Artcotedazur N°15

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l a v i e des a r ts

artiste

Sens de l'aiguille d'une montre  Myrian Klein © H lagarde  Le violon d’Ingres II, 2009, Photographie sur toile, Résine  Détail © H lagarde

Comme les avant-gardistes de l’Arte Povera, Miryan détourne les matériaux dits pauvres, empruntés à l’industrie, y compris le néon qu’elle convoqua en 2002 pour dépoussiérer « Le déjeuner sur l’herbe ». Une œuvre qui 7 ans plus tard fut choisie par le Ministère de l’Éducation Nationale, afin d’illustrer le sujet du Baccalauréat en arts plastiques autour de l’œuvre emblématique de Manet. Ses « no-painting » substituent alors au pigment la fée électrique afin de révéler une « peinture de lumière ». La fibre optique, s’allie elle, à la peinture offrant un nouveau médium dans lequel se fondent les frontières entre pictural et installation, entre l’art classique et le discours duchampien. Impressionisme post-atomique ? Plus généralement, les créations mutantes de Miryan semblent mettre à jour par la sensualité d’une technique mixte dont elle détient le secret, une trame poétique complexe. L’artiste agit par gommage du temps comme pour s’adonner à la jouissance de l’espace, à la toute puissance du présent. Sa réflexion sur la dialectique entre la nature et la culture, autre point commun avec l’Arte Povera, procède de même. En effet à ses constats sur la condition humaine répondent des séries plus intimes, fruits d’une introspection personnelle qui permet à l’artiste de se ressourcer avant d’investir à nouveau le théâtre conflictuel du réel. Là une déclinaison saisonnière de nymphéas recouverts de papier bulle coulé sous glacis

teinté, comme une « rosée plastique » : Impressionisme post-atomique ? Ici encore dans une série proche de l’abstraction, des coulures de résine comme du miel nappent les alvéoles d’une peinture/ ruche. Miryan se promène dans La Forêt, (installation présentée à la Biennale de L’UMAM 2010 au Château de Cagnes-surMer) et, comme Alice génère à son passage les métamorphoses, Miryan, après le sien, extrait de la nature toute l’essence organique. Une nature qui se perçoit plus qu’elle ne se voit. Ainsi partout il est dit que l’énergie doit circuler. Et partout où ce flux vital est contraint, l’artiste s’immisce, soigne et s’efface… Gardienne du feu, Miryan Klein veille sur les siens (qu’elle inclut parfois dans ses œuvres) et sur une famille plus étendue : l’humanité. Son dernier travail présenté en février à Bruxelles (Galerie Art Point) bientôt à Monaco (Art & Rapy) convoque d’ailleurs en tant que modèles quelques proches pour une relecture du… Kamasutra. La libido, une autre énergie en péril ? Mis bout à bout, des pièces puzzle apparaît le fil de vie. L’œuvre aussi séduisante soit-elle formellement, fait sens au-delà de la monstration, continuant d’opérer dans notre imaginaire comme la vigie d’un monde qui se cherche, éclairant de son pinceau lumineux la possibilité d’une île ! Le verbe rêver n’a presque pas de « présent » disait Paul Valéry. Et si ce « presque pas » était précisément le territoire de Miryan Klein ? OM


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