Bref Aéro 348

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BREF Septembre/octobre 2014 • N° 348

AÉRO

ÉDITO

Schizophrénie Schizophrénie : n.f. du grec « skizein », fendre, et « phrên », pensée. Trouble psychique caractérisé par la dysharmonie et l’incohérence mentales (Petit Larousse). En matière syndicale, la notion de schizophrénie est assez souvent évoquée. Les plus anciens se souviennent du cas Manufrance qui fut emblématique dans les années 1970 : d’un côté, une entreprise dont le modèle économique était à bout de souffle, de l’autre, un personnel poussé par certains syndicats à ne rien lâcher de son statut, parce que la Direction devait plier, et qu’une entreprise, c’est bien connu, est immortelle. Mais Manufrance est morte.

Sommaire

En quarante ans, les exemples similaires ont été nombreux : les pneus en Picardie, l’acier en Lorraine, l’automobile en région parisienne, pour ne citer que les plus connus. À chaque fois, le dilemme est le même pour les organisations syndicales : essayer de sauver tout le monde au risque de tout perdre, ou n’en sauver que quelques-uns en attendant des jours meilleurs.

Actualités Développement durable, l’AED se structure

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Départ en retraite anticipée

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Centre de formation fédéral

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Vie des entreprises De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace

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Élections de représentativité

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Dossier Quand les militants CFE-CGC valorisent leurs engagements

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C’est dans l’air Résistances

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POUR VOUS AVEC VOUS

PARTOUT

L’aéronautique-espace-défense pourrait sembler épargnée par ce problème cornélien. À y regarder de plus près, notons d’abord que nos industries sont des industries à long cycle. Les concurrents n’émergent pas en quelques mois, les nouveaux produits non plus. Ce qui fait, qu’en général, nos entreprises ont, plus que d’autres, du temps devant elles pour s’adapter. Mais nous devons aussi noter, qu’en fait, le monde de l’AED est en mutation permanente depuis la chute du mur de Berlin. Lentement, mais sûrement, personne n’y échappe. MBDA, par exemple, très rentable, n’en adapte pas moins en permanence son outil industriel. La filière Ariane cherche en permanence à réduire ses coûts. Le marché des satellites est extrêmement concurrentiel, tout comme l’est, en aval, celui de ses clients. Dans les hélicoptères, on se chipe allègrement des parts de marchés, comme dans l’automobile. Et bien au-delà, on sait que la construction navale ou l’armement terrestre sont eux aussi sous tension. L’aviation n’est pas à l’abri, ne rêvons pas. La réorganisation de l’aérostructure n’est pas aboutie. Dans le militaire, on sait que le Typhoon et le Rafale sont les derniers de leurs races en Europe, et que leurs successeurs seront sans doute des drones armés. Donc mort programmée d’une filière et lente émergence d’une autre sont au programme. Pour ce qui est du civil, si rien dans l’immédiat ne porte à l’inquiétude, on observe tout de même que les prochains progrès ne sont pas attendus dans l’aérodynamique, mais dans la motorisation et les matériaux. Là encore, mutations, changements de métiers et probablement, changement de paradigme : qui demain sera le vrai dépositaire de la valeur ajoutée sur un avion ? Le motoriste ou l’avionneur ? L’équipementier ou le systémier ? Voilà pourquoi la CFE-CGC AED est à l’écoute des tendances lourdes qui dessinent aujourd’hui les lendemains de notre industrie. Précisément pour éviter - autant que faire se pourra - de nous retrouver dans des situations schizophrènes où nous ne saurions pas à la fois défendre une entreprise et son personnel. Notre credo est bien « la défense du personnel dans l’intérêt de l’entreprise ». C. Dumas - Délégué administratif


Actualités

L

a première réunion du réseau Développement durable (RDD) de l’AED s’est tenue, le 3 juillet dernier, à Toulouse. Les membres du réseau, référents Développement durable (DD) de différentes sections de l’AED, se sont réunis pour partager leurs expériences DD et développer des actions spécifiques. « Lors des élections professionnelles en 2013, la section Turbomeca à Bordes a choisi d’orienter sa campagne sur les sujets de préoccupation des salariés, dont un volet Développement durable », rapporte Eugène Reinberger, référent pour la section. « Une campagne électorale servant à « faire connaitre, faire comprendre, faire aimer », nous avons informé les salariés par une série de tracts sur les thèmes transports, alimentation et santé. Chaque tract déclinait un des 3 angles suivants : • les faits (réchauffement climatique) ; • les contraintes (freins au changement) ; • les préconisations CFE-CGC en local. Ces tracts ont été bien accueillis par les salariés et ont contribué à la réussite de ces élections puisque notre représentativité a dépassé les 30 % (au lieu de 20 % précédemment) ».

Le DD à l’AED Les représentants des salariés doivent être informés afin de s’assurer de la Responsabilité Sociétale de l’Entreprise (RSE). Celle-ci implique, en effet, une collaboration avec les partenaires sociaux sur les sujets concernant le développement durable dans l’entreprise. La CFE-CGC, bien consciente de ces enjeux, a demandé, lors du Grenelle de l’environnement, en 2007, l’instauration d’une commission DD obligatoire dans les CE, sans qu’elle soit entendue pour l’heure.

Le réseau DD AED s’est créé pour partager et capitaliser nos expériences locales. Le thème du développement durable est porteur de développement syndical si nos sections se démarquent sur ce thème et que la CFE-CGC est identifiée comme crédible sur ces sujets. Pour cela, le réseau doit s’étoffer et être représentatif des sections de l’AED. Si vous vous sentez concernés et êtes intéressés par ces échanges, vous êtes les bienvenus, rejoignez-nous !

Développement durable : l’AED se structure !

Le développement durable et l’entreprise Le développement durable est un sujet de préoccupation majeur, c’est pourquoi les sections CFE-CGC doivent s’en emparer pour se développer, et le porter aux comités d’entreprise à travers une commission ad hoc. La société civile et les réglementations européennes imposent de nouvelles lois environnementales à appliquer par les entreprises (REACH, gestion des déchets…). Ces nouvelles contraintes ont des impacts économiques et sociaux qui peuvent devenir de vraies opportunités.

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De son côté, le réseau DD de la section Airbus Opérations Toulouse a analysé les enjeux syndicaux d’une commission DD au CE (cf. encadré) et a édité, en 2009, un livre Vert (*) sur le DD en entreprise qui capitalise les réflexions et propositions CFE-CGC sur le sujet.

Une commission DD au CE, pour quoi faire ? Composée de salariés « spécialistes » intéressés par le DD, elle permet d’être force de réflexions, de propositions et d’actions pour : • apporter expertise et support aux autres commissions ; • répondre aux questions des élus et des salariés ; • intégrer les préoccupations des salariés en termes de DD et de RSE.

Et en local ?

Localement, les sections peuvent mettre en place des réseaux DD en s’appuyant sur des adhérents motivés par ces sujets et en élargissant les groupes de réflexion aux salariés intéressés. Le réseau DD AED fournira des éléments de travail à adapter aux réalités locales. Pour être crédible sur ce thème et attirer de nouvelles vocations, la CFE-CGC doit étiqueter ses actions DD dans l’entreprise, par exemple, la mise en place de prêts de vélos électriques par le CE ou des menus locaux, bio, végétariens dans l’offre de restauration. Les expériences de ces « pionniers » démontrent qu’une section syndicale peut être véritablement actrice du DD dans une entreprise. Nous sommes convaincus que ce sujet est fédérateur et peut générer un nouveau développement syndical. Lidwine KEMPF Responsable Réseau DD AED

(*) http://cfecgcairbusfrance-toulouse.com/ documents/divers/Developpement%20 durable/LV%20DD.pdf


Actualités

Départ en retraite anticipée : carrière longue et à 60 ans Le décret du 19 mars 2014 modifie la retraite anticipée et les trimestres réputés cotisés des salariés pour carrière longue. Pour bénéficier de ce dispositif, vous devez, selon votre année de naissance et de l’âge à partir duquel vous souhaitez prendre votre retraite, justifier d’un nombre de trimestres cotisés (voir tableau).

Ainsi, désormais, seront dorénavant « réputés cotisés » : • 4 trimestres : pour le service national, maladie et accidents du travail, en cas de chômage indemnisé ; • 2 trimestres : au titre des périodes d’invalidité ; • tous les trimestres : liés à la maternité et ceux attribués au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité (le décret décrivant ce compte est à paraître).

NOTA : sont exclus pour le départ en retraite anticipé : le rachat volontaire de trimestres ; les trimestres d’affiliation à l’assurance vieillesse des parents au foyer ; les trimestres relatifs au volontariat associatif.

Durée d’assurance cotisée en fonction de l’année de naissance, de l’âge de départ anticipé et du début d’activité Départ anticipé à partir de

Début d’activité* avant

Année de naissance 1954

1955

1956

1957

1958

1959

1960

1961 1962 1963

1964 1965 1966

1967 1968 1969

1970 1971 1972

1973 et autres

57 ans

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57 ans et 4 mois

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57 ans et 8 mois

175

175

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179

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59 ans

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59 ans et 4 mois

170

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166

166

166

167

167

167

168

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58 ans

60 ans

16 ans

20 ans

* il faut avoir cotisé 5 trimestres avant la fin de l’année civile des 16 ou 20 ans et 4 trimestres si né au dernier trimestre.

Actualité AGIRC & ARRCO Les partenaires sociaux se sont réunis en groupe de travail, le 10 septembre, pour examiner les paramètres d’évolution des retraites complémentaires ARRCO et AGIRC, alors que les perspectives financières des régimes se dégradent. Les réserves financières devraient être épuisées en 2027 pour l’ARRCO et en 2018 pour l’AGIRC. L’objectif est d’aboutir à un accord national interprofessionnel en juin 2015.

Centre de Formation Fédéral (CFF) Les délégués syndicaux ont reçu un catalogue de formations de la Fédération établi par le Centre de Formation Fédéral (CFF). Contrairement aux formations dispensées par le CFS, il faut prévoir les financements pour couvrir les coûts pédagogiques, les déplacements et valider les modalités permettant le maintien de la rémunération.

IMPORTANT : pour vous inscrire, passez obligatoirement par l’AED qui pourra vous fournir toutes les informations nécessaires.

Christian Viguier Expert retraite CFE-CGC AED

NOUVELLES DÉSIGNATIONS REVIMA > Sylvain Duval remplace Franck Dirou en qualité de représentant au Comité de Groupe DASSAULT AVIATION > Bernard Mathieu est désigné délégué syndical central, il remplace Richard Bédère. Richard Bédère est désigné administrateur salarié du Groupe Dassault Aviation.

Frédéric La Roche Responsable formation AED

CRÉATION DE SECTION IEA - International Engineering Assistance St Chamas (13) > Pascal Lhomond est désigné délégué syndical.

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Vie des entreprises

De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace

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’était juste avant l’été. L’annonce de la création d’une société commune par les groupes SAFRAN et AIRBUS, avec la bénédiction de l’Élysée, a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans le monde des lanceurs spatiaux.

Il faut dire que, rien que pour l’industrie française, la manœuvre concerne SNECMA à Vernon, HERAKLES et AIRBUS Defence & Space en région bordelaise, AIRBUS D&S aux Mureaux, et, par extension possible, les activités d’ARIANESPACE et du CNES. La réaction quasi intuitive des sections CFE-CGC des sites concernés dans l’immédiat a été positive. Excusez du peu : prenant conscience du risque d’écroulement (à moyen ou long terme, tout de même) de la filière lanceurs, les étatsmajors de deux grands groupes, souvent rivaux, enterrent les haches de guerre et décident d’une salutaire paix des braves. En un monde où la finance et ses lois de l’immédiateté font les alpha et les oméga de toute entreprise, et où le politique courbe régulièrement l’échine devant le financier, l’initiative mérite d’être saluée.

Son attrait initial repose sur son côté industriel, en voie de disparition, soulignons-le encore une fois. Il s’agit de sauver ce qui peut l’être, de positionner la France et l’Europe face aux USA en particulier, tout en répondant aux attentes du marché. En répondant aux attentes du marché… tiens, tiens… Encore une fois, la réaction des sections CFE-CGC a été d’abord positive. Simplement parce qu’il fallait faire quelque chose, et que le fond et la manière forcent le respect. Pour autant, nous ne sommes dupes de rien : quel que sera le mode opératoire, au bout du bout, 1 + 1 ne feront pas 2. Une fois que l’industrie aura fait le job, que les postes et les plans de charge seront répartis, la finance pointera le bout de son nez pour exiger d’une entreprise-désormais-normale qu’elle se comporte comme telle, notamment sur le plan de la rentabilité.

La CFE-CGC Aéronautique Espace Défense n’est donc pas dupe des risques à moyen terme sur l’emploi. Simplement, nous mettrons en œuvre les moyens à notre disposition pour limiter les casses sociales. Par exemple, en exigeant l’extension de la JV civile aux activités de dissuasion par souci de cohérence. Ou en tirant profit du « Papy boom » ici ou là. En somme, une révolution est en marche dans le spatial. Pour l’initier, il a fallu de l’audace à des dirigeants qui pourront, demain peut-être, postuler à la dignité de grands capitaines d’industrie, si l’opération est un succès. Il a fallu de l’audace à la CFE-CGC AED pour approuver cette initiative. Nous aurons, demain, l’audace de croire et d’agir pour contribuer à son succès, tant social qu’industriel. C. Dumas Délégué administratif CFE-CGC AED

Élections de représentativité AED… Voici notre seul résultat pour juillet/août et début septembre 2014 : • Zodiac Aerotechnics « Roche la Molière » : une représentativité de 47,14 % et un poids de 30,70 %, belle performance sans candidat au 2ème collège face à la CGT. L’AED poursuit ses efforts de développement qui se traduisent par une optimisation de notre représentativité, avec, une fois de plus, une marge de progression au 2ème collège... Ce n’est pas pour notre représentativité, mais il serait dommage de ne pas faire un «gros cocorico», à la suite des élections Administrateurs Salariés dans le groupe Zodiac. En effet, la CFE-CGC a fait un score remarquable et remarqué de 57,12 % face à la CGT (42,88 %). Ce résultat ne peut que nous encourager à poursuivre et amplifier notre effort de développement au sein du groupe Zodiac.

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Marc Legrand Secrétaire général AED


Dossier

Quand les militants CFE-CGC valorisent leurs engagements

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n 2010, la CFE-CGC signait, sous l’impulsion de Bernard Valette, alors secrétaire national confédéral au dialogue social et à la formation initiale, un partenariat avec l’Institut d’Études Politiques d’Aix-en-Provence (Sciences Po Aix), visant à valoriser, entre autres, l’expérience sociale, économique et syndicale des militants CFE-CGC. Depuis, des militants ont pu bénéficier de cette VAP (Valorisation des Acquis Professionnels) un peu particulière et obtenir un Master 2 spécialité « Management de l’information stratégique », parcours « intelligence sociale ».

La formation professionnelle est gage d’évolution dans l’emploi et doit permettre de sécuriser les parcours professionnels. L’employabilité est un enjeu de taille dans les entreprises ; être militant syndical peut, parfois, ralentir une carrière professionnelle car ce n’est pas un statut reconnu dans l’entreprise. Quid de la reconnaissance et de la valorisation.

Une filière accessible à tous En 2010, la première promotion a été constituée par un groupe pilote intégrant une formation non diplômante, dit « certificat » du pôle d’intelligence économique de l’Institut. Depuis 2013, les auditeurs retenus sont inscrits directement au sein de la formation diplômante niveau Bac+5 (300 ECTS) Master II spécialité « Management de l’Information Stratégique » de Sciences Po Aix. L’objectif de cette formation est de valider le parcours social et syndical des auditeurs qui sont très impliqués dans leur entreprise, mais qui sont également de véritables acteurs engagés dans leur territoire de façon transverse. « Nos auditeurs ne sont pas tous en délégation syndicale permanente. Même si il y a une grande diversité des parcours et une fourchette d’âge assez large (de 30

ans à 60 ans), il est vrai que nous avons tout de même de nombreux auditeurs qui proviennent de grands groupes ou de structures privées ou publiques importantes. Leur motivation première est claire : valoriser, par un diplôme, leur parcours social, économique, syndical et environnemental. Une reconnaissance que le salarié, qui a gagné en compétences durant ses mandats syndicaux, n’a que très exceptionnellement dans son entreprise », confie Jean-Christophe Humbert, Directeur de l’Institut Supérieur de l’Intelligence Sociale et le chargé de mission à l’Institut d’Études Politiques d’Aix-en-Provence, responsable du parcours « intelligence sociale ». « Les candidats ne se rendent pas toujours compte de toutes les compétences extraordinaires et les expertises qu’ils ont acquises tout au long de leur vie. Une de nos missions est justement de tout faire pour les mettre en valeur. Les auditeurs remarquent aussi que la Marque « Sciences Po Aix » change très souvent l’approche et le mode de communication de leurs interlocuteurs dans l’entreprise, mais aussi à l’extérieur ! », poursuit Jean-Christophe Humbert.

Il faut OSER ! Entre carrière professionnelle, mandat syndical -voire mandats syndicaux-, vie familiale, pas facile de penser à soi, pas

évident de se lancer dans l’obtention d’un nouveau diplôme passé 40 ans… Souvent le doute s’installe « Vais-je y arriver ? Une formation, oui, mais si je n’obtiens pas le diplôme… », autant de questions que les candidats se posent naturellement avant de s’engager dans une formation diplômante. « Le plus compliqué est de se décider. Une fois entrés en formation, les mêmes auditeurs inquiets sur leur capacité à écrire un mémoire aux exigences « Sciences Po Aix » en début de formation n’arrivent plus à s’arrêter d’écrire en fin de parcours ! La richesse de la formation les a véritablement transformés. Les méthodes et les outils acquis ont bouleversé leur manière de fonctionner au quotidien en sortie de parcours », affirme Jean-Christophe Humbert. La formation est dispensée sur 10 mois universitaire (de septembre à juin). Actuellement deux promotions sont ouvertes : l’une à Paris, l’autre à Aix-en-Provence. À l’issue de sa formation, l’auditeur rédige un mémoire qu’il doit soutenir pour valider son Master 2. « La promotion est une famille, poursuit le Directeur de l’ISIS. Quand un auditeur perd pied, les autres le soutiennent. Il y a aussi une très belle solidarité entre les différentes promotions. Le prestige de l’école ne doit pas faire peur aux éventuels candidats. Depuis que la filière existe, sur l’ensemble des masters de Sciences Po Aix, plusieurs candidats syndicaux ont performé avec des 15 et 16/20 à l’oral ! Chapeau bas !»

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Dossier

Ils ont osé Didier Jouanchicot Mandats syndicaux : délégué syndical central Turbomeca, coordinateur Groupe Safran • Âge : 52 ans • Emploi actuel : responsable compensation industrielle à Turbomeca à Bordes • Formation initiale : ingénieur mécanicien (Bac +5) • Mémoire : «En s’appuyant sur le marketing produit, comment construire un marketing syndical pertinent ?» Promotion septembre 2013 - session Paris. Je me suis lancé dans cette VAE pour plusieurs raisons. La première étant liée à mon parcours professionnel : technique à mes débuts, suivis de 3 années aux ressources humaines, pour être aujourd’hui à la direction commerciale de mon entreprise. En parallèle, j’ai des mandats syndicaux lourds, j’ai eu envie de développer mon efficacité syndicale. Il était donc nécessaire d’obtenir un diplôme en adéquation avec ce que je fais d’un point de vue syndical et qui concrétise mon expérience en ressources humaines, en commercial et en sciences sociales. Enfin, cela correspondait aussi à un besoin purement personnel : je voulais me relancer et me remettre en question ! Le choix de mon mémoire a répondu à une situation que j’allais vivre dans mon entreprise : les élections professionnelles. C’était donc un pari osé à double enjeu. Si la section CFE-CGC perdait les élections à Bordes, cela signait l’échec de mes positions dans mon mémoire, et donc un échec syndical doublé d’un échec personnel ! Les élections se sont parfaitement bien déroulées et j’ai validé mes positions. Aujourd’hui,

je me suis mis à la disposition de l’AED pour aider et soutenir les sections dans leur démarche de marketing syndical lors de leurs élections. Tout au long de ma formation, j’ai rencontré des intervenants professionnels très intéressants, partagé des moments passionnants, et reçu de bons coups de fouet. Lors de la rédaction du mémoire, je me suis vu retourner à mes nuits de mathssup/ maths-spé. Cette étape demande énormément de travail. Heureusement, mon épouse m’a énormément soutenu et déchargé dans les contingences familiales à cette période. Sans elle, je n’aurais pas eu mon diplôme. J’encourage vivement les adhérents CFE-CGC à suivre cette formation qu’ils aient un projet professionnel ou syndical. Elle permet de prendre du recul et change notre façon d’envisager les relations humaines. D’un point de vue professionnel, l’obtention de ce diplôme n’a pas modifié mes fonctions ; ce qui a changé, c’est l’attitude de mes interlocuteurs RH, je suis plus crédible.

Franck Meier Mandats syndicaux : délégué syndical Daher-Socata à Tarbes • Âge : 46 ans • Emploi actuel : responsable commercial Daher-Socata Tarbes • Formation initiale : BTS technico-commercial puis Master 1 Achats en formation continue • Mémoire : « Repenser l’entreprise dans sa dimension sociale » Promotion septembre 2012 - session d’Aix en Provence Je n’ai pas eu l’idée de cette formation tout seul. En 2011, un ami syndicaliste m’en a parlé et vanté les mérites. C’est une formation mise en place par mon syndicat, Sciences Po n’est pas n’importe quelle école, et j’ai voulu aussi penser à moi, à mon avenir professionnel. Cette formation est une sorte de reprise en main de mon avenir. Ce cursus allait me permettre de valoriser mes compétences sociales, n’ayant jusqu’à présent que des diplômes liés à mon parcours commercial et technique. L’actualité a impulsé la thématique de mon mémoire. Sur un terrain de jeu qui n’est plus la France, plus l’Europe, mais le monde, comment se positionnent les entreprises et leur modèle social « à la française »? Mon mémoire s’est, de ce fait, trouvé très axé social. Sciences Po étant très focalisé sur l’économie, je ne me suis pas toujours retrouvé. Je pense, d’ailleurs, que c’est une amélioration qu’ils peuvent apporter au cursus en rééquilibrant les jurys, lors de l’oral, avec un professionnel de la « cause sociale » dans le monde économique (directeur RH,

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sociologue du monde du travail, etc.). J’ai soutenu le 9 janvier dernier. Avant la soutenance, je me suis posé beaucoup de questions, il faut dire que cette période coïncidait avec mon entretien individuel annuel. Deux voies s’ouvraient à moi : soit je m’investissais plus encore dans le syndicalisme au sein du Groupe Daher, de mon syndicat ; soit, j’évoluais professionnellement. Le fait que j’ai suivi ce Master 2 Sciences Po a déclenché des propositions professionnelles. Pour l’heure, je suis encore en mode réflexion. J’ai des élections d’entreprise en octobre prochain et m’investie sur cet événement important; cependant, je n’exclue rien. Je suis heureux d’avoir suivi cette session Sciences Po. J’ai rencontré dans ma promotion des collègues de tous horizons, certains étaient là dans le cadre d’un aboutissement de leur carrière ; d’autres étaient des écorchés de leur entreprise et venaient s’oxygéner pour rebondir dans un autre emploi ; d’autres encore voulaient aller plus loin dans le syndicalisme et performer. Cette pluralité est une richesse dans une promotion !


Dossier

> et ils témoignent ! Fernande Oliviera Mandats syndicaux : déléguée syndicale, élue CE • Âge : 44 ans • Emploi actuel : responsable licence (propriété intellectuelle) Turbomeca à Bordes • Formation initiale : BTS Commerce international puis Sup de Co Pau (dans le cadre de la formation continue) • Mémoire : « Le management interculturel au cœur de la coopération aéronautique » • Promotion septembre 2012 – session de Paris À l’aube de mes 45 ans, je souhaitais débuter une formation qui validerait tous les acquis que j’avais accumulés depuis de nombreuses, et notamment, dans le cadre de mon engagement syndical. De plus, il me fallait une formation courte qui soit compatible avec ma vie familiale. Le Master 2 proposé par Sciences Po m’est apparu tout à fait approprié et allait me permettre d’acquérir tous les outils pour assumer correctement mon engagement syndical et, par la même occasion, me relancer professionnellement. Oui, j’ai aussi pensé à moi. Il est vrai que la loi de 2008, sur la représentativité syndicale, m’a fait réfléchir sur mon devenir tant syndical que professionnel ! Pour l’anecdote, mon DRH était « décoiffé » quand j’ai déposé mon dossier pour Sciences Po, mais il m’a prise au sérieux. À l’heure actuelle, je n’ai pas encore soutenu mon mémoire, je suis en pleine

rédaction. J’ai choisi un sujet très riche qui vient consolider mon expérience professionnelle et sociale. Dans ce mémoire, j’envisage le management comme un outil de gestion des risques interculturels. Au-delà de l’aspect technique de la formation, je tire de cette session une formidable expérience. Dans ma promotion, nous étions peu nombreux ce qui a permis des échanges fructueux avec des intervenants de qualité et très accessibles. Le rythme de la formation maintient bien le tempo, permet de gérer nos agendas chargés. Mon seul regret : nous n’étions seulement 2 femmes dans ma promotion ! Je veux dire à toutes les militantes et adhérentes de la CFE-CGC que cette formation reste compatible avec nos vies professionnelles et nos vies privées même si, par moment, nos emplois du temps sont chargés. N’hésitez pas à vous lancer !

Philippe Castera Mandats syndicaux : délégation syndical Dassault Aviation à Argonay et délégué du personnel • Âge : 52 ans • Emploi actuel : chargé d’affaires en charge des investissements industriels Dassault Aviation Argonay • Formation initiale : Bac +2 fabrication mécanique • Mémoire : « Nouvelles générations et syndicalisme » Promotion : 2014 – session de Paris Il y a quelques années, il a fallu restructurer la section syndicale d’Argonay. Je me suis penché sur la question du recrutement d’adhérents et j’ai voulu comprendre pourquoi il était si difficile d’attirer des collègues vers le syndicalisme. Cette aventure fut le point de départ d’un fort engagement syndical, ce qui m’a permis de rencontrer Jean-Christophe Humbert, au moment où je venais de découvrir la formation Sciences Po proposée par mon syndicat. Je me suis décidé à la suivre, étant persuadé qu’elle allait m’aider à acquérir des connaissances utiles, tant au niveau syndical que professionnel, et m’ouvrir à un autre regard sur l’entreprise. En même temps, ce Master 2 me permettait de valider le parcours effectué jusque là et ajoutait une nouvelle corde à mon arc pour envisager la suite. J’ai 52 ans et un diplôme de Science Po peut toujours m’être favorable … Ma problématique est de comprendre comment être attrayant vis-à-vis des jeunes, savoir ce qu’ils attendent et ce que le syndicalisme devrait leur proposer. Pour cela, il faut comprendre

les évolutions de la société et de l’entreprise. Au-delà de l’enseignement très riche, j’ai rencontré beaucoup de monde au cours de la formation. Ce nouveau réseau m’a donné des possibilités de partage créant une véritable solidarité entre les étudiants. J’encourage mes collègues à se lancer dans cette aventure. Certes, c’est une année particulière : on travaille, on dort, on vit avec son mémoire en tête ; cela exige des sacrifices mais quel plaisir d’apprendre et prouver qu’il n’y a ni âge ni profil-type pour se former ! Il y a un avant et un après Sciences Po, notre vision change. En effet, aujourd’hui, je porte un regard différent sur le syndicalisme et les connaissances acquises me donnent plus de légitimité pour exposer mes idées. À la demande de Bernard Valette, je vais développer sur le terrain les idées de mon mémoire au sein de l’AED, je suis enthousiaste et outillé pour cette mission.

POUR EN SAVOIR + Si vous souhaitez vous renseigner sur ce Master2 ou demander un

dossier de candidature, prenez contact avec : Katia Pleinet Institut Supérieur d’Intelligence Sociale : 04 42 12 30 49 • inscription@is-is.fr

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C’est dans l’air

Résistances

I

l y a quelques semaines, des représentants de l’AED tenaient une réunion dans l’ex-siège d’un important groupe aéronautique européen. Ce bâtiment, grand navire posé dans Paris, fut jadis le p.c. d’un des fleurons de l’industrie française. Pour ceux qui le connurent avant 2000, tout n’y était que réseaux, discussions, planifications, pilotage de filiales. Nous étions entre Français et nous y étions bien. L’environnement était connu, les règles du jeu aussi. Le temps a passé. Le groupe a déménagé son siège pour des contrées ensoleillées. En attendant sa vente, le paquebot est tenu – avec beaucoup de classe, il faut le souligner – par une sorte de dernier carré. Terminées les invectives d’une porte à l’autre. Adieu les poignées de mains au self. Finis les embouteillages près des photocopieurs. Tout est calme, silencieux. L’histoire est déjà écrite : dans le silence feutré de ce riche bâtiment, on finira par sceller les dernières caisses et fermer le dernier bureau. Le dernier salarié partira. C’est écrit. Et tout ça dans le calme. Ce qui nous pousse sans arrière-pensée (initialement…) à nous demander ce qu’il se serait passé si, au lieu d’un siège parisien, il s’était agi de déménager une usine de production. Car enfin, dans un siège social, on trouve essentiellement des cadres et des employés de haut niveau. Il est bien connu que l’épaisseur des moquettes y cache des grades élevés ! Seulement voilà :

BREF

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lorsqu’au journal de 20 heures, on voit une occupation de site pour protester contre un déménagement, ce ne sont pas ces cadres et ces employés qui brûlent les pneus et soudent les grilles. Mais d’autres populations, qui savent résister. Tout ceci pourquoi ? Tout ceci pour démontrer que plus le grade est élevé, plus le droit de s’exprimer est faible. À une heure où d’aucuns s’interrogent sur la notion même d’encadrement, il est évident qu’un membre de l’encadrement n’a pas le même droit à la critique, pas la même liberté d’expression que quelqu’un qui n’en fait pas partie. Voilà tout simplement la raison d’être de la CFE-CGC : être la voix de ceux qui n’en ont plus. Non pas parce qu’ils vivent dans un régime totalitaire ou dans une situation oppressante, mais parce qu’ils sont montés près du bon Dieu et que comme tels, ils s’interdisent de risquer de le froisser. Ils s’interdisent la moindre entrée en résistance, même en cas de nécessité absolue. Alors dites le autour de vous : à celles et ceux qui douteraient encore de l’utilité d’un syndicat spécifiquement dédié à l’encadrement, nous proposons des visites guidées de ce beau paquebot, avant démolition. Ça les fera forcément réfléchir sur la destinée de l’encadrement. Écrire au journal, qui transmettra ! C. Dumas Délégué administratif CFE-CGC AED

Septembre / octobre 2014 • n°348 Directeur de la publication : Bernard Valette Coordinateur de la rédaction : Daniel Verdy Ont participé à la rédaction : F. La Roche, L. Kempf, C. Viguier, C. Dumas, M. Legrand Crédits photos : © Thinkstock Bref Aéro est une publication bimestrielle de la CFE-CGC AED - 66, rue des Binelles 92310 Sèvres contact@snctaa.fr Rédaction, conception, réalisation : Agence L’œil et la plume - www.loeiletlaplume.com Impression : Imprimerie La Centrale de Lens Dépôt légal : octobre 2014 - ISNN : 0293-8251 - CPPAP : 0114S 08080


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