Chap 2 : Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres

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Chapitre II

Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres

COMMUNAUTARISME

THESE

ANTITHESE

South Park est  Il faut suivre la mode gay : Les hommes pour ne pas être dépassé, doivent-ils se  Les gays ne doivent pas confondre avec les avoir le monopole du homos ??? bon goût,  Les hommes sont enfin des femmes comme les autres.

Les femmes veulent des hommes, des vrais,  Être gay n’est pas une façon de s’habiller, mais tout un mode de penser,  Le communautarisme entraîne la gayttoïsation.

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SYNTHESE La mode n’est pas tout, Just be yourself, mouais, comme tout le monde quoi !,  La reconnaissance passe par l’audience.  

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Un crime a toujours des Le rejet criminel de la Un crime est un crime, Crime de haine de Cartman : La loi circonstances, ni aggravantes Différence est un crime point final doit-elle prendre en ni atténuantes, juste contre l’humanisme de la compte les explicatives société différences ??? Les riches débarquent : Critique de la ségrégation basée sur l’intolérance des différences

Le communautarisme Si on ne peut/veut être La communauté provient de la jalousie (ou de avec les autres, autant rester humaine se construit par sa considération comme dans sa bulle stérile avec les l’acceptation et le respect supérieur et l’Autre siens des différences d’inférieur)

Les rouquins :  Les rouquins c’est le L’autre est-il mal, nuisible parce que  La solution au problème différent ??? c’est la ségrégation,  A trop discriminer, cela peut se retourner contre la majorité.

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Il y a une différence entre informer et manipuler,  Les préjugés sont partout,  Si on se mettait à leur place on comprendrait.

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Tout est génétique dans cette histoire,  Il ne faut pas essayer d’être comme eux, mais qu’on les considère comme nous,  Il faut qu’on apprenne à tous vivre ensemble, les différences n’ont pas d’importance.


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Les enlèvements  La technologie a d’enfants : Pour toujours une réponse pallier les « adéquate », enlèvements, faut-il  Le mieux est la vivre dans la peur de surveillance parentale, l’Autre et tout  Pour vivre heureux, sacrifier ??? vivons séparer des autres.

Dès que l’on construit un mur il y a des gens pour passer outre,  Aucun système n’est parfait, il y a toujours une brèche dans laquelle on peut s’engouffrer,  On ne peut pas vivre sereinement et pleinement sans confiance.

Les comptines du  On ne connaît pas les autres enfants qui sont à singe batteur : L’école publique estpart, elle un lieu  Ils vivent dans un autre fréquentable pour monde, des enfants ???  La peur des parents fait la réclusion des enfants.

L’école publique est mal notée et a une mauvaise influence,  Apprendre à la maison est un rêve,  A domicile le niveau est plus élevé.

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La télévision surinforme et crée des troubles là où il n’y en avait pas,  L’entraide est importante dans la société humaine,  La confiance discernée est quelque chose qui s’apprend. L’école est le reflet de la société,  A force d’être surprotégé, quand on est libre on en abuse,  L’école est le meilleur endroit de socialisation.

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Tout sur les On ne se connaît pas, mais Mormons : Une c’est très bien comme ça. religion fait-elle le moine ???

Pourtant, l’autre a l’air d’être La religion peut bien. embrouiller les rapports humains.

 Les missionnaires font  Le vrai but est l’aide aux  Les missionnaires sont Ethernopiens dans l’espace : Y adu prosélytisme, démunis, ou seront partout, t-il  Ils font du chantage pour  Certaines terres  Leur image est instrumentalisation faire changer les d’émigration le sont déplorable, de la solidarité par la Africains selon leurs encore,  Il y a une certaine religion ??? critères,  Certains aident sans exploitation de la  Ils gaspillent des fonds contrepartie. misère africaine. dans leur guerre de conversion.

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Catégorie : II] Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres ! Thème : 1) Chacun sa tribu et les bisons seront bien gardés !

Fiche de visionnage n°5 : Épisode 104 (saison 7, épisode 8) – South Park est gay

Analyse philosophique des extrêmes : Les hommes doivent-ils se confondre avec les homos ???  

Les pros : Les enfants, les pères, Les antis : Kyle, M. Garrison, les mères.

  

Thèse : Dans la métrosexualisation des mœurs tout est bon ; Antithèse : Chacun à sa place et il faut que ça le fasse ; Synthèse : Soyons nous-mêmes, pas comme les autres !

Il était une fois à South Park Stan qui racontait le drame de la veille à ses copines à l’arrêt de bus. Alors qu’il regardait « Entre garçons », en attendant « Regard Gay sur un hétéro », Stan s’est endormi et a renversé son coca sur son pyjama en satin. Et là c’est le drame, même pour Cartman qui trouvait ce pyjama si splendide !

Introduction :

La culture se répand comme une traîne de poudre par contact entre communautés différentes, transfert d’influence et initiation à de nouveaux goûts !

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Quand quelque chose est bien ailleurs, c’est faire preuve d’ouverture d’esprit que de s’approprier les avantages d’autrui ! C’est d’ailleurs ainsi que se sont propagés les progrès techniques et l’évolution des mœurs. Pour autant, à trop vouloir singer l’autre, on peut disloquer deux cultures en brouillant leur identité propre qui font qu’on les reconnaît immédiatement comme deux communautés différentes. Entre évolution par amélioration des us et coutumes et déperdition dans la fusion avec l’autre, le juste milieu est toujours aussi difficile à cerner. En somme, les hommes doivent-ils se confondre avec les homos ???

Thèse en faveur de l’amélioration par la métrosexualisation La mode est le principal marqueur social d’une communauté et s’approprier cette tendance revient à reprendre les codes vestimentaires et autres d’un autre groupe. Quand une tribu est mise en avant par des phénomènes de mode liés à la reconnaissance sociale, celui qui ne suit pas se retrouve à la marge, complètement dépassé par le raz-de-marée des défilés. Ne pas être à la page a une lourde signification puisque certains peuvent estimer que la personne est à l’écart des réseaux d’influence, ou pire qu’elle se place volontairement à contre-courant pour exprimer son rejet « antisocial » d’une lame de fond tendancielle. Kyle a toujours eu un problème avec les modes, et là encore il est super ringard avec sa veste polyester. Il peut se justifier que c’est les fringues qu’il met toujours, c’est bien ça le problème : son look très « 10 septembre » est complètement dépassé et il se doit donc d’évoluer. Et en plus il est couvert de peaux mortes, à croire qu’il ne fait jamais de gommage ! Heureusement que Cartman, âme charitable pour une fois, est là pour ne pas le laisser dans cet état et que Stan va l’aider à complètement être relooké ! Mais l’habit fait le moi et ses parents sont tout de suite inquiets en le voyant accoutré de la sorte. Pour Kyle il n’y a pas de mal puisque c’est pour faire comme ses copains et essayer d’être fashion. Ses parents ne doivent pas jouer les rabat-joie, mais son père

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décide de prévenir tous les parents car là il y a un problème ! Mais la mode évolue si vite ! Le responsable de la chaîne HBC, sentant que la mode gay est révolue, change rapidement sa programmation pour relancer la mode latino. On peut voir alors le père de Stan traîner comme un banditos americanos avec le père de Kenny et boire une cerveza, Stan proposer à son amigo Kyle de jouer au ballon, redevenant ainsi potes comme des hombre cools. Le bon goût, vestimentaire ou autre, n’est pas partagé par tout le monde, et on pourrait dire encore moins par bon nombre d’hommes. Il est connu et reconnu que les homos ont en général plutôt bon goût (euh, vestimentaire s’entend, même s’il n’y a pas de jugement à avoir), et que c’est même une partie de leur marque de fabrique que de lancer les modes. Pour autant, aucun monopole n’étant bon par nature, les hommes se doivent de rattraper leur retard en la matière, non seulement pour ne plus paraître à la traîne, mais également pour apprendre à s’enjoliver et à prendre soin d’eux en écoutant davantage leur corps. Alors que les parents de Kyle veulent parler des enfants, les hommes regardent la télé et le père de Kyle s’étonne qu’il y avait match ce soirlà. Eh bien non, c’est juste que tous les mecs se sont réunis pour mater « Regard gay sur un hétéro ». Ils ne sont pas tous devenus gays pour autant, juste métrosexuels. Le bourru Skeeter, habitué du bar de South Park, explique que le fait qu’un mâle prenne soin de lui et accepte sa part de féminité ne veut plus dire qu’il est gay. En effet, pour le père de Kenny, se définir comme métrosexuel c’est être hétéro mais apprécier la culture gay ! Et les hommes ont enfin bon goût, puisqu’ils ont même abandonné la bière pour se mettre au vin de Chiraz. Les femmes reprochent assez aux hommes d’être comme des bêtes, même si ces dernières s’occupent très bien d’elles en prenant soin de leur corps, notamment par des bains de boue ou autre. Avec la mode métrosexuelle, les hommes découvrent leur part de féminité qui n’était pourtant pas si profondément enfouie sous leur carapace, et se valorisent en se faisant bels. Enfin les mâles se préoccupent un peu plus d’eux-mêmes pour offrir le meilleur qu’ils ont et le présenter sous un jour favorable. Les femmes peuvent alors se

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réjouir de partager leur vie avec une super copine, qui les comprend et qui pour autant les prend comme un homme. La mère de Stan est ravie de voir que les hommes sont devenus si délicats. Tout ça grâce à « Regard gay » et ses cinq homosexuels qui relookent des hétéros. Avec cette émission les époux sont devenus propres et soignés, ils parlent de ce qu’ils ressentent, font de la déco : Randy Marsh repasse son linge et va chez le pédicure, une femme adore que son Steven s’épile le torse et les roubignolles, et même les fils se lavent et se brossent les dents 3 fois par jour. Mais du coup, les hommes ont aussi récupéré certains défauts des femmes tel que la jalousie, Stan se vantant d’avoir un look d’enfer et Cartman d’en rajouter que Craig ne pourra pas faire plus gays qu’eux. Peut-être, mais ce dernier se venge en disant que son père s’habille mieux que celui de Stan. Les deux parents se crêpent alors le chignon, le père de Craig claironnant que c’est l’évidence même qu’il est plus stylé que le père de Stan qui choisit ses fringues comme une pétasse japonaise, alors que pour Randy le père de Craig sort d’un cauchemar des deux orphelines (ou little Annie pour la VO ; même notion de Misérables) ! Il en va de même de la frénésie de achats compulsifs, d’autant plus qu’il y a des soldes chez Express pour hommes, mais il faut se dépêcher car les boutiques ferment dans 7 heures. Chacun y va de sa coquetterie sur les nouvelles chaussures achetées, et Jimbo voudrait même vivre dans un centre commercial. Mais c’est clairement lors de la Métro Pride qu’on voit que les hommes manquent ! Alors que l’un des chars est en feu, c’est le sauve qui peut général : l’un ne peut rien faire car il a un pantalon tout neuf, pour l’autre la chaleur va abîmer ses cheveux. Et que fait la police ? Rien, l’uniforme de Barbrady sort tout juste du pressing ! Antithèse en faveur de la masculinité raisonnée Dans toute société, chaque genre a son rôle, bien défini, et si l’un manque à ses devoirs, l’autre et toute la communauté en pâtissent. Les hommes ont peut-être besoin de reconnaissance de leurs talents, mais les femmes exigent de la sécurité pour leur personne et leur famille. Même si les féministes ont combattu bec et ongle les machos patriarcaux, il semble bien que les femmes d’aujourd’hui, leurs filles,

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soient à nouveau attirées par ce type d’homme à poigne virile. Finalement, les hommes ont tout faux à vouloir se féminiser : ces gentes dames ne demandent qu’à être traitées comme de belles fleurs avec qui l’on parle le matin et qu’on arrose le soir ! Devant la mascarade navrante de la métro pride, les femmes se révoltent ! La mère de Stan la première n’en peut plus et lance une grande contre-attaque, épaulée de près par la mère de Butters qui concède qu’elle a bien eu tort de vouloir un homme plus soigné ! Arrivées au studio de la chaîne, les Amazones se ruent pour choper les enculés qui ont fait de leurs maris des lopettes. La porte-parole du mouvement, encore et toujours la mère de Stan, explique devant l’hécatombe qu’au début elles étaient ravies que leurs maris soient plus soignés, pensant que ça les rendrait plus attirants, mais ce n’est pas le cas. La mère de Butters témoigne qu’effectivement son Stephen est écœurant parfois, mais ce sont ses manières viriles et grossières qui l’ont justement séduite. Il n’y avait qu’une solution : tuer les gens de « Regard Gay ». Les Hommes Crabes, déguisés en hommes gays, avouent leurs plans dans un dernier râle : en faisant des hommes des lopettes, ils auraient régné sur terre ! Il y a l’être et le paraître ! L’habit ne fait pas le moine ! Il faut se méfier des apparences, souvent trompeuses ! On lit bien dans la sagesse populaire que le fait de revêtir les codes vestimentaires d’une communauté ne confère nullement les caractéristiques de celles-ci ! Chaque tribu a sa culture propre, son langage et modes d’expression, son éthique et ses intérêts spécifiques ! Copier les mœurs d’un groupe autre ne fait que décrédibiliser celui qui contrefait, car malgré le déguisement son discours sonnera toujours faux. M. Garrison est le premier à être agréablement surpris par le look d’enfer de ses élèves. Quand les enfants s’emmêlent les pinceaux, tout se complique ! Parce que Kyle s’est resapé à l’ancienne, les autres garçons traitent la bande de galopins d’hétéros ... comme des phoques ! Cartman se défend en retournant l’attaque contre Craig, ironisant que ce dernier n’est que gay dans ses rêves, mais Craig justifie de son orientation gay cadamite (victime/bénéficiaire d’un pédéraste – qui aime

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les enfants – qui ne cesse de recruter des adolescents et leur procure de l’affection, des opportunités professionnelles et des biens matériels en échange de faveurs sexuelles). Cartman ne se laisse pas démonter et renchérit en déclarant son héritage à moitié bisexuel (enfin, plutôt un quart bi puisque son grand-père l’était à 100%). M. Garrison n’en peut plus de ces enfants qui s’épanchent sans savoir : il n’a jamais vu une chose aussi folle que de voir les enfants se comporter comme si être gay était cool ! Il se réjouit à nouveau, pensant ne plus être le seul couple gay de South Park. Et d’ailleurs cela semble se confirmer quand M. Garrison et M. Esclave vont dans le bar de la ville. Ils n’y voient que des copines, notamment Jimbo qui trouve chou le pantalon tout simple de M. Garrison. En retour, celui-ci complimente Jimbo pour son ensemble rose sportswear décontracté. Et en parlant de sport, il lui propose d’aller en faire dans sa chambre avec M. Esclave. Sauf que Jimbo ne voit pas trop pour quoi faire ! Il ne s’en doute même pas, ou feint plutôt de l’ignorer (sachant qu’il est une fiotte qui a le droit de le dire, sinon c’est censuré pour ceux qui ne le sont pas). Même déconvenue avec le père de Stan, pour qui se faire astiquer dans les toilettes n’est pas son truc. Y allant avec plus de finesse sournoise, ce grand fou propose à M. Tweek que tout le monde file chez lui, histoire d’écouter de la musique, de regarder une vidéo et (accessoirement) de péter la rondelle de M. Esclave. Doux Jésus ! M. Tweek en est tout retourné, lui qui est hétéro ! M. Garrison pète un câble que personne ne veuille péter la rondelle de M. Esclave, mais ils sont tous hétéros ! M. Garrison a beau vociférer que leurs fringues disent qu’ils pètent des rondelles (ou pour être plus exact, elles disent qu’on leur pète la rondelle, nuance – de taille), Skeeter (celui qui aime pas trop les gens comme nous par chez lui) plaide que maintenant qu’ils savent qu’être gay c’est naturel, désormais les gays sont des leurs ! Ça part certes d’un bon sentiment, mais M. Garrison ne peut rester stoïque : lui (et sa communauté) qui a tant fait pour ne pas être comme les autres trouve injuste d’être ainsi récupéré en étant pompé par ce mouvement profond. Après avoir essayé de tuer les animateurs de l’émission, il demande l’arrêt de la retransmission. Même si la chaîne pulvérise l’audimat, le prix est cher car ces gays vendent leur façon d’être ! Les homos ont créé un style de vie, une culture bien à eux : si les hétéros deviennent comme

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eux, ils auront perdu leur identité !!! Quand le producteur déclare qu’ils n’arrêteront pas, M. Garrison s’enflamme devant ce non-sens, ne comprenant pas comment des homos peuvent faire ça à leur communauté. A moins ... qu’ils ne soient pas gays du tout ! A présent, lui, M. Esclave et Kyle connaissent la vérité ! A force de se différencier des autres, on peut vite en venir à exclure ceux qui n’arborent pas les mêmes codes vestimentaires et tribaux que son clan communautaire ! L’exclusion de ceux qui ne suivent pas le mouvement, voire qui sont carrément à contre-courant, est caractéristique des modes de vie communautaires. Petit à petit, la tribu se renferme sur elle-même et peut même en devenir sectaire, rejetant tout ce qui est différent de sa différence ! De là à construire son propre donjon et vivre en reclus du monde extérieur, il n’y a qu’un pas ! Alors que Cartman fait son malin avec son conditionneur sans rinçage qui en plus détoxique le cuir chevelu, évidemment produit « Origins » fait d’huile de bois de santal, Kyle propose à ses potes de jouer au football. Le problème c’est que des gens de l’école commencent à jaser que le groupe ne serait pas métrosexuel parce qu’ils sont amis avec Kyle. Cartman tente encore une fois de faire tuer Kyle, mais Stan propose plus simplement de lui dire qu’ils ne sont plus potes ! Il faut dire que les temps sont durs : Craig traite Kyle de petit beauf, Token se demande depuis quand ce bourrin n’a pas vu une manucure, et le pire c’est que vu ses cheveux il ne doit pas utiliser de crème de soin ! La honte !!! Quand Stan voit ce qui se passe, il arrive avec son groupe. Craig envenime la situation en remarquant que les autres beaufs viennent aider leur petit copain, mais Cartman met les pendules à l’heure : Kyle n’est pas leur copain, et il tourne les sabots ! Même Stan en fait de même. Immédiatement, Craig et ses potes font remarquer à ce machoman qu’il est dans une cour de récré pour métrosexuels et qu’il ferait mieux d’emmener son cul d’hétéro ailleurs. Finalement, tout le monde lui tombe dessus et lui casse la gueule ! Quand il rentre chez lui et que sa mère voit ça, qu’il explique qu’on l’a tapé à l’école parce qu’il est différent, évidemment sa mère pense de suite que c’est parce qu’il est juif. Mais non, « simplement » parce qu’il n’est pas métrosexuel !

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Son père, appelé à la rescousse débarque, mais lui aussi transformé en métrosexuel. Puisque des garçons de l’école l’ont battu, son père va arranger ça : de l’anticerne pour son coquard et de la javel pour donner un look vintage à ses fringues et le tour est joué ! Kyle en a marre de tout ceci ! Le trouble est également à son comble pour M. Garrison, qui va chercher conseil auprès de Chef. Lui qui s’est toujours senti à part, différent, qui faisait tâche dans la ville, maintenant les hétéros ont l’air plus gays que lui. Il demande ainsi à Chef ce qu’on fait les noirs quand les blancs ont volé leur culture ! Réponse de l’intéresse : ils ont toujours essayé d’avoir une longueur d’avance ! Il prend alors l’exemple de l’argot où l’on disait Zonmé au lieu de dire la maison. Quand les blancs ont dit la Zonmé, ils ont changé pour dire la Onzmé. Quand les blancs se sont mis à dire ça ils ont rechangé pour dire Onzem. Et pour finir : Checré pour où je crèche. Maintenant, vu que les blancs le disent aussi, ils sont obligés de dire : Flippity floppity floop. Bien sûr, tout ceci prendrait trop de temps pour M. Garrison, mais il a trouvé la solution et rentre urgemment à son flippity floppity floop (ce qui fait enrager Chef car c’est les blacks qui disent ça !). Kyle prend un billet de train pour New-York (où on lui fait encore remarqué qu’il a bien besoin d’être relooké) et rencontre M. Garrison qui part pour tuer ceux de « Regard gay » qui ont volé la culture des vrais homos, alors que Kyle veut aussi les tuer car ils ont bousillé sa vie. Alors qu’ils se chamaillent pour savoir qui a eu l’idée en premier, M. Esclave recentre le débat et ils les tueront tous ensemble ! Cette mode va décidément trop loin. Même les hommes se prennent la tête entre eux pour des questions de style. Mais si leurs femmes ne veulent plus qu’ils soient métrosexuels, les hommes pensent que c’est parce qu’elles sont métrophobes ! Ils décident alors d’arrêter de se disputer entre eux et de s’unir contre ces métrophobes. La mère de Stan trouve tout ceci insensé, mais son mari lui retourne la pareille : insensé, différent, décalé, les femmes peuvent penser ce qu’elles veulent, mais les métros ont le droit d’exister ; qu’elles cassent du métro tant qu’elles veulent, ils résisteront ! Pour ouvrir les cœurs à la métrosexualité, Cartman propose d’organiser une grande métro pride, agrémentée de chars décorés de fleurs selon l’idée du père de Kenny. Le mouvement est lancé : « Cessons d’acheter, allons défiler ! ». Les femmes et mères en restent bouche bée, se demandant bien ce que cette

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émission leur a fait ! Et le pire est à venir, quand on voit les enfants scander « A bas la métrophobie ! On n’est pas pédés, mais pas loin... !!! ». A la fin, on peut estimer que tout rentre dans l’ordre, sauf pour Kyle : pour lui tout ça n’a pas été cool, ses potes lui ont tourné le dos ! Ils étaient ses meilleurs potes, ils l’ont traité comme une merde et ils pensent qu’ils vont redevenir amis comme si rien ne s’était passé ? Pour Stan, tout ça c’est du passé, Kyle ne doit pas faire sa lopette mais tout simplement venir jouer avec eux. Cartman confirme : il faut qu’il arrête de jouer les tarlouzes ! Synthèse La mode est passagère, furtive même, mais la société peut mettre une telle pression que tout le monde est poussé à y adhérer, bon gré mal gré ! Heureusement, certains résistent à ces phénomènes, soit parce qu’ils ne comprennent pas la nouvelle tendance, soit justement parce qu’ils la refusent ! Au-delà même de tout ça, il faut remettre la mode à sa place qui n’est « que » premièrement d’habiller, et deuxièmement de véhiculer certaines informations sur l’état d’esprit du portemanteau et sur ses sources d’influence. Au risque sinon de vraiment être connu sous le nom de code de victimes de la mode ! La mère de Kyle le sait très bien : parfois les enfants suivent les modes un peu trop à fond. Mais son fils est toujours en porte-à-faux par rapport à cela, et il est le premier (et le seul d’ailleurs) à se plaindre de ne pas trop se sentir métrosexuel. Toujours de bon conseil, Chef lui suggère alors de ne pas suivre cette mode et de rester lui-même. Habillé comme avant pour l’hiver, Kyle est à nouveau à l’aise, enfin lui-même : il se trouve très bien en sale gamin, et personne ne fera de lui un métrosexuel ! La mère de Stan pense également que cette mode n’est pas si bien que ça, idem pour la mère de Butters dont le mari passe son temps à se regarder dans le miroir et s’intéresse plus à son apparence qu’à celle de sa femme ! La mère de Tweek espère bien que quelque chose mettra fin à cette mode au plus vite ! Il faut dire que même les plus hautes autorités sont touchées, tel le président dont les ongles sont navrants et les cheveux en bataille ! Les homos, qui valent de l’or, vont

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s’occuper de lui. Les hommes-crabes se frottent déjà les pinces de voir notre race pitoyable réduite à l’impuissance. Preuve ultime du décalage vestimentaire, alors que M. Garrison, M. Esclave et Kyle ont tenté de tuer les homos, ils ne portent pas plainte car leurs agresseurs ont compris que tuer c’est mal ... surtout en pantalon de cuir ! Quand tout le monde veut être à la page, plus personne ne l’est car tous ont adopté le même style ! La mode est là pour exprimer l’humeur du jour, les tendances profondes du porteur. L’idée générale est que chacun expose sa vision du style branché en le mettant à sa sauce perso. Sauf que si tout le monde suit aveuglément une mode, tôt ou tard les différences s’estompent et l’on se trouve nez à nez avec une foultitude de clones dont seuls quelques détails permettent la différenciation ! Tout un chacun est différent, mais si tout le monde porte le même type de pantalon avec un panel relativement réduit de genre de haut moulant, les tendancieux se retrouvent noyés dans la masse. Alors que les enfants sont tout fou de montrer aux filles qu’ils sont gays à donf pour qu’elles soient toutes après eux (tiens donc, maintenant qu’ils sont métros ils s’intéressent aux filles), ils hallucinent de voir que les autres élèves ont eux aussi adopter cette mode. Craig a beau faire preuve de politesse en congratulant les enfants pour leur air très gay, il rattrape vite qu’ils ne le sont pas autant que ses potes (qui portent d’ailleurs tous le triangle rose de l’exclusion de nazie) ! C’en suit alors une montée en puissance sur qui sera le plus super hyper ultra méga gay. Chef se désole de voir que les enfants suivent cette mode métrosexuelle, mais Stan explique que pour eux ce n’est pas une mode, c’est ce qu’ils sont ! Sauf que l’année d’avant ils voulaient être blacks et maintenant ils veulent être gays ! Stan rectifie : ils sont métrosexuels ! Craig remet une couche qu’ils ne le sont pas autant que ses potes et part avec ses copines. La télé peut souvent faire en quelques minutes beaucoup plus pour les minorités que des décennies de campagnes de information/sensibilisation ! Même si l’on peut toujours changer de chaîne, il n’en reste pas moins

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que la petite lucarne est un élément important de reconnaissance sociale. La télé formatée permet en effet de regarder en face ce que certains ne veulent pas voir dans la réalité. Ce genre d’orientation familiale des programmes dépassionne quelque peu les attitudes et ouvre les esprits vers plus d’acceptation ! On trouve ainsi sur HBC des émissions comme « Regard gay sur un hétéro », « Entre garçons », « Will et Grace » (Will Truman, avocat, homosexuel et bel homme partage un superbe appartement new-yorkais avec Grace Adler décoratrice d’intérieur, juive et complexée. À ce couple qui cherche l’amour et le bonheur chacun de son côté s’ajoutent Karen, la riche et antipathique secrétaire de Grace, et Jack, l’envahissant ami gay de Will), et même « La croisière s’amuse ... entre hommes » ! Comme le dit la mère de Kyle, il y a de plus en plus d’émissions gays à la télé, et pour son mari c’est très bien que cette communauté soit enfin acceptée ! Et effectivement ils cassent la baraque, notamment avec « Regard gay » qui est la meilleure émission de la chaîne (et ils le savent, ces homos qui se trouvent si fabuleux). Ils sont en train de changer le monde, à un point tel que le lendemain ils iront relooker le président des États-Unis. Mais ce fut un travail de longue haleine, puisque les homos avaient déjà lancé leurs attaques lors de la diffusion de « La vie à cinq » (après la mort accidentelle de leurs parents, cinq frères et sœurs font face aux difficultés de la vie tout en essayant de rester une famille unie).

Conclusion :

Voyez, on se couchera moins bête car on a appris un truc aujourd’hui : chaque communauté entend faire respecter ses spécificités et son positionnement social. Certes le communautarisme sectaire et le repli sur soi prôné par certains n’est pas une solution, mais repomper le style d’autrui pour paraître branché est encore plus craignos ! Il est bien beau que les hommes prennent soin d’eux et se comportent moins comme des

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machos et acceptent davantage leurs côtés féminins, mais cela ne doit pas se faire au détriment de leur identité de mâle et de la confusion des genres avec d’autres tribus ! Il est important de connaître et de reconnaître les autres groupes sociaux qui composent une société, mais il l’est encore plus de ne pas brouiller cartes. Bien sûr on peut prendre le meilleur de chaque communauté, mais il faut savoir aussi préserver ses propres codes et respecter les caractéristiques des autres, au risque sinon de s’emmêler les pédales !!!

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Catégorie : II] Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres ! Thème : 2) De l’affirmation des Différences au sectarisme communautaire Fiche de visionnage n°6 : Épisode 49 (saison 4, épisode 1) – L’incroyable crime de haine de Cartman

Commentaire d’épisode : La loi doit-elle prendre en compte les différences ???

Il était une fois à South Park les enfants qui font un concours de luge sur une mini colline de la cour de récré. La luge de nos quatre mousquetaires gagne encore une fois.

Introduction :

Face à la recrudescence des actes délictueux et criminels envers des « minorités », les sociétés occidentales ont mis en place ces dernières années des dispositifs juridiques spécifiques pour tenter d’enrailler les dérives phobiques. En essayant de trouver des explications à des faits graves, certains ont été amenés à caractériser des agressions au motif du rejet de la différence de l’Autre, tant il est vrai que nos sociétés se sentent tiraillées entre une norme et ses marges. Ainsi, nous avons pu être conduit à envisager ces méfaits non comme un « banal » accrochage entre individus, mais plutôt comme des manifestations violentes de la haine des pas pareils. Pour donner l’exemple et faire passer le message que la société est

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une et indivisible, les auteurs de ces faits illégaux se sont vus condamnés plus sévèrement en prenant en considération le caractère anti harmonie sociale de leurs actes. Mais le simple fait que la loi fasse un distinguo entre des actes criminels selon le type de la victime est déjà une reconnaissance des discours différentialistes ! En somme, la loi doit-elle prendre en compte les différences ???

Un crime a toujours des circonstances, ni aggravantes ni atténuantes, juste explicatives Tout délit ou crime est toujours à replacer dans un contexte et dans un historique des protagonistes (agresseur et agressé) car rares sont les faits qui surgissent du néant absolu. Il est un peu facile de juger quelqu’un sur ses seuls actes, sans connaître l’origine du geste incriminé ! Sans forcément chercher à trouver des excuses à un crime inacceptable, la société et donc la justice se doivent au moins de tenter de comprendre le déroulement du drame. Sans cela, il ne peut y avoir d’impartialité suffisante pour un jugement éclairé prenant en compte tous les différents aspects des faits ! Tout commence en fin de compte par la jalousie de Token ! En effet, il se plaint que nos garçons gagnent à chaque fois car tout ceci n’est pas juste, Cartman ayant un si gros cul que forcément cela accélère leur luge. Cartman prévient, « sereinement » mais sévèrement, que Token ne doit pas le traiter de gros ! Plus tard, les filles voulant aussi faire de la luge qui appartiennent d’ailleurs à l’école, se font jeter comme des malpropres. Notamment, bien évidemment, par Cartman et sa galanterie légendaire : « Allez plutôt faire la vaisselle ou vous faire foutre en cloque ! ». Piquées au vif sur leur connaissance du maniement d’une luge, les filles lancent un pari aux garçons : il y aura une course sur une vraie colline, la colline Phil Collins, samedi entre les quatre meilleurs garçons et les quatre meilleures filles ! Clyde s’empresse de dire que les filles n’ont pas réalisé à quel point Stan, Kyle et Kenny étaient forts. Et Token de rajouter qu’avec en plus le cul énorme de Cartman, les garçons sont sûrs de gagner ! Ce qui était plutôt un compliment machiste de la part de Token va se retourner contre lui car Cartman

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avait prévenu : il jure à Token que s’il le traite encore une fois de gros, il lui jettera un caillou dans la gueule ! Sauf que, juste pour rire, Kyle lance un pavé dans la mare en balançant sournoisement un « gros lard », interprété par Cartman comme une ultime provocation de Token qui se prend une grosse pierre en pleine face ! Le rejet criminel de la Différence est un crime contre l’humanisme de la société Une société, quelle qu’elle soit, a naturellement tendance à rejeter la différence jusqu’à ce que les mœurs qui la composent évoluent ! Pour créer un sentiment d’appartenance à une nation au-delà de sa communauté propre, une société qui se veut stable et épanouie se doit de travailler sur elle-même afin de mettre au ban des accusés tout comportement qui nuirait aux efforts d’Égalité et de rejet de la différence pratiqués par une société qui veut traiter d’égal à égal ses enfants, quelles que soient leurs spécificités ! Qu’un individu brise cet accord tacite de tolérance entre citoyens frères et sœurs et c’est toute la pyramide d’intégration qui risque d’être saper à ses bases, ouvrant la voie à des revendications, voire à des conflits, communautaires ! Dès que Cartman est entendu pour son crime, des agents du FBI débarquent dont on ne sait où pour enquêter sur l’incident du jet de pierre ! M. Mackey a beau préciser qu’il gère l’affaire en ayant puni le jeune Eric Cartman à deux semaines d’affilées de retenue, l’un des agents a bien peur que ce soit un peu plus compliqué que cela ! En effet, étant donné que la victime est un afro-américain, il s’agit alors d’un crime de haine !!! Cartman se demande bien ce que c’est que cette connerie, mais il y a de nouvelles lois : tout crime commis en raison de la « race », de l’ethnie ou de l’orientation sexuelle de la victime est un délit fédéral ! Autant pour Cartman que pour M. Mackey cette notion de délit fédéral semble être une catastrophe. Cartman sera jugé par la cour fédérale de justice et d’ici là il doit être placé en détention provisoire, ce que sa mère juge « embêtant » ! Mais le pire est à venir, les médias se mêlant de ce procès du siècle pour crime de haine, où Tribunal TV se trouve en direct avec l’animatrice Leslie Smith. Celle-ci se demande publiquement ce qui a pu pousser ce petit gros de huit ans apparemment

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normal, à commettre un odieux crime de haine ! Retournons donc à la salle d’audience où le procureur procède à son interrogatoire. Lorsque celui-ci demande à Cartman qui est Token, il répond que c’est un black qui est dans la même école que lui. Le procureur s’emporte devant le mot de black alors que Cartman justifie que c’en est un, sans connotation spécifique (ce qui n’est bien sûr pas pareil que négro ou bamboula !). Pour le proc’, Cartman l’a agressé parce que Token est afro-américain, ce qui étonne l’accusé lui-même ! Selon l’accusation, la rage qui est montée en Cartman l’a rendu fou et il est passé à l’acte parce qu’il hait les afro-américains. Cartman rectifie : il hait les hippies, point final (moui enfin, les juifs aussi et tant d’autres pas pareils) ! Il précise qu’il les hait car ils sont toujours là à dire qu’il faut protéger la Terre, ils conduisent des bagnoles qui ne polluent pas, et ils portent des bracelets indiens de merde ! Son souhait le plus cher serait de leur latter les couilles ! Sa mère pousse alors sa complainte habituelle « Oh, mon poussin ! ». L’accusation termine par ces mots : « Mesdames, messieurs les jurés, c’est pour cela qu’il existe des lois contre les crimes de haine ! Ce monstre n’a pas commis un crime à l’encontre d’un individu, mais à l’encontre d’une race ! Protégez notre démocratie et envoyez ce petit gros agressif en prison ! » Le proc’ cherche la bagarre, mais Cartman ne se laisse pas faire et pousse sa gueulante : ce connard ne doit pas le traiter de gros, sinon ... Le juge reconnaît Eric Cartman coupable d’avoir commis un crime de haine, et par conséquent il sera incarcéré dans la maison de correction d’Alamosa d’où il ne sortira qu’à l’âge de 21 ans ! En fait, le juge tient à faire un exemple avec lui afin d’envoyer aux gens du pays un message fort : si l’on veut faire du mal à un autre être humain, il conseille de vérifier qu’il soit de la même couleur que soi ! Les filles jubilent, mais pour Stan il faut absolument faire sortir Cartman de prison s’ils veulent s’entraîner avant la course de luge de samedi. Au moment même d’emmener le criminel en maison de correction, les gardes se rendent compte qu’il a disparu. Il tente en fait de rejoindre le Mexique avec la bagnole à pile que Kenny a reçu pour Noël. Les policiers se devant de respecter les distances réglementaires de sécurité, ils arrivent quasiment à la frontière. Pauvre qu’il est, Kenny n’a pas pu s’acheter de piles longues durées et l’échappée belle s’arrête nette après des heures de course-poursuite ! Parce qu’ils n’ont pas pu donner à

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Cartman leur gâteau avec une meli à gleon dedans pour qu’il s’évade de la prison pour mineur, Stan propose qu’il faille demander à Token de pardonner à Cartman de l’avoir criminalisé de haine. En se rendant chez lui, Kyle découvre que les élèves de « race différente » ont leur propre bus pour favoriser la diversité culturelle, sachant que Token est le seul black de la ville avec Chef ! Un crime est un crime, point final Tout crime mérite sanction, juste et justifiée selon des lois préétablies qui définissent de manière précise les conditions d’application de la sanction. Devant les arsenaux juridiques mis en place ces dernières années pour lutter contre les xénophobies différentielles de toute sorte, on peut se demander si la loi ne devient pas elle aussi inégalitaire pour punir les dérives différentialistes ! En effet, à partir du moment où l’on considère qu’il est plus grave d’avoir commis un crime sur une personne en raison de sa différence, cela revient à estimer que la victime est plus faible qu’une autre de par sa spécificité même, ce qui va à l’encontre de la notion d’Égalité promue dans la Constitution et les Droits de l’humain ! Au départ, M. Mackey veut que Cartman comprenne que son comportement est inacceptable, idem pour sa mère qui entend bien que son fils réalise qu’il aurait pu blesser gravement son camarade. A moitié convaincu, Cartman s’excuse vite fait mal fait auprès de sa mère. Mais elle ne veut pas de cela, puisque c’est à Token qu’il doit présenter ses excuses, ce qu’il fait dans la foulée. M. Mackey espère qu’il aura compris que c’est mal de jeter des pierres sur les gens ! Cartman, avec son cynisme et son désintérêt des autres habituels, bredouille qu’il regrette, qu’il se demande pourquoi diable il a fait cela, qu’il est rongé par le remord, qu’il a tellement honte d’avoir lancé cette pierre, finissant sa feinte par un « Allé, à plus ! » qui en dit long sur sa conscience du crime perpétré ! Mais pour M. Mackey c’est trop facile : il veut que Cartman apprenne à respecter ses camarades, donc il sera en retenue pendant deux semaines ! Aucune mention n’est faite ici d’une quelconque distinction en raison de la couleur de Token !!! Stan va justement le voir pour que les filles ne les battent à la course de luge à

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présent que Cartman est en prison. Kyle suggère alors que Token appelle la prison pour dire qu’il pardonne Cartman de l’avoir crime de hainé ! Malheureusement, le père de Token, avocat comme celui de Kyle, a peur que ce ne soit pas aussi simple que ça : la seule personne qui a le pouvoir de faire sortir Cartman est le gouverneur ! Kyle s’emporte avec un « Bordel, putain de merde, ça fait chier ! » qui vient du fond du cœur, et d’ailleurs il s’en excuse. Mais le père de Token est assez d’accord avec eux : il a un réel problème avec ces lois sur les crimes de haine, et il aimerait que les enfants aillent voir le gouverneur et qu’ils lui disent sa façon de penser ! Stan demande à juste titre pourquoi il n’irait pas lui-même, mais il sait déjà qu’on ne l’écouterait pas, parce qu’il est noir (et même riche comme Crésus, ça ne changerait rien à la donne !). Il explique alors aux enfants pourquoi les lois sur les crimes de haine sont hypocrites ! Le comité « Libérez Eric Cartman tout de suite » va voir le gouverneur pour lui faire un exposé sur les « lois anti crime de haine : une violente hypocrisie ! » Stan explique que depuis quelques années, on a mis en place des lois contre les crimes de haine ! Token développe que si un homme tue un autre homme c’est un crime, mais si un homme tue un autre homme d’une autre couleur alors c’est un crime de haine ! Pour Kyle et ses confrères, c’est une violente hypocrisie car tous les crimes sont des crimes de haine : si un homme frappe un autre homme parce qu’il a couché avec sa femme, n’est-ce pas un crime de haine ? Si une personne vandalise un bâtiment officiel, n’est-ce pas pour manifester sa haine envers le gouvernement ? Pour Token, les motivations d’un crime ne devraient pas affecter la sentence ! Stan enchaîne : il faut arrêter de diviser la population en groupes ! Les lois anti crime de haine ne font que renforcer l’idée que les blancs sont différents des noirs, que les homosexuels doivent être traités différemment de ceux qui ne le sont pas, comme s’ils n’étaient pas pareils !!! Kyle finit l’exposé en défendant l’idée que nous devrions tous être Égaux devant la justice, avec les mêmes lois et les mêmes punitions pour les mêmes crimes. Il rajoute qu’ainsi Cartman serait libéré et qu’ils pourraient gagner la course de luge contre les filles le samedi ! C’est la présentation la plus sensée que le gouverneur ait entendu depuis bien longtemps ! Alors que Cartman s’est évadé avec la complicité de son codétenu, ils sont pris par les gardiens. Mais pour Cartman il est hors de

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question qu’ils se fassent prendre vivants, les matons crèveront avec eux ! En réalité, il vient d’être gracié par le gouverneur. Arrivant juste à temps pour la course de luge, il l’a remporte avec son équipe (en trichant en envoyant les filles dans le décor). Pip demande un triomphe pour Cartman et son gros cul ! Ce dernier s’empresse de demander si les roastbeefs comptent comme une ethnie dans le cas des crimes de haine ! Vu que les autres gamins s’écrient en chœur que non, il se précipite sur une pierre et la jette sur Pip l’anglais !

Conclusion :

Voyez, on se couchera moins bête car on a appris un truc aujourd’hui : c’est en créant divers niveaux de lecture de crime et donc de sanction afin de lutter contre la haine des différences, que l’on justifie un sentiment inégalitaire présent tant chez les « minorités » que dans la majorité. On peut, et on doit même, se demander s’il doit y avoir circonstances aggravantes en cas de délit/crime envers une communauté différente, mais il ne faut pas se leurrer sur les conséquences sociales de ce genre de questionnement. En effet, l’Égalité devant la loi et dans de nombreux domaines est le ciment social de nos civilisations multiculturelles et cultuelles ! Le simple fait de créer des catégories « faibles », à protéger des « forts », revient à reconnaître à des communautés un caractère autre que celui d’ensembles de citoyens comme tout un chacun, renforçant ainsi le sentiment de perpétuel nécessité d’intégration pour des gens nés, formés et vivants dans le pays comme des habitants lambda. Une chose est sûre : ce n’est pas en analysant forcément des actes criminels sous l’angle de la différence, que l’on arrivera à dépasser celle-ci ! N’oublions jamais que ce qui nous rapproche est plus vaste que ce qui nous différencie, et que les crimes les plus atroces sont souvent commis par des proches ou entre membres d’une même communauté (rurale, ethnique, religieuse, etc. ...) !

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Catégorie : II] Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres ! Thème : 2) De l’affirmation des Différences au sectarisme communautaire

Fiche de visionnage n°7 : Épisode 77 (saison 5, épisode 12) – Les riches débarquent

Commentaire d’épisode : Critique de la ségrégation basée sur l’intolérance des différences

Il était une fois à South Park la prof Mme Crockelpaf qui a demandé à ses élèves de faire un projet personnel et de le présenter à la classe. Butters reçoit un C pour son volcan crachant de la lave gluante, et vu que Cartman n’a pas fait ses devoirs (comme d’hab) il est sanctionné d’un D- pour son crayon ruban-adhésifié à un stylo, montrant la dualité naturelle des objets pour écrire, mais scotchés 30 secondes avant de passer. Token, quant à lui est allé sur un site météo avec son portable, et grâce au vidéo projecteur de son papa, présente ses prévisions pour les 3 prochains mois, qu’il a également tirées sur son imprimante laser. Cet excellent travail se voit gratifié d’un A.

Introduction :

Dans un certain nombre de société tribale, certaines catégories de statuts et de personnes (notamment les sorciers, mais aussi ceux qui travaillent le métal ou qui s’occupent des cadavres) se voient imposer des contraintes et interdictions dans leur vie de tous les jours, mais également au niveau de leur mariage et de leur mort. Depuis l’Antiquité, des lois ont été mises en place pour institutionnaliser des états de

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discrimination déjà présents de fait dans la société. La ségrégation patrimoniale développée dans cet épisode n’est ainsi que le dernier avatar en date d’une longue tradition de séparation par la distinction, sur des critères définis par la majorité à l’encontre de la minorité afin d’appuyer son pouvoir sur elle et essayer de contenir l’affirmation de ses particularismes. Alors que certaines personnes d’une communauté vivent quelque peu différemment, on distingue l’ensemble de leur « catégorie » pour bien marquer « vous vivez dans la différence, et bien nous vous enfermons dans celle-ci et ainsi il n’y aura jamais d’Égalité » ! Après avoir déterminé les origines de la distinction communautaire, nous tenterons de comprendre comment celle-ci se met concrètement en œuvre dans sa forme la plus aboutie qu’est la ségrégation, sachant que pour vivre réellement en Harmonie les uns avec l’Autre nous nous devons de voir au-delà des différences ce qui nous rassemble et cultiver le goût immodéré de l’Égalité dans la lignée de la Fraternité entre humains sapiens sapiens (deux fois sages) et de la Liberté de chacun.

Le communautarisme provient de la jalousie (ou de sa considération comme supérieur et l’Autre d’inférieur) Instinctivement, dès qu’une nouvelle tête débarque, on se compare à elle et on l’évalue par rapport à soi. Ce n’est que la culture qui permet par la suite de relativiser tout ceci en ne définissant pas des rapports dominant-dominé mais plutôt en hiérarchisant selon le « meilleur en cela » et le « moins bon en ceci ». Cependant, quand la différence saute à l’œil, tous les schémas rationalisés de pensée peuvent se mettre en berne et laisser ressurgir la « haine animale » de la différence, de la non-appartenance à un clan ou un territoire, à une communauté d’idées ou de pratiques. Très souvent, ces sentiments sont dictés soit par la jalousie de la réussite du nouveauvenu sur un terrain qui « n’est pas le sien » (mais qui appartient à tout le monde et à personne à la fois), soit par la peur de celui qu’on ne connaît

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pas [xéno (étranger, en terme de territoire mais aussi aux us et coutumes du cru), -phobie (peur plutôt que haine, l’un engendrant l’autre)]. Ainsi, Cartman est jaloux de Token car ce s’il a pu faire ce qu’il a fait, c’est parce qu’il est riche (alors que lui a fait de la merde, non parce qu’il est pauvre comme Kenny, mais parce qu’il n’a rien branlé comme d’hab). Cartman lui fait un procès d’intention parce que la maison de Token (de ses parents plutôt) est quatre fois plus grande que les autres, qu’il a des sandwiches au homard pour la récré, qu’il achète ses fringues chez Armani Enfant. Cartman faisant remarquer qu’eux vont acheter leurs fringues chez J-Mart (où il doute fort que Token ait déjà mis les pieds), Stan emboîtant le pas sur le fait que chez lui il ait un billard, et Butters pointant du doigt que son arrosage automatique du jardin doit coûter cher, on voit bien ici que les gamins sont simplement jaloux de lui et de la situation sociale de ses parents (marre d’avoir des vêtements à deux balles, envie de jouer au billard plutôt que des jeux à pas cher, ras-le-bol de la corvée d’arrosage de la pelouse). Pour autant, tout ceci s’explique, les parents de Token n’ont pas volé cet argent ou commis des actes criminels : ils gagnent tout simplement plus d’argent parce qu’ils ont fait des études supérieures d’où ils ont un travail mieux payé. Le père de Token est avocat et sa mère est chimiste dans un grand laboratoire, alors que la mère de Cartman est une pute : l’un paie mieux que l’autre ! Sans vouloir trouver des excuses à cette jalousie mal placée, on peut tout de même essayer de la comprendre. Évidemment, les riches n’ont pas les mêmes habitudes de vie que les pas riches (pour les pauvres comme Kenny c’est encore autre chose). Quand, pour faire plaisir à Token pensant que s’habiller comme tout le monde changera quelque chose à l’affaire, la famille débarque chez J-Mart, leur première question est de savoir où est le voiturier ? Lorsque quelqu’un arrive, estimant que ça doit être lui, il lui refile 20 dollars de pourboire (ce qui est plus que généreux, surtout dans ce trou du cul du monde qu’est South Park). On voit bien par la suite que les parents ne sont pas du même monde, puisque qu’ils pensent que le magasin a activé un rayon aveuglant extraterrestre (alors que c’est juste un éclairage au néon), qu’ils sont stupéfaits d’apprendre que le rayon prêt-à-porter garçonnet se situe allée 6 à côté des bretzels. Quand Token trouve son bonheur avec des pantalons à 5 dollars, ses parents demande de quelle marque ils

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sont, leur fils déclare qu’il s’en fiche : l’important est que ce soit des pantalons de pauvre, même s’il est conscient que ces fringues doivent vraiment être nulles à ce prix là. On ressent clairement que le malaise est là quand les parents de Stan s’étonnent que les Williams soient dans ce supermarché alors qu’ils ont les moyens de faire leurs courses dans les quartiers chics, idem pour la mère de Cartman qui en tamponne le caddie de la mère de Kyle, elle aussi surprise de les voir là alors que le père gagne autant. Les parents de Token se rendent vite compte qu’ils font tâche et qu’il vaut mieux se dépêcher, tous les regards interloqués ou accusateurs se tournant vers eux. Il est en effet loin d’être évident de faire comme les autres quand on n’est pas comme les autres. Token s’en aperçoit vite, lui qui croit pouvoir se faire accepter avec son nouveau tailleur (dixit Cartman) de chez J-Mart. Alors que les enfants (qui jouaient au Monopoly mais Cartman triche comme à son habitude) veulent se mater « Le Roi lion », Stan est tout surpris quand Token lui donne un disque. C’est qu’il s’agit d’un DVD, et que personne n’a de lecteur car c’est trop cher (sauf pour les parents de Token pleins aux as comme le pense Cartman). Cartman propose alors d’envoyer le DVD à l’Enterprise pour voir si le capitaine Kirk peut le décrypter, alors que Token se demande bien ce que peut être une cassette VHS (ponctué par un « sans déconner » des autres gamins). Il y a là clairement une incompréhension des styles de vie de chacun ! Quand les riches commencent à pulluler, M. Garrison s’emportent dans ses relents fortunistes en haranguant les nouveaux venus avec les sobriquets de Crésus (dernier roi de Lydie – territoire comprenant les vallées de l’Hermos et du Méandre, situé sur le parcours des grandes routes commerciales – les sables aurifères de la rivière Pactole lui permirent d’inventer la première monnaie au -VIè siècle) et de Richie Rich (bande dessinée publiée dans les années 50, elle raconte la vie d’un gamin unique héritier d’une fortune estimée à 70 milliards de dollars, mais qui s’ennuie car il n’a pas d’ami. Il s’en procure en rachetant des usines en difficulté pour les rénover et les offrir aux ouvriers). M. Garrison se moque bêtement d’eux en demandant s’ils transportent dans leurs gros cartons leur réserve de chéquiers, indiquant qu’ils ont de grands garages pour leurs Porsche, leurs yachts et leur porte-avion nucléaire, et Jimbo en remet une couche en répondant à sa blague idiote sur « Combien faut

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de riches pour changer une ampoule ? Aucun. Ils engagent quelqu’un pour le faire. » Cela fait bien marrer les autres (les pères de Stan, Kyle, Kenny et Butters, ainsi que Ned et Skeeter – le pilier de bar qui n’aime pas trop les gars dans tous les genres par chez lui), jusqu’à ce que Garrison lance aux richards (qui s’amusent à jeter l’argent par les fenêtres) d’aller jouer dans leur maison à 2 millions de dollars ! Il est bien stupide de classer les gens, la catégorie ne faisant pas le patrimoine de la personnalité ! Ainsi, quand la famille de Will Smith s’installe à South Park et que ses enfants rencontrent l’autochtone Token, ils s’empressent de dire que leur papa est star de cinéma et de demander ce que fait le père de Token (avocat, enfin il croit). Token est tout fier de montrer le Van Gogh de ses parents, sachant que les Smith en ont sept, et est dès lors si heureux de ne plus être le seul gosse de riche, les parents des autres étant plutôt pauvres. Pour les enfants Smith ceci est incompréhensible, qu’ont-ils bien pu faire de leur argent ? Que Token leur réponde qu’ils n’en ont jamais eu n’est pas une excuse, ils n’ont qu’à dire à leur papa de faire des films : il faut être ferme avec son papa si on veut un lama ! S’il refuse à cause d’un mauvais scénario, il faut le supplier, lui dire de penser aux 20 millions de dollars (enfin 12 millions après impôts, les gamins étant déjà de futurs comptables). Pour Token c’est ... super (mouais bof), pour les enfants Smith c’est 20 millions de fois super). De même, Token souhaite simplement faire de la luge, alors que les autres gosses de bourges veulent faire du shopping (enfin, aller au centre commercial pour acheter quelques boutiques). Dans le même registre, Token n’est pas à l’aise pour jouer au polo, qui plus est en uniforme, alors que pour les richard-sons jouer sans uniforme est aussi incongru que de manger du caviar sans blinis ! On voit ainsi que trouver sa communauté de cœur est plus difficile que celle de condition sociale ! Quand Token se fait rappeler à l’ordre parce qu’il n’est pas assez concentré et que l’un des fils de Will Smith aurait alors pu jalier le dishmire de Token par son fralène, Token trouve ce jeu trop compliqué et propose plutôt de jouer aux boules de neige. Pour les enfants pétés de thunes, ce jeu est trop simple et donc barbare. Ils lui rétorquent que s’il aime les jeux de sauvages, il n’a qu’à aller vivre chez les lions, et Token se sent une fois de plus rejeté. Quand il se retrouve dans la gueule de la fosse aux lions, il leur raconte son histoire : il se sentait rejeté à l’école,

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du coup il a fait venir plein de riches, mais ça ne colle pas avec eux non plus. Alors il veut vivre parmi les fauves, promettant que s’ils acceptent de l’élever, il sera le meilleur lion qu’il pourra. Mais le seul moyen de devenir un félin, pour Token qui ne s’intègre nulle part, est de rencontrer Aslan. Lorsque celui-ci lui demande ce qui lui fait croire qu’il s’intégrera parmi eux, il ne sait pas trop, mais tous les deux adorent les blagues. Le test d’acceptation dans le club est de pouvoir, à la manière du roi Arthur, retirer une épine de la patte du patriarche Aslan. Token réussit (gratifié en cela par un pet de lion) et demande s’il peut rester à présent, mais le vieux roi des animaux le met en garde qu’être un lion est peut-être plus dur qu’il ne le croit ! Si on ne peut/veut être avec les autres, autant rester dans sa bulle stérile avec les siens S’intégrer, c’est faire des efforts pour être accepté en tant que tel, car de toute façon on porte sa différence sur soi et on ne peut renier ce que l’on est. Même si on fait tout pour, les autres feront toujours remarquer ou ressentir qu’on n’est pas pareil, qu’on a beau être du même monde, on ne vit pas sur la même planète. Souvent, la ségrégation se met en place parce que les communautés en présence ne peuvent se parler si aucune ne fait d’effort pour faire un pas vers l’autre en vu d’accepter (ou au moins tolérer) ces spécificités qui font la différence. L’autre aspect concerne plutôt le sectarisme primaire, quand une communauté (locale ou de nouvel arrivage) ne cherche même pas à essayer de comprendre l’autre : pour des raisons culturelles, cultuelles ou toutes autres balivernes, elle ne veut pas entrer en relation avec ces gens-là et point final le débat est clos comme le territoire de chacun ! La solution consiste alors à cultiver la différence pour justifier l’indifférence à l’Autre, ce qui promet une bonne ambiance aux lieux où l’on est obligé de vivre ensemble. A moins de cloisonner nos villes pour permettre à chacun de se croire comme chez soi, uniquement avec les « siens », sans jamais voir (sauf à la télé) que l’on n’est pas seul sur Terre. Token en avait marre qu’on se moque de lui parce qu’il est riche. Il ne voulait plus être riche, mais être simplement comme les autres à

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manger des macaronis et s’habiller chez J-Mart. Il résume très bien sa situation dans sa chanson initialement emplie de spleen avant de se tourner vers un « idéal » factice : « Pourquoi j’suis pas comme les autres enfants qui habitent dans des taudis, ont des voitures pourries, déjeunent de p’tits bouts d’saucisse. C’est pas ma faute si mes parents sont riches. J’ai du mal à me faire des copains. J’ai une batte de baseball pro, les autres ont des bâtons et une pomme de pin. J’me sens à l’écart, mis au rancart. Au fond j’ai pas besoin d’eux, faire semblant ça m’déplaît. Si j’peux pas être pauvre, je ferai avec c’que j’ai. Si j’peux pas être comme eux, je ferai venir d’autres gosses de riche. Comme ça je ne serai plus seul et je serai moins malheureux. Dieu faites que viennent vite d’autres gosses de riches ». Évidemment, à South Park rien ne se passe jamais comme on pourrait s’y attendre ! M. Garrison est le premier à se plaindre que d’autres de ces gens arrivent sans cesse; là c’est la cinquième famille qui débarque et pour lui la ville commence à être envahi par des gens de cette espèce. Le père de Kyle (avocat comme le père de Token, mais moyennement riche) s’offusque de ces propos et demande de quelle espèce parle M. Garrison ! Le prof à la marionnette parle bien sûr des riches. Pour Jimbo, le quartier a « bien » changé, lui qui n’a jamais trop aimé les riches (et Ned non plus) et qui se rappelle avec nostalgie le « bon vieux temps » où ils étaient interdits à South Park, alors qu’à présent en voilà toute une colonie. Skeeter (pour rappel, le pilier de bar qui n’aime pas trop les gars dans tous les genres par chez lui) s’inquiète que les gosses de riches iront dans « leurs » écoles, où ils seront mélangés à leurs purs gosses de pas riches. M. Garrison confirme qu’ils vite fait de chasser les pauvres et les classes moyennes de la ville en faisant monter l’immobilier (ce qui est un phénomène bien réel). Mais la résistance ne tarde pas à se mettre en place. Quand un grandpère richissime veut emmener ses petits-enfants au zoo en prenant le bus, il se fait refouler du fond du bus pour s’asseoir à l’avant sur les fauteuils de 1ère classe. Même s’il s’agit clairement d’un comportement fortuniste, le grand-père est plutôt content de ces sièges confortables, ce que le gars qui les a refoulés veut bien croire. La ségrégation est pourtant plus visible et féroce lorsque trois riches veulent boire une bière au bar du coin. Skeeter le jamais content leur lance à la face qu’ils n’ont qu’à aller en face, à la nouvelle épicerie de luxe où ils pourront

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trouver toutes les bières hors de prix qu’ils veulent. L’un des riches rétorque qu’ils veulent simplement une bonne petite bière bon marché, mais se fait vite rembarrer par le barman qui lui rappelle qu’il y a une pancarte accrochée à la porte : « Réservé aux gens qui vivent au-dessous de leurs moyens ». Tout naturellement, le riche n’en démord pas et rappelle qu’il est dans un pays libre, et qu’il peut boire une bière où il veut, lâchant, vengeur, que ça n’en restera pas là ! M. Garrison trouve que les richards commencent à se la jouer et entend bien leur montrer qu’ils ne sont pas les bienvenus. Il propose ainsi de mettre le feu à un grand « T » minuscule, pour « Tirez-vous », devant une de leur maison. Le riche du bar a bien compris le message. Il a eu tellement peur que Jimbo lance que la prochaine fois, ils feront un T majuscule, pour bien leur montrer qu’ils ne rigolent pas ! Pourtant, les riches effectuent une marche en faveur de leur droit et les south-parkois fortunistes ont peur que si les politiques les lâchent les riches aient gain de cause et que la ville soit foutue. Pour Jimbo, la chose est entendue : on ne peut rien contre les riches, ils ont trop de pouvoir. Mais M. Garrison n’est pas du genre à céder comme ça. Pour lui, les fortunistes n’ont pas utilisé la bonne méthode : comme Jimbo le confirme, ce qui effraie le plus les riches ce sont les fantômes. Et le résultat est là : les riches, sur le point d’avoir les mêmes droits que les non-riches, sont épouvantés en voyant que la ville est hantée et partent tous comme des dératés. La communauté humaine se construit par l’acceptation et le Respect des Différences On ne le répètera jamais assez, mais même si nous sommes tous différents, nous nous devons de passer outre les distinctions de fortune ou autre pour pouvoir construire une communauté humaine sereine et pérenne. Pour cela, nous devons nous appuyer non pas sur l’égalitarisme à tout crin (puisque cela sous-entend la mise en avant de ceux qui seraient « moins Égaux » que les autres), mais plutôt affirmer sans cesse haut et fort l’Égalité de tous dans tous les domaines de la vie sociale. Le XXè siècle est un très bon (contre)exemple, puisqu’il nous a montré exactement tout ce qu’il ne fallait pas faire ! Il suffit donc, non pas de

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partir dans les extrêmes inverses (puisque tout extrême est par définition au bord ou hors limite), mais plutôt de tirer les enseignements de ce que nous a appris l’Histoire et de comprendre les fondamentaux qui ont engendré ces situations criminelles pour qu’elles ne se reproduisent plus à l’avenir. Malheureusement, face au conservatisme de certains nostalgiques, cette reconnaissance des droits ne se fera pas sans lutte, pacifique il va sans dire, ni éducation au respect de ce qui fait la vraie richesse humaine : la Diversité ! L’exemple est donné par la marche du million de milliardaires manifestant contre les pauvres de la ville qui les persécutent parce qu’ils sont riches. Comme ils le scandent eux-mêmes, « Nous nous imposerons ! » et nous ne pouvons que l’espérer ! Leur combat est juste puisqu’ils demandent simplement la fin des places réservées aux riches dans les lieux publics et l’abolition de ces lois séparatistes absurdes. Après cette soirée très enrichissante, la mairesse est ravie d’accepter d’abolir toutes les lois séparatistes et de réaffirmer à la nation (qui la regarde) que South Park n’est pas une ville aux préjugés d’une autre époque. Token aussi a appris un truc aujourd’hui : il veut rentrer chez lui, malgré le fait que ses amis se moquent de lui et qu’ils soient différents, car ce sont ses copains et il les aime bien (les préférant à des petits snobs ou à des lions, ces vrais beaufs avec leur blague à deux balles). Retourné parmi les vrais siens, il reste toutefois étonné que les gamins lui proposent d’aller jouer au foot. Il lui reste à comprendre que même s’ils le vannent parce qu’il est riche, il reste leur pote tout de même : c’est pas parce qu’ils le vannent qu’ils ne l’aiment pas. Ce sont des mecs et ils vannent donc tous leurs potes: lui parce qu’il est riche, Butters parce qu’il est bébé, Kyle parce qu’il est juif, Stan parce qu’il est amoureux de Wendy, Cartman parce qu’il est gros, qu’il est bête et que sa mère est une pute, et parce que c’est un enfoiré (stop, là ça le gave). Token comprend enfin qu’il n’y a rien de méchant et qu’à présent ça lui est égal qu’on se moque de lui parce qu’il est riche. Il peut se rassurer, les enfants ont trouvé autre chose : comme quelques vannes ont brisé son petit cœur, il est maintenant une lopette. Tous les gamins le traitant de lopette et Kyle lui disant de venir au foot puisqu’ils ont besoin d’une pom-pom girl, Token aimait mieux finalement les vannes sur les riches, mais c’est trop tard. Comme d’habitude, les enfants

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montrent la voie de la sagesse, alors que les adultes restent sur leurs stéréotypes. Tous fiers que le dernier se soit enfui à toute vitesse dans son van, M. Garrison se frotte les mains de revendre ce qu’ils ont construit, afin de devenir milliardaires eux aussi. Jimbo, toujours aussi bouseux, a bien compris que s’ils deviennent riches en revendant leurs maisons, il y aura toujours des riches à South Park, et qu’ils deviendraient alors ce qu’ils haïssent. Certes, mais pour M. Garrison, l’important est au moins de s’être débarrassé de tous ces connards de nég...

Conclusion :

Voyez, on se couchera moins bête car on a appris un truc aujourd’hui : l’apartheid est d’une stupidité absolue. Pour ceux qui ne le savaient pas, les riches étaient tous noirs, Token compris. Celui-ci est d’ailleurs le seul afro-américain de la classe (et ses parents, anciennement avec pour nom de famille Williams puis Black, sont les seuls noirs avec Chef). Son nom vient de Tokenism (ce qui veut dire quota ethnique en français) utilisé habituellement pour décrire les personnes non blanches qui jouent des seconds rôles dans les séries TV ou dans les films afin de varier les personnages. Tout l’épisode repose sur la vraie compréhension de l’apartheid comme différenciation sur des critères qui n’en sont pas, à savoir ici sur la richesse et historiquement sur la couleur de peau. L’apartheid signifie en afrikaans « Vivre à part ». C’est en fait un système ségrégationniste basé sur la politique raciste du Parti national. En 1948, les Afrikaaners [descendants de colons hollandais établis dès le XVIIè siècle; ces colons étaient des paysans (Boers) qui à la fin du XIXè siècle, à la suite de la guerre des Boers, ont du se soumettre à la puissance coloniale britannique], qui ont remporté les élections en Afrique du Sud contre les partis anglophones, décident de mettre sur pied ce système qui leur permettra de concentrer le pouvoir, les ressources minières et les richesses du pays. Alors que l’Europe sortait

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tout juste de l’horreur nazie, ses enfants exportés les siècles précédents n’en tirèrent aucune leçon : tous ceux qui n’étaient pas considérés comme « blancs » devenaient des citoyens de seconde catégorie. Ce système est basé sur la prétendue supériorité des blancs par rapport aux autres populations. Il existe une similitude avec la ségrégation des noirs aux États-Unis qui a commencé beaucoup plus tôt. Affranchis avant même la fin de la Guerre de Sécession (1861-1865), les noirs américains passent en fait de l’esclavage à la ségrégation et sont empêchés d’exercer leurs droits civiques. Temporairement évincés du pouvoir par leur défaite militaire et la ruine de leur économie, les planteurs et « petits blancs » du Sud le reconquièrent peu à peu, et dès 1880, s’emploient, avec la complicité des juges locaux, à mettre en sommeil les amendements de la Constitution américaine qui garantissent à tous le droit de vote et d’éligibilité. Plongés dans la misère, insultés et brimés, victimes de lynchages et terrorisés par des bandes racistes –tel le tristement célèbre Ku Klux Klan– les noirs sont de plus marginalisés au nom du principe hypocrite « séparés mais égaux », et en application de toutes une série de lois discriminatoires : mariages interraciaux proscrits, cohabitation interdite dans les transports publics, les hôtels, les restaurants, les théâtres, les écoles et les lieux de culte. La Cour suprême sanctionne ces pratiques en l896, à la condition que chaque communauté se voie offrir « des commodités égales » (sic). C’est là légaliser un racisme sans cesse plus virulent, qui contraint, dès 1900, les noirs à émigrer des États du Sud vers ceux du Nord, en apparence plus libéraux et pourvoyeurs d’emplois. Des groupes multiraciaux se créent alors, résolus à abolir ces législations indignes, à promouvoir une instruction égale pour tous et à rendre effective l’application des amendements favorables aux droits civiques des Noirs : ainsi, en 1909, la NAACP (Association nationale pour le progrès des gens de couleur), ou la Ligue Urbaine, fondée en 1911, active dans les grandes villes du Sud et du Nord. Cette première mobilisation, essentiellement juridique, est amplifiée par l’essor d’un syndicalisme noir après 1920, les initiatives provocatrices mais pacifiques du CORE (Congrès pour l’égalité raciale) dès 1942, et le mouvement des droits civiques dès 1955 (une effervescence qui met en

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évidence le poids toujours plus grand de la communauté noire aux ÉtatsUnis). Et la culture noire s’affirme, dans les domaines de la musique avec le jazz et de la littérature avec la Negro Renaissance, qui, dans l’entre-deux-guerres, inspirera les pionniers africains et antillais de la négritude. Cette progressive montée en puissance contribue à sensibiliser les autorités fédérales aux conditions de vie matérielle de la communauté noire, particulièrement sous les administrations démocrate de Roosevelt et de Truman (1933-1952), et républicaine d’Eisenhower (1952-1960). Pour sa part, la Cour suprême se prononce à la veille de la Seconde Guerre mondiale en faveur de l’admission des noirs dans les universités du Sud; en 1954, par un arrêt historique, elle déclare anticonstitutionnelle la ségrégation scolaire, en vigueur dans vingt-deux États de l’Union, et trois ans plus tard, demande aux cours locales de se conformer à ses décisions, sans résultats notables dans l’immédiat. C’est dans la capitale de l’Alabama, à Montgomery, lieu de naissance de la Confédération sudiste en 1861, que les noirs vont prendre en mains leur destin. Rosa Parks est à l’origine du mouvement qui a mené les noirs de Montgomery à boycotter les transports publics. C’est parce qu’elle refuse d’accéder à la demande du chauffeur du bus de céder sa place à un blanc que Rosa Parks est arrêtée par la police locale le 1er décembre 1955. Cette arrestation fait scandale car les noirs en avaient assez de cette ségrégation dans les transports publics. Assez rapidement Martin Luther King a l’idée de boycotter les transports publics de la ville afin de les forcer à supprimer la ségrégation. Les noirs représentent environ 75% de la clientèle régulière, la compagnie risque de perdre beaucoup d’argent. Ce boycott est un succès immédiat, mais il va durer longtemps. Les noirs tiennent bon, refusent de prendre les transports publics, mettent sur pied un système de voiturage, se débrouillent entre eux pour aller au travail quotidiennement. Finalement, le 13 novembre 1956, soit un an plus tard, la Cour Suprême des ÉtatsUnis déclare illégale la ségrégation dans les transports publics d’Alabama. La mobilisation des noirs met les instances suprêmes de l’Union en demeure d’agir contre les pouvoirs locaux obtus et brutaux, et prend le peuple américain à témoin. Au mois de mai 1963, la répression féroce par les autorités de Birmingham, toujours en Alabama, d’une

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manifestation résolument pacifique, au cours de laquelle des hommes, femmes et enfants noirs sont blessés par des jets de lances à incendie et attaqués par des chiens policiers, va susciter une réprobation générale. A Washington, le 28 août 1963, près de 200 000 noirs, 60 000 blancs arrivent à pied, en patin à roulettes, en voiture, en autocar, en avion, pour rappeler à l’opinion et aux politiques que cent ans, jour pour jour, après l’abolition de l’esclavage par le président Lincoln, les hommes et les femmes « de couleur » ne sont pas encore libres aux États-Unis, et que le racisme est une réalité quotidienne. Martin Luther King, d’Atlanta, va donner à la Marche d’un million d’Hommes une portée universelle, en racontant un rêve à la foule bouleversée : un jour prochain, les noirs seront libres et égaux comme les blancs dans une nation enfin fidèle aux idéaux de sa Déclaration d’indépendance. Durant tout l’épisode, les ambiguïtés sont palpables, puisqu’on ne sait jamais véritablement si on ségrége les personnes parce qu’elles sont riches ou par rapport à leur couleur de peau ! Au-delà de la scène du bus et du bar, qui reprennent des lois en vigueur dans les états du Sud appliquées selon la fortune, Chef est appelé à manifester alors qu’il mentionne qu’il n’est que le simple cuisiner de l’école et ne gagne donc pas beaucoup (on peut même se demander à ce niveau-là si ce ne sont pas les riches noirs qui sont racistes, puisqu’ils ont l’air étonné qu’un noir ne soit pas fortuné comme eux). Dans la même veine, plusieurs milliardaires ont payé des milliers de mexicains pour manifester à leur place, ce qui encore une fois déplace le combat de la fortune vers l’origine ethnique (en plus des conditions sociales des mexicains, sûrement l’une des catégories les plus pauvres aux États-Unis). Tout comme dans « La cupidité de l’homme rouge » plus tard, la discrimination est confusée. Si dans la saison 7, ce seront les Indiens qui tenteront de chasser les Américains blancs de leurs terres sous forme de revanche de l’Histoire (South Park devant être rasée comme les blancs mirent le feu aux tipis), ici, les noirs ne sont pas discriminés pour leur couleur mais pour leur richesse. Pour autant, à chaque fois à l’initiative de M. Garrison (officiellement, ce n’est pas lui mais M. Toc qui a ces idées et appartenances malsaines), les habitants de la ville décident de construire un t minuscule en bois qui signifierait « Tire-toi d’ici » et de l’enflammer, en référence aux croix de bois brûlées par le Ku Klux

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Klan. M. Garrison suggère ensuite, pour faire peur aux riches, de se déguiser en fantômes, dont le déguisement rappelle évidemment le Ku Klux Klan. Fondamentalement, la fin de l’épisode nous enseigne qu’au contraire des autres M. Garrison n’a rien contre les riches puisque luimême souhaite en devenir un en revendant les maisons abandonnées, mais que dès le départ il a utilisé le prétexte fortuniste (puisque le père de Kyle – avocat et juif pour rappel – était sur la défensive quant à savoir le type d’espèce que M. Garrison était outré de voir pulluler à South Park) pour camoufler sa haine raciste qui n’aurait pas été suivie par les autres. On peut voir ainsi que les mentalités ont évolué sur la différence abjecte par la couleur de peau, mais que quand on veut il est facile de pouvoir se distinguer des autres par n’importe quel critère qui traîne par terre.

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Catégorie : II] Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres ! Thème : 2) De l’affirmation des Différences au sectarisme communautaire

Fiche de visionnage n°8 : Épisode 136 (saison 9, épisode 11) – Les rouquins

Analyse philosophique des extrêmes : L’autre est-il nuisible parce que différent ???

 

Les pros : Cartman, les roux, Les antis : Kyle, Stan.

 

Thèse : Ce qui est différent est déviant et inférieur ; Antithèse : Il faut stopper les préjugés et comprendre ce que vit l’autre ; Synthèse : Acceptons toutes les couleurs de l’arc-en-ciel humain et vivons en Harmonie !

Il était une fois à South Park Token qui fait un exposé sur le système solaire. Comme il reste du temps pour un autre exposé, Mme Garrison appelle Cartman au tableau. Pour une fois, il ne rechigne pas !

Introduction :

Tous ceux qui sont physiquement différents ont toujours été perçus bizarrement, qu’ils soient jugés enfants de Satan ou qu’on associe leur

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« tare » à des comportements navrants, voire déviants ! Alors que le XXè siècle a malheureusement montré jusqu’où pouvait aller le rejet de la différence de l’autre, force est de constater que nous n’en avons pas tiré tous les enseignements puisqu’on voit et entend encore des gens qui insistent sur la couleur de l’autre pour l’affubler de tous les torts et maux du monde ! Certains pensent que pour vivre heureux nous devons nous séparer des pas pareils qui nous « gâchent la vue ». Avant d’en arriver à de telles extrémités, il est déjà important de s’informer correctement sur l’autre et d’essayer de comprendre ce qu’il vit au quotidien. En somme, l’autre est-il nuisible parce que différent ???

Thèse en faveur de la guerre civile entre communautés différentes Certains aspects corporels « spéciaux » ont de tout temps été considérés comme étant l’expression du mal ou d’un sort jeté sur une famille ayant fauté ! Que ce soit concernant des « anomalies » physiques ponctuelles ou héréditaires, certaines différences frappantes ont toujours inquiété le reste de la société, aussi bien au sujet d’un risque d’épidémie lorsqu’on ne savait pas si une infirmité était contagieuse que par des comportements associés à certaines spécificités ! Afin de se protéger, le mieux est de tenir l’autre à l’écart et de le stigmatiser afin d’atténuer son pouvoir de nuisance ! Il en va ainsi de l’exposé de Cartman intitulé « Les rouquins : Des enfants aux cheveux roux, à la peau pâle et avec des taches de rousseur ». Nous en avons déjà tous vus dans la cour de récré, dans le parc, au magasin, marchant dans la rue. Ils nous dégoûtent et nous donnent envie de vomir. Il s’agit bien sûr des enfants rouquemoutes. Ponctuant son intervention de photos de rouquins qu’il juge crade, dégueu, immonde, Cartman explique que les roux naissent avec une maladie qui cause une peau très pâle, des cheveux roux, et des taches de rousseur. Cette maladie s’appelle rouquinitude, et cela arrive car les

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rouquins n’ont pas d’âme. Les rouquins infectés par la rouquinitude ne peuvent pas être soignés et de fait, à cause de la pâleur de leur peau, ils doivent éviter le soleil, comme les... vampires ! Selon Cartman toujours, comme pour Dracula, le gène roux est une malédiction et à moins que l’on débarrasse la Terre de cette malédiction, les roux pourraient recouvrir nos vies de ténèbres jusqu’à la fin des temps. Selon sa théorie, il est temps d’admettre pour le bien de l’humanité que les rouquemoutes sont vicieux et malsains. En guise de conclusion, si on pense que le problème roux n’en est pas un, Cartman nous invite à y repenser en montrant une dernière photo de roux, particulièrement atteint de rouquinitude. Plutôt que de vivre avec des gens que l’on n’apprécie guère, le plus simple est de les mettre à l’écart, au ban de la société, là où on ne les verra pas ! Parce qu’ils ne peuvent supporter que certaines différences et communautés leurs « polluent l’air », certaines personnes estiment nécessaire le cloisonnement social et la mise en œuvre d’une ségrégation permettant de ne pas se rencontrer. Cela peut tenir aussi bien de la relégation en banlieue urbaine de ces populations indésirées, que d’un apartheid pur et simple visant à marquer la supériorité d’un groupe sur l’autre, la minorité subissant la domination et les exigences de la majorité. Kyle choisit de « s’auto-exclure » de la cafétéria car sa mère lui a préparé un repas kasher. Par contre, un roux qui lui souhaitait y manger se voit refoulé par Clyde au prétexte que la cafétéria lui serait interdite. Alors qu’il est noir, Token explique au rouquin que ceux comme lui doivent manger dans le couloir. Jimmy, handicapé, rajoute même que ce genre de « dégénéré » a sa vraie place dehors ! Cartman s’installe comme si de rien n’était entre Clyde, Token et Jimmy. Token s’empresse de savoir ce qu’il fait là, même si la réponse saute aux yeux puisqu’il mange. Mais Clyde lui rappelle vite qu’il n’est pas censé être dans la cafétéria, Craig rajoutant qu’il connaît la règle : pas de rouquin à la cantine ! Même si Cartman justifie que c’est lui, il n’empêche, Clyde lui fait remarquer qu’à présent il est un rouquemoute ! Cartman réagit et précise que certes il est devenu roux dans la nuit, mais il n’est pas

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comme les autres rouquins, il est toujours lui à l’intérieur ! Peut-être, mais pour Craig il faut faire un exemple et il ne peut y avoir de traitement de faveur : s’ils laissent un seul rouquin manger là, les autres vont venir ! Jimmy le somme de dégager vite fait ! La majorité se croit toujours plus forte de par son nombre, mais il ne faut jamais sous-estimer la minorité animée par l’énergie du désespoir ! A force de faire subir les pires discriminations à une communauté pour ce qu’elle est et les différences qui la séparent d’une certaine norme, un mouvement de ras-le-bol de la minorité oppressée peut vite se retourner contre ses tortionnaires moraux ! Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse : plutôt que d’encaisser les coups, à force d’en recevoir, une communauté peut vite s’élever contre son traitement indigne et estimer qu’à présent les rôles doivent être inversés et que l’oppresseur d’hier doit maintenant subir les conséquences de sa discrimination aveugle ! Cartman, manipulateur et profiteur des situations qu’il est, saisit vite sa chance en organisant une réunion entre roux parce qu’il en a ras-lescouilles d’être discriminé ! Tout ceci part d’un bon sentiment : juste parce qu’ils ont les cheveux roux, une peau pâle et des taches de rousseur, on pense qu’ils sont moins importants, et c’est des conneries bien sûr ! Les gamins à l’école se moquent d’eux, les docteurs les disent génétiquement inférieur. Pour Cartman il suffit : le monde doit savoir qu’ils sont des êtres humains avec des sentiments, et que leurs parents les aiment pour ce qu’ils sont (un père trouve même que chacune des taches de rousseur de son fils est un baiser d’un ange) ! Ils doivent être fiers de ce qu’ils sont, rien qu’en pensant à tous les grands Hommes roux de l’Histoire comme Ron Howard et ... euh ... Bref, les roux font des choses géniales pour la société ! C’est décidé, les roux doivent faire savoir à tout le monde qu’ils ne sont pas inférieurs, qu’en fait ils sont beaux, complètement géniaux, et super intelligents. Il est temps pour eux de récupérer leur fierté ! Cartman organise ainsi une manif dans la cour de récré aux cris de « Pouvoir aux roux ! Plutôt roux qu’à genoux ! ». Cartman galvanise ses troupes : ils sont un peuple fier, de

nobles descendants de grands américains comme Ron Howard ... et d’autres ! Ils ne se laisseront pas discriminés plus longtemps, ils Collectif des 12 Singes

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sont une grande race ! D’ailleurs, celui qui a su ramener l’estime de soi aux roux, Cartman, organise la première conférence sur la fierté d’être roux. Eux qui sont venus si nombreux sont heureux de pouvoir être fier de ce qu’ils sont ! Pour autant, Cartman n’a pas besoin de leur dire qu’il y a de la haine, envers des personnes aussi géniales qu’eux, dehors. Pour ce grand maître de cérémonie, la seule façon de combattre la haine, c’est avec encore plus de haine : les roux ne sont pas une monstruosité de cette société ; les monstres ce sont tous les autres ! Les roux sont le peuple élu, la race supérieure, qui se doit de voir le reste de l’humanité comme la sous-espèce de rats à la peau sombre qu’ils sont ! Cartman harangue ses camarades roux : il a eu la vision d’un monde sans haine, soit un monde où tout le monde est roux ! Ainsi, il pousse ses frères de pâleur à capturer chaque enfant qui n’est pas roux et à les exterminer ! Cartman ne veut pas vivre toute sa vie dans une putain de minorité ! Ses conginger doivent sortir dans la nuit et chasser tous les enfants qui ne sont pas roux : ils les éradiqueront avec des cages et de savantes tortures, et un puits de lave pour les balancer dedans ! Une fois cette basse besogne faite, Cartman réunit à nouveau ses troupes au Airport Hilton lors d’une conférence sur l’extermination de tous les enfants non-roux. Le Jour du Jugement est enfin arrivé : ce qu’ils commencent ici, ils le propageront à travers le monde, jusqu’à ce que le sang de tous les non-roux ait été versé ! Il commence bien sûr l’éradication avec le diurnambule Kyle ! Antithèse en faveur du respect des « bizarreries » d’autrui Surfant sur la vague du repli communautaire identitaire, l’information peut vite se transformer en propagande et donc en manipulation des masses ! Même en partant de données sérieuses, il est relativement facile de faire dire tout et n’importe quoi à des faits bien réels, à des statistiques ou autres sources de (dés)informations ! Si l’on n’a pas le bon sens et la critique nécessaires, il est vite tentant pour certains de détourner l’information au profit de thèses nauséabondes. A force de simplifier des réalités pour les faire rentrer dans sa conception du monde, on en oublie vite que tout est soumis à de multiples facteurs, tant en terme de

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cause à effet que d’interprétation de données brutes ! Cartman fait beaucoup de généralités dans son exposé, mais Kyle veille et dénonce : il est roux, mais il ne doit pas éviter le soleil comme un vampire ! Mais Cartman, en bon orateur manipulateur de première qu’il est, avait prévu le coup et allait y venir si Kyle veut bien le laisser parler. Certains sont roux, mais ils n’ont pas la peau pâle ni de tâches de rousseurs. On les appelle les « diurnambules ». Pour Kyle c’en est trop, ce n’est qu’un tas de conneries ! Cartman, utilisant à son avantage la liberté d’expression, se plaint auprès de Mme Garrison de ne pas pouvoir finir son exposé tranquillement à cause de toutes ces interruptions. La prof demande donc à Kyle de laisser Cartman dire ce qu’il a à dire dans son exposé. Mais pour Kyle cela ne relève pas du simple exposé, c’est plutôt un discours haineux ! Et en plus les gens n’ont pas la trouille des rouquins, sauf Clyde ! Pour débattre avec Cartman, Kyle le fera dans son exposé du lendemain. A la sortie de la classe, Kyle est hors de lui à cause de cet enfoiré de raciste stupide, mais Stan ne voit pas où est le problème. Kyle doit réfuter les rumeurs haineuses de Cartman car ce genre de préjugés ignorants peut amener au pire ! Il est alors décidé de se faire leur propre idée de la chose en allant voir la famille Foley, des rouquins avec la peau pâle. Kyle au moins fait un exposé rationnel basé sur des faits et des témoignages concrets. Mais Cartman continue de juger que c’était intéressant si on veut mourir ! Pour lui, il ne faut pas oublier que Kyle est un diurnambule, c’est-à-dire à moitié rouquin lui-même. Restant sur sa lancée raciste, il enjoint les autres à ne pas se leurrer : les rouquins sont mauvais, la preuve Judas était roux et il a faut tuer Jésus ! Pour lui, il dit simplement ce que tout le monde pense tout bas : les roux sont dégoûtants, et une nuit quand tout le monde dormira, les rouquins nous auront, ILS LES AURONT ! Pfff, c’est chaque fois la même histoire quand Cartman utilise son droit à la liberté d’expression !!! Si la désinformation marche aussi bien, c’est pour une large part parce que les préjugés sont partout présents parmi nous ! Même chez les plus ouverts d’entre nous, certaines différences traînent derrière elles toute une série de conceptions qui les stigmatisent, issues du poids de notre culture et du passé. A force d’entendre des

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blagues différentialistes, de voir certains faits reprochés systématiquement à certaines communautés, tout un chacun, pour sa tranquillité d’esprit, préfère prendre les devants et rester sur sa garde quand il croise un certain type de personne. Tout ceci ne repose bien sûr sur rien, et il suffit d’ailleurs de connaître la personne pour bien voir qu’il ne faut pas faire de généralités, mais il n’empêche que les présupposés et les présomptions de dangerosité restent ! Quand le docteur diagnostique la rouquinitude de Cartman, il prend sa mère à part. Lui qui personnellement ne peut pas encaisser les rouquins, il sait que cette épreuve doit être difficile pour une mère, d’autant plus qu’il n’y a pas de traitement ! Son fils sera roux toute sa vie, et elle pourrait vouloir le piquer ! Ayant entendu cela, Cartman s’interpose et précise que sa mère l’aime, quelle que soit son apparence, même si sa mère tarde – vu qu’elle est sous le choc de la nouvelle – à confirmer ses dires. Mais, même si Cartman est un enfoiré raciste et un intolérant insensible, Stan admet également qu’il avait des préjugés envers les roux. La preuve, Cartman a même réussi à lui faire croire que les roux pourraient venir l’enlever dans la nuit. Mais à présent Stan estime qu’on a tous besoin de réaliser qu’on est tous différents d’une manière ou d’une autre, et on ne devrait pas se sentir menacé par ces différences ! Il est facile pour une majorité de stigmatiser une minorité, mais il faudrait se mettre à leur place pour comprendre tout le mal que cela peut faire ! On ne se rend pas forcément compte au combien on peut blesser quelqu’un parce qu’on se moque de sa différence, mais le mal est fait et il en restera toujours une trace. Même de petites attaques, les plus nombreuses, frappent les esprits de ceux qui les subissent : alors que l’on peut estimer qu’il ne s’agissait que d’une boutade, la victime prend la chose sûrement plus mal à force d’accumulation de ces « petits riens » ! Et pour comprendre toute cette violence psychologique, il n’y a que l’immersion totale, dans la peau de ..., qui permettent réellement de se rendre compte de l’ampleur de la souffrance accumulée par tant de brimades ! Justement, ce qu’a dit Cartman est si mal que Stan aimerait qu’il

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puisse voir ce qu’on ressent quand on est roux. Qu’à cela ne tienne, Kyle propose de donner une bonne leçon à ce gros con : en pleine nuit, ils transforment l’anti-roux en ce qu’il hait par-dessus tout ! Cartman se pointe le matin à l’arrêt de bus comme si de rien n’était, si ce n’est son ombrelle pour se protéger du soleil. Kyle trouve qu’il a l’air différent, et Cartman explique tranquillement qu’il a vu un docteur qui lui a dit qu’il souffre d’une légère dépigmentation de la peau. Plutôt que rouquin comme se moque Stan Cartman préfère se définir comme atteint de rouquinitude, selon le terme médical. Kyle remarquant le parapluie, Cartman explique que les rayons du soleil sont mauvais pour sa peau, donc il a besoin de protection quand il sort. Sur ce, il est content d’avoir parlé de ça, mais ne souhaite qu’une chose, reprendre sa vie normalement. Mais Kyle ne le lâche pas si facilement, trouvant la situation ironique vu que Cartman s’est moqué toute la semaine des rouquins et qu’à présent il en soit un ! Mais Cartman, blasé, ne voit pas vraiment d’ironie là-dedans. Assis dans le bus à côté de Butters, celui-ci n’en peut plus d’éclater de rire sur le nouveau look de Cartman. Kyle se réjouit que cela fonctionne au poil (de carotte). Ils ont donné une bonne leçon à Cartman, espérons qu’à présent il va réfléchir à la façon qu’il a eu de traiter les roux ! Synthèse Bon nombre de différences sont dues au hasard de la naissance, ainsi les railleries sont encore plus dures à supporter qu’on n’a pas choisi son code génétique ! Que l’on s’attaque à des personnes en raison de leur comportement inacceptable, passe encore, mais s’en prendre à des individus en raison de leur héritage génétique est non seulement mesquin, mais même immoral ! Alors que le vieux racisme scientifique tente de revenir sur le devant de la scène grâce aux « avancées » de la génétique, il est important de rappeler que le génome construit l’humain, mais que la société et la culture dans lesquelles il vit façonne également pour une large part le citoyen qu’il est ! Comme Kyle veut clouer le bec à Cartman en faisant lui aussi un exposé sur les gens avec des cheveux roux et des taches de rousseur, il

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se rend avec Stan chez les Foley voir les mignons petits démons roux comme les appellent leurs parents. Stan ne comprend pas comment les enfants peuvent être roux alors que leurs deux parents ont les cheveux foncés et les yeux marron. Le père lui explique alors qu’ils ont appris que le gène roux est récessif dans l’ADN de leurs deux familles : les probabilités pour qu’ils aient un rouquin avec des taches de rousseur sont de 1 sur 4, pourtant c’est arrivé, trois fois de suite même (ce qui n’a pas l’air de ravir le père, du moins il fait avec). La mère ajoute que beaucoup de gens portent le gène roux et ne le savent pas. Ainsi, si leur partenaire est aussi porteur, alors leurs enfants peuvent être comme ... « malheureusement » ceux des Foley. Le père s’empresse toutefois de préciser que chacun d’entre eux est une bénédiction pleine d’amour et qu’ils les adorent ! Pour autant, quand Kyle cherche à avoir confirmation que ce n’est pas vrai qu’ils n’ont pas d’âme, le père est sûr qu’ils en ont une mais met vite les enfants à la porte. Il leur précise juste avant de leur claquer la porte au nez que s’ils ne veulent vraiment pas avoir d’enfant roux, ils doivent épouser une asiatique, ethnie qui ne porte pas le gène récessif. Lors de son exposé, Kyle explique ce qu’il a appris avec les Foley : les cheveux roux, la peau pâle et les taches de rousseur, sont transmis par les gènes. La couleur des cheveux d’un enfant n’est pas déterminée par l’absence d’âme, mais par les mélanines qui contrôlent le pigment de notre peau. Justement, Cartman se rend chez le médecin pour diagnostiquer ce qui lui est arrivé dans la nuit. Pour le docteur, tous ses signes vitaux sont normaux, et au vu de son apparence extérieur, il estime que Cartman souffre d’une déficience pigmentaire standard, c’est-à-dire de rouquinitude. Cartman cherche à comprendre pourquoi il est roux maintenant alors qu’il n’est pas né comme ça. Le médecin lui explique que les cheveux roux et les taches de rousseur sont un gène récessif, qui a dû rester endormi jusqu’à son adolescence. Maintenant il restera comme ça pour toujours, autant si faire ! A certaines occasions, on peut avoir besoin de ressembler à ce que l’on rejette tout le reste de l’année ! Alors que la publicité et notre culture en général tentent d’offrir un visage stéréotypé de notre société en omettant régulièrement de montrer

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autre chose que des visages pâles, on peut ponctuellement avoir besoin de représenter les minorités invisibles. Mais plutôt que de prendre de vraies personnes de ces communautés, certains utilisent des gens qui s’en rapprochent : afin de ne froisser les sensibilités de personne, on emploie plutôt des métisses ou des individus qui ne sont pas trop marqués, en espérant que chacun y trouve son compte. Mais quelque part il est encore pire de ne montrer qu’un travestissement de la réalité que de la cacher complètement ! C’est exactement ce qu’il se passe au centre culturel de Denver, où la première de « Annie » provoque la polémique. Le « Mouvement Séparatiste Roux », une nouvelle organisation qui grossit rapidement, est furieux que l’actrice principale d’Annie soit jouée par une fillette qui n’est pas réellement rousse avec des taches de rousseur. Cartman, porteparole du mouvement, explique que les roux de pure souche sont furieux que le rôle d’Annie soit à ce point rabaissé : cette salope n’est pas rousse, elle se maquille pour le paraître, mais faire semblant d’être roux est la pire chose que l’on puisse faire ! Et c’est bien pour cela que les enfants ont fait ce tour à Cartman : depuis qu’il est roux il fait comme si les rouquins étaient géniaux et d’ailleurs tous ses amis sont rouquemoute ! Il est donc temps pour eux de le retransformer en nonroux qu’il est d’origine pour qu’il ait trop les glandes ! Fondamentalement, qu’est-ce qu’une couleur de cheveux a à voir avec son comportement et les liens sociaux établis entre citoyens ? Dans nos sociétés, les meurtres et les viols sont essentiellement commis par des blancs, mais il ne viendrait à l’idée de personne de dire que tous les blancs sont supposés capables et coupables de tels crimes, alors que de penser que des vols « régulièrement » commis par d’autres entachent plus certainement toute une communauté, juste parce qu’elle est différente ! Le mal est humain par nature, il n’a donc aucune couleur précise puisqu’il les a toutes ! Arrêtons alors de focaliser notre attention sur des détails biologiques et considérons la personne, non son patrimoine génétique ! Alors que Kyle vient de lui révéler qu’il n’est pas roux, Cartman réalise quelque chose : se demandant ce qu’ils sont devenus, les roux ne devraient pas exterminer les non-roux (sachant justement qu’il en est un,

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donc du mauvais côté de la barrière). Cherchant à sauver sa tête, Cartman explique avec intelligence que s’ils exterminent tous ceux qui ne sont pas roux, alors les rouquins ne seront pas meilleurs qu’eux quand ils pensaient que les roux étaient inférieurs. Les roux doivent vivre et laisser vivre ! Le public, en transe vengeresse, lui fait remarquer qu’il prônait l’extermination des non-roux, mais Cartman aura au moins appris de cette mésaventure qu’on ne peut pas juger les gens sur leur apparence, mais qu’on doit apprendre à vivre tous ensemble ! Sommé de s’expliquer sur ce que lui a dit Kyle pour qu’il change ainsi d’avis, Cartman esquive en savourant le bonheur de sentir l’amour, d’aimer ses semblables. Tout le monde a subi de nombreuses épreuves ensemble, mais à la fin tous ont appris à s’entendre et c’est ce qui compte ! Une petite chanson finira de ressouder les liens : « Main dans la main, on peut vivre tous ensemble. Qu’on soit roux ou pas, on se ressemble. Noir ou blanc, brun ou roux, on ne devrait pas s’entretuer, parce que ça craint ! ». Cartman est vraiment un trou du cul manipulateur, puisque cette fin ne lui ressemble pas du tout, mais au moins il peut se vanter qu’il ne va pas mourir à cause des idées qu’il a lui-même prônées !

Conclusion :

Voyez, on se couchera moins bête car on a appris un truc aujourd’hui : à force de stigmatiser l’autre par rapport à ce qu’il paraît plutôt que de considérer ce qu’il est, on peut vite faire éclater une société et déclencher une guerre civile fratricide ! Il est toujours plus facile de s’arrêter sur des détails physiques ethniques pour expliquer certains phénomènes plutôt que de se creuser les méninges pour avoir une vision globale des problématiques et recadrer le débat. Malheureusement, tant qu’on ne cherchera pas à comprendre comment l’autre vit sa différence qu’on n’arrête pas de lui faire remarquer, il existera toujours un fossé d’incompréhension entre des communautés loin d’être si éloignées !

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Pour qu’une société vive en Harmonie avec tous les membres qui la composent, il est plus que nécessaire de savoir regarder au-delà de la couleur des cheveux ou de la peau, et d’enfin comprendre que ce ne sont pas ces critères – qui n’en sont pas – qui font les défauts et les qualités d’un individu, mais uniquement ses actes et son comportement dans la vie de tous les jours !

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Catégorie : II] Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres ! Thème : 3) Se couper du monde n’est pas s’en protéger ! Fiche de visionnage n°9 : Épisode 90 (saison 6, épisode 11) – Les enlèvements d’enfant, c’est pas marrant

Analyse philosophique des extrêmes : Pour pallier les enlèvements, faut-il vivre dans la peur de l’Autre et tout sacrifier ???  

Les pros : Les parents, Les antis : Les Mongols, les enfants.

 

Thèse : Pour éviter les enlèvements, il faut renier ses Libertés ; Antithèse : Se surprotéger ne sert à rien sinon à s’empêcher de vivre ; Synthèse : Il ne faut pas être obnubilé par les enlèvements mais prendre les précautions de base !

Il était une fois à South Park le très anxieux Tweek qui regardait seul la télévision. Bloquant sur les infos, il apprend qu’un nouveau carnage a eu lieu dans une école de l’Idaho, cette tuerie prouvant que les enfants ne sont plus en sécurité à l’école. Zappant vite sur une autre chaîne, le poste lui dit que la menace terroriste plane sur les parcs d’attractions et qu’ainsi les enfants ne sont plus en sécurité lorsqu’ils sortent. Il a beau changer encore une fois, on lui annonce qu’un nouveau risque se développe, le kidnapping par des étrangers, ce qui entraîne que les enfants ne sont donc plus en sécurité chez eux.

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Introduction :

Que ce soit pour des crimes à caractère sexuel, pour le « plaisir » de tuer une innocente « tête blonde » ou pour se venger d’une famille, les enlèvements d’enfant font parties de nombreuses cultures humaines. Puisque le risque 0 n’existe pas, ils ont toujours existé et malheureusement existeront encore. Toutefois, avec la prise de conscience du phénomène par le biais des médias, les citoyens et les parents prennent leurs responsabilités en main. Aidés en cela par la technologie et la considération que les enfants sont l’avenir de la société (chose relativement récente, puisque datant surtout du siècle des Lumières), nous mettons en œuvre les solutions jugées adéquates pour la sécurité de notre progéniture. Pour autant, nous prenons le risque de devenir des esclaves volontaires de nos psychoses, plus ou moins justifiées par la réalité statistique des faits. Avons-nous encore les capacités d’êtres raisonnables ou nos angoisses nous mènent-elles déjà vers un abandon de nos principes ? En somme, pour pallier les enlèvements, faut-il vivre dans la peur de l’Autre et tout sacrifier ???

Thèse en faveur de la méfiance absolue Il est bien naturel pour un parent de s’inquiéter de savoir où est et ce que fait son enfant, afin d’être sûr qu’il ne court aucun risque. Alors que tout parent a déjà été pris de panique au moins une fois en ne sachant pas où est son enfant, qu’il se soit trop éloigné alors qu’il était avec ses parents ou qu’il ne soit plus là où il était censé être, la technologie vient à la rescousse en utilisant le dernier cri des matériels high-tech. Grâce aujourd’hui à la géolocalisation par satellite, n’importe quoi ou qui peut être situé avec une précision épatante. Ainsi, les parents south-parkois ont opté pour cette solution Collectif des 12 Singes

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technologique, qui n’a rien à avoir avec un remède anti-kidnapping – contrairement à ce que pensent les parents – mais qui permet tout de même de toujours savoir où se trouve l’enfant affublé du casque énorme de ce localisateur. Si celui-ci se fait enlever un jour, on pourra le localiser à 2 mètres près. Évidemment, Stan ne veut pas mettre ce chapeau horrible (en plus d’être gros et pesant sur sa petite tête brune), se plaignant en outre que ses copains se moquent de lui. Non seulement ses parents le rassurent sur le fait que ça se remarque à peine (mouais, enfin c’est quand même un bidule énorme, en plus avec un gyrophare, une grande antenne et une parabole), mais également lui indiquent qu’il n’a pas à s’inquiéter sur ce que pourront dire ses camarades de classe. Et pour cause : les parents sont tellement morts de trouille après que Tweek ait failli se faire enlever, que tous les gamins sont équipés de ce localisateur, plus que dissuadant par son manque de discrétion. Puisque localiser un enfant qui a été enlevé est déjà guérir, mieux vaut prévenir toute tentative d’enlèvement. Et bien sûr, on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Dès lors, la solution la plus efficace est de prolonger 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, la mission première de tout parent, à savoir surveiller son enfant. Bien que cela ne soit pas évident pour leur permettre de vivre leur propre vie professionnelle, si les parents ont constamment à l’œil leur enfant, cela limite nécessairement les opportunités de kidnapping par un individu profitant de l’isolement et de la non surveillance d’un gamin. C’est ainsi que les parents surveillent sans arrêt leurs enfants, à l’extérieur comme en classe. A l’arrêt de bus, Stan trouve que c’est encore pire que le localiseur, mais le père de Tweek et la mère de Stan rassurent tout le monde en disant que les gamins n’ont qu’à faire comme si les parents n’étaient pas là. Et forcément, ils voient alors comment leurs enfants se comportent comme des charretiers : Kyle traite Cartman de gros lard (ce en quoi la mère de Cartman ne trouve pas grand chose à redire, et pour cause), et celui-ci répond que lui au moins n’est pas un connard de juif (ce qui n’a l’air de stupéfier que les parents de Kyle, surtout sa mère avec son fameux « Quoi, quoi, quoi ? »). En classe la présence des parents est encore plus gênante, puisque M. Mackey est

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obligé de rappeler que les parents, qui sont censés connaître au moins une partie des réponses, ne doivent pas souffler. Il pense alors qu’avoir tous les parents en classe, ce n’est pas une bonne idée. Pour le père de Tweek, tout irait mieux si on pouvait avoir confiance en des gens comme les Stotch (les parents de Butters, qui avaient lancé la fausse information comme quoi leur fils avait été enlevé par un latinoaméricain alors que la mère avait tenté de le noyer après avoir appris par Butters que son mari fréquentait les saunas gays), ce en quoi le père se défend en arguant que c’est la famille Tweek qui a une réputation de merde. Alors que tout le monde se gueule dessus, M. Mackey préfère démissionner ... et demande à ses parents de le laisser seul (mais ils restent, voulant être sûr que personne ne l’importunera, voyez ; il voit). Pour être sûr de ne pas être dérangé intra-muros, autant se préserver des extra-murés. Le repli sur soi, entre gens de bonne compagnie et de confiance, est le premier des réflexes de défense face à l’agression. Si, parce qu’on a peur de ce qui vient de l’extérieur, on doit défendre ses personnes et ses biens, la solution mise en œuvre de tout temps est de se barricader, de s’emmurer vivant afin de mieux contrôler les entrées-sorties et d’avoir la meilleure défense possible. Étant donné que Tweek a failli se faire enlever par un étranger dans les murs même de la ville, la solution pour les citoyens est d’empêcher ces kidnappeurs d’entrer dans la cité, en fermant complètement la ville aux étrangers indésirables, un peu à la manière d’une barrière pour protéger les enfants. Le père de Stan propose alors de construire un grand mur tout autour de South Park, afin de contrôler ceux qui veulent entrer. En se demandant qui pourrait construire une telle grande muraille, la solution est toute trouvée. Tout le monde se rend alors chez City Wok, le restaurant chinois du coin. Évidemment, quand la mairesse propose ce job au seul chinois de la ville, celui-ci refuse, n’étant qu’un simple cuisinier du Shitty Phoque. Pour le père de Kyle, le cuisinier chinois est le plus qualifié pour bâtir ce mur, c’est dans ses gènes (sachant que le père de Kyle est avocat et juif, il devrait savoir que ce genre de stéréotype est d’une stupidité affligeante, mais non). Bien sûr le cuisinier chinois se rebelle contre cette vision simpliste et discriminatoire des choses (lui qui n’est pas une caricature, qui mange

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du riz et conduit très lentement comme tout le monde), mais le père de Stan calme le jeu en rappelant à M. Tuong Lu Kim que la grande muraille de Chine a repoussé les Mongols durant des siècles. Devant ce souvenir du passé glorieux, le cuisinier chinois se doit de s’exécuter, pour continuer l’honneur de ses ancêtres. Antithèse en faveur sérénité plutôt que de la sécurité à outrance Tout système mit en place génère de fait un contre-système ou du moins l’envie de passer à travers les mailles du filet. Dans ces conditions, il est inutile – et qui plus est coûteux – de vouloir ériger des barrières « infranchissables » dans le seul cadre d’une protection passive. En effet, si l’on veut solutionner les choses, il est important d’avoir une démarche active, notamment en essayant de comprendre les autres et de tenter par tous les moyens des solutions alternatives à son propre enfermement à l’intérieur de quatre murs. Ainsi, alors que M. Tuong Lu Kim est encore en cours de construction du Mur de South Park, des hordes Mongols déferlent à cheval sur la plaine et s’attaquent à la grande muraille. Tuong ne comprend pas, et nous non plus d’ailleurs, ce que ces fléaux de dieu viennent foutre au plein milieu du Colorado. Il n’y a pourtant rien de plus simple : dès qu’un chinois fait une muraille, ces putains de Mongols de merde débarquent pour tout casser ! Pourquoi ??? Tout simplement pour le plaisir de montrer que personne ne peut se murer du monde extérieur, que bâtir des murs – si hauts et si puissants soient-ils – ne résout rien. Bien au contraire, seul le fait de les détruire permet de se réunir. L’humain fonctionnant par défi, que ce soit pour défendre sa Liberté ou simplement assouvir sa curiosité de voir si l’herbe est vraiment plus verte dans le champ barbelé du voisin, rien ne sera jamais assez puissant ou dissuasif pour contenir éternellement ses assauts répétés. Plus un édifice ou un problème résiste, plus forte sera l’envie de réussir à le prendre en défaut. Et forcément, plus on tente, plus on échoue, et plus on a de possibilités d’apprendre de ses erreurs jusqu’à trouver la solution ultime. Car il faut bien l’admettre : le risque 0

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d’infaillibilité n’existe pas ! Il y aura toujours une brèche, si petite soitelle, dans toute protection ingénieuse, et plus on rajoutera de surcouche de protection, plus on ouvrira de nouvelles brèches ou on délaissera ce qu’on croyait intouchable et qui ne le sera plus avec l’avancée de la technologie ou les progrès de la ruse/machination humaine. Après la première attaque contre la muraille et les réparations à peine finies, M. Tuong Lu Kim hallucine en attendant des bruits de sabre à proximité. Sortant son guetteur de Mongols (une longue-vue en fait), il les voit à quelques dizaines de mettre s’attaquer à son bel ouvrage. Lorsqu’il se précipite sur place en leur criant dessus, il se rend compte qu’il ne s’agit là que de simples arbustes déguisés en Mongols et d’un magnéto produisant ces sons de sabre attaquant le mur. Juste à ce moment-là, il s’aperçoit qu’il a lâché la proie pour l’ombre et revient au pas de course sur son emplacement premier (fraîchement réparé), déjà complètement ravagé par les Mongols. Il se jure que c’est la dernière fois que ces Mongols de merde démolissent sa belle grande muraille pour qui il sue sang et eau depuis un bout de temps. Il s’équipe alors d’un système de défense anti-Mongol, un missile à tête chercheuse qu’il rêve de leur balancer dans la gueule. Quand ces derniers reviennent à la charge, il fait genre le mec qui a les chocottes face à la petite balle que les Mongols veulent envoyer contre sa forte muraille. Il sort alors son arme secrète et titille les Mongols en leur proposant de dire bonjour à son copain missile. Lorsque ce dernier est relativement proche de sa cible, l’un des cavaliers verse de l’essence sur la petite balle inoffensive, puis un autre l’enflamme. Le chef lance alors la petite balle vers la muraille, que s’empresse de suivre le missile à tête chercheuse, explosant ainsi de manière encore plus destructive la muraille. Tuong s’est fait prendre à son propre piège : plus il sort la grosses artillerie, plus ça fait de dégâts, chez lui ! Vert de rage et explosé de tous les côtés, il lance dans sa souffrance que ces putains de Mongols à la con ont cassé sa grande muraille pour la dernière fois (ce qu’il avait déjà dit une autre fois, comme quoi, l’histoire se répète sans cesse). Il est persuadé d’avoir trouvé la solution ultime, leur ayant préparé du porc sauce aigre douce à leur jeter dessus, mixture brûlante et gluante. Les Mongols seront alors collés au mur et il pourra se venger facilement et sans risque de toutes ces humiliations faites à la grandeur chinoise. Mais à malin,

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malins et demi ! Lui qui croyait son plan génial, voit venir de loin la ruse du fameux cheval de Troie. Mais on ne l’a lui fait pas, il a lu ou entendu parler de cette histoire et ne s’en laissera pas conter ! Il joue alors la comédie, parlant haut et fort, se réjouissant de cette surprise de taille et hurlant à qui mieux mieux que les Mongols ne sont peut-être pas que des barbares puants, finalement. Il déclare assez fort pour que tout le monde entende (même s’il est seul) qu’il va pousser le cheval à l’intérieur et le montrer à tous ses amis. Pensant avoir ainsi bien feinté l’adversaire, il ouvre la trappe du cheval où sont censés se trouver les Mongols et ... reçoit une énorme quantité de porc sauce aigre douce sur le coin de la gueule. Une fois qu’il est bien empêtrer dans ce méli-mélo brûlant et gluant (son idée à la base, mais encore une fois retournée à l’avantage de l’adversaire), les Mongols attaquent, juste à côté de ce pauvre bougre inoffensif, englué dans la mélasse jusqu’au cou. Il a beau hurler la bouche pleine (ce qui n’est pas très poli) « je vous aurai un jour, je vous aurai », à l’instant présent il ne peut que contempler son impuissance. Mais il ne se laisse pas abattre pour autant : pour détruire son mur, les Mongols vont devoir le battre directement dans une ultime bataille. Il exécute alors une « terrible » ancienne danse de guerre chinoise (avec costume et tout le tintouin), censé foutre autant les chocottes que le fameux haka néo-zélandais. Histoire d’enfoncer le clou, il refait sa danse, alors que les enfants passent discrètement derrière lui pour déposer aux pieds du mur un chariot rempli d’explosifs. Lorsque ceux-ci repartent avec le détonateur en main, Tuong voit les gamins et les avertit de faire attention car la région est infestée de Mongols (ce qu’ils savent puisqu’ils ont été recueilli par eux après avoir été évincés par leur tribu familiale pour éviter leur enlèvement par les parents euxmêmes). A peine a-t-il dit ça, qu’il s’aperçoit que le chef Mongol a un détonateur dont le fil rouge va jusqu’au chariot bourré d’explosifs puis tout explose. Au-delà de ces aspects pratiques, il est important de voir que l’humain, cet animal sociable (comme beaucoup d’autres d’ailleurs), a besoin de confiance pour établir des relations sociales saines et durables. Celle-ci est dans les relations humaines aussi vitale que l’air, même si elle est tout aussi impalpable ! La confiance permet ainsi de ne pas

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voir l’Autre forcément comme un ennemi qui vous veut du mal, mais permet plutôt de se sentir bien dans ce monde (de brutes aussi). Même si l’on doit se méfier dès que quelque chose nous paraît louche, il n’en reste pas moins que nous ne pouvons et ne devons pas vivre dans une bulle stérile, à l’abri des méchants mais de fait aussi couper des gentils. L’important étant bien évidemment de ne pas toujours se fier à sa première impression, qui est loin d’être toujours la meilleure. On le voit bien par exemple quand les gamins vont au cinéma pour voir Men in Black 2. Même s’ils espèrent que le film ne sera pas à chier, ce que Kyle craint fort, Tweek est pris d’une peur panique en voyant que ce n’est pas le même guichetier que d’habitude. Alors que les autres s’en foutent, jugeant que ce n’est pas grave, lui craint qu’il veuille le tuer. Cartman se demande bien ce qu’on pu lui dire ses parents (pour une fois, Cartman s’ « inquiète » pour quelqu’un d’autre que lui). La parano atteint ensuite toute la ville de South Park et nuit aux activités sportives des enfants. Ceux-ci s’étonnent de jouer dans un stade bondé de south-parkois, mais sans aucune équipe adverse à jouer. Leurs supporters parentaux se justifient en disant que s’ils ont fait faire un mur pour protéger leur progéniture, ils ne vont pas laisser entrer une équipe d’étrangers. Les parents sont tellement décalés, comme d’hab, que même si les enfants arguent du fait que jouer seul ce sport d’équipe est nettement moins marrant, ils les encouragent quand même et les félicitent à chaque balle strikée (vu qu’il n’y a pas de batteur adverse, il n’y a que ça) et pour toutes leurs si franches victoires. Pour les southparkois, même si (ou justement, parce que) les enfants ne jouent contre personne, ils assurent à fond. Alors que tout le monde savoure la pizza de la victoire (seul vrai avantage pour les mômes à jouer tout seuls), la télévision annonce qu’une étude révèle des choses ignorées sur les kidnappings : la majorité des enlèvements ne sont pas le fait d’étrangers, mais d’un voisin que l’enfant connaît bien. C’est parce que l’enfant est en confiance qu’il y a tant de kidnappings. L’ennemi est à leurs portes blindées, prêt à agir ! Immédiatement, tous les parents décident qu’ils doivent rentrer, pizza finie ou non ! A peine chacun chez soi, qu’une nouvelle nouvelle découverte parasite le poste de télévision : a plupart du temps, les ravisseurs ne seraient autres que les parents eux-mêmes ! En effet, 9 fois sur 10 l’enlèvement est commis par le père ou la mère.

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Les enfants ne sont donc pas en sécurité même au sein de leur home sweet home ! Pour être sûre que Tweek va bien, sa mère veut monter vérifier s’il est toujours dans son lit. Immédiatement son mari veut y aller avec elle, juste pour être sûr qu’elle ne l’enlèvera pas, ce qu’il croit qu’elle a peut-être déjà fait ! Elle a beau affirmer qu’elle n’enlèvera jamais Tweek, ce n’est pas ce qu’ils disent à la télé. Bonjour la confiance dans le couple, mais c’est pareil dans les autres familles. La question se pose alors de savoir comment protéger les enfants contre leurs parents ? La solution extrême, que les south-parkois apprécient tant, est de bannir les enfants de la ville afin qu’ils soient en « sécurité », en pleine nuit et par un fichtre froid de canard. Lorsque les parents comprennent enfin leur erreur/bêtise, ils s’excusent platement. Toutes ces infos à la télé leurs sont montées à la tête. Le fantôme de la bonté humaine (celui qui tenta de kidnapper Tweek) avait raison. Non pas d’enlever des enfants, mais sur ce qu’il disait au sujet de la confiance que l’on doit accorder à priori, sauf si la personne est trop louche. Il faut faire ce qu’il disait, pas ce qu’il faisait. Synthèse La télévision permet d’accélérer la vitesse de transmission de l’information. Elle facilite ainsi la prise de conscience de problématiques qui autrement nous passeraient par-dessus la tête. Pour autant, à trop informer, les téléspectateurs les moins critiques peuvent avoir une idée faussée de la réalité des choses. On peut alors avoir le syndrome de la surmédiatisation, qui consiste à être persuadé qu’il y a beaucoup plus de ceci ou de cela qu’auparavant, tout simplement parce qu’on en entend plus parler dans le poste (télé ou radio d’ailleurs). Cela résulte la plupart du temps d’une succession d’affaires dans un court délai, nous faisant croire que ce genre de choses arrive tous les jours et donc que personne n’est à l’abri. Il en va ainsi de Tweek qui, regardant tranquillement la télévision, tombe sur une chaîne parlant d’un nouveau carnage dans une école de l’Idaho. Cette tuerie prouverait que les enfants ne sont plus en sécurité à l’école. Il a beau vite changer de chaîne, le discours alarmiste est le même, par le biais de la cascade médiatique où ce que l’un dit, l’autre le

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reprend dans le cadre d’un dossier pour ne pas paraître omettre des sujets « d’actualité ». Il apprend alors que la menace terroriste plane sur les parcs d’attractions et que les enfants ne sont plus en sécurité lorsqu’ils sortent. Après un autre zapping, la télé lui révèle qu’un nouveau risque se développe : le kidnapping par des étrangers. Les enfants ne sont donc plus en sécurité chez eux. Avec tout ça, on comprend bien que lorsque ses parents l’appellent pour qu’il vienne dans la cuisine pour le voir, lui comprend que ses parents veulent l’avoir. Ils lui parlent justement des risques de kidnapping, en précisant qu’il n’arrivera sans doute jamais rien, mais son esprit d’anxieux caféiné reste persuadé qu’ « ils » vont venir le prendre, lui qui n’y peut rien mais qui a toujours l’impression qu’on va l’agresser. Même si nos sociétés dites « modernes » sont très nettement individualistes, il n’en reste pas moins que la solidarité est nécessaire, ne serait-ce que sur des petits détails mais qui peuvent faciliter la vie de tout un chacun quand il en a besoin. Ainsi, il est plus qu’agréable, nécessaire, que l’on puisse demander à n’importe qui un petit coup de main quand on requiert de l’aide. Cela nous rassure sur la nature humaine, qui n’est pas bonne par nature, mais que la société façonne selon ses principes, dont l’entraide est un des fondements pour sa survie propre (individuelle autant que collective). Personne ne pourrait vivre sereinement (et même dignement) dans une société où tout le monde a peur de tout le monde. Lorsqu’un automobiliste demande gentiment son chemin pour aller à Breckenridge, ou simplement de confirmer qu’il se trouve bien à South Park, Tweek l’envoie balader. Idem quand une vieille dame lui demande de l’aide pour traverser, sa réponse est cinglante avec un « je vous connais pas ! ». Pire encore alors qu’un paralysé en fauteuil remercie dieu que le gamin soit là pour le sortir du pétrin, sachant que son fauteuil est en panne de batterie ... au beau milieu de la voie ferrée. Tweek lui balance froidement qu’il ne doit pas parler aux inconnus. Le paralysé de la tête aux pieds (qui avance grâce à une commande buccale mais qui est cassée) a beau lui dire que ce n’est pas drôle et qu’il a vraiment besoin d’aide (ce qui se voit dix fois), Tweek refuse obstinément en pensant qu’il s’agit peut-être d’une ruse. Lorsque le train

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l’éclate sur son passage, Tweek trouve que la ruse est quand même vachement bien faite, mais bon (de toute façon il est trop tard). « Heureusement », dans son sommeil, Tweek a l’apparition du fantôme de la bonté humaine. Celui-ci ne peut accepter que le petit garnement ait perdu foi en l’humanité. Certes il a toujours l’impression qu’on va l’agresser, mais le fantôme lui explique que ce que les infos nous montrent n’est que le monde que les adultes qui ont perdu leurs rêves préfèrent voir. Mais le vrai monde n’est pas comme ça. Il lui montre alors une femme qui va à la maison de retraite. Elle est bénévole et donne un peu de son temps à des personnes âgées qui ont tellement besoin d’amitié. Il lui désigne une humble demeure, abritant un couple qui a adopté des petits orphelins. Avant, ils n’étaient que des étrangers. Désormais, ils sont leurs parents. Plus loin, une vieille dame avait un pneu crevé et deux inconnus sont venus l’aider. Il lui demande si on parlera de toutes ces personnes dans les journaux télévisés, si on montrera leur bonté aux infos ? Rien de moins sûr. Mais une chose est sûre, elle : même si les infos ne parlent que de tueurs et de kidnappeurs, ils ne représentent qu’une toute petite minorité ! (ce en quoi il enjoint Tweek à monter dans sa camionnette ... avant de se faire pincer par les flics à la recherche de ce Frédérick Johnston, un kidnappeur qui agit sous ce déguisement depuis un an). On n’est jamais sûr de rien, mais l’on peut tout de même faire confiance à beaucoup de monde. La limite étant bien sûr de se sentir à l’aise et d’essayer de détecter les comportements louches. On dit que la confiance est quelque chose qui s’apprend par les preuves, que l’Autre fait pour témoigner de ses bonnes mœurs et foi. Pour autant, les enfants sont des êtres timides par nature et ont toujours peur d’autrui dès que les parents ne sont pas à proximité ou ne les ont pas rassurés sur l’inoffensivité d’une personne, d’une chose ou d’un geste. Même si chat échaudé craint l’eau froide, il n’en reste pas moins que la confiance (et son meilleur allié, le discernement) doit nous gagner. C’est justement ce que propose le fantôme de la bonté humaine à Tweek lorsqu’il lui demande s’il croit pouvoir apprendre à faire confiance aux gens. Ce dernier indique en tout cas qu’il va essayer, ce

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qui est un bon début. Malheureusement, ce fantôme de la bonté humaine promeut la confiance pour mieux en user et abuser, mais la société veille puisqu’il se fait arrêter avant son passage à l’acte criminel.

Conclusion :

Voyez, on se couchera moins bête car on a appris un truc aujourd’hui : les relations avec les étrangers (voire même certains familiers, mais qu’on ne connaît pas si bien que ça – puisqu’on ne connaît jamais vraiment le fond de qui que ce soit) sont emplies de préjugés coupables que nous nous devons de surmonter pour pouvoir vivre tranquillou bilou en bonne harmonie sociale. Bien que la profusion d’informations peut nous faire croire que nous ne sommes en sécurité nulle part et avec personne, nous sommes obligés de vivre avec les autres, que cela nous plaise ou non. Si nous ne voulons pas vivre comme Bernard ou Thierry en ermites coupés du monde, nous devons apprendre à faire confiance aux gens, mais pas non plus de manière aveugle. Ici se trouve la délicate alchimie permettant de jauger si l’on peut y aller ou si l’on doit se méfier, sachant qu’il faut toujours rester un peu sur ses gardes, sur la défensive, face à des inconnus. Étant donné que l’habit ne fait pas le moine (puisque même eux peuvent pour certains être de véritables pervers, interdiction du mariage et du sexe, créant la frustration de besoins naturels et vitaux, obligent), l’important est de ne pas commettre les erreurs de base en suivant les précautions d’usage et d’essayer de jauger les intentions d’une personne (étrangère ou non) qui nous sollicite pour quoi que ce soit. Pour ne pas verser dans la psychose, aider les autres mais se protéger quand même, la première des nécessités parentales est de parler et d’informer son enfant sur les risques, éventuels, qu’il pourrait rencontrer : un gamin avertit en vaut deux. Nous finissons tout de même ce point de vue critique par un « il n’arrivera sans doute jamais rien » ... mais quand même, restons vigilants et prudents !

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Catégorie : II] Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres ! Thème : 3) Se couper du monde n’est pas s’en protéger ! Fiche de visionnage n°10 : Épisode 44 (saison 3, épisode 13) – Les comptines du singe batteur

Analyse philosophique des extrêmes : L’école publique est-elle un lieu fréquentable pour des enfants ???  

Les pros : Les enfants, Mark, Les antis : Les parents Cotswolds, Cartman.

  

Thèse : L’école publique permet de se rencontrer et d’évoluer ; Antithèse : La scolarisation à domicile est plus efficace ; Synthèse : L’école forme de futurs citoyens malins !

Il était une fois à South Park la mère de Cartman qui lui apporte un cadeau. Son fils s’attend à un jeu vidéo, un laser de SpaceMan ou une poupée de Dave l’homme-grenouille, mais non ! Il s’agit plutôt des « comptines du singe batteur », une nouvelle méthode d’orthographe qui l’aidera à gagner le concours d’orthographe.

Introduction :

La scolarisation à domicile était au départ essentiellement destinée aux enfants malades ne pouvant suivre une scolarité normale, puis certains parents ont demandé et obtenu le droit de s’occuper eux-mêmes

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de l’instruction de leurs enfants. Plutôt que de faire confiance à l’école publique, un certain nombre de parents préfèrent à présent placer leurs enfants dans des écoles privées ou directement à leur domicile. La qualité des enseignements est leur première préoccupation, mais ils comptent également sur la sérénité de l’environnement de travail pour donner les meilleures chances à leurs enfants. L’école publique est un très bon endroit pour que les enfants se rencontrent, partagent leurs jeux et leurs sentiments. Malheureusement, tout est loin d’être rose dans la transmission des savoirs et les bleus sont fréquents dans la cour de récré. En somme, l’école publique est-elle un lieu fréquentable pour des enfants ???

Thèse en faveur de la socialisation par la scolarisation Pour faciliter l’intégration de l’autre, il est déjà nécessaire de le connaître, après ça le fait ou pas mais au moins on a jugé sur pièce ! Le simple fait de savoir que des enfants habitent dans le coin mais qu’on ne les voit jamais les rend « suspects » au regard des autres gamins. De fait, quand on sera amené à les croiser, si jamais c’est le cas, soit au mieux on les ignorera, soit on s’en prendra à eux pour le simple fait qu’ils sortent de la norme qui veut que tout le monde en passe par l’école. Des gamins peuvent avoir un parcours scolaire différent, mais il est important qu’ils ne vivent pas en reclus des autres enfants. Quand, lors du concours d’orthographe, la mairesse présente pour la première fois deux enfants scolarisés à domicile, Cartman ne les connaît pas et se demande ce qu’ils viennent foutre là ! Jimmy estime même que ce n’est pas juste, que des enfants scolarisés à domicile ne devraient pas avoir le droit de participer ! Kyle ignore carrément le concept de scolarisation à domicile, alors que Stan s’étonne de voir ces gamins qu’il n’a jamais vus auparavant ! Il pose d’ailleurs la question à Mark, l’un des enfants, lui demandant pourquoi on ne les a jamais vus. Ce

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n’est pas qu’ils vivent dans les bois comme Stan pourrait le penser, vu qu’ils vivent depuis toujours dans une maison à proximité, mais ils ne vont pas à l’école car ils apprennent chez eux, ce qui ne lasse pas d’étonner Stan ! Mark aussi est très curieux des autres, il demande d’ailleurs à ses parents d’aller à l’école afin de s’amuser avec les autres enfants, qui ont l’air de tellement s’éclater ! Pour sa mère c’est incompréhensible, vu que son fils a tous les après-midi pour jouer. Mais Mark veut essayer un peu l’école publique, ne serait-ce qu’un certain temps pour voir comment sont les autres enfants ! A force de tourner en rond dans un vase clos, on développe son propre univers, influencé uniquement par son entourage, qui peut éloigner de la réalité ! La réalité est une construction de l’esprit basée sur des mœurs, des codes sociaux et moraux, qui font que l’on peut échanger des idées et établir des liens avec autrui. Quand on est coupé du monde et donc façonné par un nombre restreint de source d’influence, on développe une réalité parallèle qui ne fonctionne que dans le cadre de son propre système de penser. Forcément, au moment de vouloir ou de devoir communiquer avec les autres, l’abîme se révèle et complique beaucoup les choses. Cartman va droit au but : ces enfants scolarisés, Mark et Rebecca, ont autant de personnalité qu’un gant de toilette ! Kyle demandant son nom à Rebecca, celle-ci ne sait même pas ce qu’est un nom, ce qui ne l’empêche pas d’être scotché par cette belle brunette. Quand la famille part pour aller mettre les trophées dans une vitrine, Stan hallucine comme ils sont graves, et les parents aussi, mais Kyle lorgne toujours sur Rebecca. Il se rend le soir-même chez elle. Sa mère ouvre et Kyle demande si Rebecca est là. Elle confirme, mais reste plantée là jusqu’à ce que Kyle demande à parler à sa fille. Quand celle-ci arrive, ils s’échangent les politesses d’usage, mais comme la mère reste figée sur place, Kyle coupe court à la « discussion » et s’en va, visiblement déçu. Il revient plus tard lui faire une sérénade sous sa fenêtre, chantant « Partout où je vais, Je pense à toi, Rebecca, Je ne sais plus quoi faire, Rebecca, T’es si belle, J’aimerais te connaître mieux, Que dirais-tu de sortir avec moi, Tu es vraiment trop jolie, Rebecca, Rebecca, tu es trop

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jolie, T’es un canon ». Délicate attention, sauf que Rebecca n’a rien compris : par les barreaux de sa fenêtre elle jette quelques pièces dans son étui à guitare, tel à un clochard de l’amour. Kyle en discute à la cafétéria avec ses potes, n’étant pas sûr qu’elle comprenne tout ce qu’il lui dise, comme si elle venait d’une autre planète. Toutefois il ne lâche pas l’affaire et se repointe chez elle pour lui parler d’un bal à l’école. Elle ne lui laisse pas finir sa phrase qu’elle lui propose d’aller jouer dans sa chambre et l’embarque. Son père, demandant à Mark où est sa sœur, s’entend répondre qu’elle joue au docteur avec Kyle et rejoint la chambre tout affolé. Il la somme de ne pas jouer à ces jeux pervers avec ce garçon, mais elle ne fait qu’extraire la tumeur de son cortex cérébral, au risque sinon d’une infection des marqueurs synaptiques. Son père met fin à l’opération car il est l’heure de faire ses devoirs et Kyle la relance sur sa proposition : il y a le lendemain le bal commémoratif de la Baie des cochons et il lui/se demande si ça lui dirait de venir. Elle ira, peut-être qu’ils se verront là-bas. Euh, certes, mais Kyle pensait plutôt y aller ensemble. Pour elle ce n’est pas la peine, son père l’emmènera. Kyle n’en peut plus de cette incompréhension flagrante et s’en tape la tête dénudée par l’opération contre une chaise. Il tente par la suite le tout pour le tout en lui écrivant un mot sur son chien. Ils s’assoient alors tout les deux dans le jardin du père. Kyle lui montre une petite lueur tremblotante, lui expliquant que c’est une école, où l’on trouve à l’intérieur des enfants comme elle et lui (enfin surtout comme lui, puisqu’elle – toujours autant à l’ouest – se demande comment on peut aller à l’école dans une lueur tremblotante ?). Elle qui est toujours enfermée chez elle à étudier, Kyle l’interroge pour savoir si elle n’a jamais envie de sortir. Preuve ultime qu’ils ne sont pas du même monde, elle se demande bien ce qu’il peut y avoir à part les études. Pour Kyle, il y a essentiellement l’amour, expliquant à Rebecca qui ignore également cela que c’est la chose la plus importante sur Terre. Lui tendant une perche, Kyle développe son propos en disant que quand un garçon et une fille s’aiment, ils s’embrassent, mettant leur bouche l’une contre l’autre. Rebecca croit comprendre, pour elle il doit s’agir de la même chose qu’un ami, du genre de ceux que son fournisseur Internet a très bien choisi. Kyle doit encore une fois lui expliquer la réalité, à savoir qu’à l’école publique, on choisit ses amis, qu’hommes et femmes vivent

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ensemble et se rendent heureux ! Et c’est Rebecca qui estime que Kyle vient d’un endroit bizarre ?! Pour autant, elle essaierait bien ce truc, s’embrasser, et ferait même une rédac’ dessus. Malheureusement, Kyle ne sait pas vraiment comment faire, mais plutôt que de se documenter comme propose Rebecca, il pense qu’il suffit d’essayer deux ou trois fois jusqu’à ce qu’on le fasse bien. Et justement c’était super bien fait ! Du coup elle viendra au bal avec lui sans hésitation ! A force de trop regarder la télé, on la croit sur parole et les parents, prenant peur pour leur progéniture, préfèrent la séquestrer dans une prison dorée ! Avec tous les ouï-dire que l’on entend sur l’école, on peut comprendre que des parents aient peur. Pour autant, il serait déjà bon qu’ils aillent se faire leur propre opinion des choses par eux-mêmes avant de croire toutes les rumeurs et exagérations qui circulent. En effet, même si la réalité n’est pas toujours rose, loin s’en faut, il ne faut pas non plus tomber dans la panique et penser que l’école est un coupegorge, au risque de finir cloîtré chez soi et d’empêcher ses enfants de vivre et de sortir. Et c’est bien ce qu’il se passe chez les Cotswolds, puisqu’à peine la mère apprend au père que Rebecca a eu une visite, que celui-ci pense que le concours d’orthographe était une très mauvaise idée. Certes ses enfants voulaient rencontrer d’autres gamins, mais pour le père ils ont ouvert une boîte de Pandore qu’il sera dur de fermer ! Quand Mark arrive à l’école publique, Mme Garrison annonce que ses parents s’inquiètent pour sa sécurité, raison pour laquelle il déambule dans une boule pour hamster. Cartman ne peut s’empêcher de lui demander s’il a la maladie de Travolta (il a le rôle principal dans le téléfilm The boy in the plastic bubble, où il joue un adolescent placé depuis sa naissance dans un environnement entièrement stérile à cause d’une grave maladie). Finalement, comme les parents ne peuvent rien faire pour éviter qu’on brutalise leur fils, ils vont le retirer de cette maudite école publique. Mark pourra tout de même aller au bal, mais son père viendra le chaperonner !

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Antithèse en faveur du bien-être et de l’efficacité de l’auto-éducation Certes l’école est un passage indispensable, mais il ne faut pas se leurrer non plus sur ses difficultés ! Bon nombre de parents envoient leurs enfants dans des écoles privées ou se chargent eux-mêmes des cours, estimant – à tort ou à raison – que l’environnement scolaire du publique n’est pas à la hauteur de leurs espérances. Non seulement le niveau n’est pas toujours là, mais ce qui inquiète le plus est plutôt la qualité des cours et surtout l’ambiance de travail. Si on ajoute à cela que l’école, enfin surtout la cour de récré, n’a pas forcément une bonne influence sur le comportement de ses enfants, on comprend bien la réaction de certains parents qui veulent le meilleur pour leurs enfants. Quand Mark demande à son père pourquoi il ne va pas à l’école avec les autres, son père lui explique que le public est inefficace que dangereux. Pour lui, l’école est une mauvaise chose, et il en veut pour preuve que sa femme et lui ont été scolarisés à domicile et qu’ils s’en sortent mieux que les autres dans la vie. Étant donné que Mark insiste pour essayer, rien qu’une semaine, son père veut bien l’envoyer à l’école publique. Au moins il découvrira par lui-même la violence et la perfidie qui y règnent. Heureusement que sa fille ne veut pas y aller, au moins un de ses enfants restera sain d’esprit ! C’est vrai qu’à peine Mark arrive à l’école que Mme Garrison demande aux autres enfants de ne pas être trop cruels avec lui, le ton est donc donné. A la récré, Craig et ses potes exigent qu’il sorte de sa boule pour hamster alors qu’il a promis à son père d’y rester. Stan ne peut rien faire pour lui. Butters tient sa revanche sur ses propres mauvais traitements : le scolarisé à domicile est sur leur territoire et s’il n’obéit pas à leurs lois, ils le scotcheront à un banc. Mark se demande pourquoi ils feraient ça, mais ce n’était pas des paroles en l’air ! Butters se marre : ça apprendra au petit bleu M. Je sais tout à venir frimer dans leur classe ! Il est évident que Mark n’est pas dans son monde. Quand Stan et Cartman s’engueule et se traitent de tous les noms, il est surpris d’apprendre qu’ils ne sont pas ennemis mais amis, trouvant ça curieux de voir des copains s’insulter et se battre ! Idem avec Pip, qui n’est le pote de personne : Stan lui demande de dire « s’il te plaît, tape-moi », mais il se doute que

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s’il dit ça Stan va le taper ; il rectifie, c’est si Pip ne le dit pas qu’il va le cogner, sinon il sera cool. Pip s’exécute et bien sûr se fait taper. Encore une fois, tout ceci est bizarre : les enfants semblent aimer et détester en même temps Pip ! A midi, Mark demande s’il peut s’asseoir à la table de Stan, qui lui répond pourquoi, s’il n’y a pas de place ailleurs ! Encore une fois, Kyle et Stan s’insultent et se moquent l’un de l’autre. Stan explique enfin qu’ils sont amis, mais qu’entre mecs on se vanne tout le temps. Mark analyse cela comme un marquage du territoire pour établir son rang social. Quand Craig passe et l’insulte, Mark lui renvoie que « La bave du crapaud n’atteint pas la blanche colombe, et le train de votre mépris glisse sur les rails de mon indifférence ! », genre de chose à ne pas dire. Du coup il se retrouve à nouveau ligoté sur un banc. Kyle pense qu’il aura du mal à se faire à l’école publique. D’ailleurs, ses parents s’inquiètent de ne pas le voir rentrer de l’école. Son père se demande bien ce que lui ont fait ces voyous, et la réponse est devant lui : son fils est encore scotché à un banc. Il ignore pourquoi, ça n’a absolument aucun sens, mais pour son père c’est toujours comme ça dans les écoles publiques. Par la suite, il suffira que Mark pète la gueule de Kyle, lui mettant une sérieuse branlée, pour que tout le monde le trouve cool et se l’arrache comme copain. Il est définitivement intégré, d’autant plus qu’il a assimilé le vocabulaire scolaire comme « tête de nœud » ou « pauvre naze ». Que celui qui n’a jamais rêvé d’apprendre en restant chez soi jette la première pierre, même si de toute façon il ne serait pas cru ! Pour un enfant, apprendre à domicile est le paradis sur Terre, puisqu’on joint l’utile de s’éduquer à l’agréable de rester chez soi et de gérer son emploi du temps. Même pour les parents c’est le bonheur : on partage plus de temps avec ses enfants, on les instruit en complément de l’éducation qu’on leur donne. Le plus gros avantage de la scolarisation à domicile est surtout d’avancer à son rythme, selon ses difficultés, avec toute la patience nécessaire pour que l’enfant comprenne bien ce qu’on lui demande et qu’il y réponde au mieux, sans pression du groupe. Mark explique aux enfants que ses profs sont ses parents, qu’il n’a pas besoin d’aller à l’école. Cartman hallucine et n’aurait jamais cru ça possible, pour lui c’était un rêve inaccessible, mais l’école chez soi c’est

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enfin être libre ! La preuve, quand Mme Garrison demande de quel pays venait Christophe Colomb, elle lui dit qu’il est inutile de lever la main et le traite de gros lard. Là ça suffit : Cartman en a ras-le-bol de cette classe où on le ridiculise et veut se scolariser à domicile. Il laisse les humiliations de l’école publique derrière lui, emmerde tout le monde, et rentre à sa maison se scolariser. Mme Garrison espère bien que ce soit pour toujours. En tout cas Cartman est dix fois pour : larvant dans son lit en grignotant et matant Terrance et Philip, il dit à sa mère de lui laisser le bouquin de math, il y touchera plus tard. Avec un brin de chauffage en plus, il n’y a pas à dire, l’école à domicile, c’est cool ! Contrairement à ce qu’on pourrait penser à prime abord, apprendre à domicile permet de meilleurs résultats ! La scolarisation à domicile a beaucoup évolué ces dernières années, et la pédagogie est à présent très adaptée à ce cadre quelque peu spécifique. Les manuels permettent à tous les parents, quel que soit leur niveau, de bien dispenser les cours et surtout facilitent la correction de tous types d’exercices. Au-delà de cela, comme on peut adapter l’emploi du temps au rythme particulier de son enfant, certains apprennent vite, plutôt le matin, d’autres mettent plus de temps et ont besoin de grandes pauses, l’élève peut mieux se concentrer au lieu de subir un tempo qui n’est pas le sien et le fatigue ou l’agite. Le premier concurrent du concours d’orthographe est Mark. Son mot est « Consciencieux » et il l’épelle très bien, alors que Cartman ne connaît même pas ce mot de merde. Justement il est le suivant avec le mot « Gâteau ». Il en demande la définition, de quelle langue est ce mot et même de l’utiliser dans une phrase, attendant que son singe batteur lui donne rythmiquement la réponse. Il se plante lamentablement avec son G.A.T.O.T., s’excite sur le jury parce qu’il juge qu’il a des mots difficiles puis s’en prend à son singe de merde. Alors qu’il ne reste que trois finalistes, Rebecca épelle correctement « Littoral ». S’en suit Kyle, avec le mot « Kroxeldyphivic ». La définition en est « Se dit d’une chose qui concerne ou est transmise par le kroxeldif » et dans une phrase cela donne « Kroxeldyphivic est très difficile à épeler ». Il commence par un C et se plante lui aussi, mais sûr un mot impossible. Jimbo, qui avait parié sur lui car en orthographe les juifs sont forts,

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l’engueule car il paume 50 $ par sa faute et a bien envie de lui démolir la gueule. La mairesse félicite Mark et Rebecca et les reconnaît comme la fine fleur de South Park. Stan aussi trouve que les deux qui sont scolarisés à domicile sont balèzes ! Quand Mme Garrison demande à quelle date Christophe Colomb a découvert l’Amérique, Cartman est énervé qu’on ne l’interroge jamais, mais c’est simplement parce que cette pauvre tâche ne connaît jamais la bonne réponse. Mark répond quant à lui que la date est 1492, mais précise que l’Amérique eut d’autres découvreurs, tels les Vikings et les Indiens. Mme Garrison est impressionnée : son niveau est excellent, de quoi faire redoubler tous ces petits cons ! Synthèse Comme bon nombre de structures qui concentrent l’air du temps, l’école, son personnel et ses élèves sont le reflet de la société ! Il est toujours plus facile de blâmer le dernier chaînon d’un long processus, mais c’est critiquer l’arbre qui cache la forêt. Tout comme la société refoule certains phénomènes pour mieux oublier que c’est elle qui les a engendrés, on a vite fait d’accuser l’école et la jeunesse sans trop se poser les vraies questions concernant les objectifs éducatifs et instructifs à court/moyen/long terme et les moyens qu’on y alloue pour réussir. Mais si l’on veut que l’école change, il faudra aussi réfléchir en amont sur ce qui doit évoluer dans la société en général. Puisque Mark tient tant à retourner à l’école publique, il est temps que son père ait une discussion avec les pères des autres enfants. Au bar, il attire l’attention des pères sur le fait que son fils Mark a été molesté à l’école par leurs fils. Il demande donc aux pères de dire à leurs fils que ce qu’ils font est mal et qu’ils ne doivent plus ennuyer Mark. Pour le père de Stan le problème est plus délicat puisqu’on ne peut contrôler tout ce qu’ils font à l’école. Mieux vaut donc qu’ils se débrouillent seuls ! M. Cotswolds n’est pas du tout d’accord, mais Jimbo lui propose une bière pour briser la glace, même s’il l’appelle M. Cassedalle. En fait, il a horreur de la bière, il n’aime que les vins cuits. C’en est trop, les pères le ligotent sur un banc du bar et s’en vont. A l’école, Craig explique son plan à ses potes : au bal, sans se faire repérer, dès que les

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adultes auront le dos tourné, ils coinceront le nouveau, et le scotcheront au pied du drapeau. Butters lance le mouvement pour aller acheter un gros rouleau de scotch. Juste après, au même endroit, Jimbo explique son plan à ses potes : au bal, ils s’engageront tous comme chaperons. En effet, M. Gasoil a prévu de venir aussi et dès qu’ils le verront, ils le choperont et le scotcheront au pied du drapeau. Jimbo lance le mouvement pour aller acheter un gros rouleau de scotch ! Il est bien connu que plus on maintient dans un extrême, plus on partira dans le sens opposé le jour où la bride sera relâchée ! Parce que l’enfance est l’âge où l’on teste les limites et où l’on cherche à explorer les possibilités de son monde, certains parents pensent qu’il vaut mieux protéger ses enfants contre les tentations et le mal extérieurs. Toutefois, curieux de nature et rebelles que nous sommes, il existera toujours une part de nous-mêmes que l’on ne pourra contrôler et qui cherchera à expérimenter ce qui est montré du doigt, pas forcément rien que pour embêter les grands, mais aussi et surtout pour savoir par soi-même de quoi il retourne concrètement ! Au bar, M. Cotswolds se plaint auprès du père de Kyle que son fils harcèle sa fille et il le somme de lui demander d’arrêter ça ! Cependant, pour le père de Kyle son fils découvre simplement l’amour et peut-être Rebecca aussi, et il trouve que c’est important qu’ils connaissent ça. Pour M. Cotswolds il en va tout autrement : sa fille n’a que huit ans, que peut-elle apprendre sur l’amour ? Le père de Stan intervient, estimant qu’il ne vaut mieux pas attendre qu’elle soit adolescente et qu’elle découvre tout en même temps. M. Cotswolds s’emporte : il ne donne pas de leçon d’éducation aux autres pères (quoique !), donc ils ne doivent pas lui en donner ! Au bal, alors que Mark arrive et que Craig lance l’opération scotchage au drapeau, Butters remarque que Rebecca débarque, aguicheuse comme jamais, et la trouve méga bonne dans sa tenue sexy ! Elle invite le beau brun de Token à se voir plus tard, lui pinçant les fesses au passage, puis propose à Kyle de s’envoyer en l’air. Son frère hallucine, lui demandant des comptes ! Mais Rebecca ne fait que s’éclater, ventousant Pip ! Mark la juge folle, elle ne se contrôle plus ! Il s’en prend alors à Kyle, responsable à ses yeux de ce que sa sœur est devenue. Mais finalement, après avoir claqué la gueule de

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Kyle, il montre à son père ce qu’il est advenu de sa fille : à force de lui avoir caché la sexualité, elle est devenue une vraie pute, ce que confirme Butters ! La vie est loin d’être un long fleuve tranquille, mais plus on apprend tôt à nager dans le courant, mieux on s’en sortira par la suite ! La socialisation se construit dès le plus jeune âge en étant au contact des autres, et cette étape est importante pour l’insertion sociale du jeune amené à devenir un adulte citoyen ! L’école est justement un endroit où l’on est confronté aux autres, où l’on apprend que la vie en société n’est pas toujours évidente mais quelle vaut la peine d’être vécue ! Si cet apprentissage se fait tôt, encadré par des adultes et favorisé par la transmission entre enfants, le jeune aura expérimenté les relations sociales à un âge où les conséquences de ses actes ne sont pas trop graves et sera donc rôdé pour se frotter au niveau supérieur, la société dans sa globalité ! Le soir du bal, les parents Cotswolds sont très inquiets. Le père débarque, coupe le jus de la sono et recherche ses enfants pour les emmener loin de ce lieu de perdition ! Mark se saisit alors du micro sur scène et rassure son père. Il ajoute ensuite que l’école publique a peutêtre un moins bon niveau, mais c’est le meilleur endroit pour apprendre à vivre en société : ce qui ne s’étudie dans aucun livre s’apprend avec les autres, à la récré, à la cafet’... ! Bien sûr ses parents ne veulent que les protéger lui et sa sœur afin qu’il ne leur arrive rien de mal, mais ça arrivera tôt ou tard, et ils devront s’en sortir seuls. Donc autant apprendre à y faire face dès maintenant, avant qu’il ne soit trop tard ! Son père admet et comprend ce qu’il veut dire : si c’est ce qu’ils veulent, Mark et Rebecca iront à l’école publique !

Conclusion :

Voyez, on se couchera moins bête car on a appris un truc aujourd’hui : l’école est autant un lieu d’instruction des connaissances que d’éducation au vivre ensemble !

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On peut reprocher beaucoup de choses à l’école publique, notamment son niveau pas toujours à la hauteur, mais il faut reconnaître qu’elle reste le meilleur endroit pour se socialiser, c’est-à-dire aller à la rencontre des autres et apprendre à vivre avec eux dans une microsociété. Certes nos enfants vont apprendre des autres des choses qu’on préférerait qu’ils ignorent ou que l’on souhaite leur enseigner en tant que parents avec le discours adéquat, mais il est important qu’ils apprennent également par eux-mêmes au contact de ceux de leur âge. Plutôt que d’élever ses enfants dans une bulle à l’abri du monde sauvage extérieur, il est crucial au contraire qu’ils s’y frottent et s’y piquent le plus tôt possible afin qu’ils développent leurs propres défenses pour être armés dans la vie ! Au-delà de ça, le contact avec les autres permet de définir sa personnalité en fonction des multiples influences reçues, chacun choisissant ensuite ses amis et ses « ennemis ».

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Catégorie : II] Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres ! Thème : 4) Quand en plus les religions s’emmêlent parce qu’elles s’en mêlent ! Fiche de visionnage n°11 : Épisode 108 (saison 7, épisode 12) – Tout sur les Mormons

Commentaire d’épisode : Une religion fait-elle le moine ???

Il était une fois à South Park un nouvel élève, Gary, qui débarque de l’Utah, l’état des Mormons.

Introduction :

Même si au début du XXè siècle selon Nietzsche dieu est mort (ah bon, parce qu’il était vivant ?), Sartre considérait que le XXIè siècle serait spirituel ou ne serait pas ! L’opium coule dans les veines des peuples depuis des millénaires et recouvre une foultitude d’aspects les uns plus spectaculaires ou incompréhensibles que les autres ! A l’heure du matérialisme à tout va et du fondamentalisme de nombreuses religions pour protéger leur identité cultu(r)elle, nous devons nous interroger sur le sens profond du verbe « croire » conjugué au gré des (in)tolérances religieuses. Alors que nous sommes naturellement dans le rejet de la nouveauté avant de l’avoir cernée, il est nécessaire de se questionner sur la différence d’opinion qui anime l’autre pour tenter de le comprendre dans ses spécificités. C’est alors seulement que l’on peut voir qui se « cache » derrière le livre de prière. En somme, une religion fait-elle le moine ???

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On ne se connaît pas, mais c’est très bien comme ça Quand on est un bleu nouvellement arrivé dans une ville, qui plus est en cours d’année scolaire, tous les regards se tournent vers vous et c’est loin d’être évident de se faire sa place parmi les autres. Autant on peut considérer que la nouveauté créée de la curiosité, autant l’autre restera durant un certain temps un étranger que l’on va jauger puis juger à l’aune de ses capacités d’adaptation et d’intégration. C’est malheureux, mais c’est ainsi, toujours est-il que le nouveau (par)venu est à priori connoté négativement, démarrant au bas de l’échelle avec tous les stéréotypes de celui qui n’est pas du coin. Ce sera ensuite à lui, par des rites de passage et des épreuves tests, de montrer qu’il n’est pas différent ou alors que ses spécificités apportent un plus à la communauté originelle. C’est alors seulement qu’il pourra être adoubé, mais après un long et difficile parcours du combattant. Quand Gary arrive, M. Garrison le présente exactement comme il ne faut pas faire puisqu’il le met en avant et valorise ses performances (ce qui induit fatalement un dénigrement des locaux) : dans l’Utah, il était champion de lutte et de tennis, il a toujours eu 18 de moyenne dans son ancienne école et a tourné deux pubs importantes pour du dentifrice. Il a beau se montrer aimable (mais chez les enfants il ne faut pas trop en faire) en se déclarant ravi d’être là et de rencontrer plein de nouveaux camarades avec qui partager de belles expériences, Kyle trouve d’entrée de jeu que c’est un connard et Stan confirme qu’il le gave déjà (on aurait plutôt pu penser ça de Cartman, mais c’est un sentiment partagé par bon nombre d’enfants). Dans la même veine, quand M. Garrison le fait asseoir à côté de Cartman, celui-ci se décale et dit s’appelle Tumla, Tumla Chlagrappe ! Commençant le cours, M. Garrison demande quand l’homme se posa pour la première fois sur la lune et Gary s’empresse de donner la bonne réponse (1969 pour ceux qui ont oublié). Gary fait ainsi tout ce qui faut pour être mal vu, puisqu’on n’aime pas trop les têtes d’ampoule, d’autant plus quand M. Garrison enfonce le clou en faisant remarquer aux enfants qu’il a enfin autre chose que des attardés dans sa classe. Évidemment, à la récré les esprits sont échauffés : pour Kyle le nouveau est définitivement un connard, même Butters s’y met en le

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traitant de tête de nœud, et bien sûr Cartman ne manque pas de proposer de le remettre à sa place (de petit nouveau qui n’est rien dans un jeu de quille). Selon lui c’est à Stan de lui casser la gueule, encouragé en cela par Clyde. Stan s’interroge tout de même de savoir quoi faire si Gary refuse de se battre, mais pour Cartman l’important est qu’il saigne, bizutage justifié par Kyle pour qui Stan doit lui arranger sa tronche de premier de la classe. Cartman le traître pousse au crime en appelant Stan à le tuer, mais propose de suite de miser 5 $ sur Gary. Pourtant, l’autre a l’air d’être bien On dit que la première impression n’est pas la meilleure, mais souvent ce sont aussi les premiers préjugés qui sont loin d’être justifiés. Que ce soit flagrant ou pas, il y a le paraître et l’être : on a donc ainsi vite fait de cataloguer quelqu’un sur des détails qui peuvent sembler marquer profondément la personnalité puis se rendre compte, à l’usage, que l’apriori était l’arbre parasité qui cachait la forêt enchantée. L’important à ce moment-là est de savoir admettre qu’on s’était trompé afin de pouvoir envisager les aspects du rapport social sous un autre angle plutôt que de continuer à faire semblant de n’avoir rien vu pour rester fidèle au groupe et à sa pression collective. On le voit avec Stan qui arrive vers Gary, ce dernier lui proposant de jouer au ballon, alors que Stan veut lui péter sa gueule ! Gary ne se laisse pas démonter (enfin si, mais bon bref) et comprend de suite que si Stan veut le taper c’est parce qu’il est nouveau et que peut-être il le mérite. Pour lui c’est dur de changer de ville, et il est prêt à accepter les rites d’initiations parce qu’il trouve les south-parkois cools. Le groupe (et Butters en particulier, chacun son tour de se prendre une raclée, que ce soit pas toujours les mêmes qui trinquent) met la pression sur Stan. Gary veut bien être conciliant vu que le groupe regarde, et il est prêt à se faire casser la figure en ne se défendant pas. Il espère juste qu’après ils deviendront quand même copains. Kyle et Cartman s’inquiètent de savoir ce qu’ils foutent puisqu’ils ne font que parler. Quand Stan revient, il répond tout penaud qu’il est invité à manger chez Gary le soir, qu’il est vraiment très gentil. Évidemment Cartman s’emporte en lui balançant qu’il devait lui botter le cul, pas le lui lécher, et Kyle se

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demande bien quel genre de famille peut avoir un mec comme ça ! Justement, il s’agit d’une famille heureuse et unie avec cinq enfants. Ils aiment leur famille, la meilleure, et d’ailleurs si un jour il y avait un concours, leur famille le gagnerait, tout comme la mère serait nommée meilleure maman du monde ! Et en plus ils sont généreux : ayant fait du riz soufflé, ils en gardent pour aller en donner aux pauvres. Quand Stan retrouve ses potes, Cartman lui demande de suite si son rencard avec le nouveau était bien. Mais Stan défend Gary : sa famille est géniale et lui est sympa et intelligent. Bien sûr Cartman ne peut pas comprendre et revient à la charge en affirmant que Stan est amoureux. Même Kyle se demande s’ils sortent ensemble ! Mais Stan a le droit d’avoir d’autres potes, et ses copains historiques doivent lui laisser une chance. Quand Gary arrive, Cartman ne loupe pas l’occasion de dire que voilà la petite amie de Stan : il faut dire qu’ils sont trognons quand on voit que Gary a fabriqué un porte-monnaie pour Stan (qui avait perdu le sien) où il a gravé une image de John Elway (alias The Duke : joueur de football américain évoluant au poste de quarterback chez les Broncos de Denver, le seul à avoir participé à cinq Super Bowl comme titulaire et qui en gagna deux). Gary et sa famille vont ensuite chez les pompiers donner leur sang. Ils débarquent, tous maquillés (en lion, en extra-terrestre). Cartman, et les autres, hallucine complet ! Quand Gary demande à quoi ils veulent jouer, Cartman, Kyle et Kenny s’en vont, préférant les laisser en amoureux. Officiellement, mais ironiquement puisque c’est Cartman, ils vont au foyer des sans-abri en tant que bénévoles. Gary, trop bon, mais trop con aussi, le croit et il fera ça le lendemain. Les Harrison peuvent nous sembler bizarres, mais ils sont vraiment des gens bien. Pareil que pour Stan dans la cour de récré, quand son père débarque chez ses nouveaux voisins pour se plaindre de leur prosélytisme, il se fait attendrir en moins de deux, notamment avec le délicieux riz soufflé au chocolat de la mère de Gary. Ils lui proposent d’en goûter un morceau...ou six ! Quand le père de Stan rentre à la maison, son fils lui demande si ce Mohamed Ali va mieux après avoir cassé la figure de M. Harrison ? Beh, en fait ils viennent dîner chez les Marsh, exactement le même effet que Stan dans la cour de récré. On ne peut rien leur reprocher, c’est vraiment une famille géniale : vu qu’ils refusent la télé, ils se parlent et font de la musique. Alors que chez Stan, ils ne passent

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pas de soirées sans télé à faire des trucs ensemble (le père a beau tenter de se justifier avec les soirées bières du vendredi, mais c’est juste lui et ses potes) et sa sœur le traite sans cesse de merdeux. Les Marsh retrouveront enfin le goût d’une vraie soirée en famille, sans télé, quand ils deviennent mormons. La religion peut embrouiller les rapports humains Tout ceci peut être jugé trop beau pour être vrai, et certains ont vite fait d’imaginer qu’il y a anguille sous roche quelque part. Le pot au (voir la vie en) rose est découvert au niveau de ce qui est le plus intime à chacun : la foi ! Dès lors que l’on parle de religion, l’esprit humain se déconnecte de la raison pour ne laisser s’exprimer que la passion (du Christ ou d’autres, peu importe le personnage). Quels que soient les fondements d’une religion et les valeurs véhiculées, on en revient tôt ou tard à la notion de croyance en quelque chose de crédible voire palpable, ce que ne peut bien naturellement pas offrir une religion, puisqu’elle se base sur la perception personnelle d’une présence ou d’une volonté supra-humaine invisible. En bref, tout ce qu’il faut pour ne mettre personne d’accord. Déjà, pour le commun des mortels, force est de constater que la religion mormone est franchement conne à prier du foin ! Quand le père de Gary propose de lire un peu du livre de Mormon, il se demande bien ce que c’est. M. Harrison lui explique que c’est le bouquin que Joseph Smith a trouvé. Stan ne connaissant pas « l’homme le plus important du monde », le père de Gary lui lis alors son histoire. « Joseph Smith, le prophète Mormon, habitait une petite ville d’Amérique au début des années 1800. On le considérait comme un fou, étant donné qu’il prétendait avoir parlé avec Dieu et Jésus. Même sa femme ne le croyait pas, alors qu’il leur avait pourtant parlé. Un jour, dans la forêt, il priait Dieu, Lui demandant s’il fallait être protestant, catholique ou autre chose quand soudain, Dieu et Jésus lui apparurent et lui dirent de fonder sa propre église car toutes les autres étaient dans l’erreur. Pourquoi inventerait-il cela ? Ainsi bien des gens le croiront. Un ange vint dans sa maison. « Bénissez ma mère et mon père, apportez-nous chaque jour de quoi bien manger...Je m’appelle Moroni, je suis un natif Américain / Un

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natif Américain ? Mais vous êtes blanc. / Avant, tous les natifs Américains étaient blancs. Nous sommes venus ici depuis Jérusalem et nous avons reçu la visite du Christ. / Jésus est venu en Amérique ? / Oui, et finalement, mon peuple fut tué par les autres tribus d’Israël. En punition, Dieu colora leur peau en rouge. Ce sont les natifs Américains que tu connais. Il y a un livre enterré près d’ici, écrit sur de l’or. Il conte l’histoire de mon peuple. Avec le livre, il y a deux pierres de voyant : l’Urim et Thummin, qui permettent de traduire le livre. Trouve-les et accomplis ton destin ». Ainsi, Joseph Smith trouva un autre nouveau testament de Jésus Christ. « Hier soir, un ange natif Américain m’a dit où trouver cet autre testament. Je suis allé dans la forêt... J’ai creusé à l’endroit indiqué par l’ange.... Peut-être qu’en fait, il n’y a rien. Une seconde. Qu’est-ce là ? Dans le caisson de granit, je trouvai les deux pierres de voyant. Et dessous, quatre plaques d’or, couvertes d’une étrange écriture. L’Évangile que Jésus donna aux Néphites ! Ce que je voyais était extraordinaire. / Bien, mais où sont-elles ? / Où sont quoi ? / Les pierres et les plaques d’or. / Je n’ai pas eu le droit de les prendre. Après que j’eus trouvé les plaques, l’ange Moroni m’apparut à nouveau et m’interdit de montrer les plaques d’or ou les pierres à qui que ce soit. Car, avant et afin que chacun puisse les lire, je dois en faire la traduction. (Sion Sion Sion Sion : le Mont Sion est une des collines de Jérusalem souvent prise comme symbole de la ville trois fois sainte. Ainsi, le mot hébreu « Sion » est le nom de la colline sur laquelle Jérusalem fut bâtie, le noyau originel et plus ancien de la ville. Elle se dresse le plus à l’Est de la ville, entre les vallées du Cédron et du Tyropoeon. Les Jébuséens, fondateurs de la ville, habitaient le mont Sion où ils avaient bâti une forteresse. C’est cette ville fortifiée que David, roi d’Israël, a prise autour du -XIIè siècle pour y établir son palais. Le Mont est aussi le lieu traditionnel du cénacle, la « chambre haute » dont parlent les Évangiles et les Actes des Apôtres, où se déroulèrent la Sainte Cène, la Pentecôte et d’autres événements importants des premiers temps de l’Église). Ils le crurent sans poser de questions. « Qu’attendez-vous de moi, M. Smith ? / Pouvez-vous garder un secret ? / Certes oui. / J’ai en ma possession un livre écrit sur des plaques d’or qui raconte la seconde venue du Christ, ici, en Amérique. / En Amérique ? Ça me paraît très... (Con Con Con Con Con) / C’est

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pourtant vrai. Je vais traduire ces plaques et publier un livre que le monde entier pourra lire. Et vous êtes très riche, M. Harris. Je compte sur vous pour payer les frais de publication. / J’hésite... Comment allezvous le traduire ? / Avec ceci. / Des galets ? / Pas des galets : des pierres de voyant, qu’un ange me donna. Ainsi, Dieu m’offre le pouvoir de traduire les plaques. Tenez, vous écrirez sous ma dictée. J’ai déposé les plaques d’or dans ce chapeau. Seule la lumière divine doit les éclairer. / Vraiment ? / Grâce aux pierres de voyant, l’ancien texte s’illuminera et ainsi, je pourrai le traduire. Oui, je vois la lumière...Très bien, veuillez écrire. Car ainsi il arriva...que le Christ apparut...devant les Néphites... » Ainsi fut écrit Le livre de Mormon. Lorsqu’ils eurent terminé, M. Harris emporta quelques pages du futur livre de Mormon chez lui et montra à sa femme la traduction. « Joseph Smith a mis sa tête dans le chapeau et il a traduit les plaques d’or. J’ai tout noté et nous allons publier un livre. / Êtes-vous sûr que ce n’est pas pure invention ? Peut-être a-t-il fait semblant de lire ces plaques. » Lucy Harris n’était pas conne. « Pourquoi aurait-il fait cela ? » Mais Martin Harris quel con. « Très bien, écoutez, je vais cacher ces pages. Si Joseph Smith les a réellement traduites, il pourra recommencer. Mais s’il a tout inventé, sa nouvelle traduction sera différente ! / Je parie qu’il n’aura aucun problème. » Martin annonça à Smith la disparition des pages. Il dit « ces pages sont sacrées Je suis furibond. / Je suis navré d’avoir perdu ces pages. Je suis prêt à tout réécrire, si vous retraduisez les plaques. / C’eut été volontiers. Mais j’ai eu une vision. Dieu se disait très fâché contre moi de vous avoir laissé ces pages. / C’est vrai ? » Con Con Con Con Con. « Oui, et sa fureur est telle qu’Il ne veut plus que je traduise la plaque de Lehi. Il a dit : "Tu devras traduire la plaque de Nephi" Ce sera la même histoire mais écrite différemment. / Si Dieu est furieux après vous, vous devez dire la vérité. » C’est ainsi que cela se passa. Après que Stan ait parlé de cette lecture à son père, il se rend chez les Harrison. N’ayant jamais connu de Mormons, il ne sait pas en quoi ils croient et sa curiosité le travaille. Il demande alors au père de Gary de lui expliquer qui était ce Joseph Smith et s’ils pensent vraiment cette loufoquerie que selon Smith les natifs Américains étaient des blancs venus de Jérusalem ? Le père de Gary lui explique l’histoire de l’ange Moroni et des plaques d’or. Mais alors que Stan était curieux de savoir comment

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Smith avait traduit les plaques, il n’en garda pas moins un sens critique et non de béni oui-oui comme son père ! Il tente d’ailleurs de le réveiller en lui rappelant quand même que Joseph Smith a lu le livre de Mormon dans un chapeau, et que ce bouquin dit des tas de trucs zarbis, du genre Adam et Ève vivaient dans le Missouri. Stan a bien raison de souligner qu’à l’école on dit que l’humain vient d’Afrique. Mais pour son père (certes géologue mais souvent peu scientifique dans sa façon de penser), il ne faut pas croire tout ce qu’on dit à l’école. Son père lui fout d’ailleurs la honte quand les Harrison arrivent en leur disant que Stan a un problème avec leur nouvelle religion. Ce qui l’étonne c’est que les Mormons connaissent l’histoire et qu’ils croient que c’est un prophète. Pour eux l’histoire le prouve, mais Stan pense (à raison pour beaucoup de gens sains d’esprit) qu’elle prouve surtout qu’il a tout inventé ! Pour les Mormons c’est une question de foi, pour les normaux ça tient surtout de la logique : si on dit des trucs bidons sur Adam et Ève dans le Missouri et les natifs Américains de Jérusalem, il faut des preuves, alors que les Mormons n’ont que les histoires d’un abruti sur des plaques qu’il cachait et qu’il ne pouvait pas traduire deux fois pareillement. Mais Stan se fait vite remettre en place par son père : il ne doit pas dénigrer leur nouvelle religion ! Pourtant, le moins qu’on puisse dire, c’est que le père de Stan était loin d’être favorable à ce mouvement religieux ! Il faut dire que dès que l’on parle de religion, on croit tout de suite que l’autre fait du prosélytisme. Ainsi, quand Stan demanda à son père pourquoi il ne lui avait jamais parlé de Joseph Smith, d’une il lui expliqua que Dieu et Jésus ne parlent pas réellement avec les gens, puis il crut que les nouveaux voisins, les Harrison ayant dit à Stan qu’aucune religion n’était bien, étaient des intégristes. Quand Stan raconte en outre que les Harrison lui ont dit de suivre le plan de Dieu (dont le gamin ignore la teneur), le sang du père ne fait qu’un tour ! Pour lui, le voisin bourre le crâne de Stan avec sa religion à la con, et il a tort. Les gens des sectes, il faut les arrêter tout de suite. Après avoir tout de même vérifié que M. Harrison est un blanc, il s’en va botter le cul de connard de fanatique religieux, qui ose dire à son fils ce qu’il doit croire. Il se demande bien si son poing dans son cul, ça va lui plaire ? Toutefois, il faut bien voir que les vrais religieux savent qu’ils ont raison et seule leur exemplarité pourra faire évoluer les autres, pas leur propagande

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prosélyte ! Quand le père de Stan débarque chez les voisins, ces derniers comprennent de suite qu’il a cru qu’ils voulaient le convertir. Il faut dire qu’ils viennent de l’Utah, où il n’y a pratiquement que des Mormons, et qu’ils ont oublié que ça peut choquer. Pour eux qui s’excusent platement, le père de Stan doit être furieux que son fils lui ait parlé d’idées religieuses différentes. Les Harrison sont vraiment navrés, ça ne se reproduira pas. A chacun sa foi : ils ne veulent pas imposer leur religion et leurs croyances ne valent que pour eux ! Rentré chez lui, le père de Stan change du tout au tout : les voisins sont des gens charmants, leur famille est unie et heureuse. Comme il le dit lui-même, suivi en cela par Stan, il y a un truc dans leur religion qui leur donne de bonnes valeurs. Du coup, toute la famille Marsh se convertit et devient mormone. Toutefois, après que Stan ait compris l’histoire complète du livre de Mormon, il ne veut plus en être. Pour M. Harrison ce n’est pas grave puisque chacun croit en ce qu’il veut, et c’est bien d’avoir sa propre foi ! Mais pour Stan tout ça craint : ils sont trop gentils et ce n’est pas normal. Il considère tout ça comme de la pub pour leur religion pour piéger les gens un peu cons comme son père (ce que l’intéressé confirme). Quand Stan rejoint ses anciens potes, il ne veut plus entendre parler de Gary. Cartman est « triste » qu’ils aient rompu. Quand son « ex-petite copine » arrive, Gary dit à Stan qu’il ne veut plus être son pote et s’en explique. Peut-être que les Mormons croient des trucs idiots et que Joseph Smith a tout inventé. Mais il a une vie et une famille géniales grâce au livre de Mormon. Il s’en fout si Joseph Smith a tout inventé, ce qui est important c’est que son église dit juste d’aimer sa famille, d’être gentil et serviable. Alors, même si beaucoup trouvent ça stupide, il a envie de continuer à y croire. Lui qui voulait juste être l’ami de Stan est affligé : se croyant supérieur et plus intelligent, tout ce que ce dernier a vu c’est sa religion. Stan a encore beaucoup à apprendre. Pour finir, il lui pisse à la raie ! Cartman achève tout le monde en s’extasiant, après un sacré blanc : « Putain de merde, qu’est-ce qu’il est cool ce mec ! »

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Conclusion :

Voyez, on se couchera moins bête car on a appris un truc aujourd’hui : la religion est un sujet délicat, propre à faire tourner les crucifix, les kippas et les mains de Fatma (et autres grigris, il n’y a pas que les religions du livre dans les têtes) ! Dès que l’on effleure un tant soit peu ce thème, tout le monde se met sur la défensive. Qu’on le veuille ou non, l’Histoire humaine nous a programmés pour croire ! Au départ, essentiellement pour nous donner des règles de vie en groupes sociaux de plus en plus grands/étendus et complexes, mais aussi pour nous rassurer sur notre mort (anthropologiquement dans ce sens, contrairement aux idées reçues). Même si nous sommes forcément tentés de comparer, nous devons surtout bien nous garder de juger. Certains dogmes peuvent paraître stupides, mais il faut savoir regarder au-delà ! Nous devons bien sûr faire attention aux groupes religieux pratiquant la propagande spirituelle, mais l’aspect crucial est de « juger » le croyant sur ses actes, pas sur ses croyances ! Ce qui est important est de voir ce que sont devenus les croyants et pratiquants : s’ils ont un meilleur comportement en société et famille, tant mieux pour eux, et pour nous aussi !

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Catégorie : II] Pour vivre heureux, ne vivons pas cachés les uns des autres ! Thème : 4) Quand en plus les religions s’emmêlent parce qu’elles s’en mêlent !

Fiche de visionnage n°12 : Épisode 42 (saison 3, épisode 11) – Ethernopiens dans l’espace

Analyse philosophique des extrêmes : Y a-t-il instrumentalisation de la solidarité, notamment par la religion ???

 

Les pros : Pascal la dalle, les enfants, Les antis : Sœur Hollis, CBC.

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Thèse : Les cathos mènent une guerre commerciale en Afrique ; Antithèse : D’autres sont plus philanthropes ; Synthèse : Les missionnaires sont partout, mais mal vus !

Il était une fois en Afrique un Marklor qui approche de Marklor. Il procède au Marklor et établit un premier contact. Même s’il vient en Marklor, il se fait bouffer par des lions.

Introduction :

La générosité et l’aide aux plus démunis sont les fondements de bon nombre de religions, le christianisme en premier lieu de par le message de pauvreté de Jésus puis par les actions de St François d’Assise.

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L’Afrique, terre fertile en misère, est depuis longtemps – avec l’arrivée des blancs – un contient propice à la solidarité. Quand les premiers colons sont arrivés, ils emmenèrent avec eux des missionnaires afin de propager la « vraie foi », celle en Jésus. Alors que les locaux avaient une vie, des valeurs et une spiritualité « primitives », les blancs considéraient qu’il était de leur devoir d’inculquer aux noirs les bienfaits de la civilisation et de tout ce qui s’y rapporte. De nos jours, de nombreuses organisations s’occupent d’aider les Africains, certaines à caractère humanitaire pur et d’autres avec des arrière-pensées. Les missionnaires cathos sont souvent jugés comme calculateurs car l’on doit se plier à leurs règles pour bénéficier de leurs bienfaits, alors que d’autres viennent en aide gratuitement. En somme, y a-t-il instrumentalisation de la solidarité, notamment par la religion ???

Thèse en faveur de l’évangélisation à marche forcée Dans les guerres de colonisation des religions, le sabre montre vite ses limites, là où le goupillon est toujours utilisé pour purifier à l’eau bénite les âmes à conquérir ! Tout comme une entreprise, une religion a besoin de communiquer autour de son offre spirituelle afin de se développer en conquérant de nouveaux marchés de la foi. A notre époque de globalisation, tout est bon pour étendre sa pénétration sur des secteurs émergents. Ainsi, la conversion des âmes païennes se fait à grand renfort de communication et de propagande en encensant la vie de Jésus. Dans un camp de pauvres en Afrique, seule l’église est belle. Sœur Hollis est venue comme missionnaire en Afrique pour parler aux païens des enseignements de son seigneur Jésus. Les religieux leur ont offert des bibles, mais malheureusement elles ne se mangent pas, elles se lisent ! Pour faire comme dans les autres pays déjà convertis, sœur Hollis propose aux locaux de confesser leurs péchés, même si personne ne semble pressé d’y aller. Qu’à cela ne tienne, la lecture du psaume 46, verset 39sera toujours « utile ». Même sur la planète Marklor, entourée

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de tant d’âmes à ramener dans le droit chemin, sœur Hollis effectue sa mission. Elle rappelle à ses amis extraterrestres qu’elle est là pour apporter la parole de Jésus, mort pour leurs péchés ! Ce qui étonne bien Marklor qui se demande qui est Marklor. Une religion ne fait jamais de social gratuitement, le but inavoué étant toujours de formater les nouveaux convertis selon ses principes religieux et ses valeurs de vie en communauté ! Sous couvert de solidarité envers les plus démunis, la religion instille son venin dans les esprits de ceux qu’elle est censée aider par simple charité bien ordonnée ! Comme rien n’est gratuit, les cathos comptent bien avoir un retour sur investissement rapide et efficace : en échange de leur aide, ils estiment que l’on doit se convertir et donc se plier aux valeurs et mœurs de leur religion ! Ainsi, sous la forme d’un chantage alimentaire, la religion entend bien rémunérer son action fondamentalement caritative, puisque c’est la moindre des choses d’aider des créatures de dieu, en ayant de nouveaux membres, parfaitement éduqués à ses principes ! Sœur Hollis offre justement un cadeau à l’un des Africains, mais encore une fois ça ne se mange ! Il s’agit en fait d’une croix, avec le nom de chrétien de la personne, qui s’appelle dorénavant Michel. Évidemment, puisque les Ethernopiens « parlent » en clics, Michel ne peut prononcer le nom qu’il s’est vu affublé, mais la sœur est sûre qu’il y arrivera un jour. De toute façon ces pauvres gens n’ont pas le choix. Ils doivent bien se souvenir que Lire la Bible + Accepter Jésus = Nourriture ! Souhaitant que Pascal lise Marc, 3.19 dans la langue de dieu, l’américain, celui-ci en a marre et s’en va. Sœur Hollis se désole qu’il retourne vers une vie de péché. Il doit comprendre que si lui et son peuple n’acceptent pas Jésus, ils sont voués à brûler éternellement dans les flammes de l’enfer ! A force de se concentrer sur l’expansion de ses parts de marchés, la religion catho en oublie sa mission première ! Afin de combler le moindre « vide spirituel », les cathos se dépensent et dépensent sans compter pour occuper un maximum de terrain, construisant à tour de bras des églises et autres éléments

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importants dans leur quête de nouveaux fidèles. Malheureusement, au lieu de faire leur travail à fond dans quelques endroits, ils se dispersent partout à la fois avec des résultats plus que moyens. En outre, pour continuer leur expansion, ils réclament et perçoivent des fonds considérables, souvent plus utilisés pour entretenir leur système d’implantation à tout va que pour aider ceux à qui c’était initialement destiné ! Afin d’évangéliser les extraterrestres de Marklor, la chaîne catho CBC propose que ses 600 clubs envoient de l’argent pour construire un croiseur interstellaire. Alors que les enfants et les Ethernopiens sont dans le vaisseau spatial qui doit les mener sur la planète Marklor, le croiseur de sœur Hollis Missionnaire 600 ouvre le feu sur eux avec leurs lasers afin qu’ils fassent demi-tour. Toutefois, l’alliage du vaisseau des enfants est trop solide pour leurs lasers. CBC lance alors un nouvel appel à l’aide concernant un laser à cristal d’Argon, laser qui perce des blindages qu’un laser classique n’égratigne même pas. Les téléspectateurs doivent donc envoyer des sous ! Plus tard, alors que sœur Hollis a les infidèles en joue, elle se fait tirer dessus par des torpilles à photons ! CBC informe ses ouailles cathodiques que leurs boucliers déflecteurs sont inefficaces contre les torpilles à photons. Dans les 600 clubs, on attend leur argent pour répandre la parole de Jésus et installer des boucliers plus puissants sur leur vaisseau. Que les fidèles envoient des sous, et ils recevront un pin’s gratuit ! Malheureusement, ces efforts ne suffisent pas face à la guerre technologique qui se livre dans l’espace. Sally Struthers, vedette de l’humanitaire africain, a un Tiberian Junker, le vaisseau préféré des Hutts, et elle a pris le vaisseau catho dans un ... rayon tracteur positronique. Il faut donc un disrupteur ionique de traction, pas un disrupteur ionique classique, mais un disrupteur ionique négatif pour répandre la parole de Jésus. Antithèse en faveur de la solidarité par la simple charité Alors que la religion s’éloigne de sa mission de solidarité, heureusement d’autres ne la perdent pas de vue ! Heurtées par le côté prosélyte de la religion où le malheur des uns fait son bonheur, des organisations non gouvernementales et d’autres

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structures ont décidé de prendre les choses en main et de vraiment s’attaquer au problème de la pauvreté. Pendant que la religion catho se débat avec ses concurrents religieux voire des mouvements plus ou moins sectaires, des organismes vraiment caritatifs n’oublient pas leurs fondements et font tout ce qu’ils peuvent pour aider autrui ! Alors que les enfants sont sur le point d’exploser le vaisseau des cathos, une défaillance des boucliers survient car ils sont pris dans le rayon tracteur du vaisseau de Sally Struthers. Cartman, qui l’avait déjà rencontrée dans un autre épisode, lui lance une belle supplique ! Il lui rappelle que sa fondation sert une noble cause, aider de pauvres affamés qui vivent dans un pays pourri. Elle a aidé tellement de gens, et c’est ça qui compte : aider les autres ! Ce que les enfants veulent, pour les mêmes raisons, c’est aider leur pote Pascal. Cartman la fait craquer en la séduisant : tout ce qu’ils veulent, c’est être comme elle ! Elle relâche alors leur vaisseau et capture dans son rayon celui des cathos. Parce qu’elle a tout gobé de ce qu’à pu lui dire Cartman, elle a sauvé Pascal et son peuple ! De tout temps des peuples ont émigré pour voir si l’herbe était plus verte dans le pré du voisin et bon nombre de pays se sont développés ainsi ! Un certain nombre de grands pays ont été littéralement colonisés par des peuples vivant une grande précarité sur leurs terres. Malheureusement, ne pouvant accueillir toute la misère du monde, beaucoup d’entre eux ont mis en place des barrières très sélectives afin de trier ceux qui peuvent s’installer sur place de ceux qui doivent retourner dans leur pauvreté. Heureusement, il reste encore quelques pays où l’on considère qu’il y a de la place et de la nourriture pour ceux qui en ont besoin et qui n’oublient pas comment les émigrations les ont aidés à devenir des nations grandes et fortes ! A proximité de l’opéra de Sydney, se pose un OVNI d’où débarque un effrayant extraterrestre, qui n’est en réalité que Pascal la dalle. Le maire, pressé par ses administrés, souhaite à ce grand et noble extraterrestre la bienvenue sur sa belle planète Australie, salué par un vif « Hip hip hip Hourra ! ». Pascal sort alors une feuille de papier et dessine. Le maire comprend que son espèce veut émigrer en Australie et

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il lui confirme qu’ils seront les bienvenus ! Dans notre monde où tout est question d’argent, il reste heureusement des gens qui sont capables d’aider sans attendre de contrepartie ! Alors que nos sociétés occidentales dites modernes sont hyperindividualistes, la notion d’hospitalité signifie encore quelque chose pour certains humains ! Pour eux, tout le monde se doit d’aider qui que ce soit, d’où qu’il vienne, qui est dans le besoin. Cette forte solidarité, étonnamment pour nous, se veut purement gratuite et n’attend absolument rien en retour : il s’agit simplement d’humanisme et d’acte de philanthropie. Peu de religieux le pratiquent encore, mais certains vrais croyants et d’autres considèrent que c’est leur devoir d’aider s’ils le peuvent ! Après que les enfants aient retrouvé leur vieux pote Pascal la dalle, celui-ci les convie dans son vaisseau spatial. A la recherche d’un endroit pour accueillir son peuple, Cartman appuie sur un bouton et ils rentrent dans un trou de verre qui les emmène sur une autre planète magnifique, plantée d’arbres. Un extraterrestre se présente à eux, leur souhaitant la bienvenue sur Marklor. Pascal scrute ce monde et le trouve à son goût. Marklor, leader des Marklor, remercie les enfants d’avoir ramené son Marklor (vaisseau). Pour information et répondre à Kyle, il est nécessaire de préciser que sur la planète Marklor, les êtres, les lieux et les choses s’appellent Marklor. Kyle explique que Pascal la dalle et son peuple habitent un endroit vraiment craignos sur Terre, qu’ils n’ont rien à bouffer là-bas parce que rien n’y pousse. Pour Stan, ce serait cool qu’ils puissent venir vivre sur cette planète. Il n’y a pas de problème pour Marklor, il y a assez de place pour tous sur Marklor. Si ce Marklor veut vivre avec son Marklor sur Marklor, ils sont d’accord. Il suffit qu’ils reprennent le Marklor qu’ils viennent de rapporter, qu’ils retournent sur Marklor et que Pascal ramène son Marklor. Alors qu’ils ramenaient les Ethernopiens, ces cons de cathos, de CIA et de Sally Struthers ont suivi. Ça piaille dans tous les sens, mais Kyle peut tout expliquer à propos des cathos qui sont en mission de prospection et des Ethernopiens qui les fuient sur Marklor pour vivre mieux et sans religieux ! Ces Marklors veulent changer leurs Marklors. Si les

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Marklors émigrent, ça craint pour leurs Marklors car ils forcent les Marklors à croire en leur Marklor. S’ils restent sur Marklor, ils construiront plein de Marklors, remplaceront les Marklors des extraterrestres par leurs Marklors. Kyle demande de laisser les Marklors vivre là et prospérer sans Marklor, Marklor ou Marklor ! Marklor juge que le Marklor de ce jeune Marklor est sage et juste, et il autorise que les Marklors restent ! Synthèse Dans leur quête d’expansion, les missionnaires pullulent aux quatre coins de la Terre pour répandre la « bonne parole ». Telle une pieuvre, les missionnaires cathos étendent leurs tentacules sur tous les continents. Afin d’accentuer et de protéger leurs implantations ou pour griller sur le fil des concurrents, ils multiplient leur présence, testant au passage les difficultés de conversion des peuples qu’ils rencontrent. La multinationale Christ Company développe son réseau local, et bientôt toute la planète sera couverte par ses franchises ! Alors que Pascal la dalle cherche un endroit sans missionnaire, Kyle lui dit de ne pas aller au Mexique où il y en a plein, Cartman déconseille l’Utah où il n’y a que ça, mais Stan se rend compte qu’il a essayé partout dans le monde. Heureusement, ils ont découvert une autre planète, super belle où les Ethernopiens peuvent aller vivre là-bas ! Toutefois, dès que sœur Hollis apprend cela, elle s’empresse de savoir si ces extraterrestres connaissent la parole du Christ ! Même si Cartman lui dit qu’ils n’ont pas besoin de ça car ils sont parfaits, la missionnaire se désole de ces pauvres âmes et veut absolument les évangéliser. Pour Kyle il faut vite partir pour Marklor avant les missionnaires. Mais la nouvelle circule vite : la chaîne catho CBC informe qu’une planète, située dans la galaxie Alpha Séti 6, abriterait une forme de vie intelligente et que s’ils ignorent tout de ces êtres hyper intelligents, il est sûr qu’ils ne connaissent pas Jésus Christ. Étant donné que la parole de dieu est présente partout dans le monde, que CBC veut offrir la Bible à tous les déshérités, ils ont besoin de sous pour un vaisseau qui pourrait emprunter le trou de verre et délivrer le message à la gloire du Christ à

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ces créatures sans dieu. A force de leurrer des populations qui sont dans le besoin avec des promesses de salut dans une autre vie plutôt qu’une véritable aide icibas, les missionnaires sont de plus en plus mal perçus ! Quand on vit dans la misère et qu’on voit des blancs (même habillés en noir) débarquer avec de gros moyens, on pense qu’ils vont pouvoir nous aider à ne plus mourir de faim. Malheureusement, quand on s’aperçoit que leurs fonds servent essentiellement à construire des églises et à apporter des biens matériels qui ne se mangent pas, l’estomac crie d’autant plus famine et les esprits s’échauffent ! L’exemple est frappant quand Pascal la dalle atterrit en Australie où son peuple est le bienvenu. D’ailleurs le maire s’empresse de préciser qu’ils ont une mission qui pourra tous les accueillir. Dès qu’il entend ça, Pascal repart tout de suite, à croire que ce petit con n’aime pas les missionnaires ! Idem, alors que les enfants cherchent Pascal aux infos, ils tombent sur CBC qui affirme que dieu dit d’envoyer de l’argent afin que la chaîne aide les pauvres. Mais Cartman ne voit vraiment pas pourquoi envoyer des thunes à ce connard ! Enfin, alors que les Ethernopiens peuvent rester sur Marklor, les missionnaires sont sommés de partir. Sœur Hollis a beau rappeler que les Marklors brûleront en enfer s’ils refusent le seigneur, le leader Marklor n’y croit pas une seconde et les remercie d’être passés ! Que ce soit les religieux ou d’autres mouvements, les malheurs des Africains profitent à beaucoup de monde, eux les derniers ! Il est bien évidemment important que le monde entier connaisse et agisse en faveur de la lutte contre la pauvreté en Afrique. Cela se fait par le biais d’organisations plus ou moins spécialisées et d’envergure, via des opérations marketing de sensibilisation et éventuellement par de gigantesques concerts. Pour autant, depuis le temps, un véritable business de la misère s’est organisé : il s’agit alors de récolter un max chez les riches pour donner un peu chez les pauvres, le reste partant en frais de gestion et de communication ! On le voit avec la Fondation Nourrir les Enfants de Sally Struthers. Déjà, comme critiqué dans un autre épisode, son surpoids ne la rend pas

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des plus crédibles face aux Africains qui se régaleraient bien de sa graisse. Pour autant, c’est cruel de se moquer de son poids, puisqu’elle aide les gens après tout, collectant des millions pour aider les enfants sous-alimentés d’Éthiopie. Mais si les Ethernopiens émigrent sur une autre planète, qui fera des dons à sa fondation ? Et plus d’Ethernopiens, plus de nourriture ... dont elle s’empiffre au passage !

Conclusion :

Voyez, on se couchera moins bête car on a appris un truc aujourd’hui : la religion, sous couvert de générosité, mène une conquête de parts de marché en se servant de la pauvreté des autres ! On sait bien que rien n’est gratuit en ce bas-monde, mais on aurait pu s’attendre à mieux de la part des religieux. Alors que tant d’autres organisations se donnent corps et âmes pour aider par simple charité ceux qui sont dans le besoin, les missionnaires se servent de la nourriture pour appâter de nouveaux fidèles et les convertir autant à leurs valeurs religieuses qu’aux mœurs occidentales. Depuis que certains ont ressenti que le catholicisme est en perte de vitesse, un grand nombre de mouvements religieux se sont mis à prospecter en Afrique. Pour contrer cela, les missionnaires cathos ont accentué leur stratégie « Prières contre nourriture » pour préserver leur influence et recommencer à se développer. C’est oublier qu’il est immoral, d’autant plus pour une religion, de rentrer dans un système de charity business, où la solidarité n’est plus motivée par l’entraide bénévole mais par le gain, de dons en amont et de fidèles en aval !

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