Mythes, croyances et légendes roumaines liés à l'eau

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MYTHES, CROYANCES ET LÉGENDES ROUMAINES

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LIÉS À L’EAU


L’eau, élément de la génèse Le moment initial de la création du monde est marqué dans presque toutes les légendes cosmogoniques roumaines par les eaux primordiales. C’est le contexte d’où surgit le monde, si bien représenté dans ces vers empreints du génie de Mihai Eminescu (1850-1889) : « Au

début,

quand

il

n’y

avait

ni

être

ni

non

être,

Il y avait un gouffre ? Un abîme ? Una étendue infinite d’eau? » (« La-nceput,

pe

cînd

fiintã

nu

era,

nici

nefiintã,

Fu prãpastie ? Genune ? Fu noian întins de apã ? » - Scrisoarea I, 1881) Les personnages qui brisent de leur présence cette immensité d’eaux et d’obscurité sont Dieu et le Diable qui, à ce moment-là, étaient frères. Dieu était bon, charitable, miséricordieux, juste, et le Diable était méchant, rusé, injuste. Ils se promenaient sur les eaux primordiales et, comme tout marin-navigateur, ils éprouvaient le sentiment solitude. Dieu dit au Diable de plonger dans les eaux et de lui apporter du sable/ du fond de la mer/ avec lequel Dieu ferait la terre.

Dans d’autres variantes, Dieu et l’ange André sont sur un navire ; une rame tombe dans l’eau, l’ange plonge pour la récupérer. Dieu ramasse la vase qui était collée à la rame et fait d’elle la terre, en mettant l’ange André pour la soutenir sur son dos. Un autre

conte lié à l’eau évoque

l’histoire des Blajini (en roumain, « hommes

paisibles », « saints »). Ce sont des Moldaves partis en mer ; leur navire sombre – un vrai

croyants mais ne savent pas quand ont lieu les jours de Noël et de Pâques. Alors, on jette dans les

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montagne. Les gens noyés – têtes de souris, corps d’hommes – sont au fond de la mer. Ils restent

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naufrage – tous sont noyés sauf un qui, bon nageur, parvient à se sauver et arrive à une


rivières, à Noël, des coquilles de noix et, à Pâques, des coquilles d’œufs qui flottent et arrivent aux Blajini ; ainsi ils savent que, chez nous, c’est la fête de Noël ou de Pâques. Le fond de la mer, des océans, des eaux, en général, a souvent le statut d’une vraie cachette. Dieu, afin d’empêcher le mariage du Soleil et de la Lune – car, ceux-ci, étant frère et sœur, auraient commis un péché – fait plonger la Lune au fond de la mer, pour la cacher, l’eau de la mer ternit son éclat et atténue le feu de ses rayons.

Les eaux stagnantes, les lacs ou les étangs isolés peuvent aussi servir d’abri pour le Diable, donc il faut les éviter. L’eau, élément de la vitalité Le motif de l'eau miraculeuse qui rajeunit, qui guérit ou qui ressuscite est très présent dans la mythologie et le folklore roumains. On dit que nos ancêtres, les Daces, buvaient de l’eau du Danube avant de partir à la guerre. Toutefois, outre cette eau régénérante, les contes roumains évoquent fréquemment, tantôt « l'eau vive » tantôt « l'eau morte ». Souvent, pendant leurs voyages initiatiques, les héros des contes rencontrent des fontaines, des puits, des rivières ou des sources et la réussite de leurs exploits dépend de la qualité de ces eaux. L'eau morte et l'eau vive, utilisées successivement et dans cet ordre permettent de faire revenir à la vie un personnage dont le corps a pourtant été coupé en morceaux. C’est le cas de « L’histoire d’Harap Alb », un conte

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roumain célèbre écrit par Ion Creanga.


L’eau, élément de la jeunesse éternelle Le folklore roumain est parsemé de « fontaines de la jeunesse » dont l’eau confère la jeunesse éternelle à celui qui en boit. Pourtant, dans un conte emblématique de notre littérature populaire, « Jeunesse sans vieillesse et vie sans mort », après avoir conquiert la jeunesse éternelle, le héros redevient mortel parce qu’il entre, sans s’en rendre compte, dans « la Vallée des Larmes ».

L’eau, élément de la purification Pour les croyants roumains, l’eau bénite à l’église (« agheazma ») devient pure et miraculeuse. Elle peut guérir les maladies, chasser les démons et les esprits maléfiques et

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favorise la prospérité de la famille.


L’eau, élément de la destruction Dans les croyances roumaines on invoque « la Mère des eaux » ou « la Mère des pluies » pour arrêter les précipitations trop abondantes ou la sécheresse. L’eau symbolise aussi l’écoulement du temps, si bien exprimé par le proverbe roumain « L’eau coule, les pierres restent ». L’arc-en-ciel Pour les habitants de certains villages roumains, l’arc-en-ciel est une sorte de dragon géant qui habite au ciel et que Dieu envoie sur terre quand les réserves d’eau du ciel finissent. L’arc-en-ciel, toujours assoiffé, boit l’eau des rivières ou des mers, filtrée à travers une pierre spéciale, percée d’un coté à l’autre. Celui qui trouve cette pierre doit bien la garder et la transmettre de père en fils parce qu’elle assure la prospérité de ses possesseurs. L’arc-en-ciel est parfois nommé « la ceinture » de Dieu, du ciel, de la Vierge Marie. C’est le symbole d’un « pont » entre la terre et le ciel qui a toujours une connotation positive, vu qu’il assure en quelque sorte le cycle de l’eau : Dieu a créé l’arc-en-ciel soit pour lui apporter

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l’eau nécessaire aux pluies, soit pour arrêter les pluies trop abondantes.


La Paparuda Paparuda (du mot bulgare Peperuda) est un rite d’ invocation de la pluie. Mais Paparuda est aussi une figure de la mythologie roumaine, notamment une femme vêtue d’haillons, qui amène la pluie par où elle passe.

La coutume de Paparuda est attestée dès les premiers ouvrages qui traitent du folklore roumain, au XVIIIème siècle: « Durant l’été, quand la récolte est menacée par une grande sécheresse, les gens du village choisissent une fillette âgée de 10 ans et l’habillent d’une chemise tissée en feuilles d’arbres et des plantes. Tous les autres enfants de son âge la suivent en cortège en chantant tout au long du village; partout, les vieilles femmes les aspergent de l’eau froide ». Paparuda est un rituel pratiqué par des jeunes filles de moins de 14 ans, vętues de feuilles et de guirlandes vertes. Le capuchon de verdure qu’elles portent sur la tête est décoré avec des bandelettes rouges. Les filles dansent devant toutes les maisons du village au rythme des tambours improvisés de poêles. Le cortège parcourt le village en chantant la chanson de Paparuda – un ancien texte d’invocation de la pluie : Seigneur, donnez-nous les clés/ Pour ouvrir les cieux,/Pour que la pluie tombe ! Le rituel de Paparuda prend fin lorsqu’on jette les vêtements de verdure dans une rivière. (M. Olinescu, Mythologie roumaine; I. Evseev,

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Dictionnaire de magie roumaine)


Le Caloian Le terme Caloian (du slave Kalenu) a ses origines dans la langue grecque : Coloe (beau) + le nom masculin Ian, Caloian signifiant Jean le Beau, Jean Baptiste. En roumain, le mot Caloian désigne plus particulièrement un objet rituel utilisé dans le cadre d’un autre rite d’invocation de la pluie.

morceaux de tissu, ayant la tête parue de basilique et de coquilles d’oeufs de Pâques. Au

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printemps et en été, après une longue période de sécheresse, des jeunes filles et parfois des

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Le Caloian est une poupée qui représente un homme fait en terre, en bois ou en


adultes, selon les régions, se réunissent et fabriquent ensemble le Caloian. Ils le mettent ensuite dans un cercueil en miniature et le promènent dans les champs ensemencés. Ensuite, le cortège procède à la cérémonie funéraire du Caloian mais au lieu de l’enterrer, il le laisse flotter sur une rivière, afin que la poupée aille chercher et amener la pluie. Parfois, le cercueil est enterré pour trois jours, dans un endroit secret, étant ensuite récupéré à l’aube du troisième jour et jeté dans une fontaine ou dans une rivière, pour que la poupée fasse « bouger » les eaux et qu’elle amène la pluie. En męme temps, une chanson rituelle est interprétée par le cortège du Caloian. (Gh. F. Ciausanu, Les superstitions du peuple roumain; I. Ghinoiu, Les coutumes du calendrier. Dictionnaire)

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Réalisé par Ana Taran et Barcau Emanuel, Lycée Théorique « Ion Luca"


Bibliographie : Valerie Rusu, « Le naufrage-plongée, acte de création », Cahiers d’études romanes[Online], 3 | 1999, online dal 31 luglio 2013, consultato il 23 gennaio 2015. URL : http://etudesromanes.revues.org/3413 http://fr.wikipedia.org/wiki/Eau http://fr.wikipedia.org/wiki/Arc-en-ciel

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http://www.reper-romanesc.org/publicatie/0607/radacini.htm


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