JA 2711 12 DU 23 DECEMBRE 2012 AU 5 JANVIER 2013

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Afrique subsaharienne

LES HOMMES CLÉS DE L’AFFAIRE

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• Gaston Eyskens (1905-1988),

Premier ministre belge de juin 1958 à avril 1961, il est habile et coriace. Les coalitions changent, mais lui, l’ancien professeur à l’université catholique de Louvain, reste aux affaires. La preuve: en août 1960, il résiste à une offensive du roi Baudouin, qui le trouve trop modéré sur le dossier congolais et veut le débarquer.

AFP

• Le comte Harold d’Aspremont Lynden (1914-1967), ministre des

de sa haine vengeresse, lui qu’il tient en partie pour responsable de la mort de Lumumba. En juin 1967, le président Boumédiène fera détourner son avion au-dessus des Baléares, et l’enfermera dans un cachot où il mourra deux ans plus tard, officiellement d’une « crise cardiaque ». En 1960, Tshombe pressent-il tout cela ? Ce qui est sûr, c’est que jusqu’à la mi-janvier 1961, ses tuteurs belges d’Élisabethville et lui-même ont fait savoir à Bruxelles qu’ils ne voulaient pas recevoir le « cadeau empoisonné » Lumumba. Le 13 janvier 1961, tout s’emballe. Une mutinerie éclate au camp militaire de Thysville, où Lumumba est enfermé depuis six semaines. Du fond de son cachot,letribunnationalistearetournéunepartiede sesgeôliers.PaniquechezlesBlancsdeLéopoldville. Mobutu et Victor Nendaka, le directeur de la Sûreté, undur,réquisitionnentKasa-Vubuets’envolentpour Thysville, où ils rétablissent la situation in extremis, avec des liasses de billets. Mais le chef du camp, le colonel Bobozo, un Ngbandi comme Mobutu, dit à celui-ci: « Si une nouvelle mutinerie éclate, je ne pourrai plus garder Lumumba en prison. » Aussitôt, le scénario katangais est enclenché. Le 16 janvier au matin, un télex de Bruxelles intime l’ordre à Élisabethville de recevoir le prisonnier. Vu les propos publics des ministres de Tshombe (« S’il vientcheznous,nousletuerons»),aucundouten’est permissurlesortquiattendLumumba.Cejour-là,le Premier ministre belge, Gaston Eyskens, et Mobutu décident de sang-froid la mort de Lumumba, avec la bénédiction de Dwight Eisenhower. Un crime d’État et, pour les Congolais, le premier pas d’une longue descente aux enfers. ● JEUNE AFRIQUE

! De haut en bas : le président américain DWIGHT EISENHOWER ; le Premier ministre belge de l’époque, GASTON EYSKENS ; et HAROLD D’ASPREMONT LYNDEN, le Foccart de Bruxelles.

Affaires africaines de septembre 1960 à avril 1961. Aspremont, c’est le Foccart de Bruxelles. Ancien résistant, il est au cabinet du Premier ministre quand le Katanga fait sécession. Aussitôt, Eyskens l’y envoie comme proconsul, puis lui confie les commandes du Congo à Bruxelles. Le mot d’ordre du 6 octobre: « L’objectif principal est évidemment l’élimination définitive de Lumumba », c’est lui. Le télex du 16 janvier à Élisabethville, c’est encore lui.

• Joseph Kasa-Vubu (1915-1969),

premier président de la République du Congo à partir du 30 juin 1960.

• Le colonel Joseph-Désiré Mobutu

« Si je meurs demain, ce sera parce qu’un Blanc aura armé un Noir », avait un jour dit Lumumba.

(1930-1997), chef d’état-major de l’armée congolaise à partir du 5 juillet 1960. Le 14 septembre, il « neutralise » Kasa-Vubu et Lumumba et prend le pouvoir une première fois.

• Victor Nendaka (1923-2002),

directeur de la Sûreté congolaise à partir de septembre 1960.Très brillant, il est d’abord le bras droit de Lumumba, puis celui de Mobutu.

• Le colonel Louis Marlière (mort en mai 2000), chef des services belges à Léopoldville et conseiller de Mobutu à partir de juillet 1960.

Pour en savoir plus, lire L’Assassinat de Lumumba, de Ludo De Witte, aux Éditions Karthala (2000).

• Larry Devlin (1922-2008), chef

de la CIA au Congo de 1960 à 1967.

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