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Revue trimestrielle FOI n°42 - Septembre - Octobre - Novembre 2014 - 5,50 €

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VIE Sommaire

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Editorial du Père Laurent FABRE Dossier

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le miracle

de l’unité a déjà commencé

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Œcuménisme

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Formation Chrétienne

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Jeunes

14 • La conversion pour l’unité - A. Strojny 18 • Prière

20 • Synode sur la famille - D. Coatanea 22 • La foi dans les bulles - G. Leluc 24 • Interview de Bernard Bougon

26 • Viser quelle réussite ? 28 • Témoignages

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Vie de la Communauté

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Jeune Talent

30 • Le tour du monde ... la Belgique 32 • Semaine communautaire paroissiale

35 • Jeanne Dantès

La revue FOI (Fraternité Œcuménique Internationale) est publiée par la Communauté du Chemin Neuf-10 rue Henri IV-69287 Lyon cedex 02 Directeur de la publication : P. Laurent Fabre Directeur délégué : Jean-Charles Paté, Rédactrice en chef : Pascale Paté, Comité de rédaction : Franck Démaret, P. François Lestang, Marie-Farouza Maximos, Isabelle Rambert, P. Gabriel Roussineau, P. Adam Strojny. Création graphique : Annick Vermot (06 98 61 98 76), Crédit photos : fotolia.com : angelo.gi, Andres Rodriguez, kasiap, herreneck, Eisenhans, M.studio, Mihai-Bogdan Lazar, creativa, bagaric, Christophe Boisson, storm, spotmatikphoto, Dossier : Nicholas Manginas, Gilbert Soobraydoo, epd-bild / Norbert Neetz, KCM TV, Frédéric Prochasson Abonnement : Nicole Zébrowski, Gestion-Administration : AME, Réalisation PAO : Sandrine Laroche Impression : Saxoprint.fr, Dépôt légal : sept 2014, CPPAP : 0315 G 83338, ISSN : 1770-5436

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Editorial Le prix de la grâce

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aradoxalement, au moment où des Chrétiens sont persécutés parfois très sauvagement, le pape affirme dans une vidéo adressée à des Pentecôtistes par l’intermédiaire de son ami l’évêque anglican Tony Palmer (vidéo qui a fait le tour de la planète) que : « Le miracle de l’Unité a déjà commencé ». J’avais l’impression que de nouveau, comme au moment de la naissance de Jésus, espérance de Paix et d’Unité pour toute l’humanité, on entendait les cris de « Rachel qui pleure ses enfants et ne veut pas être consolée, parce qu’ils ne sont plus » (Mt 2, 18). Comme souvent dans l’histoire, les plus grands évènements, au début, humbles et cachés, côtoient de près les explosions de violence de l’histoire : la naissance de Jésus et le massacre des saints innocents. Je ne sais pas si la décision récente du président des Etats-Unis, Barack Obama, qui veut « éradiquer l’Etat islamique jusqu’en Syrie » sera suivie d’effets. Je ne sais pas si nous nous engageons (une dizaine de pays, dont la France, a donné son accord) dans une longue guerre semblable à celle encore récente de l’Irak, mais j’ai la conviction profonde que, au même moment, ce petit commencement, cette nouvelle attitude œcuménique, inaugurée par le pape François, est vraiment riche de promesses.

Et ces deux questions ne sont pas indépendantes l’une de l’autre. J’ai compris, en effet, que le plus grand obstacle à la Paix dans le monde est bel et bien la division des Chrétiens. Chaque retard dans cette marche vers l’Unité maintient paralysés le Christ et son message. Lorsque Jésus disait comme consigne à ses disciples : « La Paix soit avec vous », lorsqu’il disait : « De toutes les nations, faites des disciples », il pensait à la Paix pour tous les hommes. La division des Chrétiens, la division du Corps du Christ « notre Paix », n’est pas sans rapport avec la Paix dans le monde. Comment ne pas mettre ensemble deux évènements très significatifs, qui nous font croire ce que dit le pape François : « Le miracle de l’Unité a déjà commencé » ?

Au centre, il y a l’amitié, « l’œcuménisme du cœur » comme dirait notre pape : l’amitié entre l’évêque anglican Tony Palmer et le pape François lui-même, et l’amitié entre l’archevêque de Cantorbéry (primat de la Communion anglicane) et la communauté du Chemin Neuf. De part et d’autre, vous avez un milliard deux cents millions de Catholiques et la multitude de plus en plus nombreuse des Eglises pentecôtistes et évangéliques (environ 750 millions). Sans beaucoup de bruit, il y a deux faits d’actualité peut être aussi importants que la chute du mur de Berlin. Il y a une liberté, un accueil, disons tout simplement une grâce de l’Esprit Saint, qui fait que des centaines de leaders pentecôtistes se lèvent pour une « standing ovation » et prient pour ce pape venu par l’intermédiaire d’une vidéo prise par le smartphone de Tony Palmer, son ami. Dans ses paroles, simples et profondes, qu’il faut absolument entendre du fond de notre cœur, le pape évoque la joie des retrouvailles de Joseph et ses frères (cf. Génèse 45).

Cela paraît tout simple et banal, comme une simple rencontre de famille (de plus de deux milliards de baptisés !)… mais Dieu le Père attendait cela depuis 480 ans. Même pour le Père Eternel, 480 ans, c’est long ! Le chemin n’est pas terminé, mais il faut croire aux accélérations de l’Esprit Saint.

Père Laurent FaBRE Fondateur et responsable de la Communauté du Chemin Neuf

Fait étrange, Tony Palmer qui avait véritablement une vocation de « pont » entre le pontife romain, son ami, et beaucoup de Protestants, de Pentecôtistes et d’Evangéliques, est mort cet été en Angleterre d’un accident de moto. Comme nous le disons souvent : « En temps de guerre, on commence toujours par bombarder les ponts ». Comment ne pas penser que, dans la mort de Tony Palmer, il y a, en fin de compte, une certaine logique du combat spirituel ? Le « Miracle de l’Unité » passera aussi par la Croix comme le dit si bien St Paul dans l’épitre aux Ephésiens 2, 13-22 : « C’est lui en effet qui est notre Paix, qui de deux réalités n’a fait qu’une (…) pour les réconcilier en Dieu tous les deux, en un seul Corps, au moyen de la Croix : là, il a tué la haine. »

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P. Laurent Fabre

5 bonnes nouvelles

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TONY PALMER

Bâtisseur de ponts

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BREF HISTORIQUE

Divisions et rapprochements

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témoignages

L’œcuménisme n’est pas une option !

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dossier

le miracle

de l’unité

a déjà commencé

Cette année 2014 est marquée par des avancées parfois spectaculaires sur le chemin de l’unité : des amitiés œcuméniques amenant à des rencontres inattendues, des appels à la communion, des accords théologiques qui deviennent partie intégrante de la vie des Eglises. Ce qui fait dire au Pape François : « Le miracle de l’unité a déjà commencé ! »

Dans le dossier Net for God de ce mois, nous vous partageons cinq bonnes nouvelles concernant le dialogue entre confessions chrétiennes à travers le monde. Elles nous donnent l’espérance que s’accomplisse enfin la prière du Christ : « Que tous soient un afin que le monde croie. » Net for God est un réseau de prière, de formation et d’évangélisation, créé par la Communauté du Chemin Neuf en 2000, qui s’engage pour l’unité des chrétiens, la réconciliation et la paix. Chaque mois, un film traduit en 20 langues est envoyé dans près de 70 de pays à tous les membres du réseau qui constituent la Fraternité Œcuménique Internationale. (www.netforgod.tv) DVD en vente sur ame-boutique.com Photos : Lyon, Passerelle Paul Couturier, pionnier de l’œcuménisme. à gauche : Le pape François et le patriarche Bartoloméo à Jérusalem le 25 mai 2014

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5 bonnes nouvelles

P. Laurent Fabre

« Je suis heureux de vous parler de cette chose magnifique qui se passe en ce moment dans l’Église à propos de l’unité des chrétiens si chère à l’abbé Paul Couturier, ce prophète de l’œcuménisme. Nous sommes en train de vivre un moment extraordinaire de la vie de l’Église ! Récemment, dans un message vidéo adressé par le Pape François aux Evangéliques pentecôtistes (voir encadré), celui-ci a prononcé cette phrase que nous avons retenue comme titre de ce film Net for God : « Le miracle de l’unité a déjà commencé. »

« Le miracle de l’unité a déjà commencé ! ça, c’est une bonne nouvelle ! » Alors j’ai cinq bonnes nouvelles. Cinq comme les cinq doigts de la main. Comme si on permettait à Dieu de retrouver, s’articulant entre eux, ses cinq doigts de la main pour bénir et apporter la paix sur le monde. Sans cela, il est comme paralysé par notre division. Photos : 1. Signature de la déclaration commune luthéro-catholique en 1999. 2 & 3. Tony Palmer et pape François. 4. Mgr Justin Welby accueille la communauté du Chemin Neuf à Lambeth Palace. 5. Travaux préparatoires au Concile Panorthodoxe de 2016.

1. 1999 : accord luthéro-catholique sur la justification par la foi La première bonne nouvelle : ce qui s’est passé en 1999. 482 ans après leur séparation, finalement Luthériens et Catholiques se retrouvent, et signent un accord - et depuis d’autres ont signé, comme les Méthodistes - sur la question de la justification (voir Historique p.10). Très bonne nouvelle. “The Protest is over”, comme le disait si bien Tony Palmer. 2. Rapprochement de pentecôtistes et de catholiques Deuxième bonne nouvelle : il y a en ce moment un rapprochement entre certains évangéliques pentecôtistes et certains catholiques.

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Auparavant dans certains endroits, par exemple en Amérique latine, notamment au Brésil, c’était un peu la guerre. Mais maintenant il y a un rapprochement considérable qui est en train de se faire, les gens finalement deviennent un peu plus chrétiens, et ils savent bien que c’est seulement dans l’unité qu’on pourra peser positivement dans le monde. Or, en gros, les Catholiques représentent un milliard trois cent millions de personnes, et les Evangéliques pentecôtistes sept cent cinquante millions. Alors si les deux se mettent d’accord ensemble, quelle est la bonne nouvelle ? C’est que deux milliards cinquante millions de chrétiens sont d’accord sur les questions éthiques, les questions de la famille, etc. C’est très important. 3. Réunion d’un concile pan-orthodoxe en 2016 Troisième bonne nouvelle : ce qui se passe en ce moment pour les Orthodoxes. Les primats des Eglises orthodoxes se sont retrouvés à Istanbul à l’invitation du patriarche


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de Constantinople, Bartholomée Ier, du 5 au 9 mars 2014 et ont annoncé la réunion d’un concile pan-orthodoxe à la Pentecôte 2016. Une telle rencontre n’avait pas eu lieu depuis le deuxième concile de Nicée en 787, c’est-à-dire avant la séparation avec l’Eglise catholique romaine. Nos frères orthodoxes, les quatorze patriarcats, ne s’étaient pas retrouvés pour faire vraiment un concile ensemble depuis 1227 ans. Et ça c’est une très bonne nouvelle. Il se passe quelque chose parmi les Orthodoxes, ils vont peut-être arriver enfin à marcher d’un seul pas. Si dans ce concile, d’ici deux ans, il y a ce travail d’unité qui se fait, c’est un enjeu fantastique pour l’unité du corps du Christ, parce que si les Orthodoxes se mettent d’accord, alors ce sera très facile de faire l’unité avec les Catholiques. Peut-être la question douloureuse de l’Ukraine est-elle la cause de cette urgence qu’ils ont tout d’un coup à se retrouver. Parfois le Saint Esprit utilise les querelles historiques pour permettre une réconciliation.

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4. L’unité vécue avec l’invitation du Chemin Neuf à Lambeth Palace Quatrième bonne nouvelle : ce qui se passe en ce moment entre les Catholiques et les Anglicans. Nous sommes bien placés pour vous en parler, puisque la Communauté du Chemin Neuf a été invitée dans le « Vatican anglican », au cœur de Londres, à Lambeth Palace. Une fraternité de notre communauté s’y trouve en permanence, se mettant au service de nos frères anglicans et partageant avec eux ce désir de l’unité enfin retrouvée. L’installation officielle d’une fraternité de la Communauté du Chemin Neuf dont les membres sont luthérien, catholique et anglicans dans la résidence de l’archevêque de Cantorbéry, primat de la communion anglicane, est un événement œcuménique sans précédent. Cela fait ainsi 480 ans, depuis la séparation entre Catholiques et Anglicans, qu’un membre de l’Eglise catholique n’avait pas résidé dans ce lieu. « Je pense que la présence de catholiques et de luthériens priant ici en tant que membres

de la communauté que nous formons, pas comme invités mais comme partie intégrante de la communauté est bien plus qu’un signe ou un symbole. C’est une réalité vécue. L’unité est établie pour nous par le Christ. En Christ, nous sommes un. Nous n’avons pas à rechercher l’unité : elle est là, il faut la vivre » (Justin Welby, archevêque de Cantorbéry). 5. La conversion de l’Eglise catholique est-elle en marche ? Et enfin, dernière bonne nouvelle : j’ai le sentiment que l’Église catholique est en plein renouvellement. Ce pape a un charisme, un courage extraordinaire. Il faut vraiment que nous l’accompagnions dans nos prières, parce qu’avec cet homme-là, l’Église catholique va peut-être faire ce pas que Jésus attend d’elle, celui de la conversion. Il n’y a pas de possibilité, pour JésusChrist, de retrouver ses cinq doigts de la main s’il n’y a pas une conversion de toutes nos Eglises. v

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Tony Palmer

Bâtisseur de ponts entre catholiques et évangéliques En février 2014, une vidéo fait le buzz sur internet et étonne le monde entier : un message de six minutes du Pape François, adressé à des leaders évangéliques américains réunis en congrès au Texas. Dans cette vidéo, le Pape s’adresse à eux « comme un frère, avec joie et aussi nostalgie, celle que cette séparation s’achève et puisse nous donner la communion ». Ce « langage du cœur » touche tout l’auditoire et le pasteur Kenneth Copeland répond à la demande du pape de prier pour lui en lui envoyant à son tour un message vidéo filmé sur le champ. L’homme qui a été à l’origine de cet événement inédit s’appelle Tony Palmer. Originaire d’Afrique du Sud, Evêque de la Communion des Eglises Evangéliques Episcopaliennes (CEEC), il a fondé avec sa femme Emiliana, elle-même catholique, une communauté œcuménique, « the Ark Community ». En 2006, il rencontre en Argentine le cardinal Bergoglio, archevêque de Buenos Aires, à l’occasion d’une convention charismatique œcuménique. Ils restent en contact régulier et celui-ci devient pour lui un vrai père spirituel. Le 13 mars 2013, le cardinal Bergoglio est élu pape. Tony Palmer réalise la chance et la bénédiction qu’a été leur relation, tout en pensant que dorénavant la nouvelle fonction de son ami va entraîner une plus grande distance entre eux. Mais quelques mois plus tard, il reçoit un appel du Pape François qui l’invite à venir le rencontrer à Rome… C’est durant cette rencontre que Tony Palmer va enregistrer le message du pape aux évangéliques sur son smartphone et le diffuser une semaine plus tard aux Etats-Unis. Cet appel à la fraternité ne reste pas sans réponse : le 24 juin 2014, il organise une nouvelle rencontre à Rome avec le Pape François et une délégation de responsables Vidéo en ligne : « Message du Pape François à Kenneth Copeland, leader charismatique américain »

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évangéliques et charismatiques, parmi lesquels le président de l’Alliance Evangélique Mondiale, Geoff Tunnicliffe et des prédicateurs télévangélistes parmi les plus connus, dont Kenneth Copeland. Lors de cette rencontre, Tony Palmer et les leaders évangéliques proposent au pape un projet de « déclaration de foi dans l’unité pour la mission » qui pourrait être signé en 2017 par les responsables des grandes Eglises Protestantes à l’occasion du 500ème anniversaire de la Réforme et du 50ème anniversaire du Renouveau Charismatique Catholique. Celui-ci reposerait sur trois éléments : le credo de Nicée-Constantinople, le noyau de la déclaration commune sur la Justification de 1999 et une dernière partie déclarant que désormais catholiques et protestants sont « unis dans la mission car nous proclamons le même Evangile ». Quelques semaines plus tard, le 26 juillet, le Pape François rendait visite à un autre de ses amis, le pasteur pentecôtiste Traettino, à Caserte, en Italie. C’est la première fois dans l’histoire qu’un pape se rendait dans une église pentecôtiste pour une visite qui allait occasionner un pas de pardon entre catholiques et pentecôtistes. Tony Palmer aurait dû l’accompagner. Mais au petit matin du dimanche 20 juillet, il était victime d’un violent accident de moto sur une route d’Angleterre. Il n’aura pas survécu à ses blessures. Lors de ses obsèques, célébrées le 6 août à Bath, sa femme a lu un message de son ami, le Pape François : « Nous étions de grands amis. Son amitié fraternelle et filiale m’ont fait beaucoup de bien. Je garde le souvenir d’un homme libre qui vivait dans la liberté de l’Esprit. Impatient, il cherchait sans relâche l’unité du corps du Christ déchiré et brisé à cause de nos péchés. Son héritage est précieux pour


dossier « Je crois que nous allons voir bientôt de plus en plus de gens appelés à aller dans le monde et à travailler entre les Eglises dans l’Esprit d’Elie pour “ramener le cœur des pères vers les fils et le cœur des fils vers les pères” pour faire véritablement “un peuple préparé pour le Seigneur” (cf. Lc 1, 17) par des ministères de réconciliation. Nous devons consacrer autant de ressources et d’énergie pour le ministère de réconciliation que ce que nous faisons pour l’évangélisation. Ou bien construisons-nous des murs qui n’ont pas de fondations ? Je vous lance un défi : trouvez un bâtisseur de ponts et soutenez-le. »

Tony Palmer

Tony Palmer

tous. C’est l’héritage de la volonté de Jésus exprimée en Jean 17. Ceux d’entre nous qui l’aimaient se sentent poussés par son zèle à suivre ses traces, à marcher sans repos pour préparer l’Epouse, l’unique Epouse, pour l’Epoux qui doit venir ». Quelques jours avant sa mort, Tony Palmer envoyait un mail à Net for God pour nous remercier de l’envoi du film Le miracle de l’unité. Il nous disait qu’il était alors en Afrique du Sud pour y « répandre le virus de l’unité ». Puissions-nous entendre chacun cet appel à lancer des ponts entre nos Eglises, à brûler de ce désir de l’unité visible du corps du Christ : « Père, qu’ils soient un afin que le monde croie que tu m’as envoyé » Jean 17, 21. v P. Gabriel Roussineau

Rencontre du 24 juin 2014 entre le Pape et des responsables évangéliques et chartismatiques dont Geoff Tunnicliffe et Kenneth Copeland.

Sources : - “Pope’s friendship with late Evangelical leader Tony Palmer”, Philippa Hitchen, Vatican Radio, www.news.va/en/news/ popes-friendship-with-late-evangelical-leader-tony, 25 juillet 2014. - “Pope’s Protestant friend dies, but push for unity lives”, Austen Ivereigh, The Boston Globe, 7 août 2014. - “Pope Francis’ fulsome tribute to evangelical bishop”, Christopher Lamb, The Tablet, 8 août 2014.

Le 24 juin 2014, Tony Palmer et les leaders évangéliques proposent au pape un projet de « déclaration de foi dans l’unité pour la mission » qui pourrait être signé en 2017 par les responsables des grandes Eglises Protestantes à l’occasion du 500ème anniversaire de la Réforme et du 50ème anniversaire du Renouveau Charismatique Catholique.

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Bref historique

des divisions et rapprochements entre les Eglises P. Gabriel Roussineau

La Pentecôte marque l’acte de naissance de l’Eglise : les disciples de Jésus réunis ensemble sont remplis de l’Esprit-Saint et proclament la mort et la résurrection du Christ avec assurance aux juifs et aux païens. La distance se creuse cependant peu à peu entre juifs fidèles à la Torah et disciples du Christ, jusqu’à une rupture totale. L’Evangile se propage de Jérusalem vers les grandes cités de l’empire romain : Antioche, Alexandrie, Rome et Constantinople, formant les cinq patriarcats historiques qui développent leurs traditions ecclésiales propres. L’unité entre les chrétiens se maintient, mais au prix de fortes tensions.

On peut dire que tous les cinq siècles environ se produit une grande fracture. La première a lieu au Vème siècle, quand les conciles d’Ephèse en 431, puis de Chalcédoine en 451 cherchent à définir plus précisément la double nature du Christ, vrai Dieu et vrai homme dans l’unité de Sa personne. Des rivalités politiques ainsi qu’une mauvaise compréhension des enseignements de ces conciles – en grande partie due à des divergences de langage philosophique et théologique – auront pour conséquence cette première séparation entre Eglises en Orient. Cinq siècles plus tard, dans un contexte de rivalités politiques et culturelles entre Rome et Constantinople, de nouvelles incompréhensions dogmatiques surgissent ; le patriarche de Constantinople et le pape de Rome

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s’excommunient mutuellement en 1054, provoquant le Grand Schisme entre l’Eglise orthodoxe et l’Eglise catholique, entre Orient et Occident. Cinq siècles plus tard, une troisième déchirure se produit, cette fois au sein de l’Eglise d’Occident. Le 31 octobre 1517, Luther affiche ses 95 thèses sur la porte de l’église de Wittenberg. C’est le point de départ de la réforme protestante en Europe. Catholiques et Protestants se divisent en particulier sur la manière dont l’homme est justifié, c’est à dire rendu juste par la grâce de Dieu au moyen de la foi en Christ, et sur la place à donner aux bonnes œuvres dans le salut. En 1534, en Angleterre, le roi Henri VIII affirme sa souveraineté face au pape et s’érige chef de l’Eglise d’Angleterre. La communion anglicane intégrera plusieurs traditions d’origines tant catholiques que protestantes.

ouverture du concile Vatican II en 1962 qui engage toute l’Eglise catholique dans le mouvement œcuménique. La rencontre du pape Paul VI et du Patriarche de Constantinople Athénagoras en janvier 1964 à Jérusalem marque le début de la réconciliation entre catholiques et orthodoxes. L’année suivante, les excommunications de 1054 sont levées. Le 25 mai 2014, le pape François et le patriarche Bartholomée Ier se sont retrouvés à Jérusalem pour marquer le 50ème anniversaire de cette rencontre historique. Le 31 octobre 1999, après des siècles de division et d’incompréhension, un accord est signé entre l’Eglise catholique et la Fédération Luthérienne Mondiale, marquant un tournant décisif dans le dialogue œcuménique. v

« Le corps de mon Fils, le corps de mon Fils est brisé ! » Conférence d’Edimbourg, 1910

Mais cinq siècles plus tard, l’Esprit-Saint va susciter un mouvement puissant allant contre les divisions dans le corps du Christ. Le XXème siècle sera celui de l’œcuménisme et sera marqué par des étapes déterminantes : conférence d’Edimbourg en 1910, rassemblant missionnaires protestants et anglicans, création du Conseil Œcuménique des Eglises en 1948 et

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dossier Vivre la fraternité a Lambeth Palace Ula Michlowicz, sœur consacrée polonaise de confession catholique.

«

Pour moi, c’est comme entrer dans la joie du Seigneur : pour ce projet, pour nous-mêmes, pour son Eglise, pour l’unité des chrétiens. C’est une invitation à ouvrir largement mon coeur et entrer dans la joie du Christ. »

Oliver Matri, allemand de confession luthérienne, membre de

« Déclaration conjointe sur la doctrine de la justification

de la Fédération Luthérienne Mondiale et de l’Eglise catholique 15. Notre foi commune proclame que la justification est l’œuvre du Dieu trinitaire. Le Père a envoyé son Fils dans le monde en vue du salut du pécheur. L’incarnation, la mort et la résurrection de Christ sont le fondement et le préalable de la justification. De ce fait, la justification signifie que le Christ lui-même est notre justice, car nous participons à cette justice par l’Esprit Saint et selon la volonté du Père. Nous confessons ensemble : c’est seulement par la grâce au moyen de la foi en l’action salvifique du Christ, et non sur la base de notre mérite, que nous sommes acceptés par Dieu et que nous recevons l’Esprit Saint qui renouvelle nos cœurs, nous habilite et nous appelle à accomplir des œuvres bonnes.

«

la Communauté du Chemin Neuf.

Quand j’ai appris que j’allais vivre à Lambeth Palace, j’étais très enthousiaste, surtout à l’idée de pouvoir prier au coeur d’une autre Eglise que la mienne, et de pouvoir y prier pour l’unité de cette Eglise et aussi pour l’unité de l’Eglise universelle. »

Je pense que la présence de catholiques et de luthériens priant ici en tant que membres de la communauté, pas comme invités mais comme parie intégrante de la communauté est bien plus qu’un signe ou un symbole. C’est une réalité vécue. L’unité est établie pour nous par le Christ. En Christ, nous sommes un. Nous n’avons pas à rechercher l’unité : elle est là ! Il faut la vivre ! »

Justin Welby, archevêque de Cantorbéry

18. Ensemble, luthériens et catholiques ont pour but de confesser partout le Christ, de placer en lui seul leur confiance car il est le seul médiateur (1 Tm 2, 5s.) par lequel Dieu se donne lui-même dans l’Esprit Saint et offre ses dons renouvelants.

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Liverpool “ L’œcuménisme n’est pas une option ” Lors de la semaine précédant la Pentecôte, j’ai eu la joie de partir en mission à Liverpool, avec quatre autres frères et sœurs ayant suivi le Cycle C à l’abbaye d’Hautecombe, pour aider la communauté en Angleterre à animer trois journées de prière, afin de demander la venue de l’Esprit Saint et prier pour l’Unité des Chrétiens.

de prière continue en parallèle dans les deux cathédrales, groupe de prière charismatique dans la cathédrale catholique, présentation d’un film « Net for God » dans la cathédrale anglicane, colloque œcuménique sur l’Esprit Saint et l’Unité et participation à une soirée de louange dans une Eglise évangélique le samedi soir.

Liverpool est en effet une ville pionnière pour l’œcuménisme. Tout d’abord, dans un pays à majorité anglicane, c’est une ville avec une forte communauté catholique, mais aussi avec de nombreuses Eglises évangéliques, baptistes… Ainsi, les deux cathédrales anglicane et catholique, construites au XXème siècle, sont situées en vis à vis, aux deux extrémités de la « rue de l’Espérance », Hope Street.

Je retiens de ces quelques jours deux moments forts. Tout d’abord, cette soirée de louange et de prière avec l’Eglise « Temple of Praise », où j’ai pu, dans un court témoignage, partager l’expérience de l’action de l’Esprit Saint dans ma vie. Ce fut pour moi une réelle expérience de l’Esprit Saint : c’était la première fois que je témoignais ainsi dans une langue qui n’est pas la mienne, l’anglais ! Avant de prendre la parole, j’ai pris un petit temps de prière pour me remettre au Seigneur et j’ai reçu cette parole dans le livre de Samuel : « L’Esprit du Seigneur s’est exprimé par moi, sa parole est sur ma langue » (2 Sam 23, 2-3). Et je crois que cette parole s’est vraiment réalisée !

Cette situation très particulière a permis à la ville de devenir peu à peu un véritable laboratoire pour les pratiques œcuméniques. Cette dynamique est rendue visible depuis 1982 : tous les deux ans, une célébration réunit les deux cathédrales lors de la Pentecôte. Cette année, les Eglises locales ont fait appel à la communauté du Chemin Neuf pour animer trois journées de prière avant cet événement : temps

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Et bien sûr, la célébration de Pentecôte, avec les responsables de nombreuses Eglises de la région, commençant dans la cathédrale anglicane, puis une procession dans

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« Hope Street » jusqu’à la cathédrale catholique où la célébration s’est clôturée par une prise de parole de l’évêque catholique de Liverpool. Pour moi, cela a été une grande joie de pouvoir travailler concrètement pour l’unité, de concrétiser cette prière pour l’unité que nous récitons chaque jour. En trois jours, nous avons pu rencontrer plusieurs Eglises de Liverpool, partager avec des chrétiens de tous horizons, et témoigner ensemble de l’action de l’Esprit Saint dans nos vies. Pour la vie de l’Église à Liverpool, l’œcuménisme n’est pas une option, mais une réalité de chaque instant ! Cela fut pour moi une belle confirmation par l’expérience de cet appel à donner ma vie pour l’Unité de son Corps. v Nicolas Rhoné

Photos : en haut : cathédrale

catholique à Liverpool, à droite : temps de prièreanimée dans la cathédrale anglicane de Liverpool, au milieu : frères et sœurs du Chemin Neuf


dossier Bernard SESBOUé

« N

ous vivons un tournant entre le moment où l’œcuménisme a sécrété ses institutions propres de rencontre et d’action, et celui où il commence à œuvrer à la réconciliation des institutions ecclésiales. Notre tâche est de remplacer désormais le substantif par l’adjectif ; il ne s’agit plus de “faire de l’œcuménisme“, mais d’intégrer la tâche œcuménique à tout ce que nous faisons. Il est donc important que l’œcuménisme n’apparaisse pas comme le fait de quelques “professionnels”.

Il

est nécessaire qu’il y ait des “permanents” de la tâche œcuménique. Mais il est non moins requis que les animateurs de l’œcuménisme soient aussi des animateurs de la vie et de la recherche intérieure de leur propre Eglise. Corrélativement, le problème de l’heure n’est sans doute plus de réunir des chrétiens sur les questions œcuméniques, mais de les réunir dans un esprit œcuménique sur les questions de la foi. Le projet œcuménique ne peut-il pas être aujourd’hui le lieu d’une redécouverte de l’identité chrétienne ? » Bernard SESBOÜE, sj., La patience et l’utopie, DDB, Paris, 2006, p.28

Biblio

graphie

Bernard SESBOÜE, La Patience et l’utopie : jalons œcuméniques, DDB, Paris, 2006

Père René GIRAULT et Pasteur Albert NICOLAS, Sans tricher ni trahir sur la grande route œcuménique, Cerf, Paris, 1985

GROUPE DES DOMBES, Communion et conversion des Eglises, Bayard, Paris, 2014

Elisabeth PARMENTIER, Michel DENEKEN, Catholiques et protestants, théologiens du Christ au XXème siècle, Mame, Paris, 2009

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œcumén

VIE

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œcuménisme

Chrétiens d’Orient et Islam

La conversion pour l’unité Vouloir avancer vers l’unité est-il suffisant pour y arriver ? Il y eut, au cours de l’Histoire, différents modèles d’unité. Mais aujourd’hui, on ne peut envisager l’œcuménisme sans parler de conversion. Voici un enseignement donné par le P. Laurent Fabre, nourri par l’ouvrage de René Giraud, Construire l’Eglise une, du travail du Groupe des Dombes, Pour la conversion des Eglises, et des documents de l’Eglise catholique.

P. Adam STROJNY, ccn Professeur de Théologie

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Personne ne peut nier la volonté du Christ pour ses disciples « Que tous soient un » (Jn 17,21). Deux mille ans d’histoire du christianisme ont vu plusieurs divisions et schismes entre chrétiens, mais également diverses tentatives pour avancer vers l’unité de l’Eglise. Les divisions des chrétiens s’opposent au projet de Dieu qui appelle son Peuple au service de la réconciliation de l’humanité. L’unité désirée par Dieu n’est pas une unité au rabais, mais elle a pour modèle et pour fondement l’unité au sein de Dieu, l’unité de la Trinité, « comme nous sommes un, Toi en moi et moi en toi », dit le Christ dans sa prière au Père. « Afin que le monde croie », ce qui veut dire que le monde voit dans les divisions des chrétiens un contre-témoignage et un obstacle à l’accueil de la Bonne Nouvelle de l’Evangile. Telle fut la prise de conscience des missionnaires protestants rassemblées à Edimburgh en 1910, tel fut le message de l’encyclique du patriarche de Constantinople en 1920. Après le drame de la Seconde Guerre Mondiale cette conscience a permis la fondation du Conseil Œcuménique des Eglises. A cette époque, l’Eglise de Rome est restée encore méfiante, car elle a craint que l’œcuménisme amène à un compromis au sujet de la vérité de la foi et sous-entende une conception de l’Eglise comme fédération.

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Pourtant, petit à petit, elle est arrivée à reconnaitre que le mouvement œcuménique était une œuvre de l’Esprit Saint1. C’est le Concile Vatican II (1962-1965), qui marquera l’engagement irréversible et irrévocable de l’Eglise catholique dans la recherche commune de la recomposition de l’unité entre les chrétiens et indiquera les principes pour cet engagement (cf. Décret Unitatis Redintegratio). Encore tout récemment, François, l’évêque de Rome, n’a pas hésité à rappeler que « dans une communauté chrétienne, la division est un des péchés les plus graves, parce qu’elle en fait un signe non pas de l’œuvre de Dieu, mais de l’œuvre du diable2 », d’où l’appel pour tous à prendre une part active à l’effort œcuménique.

« La division est un des péchés les plus graves, parce qu’elle en fait un signe non pas de l’œuvre de Dieu, mais de l’œuvre du diable » Pape François

Pourtant, même la claire conscience de devoir avancer vers l’unité n’est pas suffisante pour nous entraîner concrètement sur ce chemin. En regardant l’histoire des relations entre les Eglises chrétiennes, nous pouvons reconnaitre quatre modèles ou quatre étapes dans la manière de concevoir le chemin vers l’unité.


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Des modèles intéressants, mais limités… 1. L’unité par la conversion de l’autre Pendant longtemps, chaque Eglise a attendu « le retour des autres », et chacune a lancé un appel à la conversion. L’Eglise catholique attendait le retour des fils prodigues, en ouvrant les portes, en invitant les brebis perdues à retourner au bercail… prête à les réintégrer. Elle ne manquait pas de sincérité ni de générosité dans cette attente bienveillante. Le problème est que les orthodoxes ont eu le même désir : voir le retour à la vraie orthodoxie chrétienne de ceux qui ont ajouté ou enlevé des éléments à la foi orthodoxe… Et les protestants n’ont pas cessé d’appeler tous les frères à la réforme, qui, après quatre siècles, devrait finalement embraser toute la chrétienté. En conséquence, personne ne bougeait… 2. « Murailles infranchissables » et unité comme mystère

On a compris que, même si nos Églises restaient divisées au niveau institutionnel à cause de murailles infranchissables, le Seigneur permettait l’unité spirituelle. C’est un mystère de la grâce qui se montre plus forte que le péché des hommes. Et c’est déjà maintenant que nous pouvons et que nous devons vivre cette unité donnée par le Seigneur. Sans aucun doute, c’est une conviction très positive, partagée notamment par ceux qui font l’expérience de l’unité au sein de mariages interconfessionnels.

Après l’expérience des atrocités de la Seconde Guerre Mondiale, où de nombreux chrétiens de diverses dénominations ont vécu, au cœur de la détresse, l’expérience d’un partage authentique de la même foi, une conviction inspirée par le pasteur Marc Boegner a commencé à faire son chemin : les murs de la séparation ne montent pas jusqu’au ciel.

Pourtant, il nous faut poser la question : cela suffit-il ? Avons-nous le droit de nous résigner devant l’unité qui n’arrive pas à trouver les expressions visibles ? Est-il possible que la prière du Christ ne trouve sa réalisation que dans les cieux ? Nous avons besoin que cette unité trouve sa visibilité déjà sur cette terre, au milieu de ce monde ! >>>

L

église

vers une vision commune Abbaye d’Hautecombe Du jeudi 18h au dimanche 17h

12-15 mars 2015

L’église : vers une vision commune a été publié en automne 2013. Ce texte émane de la commission Foi et Constitution, l’organe théologique du Conseil Œcuménique des églises, une commission dont l’église catholique romaine est membre à part entière. Ce texte montre les convergences partagées par toutes les églises chrétiennes et à partir desquelles elles sont appelées à développer des consensus qui permettront d’avancer sur le chemin d’une compréhension commune de l’église. Le but de la session est de prendre connaissance de cette avancée et d’en discuter les contributions majeures. Il s’agira de travailler ce texte ensemble dans un dialogue fraternel entre nos différentes familles chrétiennes et de contribuer ainsi à sa réception. André BIRMELé

Faculté de Théologie Protestante, Université de Strasbourg

Frans BOUWEN M. Afr, Jérusalem, Spécialiste des Églises orientales et du dialogue avec les Églises chrétiennes d’Orient

Session

de formation œcuménique

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3. « Prenons-nous tels que nous sommes. » D’où le troisième modèle, la troisième étape : prenons-nous tels que nous sommes ! Acceptons-nous déjà avec nos différences dans lesquelles nous pouvons reconnaître la beauté de la variété. Nous ne voulons pas d’uniformisme, donc reconnaissons ensemble que nos pratiques et nos enseignements sont également légitimes. En effet, les dialogues théologiques menés aux différents niveaux ont permis de constater que plusieurs différences ne doivent plus être considérées comme séparatrices. Nous apprenons aujourd’hui à souligner ce qui nous rapproche et à chercher à comprendre les intentions et le message qu’un autre veut transmettre, à dépasser une lecture partiale de sa position et à rejoindre la part de vérité dont il est porteur. L’autre n’est plus l’ennemi qui me menace mais il est mon frère, qui, en étant différent de moi, peut m’enseigner. Dans l’échange des dons, nous pouvons grandir et nous enrichir réciproquement 3.

Le défi reste de savoir transformer le caractère séparateur de nos différences en témoignage de la beauté du corps uni et différencié du Christ. Il faut reconnaître ces points où nous continuons à nous opposer. Certains points dans la théologie sacramentelle et dans l’ecclésiologie, notamment la compréhension du ministère ecclésial, divisent encore l’Occident et l’Orient. Il est vrai que ces points ne relèvent pas du cœur du mystère chrétien (à savoir le mystère du Christ et de la Trinité) mais ils ont leur importance. Les chrétiens, les jeunes en particulier, sont fatigués de nos divisions. Ils voudraient se débarrasser de cet héritage malheureux de débats, de malentendus, de honte et de haine. Les pas de réconciliation, de reconnaissance fraternelle, des gestes de lavements de pieds ont été accomplis par ceux qui, 50 ans plus tôt se considéraient réciproquement comme hérétiques et non-chrétiens ! Les trois modèles ont plusieurs mérites, mais aucun n’apparaît pleinement cohérent avec le projet de l’unité voulu par Dieu. Ni le modèle de l’absorption, ni celui du mystère de l’unité spirituelle au-delà de murailles infranchissables, ni celui du pluralisme (« prenons-nous tels que nous sommes »), ne nous amènent assez loin.

Pas d’unité sans conversion En 1990, René Girault, après avoir présenté ces trois modèles précédents, en a signalé un quatrième. Celui-ci fut développé ensuite davantage par l’étude du Groupe des Dombes en 1991 : Pour la conversion des Eglises. Déjà Vatican II

« Même après les nombreux péchés qui ont entraîné les divisions historiques, l’unité des chrétiens est possible, à condition que nous soyons humblement conscients d’avoir péché contre l’unité et convaincus de la nécessité de notre conversion. » Ut unum sint

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disait : « Il n’y a pas de véritable œcuménisme sans conversion intérieure. En effet, c’est du renouveau de l’esprit, du renoncement à soi-même et d’une libre effusion de charité que naissent et mûrissent les désirs de l’unité. Il nous faut par conséquent demander à l’Esprit Saint la grâce d’une abnégation sincère, celle de l’humilité et de la douceur dans le service, d’une fraternelle générosité à l’égard des autres. » (UR 7).

« Il n’y a pas de véritable œcuménisme sans conversion intérieure. » Unitatis Redintegratio, 7

Le Concile admet la nécessité de la « rénovation de l’Eglise consistant essentiellement dans une fidélité plus grande à sa vocation […] en matière morale, dans la discipline ecclésiastique, ou même dans la formulation de la doctrine, qu’il faut distinguer avec soin du dépôt » (UR 6). En 1995, Jean Paul II, dans son encyclique Ut unum sint, parle déjà explicitement de la conversion personnelle et communautaire, ainsi que du dialogue de conversion entre les Eglises. Il affirme : « Même après les nombreux péchés qui ont entraîné les divisions historiques, l’unité des chrétiens est possible, à condition que nous soyons humblement conscients d’avoir péché


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1999 : Déclaration commune sur la doctrine de la justification

2016 : Concile Pan-Orthodoxe

2014 : Lambeth Palace

METANOÏA

contre l’unité et convaincus de la nécessité de notre conversion. Ce ne sont pas seulement les péchés personnels qui doivent être remis et surmontés, mais aussi les péchés sociaux, pour ainsi dire les “structures” mêmes du péché, qui ont entraîné et peuvent entraîner la division et la confirmer 4. » Nous sommes tous pécheurs, et tous nous avons besoin du pardon. C’est en regardant le Christ, en vivant notre propre conversion au Christ et à l’Evangile, que nous nous rapprochons effectivement les uns des autres. Il est l’unique modèle pertinent. Au lieu d’attendre la conversion des autres, je dois vivre moimême une conversion. Chaque pas vers le Christ, qui rend notre vie plus évangélique, donc plus chrétienne, nous rapproche dès maintenant de nos frères chrétiens. Le fruit de ce chemin est l’apparition progressive de zones communes où, dès aujourd’hui, nous pouvons vivre réellement unis : prier, évangéliser et servir ensemble le Royaume de Dieu. Il nous faut cette attitude à la suite du Christ qui « de condition divine, n’a pas considéré comme une proie à saisir d’être l’égal de Dieu, mais il s’est dépouillé […] il s’est abais-

sé » (Ph 2, 6-8). C’était également le chemin de Pierre et Paul qui, en reconnaissant leur péché, leur faiblesse et leur fragilité, ont pu accueillir la mission grandiose dans laquelle la puissance de Dieu se déploie sans cesse (cf. 2 Co 12).

complexe de supériorité, péché collectif, etc.) ; elle peut toujours, comme corps et en chacun de ses membres, devenir opaque, voire contredire le message chrétien dont elle est porteuse », Pour la conversion des Eglises (1991), n°25. l Illustrations : Dominika Ercsey, ccn

Plus nous sommes convaincus d’être bénéficiaires et dépositaires des dons de Dieu, plus nous devons nous convertir pour être vraiment et visiblement ce que nous sommes par la grâce : enfants de Dieu, membres d’un seul corps du Christ. v 1. Le Décret du Saint Office de 1949 décrit pour la première fois le mouvement œcuménique comme « un fruit de l’œuvre de l’Esprit Saint ». Par rapport à l’encyclique Mortalium animos de Pie XI en 1928, c’est le signe de la nouvelle conscience qui permettra l’ouverture œcuménique du Concile Vatican II. 2. Catéchèse du pape François lors de l’Audience générale du 27 août 2014, place Saint-Pierre. 3. Le même Jean Paul II écrit dans Ut unum sint, 85 : « Parce que, dans sa miséricorde infinie, Dieu peut toujours tirer du bien même des situations qui contredisent son dessein, nous pouvons découvrir que l’Esprit a fait en sorte que les oppositions servent, dans certaines circonstances, à clarifier divers aspects de la vocation chrétienne, ainsi qu’il advient dans la vie des saints. Malgré les séparations, qui sont un mal dont nous devons guérir, une sorte de communication de la richesse de la grâce s’est tout de même réalisée et elle est destinée à embellir la koinônia ». 4. UUS 34. Le Groupe des Dombes à son tour reconnaît : « Sans que l’Eglise en vienne jamais à sortir des promesses de la vie éternelle, elle est vulnérable aux données de psychosociologie : elle peut connaitre des déformations, des excroissances de sa véritable identité (formes partisanes,

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« Que tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé. Et moi, je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes un : moi en eux, et toi en moi. Que leur unité soit parfaite. » Jean 17, 21 Basilique de la Chora, Istanbul, mosaïque de la généalogie de Jésus

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Synode des évêques sur la famille

L’Eglise écoute les familles Une assemblée extraordinaire du Synode des évêques aura lieu du 5 au 19 octobre 2014 à Rome, consacrée aux « défis pastoraux de la famille dans le contexte de l’évangélisation ». Le pape François a souhaité ouvrir un nouvel espace de « conversation » au sein de l’Eglise catholique sur la question majeure pour la vie des hommes et femmes de « bonne volonté » : la question de la famille.

Dominique COATANEA

Docteur en théologie, maître de conférence de l’UCLy, coordinatrice du Centre de Recherche en Entreprenenariat Social (UCLy). Elle est mariée et mère de famille.

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Depuis le Concile Vatican II et en relisant sa constitution pastorale Gaudium et Spes, nous sommes invités à penser les questions familiales comme le creuset de la vie sociale : la famille est ce premier lieu où chacun apprend à devenir fils et fille, frère et sœur. Cet apprentissage concret, « incarné » de la filiation et de la fraternité est précieux pour soutenir la genèse de la vie sociale, politique et économique. « La famille est en quelque sorte une école d’enrichissement humain » (GS 52,2) « Ainsi la famille, lieu de rencontre de plusieurs générations qui s’aident mutuellement à acquérir une sagesse plus étendue et à harmoniser les droits des personnes avec les autres exigences de la vie sociale, constitue-t-elle le fondement de la société. » (GS 52,2) Le processus de mise en œuvre de cette « conversation » en vue du Synode sur la famille est une véritable innovation. Il a pris la forme d’un processus par étapes. En octobre 2013, ce fut la publication du document préparatoire sous forme d’un vaste questionnaire adressé à tous les diocèses. Le texte de travail comporte 39 questions réparties selon 9 rubriques (www.vatican.va) et l’instrumentum laboris réalisé à partir de ce recueil de la parole des diverses conférences épiscopales a été publié le 26 juin 2014. Les consultations des acteurs de la pastorale familiale, des experts ou des personnes intéressées ont été laissées

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au libre discernement des évêques avec impératif pour les Conférences épiscopales de faire remonter leurs réponses avant fin janvier 2014 à la Secrétairerie du Synode. Les délais étant fort courts, les modalités de la consultation ont été variées, allant pour certains diocèses de l’organisation de véritables « Assises de la pastorale familiale » à des consultations individuelles menées par les responsables de la pastorale familiale et permettant à certains diocèses de faire parvenir une réponse concertée au questionnaire proposé.

« Ce vaste processus de consultation est une démarche innovante » Les Conférences épiscopales des divers pays ont collecté et synthétisé ces réponses avant de les envoyer à Rome. Chacune a in fine discerné s’il était opportun de rendre public ce vaste travail de consultation en vue de l’Assemblée Générale extraordinaire des 5-19 octobre 2014. Cette Assemblée procèdera à un travail collégial à partir des données rassemblées et présentées par la Secrétairerie. L’Assemblée Générale extraordinaire visera ainsi à préciser le « status queastionnis » et à recueillir les témoignages et les propositions des évêques pour annoncer et vivre de manière crédible l’Evangile de la Famille.


ion chrétienne ion chrétienne formation pour les personnes qui ont connu l’échec dans leur mariage et de réfléchir de nouveau à la possibilité de les réadmettre aux sacrements 4. » La Conférence des évêques du Japon5 (0,35 % de la population est catholique) souligne quant à elle le risque de méconnaissance des problématiques sociales et culturelles qui sont décisives dans l’évangélisation des familles. Le texte publié souligne le défi exceptionnel et spécifique du pays : une éthique du travail qui décourage de prendre du temps pour la vie de famille : repas partagés rares, enfants seuls, peu de conversation, pas de communion, chacun est solitaire et a peu d’expérience d’aimer et être aimé… Les évêques alertent les rédacteurs du questionnaire sur le fait qu’il a été élaboré avec une mentalité où la famille est chrétienne, ce qui n’est pas le cas au Japon ! Pour autant, participer à un mariage ou à un enterrement est un fait de culture, tout le monde y participe. Il s’agit de penser ces passages comme des lieux d’évangélisation avec une clé : la pratique de l’hospitalité et de la bienveillance. « L’Eglise doit être un refuge pour ceux fatigués par la vie, et les cérémonies, des lieux où ils peuvent expérimenter ce refuge. » m

« Les trois grands domaines sur lesquels l’Eglise entend développer le débat pour parvenir à des indications qui répondent aux nouvelles demandes qui surgissent au sein du peuple de Dieu sont en tout cas les suivants : l’Evangile de la famille à proposer dans les circonstances actuelles ; la pastorale familiale à approfondir face aux nouveaux défis ; la relation d’engendrement et d’éducation des parents visà-vis des enfants1. » La dernière étape prendra place courant 2015 sous la forme de l’Assemblée Générale ordinaire du Synode et aura pour mission de formuler les lignes d’action retenues pour la pastorale de la personne humaine et de la famille. Ce vaste processus de consultation est une démarche innovante qui engage une nouvelle prise de parole au sein de l’Eglise catholique sur des questions de société controversées. Soulignons simplement un aspect de cette consultation : la manière diversifiée dont les Conférences épiscopales ont cru bon de rendre public ou pas leur travail d’écoute des acteurs de terrains. m La Conférence épiscopale du Cana-

da2, représentative de la majorité des épiscopats, a choisi de ne pas publier son texte de synthèse envoyé à Rome, selon la démarche habituelle de constitution d’un instrumentum laboris. Elle a simplement diffusé dans la presse quelques indications de fond et de forme sur la teneur des réponses : ampleur des remontées qui souligne

l’importance du thème ; vive appréciation de l’Eglise pour l’engagement et le témoignage généreux des couples mariés et des familles dans un monde marqué par de rapides changements sociaux et affrontés aux problèmes économiques ; faible conscience de nombreux catholiques du contenu positif et de la richesse de l’enseignement social sur le mariage « ce qui pourrait creuser un écart inquiétant entre la doctrine de l’Eglise et la pensée de nombreux catholiques3 » ; souhait de nombreuses réponses, « que l’Eglise arrive à exposer son enseignement d’une manière plus efficace et qu’elle réexamine quelques aspects de sa discipline dans certains domaines ». m Les conférences épiscopales de

Suisse, Allemagne, Pays-Bas et Japon ont publié in extenso leur texte de synthèse. Le texte allemand souligne la multiplicité de l’engagement de l’Eglise catholique au service des familles (écoles-garderies-suivi des couples et des familles) qui est très apprécié des fidèles et facilité par un régime concordataire. Mais il pointe aussi les attentes des fidèles : renouveau de la pastorale des divorcés-remariés avec accès sous certaines conditions aux sacrements ; arguments et langage de la morale sexuelle à rendre compréhensibles ; attente d’une pensée de la notion d’échec dans les rapports humains. Les évêques insistent, dans le dernier paragraphe, sur la nécessité « de trouver à l’intérieur de l’Église une place

Ce cheminement long d’une réflexion synodale souligne combien l’Instrumentum laboris est le point de départ, à partir de l’écoute de la vie du peuple de Dieu, de ses angoisses et de ses espoirs, d’un fin discernement de l’Esprit à l’œuvre dans le monde. Cette tâche est remise entre les mains des Pères synodaux qui auront à répondre de cet appel selon le souffle évangélique qui anime la catholicité… Prions pour que l’Esprit éclaire nos pasteurs porteurs de cet élan dialogal. v 1. Voir sur le site du Vatican le texte de l’Instrumentum laboris n° 158 - conclusion. 2. Mgr Patrick Powers, Secrétaire général, 5 février 2014 : « Une synthèse a été préparée et envoyée au Saint Siège qui résume les réponses obtenues des évêques et des diocèses du Canada aux questions du Document de préparation ». 3. Site de la Conférence des Evêques du Canada. 4. Site de la Conférence des évêques d’Allemagne : Deutsche Bischofskonferenz (DBK). 5. Site de la Catholic bishops conference of Japan.

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Formation chrétienne

Evangélisation et bande dessinée

La foi dans les bulles La bande dessinée chrétienne représente près d’un quart des ventes nationales de BD. En analysant ce résultat, on s’aperçoit que les récits classiques liés aux textes bibliques ou à la vie des grands saints sont les plus nombreux. Quelques idées novatrices apparaissent néanmoins chez certains auteurs qui prennent appui sur leur « passion des bulles » pour témoigner de manière plus singulière de leur foi.

Gilles LELUC, Journaliste

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BD, initiales de Bande Dessinée qui pourraient vouloir dire aussi Bon Dieu. Un clin d’œil amusant et léger qui correspond bien à cet univers de bulles qui a, parfois, souvent, pétillé dans notre regard d’enfant. Le livre d’images est un support pédagogique indéniable et les peintures murales de nos églises, comme leurs vitraux, qui ont autrefois aidé à évangéliser les fidèles, en témoignent. Au siècle dernier, les auteurs du genre, du moins ceux qui se sentaient concernés, ont légitimement pensé que la bande dessinée avait toutes les qualités requises pour favoriser l’enseignement de la foi auprès des plus jeunes. En Belgique, pays pionnier de la BD, le dessinateur Jijé croque la vie de Don Bosco dans Le journal de Spirou dès 1941. Il récidive quelques années plus tard en éditant chez Dupuis Emmanuel, une Vie de Jésus, scénarisée par l’Abbé Balthasar.

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La Bible en manga D’autres auteurs belges et francophones lui emboîtent le pas, et le mouvement s’amplifie. La BD se diversifie dans ses approches stylistiques et scénaristiques et la BD chrétienne suit, se déployant dans de multiples formats, des centaines de langues, telle la récente édition d’une Bible en manga, forme typique des BD japonaises qui se lisent de droite à gauche et dont la popularité est devenue planétaire. Cette bible, dessinée par des auteurs chrétiens convertis, a été diffusée en 17 langues et a atteint plusieurs millions d’exemplaires. Au regard de cette offre exponentielle, on pourrait nourrir de grandes espérances d’évangélisation des jeunes et adolescents. Roland Francart, frère jésuite de la communauté Saint-Ignace à Ixelles, en Belgique, directeur du Centre


ion chrétienne ion chrétienne formation religieux d’information et d’analyse de la BD (CRIABD), tient à relativiser ce succès apparent. Pour participer au prix Gabriel de la meilleure BD chrétienne décerné chaque année par ce centre, « nous n’avons retenu qu’une vingtaine de titres l’an passé », eu égard aux contenus des ouvrages, tant le scénario que le dessin, fait valoir le frère. Pour mieux discerner la qualité des ouvrages, le CRIABD propose un observatoire et une revue critiques où sont recensés les titres récemment édités qui manifestement font sens.

« Evangéliser mon propre imaginaire » Christophe Hadevis Pour leurs auteurs, ce qui fait sens est bien cette transmission de l’expérience intérieure de la foi à travers un sujet directement religieux ou non qui se révélera au lecteur au hasard des pages, dans un dessin, un texte, des personnages. Afin de toucher le plus grand nombre ? Pas nécessairement. Christophe Hadevis, prêtre et scénariste de

BD qui a déjà quatre albums à son actif, résume sobrement : « Je sème. » Certes pour le lecteur mais pas seulement. Passionné de BD et de cinéma depuis le plus jeune âge, Christophe Hadevis explique vouloir collaborer avec des dessinateurs non chrétiens, « dans le but qu’ils soient touchés eux-mêmes » par le sujet qu’ils mettent en images et en couleurs. « Une évangélisation pour une seule personne » qui répond au besoin d’« évangéliser mon propre imaginaire », de « restituer ma propre évangélisation », poursuit Christophe Hadevis, déjà deux fois lauréat au festival d’Angoulême, notamment en 2014 avec une biographie de Benoît Labre (voir bibliographie).

Entre foi et raison Une autre démarche, plus pédagogique, est celle de Brunor, auteur d’une série intitulée Enquête sur Dieu, Les indices pensables, également récompensée en 2012 au festival d’Angoulême. Cette conférence sous forme de récit dessiné cherche à voir s’il y a des raisons de croire alors que, pour beaucoup, les progrès de la science menacent la foi en Dieu. « Je veux seulement transmettre des informations scientifiques pour aider

les gens à y voir plus clair, les rendre libres de choisir. Je n’ai aucune preuve à donner de l’existence de Dieu mais il y a quantité d’indices vérifiables qui montrent que la foi est compatible avec les progrès des sciences expérimentales », explique Brunor, soucieux de montrer comment, « à travers une enquête honnête », convergent intelligence et raison humaine. Le troisième tome de la série a pour titre Le hasard n’écrit pas de message, suggérant Dieu et le réel dans une même alliance. Reflet de l’imaginaire ou support de narration scientifique, le BD démontre avec ces deux exemples une souplesse d’expression, une attractivité et une proximité avec le lecteur qui peuvent en faire un outil privilégié des prédicateurs de la foi en prenant des voies moins attendues que de coutume. Christophe Hadevis tient à rappeler le proverbe chinois : « Une image vaut 10 000 mots ! » v

Bibliographie

Lauréat BD chrétienne du festival d’Angoulême 2014 - Quelques oranges d’écorce amère, Une vie de Benoit Labre. Editions de l’Emmanuel. Par Christophe Hadevis, Erwan Le Saëc, Tatiana Domas Et en 2012 - Enquête sur Dieu Les indices pensables.4 Tomes. SPFC Editions. Par Brunor

Lauréats du prix Gabriel de Bruxelles 2014 - Césaire d’Arles. Editions du Triomphe. Par Christian Goux, Marie-Josée Delage et LouisBernard Koch - Haïku. Editions Petit Pierre & Ieiazel. Par Gabriele Parma, Maurizio Mantero, Luca Malisan A propos de la BD chrétienne - La BD chrétienne. Editions du Cerf. Par Roland Francart

Pour aller plus loin sur internet : v www.bdchretienne.net, site BD chrétienne du festival d’Angoulême v www.criabd.be, site du prix Gabriel de Bruxelles

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Interview de Bernard Bougon, sj.

Le Pour-Quoi du choix Une démarche originale ! Dans deux ouvrages1, Bernard Bougon et Laurent Falque reprennent les grandes intuitions du discernement ignacien sans faire de références explicites et immédiates à la foi chrétienne. Ainsi, ils s’adressent à tous publics, ceux des périphéries existentielles de l’Église selon l’expression du pape François. Voici l’interview du Père Bernard Bougon, jésuite, philosophe et psychosociologue de formation, attaché au département d’éthique publique du Centre Sèvres (Faculté jésuite de Paris). Bernard Bougon, sj. FOI : Votre premier ouvrage Pratiques de la décision - développer ses capacités de discernement en est à sa 3ème édition. Comment expliquer que cette question du choix nous préoccupe autant ? Est-il si difficile de faire des choix ? Restons modestes, ce sont quelques milliers de livres vendus. Les connaisseurs disent, cependant, que ce n’est pas négligeable pour ce type d’ou-

vrage. Une recension récente, sur le web, qualifiait ce premier livre de « savant et pratique ». C’est exactement ce que nous avons voulu faire. Alors pourquoi semble-t-il si difficile de faire des choix ? A mon sens, parce que faire des choix ajustés et cohérents est un chemin de liberté. Et, hier comme aujourd’hui, cette liberté demeure difficile à notre humanité. Nombre de philosophes n’ont cessé de le rappeler. S’ajoutent des raisons secondes : complexité, manque d’informations fiables, blocages psychologiques, etc. FOI : Dans ce nouvel ouvrage, Discerner pour décider, vous posez, avec Laurent Falque, les bases des critères du discernement (disposition de l’esprit à juger clairement et sainement les choses) dirigées vers la question du « Pour Quoi ? ». Cela revient-il, dans la vie de travail, à remplacer le « Comment ? » par le « Pour quoi ? » comme fondement de toutes décisions ? N’est-ce pas là une vision utopiste ?

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Lorsqu’une question se pose, soit au niveau personnel, soit dans une entreprise et plus largement dans toute organisation, nous sommes immédiatement tentés d’aller directement aux solutions qui nous apparaissent évidentes. Ce que l’américain Herbert Simon appelle un choix satisfaisant : se saisir de la première option qui nous paraît possible ou à portée de main… Quelquefois cela marche. Mais, le plus souvent non ou pas longtemps. Discerner - selon la définition du Petit Robert que vous venez de rappeler - demande de répondre à une double question : 1) Pourquoi devons-nous faire un choix ? Autrement dit, quel est le problème qui se pose à nous ? L’expérience montre qu’il n’est pas toujours aisé de poser clairement ce dernier. 2) Pour quoi, en vue de quoi, devonsnous faire ce choix ? La réponse à cette question fournira comme un guide qui nous permettra d’identifier la solution la plus pertinente avec ce que nous désirons réaliser. Elle permettra aussi de mettre en ligne, les uns avec les autres, les choix successifs que nous aurons à faire. Cela donne une véritable cohérence à l’action, condition de son efficience comme de son efficacité.


ion chrétienne ion chrétienne formation FOI : Votre approche du processus de décision par le discernement est inspirée de l’expérience d’Ignace de Loyola. Vous arrive t-il d’y faire référence en tant que consultant ? En tant que consultant, non, pratiquement jamais. Sauf en passant, pour faire entendre que nous puisons à une tradition ancienne et que nos sources sont solides. FOI : Pourquoi cette pratique si pertinente de la décision Ignacienne n’estelle pas enseignée dans les universités ? Probablement parce qu’elle est ignorée. Les raisons à cette ignorance sont diverses et, à mon sens, ne relèvent pas seulement de la neutralité en matière religieuse qu’entend observer l’Université. Les jésuites, de leur côté, ont souvent cantonné ce trésor du discernement à ce qu’ils estimaient être le plan spirituel… FOI : Dans le processus de décision professionnelle que vous développez, la découverte de sa finalité permet d’éclairer ses propres choix. Qu’en est-il dans les décisions de ‘‘groupes projets’’ où les finalités individuelles et les objectifs des personnes ne sont pas forcément convergents ? Même si les membres d’une ‘‘équipe projet’’ ont des finalités personnelles différentes, au final c’est le fait d’être réunis pour travailler sur un même projet, dont la finalité doit être aussi claire que possible, qui l’emportera.

Le film « 12 hommes en colère » de Sidney Lumet.

« Ayant ainsi acquis une certaine liberté personnelle, il est en mesure d’aider chacun à prendre à son tour un peu de distance par rapport à ses préjugés. »

La finalité d’un projet se déclinant en buts à atteindre (tel résultat dans tel délai et selon tel cahier des charges, etc.) et en objectifs permettant de mesurer les avancées vers chacun de ces buts. Nous en donnons l’un ou l‘autre exemple dans notre ouvrage, empruntés à notre expérience. Je pense que beaucoup de ceux qui ont participé à de tels projets transversaux réussis pourront s’y reconnaître.

tions de chacun en fonction de leurs histoires personnelles, leurs besoins... pour prendre à l’unanimité une décision grave. Comment parvient-on à retrouver ensemble davantage de libre arbitre pour délibérer ? Cette pièce de théâtre, comme le film, montrent une délibération à l’œuvre, où chacun est invité à retrouver une forme de liberté personnelle par rapport au choix à faire. Cela suppose la présence d’un accompagnateur assez libre. Dans le film, ce rôle est tenu par Henry Fonda. Juré n°8, il a mené, avant la fin du procès, une sorte d’enquête personnelle, sur le terrain, qui lui a montré une outrance de l’accusation. Dès lors, pour lui, il y a doute. Ayant ainsi acquis une certaine liberté personnelle, il est en mesure d’aider chacun à prendre à son tour un peu de distance par rapport à ses préjugés, ses certitudes, ses peurs ou ses mobiles secrets...

FOI : Pour illustrer l’implication des équipes dans une décision collective, vous prenez l’exemple du film Douze hommes en colère. Cet exemple captivant montre la diversité des motiva-

Ce travail d’accompagnement, où chaque membre du jury accède à une certaine vérité sur lui-même, rend cette délibération passionnante. Elle est aussi très éclairante sur la manière

dont, à partir d’une grande diversité de positionnements de ses membres, un groupe peut accéder à une vérité nouvelle. En un mot, la démarche de discernement, en raison de l’approfondissement de la liberté personnelle et collective qu’elle suppose, œuvre à l’humanisation de chacun et de tous dans leurs actions propres. v Propos recueillis par Thierry Roche 1. Deux livres de Laurent Falque & Bernard Bougon - Pratiques de la décision - Développer ses capacités de discernement, Collection : Stratégies et Management, Dunod 2013 - 3ème édition. - Discerner pour décider - Comment faire les bons choix en situation professionnelle, Collection : Stratégies et Management, Dunod - mai 2014

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Viser quelle réussite?

Du 8 au 10 mai, 400 jeunes professionnels se sont réunis à Lyon lors du Forum Jeunes Pros sur le thème “Viser quelle réussite ?”

Jean-Baptiste, 27 ans, Analyste Communication financière dans une entreprise du secteur de l’environnement

Manon, 26 ans, Responsable financière d’une ONG humanitaire.

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« Je ne vois non plus mon travail comme une obligation “alimentaire”, mais comme un lieu possible de sanctification.»

« “On ne devient pas saint en restant dans une chapelle” Cette phrase me suit depuis et m’appelle à l’action. »

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« Je ne pourrai tenir dans la durée qu’en tenant ferme dans la prière. »

« On a toujours une marge de manœuvre. »

u « Demander l’Esprit Saint pour éclairer toutes mes petites décisions de la journée et garder mes relations de travail dans la paix. »

Aude-Marie, 25 ans, adjointe RH dans une entreprise du secteur agroalimentaire

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« Comment être chrétienne au quotidien, dans une entreprise dont l’activité et le modèle sont très critiqués ? »

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« C’est dans ton entreprise que tu es appelée à être Sainte, là où il reste beaucoup à faire, là où tout n’est pas juste... » PY Gomez

« On a toujours une marge de manœuvre. »


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Qu’as-tu fait de ton travail ? Pierre--Yves Gomez,

Economiste, Docteur en Gestion, Professeur de management et stratégie à l’EM Lyon business school, fondateur du parcours Zachée sur la doctrine sociale de l’Eglise.

Derrière le souci de la réussite professionnelle, se pose une question beaucoup plus profonde qui est celle du sens de notre vie. Or, cette recherche profonde de sens, l’homme ne la poursuivrait pas s’il ne savait pas au fond de lui-même que ce sens existe et qu’il est nécessaire. Ce cri de l’homme a déjà sa réponse en lui, comme le dit St Augustin : « Tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais déjà trouvé. » C’est pourquoi, nous sommes invités à mieux écouter le cri de l’humanité en quête de sens. Ce n’est pas toi qui crie désespérément, mais c’est Quelqu’un qui t’appelle à accomplir quelque chose, à construire du sens. Pour nous chrétiens, cette quête universelle porte un nom considérable et parfois impressionnant : c’est l’appel à la sainteté ! Et pourtant, c’est quelque chose de simple et de vital. Rien d’autre que l’appel de Quelqu’un qui nous dit : « Viens, il y a un sens à ta vie. Tu es fait pour ce sens ! ». Tel est l’appel qui nous est adressé en premier lieu dans notre vie quotidienne, « Soyez saints comme votre Père est saint ! » (1P 1,16), et cela au sein même de nos activités professionnelles, car le monde où Dieu nous a plantés est l’espace donné, le seul espace pour notre sanctification. Le travail n’est donc pas une espèce de malédiction que l’homme est appelé à subir parce qu’il lui faut manger ou payer son loyer. L’être humain, au sens philosophique du terme, est profondément un être pour le travail, c’est-à-dire un être pour la participation à la Création. Ainsi, le travail n’est pas uniquement un effort quotidien pour payer ses charges et survivre, il permet de construire une société, d’embellir l’environnement, de faire partie du monde, de mettre ses compétences au service des autres.

L’humanisation passe par le travail, c’est ce que nous rappelle Jean-Paul II dans l’encyclique Laborem exercens (1981) : « Le travail est un bien de l’homme - il est un bien de son humanité - car, par le travail, non seulement l’homme transforme la nature en l’adaptant à ses propres besoins, mais encore il se réalise lui-même comme homme et même, en un certain sens, il devient plus homme » (n°9).

«Le travail n’est pas une charge en plus parmi nos activités : il nous humanise, et parce qu’il nous humanise, il nous sanctifie. »

Le travail n’est donc pas une charge en plus parmi nos activités : il nous humanise et parce qu’il nous humanise, il nous sanctifie. « Le Verbe s’est fait homme et le Fils de Dieu, afin que l’homme, en entrant en communion avec le Verbe et en recevant ainsi la filiation divine, devienne fils de Dieu » écrit Saint Irénée. Et Dieu s’est fait charpentier… Alors quelle réussite professionnelle peut-on viser ? La performance, le gain financier, le matérialisme, la reconnaissance à tout prix, le vertige du toujours plus ?… « Qui nous fera voir le bonheur ?» demande le psalmiste. Et il implore : « Fais briller sur nous la lumière de Ta face. » (Ps 4) Quatre balises peuvent nous guider sur ce chemin : - Apprenons à être libre ! La vérité vous rendra libre (Jn 8). Être libre, ce n’est pas faire ce que je veux, car précisément le plus souvent, je n’arrive pas à faire ce que je veux et c’est la frustration ! Être

libre, c’est assumer les difficultés de la vie, croire à la lumière qui est derrière elles et au moment des grands choix, choisir la vie. - Imitons Jésus Christ ! Imaginons la vie de Jésus comme charpentier, la vie quotidienne de Jésus pendant 30 ans, qui a connu les difficultés, des clients qui ne le payaient pas, les fournisseurs indélicats, etc… Mais aussi les joies du travail bien fait, des échanges et des coopérations… Sa vie, c’est notre vie. - Comptons sur l’Eglise, c’est-à-dire sur la communauté des croyants, sur la fraternité, même et surtout au travail ! Ne restons pas seul, parce qu’on est vite broyé par le travail, la routine, l’enfermement, la peur… et on peut se couper de la lumière, perdre le sens de notre vie. Comptons sur l’Eglise, qui est une communauté, mais aussi porteuse d’une sagesse particulièrement éclairante sur le sens du travail. - Enfin, ouvrons-nous à la grâce ! En toute confiance, croyons que Dieu nous attend aussi sur notre lieu de travail. Voici la prière que je vous invite à faire tous les matins : « Seigneur, tu m’attends aujourd’hui sur mon lieu de travail, je te présente mes collègues, mes élèves, mes clients, mes fournisseurs… ceux que je vais rencontrer. Merci de me donner de vivre avec eux, de partager leur joie et leur espérance, de compter sur eux comme ils comptent sur moi. » Le travail peut alors devenir le lieu même de notre sanctification parce que Dieu y est présent.

Retrouvez les conférences en ligne.

forumjeunespros.com

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arié et père de famille, Nicolas de Lambert, directeur Essilor Europe, témoigne de son parcours professionnel. Il a débuté sa carrière chez Danone, et décide à 41 ans de changer d’entreprise. Parallèlement, il vit une expérience spirituelle qui va changer profondément sa vie...

TEMOIGNAGE

« Essilor est une entreprise un peu atypique issue d’une fusion entre une coopérative ouvrière, S L, et une société commerciale, Silor. Elle porte des valeurs importantes pour moi, comme l’utilité sociale du produit qu’elle vend et la mission associée à ce produit. L’utilité sociale du verre de lunette est très forte. Quand on change la vue de quelqu’un, on lui change sa vie ! Dans nos missions au Vietnam, on équipe des enfants qui n’ont jamais eu accès à des lunettes. On leur ouvre un monde complètement nouveau. Ils ne se sont jamais vus et n’ont jamais vu leurs parents. C’est très émouvant. On le constate aussi soi-même si on porte des lunettes ! Essilor a pour mission d’équiper le plus grand nombre de personnes possible. Sur 4,2 milliards de personnes sur terre qui ont besoin de lunettes, 1,5 milliard sont équipés. Il en reste 2,7 milliards ! Un champ d’action énorme ! Aussi, les valeurs d’autonomie, de confiance, de respect que nous vivons chez Essilor donnent du sens à mon quotidien. Sur le plan spirituel, j’ai rencontré un père carme et, grâce à lui, j’ai rencontré le Christ. La spiritualité du Carmel est basée sur une intimité avec Dieu notamment dans la prière, que Ste Thérèse définit comme « un commerce d’amitié où l’on s’entretient souvent dans la solitude avec celui dont je sais qu’Il m’aime ». Cherchant des moyens concrets pour avancer, j’ai trouvé une église ouverte tôt le matin près de mon bureau. Ce temps d’oraison du matin m’ancre profondément dans ma relation avec le Christ et cela illumine ma journée.

« En effet, pour moi, vivre c’est le Christ » Gal 2,20. Cette parole me bouleverse quotidiennement. Dieu, que je pensais un peu loin, vit en fait dans mon cœur. Il vit en moi, et je vis de la vie même du Christ. Alors quelle place je lui fais dans mon cœur ? Et puis, s’il vit en moi, Il vit aussi en l’autre ! Quelle relation j’ai avec mes collaborateurs, mon patron, mes fournisseurs, mes clients mais aussi avec des personnes moins en vue comme le veilleur de nuit qui est là quand je pars un peu tard du bureau ? La vie professionnelle est compliquée, il y a des conflits, de la violence parfois, cela peut être extrêmement dur. Le pape François parle de fraternité qui transforme le monde et qui transforme les relations. Je crois que cela peut se vivre aussi au travail : est-ce que je vois l’autre comme un concurrent ? ou bien comme un frère ?

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Le travail… un appel de Dieu ? A deux reprises, mon patron me propose de prendre une nouvelle responsabilité, d’abord la direction d’Essilor France, et trois ans plus tard l’Europe du Sud. Pour moi, c’était inimaginable. La France étant la plus grosse filiale du groupe, je ne me sentais pas à la hauteur d’une telle responsabilité. Je réponds non ! Invité à réfléchir, j’en parle à mon père spirituel qui me propose de demander la prière des frères (je fais partie d’un groupe de spiritualité carmélitaine). Pendant plusieurs jours, je suis habité par cette parole : « Choisis la vie » Dt 30,19. Cela signifiait de choisir la confiance, d’aller de l’avant. Je suis donc retourné voir mon patron pour lui dire que j’acceptais ! Je suis passé d’un regard humain à un regard éclairé par le Christ. Les postes que j’occupe ne sont plus une position à occuper, mais la réponse à un appel. Cela change tout ! Régulièrement, je me pose cette question : quelle est ma mission profonde ? Où le Seigneur m’appelle-t-il à porter du fruit ? Cela me donne une force incroyable parce que je sais que le Seigneur m’attend là. Alors on ne parle plus d’ambition car la véritable ambition c’est d’être là où le Seigneur m’appelle. Chacun a une mission, nous sommes tous appelés à porter du fruit. La question c’est : où le Seigneur m’appelle-t-il dans ma vie professionnelle ? Quelle est la place où je vais pouvoir développer mes talents ? J’ai pris conscience que je pouvais avoir des marges de manœuvre à la place que j’occupais. En France, 15% des personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté et ne peuvent pas s’acheter de lunettes. J’avais le désir de faire quelque chose. Est-ce le rôle de l’entre-

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Jean-Paul Cottet

Dir. Exécutif Innovation, chez Orange


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prise ? D’un côté, il y a l’ultra libéralisme dont l’objectif est de maximiser les profits, mais ça ne diminue pas la pauvreté ! De l’autre, il y a le « Charity » ou la philanthropie, et là on manque de moyens ! Un jour, poussé par l’Esprit, j’en parle à des amis et l’une me dit : « Pourquoi ne lances-tu pas un social business en France sur les lunettes ? ». Tout à coup, cela m’a paru évident ! Trois ans après naissait Optique Solidaire – une association avec des ophtalmologistes, des opticiens, des assurances complémentaires, des fournisseurs de monture – dont le but est d’équiper des personnes de 60 ans et plus qui n’ont pas les moyens de se payer des lunettes. Nous avons tous la capacité de faire bouger les choses. On peut penser que c’est plus simple quand on occupe un poste à responsabilité, mais c’est faux. Il faut simplement croire et essayer d’aller au bout de ce que l’on porte, et voir si l’Esprit nous confirme.

Un message pour les jeunes pros ? Soyez vous-même ! Soyez profondément vous-même dans la vie professionnelle, recherchez une cohérence entre votre vie personnelle, spirituelle et professionnelle. On ne peut pas être heureux avec un désir dans le cœur et vivre autre chose dans sa vie professionnelle. Je vous encourage à travailler sur ce point si vous avez ce sentiment. Pour cela, il est nécessaire d’avoir confiance en vous. Ayez profondément confiance en ce que vous êtes ! Vous avez reçu des talents, développez-les ! Entourezvous d’amis, trouvez des lieux de ressourcement, d’écoute et de discernement. Soyez acteurs et moteurs de vos choix. Ne les subissez pas, ne pensez pas qu’il y ait un système que vous devez subir. Il n’y a pas de système, vous pouvez faire bouger les lignes quel que soit l’endroit où vous êtes. Il faut que vous en soyez convaincus ! Quand il y en a un qui fait bouger les lignes, puis un deuxième, ça fait boule de neige ! Soyez dans votre lieu de travail bienveillant et fraternel. Osez la bienveillance, osez la fraternité au travail, en changeant de regard sur vos collègues, votre patron, etc… Enfin “Soyez toujours dans la joie, priez sans cesse, rendez grâce en toutes circonstances (1Th 5,16-24)” et choisissez la vie ! »

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14-18 ANS

• MONT-SAINT-MICHEL: 26-28 sept. pour les étudiants et jeunes professionnels de 18-30 ans. Deux jours avec des gens géniaux, pour recharger tes batteries et commencer ton année avec Dieu, guidé par l’Essentiel ! • WE TALENTS & LEADERSHIP : 1819 oct. à Paris (Puteaux 92). Découvrir ses talents, les faire fructifier et s’équiper pour devenir un leader chrétien, influent dans le monde ! Apprendre à mieux se connaître et à travailler en groupe pour s’investir dans la mission au service de Dieu et des autres !

• WEEK-END MUSIQUE 14-18 ans. Du 25 au 27 oct. à Paris (91). Pour tous ceux qui veulent apprendre le répertoire 14-18 ! Ateliers possibles : chorale, danse, orchestre. • KEEP IN TOUCH ! Semaine 16-18 ans du 27 oct. au 1er nov. à Paris (91). Avec plus de 100 lycéens: réfléchir, partager, prier, faire la fête…l’oxygène de ta rentrée ! Thème: Exploration sous-marine, connais-toi toi-même. Viens explorer ta personnalité pour poser les bons choix.

• WE FAMILLE & RELATIONS : 8-9 nov. à Nancy, 15-16 nov. à Paris (Tigery), 22-23 nov. à Lyon (Hautecombe) et à Angers, 17-18 janv. à Marseille. Mieux se connaître à travers son histoire. Apprendre à pardonner et construire des relations vraies et libres. • WE JEUNES PROS - 22-32 ans. Paris (Livry) 22-23 nov. «Discerner pour décider», sous le regard de Dieu avec Bernard Bougon. Lyon (Les Pothières) 29-30 nov. «Tous leaders !» avec Nathalie Aubé • RETRAITE JERICHO : du 28 déc. au 3 janv. à Tigery (91) et Hautecombe (73). S’arrêter et se mettre à l’écoute de Dieu. L’occasion de mieux connaître le Seigneur et accueillir son Amour, apprendre à prier avec la Bible et partager avec d’autres. Et surtout, commencer la nouvelle année avec Dieu ! • De nombreuses autres propositions : messe des jeunes, soirées de louange, soirées Jeunes pros, soirées de formation, fraternités, groupe Appel, etc. • Secretariat 18-30 ans : 01 47 74 93 73 ou 06 30 14 06 96 jeunes.france@chemin-neuf.org www.jeunes.chemin-neuf.fr

• WEEK-ENDS REGIONAUX : des week-ends près de chez toi pour se retrouver et construire de vraies amitiés, se poser avec des temps spi, se détendre dans la louange et la fête ! A chaque week-end, un thème à découvrir : Talents à développer, Famille-Mode d’emploi, Les copains d’abord… Paris : 11-12 oct. et 29-30 nov. Lyon : 11-12 oct. et 6-7 déc. Région Est : 6-7 déc. Région Ouest : 22-23 nov. Région Sud : 22-23 nov. Bretagne : 22-23 nov. • INFOS et INSCRIPTIONS au Secrétariat 14-18 ans : 04 78 15 07 98 ou 06 61 61 02 72 14-18ans@chemin-neuf.org www.14-18ans.chemin-neuf.fr

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Un tour du monde

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La Belgique

un peu d’histoire « De tous les peuples de la Gaule, les Belges sont les plus courageux », ce n’est pas moi qui le dis mais bien Jules César, donc c’est sûrement vrai ! C’est dire que nos peuplades existent depuis un certain temps déjà. Mais notre pays qui n’existe que depuis 1830 tel qu’il est aujourd’hui, a été traversé par beaucoup de guerres et occupé par de nombreux pouvoirs (espagnols, autrichiens, français, néerlandais). Suite à la chute de Napoléon, le traité de Vienne (1815) nous place sous domination hollandaise et donc des protestants alors que les belges sont catholiques. Cela empêche de facto l’espoir de l’unité de ce nouveau pays avec des partenaires qui ne se sont pas choisis ! Le soulèvement des Belges est alors inévitable. Différentes manifestations en 1830 amènent progressivement l’indépendance de la Belgique. Cette monarchie sera confiée à la famille allemande de Saxe-Cobourg-Gotha et, le 4 juin 1831, Léopold (Ier) devient le premier roi des Belges. Il prête serment le 21 juillet 1831, date qui restera comme fête nationale. Au 19ème siècle, la Belgique profite à plein de la révolution industrielle car elle possède du charbon et du fer, en Wallonie principalement. La région devient ainsi le deuxième producteur mondial d’acier et de charbon. Dans les années 60-70, on ferme les charbonnages et la sidérurgie décline petit à petit. La Flandre devient la région la plus

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productive et la plus riche du pays, principalement en développant des entreprises de transformation (usines de montage de voitures notamment) Les deux régions, ayant connu des fortunes diverses en matière économique, ont dû développer des solidarités financières par des transferts d’une région vers l’autre (et vice versa) à des moments différents de leur histoire. Sous la pression conjointe du mouvement flamand et des régionalistes wallons, la Belgique évolue progressivement vers un État de plus en plus fédéralisé. Lois linguistiques de 1963, Constitution adaptée en 1994 et en 2004, nouvelle volonté de la Flandre d’établir un état confédéral… Aujourd’hui, le pays est constitué de trois régions : la Wallonie, la Flandre et Bruxelles, chacune dotée d’une autonomie de plus en plus importante. On y parle trois langues : le flamand en Flandre, le français en Wallonie et à Bruxelles, et l’allemand dans l’extrême est de la Wallonie. Au-delà des différences qui séparent, de nombreux Belges souhaitent pourtant conserver l’unité du pays. Connaître mieux l’autre communauté linguistique est certainement une des clés pour un avenir ensemble. v Philippe Englebert, ccn La mer du Nord. La Communauté - Communion de Belgique. Antwerpen (Anvers). Le Carmel de Mehagne. Les Jeunes de la Mission Jeunes en Belgique.


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la communauté en belgique L’histoire de la communauté en Belgique commence réellement en 1989, lorsque le Cardinal Daneels lui confie une maison d’accueil de 40 chambres à La Hulpe, en périphérie de Bruxelles, à l’invitation des Sœurs du Cénacle. Pendant plus de 20 ans, cette maison du Cénacle à La Hulpe abritera 2 à 3 familles et quelques célibataires, ainsi qu’une dizaine d’étudiants qui poursuivront leurs études de théologie à l’IET de Bruxelles. La plupart garderont de leur passage à La Hulpe le souvenir d’un lieu magnifique, d’une convivialité typiquement belge, mais aussi parfois d’un difficile équilibre entre les missions et le temps nécessaire aux études. C’est essentiellement à partir de ce pôle et d’une maison à Kraainem (Bruxelles), que la Communauté, la Communion et les fraternités Cana se développent peu à peu, et que les missions s’organisent en Belgique, jusqu’à rassembler en tout une petite centaine de personnes. Une page se tourne cependant lorsqu’en 2010, la Communauté doit quitter Le Cénacle.

Le diocèse, propriétaire du bâtiment a décidé de le revendre et interrompt la convention en cours. La Communauté vivra alors l’expérience dynamisante de devoir fonder son existence sur la réalité d’un corps communautaire plutôt que sur la présence d’une maison et d’une fraternité de vie. Mais un an après avoir quitté La Hulpe, l’évêque de Liège, à 100 kms de là, invite la Communauté à reprendre le beau Carmel de Mehagne. C’est le début d’une nouvelle fondation qui portera beaucoup de fruits. La mission Jeunes en particulier sera particulièrement dynamisée, si bien que deux foyers d’une dizaine d’étudiants, appelés «kots» en Belgique, seront créés, l’un au carmel, l’autre à proximité de l’université dans le centre de Liège. Avec sa vingtaine de chambres disponibles, le Carmel permet d’accueillir des sessions et week-ends Cana, des retraites mais aussi quelques groupes extérieurs en recherche d’un lieu de silence ou de formation.

Il y a deux ans, une congrégation de religieuses contemplatives a proposé à la Communauté sa maison-mère, située à Anvers, dans la région flamande du pays, à trente minutes de l’abbaye d’Oosterhout aux Pays-Bas. Ses 40 chambres, après de sérieux travaux de rénovation, pourront abriter un beau foyer d’étudiants dans cette ville universitaire. Mais notre présence dans ce lieu en Flandre invite surtout à entrer davantage dans notre charisme d’unité en choisissant l’inculturation, à devenir, à notre mesure, pont entre les deux communautés linguistiques de notre petit pays. Aujourd’hui, avec une vingtaine de membres engagés, dont une majorité de couples, et une quinzaine dans la Communion, nous essayons de relever le défi d’animer ces deux nouvelles maisons. Même si les ouvriers sont toujours trop peu nombreux, nous ne pouvons qu’admirer l’œuvre du Seigneur dans les cœurs à travers les missions qu’Il nous confie. v

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Didier Van Laethem, ccn

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La semaine communautaire des paroisses

Une semaine au goût de fondation ! Réunis en cet été 2014 pour une seconde semaine communautaire à l’Abbaye des Dombes, en présence de Mgr Philippe Ballot, archevêque de Chambéry et de Mgr Renaud de Dinechin, évêque auxiliaire de Paris, quelques 300 paroissiens et frères et sœurs de la communauté engagés en paroisse se sont retrouvés pour partager et prier ensemble. Il y a deux ans, la première semaine avait confirmé, devant l’urgence de la mission et l’encouragement de l’Eglise, le bien-fondé de la création des fraternités paroissiales missionnaires du Chemin Neuf, tout en se donnant deux années d’expérimentation et de discernement. Représentant, cette année, dix-neuf paroisses, dont treize en France et six à l’étranger, paroissiens et membres de la communauté, plus nombreux qu’à la première édition, étaient fidèles au rendez-vous !

« C’est en lui encore queavons nous avons étéàmis à part, désignés « C’est en lui encore que nous été mis part, désignés d’avance d’avance (…) C’est en lui que vous aussi, après avoir entendu (…) C’est en lui que vous aussi, après avoir entendu la Parole de vérité, la Parole de salut, vérité,et l’Evangile de votre y avoir cru, d’un sceau l’Evangile de votre y avoir cru, voussalut, avezetété marqués vousde avez été marquéscet d’un sceau par l’Esprit de la Promesse, par l’Esprit la Promesse, Esprit Saint qui constitue les arrhes de cet Esprit Saint qui constitue les arrhes de notre héritage. » notre héritage. » Eph 1, 11-14Eph 1, 11-14

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« Cette semaine, on a rejoint l’Octave de Noël et l’Octave de Pâques. Dans la tradition chrétienne, l’Octave c’est comme une unique journée. Nous avons vécu cette semaine comme une unique journée tellement nous voulions suivre Jésus et écouter l’Esprit Saint », relisait Mgr Ballot à la fin de la semaine. Partageant les journées entre vie fraternelle, services, enseignements, temps de prière, de célébration et de fête, cette rencontre avait pour premier objectif de relire l’expérience des deux dernières années. A l’écoute des uns et des autres, il semblait que l’expérience menée depuis deux ans dans les paroisses confiées à la communauté du Chemin Neuf confirme l’intuition des fraternités paroissiales.


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Nous nous sommes laissé conduire par l’Esprit Saint.

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Depuis deux ans, nous expérimentons les fraternités missionnaires paroissiales du Chemin Neuf à Levallois. Nous aimons partager, sous le regard du Seigneur, avec nos frères prêtres, religieux ou « laïcs » comme nous. Nous aimons confier notre « ici et maintenant », et nous porter les uns les autres dans la prière. Cet été, nous avons retrouvé les codes traditionnels de semaine communautaire, la vie en village, l’hébergement sous la tente (quand il ne pleuvait pas !), les camps séparés pour les enfants.

Nos quatre enfants sont partis le premier jour dans leurs camps respectifs. Nos filles aînées dont l’anniversaire de 14 ans a été fêté le 1er jour du camp (leur permettant ainsi d’entrer dans la famille si convoitée des 14-17 ans !) ont vécu aux Pothières une semaine qu’elles qualifient de « merveilleuse ». Elles ont aimé l’écriture au démarrage d’une charte de vie commune, stipulant notamment l’interdiction des bandes à part, l’écoute de l’autre sans l’interrompre, etc. Elles ont goûté la liberté (sans les parents), les fraternités, l’Adoration et les nombreuses activités sportives et culturelles, dont le laser game ! Nos plus jeunes enfants sont partis à Montagnieu, où ils se sont fait beaucoup d’amis, ont visité le musée de l’automobile et ont été très touchés par la disponibilité des serviteurs.

Quant à nous adultes, nous avons été portés par la bienveillance de chacun, le talent et la joie des orateurs, et plus que tout, par la certitude palpable que le Seigneur était à l’œuvre pour nous inspirer la suite à donner à ces fraternités. Sous son regard, nous avons choisi de poursuivre les fraternités, et de mettre l’accent sur la formation de ses membres afin d’être réellement des missionnaires annonçant l’Evangile. La mission de partage et service a été réaffirmée. Cette semaine a été, comme chaque fois, l’occasion de magnifiques rencontres. Découvrir la vie des autres paroisses en France et hors de France, et même en dehors du Chemin Neuf, est très stimulant. Famille Kersaintgilly, Levallois-Perret (92)

Certains paroissiens témoignent de la « contagion de la fraternité » qu’ils ont vue dans leur paroisse, d’autres de « la joie et la nécessité d’être ensemble pour l’évangélisation ». Le souhait partagé par la plupart est « que ceux qui sont à la périphérie de la paroisse soient attirés par la vie fraternelle ».

Ensemble dans la fraternité paroissiale, membres engagés dans la communauté et paroissiens ont témoigné qu’ils se sentent de plus en plus « frères et sœurs », faisant partie du même corps au service de tous.

La parole d’accueil du P. Laurent Fabre fut ainsi très vite confirmée : « Depuis le début, le Seigneur nous a conduits. Ce projet, c’est l’appel de l’Esprit Saint, et pas seulement pour nous. » Ensemble dans la fraternité paroissiale, membres engagés dans la communauté et paroissiens ont témoigné qu’ils se sentent de plus en plus « frères et sœurs », faisant partie du même corps au service de tous.

Comme dans toute semaine communautaire, le partage était nourri d’enseignements. La figure du Pape François, sa parole et surtout sa vision de l’Eglise ont été autant d’encouragements pour cette fraternité paroissiale naissante, dont les contours se dessinent progressivement. « Le pape François veut une Eglise pauvre, qui protège les familles, une Eglise qui sorte au-delà des frontières et qui mette l’œcuménisme au cœur de la vie d’Eglise, une Eglise qui accueille le Baptême dans l’Esprit Saint et les charismes », soulignait le Père L. Fabre. Les interventions qui ont suivi permettaient de voir que ce que la communauté du Chemin Neuf sait faire depuis 40 ans peut être partagé avec les paroisses : l’expérience du Baptême dans l’Esprit Saint, les cours Alpha, une réflexion et une expérience de la vie paroissiale depuis une vingtaine d’années, la mission auprès des couples et des personnes séparées ou divorcées, l’évangélisation des enfants, l’accompagnement spirituel. >>>

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Pascale Paté, ccn

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Le mot fraternité me touche, car c’est la première chose que Jésus a proposée à ses disciples : vivre la fraternité avec lui. Les apôtres Pierre et Paul ont fait l’expérience de leur pauvreté devant le Christ et leurs frères avant d’être missionnaires de l’amour gratuit de Dieu pour tous.

Après 25 ans de vie dans la communauté du Chemin Neuf, je cueille ce merveilleux fruit d’être plus vrai dans l’accueil de ce que je suis. Si la communauté est un lieu où l’on partage des richesses, c’est surtout le lieu où j’expérimente, avec miséricorde, la grâce d’être un pauvre avec d’autres pauvres sous le regard de Dieu. Quand on se sait aimé, on peut se montrer sans peur tel que l’on est. Cela m’aide à accueillir sans crainte, comme des frères, ceux vers qui je suis envoyé quelles que soient leurs pauvretés. Je suis heureux de voir que certains paroissiens se sentent appelés à ce chemin d’alliance avec la communauté dans les fraternités paroissiales missionnaires du Chemin Neuf. Avec mes frères, je suis aimé pour ce que je suis et non pas pour ce que je fais : quelle bonne nouvelle.

1- Parole du P. Vincent Breynart, ancien curé de la paroisse St André à Reims.

Touchés par la joie de servir avec des frères communautaires et témoins des fruits de la spiritualité ignacienne, la proposition de participer à la semaine « frat paroissiale » de 2012, en tant que paroissiens, nous a tout de suite emballés, car elle nous appelait à aller « plus loin ». Les deux années vécues en fraternité paroissiale nous ont permis de partager des « trésors » de la Communauté. Lesquels en particulier ? - Une vraie fraternité créée avec des personnes que nous ne connaissions pas. - La sincérité de nos partages nous a édifiés. - Le Seigneur nous parle par nos frères et sœurs !

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FOI • N°42

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Cette semaine de rencontre avait pour second objectif d’écouter la volonté de Dieu sur ce projet des fraternités. Fruit de la prière communautaire, et des interventions des uns et des autres, une évidence est apparue petit à petit : en participant à ces fraternités paroissiales missionnaires, des paroissiens et des membres de la communauté répondent à un appel de Dieu. Appelés à partager la fraternité, la mission et l’évangélisation, mais aussi la formation. Si la paroisse est « un lieu extraordinaire pour la nouvelle évangélisation, c’est-à-dire un lieu d’engendrement à la foi 1 », cependant le Père Fabre a rappelé « qu’il est impératif qu’elle soit aussi le lieu de formation des disciples de Jésus, une formation qui approfondit le kérygme et conforme le disciple au Christ. » La qualité des engagements, lors de la dernière Eucharistie, fut une réponse joyeuse à cet Appel à servir dans et pour la fraternité dans les paroisses. v

• Septembre - Octobre - Novembre 2014

P. Jean-Michel Bernier, curé de la paroisse Ste Trinité à Chambéry

Sans que notre fraternité soit un lieu de mission en tant que tel, nos rencontres ont nourri nos différentes missions. La prière des frères nous a aidés à gagner certains combats ou à discerner certains choix. Enfin, pour reprendre une formule entendue lors de la semaine communautaire paroissiale de 2014 : notre désir de nous configurer au Christ a grandi grâce à la fraternité. Notre choix de vivre le cycle A, à Saragosse, en septembre 2014, a été mûri durant ces deux années de fraternité paroissiale missionnaire. Nous rendons grâce à Dieu pour cet appel à vivre davantage unifiés en nous-mêmes, en couple et entre frères et sœurs, chrétiens de différentes confessions, paroissiens et communautaires ! Isabelle et Damien Hanus, Paroisse St André à Reims


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Talents

« Je pratique la planche à voile olympique comme sport de haut niveau au Centre d’entraînement de Marseille. Au cours des trois dernières années, j’ai remporté deux victoires au championnat de France Jeune, deux médailles au championnat du Monde Jeune (bronze et argent), et actuellement championne d’Europe en titre. Je réalise à quel point je ne suis que peu responsable de ce que j’ai la chance de vivre aujourd’hui. Dieu m’a dotée d’un talent particulier, et mon cœur se souvient de Ses grâces qui m’ont petit à petit fait emprunter le chemin sur lequel je suis désormais. J’ai reçu comme talents des qualités physiques, motrices et sensitives particulières, accompagnés d’un véritable goût pour la vitesse et la proximité avec les éléments naturels. Très jeune déjà, j’avais le profond désir d’être ce que je pouvais être de meilleur, un désir d’absolu et de perfection. Je crois que tout cela, c’est le Seigneur qui me l’a gratuitement donné.

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Jeune

JEANNE DANTès

Chaque jour, je désire dire « Oui » à Dieu et c’est toute une aventure qui engage ma personne toute entière ! Mon projet sportif est un projet d’apprentissage : celui de la connaissance de soi, de la reconnaissance de sa faiblesse, du développement de ses talents, de la persévérance dans la difficulté, de la confiance face à l’échec, du don de son corps au travers de l’effort physique intense. C’est également l’apprentissage de la patience, de l’exigence, de l’endurance dans le temps, de l’équilibre, de la constance. En faisant de la planche à voile, non seulement j’ai la joie de connaître la plénitude et la paix du Seigneur en planant tous les jours sur les eaux qu’il a créées, mais il me donne aussi de devenir celle que je désire profondément être avec Lui. A Jésus j’adresse alors cette prière : « Oui je te reconnais, tu es Dieu, tu m’as créée, et je ne veux rien faire qui ne t’honore. »

Jeanne Dantès, 20 ans

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• Septembre - Octobre - Novembre 2014

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