La lettre du Changement n°6

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Grenoble agglo : faire sauter les bouchons : les 5 mesures choc ! N° 02 - octobre 2011 - Lettre indépendante d’information sur l’agglomération grenobloise

La Lettre du Changement 15 décembre 2011 — n°6 http://www.grenobleagglo2014.tumblr.com/


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Grenoble agglo : faire sauter les bouchons : les 5 mesures choc !

Les faits parlent d’euxmêmes pour attester du niveau inédit d’exaspération face aux bouchons dans l’agglomération grenobloise. Le 11 novembre 2011, le Club 20 ouvre un questionnaire en ligne sur le thème «lors des municipales de 2014, votre vote sera influencé par ...». Et le premier dossier évoqué concerne les voies de circulation pour 31, 7 % des personnes exprimées. Le 18 novembre, second questionnaire en ligne sur les aménagements projetés de l’A 480 : réponse : 83, 3 % y sont défavorables. Début décembre, Grenews lance également un questionnaire en ligne sur le thème «bouchons et Grenoble, vous dites ... ». Parmi 17 réponses proposées, c’est le thème «y en a marre» qui arrive en tête pour 52 % des personnes exprimées. Bien davantage, toujours début décembre, ce sont des organisations socioprofessionnelles qui lancent une pétition sur le thème : stop bouchons ! Chaque matin, France Bleu

Isère dresse le constat en direct égrenant les kilomètres de bouchons dans l’ensemble de l’agglomération grenobloise. L’agglomération grenobloise bat un record historique d’embouteillages partout et à toutes les heures de la journée.

Une crise prévue depuis … 25 ans ! En 1986, le CETE d’Aix en Provence, organisme d’étude des directions départementales de l’équipement, remet un rapport très complet dans le cadre des études préalables à la décision sur l’autoroute Grenoble – Sisteron. En janvier 1994, l’Agence d’Urbanisme de l’Agglomération Grenobloise a publié un premier document technique qui était le fruit de travaux longs associant tous les partenaires concernés. Ce document intitulé «le déséquilibre en marche, ima-

ges de la région grenobloise» avait le préambule suivant : «afin de mieux cerner l’évolution de la Région Urbaine Grenobloise, dans la perspective de la réalisation du futur schéma directeur, l’Agence d’Urbanisme a réalisé un certain nombre d’études statistiques à partir des données du Recensement Général de la Population de 1990 et des précédents sur un périmètre élargi à 291 Communes». Des chiffres majeurs étaient mis en évidence pour aboutir à des décisions politiques urgentes dont les chiffres suivants. En 1975, un quart des emplois sur la Ville de Grenoble étaient occupés par des migrants venant d’une autre Commune. En 1990, ces chiffres sont passés à plus d’un tiers. En 1975, 48 Communes de l’Isère avaient au moins 20 % de leurs actifs qui allaient travailler à Grenoble. En 1990, ces Communes étaient passées au nombre de 77.


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La crise est là Comme Président de l’Agence d’Urbanisme de la Région Grenobloise, Denis Bonzy a multiplié les alertes au début des années 90. Ce fut le cas également de nombreux articles et des rapports au sein de l’Assemblée Départementale. Le blocage politique depuis 1995 par le rapport de forces entre le PS et les Verts a accéléré et amplifié les alertes de l’époque. La crise annoncée est maintenant là. L’agglomération grenobloise est asphyxiée. Son expertise a été mise à profit par l’équipe du Club 20 qui a participé à la rédaction de cette lettre consacrée aux «bouchons grenoblois».

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Entre 1975 et 1990, les migrations quotidiennes entre l’agglomération et les extérieurs de première proximité ont augmenté de 130 % en volume. En 1990, chaque jour 40 000 personnes extérieures à l’agglomération grenobloise venaient travailler dans l’agglomération grenobloise alors qu’elles n’étaient que 16 000 en 1975... Tous ces chiffres justifiaient le choix du titre de cette publication technique : le déséquilibre en marche. Que s’est-il passé de 1990 à 2005 ? Toutes ces tendances se sont accentuées au point d’arriver au constat suivant : «Grenoble : une attractivité handicapée par les difficultés croissantes des déplacements. … Les principales voies d’accès sont engorgées aux heures de pointe et le moindre accident provoque un blocage complet de l’agglomération. Les transports ferroviaires ne sont pas au niveau requis pour une agglomération de cette taille... ». Qui dresse ce constat ? Ce constat d’une agglomération paralysée est dressé officiellement à la page 02 du rapport réalisé par les services du Conseil Général de l’Isère (PS) et publié le 14 juin 2005. Le 1er constat avait été effectué en janvier 1994. 11 ans plus tard, une institution majeure (le Départe-

ment de l’Isère) effectue un pas supplémentaire et officialise le constat quotidiennement opéré par des dizaines de milliers d’usagers. Pourquoi ces constats ne sont-ils suivis d’aucune conséquence pratique ? Les voies de communication ont été victimes d’arbitrages politiques au sein des nouvelles majorités locales. Le poids déterminant des écologistes a paralysé les élus socialistes. En juillet 1990, les élus socialistes et apparentés du Sieparg (mère de la Métro) publiaient une brochure de réflexion intitulée «l’avenir de l’agglomération grenobloise». Aux pages 22 et 23 figure la liste des signataires c'est-à-dire tous ceux qui sont maintenant en charge

des dossiers de l’agglomération depuis 1995. A la page 13 dudit document sont mentionnés les objectifs prioritaires en matière de déplacements. Les engagements sont clairs. C’est la reprise des propositions de la DDE qui avaient obtenu un certain consensus. Il est donc question de l’aménagement de l’A 480, de la réalisation de l’U4… Les Verts ont impacté deux dossiers de façon privilégiée : le gel des voies de communication et la réduction brutale de la place de l’automobile dans la Ville de Grenoble. La crise actuelle est d’abord le produit de cette réalité politique qui a primé sur toutes les prospectives techniques comme sur les engagements publics du seul


Grenoble agglo : les 5 mesures choc pour faire sauter les bouchons Parti Socialiste au début des années 90.

Retrouver le sens des grands travaux

Par sa gravité, cette crise appelle des mesures choc. Les cinq exigences majeures nous semblent être les suivantes.

1 : l’exigence de vérité financière L’agglomération grenobloise et la Ville de Grenoble connaissent aujourd’hui une réalité financière marquée par deux records : le niveau très élevé d’imposition et le niveau très élevé d’endettement. Cette réalité officielle signifie concrètement que ces deux collectivités n’ont désormais aucune marge de manœuvre pour financer des travaux lourds d’équipements de voiries. Leur projet de péage urbain après les élections de mars 2014 constitue d’abord une taxe supplémentaire sur la consommation des voiries destinée à fournir des recettes sans lesquelles à ce jour les collectivités en question sont paralysées. La première question préalable consiste à se prononcer sur les conditions de réouverture de marges de manœuvres. Soit c’est la logique du pouvoir sortant : une taxation de plus via le péage urbain. Soit c’est une autre logique écartant toute fuite en avant vers une progression

Le dernier programme de grands travaux dans l’agglomération grenobloise date de la fin des années 80 avec le programme Tazieff (cf photo page 4) sur les risques naturels et technologiques. Cet ancien Ministre de François Mitterrand, vulcanologue très médiatisé, proche d’Alain Carignon, est élu en octobre 1988 Conseiller Général de Grenoble V. Au sein du Département de l’Isère, il casse le ronron des discussions de mutuelle financière. Il s’attache à deux dossiers : - les risques majeurs (naturels et technologiques), - les grandes liaisons internationales dans une logique multimodale. C’est le «Monsieur tunnels». Avec son franc-parler, Haroun Tazieff intervient pour convaincre d’abord ses collègues élus qu’en sites urbanisés densifiés, l’avenir était aux tunnels. Pour une raison principale simple : les tranchées en surface ne seraient plus tolérées par les populations. Mais bien au-delà, l’expert qu’il était énonçait des avantages techniques durables. Haroun Tazieff considérait que les grands travaux étaient l’héritage positif d’une génération à ses suivantes. C’est cet esprit des grands travaux qu’il faut retrouver. Il y a non seulement une éthique dans la chaîne des générations mais aussi une dynamique de croissance économique par l’ensemble des dépenses productives alors engagées. C’est ce sens des grands travaux d’intérêt général qui a été perdu ces dernières années par un rapport excessif donné au simple équilibre politique entre des composantes des majorités de la Métro comme de la Ville de Grenoble paralysées entre des orientations trop différentes.

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des taxations pour aller vers une redistribution des actions publiques par le changement du périmètre du secteur public local. Ce cadre de la réduction du périmètre du secteur public local est celui de nos propositions. Les collectivités publiques locales doivent fixer comme priorités : - la stabilisation de la pression fiscale locale, - la préservation des services publics majeurs, - le désendettement. Ces priorités supposent notamment la mise en place d’une mission de réalisation des actifs dans les activités publiques ou para-publiques à caractère industriel et commercial. Dans ces métiers, cette mission doit viser au minimum à mettre un terme aux pertes manifestement récurrentes voire même à externaliser des activités qui n’entrent pas dans la vocation des services publics fondamentaux à caractère administratif, social ou d’ordre public. C’est le seul moyen pour assainir les finances publiques locales sans augmenter la fiscalité ni altérer la performance de services publics essentiels (enseignement, solidarités …).

2 : le choix de la bonne perspective Engager des travaux lourds


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en matière de voies de circulation, c’est penser au moins à 20 ans. Les autres perspectives relèvent de la rustine et non pas de travaux structurants. C’est le cas par exemple des actuels projets sur l’A 480 consistant à neutraliser des espaces de bandes de sécurité pour faire vivre une voie de plus … Qui peut sérieusement imaginer qu’il s’agirait là d’un aménagement durable ? Cette perspective à long terme ne doit pas reposer sur une analyse des voiries mais sur une analyse du développement des territoires. Les voiries sont et doivent rester un moyen de liaison entre des bassins de vie et non pas une fin en soi. Par conséquent, la bonne

approche ne consiste ni à s’occuper du court terme ni à s’occuper des voiries. Mais, dans le long terme, elle consiste à s’occuper de la logique de l’occupation de l’espace et, par voie de conséquence, de la bonne répartition des activités publiques et économiques sur ce large territoire. Or, dans ce cadre, la Métro est un échec grave puisqu’elle a été construite sur la base d’un «Yalta politique» entre les leaders socialistes locaux protégeant chacun «leurs» territoires et non pas sur une logique technique d’aménagement territorial. Pour que les réalités territoriales prennent le pas sur les considérations partisanes, il est nécessaire que ce

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dossier soit ouvert lors des prochaines élections municipales pour donner une assiette démocratique à une nécessaire remise en question des frontières d’organisation territoriale de la Métro.

3 : l’exemplarité de la réorganisation financière Les alertes actuelles sur les finances de la Ville de Grenoble et de la Métro sont comparables à celles d’hier sur les … voies de circulation. La crise gravissime est en marche. Tous les indicateurs nationaux officiels l’établissent de façon incontestée.


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L’enjeu est de sauver les services publics fondamentaux en accélérant le désendettement pour retrouver une marge de manœuvre financière pour des grands travaux d’intérêt général. A cette fin, il est indispensable de : - corriger le périmètre du secteur public (cf ci-dessus le paragraphe sur l’exigence de vérité financière), - mais aussi réduire de façon drastique toutes les dépenses de fonctionnement qui n’impactent pas les services publics. Dans cette logique, il est nécessaire par exemple de procéder aux décisions suivantes : - suppression de 4 postes sur 5 dans les cabinets des exécutifs, - diminution immédiate de 50 % des frais de communication pour ne garder que

des informations techniques, - diminution immédiate de 50 % sur tous les frais de protocole, de fêtes et de cérémonies, - diminution très significative du nombre des adjoints à la Ville de Grenoble et encore davantage du nombre de Vice-présidents à la Métro. Ces trois dernières mesures ont vocation à s’appliquer à l’ensemble des organismes publics et para-publics au sein desquels la Métro et la Ville de Grenoble sont des actionnaires de référence. Ces mesures doivent s’accompagner d’une réorganisation globale des mécanismes de représentation des élus dans les organismes locaux et d’organisation de ces organismes pour diminuer en nombre et gagner en cohérence. Ce sont là des économies récurrentes

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qui, ajoutées à la correction du périmètre public d’interventions, représentent une marge de manœuvre de plusieurs dizaines de millions d’euros sans le moindre impact négatif sur la qualité des services publics. Un chiffrage détaillé est en cours de finalisation. Sa présentation publique interviendra courant le premier semestre 2012. Parce que les élus auront appliqué d’abord euxmêmes les économies, leur force morale sera d’autant plus grande pour solliciter des efforts de gestion auprès de tiers. Cette exemplarité n’est donc pas que quantitative. Elle vise à prouver par les actes que les collectivités publiques changent leurs comportements comme le font les ménages ou les entreprises face à une crise historique.


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4 : le choix de la liberté donc de la diversité des modes de déplacements La place de l’automobile comme outil de déplacement doit être réaffirmée. Il ne s’agit pas là d’un acte dogmatique mais du simple respect des réalités. La situation des transports publics, actuel véritable gouffre financier, doit être différenciée entre les déplacements intra-urbains et les déplacements péri-urbains. Sur le plan intra-urbain, la priorité doit aller à la sécurisation des équipements en question à toutes les heures des services car c’est la condition préalable à leur fréquentation. Sur le plan péri-urbain, la logique doit

être plus globale intégrant des modes de déplacements individuels en sites propres notamment pour les vélos à destination des pôles de services publics. Le Club 20 préconise une étude détaillée sur la gratuité des transports publics. Cette logique supprime certes des recettes mais elle supprime également certaines charges. Elle permet surtout d’offrir une valeur ajoutée objective et marquante face aux véhicules individuels.

5 : la priorité à des voies de circulation souterraines Dès 1988 (rapport du groupe IDEES), les évolutions des contraintes légitimes de la qualité de vie conduisaient à affirmer que les

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grandes voies de contournement seraient souterraines en milieu urbanisé densifié. C’est le cas des grandes agglomérations étrangères. Cette amélioration à terme par la paisibilité en surface est d’abord une contrainte en coûts. C’est pour cette raison que faire sauter les bouchons dans l’agglomération grenobloise c’est d’abord un enjeu financier. La mise en place de voiries de qualité non pénalisantes pour la vie quotidienne a un prix élevé. C’est cette capacité à financer des voies de circulation performantes et respectueuses du cadre de vie qu’il faut d’abord regagner.

Editeur : club20@orange.fr http:// www.grenobleagglo2014.tumblr.com/


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