision, découvrir à quel point on peut rire de soi-même. Que ce soit en se déformant ou en se mettant dans des situations ridicules, avec l’autodérision vient l’honnêteté. Ça aide beaucoup dans le rapport à l’autre : ça aide à être 167

transparent et ouvert, même envers ceux qui regardent le tableau. Quand j’en finis un, je me dis « oh, maintenant je suis une œuvre d’art » et je m’apprécie autrement. Quand ce buzz en moi finit par mourir, il faut aussitôt que je fasse un nouvel autoportrait pour le raviver. C’est très addictif : on se met dans différentes situations, avec différentes couleurs. Peut-être que les gens finiront par se lasser. Quant à moi, je passerai à autre chose quand je sentirai que cette phase est terminée, mais pas avant. En tout cas, je crois que je revisiterai toujours l’autoportrait. Il est intéressant de savoir qu’au début de la Renaissance, les artistes, qui étaient payés moins que les charpentiers, revendiquaient leur singularité. Voulant être reconnus, ils ont donc commencé à se peindre eux-mêmes pour affirmer leur présence et se donner de la valeur. Je crois que c’est un peu ce que je fais aussi. Je me donne une représentation dans le monde des œuvres d’art.


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ART

Jugez-vous vos portraits fidèles ? Sont-ils ressemblants selon vous ? Ils ne sont pas fidèles à mon apparence réelle, ils sont exagérés, mais ils sont fidèles à ce que je ressens sur le moment. Ça aide à surmonter une situation, à prendre conscience de son état mental et physique. Je représente des mains surdimensionnées, d’abord parce que ça donne une impression de proximité dans la perspective, mais surtout parce qu’on fait tout avec ses mains. Quand on ne fait rien ou qu’on n’a envie de rien faire, les mains prennent une place trop importante, elles sont trop grandes, elles nous pèsent. Quand on est mal à l’aise, on ne sait pas quoi en faire, où les mettre. Quelles sont vos influences ? L’expressionnisme allemand a changé ma vie : Oskar Kokoschka, Otto Dix, Max Beckmann, trois monstres sacrés. C’est peut-être cliché, mais Picasso a aussi changé ma vie, surtout ses périodes bleue et rose, plus que sa période cubiste. Frida Kahlo aussi, je trouve qu’elle fait preuve de beaucoup d’autodérision. J’ai récemment découvert Gregory Gillespie que je trouve incroyable, et Jim Dine qui fait de beaux portraits. En fait, toutes les périodes m’inspirent, surtout le début de la Renaissance, même si ça ne se voit pas forcément dans mon travail. C’est si beau ! Écoutez-vous de la musique en peignant ? Si oui, laquelle ? J’écoute beaucoup de musique en peignant, un peu de tout, en ce moment beaucoup de musique classique. J’aime les bons auteurs compositeurs. J’adore David Bowie, Elliott Smith et Bach. Comment définissez-vous votre esthétique ? Il s’agit de peintures narcissiques ! Avec beaucoup d’exagérations, beaucoup de strates et de couleurs. Je préfère quand-même qu’une personne qui regarde mes tableaux s’en fasse sa propre définition. Certaines personnes me demandent pourquoi je suis triste dans tous mes portraits, mais ce n’est pas de la tristesse c’est de la neutralité, je n’ai pas envie d’y sourire. Ce sont des autoportraits très spontanés que je ne planifie pas du tout. Combien de temps passez-vous sur une toile ? Ça va de quelques heures à des mois. C’est du

«problem-solving » : il arrive un moment où on bute et on ne sait pas comment continuer, alors il faut mettre la toile de côté et faire autre chose pendant un moment. Un jour, sans crier gare, alors qu’on est en train de manger par exemple, la solution apparait et on peut continuer. Parfois, quoi qu’on fasse, on ne peut pas finir. Il y a donc plusieurs couches sur chaque peinture pour chaque fois que j’ai voulu couvrir ce qui ne me plaisait pas. Où vous voyez-vous dans 10 ans ? Soit à la rue, soit sur la bonne voie, la 2e option j’espère ! J’aimerais essayer d’avoir un job en parallèle, pour pouvoir continuer à acheter du matériel de dessin et survivre. J’espère aussi faire un master à un moment, ou avoir une résidence d’artiste à l’étranger. Je n’ai jamais voyagé en dehors du Liban à part une seule fois, 4 jours en Jordanie avec l’école. Je commence à m’ennuyer au Liban, je veux savoir ce que c’est, ailleurs ! Je continuerai à travailler dur pour y arriver. Où peut-on voir votre travail ? En ce moment j’ai une toile exposée au Salon d’automne du musée Sursock, jusqu’à la mi-janvier. C’est un de me autoportraits, avec les grandes mains. Récemment j’ai aussi été exposée à Beit Beirut, dans le cadre d’un accrochage sur le thème des femmes dans l’art, organisé en collaboration avec Women In Front. J’ai aussi une toile à CUB Gallery. Qui a été votre mentor ? Mes professeurs d’université à la LAU, en particulier quatre que j’adore : Hannibal Srouji, Lee Fredricks, Bassam Jeitani et Bettina Khoury. Il y a aussi, bien sûr, ma grand-mère Grace Hitti dont j’ai parlé plus haut. Mon atelier est chez elle, alors elle passe parfois me dire « ça c’est beau, ça c’est nul », elle est toujours très franche. Elle m’a beaucoup transmis sur la forme et la composition. Que pensez-vous de l’art contemporain ? Je pense qu’il y a en ce moment une belle réémergence de l’art figuratif, ce qui me plait. J’ai du mal avec l’art trop conceptuel, je n’aime pas qu’on néglige l’esthétique. Il faut, à mon avis, qu’il y ait des choix visuels conscients qui soient faits pour stimuler les yeux. @oh_ramonaa

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Photo Nomadic Traces, Marrakech, Ghita AbiHanna

À LA RECHERCHE D U K H AT T PERDU


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EXPOS

Pétrie du galbe des Aleph levantins, l’exposition « Nomadic Traces : The Journeys of Arabian Scripts »* est une incitation au voyage dans les murmures et les mystères des écritures de notre région. Rencontre avec la commissaire de l’exposition Huda Smitshuijzen AbiFarès de la Khatt Foundation.

D’où vient “Nomadic Traces: The Journeys of Arabian Scripts”? Berceau de civilisations, de religions, de langages et de nombreuses traditions, le Moyen Orient a longtemps été le point de convergence de routes qui jadis transcendaient frontières et identités nationales. Biens et savoirs se sont échangés au fil des siècles le long de multiples convois de caravanes. Les frontières étaient perméables; les peuples parlaient, écrivaient en diverses langues, s’empruntant mutuellement idées et savoir-faire en fonction de leurs besoins respectifs. L’histoire de l’écrit au Moyen-Orient témoigne, à elle seule, d’une diversité culturelle inouïe. L'exposition « Traces Nomades: Le voyage des écritures arabes » revient sur le rôle que ces dernières ont pu jouer dans la définition et la préservation de l'identité culturelle des civilisations passées et présentes; sur les migrations de l'écriture et la capacité de celle-ci à franchir librement les frontières et les cultures. L'exposition met en lumière le développement de certains des Abjads ou alphabets clés du Moyen-Orient. Phénicienne, araméenne, musnad, palmyriène, nabatéenne ou encore arabe primitive, les écritures servent de prétextes à des créations en provenance des Émirats Arabes Unis, d’Arabie Saoudite, de Jordanie, de Syrie et du Liban. Les œuvres repensent l’écrit et refondent la notion de «nomade171

contemporain» en faisant référence d’une part aux métiers traditionnels et en explorant d'autre part leur potentiel dans les champs du design contemporain. Une exposition-promesse de voyage. Quelles sont les destinations de “Nomadic Traces”? D’abord vers un passé où le voyage faisait fi des frontières et où les cultures s’échangeaient au travers de biens mais aussi de connaissances. Les alphabets se mouvaient et s’adaptaient en fonction des besoin pratiques de chaque culture. “Nomadic Traces” réfléchit aussi notre présent à la lumière des héritages d’un passé trop souvent incompris ou tout simplement oublié. Comment le passé peut-il nous aider à nous enraciner dans un monde plus inclusif et plus perméable aux diverses cultures du monde contemporain ? En prônant une identité ouverte au-delà de toute étroitesse d’esprit, nous célébrons la richesse du nomadisme en tentant de l’appliquer à nos vies sédentaires contemporaines. Certes nous voyageons aujourd’hui plus que jamais mais nous ne nous immergeons que trop rarement dans les cultures que nous côtoyons. Nous sommes aussi des nomades numériques au savoir – pensons-nous – total; mais en réalité nous n’avons que peu de connaissances approfondies; nous nous laissons rarement changer par de nouvelles connaissances. Pour moi, être un vrai nomade c’est être dans


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un mouvement constant, c’est se laisser transformer par les lieux et les peuples que l’on rencontre. L’histoire des écritures du Moyen-Orient témoigne de ce mouvement qui engendre de nouvelles formes de communication. Qui sont – et comment avez vous sélectionné – les artistes de “Nomadic Traces”? Le mot clé est “pluralité”! Diversité de mediums, de matières, de typographies, de disciplines… Nasser Al-Salem, Sarah Al-Agroobi, Nadine Kanso, Ghita Abi-Hanna, Milia Maroun, Khalid Mezaina, Rasha Dakkak, Hamza Omari, et Xeina AlMalki présentent tour à tour installations, bijoux, vêtements, mobiliers, céramiques, design textile… Ayant un rapport intime au langage, ces artistes ont, à un moment donné de leur carrière, placé l’écrit au cœur de leurs recherches. Redonner vie aux langues mortes, déterrer les typographies anciennes. Que nous ont légué les langues archaïques ?

Nous n’avons pas pour ambition de ressusciter les langues mortes mais simplement d’utiliser leur représentation visuelle pour faire revenir à nous l’esprit d’ouverture, de fluidité et de mélange que représentait jadis le monde arabe; et ce, notamment en terme d’échange Est-Ouest. Nos civilisations sont intrinsèquement liées les unes aux autres. Il nous faut cesser de considérer la Grèce antique comme seul berceau de la culture occidentale ; l’Islam et l’Arabie comme seuls berceaux de la culture arabe. Il s’agit, il me semble, d’un message important à ce moment précis de l’histoire où nous assistons à la résurgence des nationalismes, où les frontières se redessinent et les murs s’érigent de plus en plus haut pour imposer une forme de purisme nationaliste et identitaire. De l’ouverture avant toute chose! * Exposition présentée et produite par Warehouse421, Abou Dhabi, du 16 Mars au 16 Juillet 2019 172

Photo Nomadic Traces, Marrakech, Amine Bendriouich

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DESIGN

BLATT CHAYA, ARTISANAT D’HIER, DÉCOR D’AUJOURD’HUI

Photos Dr

PAR F.A.D

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DESIGN

Héritier d’une dynastie de fabricants de carreaux, Edgar Chaya décide, à l’âge de la retraite, de ressusciter la fabrique familiale. Le succès de son terrazzo artisanal et artistique baptisé Blatt Chaya n’est pourtant venu qu’au bout de six ans de tentatives et d’erreurs. Une histoire de persévérence.

Les Chaya, nommons ici Maxime, athlète accompli et vainqueur des plus hauts sommets du monde ; Karim, chef de file du design contemporain libanais ou Caline et sa fille Youmna qui portent l’art culinaire à son apogée, sont une famille atypique tant chaque membre s’y distingue par un esprit conquérant doublé d’une inconditionnelle quête de l’excellence. Cet ADN particulier se retrouve chez Edgar, le père de cette lignée choyée par les muses. Longtemps établi à Beyrouth en qualité de changeur, ce dernier décide, à l’âge de la retraite, de se reconvertir en artisan, et entreprend de réactiver un atelier de confection de carreaux terrazzo fondé par ses aïeux en 1881. « Blatt Chaya » a été tenu par trois générations avant de fermer ses portes en 1940, probablement en raison d’un ralentissement de l’économie entraîné par la deuxième Guerre mondiale. Une découverte au bon moment C’est à la faveur de la découverte, dans une redoute, d’un ancien jeu de pochoirs et de moules en bon état, que vient à Edgar Chaya l’idée de s’essayer à son tour à la confection de carreaux artisanaux. Mais comme recettes et tours de main n’ont pas été transmis avec les outils, il faut à l’entrepreneur non moins de six ans et toute la persévérance « Chaya » pour maîtriser le savoir-faire de son grand-père. Par chance, son projet est lancé à un moment où les Beyrouthins, pétris de nostalgie, voient leur ville s’effacer sous l’effet d’un boom de spéculation immobilière et des bulldozers des promoteurs. Les infinies combinaisons de couleurs et de motifs du carreau terrazzo traditionnel, fait de pâte de ciment pigmentée coulée dans des moules formant arabesques, sont autant de madeleines proustiennes pour toute une génération qui a connu les beaux jours et le modeste raffinement des sols des vieilles maisons en déshérence. Ce qui n’était au départ qu’un passe-temps pour le bricoleur invétéré qu’a toujours été Edgar Chaya, se transforme en une véritable entreprise qui voit rapidement pleuvoir les commandes, y compris de l’étranger. C’est ainsi que 130 ans plus tard Blatt Chaya revit, label enraciné dans un passé

heureux et ramifié dans un présent optimiste. Emporter son carrelage sous le bras Rejoint par sa petite-fille Youmna, Edgar Chaya est ouvert à toutes les innovations. La jeune femme lance l’idée d’une collection de carrelages « prêt-à-poser ». Le mode de fabrication de ces lais est exactement le même que celui des carreaux sur-mesure, artisanal et minutieux, à la différence que cette ligne est disponible en stock et à emporter, avec des motifs et des coloris présélectionnés. Mieux, dans le cadre de cette collection, Blatt Chaya a invité plusieurs designers libanais à créer leur motif signature. C’est ainsi que tout un ensemble de sols et mosaïques exclusifs, conçus par Carlo Massoud, David/Nicolas, Nada Debs, Maria Group, Stephanie Moussalem, Studio Safar et même le chef Nicolas Audi, peintre à ses heures, contribuent à la modernisation d’une tradition de plusieurs décennies. Les designers s’éclatent On adore les cactus de Carlo Massoud, où pointe au hasard du rythme et selon la gamme de couleurs choisie, une petite fleur rouge ou grise. On peut préférer l’effet texturé des diagonales tremblées dessinées par le binôme David/ Nicolas sur fond vert, crème ou sable. On peut choisir les carrés imparfaits du tandem Maria Group qui créent l’illusion optique d’un parterre disjoint. On sera touché par les fleurs mécaniques de Nicolas Audi que l’on croirait moulées sur des roues à crémaillères malgré leur aspect de fragiles asters colorés. On trouvera un je-ne-sais-quoi de japonisant dans le motif de Nada Debs qui semble inspiré de l’origami, et l’on sera infiniment séduit par sa palette de confiserie zen. Pour Studio Safar et Stéphanie Mousallem, Blatt Chaya s’offre des effets op’art et constructivistes qui nous ramènent à une époque pionnière où la fabrique n’osait pourtant pas encore s’éloigner des goûts de son public pour l’arabesque traditionnelle. Voilà qui est rattrapé et qui illustre admirablement la maxime de la maison : « Évoluer vers le passé ». blattchaya.com 176


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ART

PAR MYRIAM RAMADAN

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Photos MILAD AYOUB

LIANE MATHES RABBATH ROULE SON PAPIER À VISIONS


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ART

L’univers coloré et ludique de Liane Mathes Rabbath, férue de collage, est fait de bulles, de cylindres, et de motifs circulaires et géométriques, de toutes tailles et de toutes nuances, le tout à base de papier à cigarettes. Après des études en hôtellerie, en Suisse, dont elle acquiert rigueur et organisation, elle effectue un MA en Finances, monde de chiffres, d’ordre et de précision dans lequel elle navigue sans déplaisir. Originaire du Luxembourg, Liane rencontre son mari en Suisse. Ce dernier est Libanais. Le couple s’installe à Beyrouth en 1991. Entre 1996 et 1997, la future artiste qui s’ignore encore décide de fréquenter des ateliers, notamment ceux de Paul Guiragossian et de Tania Bakalian Safieddine (Tanbak). C’est auprès cette dernière qu’elle découvre sa passion pour le collage, technique qui lui « collera » à la peau. Croyant, au départ, qu’un talent était forcément inné, et que l’inspiration était un sentiment aussi puissant qu’envahissant, Liane Mathes Rabbath est séduite par l’idée, soufflée par un de ses mentors, selon laquelle : « l’art c’est 98% de travail et 2% de don ». Dans les années 2000, elle tombe sous le charme du papier de Damas, un papier cigarette fin et satiné, orné de calligraphies orientales, que fabrique son mari. Au début, elle commence par utiliser ce papier pour réaliser des tableaux à motifs géométriques de différentes formes : horizontales, verticales, obliques, le tout résultant en dessins qui parfois pourraient rappeler les mandalas, ces supports de méditation, compositions organisées qui gravitent autour d’un point central. Cette série de tableaux que signe Liane Mathes Rabbath ont un effet calmant de par leur ordre, leur précision et surtout ce rythme répétitif dont elle joue à loisir. Cette artiste, autodidacte avant d’obtenir un diplôme en Beaux-Arts de la LAU, n’a pas peur de se 179

renouveler et d'essayer diverses directions : C’est ainsi qu’elle crée une collection de sacs et d’éventails inspirés de ses tableaux.Dans une seconde phase Liane s’est tournée vers le papier à cigarette lui-même, le roulant, le tordant, le manipulant, transformant cette matière si sensible et si délicate en une autre qui, au contraire, inspire solidité et même rigidité. A ce stade, elle utilise les fins de rouleaux qu’elle découpe en bandes pour ensuite les peindre à l’huile ou à l’acrylique. C’est là que commence une déclinaison infinie et ludique d’images, ainsi qu’une explosion de couleurs vives et chatoyantes. La vision de ses tableaux, dégage légèreté et bonne humeur. « Le bleu particulier inspiré par le ciel du Liban donne envie de vivre », dit l’artiste. En effet, Liane Mathes Rabbath navigue entre les couleurs de son pays d’adoption et la palette de son pays natal, de même qu’elle puise son inspiration dans les mosaïques des églises et musées qu’elle visite. « Arty Bubbles », comme dans un rêve Sa dernière exposition individuelle a eu lieu en automne, à l’Espace Galerie Ghandour où se trouve aussi son atelier. Elle y donnait à voir sa technique du papier à cigarette en version « Arty Bubbles », titre qui évoque la fête, le rêve et le hasard. Ici explosent des bulles éclatantes de vie et d’énergie aux couleurs vibrantes et motifs cycliques d’aspect cosmique et astral. Pour la première fois, l’artiste introduisait dans son travail la feuille d’or, malgré le risque que présente ce matériau anecdotique, preuve qu’elle poursuit son exploration entre sentiers battus et chemins de traverse. La joie que dégage et transmet son œuvre est infiniment séduisante. lianemathesrabbath.com


TOUT SUR CHAHINE ! À l’occasion de la dixième commémoration de la disparition de Youssef Chahine (1926-2008), la Cinémathèque française célèbre la vie et l’œuvre d’un grand maître du 7ème art arabe, à travers une rétrospective de ses films et une exposition de ses archives. Entretien avec Amal Guermazi chercheure à la Cinémathèque française et co-commissaire de l’exposition.

Photos DR, "Le Destin"

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Photo "Adieu bonaparte" - photographie de tournage - Youssef Chahine Gamel Fahny

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Amal Guermazi, qui était Youssef Chahine ? Youssef Chahine est l’un des plus grands cinéastes du monde arabe. Il nait dans l’Alexandrie cosmopolite des années 1920, où il s’initie très vite au théâtre et à la mise en scène. Passionné de cinéma américain, il poursuit ses études d’art dramatique au Pasadena Playhouse en Californie avant de revenir en Égypte pour entamer une carrière fulgurante. Au fil de son parcours, il doit faire face à la censure et fait preuve de beaucoup de courage en abordant les sujets les plus tabous. Son œuvre engagée est autant connue pour son caractère dérangeant que pour sa portée humaniste. Chahine décède en 2008 au Caire, laissant derrière lui une œuvre riche avec pas moins de 41 longs métrages… Qu’est et qu’a été Youssef Chahine

CINÉMA

pour l’Egypte et pour le monde ? Youssef Chahine a été un véritable ambassadeur du cinéma égyptien. Un homme authentique, fier de ses racines et solidement attaché à son peuple. Pour le reste du monde, il est une invitation ouverte au dialogue entre les cultures, une note d’espoir, une main tendue vers l’Autre, quel qu’il soit et tel qu’il est ! Comment avez-vous composé l’évènement « Youssef Chahine » ? À l’occasion de la dixième commémoration de sa disparition, la Cinémathèque française a voulu célébrer la vie et l’œuvre de l’homme. Cet hommage prend la forme d’une rétrospective intégrale de ses films et d’une exposition élaborée principalement à partir des archives professionnelles du cinéaste. Cet événement se veut donc un voyage 181

au cœur des mondes de Chahine ; évoquant ses inspirations, ses passions et ses coups de cœur. Quel est l’héritage du cinéma chahinien ? Que nous a-t-il appris sur nos images, sur notre temps et sur nous-mêmes ? Que lui devons-nous ? Chahine a réalisé 41 longs métrages ! C’est une œuvre généreuse, foisonnante et humaniste, tout comme il l’était lui-même. Il partait fièrement du cœur de l’Égypte, du « peuple de ses artères » comme il disait souvent, pour le mettre en valeur et montrer la richesse de la culture et de la civilisation arabes. En même temps, il était le premier à pointer du doigt les maux de sa société sans avoir peur d’en payer les conséquences. Pour la jeunesse d’aujourd’hui, la vie de Chahine est une belle leçon d’engagement et de sincérité.


CINÉMA

L’âge d’or du cinéma égyptien est-il selon vous à jamais révolu ? Je ne l’espère surtout pas ! Je pense vraiment qu’une nouvelle génération de cinéphiles est en train de renaître un peu partout dans le monde arabe. Grâce aux réseaux sociaux, celle-ci est consciente d’elle-même et assez bien organisée. Que souhaitez-vous au cinéma égyptien et aux cinémas arabes ? Une longue vie déjà, malgré la censure, malgré la fragilité politique et économique de ces pays. Puis, je l’espère, beaucoup de profondeur, d’audace et de créativité ! Un film emblématique qui vous a profondément marquée et pourquoi ? « Al-Massîr » (Le Destin) est un film que j’affectionne particulièrement. À la fois d’actualité et prémonitoire, il est un appel pour un islam des Lumières, un islam d’Averroès pour le XXIème siècle, rejetant l’intolérance et le fanatisme. À travers ce film, une ligne artistique originale se dessine chez Chahine qui réconcilie ses deux vocations :

l’engagement et le divertissement. « Le Destin » lui vaudra d’ailleurs le Prix spécial du 50ème anniversaire du festival de Cannes. Une réplique Chahinienne qui vous émeut particulièrement ? Pour la musicienne que je suis, je choisirais peut-être la suivante : « Avec l’amour, la compréhension et la musique, on peut lutter contre tout. Ce n’est pas possible que des gens qui dansent et chantent ensemble puissent ensuite se détester ». Youssef vu par Youssef Grand admirateur de l’œuvre de Youssef Chahine, l’artiste égyptien Youssef Nabil rend un hommage ému à son mentor en revisitant la Nouvelle vague orientale des années 50. Sous son objectif, il fixe, à sa manière, les portraits de Faten Hamama, de Omar Sharif et Youssef Chahine ; triangle amoureux légendaire de l’histoire du 7eme art. A découvrir à la Cinémathèque Française jusqu’au 28 Juillet 2019. cinematheque.fr 182

Photos "Ciel d'enfer", Youssef Chahine, 1960, MISR International Films; "Le Sixieme jour", Youssef Chahine

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CINÉMA

Margot Robbie, Olivia Colman, Emma Stone, Rachel Weisz, Keira Knightley…, quand les grandes actrices rejouent les héroïnes du passé.

PAR JULIETTE MICHAUD

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Photo 20th Century Fox 2018

PORTRAITS DE FEMMES


CINEMA

Au royaume des rôles flamboyants et jubilatoires, en 2019, les actrices seront reines et démontrent – yes ! – que les grands rôles féminins sont en plein essor. Dans le très loufoque La Favorite de Yorgos Lanthimos, son film le plus grand public à ce jour qui sort le 6 février, Rachel Weisz et Emma Stone (en photo ci-dessus) jouent à la perfection deux cousines ennemies à la cour de la reine Anne d’Angleterre, incarnée par une Olivia Colman (Broadchurch, The Crown) totalement habitée dans le rôle de la souveraine qui aimait les femmes et pour lequel elle a eu le prix d’interprétation à la Mostra de Venise. Nous sommes au début du xviiie siècle mais l’action pourrait se dérouler aujourd’hui tant cette farce historico-irrévérencieuse très librement adaptée d’évènements et personnages réels, est moderne, scabreuse, et vraiment hilarante. Plus Renaissance, Margot Robbie et Saoirse Ronan (photo ci-contre), alias l’impitoyable Elizabeth I et la martyre Mary Stuart, vont elles faire couler beaucoup de sang, et peutêtre de l’or (les oscars ont lieu le 24 février), dans Mary Stuart, Reine d’Écosse, premier film d’une vétéran du théâtre anglais, Josie Rourke, dont la sortie est attendue chez nous le 27 février. Margot Robbie, dans les pas de Bette Davis et Cate Blanchett qui ont incarné avant elle Elizabeth I, absolument méconnaissable dans le rôle de la mythique reine, on a hâte ! Mais faut-il, pour prétendre au pouvoir, que les femmes se battent comme des hommes ? Dans Colette de Wash Westmoreland (Still Alice), qui est sorti le 16 janvier, Keira Knightley (photo ci-dessus) réclame son indépendance dans le rôle de la jeune Gabrielle Colette. Un biopic trop sage mais qui rappelle, après la création du mouvement #MeeToo, que les égéries du passé n’ont jamais été aussi actuelles et nous font aimer l’époque.

Photos Universal Studios 2018, Robert Viglasky/Bleecker Street

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PRESQUE CÉLÈBRE

Freya Mavor Découverte dans la série anglaise “Skins”, l’actrice écossaise séduit de plus en plus. Et, de John Malkovich à Johan Sfar, poursuit une carrière qui s’annonce très prometteuse.

Freya est une déesse nordique représentant l’amour, la fertilité, mais aussi la guerre. Une ambivalence qui sied à Miss Mavor avec son aura lumineuse (teint de porcelaine, boucles rousses) alliée à une étonnante profondeur. Dans le désordre, elle aime le rap, Billy Wilder, la musique classique, Jonathan Glazer, Frances McDormand, Joaquin Phoenix… Un riche éclectisme révélant une belle éducation artistique, prodiguée par un père scénariste et une mère chanteuse d’opéra. Née il y a vingt-cinq ans à Glasgow, Freya a appris le français lorsque ses parents sont partis vivre à La Rochelle pendant quelques années. À 13 ans, elle revient en Écosse où elle a le coup de foudre pour la série télévisée Skins : “Ça semblait jamais vu, des ados ainsi mis en scène de manière aussi crue.” Quand elle entend parler d’un casting, elle tente sa chance et obtient le rôle de Mini. Le charisme de Freya fait mouche et la marque Pringle of Scotland lui propose de poser pour une de ses campagnes : “Ça a été une vraie découverte de la mode. J’adore étudier le style vestimentaire de mes personnages, qui influence les mouvements comme l’attitude.”

Peu après ses 20 ans, elle s’installe à Paris où elle tourne son premier film français et son premier grand rôle, celui de Dany dans La Dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil de Joann Sfar : “Son approche cartoonesque m’a épatée : il est si créatif et inventif !” Il y a deux ans, elle part vivre dans l’Est londonien. Depuis, elle traverse souvent la Manche ! Elle joue dans la pièce Good Canary de John Malkovich, des productions anglaises telles qu’À l’heure des souvenirs ou chez Jean-François Richet avec L’Empereur de Paris. Au côté de Vincent Cassel, “un acteur très généreux”, elle y incarne une bonapartiste convaincue. En 2019, on la verra dans la minisérie réalisée par Guillaume Nicloux pour Arte, Il était une seconde fois, dans Trautmann, biopic sur un soldat allemand devenu goal du club de foot de Manchester. Comme si elle n’était pas assez occupée, Freya écrit aussi de la poésie et réalise des vidéos pour chaque poème : “Ça m’intéresse d’être celle qui regarde.” Son prochain objectif ? “J’aimerais mettre en scène une pièce ou remonter sur les planches.” Rendez-vous pris ! @frejska 186

Photo Felipe Barbosa

PAR SOPHIE ROSEMONT


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BLU, ENTRE DEUX PÔLES Photo DR

PAR MARIE ABOU KHALED


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MUSIQUE

Blu Fiefer, la chanteuse, productrice, pole-danseuse, entrepreneure et bad girl libano-mexicaine a lancé son EP « The Prelude » le 26 Janvier 2019. Le single Girl’s Gotta Eat était numéro 1 sur iTunes lors de sa sortie. Elle nous parle de ses débuts, de son nouvel album et de ses multiples cultures.

Comment définiriez-vous votre style musical ? Je dirais hip-hop alternatif, entre le hip-hop et la pop. J’adore raconter des histoires. Les contrastes me plaisent, j’aime mettre des mots d’argot dans un poème par exemple, ou superposer un violoncelle sur un cœur qui bat. Vous chantez en anglais, espagnol et arabe sur votre EP ? Non, juste sur Girl’s Gotta Eat. J’avais en tête la musique mariachi qui est toujours un peu grossière, même quand le sujet est triste. J’aime ce côté qui n’a pas besoin de se justifier. Puis, quand j’expliquais que les paroles « mandale saludos a tu madre » signifient « sallemleh 3a ommak » ça faisait rire les gens. C’est comme ça que ça a commencé. Le reste de l’EP est en Anglais. Pensez-vous que votre son est mexicain/libanais ? Non pas vraiment. Je viens du petit village de Seb3el, mais j’ai beaucoup voyagé dans mon enfance, alors j’ai du mal à rattacher mes influences à un certain lieu. Je réalise que finalement ça fait écho a plein de gens de ma génération qui ont dû fuir la guerre et ne savent plus se situer. Mais ma musique est assez universelle et ne me rend pas moins libanaise ni mexicaine pour autant.

Je ne sens jamais que je dois me justifier. Je ne filtre rien, ni la vie pour moi-même ni moi-même pour les autres. On penserait que quelqu’un comme moi qui fait du pole dance et dit les choses que je dis attire beaucoup de haine, mais en fait les gens me sont reconnaissants simplement d’être moimême. Je ne reçois que de l’amour. Dans une société qui nous dit constamment « ne parle pas comme ça » et « ne marche pas comme ça » je représente une liberté d’expression à laquelle beaucoup de mes fans aspirent. Je le dois à une famille extrêmement ouverte. Quel est le message derrière GGE ? Cette chanson est très appréciée de mon public féminin, et appartient finalement à ces femmes à qui elle donne force et courage. J’ai donc voulu leur rendre hommage dans la vidéo, à travers un petit casting call conviant les femmes de toutes formes et tailles, drag-queens inclues, à une fête. C’était bon de les représenter. « A Girl’s Gotta Eat » est un adage qui s’applique à une femme d’affaire comme à une effeuilleuse : je dois faire ce qu’il faut pour gagner ma vie. Pour moi c’est aussi faire ce qu’il faut pour être heureux, se réaliser et avancer. Première chanson que vous avez chantée en public ? Etta James : « All I could do was cry ». J’adorais improviser sur du blues. J’ai quitté l’école à 14 ans pour étudier la musique à Londres. Bien plus jeune que mes camarades, je mentais sur

Comment votre musique a-t-elle été accueillie au Liban ? Sentez-vous parfois devoir expliquer à votre public ? 189


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mon âge pour ne pas attirer l’attention. J’avais tellement peur de monter sur scène que je faisais une sorte de blackout: je ne me souvenais jamais de rien en redescendant. C’est comme ça que, insomniaque, j’ai commencé à écrire. Expérience de scène préférée ? Birthday Bash, à AR_KA : mon anniversaire l’an dernier. C’était la toute première fois que j’intégrais une performance de pole dance à mon show. J’étais persuadée que j’allais tomber devant 300 personnes. Mais une fois le show commencé, l’adrénaline était tellement forte que je me sentais légère, mes mouvements étaient si fluides que je ne ressentais aucune fatigue. Tout le monde chantait avec moi. Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite se lancer dans le pole dance ? Vraiment essayer. On pense qu’il faut être très fort et flexible pour pouvoir commencer, mais en réalité, on acquiert tout ça en s’entrainant justement pour le pole dancing. Il faut juste s’attendre à deux premières séances très pénibles tant physiquement que pour l’estime de soi. Dès la 6e fois, la magie opère et on commence à faire des choses qu’on n’aurait jamais cru possibles, c’est incomparable. Ça a changé ma vie. Une collaboration préférée ? Avec Jana Saleh, ma coproductrice, ma partenaire. Quand je lui ai montré mes démos, elle a tout de suite voulu m’aider. Elle m’a appris énormément sur mes 190

Photos Mohamad Abdouni

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héritages libanais et mexicains de par sa culture immense. Les gens n’ont pas idée de son expérience : elle a travaillé à VP records, managé des artistes en Jamaïque, étudié a Berklee… C’est aussi une vraie geek : un jour elle a transformé un de mes vieux téléphones en micro en moins de 20 minutes. Jana me pousse à avoir une raison solide derrière tous mes choix artistiques, à ne garder que ce qu’il y a de plus authentique. Une collaboration de rêve ? Par expérience, quand on collabore avec un grand nom, ça ne se passe jamais aussi bien qu’on le voudrait. Il faut que ce soit naturel, jamais forcé, et un illustre inconnu est souvent un bien meilleur partenaire. Mais sinon, prenez quelqu’un comme Drake ; il pourrait dire n’importe quoi qu’on l’écouterait. Il a un vrai pouvoir sur le monde. Parlez-moi de votre expérience de productrice au Liban. En général je pars d’une mélodie enregistrée sur mon portable, et pose dessus des pistes instrumentales. Je la montre ensuite à Jana et nous nous mettons au travail. Quand j’explique que je coproduis ma musique, on rétorque souvent « mais qui est-ce qui produit réellement ta musique ? ». Parfois je donne des directives a l’ingénieur-son, pour le voir scruter le vide autour de moi à la recherche d'un homme à l’origine de ces requêtes. 191

Il tombe alors sur Jana! Elle les rassure plus que moi, je crois qu’ils trouvent qu’elle a la tête de l’emploi, n’étant pas à moitié nue. C’est extrêmement frustrant. Pensez-vous que c’est un bon moment pour être musicien ? Ça ne l’est jamais ! Aujourd’hui il faut savoir prendre en charge plusieurs aspects de sa carrière. Quand, il y a quelques années, l’internet a plongé les maisons de disques dans la faillite, les musiciens qui ont surfé la vague Youtube ont fait des carrières magnifiques. C’était donc le bon moment. D’un autre côté, les musiciens de labels, ayant très peu de contrôle sur leur carrière, ont été entrainés dans ce déclin. En gardant l’œil ouvert sur l’évolution de l’industrie, on s’en sort. A quoi pouvons-nous nous attendre sur l’EP ? Des hits ! Pas des hits conventionnels, mais mes hits à moi, les hits de ma vie. Des chansons que j’ai écrites il y a 4 ans sans jamais pouvoir les laisser partir. Et aussi des photos magnifiques, par Mohamad Abdouni. Il photographie exclusivement en analogue, une vraie épreuve pour la control freak que je suis ! Finalement, j’en ai pleuré tellement c’était beau. Le concert de lancement de l’EP a eu lieu le 26 janvier au

Ballroom Blitz, après la sortie en ligne le 11. Vous pouvez déjà le précommander sur iTunes à partir du lien ci-dessous. @blufiefer



POMME ROUGE, LA RÉVÉLATION ÉLECTRO DE LA SCÈNE BEYROUTHINE Vous les avez sûrement déjà écoutés ou en avez tout du moins déjà entendu parler alors que vous sirotiez un verre en terrasse au Pré-Beyrouth, au centreville, ou en battant le rythme de leur dj set au Grand Factory. Pomme Rouge, c’est le nouveau duo émergent de la scène électro libanaise, formé par Joy Moughanni et Alex Chahine.

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PAR JOSÉPHINE VOYEUX

Passionnés de musique depuis leur plus tendre enfance, Joy Moughanni et Alex Chahine qui officient sous le pseudo Pomme Rouge ont, à respectivement 23 et 21 ans, déjà roulé leur bosse sur la scène beyrouthine underground. Avant de remporter l’an dernier la compétition Beirut Berlin Express organisée par The Grand Factory, et de partir dans la foulée enregistrer le premier EP de Pomme Rouge avec le grand producteur d’électro allemand Tobi Neumann, les deux amis et partenaires s’étaient fait connaître en participant en 2016 à Beirut Open Stage, une plateforme dédiée à la scène indépendante libanaise. Leur groupe, Gizzmo, dont ils partageaient l’affiche avec Camillo el-Khoury, avait à l’époque déjà attiré la curiosité du public et leur avait donné l’opportunité… d’enregistrer un album.


En fusion avec le public Pomme Rouge est en quelque sorte le petit-frère de Gizzmo : Le duo existait déjà quand Gizzmo participait à Beirut Open Stage, mais dans son ombre. « On a lancé Pomme Rouge pour gagner un peu d’argent pour Gizzmo, au début », se souvient Joy Moughanni. C’était il y a cinq ans. L’idée de base était, pour le duo, de jouer des DJ sets dans des pubs de la capitale et de ses environs pour financer le matériel dont ils avaient besoin pour leur groupe rock électropsychédélique. Mais rapidement, les deux copains qui se sont rencontrés sur les bancs de l’Alba se sont laissé prendre au jeu. « A force de jouer, nous avons trouvé notre propre son, précise Joy Moughanni, et nous nous sommes dit que Pomme Rouge devait avoir sa propre identité ». A raison. La magie a rapidement opéré. Au fil des mois,

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Joy et Alex ont gagné en maturité et perfectionné leur set jusqu’à envoûter leur public. Le déclic, le duo Pomme Rouge estime l’avoir eu en 2017, lors d’un live à l’espace AR_KA avec le DJ Jugurtha. « C’était fou, s’exclame Alex Chahine, on était nous-mêmes surpris de cette performance, on n'en attendait pas tant, on était vraiment en fusion avec le public, tout le monde tripait avec notre musique ». Un seul regard suffit La machine par la suite s’est rapidement emballée. Pomme Rouge participe au concours organisé par The Grand Factory en collaboration avec Jaegermeister, le Goethe Institut et Teenage Engineering entre autres. Acclamé par le public et les professionnels, le duo remporte un mois de résidence à Berlin, au cœur 194

des Riverside Studios, poumon de la scène électro et techno internationale. C’est à partir de ce moment-là qu’Alex Chahine et Joy Moughanni mettent véritablement le pied à l’étrier. Les deux jeunes musiciens se souviennent de cette période comme d’un passage initiatique. Leur porte d’entrée dans la cour des grands. « C’était une expérience de malade mental, lance le plus jeune de la bande, la plus belle de notre vie, renchérit son aîné. On a beaucoup appris là-bas, sur les méthodes de production et les bases du design sonore ». En rentrant au Liban, le duo enchaîne les représentations : à AR_KA, au Yukunkun, au Pre-Beyrouth et à Reunion où ils ont lancé leur EP… Sur scène, leur complicité est palpable. Un seul regard suffit pour qu’ils se comprennent et enchaînent avec brio leur partition grâce à une l’utilisation

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maîtrisée de leurs équipements analogiques et numériques. Fruit défendu Il faut dire que Pomme Rouge, c’est avant tout l’histoire de deux copains qui s’entendent à merveille. Si le seul nom de leur groupe attise la curiosité, en faisant écho au mythe du fruit défendu, rouge et appétissant, symbole de tentation irrésistible et d’interdit transgressé, les deux amis l’assurent : l’idée est partie d’un délire entre copains. « C’est bête mais c’est une histoire super cool, raconte Alex. Mon père a l’habitude de peindre et il y avait toujours, dans toutes ces peintures, une pomme rouge. Un jour, on était dans le studio où il peignait et on devait trouver un nom pour notre première représentation, il y avait un tableau devant nous, avec une pomme rouge, et c’est devenu notre premier flyer ! ». C’est donc sûrement ça la clé du succès des deux jeunes hommes, l’amitié. Pas étonnant à partir de là que derrière les platines, la magie opère. @rommepouge

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C RYS NAM M O U R, L’ Â M E D ’ U N E GUERRIÈRE « Libanaise de cœur, Ivoirienne d’énergie et Française d’esprit ». C’est ainsi qu’aime se définir Crys Nammour, chanteuse et musicienne qui a grandi entre Paris, Abidjan et Beyrouth. Son style musical, de la pop urbaine nourrie de sonorités afro-orientales est directement inspiré de ses origines. Rencontre. PA R P H I LI P P I N E D E C LE R M O NT- TO N N E R R E

Parlez-nous de ce premier single solo : « On reprend là ». J’ai choisi de démarrer mon deuxième album par cette chanson parce qu’elle a une importance particulière dans ma vie. Je l’ai écrite à un moment où j’étais à bout de souffle dans mon parcours musical parce que cela fait pas mal d’années que je me bats pour sortir de l’ombre. C’est un texte assez fort, un message d’espoir avec des mots combattifs et très optimistes qui font écho à ma personnalité. La chanson parle du courage dont il faut s’armer pour toujours continuer à aller de l’avant. Je suis comme ça : quand je touche le fond, je fais l’impossible

pour réussir à me relever. J’ai écrit cette chanson pour me présenter et j’espère qu’elle touchera beaucoup de personnes. De la combativité, il en faut dans ce métier ? Oui, la musique s’est un peu comme un sport de haut niveau où il faut s’entraîner tous les jours ! C’est un monde où la compétition est très rude. Si tu veux une place, il faut que tu la défendes avec ton cœur et tes tripes. Comment travailles-tu ? Je compose, écris et fais mes maquettes moi-même sur mon ordinateur. Soit, je commence par le texte et essaie ensuite de trouver sur mon piano les accords qui vont avec, soit c’est l’inverse. Je suis une véritable éponge. Je capte tout ce qui se passe autour de moi. Généralement, quand tout va bien, je n’écris pas. Je profite de la vie, j’emmagasine différentes expériences. Puis arrive le moment où ça ne va pas et où je déverse tout sur le papier. L’écriture et la composition sont mes armes pour pouvoir me vider et rebondir. J’écris des choses qui me 196

boostent, c’est un peu une thérapie. Pouvez-vous nous donner un avantgoût de votre deuxième album en préparation ? C’est un album assez dansant et festif, rempli de good vibes, une sorte d’hymne à la vie sans filtre et sans frontières. Je voulais inviter les gens dans un voyage musical positif où je mélange les langues, les rythmes et les couleurs. Vos morceaux sont imprégnés de plusieurs influences : africaine, orientale, pop. Comment définissezvous votre style musical ? Mon univers est un vrai cocktail d’influences : de la pop urbaine avec des sonorités afro-orientales. Je suis cliente des sons du moment, j’adore aller en boite de nuit, faire la fête et danser. J’ai aussi grandi sur différents continents et je m’inspire de ces cultures pour ma musique. J’adore la vibration de l’Afrique ; sa couleur, ses rythmes, les voix et toutes les sonorités africaines me touchent beaucoup et m’inspirent énormément. Et il y a aussi l’Orient. Dès que je chante on me dit : tiens ça c’est

Photo DR

Son motto : optimisme et combativité! Après un premier album « Jamais perdus » avec Hushh, le duo formé avec le guitariste Raphaël Arbib, et une interprétation de Marie Madeleine dans la comédie musicale Jésus, Crys Nammour vient de sortir en janvier un single en solo. Baptisé « On reprend là », ce titre positif et entraînant se veut un avant-goût de son prochain opus signé avec le label indépendant My Saphir.


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oriental ! Même si je ne fais pas exprès, ça fait partie de qui je suis. J’aime bien me définir comme Libanaise de cœur, Ivoirienne d’énergie et Française d’esprit. Que vous a apporté votre expérience aux côtés de Christophe Barratier et Pascal Obispo dans la comédie musicale « Jésus » ? C’est une expérience très forte émotionnellement. Déjà parceque l’histoire de Jésus me touche profondément en tant que croyante. Revivre la passion du christ sur scène six fois par semaine a été quelque chose de très fort, surtout que les décors et les costumes étaient extrêmement réalistes. Jouer six fois par semaine au Palais des Sports et faire ensuite la tournée des Zéniths de France était exceptionnel. J’ai beaucoup appris en termes d’expression scénique, de confiance en moi et d’endurance. Il fallait donner le meilleur de nous-même tous les soirs. Humainement, ça a été très fort aussi. On avait des coachs incroyables, Pascal Obispo pour les chansons et Christophe Barratier pour la mise en scène. J’ai aussi tissé de profonds liens d’amitié

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avec les membres de la troupe, en particulier avec Massy qui est Libanais; j’avais l’impression d’avoir un cousin avec moi ! Et avec Anne Sila dont je partageais la loge. On était vraiment comme des sœurs. Et dès le lendemain vous avez signé avec le label My Saphir pour un deuxième album, en solo cette fois-ci. Oui, c’est un label indépendant qui a eu un coup de cœur pour mon univers. Le producteur nous suivait depuis l’époque de Hushh, venait à nos concerts de manière assez discrète. Le jour où la comédie musicale s’est terminée, il m’a contactée et m’a demandé si j’étais d’accord pour qu’il signe mon prochain album. J’ai tout de suite accepté. Le label croit en mois et me soutient. Je sais que cette équipe ne va pas me lâcher, c’est vraiment très agréable de travailler avec eux. A quel moment avez-vous décidé de vous lancer dans la chanson ? Je chante depuis que je suis petite. J’étais une enfant hyperactive, incapable de faire de beaux dessins et coloriages comme ma grande sœur. Mes parents 197

m’ont mise au chant pour canaliser mon énergie, j’ai adoré ça, et c’est comme ça que j’ai commencé. J’ai débuté les cours de chant et de chorale à l’âge de 12 ans, à l’école de musique Ghassan Yamine au Liban, jusqu’à mes 18 ans. Puis je suis partie faire mes études à Dauphine à Paris. J’ai commencé en mathématiques et informatique, puis j’ai viré en économie et finalement en gestion des médias. J’ai essayé de rendre mes études un peu plus fun (rires). Vous travaillez dans le secteur des médias parallèlement à la musique. C’est difficile de mener de front ces deux activités ? J’ai toujours voulu faire les deux car c’est ainsi que j’ai été éduquée par mes parents. Je tenais à terminer mes études, à trouver un CDI, à être dans la vie normale et à m’assurer un bagage professionnel tout en faisant de la musique. Pour l’instant, c’est tout à fait gérable de cumuler les deux jusqu’à ce que, Inch’Allah, la musique prenne toute la place. J’ai pris une année sabbatique prolongée pour la comédie musicale mais je retourne au boulot le 1e mars ! crysnammour.com


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PRESQUE CÉLÈBRE

Maggie Rogers Après avoir été découverte par Pharrell Williams, la jeune Américaine s’impose pour de bon avec “Heard It in a Past Life”, album d’une maturité qui n’est pas de son âge.

PAR SOPHIE ROSEMONT

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n ce moment, Maggie Rogers, 24 ans, n’a plus d’appartement. Sans cesse sur la route pour ses concerts, elle a jugé plus sage de renoncer à son loyer new-yorkais. Ce sont ses parents, qui habitent le Maryland, où elle a grandi, qui gardent ses affaires. Sa vie d’avant ne lui manque pas. Même si, dans Back in My Body, une des chansons de son album Heard It in a Past Life, elle évoque une crise de panique survenue en pleine promotion : “Je me sentais loin de chez moi, je n’étais jamais seule, je me sentais testée par des gens qui pensaient que je n’étais qu’une nouvelle poupée pop créée par une maison de disques, et que si Pharrell ne m’avait pas révélée, je ne serais rien.” Certes, sans Pharrell Williams, Maggie n’aurait pas bénéficié du plus gros buzz musical de 2016. Alors qu’il était en visite à la New York University, il avait demandé aux élèves de lui présenter une chanson. Parmi eux, Maggie, qui lui fait écouter Alaska. Ébahi par la maturité des paroles comme par l’efficacité des mélodies, Pharrell Williams s’extasie devant les caméras de

l’école. Forcément, la vidéo fait le tour du monde et les labels se battent pour la signer. Un conte de fées pour celle qui maîtrise harpe, banjo et piano, et qui compose depuis les années collège. “C’est lorsque je suis partie par Erasmus en France que j’ai vraiment découvert le pouvoir de l’électro, dans des soirées où plein de gens cool étaient ultra-connectés sur le dancefloor.” Ne vous fiez pas à ses yeux clairs, à sa bouille encore enfantine et au blond vénitien de sa chevelure, qui rappelle celle de la Vénus de Botticelli. Allergique à Donald Trump, Maggie Rogers est une fille engagée qui souhaite, avec ses concerts dans des villes parfois très conservatrices, “montrer aux gens qu’ils peuvent être liés par la musique, former une communauté qu’ils n’auraient pas imaginée avant, leur offrir une pause en cette époque tendue du point de vue social et politique.” Peu adepte du maquillage, elle possède une cool attitude qui se passe de toute recherche de sex-appeal. Ce qu’elle aime, ce sont les jeans à la coupe large 198

et les T-shirts unisexe, et elle ne compte pas se faire rhabiller par une armada de stylistes : “La concurrence est dingue dans ce métier et je ne veux surtout pas me trahir, seule l’authenticité paie. Mais je sais aussi m’amuser avec mes tenues sur scène !” Forte de 20 millions d’écoutes de son titre Alaska, Maggie a préféré se concentrer sur la musique. Ayant sorti quelques disques folk au début des années 2010, elle avait déjà une petite expérience avant d’enregistrer Heard It in a Past Life avec notamment l’un des producteurs les plus demandés du moment, Rostam Batmanglij, de Vampire Weekend. En douze titres, la jeune Américaine réinvente la pop contemporaine : le groove est assuré par des beats millimétrés, les claviers tracent un fil rouge romantique : “Je veux marier l’acoustique et le synthétique pour concilier tout ce qui peut nous faire vibrer aujourd’hui. Je ne veux pas me restreindre à une seule vision de la musique.” La voix de Maggie, elle, tutoie les étoiles sans forcer. @maggierogers

Photo Olivia Bee

Maggie Rogers.


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BOÎTE DE NUIT

LE B018 FAIT PEAU NEUVE Rénovée de fond en comble, la mythique boîte de la Quarantaine se mue en bar dansant.

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u terme de 82 jours de chantier, le B018 a dévoilé le 13 décembre sa nouvelle mouture. Si « l’esprit reste le même », assure son CEO Michel Ghanem, le concept évolue en bar dansant. « Ce n’est plus la boite de nuit pure et dure mais un espace où l’on peut dîner avant de danser », expliquet-il. Dans cette nouvelle aventure, l’entrepreneur a souhaité faire entrer du sang neuf en s’associant à Nemer

Saliba, Romy Habre, et Ali Saleh. « Gérer un club aujourd’hui est un vrai challenge, compte tenu des conditions économiques difficiles et de la compétition féroce. On a décidé de reprendre l’espace en préservant le legs des fondateurs Naji Gebran et Bernard Khoury », confie Nemer Saliba qui compte à son actif plusieurs lieux dont The Garten et Discotek. « Cette nouvelle formule nous permet aussi de toucher les jeunes et les moins jeunes, car la clientèle qui faisait la fête en 1998 200

ne sort plus tous les week-ends jusqu’à 6h du matin », relève-t-il. Changement notable, il est désormais possible de dîner sur place. On trouve à la carte une série de mets à déguster sans couverts règlementaires ; filet Black Angus, tempura de crevettes ou encore salade de sashimi. « C’est une cuisine asiatique moderne, légère, facile à attraper. Cela permet aux gens de venir plus tôt et de dîner sur place tout en faisant la fête », détaille le restaurateur Mario Haddad qui a réalisé le menu.

Photos DR, Ieva Saudargaite Douaihi

PA R P H I LI P P I N E D E C LE R M O NT- TO N N E R R E


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Performances live Le B018 reste fidèle à la programmation musicale pointue qui a forgé sa réputation. Plusieurs DJ internationaux sont attendus aux platines dans les prochains mois ; Inland, William Djoko, Behrouz, Guti, Cuartero ou encore Magda & Jimpster. « Le B018 est devenu toutes ces années un peu comme une école. Énormément d’artistes sont passés par là. C’est véritablement un lieu qui produit de la culture », souligne Bernard Khoury. Le club propose des sets électro le vendredi et new disco le samedi, et des performances live le mercredi - clin d’œil au bar de jazz qu’il était à ses débuts à Sin el Fil. Les mémorables « MIX FM Eighties nights » animées par DJ Rodge, les jeudis, sont également conservées.

BOÎTE DE NUIT

« C’est la seule soirée à thème qui reste car elle était très importante pour les fidèles du club », affirme Nemer Saliba. Fondé par Naji Gebran et l’architecte Bernard Khoury en 1998, B018 a fêté l’année dernière ses vingt ans d’existence. Construit aux portes de Beyrouth dans un sous-sol du quartier déshérité de la Quarantaine, en lieu et placte d’un ancien camp de réfugiés, le club légendaire, enterré et meublé de « cercueils » s’est imposé comme un des symboles architecturaux les plus parlants de l’après-guerre. « B018 n’est pas une boite comme les autres, c’est un lieu qui a une importance quasipolitique », souligne Bernard Khoury. Sur le marché ultra compétitif de la nightlife, rares sont les boites de nuit affichant une telle longévité. « Au 201

départ c’était un projet temporaire voué à disparaître après cinq ans, période du contrat de location de la parcelle », se souvient l’architecte. Si le célèbre toit ouvrant est conservé, l’intérieur a été entièrement rénové. Exit les rideaux rouges, les meubles en acajou et les murs aux teintes cuivrées. Place au basalte noir : cette roche volcanique présente dans certains massifs montagneux du Liban. « Il n’y a plus de matériaux précieux, tout est en pierre ; le sol, le plafond, le mobilier et même les bouches d’air conditionné», explique Bernard Khoury. « Je l’ai carrément pétrifié ! C’est un bâtiment qui sera peut-être encore là dans 1000 ans ». Quarantaine, Beyrouth, +961 3 810 618, @b018official


L’ART D’E N FOU R N E R S E LON ALB E RT MASSAAD Photo DR

PAR MYRIAM RAMADAN


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CUISINE

Albert Massaad, âgé de juste 21 ans, avait en tête de devenir acteur mais il a pris un autre tournant. «Il n’y a qu’une seule cuisine, la bonne», dit Paul Bocuse. Une formule dont le jeune chef a fait son moteur.

Est-il tombé dans la marmite quand il était enfant ? Peut-on dire qu’Albert Massaad était prédisposé à une vocation dans la gastronomie ? Probablement oui, lorsqu’on est le fils de Barbara Abdeni-Massaad. Cette dernière est auteure/ photographe de livres de cuisine, ainsi que consultante culinaire. Ses ouvrages qui ne sont plus à présenter tant leur succès a été retentissant, Man’oushe, Soup for Syria, et Mouneh, pour ne citer que quelques un, ont remis en avant la cuisine libanaise du terroir. Oui, aussi, lorsqu’en classe de 3e (à Jamhour), on réalise comme projet de classe une vidéo sur la cuisine qui décroche la plus haute note et qui sera donnée en exemple aux promotions suivantes. Et finalement, oui, lorsque l’on s’amuse à vendre des pizzas dans la cour de l’école tout en ignorant que quelques années plus tard on deviendra chef au Zimi. Ce restaurant qui a récemment ouvert à Gemmayzé, dont le nom signifie « pâte », en grec, est spécialisé justement dans une cuisine ou tout est préparé dans un four à pizza. A Zimi, en association avec sa mère, Albert Massaad est chef et s’occupe aussi de la création, conscient que c’est sa maman -qu’il accompagnait régulièrement aux enregistrements de ses shows de TV sur la cuisine- qui lui a communiqué sa passion pour la bonne nourriture.

proposition de travail dans un restaurant à San Francisco, qu’il refuse néanmoins pour retourner au Liban, préférant rentrer chez lui et participer au changement qu’il estime que sa génération se doit d’offrir à son pays, si possible. Ouvrir un restaurant avec sa mère a toujours été un projet dont il avait rêvé, et Zimi en est la concrétisation. A travers ce restaurant, qui offre un menu couvrant des spécialités de douze pays méditerranéens, mère et fils ont voulu montrer que l’on peut diversifier les manières de préparer « notre cuisine », la leur étant de tout cuisiner dans un four.

Le jeune chef qui reconnaît apprendre rapidement a obtenu un BA en Art Culinaire à l’iconique Institut Paul Bocuse à Lyon entre 2015 et 2018. Entretemps, il a enchaîné les stages de boulangerie entre le restaurant Piazza Duomo Alba (Italie),et la boulangerie Mof Pozzoli (Lyon), où il s’est plongé dans la philosophie de la vraie boulangerie française. C’est là aussi que sa vision pour la nourriture a commencé à prendre forme. S’en est suivi un passage au célèbre restaurant Lasserre à Paris, où il a pris conscience des limites de son endurance au stress et réalisé que travailler dans la restauration demande une extrême rigueur (réveil tôt et longues heures de travail).

Préserver la Terre Très conscient de la nécessité de préserver notre planète ainsi que de la manière dont on traite les ingrédients, Massaad préfère utiliser des produits de saison, et a une vision réaliste, légèrement pessimiste du « futur de la cuisine et de la cuisine du futur ». Il aimerait éduquer les consommateurs et leur ouvrir les yeux sur une manière de mieux manger et de respecter notre Terre. Ce jeune homme à l’air timide et réservé se révèle très conscient de son environnement, de la qualité qu’il offre à ses clients. Et, ses projets sont nombreux… mais pour le moment, il voudrait se concentrer sur son restaurant. Et de conclure, « la nourriture n’est pas toujours faite avec amour, mais l’amour est la nourriture du corps, de l’esprit et de l’âme ».

Retour au Bercail Apres son passage chez Bocuse, Albert Massaad reçoit une 203

Convivialité du four Albert Massaad est conscient qu’à son âge, il a encore beaucoup à apprendre et à se prouver. La nourriture est pour lui une manière de s’exprimer et de communiquer. Son endroit préféré à Zimi? Derrière son four, lequel se trouve entouré d’un bar d’où il peut faire mieux faire connaissance avec ses clients, et nouer des liens chaleureux tout en cuisinant.Ce chef qui place dans sa perspective une formation à la University Of Gastronomic Sciences, en Italie, estime que la nourriture « est le resultat d’une culture, un moyen d’expression et un besoin ».


L’ A S I A T ’ D U C O I N Un néon rouge qui évoque les rues illuminées de Hong Kong nous entraine vers ce bar niché au pied de l’escalier Saint Nicolas à Gemmayzé. L’enseigne, en caractères chinois, indique « Electric Bing Sutt ». Un concept insolite à Beyrouth. PA R M A R I A L ATI


Photos DR

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RESTO-BAR

Affairée entre le bar, la préparation des tables et l’accueil des clients, Lin nous invite à partager un cold brew revisité, parfumé à la poudre de bière dorée qui scintille en se dispersant dans le liquide. Autour d’une table à laquelle d’anciennes bouteilles de bière recyclées donnent des éclats émeraude, entre une chaise pliante années 70 et une banquette aux couleurs verdâtres sur laquelle on peut s’assoir coté trottoir ou intérieur, Lin remonte le temps jusqu’à sa rencontre avec Jad, il y a deux ans. Ce dernier, créateur de concepts dans la restauration, créateur notamment du Central Station à Mar Mikhaël, élu l’un des 50 meilleurs bars du monde, est invité par l’hôtel Shangri-La à Pékin pendant une semaine pour faire découvrir ses cocktails novateurs. Lin, qui vit alors dans la mégalopole, s’y rend un soir et c’est le début d’une histoire d’amour qui décide la Chinoise et le Libanais à poursuivre leur parcours ensemble. Ils choisissent de s’installer à Beyrouth et la jeune femme qui a beaucoup voyagé entre les États-Unis et l’Asie, veut retrouver un peu de chez elle dans la capitale libanaise. Ces saveurs authentiques qui s’élèvent dans les rues de Bangkok, Singapour ou Chinatown à New York, elle décide de les transporter avec 205

elle. Le couple rencontre André qui se joint au projet. Ils trouvent leur emplacement dans un bâtiment historique qu’ils font le choix de mettre en valeur en en conservant les lambris, les murs en pierre et le sol en béton, éléments bruts caractéristiques des bing sutts. Au sens propre Bing Sutt signifie chambre glacée en cantonais, mais les autochtones ont adopté l’expression pour désigner ces lieux conviviaux, nés à Guangzhou dans les années 50, où l’on peut se poser à toute heure pour siroter un thé, grignoter un toast au déjeuner ou boire un coup après le boulot et jusqu’au bout de la nuit. ‘C’est un peu la version asiatique du ‘diner’ américain’, s’amuse Lin. Un brin branché, avec une touche moyen-orientale, Electric Bing Sutt est le cocktail détonnant du trio. Des accords saveurs-culture Au bar, construit bas exprès pour assurer une fluidité entre le côté ou l’on mixe les ingrédients et le côté ou l’on déguste, les boissons se font légères durant la journée, plus soutenues le soir. Les aromates classiques des cuisines moyen-orientales et asiatiques fusionnent dans des drinks qui invitent à l’évasion. Le goût de citronnelle du kéfir se mélange à l’Aperol et le saké


RESTO-BAR

fait un sort au Prosecco pour le Bangkok Babylon. Ce cocktail emprunte son nom à l’un des livres préférés de Lin, qui relate l’histoire de vingt-cinq expatriés installés dans la capitale thaïlandaise. La saga Crazy Rich Asians, inspire une relecture du Manhattan classique qui prend un goût de popcorn au beurre, clin d’œil au film qui a suivi, relevé de feuilles de pandan, qui poussent entre Singapour où se déroule l’intrigue et la Malaisie où elle est tournée. Jad et Lin aiment se rendre aux jeux d’arcade à Tokyo et leur Geimusenta Gin Tonic est un clin d’œil à la façon de prononcer ‘Game Center’ des Japonais qui n’ont pas de ‘r’ dans leur langue : le gin est distillé sur place et marié au matcha. Le Bloody Mary devient k-pop avec un peu de labné et surtout du kimchi, un classique de la cuisine coréenne à base de choux fermenté. Des petits plats accompagnent les boissons, à partager, comme il est de mise pour les repas conviviaux en Chine ; bœuf cuit à l’étouffée, épinards au poivre de Sichuan ou œufs de caille,

un classique des commerces de proximité, vendus en sachet. Quand elle ne retrouve pas le goût authentique sur place, Lin prépare ses propres condiments comme le curry vert qui accompagnera un poisson ou poulet avec du riz de coco, et le pak soy, le chou chinois servi avec des champignons shiitake et sauce soja, dans des assiettes en porcelaine de Chine fabriquées dans la ville de Jingdezhen. Les recettes sont inspirées des plats de grand-mère que Lin dégustait enfant, mais aussi par le chef consultant Jason, célébrité à Taiwan, qui après avoir écumé les restaurants libanais quelques jours s’est amusé à inventer des plats fusion. La musique venue d’Asie de l’Est s’intègre au lieu, hip hop, old school ou encore jazz du pianiste japonais Ryo Fukui. Lin s’est créé un refuge à Beyrouth en introduisant un lieu où l’on s’immerge dans la culture des rues de Hong Kong et Pékin ou elle a grandi.

Gemmayze, Beyrouth, +961 81 424 577, @electricbingsutt 206

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Fast Building, 344 Pasteur Street, Gemmayze, Lebanon T. +961 1 562 777 F. +961 1 449 000


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SAVEURS

UN CHAMPIGNON S’IL VOUS PLAIT.

Les champignons exotiques ont trouvé refuge dans la montagne de Byblos. Shiitaké, Enoki ou Nameko sont choyés dans la ferme Gourmet Mushroom où Julien Khoury a choisi d’en faire l’ingrédient vedette d’une recette réussie.

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PA R M A R I A L ATI


I

l pleut dehors mais, à l’abri sous la verrière, autour de la table en bois de la ferme Gourmet Mushroom, les chefs s’activent dans la bonne humeur. Au menu, pour commencer, velouté crémeux aux pleurotes avec émulsion de lait et huile de noisettes. Ensuite, vacherin Mont d’Or aux truffes, un fromage du Jura, la région du chef Franck Page venu ce jour-là des cuisines de l’Hôtel Phoenicia pour concocter ce repas autour du champignon. Pour le plat principal, un poisson cuisiné à la Thaï, au lait de coco et huile de sésame avec oignons, carottes, brocolis, citronnelle et gingembre, sans oublier la fricassée de champignons. Pour finir en beauté, une onctueuse crème brulée est caramélisée au moment d'être servie. Vanille, sucre, crème, pleurotes saisies et poudre de champignons fondent en bouche. Sur la ferme, Julien Khoury a voulu construire une cuisine qui met en valeur la polyvalence du champignon : les palettes des caisses en bois qui servent de stockage ont servi pour la structure et les sacs en plastique sont recyclés en tuyaux d’arrosages. D’ingrédients de pizzas, pâtes ou salades, les champignons deviennent le bun d’un burger végétarien ou une fricassée aigre-douce à l’huile de sésame, sucre brun, gingembre et sauce soja sur un riz vapeur, ou farcis de riz, lait d’amande et parmesan, ou encore servis tout simplement accompagnés d’une pincée de sel, de poivre, d’ail et d’oignons et arrosés

d’huile d’olive. Les recettes sont partagées sur les réseaux sociaux mais aussi à l’occasion de marchés, foires et journées à la ferme où Julien s’associe à des chefs qui subliment son produit. Sa poudre de champignon, le jeune homme l’improvise d’abord de manière artisanale, ôtant l’humidité de sept variétés de champignons au moyen d'un réchaud. Le système de séchage est ensuite mis au point avec une entreprise spécialisée et la recette peaufinée et goutée pendant un an avant de rejoindre les champignons frais sur les étalages et dans les sauces de quelques cinq cents restaurateurs. Une tonne de champignons exotiques par mois Pour visiter la ferme en cette saison humide, il faut s’armer de parapluies. Promenade entre les allées où champignons de Paris et Portobello se font face. Ces derniers émergent en seulement quelques jours et poussent vite, au frais dans leurs abris où les conditions idéales d’humidité, luminosité et température sont assurées. Pas de pesticides, ni d’engrais chimiques mais juste un substrat enrichi de compost : les champignons seront organiques, riches en protéines et gorgés à plus de 90% d’eau. Le chef nous explique qu’il ne faut pas éplucher le champignon de Paris, rosé à l’intérieur quand il est tout frais et qui blanchit à maturité. La seule condition où ce geste est possible, c'est pour la préparation d’un carpaccio, qu’on assaisonnera 209

d’huile d’olive et de fleur de sel. Plus loin le shiitaké -de « take », champignon en japonais, et « shii », l’arbre Castanopsis à l’ombre et sur les troncs duquel prospère le tubercule- fait face aux pleurotes grises, jaunes et roses. Ces variétés exotiques ont vite conquis les restaurateurs. De cinq blocs de substrat au départ, leur production est passée à une tonne de champignons par mois. La ferme continue d’introduire des variétés nouvelles come le Maitake ou le Hericium en forme de corail fin, aux vertus nombreuses. Julien Khoury s’est passionné pour la culture des champignons quand, en 2015, son voisin Jean Chamoun lui a proposé de s’associer avec lui pour dynamiser la ferme. Après des études à Miami et plusieurs années d’expérience dans le domaine de l’hospitalité entre le Liban et l’Afrique du Nord, ce nouveau projet audacieux le tente. Depuis, la production s’est démultipliée et les particuliers sont venus compléter la clientèle de restaurants et hôtels à Beyrouth, Dubaï ou Doha. On peut trouver les produits de la ferme dans les épiceries ou via le service livraison de Gourmet Mushroom. Sur les collines vertes qui surplombent le port de Byblos, désormais quinze variétés de champignons ont élu domicile à la ferme qui deviendra bientôt un domaine où œuvres d’art et restaurant gourmet déclineront le champignon sous toutes ses formes et saveurs. @gourmetmushroom


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SNACK

UN “ TAQA BAR ” POUR LA ROUTE De plus en plus populaires, les « Taqabars », ces tablettes nutritives, saines et énergétiques, à base d’avoine, sont les complices de toute une génération obsédée de sport et de santé. La recette, bien libanaise, a été mise au point par Soumaya Merhi.

Ce n’est sûrement pas de TAQA (énergie en arabe) que manque Soumaya Merhi. Cette jeune femme de 30 ans, originaire de Tripoli par son père, Allemande par sa mère, et née à Montréal, a tout d’une jeune businesswoman accomplie. Soumaya aux cheveux roux et longs, à l’allure saine et naturelle, est une fervente sportive, adepte de course et de natation. Son physique d’adolescente ne dément nullement sa détermination, adepte d’une nourriture et d’un mode de vie sains. Son franc-parler ne laisse aucun doute sur ses capacités et sur les ambitions que révèle son parcours. Taqa, une formule artisanale Soumaya rentre au Liban en 2013 après plusieurs années à l’étranger et des études dans divers domaines dont la sociologie, l’anthropologie, et la nutrition. La jeune femme qui vient d’une famille adepte de médecine alternative a

toujours été portée vers la nourriture saine. A son retour au Liban, la sportive en elle constate un manque de snacks sains sur le marché. Et c’est ainsi que lui vient l’idée de reprendre la boulangerie de son père qui confectionnait du pain d’avoine. Elle met au point et commence à produire ses propres barres énergétiques, les Taqabars, et autres biscuits qu’elle vend à Souk El- Tayeb, le marché organique créé par Kamal Mouzawak. Deux ans plus tard, la jeune femme, qui s’est investie dans cette entreprise à fond, physiquement et émotionnellement, est fatiguée de vendre sa production sur les marchés ponctuels, et réalise qu’elle désire aller plus loin, voire de réellement officialiser ses produits. Son expérience à Souk El-Tayeb, ainsi que son implication directe dans son entreprise, lui a permis d’avoir une vision claire des attentes du marché libanais ainsi que des spécialités dont il est déjà saturé. 210

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PAR MYRIAM RAMADAN


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SNACK

Saveurs d’eau de rose et de fleur d’oranger En 2016, Soumaya Merhi décide de transformer sa passion en un vrai business. Elle entreprend une étude de marché, augmente son capital d’entreprise, et trouve des investisseurs qui, constatant son sérieux, son professionnalisme et son sens de l’éthique, ainsi que le potentiel de son label, la financent et poussent Taqa à prospérer. Le défi de Soumaya débute avec l’ouverture d’une usine à Tripoli, la formation d’une équipe de boulangers et la mise au point d’une ligne de production automatisée et standardisée. A travers ses produits, tous à base d’avoine, Soumaya veut transmettre au consommateur un goût classique et familial, infusé d’une saveur d’eau de rose ou de fleurs d’oranger. La gamme Taqa, proposée à des prix abordables, se décline en crackers au thym, cookies au chocolat et orange, maamouls aux dattes et pistaches, et bien sûr en Taqabars célèbres barres énergétiques aux fruits secs, également aux parfums bien de chez nous. Soumaya insiste pour que sa production soit aussi « verte » que possible et utilise à cet effet un maximum d’ingrédients locaux ainsi que des emballages recyclables. Tous les produits Taqa sont donc préparés sans blé blanc, ni OGM, ni produits laitiers, ni huile de palme, ni farine de blé ou de soya. 211

Douce Tripoli Soumaya considère que c’est le Liban qui lui a donné la chance et l’expérience qui lui ont permis de devenir ce qu’elle est aujourd’hui, de faire ce qu’elle aime, et de le faire bien. Et pour bien le lui rendre, elle s’engage à éduquer le consommateur libanais à bien se nourrir en l’invitant à être conscient des ingrédients qu’il achète. Le monde de l’entreprise n’est pas chose évidente, surtout lorsque l’on prend la responsabilité de nourrir les autres. L’une des leçons essentielles que Soumaya a apprise du marché alimentaire libanais est la constance et la qualité du produit que l’on offre. Elle préfère produire des quantités restreintes mais bien faites plutôt que d’augmenter le volume et perdre en qualité. L’année 2018 était fructueuse pour Soumaya qui a vu ses ventes doubler. Les produits Taqa sont à ce jour distribués dans 330 points de vente à travers le pays. La jeune femme voulait voir Taqa s’étendre en dehors des frontières locales, et le label est déjà en vente à Dubaï. Soumaya est une Tripolitaine très fière que sa marque soit produite dans la ville que les Libanais considèrent comme « la capitale des douceurs ». taqaonthego.com


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GOURMANDISE

LA MAISON DES COOKIES Une maison en sucre qui sent bon la pâte et le chocolat, on se croirait dans un conte des frères Grimm. Et pourtant c’est au coin de la rue du Liban, à Huvelin, que nous nous sommes perdus parmi les saveurs de The Cookie Shop.

La pâte est enfournée sur place jusqu’à cinq fois par jour, pendant douze minutes, et les cookies tout chauds se reposent ensuite quelques minutes avant de s’installer sur les étagères. Chaque semaine, une recette de cookie ou de nouveaux ingrédients créatifs prennent la relève et viennent rejoindre les classiques composés par Dalia Naoufal : le cookie « trois chocolats », le « beurre de cacahuète », le « caramel et bretzel », le « café et noisette » ou le « noix de coco et dattes ». Les idées fusent dans la tête de la jeune pâtissière. Assise un dimanche dans un restaurant avec ses parents, elle

observe les loukoums servis à la fin du repas et se dit qu’il serait intéressant de créer un cookie au parfum de ce dessert de son enfance. En automne, citrouille, noix de muscade, gingembre et cannelle s’affichent en tête du menu et parfument les cookies de la saison. L’hiver, les « S’mores », une confiserie venue des États-Unis et que l’on fait fondre autour du feu, donnent un cookie dont la pâte croustille sous le moelleux de la guimauve. La jeune pâtissière concocte sans relâche de nouvelles recettes et parfums : matcha et noix de macadamia, pomme et cannelle, crème de marrons pour 212

les fêtes de fin d’année, mais aussi des saveurs salées pour faire de ce petit biscuit un encas pour toutes les circonstances. De bonne heure, avec le café, l’on peut croquer dans un cookie au labneh et au thym, revenir vers l’heure du déjeuner pour gouter, au choix, des cookies au parmesan, olive et tomates séchées, ou à la dinde et fromage, et puis vers l’heure du goûter se faire plaisir en trempant son cookie chocolat noir et fleur de sel dans un grand verre de lait. Et enfin rentrer chez soi avec un bocal rempli de cookies que l’on reviendra remplir une fois tous les petits gâteaux engloutis.

Photos Karim Chehab

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La pâtisserie comme un jeu Dalia a fait ses études universitaires à l’université de Bath, au Royaume Uni. Entre deux cours, elle aimait se poser dans les petites boutiques spécialisées qui entourent le campus : La plus colorée, où le cupcake est roi ; la veloutée où l’on sublime le doughnut, et bien sûr le marchand de cookies. Ces espaces où tout se décline autour d’un produit phare l’inspirent. A son retour à Beyrouth, elle est embauchée dans le département marketing d’une grande entreprise. Mais un jour, au cours d’une réunion qui se prolonge, elle se rend compte que c’est peut-être le bon moment pour se lancer à son

GOURMANDISE

propre compte. Elle s’en va donc suivre une formation de pâtisserie à Dubaï pendant trois mois. La jeune femme qui, au départ, pensait se contenter d’apprendre les bases et puis trouver un chef pâtissier pour réaliser ses cookies, se prend au jeu. Derrière ses fourneaux elle passe désormais ses journées à mélanger la farine, le beurre, le sucre et les œufs, sans oublier les ingrédients inventifs qui font la particularité de ses pâtisseries. Dalia réalise elle-même les pâtes à tartiner pour garantir des ingrédients naturels, sans colorants ni conservateurs ou huile de palme. Elle propose même des options vegan ou sans gluten. Ses bocaux de beurre de 213

cacahuète, pâte de chocolat et noisette, caramel au beurre salé et crème de marron sont eux aussi disponibles sur le comptoir de The Cookie Shop. Dalia utilise du chocolat blanc pour décorer sa famille de personnages en pain d’épices en évitant le sucre glace que l’on finit toujours par ôter de son gâteau. Autour d’un thé, d’un chocolat chaud ou d’un jus d’orange, les cookies se dégustent dans une ambiance cosy où coussins et papier-peint fleuris, bocaux déposés sur les étagères de bois sombre et vaisselier blanc rempli d’assiettes, tasses et théières en vrac, nous ramènent dans la cuisine de nos grand-mères. @thecookieshoplb


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CAFÉ

ANFEH BRANCHÉE

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Panini italiens et ingrédients libanais, café en grains torréfié sur place et espace lounge ou l’on peut se poser avec son ordi ou s'alanguir pour écouter un concert de guitare acoustique, El Panino Café l’annonce : Anfeh est désormais bien dans le vent.


Il porte la tasse chaude à ses lèvres et grimace juste avant de boire, grimace qui exprime bien le doute si particulier qui nous vient toujours avant d’avaler la première gorgée d’une tasse de café brûlant. Ce bonhomme design est le logo dessiné par Ziad El Khoury, entrepreneur et architecte qui, avec deux copains, a ouvert El Panino Café l’été dernier. Mobilier en bois, murs bleu ciel et blanc décorés de dessins et messages qui racontent les péripéties des grains de café, sans oublier les tasses sur lesquelles le bonhomme à la grimace nous nargue, et les sets de tables inspirés des cahiers quadrillés utilisés pour les croquis d’architecture ; le design s’infiltre partout jusque dans les desserts et boissons. Le macchiato s’entoure d’une couronne de pistaches ; des dessins de feuilles et fleurs sont esquissés par le barista sur le Moca et quand le Volcano, savant mélange de café et de thé, est servi, la crème remonte mousseuse comme la fumée qui s’échappe lors de l’éruption d’un volcan. Les sandwichs prennent des saveurs et des noms italiens, inspirés des paninis que Ziad dégustait à déjeuner lors de ses études à Milan il y a quelques années : Le Bresaolino avec du fromage de chèvre, le Pugliese qui emprunte à la pizza ses ingrédients et le Panino qui,

lui, associe halloum et pesto, tapenade d’olive et tomates séchées dans un pain ciabatta. Croissants et gâteaux gourmands sont parfois confectionnés sur place et les cinnamon rolls, ces brioches à la cannelle, s’imprègnent d’une crème versée directement dans l’assiette. Le pudding à la banane est servi dans un petit bocal et le lazy cake, gâteau de chocolat et biscuit avec coulis de chocolat, a un gout de réconfort. Anfeh en hiver Elle est surnommée affectueusement Anforini en raison de ses maisons en bord de mer peintes en bleu et blanc, couleurs de la Grèce. Mais Anfeh commence aussi à vibrer sous la pluie d’hiver. Ziad El Khoury s’est fait un nom aux États-Unis où il a vécu de nombreuses années et travaillé comme designer de produit pour Philips, le géant de l’électroménager. A son retour dans son Koura natal, il ouvre un bureau d’architecture et l’un de ses projets consiste à réhabiliter le patrimoine de sa ville. En partenariat avec le ministère de la Culture, il rénove l’église Saydet el Rih, la plus ancienne d’Anfeh, construite sous l’ère byzantine, qui surplombe les chalets et la mer. Avec ses deux amis, ils se dit qu’il pourrait contribuer à faire revivre la ville, ses marais salants, ses 215

églises et les vestiges de son ancienne citadelle.C’est ainsi qu’en guise de premier projet, le petit groupe crée El Panino Café, un concept de coffee shop et espace de travail où tasses de cafés aux mélanges originaux cohabitent avec la rakwé (cafetière traditionnelle), et où l’on peut manger sur le pouce ou se détendre et prendre son temps. Non loin de la mer, les tables et chaises en bois bleu qui ont investi le café trottoir, d’emblée donnent le ton de ce coffee shop tendance mais surtout décontracté. Les tonneaux en métal qui servent de pied aux tables en bois, colorés et numérotés comme les maillots d’une équipe de football, ont été conçus par Ziad El Khoury. Aplatis, « ils rappellent l’aspect d’une cannette de soda vide qu’on écrase, avachi dans son canapé, avant de la jeter à la poubelle » explique le designer. El Khoury envisage déjà d’implanter son concept ailleurs, sur les campus et dans d’autres villes. Mais en attendant, il peaufine un autre projet sur le rivage d’Anfeh : un restaurant lounge où fruits de mers et sel auront la vedette, car la ville était autrefois un village de pêcheurs que la production et le commerce du sel avait fait prospérer. Anfeh, rue principale, +961 71 879 333, @elpaninocafe


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COCKTAILS

LE PUB CHEZ SOI Solution Cocktails lance un tout nouveau concept de livraison à domicile. Au grand bonheur des fous de mojito, sangria et autres breuvages enivrants.

De savoureux cocktails livrés sur le pas de votre porte. L’idée est simplissime mais il fallait quand même y penser. « Mes clients et mes amis n’arrêtaient pas de me demander les recettes des boissons que je leur servais pour les reproduire chez eux. Je me suis dit pourquoi ne pas leur en faire profiter à la maison », explique Harout Ghazarian, fondateur de Solution Cocktails. Lancé il y a deux mois, le concept propose une douzaine de collations fraîches prêtes à consommer : Moscow Mule, Gin Basil, Sangria, Old Fashioned ou encore Passion Fruit Martini, il y en a pour tous les goûts. « Après onze ans dans le métier, je sais ce que les gens apprécient », assure l’entrepreneur. Le trentenaire compte à son actif de nombreuses heures derrière le zinc (Under construction, Back Stage, etc.). « Je travaille dans le secteur depuis l’âge de 19 ans. J’avais envie d’évoluer et en même temps je voulais continuer à faire des cocktails, même si j’ai arrêté de travailler comme serveur. Je ne voulais pas perdre ce savoir-faire », confie-t-il. Sur-mesure La nuit, Harout est aux commandes de Faze II à The Village Dbayeh, pub dont il est partenaire. Ses journées, il les consacre

à la confection de ses breuvages dans un local spécialement aménagé à Dbayeh. « Je fais tout de mes propres mains, de A à Z, de la production au packaging », dit-il. Le produit final, de jolies bouteilles de toutes les couleurs surmontées d’une étiquette explicative, ravit autant le regard que les papilles. Vendu entre 25 et 28 dollars l’unité, chaque pack peut contenir sept verres. Chacun est livré avec sa « garniture », de la menthe, du basilic, ou encore des fruits de la passion, selon la commande. Il est également possible de commander sa propre mixture. « Je m’adapte aux goûts des clients. Si quelqu’un a une demande particulière, je peux la réaliser », assure Ghazarian. Pour l’heure, sa petite affaire tourne à un rythme de 10 à 12 commandes par jour. Outre les livraisons à domicile, Solution Cocktails propose ses services pour les soirées et événements privés. « Ca marche très bien, les gens sont vraiment très enthousiastes », se réjouit l’entrepreneur. Si, pour l’heure, les livraisons se concentrent essentiellement sur Beyrouth, Dbayeh et ses environs, Harout Ghazarian espère à terme pouvoir arroser l’ensemble du pays. @solutioncocktails 216

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PA R P H I LI P P I N E D E C LE R M O NT- TO N N E R R E


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COCKTAILS

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SOUS LA CRÉMAILLÈRE DE AÏSHTI HOME SOLUTIONS

C’était en décembre 2018, au seuil de la nouvelle année. L’architecte Rabih Geha avait déployé le meilleur de son talent pour contribuer à transformer le 2e étage de la section « Home Solutions » du magasin Aïshti by the Sea (réservée aux meubles, objets et domotique) en un espace exclusif dédié à la fine fleur des créateurs libanais, choisis par ses soins pour exposer leurs toutes nouvelles collections. Du vêtement à l’accessoire, du meuble à l’objet décoratif, tout concordait pour donner à l’atmosphère le caractère habité, vibrant, cohérant, d’un « chez-soi » dont on avait l’impression, à l’ouverture, de pendre la crémaillère. Mettre en avant le meilleur de ce que le Liban a à offrir fait partie des engagements de Aïshti qui se veut, audelà d’un magasin dédié à l’art de vivre, une destination à part entière où chaque visite apporte une nouvelle expérience. Yassmin Saleh, Second St et Timi Hayek (mode), Alexandra Hakim, Joumana Dagher et Vanina (bijoux et sacs) ; Mawsam, George Amatoury et Anastasia Nysten (meubles), ont, à l’occasion de cet événement qui s’est prolongé jusqu’à la mi-janvier, démontré parmi beaucoup d’autres leur niveau international.

Photo Carl Halal

PAR F.A.D.



Photos Carl Halal



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LIVRE

DE L'ART À LIRE Pour commencer l’année en beauté, voici notre sélection de livres d’art, véritables musées de poche pour un vertigineux voyage autour d’une «coffee table ». PA R N A S R I S AYE G H

Arts Spirituels Dans ce titre-évènement, les éditions Kaph Books reviennent sur l’œuvre d’une grande dame de la peinture libanaise. Née à Beyrouth en 1945, l’artiste d’origine arménienne Seta Manoukian rêvait, enfant, de danse et de grands ballets. Mais c’est dans les pigments du 3ème art qu’elle dessinera sa vie; entre les silences fascinés de ses autoportraits et les géométries effarées de ses compositions. “Seta Manoukian: Painting in Levitation” retrace le parcours d’une artiste hors-norme qui a tantôt peint sa vie au son des fracas de la guerre civile libanaise, tantôt dans les plis silencieux de ses retraites spirituelles. Aujourd’hui basée à Los Angeles où elle vit en tant que moniale bouddhiste, Ani Padma Tsul T'hrim Drolma – nom qui lui a été conféré lors de son ordination en 2005 – fera le voyage à Beyrouth le 7 Mars prochain, après plus de 20 ans d’absence, pour le lancement de l’ouvrage au Musée Sursock! Une rencontre essentielle. Kaph Books

Fulgurant Basquiat Précurseur du street art, avant-garde, icône Pop Art, premier peintre black américain au musée, défenseur de la cause des minorités raciales dans les années 80… les superlatifs s’emballent et s’exclament pour tenter de cerner / célébrer l’œuvre de Jean-Michel Basquiat, ce surdoué haïtiano-porto-américain précoce à la carrière fulgurante. Trente ans après sa mort subite – à 27 ans, comme Jimmy Hendrix – les éditions Taschen rendent hommage au legs d’un artiste qui avait la carrure d’une rockstar. Une très attendue monographie signée Hans Werner Holzwarth et Eleanor Nairne qui offre un aperçu inédit de l’art et de la vie de Basquiat. Année après année, les reproductions exceptionnelles de ses peintures, dessins et croquis les plus emblématiques tentent de mieux appréhender le génie de cette légende des années 80. Attention collector ! Taschen. 222


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LIVRE

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Victoria, Albert et l’art textile Le V&A Museum de Londres est sans conteste le dépositaire des spécimens les plus raffinés, les plus riches et les plus rares en matière d’arts textiles. Tapisseries médiévales, broderies Renaissance, chintz indiens, tapis persans… motifs et couleurs se retrouvent réunis dans un recueil qui retrace la fabuleuse odyssée de la couleur telle qu’employée dans les papiers peints et autres tissus d’ameublement, du XVème siècle à nos jours. Présentées par ordre chronologique, chaque pièce est accompagnée d’une grille de couleur proportionnelle très simple. Ces palettes montrent clairement les associations de couleurs qui, à traver s l’histoire, ont permis de créer les splendides motifs aujourd’hui encore admirés et reproduits. Véritable musée de poche, ce livre-référence s’adresse tant aux amateurs du métier qu’aux professionnels tisseurs de rêves. Editions PYRAMID

La Shabanou des Arts Pendant les douze ans qu’a duré son règne (1967-1979), Farah Diba, impératrice d’Iran, n’aura qu’un seul objectif, se consacrer aux arts. Avec majesté, elle rendra hommage à la culture millénaire de son pays - les fêtes de Persépolis restent encore dans les mémoires - encouragera la création. Pléthore d’institutions voient le jour : le Musée du Tapis à Téhéran, celui du bronze à Khorramâbâd, le Festival de Chiraz… Mais sa réalisation la plus extraordinaire reste la collection du Musée d'art contemporain de Téhéran. Impératrice des arts, la Shabanou visite l'atelier d'Henri Moore en Angleterre, elle rencontre César et Dalí à Paris, Andy Warhol à la Maison Blanche (elle invitera ce dernier à Téhéran). Dans la foulée, le musée acquiert une série de «Mao», une «Marilyn» et autres «Mick Jagger» du fondateur du Studio 54 … Inauguré en 1977, le Musée de Téhéran présentera au total plus de 250 œuvres occidentales – la plus grande collection au Moyen-Orient! « Iran Modern. The Empress of Art » revient sur cette épopée vertigineuse. L’Iran dans tous ses états d’art, à découvrir aux éditions Assouline. Assouline. 223


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BIEN-ÊTRE

PENSION COMPLÈTE Découvrir l’âme et l’histoire d’un pays à travers sa gastronomie ? C’est le pari de ces quatre hôtels qui offrent des “cooking classes” d’exception, expériences immersives au cœur de cultures locales.

Le Relais Borgo Santo Pietro, échappée belle en Italie Bienvenue dans une demeure toscane cinq étoiles ultraraffinée, située sur une ferme biologique de quatre-vingts hectares à un jet de pierres de Sienne. Accueillis par une allée de cyprès photogénique au possible, les chanceux pensionnaires sont invités à appréhender la golden hour dans les sublimes jardins du domaine, aux passages secrets et aux grottes propices aux échappées romantiques. Situées dans la villa principale datant du xiiie siècle, les chambres et suites aux décors uniques déploient leurs apparats grandioses : fresques murales peintes à la main, cheminées de marbre, lustres en cristal, lits à baldaquins et tapisseries de velours. L’expérience L’école de cuisine de Borgo Santo Pietro en est une preuve de plus : les Italiens ne prennent décidément pas la gastronomie à la légère. Érigée au quasi-rang de religion nationale, elle est l’un des piliers fondateurs de ce lieu animé par une philosophie farm to table revendiquée. On y explore la richesse infinie des aliments et de leurs textures, des arômes et des notes olfactives. Située aux abords du potager organique, l’académie met l’accent sur l’ensemble du processus de nutrition, éduquant les élèves de tous bords aux techniques agricoles de moissons, de récoltes et de vendanges, mais aussi aux méthodes de préservation des ingrédients saisonniers ; autant d’étapes fondamentales qui contribuent à une pratique éclairée de la cuisine. L’opportunité rêvée de découvrir les secrets de fabrication de la comfort food toscane ancestrale, celle que les mammas transmettent de génération en génération : au contact d’Olga, qui y partage généreusement les recettes de sa grand-mère, on apprend à travailler la truffe dans tous ses états, à confectionner son patè di fegatini au foie de poulet, sa pappa al pomodoro, soupe de pain épaisse aux tomates fraîches, ou encore inénarrable peposo, ragoût de bœuf épicé typique de la vallée du Chianti.

Four Seasons Resort Chiang Mai, la Thaïlande autrement C’est un havre de paix situé au cœur des rizières et des montagnes brumeuses de la vallée de Mae Rim, dans le nord de la Thaïlande où les Full Moon parties agitées n’ont pas droit de cité. On y dort dans des pavillons individuels à l’architecture caractéristique de la région qui fusionnent harmonieusement design contemporain et objets d’art siamois ancestraux. Particulièrement tourné vers la découverte du riche patrimoine culturel de la région, le Chiang Mai propose des expériences authentiques et axées sur le partage : d’une discussion avec un moine tibétain au bain des buffles en compagnie des fermiers, jusqu’à la découverte des rituels de beauté sacrés des femmes thaïlandaises ou des rencontres avec des guérisseurs spécialisés en reiki ou dans l’alignement des chakras, le lieu propose un aperçu complet de la culture locale, à mille lieues des resorts standardisés. L’expérience Des cours dispensés à la Rim Tai Kitchen, demeure de bois nichée en pleine végétation tropicale, arborée de banians, arbres sacrés venus de l’Inde. Après un réveil à l’aube, les cuisiniers en herbe se lancent dans l’exploration des marchés locaux en compagnie du chef, qui ne manque pas de faire découvrir toutes sortes d’épices et de mets méconnus. Une fois rentrés à l’hôtel, place à la pratique : après avoir noué le tablier de rigueur, on concocte ses propres plats grâce à l’aide précieuse de l’un des commis. Dans ce temple du goût thaïlandais, décoré à la façon d’un marché traditionnel avec ses multiples stations entièrement équipées, on apprend à tirer le meilleur parti des aliments organiques cultivés sur place : currys, woks, infusions, mais aussi smoothies aux fruits et aux herbes locales. La meilleure part de cette expérience hors pair ? La dégustation en famille, instant privilégié de complicité et de partage. À la nuit 224

Photos DR

PAR MÉLANIE MENDELEWITSCH


Ci-dessus, le Relais Borgo Santo Pietro. Ci-contre et ci-dessous, le Four Seasons Resort Chiang Mai, avec le Rim Tai Kitchen.


BIEN-ÊTRE

tombée, le lieu laisse place à un espace culinaire interactif, où chacun est encouragé à dialoguer avec les chefs en place afin de recueillir tips et secrets de fabrication qui font toute la différence : on y navigue librement entre les postes consacrés aux incontournables de la cuisine thaïe, de la salade de papaye à l’émincé de porc au basilic du jardin, cuit au wok, sans oublier les nombreux desserts qui raviront les palais sucrés. Le Saint-James, au cœur du vignoble bordelais Située à Bouliac, autrefois baptisée le “balcon de Bordeaux” grâce à sa vue panoramique sur la région, c’est une longère majestueuse du xviiie transformée et agrandie par l’architecte star Jean Nouvel, classée au patrimoine du xxe siècle par le ministère de la culture, qui s’ouvre généreusement sur le paysage alentour et laisse entrevoir la forêt des Landes de Gascogne. Niché au cœur des vignobles, cet ensemble de quatre bâtiments, inspirés des séchoirs à tabac d’antan, propose des suites spacieuses aux vastes baies vitrées et au mobilier trié sur le volet mêlant des pièces de Jean Nouvel à des objets de collection signés Verner Panton ou Charles Eames. Haut lieu de l’œnotourisme, le Saint-James se voit aussi célébré pour son restaurant étoilé où le génie du chef Nicolas Magie opère. Cet artiste des fourneaux, passé entre autres par le Crillon, y réinterprète avec brio les classiques de la cuisine du terroir, de la truffe noire du Périgord au foie gras et son carpaccio de figues et cèpes grillés en passant par un cochon de lait caramélisé corsé de vieux parmesan, et d’un homard bleu exquis travaillé à la façon d’un fish and chips. L’expérience Baptisée Côté Cours, l’école de cuisine dirigée par la sous-chef de Nicolas Magie, Célia Girard, est une institution. Située sous une véranda baignée de lumière articulée autour de deux grands îlots immaculés, elle propose aux gastronomes de découvrir les secrets déployés par les chefs en coulisses. Ouverte à tous, débutants comme confirmés de 7 à 77 ans, cette école du goût propose une large variété de cours : l’occasion de partir à la rencontre des spécialités de France et de Navarre, de la Savoie à la Bretagne en passant par la Corse et la Franche-Comté. On y recrée les succulents plats du restaurant durant la session “Comme au Saint-James”, puis on découvre les facettes multiples de la cuisine contemporaine durant les ateliers à thèmes. Comment confectionner des snackings d’exception ? Quelles sont les

gestes clés pour apprendre à préparer le gibier, les coquillages, les légumes ou fruits exotiques ? Autant de questions cruciales auxquelles ces parenthèses ludiques répondent sans détour, avec pédagogie et décontraction. Belmond Las Casitas, immersion au cœur des Andes Niché au cœur des Andes dans le majestueux Colca Canyon au sud du Pérou, ce complexe hôtelier hors du temps, compte seulement vingt bungalows individuels luxueux – des casitas en version originale – équipées de piscines privées. Dans ce cadre à couper le souffle qui s’étend sur onze hectares de végétation luxuriante, on s’initie à la culture péruvienne, soucieuse de respecter au maximum la faune et la flore : l’hôtel revendique une approche éco-responsable et veille à minimiser au maximum son impact environnemental. Doté d’un potager et d’une ferme intégrés, il propose une cuisine organique composée exclusivement d’aliments extra-frais, que ses hôtes sont plus qu’invités à découvrir, au cours de séances de pêche ou de nutrition des bébés alpagas, entre deux treks à pied et des randonnées à dos de cheval au gré des paysages féeriques des environs. L’expérience Véritables plongée au cœur de la culture sudaméricaine, les cours de cuisine dispensés sur place donnent à voir la richesse et la diversité de l’art culinaire local. Adaptées en fonction des saisons et des mets cultivés dans le jardin organique, les leçons font la part belle aux recettes traditionnelles. Les participants y sont invités à rejoindre le chef au restaurant Curiña, hommage enflammé à la ville d’Arequipa et à ses mille saveurs. Au programme de cette masterclass en plein air avec vue sur les Andes ? Préparation de ceviche et autres viandes savamment marinées, et assaisonnements au Pisco et aux fruits tropicaux aux notes acidulées. C’est aussi l’occasion pour les novices de découvrir les vertus de super-aliments découverts sur le tard en Europe, qui font pourtant partie intégrante du patrimoine culinaire péruvien. Parmi eux, le maca mais aussi le quinoa, denrée millénaire intrinsèquement liée à la tradition du cru. Les chefs y confient leurs meilleures astuces pour la confection d’un parfait quinoto, équivalent local du risotto transalpin réalisé ici à base de quinoa et de piment jaune du Pérou, ou un aji de Gallina, des tranches de poulet assorties de riz, accompagnées d’une étonnante sauce au fromage. 226

Photos Nicolas Claris, Richard James Taylor

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De haut en bas, le Saint-James. La piscine du Belmond Las Casitas.

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BIEN-ÊTRE

ÉLÉMENTAIRE Épuré et minéral, le spa Akasha de l’hôtel Lutetia s’impose comme le nouveau rendez-vous wellness de la Rive gauche.

C’est quoi ? Un espace aux accents minimalistes de 700 m2 entièrement conçu par l’architecte star Jean-Michel Wilmotte. La force de ce spot où se presse déjà la fine fleur des beautistas parisiennes ? L’illusion d’une lumière naturelle omniprésente, e­ xception notable dans le paysage des spas parisiens, qui peinent parfois à s’accommoder de l’obscurité inhérente à leur situation en sous-sol. Le concept ? Holistique, articulé autour

des quatre éléments : eau (avec le bassin principal, un jacuzzi et un cérémonial aquatique à chaque début de soin), air (à travers des techniques d’inspiration profonde), feu (avec une offre fitness complète et une stimulation constante des énergies) et, enfin, l’élément terre, symbolisé par une large gamme de menus sains personnalisables et de boissons détoxifiantes. On y réserve quoi ? Un cours de flow yoga ou de yin détox, disciplines signatures de la yoga queen Hélène 228

Duval, dont la marque YUJ prend ses quartiers au spa. Selon l’humeur, un soin signature de la marque Carita ou Cellcosmet, pour faire peau neuve avant d’entrer dans l’hiver, ou un protocole corps Aromatherapy Associates, mixant techniques orientales et occidentales. Mais aussi une restructuration complète du regard opérée par la marque Chado, aux produits de make-up haut de gamme disponibles à la vente. hotellutetia.com/akasha

Photo Mathieu Fiol/Hôtel Lutetia

PAR MÉLANIE MENDELEWITSCH


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BIEN-ÊTRE

LE CLUB 5* LUXE Hôtel fastueux et atypique pensé par Philippe Starck, le Brach fait la part belle au bien-être. PAR MÉLANIE MENDELEWITSCH

Photo Guillaume de Laubier

L

’ouest parisien a désormais son QG avec l’hôtel Brach. Fleuron du jeune groupe Evok, ce lieu entièrement dessiné par Philippe Starck a pris place sur les ruines d’un centre de tri postal désaffecté. Parmi les références qui ont nourri l’imaginaire du designer fantasque, un pot-pourri arty et créatif où fusionnent l’architecture des années 1930, le Bauhaus, Dada et le courant surréaliste. Intimiste et chaleureux, cet hôtel de 59 chambres se distingue par son jardin potager perché sur le toit, doté d’un poulailler où savourer un cocktail fruité, des œufs frais du jour ou un barbecue en appréciant la vue à 360 degrés sur les toits et la tour Eiffel… Centre névralgique où se croise tout le Triangle d’or, son club de sport de 1 000 m2 ravive l’âme des clubs de boxe d’antan. Après un cours d’aqua-Pilates ou un massage watsu dans le bassin de 22 mètres, puis un détour par le sauna, le ­hammam et l’étonnante grotte de sel de l’Himalaya, on s’offre une séance de boxe, de yoga ou de fitness parmi la vaste gamme d’activités proposées. Le must ? Des consultations privées et des programmes sur mesure établis avec une équipe de coachs, ­d’ostéopathes, de kinés, de naturopathes et de d ­ iététiciens triés sur le volet. brachparis.com

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BIEN-ÊTRE SAVEURS

QUAND TATIANA RENCONTRE ALESSANDRA Conversation à bâtons rompus entre Tatiana Korsakova, beauty guru russe et fondatrice de la marque d’athleisure de luxe Vaara, et Alessandra Rich, créatrice italienne installée à Londres dont la griffe de prêt-à-porter séduit aussi bien les stars de cinéma que les princesses. PAR MÉLANIE MENDELEWITSCH

Tatiana : Quel est votre processus créatif pour chaque collection, et quels sont les univers qui vous inspirent ? Alessandra : Cela peut partir d’un simple détail, une matière ou une image, ou bien cela répond à un mode de fonctionnement plus classique. Il y a toujours une étape préliminaire de recherche, à travers des archives ou au gré de ce que je peux observer dans les rues. Chacune de mes collections est inspirée par un type spécifique de femmes, et bien que toutes soient issues d’univers différents, elles partagent une même féminité, une même intelligence. Ma dernière collection, “Yacht

Allesandra Rich, à gauche, et Tatiana Korsakova.

Clubbing”, s’inspirait par exemple d’une femme mondaine à la personnalité affirmée. Tout commence toujours avec une histoire. Tatiana : La mode et le monde en général traversent une période compliquée, avec des perspectives incertaines. Qu’aimeriez-vous voir changer dans l’industrie de la mode ? Alessandra : La mode est un extraordinaire moyen de nous exprimer, de refléter notre époque, mais c’est en effet un univers très particulier. J’aimerais y insuffler plus de fun, et que le milieu se prenne moins au sérieux. Tatiana : La tendance que vous aimeriez voir disparaître ? Alessandra : Les chaussures plates. Tout le monde devrait vivre perché loin du sol. Tatiana : Quels sont vos spots fétiches à Paris ? Alessandra : La place Vendôme, un lieu symbolique pour moi. C’est ici que la fondatrice de Net-a-porter, Natalie Massenet, a repéré mes créations exposées dans le lobby du Ritz, et a décidé d’acheter toute ma collection. Je suis une amoureuse de Paris ! Tatiana : Quel conseil donneriez-vous aux jeunes femmes souhaitant créer leur propre marque ? Alessandra : De toujours rester concentrées sur leurs objectifs, et de laisser parfois de la place à la nouveauté.

@tati_vk et @alessandrarich 230

Photos DR

T

atiana Korsakova : On pourrait dire que votre vision constitue le contre-pied de la culture streetwear androgyne qui a émergé ces dernières années. Comment réussissezvous à révéler la féminité de façon si évidente ? Alessandra Rich : Il est naturel pour moi d’aller à contre-courant des tendances et d’affirmer une identité forte. Quand j’ai créé ma griffe, en 2010, j’ai été portée par l’image de femmes sûres d’elles, conscientes de leur féminité. C’est toujours l’un de mes moteurs, qu’on retrouve assez logiquement dans chacune de mes créations.


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À TABLE

ELDORADO CARNIVORE PAR EUGÉNIE ADDA

Aux commandes Riccardo Giraudi, connu comme l’un des meilleurs importateurs de viandes de la planète. Propriétaire d’une dizaine d’adresses dans son Monaco natal, instigateur des Beefbar, qui s’étendent de Mexico à Hong Kong, et désormais propriétaire de l’institution Anahi, que lui seul pouvait parvenir à réveiller, il ouvre ici la première antenne parisienne de sa chaîne signature. Aux fourneaux, il place le jeune Gabriele Faïella, passé par l’adresse triplement étoilée de Gordon Ramsay, à Londres. Rompu à l’exercice grâce à ses années aux Beefbar Monaco puis chez Anahi, il livre ici une partition entre finger food nikkei et pièces de

viande premium, sublimées par des cuissons ultra-maîtrisées et des sides de très, très haut niveau. À la déco Humbert & Poyet, à qui on doit The Hoxton Paris et d’autres adresses de Giraudi. Mais ici, le cabinet parisien a dû faire face à un défi de taille, à savoir la rénovation complète d’une imposante salle Art nouveau découverte derrière l’ancienne Fermette Marbeuf, et inscrite à l’inventaire des monuments historiques. Les architectes Emil Humbert et Christophe Poyet ont œuvré de concert avec une armée de restaurateurs, de staffeurs et de miroitiers pour raviver les fresques peintes par Jules Wielhorski en 1889, remplacer l’impressionnante verrière et redorer les pilastres et les lustres d’époque. 232

Leurs teintes de laiton s’accordent avec les marbres, les velours et les verreries de la nouvelle déco, dans un pur style néoclassique 3.0. Résultat, un habile jeu de contrastes entre volumes dramatiques et espaces intimes où dîner incognito. Quoi, quand, avec qui ? Du Kobe partout, dans un bao fumé, des gyozas, des tacos et surtout en charcuterie, puisque l’adresse propose en exclu mondiale (!) du jamón de bœuf de Kobe, création spéciale de Giraudi, une version upgradée de la cecina, plus fondante et addictive encore. Mais aussi de l’angus, du français et du wagyu australien sublimés dans des morceaux choisis, à accompagner d’une purée au piment ou de frites truffes-parmesan. On y va les soirs de semaine, presque en afterwork, ou le week-end, à dix, avec des habitués du Triangle d’or. Déjà croisés là-bas : des tops, quelques PDG de grandes maisons et des chefs étoilés, dont Alain Ducasse et Akrame Benallal @beefbar_paris

Photo Francis Amiand

Passé maître dans l’art de la table gastro‑mondaine, le Monégasque Riccardo Giraudi vient d’ouvrir son premier Beefbar parisien, sublime vaisseau Art nouveau.


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ADDRRESSES

0, A, B

E, F, G, H

324 NEW YORK +961 1 99 11 11 EXT.104

ELLERY +961 1 99 11 11 EXT.140

ALEXANDER MCQUEEN +961 1 99 11 11 EXT.130

EMILIO PUCCI +961 1 99 11 11 EXT.579

ALEXANDRE VAUTHIER +961 1 99 11 11 EXT.130

FENDI +961 1 99 11 11 EXT.550

ATTICO +961 1 99 11 11 EXT.130

GEORGE HAKIM +961 1 98 15 55

PHILOSOPHY DI LORENZO SERAFINI +961 1 99 11

AZZEDINE ALAÏA +961 1 99 11 11 EXT.130

GIANVITO ROSSI +961 1 99 11 11 EXT.110

11 EXT.130

BALENCIAGA +961 1 99 11 11 EXT.570

GUCCI +961 1 99 11 11 EXT.200

PRADA +961 1 99 11 11 EXT.130

BALMAIN +961 1 99 11 11 EXT.130

HERMÈS +961 99 97 10

PROENZA SCHOULER + 961 11 11 11 EXT.130

BLAZE MILANO +961 1 99 11 11 EXT.130 BUCCELLATI +961 4 71 77 16 EXT.353 BURBERRY +961 1 99 11 11 EXT.455 BVLGARI +961 1 99 91 59

C, D CARTIER +961 1 97 26 00 CELINE +961 1 99 11 11 EXT.250 CHANEL +961 1 99 91 29 CHLOÉ +961 1 99 11 11 EXT.580 CULT GAIA +961 1 99 11 11 EXT.104

NADA G +961 1 98 34 43 OFF-WHITE +961 1 99 11 11 EXT.130

P, R RALPH MASRI +961 1 56 65 38

J, L

ROBERTO CAVALLI +961 99 11 11 EXT.115 ROCIO +961 1 99 11 11 EXT.104

JALINE RESORT +961 1 99 11 11 EXT.130 JIMMY CHOO +961 1 99 11 11 EXT.595 JONATHAN SIMKHAI +961 1 99 11 11 EXT.130

S, T, V

LA DOUBLE J +961 1 99 11 11 EXT.130

SAINT LAURENT +961 1 99 11 11 EXT.562

LOEWE +961 1 99 11 11 EXT.130

SARA BATTAGLIA +961 1 99 11 11 EXT.130

M, N, O

SONIA RYKIEL +961 1 99 11 11 EXT.130 STAUD +961 1 99 11 11 EXT.104 STELLA MCCARTNEY +961 1 99 11 EXT.575 SYLVIE SALIBA +961 1 33 05 00

DION LEE +961 1 99 11 11 EXT.130

MAX MARA +961 1 99 11 11 EXT.130

TABBAH +961 1 97 57 77

DIOR +961 1 99 11 11 EXT.592

MIU MIU +961 1 99 11 11 EXT.130

VALENTINO +961 1 99 11 11 EXT.569

DOLCE & GABBANA +961 1 99 11 11 EXT.555

MOSCHINO +961 1 99 11 11 EXT.130

VICTORIA BECKHAM +961 1 99 11 11 EXT.130

DSQUARED2 +961 1 99 11 11 EXT.130

MSGM +961 1 99 11 11 EXT.130

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CORRESPONDANCE

ATTENTIONS INTENTIONS PAR LAURA HOMSI I LLU STR ATI O N M A R I O N G A R N I E R

Cette correspondance devrait être consacrée à l’amour. Vaste sujet ; je ne suis pas sûre de vouloir m’y embarquer. Je préfère dresser une liste de preuves d’amour, ces attentions qui prennent la relève lorsque les mots nous font défaut. Ensemble, elles forment un tout, qui, finalement, m’inspire beaucoup plus que des discours fleuves. Amour filial, amour amical, amour fraternel, amour amour... il y en a tellement que je ne saurai les compter. J’espère que vous en avez chacun un peu. Voici un méli-mélo inspiré des histoires entendues et consignées au fil des années. -Quand ma mère a démonté et refait toute la déco du sapin de Noël après que je lui ai confié que je n’aimais pas les couleurs des guirlandes. Après, je me dis que je vais en baver dans la vie, vu que je ne trouverai pas grand-monde prêt à faire ça pour moi ! -Quand quelqu’un est généreux de compliments sincères. Il n’y a rien de pire que les faux compliments, mais ce qui est insupportable, c’est aussi ceux qui en sont avares. Pourquoi se retenir de dire quelque chose qui ferait plaisir ? -Quand il y a un groupe qui brave les embouteillages pour attendre les voyageurs au terminal des arrivées à l’aéroport, alors que c’est la foire absolue. Ou quand quelqu’un se propose de me déposer pour rattraper l’avion de 2 heure du matin alors que prendre un taxi serait plus simple. -Quand ma grand-mère m’appelle un mois avant mon retour à Beyrouth pour me demander quel plat je souhaiterais qu’elle me prépare. Et qu’elle continuera à m’appeler toutes les semaines pour s’assurer que je ne change pas d’avis et proposer 14 options supplémentaires. -Quand un bouquet de fleurs / une carte postale / un cadeau sans raison particulière égaie une journée. La meilleure raison du monde est parfois “Juste parce que”. -Quand je reçois un gâteau au chocolat sans lactose sur le pas

de ma porte en cadeau d’accueil pour la rentrée. Histoire de m’aider à me remettre de l'émotion d’avoir été diagnostiquée intolérante au lait, donc aux desserts. -Quand mon frère montre régulièrement ma photo à sa petite fille en lui répétant mon prénom, afin qu’elle puisse me reconnaître après quelques mois d’absence. Il sait que j'en serais, sinon, beaucoup trop mortifiée. -Quand un café et un croissant m’attendent sur mon bureau, un matin difficile. Clin d’œil de collègues attentionnés. -Quand mes meilleures amies retirent systématiquement les objets tranchants de mes mains, me sachant trop maladroite pour les manipuler sans me blesser. -Quand cet homme connaît si bien sa femme qu’il anticipe ce dont elle aurait besoin pour qu’elle ait toujours ce qu’il lui faut. Quand elle est végétarienne et qu’il appelle systématiquement les personnes qui les invitent à dîner pour proposer d’apporter un repas adapté. Ou quand il s’assied à côté d’elle pour glisser subrepticement dans sa propre assiette ce qu’elle sera incapable de manger. -Quand les traditions demeurent avec les mêmes personnes au fil des ans, même si elles changent. On s’y glisse comme on le ferait dans un vieux pull tout chaud. Un peu élimé mais si doux. -Quand une personne dit pardon quand elle est en tort. C’est si rare d’avouer avoir fait une bêtise et être en tort. Ravaler sa fierté et assumer n’en sont que plus admirables. La liste peut être longue. Chacun a des exemples pour compléter. Ces gestes font tellement de bien qu’ils ensoleillent une journée, un mois, une vie... essayons de les provoquer aussi. Au risque d’avoir l’air baba hippie absolu, lançons une chaîne. Démultiplions ces gestes. Rendons le quotidien plus agréable. Une attention avec bonne intention à la fois. 236


AD Beatrice Rossetti - Photo Federico Cedrone

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