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MIRALDA KM

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KM





Miralda




Je me suis retrouvé à Paris en 1962. Pas vraiment par choix. Moi, je voulais aller à Londres, ou mieux, à New York. En tout cas, apprendre l’anglais. Mais je me suis trompé de gare et j’ai pris un train pour la France. Une sorte de défaillance de l’agence de voyage, en fait…


L’any 1962 jo em trobava a Paris. No pas perquè jo ho hagués triat. Jo volia anar a Londres, o millor, a Nova York. En tot cas, volia aprendre anglès. Però em vaig equivocar d’estació i vaig agafar un tren que anava a França. Un error de la agència de viatges, de fet...


Toujours est-il que je ne voulais pas rester à Barcelone, à cause du franquisme, de la censure, de l’absence de liberté. Mais je ressentais aussi un manque d’oxygène, un manque d’espace qui m’oppressaient.


El que no hauria volgut mai era quedar-me a Barcelona, a causa del franquisme, la censura, la manca de llibertat. Però també sentia una manca d’oxigen, una manca d’espai que m’oprimia.


Je me suis donc arrêté à Paris avec dans la poche une bourse de la Diputació de Barcelone. Là, j’ai commencé à travailler comme photographe pour le magazine Elle et à réaliser des Frottages et des Collages. Mais l’Espagne m’a rattrapé, j’ai dû rentrer faire mon service militaire. Ce fut une expérience plutôt « chromatique ». C’est réellement terrible de passer des mois entouré de kaki.


Així doncs vaig arribar a Paris amb una beca de la Diputació de Barcelona a la butxaca. Allà vaig començar a treballar com a fotògraf per a la revista Elle i a fer Frottages i Collages. Però Espanya em va agafar i vaig haver de tornar per fer el servei militar. Va ser una experiència més aviat “cromàtica”. És realment terrible passar mesos rodejat de caquis.


Alors, de retour à Paris, j’ai arrêté de travailler pour me lancer dans un nouveau projet, Soldats soldés, qui consistait en des assemblages de petits soldats de plastique. J’avais déjà une fascination pour l’objet et je voulais m’en servir pour illustrer mes sentiments anti-militaristes, antiVietnam — d’ailleurs un peu anti-tout.


Quan vaig tornar a Paris, vaig deixar de treballar per tal d’iniciar un nou projecte, Soldats saldats, que consistia en muntatges de petits soldats de plàstic. Jo ja sentia una fascinació per l’objecte i volia emprar-lo per il·lustrar els meus sentiments antimilitaristes, anti Vietnam, més ben dit, una mica anti tot.


À mes yeux, c’était très enfantin de personnifier le soldat, de le représenter comme une icône, de le promener dans les rues de Paris à la recherche d’un piédestal vide ou de provoquer un embouteillage bien ludique. Il en résultait une certaine confusion, un jeu. Un jeu fatal : je tire, tu tires… c’est bien ou mal… et il ne se passe rien, juste des milliers des morts…


Al meu entendre, era molt infantil personificar el soldat, representarlo com a una icona, passejar-lo pels carrers de Paris a la recerca d’un pedestal buit o provocar un embús força lúdic. Es tractava d’una certa confusió, un joc. Un joc fatal: jo disparo, tu dispares... està bé o malament... i no passa res de res, només uns quants milers de morts...


À la Galerie Zunini, je passais les soldats — toujours kaki — à la machine à laver et, symboliquement, ils devenaient blancs. On faisait ce qu’on voulait d’eux, on jouait avec sur la base du jeu absurde qu’est la guerre. Je retrouvais ainsi l’expérience chromatique du service militaire et ce rapport à la couleur jouera un rôle déterminant dans l’ensemble de mon œuvre.


A la Galeria Zunini, posava els soldats, sempre de color caqui, a la rentadora i, simbòlicament, es tornaven blancs. En feia el que volia d’ells, hi jugava partint de la base del joc absurd que és la guerra. D’aquesta manera vaig reviure l’experiència cromàtica del servei militar i aquesta relació amb el color tindrà un paper decisiu al conjunt de la meva obra.




J’ai poursuivi ce travail de manière presque obsessionnelle et c’est peut-être un peu pour ça que je me suis dirigé vers la nourriture à la fin des années 60. J’ai senti que je devais arrêter de baser mes œuvres sur mes problèmes. Il fallait que je retrouve une autre réalité, que je me sorte des soldats pour me reconnecter à la vie quotidienne, à la rue, et surtout aux gens — que je sentais alors loin de comprendre ce que peut être une œuvre d’art. Je voulais me rapprocher du quotidien, du « populaire », du travail artisanal et arriver à jouir des situations de manière plus sensorielle. Il fallait sortir de mon atelier, de mon entourage, de mes obsessions. C’est le moment où j’ai préféré le rouge Ketchup au rouge vermillon et où je me suis mis à visiter les grands magasins au lieu des grands musées.


Vaig realitzar aquest treball d’una manera gairebé obsessiva i pot ser que fos per això que a finals dels anys 60 em vaig dedicar a l’alimentació. Sentia que havia de deixar de basar les meves obres en els meus problemes. Calia que trobes una altra realitat, que fugís dels soldats i em tornés a connectar a la vida quotidiana, al carrer i, sobretot, a la gent, que aleshores pensava que no comprenia el que pot ser una obra d’art. Volia apropar-me a la quotidianitat, al que és «popular», al treball artesanal i arribar a fruir de les situacions d’una manera més sensorial. Calia que fugís del meu taller, del meu entorn, de les meves obsessions. És el moment en el qual em decanto pel vermell Ketchup en comptes del vermell vermelló i que començo a visitar els grans magatzems en lloc dels gran museus.


Me tourner vers la nourriture n’a pas été une décision écrite, ni prévue, ni planifiée. Cela m’est venu par des expériences, des rencontres : le voisin, la pâtisserie, les meringues dans les vitrines, Dorothée Selz, les braç de gitano, l’iconographie qui m’entourait. Je voyais des trucs inimaginables pour un catalan, comme le vacherin, cette sorte de structure, comme un stadium romain, avec toute cette dégoulinade de meringue, à l’intérieur de laquelle on rajoutait des crèmes, des goûts différents, des couleurs...


Dedicar-me a l’alimentació no va ser pas una decisió escrita, ni prevista, ni planificada. Em va venir per les experiències, les trobades: el veí, la pastisseria, les merengues dels aparadors, Dorothée Selz, el braç de gitano, la iconografia que m’envoltava. Jo veia unes futilitats inimaginables per a un català, com el vacherin, aquesta espècie d’estructura, com un stadium romà, amb tota aquest regalim de merenga dins la qual s’hi afegien cremes, sabors diferents, colors...


Il y a toute une partie sensorielle dans le travail avec la nourriture. Tu fais constamment des découvertes, des rencontres. Tu communiques. Et finalement c’est ça, il faut communiquer. Sinon, tu restes chez toi avec ton petit tableau, tes petites choses et ça casse, ça prend la poussière.


Hi ha tota una part sensorial en el treball amb l’alimentació. Fas constantment descobriments, troballes. Tu ho comuniques. I finalment es limita a això, a la comunicació. Si no, et quedes a casa teva amb el teu quadret, les teves petites coses i tot acaba trencant-se, agafa pols.


La rencontre avec Dorothée Selz m’a permis de développer ces idées. On élargissait l’action dans des lieux de non-art, on faisait participer le plus grand nombre avec l’idée de la table comme un banquet, qui devenait lui-même un support festif et rituel pour étendre ce partage. C’était une chorégraphie extraordinaire : une table avec seulement des assiettes, ou avec des restes de repas, ou encore avec de beaux plats préparés comme ça devait se faire à l’époque baroque.


La trobada amb la Dorothée Selz m’ha permès desenvolupar aquestes idees. Ampliem l’acció a llocs no propis de l’art, fem participar el nombre més gran possible de gent amb la idea de la taula com a un banquet, que es transforma per sí sol en un suport festiu i ritual per a allargar aquest repartiment. Era una coreografia extraordinària: una taula amb només plats, o amb restes de menjar o fins i tot amb bells plats preparats a l’estil de l’època barroca.


C’est une vraie jouissance de pouvoir déguster, digérer, métaboliser une œuvre d’art. Ça a été une expérience très forte pour moi, qui m’a permis d’élargir cette rencontre, ces rencontres. Tout le monde avait besoin de manger pour survivre. Mais les gens étaient trop habitués à ces rituels, ça faisait simplement partie d’un régime quotidien. L’expérience artistique se situe dans les interrogations qu’on fait naître chez les gens, qu’on leur impose ou, mieux dit, qu’on leur propose lorsqu’on partage avec eux un mets qui est différent, qui est un symbole avec une forme et une couleur.


És un autèntic goig poder degustar, digerir, metabolitzar una obra d’art. Ha estat una experiència molt forta per mi, m’ha permès allargar aquesta trobada, aquestes troballes. Tothom tenia necessitat de menjar per sobreviure. Però la gent estava massa acostumada a aquests rituals, simplement formaven part d’un règim quotidià. L’experiència artística es situa a les preguntes que es fa la gent, que se’ls imposa o, millor dit, que se’ls proposa quan comparteixen entre ells un menjar que és diferent, que és un símbol amb una forma i un color.



Tous les aliments m’inspiraient. Les comestibles comme les non comestibles. Ceux qui n’ont pas l’air mangeable mais qui ont peut-être été goûtés dans d’autres cultures ou par d’autres générations. Les aliments de base sont un peu comme la palette du peintre. On a commencé à utiliser du pain, des pâtes et du riz dans les années 70 parce que c’était important à cette époque. On transformait quelque chose de très quotidien, qui servait à survivre et qui devenait, du coup, étrange : la couleur change, et avec elle la perception que l’on avait de cet aliment. Peu à peu, la symbolique attachée aux couleurs s’est imposée.

Tots els aliments m’inspiren. Tant els comestibles com els no comestibles. Els que no tenen un aspecte comestible però que potser han estat assaborits per altres cultures o per altres generacions. Els aliments bàsics són una mica com la paleta del pintor. Els anys 70 es comença a emprar el pa, les pastes i l’arròs perquè era important en aquesta època. Es transformava qualsevol cosa molt quotidiana, que servia per a sobreviure i que, de cop i volta, esdevenia estranya: el color canvia, i amb ell la percepció que es té d’aquest aliment i s’imposa el simbolisme relacionat amb els colors.




J’ai toujours travaillé ces éléments. Mais, depuis quelques temps, j’essaie de les organiser, d’en faire une espèce d’abécédaire qui aiderait à expliquer la relation entre la nourriture et les aspects sociaux, rituels et politiques qui m’ont toujours fasciné. Comme l’évolution de la consommation. J’ai toujours pensé que je ne m’habillerai pas avec un jean, que je ne boirai pas de Coca-Cola et je continue à le croire.


Sempre

he treballat

aquests

elements.

Però,

des de

fa algun temps, provo d’organitzarlos, de fer una espècie d’abecedari que ajudaria a explicar la relació entre l’alimentació i els aspectes socials, rituals i polítics que sempre m’han fascinat. De la mateixa manera que l’evolució del consum. Jo sempre he pensat que no em posaria un texà, que no beuria Coca-Cola i segueixo pensant-ho.


Cependant, il est bien que tout cela existe et ait évolué. Peut-être pas en bien, certes, mais toute cette élucubration autour de la nourriture de fast-food et tous ces rapports à la nature sont plus visibles qu’avant, moins camouflés. Même en rentrant dans un McDonald, on se rend compte de la manière dont ils ont fait évoluer leur image. Ils accrochent des petites poires, des petites pommes en plastique pour qu’on sache qu’il y a quand même une nature qui existe quelque part… I’m lovin’it ! Ils doivent même dire d’où vient leur viande ou imprimer leur analyse nutritionnelle. Il y a tout un modèle d’aliénation qui est plus fort, plus intéressant et plus excitant parce qu’on l’a au coin de la rue.


Tanmateix, està bé que tot això existeixi i evolucioni. Potser, i que no pas per bé, algunes, però totes d’aquestes elucubracions al voltant de l’alimentació del fast-food i totes aquestes relacions amb la natura són més visibles que abans, estan menys camuflades. Fins i tot si entrem a un McDonald’s, ens en adonem de la manera en com ha evolucionat la seva imatge. Pengen petites peres, petites pomes de plàstic perquè sapiguem que si més no hi ha una natura que existeix en alguna part... I’m lovin it! Ells han de dir fins i tot d’on procedeix la seva carn o imprimir el seu anàlisi institucional. Hi ha tot un model d’alienació que és molt més fort, més interessant i més excitant perquè es troba a la cantonada del carrer.


C’est pour montrer et réfléchir sur tout cela que j’ai décidé de créer le projet du FoodCulturaMuseum à Barcelone. Il est né de cette volonté de rechercher, de décrire, de montrer, de muséifier la nourriture. D’un côté, le point de départ est une sorte d’assemblage des expériences et des projets que j’ai eu toutes ces années. D’un autre côté, c’est une plateforme interactive pour créer des situations pédagogiques et essayer de montrer que la nourriture est un monde incroyablement diversifié mais que c’est aussi de l’art.


És per tal de mostrar i reflexionar sobre tot això que he decidit crear el projecte del FoodCulturalMuseum a Barcelona. Aquest projecte ha nascut de la voluntat de cercar, descriure, mostrar, introduir l’alimentació als museus. D’una banda, el punt de partida és una espècie de muntatge de les experiències i dels projectes que he portat a terme durant aquests anys. D’altra banda, és una plataforma interactiva per a la creació de situacions pedagògiques i provar de mostrar que l’alimentació es un món increïblement diversificat però que també és art.


En introduisant, dans mon travail, des situations comme le problème des guerres et de la violence liées à l’importation ou l’exportation d’aliments, la manipulation génétique, les biocombustibles, pourquoi un produit se vend et l’autre pas, je réorganise peu à peu le menu de toutes mes obsessions.


Amb la introducció en el meu treball de situacions com el problema de les guerres i de la violència a causa de la importació o de l’exportació d’aliments, la manipulació genètica, els biocombustibles, el perquè un producte es ven i un altre no, aconsegueixo reorganitzar poc a poc el menú de totes les meves obsessions.


Vuitantena obra de la col·lecció « L’art en écrit », el text de Miralda titulat KM – Ketchup Moutarde – s’ha acabat d’imprimir per éditions Jannink el 22 d’abril de 2010 a la impremta Graficas 94, a Barcelona. Ha estat igualment editat una tirada de 285 exemplars, numerats de l’1 al 285, i 15 exemplars marcats H.C., acompanyats d’una obra original, signada i única per a cada exemplar.

Maquette : Sylvain Aubert © éditions Jannink, Paris, 2010 – ISBN : 978-2-916067-50-6


Quatre-vingtième ouvrage de la collection « L’art en écrit », le texte de Miralda intulé KM – Ketchup Moutarde – a été achevé d’imprimer pour le compte des éditions Jannink le 22 avril 2010 sur les presses de l’imprimerie Graficas 94, à Barcelone. Il a également été édité un tirage de tête de 285 exemplaires, numérotés de 1 à 285, et 15 exemplaires marqués H.C., accompagnés d’une œuvre originale, signée et unique pour chaque exemplaire.



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