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2014

24800 lemagazinequin’enestpasun


Bonne photo / Mikko Lagerstedt


Annee


2o14


Le 24800 débute cette année 2014 avec l’idée que tout est possible. Que des possibles différents ont le droit de cité. Une année qui sera certainement pleine de rumeurs, de tumeurs, d’humeurs et c’est en cette période de début d’année, souvent abruti par notre société de surconsommation, après sa cohorte de stressés du cadeau, cette surenchère permanente où tout s’avale et se recrache le lendemain d’orgies indécentes, que nous vous proposons des pistes ou par exemple l’idée du cadeau que l’on offre, nous rappelle qu’à une époque, nous fûmes plus généreux. Que le don de soi, la gratuité du geste primait sur la valeur marchande. La crise aidant, nos comportements changent. À l’inverse des instances économiques et politiques toujours suspendues au mirage de la croissance, au pseudo-développement durable, s’élèvent partout dans le monde des voix dissidentes pour de nouveaux modèles de société, de nouveaux comportements. Nous tâcherons durant toute cette année de nous en faire l’écho. Vivre mieux avec moins. Vivre plus pour les autres que pour soi, vivre parce que c’est ce que nous savons le mieux faire.


Il vous reste plus de 300 jours avant le fatidique cadeau du 25 décembre. Et si vous décidiez de faire différement! Plongez-vous dans le site de Michel Butor qui vous propose «ses poémes du jour» et vous pourrez alors en partager un ou plusieurs avec ceux que vous aimez et ce tout au long de cette année. http://michel.butor.pagesperso-orange.fr

photo / Mikko Lagerstedt


Lundi j’ai vu le soleil roux caresser les tours et les nuages paupières de briques fondantes dans un halo de beurre noir Mardi j’ai vu fleurs et lichens ouvrir les draps de la clairière frissons de pollen et rosée traversant ornières et flaques Mercredi j’ai vu les coquilles courtiser les feuilles d’érable brûlures des lèvres sylvestres sur les tempes de l’horizon Jeudi le brouillard est tombé le paysage a disparu un cygne d’autrefois oublie les vêtements de son enfance Le vendredi ce fut la neige avec des coulures d’argile stalactites prenant au vol les rayons du printemps prochain Samedi le retour des arbres et le frémissement des sèves résine perlant sur l’écorce avec le réveil des abeilles Dimanche une main s’est tendue pour nous faire franchir le gué le siècle change de couvercle et les sciences de théorie MICHEL BUTOR


LEGOTHEqUE

Voici un moyen plutôt original de posséder des œuvres de grands-maîtres sans pour autant cramer sa belle carte bleue. Une espèce d’art post-beauf, un peu comme la sempiternelle boîte de chocolats ou le 1000 pièces encadrées, mais en plus drôle et ludique. Munissez-vous donc de quelques boîtes de Lego et composez et décomposez à l’envie les tableaux les plus célèbres. Et si l’inspiration vous vient, n’hésitez pas à composer vos propres œuvres. On ne sait jamais un génie sommeille peut-être en vous.

création / marco sodano



BÊTE ET MÉCHANT On mesure assez mal l’influence décisive des programmes de fin d’après-midi concoctés par les diverses chaînes de télé comme M1, TF7, D12 et autres A moins à destination des ménagères de moins de 50 ans. L’idée de refaire sa déco avec des capsules de bières ou de faire goûter sa poêlée de champignons au Carambar rameute un public accroc du, « c’est moi qu’il l’a fait ». Il y a eu un avant « dîner presque parfait » et un après. Concept modélisé, il s’agit de confronter sur une période de 5 jours, plusieurs candidats dans un domaine choisi. « Un dîner presque parfait » pour la bouffe entre amis, « quatre mariages pour une lune de miel » pour le crêpage de robe de mariée, «bienvenue chez nous» pour la plus belle boule de poussière sous le lit ou dernièrement « 24h déco » pour je te refais une déco pourave chez toi. Ces émissions sont l’apanage de la mocheté et de la méchanceté. On joue « stratégique » pour dégommer à tout prix le petit copain, ça, c’est pour la méchanceté, mais surtout, on expose, on revendique le goût de chiottes, ça, c’est pour la bêtise. Pour exemple, je prendrais un épisode de 24 h déco (TF1, le mardi 7 janvier) où Fabienne est chargée de concevoir chez serge une pièce façon « Las Vegas » mais chic, oui, oui, chic. Que voulez-vous, car chez serge la déco de sa maison est chic façon Conforama. Las, le pauvre serge va en prendre plein les yeux avec la déco Bollywood de Fab. En gros une déchetterie qui clignote, un dépotoir de stickers dollars et jetons de casino et déchetterie tout court avec un canapé simili cuir blanc totalement défoncé et bouffé aux mites récupéré sur un trottoir et recouvert d’un tapis de jeu. Découvrant son « paradise » nom donné à sa maison par serge, au bord du gaz et de l’explosion découvrant la new chic déco de Fab, on a qu’une seule envie c’est de passer les candidats et leur univers au napalm. Ces émissions fleurent bon donc le goût de chiottes et cela provoque inévitablement la méchanceté, car on a droit aux commentaires des autres du style, « c’est un suicide décoratif » où « ça lui fait un cul encore plus plus gros » dans les « Reines du shopping ». Tout n’est que piques assassines et levés d’yeux au ciel. La mocheté et la méchanceté, la leur et la nôtre. Pari gagné pour ces chaînes bas de gamme du bourre-paf.

photo / david stewart



allez zou ! Tout créatif qui se respecte veut produire un travail original qui sortira du lot. Cependant bien connaître les tendances et y ajouter votre touche personnelle vous permet de garder une approche fraîche dans votre travail (même si vous n’avez pas quitté le bureau depuis une semaine et que vous n’êtes vous-même pas très frais...). Voici les tendances visuelles incontournables de 2014 et ne vous avisez pas de faire autre chose sous peine d’être disqualifié par vos pairs. Non des fois que vous soyez créatifs!!! À propos des graphistes et des créatifs en général, il est bon de saluer la création d’une fête du graphisme organisée à Paris jusqu’au 18 février. Cette manifestation aura-telle avec le temps pour résultat de redorer l’image de la création graphique ? Il faut l’espérer. Nous verrons, car malheureusement en France cette image est lamentable et la profession en souffre par manque de considération et d’attention. La France n’a pas de vraie culture graphique à l’instar des pays anglo-saxons ou ceux du nord de l’Europe. Même si des Starck ou Goude, on fait beaucoup pour le rayonnement international de la création française, il faut bien admettre que nos compatriotes sont moins sensibles à l’esthétique graphique que les Espagnols ou les Danois. Il suffit pour cela de voir à quel point les abords de nos villes avec ses centres commerciaux sont pollués et saturés d’affiches criardes, de logos ineptes et d’une incohérence esthétique à faire pleurer. À la différence d’autres villes d’Europe comme Barcelone ou Londres, on peut sentir et surtout voir à quel point l’esthétique des boutiques, des cafés et restaurants, de la signalétique est travaillée et porteuse de message. Faites le test un jour en Espagne par exemple dans un restaurant et vous verrez la richesse et la qualité des étiquettes que les producteurs proposent sur leurs bouteilles de vin ou la manière de gérer la signalétique dans une ville. Il suffit de plonger dans les entrailles du métro de Stockholm pour voir comment des idées folles sont porteuse d’idées, de sensations et d’étonnement. Et quand je dis que la culture graphique en France n’existe pas, je m’appuie sur plusieurs constats : lors d’appels d’offres provenant d’institutions privées ou publiques, c’est la capacité financière du candidat qui prévaut par rapport à la qualité du travail créatif qu’il peut proposer. D’autre part, il semblerait que ce soit le propre du français que de penser « mon voisin fait ça donc je suis capable de le faire aussi ». C’est vrai que le français construit sa maison, seul, électricité et gaz à tous les étages, qu’il répare sa voiture seul, qu’il sait jardiner, peindre, seul. Mais surtout quand il lance une activité, il sait créer son propre logo et son image et met en ligne en général un site top moumoute. Après tout pourquoi payer un plombier, un garagiste, un homme de l’art ! Alors vous parlez d’un graphiste... document: iStock / Getty images


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REFLETS

Les reflets ne relèvent plus de l'erreur technique : ils symbolisent l'authenticité.

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HUMANITÉ ROBOTISÉE

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Pour le meilleur ou pour le pire, la technologie nous a transformés en androïdes assoiffés de données.

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MULTI-ETHNICITÉ

Les modèles multi-ethniques sont les nouveaux visages de la publicité mondiale.

PHOTOS INSTANTANÉES

La technologie nous permet de retranscrire la vie telle qu'elle est, dans l'instant.

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2014 FIFA WORLD CUP™

En 2014, rien ne résistera à La Coupe du Monde !


vdm.

vie de maraîcher ou vie de merde

Vivre de maraîchage et de surcroît bio est-ce une vie enviable, une nouvelle vie ou une future vie de merde ? Le maraîchage traditionnel et local est en voie de disparition avec le dépôt de bilan d’environs 250 petites exploitations en moins chaque année en France pour la plus grande satisfaction des géants de l’agro-alimentaire et des enseignes d’hypermarchés qui se lancent de plus en plus dans l’exploitation de façon intensive des cultures maraîchères dont le bio, mais à minima. 1/3 des légumes produits sont jetés avant commercialisation car ils ne correspondent pas aux critères de calibrage voulus et ardemment souhaités par l’homocaddicus. Le légume bio est cher dixit le même homocaddicus désormais soumis à la guerre des prix bas. Le bio ne peut nourrir tout le monde dixit les gros exploitants travaillant pour les grosses entreprises de l’agro-alimentaire qui servent les enseignes d’hypermarchés qui se gavent sur le dos de l’homocaddicusmoinscheratouprix... La fameuse loi du marché s’impose donc et circulez y a rien à voir ! À qui la faute ? Aux exploitants. Aux distributeurs. Aux consommateurs. Si certaines enseignes bio se la jouent, « c’est tellement bio que ça vaut son pesant de carottes », il y a en réalité un basculement fondamental où il s’agit de nourrir vite et à peu de frais une population citadine en croissance constante et en rupture avec des habitudes alimentaires ancestrales. Le bio revendique quant à lui le local, la proximité et le prix juste avec des produits frais et de saison, mais son rayon d’action est limité au vu de son cahier des charges. Le problème, c’est que les locaux fondent comme neige au soleil au même titre que les petites exploitations. Il n’est pas rare de voir en supérette à la campagne des locaux gavant leurs caddies de fruits et légumes provenant des quatre coins de l’Europe et du monde alors qu’à deux pas de chez eux, ils ont un voisin avec un potager ou un marché de producteurs. Mais hip, hip, hippster, bientôt nos campagnes seront sauvés par les bobos qui comme à l’image de ses new-yorkais branchés, raflent les petites exploitations à prix d’or pour produire leurs propres légumes ou poulets car c’est so chic! Le naturel n’est pas prêt de revenir au galop sauf sous forme de slogan publicitaire malgré la volonté d’associations comme les Amap, les regroupements de producteurs et la réelle volonté de certains de changer la donne.

photo / David Stewart



B&B.

bobobusiness

Le guide du fooding vient de nous référencer dans ses tablettes. What’s that? En 2000, une jeune génération décide de bousculer la critique gastronomique et crée un nouveau concept : le Fooding. Aujourd’hui, l’ancien petit agitateur est devenu incontournable. La scène, en apparence anecdotique, se passe au Chateaubriand, chez Iñaki Aizpitarte, un des lieux emblématiques de la tendance Fooding. Alexandre Cammas et Marine Bidaud, fondateur et directrice associée, y dînent en compagnie d’un représentant de la direction de San Pelegrino, leur sponsor historique. « Là, un Américain se retourne et demande, are you le Fooding ? », raconte Alexandre Cammas. Le type, tout content, explique qu’il fait une tournée des restos Fooding pour son voyage de noces. En 2013, avec 50 000 exemplaires vendus, le guide Fooding est second de sa catégorie, derrière le Michelin (autour de 100 000 exemplaires, cinq fois moins qu’il y a dix ans), et leader sur smartphone avec 20 000 téléchargements de son appli. A Paris en avril, où déjeunent Jay-Z, Beyoncé et Blue Ivy avant le concert de maman ? Chez Septime, le resto de Bertrand Grébaut, Fooding d’honneur 2012 et chef très en vue. Il faut lire la fable de l’Américain entre les lignes. En plus de faire rayonner à l’étranger la jeune garde de la gastronomie française, le Fooding grignote à Michelin un de ses derniers fonds de commerce : les touristes. Il y a quinze ans, Cammas et sa bande voulaient mettre un coup de pied au cul à un Michelin juste bon à servir de référence aux étrangers et à un public vieillissant. Aujourd’hui, l’ancien petit agitateur est incontournable. Pour preuve, même les Ricains s’y mettent. Alors obsession générationnelle de mettre un coup de baskets dans les vieilles valeurs gastronomiques, il s’agit d’insuffler du cool, un esprit libertaire et de la déontologie dans la presse gastro. Bistronomie, cuisine pointue et intelligente, décor décontracté, note moins salée. Mais c’est aussi le piège de virer à l’extrême. Resto dans un lavomatic, cuisinier rappeur ou strip-tease de cuisiniers... En ouvrant notre maison d’hôtes on pensait coolitude autour de la table, produits frais et locaux arrangés sauce world, electro en fond et débats à bâtons rompus sur la culture en général. La formule a souvent surpris car la réalité est tout autre avec 80% des hôtes qui forts sympathiques au demeurant parlent de météo et d’insécurité avant tout, quant aux 20% restants ils sont devenus nos amis et veulent faire du maraîchage bio (-: . Quand on vous disait que les bobos allaient sauver la France profonde. Mais pour combien de temps. http://lefooding.com/fr/chambres-hotels/chambre-d-hote-beaudouy-saint-jory-de-chalais

photo / Marie-Paule Thuaud



almost human Un(e) ami(e) sceptique vous demande de lui faire découvrir le monde merveilleux des séries, cet étrange territoire d’amour et d’addiction dont vous lui parlez tout le temps. Vous êtes fatigué, un peu impatient aussi, et vous choisissez bêtement l’une des dernières nouveautés de la rentrée, Almost Human, sous prétexte que la personne en question a lu tout Philip K. Dick et adore la science-fiction. Après quelques minutes du premier épisode, vous êtes dans le futur. Cette histoire de flics, où la moitié des effectifs de terrain est composée d’androïdes vous refait toutes les références du genre. L’ambiguïté des rapports entre robots et humains aux images d’une ville du futur évoquant Blade Runner, Minority Report ou iRobot. Pour ce qui est du récit, la série emprunte l’autoroute narrative de l’enquête policière. C’est le moment d’étaler votre science et vous expliquez avoir souhaité jeter un œil sur cet objet filmique pour plusieurs raisons. Tout d’abord, son créateur, J. H. Wyman, est un ancien de Fringe, la belle série existentielle et futuriste où il était question de réalités parallèles. Ensuite, l’un des producteurs exécutifs d’Almost Human n’est autre que J. J. Abrams, qui se fit connaître de la fin des années 1990 au milieu des années 2000 avec Felicity, le pilote de Lost et l’émouvante Alias. Ce garçon semblait avoir inventé la série grand public sentimentale et conceptuelle, avant qu’Hollywood ne s’aperçoive vraiment de son talent et ne fasse de lui le nouveau Steven Spielberg mâtiné de George Lucas. Saison 1 / 8 épisodes en streaming / http://www.cinemay.com/serie/almost-human/



true la la la!


Si ce (cette) ami(e) égaré(e) dans un monde sans télévision et sans internet vient frapper à votre porte après une vingtaine d’années d’exil, montrez-lui True Detective afin de le (la) mettre à jour dans le domaine du récit contemporain. Il (elle) n’en croira pas ses yeux. Mieux, il (elle) ne pourra sans doute pas comprendre qu’aujourd’hui, une série puisse ressembler à un objet artistique aussi compliqué, ambitieux et néanmoins fascinant. Cette impression de maîtrise et de nouveauté totales (les deux vont rarement ensemble) s’impose immédiatement à la vision du premier épisode de True Detective, la nouvelle série de HBO écrite par Nick Pizzolatto et réalisée par Cary Fukunaga. Le plus paradoxal reste que si True Detective va puiser loin dans la tradition fictionnelle américaine – ce titre était aussi celui d’une série de romans «pulp» née en 1925 -, les sériephiles d’aujourd’hui pensent d’abord à la Scandinavie des années 2010. Sans le rythme étiré et la noirceur atmosphérique des fictions nordiques comme The Killing, True Detective ne serait peut-être jamais sortie de terre. L’Amérique regarde désormais ailleurs, sans forcément passer par la case remake, et c’est une bonne nouvelle. Plus que toute autre série actuelle, y compris House of Cards, True Detective réfléchit d’emblée à la meilleure manière de raconter une histoire dans un monde de mensonge et de violence. C’est dire à quel point elle se prend au sérieux. Avec raison, jusqu’à preuve du contraire. Pour le spectateur, le plaisir – puisque plaisir il y a, malgré l’atmosphère très sombre – consiste à décoller une à une les couches toujours plus prenantes du récit, de rentrer dans la tête de deux êtres ambigus et profonds. Au risque de se perdre avec eux. Après la fin de Breaking Bad, on imaginait que la figure de l’anti-héros né avec Les Soprano allait disparaître ou se transformer. True Detective commence à apporter une réponse : les anti-héros sont parfois plusieurs, ils avancent dans la vie très fatigués, voire épuisés. Ce ne sont peut-être que des spectres, des rêveurs angoissés qui ne savent plus très bien ce qu’ils disent. Faut-il écouter ce qu’ils ont à raconter ? Que ce soit en enquêtant sur un meurtre rituel ou en essayant de se remémorer le passé, ces deux hommes décryptent un récit et des symboles, tout comme nous décryptons un récit et des symboles devant True Detective. Nous voilà donc installés dans le même bateau qui tangue.


COLDW AVE Johann François est un jeune architecte d’intérieur partageant sa vie professionnelle entre Paris et Besançon. Avec une vraie sensibilité aux formes, matériaux et couleurs, il vous plante au beau milieu d’un loft une bibliothèque carrée montant jusqu’au plafond l’éclairant avec des néons de couleurs ou repeint aux couleurs denses et profondes le minuscule appartement d’un musicien compositeur en co-location avec un auteur de BD. C’est aussi un architecte avec des partis-pris et des engagements éco-responsables pour preuve sa dernière réalisation qu’il commente dans cet article. « C’est une maison bioclimatique dans laquelle j’utilise différents moyens et ressources naturelles. J’ai travaillé tout d’abord, l’orientation, l’implantation, la compacité de la maison... Il y a une récupération d’eau de pluie, un unique chauffage au poële, un puits canadien, une vmc double-flux, des panneaux solaires pour l’eau chaude et le plus important une clim naturelle !! C’est ce fameux mur sur la photo qui illustre mes propos et qui à plusieurs fonctions. C’est un peu le cœur de la maison. Outre de former un trait d’union entre le RDC et l’étage, il est planté au centre de la maison tel un monolithe et sert à élever son regard jusqu’à la magnifique charpente traditionnelle typique de ma région, la Franche-Comté. Il sert également à dissimuler l’escalier menant à l’étage. Mais le plus important, c’est qu’il participe au confort d’été et d’hiver, c’est lui la clim : je m’explique : petite précision, c’est un mur plein de 2,5m de large et 4,5m de haut. Pour l’hiver, le poële situé juste devant ce mur à la base produit de la chaleur, chaleur qui vient s’accumuler dans ce mur qui fait un peu office de radiateur à accumulation. Le poële s’éteint et la chaleur accumulée dans la masse va se diffuser avec un certain déphasage tout au long de la nuit. Ça, c’est pour le confort d’hiver. Pour l’été, j’utilise le principe d’évapotranspiration (ce que les hommes et les plantes font naturellement pour réguler leur température en transpirant !) et ceci grâce à l’eau de pluie récupérée. L’eau s’écoule lentement sur ce mur (il faut qu’elle s’écoule sur un maximum de surface), abaissant ainsi la température du mur qui va se remettre mécaniquement à température ambiante en pompant les calories à l’intérieur de la maison. Ceci associé à la VMC double-flux et au puits canadien permet d’abaisser la température intérieure d’environ 5 à 6°, ce qui est largement suffisant en cas de forte chaleur. »



Piou-Piou Entre la mode et la basse-cour il n’y a qu’un pas. Quel rapport entre un défilé de Karl Lagerfeld pour Chanel et Chicken Run film d’animation où les poules prisonnières d’une fermière productiviste décident de s’évader pour un avenir meilleur ? Apparemment les aficionados de la mode, les accros des fashion weeks n’ont aucune envie d’échapper au diktat qu’impose le monde du luxe. En dehors de l’image facile du poulailler qui piaille dans les deux cas, existe-t-il pas une forme d’esclavagisme dans ce type de manifestations? Esclavagisme subi et voulu, mais qui en dit long sur l’état de nos sociétés. Un peu comme si la vie ne pouvait exister que dans un mimétisme ridicule avec force parades, fanfaronnades, gloussements en tous genres. La vie, la beauté doivent-elles immanquablement s’accompagner de précieux(ses) ridicules ? Que ce soit un diable habillé en Prada ou une blogueuse hystérique, il semblerait que tout soit irrémédiablement soumis aux lois d’une caste de nantis, d’une classe sociale en total décrochage avec les réalités du monde. Dans le film « Ridicule », un courtisan pouvait être mis au ban de sa bassecour sur un mauvais jeu de mots. Aujourd’hui, on ne peut vivre que sur le consensus d’une classe dominante dominée par ses propres hystéries. Cela vaut pour la mode, pour la peinture, le théâtre, le spectacle et le monde de la création en général. Et quel est donc cet esprit du temps ? C’est une idéologie qui privilégie les valeurs de performance, il faut être un « perfomeur », aussi bien dans la sphère publique que sociale. C’est une injonction au caméléonisme : performer, ça veut dire s’adapter. Avant, on avait un métier, une carrière menée de bout en bout. Maintenant, il faut avoir plusieurs vies, plusieurs récits dans sa série biographique. C’est une injonction permanente de la métamorphose à laquelle on est tous soumis.

création / Konstantin Paygay



Kollektif Le logement est un secteur terriblement injuste. Le plus injuste qui soit en réalité. Injuste en terme économique puisqu’il représente que vous soyez propriétaire ou locataire le poste budgétaire le plus important avec une part de plus de 30 % des dépenses supportées par les Français. Pour exemple, il suffit de prendre une personne âgée non-propriétaire, sa part consacrée au logement peut représenter jusqu’à 40 % de sa retraite. Un étudiant nonboursier travaillant plus de 30h par semaine avec un revenu aux alentours de 1OOO€ doit s’acquitter d’un loyer moyen d’environs 300€ ce qui représente plus de 30% de ses ressources. Une famille moyenne accédant à la propriété va devoir réduire du quart son budget alimentation, tout cela pour rembourser un crédit pouvant aller au delà de 30 ans. Que ce soit en location ou en achat, le logement coûte très cher en France comparativement aux autres pays européens. La part consacrée au logement par les Allemands est de l’ordre de 15 %. La France pays traditionnellement attaché à la pierre, à l’épargne a engendré une politique et un état d’esprit où être propriétaire est le summum de la réussite sociale. Marqué par l’obsession terrienne des paysans après 1789, ce phénomène


s’est répandu dans toute la société française et quand on parle du haut du panier cela sous-entend difficulté à l’atteindre. Pourtant, la notion d’accès à tous à un logement décent figure dans la Constitution Française au même titre que l’accès à un emploi, à la santé, l’éducation et au droit. Si de nombreux pays n’ont pas les mêmes valeurs concernant l’habitat et le logement, l’approche est toute différente par exemple dans les pays scandinaves où la notion d’habitat collectif est mieux accepté et surtout mieux géré. Mise en commun d’appareils ménagers ou de services rendus à la personne. Meilleure gestion, avec une réelle implication des locataires ou propriétaires dans le collectif. Réductions des coûts par un meilleur entretien. Taux d’imposition plus faibles, taxes moins lourdes. En temps de crise malheureusement le coût de l’immobilier prend de l’ampleur avec un marché figé en perte de vitesse et des loyers stratosphériques. À repenser donc avec de nouvelles approches qui permettront également à l’État de se désengager d’une politique d’aides extrêmement coûteuse. Alors à quand 40 % d’habitat participatif en France comme c’est le cas aujourd’hui en Allemagne ou en Norvège ? La France en face, le scandale du logement. pluzz.francetv.fr/france3

image / Oblivion. Chernin Entertainment, Radical Pictures / Joseph Kosinski

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« Pour étouffer par avance, toute révolte, il ne faut pas s’y prendre de manière violente. Il suffit de créer un conditionnement collectif si puissant que l’idée même de révolte ne viendra même plus à l’esprit des hommes. L’idéal serait de formater les individus dès la naissance en limitant leurs aptitudes biologiques innées. Ensuite, on poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle. Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité et plus sa pensée est bornée à des préoccupations médiocres, moins il peut se révolter. Il faut faire en sorte que l’accès au savoir devienne de plus en plus difficile et élitiste. Que le fossé se creuse entre le peuple et la science, que l’information destinée au grand public soit anesthésiée de tout contenu subversif. Surtout pas de philosophie. Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des informations et des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante d’empêcher l’esprit de penser. On mettra la sexualité au premier rang des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux. En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté ». Ce texte écrit par Aldous Huxley en 1939 est la triste vision de ce que nous vivons aujourd’hui ? Il est consternant de voir à quel point les problèmes essentiels sont relégués aux oubliettes par les péripéties amoureuses d’un président en exercice à la une d’une actualité plus préoccupée de scandales que de vrai journalisme. Que des émissions de débat, de service public soient déprogrammées et reléguées en fin de soirée pour laisser place à des shows Hannouniens abêtissants, de pseudo analyses d’experts très experts en langue de bois et asservis à une pensée dominante. Pseudo débats d’idées dégoulinant à la crème BHL, shows hollywoodiens de beurettes siliconées ou de chti’s élevés dans les centres commerciaux Auchan, marathons d’individualismes façonnés par l’appât du gain et fascinés par une célébrité warohlienne éphémère. Temps de cerveaux disponibles pour Coca, préoccupations existentielles mâchées et digérées par Facebook puis recrachées sous forme d’appétissantes promotions publicitaires... Le XXIe siècle n’aura rien de spirituel mon cher André et comme vous aviez raison Aldous. Le meilleur des mondes.


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recyclage syndical

Plus personne aujourd’hui ne s’étonne du parachutage de personnalités dans tel ou tel conseil d’administration ou de la nomination d’un politique à un poste plus honorifique qu’utile. Mais qu’en est-il des anciens syndicalistes ? À la lumière d’une enquête menée par Le Canard enchaîné, une cohorte d’anciens responsables syndicaux mènent à ce jour de douillettes, lucratives et prestigieuses nouvelles vies professionnelles. Edouard Martin, lutteur acharné chez ArcélorMittal vient d’être catapulté tête de liste pour les Européennes avec le PS. Denise Parise, leader CGT du conflit Molex s’est faite élire conseiller régional PS en Midi-Pyrénées. Didier Le Reste ex-CGT cheminot a rejoint la liste de Anne Hidalgo. Laurence Laigo, CFDT a intégré le cabinet de Najat Vallaud-Belkacem. Jean Kaspar ex-secrétaire général de la CFDT, ancien mineur lorrain nommé au poste de conseiller à l’ambassade de France à Washington. Jean-René Masson, son numéro 2 à celle du Maroc, quant à Annie Thomas, ce fut Madrid grâce à Sarkozy. Jean-François Trogclic, autre CFDT a été propulsé à l’ONU en 2007. Pour FO, les anciens numéros 1 ont également envahi la sphère diplomatique comme Valérie Gervais en poste à la villa Farnése à Rome ou Jacques Pé à Madrid. La CGT n’est pas en reste avec son ancienne trésorière Lydie Brovelli nommée à Dakar pour « scruter- au microscope?les politiques sociales en Afrique Occidentale. François Chérèque quant à lui a réussi à se hisser à l’Inspection générale des affaires sociales avec un salaire passant de 4 500 à 7 200€. Ainsi il est devenu le « Monsieur pauvreté » de Jean-Marc Ayrault. Chérèque a gardé sa hargne militante en adhérant au think tank socialiste Terra Nova... Et en devenir président de la boîte à idées qui conseille au PS de prendre ses distances avec le milieu ouvrier et vivant à 80 % des dons des principaux acteurs du CAC 40. Edmond Maire en son temps géra la présidence de Villages Vacances de France en licenciant son personnel et transformant cet acteur de l’économie social en acteur du privé. Nicole Notat a pour sa part choisi directement le privé en créant Vigeo, agence de notation dans les domaines sociaux et environnementaux dont le gros client et actionnaire n’est autre qu’ArcelorMittal, ennemi juré du fameux Edouard Martin. Elle est également à la tête du Siècle, cercle d’influence qui ne recrute que dans les allées du pouvoir. À coup sûr, ces femmes et ces hommes n’ont pas perdu leur virulence revendicative face aux problèmes qu’elles ou ils rencontrent dans leurs nouveaux domaines. L’ascenseur social a merveilleusement fonctionné pour ces heureux élus et cela devrait réjouir et servir d’exemple aux classes laborieuses.


Illustration: Graig & Karl


sales gosses!

Et si nous commencions notre année par la musique, puisque selon l’adage, elle adoucit les mœurs. La production n’a jamais été aussi pléthorique et les choix sont difficiles à faire. Sortons donc des sentiers battus et grosses machineries à succès et plongez-nous dans l’univers du web, des auto-productions et des talents en devenir. Par exemple avec No Education, jeune groupe parisien né il y a à peine 3 ans. Le dernier concert auquel j’ai pu assister a été court (20 mn) aux 3 baudets et très frustrant. Arrivé au quatrième et dernier morceau, on sentait un potentiel énorme, tué dans l’œuf par l’impératif du temps imposé par la programmation. Dire qu’ils se cherchent encore est évident et comme le groupe ne souhaite pas céder à la facilité leurs parcours risque d’être encore un peu long. Pourtant tout y est. L’énergie, la composition, des textes accrocheurs et un univers musical qui vous trimballe du son progressif de Genesis, au funk et à la soul, en passant par le jazz-rock mâtiné de rap et de hip-hop. Ouf ! Pas facile à gérer dans des sets aussi courts. On est loin des premiers concerts de rock du siècle dernier qui pouvaient durer des heures et où les expérimentateurs de tout poil, brodaient tout en apprenant à jouer et se perfectionnaient tout au long des concerts. Soutenue par une batterie puissante qui récupère le moindre hic, une basse comme on les aime, langoureuse et rageuse à la fois appuyant la voix très particulière du chanteur. Un clavier aux solos dukiens et un jeune guitariste encore un peu fragile et timide, mais qui sans se la jouer guitar heroe assure une belle présence rythmique, c’est un style bien à eux qu’ils cherchent à définir. Ils ont bien retenu les leçons du passé et les expérimentent joyeusement avec ce qu’ils aiment aujourd’hui. Leur objectif, un EP en 2014, de nombreuses dates de concerts et peut-être un nouveau clip. Malheureusement, le dernier, malgré l’énergie déployé, manquait cruellement de scénario et de réalisation et servait mal les propos de leur morceau « Keeper ». Erreur de jeunesse... À offrir ou a partager avec vos amis et vos proches puisque leurs morceaux sont disponibles sur le Net. https://www.facebook.com/noeducationhbn?fref=ts



FUCKING ART

Cher Vincent, lors de la dernière Foire internationale d’art contemporain Bertrand Lavier, un artiste qui s’est déjà taillé une solide réputation de « subversivité novatrice » en posant un réfrigérateur sur un coffre-fort, a exposé une Ferrari Dino accidentée trônant sur un socle blanc. Toit écrasé, ailes défoncées, pare-brise explosé, roues crevées, capot disloqué, bref, une voiture à laquelle on a fait faire un tonneau. Rien d’autre à signaler, aucun ajout ni effet esthétique particulier. Or Lavier a trouvé un acheteur qui lui a offert 250.000 dollars en échange du tas de ferraille. Juste pour information : on peut trouver le même modèle de Ferrari en parfait état de marche pour moins de 50.000 dollars. L’heureux propriétaire du chef-d’œuvre aurait donc pu s’offrir cinq Dino rutilantes au même prix, en faire détruire une si ça lui chantait, et prendre le volant des autres. Comme tu peux t’en douter, celui qui préfère l’épave n’est ni un ouvrier ni un paysan. Il s’agit, comme d’habitude dans l’art contemporain, d’un grand capitaine d’industrie. Si l’artiste d’aujourd’hui se dit volontiers « de gauche » , à tout le moins « anarchiste », son acheteur, lui, est en général de droite et bien installé. Et il n’est guère difficile d’imaginer ce qui lui passe par la tête : le bolide ratatiné illustre jusqu’au grotesque sa logique à lui, celle de la « destruction créatrice ». Et il en est tout ébaubi : enfin un art qui lui ressemble ! À vrai dire, le seul dans l’histoire humaine où il peut se mirer, le seul qui lui renvoie son image et le conforte dans sa logique d’entrepreneur. Passionné d’innovations, n’est-il pas, lui aussi, un acteur de cette « révolution permanente » en laquelle Marx, voyait déjà l’essence du capitalisme ? Pour tenter de comprendre cette étrange alchimie, voici les commentaires du commissaire-priseur qui a réalisé la vente. Il explique, mots savants à l’appui, que Lavier se situe dans la tradition de Dada et Duchamp, dont il repousse


encore (mais cent ans après quand même...) les limites de l’audace créatrice. Comme eux, et là, il faut citer, « il fait table rase des valeurs traditionnelles de l’art, liées à l’esthétisme et au travail ». Bien vu, en effet : il n’y a dans cette « œuvre » ni vision du monde, ni beauté, ni métier, seulement, comme le précise encore l’habile vendeur, une volonté de « tourner l’œuvre d’art en dérision ». Il s’agit de rompre avec les traditions, dans le style de l’urinoir de Duchamp qui « bouscule » la sacralisation muséale et compassée de l’œuvre d’art classique, celle qui visait la beauté et demandait malgré tout du savoir-faire. À nouveau, bien vu : dans le genre dérision dérisoire, la réussite est totale. Donc en faisant faire un tonneau à une Ferrari, on peut espérer aussi transformer le plomb en or ? Hélas non, répond l’homme de l’art, car il faut bien du temps et une maîtrise consommée de la communication moderne pour installer son nom et ses « œuvres » dans un marché dont les arcanes n’ont rien à envier à ceux du CAC 40. Le commissaire-priseur se sent obligé d’y aller de son petit couplet métaphysique. Pas d’œuvres contemporaines sans un laïus sur la « fin de toutes choses », le « tragique de la condition humaine » et l’horizon du « sens de la vie ». Pourquoi détruire cette pauvre voiture ? Pour « montrer la finitude des êtres », la « vanité des possessions », « l’inanité de la consommation », pour faire comprendre, en somme, que « tout passe ». Whaou ! Heidegger et le dalaï-lama n’ont qu’à bien se tenir ! On est clairement sur les cimes, on côtoie des abîmes. Quelle audace dans la pensée ! Sans cette œuvre d’une puissance inouïe, qui aurait osé s’aventurer à des hauteurs aussi vertigineuses ? Mais rassure toi Vincent, à ce jour, tu restes la valeur la plus côté sur le marché de l’art. À la différence que Bertrand en profite bien plus que toi !


thethe london london photo photo corner corner Photo : Brigitte Niedermair


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Corée du Nord Libye Birmanie Guinée équatoriale Érythrée Somalie Soudan Turkménistan Ouzbékistan Tibe


et Syrie Biélorussie Tchad Chine Côte d’Ivoire Cuba Laos Arabie Saoudite Ossétie du Sud Sahara occidental


selfie toi-même! Dans un monde devenu complexe, chacun se sent obligé de multiplier les empreintes pour se sentir exister. Cette inflation narcissique, sans être tragique, impose le règne de ceux qui se considèrent les meilleurs. Au risque d’écraser les plus discrets et les plus fragiles. Un signe : sur les lignes téléphoniques de Fil Santé Jeunes, un service d’écoute anonyme, les questions des adolescents portent désormais autant sur l’image qu’ils renvoient d’eux-mêmes que sur la sexualité. Récemment, le magazine Time a consacré sa Une à celle qu’il surnomme la « génération moimoi », en référence à la « génération moi » des baby-boomers. Les troubles de la personnalité narcissique sont trois fois plus élevés chez les jeunes de 20 ans que chez les plus de 65 ans, s’alarme, en préambule, l’hebdomadaire américain, citant une étude des National Institutes of Health. Suis un portrait à la fois tendre et vachard d’une jeunesse jugée très sûre d’elle, obsédée par la célébrité et tire-au-flanc, mais aussi sympathique, ingénieuse et rétive à toute forme de hiérarchie. La révolution de l’information a donné aux individus le pouvoir technologique de défier les plus puissantes organisations : les hackers contre les grands groupes, les blogueurs contre les journaux, les terroristes contre les Etats-nations, les réalisateurs de films diffusés sur YouTube contre les grands studios.Globalement une immense majorité de clichés expose des anonymes « surpris » dans l’intimité de leur salle de bains ou de leur chambre à coucher (très populaire, le look jeté de lit), moue aguicheuse pour elle la fameuse « duck face » , torse imberbe pour lui. Certains « selfies » témoignent d’une réelle audace artistique, comme celui réalisé en apesanteur par l’astronaute japonais Aki Hoshide : une merveille de poésie. D’autres donnent carrément la nausée, comme ce jeune crétin, posant, pouce levé, à l’entrée du mémorial de la Shoah de Berlin. Pourquoi pas « Yo ! » en légende, tant qu’on y est. Faut-il s’inquiéter d’une telle fièvre ? Depuis l’Egypte ancienne jusqu’à Lucian Freud et Andy Warhol, le genre de l’autoportrait a traversé toutes les civilisations. Mais comment ne pas voir dans cet ego trip planétaire le miroir d’une société gavée d’elle-même et oublieuse de toute forme de pudeur ?



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anthroL’anthropocène, une révolution géologique d’origine humaine. La Terre serait entrée dans une nouvelle ère avec la modernité industrielle. Ce n’est pas la fin du monde, mais celle d’une ère assurément. Si les 11 500 dernières années ont connu des conditions de vie relativement stables permettant à l’homme de sauter de la terre labourée du néolithique au sol lunaire, désormais, nous filons vers l’inconnu. La planète est entrée dans une nouvelle ère géologique baptisée anthropocène, née il y a deux siècles avec la révolution thermo-industrielle. Autour de ce concept, la communauté scientifique dans son ensemble s’interroge sur nos représentations du monde. Car cette époque interpelle les certitudes de notre modernité, de notre mode de développement et de notre vision du monde. Il existe trois thèses à ce sujet. La première remonte à la période où l’ensemble des cultures humaines auraient stabilisé le système climatique en empêchant le retour à un nouvel âge glaciaire. En gros, cela démarrerait au néolithique, avec les débuts de l’agriculture et de l’élevage. Une autre thèse met l’accent sur la « grande accélération » d’après 1945, lorsque l’ensemble des indicateurs de l’empreinte humaine sur la Terre - démographie, émissions de CO2, consommation d’énergie, extinction de la biodiversité, recul des forêts, cycles de l’azote et du phosphore, etc. - montent à l’exponentiel. Cela dit, l’empreinte humaine s’est intensifiée dès le XIXe siècle. La thèse la plus acceptée par les scientifiques - celle de Crutzen - fait débuter l’anthropocène au début de la révolution thermoindustrielle, c’est-à-dire symboliquement en 1784, date du brevet de Watt perfectionnant la machine à vapeur. C’est aussi la périodisation la plus pertinente pour les historiens car, comme l’a montré Kenneth Pomeranz, c’est justement au tournant des XVIIIe et XIXe siècles que se produit la « grande divergence », où la Grande-Bretagne, grâce aux « hectares fantômes » du charbon et du Nouveau Monde (coton, sucre, bois...), surmonte une crise des ressources (bois, alimentation...), qui est source de tensions sociales. Elle écrase alors les autres pays, et notamment la Chine, en déployant son hégémonie à travers le monde et inaugurant un modèle économique intensif en capital et en énergie. Depuis, ce modèle s’est mondialisé et le tableau de bord des indicateurs de l’emprise humaine sur la planète - climat, biodiversité, cycle de l’azote, du phosphore et de l’eau, démographie urbaine, consommation de papier, barrages, déforestation - a viré au rouge. Dire qu’on est entrés dans l’anthropocène, c’est dire qu’il ne s’agit pas d’une crise passagère, qu’on peut oublier entre deux Sommets de la Terre au nom de la sacro-sainte croissance, mais d’une révolution géologique d’origine humaine. L’histoire humaine a rendez-vous avec l’histoire de la Terre : les humains pèsent sur le devenir géologique de la planète, tandis que les limites et les processus globaux de la Terre ont fait irruption sur la scène politique, dans nos vies quotidiennes, dans nos corps. Ce télescopage est sidérant. L’anthropocène nous condamne donc à la responsabilisation.

-pocène


complétement barthes mythologies de roland barthes

Roland Barthes est critique littéraire et sémiologue (1915 – 1980) il fait partie des éminents penseurs de l’effervescence intellectuelle des années 60. C’est en 1957 que paraît Mythologies, un ensemble de courts textes écrits entre 1954 et 1956 et parus tout d’abord dans la revue Esprit puis dans Combat et enfin dans Les lettres nouvelles. En 1957 ils seront réunis et publiés en un seul volume. Mythologies s’organise autour de deux parties. Dans une première partie le texte égraine chapitre après chapitre des thèmes familiers de la vie quotidienne de l’époque, tels que le catch, les détergents, le plastique, le bifteck et les frites, le strip-tease, la nouvelle Citroën, etc. Une sorte de dictionnaire des mythes finement sélectionnés. Chaque élément est disséqué et nous est donné à voir sous un autre angle. Dans une deuxième partie, beaucoup plus théorique, Roland Barthes nous explique sa conception du mythe d’aujourd’hui et introduit pour la première fois la notion de « science des signes ». En lisant Mythologies on ne peut manquer de penser à La société du spectacle de Guy Debord ou encore à Catastrophisme, administration du désastre et soumission durable de Jaime Semprun et René Riesel. Mais à la différence de Guy Debord, Roland Barthes ne cherche pas à nuire à la société spectaculaire. Il faut considérer Mythologies plus comme un catalogue des idées reçues dans lequel la bourgeoisie a été prise pour cible. : « L’ennemi capital est la norme bourgeoise ». Or, par définition, la norme est considérée comme quelque chose qui va de soi. Roland Barthes va tenter de décrypter, de dénoncer ce qui va de soi en allant au cœur du mythe en le démystifiant.

Oui mais qu’est-ce qu’un mythe ? La première définition du mythe communément acceptée et à laquelle nous pensons est un récit qui raconte une histoire sacrée grâce aux exploits d’êtres surnaturels. Ces histoires souvent issues de l’antiquité deviennent des modèles, parfois utopiques, dans notre société contemporaine. Pour Roland Barthes « Le mythe est une parole » « un système de communication, un message », « Le mythe ne se définit pas par son message, mais par la façon dont il le profère ». Donc nous pouvons en déduire, et constater par là-même, que ces deux définitions ne s’opposent nullement : le mythe propose une explication, voire une aspiration collective, pour certains aspects fondamentaux du monde et de la société. C’est un moyen d’éclairer le monde, une prise de conscience pour tout un chacun, il rend




la vie en société à la fois transparente et mystérieuse. La définition du mythe telle que Roland Barthes la conçoit est complexe car le mythe peut être extrait de tout objet ou fait de notre société contemporaine. Il me semble que par son décryptage c’est Roland Barthes lui-même qui a fait que tous ces objets et idées reçues sont devenus les mythes d’aujourd’hui. Son étude a eu pour effet d’éterniser les objets et concepts qu’il a placé sous son scalpel. Notre auteur pense que tout peut être mythe « car l’univers est infiniment suggestif ». La scène de vie quotidienne est une succession de messages, d’indices qui nous envahissent sans intention affichée, paraissant mêmes innocentes, mais qui insidieusement dirigent notre regard et nos modes de pensées. Se sera donc cette scène de vie quotidienne que Barthes va scruter mais partant du principe que cette société dans laquelle nous vivons est une société bourgeoise obéissant à une idéologie et un ordre social, ancrée dans un régime de propriété.

La société bourgeoise « Quels que soient les accidents, les compromis, les concessions et les aventures politiques, quels que soient les changements techniques, économiques ou même sociaux que l’histoire nous apporte, notre société est encore une société bourgeoise ». Partant du postulat que la culture bourgeoise est figée, l’étude des mythologies contemporaines s’effectuera donc en synchronie. Le mythe serait donc un outil au service du monde bourgeois mais plus précisément au service de ses normes « vécues comme les lois évidentes d’un ordre naturel ». Une idéologie bourgeoise infiltrée dans tous les recoins même les plus insignifiants de notre vie quotidienne et ayant ainsi la possibilité de diffuser les idées de la classe dominante à laquelle elle appartient vers la classe laborieuse. Il ne faut pas oublier que Roland Barthes, comme beaucoup d’intellectuels de l’époque, était marxiste lorsqu’il a écrit Mythologies. Nous ne pouvons donc pas échapper à cette vision idéologique de la lutte des classes à travers son récit. La culture bourgeoise et petite bourgeoise devenant les cibles idéales. Ce qui n’enlève rien à la qualité de son regard et de sa critique. Considérant l’Homme comme une espèce à l’instinct grégaire, Barthes s’adresse à chacun d’entre nous en invectivant cet instinct grégaire.

Quelques mythes « bathésiens » Martiens : Le mythe de l’identique. Les martiens ne seraient qu’une civilisation calquée sur la notre : « Tout mythe tend à un anthropomorphisme étroit ». Bien sûr ! Comment imaginer une société qui ne serait pas à l’image de la société bourgeoise, parfaite par définition. « La logique oblige qu’elle ait aussi les mêmes religions, et bien entendu, singulièrement la notre, à nous français ». Romans et enfants : Le magazine Elle (un magazine de femmes pour les femmes rappelons-le) nous propose un article sur les femmes écrivains. Mais à travers le regard de Barthes ce qui ne nous avait pas été évident devient aliénant. Sous couvert de glorifier la femme intellectuelle, Elle, maintient insidieusement la femme dans sa condition de mère et de femme au service de l’homme. Comment cela ? En présentant sur un même niveau et pour chaque femme écrivain citée, le nombre de romans et d’enfants. Pour Elle la femme de lettre accouche pêle-mêle de romans et d’enfants. Barthes se présente à nous sous un jour très féministe. Photogénie électorale : Il s’agit certainement du mythe le plus actuel et le plus évident du recueil. Comment une photographie peut-elle manipuler inconsciemment l’électeur ? Par quels signifiants allons nous pouvoir induire un comportement chez l’électeur ?

En conclusion Aujourd’hui les mythes anciens survivent mais l’homme moderne en créé de nouveaux. La mythologie quotidienne est toujours en formation. Nous sommes confrontés quotidiennement à une masse d’information. La publicité est toujours aussi présente de nos jours, elle se veut rassurante dans un monde de plus en plus privé de sens. On peut élargir la cible et passer de la bourgeoisie à la société en général car notre civilisation produit des images comme autant de représentations des buts à atteindre. Marie-Paule Thuaud


POL SKI PLA KAT L’AFFICHE POLONAISE

Minimalistes, surchargées, décalées ou détournées... Outils de promotion par excellence, les affiches de films peuvent aussi être de véritables œuvres d’art, laissant courir l’imagination débridée de leurs créateurs. Les affiches polonaises méritent à elles seules une place bien à part, tant l’art de la création d’affiches est ancré dans le paysage artistique du pays; au point que l’on parle véritablement d’école polonaise. Cette expression désigne en fait un mouvement artistique né après la Seconde Guerre mondiale, dans un pays de l’Est dont la culture et l’art contemporain ont connu un retentissement mondial. En 1946, la Pologne est intégrée aux pays dits « du bloc socialiste ». De 1946 à 1955, la vie artistique polonaise traverse une étrange période, où l’idéologie dominante tente d’exercer son contrôle sur la création, sous le dogme du « réalisme socialiste ». Dans ce contexte tendu se développe un langage iconique où la métaphore et autres figures de rhétorique, appliquées à l’image imprimée, s’affinent et se développent, pour créer un univers de signes qui tente de résister aux diktats de la censure. Paradoxalement, celle-ci n’a pas que des effets négatifs. L’industrie polonaise du cinéma fut, en effet, nationalisée dès 1945. La centralisation des moyens de production et de distribution des films a stoppé complètement la publication du matériel promotionnel des films venus de l’étranger. Dorénavant, l’affiche polonaise doit affirmer sa spécificité. L’affiche de cinéma devient ainsi dès 1946 un laboratoire de recherches expérimentales. À la demande politique qui exige du nouveau, les artistes semblent répondre par une liberté d’expérimentation radicale, au-delà de toutes contraintes commerciales et artistiques, laissant l’image s’exprimer. La chute de l’Union Soviétique, et par ricochet, le Bloc de l’Est, n’a heureusement pas entamé ce bouillonnement créatif. Les artistes d’aujourd’hui continuent ainsi à faire perdurer cette tradition, pour la plus grande joie des collectionneurs... Et le plaisir des vos yeux ! www.polishposter.com



SM

« Maison close, Bordelle » deux noms nouveaux venus dans l’univers des dessous féminins. La tendance pour 2014 sera donc « pan pan cul cul » pour madame le samedi soir et « harnache-toi chérie j’arrive! » pour les hommes. Plébiscité par une clientèle CSP+ (catégorie sociale et professionnelle supérieure) aux dires et des analyses des acteurs du marché, c’est le retour à l’entrave du corps des femmes. Que dirait ma grand-mère qui a balancé son corset aux orties pour lutter contre l’oppression des femmes et que penserait-elle de voir ses petites filles avec un cadenas dans la petite culotte ? Après le porno chic des années 2000, voici donc le temps des dessous en menottes. De la lingerie qui récupère l’air du temps, ça vaut le coup pour un marché de 3,5 milliards d’euros et ça vaut le coup de mettre un petit coup de sm petit bras à portée de toutes les bourses.



Bababoum!

Aux environs de 68 au XXe siècle, cette période a vu fleurir bon nombre de communautés en rupture avec le système. Antinucléaires, écolos avant l’heure, leur but était de redonner du sens aux relations humaines avec un retour à la nature. Que reste-t-il de l’après Woodstock et de ses premières expériences de communautés néonomades américaines ou de ces fameux trips hindous qui en a laissé plus d’un dans les champs de pavot. Collectifs, écolieux, tout est bon pour revenir à un souci d’écologie, d’autonomie, de reconnexion à la terre avec l’idée d’entraide et d’accueil, voire d’installation du paradis sur terre. Vivre ensemble, de façon harmonieuse et authentique sous-entend une belle abnégation de soi. Tous les aspects de l’humain, la nature, la terre, l’autosuffisance alimentaire, l’ agroécologie, la solidarité ville-campagne, l’autonomie sont mis en pratique tant bien que mal, mis à l’épreuve du collectif et ne sont pas toujours concluants. De l’aveu de tous, le plus éprouvant, ce sont les relations humaines et le quotidien (ça n’arrive pas que dans les vieux couples). Ces communautés souvent bâties sur un collectif peu structuré ou la notion de famille ou d’entreprise est balayée d’un coup de botte, chacun cherche sa place en réalité. Dans ce type de regroupements toutes les typologies coexistent tant bien que mal, du sculpteur maudit, la comédienne hystérique, l’organisateur de festival chamanique, l’ancien fonctionnaire qui s’empresse d’aider la mairie toute proche pour « éviter d’être totalement déconnecté » à l’anglais débarquant de Londres qui trouve ça « fantastic! » parce que tout le monde a laissé tomber la tv, l’ordinateur et sa carte de crédit, donc en rupture totale, avec l’espoir que la société ne les rattrape jamais. Pierre Rabhi sert souvent d’exemple avec son expérience « d’oasis en tous lieux », bien qu’il prône l’autonomie plutôt que l’autarcie en créant de la richesse pour que ça sorte à l’extérieur. Au final, le constat que font tous ces expérimentateurs, c’est que « c’est énergivore, qu’il faut être solide et surtout responsable tout en gardant sa propre autonomie ». Futurs participants vous voilà prévenus!



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