E22-BOOK

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le magazine des itinĂŠraires

graphiques et infographiques

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Octobre 1996

s o m m a i r e

Quand la BD vient au service de l’emballage.

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22 Sous les feux de l’actualité, Marseille. Enquête sur les graphistes marseillais, leurs travaux, leurs histoires.

46 Histoire d’un packaging et d’une méthode de travail.

Création Présence Numérique Curiosités Graphisme Packaging Packaging Mini book Instantané Législation Réaction

Éditorial Actualités graphiques Jean-Louis Azizollah, un commercial sachant créer Marie-Pierre Guiard Après Apple Expo… Mots de passage Laurent Sauerwein Toutes les couleurs de Marseille Vert perroquet (062C), rouge tomate (032C), jaune mauresque (011C) Rudy Lainé Amsterdamer, la création d’un packaging Nuit gravement à la santé Isabelle Pasquet Le marketing découvre le cartoon L’illustrateur du mois : Buster Bone Calendrier, livres, expositions, concours Vous avez dit vide juridique Isabelle Durand Abondance de logos nuit… Philippe Quinton

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Faire ou discourir…

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Directeur de la publication Michel Chanaud Rédacteur en chef Patrick Morin Edition-Maquette David Laforgue • Bruce Pleiser • Ellen Gögler Ont participé à ce numéro Marie-Pierre Guiard • Laurent Sauerwein Isabelle Durand • Philippe Quinton Ulf Andersen • Guillaume Frauly Rudy Lainé • Isabelle Pasquet Isabelle Lesur • Marie Jo Alusus Flashage Wizzz Imprimé par Imprimerie Saint Paul • Versailles sur Matillant 135 g. Job Parilux TCF

ulf andersen

15, rue de turbigo, 75002 paris Tél. : 33 – 01 40 26 00 99 Fax : 33 – 01 40 26 07 03

Michel Chanaud Patrick Morin Adresses E-mail : mchanaud@club-internet. fr pmorin@club-internet. fr

Publicité au journal Nadia Zanoun : 33 – 01 40 26 00 99 Abonnements Valérie Grecki : 33 – 01 40 26 00 99 Prix pour 10 numéros : 680 FF France 850 FF CEE, DOM TOM • 980 FF autres pays étapes Graphiques est édité par Pyramyd ntcv. Société Anonyme au capital de 500 000 F dont les principaux actionnaires sont Michel Chanaud & Patrick Morin. 15, rue de Turbigo, 75002 PARIS Tél : 01 40 26 00 99 R.C.S. Paris B 351 996 509 N° de commission paritaire : 75280 Dépôt légal à parution – ISSN 1254-7298 Le coupon d’abonnement est en page 19/20.

proFessionnelle

étapes Graphiques est publié en association avec StepBy-Step Graphics, The how-to magazine for traditional and electronic graphics édité par Step-By-Step Publishing, une division de Dynamic Graphics Inc.

“Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans la présente publication, faite sans l’autorisation écrite de l’éditeur est illicite et constitue une contrefaçon”. (Loi du 11 mars 1957, art 40 et 41 et Code pénal art 425). Le magazine n’est pas responsable des textes, photos, illustrations qui lui sont adressés. Toutes les marques citées dans “étapes Graphiques” sont des marques déposées” ainsi que le logo Étapes Graphiques et sa marque .

drelin drelin • Le numéro 23 de novembre sera intégralement consacré au “Mois du graphisme d’Echirolles” (lire en page 63). • Qui dit journal professionnel dit informations professionnelles. D’où viennent-t-elles ? De vous ! N’oubliez jamais de nous informer non seulement de vos créations mais de ce qui se passe dans vos régions, des étudiants de talent, de tout ce qui fait la vie graphique. Nous sommes également sensibles à ceux qui ont envie d’aller au-delà et qui souhaiteraient collaborer à la revue, en proposant et en réalisant des sujets. Contacteznous, Étapes Graphiques vit par vous.

avec un spécial Internet, est tranquillement passé de l’ère de l’édition papier à l’ère de l’édition en ligne. Mais, sur la plupart des stands, la présentation des produits au public est restée dans la même logique : “Les logiciels sont tellement simples à utiliser, qu’en fait, ils font le travail pour vous”. Rien ne serait plus élémentaire que la réalisation de sites ou de pages Web, que le paramétrage de son modem et de sa connection Internet, que la réalisation d’applications interactives et pourquoi pas que Quick Time VR, HTML ou Lingo. Quotidiennement confronté à l’instabilité du système 7.5.3 sur certains PowerMac, alors que leur utilisation est devenue très informatique et beaucoup moins plug and play, on éprouve une certaine lassitude face à ce discours lénifiant autour de la simplicité. L’outil ne remplace en rien le savoir et pour bien l’utiliser, aussi simple soitil, il faut de la logique, de la pédagogie et – particulièrement dans nos univers professionnels – beaucoup de temps pour caler une machine prête à toutes les fantaisies au premier courant d’air venu… Est-ce donc un hasard si les graphistes marseillais de ce numéro sont moyennement attirés par le “multimédia” et lui préfèrent encore la vérité de la matière et des éléments bruts ? En bons résistants habitués aux turpitudes d’une ville passionnante, probablement pas. Ils ont – dans l’actualité qui projette parfois cette ville au premier plan – d’autres chats à fouetter. Pour inaugurer ce type d’article consacré à une ville ou une région, Marseille s’imposait. Ville de contraste, de paroles et d’images, ville où les graphistes se connaissent et se recoupent, ville où il est plus agréable de donner la parole à ceux qui revendiquent les mélanges et les différences qu’aux chantres de l’exclusion. De l’actualité naissent parfois d’autres synchronismes, comme l’appel d’offres pour le nouveau logo de la ville de Marseille et la chronique du numéro 21 sur ce sujet, ou bien les réactions de certains graphistes, toujours de Marseille, sur l’abondance des logos en pied des affiches, sujet du même chroniqueur dans ce numéro-ci. Soit le journal est “pile poil” dans les sujets du moment, soit plus certainement un vrai ras-le-bol face aux pratiques excessives pourrait bien structurer – enfin – les réactions des graphistes. C’est une question qui se pose aux professionnels comme d’autres se posent aux citoyens, celle de veiller à ce que certaines limites ne soient pas franchies. ■

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Après le Bastille, le Parnasse, le Beaugrenelle, Odéon, Hautefeuille et Beaubourg, le 14 juillet sur Seine a ouvert ses portes au public, le 18 septembre dernier. Les embouts latéraux du bâtiment, ont été confiés à Claude Maggiori. Les mots emblématiques et les citations retenues par Marin Karmitz, fondateur des cinémas, "fusent" de la façade et interpellent les passants. Reste à espérer que les taggeurs ne trouveront pas là une bonne excuse pour en faire… "autant". Comme pour le cahier Livre de Libé, le grand Maggiori a choisi le Matrix Script Bold en approche serrée, créé par Zuzana Licko en 92 et diffusé par Emigre.

aura t’asdebeaux lamortnem’ pasvivant...

rosebud atmosphère phonehome okay! jet’aimelabête yeuxtusais youtalkin’tome?

tomorrowis

anotherday

yconnaît pasleraoul

j’suissur l’point deconclure

bizarre

Claude Maggiori. Agence Editorial. Tél : 01 40 29 09 09.

etmes seins...

jusqu’icitout vabien

les jambesdes femmes sont des compas

merde

labelle

nobodyisperfect dégueulasse playitagainsam qu’est-ce que je peux faire? je sais pas quoi faire!

lesoiseauxsontdescons

quela forcesoitavec toi

si vous n’aimez pas la mer,si vous n’aimez pas la montagne, si vous n’aimez pas la ville, allez vous faire foutre!

lumière démocratie a moralepasseur liberté silence

télévision

amourégalité images désirs rêvescinéma révolte écritures

femmes jeu art 8 résistance 7 héros maivérité fin

point de vue

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américain

acteurs mensonges

regards cérémonie avenir

s’est séparés t’asdebeaux onretrouvés

yeuxtusais youtalk’tome?

amarcord bizarre bizarre yconnait pasleraoul

c’est tellement simple l’amour

rosebud phonehome tomorrowis

anotherday

jusqu’icitout vabien

jet’aimelabelle etmes fesses...

tu me tues,tu me faisdu bien

garance la bête

moitarzantoi jane dégueulasse playitagainsam qu’est-ce que ça veut dire dégueulasse?

lesoiseauxsontdescons

quela forcesoitavec toi

on ne peut tout de même pas tout leur prendre aux pauvres

sexeétoiles

sons

comédie innocent fraternité

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Maggiori et Matrix


création

Commémoration

Pour célébrer ses 150 ans d’existence, la marque Menier (groupe Nestlé) a confié à l’agence Publicis, la conception de nouveaux packagings dont une boîte commémorative "Série limité". Les signes de reconnaissance de Menier (la marque, la typographie, la petite fille et les médailles) ont tous été redessinés pour y gagner en clarté et en lisibilité. Ces transformations et la rééquilibration des codes-couleur permettent à la marque d’entrer dans un nouveau siècle sous le signe de la modernité. Publicis Design. Tél : 01 47 34 4818. Cité

Valérie Besser, en coordination avec l’agence WestEnd, a signé la nouvelle identité visuelle de "l’Association pour la santé mentale de l’enfance", rebaptisée "Chrysalide". Nouveau nom, nouveau logo, déclinaison sur tous les supports de promotion presse ainsi que la création d’une brochure de présentation. Une grande révolution pour de petits moyens qui devrait porter ses fruits. Valérie Besser. Tél : 01 45 88 66 20.

Knorr soigne les restaurants L’agence P’Référence a récemment conçu une gamme de trois aides culinaires, prêtes à l’emploi, pour la restauration. Une démarche qui s’appuie sur le savoir-faire professionnel et une segmentation claire des produits selon leurs utilisations. P'Référence. Tél : 01 44 85 86 00.

Totems et tabous. Les logos sont les totems favoris des chefs. Nouveau chef : nouveau logo et pour Jean-Claude Gaudin, élu en 95, le changement de l’image de Marseille devait passer par la création d’un nouveau logo. Force 10 qui a pour base line stratégie et mise en œuvre de techniques de communication de combat - dirigée par Roger Pronzati a remporté la compétition de l’appel d’offres qui comptait une douzaine de participants. Au vu du résultat, où chacun sera juge, se profile des interrogations sur l'à propos de ce type de changement, sur l’ignorance des systèmes d’identités visuelles urbaines et de leur codes, sur la pertinence des cahiers des charges, et de la capacité technique des jury. Cherchez les tabous !

Poste

Simplifier une image

Correspondances

tout en renforçant sa personnalité : c’est par cette démarche que l’agence Tonnerre de Brest a opéré la rénovation des volumes des produits Vichy. Cette dernière a débuté par un lifting complet du pot, dont la forme évasée évoque à la fois la vitalité et le "V" de la marque. La création a ensuite été déclinée sur l’ensemble de la gamme (pots, flacons et tubes). Une opération en totale synergie avec la nouvelle communication publicitaire de Vichy autour du thème "la santé passe par l’eau". Tonnerre de Brest. Tél : 01 49 88 10 80.

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La réouverture des salles du Musée de la Poste suscite l’édition de nouvelles lignes de produits dont la gamme de papeterie créée par Aude Clément intitulée "Témoins de l’histoire". Des ombres chinoises imprimées sur fond de papier blanc, qui retracent, à partir des documents historiques émanants du Musée, l’anthologie de la correspondance : une succession de silhouettes, messagers de tous les temps, porteurs de nouvelles, à dos de mulets ou en Concorde… Au total, 48 illustrations, pour une partie retravaillées, déclinées sur de nombreux supports : marque-page, bloc d’écriture, bloc post-it, organisateur personnel, pochette de correspondance et… tapis souris. Ce dernier comporte notamment de nombreuses signatures de personnages célèbres qui ont marqué l’histoire de la France comme Robespierre ou Guillaume Appolinaire. La frise représentant les postiers est intégrée à l’image des dentelures des timbres. Des objets qui invitent au voyage. Aude Clément. Tél : 01 42 71 08 69.


création

Disfit

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Police

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Parmis tous ceux qui évoluent dans l’art subtil de la création typographique en France rare sont encore ceux qui entretiennent une réelle démarche de diffusion. Alors nous les soutenons. Nouvelle fournée de polices Radiateur® qui sont désormais visibles sur le site web (http:// www.irgb.fr/ici) de Jean-Jacques Tachdjan. A vous !

Nobo d y abcdefghijklmnopqrstuvwxyz ABCDEFGHIJKLMNOPQRSTUVWXYZ 123456789 &$⁄ *

Saturn

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S q u e e z e

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création

Urbanoïd

London

Le design conserve

Manga boulot dodo

Après l’opération "des chocolats pour les fumeurs", la RATP se penche sur les 11-15 ans en développant une relation de proximité autour du héros le plus mythique des Manga japonaise, dessiné par Katsuhiro Otomo. Cette initiative vise à associer Akira, héros urbain moderne au ticket de métro, dont un exemplaire est offert gratuitement aux futurs usagers. Un ticket spécialement relooké par l’agence Terre Lune, a été édité à 50 000 exemplaires numérotés en partenariat avec Glénat, leader incontesté de ce marché en plein essor. Alexandre Ganem, DA , a dû faire face à plusieurs contraintes comme la taille du ticket, la présence de la bande magnétique, les éléments existant sur le ticket ainsi que l’inscription des droits d’auteurs. Les Mangas, véritable phénomène sociologique en parfaite adéquation avec la cible des 11-15 ans, semblent être, pour la RATP, un moyen pédagogique de communiquer visuellement auprès des jeunes, futurs utilisateurs des transports en commun.

Si

vous souhaitez revoir la première chaise longue ou le premier prototype du fauteuil Petit Confort (1928), le DesignMuseum de Londres met en place une rétrospective inédite de l’œuvre de Charlotte Perriand, grande designer et décoratrice d’intérieur française et créatrice d’avant-garde. La graphiste s’est notamment faite remarquée après son travail de maquettes et d’aménagement d’intérieurs pour la station de ski "Les Arcs" en Savoie. A 94 ans, Charlotte Perriand travaille toujours. Sa dernière commande : une Maison de thé japonaise pour l’UNESCO. Du 24 octobre 96 au 13 avril 97, DesignMuseum, Shad Thames, Londres. Carte postale

Niemeyer à Rio

Terre Lune. Tél : 01 42 63 76 00

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En face de Rio de Janeiro, de l'autre côté de la magnifique baie de Guanabara, se trouve la ville de Niteròi. C'est là, sur le belvédère de Boa Viagem, que le Musée d'Art Contemporain (MAC) vient d'ouvrir ses portes. Ce musée est destiné à abriter une collection de 120 œuvres d'art contemporain brésilien, réunies tout au long des trente dernières années par Joào Sattamini et cédée à la ville de Niteròi. L'architecte Oscar Niemeyer a été invité à réaliser le projet architectural du musée. Tâche difficile car il fallait faire face à la beauté resplendissante du site qui rassemble la modernité imposante de la ville et l'immensité bleue de la baie. A la vue de ce paysage, l'homme qui a construit Brasilia, imagina un oiseau sur le point de s'envoler ou une fleur prète à éclore? Le résultat de cette imagination féconde est un complexe architectural admirable, tant sur le plan esthétique que technique. Le musée s'étend sur 3 900m2 et offre une vue de 180° sur la baie de Guanabara et sur les collines qui l'encerclent. Il possède une salle d'expositions, une bibliothèque, un auditorium, un restaurant et un bar. Le projet graphique du musée a été développé par le studio Dupla Ney Valle/Claudia Gamboa : un dessin de Niemeyer a été retenu pour le logo, souligné sobrement par une typographie qui reprend les courbes si chères à l'architecte. Une plaquette au design aérien et aquatique à la fois, a été réalisée pour présenter aux visiteurs le monument architectural ainsi que les œuvres d'art exposées. Une invitation au voyage... Barbara Szaniecki.


Quelles soient fantastiques, policières ou comiques, historiques, sentimentales et véridiques, graves, brèves ou longues à suivre... les aventures rassemblées dans le premier numéro de Bonté Divine ! font honneur au dessin d'aventure. L'occasion de découvrir tous les deux mois, au fil des numéros, des auteurs-dessinateurs-typographes en quête d'expression graphique. Cette bande dessinée de 200 pages, au format poche, concentre dans chacun des numéros 15 réçits inédits. Reste à préciser que les illustrations, les typographies et la mise en page de chaque volume sont des créations originales des Éditions Bonté Divine ! Coup de chapeau... Éditions Bonté Divine ! Tél : 01 42 84 39 11.

Typo city

Le Japonais Dentsu a été à l’honneur lors de la remise des prix de la 4e édition des Cresta Awards, le 2 octobre dernier. L’agence a en effet remporté le prix "Professionnel-Professionnel" pour ses campagnes d’impression "Hong Kong", "Las Vegas", "Séoul" et "Tokyo" : un concept original qui consiste à isoler tous les éléments typographiques à partir d’unevidéo de chacune de ces villes. Dentsu a également été récompensé pour ses campagnes "Garlic" et "Corn" pour Ion Kiss Toothbrush.

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Bonté divine


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Couverture

On n’arrête pas Progress

Photo : Bruno Louis

François Sargologo & Simon Elliott

"Des symboles universels puisés à la source de l'Histoire". C'est en ces mots que l'on pourrait qualifier la dernière création de Simon Elliott et François Sargologo. L'histoire, la leur, débute il y a un an. François, 38 ans, d'origine libanaise, est contacté par un de ses amis imprimeurs de Beyrouth, Ali Shawraba, afin de promouvoir les qualités techniques de la société au Liban. L'idée d'une brochure est rapidement abandonnée pour faire place à une publication de petit format (21cmx16cm) qui rassemble le savoir-faire de l'imprimeur. Mais pour ces deux directeurs artistiques, cette commande devient, par la même occasion, un support privilégié pour fusionner leurs deux cultures (anglo-saxonne et arabe) et s'exprimer graphiquement, en créant sur vingt pages, un système "corrélation-opposition" entre symboles visuels et citations : une feuille - le logo "Recycle", une pièce de monnaie - une suite binaire ou encore l'empreinte digitale - suite d'ADN génétique. En créant un jeu subtil entre les techniques modernes, les modes de lecture, les illustrations et une suite de mots-clés, ils ont prouvé q'une publication peut à la fois revêtir un caractère promotionnel et être également un support d'expression graphique recherchée. Les mots-clés mis en valeur au sein des citations, bien qu'indépendants les uns des autres, forment une suite logique et poussent le lecteur à s'interroger sur le pouvoir des mots et des visuels, pour la plupart issus du Liban. Le système créé permet également de lire cet ouvrage dans les deux sens : une lecture "à l'Arabe" de droite à gauche, ou "à l'occidentale". Les deux alphabets sont d'ailleurs utilisés. Les deux auteurs poussent le contraste jusqu'aux couleurs (quadrichromie et 10 tons directs-couleurs pantones) et aux matières utilisées : un gaufrage, un papier fibre végétale en antinomie avec les passages multiples de couleurs pantones argentées. On peut noter des prouesses techniques comme l'impression en typo des textes, l'introduction de reliures japonaises ou encore le jeu des transparences du papier en imprimant sur la "face cachée" de la feuille. Contraste toujours en ce qui concerne la typographie utilisée (Letter Gothic Akzidenz Grotesk), des linéales en conflit avec une calligraphie arabe. Cet ouvrage en série limitée est présenté dans un coffret de papier gaufré illustré d'une graine, symbole de la création et de l'inspiration. La plante (croissance et vie) qui se profile sur la couverture incite le lecteur à la découverte. Un bel ouvrage, une belle idée qui oppose merveilleusement les éléments naturels de l'environnement direct à la technologie mise en œuvre par l'imprimeur. Simon Elliott Tél : 01 45 78 29 87. François Sargologo. Tél : 01 47 34 70 37. Ali Shawraba @ Calligraph Printing. Beirut 01 869 212/223/224

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Jean-Louis Azizollah

un commercial sachant créer… par marie-pierre guiard

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etite devinette : quelle est la diffé-

rence entre un commercial créatif et un créatif commercial ? Il n’y en a pas. Ou si peu. A écouter Jean-Louis Azizollah, directeur général de Carré Noir, qui parle couramment le langage des images, le design est avant tout affaire d’observation. Tout est dans l’air, il suffit de savoir saisir, analyser et transcender, toutes antennes dehors. Jean-Louis Azizollah a promené les siennes chez Synergie après une maîtrise de philo et d’histoire de l’art, oscillant entre la création et le commercial puis chez Carré Noir. Avec l’agence, il a choisi de nous en mettre plein la vue. Suite logique d’une exposition intitulée Shopping in Tokyo l’année dernière, Carré Noir organise ce mois-ci un Shopping dans l’univers du cartoon (lire page 52). L’occasion de tourner une nouvelle fois autour du pack et d’emballer tout le monde…

Quelle est l’idée première de cette exposition ?

Sortir du champ de réflexion quotidien. Une agence de conseil et de création n’est performante que si elle a des ouvertures et des antennes sur le monde qui l’entoure. Une bonne agence n’est pas une agence qui sait créer mais écouter pour ensuite transposer et créer quelque chose qui est déjà en potientialité. Aujourd’hui, il se trouve que c’est l’univers du cartoon. Quand on fait du design, on crée des signes qui font le décor de notre consommation, on crée des lieux qui participent à ce décor, c’est une drôle de responsabilité, c’est ce qui fait au bout du compte que le monde devient beau, généreux, intelligent, optimiste. Le commerce ne peut se développer que s’il se base sur de vraies valeurs d’échanges. Quand on vit tous les jours avec une bouteille d’eau posée sur son plateau, cela envoie des stimuli au quotidien. Au même titre que les gens de la mode lorsqu’ils mettent sur le marché des couleurs, des matières… Mais il faut rester modeste, on s’en fait simplement l’écho.

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stratégique pour que les industriels comprennent que c’est une façon d’imposer leur différence et de gagner des parts de marché. Mais je crois que la meilleure façon d’apprécier le design c’est de ne plus faire la différence entre un produit désigné et un objet dans une brocante. C’est un objet qui se vend ou pas. Tout le monde dit que le design, c’est donner du sens, je pense que la meilleure façon de donner du sens à un produit, c’est de le laisser dans son contexte. C’est comme un coquillage que l’on pose sur une cheminée, il perd son éclat, sa couleur. Le plus important n’est pas de monter des expositions sur le design mais de comprendre que c’est un facteur économique. Le métier de designer a-t-il évolué depuis ces quinze dernières années ?

D’où l’importance de regarder ce qui se passe ailleurs…

Exactement, d’où cette nécessité de s’obliger à sortir et à prendre du recul pour comprendre les grands phénomènes qui influencent le monde de la création. Ces phénomènes évoluent-ils beaucoup ?

En permanence, comme une langue vivante. Une langue qui, de plus, va devenir universelle. Aujourd’hui, on crée des produits capables d’être vendus dans le monde entier. C’est la nouvelle donne marketing, la globalisation des marchés. Les images franchissent d’ailleurs bien plus facilement les frontières que les mots. L’affectivité est un moyen de parler aux cultures qui nous sont éloignées. C’est pour cette raison que les héros de cartoon se baladent dans le monde entier. Les bandes dessinées sont les ouvrages les plus traduits. Il faut les observer et les analyser. Pourquoi, dans ces conditions, le design ne génère-t-il que si peu d’expositions ?

Le design n’a pas forcément besoin de s’exposer dans des lieux d’exposition puisqu’il est en permanence présent chez Carrefour ou chez Auchan. L’essentiel du design, c’est finalement de se faire oublier pour être dans la rue, chez vous, sur vous. Il est utile de temps en temps d’expliquer sa dimension

Oui, de plus en plus d’industriels reconnaissant l’efficacité du design, l’on peut passer de plus en plus de temps à travailler et moins de temps à convaincre de devoir travailler… Mais il nous reste pas mal de chemin à faire. La profession doit rester vigilante sur les conditions budgétaires. Bien travailler nécessite du temps. On ne se lève pas le matin avec l’idée géniale, cela demande un vrai travail analytique. Qu’est-ce qui continue à vous nourrir ?

Les gens. Le design n’a d’intérêt que si ça aide des gens à mieux faire commerce entre eux. Ce ne sont pas les dossiers mais les gens qui sont derrière qui sont intéressants. Tout ce travail sur l’énergie. Et le feed back est génial car, à la différence de la pub, il est immédiat. On voit tout de suite si cela se vend ou pas, la sanction est immédiate. Qu’aimeriez-vous tenter ?

Je rêve de reprendre un gros dossier comme Air France, la SNCF ou les grands magasins. Il existe un tel décalage entre leur image et leur pratique, le TGV, les gares, les aéroports accueillants, les services ponctuels… Et d’un point de vue graphique ?

La couleur des automobiles ! On reste en France, très conformiste sur la couleur des automobiles. Tous ces objets métalliques qui roulent et qui stationnent font partie intégrante du mobilier urbain. On aimerait les voir un plus plus gaies, plus humaines. La Twingo est un bon début mais pourquoi ne pas tenter, je ne sais pas moi, des voitures zébrées ? ■


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numérique

Feuilleton

XPress 4, Exposure… Immedia En France, la mise en page et la conception graphique sont avant tout réalisées avec XPress. Société extrêmement discrète aussi bien en communication qu’en information sur ses projets ou sa structure, les nombreux utilisateurs – le temps passant – se posent, avec raison, de nombreuses questions et personne ne leur répond (petit pas, pour la première fois Quark était présent à Apple Expo). Pourtant, selon le réseau des grossistes, cette base installée continue de croître régulièrement et les ventes d’XPress se portent bien. Alors la litanie des questions, que tous les utilisateurs se posent, perdure : Quark est-il à vendre ? Comment va évoluer XPress ? Est-il prévu chez Adobe de déclarer une guerre commerciale à XPress avec PageMaker ? Immedia, présenté à Apple Expo est disponible aux Etats-Unis, quant à la version 4 d’XPress, Quark France, prudent, parle de mi-1997. Au delà de toutes ces questions, subsiste pour de nombreux utilisateurs la désagréable sensation d’avoir soutenu – avec raison – de manière quasi militante un produit et de n’en retirer que mépris. Or, on sait que le rejet de ce que l’on a aimé est parfois extrême…

par Yves Stern Cet article est issu du numéro 112 d’Argos, une lettre d’information et d’analyse sur la Pao, le pré-presse, l’impression numérique et l’édition électronique dont Yves Stern est le rédacteur en chef. Renseignements au 01 43 48 38 41

Selon certains, le secteur le plus actif de la haute technologie américaine est celui de la production de T-shirts. Dans mon placard reposent des dizaines (et oui) de T-shirts commerciaux dont certains se réfèrent à des produits n’ayant jamais vu le jour. Parmi ceux-ci, un magnifique, de couleur sable (parfait pour la plage), orné du logo de Quark, l’éditeur d’XPress, et de celui “d’Exposure” un logiciel de retouche d’images présenté par Quark au printemps 95 pour concurrencer PhotoShop et qui, on vient de l’apprendre, ne verra jamais le jour. Projet abandonné en effet, plus d’un an après sa date prévue de livraison initiale… “Exposure” était né d’un accord entre la filiale américaine du géant de l’électronique grand public japonais, le groupe JVC et Quark. Le premier apportait le cœur du programme, une technologie mêlant traitement bit-map et traitement objet de l’image, une technologie susceptible, sur le papier, de damer le pion à PhotoShop, LivePicture et autres logiciels vedettes de ce domaine, une technologie développée dans ses labos mais pour laquelle JVC pensait préférable de s’allier avec un ténor connaissant bien les besoins de ce marché, les contraintes des interfaces utilisateurs ainsi que les circuits de distribution plutôt que de tenter sa chance seul. Le second partenaire, Quark, devait transformer cette technologie en logiciel clé en main, à savoir établir la liste des fonctionnalités, les mettre au point, concevoir l’interface utilisateurs… un travail important et forcément long. Seconde tâche de Quark dans l’accord, assurer la distribution d’Exposure et toutes les activités de marketing et promotion y afférant. JVC vient d’annoncer la rupture du contrat les liant à Quark et le dépôt d’une plainte contre son ex-partenaire pour non respect d’engagements avec demande de dommages-intérêts importants. Les responsables de JVC accusant Quark de n’avoir pas mis les ressources promises sur leur projet commun.

Et ensuite… Au-delà de la péripétie cette rupture amène quelques réflexions. Tout d’abord cela dégage l’horizon de PhotoShop dont Adobe vient de présenter une nouvelle version,

la quatrième. Effet positif pour Adobe, mais aussi pour le cercle très restreint de ses principaux concurrents comme LivePicture ou Xres (Macromedia). Mais la principale question soulevée par cette rupture et l’abandon d’Exposure, c’est celle de la situation exacte de Quark. Cet abandon représente un nouvel échec dans les tentatives de Quark d’échapper à son statut de société mono-produit. Un statut d’autant plus inconfortable que le marché de ce produit atteint ses limites et que le produit lui-même est à maturité. Maturité qui diminue, aux yeux des utilisateurs, l’intérêt de mises à jours régulières coûteuses. Comme un logiciel ne se détruit pas à l’usage, le rythme de renouvellement est d’autant plus faible. Heureusement qu’Apple change parfois la donne, nouveau processeur, nouvelle version du système, pour justifier mises à jour, nouvelles versions et le chiffre d’affaires correspondant. Pouvoir proposer une gamme de produits, destinés à la même clientèle, cela présente de nombreux avantages, répartition des risques, rentabilisation des efforts de promotion et des canaux de distribution. Il est toujours préférable, lorsque cela est possible, de vendre plusieurs produits différents à un même client que l’on connaît bien que d’avoir à chercher en permanence de nouveaux clients pour le même produit. Cela fait maintenant de nombreuses années que Quark est confronté à cette question. La première réponse fut d’élargir la cible potentielle de XPress. Pour cela ce dernier fut “porté” sous environnement Windows. Cela prit beaucoup de temps et coûta très cher en ressources à Quark pour un succès commercial mitigé ou, tout du moins, un élargissement faible de son marché. Beaucoup d’utilisation Windows de XPress étant en effet des opérations de transfert du Mac vers cette plate-forme. Autre mesure, bien plus réussie, pour élargir le marché de base d’XPress, une politique d’ouverture logicielle offensive, avec les Xtensions, permettant d’adapter XPress à beaucoup plus d’utilisations et d’applications différentes. Mais cette stratégie atteint aujourd’hui ses limites comme moteur de croissance pour Quark. La seconde réponse consista à développer, à côté d’une activité d’édition de logiciels clés en main et de distribution indirecte une activité “systèmes” et distribution par un réseau qualifié à valeur ajoutée. Cette stratégie

● Baisse de prix. Iomega baisse le prix des lecteurs jaz 1Go de 3 500 à 3 000 FHT pour les lecteurs internes et de 4 500 à 3 500 pour les lecteurs externes ● Dolev 800V. Scitex annonce la sortie de sa nouvelle flasheuse 8 poses ● Postscript niveau 3. Adobe annonce la mise en chantier du niveau 3 de leur fameux langage de description de pages. Il permettra de ripper directement des pages PDF ou HTML (nous y reviendrons) ● ClicWorks. Scitex se lance à son tour dans le multimédia avec ce logiciel présenté à Apple Expo. Vendu 7 900 FHT, c’est un produit de plus qui vient titiller le leadership de Director ● Correcteur typo en réseau. Toujours à Apple Expo, il fallait découvrir la version réseau de ProLexis qui permet de partager les dictionnaires et les préférences, bien pratique lorsque l’on travaille à plusieurs sur un magazine par exemple.

14   Étapes Graphiques – Octobre 1996


Nouveau starter Kit chez PhotoDisc permettant de consulter plus de 15 000 images et de disposer en bonus de 30 photos en haute résolution. Les derniers CD édités présentent différents types de fonds, de matières, de documents géométriques ou d’images permettant de nombreuses dérives graphiques. Un logiciel de navigation permet, par mot clef, d’effectuer tout type de sélections. PhotoDisc est à ce jour un des plus importants distributeurs et certainement le premier a avoir lancé les CD photo libres de droits d’auteurs. Ce StarterKit est disponible au prix de 310 FHT au 05 90 04 20. Le répertoire complet des images PhotoDisc est disponible sur le site Web : http :// www. photodisc. com

Immedia… Dernière option pour sortir de cette impasse, l’idée d’accompagner ses clients dans la quête de nouveaux marchés, de nouveaux débouchés. L’édition multimédia devient une réalité et un nouvel horizon d’activités potentielles pour les clients de Quark, d’où l’idée de lui proposer une solution reposant sur XPress. C’est le projet Immedia dont la commercialisation débute aux USA ces jours-ci. Il s’agit d’une série d’Xtensions XPress apportant à ce logiciel des fonctionnalités pour gérer des données dynamiques, son, animation et séquences vidéo, ainsi qu’un langage permettant de réaliser des scripts enchaînant différentes actions (passage de page, lancement de vidéo…). Ainsi “équipé” XPress est transformé en logiciel “auteur” multimédia. Avantages de la démarche : elle s’appuie sur la maîtrise d’XPress par une large base installée. Elle permet en outre de tirer immédiatement parti de nombreuses fonctionnalités graphiques et typographiques déjà présentes dans XPress. Inconvénient, le format de fichier étant spécifique, les pages ou documents interactifs créés avec Immedia requièrent un logiciel de consultation particulier. Bien entendu, Quark s’engage à faire le maximum pour que ce nouveau “reader”, gratuit, soit largement diffusé. Toutefois personne ne tient à manipuler différents “readers” selon l’ouvrage électronique qu’il souhaite consulter. Force est de constater que le marché des “readers” est aujourd’hui monopolisé par les logiciels de consultation Web comme ceux de Netscape ou Microsoft ou par Acrobat d’Adobe, des logiciels qui reposent sur des technologies bien différentes qui, de plus, évoluent à un rythme effréné, un rythme difficile à soutenir pour Quark qui reste un nain comparé à ces dernières sociétés. S’ouvre pour “Immedia” cependant le marché, déjà important, de l’édition électronique off-line, sur CD-Rom, bornes électroniques ou autres supports permettant

Anecdote. Un imprimeur américain a largement dépassé le million d’exemplaires (sans altération de la qualité) avec la même plaque Silverlith de Dupont dont il s’est vendu plus de 2 millions d’exemplaires depuis la dernière Drupa.

Sans chimie. LaserMaster annonce une nouvelle flasheuse, présentée comme personnel (cela veut dire quoi) qui permet sans chimie de produire des films jusqu’au format 304,8/660 mm en trame 133 demi-tons. Une solution intéressante (149 000 FHT) pour produire, à domicile, des films de bonne qualité où la solution thermique de dépôt d’encre évitant la chimie est une solution souple. Macsys :

01 49 48 61 50. Fiery. Les Rips et serveurs Fiery déjà connectables à l’ensemble des copieurs du marché étendent leur champ de possibilités. Ils sont désormais connectables aux traceurs grand format Novajet et HP DesignJet ainsi qu’au système d’impression couleur DocuColor de Xerox et celui de Indigo. Par ailleurs, Electronic for Imaging annonce la possibilité d’imprimer des fichiers au format Acrobat via le Web sur un copieur connecté à un Rip Fiery. Renseignements : 01 41 79 00 00.

Étapes Graphiques – Octobre 1996   15

numérique

Photos libres de droits d’auteur

reposait sur QPS, Quark Publishing System, un système éditorial-production intégré pour la presse quotidienne ou les gros magazines. L’impact commercial, après plusieurs années, est bien réel, la base installée s’étend. Mais au départ l’accueil fut très réservé et le succès long à se concrétiser. La rentabilité de l’opération reste, quant à elle, une inconnue ainsi que les avantages ou inconvénients de la cohabitation de deux modèles d’activité, parfois difficilement compatibles, en une même société. La troisième réponse reposait sur l’élargissement de la gamme de produits proposés à la clientèle de Quark. La palette de logiciels d’une grande partie de cette clientèle comporte, à côté du logiciel de mise en page, un logiciel de dessin vectoriel (généralement Illustrator ou FreeHand) et un logiciel de retouche d’images (bien souvent PhotoShop). D’où les rumeurs au moment où Adobe se déchargea de FreeHand (issu d’Aldus) et de la reprise de ce logiciel par Quark… mais cela ne se fit pas. D’où le projet Exposure, qui capote aujourd’hui. Echec donc de cette voie pour sortir de l’impasse mono-produit.


numérique

directement l’intégration du “reader” au document édité. Un marché déjà couvert par Macromédia avec son logiciel Director, Adobe, encore, avec les possibilités de scripts offertes par Acrobat et quelques autres. Un marché visé aussi par Scitex qui vient de lancer ClicWorks, un logiciel ad-hoc.

Nuages… L’arrêt d’Exposure relance donc, pour de nombreux observateurs, les interrogations sur la solidité financière de Quark, interrogations amplifiées par son opacité financière. Non cotée en bourse, détenue par des particuliers, Quark ne publie aucune information sur son chiffre d’affaires, sa rentabilité, l’évolution de ses effectifs… Interrogations amplifiées aussi par les reports successifs de la version 4 d’XPress. Tout cela apparaît quelque peu angoissant pour de nombreux utilisateurs, groupes de presse ou d’édition ayant misé gros sur XPress et déjà très “énervés” depuis plusieurs années par la faiblesse du support reçu en contrepartie de leur engagement et parfois une certaine “désinvolture” dans les relations. Pour notre part, nous n’avons pas souvenir d’une situation historique analogue, une situation où un fournisseur détient une hégémonie semblable sur le cœur de la production de tout notre secteur d’activité et où l’on dispose de si peu d’informations fiables permettant d’évaluer sa pérennité et la qualité de son engagement. ■

● Fractal Design présentait à Apple Expo, Detailer, étonnant logiciel de peinture 3D qui permet de peindre, en temps réel, tout objet filaire issu d’un logiciel de 3D. On y retrouve toutes les possibilités de Painter mais appliquées au maping 3D. Petit tour pas à pas. •  On importe une image en volume ou on utilise une forme fournie avec le logiciel. •  Soit on dessine, soit on applique une texture (avec possibilités de jouer avec des lumières et des éclats par exemple), soit on importe des images ou photos (y compris les calques de Photoshop). •  Les textures peuvent habiller un objet en utilisant les différents mapings : sphérique, cubique, cylindrique, par plan et par mode paramétrique. •  Les modèles peuvent subir des rotations et ressentir les effets d’ombres et de lumières. Vendu 2 745 FHT dans tout le réseau revendeurs.

16   Étapes Graphiques – Octobre 1996

Qui t’a fait roi ? par Thierry Buanic Formateur, utilisateur d’XPress, Thierry Buanic est aussi l’auteur du livre de formation sur XPress édité par Pyramyd.

Beaucoup d’utilisateurs de logiciels d’édition papier ont aujourd’hui la sensation (inconfortable) d’être abandonnés. Bien sûr, Adobe nous proposera bientôt une nouvelle version de PageMaker, la 6.5. Mais, outre la désagréable impression (générale à tous les éditeurs) que les mises à jour sont davantage programmées pour taxer les utilisateurs de 1 500 F tous les 12 ou 18 mois qu’en fonction d’innovations professionnellement utiles, force est de constater, au vu des déclarations d’Adobe, que l’effort porte d’abord sur le multimédia et l’intégration HTML. Une fois de plus, le “XPress killer” est renvoyé à une version ultérieure. S’il est évident qu’Adobe couvre beaucoup de besoins en PAO (mais a revendu sa division pré-presse), cette offre repose sur une multitude d’applications : PageMaker, FrameMaker, Illustrator, Photoshop, ATM 4 – au demeurant très intéressante alternative à un décevant Suitcase 3 – Streamline, Dimensions, etc. L’apprentissage, l’articulation, la mise à jour de toute cette batterie sont d’un coût élevé pour les entreprises. Et de réels progrès, par exemple dans l’automatisation des tâches répétitives, la gestion des défonces, des feuilles de style plus élaborées, etc. ne pointent leur nez qu’à doses homéopathiques. À quand le multipage et une palette des cotes non fantaisiste dans Illustrator, l’import de texte dans de véritables “formes” dans PageMaker, etc ? Les spécialistes d’Adobe, qui se montrent par ailleurs d’excellents acrobates, devraient pourtant y arriver sans trop de mal. Du côté de Denver, Colorado, la situation est bien pire. Ou bien j’ai rêvé, mais alors, c’est une hallucination collective, ou bien j’ai entendu, au Seybold Paris de juin 1994, Tim Gill, l’un des deux créateurs – chief managers – propriétaires de Quark, nous promettre une version 4 d’XPress intégrant la plupart des fonctionnalités qu’il venait d’avoir la bonté de nous demander de lui proposer et ce, au plus tard pour la fin… 1994 ! Deux ans après, nos vieux XPress 3 tournent toujours, avec de plus en plus d’XTensions, beaucoup trop chères et souvent sources de lenteurs et de conflits.

Des mises à jour de sous-versions, il y en a bien ! Pas pour de nouvelles fonctions (à moins de considérer les dégradés en diamant comme un progrès majeur), mais pour de nouveaux modèles de Mac ou versions du système, qui posent problème à un logiciel vieillissant, jamais réellement “reconstruit” pour les PowerMac. Ces “patches” sont disponibles avec retard et un manque total d’informations des clients à qui ils sont rarement envoyés (ou seulement à certains) : les mystères du fichier Quark, même quand on a renvoyé une carte d’enregistrement à chaque version, sont insondables ! Ce mépris des clients a atteint un sommet dans l’arnaque du passage à la version PowerMac qui coûtait plus de 2 000 F, pour un logiciel identique ! Tous les autres éditeurs (sans exception) ont dès le début vendu des versions doubles (Mac et PowerMac) de leurs logiciels pour le même prix, ce que Quark ne fait que depuis cet été. Et que dire de la triste pantalonnade du récent filtre pour Word 6, attendu plus d’un an et qui ne marche plus pour Word 5… Là encore, la publicité autour du prochain accouchement (pénible) de QuarkImmedia pour le multimédia est le seul message diffusé depuis plus d’un an. Entendonsnous : il ne s’agit pas ici d’opposer le papier à l’écran, mais de parler de l’irritation de professionnels qui dépensent des sommes qui s’alourdissent à chaque mise à jour et qui ont besoin d’outils de travail efficaces et productifs, non pour faire joujou, mais pour gagner leur vie. Je ne sais plus d’où vient la réplique célèbre : “N’oublies pas qui t’a fait roi…”, mais elle me semble terriblement d’actualité, à un moment où le marché du multimédia est loin de tenir les mirifiques promesses que les augures lui assuraient. ■


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Mots de passage

E par laurent sauerwein

Gris, imper et passe. Avec le temps qu’il fait, on est mieux chez soi, blotti bien au chaud entre le Web et la télé, entre lecture et spectacle.

E-mail : 73364.2063@compuserve. com Passage des arts : http ://www. geocities. com/ Paris/2572

nlevez les images, retirez les sons, dégagez la

vidéo, virez la réalité virtuelle d’Internet et que reste-t-il ? Des mots et des liens hypertexte. C’est-à-dire l’essentiel, non ? Franchement, sans ces images en format GIF même pas entrelacé ou JPEG mal ficelé, les connexions seraient à nouveau rapides comme la lumière et on pourrait surfer le Web sur des vagues dignes de ce nom. Il y a des jours où je me sens profondément iconoclaste, notamment les jours où le Web s’enlise. Problèmes de tuyaux, de “bande passante” paraît-il. Tu parles… Je n’ai jamais vu la moindre bande passer sur le Web. C’est la faute aux images et aux sons, je vous dis. A quoi peut bien servir un livre sans image ni conversation ? se demandait l’Alice de Lewis Carroll. C’était avant qu’elle n’entre au Pays des Merveilles. La pauvre petite, si elle avait su qu’au bout du chemin il y aurait le World Wide Web, que celui-ci serait de plus en plus contaminé par la télé et que la télé chercherait à phagocyter Internet, je suis sûr qu’elle aurait hésité à suivre le lapin dans son trou. Pourquoi diable faut-il que la télé vienne contaminer le Web ? Chez moi, j’ai arrangé le salon précisément pour éviter cette confusion : quand je suis assis devant mon Mac, je tourne le dos à la télé. Peine perdue. Avec Shockwave, QuickTime, RealAudio, voilà maintenant que le Web s’agite et vocifère à son tour. Je ne retrouve la paix que dans le silence des mots ou en matant le Fuji Yama en direct-live (www. flab. mag. keio. ac. jp/cgi-bin/fujicapture. cgi). On peut piloter soi-même le zoom de la caméra. Lorsqu’il fait jour là-bas, c’est saisissant. Lorsqu’il y fait nuit, c’est Zen. En tout cas, c’est mieux que Fort Boyard. Vous allez voir qu’on va finir par regretter le charme désuet du Minitel, le 3615, cette ruineuse et lente grisaille qui a pris jadis son essor avec du texte dit rose. Ah, le texte pur et dur avait son charme, y compris dans le courrier électronique, mais voilà que Netscape sort un nouveau lapin de son chapeau : “HTML mail”, ça s’appelle. Difficile à prononcer mais ça vous permet d’envoyer du courrier électronique en incluant images, sons, et liens hypertexte. Du e-mail multimédia, quoi. Trop cool. Chers parents, nous passons des vacances géniales à Palavas-les-Flots (QuickTime de notre discothèque préférée). Nous dormons toute la journée mais il paraît qu’il va continuer à faire beau (cliquez ici pour Météo France). On vous embrasse (à gauche, c’est Rita, à droite, de dos, c’est moi). Signé : michou@vacances. com/.

un faible pour les passages avec leurs vitrines et leurs courants d’air. Il en reste un certain nombre dans le centre de Paris, en profonde désuétude, complètement éclipsés par les grandes surfaces et autres zones dédiées à la marchandise qui se sont installées à la périphérie. De nombreuses boutiques des passages du centre-ville sont closes. On voit le courrier, glissé sous leurs portes vitrées, s’amonceler dans la poussière. Ça se déglingue et ça se délabre. Pas très gai, tout ça, direz-vous. Raison de plus pour ouvrir un nouveau passage tout blanc, avec vue sur les arts d’un côté, sur le lac et les montagnes de l’autre. Un endroit flambant-neuf où, grâce au ray-tracing, le soleil brille à minuit. Il va peut-être falloir que je rajoute tout de même un peu de nuages et de poussière.

Techno retro

La technologie la plus sophistiquée est celle qui parvient à se faire oublier, celle qui se fond dans le paysage et dans ce que Virilio appelle la “profondeur de temps”, par opposition à celle, de champ, de l’image. Tiens, j’aimerais bien voir un site dont le texte serait totalement écrit à la main, au crayon, sur ce qui ferait penser à du papier recyclé. Des pages de Web un peu froissées. Des boutons patinés sur lesquels on clique avec des curseurs un rien amochés. Ni “destroy”, ni Blade Runner, juste un peu râpés autour des coudes et hors-saison. Dans son film de science-fiction “Farenheit 451”, inspiré d’une célèbre nouvelle de Ray Bradbury, François Truffaut avait choisi d’utiliser, dans le décor, des accessoires vieillots plutôt que futuristes. Il y était question d’une société où on brûlait les livres et où des gens apprenaient les textes par cœur afin d’éviter qu’ils ne disparaissent à jamais. Ces résistants de l’écrit parlaient d’avenir avec des téléphones du passé. Je me demande si un jour on pourra s’envoyer des e-mails avec un poste à galène. Ma grand-mère russe avait la télé, un poste en noir et blanc avec un écran bombé et aux coins arrondis. Ça faisait un bruit d’enfer chez eux parce que mon grand-père était sourd comme un pot. Lorsqu’il y avait une scène sombre dans un film, Babouchka approchait une lampe de l’écran pour essayer d’y voir plus clair. Par ailleurs, elle était très cultivée, je vous assure. Elle pouvait réciter Pouchkine, Schiller et Shakespeare de mémoire comme les gens dans le film. De plus récents poètes comme Philips, Samsung et Mitsubishi sortent des bidules pour se connecter au Web sur une vulgaire télé. Le Net dans le poste en somme. Ces gens-là Passage des Arts n’ont rien compris. La distance optimum pour regarder la télévision, c’est le carré de l’hypoténuse égal à la somme J’ai créé mon site et posé mon sac à pixels dans un coin des carrés des deux côtés, moins l’âge du capitaine, alors de la toile. J’ai enfin un lopin à jardiner le dimanche. Ça ne coûte pratiquement pas un rond, alors pourquoi diable quelques mètres. Vous vous voyez lire ces lignes à une telle distance ? Bien sûr que non. C’est bien ce que je vous s’en passer ? J’ai créé ma “home page” à l’aise et à l’œil. Sans mot de passe ni passe-droit. Maintenant c’est à vous. disais : attention, il y a un complot contre le texte. Je ne vous en dis pas plus. ■ La première chose a été de lui trouver un nom. Shangri-la, Eldorado ou Édelweiss, c’était tentant, mais le site s’appelle finalement “Passage des Arts” parce que j’ai

18  Étapes    étapes Graphiques - Octobre 1996


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graphisme

Mars Vert perroquet (062C), rouge tomate (032C), jaune mauresque (011C)…

toutes les couleurs de…

Si le graphisme marseillais est sensiblement le même qu’ailleurs, les traits de caractères y sont différents. Absence de book au profit du contact, relais inter-graphistes, relations aiguës et vitales avec le culturel, transversalité omniprésente, les individus comme les groupes revendiquent haut et fort leur travail et leur ville. Autre point commun, la méfiance créative face à l’outil numérique et l’envie de l’authentique, de la matière vraie, du brut, typique de l’identification de cette ville maritime et méditerranéenne. Ils ou elles ne sont pas tous dans ce numéro : pas eu le contact, pas répondu, pas rencontré, rien envoyé, autant de mauvaises raisons, mais nous reviendrons, l’accueil était vrai. Cette enquête sur le graphisme à Marseille, en quête d’un graphisme marseillais, inaugure un principe d’article qui verra d’autres villes ou d’autres régions prendre leur place épisodiquement dans Étapes Graphiques. Merci à tous.

22   Étapes Graphiques - Octobre 1996

S

ans doute plus qu’aucune autre ville de france,

Marseille ne peut laisser personne indifférent. Une ville qui tranche, une ville à la fois laide et belle, une ville propre et sale, une ville qui a raison et qui a tort, une ville où l’ombre est lumière, une ville qui a toujours “tourné” le dos à la France et sans doute encore plus à Paris. C’est sous forme de galéjade qu’un des graphistes marseillais m’a accueilli, en m’offrant le Marseillan Process Color Guide, équivalent local du nuancier Pantone, outil indispensable pour aborder cette ville aux saveurs empruntées à une histoire déjà vieille de 2 600 ans et aux différentes cultures qui font d’elle un cas unique. C’est de ses collines situées autour de la ville, remparts naturels contre toutes les “agressions nordiques ou barbares” que Marseille tire la principale de ses originalités. Ville ouverte sur la Méditerranée, la mer du milieu, d’où sont venus les Phéniciens il y a 2 600 ans et qui se sont installés ici les premiers. Ce sont eux qui ont donné à cette ville une couleur qu’elle ne quittera jamais, celle des “marchands de tapis”, la couleur du commerce, du négoce avec les


seille autres rivages, la couleur de ses entrepôts. Depuis, Marseille a confirmé cette ouverture par la mer, avec une immigration d’origine maritime, Asie, Arménie, Maghreb, Afrique noire… bien plus forte que celle du continent. Point stratégique tout au long de l’histoire, Marseille qui semble sans passé – ici il y a peu de monuments – est cadette de Rome de 100 ans, mais elle s’est construite sur elle-même, en s’empilant, en s’effaçant, en s’oubliant. Marseille, ville du soleil, ne conserve de son passé que des traces orales, de simples empreintes. Aucune grande industrie ne s’est installée lors de la révolution industrielle et ici il y a sans doute moins d’industries que dans d’autres régions. Alors sa vraie richesse, elle l’a toujours tirée de l’ailleurs, de son port, lieu où l’on achète et l’on revend, pôle marchand central, lieu de négociation par excellence, de dialogues, de “palabres”. Cette richesse tant développée, c’est celle de l’étranger, du métissage, de l’échange, du troc, Marseille a su s’enrichir de la culture du passager. Avec ses 30 km de large, cette ville, grande par sa superficie, est

un lieu où les gens parlent beaucoup ; c’est un village de plus d’un million de personnes où tout est occasion de discuter, de se héler, de se rencontrer, Marseille est grande par son âme. Et puis un jour, hier, le port, comme d’autres activités ailleurs, a décliné pour finalement se casser la figure, risquant de tout engloutir avec lui. Et pourtant, malgré toute la mauvaise image qu’elle a eu et qu’elle a encore, malgré l’absence de fonds qui ne sont jamais arrivés, malgré le retard énorme qu’elle a accumulé, cette ville s’en sort. Pour qu’elle soit encore là, pour qu’elle continue à attirer tant de monde, tant de passages, tant de convoitises, c’est qu’il y a des gens qui bossent et qui créent. Marseille s’agite, Marseille met le feu, et montre à tous son dynamisme, peut-être même plus que d’autres car elle a des choses à prouver, à se prouver, pour se défendre. A Marseille on est d’abord fier d’être Marseillais, et on aime se montrer, s’afficher. Pour compenser la baisse d’activité du port, Marseille s’est dotée d’une politique volontariste visant à rattraper son retard culturel. La mise en place, il y a une ving-

de notre envoyé spécial à Marseille

Rudy lainé graphiste et concepteur multimédia

Étapes Graphiques - Octobre 1996   23


Yellow Cagnard : Lou souleo mi fa canta, lou cagnard mi fa caga disait Theillard de Chardin.

Olive Oil : plus qu’une base de la cuisine marseillaise, un art de vivre.

Pastaga : traduction marseillaise du mot “pastis”.

Rust : la rouille est indispensable pour la soupe de poisson et la bouillabaisse.

Red Tomato : la tomate n’a du fruit que le nom. 100 % marseillaise, grenadine incluse.

Ass Scrapper : chaque fois que tu essaies de mentir, tu deviens rouge comme un gratte-cul. Parrot : variante chlorophilisante de la mauresque où l’orgeat est remplacé par du sirop de menthe. Avec colorant bien sûr, sinon pourquoi dirait-on un perroquet ? Mistral Blue : lorsqu’il souffle “à décorner les cocus”, il donne aux cieux ce bleu profond qui est dans les yeux… D’où l’expression : “Ciel mon mari”.

Olympic Blue : la passion de toute une ville… Black Tapenade : l’olive sous toutes ses formes, ou plutôt sans forme puisque totalement esquichée pour donner cette purée parfumée et savoureuse.

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Marseillan Process Color Guide Admirez le Black Tapenade (084C), à base d’olives totalement “esquichées” pour donner cette purée parfumée et savoureuse ; ou encore le Yellow Cagnard (012C), l’Arabic Girl (011C), le Soap (014C) (qui a fait la renommée de la ville), et aussi le Fool House (093C) composé des couleurs originelles de la “maison du fada” immeuble du Corbusier baptisé ainsi affectueusement par les Marseillais. Le Marseillan Process Color Guide à consommer sans modération… comme le reste…

taine d’années, d’une ouverture culturelle intensive, a porté ses fruits, attirant énormément d’artistes, de créateurs, de troupes de danse, de théâtres, de cirques. Tout existe à Marseille, et le graphisme marseillais s’offre ainsi un vaste champ d’investigation potentiel. A côté de cela, il existe peu de budgets de communication publicitaire pour les quelques grandes entreprises de la région, pourtant célèbres (Orangina, Haribo, Panzani…) qui, même si cette communication se décide sur place, s’adressent à Paris. Ici, il ne reste que des miettes, et les quelques trop rares budgets de consommations qui traînent sont plutôt pris par les agences de


pub ou par ceux qui existent ici depuis longtemps. C’est sans doute cette double réalité qui donne au design graphique local sa couleur bien particulière. Inutile de chercher une spécificité du graphisme marseillais dans sa plastique ou dans son style. Non, les graphistes que nous avons rencontrés, sont ouverts à toutes les influences, toutes les écoles, comme vous et moi. Cette spécificité se situe ailleurs. La forte place du fait culturel, le bain permanent des institutions dans ces activités créent un rapport bien particulier entre ces institutions publiques, les graphistes, les artistes et la communication. Tout est rapport à la culture, au message, à l’image ; ici on ne vente pas les petits pois, on les expose. Il y a toujours un apport à forte valeur d’image, impliquant une “culture” urbaine, la mode, la musique, etc. Tout cela se retrouve dans la communication que créent ces graphistes pour les lunettes IDC, les jeans Aviatic, les santons Carbonnel ou le Conseil Général… Les identités sont très fortes, car ici les clients sont des “flambeurs” de l’image. Il y a une évidente prise de risque de la part de ces institutions et de ces commanditaires, une acceptation, un désir, même, d’oser, et cela ne se voit pas partout ! Culture omniprésente, biennales, lieux, événements, expositions, musées, incitent les graphistes à se placer plus près d’une démarche artistique, plastique, moins arts appliqués, les conduisant également à avoir, pour beaucoup d’entre eux, une activité éditoriale propre. De “l’utilité” de l’art appliqué à “l’inutilité” de l’art, les frontières ne sont pas marquées et surtout non revendiquées. Ce qui, ailleurs, participe à la nourriture intellectuelle et visuelle du graphiste comme source d’inspiration, de références, est ici intégré pour beaucoup comme une démarche qui se retrouve aussi dans le rapport au client. Certains n’hésitent pas à affirmer : on aime bien quand il n’y a pas de brief, on a du plaisir à le faire… nous créons totalement l’image du client, démarche qui n’existe pas uniquement dans la réponse, mais aussi et parfois surtout, dans la proposition. L’arc en ciel de la création est riche de ces ambiguïtés, artistes devenus graphistes, graphistes devenus

artistes, il n’y a pas de revendication corporatiste, et à Marseille, on aime à se mélanger. C’est à double sens total, car un plasticien marseillais peut se voir commandité par un annonceur ou un musée, un travail de design graphique, cela ne posera aucun problème de lui confier l’édition d’un catalogue, d’une affiche. A l’inverse, on pourra demander à un graphiste de faire un acte d’art dans le cadre du 1 % par exemple. Il n’y a pas de cloisonnement, mais ce n’est pas du touche à tout, cela vient du pouvoir et du bon vouloir des décisionnaires, de ces clients, qui consultent et décident, et qui surtout, osent… A tout cela, bien que le travail pour un client appelle les mêmes règles que partout, il est certain que le “côté sud” influe, un climat sympathique, un rapport humain un peu plus décontracté parce qu’il fait beau, un rapport hiérarchique sans doute plus rapide. Ici, pas besoin de book, on préfère éditer des cartes postales pour se faire connaître, parler, un pastis à la main, et surtout faire confiance au bouche à oreille. A Marseille, tout le monde se sait m’a dit Alain Puech aujourd’hui plasticien après avoir été graphiste, Marseillais de Marseille comme il aime à dire, à revendiquer même, et c’est totalement vrai… La Friche de la Belle de Mai, TakTik, I am, Tous des K, Ryck et Lola, le Trolleybus, Casa Factori, Alain Puech, Michel Morosoff, Les abattoirs, Georges René, Michel Strauss, la Cité de la Musique, etc, etc, autant de lieux où l’on se croise, d’individus qui se respectent, de groupes qui se connaissent, de “bandes” qui parfois, se fréquentent, de parcours qui se chevauchent, de liens qui s’entretiennent, de discours qui se superposent. Sans cette entraide, ces amitiés, ces affinités qui vont bien au-delà du simple regard des uns sur les autres, ce reportage n’aurait pas pu être ce qu’il est, et j’en profite pour leur dire merci et bon vent, belle mer. Maintenant fermons les écoutilles et plongeons dans le Marseille de l’image. ■

Les Abattoirs Ce lieu, dont les anciennes fonctions ne vous auront pas échappées, très beau dans son détournement actuel s’impose comme un des lieux culturels “alternatifs” de la ville. Au milieu d’un chemin allant du Vieux Port aux quartiers nord, loin du centre ville et de La Canebière, loin du tourisme et du commerce, Les Abattoirs accueillent à titre gracieux (et précaire) différentes activités : associations, ateliers de plasticiens, ateliers pour enfants, cirque de rue, atelier de réparation de vieilles motos… Sacré mélange ! ■

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Tous des K

État civil : Stéphan Muntainer 29 ans, Didier Deroin 26 ans, Pierre Vecca 23 ans, trois fils de prof, trois ans d’écart, nous sommes trois, la lettre K a trois barres, le K est une lettre de mythologie. Nous n’avons pas de boo“K”. Marseille : Il faut partir pour savoir combien Marseille peut te manquer. Cette ville, au départ quand tu y vis, elle ne te plaît pas, y’a rien, et quand tu reviens… tu l’aimes, tu t’aperçois que tout est à faire, que tout est en train de se faire. D’ailleurs, nous proposons un projet personnel sur les 2 600 ans de Marseille, on est en train de rédiger une grosse recommandation basée sur le graphisme et la communication pour une année d’événements, de réalisations graphiques afin de sensibiliser les gens à leur ville, à leur apprendre des choses pendant un an, pour qu’ils ne fassent pas la fête sans savoir pourquoi. Images : On préfère le cinéma film que le film vidéo, le film photo que la photo numérique, et ainsi de suite, les images que nous faisons, nous en constituons tous les ingrédients nous-mêmes, nos rendus sont authentiques, photocopies, prises de vues qui ne correspondent pas pour nous à l’univers du Mac. On s’aperçoit avec toutes les possibilités offertes que cela prend plus de temps de refaire quelque chose de réel avec l’informatique que de le faire réellement. Il y a une sorte d’absurdité dans tout cela, c’est qu’on nous propose des images fausses pour faire croire que c’est des

Casa Factori Remettre la parole de l’artiste dans la cité, redonner à l’art une place sur les murs de la ville telle est aujourd’hui la volonté farouche de Martine Derain et Laure Maternati de Casa Factori. Cette structure associative, après avoir œuvré dans la communication graphique (on leur doit entre autres, la com du Trolleybus de 91 à 94) est désormais centrée sur la recherche autour de la chose imprimée, tout d’abord par l’édition et la diffusion d’une “revue murale urbaine”. Celle-ci, conçue comme un es-

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pace ouvert à d’autres artistes, se propose de donner à lire et à voir de multiples propositions différentes, photo, graphisme, écriture dans le contexte ouvert de la rue. Chaque artiste utilise l’espace d’une page, Casa Factori conçoit la mise en page dans son ensemble, assure la fabrication et la diffusion. Cette revue, qui s’appelle “numéro”, constituée de 7 à 8 “affiches” 60 x 80 en noir et blanc, est collée sur les murs de Marseille, la ville aux multiples visages, selon un par-


vraies alors que c’est tout aussi simple de faire des vraies. Il faut que l’image soit évidente au premier abord, que les gens puissent la comprendre au premier degré, puis au second et au troisième, qu’ils puissent y voir des anecdotes, des références pour s’amuser. Il ne s’agit pas de faire de l’élitisme, on va pas “éléver” le niveau, il faut que tous les “niveaux” soient contents. Macintosh : La machine ne remplacera jamais le coup de crayon. L’erreur et l’aléatoire existent avec le Mac. L’erreur, c’est ce contre quoi on se bat, la courbe de Béziers qui part dans un coin, le pixel parfois par son manque de qualité, mais on a toujours la possibilité d’enlever cette erreur, il ne faut pas oublier le

Autopromotion Séries de cart-coms diffusées dans toute la ville. Elles sont signées Kréativ Killer Gang en référence évidente à une certaine mythologie de la ville. La mode çà Fish Cart-com pour un défilé de mode organisé au Cactus café.

cours qui suit la ligne de bus 70, allant du Vieux Port touristique aux quartiers nord à forte proportion d’immigrés (en passant par Les Abattoirs où elle est installée). Sur ce parcours symbolique, des emplacements réguliers de collage ont été déterminés et négociés avec les propriétaires privés ou publics des murs. Au sommaire, de Ruedi Bauer à Alain Puech, autant de regards ou de messages portés sur la société, sur la création contemporaine mise à la disposition de tous,

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“Pomme Z” qui est un très grand paramètre, mais utilisé à bon escient. Demain : On en vient de plus en plus, à côté des clients, à proposer des projets, expo photo, un livre sur I am (sortie chez Plein Sud en octobre). Ce sont des “entreprises personnelles” que nous créons sous le nom collectif Tous des K. Ce qu’on voudrait, au-delà d’être un studio de création, c’est être tout et n’importe quoi, on voudrait devenir un label, par exemple acheter un vignoble et produire une cuvée Tous des K… Multimédia : Non (sauf Pierre), on pense qu’aujourd’hui c’est une grosse poubelle qui deviendra intéressante quand il y aura une valeur mercantile et de promotion derrière, qu’on pourra envoyer des mailings etc. Une affiche dans la rue, on marche et on la voit, même si on tourne le regard, on le tourne parce qu’on l’a vue, le multimédia si on veut pas voir, on voit pas. Boulots : Nous sommes des faiseurs de “gibouillis” (sans R), on ne fait pas de rough, on envoie toujours au client des merdes infâmes, il y a quelques traits avec des explications et c’est ça qui sort et ça marche toujours… On a toujours le souci de créer une image de marque, une identité, avec notre façon, notre sensibilité, on s’y reconnaît, c’est ce qu’on estime être le meilleur pour le client, son image. Ce qui nous plaît c’est créer une histoire, développer, faire durer, On a failli faire l’affiche de La haine, grâce à nos cartes postale que Kasowitcz avait reçu et qui a aimé notre boulot. ■

permettant la confrontation directe avec les gens, la discussion ou encore le détournement par d’autres colleurs d’affiches. Elles en sont à leur cinquième numéro (numéro 4), celui-ci sera collé/diffusé simultanément sur les murs de Marseille et de Casablanca en collaboration avec des artistes marocains. Un nouveau pari audacieux en perspective, deux femmes collant des “images” sur les murs d’une civilisation qui n’a pas encore vraiment fait de place aux femmes et aux images… Des filles à suivre… ■

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Trolleybus Flyer à la sauce Tous des K. Deux clientes du Trolley détournées à leurs avantages.


Trolleybus Mag Couverture et double intérieure du programme des manifestations. Chaque numéro est conçu autour d’un thème décliné graphiquement. La parution n’existe malheureusement plus…

Alain Puech Amoureux de la beauté de l’ordinaire, brave type, dinosaure comme il se définit lui-même, ce Marseillais d’origine a commencé comme illustrateur-affichiste, spécialisé dans la mine de plomb et les pastels. A la suite de l’incendie qui a ravagé son atelier en juillet 91, balayant tout son travail, Alain Puech, déjà très critique sur le milieu des agences de communication qui, pour lui, manquaient et manquent toujours totalement d’audace décide d’arrêter le travail d’illustrateur-graphiste. J’ai

découvert alors que je souhaitais être un “homme”, pas un outil, j’en ai eu marre d’être un outil, je n’avais plus envie de communiquer mais de parler. Dans la communication, c’est avant tout la séduction qui prime, alors que dans la création artistique, on travaille sur l’urgence, l’émotion, l’instinct, la découverte. J’ai voulu aller plus vers l’essentiel… La réponse, il la trouvera dans une démarche plus fondamentale, dans l’augmentation de

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Rick & Lola

Marseillais : D’adoption tous les deux. Images : On aime faire des images relativement détournées avec peu de travail, peu de “bidouille” informatique, on respecte trop la photo pour la trafiquer, on préfère plutôt faire des “sandwichs” d’ektas… Lola fait plutôt la photo et Ryck le graphisme, mais Lola ne se prive pas de donner son petit mot et de remettre tout en question quand elle n’a pas été assez sollicitée à son goût. L’avis féminin est souvent juste, la sensibilité qu’elles ont est loin d’être négligeable dans ces métiers (dixit Ryck). Mac : La mise en forme graphique est faite sur l’ordinateur, mais bien pensée et aboutie avant. Quand elle ne l’est pas avant de passer au Mac, on a toujours des problèmes, on tourne autour et finalement on reprend tout, on retourne sur notre table avant de repartir sur l’ordinateur. Pinailleurs : Nous sommes réputés pour cela, auprès de nos fournisseurs et même pour nos clients. Très (trop ?) perfectionnistes. Boulots : Nos clients sont très fidèles, (on touche du bois), ils nous font confiance, sans doute parce qu’on s’occupe bien d’eux. On part du principe de choisir pour qui on bosse, si ça ne nous correspond pas ou ne nous plaît pas, on envoie chez des confrères. 99 % de notre production se situe dans le culturel, et seulement 1 % dans le commercial. La culture, c’est l’industrie locale, mais avec le changement de municipalité, cela a tendance à stagner voire à régresser. La cité de la musique pour qui on travaille depuis

Cité de la musique Affiche et couverture. L’ouïe est déclinée depuis quatre ans, au sens propre comme au sens figuré.

leur ouverture en 92 ne fait rien pour cette rentrée alors que c’est une structure importante, qui apporte la musique dans la ville avec de la diffusion, plusieurs écoles décentralisées, et qui compte environ 30 000 adhérents. On démarche pas beaucoup, mais on va arrêter d’être gentil, on va attaquer ! Humeur : On ne répond plus du tout aux appels d’offres, on a assez donné ! On est les Poulidor de l’appel d’offres, toujours deuxième : On a aimé, mais vous êtes trop resté dans le brief, ou pas

du tout, ou c’est peut-être un peu trop, etc. Le dernier nous a demandé 10 jours de travail sans dédommagements pour un client qui a pris 1 mois pour se décider. Le budget à la clé était de 80 000 F pour concevoir et imprimer 1 000 ex ! Des confrères qui n’avaient pas rendu de maquette ont quand même reçu un petit mot pour les remercier et leur dire qu’ils n’était pas choisis ! Les appels d’offres sont trop souvent pipés. C’est la récréation pour le client : Vous étiez en-dessous s’est

son bonheur de créer, au détriment de son pouvoir d’achat bien sûr. A partir de cette rupture forcée, il a eu envie de repartir de la manière la plus simple possible, redécouvrant le foncé/clair, le noir/blanc, Alain met alors au point sa technique qu’il appelle monotype, à l’opposé total du graphisme qu’il pratiquait, le contraire de la communication, le contraire du prévu, du contrôlé, un travail en “aveugle”.

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même permis de dire un “client” ! Et puis on a assez pour faire un salon des refusés. Sida : depuis 93 à chaque journée mondiale, on édite, bénévolement avec l’aide de nos fournisseurs, des cartes postales et des affiches sur le thème du Sida, à chaque fois c’est 2 000 affiches 40/60 et 5 000 à 6 000 cartes postales, qu’on envoie aux associations qui n’ont pas de matériel. ■

Encre d’imprimerie étalée sur une grande table, un papier d’Arches mouillé à cœur posé par-dessus et Alain dessine sur la face visible à la pointe sèche, au crayon etc, mais ce qu’il crée se réalise en-dessous, à l’envers. Je ne sais pas du tout où je vais, je suis obligé d’aller vite avant que le papier ne sèche, je découvre ce que j’ai fait une fois terminé, en retournant la feuille. C’est un travail sur des impressions, un travail sans modèle, sur la trace, le souvenir et l’empreinte qui en résulte. Il


Michel Strauss SIDA Affiches et cartes postales éditées bénévolement.

Moi : J’ai débuté comme décorateur de théâtre et comme graphiste en exerçant pendant dix ans à Toulouse. Je suis arrivé dans la région avec une compagnie de théâtre qui s’installait ici et me suis alors occupé du centre culturel de Martigues. C’était l’époque où on faisait tout, où on pouvait tout se permettre. J’ai installé mon atelier et je suis resté. Boulots : Je travaille essentiellement pour le secteur culturel, théâtres, compagnies de danse, centres culturels, festivals, musées… Je connais surtout ce domaine, cela fait maintenant 17 ou 18 ans que j’y suis. Ce que je préfère, c’est la déclinaison de l’ensemble de communication, affiche, plaquette, catalogue, Point de vue : Ce qui me plaît le moins, c’est la création de logo, j’en fait de moins en moins. D’une part, je me fais chier en permanence à aligner 15 logos sur la moindre affiche, il y en a de plus en plus à placer, et je pense qu’il serait temps de s’interroger sur l’utilité et l’efficacité du logo, à partir du moment où on en met partout, où tout le monde en a un, ça ne veut plus rien dire. Certains comme Le Quernec en sont à les intégrer dans l’image, à les mettre au milieu, quant aux Graphistes associés, eux, n’en veulent carrément plus, ils ont sans doute les moyens de l’imposer (lire, sur ce sujet, la chronique de Philippe Quinton en page 70). Marseille : Ici il y a une culture, une façon de s’exprimer, des sons, des couleurs, un certain style de vie et de rapports, comme partout, mais sûrement pas de style graphique. Quand

Affiche pour le centre culturel d’Aix-en-Provence.

Affiche Lisboa 94 Pour l’appel à participation à la biennale des jeunes créateurs de la Méditerranée.

ZM & co - L’observatoire s’inspire pour cela d’un voyeurisme ordinaire, quotidien dans lequel le politique pénètre régulièrement. On le retrouve dans TakTik où pendant un an, il a porté son regard sur l’actualité marseillaise encore et dans la rue avec la revue murale de Casa Factori. Le fondamental, pour Alain Puech, c’est sans doute l’art qui reste, avec l’amour, la dernière véritable aventure de l’homme, et on pourrait continuer à parler de cela avec lui pendant des heures. ■

Cas à part dans la création à Marseille, Laurent Malone et Francine Zubeil ont créé ZM & co en 88 pour travailler à la production d’œuvres d’artistes pour des institutions culturelles. L’observatoire est le nom de leur maison d’édition définie comme un outil de production au service des artistes, comme une invitation à travailler sur d’autres supports d’expressions comme les affiches, les livres, les revues et les espaces publics. ZM & co maintient parallèlement une pratique de travaux de com-

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je travaille, je ne pense pas à faire Marseillais. Demain : On est dans la création et il faut s’interroger en permanence sur ce qu’on fait ou ce qu’on a pu faire, remettre en cause. Avec les nouveaux médias, on va bientôt ne plus faire d’affiches, je ne sais pas quand, dans dix, quinze, vingt ans ? ni comment, mais à mon avis l’imprimé va perdre de l’importance au profit de l’image électronique. Il va falloir que je m’y mette. ■ Sarajevo Création-opinion personnelle éditée en affiche au sujet de Sarajevo.

3 bisf Dépliant pour une association subventionnée d’Aix-en-Provence tendant des ponts entre art, culture et santé.

mande avec comme démarche celle d’un design graphique relationnel minimaliste, celle d’une simplification graphique la plus totale afin que le client puisse s’en emparer. ■

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Route buissonnière Promotion pour un spectacle de la compagnie de danse Geneviève Sorin.

La Friche de la Belle de Mai Située dans l’ancienne usine de La Seita, ouverte en 91, La Friche présidée par Jean Nouvel et dirigée par Philippe Foulquié occupe 40 000 m2 de cet espace industriel alors délaissé et sans projet. C’est un laboratoire d’expérimentations et de productions culturelles, un lieu d’hébergement, d’échanges et de rencontres où les disciplines se croisent en un métissage dynamique. Des premiers studios du fameux groupe I Am à Radio Grenouille en passant par TakTik et Dernier cri, on croise de tout à La Friche : théâ-

tres, studios son, danses, restaurants, bars, Internet, cirques, studios cinéma et TV, ateliers d’artistes… C’est aussi un lieu d’initiation artistique et de formation ainsi qu’un lieu de diffusion de spectacles où la simultanéité d’événements est permise grâce à la taille du lieu. A La Friche, on a le temps de faire, la quantité d’espaces disponibles rendant possible leurs utilisations pour des réalisations de longue durée alors que leurs tailles permettent des scénographies inconcevables dans d’autres lieux.

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Route buissonnière Affiche pour un spectacle de la compagnie de danse Geneviève Sorin.

NK Pages du magazine édité pour le théâtre du Merlan.

La Friche, c’est environ pour chaque année : 800 artistes accueillis, 30 000 heures de formation, une fréquentation de 60 000 personnes, pour 130 personnes qui y travaillent… Demandez le programme ! ■

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Grafitis

Clients : Nos clients sont fidèles, le premier client de l’agence pour qui nous réalisons du packaging alimentaire (Crustimex) est toujours notre client. Créé en 78, Grafitis a toujours travaillé pour les entreprises, notre histoire d’avant la “crise” explique sûrement en partie notre profil atypiquement marseillais, 60 % d’activité pour l’institutionnel et le culturel et 40 % dans l’industrie et le commerce. Image : Il paraît qu’il y a un style Grafitis, mais nous on ne le pense pas, en tout cas, ce n’est pas notre préoccupation, cela ne nous intéresse pas de travailler notre image et de communiquer sur nous. Démarche : Nous voulons avancer dans notre travail, faire toujours mieux et répondre à l’image du client, révéler ses fantasmes, ses envies, mais pas les nôtres. Pour une entreprise, lui apporter beaucoup de création, c’est la faire avancer, mais pas simplement pour se faire plaisir, c’est lui apporter une stratégie commerciale à l’aide d’une ligne graphique.  Grand bleu : Beuchat, qui était une petite entreprise de matériel de plongée, est devenu première au niveau français et 3e au niveau mondial. Aujourd’hui, elle a une image de leader qui bouge, en tout cas beaucoup plus que ses concurrents. On l’a accompagnée dans son développement international. Ce résultat est le fruit d’une volonté commune du client et de nous-mêmes. Nous entamons actuellement la sixième année de collaboration, Beuchat était auparavant chez Publicis, et ils a cherché avec

Les coquelettes Packaging alimentaire pour une nouvelle gamme d’omelettes à préparer.

nous un rapport plus intime. Avec eux, on fait passer dans le domaine industriel ce qu’on fait à côté dans le domaine culturel, tendances, mode, look. Cela ne nous empêche pas parfois, de nous faire jeter, parce qu’on tente d’aller plus loin, on fait deux pas en avant, ils nous ramènent un pas en arrière, mais le bilan est toujours positif. Packaging : C’est un peu au coup par coup, nous ne sommes pas une agence de packaging, d’ailleurs il n’y en a pas sur Marseille. Dans ce domaine, nous n’avons pas de démarche particulière, on se “débrouille”. On essaye toujours de faire quelque chose de bien, de tirer vers le haut, mais franchement, il n’y a pas grand chose à dire sur une boîte de crevettes, on ne va pas revendiquer une création extraordinaire, cela se vend bien, le client est content, et nous aussi. PAO : Nous avons une certaine histoire, on est sans doute les premiers à s’être équipés en PAO dans le coin. Marseille : Ici, il ne reste pas beaucoup de business to business, Publicis et RSCG se partagent le boulot, et cette année la plupart des clients ont réduit leur budget. Il ne reste pas grand chose pour nous, alors on se rabat sur l’institutionnel qui essaie de compenser, mais comme aujourd’hui l’outil informatique est de plus en plus à la portée de tous, on trouve de plus en plus de graphistes qui s’équipent et bossent chez eux, et qui viennent nous chatouiller sur nos territoires, c’est ce qu’on a vécu avec Beuchat pour Publicis. Le gâteau s’atomise… ■

Dernier cri Animé par Pakito Bolino et Caroline Soury, Dernier cri est une maison d’édition déviante et suicidaire, une machine à produire des dessins sales. Issu de Paris où plus personne ne fait ce genre de travail, Dernier cri édite en sérigraphie des affiches et des livres d’illustrateurs français comme Alexios Tojas, Kerosen, Frédéric Poincelet mais aussi de talents venus d’ailleurs tels Keiti Ota (Japon), Henriette Vallium (Québec), Mike Diana (USA). Ils ont édité 35 livres depuis trois ans, 10 numéros de

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Théâtre du Gymnase Plaquette programme de la saison 96/97 du Théâtre du Gymnase.

Beuchat Double intérieure du dernier catalogue de produits de plongée Beuchat.

leur magazine Dernier cri et sont distribués à l’étranger grâce à leurs contacts dans le monde de l’illustration. A Marseille, pour eux, il y a encore des choses à faire, tout n’est pas verrouillé. Ils viennent également d’enregistrer leur deuxième CD : Discotroma, compilation musicale de groupes comprenant des illustrateurs graphistes. Leurs deux prochains projets : créer un magazine bilingue “Hôpital brut”, mélange de chroniques musicales et de rencontres et mettre leur catalogue sur In-

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ternet afin d’élargir leur cercle, et pourquoi pas trouver des financements leur permettant de continuer leur aventure. Bon net-fishing ! ■


Bik & Book

État civil : Nous nous sommes créés après une expérience aux éditions Rivages qui étaient à Marseille. Les éditions Rivages ont été rachetées par Payot et sont parties sur Paris. Bik et Book a été créé à cette occasion, on est donc plutôt dans le livre, le domaine culturel, un de plus !… et développons une activité d’édition. Diversification : On a surtout ouvert cette boîte sur une frustration, à partir de là, il a fallu acquérir d’autres connaissances, tellement nous étions marqués Édition. Nous ne pouvions vivre de l’édition uniquement, sur la région cela n’est pas possible. Il n’y a pas un marché de l’édition suffisant pour faire bosser des graphistes en édition. Il y a juste Actes Sud à Arles et Rivages, ça ne suffit pas, on a été obligé de trouver autre chose à faire. Boulots : On essaye de rééquilibrer notre clientèle pour aller vers les entreprises institutionnelles et “privées”. Il y aussi des réseaux très organisés entre pouvoir politique et économique. Si tu ne vas pas nager au cercle des nageurs, quelques lieux de “rencontre” comme cela, ce sera plus difficile pour des contacts. La vie sociale est assez structurée comme dans toute “capitale” de province, on peut y être catalogué très vite. Il y a beaucoup de graphistes à Marseille, ville économiquement malade, et il n’y a pas une quantité folle de travail. Édition : Essayer d’exister comme graphiste et comme éditeur, de travailler sur la forme de l’objet-livre et sur le fond.

On se rend compte qu’il est difficile d’avoir une politique éditoriale sans en avoir les moyens. Nous partons sur un coup de cœur, une rencontre avec des artistes et il faut trouver des subventions pour diffuser avec les moyens du bord, mailing, pré-achat, dépôt-vente, etc. On souhaite développer des collections car c’est aussi assurer une possibilité de rentabilité. On a lancé la collection “vous ici”, avec un premier titre opération papillon réalisé avec Jacky Halter, un photographe de Marseille. Cette collection se propose de traiter de la

surprise, du dépaysement et de l’engagement physique. Deuxième collection en préparation, basée sur un regard de photographe, sur une communauté. Ce travail sera édité en français et dans la langue de la communauté. L’optique de cette collection est de conjuguer l’information ethnologique et historique, en ayant une approche littéraire et écrite de cette communauté à l’aide d’entretiens avec les personnes photographiées et les porte-voix de ces communautés. Image : Il est important d’avoir un travail sur son image alors nous

Château d’If Mise en espace et scénographie d’une exposition historique au Château d’If. Supports en toile de voile.

La biennale des jeunes créateurs d’Europe de la Méditerranée Huitième édition de cette manifestation née en Italie qui se déroule tous les deux ans, la biennale offre un panorama de la jeune création issue de huit pays du bassin méditerranéen, France, Espagne, Italie, Portugal, Grèce, Chypre, Croatie et Slovénie et ce, dans 14 disciplines artistiques. Elle se déroulera en mai prochain à Turin. Les différents objectifs suivis par cette initiative sont de permettre aux jeunes artistes (moins de 30-35 ans) de s’intégrer aux circuits professionnels et médiatiques,

d’établir des réseaux stables d’échanges, de confronter des pratiques artistiques et de devenir le lieu de la création contemporaine de l’Europe du Sud. Ryck & Lola ainsi que Tous des K ont été respectivement lauréats des cuvées 92 et 94 pour le design graphique. Qui prendra la suite ? ■

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nous auto-produisons sur des petits supports. Prise de position : Il faut savoir prendre ses positions. Ici il y a des “politiques” qui ne sont pas claires vis-à-vis du FN, nous, nous sommes très clairs, nous refusons de le légitimer et de travailler, de collaborer avec des gens, fournisseurs, clients, qui le soutiennent. C’est une menace très présente, qui s’est mise en place doucement, sournoisement depuis une dizaine d’années. Nous avons récemment arrêté de travailler avec un client dès que l’on a appris qu’il avait des connivences avec le FN. Marseille : C’est une ville qui vit allégrement sa crise économique. ■

Saison 13 Dossier-classeur à l’initiative du Conseil Général 13 décrivant, pour les responsables municipaux, les conditions et contenus des manifestations culturelles du département pour toute une saison.

Trolleybus The “boîte of Marseille”, aujourd’hui “habillé” par Tous des K depuis 2 ans, le Trolleybus est situé sur le Vieux Port dans les “caves des galériens”. Plusieurs espaces, plusieurs tendances, expositions, performances, terrain de pétanque, s’y côtoient… à l’image de la ville. Le Trolleybus, animé par Jean-Jacques et Yann, a su dès le début (88) accorder de l’importance à un bon design graphique pour communiquer leur différence. Eric Bediez de Ryck & Lola a été le premier à les aider à se mettre

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sur les rails en créant le logo et ce qu’on appelait alors les cartons, suivi par Casa Factori de 91 à 94 pour qui l’apport d’un message dans cette communication était primordial. Aujourd’hui, on fait des “flyers”, Tous des K a repris le flambeau. Nouvelles images fortes de créatifs, eux-mêmes “clients” du Trolley. Tous des K a créé une nouvelle peau très personnelle dont toute l’équipe de la boîte est très fière.


Michel Morossof/Art Directing

Boulots : Art Directing ne se positionne pas sur le marché exclusivement culturel et institutionnel, réalisations de logos comme pour les jeans Aviatic, plaquettes et magazines d’entreprise, cela représente une bonne moitié de notre activité. Comme client dans le culturel, nous avons le Théâtre de la Minoterie. Nous réalisons pour eux : journaux, cartes postales, programmes, charte sur les spectacles etc, et nous allons sortir prochainement un livre sur dix ans d’histoire de ce théâtre. (NDLR : Michel, on attend toujours tes docs, dommage…) Images : Je suis issu d’une culture de pub, je ne renie pas la vente de petits pois, mes commandes ne sont pas des supports à faire de l’art, je ne cherche pas à vampiriser mon client, même dans le monde culturel. Notre démarche est soft, je n’ai jamais été reconnu pour avoir pondu de l’image en soi. L’image en soi ne m’intéressera pas forcément autant que la démarche. Choisir l’option de l’efficacité pour le résultat plutôt que penser que nous sommes en train de “pondre” une œuvre graphique. Notre travail consiste à mettre en place des codes. Une brochure pour une entreprise, c’est pas de la rigolade, faut pas se louper. Si on vient nous voir et pas le graphiste d’à côté, c’est qu’il doit bien ressurgir quelque chose, cela veut certainement dire qu’on véhicule une image. Mais au final, je ne crois pas qu’il y ait un style Art Directing qui Carbonel Dossier-plaquette de communication pour les santons Carbonel. Toutes les séries de santons y sont reproduites à l’échelle 1.

Huit années de créations originales, une bonne centaine de réalisations de haute qualité, voilà le bilan que nous n’espérons pas clos de si tôt pour cet endroit unique. Graphistes, quand vous passez à Marseille, allez leur dire merci au “trolley”. Un Trolleybus, deux Trolleybus, trois Trolleybus, dans chaque ville, tel est le mot d’ordre ! ■

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Pirates associés

se dégage, une démarche et une approche, sûrement, mais c’est pas moi qui peut le dire. Clients : Je ne prend pas les commandes de mes clients comme un territoire de création, mais le résultat est lié à l’équipe que nous créons ensemble, il y a une dynamique dans le rapport qu’on peut avoir avec eux, et c’est cela qui m’intéresse. Press book : Personne ici ne fait une démarche avec un book, Toc-toc, bonjour… Non. Ce n’est pas notre genre, ni un besoin, parce qu’à Marseille, on fait surtout un travail de réseau et de bouche à oreille, en même temps, c’est dangereux parce que si tu fais une erreur, on va te casser et t’es viré. Marseille : ça se passe toujours en famille et finalement, ça se passe plutôt bien. ■

Théâtre de la Minoterie Cart-com pour le théâtre.

P’tits jeunes : Nous existons officiellement depuis à peu près neuf mois, bien qu’ayant auparavant “galéré” pendant un peu moins d’une année… A la sortie de nos études de BTS, nous avons effectué chacun un stage dans deux agences de communication graphiques marseillaises. Malheureusement, nous avons été très déçus, autant par la mentalité des DA, que par le manque de confiance accordé à de jeunes stagiaires, qui n’étaient pourtant là que pour travailler, s’investir, prouver autant que possible leurs capacités… On a donc tenté l’aventure en solo (… à deux). Pirates : Un pirate, ça galère, ça explore, ça trouve parfois des trésors ! Mais ça a toujours un port d’attache. Credo : Notre volonté est de se spécialiser dans la création graphique à caractère culturel : théâtre, expos, concerts, festivals, événements, musique, édition… même si pour l’instant on prend tout ce qui vient, et aussi parce que ça nous plaît, autant avoir du plaisir à travailler… Travailler sur des thèmes culturels nous permet de mieux nous exprimer graphiquement, de travailler en créant, que ce soit des images, des typos, d’expérimenter différentes techniques ; numériques ou traditionnelles, manuelles, de contourner, par des effets graphiques et visuels percutants et justifiés, les contraintes de budget, car il y en a toujours, mais tout en gardant toujours à l’esprit un souci de lisibilité… Matières et binaire : On attache beaucoup d’importance à la matière, non pas aux textures, mais aux maté-

riaux bruts, qui ont vécu, qui dégagent quelque chose d’authentique, contrairement aux textures numériques… Nous sommes de plus en plus contre le tout numérique, dans le sens qu’un travail doit dégager la trace d’une intervention humaine, non mathématique, comme une photographie a toujours du grain, ou un mur n’est jamais blanc ou lisse à 100 %… Passion : D’après nous, ce métier doit se vivre comme une véritable passion. On n’est pas graphiste seulement aux heures de bureau. Il faut se sentir habité par ce que l’on crée, y penser sans cesse, avoir un regard de graphiste sur ce qui nous entoure, toujours être à l’affût d’images, d’idées… Passionnés par la création de typographies. Typos que l’on essaie – dès que cela est possible – d’utiliser dans nos travaux. Ou typos que l’on crée spécialement pour tel ou tel job. Nos typos regroupées sous le label “X-Font”, et que l’on souhaiterait diffuser… (d’ailleurs, si vous avez un plan…). ■

TakTik Hebdomadaire culturel gratuit diffusé depuis 8 ans sur l’ensemble du département des Bouches-du-Rhône. TakTik est né du constat de l’absence d’un véhicule d’informations culturel. Didier Urbain, à l’origine du magazine, a reproduit ce qui existait déjà dans de nombreuses villes nord-américaines où est né ce concept de gratuits comprenant une partie informative et rédactionnelle forte ainsi qu’un agenda des manifestations culturelles. Ce journal vit sans aucune subvention en tirant ses recettes de la publicité et a pu naître et exister

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grâce à la PAO qui a permis de le réaliser à un coût de production compatible avec cette aventure. Aujourd’hui tiré à 35 000 exemplaires, TakTik bénéficie de 700 points de dépôts, l’essentiel du lectorat est composé d’un public de 25 à 40 ans, gros consommateur de loisirs. Après 376 Unes, ce journal se définit toujours comme un magazine culturel au sens large, portant un regard sur l’environnement, l’éducation et les phénomènes de société. TakTik est animé par une vraie équipe rédactionnelle composée de


Aérobika Astéroid

Maniak Korrosif Créations typographiques originales cherchant éditeur.

Numéro 0 de la revue Balagan paraissant quatre fois par ans, au rythme des saisons.

10 permanents (Frédéric Khan rédacteur en chef, Didier Métal, directeur artistique) et d’une vingtaine de collaborateurs pigistes spécialisés en musique, cinéma, etc. A l’image de La Friche qui abrite le magazine, celui-ci est ouvert sur tout type d’expressions, de l’opéra à la techno, du cinéma à la danse, du rock n’ roll à la littérature, du tourisme au multimédia (supplément mensuel “Thématik”). Parce que TakTik peut prendre des “risques”, il est également un support ouvert d’expressions où certains graphis-

tes, photographes, artistes ou illustrateurs locaux interviennent en Une ou en pages intérieures, leur permettant de s’exprimer, de confronter leurs créations à l’actualité choisie par la rédaction. Certains ont pu ainsi se faire connaître, leur permettant de mettre le pied à l’étrier pour entamer leur carrière professionnelle. Merci à Taktik d’exister, merci à Lolita de m’avoir raconté ; je pense qu’on devrait vous déclarer d’utilité publique ! ■

Étapes Graphiques - Octobre 1996   41


Images en manœuvre 42   Étapes Graphiques - Octobre 1996

Philippe Foulquier, Jean Nouvel 41, rue Jobin 13 003 Marseille Tél. : 04 91 11 42 43

La Friche de la Belle de Mai

La Friche de la Belle de Mai 41, rue Jobin 13 003 Marseille Tél. : 04 91 60 75 14 Fax : 04 91 69 26 22

Danse à Aix-en-Provence Affiche du festival.

TakTik

Laurent Malone, Francine Zubeil 19A, rue Francis de Pressensé 13 001 Marseille Tél. : 04 91 91 17 07 Fax : 04 91 56 65 03

ZM & co - L’observatoire

2, rue Estelle 13 006 Marseille Tél. : 04 91 33 69 23

Alain Puech

Martine Derain, Laure Maternati Les Abattoirs, 12, place des Abattoirs 13 015 Marseille Tél. : 04 91 60 75 14 Fax : 04 91 69 26 22

Casa Factori

12, place des Abattoirs 1 3 015 Marseille

Les Abattoirs

Le Parvis des arts Programme 96/97 du Parvis des arts, ateliers de musique et théâtre, et salle de spectacle.

Histoire : On fait partie des vieux ici. Nous sommes issus des Beaux-Arts de Marseille. L’opportunité s’est présentée de remplacer quelqu’un qui quittait le studio intégré du théâtre, alors on a démarré très rapidement notre aventure en ayant l’assurance d’une occupation à mi-temps pour la Criée. Assez vite après, fin 84, la direction des musées de Marseille nous confie l’ensemble de la communication de tous les musées. Puis on a développé dans d’autres secteurs, dans d’autres milieux, rencontres d’Arles, Sud-Marine (chantiers navals), Parallèles (chaussures), étiquettes de vin… Étiquette ? On nous colle l’étiquette d’agence travaillant exclusivement dans le culturel, sans doute parce qu’on nous retrouve très facilement sur les murs de la ville en affiche, alors que l’on conçoit et réalise des plaquettes pour les entreprises mais que cela se voit moins, mais on travaille quand même beaucoup pour les entreprises, à peu près moitié/moitié. Business : On n’a pas de politique commerciale, on fait des cartes postales pour nos clients, mode emprunté au tourisme, mais nous n’en avons jamais fait pour nous. Comme nous sommes bien implantés dans le culturel, nous faisons plutôt du relationnel, on est amené à sortir, à fréquenter du monde et ainsi à dénouer des fils… Création : Nous essayons de ne pas trop nous répéter et d’être le plus possible à l’écoute du client, nous sommes sérieux dans le boulot, on ne présente pas n’importe quoi. Nous ne cherchons pas à être mode mais créatif, on ne


Espace 13 Couvertures des catalogues d’exposition de l’Espace 13, galerie d’exposition du Conseil Général. cherche pas à coller à chaque courant qui passe et nous sommes parmi les rares à être capable de prendre en charge de gros dossiers d’édition. Cependant, nous pouvons traiter pas mal de choses différentes en passant du classique au style le plus destroy tout en ne faisant pas n’importe quoi, et surtout sans créer un style particulier. Avec le temps nous sommes devenus, DA, chefs de fab, commerciaux et gérants, mais nous ne sommes plus vraiment des graphistes. Au départ, il y avait peut-être un style Images en manœuvre qui était lié au nôtre, mais maintenant la création passe à travers l’interprétation des graphistes qui travaillent ici. Macintosh : La PAO a changé pas mal de choses, très vite l’outil est devenu perturbant car il vient quelque part

Vincent Hanrot, Christelle Huc 19, quai Rive neuve 13 007 Marseille Tél. : 04 91 33 19 36 Fax : 04 91 33 23 57

Bik & Book

André Frère, Arnaud Bizalion 2, place Francis Chirat 13 002 Marseille Tél. : 04 91 14 28 28 Fax : 04 91 90 30 85

Images en manœuvre

Stephan Muntaner, Didier Deroin, Pierre Vecca 16, quai Rive neuve 13 007 Marseille Tél./fax : 04 91 33 11 94

Tous des K

2, rue Commandant Sourian 13 007 Marseille Tél. : 04 91 54 86 07 Fax : 04 91 55 63 98

Ryck & Lola

24, quai Rive neuve 13 007 Marseille Tél. : 04 91 54 30 45

Trolleybus

Pakito Bolino, Caroline Soury Les Abattoirs, place des Abattoirs 13 015 Marseille Tél. : 04 91 60 75 14 Fax : 04 91 69 26 22

Dernier cri

Parallèles Dépliant pour la marque de chaussures.

Étapes Graphiques - Octobre 1996   43


gêner la création, en nivelant un peu les choses… mais dans les côtés positifs, cela nous a permis d’intégrer la numérisation et la retouche d’image. Et ce n’est pas fini, l’image est numérique et la diffusion de celle-ci passe par de nouveaux supports. Alors que nous étions totalement orientés papier, voilà un nouveau centre d’intérêts qui va nous permettre de nous renouveler. Édition : Nous avons créé notre maison d’édition, pour nous permettre de réaliser des catalogues ou livres en coédition avec les musées par exemple. Mais c’est long, il peut se passer deux ans entre le moment où on démarre un projet et celui où le livre sort. Pour le financement, nous avons plusieurs démarches, l’une d’elles est la recherche d’entreprises privées concernées par un pré-achat. Par exemple, lorsque nous avons sorti un livre sur les docks, on a demandé à toutes les entreprises qui y travaillent de participer, c’est ce qu’a fait la SNCM entre autres. ■

44   Étapes Graphiques - Octobre 1996

Office de la culture de Marseille 38, rue Saint-Ferréol 13 001 Marseille Tél. : 04 91 33 33 79 Fax : 04 91 54 28 84

Biennale des jeunes créateurs d’Europe de la Méditerranée

Magaly Madelain, Moïse Parienti 39, rue Sainte-Victoire 13 006 Marseille Tél. : 04 91 53 46 89 Fax : 04 91 81 72 65 eMail : pirates@waw. com

Pirates associés

13, rue Plan-Fourmiguier 13 007 Marseille Tél. : 04 91 54 02 43 Fax : 04 91 54 20 11

Michel Morossof

7, bd Camille Pelletan 13 500 Martigues Tél. : 04 42 81 11 58 Fax : 04 42 07 32 65

Michel Strauss

Norbert Scimecca, Bernard Cavit 14, quai Rive neuve 13 007 Marseille Tél. : 04 91 54 04 48 Fax : 04 91 55 57 63

Graffiti

Dépliants Pôle sud Pôle sud est une association d’entreprises œuvrant dans la réinsertion des personnes en difficulté.


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stratégie

par isabelle pasquet

Trois années furent nécessaires pour concevoir ce paquet de cigarettes. L’intervention d’une société d’études d’un type nouveau a permis l’aboutissement du projet.

Amsterdamer

la création d’un packaging

Le nom évoque la ville “libertaire” de 68, tandis que le portrait du fumeur de pipe introduit un univers traditionnel.

Le “tabac à rouler” lancé en 1985 s’inspire d’Amsterdam.

46   Étapes Graphiques - Octobre 1996

L

orsqu’un projet de packaging est lancé, il arrive parfois que l’inspiration ne soit pas au rendez-vous, que l’intuition soit “brouillée”, que la création reste impuissante à définir une solution. Pour sortir de ce mauvais pas, il faut alors prendre des chemins de traverse, explorer de nouvelles méthodes, tenter de nouvelles alliances. Cette aventure, la Seita l’a expérimentée sur son paquet de cigarettes Amsterdamer. Trois années entières, des premières esquisses à la finalisation du projet, furent nécessaires pour venir à bout d’un packaging plus complexe qu’il n’en avait l’air, au premier abord. Pour comprendre son histoire, il nous faut revenir quelques années en arrière, en 1968 : une nouvelle marque de tabac appelée Amsterdamer, d’origine suisse, est créée et commercialisée par la Seita sous licence. L’époque libertaire n’est pas étrangère au

choix du nom, pourtant, il ne s’agit que d’un sage tabac à pipe qui se présente sous une forme très classique. La “blague” de couleur bleue, bien connue des amateurs, est agrémentée d’une figure de fumeur traditionnel, un nordique vigoureux et souriant. La marque s’impose et prend très vite 45 % du marché. Une version “mild”, est lancée en 1988. Le packaging d’un jaune pâle, ne présente pas de modifications notables. Entre temps, la Seita lance une déclinaison “tabac à rouler”, dans un packaging spécifique. Ces précisions, sur l’histoire de la marque, permettent de mettre en valeur les deux données essentielles à l’origine du produit : le nom évocateur d’une culture à la fois ancienne et moderne, libre et naturelle, et l’univers très traditionnel de la pipe. Cette antinomie va mener dans l’impasse, les équipes chargées en 1993, de développer la marque, sur le segment des cigarettes.


Jamais jusque là, une marque n’a tenté de se déplacer de l’univers de la pipe à celui de la cigarette. Cette démarche, la Seita l’entreprend “en aveugle”. Elle confie à l’agence Raison Pure le soin de balayer les pistes créatives autour des images du fumeur de pipe (le fonds de marque), de la Hollande et de la ville d’Amsterdam, émancipée et porteuse de valeurs universelles. L’agence de design propose alors des maquettes très modernistes, allant jusqu’à des interprétations picturales inspirées de Mondrian. Les maquettes sont testées, mais les

repris en 1994. Échaudée par sa première expérience, la Seita fait alors appel à Achab, une société d’un type nouveau, qui allie études, marketing et création. Elle lui propose un outil de recherche visuelle systématique. Il s’agit d’une méthode d’exploration basée sur une matrice de mots clefs qui permet d’associer autour du nom de marque toutes les images possibles. Nous ouvrons le robinet créatif explique Alexandre Petroff, directeur associé d’Achab. Cette logique d’associations prend racine dans la notion de plaisirs, dont les différentes formes sont

consommateurs n’adhèrent pas. De ces premières propositions graphiques, seul, le code aux couleurs chaudes, semble une direction à affirmer par la suite : maigre résultat ! Il est rare de se retrouver ainsi dans une telle impasse, confie Rémi Armelin. Dans un projet classique, précise le chef de groupe de la Seita, nous vérifions auprès des consommateurs, le brief que nous avons élaboré. Nous rectifions, nous faisons travailler l’agence et retenons 4 à 5 propositions qui sont testées. Le résultat final est obtenu après deux ou trois “aller-retour”. Les tests consommateurs ont cependant plébiscité le concept d’une “cigarette Amsterdamer”. Cette franche adhésion était d’autant plus rassurante que Le lancement d’une marque ex-nihilo, est plus difficile. Les négociations pour le rachat de la marque retardent de quelques mois le projet; il est

explorées, en relation avec le produit. Cet éventail de mots, appliqué à Amsterdamer, s’ouvre sur l’univers caractéristique de la ville, de ses canaux, ses cafés, son architecture particulière, son activité intellectuelle et artistique, l’image d’une vie naturelle, l’ambiance animée du port... Aucune piste n’est laissée de côté par la méthode. Ces mots clefs sont traduits en images. Celles-ci sont toutes testées auprès des consommateurs. Ce système d’entonnoir permet alors de recentrer le brief, de construire une plateforme de création précise. Grâce à cette exploration libre et sans cesse validée auprès de l’utilisateur final, la Seita, redéfinit ses objectifs packaging : Nous connaissions désormais les pistes qu’il fallait éviter, les territoires à bannir, ceux qui étaient trop modernistes et sophistiqués, trop éloignés de la marque. •••

Les premières maquettes proposées par Raison Pure explorent quelques pistes classiques et un axe moderniste.

Étapes Graphiques - Octobre 1996   47


Une matrice de mots clés Le mot Plaisir sert de point d’appui à la matrice qui se déploie sur trois parcours. Chaque forme de plaisir est analysée dans sa relation personnelle (dépendance, repli sur soi, rêve), dans sa relation aux autres (jouissance, convivialité, création), dans son point d’équilibre (maîtrise, affirmation, réflexion).

Tout produit procure différents plaisirs à des degrés divers. Le tabac s’exprime plus spécifiquement sur le registre de la dépendance, la convivialité et le rêve. Ces trois mots clefs, forment des pistes qui vont passer dans le filtre de la marque et proposer des images. Nous suivons le produit sur la piste convivialité,

[Petits paquets : phase préliminaire Achab Grands paquets : finalisation Raison Pure]

Amsterdam, ville portuaire, invite au voyage. N’est-ce pas également, la vocation d’une cigarette au tabac parfumé ?

1

Les bateaux sillonnent les mers, avant de se réfugier dans les ports. Goélettes élancées aux voiles gonflées, habitations hautes surmontées de greniers, toute l’imagerie portuaire, animée et bruyante surgit de ce thème.

avec une marque généreuse, un produit à l’odeur agréable, un univers qui favorise les rencontres. Passant par le filtre “Ams-terdamer”, les images suggérées, vont de celle du marché en passant par l’immigration, le commerce... Sur la piste dépendance, nous pénétrons l’univers des labyrinthes, des canaux, des enchevêtrements. Sur la piste rêve, nous nous échappons de toutes les manières sophistiquées ou naturelles : des drogues douces (dans un décor de café), aux éléments poétiques, l’air et l’eau. Le croisement de ces trois univers aboutit à une plate-forme créative où les mots clefs : commerce, laby-

rinthe, eau vont jouer un rôle important. Cependant, ce cadre s’enrichit au cours de l’étude et des tests consommateurs. Des voies d’explorations fournissent des thèmes intéressants, comme par exemple la piste “affirmation de soi”, qui apporte celui de la Cie des Indes, ou encore la piste “ maîtrise”, qui produit celui des grands voyages, la navigation, etc. Des pistes sont réunies, telles celles du “labyrinthe” et de la “cartographie”. Cette conjonction propose le thème des instruments de mesure. ■


AMSTERDAMER PLAISIR PHYSIQUE

SPIRITUEL

SOCIAL

R de ê v soi e Projet créatif sv o i v i aAffirmation D é p e n d a nJcoeu i s s a nMcae î t r i sRee p l i s uCr o n lité Réflexion

MARQUE

la jouissance

la générosité

l'élection le choix

l'osmose

l'ouverture

l'imposition

l'accompagnement

l'innovation

le soutien

PRODUIT

un goût particulier dont on ne peut se passer

un goût gourmand et riche

un goût original

l'odeur intime

l'odeur agréable

l'odeur séduisante

l'effet psychotrope

l'odeur et le goût différents des autres

la composition, l'odeur et le goût denses

ATTITUDE

la répétition

la pulsion

la modération

la solitude

la rencontre

la reconnaissance

le voyage intérieur

l'exaltation

l'introspection

la toile d‘araignée de la ville le labyrinthe des canaux

les parcs (VondelparkHortus Plantage) les 550 000 vélos les écologistes les natures mortes/paysages l‘art du bien vivre les aliments les matériaux (laine, soie...)

l‘urbanisme la nvigation les grands voyages la cartographie le commerce, l‘argent la caricature, l'humour (“la ronde de nuit”)

les fortifications les églses camouflées le “Beguinage” l‘arcitecture intérieure les vues de l‘intérieur (“la lettre d'amour”)

les marchés les cafés bruns l‘urbanisation (les quotas) l‘immigration le commerce

la construction sur l'eau la Cie des Indes le portrait le luxe, le raffinement

les drogues douces le coffe shop l‘oiseau l‘eau, la mer l‘ambiance

Van Gogh le movement Cobra

les philosophes (Descartes, Spinoza) la libre pensée l‘utopie les bibliothèques (Biblioteca hermetica)

DE CONSOMMATION

AMSTERDAM

Le café, lieu de toutes les perditions, havre du marin esseulé. A Amsterdam, les consommateurs disparaissent derrière des fenêtres aux vitraux colorés, pour partager un peu de cette chaleur conviviale et enfumée...

Les astres où se perdent nos rêves, sont aussi des repères, ceux des marins et des explorateurs ; les instruments de navigation ont balisés des routes et favorisé l’élaboration de cartes. Cet univers intellectuel fournit ces géométries enchevêtrées.


••• A partir de ce brief, les designers vont travailler en toute sérénité, et s’attacher à perfectionner l’axe choisi : le thème du voyage, autour de la représentation de l’actvité portuaire d’Amsterdam. Il évoque les échanges maritimes, le commerce des épices... Ce motif d’inspiration est lié aux valeurs du produit, qui venant de l’univers de la pipe, est perçu comme naturel, odorant, et possédant une forte personnalité. L’agence de design confirme : Le brief de la Seita était alors très clair. Il fallait exprimer le goût, l’odeur, les épices et l’authenticité.

Le paquet de cigarettes Amsterdamer finalisé, combine la piste visuelle du port. Il est agrémenté, au dos, d’une fleur stylisée, emprunté au décor des vitraux de cafés. Les tons chauds en évoquent le caractère et le goût prononcé.

50   Étapes Graphiques - Octobre 1996

Que retiennent de cette expérience, les partenaires traditionnels du projet packaging ? La Seita qui a apprécié cette alliance étude, marketing, création, admet son rôle de catalyseur. Cette méthode est nécessaire pour les projets sophistiqués, affirme-telle. L’agence de design reconnaît que la méthode a enrichi le brief, mais elle précise : Il nous fallait encore explorer ces pistes définies. En effet, la recherche iconographique, la qualité graphique, la finesse de la typographie, l’équilibre coloriel, resteront le savoir-faire de l’agence. Un apanage qu’on ne lui contestera pas... ■


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packaging

car

Le marketing découvre

le

Dès le début du siècle, des pionniers ont compris que placer leurs marques et leurs produits dans l’imaginaire du consommateur était un atout formidable. Ils ont fait appel pour cela aux territoires imaginaires que constituent la littérature, l’histoire, la géographie, les voyages… et les héros de BD. Dans les années 70 et 80, le rouleau compresseur du marketing international a

exploité le filon de la BD, l’a organisé et l’a rendu opérationnel. Les années 90 voient cette tendance se développer d’une manière spectaculaire partout dans le monde. C’est en analysant les tendances naissantes que l’on peut à la fois les comprendre et les appliquer d’une façon performante. Comme en 1995 avec Shopping in Tokyo (voir Étapes Graphiques

52   Étapes Graphiques - Octobre 1996

n° 12), Carré Noir focalise aujourd’hui sa réflexion sur cette nouvelle tendance mondiale et vous invite à découvrir une exposition passionnante : Shopping in Cartoons. Carré Noir a acheté et analysé plusieurs centaines d’emballages en provenance d’Europe, des USA et du Japon. Les points suivants s’imposent : • le cartoon est essentiellement réservé à la cible des enfants et des adolescents,

• il y a d’une part des personnages cédés sous licence (Mickey, Tintin, Dragon Ball) et d’autre part les personnages créés spécialement pour une marque (M. Propre, La Vache qui Rit, Mamy Nova, Bonhomme Michelin), • on peut distinguer six rôles principaux de la BD dans le packaging, • on peut en déduire sept règles universelles d’utilisation.


toon Cette exposition est présentée à Bruxelles du 18 au 25 octobre dans les locaux de Carré Noir, 44 rue des Mimosas, puis à Turin du 8 au 15 novembre et à Paris du 3 au 6 décembre

Étapes Graphiques - Octobre 1996   53


Les six rôles du cartoon

dans le packaging

1 L’emballage devient personnage Le packaging s’identifie totalement aux héros de BD. Il en prend la forme à tel point qu’il y a souvent une vampirisation de la marque. L’emballage peut être utilisé comme jouet ou objet pendant – ou après – la consommation du produit. C’est principalement l’univers des personnages sous licence.

Les plus

Les moins

• pouvoir d’attraction immédiat • prise en main • jouet • animation commerciale • collection • appropriation enfant-produit • segmentation • impact en linéaire

• vampirisation de la marque • détournement du produit • crédibilité qualité du produit • effet de mode • gamme de produits limitée • segmentation extrême • coûts (licence + production)

54   Étapes Graphiques - Octobre 1996


2 Les personnages issus de la marque

Dans ce cas, c’est la marque et non le produit qui prend son inspiration dans l’univers cartoon. Ces marques s’appuient sur des personnages-types qui personnalisent la marque et deviennent – avec le temps – de véritables héros de BD à leur tour. Ainsi en est-il du P’tit Louis, du lapin Nesquick, du Géant Vert… Les plus • propriété de la marque • maîtrise de l’image • renfort mnémotechnique • distinction vis-à-vis de la concurrence • charge émotionnelle de la marque • capitalisation sur la marque • gammes de produit • cibles enfants et cibles adultes • objets promotionnels • exclusivité garantie et contrôlée • pas de royalties. Les moins • limitation à certains types de produits • cohérence dans le temps obligatoire • dépôt de marque et d’image • mise en place de longue durée.

Étapes Graphiques - Octobre 1996   55


3 Les personnages

“portent” l’emballage Les personnages sont sous licence (Spirou, Spiderman, Sailor Moon…) Ils prêtent leur silhouette – et parfois leur nom – au produit. C’est un moyen astucieux de débanaliser un produit et de conserver une niche. Les plus • cumul des notoriétés (marque + licence) • anthropomorphisme du produit • séduction • animation commerciale • publicité • débanalisation du produit. Les moins • capital extérieur à la marque • absence de notoriété fabricant • simplicité de mise en place • coût (mais moins coûteux que 1) • risque de lassitude.

4 Détournement

de tendances

Les emballages adoptent ici le ton et le style BD sans pour autant faire référence à des héros identifiés. On détourne le cartoon au profit du produit. C’est un bon moyen pour renouveler l’image d’un produit placé sur un marché très concurrentiel. C’est une voie à creuser pour la présentation des modes d’emploi. Les plus • moyen d’expression • renouvellement du langage • créativité ouverte • information sur le produit • communication média • moderne • pas de royalties ou licence. Les moins  • catégories de produits limitées • deséquilibre crédibilité /

séduction • valeurs rationnelles, analytiques.

56   Étapes Graphiques - Octobre 1996


5 Les cartoons

à consommer L’osmose est ici à son paroxysme. L’acheteur est appelé à consommer le personnage lui-même. Les pâtes auront la forme des Schtroumpfs, le sparadrap sera à l’image de Mickey, le savon contiendra la pomme magique de Blanche Neige, le biscuit ressemblera à Super Mario… Les plus • appropriation du produit • évocation /mémoire forte • innovation produit évidente • relation produit /packaging • impact enfants. Les moins • adéquation cartoon /produit

délicate • s’adapte à peu de produits • pérennité courte • coûts (licence + outil).


6 Les cartoons font de la promo Les personnages de BD sont maintenant les locataires provisoires de conditionnement et ne sont là que pour présenter des concours, des offres spéciales, des jeux puis disparaître très vite. C’est un des créneaux majeurs d’utilisation des cartoons dans le conditionnement. Les plus • événementiel • dynamisation des ventes

58   Étapes Graphiques - Octobre 1996

• flexibilité • le produit accroché à

un courant de mode • effet de série, de

collection, de rachat • couplage produit /média • animation interne

et distribution. Les moins • parasitage de la marque eséquilibre d’impact •d entre le personnage et la perception produit • législation • action ponctuelle.


L’imagination, le rêve, le plaisir, le détournement, l’appropriation, la différence, la mode, le jeu,… sont les armes principales des héros de cartoons. Le marketing en découvre les pouvoirs et les limites. L’observation oblige à constater que ces limites reculent chaque jour d’avantage dans un monde où l’enfantconsommateur cultive ses propres références, et où les parents eux-mêmes sont des générations cartoons. Le mariage des marques et du cartoon est voué à un avenir sans séparation ni divorce.

Sept règles d’utilisation • Le héros de BD est le porte-parole plus ou moins conscient des qualités du produit. Ces attributs physiques et moraux, ses pouvoirs, son territoire favori doivent être une amplification des propres performances du produit. • Le héros de BD est l’ambassadeur des valeurs de la marque qui l’accueille. Cela doit être une seule et même histoire, amplifiée certes par la dimension surhumaine du personnage cartoon. En cas de choix négatif, le héros véhicule un message en opposition ou dévié avec celui défendu par la marque. Le duo se transforme en duel dont le perdant est toujours la marque. • En aucun cas la BD n’apporte prestige et distinction. Son registre se situe au niveau de l’émotion liée à l’enfance, aux conflits enfantmonde et enfant-parent. L’imaginaire est sollicité pour un contact direct avec l’enfant, un contact qui passe par les modes pour l’adolescent et un contact plus complexe, vécu par l’adulte. • La BD étant dans le monde de l’imaginaire, les designers – ouvriers de l’imaginaire – peuvent exprimer leur métier avec une grande créativité. Plus ils seront impliqués en amont sur ce type de packaging, plus ils apporteront d’idées inédites à la création du packaging. • Le héros de BD a un sexe, un âge, des valeurs et une époque. Il est par essence discriminant par rapport à la cible. Les héros éternels et familiaux (Mickey, Tintin, Batman, Babar) se feront de plus en plus rares, au bénéfice de personnages nouveaux et jetables (Goldorak, Tortues Ninja, Pocahontas). Les marques peuvent tirer profit de ces deux aspects de plus en plus présents et ponctuels : discrimination et mode. • La meilleure osmose produit-BD est celle qui intègre le héros dans le concept même du produit ou de la marque. La plus superficielle est l’utilisation du cartoon pour les opérations promotionnelles. L’une et l’autre peuvent donner d’excellents résultats dans la durée ou dans le ponctuel. Le champ d’application du cartoon est vaste. • La BD tend à devenir universel par le développement de la communication visuelle (TV, vidéo, jeux, Internet, parc d’attractions, magazines, produits, etc.). Pourtant le degré de notoriété des héros varie d’un marché à un autre. Dans certains cas, les noms des personnages varient d’un pays à l’autre, excepté pour certains héros mondiaux (Mickey, Batman, Barbie, Super Mario,…) Une grande prudence s’impose dans l’utilisation des cartoons pour les produits multinationaux. ■

ADDIT

Étapes Graphiques - Octobre 1996   59


d couvertes

1

2

Espace ouvert de bienvenue dans lequel toutes les images ont leur place : photos ou illustrations, à la main ou électroniques…, un seul critère pour être publié dans ce mini-book : que l’image soit récente. Notre préférence va aux fichiers numériques et aux ektas 24 x 36, mais tout est possible en terme de coup de cœur.

Buster Bone Tél : 43 78 18 29 Âge : 25 ans Ville : Alfortville Itinéraires : Diplôme d’Estienne et diplôme des Métiers d’Art. Publications : Presse : Jaimes, Télérama junior, Informations sociales et Dossier familial. Réalisation de BD publicitaires pour l’agence de communication Écho Vision. Sources d’inspiration : Le quotidien, la rue, la musique, mon entourage, ma passion pour les œuvres de Chaland, Gus Bofa, Rébéna, l’univers de Boris Vian, le style narratif de Berroyer… Recette : Recycler des images, des codes graphiques de la BD, les insérer dans un contexte onirique en décalage avec la réalité, saupoudrer d’une pincée de Pop-Art, vous obtenez un univers graphique “tout plein de couleurs qu’existent pas”. Satisfaction : Rare Déception : La dure et cruelle réalité du métier d’illustrateur, mais je reste positif. La commande idéale : Illustrer Boris Vian, dessiner pour les enfants, publier un recueil de nouvelles, d’illustration, de strips de mon cru. Rien que ça ! 1 Extrait de carnet de croquis 2 Illustration de carte de vœux. 3 Croquis et illustration de nouvelle pour le Fanzine “Keep on lying”. 4 Illustration pour le journal Jaimes. 5 Illustration pour le press-book du groupe Shocktaws. 6 Fausse couverture de comic-book (travail personnel).

3

5

4

60   Étapes Graphiques - Octobre 1996


6

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é Amnesty

Saint-Maur-des-Fossés La Villa Médicis de Saint-Maur accueille la quatrième biennale d’arts graphiques. Cette année, c’est autour du thème “Composition à la fenêtre” que plancheront les participants. Du 19 octobre au 1er décembre 1996, Saint-Maur-des-Fossés.

Salon d’automne

calendrier

L’institution, considérée comme le pilier de l’Art du XXe siècle, propose un panorama de l’art vivant en rassemblant toutes les formes d’expression artistique, accentuant notamment son rôle de dénicheur de talents vers la province et en utilisant de nouveaux moyens de communication comme Internet. Cette année, trois expositions présenteront les œuvres des artistes. Du 25 octobre au 3 novembre 96, Espace Eiffel Branly. Du 8 au 28 novembre 96, Galerie du Château, Homecourt. Du 14 au 28 novembre 96, Salle Poirel, Nancy.

Duranel Personnages graphiques, colorés, qui s’imbriquent les uns dans les autres, s’échappant parfois de la toile pour la prolonger dans l’espace, les créatures en bois découpé de Jean Duranel sont présentées dans cette exposition. Du 17 octobre au 16 novembre 96, Galerie R. Treger, 47, rue Mazarine, Paris 6e.

Ecole de Paris Le Musée Bourdelle présente, en collaboration avec le Museum National de Varsovie et le Museum Literatury de Varsovie, les œuvres d’artistes polonais réalisées à Paris entre 1900 et 1918 : des toiles et des sculptures que l’on peut rattacher à l’esprit de l’École de Paris. Du 23 octobre 96 au 19 janvier 97, Musée Bourdelle, 16, rue Antoine Bourdelle, Paris 15e.

Pages réalisées par Guillaume Frauly

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Impressions d’artistes Le “livre artiste”, le “livre-objet” et “l’artist-book” sont présentés à l’occasion de l’exposition “Impressions d’artistes, variations sur le livre” : un aperçu assez large sur les livres d’artistes réalisés depuis les années 60.

Art d’intervention, engagé, partisan, provocateur ; art affiche, art message, art pétition… L’exposition “100 artistes pour Amnesty” est constituée d’œuvres de créateurs de notoriété internationale, confiées à l’organisation à l’occasion de son 30e anniversaire. Cette collection, enrichie depuis, est mise en vente pour permettre à Amnesty de continuer son action. Jusqu’au 12 octobre 96, Nomade Patras - Paris, 8, rue Saint Anastase, Paris 3e.

Jusqu’au 25 octobre 96, Action culturelle du Barrois, Scène nationale, 7, rue Jeanne d’Arc, Bar-le-Duc.

Pop art Ce courant d’art américain est représenté par un de ses symboles, Tom Wesselman, acteur essentiel du Pop Art américain depuis les années 60. Une centaine d’œuvres réalisées entre 1959 et 1993, essentiellement sur l’illustration du corps féminin sont exposées. Jusqu’au 27 janvier 97, Musée d’art moderne et d’art contemporain, Nice.

Montblanc La firme des stylos bien connus nous dévoile ses archives publicitaires à travers une série d’expositions thématiques. La première d’entre elles s’intitule “Impressions de rentrée : Montblanc reprend le chemin de l’école”. Une exposition inédite d’affiches d’une autre époque qui s’adresse à tous les amateurs d’affiches anciennes.

9e art

Jusqu’au 2 novembre 96, 60, rue du Faubourg St Honoré, Paris 1er.

Pour fêter le centenaire de la BD, le 20 e festival international de la bande dessinée de Chambéry et les “Bulles de la BD”, en association avec le groupe de presse Bonjour, organisent l’élection de la BD du siècle. Une cinquantaine d’auteurs dont Janry, Léonardo Vittorio ou encore Mœbius seront présents. Du 25 au 27 octobre 96, ville de Chambéry.


Mois du graphisme d’Échirolles Péchés capitaux Une série de six expositions d’illustrations regroupées sous le titre “Les péchés capitaux” est présentée par le Centre George Pompidou. La paresse, la colère, la gourmandise, l’avarice, la luxure et l’orgueil rythmeront les différentes expositions. La première d’entre elles autour du thème de la paresse est présentée juqu’au 4 novembre 1996. Centre George Pompidou. Paris 4e. Tél : 01 44 78 12 33.

Cascella Une exposition essentiellement tournée sur la forme, grande aspiration de l’artiste italien Tommaso Cascella, qui s’est consacré autant à la peinture qu’à la sculpture. Jusqu’au 31 octobre 96, Galerie Hélène de Roquefeuil, 70, rue Amelot, Paris 11e.

Cliquez !! Après le succès de la première édition de “Cliquez pour le savoir” en avril 1995, la Cité des Sciences et de l’Industrie renouvelle cette manifestation consacrée aux nouvelles technologies. Au programme : 80 sites interactifs et CD-Rom, des ateliers d’initiation et de nombreuses conférences. Pour information, la médiathèque met en place un nouveau service, le prêt de CD-Rom.

FIAC 140 galeries venues des quatre coins du monde seront réunies durant 6 jours pour la 23e exposition de la Foire internationale d’Art contemporain. Du 2 au 7 octobre 96, Espace Eiffel Branly.

Différences - ressemblances L’association gentilléenne “Le cercle d’art” fête ses trente ans à l’occasion de la septième biennale d’art de Gentilly. Trente “paquets” seront envoyés au bout du monde à un artiste des antipodes. L’exposition présentera d’une part les photos des œuvres envoyées par les artistes gentilléens ainsi que les œuvres des artistes du bout du monde. Du 19 au 27 octobre 96 et du 31 octobre au 11 novembre 96, salle des fêtes de la mairie de Gentilly.

Exposition du 9 octobre au 3 novembre 96, Cité des Sciences et de l’Industrie, Paris 19e.

Propos d’artistes II Après “Atelier 1” présenté en mai et juin dernier, la Fondation Coprim et la société Lefranc & Bourgeois mettent en place l’exposition “L’Eveil et ses enjeux” : 28 artistes de renom exposeront sur le thème du “Vis-à-visage”. Jusqu’au 31 octobre 96, Fondation Coprim, 112, avenue Kléber, Paris 16e.

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tapes G raphiques consacrera son prochain numéro au grand rendez-vous du graphisme d’Échirolles. Pour sa septième édition, cette manifestation rassemble une fois de plus amateurs et professionnels du design graphique autour de nombreuses expositions et concours. Au programme, un hommage à Savignac, avec notamment une rétrospective de l’exposition avec Villemot en 1949 marquée par le succès de la vache Monsavon ou encore celui de l’affiche pour la marque Aspro en 1964. Le “photographiste” Claude Baillargeon, l’affiche théâtrale ou encore un témoignage de l’importance et de la spécificité de l’expression graphique argentine. Certes, l’affiche a une place privilégiée au sein de la manifestation, mais le Mois du graphisme d’Échirolles souhaite également aborder le graphisme dans sa globalité : édition, signalétique, logo, en-tête, dépliants… Le travail de plus de 500 artistes, venant d’une vingtaine de pays a été présenté depuis 1990. Seront également présents Le Cargo et Ça manque pas d’air (couverture ÉG n°21).

Du 7 au 30 novembre 96, Échirolles.

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Andréas Walser Deux ans de créations (1928-1930) sont retracés par cette exposition qui met en avant la pratique avant-garde cubiste et surréaliste, les pastels et les collages d’Andréa Walser. Un artiste qui serait resté inconnu sans la rétrospective qui lui est consacrée. Jusqu’au 10 novembre 96. Centre culturel suisse, 32-38, rue des Francs-bourgeois, Paris 3e.

Eaux de Là

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Emmanuel Pierre

Visages

Après s’être consacré aux animaux lors de l’exposition “Coteries”, cet amoureux du détail, désespérément pas sérieux, se décide à croquer l’homme. L’exposition qui lui est aujourd’hui consacrée, présente ses œuvres les plus récentes tirées des ouvrages “Quentin en Afrique” et les gravures des “Rencontres de Flibusquet à Paris”.

Figuratifs, figuraux ou transfiguraux ? Cette exposition rassemble les portraits de Giustina Perniola que le dessin maintient dans le suspens de leur apparition et que la peinture arrête avant qu’ils prennent fin. Du 10 au 19 octobre 96, Galerie Pascal Vanhoecke, 11, bis rue du Perche, Paris 3e.

Jusqu’au 7 décembre 96, Galerie Martine Gossieaux, 56, rue de l’Université, Paris 7e.

Graphisme catalan Cosmic, Ramon Prat, Rafa Mateo, Marc Panero et Studio Seis : ces cinq studios de graphisme se rassemblent pour exposer leurs créations graphiques. Des travaux très divers en matière de culture, d’architecture, de communication institutionnelle et de marque. Cette exposition est présentée par l’atelier européen d’exposition graphique “90 degrés” issu des six graphistes du studio “l’art est net”.

La ville en jouets

Jusqu’au 1er novembre 96, 90 degrés, 90, rue Notre-Dame, Bordeaux.

Sculptures murales

Durant trois mois, la ville d’Enghien-lesBains va vivre à l’heure de l’art contemporain à l’occasion de la Biennale d’art contemporain : les œuvres de neuf artistes sont à découvrir au sein de la ville. Ce projet, à l’initiative de l’association In situ, vise à faire en sorte que l’art soit présent tous les jours dans l’espace urbain.

Métamorphoses tridimensionnelles du tableau, les sculptures murales passionnent de plus en plus d’artistes à la recherche de nouveaux supports. Huit d’entre eux sont présents à cette exposition. Jusqu’au 19 octobre 96, Galerie Lelia Mordoch, 40, rue de Seine - 2, rue de l’Échaudé, Paris 6e.

Jusqu’au 15 décembre 96, ville d’Enghien-les-Bains.

Réouverture La Papeterie Beaubourg Dessin Papeterie, spécialisée dans les arts graphiques depuis 1784, réouvre ses portes. Beaubourg dessin papeterie, 66, rue Jean-Jacques Rousseau, Paris 1er.

Mencoboni Après trois mois passés en Irlande, le peintre Didier Mencoboni présente dix-sept petites peintures essentiellement axées autour du problème de la série. Des œuvres picturales au sein desquelles la couleur, fragmentée, démultipliée, devient alors elle-même le motif. Jusqu’au 27 octobre 96, Galerie Fernand Léger, centre d’art d’Ivry, 93, avenue Georges Gosnat, Ivry.

Mécano, Playmobils, Légos… Le département des jouets du Musée des Arts Décoratifs propose une exposition sur le thème de la ville. L’occasion de construire et de circuler dans la ville miniature illustrée par plus de 600 jouets de 1780 à nos jours. Cinq grands thèmes ont été retenus pour évoquer cette atmosphère citadine : l’architecture, les commerces, les loisirs, les bâtiments et les transports. Un concours “Construis un édifice de ta ville” est réservé aux jeunes architectes en herbes. Du 23 octobre 96 au 23 février 97, Musée des Arts Décoratifs, Palais du Louvre, 107, rue de Rivoli, Paris 1er.

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salons

Infographie

Le 4e festival européen jeune création en infographie se tiendra à Milan les 8 et 9 novembre prochain. L’édition 1996 est ouverte aux nouvelles technologies, avec notamment une compétition d’œuvres vidéos ou multimédia entre étudiants européens. Inscriptions au (1) 49 83 26 93. Renseignements au (33) 27 28 42 42. Du 8 au 9 novembre 96, Palazzo delle Stelline, Milan, Italie.

Luxe Pack 96 Salon très spécialisé et très sélectif, le Salon du packaging des produits de luxe tient sa 9e édition. A cette occasion, le Prix luxe et environnement sera remis le 24 octobre devant 200 exposants dont plus d’un tiers d’origine internationale.

Philatélie 96 Collectionneurs ou philatélistes avertis, le Musée de la Poste accueille une fois de plus l’exposition de la Journée de l’Académie. L’édition 96 a choisi le thème “France Canada, trois siècles de relations épistolaires”. Une présentation d’œuvres remarquables, maquettes de timbres et sérigraphie, poinçons ou iconographies ou encore les collections de Gilbert Noël et d’Allan L. Steinhart. Le samedi 12 octobre 96, Espace 56, Tour Maine Montparnasse, Paris 14e.

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Du 23 au 26 octobre 96, Principauté de Monaco. Tél. : 78 68 88 88.

Fugrama Foire professionnelle de l’industrie graphique. Du 9 au 12 octobre 96, Bruxelles. Renseignements : 03/232 94 25.

SATIS 96 Tous les professionnels, industriels, créateurs et techniciens de l’image et du son seront présents pour la 14e édition du Salon des techniques de l’image et du son, qui présente l’intégralité de la chaîne Audio-Vidéo-Cinéma-Photo-Multimédia.

La première édition du Festival du multimédia, organisée conjointement par le magazine Télérama et la Vidéothèque de Paris présente une sélection de produits hors ligne au grand public. A cette occasion, un prix sera remis au CD-Rom le plus apprécié du public : Télérama offrira un espace publicitaire d’une valeur de 95 000 F. Un des votants du public gagnera, après tirage au sort, un ordinateur “Compaq” multimédia. De plus, une sélection de produits en ligne sera également en démonstration.

Devenez héros des marques ! La 1re édition de ce salon ludique et didactique organisé par Event international vous entraîne dans l’univers des spots publicitaires.

Du 22 au 25 octobre 96, Vidéothèque de Paris, Porte Saint-Eustache, Paris 1er.

Du 18 au 20 octobre 96. Espace EiffelBranly, 55, quai Branly, Paris 7e.

Du 22 au 25 octobre 1996, Parc des expositions de Paris, Porte de Versailles, Hall 2-1. Tél. : 01 45 45 62 25.

Numérique

Odyssée, le 1er salon du numérique, de l’internet et du multimédia ouvre ses portes du 15 au 17 novembre 96. CNIT, Paris le Défense.

Citée de la pub

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é Paris des photographes

Ecriture interactive La deuxième édition des Etats généraux de l’écriture interactive, organisée par Art 3000, rassemble une fois de plus les professionnels du multimédia afin de faire le point, cinq jours durant, sur les innovations, les problèmatiques ou les développements les plus avancés sur le plan international dans les domaines de la réalité virtuelle et du miltimédia off/ on-line. Au programme de l’édition 96 : la question des droits d’auteurs, les institutions et les aides institutionnelles françaises et européennes et une présentation des récentes créations. Du 21 au 25 octobre 96, Vidéothèque de Paris, Nouveau forum des Halles, Porte Saint-Eustache, 2, grande galerie, Paris 1er Tél. 01 39 56 14 89.

IP 96 8000 professionnels de la filière papetière se réunissent à l’occasion des 8e rencontres internationales des industries papetières. Près de 400 exposants présenteront leur savoir-faire dans plus de 10 secteurs. Au programme : le 49e congrès de l’Atip (15-17), la Copacel (15), la SCI (15) l’Efpg (16) et le Gegs (16-17). Du 15 au 17 octobre 96, ville de Grenoble. Tél : 04 76 28 27 90.

Congrès Le premier congrès interprofessionnel de l’art contemporain se tiendra les 30 et 31 octobre prochains. De nombreux thèmes seront abordés parmis lesquels : la censure, la recherche et la création, un réseau sur l’Europe ou encore l’art, une affaire publique. Les 30 et 31 octobre 96, Centre de Congrès Vinci, Tours.

Typographie L’Ecole romande des arts graphiques organise la sixième journée romande de la typographie au sein de ses locaux le samedi 9 novembre 1996. Ecole romande des arts graphiques, 63, rue de Genève, 1004 Lausanne.

concours

livres

Couverture La société Iggesund Paperboard organise un concours graphique, “Euro Rookie of the year”, ouvert aux étudiants en arts graphiques et aux graphistes de moins de 28 ans. Le concours a pour thème “Le nouveau millénaire” et porte sur la création d’une carte ou d’une couverture de livre pouvant être reproduite sur Graphique-Silkia, un carton tout bois créée par la société en 1993. Seule ombre au tableau, l’exclusion de toute technique tridimensionnelle. L’artiste élu verra sa création reproduite sur Graphique-Silkia et gagnera un voyage au Festival international de la publicité de Cannes en juin 1997. Iggesund Paperboard, 3, rue Christophe Colomb, Paris 8e. Tél. : 01 53 67 32 00.

Appel à projets Le Milia 97 (Marché international de l’édition et des nouveaux médias) offre aux étudiants du monde entier, la possibilité de présenter leurs projets, au travers du Club des jeunes créateurs, aux professionnels présents au Milia. Ce concours est ouvert à tout étudiant ou groupe d’étudiants suivant une formation multimédia d’au moins un an, qui peut présenter un projet destiné à être édité sur support opto-numérique ou réseau. Le représentant de chaque projet retenu, sera invité pendant 4 jours au Milia 97, frais de déplacement, accès et hébergement compris. Date limite de dépôt des candidatures : 15 novembre 1996. Information : Coordinateur du Club des jeunes créateurs, Reed Midem Organisation. Tél : 02 41 90 44 73. E-mail : 100321.1310@compuserve.com

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L’aventure des images La bande dessinée fête aujourd’hui son centenaire et cette manifestation réunit chaque année de plus en plus d’adeptes. Pourtant, deux grandes figures de la BD, François Schuiten et Benoît Peeters, créateurs de la série bien connue “Les Cités obscures”, multiplient les expériences, toujours sur l’image, mais sur d’autres supports, d’autres domaines. Après la scénographie, le cinéma, l’image de synthèse, ils se tournent aujourd’hui vers le multimédia. Dans cet ouvrage, ils proposent un regard engagé, un point de vue d’auteurs sur les bouleversements de l’image. Il s’agit d’un ensemble de réflexions subjectives s’appuyant sur leurs expériences et une série de rencontres. Témoins et parfois acteurs des mutations de l’image, persuadés qu’une réflexion s’impose, ils nous livrent leurs préoccupations concernant la levée des frontières, naguère bien séparées, entre le dessin et la photographie, l’audiovisuel et les télécommunications. Cette publication présente de nombreuses illustrations inédites. L’aventure des images, François Schuiten et Benoît Peeters, Éditions Autrement. 185 p. 98 F.

Si la photographie a vu le jour sur les bords de la Saône, c’est sur les rives de la Seine qu’elle fait ses entrées dans la société. Ainsi débute la préface de JeanClaude Gautrand, qui réécrit en quelques pages l’histoire de la photographie à Paris, commente les différents courants et événements qui ont animé et illustré la capitale. Pour Gœthe, Paris est une ville universelle où chaque pas sur un pont, sur une place, rappelle un grand passé, où à chaque coin de rue s’est déroulé un fragment de l’histoire. C’est cette histoire parallèle entre la “ville lumière” et “l’écriture lumière”, la photographie, que nous dévoile cet ouvrage au travers de 234 prises de vues de 1860 (stéréo sur verre de Ferrier et Soulier) à nos jours. Guidé par les grands photographes, le lecteur est convié à rencontrer les gosses de Paris, les Parisiennes, les amoureux qui peuplent les rues et jardins de la capitale, mais aussi à se déplacer dans le quotidien populaire du métro, des boutiques, des bistrots, à regarder les défilés de mode, à se souvenir des pages tumultueuses de l’histoire, de “la Commune” à “Paris et les barricades”, en passant par “le Front Populaire”, “l’Occupation et la Libération” ou encore “Mai 68”. Un ouvrage éblouissant de souvenirs pour les uns, de découvertes pour les autres. Paris, une ville où la photographie a acquis une place de choix, par ses photographes, ses structures et sa renommée. Aujourd’hui, la photographie est présente partout. Les plus beaux clichés rassemblés dans ce volume confirment bien que Paris est la capitale mondiale de la photographie.


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Vous avez dit vide juridique

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ulf andersen

ans le numéro 18 d’Etapes Graphiques, nous avons

par isabelle durand Avocat au Barreau de Paris

abordé les principes juridiques généraux posés par l’apparition de réseaux tels qu’Internet. En France, le WEB se développe très rapidement, mais les Tribunaux n’ont pas encore eu à se prononcer sur une affaire directement liée à son utilisation (une seule est en cours d’instruction). Cependant, dans un souci de meilleure compréhension des problèmes juridiques ainsi posés, nous avons souhaité réexaminer ces difficultés à la lumière des péripéties liées à l’affaire du Docteur Gubler. Chacun se souvient du Docteur Gubler, médecin particulier de François Mitterrand qui, après sa mort, a publié un livre dans lequel il faisait des révélations sur la maladie du Président de la République. Quelques jours après la mise en vente de ce livre, la famille de François Mitterrand a introduit une procédure judiciaire, afin d’obtenir une mesure de saisie du livre qui a effectivement été ordonnée. C’est alors que cette affaire a pris une tournure inhabituelle, car le gérant d’un “cyber café” français a imaginé de contourner la saisie matérielle du livre et son retrait des librairies, en le “scannant” afin de le placer sur Internet. Les journalistes se sont emparés de cette affaire pour clamer, à qui voulait l’entendre, que le gérant du café s’était engouffré dans un vide juridique… Cette affirmation est totalement inexacte, car trois actes de contrefaçon peuvent être ici décelés.

Le livre a été numérisé ou “scanné” Cette première manipulation constitue un acte de reproduction tel que défini par l’article L 122.3 du Code de la Propriété Intellectuelle (C.P.I.). Un fondement juridique existe donc car la reproduction consiste dans la fixation matérielle de l’œuvre par tous procédés qui permettent de le communiquer au public d’un manière indirecte. La loi est ici applicable car elle envisage tous les procédés de reproduction de l’œuvre, sans limitation minimum ou maximum de durée. Peu importe donc qu’un site serve d’intermédiaire pour une durée très courte, car la reproduction, si elle n’a pas été autorisée par l’auteur de l’œuvre, est illicite.

Le livre “scanné” a ensuite été placé sur un site WEB La manipulation technique qui consiste à installer le livre numérisé sur un site, constitue un deuxième acte de reproduction et donc une deuxième contrefaçon, car cette installation a été faite en dehors de toute autorisa-

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tion de l’auteur. Pouvait-on se protéger en invoquant l’exception légale de l’usage privé ? Cette exception applicable par exemple aux copies privées de vidéo, n’est pas applicable ici car compte-tenu du contexte de cette affaire, le but était de faire visiter le site par le plus grand nombre “d’internotes”. Il ne s’agissait donc pas d’un usage strictement privé, et l’installation sur le site constitue donc une seconde contrefaçon.

Le livre circule sur un réseau pour y être représenté au public La télédiffusion s’entend de la diffusion par tous procédés de télécommunication de sons, d’images, de documents, de données et de messages de toute nature. Le C.P.I. analyse la circulation d’une œuvre sur un réseau comme une télédiffusion. Or, l’article L 122.2 du C.P.I. désigne la représentation comme étant une “communication” de l’œuvre au public par un procédé quelconque et notamment par télédiffusion. Cette représentation publique par télédiffusion non autorisée (au surplus contraire à une décision de justice) constitue une troisième contrefaçon. L’exception légale de la représentation autorisée, car limitée au cercle de famille, est-elle applicable pour éviter la contrefaçon ? Non, car une Jurisprudence a récemment jugé que la transmission par un hôtelier d’un programme télévisé crypté diffusé par satellite, constitue une représentation publique qui doit être autorisée par la chaîne télévisée, en l’espèce C.N.N., car bien que chaque client occupe à titre privé une chambre individuelle, l’ensemble des clients constitue un public. Cette solution est applicable ici, car chaque visiteur individuel du site constitue un public, d’autant que la visite n’est pas gratuite. La solution aurait été identique, même si aucun visiteur ne s’était rendu sur le site, car seul doit être pris en considération l’acte de télédiffusion qui existe bien et qui constitue, à lui seul, un acte de représentation non autorisé. Il n’y a donc pas de vide juridique et la famille de François Mitterrand ou l’Editeur auraient pu introduire immédiatement une action contre le gérant du cybercafé sur ces trois chefs de poursuite.

Quelle loi appliquer ? La mondialisation des réseaux implique un choix. Au niveau européen, on a choisi pour les communications par satellite, d’appliquer la loi du pays d’émission, car les Etats se sont engagés à contrôler les émissions de


leur territoire national vers les satellites. Pour Internet, le problème est techniquement beaucoup plus difficile à résoudre et c’est pour cette raison que les juristes français souhaitent, en grande majorité, que soit appliquée la loi du pays de réception, à condition de trouver la trace de l’émetteur du message (et non seulement du site qui l’accueille, comme ce fut le cas récemment), et de pouvoir ensuite interrompre l’émission déclarée illicite. Des solutions juridiques existent et le prétendu vide juridique est surtout la résultante d’un trop plein d’ignorance médiatique, mais cela aussi est un phénomène en pleine expansion, comme le WEB… ■

Made in mouse

Sujets déjà traités dans Étapes Graphiques : •  EG1 : le graphiste, auteur et utilisateur d’œuvres originales. • EG2 : le droit moral de l’auteur indissociable de l’exemplaire de son œuvre. • EG3 : banques de données, encore un problème de protection. • EG4 : auteur ou auteurs ? • EG5 : la création et le contrat de louage d’ouvrages ou de services. • EG6 : une machine peut-elle être auteur ? • EG7 : la vie de l’œuvre après la mort de son auteur. • EG8 : la libre représentation et reproduction des œuvres. • EG9 : l’appréciation subjective des droits cédés. • EG10 : le droit des marques : un mode efficace de protection des œuvres plastiques. • EG11 : quelle forme : pas toutes les formes. • EG12 : l’exception de la courte citation. • EG13 : la courte citation, images et musique. • EG14 : la gestion collective des droits d’auteur. • EG15 : le salaire de la gloire. • EG16 : concurrence déloyale et création. • EG17 : agissements parasitaires,   les attendus du procès Leclerc/FNAC/Carré Noir. • EG18 : Net et loi. • EG19 : la confidentialité sur le Net. • EG20 : la directive européenne du 11 mars 1996 sur la protection des bases de données. • EG21 : le dépôt des œuvres multimédia.

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Abondance de logos nuit… par philippe quinton

NDLR – Cette chronique est aussi présente pour susciter vos réactions, c’est le cas ce mois-ci. N’hésitez pas et rien ne vous y oblige à être d’accord avec nous…

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grosses grappes de logos divers et variés sur les nombreuses affiches de festivals, on peut se demander si cette exubérance de signes ajoutés n’entrave pas la qualité des messages transportés par ces affiches et ces logos. En effet, que vaut un logo dans une mer de logos ? Après des années de communication folle, il y a pléthore de logotypes, ce qui risque de produire l’indifférence à leur égard, alors que leur création avait pour objectif de provoquer l’intérêt, d’amener une différenciation, une valorisation de l’identité d’une entreprise ou d’une institution en donnant à celles-ci une signature qui puisse les représenter efficacement en tout lieu. Pour ne rien arranger, ces signes prétendument originaux et spécifiques appartiennent pour la plupart à des catégories graphiques assez stéréotypées.

capacité d’ubiquité du logo donne une illusion d’existence et permet de marquer un territoire stratégique. Certains s’en servent aussi comme ersatz de bénédiction, auxiliaire de subordination, et en tous cas modalité d’existence médiatique. Mais là aussi que vaut ce marquage de territoire quand, dans le meilleur des cas pour la santé du message, 15 logos sont amassés dans une tranchée plus ou moins confortable en bas de l’affiche ? N’y aurait-il pas ailleurs un autre front plus dégagé et qui permettrait au logo du partenaire de délivrer son message dans de meilleures conditions ? Personne ne gagne dans cette dérive du logo à tous vents à laquelle il serait urgent de mettre fin. Il y a pour cela des solutions plus pertinentes à trouver, la première étape consistant à convaincre les commanditaires de remettre les logos à leur juste place dans les processus de communication, et ensuite leur rappeler qu’ils disposent d’une gamme très variée de supports susceptibles de valoriser chaque partie prenante du message en lui donnant la place qui lui convient.

La place des logos

Qui signe le message ?

Au départ les logos sont en eux-mêmes des discours clairs, concis et efficaces. Normalement, ils sont prévus pour se superposer sans problème à d’autres messages plus ou moins complexes dans toutes les situations de communication. Pour les affiches qui mettent en jeu plusieurs partenaires, ce sont parfois des dizaines de logos qui s’ajoutent au message principal, et créent ainsi une sorte de brouillage entre les objectifs de la communication et les ambitions réelles de ses promoteurs. Bien sûr, les graphistes se passeraient bien d’avoir à gérer les contraintes de ces figures imposées et les caprices de leurs gestionnaires. Avec un résultat visuel souvent trop complexe, on peut douter de la performance de l’ensemble ainsi formé en matière de lisibilité. Il semblerait que cette lisibilité fasse les frais d’une volonté de visibilité à tout prix, celle des partenaires, sponsors et autres parrains, qui exigent que leur logo soit présent sur l’affiche, sans se rendre compte que c’est peut-être là un très mauvais choix tactique. Ce n’est pas parce que l’on est présent que l’on est vu… Un logo a beau être efficace, simple, lisible, etc., que vaut-il noyé dans un agrégat de congénères tous aussi performants les uns que les autres ? Avec la vitesse de régression des messages que l’on peut observer partout, peut-être verra-t-on bientôt des affiches remplies de logos et, tout petit en bas, le message de cette affiche… Tout cela parce que l’affiche – hors publicité commerciale s’entend – sert souvent à autre chose que ce pourquoi elle est faite (faire connaître une proposition, transmettre une information), colonisée par les sponsors, annexée par la communication d’entreprise, phagocytée par les marques, mise au pas des hiérarchies, ou encore filtrée discrètement par les stratégies individuelles de certains acteurs. C’est ainsi que le message se trouve perturbé dans ses trajectoires par de multiples boulets qui profitent de l’occasion pour siffler le chaland. Pour un entrepreneur, la

Normalement, seul le destinateur devrait signer le message, mais pas obligatoirement avec son logo. Trop souvent le placement des logos des partenaires rend complexe l’identification du signataire et cela peut détourner le message principal de son objectif. Ainsi, croire que la présence du logo d’un partenaire sur une affiche va le valoriser, ou développer sa notoriété est sans doute une grande illusion. Cet effet adjacent du message ne peut être obtenu de cette manière car l’affiche n’est pas le support approprié pour cela. Rappelons qu’elle est perçue très rapidement et qu’elle ne peut se permettre l’ambiguïté ou la complexité. Mieux vaudrait présenter le sponsor ou le partenaire et expliquer les modalités de leur action sur des supports mieux adaptés comme les plaquettes, voire les dépliants, à condition de leur consacrer un espace discursif spécifique qui ne serait pas bâclé graphiquement. Puisque désormais l’apport des partenaires et sponsors est une nécessité dans toute opération culturelle ou sociale, on devrait pouvoir en faire quelque chose de graphiquement intelligent. En la matière, il conviendrait de retrouver une certaine simplicité pour éviter le zapping du destinataire qui, saturé par la revendication identitaire des autres et la difficulté de construire le sens, sanctionne sans appel la complexité et la mégalogomanie. En effet, que lui restet-il quand tout le monde s’est servi sur le message pour son propre compte ? Tel le commanditaire qui veut signifier son existence, sa capacité d’organisation, valoriser sa création à travers la proposition qu’il fait à son public. Ou tel le designer qui cherche à valoriser sa griffe, son potentiel de conception des messages visuels ; ici son design est son logo, c’est-à-dire un système graphique qui permet de l’identifier, avec ses tics et ses postures sémiotiques spécifiques. Quant aux partenaires – en général ceux qui apportent des sous ou une capacité d’influence – pourquoi ont-ils

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70   étapes Graphiques - Octobre 1996

près un été où l’on a encore pu voir s’épanouir de


Ils ne s’en rendent pas encore compte ainsi besoin de dire : j’ai payé pour être vu ou bien je veux que l’on voie que j’ai payé ou encore regardez, je soutiens une bonne cause ? Quand vont-ils se décider à servir le message et non pas se servir de lui comme faire-valoir, comme écho de leur puissance ? Communiquer c’est aussi savoir être humble et discret, même si l’on comprend que les partenaires ont très envie de parler d’eux, qu’ils ont une volonté névrotique d’être vu, d’être là, d’avoir des “retombées” de leur investissement. De toute manière, la présence d’un logo sur une affiche ne permet pas de connaître la nature du “soutien” du partenaire concerné, pas plus que son degré d’investissement ou de désintérêt pour l’objet du message. Finalement, ce collage hétéroclite de discours autonomes introduit une confusion fâcheuse dans les niveaux d’énonciation spécifiques à l’affiche et constitue un brouillard de signes qui nuit évidemment à la qualité générale du message, à son accessibilité et donc à son efficacité. L’affiche n’est pas le panneau publicitaire, ni un bateau ou une voiture de course, et elle est dans la rue, pas à la télé.

Calmer la mégalogomanie Il conviendrait donc de purger un peu les affiches de tous les signes parasites – et les logos en sont dans une certaine mesure – pour leur redonner leur véritable fonction : transmettre un message. Comme chaque support, l’affiche a un potentiel spécifique qui mérite d’être mieux exploité dans l’intérêt de la circulation du sens, donc de l’émetteur, mais aussi pour le plaisir du destinataire. Mais ce sont surtout les mauvaises habitudes et les illusions de la communication qu’il faudrait combattre chez les commanditaires, en leur donnant de bons arguments pour résister à la mégalogomanie et à l’entrisme désordonné de leurs divers partenaires. Il serait intéressant de les inviter à revaloriser ces derniers, en leur montrant les affinités qui existent entre leur identité et l’objet du message, leur intérêt à soutenir une proposition commerciale ou culturelle, mais tout cela sur des supports appropriés, en respectant les niveaux d’énonciation et les places de chaque partie prenante dans les messages. Revendiquer son identité, sa différence, et les valoriser aux yeux du monde est une démarche légitime et fondatrice des actes de communication, mais si cela contribue à dégrader fortement la capacité d’écoute des autres, chaque émission de signes est vouée à l’échec. Il est grand temps que la communication passe le mur du logo, et qu’on laisse vivre l’affiche pour le plaisir des sens. ■

Cette lettre nous a été adressée par Pierre Rebichon, responsable de la société Zimages Création à Niort, en réaction à la précédente chronique de P. Quinton.

Merci et bravo pour l’article dans la rubrique "réactions". En effet, nous sommes en ce moment au prise avec une folie ambiante qui frise de plus en plus le ridicule pour les auteurs des appels d’offres eux-mêmes… …J’ai trouvé un argument pour répondre aux appels d’offres abusifs. Sur un appel d’offres concernant la création d’un visuel générique avec sa charte d’utilisation, 9 agences, studios, photograveurs, bouchers-charcutiers, ensembliers-garagistes sont consultés. Aucun dossier de premier projet n’est rémunéré bien entendu. Alors, voilà mon raisonnement en réponse : Je vous remercie et je suis honoré d’être consulté pour la mission citée en référence. En relisant votre demande, je me suis aperçu que les premiers projets n’étaient pas rémunérés. Le dossier de réponse a un prix de revient brut de 15 000 F en ne comptant aucun droit d’auteur avec une chance sur neuf de réussite. Je suis désolé de ne pas engager mon équipe et moimême dans cette aventure. Sachez que je préfère jouer ces mêmes 15 000 F au casino le plus proche en choisissant la couleur, soit : une chance sur deux. Cette image de jeu de hasard peut être un argument efficace auprès des instances dirigeantes. Imaginez que ce soit la même chose pour les impôts ? Que le public mette les différentes régions en concurrence ? Tout cela n’est pas sérieux. On sait que la politique de distribution du travail aujourd’hui est une affaire de réseaux. En plus, pour donner un peu plus de piment à la situation, vient se greffer la concurrence interrégionale, interdépartementale, intercommunale et inter on ne sait plus. Tiens, je vais lancer un appel d’offres auprès des vendeurs de voitures et après 5 000 km je donnerai mon sentiment sur mon choix, voilà… ■

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Appel d’offres ! La peur du ridicule n’a pas encore frappé ! Lors de notre enquête sur les graphistes de Marseille nous avons croisé cet appel d’offre. Pour son logo la mairie de Marseille a récemment lancer un appel d’offres auprès de plus de dix agences. Bien sûr, pas de frais de dédommagements proposés (c’est sûr, ça vaut si peu, la création graphique !). Budget total entre 80 et 120 KF ! Cela vaut combien une dizaine d’agences qui consacrent quelques jours (même rien que deux) sur un appel d’offres ? Et tant qu’on y est, pourquoi pas un appel d’offres des agences pour choisir les responsables des appels d’offres (leur temps à eux vaut-il quelque chose ?) Appréciation visuelle du nouveau logo de Marseille en pages création… ■

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