Le p'tit Buvard #7

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‘ ramène ta paume ‘

Le p’tit Buvard Journal étudiant littéraire et créatif de la faculté du Mirail

#7 Déc. 2011 — édition #7 Journal mensuel gratuit


couverture Photographie de

sommaire

Laura Mélot

Le p’tit Buvard #7 Décembre 2011 - 03

édito

...à voir

04 - 05

société ‘Psychiatrie : la vérité sur les abus’

par Jordy Dodum

...à lire

nouvelle ’De Dos’ par Nicolas Pleyell texte ’Penser cohérent rationel’ par J. Demoncu texte ’Miroir miroir’ par Joelle Daventure dossier littérature ’Loïc Lorent’ par Arno Richet : interview ‘Portrait d’auteur’ critique ‘Nonoland’ (premier ouvrage) texte ’Profitez’ de Ja Dis BD ‘à, à, à...’ par Saki et Romain Pujol texte ‘Trois hommes’ par Jaspire Delor

...à faire

spécial Noël ‘Lettre au Père Noël‘ par Nono photo de Laura Mélot illustration ‘Monsieur Renard‘ par Elke Foltz programme de la M.I.E. — Déc. 2011 recettes Menu spécial Noël blagues par Yajirobé et Jassassine Dugland

remerciements

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Directeurs de publication : Julie Dagut et Arno Richet Création graphique : Marina Costanzo — http://marina.costanzo.free.fr/ Impression : imprimerie de l’Université Toulouse II — Le Mirail


3 édito

#7

édit

ion

Vive le vent d'opposition

l

e monde est en feu Et dans le grand bûcher de l’existence Bien malin qui tient le tisonnier.

On ne le dira jamais assez : exprimez-vous ! La création n’est pas chose aisée, d’aucuns s’y sont essayés En y laissant, parfois, leur tête. Galilée l’incompris, Sade le fou, Zola le juste, Camus le sage Et bien d’autres marchèrent hors des sentiers battus. Libertaires, contestataires, objecteurs de conscience, chacun est en droit de choisir son destin. Vous l’avez compris, dans ce numéro nous ferons l’apologie de la fronde, des rameurs à contre-courant Car il n’y a d’ordre établit que celui qu’on s’impose.

La Direction


4 ...à voir

société

‘Psychiatrie : La vérité sur des abus’ — Présentation du documentaire par Jordy Dodum

Stabilisateur d’humeur, prozac, ritaline, lamental,… Après une longue tradition Freudienne, la France passe désormais à une psychiatrie automatique avec son catalogue de symptômes répertoriés, informatisables, correspondant chacun à une combinaison médicamenteuse. Dépression, stress, trouble de l’anxiété, trouble bipolaire, trouble du déficit de l’attention (TDA), … toutes les raisons sont bonnes pour avoir droit à sa pilule magique. Plus question d’écouter les méandres de son patient pendant des heures, voire des années, la prescription de psychotropes est plus rapide, plus rentable et surtout, aussi adictive que l’héroïne ou la mésenphétamine. La France est actuellement le premier consommateur de psychotropes avec cinq millions de personnes dont plus de cent vingt milles enfants et adolescents sous pilules. Mais dans cette course au bien être, les résultats sont-ils à la hauteur de nos espérances ?

Au menu de ce reportage édifiant : > Les origines de la psychiatrie sur coulis de tortures prescrites par les pères fondateurs (Rush et les saignées, Cotton et l’ablation, Wundt et son dressage d’humains, Pavlov et ces enfants aux joues percées, Watson et l’abattoir, Skinner et sa fille en cage,…). > La psychiatrie à l’origine du racisme et des

génocides avec Galton, psychologue fondateur du mouvement eugéniste, Grant et sa disparition de la grande race, Rudin ou comment passer de la stérilisation aux meurtres des malades mentaux, retardés et autres indésirables, Rush et la négritude, maladie contagieuse ou encore Cartwright et la drapetomania, trouble mental des noirs qui désirent s’échapper de l’esclavage. > La destruction du cerveau en guise de traitement miracle avec les injections de métrasole, les chocs électriques, la percée de crâne avec alcool, la lobotomie de Walter Freeman, avec la tactique du pic à glace dans l’œil et sa lobotomobile, la thorazine ou comment rendre la lobotomie plus propre, et ces effets secondaires : diskinésie tardive, contraction, sursaut incontrôlé, lésions au cerveau, extrême agita-


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tion, akathisie, envie de sortir de sa peau, personnalité qui change, dépression, violence, tentatives de suicides, meurtres ...

difficile». Ayman Al, auteur de «La Psychiatrie Coercitive» ou comment rendre la population manipulable.

> La tentative de procès de la FDA (Food And Drug administration), soutenues et financées par les industries pharmaceutiques, au même titre que la majorité des psychiatres qui témoignent. L’alliance immorale entre les trois et leur verdict en faveur des antidépresseurs.

> Digestif/bilan : zéro guérisons, mais une compotée de morts.

> L’utilisation de la force ou comment interner des gens contre leur grès avec l’internement d’office, l’administration de psychotropes sans l’avis du patient, la violence du personnel dans les hôpitaux psychiatriques destinées aux personnes couvertes par les meilleures assurances. > Cerise sur le gâteau : le DSM, escroquerie chaque fois plus grosse, et manuel soi disant scientifique, regroupant l’ensemble des troubles mentaux accompagnée de sa ratatouille de diagnostiques et de prescriptions votées à l’amiable par les psychiatres. > Le complot de la psychiatrie avec le colonel Rees, éminent psychiatre anglais au conseil de l’hygiène mentale, et son programme pour les 60 prochains années : s’ «infiltrer dans chaque activité éducative, tout les secteurs, public, politique et industriel doivent être sous notre influence : l’enseignement et l’église pour les plus facile la loi et la médecine pour les plus

~ «Psychiatrie : la vérité sur ses abus» est un documentaire réalisé par la Commission des citoyens pour les droits de l’homme (CCDH). Le but de cette association indépendante est d’exposer les violations des droits de l’homme commises en psychiatrie et d’assainir le domaine de la santé mentale. Aujourd’hui, son influence s’exerce dans le monde entier et à permis d’améliorer la condition des patients.

Reportage à voir sur : http://www.youtube.com/ watch?v=-lVVR0kh_SY&feature=related

« ramenez vos paumes W» Envoyez-nous vos œuvres : leptitbuvard@gmail.com


6 ...à lire

‘De Dos’ Par Nicolas Pleyell — épisode 3 (suite et fin)

B

ubuco, je voyais plus que lui. Sa bosse elle redescendait depuis qu’il avait arrêté de boire. C’était par choix, c’était étrange. Les infirmières même, elles lui glissaient des bouteilles en dessous du lit, lui servaient du vin à midi, mais il buvait rien. Il me disait pas pourquoi mais, il me posait plutôt des questions. Ce que je voulais faire plus tard, quand je serais guéri. Si j’avais connu l’amour, si j’avais eu une enfance difficile, pourquoi j’avais eu mon mal de dos. Mais je voulais rien lui dire, juste lui prendre ses bouteilles. Un jour d’été indien, il vint me voir pour se confier. Il me dit qu’il mourrait sûrement avant d’être guéri, alors il voulait faire confesse. Je lui ai dit «D’accord mais contre trois litres de rouge». Il partit vexé, tant pis. Le lendemain, j’eus de nouveau la visite du médecin et de son jeune architecte, petite raclure menaçante qui cette fois-ci prit les mesures de ma bosse. C’était pour le dosage des médocs apparemment. Je m’en foutais. J’étais bien, heureux, sans soucis, je me couvais moi-même, j’avais évolué. Le soir de nouveau, Bubuco se ramena mais avec les trois bouteilles cette fois et les posa sur mon lit. Je dis rien, dégoupillai et commençai à boire. Son visage était toujours aussi dévasté par la fatigue, mais il avait presque plus sa bosse. Ses petits yeux noirs brillaient quelque peu, je trouvais ça intriguant. Les poils de sa barbe étaient dressés plus qu’à l’accoutumée, comme s’il avait la chair de poule en permanence. Il me fixa et me dit : « bois et écoute » ; je prêtai oreille : – La vie tu vois c’est quelque chose de fou, que

nouvelle

toi et moi on peut pas affronter, mais y’a des choses importantes, c’est les valeurs. Alors tu vois les valeurs… « Au non, pas ça » je me disais. Pas de la morale, pas venant de lui. Je tolère les vieux sages, mais pour moi un vieil homme n’est pas forcément un sage, ça peut être un vieux con ordinaire. Bubuco c’est un vieil ivrogne qui a dû ratisser pas mal de bars et pas mal de coins sales, il devait vivre la nuit, j’ai du mal à l’imaginer le jour. D’ailleurs, Bubuco c’est quoi au final ? – Bubuco, chut ! Tais-toi maintenant, je m’en fous de ta leçon de morale à deux balles, je lui ai dit en le stoppant dans son élan. Qu…Quoi ? dit-il surpris et abasourdis, coupé en plein dans ses idées. Comment t’ose gamin, tu veux te battre ? Tu veux mon poing dans ta petite gueule de merdeux ? Oh, je te parle ! Du calme Bubu, t’enflamme pas. Seulement, arrête un peu le vin et ton petit discours qui sert à rien ; raconte moi ta vie plutôt, c’est mieux, plus franc et c’est plus sure. Ma vie ? Moi ça m’intéressera beaucoup plus que ta pseudo sagesse. Bah qu’est ce que tu veux que je te dise ? Je sais pas moi, des choses sur toi, des souvenirs, tes goûts…Merde, quoi ! Tiens, c’est quoi ta couleur préférée ? C’est quoi ma…? C’est quoi cette question pourrie ? C’est pour débuter crétin, pour t’apprivoiser. Réponds, sinon j’appelle le gardien pour qu’il te vire. Bah je sais pas moi bordel ! Mais bon dieu, t’es complètement pété ou quoi ? Je sais pas, t’as pas un souvenir agréable, un objet précieux en tête, un truc qui rassure sur lequel une couleur se pose direct dans ton esprit. Tu connais pas ça ?


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J’ai trop bu je crois… Allez Bubu, pitié...Sinon j’appelle, dernier avertissement. Non, non arrête ! Bon…T’es pas bien toi hein… Je sais pas moi. Un souvenir. Aller mon vieux, fais un effort. Il ne dit rien durant un petit moment. Je lui confisquai sa bouteille, et buvais la mienne devant ses yeux, pour lui faire venir un peu de rage, le faire revenir à des idées saines. Enfin, ça lui vint. – T’es vraiment chiant bonhomme…C’était quand j’étais gosse. Ça commence déjà mieux. Y’avait l’automne qu’était déjà tombé sur le domaine, le labyrinthe de haies était la seule chose encore verte de tout le jardin. Le reste était rouge, marron, orange ; à cause des feuilles mortes sur le sol et de l’herbe qui crevait à petit feu. Attends ! T’avais un domaine ? Oui ignare, enfin non il était à mes parents, j’y ai vécu que dans ma jeunesse. Je viens d’une grande famille à la base, mais bon, l’allure et moi ça fait dix… J’en reviens pas… Ouai, enfin on s’en fout. C’était donc l’automne, et je finissais durant l’après-midi, sur le bord de la terrasse qui donnait sur le jardin, un livre de O’Glann, un écrivain irlandais que tu connais sûrement pas. Il parlait de la beauté. C’est le seul passage que j’ai retenu d’un livre dans toute ma vie. De toute façon j’ai moins lu après être parti de chez moi, c’était plus que des écrits bien dégueulasses après, des recueils de polaks vicieux, des nouvelles gores, des râpes à fromage qui te rayent la patte et t’émiette la cervelle. Bref, de la littérature pas nette, qui te conforte dans ta crasse ; ça rassure quand t’écume le glauque, faute d’argent. Tu te sens romancer. Fin, on s’en fout. Tiens d’ailleurs,

j’dois gerber. Il alla vomir à la fenêtre, sans faire trop de bruits, on voyait l’expert. Il se rassit comme si de rien n’était, il avait bien raison ; ce genre de choses me choquait plus. – Donc, qu’est-ce que je disais… La beauté. Ah oui ! Bah tu vois, en gros…Putain, j’ai mal au bide, je sais pas si c’est du jus de chaton qu’ils ont foutu dans la vinasse mais ça me gratte jusque dans la gorge. Bon, je finis et je me casse, j’me sens pas très bien. D’accord, mais fini bordel. Bon, alors…Oui, dans le livre, ça disait un truc comme quoi, la beauté était bien supérieure à l’esprit, à la morale, au courage, car elle les faisait s’écrouler chez n’importe quel saligaud qui se présentait à elle ; un truc comme ça. Elle se suffisait à elle-même, tu vois ? Et celle ou celui qui la portait n’avait à faire aucun effort vers les autres, aucunes tentatives intellectuelles pour épater la galerie, non, il devait juste se présentait et se laissait regarder. Alors tout le monde l’aimait. Rien ni rien ne pouvait l’ébranler, la beauté c’était le pouvoir, la grandeur, et tout ça dès la naissance. Un don, qu’on peut pas contester, nous autres, connaissances de la reine beauté ; quand on a encore la chance de la rencontrer. Eh bien tu vois, ma mère avait invité la femme d’un baron cet après-midi. Elle était très belle, en tout cas c’est l’impression qu’elle m’a laissé. Son visage, je pourrais pas le décrire, je me souviens juste de cheveux bruns qui tournicotait près de ses oreilles, comme des attrape-mouches. Des attrape-mouches ? Ouai, l’image est pas belle, mais tu vois l’idée. Puis, je suis pas poète. Enfin ça, et ça robe bleu. Marine sur le bas, et plus clair vers le haut, comme le ciel d’hier après-midi tu vois ? Cette robe, c’est la seule chose dont je me souvienne vraiment.


‘De Dos’

Par Nicolas Pleyell — épisode 3 (suite)

D’accord. Elle trônait donc là, je la regardais en même temps que je finissais mon passage sur la beauté de O’Glann. La baronne illustrait ce qu’écrivait l’autre, je me disais que c’était vrai ce qu’était écrit, que je pouvais que l’admirer, qu’elle serait toujours supérieure à moi cette femme, c’était naturel. Bah, sous mes yeux, la baronne qui se promenait dans le jardin avec ma mère, glissa sur le tapis des feuilles multicolores. Elle se prit une de ces gamelles ! Comme une crotte, comme un baril qui échappe à la pince d’un chalutier, comme un cheval qui se mange une barre de parcours ! Tu vois l’truc ? Ouai, que je disais, en le regardant rigoler du fond de son ventre, d’un rire bien rauque, très barbu. Toute la noblesse qu’est tombée avec ! Ah ah ! Bah écoute, ça m’a fait deux révélations, et c’est ça qui fait que je m’en souviens. La beauté, ça peut se ridiculiser, c’est la seule manière de la mettre à tes pieds. Et pan ! La seconde chose, c’est qu’elle se met à ton niveau comme ça, qu’elle rejoint la bande de potes du monde entier. Je la trouvais plus belle la baronne, plus du tout, trop de ridicule en fait, mais j’étais amoureux. Enfin amoureux non, j’étais… Attends…Attendris, voilà ! Ce truc, ça m’a marqué n’empêche. Bah tu vois que t’as des sentiments et des choses à raconter mon bubu. Et la couleur dans tout ça, hein ? Heu…Bah toutes celles que j’ai dit, comme ça t’arrêtera de me faire chier. Plus précis, merde Bubu ! …Entre le vert et bleu alors ma couleur. Quoi ? Bon je vais y aller, j’dois faire un tour aux toilettes là. Juste, une question. Comment t’en est arrivé là ? Je veux dire, sans un rond, alcoolo, seul ?

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Bah, j’ai préféré la liberté, j’ai eu des couilles gamin. Je suis parti vers vingt piges de chez moi, et voilà. Sinon, j’aurais dû reprendre l’affaire de mon père, et puis j’aimais pas les gens de ce milieu. Personne d’autres ne se vautrait par terre comme la baronne, c’était pas marrant. Je me sentais loin du dehors, parce que je m’ennuyais je pense...C’est tout. Et tu regrettes pas ? Non, j’ai eu des couilles, c’est ça le principal, finit-il. Il partit en titubant et en se massant le ventre.

Quelque chose me titilla la gorge et le silence d’après son départ laissa des échos bizarres dans mes écoutilles. Je bus pour enlever le gratis de ma glotte et faire taire ce silence assourdissant. Bubuco mourut dans ses toilettes une semaine plus tard, d’une crise cardiaque, le dos plat. Ma bosse, elle continuait de grandir, mais j’y pensais plus, j’avais plus mal. C’était le médecin et son jeune architecte qui pensaient pour moi, c’était encore mieux, j’avais même plus d’âme pour souffrir ou me préoccuper, j’étais pris en charge pour tout, j’avais même plus besoin d’être aimé. C’était la grande vie. Le temps s’écoula, du moins c’est le souvenir que j’en gardai, et l’on vint me chercher un jour. C’était le médecin et le jeune architecte pour m’emmener au bloc. Je me souviens plus très bien non plus. Juste le regard désolé de l’infirmière dont on s’était moqué avec Criqua. Elle eu le teint, d’ordinaire coloré, très pâle lorsqu’elle me vit sur mon brancard traverser le couloir, ressemblant à un gâteau de mariage avec grande bosse pointant vers le haut. Ce couloir tiède et gargouillant, à l’air liquide, aux murs spongieux, sorte d’atmosphère tropicale; me rappela le premier jour où j’étais arrivé. Le premier jour,


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mais y’avait bien eu quelque chose avant ? Quoi...quoi...c’était quoi déjà...L’infirmière me regardait toujours, et quand enfin j’entrai dans la salle d’opération, tout devint sombre autour de ma personne et dans le couloir, juste au fond, son gros corps était encore un peu lumineux, une grosse luciole mal dans ses bottes. Le médecin et l’architecte lui tâtèrent la colonne vertébrale, les côtes, le bas du dos, les épaules. De son crayon l’architecte dessinait des lignes, des chiffres et des courbes, et son ami le médecin y regardait ensuite, comme voulant se donner le rôle de celui dont on doit attendre l’approbation. Notre ami dormait évidemment à ce moment-là, c’est bien pour cela qu’il m’a demandé de vous raconter ce passage. – C’est bien de la corne maintenant, doc ? – Oui effectivement. Avec tout les médicaments qu’il a pris, et le traitement que nous allons lui faire passer par la suite, ce sera de la pierre, de la belle et solide pierre. Aussi pure et dure que celles façonnée par le temps, aussi silencieuse et durable que celle des grands temples de jadis. – Parfait, c’est qu’il en manque de plus en plus. – Ne vous inquiétez pas jeune homme, avec la venue de l’hiver, on en a toujours plus. – Je vous fais confiance, vous êtes un client de qualité, qui sait tenir ses engagements. – C’est l’honneur mon cher, l’honneur qui porte l’homme à se dépasser, à être droit et consciencieux dans ce qu’il fait. – Oui parfait, parfait. Nous nous reverrons donc dans deux jours, n’est-ce pas ? – C’est cela. Je vous dis donc à dans deux jours. Adieu. Ils se quittèrent sur ces mots, l’architecte le nez dans ses papiers, ses fiches de calculs, ses croquis; le médecin une main dans sa poche,

l’autre dans le dos. Ce qu’il se passe ensuite ne peut être écrit car rien ne vous semblerez aussi faussement vrai. Et je vous respecte trop pour cela. Ils se quittèrent sur ces mots, l’architecte le nez dans ses papiers, ses fiches de calculs, ses croquis ; le médecin les mains dans les seringues, les pilules, les outils. Ce qu’il se passe ensuite ne peut être écrit car rien ne vous semblerait aussi faussement vrai. Et je vous respecte trop pour cela. Aujourd’hui je soutiens dans la rue Valiant tout le poids du pilier gauche de l’hôtel Magélan. Je suis juste à côté d’une superbe statue d’éphèbe et me trouve bien à ma place, tout en pierre avec ma belle bosse pour soutenir l’édifice. Je me suis réveillé ici, un matin. Mon dos a l’air d’un bloc, je pense qu’on l’a taillé ainsi, et le reste de mon corps est tout en dessous. Je peux plus bouger évidemment, et je regarde les pieds des passants, les personnes s’appuient contre moi la nuit, les chiens font leurs besoins sur mes pieds. C’est ainsi, et puis que voulez-vous, je regrette rien. C’est pas ma faute merde ! Je peux plus bouger je sais, je vais devenir fou je sais, je suis emprisonné ici pour toujours je sais. J’aurais du faire quoi ? Me battre ? Pour quoi ? Vivre ? Pour quoi ? Baiser ? Je l’ai déjà fait, avec toutes sortes de femmes, et pardonnezmoi, mais ya rien qui change. Manger ? Faut de l’argent pour ça, pour bien manger, sinon on a de la bouse tous les midis. Boire ? A force de me saouler, ça m’faisait plus rien du tout, et puis j’ai usé le capital «alcoolique romantique», j’arrivais même plus à me faire pitié moi-même. Travailler ? Pour avoir un chef miteux qui me les casse chaque matin, ou monter une affaire qui échouerait sans doute ? Partir ? Mais où ? C’est partout pareil, le mal est partout, les cons vous suivent, vous vous suivez, la solitude s’em-


‘De Dos’

Par Nicolas Pleyell — épisode 3 (fin)

barque toujours avec vous. Non désolé, j’étais faible, un vrai de vrai, de ceux qu’on peut pas plaindre car ils ont eu la même chance que d’autres. On a raté, comme beaucoup, c’est de notre faute. Fini, c’est comme ça. C’est ma faute, on va pas crée un ministère pour ça aussi, alors bon. Et après tout je suis bien ici. Je sers à quelque chose, et puis qui pleurerait sur moi pour que je m’en sorte ? Personne. Au mieux on m’aurait plaint, puis au revoir, chacun sa vie. Je comprends, je ferais pareil. Non mais je suis content, vraiment. J’ai une place. On me regarde plus, je suis anonyme et me trouve très bien ainsi. Oui. Je me souviens d’ailleurs plus d’où mon mal de dos est venu. C’était certainement pas grave, et même si ça l’était, quelle importance ? J’avais jamais été mieux loti qu’à l’hôpital Dadart. Et puis j’y ai été au chaud...il faisait trop froid dehors. Une nuit, alors qu’un gosse dormait derrière moi, je me suis dit une chose. Peut-être juste, j’aurais aimé qu’on me regarde au fond de mes yeux, que je sache si j’avais de l’émotion dedans, si j’aurais pu émouvoir. Oui juste ça, me dire que j’étais un sensible et que c’est pour ça que j’ai tout raté. Que j’avais un truc en moi, de quoi inspirer un artiste ou une femme. Me retrouver dans un film ou dans un livre, pour toucher quelqu’un. Avoir une aura malgré moi. Etre une réalité, entourée de mystérieux, de mystique, de l’erreur que tout le monde fuit, être une dure réalité, mais poétique. Ça ouais, j’aimerais.

– Fin.

«Éditions Hors Limite»

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11 "J'ai postulé à l'AFEV"

‘PENSER COHÉRENT RATIONNEL’ Par Jacqueline Demoncu Voila j'me lance, mon nouveau projet de vie : une mission au service civique ! Je sais plus comment ca m'a pris, en fait si, mais l'intérêt n'est pas la. Je veux faire quelque chose de concret, pour trouver un sens à la vie. Je veux aider. Je crois que c'est ma vocation. Je connais un peu le système éducatif, et suis déjà révoltée contre lui. Je ne comprends pas comment en tant que très bonne élève, je suis passée à élève très moyenne au collège pour finir par arrêter les cours en première, au lycée. Je ne comprends pas comment l'école peut être autant ragoûtante, au point de faire une croix sur toute instruction, et par la, tout avenir professionnel. Les profs sont nuls, le système méritocratique est nul, les élèves ne sont pas traités individuellement, on est quarante par classe, les plus mauvais au fond. On les laisse couler dans leur papotage, voyant que de toute façon, c'est hors compétence. Il faudrait des ateliers d'aide, le prof n'a pas le temps. Il ne peut pas faire des cours à la carte. Il ne peut pas prendre sur son week-end pour aider chacun d'entre nous. Le prof lui aussi a une vie. Alors moi, je veux intervenir à ce niveau la, je veux pouvoir rectifier le tir. Donnez une chance aux plus défavorisés. Aider ceux qui en ont besoin. Ne me contrarier pas, je sais très bien que le système éducatif Français est pourri et pour cause, le nombre de réforme qui vise à ternir la situation. Je me sens impliqué, concernée. Je ne peux expliquer pourquoi mais tout ce que je veux moi, c'est pouvoir aider. Contribuer à l'égalité des chances, noble cause que l'état ne se donne plus la peine de remplir. Alors je trouve que votre association, qui prône à juste titre la mixité sociale et le droit à l'éducation pour tous, la démocratie et pleins d'autres belles valeurs me conviendrait parfaitement. Je me sens complètement en accord avec votre mouvement et il

texte

est vraiment important pour moi, pour me sentir vivre, pour me sentir utile, de pouvoir contribuer à ce vaste projet. Réponse de l'institution, trois mois plus tard, et je suis recalée. Je demande à la femme pourquoi ? – " Vous êtes trop cool " – " C’est-à-dire cool ? " – " Trop cool " Mais elle sait pas comment l’expliquer. Il m’emmerde tous. J’ai l’impression que les gens s’en foutent. Ils comprennent pas ce que c'est que d'être étudiant, avoir plein de temps libre, et rien à faire. Les plus belles années de la vie, tu parles ! J'crois qu'c'est impossible de se faire autant chiez ! Et parfois je crois qu'on est tous pareils, tous dans le même bateau, qui chavire et s'écroule sur une ile déserte ou il n' y a rien à faire, aucun moyen de gagner d'autres rivages, aucun moyen de faire marche arrière. Juste attendre, attendre que ca passe. Parfois, j'me dis qu'c'est moi qui bugge, que tout les autres ont une vie mieux que la mienne, que j'suis la seule à être perdue, à m'être perdue en cours de route, à plus savoir quoi faire, j'vous parle même pas de l'orientation professionnelle, ou de vie tout court. Alors, quand c'est comme ca, j'prend mes cours d'orientation, insertion professionnelle (ue17 en science de l'éduc) et je relis c'que j'ai écrit. Ça, et le dossier bilan du ministère de l'éducation sur "25 ans de politiques sociales à destination des jeunes". L'orientation est un problème générationnel en France, j'lis l'article sur les jeunes et les études dans le magazine Le Monde, et j'lis "Confessions d'une taupe à pôle emploi", témoignage d'un conseiller d'insertion professionnelle, et l'interview de Gaspard, conseiller mission locale sur le site educ.gouv (pas de pub !) et… J'apprends des trucs, quoi…


12 "J'ai postulé à «8 à Huit»"

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‘MIROIR MIROIR’ Par Joelle Daventure

Enfin, je trouve du travail ! Ca fait au moins un an que je cherche… plus ou moins. Bref ! C'est dans un petit supermarché, commerce de proximité, un Huit-à-huit, place Roquelaine. Je suis heureuse. Je répète aux entrepreneurs le plaisir que c’est de retravailler après une longue période de chômage, mais eux s'en foutent. En fait, ils m’embauchent pour le type qui reprend le magasin, eux, vont s’installer à Argeles. Ils ont le profil. Je commence le lendemain. Le nouveau patron s’appelle Louis et m’a l’air très timide. Il a trente ans et est tout recroquevillé. D'amblé, nous nous tutoyons. Il a travaillé dans ce même magasin quand il était plus jeune et en est maintenant l’heureux gérant. Nos rapports sont de suite sympathiques. Je fais mon travail, il n’est pas sur mon dos et nous nous entendons. Ça fait maintenant un an que je suis caissière et tonnes de gens défilent dans ce magasin : Chantal, ménagère de cinquante, très ouverte niveau vestimentaire, Naïma, sa meilleure amie, assistante maternelle, Cathy, la copine anorexique, et d’autres : le livreur de pain, de légumes, de vin, les habitués, celui avec l’œil dans l’autre sens qui préambule sur la vie, celui avec une énorme cicatrice dans le cou, en arrêt travail depuis un an et demi, celui, propriétaire d'immeubles au Maghreb, qui vole des bouteilles de vin, celui qui se balade avec des milliers de poches de supermarché accroché à son chariot et qui passe une heure dans le magasin à calculer le montant exact de ses achats et à te payer en pièce de deux centimes. Mais jamais il n’acheta de savons.

Celui qui te prend de haut, celle qui est trop basse pour attraper la converse de haricots, celle que son Alzheimer pousse à acheter un kilo de sucre trois fois par jour, celui qui fait tout les jours la même blague pourrie : "combien vous me devez ?", celle que sa famille délaisse et qui veut à tout prix te raconter les cinquantes dernières années de sa vie, celui qui n’a rien, même pas de quoi dormir, le SDF du coin, et qui t’offre pour ton anniversaire un médaillon de la vierge Marie en or avec la chaîne assortie, celle qui connaît la météo de la semaine et te donnent toutes les températures, même celles des autres villes, voire des pays voisins, et la coiffeuse qu’est tellement canon qu’elle te fout des complexes à chaque fois qu'elle passe, l’esthéticienne de la rue à gauche qui mange tout les midis une choco et un bois un coca light pour garder la ligne, l’homme au chien qui reste toute la journée à discuter et à boire des bières, qui a une haleine dégueulasse mais tellement de choses à t'apprendre, et quand vient l’heure de fermer, il attend encore que je nettoie et me raccompagne jusqu’au métro. Et presque tout les bouts de vies sont, dans ma mémoire, gravés… presque tous… faut pas pousser. À tout les clients qui sont passés à ma caisse, je vous dédicace ce poème : Adepte de la charogne encombrée, ami des vieilles mamies grisonnantes et ridées, Amateur de poulpe à la vinasse, inconditionnel de la méduse avariée, Bienvenue au plus grand défilé jamais organisé Popom popom, J’ai nommée : "Le huit à huit et ses clients périmés"


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Bref… Louis veut investir dans un autre " Huit à Huit ", plus grand, rue Gabriel péri. Il me fait muter, laissant derrière nous la deuxième caissière.

Je profite de l'ambiance pour proposer un licenciement à l'amiable avec Louis. C'est ok ! Absence de poste et trois lettres de prévention plus tard, le verdict est tombé : je suis virée ! BREF, j'ai travaillé à "Huit à Huit".

Le nouveau magasin contient un ancien employé. Il est un peu empoté, porté sur la boisson et à ses habitudes, comme de planquer une petite bouteille de porto sous le comptoir. Il est très ami avec tout les SDF du coin et sa copine voit rouge. Elle n’a rien contre eux mais ne supporte plus qu’il traîne. Nous devenons amis. Il est branché culture de cannabis et son appart est un aquarium ennivrant. Le patron a une nouvelle copine : Naïma. Sous ce prétexte, la meuf se permet de me donner des ordres alors qu'elle n'a aucune expérience en matière de vente. Se prend pour ma supérieure et m'insupporte. Ce matin en speed, je récure au balais et serpillière tout le magasin avant l'ouverture. Des trucs à mettre en rayon, les dates à contrôler, un peu de facing, ouverture de la caisse… mais Naïma, point trop stressée, lit son journal. Je passe à côté d'elle, le visage en sueur, lève les yeux vers moi et : – Si tu peux mettre des bières au frais quand t'as fini ? Raaah ! Je lâche un : – Ça va toi ? T’es pas trop fatigué ? Énorme erreur ! La salope s’empresse de trouver le patron, son copain, pour tout lui raconter, sur quoi je dois m’excuser car Naïma fait des heures pour l’aider et qu’elle ne devrai même pas, qu’il ne la paye pas et qu’elle était la plus tôt que moi, et blablablagnagnagna !

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14 littérature

interview

LoÏc Lorent : Portrait d’auteur Nous qui pensions que personne ne survit au Mirail. Un endroit où la fin du cycle universitaire se confond avec l’abyme, où les années passées ne surgissent que des générations plus tard, en vieil atavisme. Nous nous sommes trompés. Loïc Lorent, ancien étudiant de 2003 à 2007, a deux particularités. Celle d’avoir survécu et celle d’être écrivain. Témoignage

Q

uel est ton parcours au Mirail ? Un parcours classique. J’y suis resté quatre ans et en suis parti avec une maîtrise d’histoire. Un coup de cœur pour une matière, un prof, une rencontre ? J’aimai déjà passionnément l’histoire avant d’atterrir au Mirail. Je n’ai pas été déçu. Cette matière y est remarquablement enseignée, par des professeurs qui, généralement, ne se contentent pas de lire leurs fiches – tous ceux qui ont enduré le supplice de la fiche un vendredi matin me comprendront. J’en ai même croisé d’excellents – tout le monde les connaît. Et puis pour non pas une mais des rencontres. C’est même là, avant les cours, ce que je conserve de mes années à l’université – comme la plupart des étudiants, j’espère. On y croise toutes sortes de spécimens. Des bizarres, des guindés, des dépressifs, des boursicoteurs , des hystériques, des qui ne savaient pas trop pourquoi ils étaient là et d’autres qui ne le savaient que trop, des aimables, des perchés, des obsédés… Certains sont devenus des amis,

que la vie s’est chargée ensuite de trier – parfois, elle s’est trompée. Une pensée aussi pour le Foyer de l’UFR d’histoire au café ouateux et une autre pour la sociologie qui m’a connu une heure. Raconte-nous la naissance de ton premier roman, «Nonoland», que tu as publié en étant encore étudiant ? Sa genèse est compliquée. J’ai composé une première mouture de ce roman (c’était alors davantage une nouvelle) en 2004. Puis je l’ai reprise et augmentée un an plus tard. En 2006, j’ai présenté le manuscrit à un éditeur. Il a dit oui, on a bu un verre (dans cet ordre-là, c’est important), et Nonoland est sorti en 2007. Après «Nonoland», tu as écrit «Votre Jeunesse» et «Vous aurez la guerre». Quelles sont les grandes lignes de ces deux essais ? «Votre Jeunesse» est né en réaction à une situation que je jugeai absurde, à savoir le blocage des universités de 2006 (le désormais célèbre CPE). Il s’agit d’un pamphlet. Pendant des


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semaines, à l’instar de milliers d’étudiants qui n’avaient rien demandé, j’ai dû endurer d’interminables philippiques antigouvernementales, des exposés sur le fascisme, le racisme, le sionisme, le sexisme – je n’aime pas les mots en –isme , j’ai vu une université se transformer en tribune pour des « étudiants engagés », c’està-dire d’extrême-centre-gauche. Dans «Votre Jeunesse», je raconte comment un groupe de gens trop sérieux s’empare aussi facilement d’une université. Je continue de penser que la politique n’a rien à y faire. «Vous aurez la guerre» est un essai, certes un peu virulent, consacré au pacifisme. J’essaie d’expliquer pourquoi les élites françaises – et anglaises – ont embrassé ce dogme après la fin de la Grande Guerre et comment il leur a été fatal à Munich à une époque où, c’est du moins ma conviction profonde, l’Allemagne nazie aurait pu être écrasée (nous n’étions pas prêts, mais eux non plus). Plus largement, sur un temps plus long, c’est une critique d’un idéal qui, à bien des égards, se confond avec la fin de l’histoire, laquelle est l’autre nom du triomphe du marché. La négation de la conflictualité, c’est la mort du politique. Tes publications s’inscrivent dans la littérature contestataire. As-tu des références ? L’exploitation publicitaire de tout, y compris ce qui survit – ou s’enrichit, ce qui est toutefois plus rare – à la marge, fait que je suis peu à l’aise avec ces étiquettes – contestataire, subversif, rebelle, etc. Je te mets au défi de ne pas trouver dix artistes « subversifs » en une semaine de lecture de tes magazines préférés. Du coup… Ces dernières années, l’œuvre la plus authen-

tiquement contestataire, c’est celle de Philippe Muray. Un mot sur Bukowski ? (On l’aime bien à la rédaction) J’ai lu mes premiers Bukowski il n’y a pas si longtemps («Pulp» et «Journal d’un vieux dégueulasse»). C’est insuffisant pour en dire plus qu’un mot. Alors le mien sera le suivant : pamplemousse. Sinon, ça ne m’a pas bouleversé. J’ai bien peur que l’homme soit plus intéressant que l’auteur… Mais puisque la rédaction aime, je promets d’insister. Quels sont tes projets d’écriture pour les années à venir ? Je me méfie beaucoup des projets en général. C’est comme les principes : on en a que pour les trahir. Cependant, j’ai bien quelques idées… De romans d’abord. D’essais ensuite. Puis, l’apocalypse approchant, j’écrirai mes Mémoires. Ou un recueil de poèmes bucoliques, du genre «Papillons et coquelicots». On te laisse quelques lignes pour t’exprimer librement sur ta passion qu’est l’écriture … Écrire, parfois, c’est comme faire l’amour avec Alison Mosshart en écoutant «Venus In Furs» du Velvet ou «Under Your Spell» de Desire, et parfois, c’est comme un arrêt d’une heure en gare de Vierzon. Par Arno Richet.

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16 littérature

critique

LoÏc Lorent :

‘Nonoland’ — Premier Roman de l’auteur.

J

etez vos cartables. Ce soir, on fait l’école buissonnière ! Avec son roman, «Nonoland», Loïc Lorent nous emmène au bout du chemin, dans son maquis. Armé de sa prose efficace et frénétique, il invite à une réflexion sur l’aventure française de la seconde guerre mondiale. Autant vous dire, ça tache. Une boucherie héroïque que même Candide n’aurait pût imaginer. Tout y passe ; communistes, capitalistes, cathos, crypto-cathos, anticléricaux, Boches, non-Boches, la Milice, la bureaucratie, l’amour, la haine, la liste est encore longue …. Mais son vrai cheval de bataille, la Résistance . La Résistance, un idéal franco-français claironné par toute la clique bien-pensante. Pour cela, «Nonoland» est un scoop. Et si ce n’était pas aussi simple que cela ? S’il n’y avait pas que le bon grain et l’ivraie. En temps de guerre, qu’importe les valeurs pourvu que chacun puisse donner son corps à la Patrie. Loïc Lorent explique pourquoi la baguette française a mauvais goût. Très bien documenté, il assène avec brio des claques de lucidité . Le livre noir de la Résistance. Lorsque l’historien est fatigué, le romancier prend le relais. On aperçoit alors quelques déséquilibres, dans la syntaxe, le

phrasé. L’impression que l’auteur observe l’Histoire, comme l’enfant se masturbant par le petit trou de la serrure . Mais est-ce bien condamnable ? Lorsque le roman dépasse la fiction, révise nos certitudes, qui pour ne pas s’exalter ? «Nonoland» est un magnifique roman. Une histoire. Plus qu’un regard sur le passé, c’est un appel à la liberté. La liberté de croire et de penser. Balayer les moutons de panurge . Loïc Lorent peint la France jeune, belle et sensible, mais il peint au couteau. "Nonoland" de Loïc Lorent Éditions Jean-Paul Bayol, 2007 Par Arno Richet.


17 texte

‘Profitez’ De Ja Dis

Et chaque repas, anniversaire ou autre regroupement familial est l' occasion immanquable pour Mamie de nous rabacher : – Mais vous êtes jeunes ! Profitez tant que vous êtes jeunes ! Mais ca veut dire quoi ca, à la fin, BORDEL ! – Bé faire des expériences, j'sais pas... Faire des expériences ? C.A.D. ? Faire des expériences ? Transcendantes ? Hallucinatoires ? Sexuelles ? Scientifiques ? Genre : faire tenir trente euros en pièce de deux centimes dans un verre d'eau rempli sans que ca déborde, c'est valable comme expérience ? Quant à rencontrer des gens, autant dire nourrir des relations de sourires étriqués pincés ou dégueulés, rire à des blagues salaces et aux propos machistes de bipèdes galvaudés et imbus qui font tenir l'ensemble de leur potentiel dans un vieux caleçon, ou encore se comparer à d’autres vies et envier tout ce que l’on a pas, et que l’autre a, c'est bien connu, en passant par la paire de loche la plus grosse, la meilleure coupe, la meilleure croupe, les meilleurs fringues, la meilleure situation, le meilleur revenu, l'appart le mieux placé, le moins cher, le meilleur supermarché, la meilleure marque de spaghetti, PUTAIN !

Parce que c’est-ce qui se passe ! On n'arrête pas de se comparer, de se comporter comme des êtres en manque de tout, des êtres fourbes et fou, et mou, des menteurs chevronnés qui casse le sucre dès le dos tourné ! Et on veut tout ! Tout, juste tout ! – Alors, moi, je cherche un mec grand, musclé, beau, intelligent, drôle, avec une bonne situation, de l'argent, indépendant, mais qu'il m'envoie des textos tout les soirs, qu'il soit pas trop collant mais qu'il me montre tout les jours qu'il m'aime, non pas en le disant, c'est trop facile, non, que ses actes le prouvent, qu'il m'offre des fleurs, qu'il soit disponible, qu'il m'écoute quand je parle, ne se vexe pas quand je ne l'écoute pas, qu'il me guide sans me conseiller, qu'il soit mature mais qu'il aime s'amuser, qu'il ai des potes mais qu'il les voit pas trop, blablablaaaah ! Moi je veux tout ! Et je veux que les gens croient que je suis parfaite mais qu'ils ne me privent pas de ma liberté de ne pas l'être ! Comprenne rien… Et compare leurs vies à d'autre ne se prononçant que par : c’est mieux, c’est pire, c’est équivalent, à ce que je vis, vois, rêve, réalise, pense, etc.… et tout ces gens veulent être les mêmes, ils veulent tous ressembler à c'qui s'voit sur les chaines, des chiennes des clips télés à celles que Dorcel parraine, leurs tailles de seins et d'cervelles calqués sur un barême… à l'effigie des stéréotypes commandités par les pouvoirs, apologie d'une démence passagère… circulez y a rien à voir !

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‘à, à, à...’ Scénario : Romain Pujol / Dessin : Saki Un petit avant goût du Nouvel an !

http://dailyrarium.over-blog.com/

BD


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‘Trois hommes’

poème

Par jaspire delor

Rien n'a changé, rien à envier, t'facon tout les jours, c'est les mêmes, Son faux costume, sa fausse valise, dans laquelle il cache ses cernes, Il sort ventre vide et marche le long des rues, Personne dehors, tout est si calme, mis à part les freins des voitures… Arrêt st lus, sortie, il r'monte sur la chaussée, Il arrive devant la place et s'cale sur l'escalier, Bientôt midi et demi, l'heure du classique coup d'fil d'sa femme Qui elle croit qu'il travaille pendant personne ne voit c'qui s'trame. Ca fait bientôt dix mois qu'ca dure et personne n'a compris : Pendant qu'il fait la manche, le reste du monde poursuit sa vie, Nourrir une bouche de plus c'mois ci mais plus une tune, Au bord du burning out, un type débarque lui met une prune… C'type a à peine quinze ans mais dans ces yeux déjà la haine, Lui-même ne comprend pas pourquoi mais sait juste qu'elle l'imprègne, Désigné comme violent, c'est aujourd'hui qu's'passe son jugement, Vont ils le laisser à sa mère ou au système incompétent ? Il aurait du être à l'école mais la il traîne dehors, T'façon ca changera quoi ? Étude ou pas, l' issue est la mort, Il s'dit que quitte à l' être autant l'être avec d'autre, Donc il repère un type sur l'escalier et lui poignarde le torse. Autopsie du cadavre amène aux solutions inadéquates,

A la mémoire de l'abdomen la peine est immédiate, Condamné à six mois pour homicide involontaire : "Levez vous !", un bruit sourd, et c'est sa mère qui s'jette à terre. En souvenir du bon vieux temps, au bout d'shit qu'il a coupé, Passé un stade suivant maintenant c'est l'héro qui le fait planer, C'est l'histoire d'un type seul aux neurones cramées, Affalé sur un pouf dans une pièce sombre, il mate la télé… Les derniers qui sont venu le voir essayaient d'le sortir de la, Mais comme chacun à sa vie, p'tit à p'tit c'est chacun pour soi, Lui a baisser les bras, maintenant il se laisse mourir, N'a plus l'espoir, n'attend même plus que quelqu'un le sauve du pire… C'est la huitième dose qu'il s'injecte qui lui est fatale, Dans son sang se dilue, il pleure, il crie, il d'vient tout pâle, Dans un dernier effort se place en posture fœtale, La il vomit, tousse et s'étouffe dans un joli décor facial… Rien a changé rien à envier t'façon tout les jours c'est les même Leurs faux costume leurs fausse valise dans laquelle ils cachent leurs cernes Ils sont des millions d'absents qui parfois marche sur la même rue Mais aucun bruit dehors on entend rien mis à part les freins des voitures

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20 ...à faire

noël

Lettre au Père Noël

‘SANTA CLAUS, PRIEZ POUR NOUS’ Cher Père Noël, L’an dernier, je t’ai écrit pour montrer tout mon scepticisme quant à ton existence. Depuis, l’eau a coulé sous les ponts. Je ne sais pas si vous captez le satellite en Laponie, laisse-moi te dire alors que l’année 2011 a été difficile. D’aucuns pourraient en témoigner. A tout point de vue, ce n’est pas un petit vent d’hiver qui a soufflé sur les plaines mais un véritable maëlstrom qui s’est abattu sur nos têtes. A ce propos, assure-toi que tes rênes soient bien attelés au chariot cette année. D’abord, on a cru passer entre les gouttes. Les premiers mois auguraient d’une année prometteuse et féconde. Les voyants étaient au vert, la crise était loin, notre chef avait pris les bonnes décisions. Le chef, quel grand homme. Lui aussi est magicien, il peut faire disparaître un euro en le donnant à une banque et en promettant qu’elle lui rendra au double. La vérité, Père Noël, c’est que le lendemain la banque veut le double. Ahhhh, quelle mince affaire ! Je ne vais pas t’embêter plus longtemps avec ça. J’avoue m’y perdre parfois. Mais il me semble opportun de te mettre en garde. Le chef, il te fait concurrence. Si, si. Il distribue lui aussi des cadeaux, fiscaux de surcroît. Bref, on en a vu de toute les couleurs. Et les autres de ne rien faire. Cette année, je le crains, les petits enfants des familles les plus modestes ne croient plus en toi. Lorqu’on entend que Papa au RSA est un cancer pour la société, que Maman aux 35 heures n’est pas assez productive, qui pour espérer un Noël chatoyant et opulent ? Non, Santa, taxe-moi de Cassandre mais j’assure que ta popularité s’estompe comme peau de chagrin. Assez parlé de malheurs ! Dans ce monde en crise, dérégulé, où la Noël sonne à Pâques pour certains et aux calendes pour d’autres, j’aime autant m’attacher au positif. Ouais, je suis sûr que tu nous réserves de bonne choses. Sans faire montre d’optimisme, j’y crois plus que jamais. Il y aura le chapon, le sapin, les boules, la bûche, et tout ce beau monde dansera en psalmodiant du vive-le-vent. Comme cadeau ? Ce que je veux ? Bah, après tout ce que je viens de dire, une immunité diplomatique fera l’affaire ! Par Nono.


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photo : Laura MĂŠlot


Elke Foltz


La M.I.E. — Maison des Initiatives étudiantes

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Programme M.I.e. Décembre 2011 A

art event musique cirque

Jusqu’au vendredi 16 décembre A Exposition photo "Le Chiapas à vu d’œil" Sujet : ateliers de photographie mis en place avec les enfants de l’état de Chiapas (Mexique). Jérémy BERMUDEZ-PARRA ~ A Exposition "Pour les enfants du désert" Projet de solidarité internationale réalisé en août 2011 dans la région de Adrar (désert d’Algérie). Association SIDRA Mercredi 14 à 12h30 Concert des étudiants de la filière musicologie

à l’Arche Tous les mardis entre 12h00 et 14h00 ≈ "Café ou thé" Sur la banque d’accueil de l’Arche offert par l’Afev (Association de la Fondation Étudiante pour la Ville). Tous les mercredis entre 12h30 et 14h00 ≈ Permanence du Collectif "CLITO" Stand d’informations et de discussions sur la contraception, IST-Sida, les rapports sociaux femmes/ hommes, etc. Tous les mercredis de 20h30 à 23h59 Foyer nocturne Initiation, création et développement des arts du cirque. Ouvert à tous les étudiants.


24 menu spécial Noël

recettes

5€

entrée / 4 pers Salade d'endive, poire, roquefort et noix Préparation : 5 min Cuisson : 25 min Ingrédients

Préparation

• 4 belles endives • 100g de roquefort • 2 belles poires • ≈ 10 cerneaux de noix • 10g de beurre • 2 CS de vinaigre de Xérès, de miel liquide, d'huile de noi

1 - Lavez, épluchez et coupez en dés les poires. 2 - Dans une poêle, faites revenir les dés de poire dans le beurre pendant 5 min 3 - Épluchez les endives et coupez-les en fines rondelles. 4 - Mélangez les endives coupées avec le roquefort émietté et les cerneaux de noix concassés. 5 - Faire une vinaigrette avec le vinaigre Xérès, le miel et l'huile de noix. Assaisonnez. > Conseil : Servir en ajoutant les dés de poire au dernier moment.

5€

plat / 2 pers Coquelet aux poires et gingembre Préparation : 20 min Cuisson : 35 min Ingrédients

Préparation

• 1 coquelet • 1 petit-suisse • 2 belles poires • gingembre frais • 1 brin de thym • 15g de beurre

> Préchauffez le four à 210°C 1 - Coupez en petits cubes une des deux poires. Puis dans un bol, mélanger les dés avec du gingembre frais râpé, le thym émietté et le petit suisse. 2 - Fourrez le coquelet de cette farce. Refermez bien l'orifice avec un cure-dent. 3 - Dans un plat allant au four, mettre le coquelet avec l'autre poire coupée en deux. 4 - Enfournez pendant environ 35 min en arrosant de temps en temps avec le jus de cuisson > Conseil : Servir avec un petit vin blanc.


25

4€

/ 12

cake

s

dessert Financiers à la châtaigne

5€

/4p

ers

Préparation : 15 min Cuisson : 30 min

Préparation

Ingrédients

2 - Fouettez le beurre mou avec la crème de marron. Ajoutez les oeufs battus, la farine et la levure. Bien mélanger.

1 - Beurrez des petits moules. Préchauffez le four à 200°C

• 2 oeufs • 100g de sucre • 60g de beurre mou • 140g de crème de marron • 60g de farine • 1 c. à café de levure • 60g de pralin

> Enfournez pour 30 min de cuisson. Sortez du four , laissez reposer 10 min et démoulez.

boisson

Ingrédients

Vin de NoëL Préparation : 10 min Macération : 5 jours Repos : 2 semaines Préparation

3 - Mettre la préparation dans les moules. Saupoudre de pralin.

• 75 cl de vin rouge (Côte du Rhône) • 3 figues sèches • 1 bâton de cannelle • 50g de sucre de canne • Graines de vanille, de poivre noir • 15 amandes et noisettes grillées

1 - Hachez les noisettes et les amandes.

5 jours au sec. Puis filtrez et mettre en bouteille pendant 2 semaines dans un endroit frais et sec.

2 - Rassemblez tout les ingrédients dans un bocal et versez le vin

> Dégustez entre amis froid ou tiède avant et après le repas.

3 - Laissez macérer pendant

> Conseil : Si vous êtes nombreux, multipliez les proportions par deux !


26 blagues

«

Chicanos : 'le desperado' Par Yajirobé et Jassassine Dugland

C'

est l'histoire d'un mexicain, il est dans le bar, il va voir le gérant de l'établissement et il lui dit : "Tu vois, j'te paris trois cent dollars que je met un petit verre sur le comptoir et je pisse dedans et je fais même pas tomber une seule goutte par terre !". Le patron il lui dit d'accord, pas de soucis. Finalement, le gars commence à pisser et en mets partout : sur le comptoir, sur les bouteilles, sur les sièges, et pas une seule goutte dans le verre ! Finalement, le barman il est mort de rire, et il lui demande comme ca, vas y mets trois cents dollars ! Le gars va voir deux potes à lui à la table de billard, et il revient avec trois cent dollars. Le gérant prend l'argent, un peu étonné, et il lui demande : "Pourquoi le gars à la table des bières il t'as passé trois cent dollars ?". Le mexicain lui dit : "T'es sur que tu veux savoir ?". Le gérant lui répond : "Oui". "Et bé tu vois, avec les gars de la table de billard, j'avais parié cinq cent dollars que je pisserai sur ton comptoir et que tu serais mort de rire !!!"

?!

série coin n i o c eux canards sur une mare. Y'en un qui dit à l'autre : ! D"T'as pas vu mon bec ?"

»

L'autre lui répond : "T'as regardé dans le coin ?"

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eux canards sur une mare : Y'en a un qui dit : "Coin coin". Et l'autre : "P'tin, exactement c'que j'allais dire !"

eux canards sur une mare : Y'en a un qui dit : "Coin". Et l'autre : "P'tin, c'qui m'énerves chez toi, c'est que jamais tu finis tes phrases !" « ramenez vos paumes W» Proposez vos blagues : leptitbuvard@gmail.com


remerciements

ipe l’équ e t u o T vard it Bu te ’t p u d ai souh vous de

ses Joyeu ! Fêtes

P

our ce tout dernier numéro de l’année 2011, nous tenons à remercier :

« ramenez vos paumes W» Parce que Le p’tit Buvard ne peut exister sans vous, envoyez-nous vos œuvres : leptitbuvard@gmail.com

ON ze web £ t Retrouvez les éditions précédentes du journal sur : http://marina.costanzo.free.fr/ rubrique ‘Le p’tit Buvard’

Les auteurs et artistes : Textes : Jordy Dodum, Nicolas Pleyelle, Jaspire Delor, J. Demoncu, Joelle Daventure, Arno Richet, Ja Dis Illustrations : Elke Foltz –http://elkefoltz.blogspot.com/ BD : Romain Pujol et Saki Photos : Laura Mélot Blagues : Yajirobé pour son humour subsversif ! (Message de lui : Spéciale casse-dédi aux «truands de la galère, les représentants du ter-ter, qui disent à chaque phrase "nique ta mère" : wesh wesh mon frère !») Et Line pour la faute d'orthographe et la rectification de phrase de dernière minute (les "que l'on") ! Création graphique : Marina Costanzo

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Mais également toutes les personnes que l'on a croisé et qui ont pris la peine de s’intéresser au projet et de faire tourner l’info ! Toutes les personnes qui se sont investies de près ou de loin au projet ! Et surtout : tous les futurs auteurs et artistes qui nous enverrons leurs créations ! Et que l'on attend impatiemment ! Et sans qui nous ne serions rien !

Ils nous soutiennent :

Faites que le p’tit Buvard poursuive son chemin, parce que l'on en a besoin et

ramenez vos paumes !

La Direction.


#7

édition

‘ ramène ta paume ‘

Le p’tit Buvard Journal étudiant littéraire et créatif

Envoyez-nous vos œuvres sur leptitbuvard@ gmail.com

uses e y o J ! Fêtes Décembre 2011 — édition #7 Journal mensuel gratuit


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