Sur les traces de la Wallonie française

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Frédéric MARCHESANI

Sur les traces de la Wallonie française

Institut du Patrimoine wallon



Frédéric MARCHESANI

Sur les traces de la Wallonie française

Institut du Patrimoine wallon


Édition

Institut du Patrimoine wallon (IPW) 79, rue du Lombard B-5000 Namur

Éditeur responsable

Freddy JORIS, Administrateur général (IPW)

Suivi éditorial

Julien MAQUET et Frédéric MARCHESANI (IPW)

Informations concernant la vente T. +32(0)81 23 07 03 ou +32 (0)81 65 41 54 F. +32 (0)81 23 18 90 E. publication@idpw.be

Conception graphique Snel, à Vottem

Mise en page

Institut du Patrimoine wallon

Impression

Snel, à Vottem

Illustrations de la couverture

En haut. Le lion de Waterloo. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine – En bas. Le palais provincial de Namur, autrefois préfecture du département de Sambre-et-Meuse. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine – À gauche. Bonaparte, premier Consul, peinture d’Ingres conservée au musée des BeauxArts de Liège © Ville de Liège – À droite. Aigle impériale sur la façade de l’ancien château de Beaumont. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine.

Carte des anciens « pays » de Wallonie

Emmanuel VAN DER SLOOT (IPW) d’après la carte administrative de la Belgique en 1780 (© C. VANDERMOTTEN e.a. Géographie politique, Atlas de Belgique, tome I, Academia Press, Gand, 2007) et d’après la carte administrative de la Wallonie (Fabien CORNÉLUSSE © SPW-Patrimoine).

Carte de l’organisation du Nord de la France en départements

Emmanuel VAN DER SLOOT (IPW) d’après la carte de l’atlas historique du site internet « Connaître la Wallonie » (© SEGEFA-ULg et Institut Jules Destrée, 2013) et d’après la carte administrative de la Wallonie (Fabien CORNÉLUSSE © SPW-Patrimoine).

Carte de la Wallonie française

Emmanuel VAN DER SLOOT (IPW) d’après la carte administrative de la Wallonie (Fabien CORNÉLUSSE © SPW-Patrimoine). © Institut du Patrimoine wallon Tous droits réservés pour tous pays. Le texte engage la seule responsabilité de l’auteur. L’éditeur s’est efforcé de régler les droits relatifs aux illustrations conformément aux prescriptions légales. Les détenteurs des droits qui, malgré ses recherches, n’auraient pu être retrouvés sont priés de se faire connaître à l’éditeur. Dépôt légal : D/2014/10.015/32 ISBN : 978-2-87522-151-3 2


Frédéric MARCHESANI

Sur les traces de la Wallonie française

Institut du Patrimoine wallon

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PRÉFACE Dix-huit juin 1815. Quand Napoléon subit sa dernière défaite lors de la bataille de Waterloo, il y a déjà plus d’un an que les territoires de la Wallonie actuelle ne sont plus français : dans la foulée de la bataille de Leipzig qui a forcé la Grande Armée à refluer vers la France, Prussiens et Russes sont entrés à Liège dès janvier 1814, l’Empereur a abdiqué en avril, les départements qui formeront plus tard la Belgique se trouvent sous administration militaire prussienne et dès juin 1814, leur rattachement à la Hollande est prévu dans un accord secret que le Congrès de Vienne confirmera en 1815. Ainsi prit fin, en 1814, une période de vingt années – ce n’est pas rien… – pendant lesquelles les territoires wallons firent partie intégrante de la France, à partir de la victoire des armées françaises contre les Autrichiens en juin 1794 à Fleurus, puis du vote par la Convention, le 1er octobre 1795, de la réunion des territoires conquis à la France. Pour une partie de la future Wallonie, cette annexion répondait aux vœux émis en ce sens par les assemblées révolutionnaires du Franchimont d’abord (Verviers) dès décembre 1792, et de Liège ensuite en janvier 1793, vœux qui avaient abouti en mai suivant à une première décision de la Convention visant le rattachement du pays de Liège à la République. Rattachement alors purement théorique puisqu’après leur défaite à Neerwinden le 18 mars 1793, les Français avaient évacué nos régions avant de les reconquérir en juin de l’année suivante. 1794-1814. Ces vingt années d’histoire commune avec la France ont profondément marqué, sur le territoire de la future Wallonie, aussi bien la population que les institutions ou l’économie. Loin d’être une simple parenthèse entre deux mondes (les principautés aristocratiques ou ecclésiastiques d’Ancien Régime et le Royaume des Pays-Bas annonciateur de la future Belgique puis du Benelux), la période française fut une époque riche en ruptures et en mutations majeures, heureuses ou non, là n’est pas la question, dans une quantité de domaines et elle a laissé bien d’autres traces physiques sur notre territoire que la butte dite de Waterloo commémorant un épisode survenu, lui, plusieurs mois après la fin de notre appartenance provisoire à la France. Le bicentenaire de la célébrissime bataille fournissait l’occasion de partir à la recherche des vestiges matériels non seulement de l’« épopée » (?) napoléonienne – souvent bien connus – mais surtout de l’ensemble des empreintes témoignant encore aujourd’hui de ces deux décennies de régime français et de leur impact protéiforme sur la Wallonie contemporaine. Ayant conçu le projet de ce nouveau volume de la collection Traces comme de ceux déjà consacrés aux lieux marquants de l’histoire du Mouvement wallon en 2009 et aux traces des « pays » d’Ancien Régime en 2013, j’ai fait confiance une fois de plus à Frédéric Marchesani, attaché à l’IPW, pour mener à bien ce projet inédit sous la supervision de son directeur Julien Maquet, historien lui aussi mais en l’occurrence responsable à mes côtés des publications de l’Institut du Patrimoine. Je pense que l’on retrouve ici, comme dans les deux autres volumes signés ou cosignés par Frédéric Marchesani, le souci de rigueur propre à l’école historique de Liège, et notamment les instruments indispensables (index des personnes et des lieux, bibliographie soignée) à faire de ce livre, je l’espère, un ouvrage de référence digne de ce nom, au-delà du succès de librairie qu’il connaîtra probablement lui aussi à l’instar des autres titres de la collection. * La parution de ce volume est l’occasion de rappeler que les années de régime français laissèrent longtemps des traces, non seulement dans les murs, mais aussi dans les mentalités, notamment dans certaines villes wallonnes. À titre d’exemple, Frédéric Marchesani rappelle l’existence dans les collections du Musée de Verviers d’un buste de Napoléon en fonte qui surmonta une des principales pompes publiques au centreville de la cité lainière à partir de 1837 (plus de vingt ans après Waterloo !) et jusqu’en 1886, pompe où la section verviétoise de l’Association des Anciens frères d’armes de l’Empire rendait hommage chaque 15 août au souvenir de l’Empereur. Mais à l’instar du régime hollandais chez les « orangistes » qui combattirent longtemps la Belgique indépendante à ses débuts comme l’a rappelé récemment Els Witte, le souvenir du régime français ne fut pas toujours anecdotique non plus et c’est ainsi que durant les années qui suivirent la révolution de 1830, les élites économiques, politiques et intellectuelles verviétoises et leur unique organe de presse militèrent pour le retour à la France. 4


Buste de Napoléon provenant de la pompe du Brou à Verviers. Photo J. Spitz © Collections Musées de Verviers

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Bref rappel des faits : révolution fin septembre, formation d’un gouvernement provisoire, proclamation de l’indépendance de la Belgique le 4 octobre, élection d’un « Congrès National » le 3 novembre devant décider du sort futur du pays. Dès le 23 octobre 1830, le Journal de Verviers prend position à cet égard en énonçant le but espéré selon lui par les Verviétois : la réunion à la France. Fin octobre et jusqu’à la mi-novembre, il publie une série d’articles où il développe les motifs et les avantages de l’opinion qu’il préconise. La base de son argumentation - par ailleurs aussi un peu « sentimentale » – est d’ordre économique : un État belge n’est pas viable car les industries, privées de débouchés, péricliteront et la population souffrira. Le Journal est persuadé que quelle que soit la Constitution adoptée par le Congrès national, la Belgique n’aura guère le temps d’en jouir puisque son commerce et son industrie seront anéantis si la « clique des accapareurs de place » persiste à tenter d’empêcher la réunion à la France, qu’il estime aussi être le seul moyen de protéger les libertés nouvellement conquises. Au début, le Journal de Verviers est presque isolé : nulle part ailleurs, le mouvement réunioniste n’a osé s’affirmer avec tant de force aussi rapidement ; les autres villes sont plus hésitantes. Progressivement, le « parti français » gagnera cependant du terrain dans le sud du pays, à Liège notamment. Quant au Journal de Verviers, il aura des paroles de plus en plus acerbes pour les partisans d’une Belgique indépendante ; il les accuse de sacrifier l’intérêt public à une chimère dont ils seraient les seuls bénéficiaires en voulant satisfaire leur soif d’emplois publics et d’honneurs. En novembre 1830, la rédaction du journal verviétois est en parfaite intelligence avec les représentants politiques verviétois. Le Conseil communal, le 14 novembre, s’était prononcé pour une république belge (en attendant la réunion) ; le 19, au Congrès national, les députés verviétois avaient voté en ce sens. De même, en décembre, ils s’opposèrent à la création d’un Sénat (« institution antipopulaire »). À cette époque, le journal lança une pétition en faveur de la réunion à la France : ce fut un succès indéniable à Verviers. La campagne profrançaise se poursuivit en 1831 avec autant d’ardeur. De fin avril à début juin, le Journal de Verviers (comme toute la presse réunioniste wallonne) combattit l’élection de Léopold de Saxe-Cobourg comme roi des Belges. C’est au moment où la désignation de Léopold semblait certaine qu’un journal liégeois développa un thème séparatiste (en mai) ; le Journal de Verviers (qui, semble-t-il, y avait songé dès octobre 1830) reprit aussitôt cette « heureuse » idée : la province de Liège pourrait revendiquer son ancienne indépendance pour en disposer ensuite à sa guise. Mais le projet resta sans suite. Il en fut de même de celui du bourgmestre de Verviers Pierre David qui, en juin 1831, aurait envisagé très sérieusement de soulever les masses ouvrières en faveur de la France : il devait se mettre à leur tête, marcher sur Liège, et ainsi entraîner les autres villes wallonnes. Mais ce « complot réunioniste » ne fut pas mis à exécution. Il témoigne cependant de la confiance mise par les activistes réunionistes dans la population ouvrière où les sentiments francophiles existaient effectivement. La nouvelle de l’élection de Léopold au trône de Belgique fut accueillie avec dépit par le Journal de Verviers, qui persistait à croire la réunion à la France inévitable. En septembre 1831, il rappelait encore que « c’est pour la France et rien que pour la France que le pays wallon s’est soulevé ». Et ce n’est que le 24 novembre, un mois après la visite du premier roi des Belges à Verviers, qu’il admit que la révolution était achevée : « révolution inutile et sans dignité », écrit-il alors. Enfin, en janvier 1832, le seul organe de presse local publiait une longue lettre ouverte au Roi en y affirmant que « la fusion de la Belgique avec la France peut encore être longtemps retardée, mais nulle puissance humaine ne peut l’empêcher ». L’auteur de l’article donnait ensuite quelques conseils au souverain pour que sa « royauté d’intérim » soit bénéfique… En mars et en juillet 1832 (près de deux ans après la révolution !), le journal trouva encore l’occasion de se dire toujours convaincu de l’inéluctabilité de la réunion. Ce furent les dernières manifestations de cet esprit réunioniste qui avait caractérisé si longtemps Verviers, une ville en plein essor alors sous l’effet d’une industrialisation parmi les plus précoces et les plus dynamiques entamée en l’an 1800, sous le régime français… * Après cette incursion dans une histoire politique verviétoise bien révolue mais significative, j’invite le lecteur à se plonger dans les traces physiques de cette « Wallonie française » dont certains, comme on vient de le voir, furent longtemps nostalgiques, et avec laquelle d’autres, héritiers de François Perin comme du Congrès wallon de 1945, renoueraient volontiers aujourd’hui.

Freddy JORIS, Administrateur général de l’Institut du Patrimoine wallon

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REMERCIEMENTS Cet ouvrage n’aurait pu voir le jour sans la collaboration, l’aide précieuse et le soutien de nombreuses personnes parmi lesquelles M. Freddy Joris, Administrateur général de l’Institut du Patrimoine wallon, à l’origine de ce projet. Nous remercions chaleureusement, pour leurs conseils avisés, leurs connaissances quant à cette riche période que constitue le régime français en Belgique et pour leurs relectures de la liste des traces, Mme Catherine Lanneau, chargée de cours à l’Université de Liège ; MM. Francis Balace, professeur ordinaire honoraire à l’Université de Liège ; Bruno Colson, professeur ordinaire à l’Université de Namur ; Paul Delforge de l’Institut Jules Destrée ; Corentin Rousman, historien-archiviste aux archives de la ville de Mons ; Pierre-Jean Niebes, chef de service aux archives de l’État à Mons et Dominique Timmermans, président de l’association franco-européenne de Waterloo et vice-président de l’association pour la conservation des monuments napoléoniens. D’autres personnes nous ont apporté leur aide et nous tenons ici à les en remercier : Mmes Marie-Paule Deblanc-Magnée, conservatrice des musées communaux de Verviers et Christine Exsteen, du centre de documentation du Musée de la Vie wallonne ; MM. Michel Lefebvre, de l’association « Les Amis de Ligny » et Benjamin Stassen, de l’asbl Le Marronnier. Enfin, pour leurs conseils avisés et leur travail dans l’ombre, toujours d’une redoutable efficacité, merci à nos collègues à l’IPW Sandrine Langohr, Christine Caspers, Sophie Bourland, Julien Maquet, Emmanuel van der Sloot et Michael Cant, ainsi que Juliane Massaux et Guy Focant, photographes au département du Patrimoine du Service public de Wallonie.

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INTRODUCTION L’histoire de la Wallonie avant la création officielle de la Région wallonne est, comme celle de la Belgique, caractérisée par son appartenance à divers États au fil des siècles. Aux Xe et XIe siècles apparaissent de nombreuses principautés territoriales qui morcèlent le territoire wallon. Dès la fin du Moyen Âge et tout au long de l’Époque moderne, la Wallonie est en grande partie bourguignonne, espagnole puis autrichienne. Notre ouvrage Sur les traces des anciens « pays » de Wallonie, paru en décembre 2013, retrace cette longue et complexe période. Ce nouvel opus de la collection « traces » entend poursuivre la présentation de l’histoire de notre région dans un fil logique et chronologique. La chute de l’Ancien Régime et les révolutions qui secouent la France et la future Belgique en 1789 amènent un vent de nouveautés. Après quelques années tumultueuses caractérisées par des révoltes, des restaurations et des campagnes militaires, l’entièreté de notre territoire est annexée à la République française le 1er octobre 1795. Suivent près de vingt années de régime français en Wallonie. Cette période très courte de l’histoire a pourtant été fondatrice à de nombreux égards. Sous la République, le Consulat et l’Empire, notre pays évolue rapidement et connaît plus de changements et de bouleversements en vingt ans qu’il n’en avait connus tout au long de l’Ancien Régime en matière administrative et institutionnelle. L’évolution dans les domaines culturels, sociaux et économiques est tout aussi importante. L’histoire de cette période est très bien connue et nombreux sont les ouvrages qui sont consacrés au régime français. Toutefois, les traces physiques qu’elle a laissées sont encore peu présentes dans l’historiographie, sauf bien entendu en ce qui concerne la très célèbre campagne de 1815. Nous présentons ici un aperçu le plus complet possible des lieux qui ont caractérisé le régime français et des traces apparues pendant cette période ou qui ont été érigées depuis afin de la commémorer. Un premier chapitre revient sur la carte de notre région à cette époque et sur le nouveau découpage administratif d’envergure instauré par les Français. Suivent une série de chapitres reprenant diverses facettes de la période française en Wallonie : les deux occupations de nos territoires après les batailles de Jemappes (novembre 1792) et Fleurus (juin 1794), les institutions françaises, les rares édifices construits à l’époque, les premiers soubresauts de la Révolution industrielle, le patrimoine funéraire, le patrimoine naturel et une série de monuments et sites divers. Chacune des notices comprend une brève description du monument ou du bâtiment et en présente également le caractère historique. Pour chaque chapitre, un bref aperçu historique permet de remettre les traces présentées dans leur contexte. La dernière partie du livre est consacrée à la campagne de 1815 et aux batailles de Ligny, des Quatre-Bras et de Waterloo. Cette dernière campagne de Napoléon a laissé un nombre colossal de traces depuis deux siècles. Son bicentenaire approchant, il nous paraissait nécessaire d’y consacrer une place importante dans cet ouvrage qui, toutefois, ne se résume pas à la personnalité de Napoléon et à l’échec final des armées impériales en terres brabançonnes. Il ne nous a malheureusement pas été possible de nous rendre sur la totalité des lieux évoqués. De ce fait, nous ne pouvons avoir la certitude que certains éléments patrimoniaux soient bien parvenus jusqu’à nous. Malgré nos recherches sur le terrain et la littérature scientifique, nous n’avons pas toujours été en mesure de retrouver certains éléments du petit patrimoine. Ne voulant pas faire l’économie de ces informations, nous avons décidé de les illustrer en nous basant essentiellement sur des clichés anciens issus de la photothèque de l’Institut royal du Patrimoine artistique. Toutes les illustrations en couleur sont par contre des photos actuelles. Si l’objectif était de partir sur les traces de la « Wallonie française », il reste bien évident que ce volume n’a pas la prétention d’être exhaustif. Nous espérons néanmoins que les lecteurs prendront plaisir à découvrir ou redécouvrir, par l’intermédiaire de ce patrimoine spécifique, l’histoire de nos contrées entre 1789 et 1815 et les témoignages que cette époque a laissés en Wallonie.

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Sur les traces de la Wallonie franรงaise UN NOUVEAU Dร COUPAGE ADMINISTRATIF DE LA WALLONIE



UN NOUVEAU DÉCOUPAGE ADMINISTR ATIF DE LA WALLONIE

Un état de la Wallonie vers 1789 Au moment où éclatent les révolutions qui mettent fin à l’Ancien Régime, la future Belgique – et plus encore la Wallonie – est composée d’une multitude de petites principautés territoriales héritées du découpage médiéval et qui existaient depuis les Xe et XIe siècles. La carte de notre région ressemble à un véritable puzzle composé de petits blocs et surtout d’une multitude d’enclaves formant un patchwork des plus compliqués. Au moment où la société des rois et des empereurs vit ses derniers instants, les deux cent soixante-deux communes actuelles de Wallonie font partie de dix-sept « États » différents, certains regroupés dans des ensembles plus imposants. Les Pays-Bas autrichiens, possession de Joseph II en 1789, sont composés de huit anciens « pays » : le comté de Flandre, le baillage de Tournai-Tournaisis, le comté de Hainaut, le duché de Brabant, le comté de Namur, le duché de Luxembourg, le duché de Limbourg et le comté de Dalhem. Au milieu de ces possessions autrichiennes, un État plus ou moins imposant tranche par sa différence : la principauté épiscopale de Liège, État pluriséculaire dirigé par un ecclésiastique, traverse du nord au sud ce territoire et s’enclave littéralement dans les Pays-Bas autrichiens. Plus à l’est, le marquisat de Franchimont appartient lui aussi au prince-évêque de Liège. À l’est également, un territoire de moindre superficie, la principauté abbatiale de Stavelot-Malmedy, constitue le second État ecclésiastique de la Wallonie d’Ancien Régime. À côté de ces trois blocs territoriaux, de très petites enclaves constituent des possessions d’États périphériques aux trois ci-dessus. C’est ainsi que l’ancien duché de Bouillon et les villes de Philippeville et Mariembourg, ainsi que quelques localités des actuelles communes de Beaumont et Froidchapelle appartiennent au roi de France. Enfin, dans l’actuelle province de Liège, se trouvent de petites enclaves appartenant au prince-électeur de Trèves, au duc de Juliers, au princeélecteur de Cologne, aux Provinces-Unies et aux chevaliers de l’Ordre teutonique.

Dans ces anciens « États », les structures administratives sont fort différentes. Les Pays-Bas autrichiens ne constituent pas un État unitaire mais plutôt une confédération composée de diverses nationalités. La principauté épiscopale de Liège est un fief d’Empire dans lequel n’existe qu’une seule nationalité, la liégeoise. Il en est de même pour la principauté abbatiale de Stavelot-Malmedy. La situation des pouvoirs locaux est bien différente de celle qui prévaut de nos jours et est variable, suivant qu’elle relève de l’un ou l’autre chef d’État. À l’intérieur de ces anciens « pays », il y a également des différences, notamment en ce qui concerne le statut des villes. Chaque pays faisant partie des Pays-Bas possède ses propres assemblées « représentatives ». Plusieurs villes bénéficient d’une certaine forme d’affranchissement vis-à-vis du pouvoir central, comme les Bonnes Villes du comté de Hainaut ou de la principauté de Liège, alors que dans les régions rurales existent des institutions intermédiaires qui ne possèdent que peu de privilèges ou de pouvoir décisionnel. La première carte, représentant la Belgique à la fin de l’Ancien Régime, permet de se rendre compte de l’état administratif de notre pays avant la Révolution et les bouleversements qui sont apportés par les Français en 1795. Sur cette carte, l’accent a été mis sur le territoire de la Wallonie, en superposant les frontières des anciens « pays » avec celles des provinces et communes actuelles. Le tracé des frontières est très peu uniforme et a été maintes fois rectifié au cours de l’histoire et principalement au XVIIIe siècle. Des traités d’ajustement des frontières sont en effet conclus en 1715, 1718, 1755, 1769, 1779 et 1785 entre les divers États situés dans l’actuelle Wallonie et à ses frontières ! Dans chaque territoire souverain, on trouve également plusieurs enclaves étrangères. C’est ainsi que la principauté de Liège possède 26 enclaves en territoire étranger, alors qu’il existe 32 enclaves étrangères dans la principauté. 11


Sur les traces de la Wallonie française

Carte des anciens « pays » de Wallonie

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Anciens « pays » Tournaisis Comté de Hainaut « Pays » situés hors de Wallonie

Duché de Brabant Principauté épiscopale de Liège

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Enclaves et zones limitrophes

Seigneurie de Malines

Comté de Namur

Pays rétrocédés à la Flandre en 1713

Baronnie de Kessenich

Duché de Bouillon

Comté de Flandre

Baronnie de Lanaken

Comté de Dalhem

Royaume de France

Bancs de Saint-Servais

Duché de Limbourg

Électorat de Trèves

Ordre teutonique

Marquisat de Franchimont

Duché de Juliers

Thorn

Principauté abbatiale de Stavelot-Malmedy

Provinces-Unies

Comté de Rekkem

Duché de Luxembourg

Électorat de Cologne

Terres de rédemption

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Un nouveau dĂŠcoupage administratif de la Wallonie

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Carte des anciens « pays » de Wallonie - Liste des communes Brabant wallon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27

Beauvechain Braine-l’Alleud Braine-le-Château Chastre Chaumont-Gistoux Court-Saint-Étienne Genappe Grez-Doiceau Hélécine Incourt Ittre Jodoigne La Hulpe Lasne Mont-Saint-Guibert Nivelles Orp-Jauche Ottignies-Louvain-la-Neuve Perwez Ramillies Rebecq Rixensart Tubize Villers-la-Ville Walhain Waterloo Wavre

Hainaut 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37

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Aiseau-Presles Anderlues Antoing Ath Beaumont Belœil Bernissart Binche Boussu Braine-le-Comte Brugelette Brunehaut Celles Chapelle-lez-Herlaimont Charleroi Châtelet Chièvres Chimay Colfontaine Comines-Warneton Courcelles Dour Écaussinnes Ellezelles Enghien Erquelinnes Estaimpuis Estinnes Farciennes Fleurus Flobecq Fontaine-l’Évêque Frameries Frasnes-lez-Anvaing Froidchapelle Gerpinnes Ham-sur-Heure-Nalinnes

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Hensies Honnelles Jurbise La Louvière Lens Le Rœulx Les Bons Villers Lessines Leuze-en-Hainaut Lobbes Manage Merbes-le-Château Momignies Mons Mont-de-l’Enclus Montigny-le-Tilleul Morlanwelz Mouscron Pecq Péruwelz Pont-à-Celles Quaregnon Quévy Quiévrain Rumes Saint-Ghislain Seneffe Silly Sivry-Rance Soignies Thuin Tournai

Liège 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34

Amay Amel - Amblève Ans Anthisnes Aubel Awans Aywaille Baelen Bassenge Berloz Beyne-Heusay Blegny Braives Büllingen - Bullange Burdinne Burg-Reuland Bütgenbach Chaudfontaine Clavier Comblain-au-Pont Crisnée Dalhem Dison Donceel Engis Esneux Eupen Faimes Ferrières Fexhe-le-Haut-Clocher Flémalle Fléron Geer Grâce-Hollogne

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Hamoir Hannut Héron Herstal Herve Huy Jalhay Juprelle Kelmis - La Calamine Liège Lierneux Limbourg Lincent Lontzen Malmedy Marchin Modave Nandrin Neupré Olne Oreye Ouffet Oupeye Pepinster Plombières Raeren Remicourt Saint-Georges-sur-Meuse Saint-Nicolas Saint-Vith Seraing Soumagne Spa Sprimont Stavelot Stoumont Theux Thimister-Clermont Tinlot Trois-Ponts Trooz Verlaine Verviers Villers-le-Bouillet Visé Waimes Wanze Waremme Wasseiges Welkenraedt

Luxembourg 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16

Arlon Attert Aubange Bastogne Bertogne Bertrix Bouillon Chiny Daverdisse Durbuy Érezée Étalle Fauvillers Florenville Gouvy Habay

17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44

Herbeumont Hotton Houffalize La Roche-en-Ardenne Léglise Libin Libramont-Chevigny Manhay Marche-en-Famenne Martelange Meix-devant-Virton Messancy Musson Nassogne Neufchâteau Paliseul Rendeux Rouvroy Saint-Hubert Saint-Léger Sainte-Ode Tellin Tenneville Tintigny Vaux-sur-Sûre Vielsalm Virton Wellin

Namur 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38

Andenne Anhée Assesse Beauraing Bièvre Cerfontaine Ciney Couvin Dinant Doische Éghezée Fernelmont Floreffe Florennes Fosses-la-Ville Gedinne Gembloux Gesves Hamois Hastière Havelange Houyet Jemeppe-sur-Sambre La Bruyère Mettet Namur Ohey Onhaye Philippeville Profondeville Rochefort Sambreville Sombreffe Somme-Leuze Viroinval Vresse-sur-Semois Walcourt Yvoir


Un nouveau découpage administratif de la Wallonie

Les bouleversements de la période française Le régime français balaye d’un grand coup l’héritage de l’Ancien Régime qui agissait comme un frein sur toute possibilité de progrès. Tel un rouleau compresseur, la République écrase les acquis médiévaux et modernes, fait table rase du passé et repart d’une page blanche pour édifier de nouvelles structures administratives. Dès l’arrivée des Français en novembre 1792, l’idée est bien présente dans leur esprit de faire profiter les territoires situés au nord de la France de tous les changements apportés par la Révolution, notamment en termes d’abolition des privilèges. La relative instabilité des premiers mois du régime républicain retarde encore cet état de fait chez nous. Le retour des Français après la bataille de Fleurus du 26 juin 1794 relance le processus. Dès les premières semaines de cette seconde occupation de nos territoires, les Français introduisent un régime municipal semblable à celui installé en France depuis 1789. Le 7 septembre 1794, différents arrondissement administratifs sont déterminés par la Convention ; le 15 octobre sont créées des administrations générales d’arrondissement ainsi que l’administration centrale et supérieure de la Belgique, dont le siège est fixé à Bruxelles. Ces premiers bouleversements ouvrent ainsi la voie à de plus profonds changements. En matière de géographie administrative, les Français décident de radicalement éradiquer la situation précédemment établie pour recommencer à zéro. Dès le 16 novembre 1794, l’ancienne principauté de Liège est démembrée et placée sous le contrôle de l’administration centrale. Le 31 août 1795, le comité de salut public approuve une nouvelle division territoriale des pays conquis. Cette division est l’œuvre de Louis-Ghislain Boutteville, commissaire du gouvernement, qui applique les principes fondamentaux de l’administration française : suppression des anciennes administrations, fusion des territoires de plusieurs d’entre elles en un seul département, suppression de leur dénomination et division en districts et cantons. La future Belgique est divisée en départements comme l’avait été la France quelques années auparavant. On retrouve dès lors chez nous de nouveaux blocs territoriaux, compacts et homogènes, qui transforment radicalement la carte de notre pays. Aucun de ces départements ne tient compte de l’unité linguistique des territoires ni des anciennes principautés d’Ancien Régime. Des peuples qui n’avaient jamais vécu ensemble sont amalgamés et intègrent des territoires nouveaux qui n’ont que très peu de rapports avec ce que l’on connaissait précédemment. Pour la première fois, tous se trouvent soumis aux mêmes lois. La commodité administrative et la volonté d’uniformiser prennent le pas sur la recherche d’un équilibre sans tenir compte de la réalité historique. Le découpage du territoire wallon change de visage à cette époque et ressemble déjà quelque peu à celui que nous connaissons aujourd’hui. Les départements sont en effet les ancêtres de nos provinces actuelles et y ressemblent à plusieurs points de vue. Toutes les communes de l’actuel Brabant wallon font partie du département de la Dyle, qui ressemble à s’y méprendre à l’ancienne province du Brabant. Il en est de même

Le comité de salut public et le comité de sûreté générale Créé le 6 avril 1793 par la Convention, le comité de salut public sert de lien entre l’assemblée et ses ministres. Il exerce le pouvoir exécutif, les ministres n’ayant aucun rôle décisionnel, et est divisé en six sections : correspondance générale, affaires étrangères, guerre, marine, intérieur et pétitions. Du 5 septembre 1793 au 27 juillet 1794, les membres du comité gouvernent la France pendant le régime de la Terreur sous la domination de Maximilien Robespierre. Le 1er avril 1794, les ministres sont supprimés et remplacés par des commissions du gouvernement. Le comité perd définitivement son pouvoir après l’exécution de Robespierre le 28 juillet 1794. Il est dissout en même temps que la Convention. Créé par la Convention le 2 octobre 1792, le comité de sûreté générale est chargé de la police. Tout comme le comité de salut public, il prend une importance redoutable sous la Terreur. pour les provinces de Liège et du Hainaut, assez proches géographiquement des départements de l’Ourthe et de Jemappes. Seuls les départements de Sambre-et-Meuse et des Forêts ne ressemblent pas aux provinces de Namur et du Luxembourg, comme le montrent la carte de l’organisation du Nord de la France et la carte administrative de la Wallonie française.

La carte de la Wallonie sous le régime français Si les cinq provinces que compte la Wallonie actuellement peuvent être à certains égards comparées aux cinq départements qui la composaient majoritairement, nous ne pouvons résumer la géographie historique de notre région à l’aube du XIXe siècle aussi facilement. La carte montre en effet que les deux cent soixante-deux communes wallonnes sont réparties sur le territoire de onze départements sous le régime français. Ces départements sont ici superposés aux limites des provinces et communes actuelles. Comparée à la carte des anciens « pays » de Wallonie, on y voit clairement comment les Français ont amalgamé les anciennes principautés territoriales pour créer des ensembles compacts et plus réguliers, très rarement en prenant en compte le découpage médiéval de nos contrées. Les frontières de ces départements ont été considérées pendant longtemps comme les frontières naturelles de la Belgique, comme en témoigne le traité concernant le Limbourg et le Luxembourg douloureusement conclu en 1839. Les bouleversements apportés par les Français ont marqué définitivement la carte administrative de la Belgique : c’est sous leur impulsion que s’est constitué l’espace belge et qu’ont été fixées dans les grandes lignes les limites provinciales. 15


Sur les traces de la Wallonie française

Bouches de l'Escaut

● Middelbourg Deux-Nèthes

● Bruges

● Anvers Escaut Gand ●

Lys

● Bruxelles

Lille ●

Dyle Jemappes Namur

● Mons

Pas-de-Calais

Nord

● Arras

Amiens ● Seine inférieure

Somme Charleville ●

Ardennes

● Laon ● Caen

● Beauvais

Aisne

Oise

Marne

● Châlons-sur-Mar

16


● ●

Un nouveau découpage administratif de la Wallonie

● Bois-le-Duc

L’organisation du Nord de la France en départements

Bouches du Rhin

0

50 km

Roer Meuse inférieure Maestricht ●

Aix-la-Chapelle Frontière de l’Empire français en 1810

● Liège Ourthe Coblence ●

Sambre-et-Meuse

Rhin et Moselle Forêts

● Trèves Luxembourg ●

Sarre

Moselle

Meuse

● Metz

rne

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● ●


Sur les traces de la Wallonie française

Brabant wallon Peu de changements en ce qui concerne la plus jeune des provinces wallonnes. Le découpage administratif organisé par les Français a donné au Brabant sa physionomie actuelle en uniformisant ces territoires : la moitié sud de l’ancien duché de Brabant devient le département de la Dyle (préfecture : Bruxelles) ; la moitié nord devient le département des Deux-Nèthes (préfecture : Anvers). L’héritage des lointains ducs de Brabant, déjà malmené au fil des siècles, est ainsi divisé par le nouvel occupant. Il s’agit également du bouleversement le moins imposant effectué chez nous. La province du Brabant wallon, qui correspondait grosso modo au roman païs du duché de Brabant sous l’Ancien Régime, reste proche du département de la Dyle. Les enclaves hennuyères situées sur les territoires des communes de Braine-l’Alleud, Braine-le-Château, Ittre, Rebecq et Tubize sont intégrées au département de la Dyle, tout comme l’enclave namuroise de Villers-la-Ville et l’enclave liégeoise de Beauvechain. D’un autre côté, les anciennes enclaves brabançonnes précédemment situées dans les comtés de Hainaut et de Namur et de la principauté de Liège quittent définitivement le Brabant. Chose intéressante, la frontière sud du département de la Dyle correspond en tous points à la frontière sud de la province du Brabant wallon. Hainaut Le département de Jemappes préfigure déjà ce que sera plus tard la province du Hainaut. Les anciennes structures politiques d’Ancien Régime sont démembrées et les territoires regroupés dans leur forme presque actuelle. Seules quelques exceptions subsistent. À l’ouest du territoire, les communes de Comines-Warneton et Mouscron se trouvent dans le département la Lys. Ces communes faisaient auparavant partie du comté de Flandre et intègrent par la suite la province de Flandre occidentale, jusqu’à leur rattachement à la Wallonie après la fixation de la frontière linguistique en 1963. Les localités de la moitié nord de la commune de Mont-de-l’Enclus, elles aussi autrefois flamandes, intègrent quant à elles le département de l’Escaut, ancêtre de la province de Flandre orientale. Enfin, les anciennes possessions du roi de France situées sur les communes de Beaumont et Froidchapelle intègrent le département du Nord et constituent une bizarrerie géographique en formant une enclave du département du Nord entre les départements des Ardennes, de Jemappes et de Sambreet-Meuse. Au nord, Brakel et Everbeek, deux localités de la commune de Brakel, aujourd’hui situées dans la province de Flandre orientale, font partie du département de Jemappes. À l’ouest du département, l’ancien baillage de TournaiTournaisis, petit État lui aussi possession autrichienne, est intégralement incorporé dans le département de Jemappes, ainsi que les petites enclaves de l’ancien comté de Flandre alors situées sur les actuelles communes de Pecq, Péruwelz et Tournai. Les deux anciennes enclaves françaises des communes de Brunehaut et Estaimpuis sont intégrées également à ce qui deviendra par après la province du Hainaut. 18

À l’est, de lourds changements sont également apportés. C’est sous l’impulsion des Français que le pays de Charleroi, historiquement essentiellement namurois et liégeois, intègre le département de Jemappes. Les anciennes possessions liégeoises, namuroises et brabançonnes sont toutes amalgamées pour créer un bloc nouveau à l’est du département. L’ancienne principauté de Liège est amputée de ses possessions situées sur les territoires des communes d’Aiseau-Presles, Beaumont, Charleroi, Châtelet, Farciennes, Fontainel’Évêque, Gerpinnes, Ham-sur-Heure-Nalinnes, Lobbes, Montigny-le-Tilleul et Thuin. L’ancien comté de Namur est quant à lui amputé de ses enclaves d’Aiseau-Presles, Charleroi, Châtelet, Fleurus, Gerpinnes, Ham-sur-HeureNalinnes et Pont-à-Celles. Enfin, l’ancien duché de Brabant est pour sa part privé de ses territoire situés sur les actuelles communes d’Aiseau-Presles, Braine-le-Comte, Chapellelez-Herlaimont, Charleroi, Courcelles, Fleurus, Les Bons Villers, Manage, Pont-à-Celles et Seneffe. Liège Le département de l’Ourthe est certainement celui composé du plus grand nombre d’anciens territoires disparates. Plus ou moins proche également de la future province de Liège, il regroupe des territoires des anciennes principautés de Liège et de Stavelot-Malmedy, des comtés de Namur et de Dalhem, des duchés de Brabant, de Limbourg et de Luxembourg, du marquisat de Franchimont, du duché de Juliers, ainsi que trois enclaves de l’Électorat de Trèves, des Provinces-Unies et de l’Ordre teutonique. C’est un véritable patchwork qui se trouve regroupé dans ce nouveau territoire. Liège devient le chef-lieu d’un département qui ne ressemble en rien à l’ancienne principauté épiscopale dont les anciennes possessions ne constituent pas la moitié du nouveau territoire. La formation de ce département fut certainement une des plus ardues. Les habitants de l’est voyaient en effet d’un mauvais œil le fait d’être liés aux Liégeois, notamment les anciens Limbourgeois dont les coutumes et le mode de vie étaient assez différents de celui des anciens principautaires. Au sein même de l’ancien marquisat de Franchimont, une tentative de sécession a lieu dès 1789 1. Ce sentiment indépendantiste se fait encore entendre quelques années plus tard, lorsque les Spadois réclament leur détachement du département de l’Ourthe afin de créer, à l’est de l’actuelle province de Liège, un « département des eaux minérales ». Tandis que l’ancienne principauté est disloquée et que cinq autres départements héritent de ses possessions (Meuse inférieure, Sambre-et-Meuse, Ardennes, Jemappes et Dyle), le département de l’Ourthe reçoit les alentours de Liège et sa banlieue, la partie sud de la Hesbaye, le marquisat de Franchimont, la principauté abbatiale de Stavelot-Malmedy, presque tout le Limbourg autrichien, 24 villages hesbignons enlevés au comté de Namur, 26 autres enlevés au duché de Brabant et 1

Voir l’article sur les traces du congrès de Polleur dans le chapitre consacré aux deux occupations françaises de la Wallonie.


Un nouveau découpage administratif de la Wallonie

34 localités auparavant luxembourgeoises. Le département comprend la quasi-totalité de nos actuels cantons de l’est ainsi que des localités aujourd’hui situées en Allemagne telles que Kronenburg ou Schleiden. Une partie de l’actuelle province du Brabant flamand se trouve elle aussi dans le département de l’Ourthe. Hormis le village d’Ezemaal, toutes les localités de l’actuelle commune de Landen se trouvent à l’époque dans l’arrondissement de Waremme. Elles y restent sous les régimes hollandais et belge avant d’être rattachées à la Flandre en 1962 et 1963. Juste au-dessus, Neerhespen et Overhespen, deux localités du sud de la commune de Linter, sont elles aussi liégeoises. Elles font également partie de l’arrondissement de Waremme jusqu’en 1962. Enfin, au nord-est de l’ancien département de l’Ourthe, toutes les localités de la commune de Fourons sont elles aussi liégeoises. Elles font partie des arrondissements de Liège et de Verviers jusqu’à la fixation de la frontière linguistique et leur rattachement forcé à la province du Limbourg en 1963. Toutefois, quelques localités de l’actuelle province de Liège ne sont pas intégrées au département de l’Ourthe. Manderfeld et Schönberg, localités des communes de Bullange et Saint-Vith, autrefois dans l’Électorat de Trèves, font partie du département de la Sarre. Comme cela était le cas pour Mouscron-Comines dans le Hainaut, une certaine logique liée à l’appartenance d’Ancien Régime prévaut dans ce cas. Au nord du département de l’Ourthe, les localités de Bassenge, Corswarem, Eben-Emael, Lanaye, Otrange, Roclenge-sur-Geer et Wonck font partie du département de la Meuse inférieure, dont Maestricht est la préfecture et dans lequel se trouve la partie nord de l’ancienne principauté de Liège. Au sud-ouest, les localités de Ben-Ahin, Bois-etBorsu, Les Avins, Marchin, Pailhe et Vyle-et-Tharoule sont intégrées au département de Sambre-et-Meuse. Enfin, plusieurs localités aujourd’hui situées dans les provinces du Luxembourg et de Namur se trouvent dans le département de l’Ourthe. Il s’agit de la totalité des localités de la commune de Vielsalm et des localités de Bovigny, Beho (Gouvy), Bomal, Izier, Villers-Sainte-Gertrude (Durbuy) et Harre (Manhay) dans la province du Luxembourg. Dans la province de Namur, on retrouve les localités de Bierwart, Forville, Franc-Waret, Hingeon, Pontillas (Fernelmont), Landenne, Seilles et Vezin (Andenne). Luxembourg Comparé aux trois provinces précédentes, celle du Luxembourg ne correspond en rien au département des Forêts, créé par les Français en 1795. Cela est principalement lié à l’appartenance médiévale des localités qui la composent. Au moment de l’annexion, la future province du Luxembourg et l’actuel Grand-Duché de Luxembourg constituent encore un seul et même État et ne seront séparés qu’en 1839. Le département des Forêts est ainsi composé d’une moitié des localités luxembourgeoises actuelles, de la totalité du Grand-Duché de Luxembourg ainsi que d’une bonne partie de localités aujourd’hui situées en Allemagne. Il s’agit

des communes d’Arzfeld, Bitburg, Dudeldorf et Neuerburg, aujourd’hui situées en Rhénanie-Palatinat. Il s’agit du plus grand département des provinces réunies à la France. Le reste de la province actuelle est réparti sur trois autres départements. Quelques localités des communes de Durbuy, Gouvy, Manhay et Vielsalm se trouvent dans le département de l’Ourthe (voir ci-dessus), la moitié nord-ouest de la province actuelle est pour sa part intégrée au département de Sambre-et-Meuse (Marche, Saint-Hubert, Durbuy, La Roche et Wellin). Enfin l’ancien duché de Bouillon, officiellement possession du roi de France depuis 1679, est en partie intégré au département des Ardennes. En effet, toutes les localités de l’actuelle commune de Bouillon deviennent ardennaises alors que les anciennes possessions bouillonnaises situées sur les communes de Bertrix, Daverdisse et Paliseul sont partagées entre le département des Forêts et le département de Sambre-et-Meuse. Namur Tout comme celle du Luxembourg, la province de Namur ne ressemble pas au département de Sambre-et-Meuse créé par les Français. C’est ici que leur œuvre unificatrice prend tout son sens et est la plus perceptible bien que l’ancien comté de Namur en forme toutefois le noyau. Au nord, quelques localités sont intégrées au département de l’Ourthe (voir ci-dessus) et la localité de Boignée (Sombreffe) se trouve dans le département de Jemappes. La quasi-totalité de l’actuel arrondissement de Philippeville se trouve quant à elle dans le département des Ardennes. Les Français ont ici amalgamé les possessions d’Entre-Sambre-et-Meuse de la principauté de Liège avec les anciennes places fortes françaises de Philippeville et Mariembourg. C’est également le cas de la localité de Sugny (Vresse-sur-Semois), autrefois intégrée au duché de Bouillon et qui rejoint elle aussi le département des Ardennes. Namur, autrefois capitale d’un comté assez petit et composé d’une myriade d’enclaves disparates, devient en 1795 la préfecture d’un département homogène, d’une superficie trois fois supérieure à l’ancien comté et qui, comme le département de l’Ourthe, est composé de territoires issus de nombreux anciens « pays » d’Ancien Régime. On y retrouve des anciennes possessions du comté de Namur, de la principauté épiscopale de Liège et des duchés de Bouillon, de Brabant et de Luxembourg.

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Sur les traces de la Wallonie française

Carte de la Wallonie française

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Départements Département de la Dyle Département de Jemappes Département de la Lys Département de l’Escaut Département du Nord Département de l’Ourthe Département de Sambre-et-Meuse Département de la Meuse inférieure Département de la Sarre Département des Forêts Département des Ardennes 20

3 12

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Un nouveau dĂŠcoupage administratif de la Wallonie

1 31 13

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28 78

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55 21

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Sur les traces de la Wallonie française

Carte de la Wallonie française - Liste des communes Brabant wallon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27

Beauvechain Braine-l’Alleud Braine-le-Château Chastre Chaumont-Gistoux Court-Saint-Étienne Genappe Grez-Doiceau Hélécine Incourt Ittre Jodoigne La Hulpe Lasne Mont-Saint-Guibert Nivelles Orp-Jauche Ottignies-Louvain-la-Neuve Perwez Ramillies Rebecq Rixensart Tubize Villers-la-Ville Walhain Waterloo Wavre

Hainaut 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37

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Aiseau-Presles Anderlues Antoing Ath Beaumont Belœil Bernissart Binche Boussu Braine-le-Comte Brugelette Brunehaut Celles Chapelle-lez-Herlaimont Charleroi Châtelet Chièvres Chimay Colfontaine Comines-Warneton Courcelles Dour Écaussinnes Ellezelles Enghien Erquelinnes Estaimpuis Estinnes Farciennes Fleurus Flobecq Fontaine-l’Évêque Frameries Frasnes-lez-Anvaing Froidchapelle Gerpinnes Ham-sur-Heure-Nalinnes

38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69

Hensies Honnelles Jurbise La Louvière Lens Le Rœulx Les Bons Villers Lessines Leuze-en-Hainaut Lobbes Manage Merbes-le-Château Momignies Mons Mont-de-l’Enclus Montigny-le-Tilleul Morlanwelz Mouscron Pecq Péruwelz Pont-à-Celles Quaregnon Quévy Quiévrain Rumes Saint-Ghislain Seneffe Silly Sivry-Rance Soignies Thuin Tournai

Liège 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34

Amay Amel - Amblève Ans Anthisnes Aubel Awans Aywaille Baelen Bassenge Berloz Beyne-Heusay Blegny Braives Büllingen - Bullange Burdinne Burg-Reuland Bütgenbach Chaudfontaine Clavier Comblain-au-Pont Crisnée Dalhem Dison Donceel Engis Esneux Eupen Faimes Ferrières Fexhe-le-Haut-Clocher Flémalle Fléron Geer Grâce-Hollogne

35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80 81 82 83 84

Hamoir Hannut Héron Herstal Herve Huy Jalhay Juprelle Kelmis - La Calamine Liège Lierneux Limbourg Lincent Lontzen Malmedy Marchin Modave Nandrin Neupré Olne Oreye Ouffet Oupeye Pepinster Plombières Raeren Remicourt Saint-Georges-sur-Meuse Saint-Nicolas Saint-Vith Seraing Soumagne Spa Sprimont Stavelot Stoumont Theux Thimister-Clermont Tinlot Trois-Ponts Trooz Verlaine Verviers Villers-le-Bouillet Visé Waimes Wanze Waremme Wasseiges Welkenraedt

Luxembourg 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16

Arlon Attert Aubange Bastogne Bertogne Bertrix Bouillon Chiny Daverdisse Durbuy Érezée Étalle Fauvillers Florenville Gouvy Habay

17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44

Herbeumont Hotton Houffalize La Roche-en-Ardenne Léglise Libin Libramont-Chevigny Manhay Marche-en-Famenne Martelange Meix-devant-Virton Messancy Musson Nassogne Neufchâteau Paliseul Rendeux Rouvroy Saint-Hubert Saint-Léger Sainte-Ode Tellin Tenneville Tintigny Vaux-sur-Sûre Vielsalm Virton Wellin

Namur 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38

Andenne Anhée Assesse Beauraing Bièvre Cerfontaine Ciney Couvin Dinant Doische Éghezée Fernelmont Floreffe Florennes Fosses-la-Ville Gedinne Gembloux Gesves Hamois Hastière Havelange Houyet Jemeppe-sur-Sambre La Bruyère Mettet Namur Ohey Onhaye Philippeville Profondeville Rochefort Sambreville Sombreffe Somme-Leuze Viroinval Vresse-sur-Semois Walcourt Yvoir


Sur les traces de la Wallonie française JEMAPPES ET FLEURUS : LES DEUX OCCUPATIONS FRANÇAISES



JEMAPPES ET FLEURUS : LES DEUX OCCUPATIONS FR ANÇAISES

Entre les événements révolutionnaires de 1789 et l’annexion de nos territoires à la France en 1795, six années riches en événements ponctuent l’histoire de la Wallonie. Plusieurs anciens « pays » sont confrontés à des révolutions inspirées par les événements parisiens de juillet 1789. Les troupes républicaines françaises entrent à deux reprises en Belgique et occupent nos territoires qui deviennent par la suite les « départements réunis ». Après la bataille de Jemappes de novembre 1792, les Français pénètrent au cœur du comté de Hainaut et parviennent jusqu’en principauté de Liège. Ils occupent les possessions stavelotaines, liégeoises et autrichiennes pendant quelques mois, jusqu’à leur retraite au printemps 1793. Les mois qui suivent sont caractérisés par une restauration des souverains d’Ancien Régime : les Autrichiens reprennent le pouvoir dans les Pays-Bas et le prince-évêque de Liège est rétabli dans ses États. Après la bataille de Fleurus de juin 1794, les troupes françaises pénètrent à nouveau en Wallonie, pour de bon cette fois. Elles occupent notre région avant l’annexion officielle en octobre 1795. De cette période riche en rebondissements, nous conservons bon nombre de témoignages divers et variés.

À l’ombre de la Révolution française Quelques semaines après la prise de la Bastille, le 14 juillet 1789 à Paris, le vent révolutionnaire souffle dans nos provinces et déclenche des mouvements de révolte, principalement à Liège et à Bruxelles. Dans les Pays-Bas autrichiens, la Révolution brabançonne éclate dans la capitale du duché de Brabant à l’automne 1789 avant de gagner le comté de Hainaut, le Tournaisis et le comté de Namur. Isolé du reste des Pays-Bas par les principautés de Liège et de StavelotMalmedy, le duché de Limbourg ne s’implique que très peu dans le mouvement alors que le duché de Luxembourg reste inexorablement fidèle aux Autrichiens. Cette révolution mène à la création, le 11 janvier 1790, des États-BelgiquesUnis, éphémère république rapidement reprise sous la pression des Autrichiens et des contre-révolutionnaires. À l’est de

ces régions, la révolution liégeoise éclate au même moment. Les reproches faits au prince-évêque y sont sensiblement les mêmes qu’en France : malhonnêteté des privilèges, lourdeur de l’impôt et mauvaise représentation du Tiers-État au sein des États. Prenant exemple sur Fabry et Chestret à Liège, les Bonnes Villes de la principauté procèdent à l’élection libre de leurs magistrats. Il s’agit alors d’une révolution essentiellement communale et urbaine. En Wallonie, quelques lieux témoignent encore de ces soubresauts révolutionnaires nés en 1789-1790. Theux, les traces du Congrès de Polleur Dès que l’annonce de la prise de la Bastille parvient dans nos régions, une vive émotion s’empare du marquisat de Franchimont, minuscule territoire de l’est de la Wallonie appartenant au prince-évêque de Liège. Dans les premiers jours d’août 1789, des cocardes aux couleurs du Franchimont (vert et blanc) apparaissent à Theux et Spa. Au même moment, les événements se précipitent dans la capitale : le magistrat de Liège est renversé le 18 août et le prince-évêque ramené de force depuis son château de Seraing dans son palais de Liège. Au même moment, Fyon s’empare de la maison de ville de Verviers, Bonne Ville du marquisat, et se fait élire bourgmestre par la voix populaire. En moins de six jours, les autres Bonnes Villes principautaires suivent l’exemple de Liège et Verviers et procèdent au changement de leurs officiers municipaux. La démocratie prend doucement le pouvoir dans le marquisat et quelques hommes empreints de liberté souhaitent réunir une assemblée nationale qui représenterait le peuple, comme cela s’est fait à Paris. Le 26 août 1789, des délégués de diverses communautés se réunissent à Polleur et se rendent dans une prairie sise derrière la maison de J.-G. Cornesse. Il s’agit là de la session inaugurale de ce que l’on appela le « Congrès de Polleur », chargé d’administrer de manière plus égalitaire la destinée des Franchimontois. Au cours de cette première séance, tous les députés prêtent serment, jurent de défendre les libertés communes et se proclament « libre assemblée nationale franchimontoise ». Vingt-quatre autres 25


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séances se tiennent jusqu’en janvier 1791 dans divers lieux au départ du pré Cornesse. Lors des troisième et quatrième séances, organisées dans l’église Notre-Dame de Polleur, les délégués du Congrès doivent faire face aux menaces de répression du princeévêque de Liège et à la possibilité de voir des troupes germaniques arriver en Franchimont. Les délégués prévoient un plan de défense et la création d’un corps de 1800 volontaires casernés au château de Franchimont. La 5e séance du 16 septembre 1789 est indéniablement une des plus importantes. Sur proposition de Laurent-François Dethier, jeune avocat qui est récemment devenu le premier bourgmestre démocrate reconnu par les autorités de la principauté de Liège, le Congrès rédige une Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, à l’image de celle qui

L’église Notre-Dame de Polleur © Bruxelles, KIK-IRPA

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vient d’être rédigée à Paris. Inspirée des voisins français, cette troisième déclaration des droits de l’homme et du citoyen (après celles adaptées aux États-Unis et en France), est toutefois plus démocratique et plus progressiste que sa grande sœur. L’article III précise que « toute souveraineté réside dans le peuple » et non « dans la nation » selon l’expression française. La déclaration franchimontoise ajoute, à l’article VI, que « la loi est l’expression de la volonté générale qui ne doit jamais s’écarter des règles éternelles de la vérité et de la justice ». Elle précise que « tout citoyen est libre dans ses pensées et opinions » et supprime le droit de propriété comme droit inviolable et sacré. Les congressistes se retrouvent ensuite à Spa le 29 octobre au moment où des événements révolutionnaires éclatent dans la principauté abbatiale de StavelotMalmedy, qui possède une longue frontière commune avec le


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marquisat. Alors que les Franchimontois apportent tout leur soutien aux voisins principautaires, le prince-abbé demande l’aide de troupes étrangères. Des troupes colonaises arrivent à Malmedy le 21 novembre, à Stavelot le lendemain. Le princeévêque de Liège réagit de la même manière et demande de l’aide au roi de Prusse Frédéric-Guillaume II. Quatre mille Prussiens entrent à Liège le 30 novembre 1789 et forcent les congressistes à se mettre en congé ; pour ne pas indisposer le roi de Prusse, il n’y a aucune séance du Congrès pendant plus de trois mois. Les troupes prussiennes quittent la principauté le 16 avril 1790 alors que le Congrès de Polleur reprend ses séances. Celles-ci se tiennent alors principalement au château de Franchimont ou dans la maison communale de Theux, où est organisée la 25e et dernière séance, le 23 janvier 1791. Le retour en force du prince-évêque, appuyé par l’empereur germanique, met fin aux prétentions libérales et indépendantistes des députés du Franchimont dont les biens sont saisis et qui sont cités à comparaître le 8 juillet suivant. Il faut attendre l’arrivée des troupes républicaines françaises près d’un an plus tard pour sentir un nouveau vent de liberté souffler sur l’ancien marquisat comme le précise le registre du Congrès : « À cette époque a recommencé le règne affreux du despotisme (…) Jusqu’à la délivrance de ce pays par les armées républicaines ». Imprégnés d’idées philosophiques, les démocrates franchimontois ne sont pas des ennemis du catholicisme ni même des membres du clergé. Leur assemblée est constituée de juristes et d’anciens militaires qui se sont inspirés des Français sans pourtant les copier. D’États généraux revendicatifs, les séances du Congrès de Polleur deviennent une assemblée constituante puis législative bien plus dans le but de rester Franchimontois que de s’unir aux Français dans un premier temps. En effet, si le mouvement franchimontois avait pour but d’incarner l’aile radicale de la Révolution liégeoise en 1789, il se rapproche de la République lors du deuxième exil des Liégeois à Paris et demande, dès le 23 décembre 1792, le rattachement du pays de Liège à la France après avoir proclamé la déchéance du prince-évêque et exigé un retrait définitif du territoire de l’empire germanique. De nos jours, plusieurs traces d’importance subsistent de cette époque. Les principaux lieux de réunion des séances du congrès sont toujours là pour en témoigner : le château

de Franchimont, siège du marquisat, a vu ses ruines consolidées ; le pouvoir communal est toujours exercé dans la maison commune de Theux, merveille classique érigée en 1770 par Barthélemy Digneffe et récemment restaurée ; l’église NotreDame-et-Saint-Jacques de Polleur, elle aussi superbement restaurée, arbore toujours sa belle tour d’origine romane surmontée d’un clocher tors, caractéristique de la région. Non loin de là, le pré Cornesse existe encore mais aucune plaque ne permet d’indiquer son emplacement, derrière la maison du même nom. Au-dessus de la porte de l’ancienne maison communale de Polleur, en face de l’église, sont gravés les mots « droits de l’homme » à côté de la devise belge « l’union fait la force ». Il s’agit ici d’un exemple unique en Belgique qui rappelle combien les Franchimontois avaient à partager avec les jeunes républicains français. En 1989, pour le bicentenaire de l’événement, l’asbl « Congrès de Polleur » prend l’initiative d’une route des droits de l’homme qui parcourt le territoire de l’ancien marquisat de Franchimont et est balisée par seize stèles sur lesquelles sont inscrits chacun des droits proclamés par le Congrès. Sur chaque stèle se trouve également un texte commémoratif : « Toi qui passes par ici, pense aux droits et aux libertés des hommes, à tous ceux qui sont prisonniers de leur condition ou contraints par un pouvoir. Pense à tous ceux qui utilisent leurs droits ou libertés sans conscience. À tous ceux qui savent et qui affirment que tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Pense à tous ceux qui reconnaissent que l’humanité recherche les conditions de ses droits et les limites de ses libertés. Pense, réfléchis, travaille, apporte ta pierre plutôt que ta peur, mais surtout, aime les hommes parce qu’ils sont comme toi ». Une statue du sculpteur Louis Gérard symbolisant cette réunion a également été installée pour le deux-centième anniversaire des séances du Congrès de Polleur. Elle représente un personnage féminin portant entre ses mains le texte de la déclaration.

La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen Ce texte fondateur de l’idéologie révolutionnaire adopté le 26 août 1789 constitue le préambule de la nouvelle constitution française. La déclaration comporte elle aussi un préambule, ainsi que dix-sept articles, et entend faire table rase de l’Ancien Régime : « tous les citoyens sont égaux aux yeux de la loi », liberté individuelle, liberté de pensées et d’opinions, liberté d’expression, propriété privée… La déclaration énonce également le principe de la séparation des pouvoirs.

La statue du congrès de Polleur. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Bouillon, le château fort Le site de Bouillon a de tous temps été occupé pour son attrait stratégique. Un premier château fort est mentionné en 988 ; la construction de la seconde forteresse débute sous le règne du célèbre duc Godefroid de Bouillon (1061-1100). Le château et son enceinte ont ensuite sans cesse évolué jusqu’au XVIe siècle. Propriété des princes-évêques de Liège, qui portaient le titre de duc de Bouillon, le château et ses défenses sont perfectionnés au fil des siècles et ont radicalement modifié le visage du site. En effet, à l’exception d’un élément de tour, peut-être médiéval, les bâtiments visibles de nos jours ne remontent pas au-delà du XVIe siècle. Les constructions médiévales ont souffert du siège mené par les Espagnols en 1521 et il faut attendre 1551 avant que d’imposants travaux soient réalisés, quelques années avant l’arrivée des Français dans la région. L’installation des de la Tour d’Auvergne en 1591 ouvre près d’un siècle de contestation entre les princes-évêques de Liège et cette famille pour l’obtention du titre de duc de Bouillon. La prise du château par les troupes de Louis XIV en 1676 et la confirmation du titre aux vicomtes de Turenne en 1678 font définitivement balancer le château et l’entièreté du duché de Bouillon dans le giron français suite à la signature

Le château de Bouillon. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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en 1679 du traité de Nimègue qui attribue officiellement le territoire aux de la Tour d’Auvergne. Lorsqu’éclatent les événements révolutionnaires de 1789, le duché de Bouillon est donc un État semi-autonome résolument tourné vers la France. Ouvert aux idées nouvelles, ayant accueilli des encyclopédistes en fuite, le duché prend une part active à la Révolution française. Le 7 mars 1790, à l’initiative de François Pirson, les Bouillonnais se réunissent à Paliseul et décident de former une « assemblée générale du duché de Bouillon » sur le modèle de l’Assemblée nationale de Paris. Pirson, formé à Sedan, est issu d’une famille aisée du duché mais s’ouvre aux idées des Lumières. En 1789, il se fait le porte-parole des notables qui avaient quelques griefs contre le duc et devient un moteur de la constitution de ce nouvel organe décisionnel. L’assemblée compte 55 députés représentant toutes les communes du duché et est approuvée par le duc de Bouillon, Godefroy Charles Henri de la Tour d’Auvergne. L’assemblée bouillonnaise s’installe dès lors au château et préside aux destinées de l’ancien duché jusqu’à son annexion à la république en 1795. Une de ses premières décisions est d’abolir les privilèges et les droits féodaux sur le territoire ducal dès 1790. En février 1791, elle


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proclame la souveraineté nationale du duché. En 1792, l’assemblée devient permanente et se donne comme but d’approuver une constitution pour le pays de Bouillon ; celle-ci est proclamée le 28 mars et transforme le duché en monarchie constitutionnelle, comme cela avait été le cas en France. Le duc de la Tour d’Auvergne se voit contraint de prêter serment et de respecter la loi fondamentale. En 1793, François Prison est envoyé à Paris dans le but de négocier la création d’une république ardennaise. Le 24 avril 1794, la république de Bouillon est proclamée par un décret de l’assemblée. Cet événement confirme le destin à part de l’ancien duché de par son appartenance française d’Ancien Régime. Les Bouillonnais ne connaissent pas de restauration après la défaite de Dumouriez en 1793 et poursuivent le processus d’évolution institutionnelle alors que le reste de nos territoires subit le retour à l’Ancien Régime. Cette éphémère république de Bouillon ne vit toutefois que quelques mois. Cette relative indépendance n’empêche pas l’annexion de l’ancien duché à la République française le 25 octobre 1795 ; son territoire est démembré et partagé entre les départements des Ardennes, des Forêts et de Sambre-et-Meuse. Malmedy, l’église des Capucins Classée et récemment restaurée, l’ancienne église des Capucins de Malmedy a été construite entre 1623 et 1626 en moellons et ardoises. Très simple, le bâtiment comprend un vaisseau d’une seule nef de quatre travées terminée par un chœur à chevet plat, le tout éclairé par de grandes baies cintrées. Dès la fin de l’année 1789, le bâtiment est lié aux événements révolutionnaires et change d’affectation au gré des successions de régimes au XIXe siècle. C’est à cet endroit qu’est installée une éphémère assemblée nationale de la principauté abbatiale. Inspirés par leurs voisins liégeois et franchimontois, les Malmédiens réclament la réunion d’une assemblée nationale. Celle-ci s’ouvre le 9 novembre 1789 par une messe célébrée dans l’église des Capucins où l’on procède ensuite à la vérification des pouvoirs. La session est ouverte par les seuls Malmédiens, les députés de Stavelot ayant refusé de participer à une assemblée dont le siège avait été fixé à Malmedy sans leur aval. Ils prennent toutefois part aux débats dans l’après-midi du 9 novembre. Cette première séance est un véritable succès de foule et doit par conséquent se tenir dans le jardin du couvent. On y choisit soixante mandataires qui représentent chaque subdivision de l’ancienne principauté abbatiale : 18 Malmédiens, 22 Stavelotains et 20 Lognards siègent ainsi dans le réfectoire du couvent. Parmi ses premières actions, la rédaction du catalogue des griefs populaires à transmettre au prince-abbé Célestin Thys. Ce dernier perçoit l’installation de cette assemblée comme une violation de ses droits souverains mais souhaite éviter le recours à la force. L’assemblée doit pourtant s’ajourner sine die dès le 19 novembre, suite à l’arrivée de troupes envoyées par le prince-électeur de Cologne afin de rétablir toutes les prérogatives du prince-abbé. Le jour même, un traité du directoire du Bas-Rhin et de Westphalie dissout l’assemblée nationale qui comptait à peine dix jours d’existence !

L’église des Capucins à Malmedy. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

La suite des événements révolutionnaires et l’annexion de l’ancienne principauté de Stavelot-Malmedy à la France sonnent le glas de l’installation des Capucins à cet endroit. Le 18 septembre 1797, le couvent est fermé et mis en vente comme bien national avant d’être racheté par les Capucins eux-mêmes. La ville de Malmedy le rachète ensuite en 1802 afin d’y installer les services de la mairie et d’y créer une école. Après la chute de Napoléon, sous le régime prussien, le couvent abrite le bureau des poids et mesures. Enfin, après le transfert de l’hôtel de ville dans un nouvel édifice, l’ancien couvent des Capucins est démoli en 1902 pour faire place à un nouveau bâtiment scolaire. Seule subsiste l’église, dernier témoin des diverses affectations du lieu. Rendeux/Marcourt, la plaque en hommage à Théroigne de Méricourt Anne-Josèphe Théroigne dite de Méricourt, née à Marcourt en 1762, est une des figures liégeoises de la Révolution française. Menant une vie de bohème pendant de nombreuses années, elle se trouve à Rome lorsqu’elle apprend ce qui se prépare en France. Mise au courant des événements, elle prend la route 29


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Portrait de Théroigne de Méricourt conservé au Musée de la Vie wallonne à Liège © Bruxelles, KIK-IRPA

pour gagner Paris quelques jours après l’ouverture des États généraux. Théroigne devient alors une spectatrice enthousiasmée de la Révolution, assistant fidèlement aux séances de l’Assemblée constituante à Versailles. À Paris, elle est connue sous les surnoms de « la belle Liégeoise » ou de « muse de la politique » : elle tient salon, donne des conseils et crée un cercle de propagande révolutionnaire. Parmi les personnages qui fréquentent son salon, on retrouve de grandes figures de la Révolution parmi lesquelles Camille Desmoulins et Fabre d’Églantine. Avec l’aide de Charles-Gilbert Romme, elle crée ensuite le « club des amis de la loi » qui est par la suite incorporé dans le club des Cordeliers auquel adhère Théroigne. Pendant quelques mois, elle revient dans sa région natale en 1790 avant de gagner Liège, où elle est arrêtée par les Autrichiens en 1791. Emprisonnée au Tyrol, elle est libérée par la suite et retrouve Paris à la fin de l’année 1791. Le 26 janvier 1792, elle entre dans le club des Jacobins et se range du côté des républicains jusqu’à son retrait de la vie politique à la fin de l’année 1793. Ayant perdu la raison après une humiliation publique, elle est hospitalisée le 11 décembre 1794 et entame une longue descente dans la folie profonde jusqu’à son décès à la Salpêtrière le 8 juin 1817. Aujourd’hui, son village natal a modestement rendu hommage à la fille du pays, figure atypique de la Révolution française. Sur la place du village, à deux pas de l’église, se trouve une plaque commémorative sur laquelle sont gravés ces mots : « Théroigne de Méricourt est née à Marcourt le 13 août 1762 (…) elle a participé à la Révolution française et à la propagation de la justice et du bon droit ».

La plaque en hommage à Théroigne de Méricourt à Marcourt. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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La plaque commémorative du lieu de naissance de Jean-Nicolas Bassenge à Liège © IPW

Liège, la maison natale de Jean-Nicolas Bassenge Située rue de la Goffe, le long de l’ancienne halle aux viandes, cette petite maison de la seconde moitié du XVIIe siècle est une des belles constructions anciennes du centre de la cité. Érigée dans le pur style traditionnel liégeois en brique et calcaire, elle est percée de baies à linteaux droits, comporte une bâtière à coyau et une lucarne à fronton triangulaire. Identique dans sa conception à sa voisine de droite bien que moins élevée, elle abrite aujourd’hui un établissement horeca. Au-dessus de la porte d’entrée se trouve une plaque commémorative rappelant le passé historique de la demeure : « Ici est né le 24-XI-1758 Jean-Nicolas Bassenge, l’un des chefs de la Révolution liégeoise de 1789 ». Issu d’une famille de la haute bourgeoisie principautaire, Jean-Nicolas Bassenge se fait connaître en 1781 en publiant La nymphe de Spa, apologie de la philosophie des Lumières qui lui cause quelques ennuis. Malgré la protection du princeévêque François-Charles de Velbrück, il décide de partir pour Paris où il rencontre les plus célèbres écrivains de l’époque. Défenseur des idées républicaines et spectateur des premiers événements révolutionnaires en France, il rentre à Liège dès que la Révolution éclate en 1789. Il prend la tête du mouvement de protestation avec Fabry et Chestret et rédige, pour le compte de la société des amis de la liberté et de l’égalité de Liège, un plaidoyer pour la réunion du pays de Liège à la France. Il est exclu de l’amnistie après le rétablissement du prince-évêque de Hoensbroeck et repart à Paris. Il retourne dans sa ville natale à la fin de l’année 1792 avec les troupes du général Dumouriez mais s’exile une fois encore après la défaite de Neerwinden en mars 1793. L’annexion de nos territoires en 1795 marque son retour définitif dans la cité ardente. Sous le régime français, il est commissaire général

du directoire exécutif du département de l’Ourthe puis est élu en 1798 pour représenter son département au conseil des Cinq-Cents à Paris. Favorable au coup d’État de Bonaparte en 1799, il siège sous le Consulat au corps législatif et y défend ses idéaux républicains. Il se retire de la vie politique en 1802 et devient conservateur de la bibliothèque municipale de Liège. Il meurt le 16 juillet 1811, à l’âge de 52 ans. Verviers, la maison natale de Jean-Joseph Fyon Au 18 de la rue Thier Mère-Dieu se trouve un édifice classé construit en style Régence au début du XVIIIe siècle. Il s’agit d’une des belles constructions verviétoises de l’époque, caractérisée par l’usage du linteau appareillé, la présence de corbeaux apparents, d’un fronton triangulaire et d’un grand porche donnant sur une cour intérieure. Cet immeuble fut la propriété d’Edmond Fyon, drapier cossu et bourgmestre de Verviers, et ensuite de son fils aîné. Le frère de ce dernier, Jean-Joseph, entra lui aussi dans l’histoire mais pour d’autres raisons. Né dans cette maison en 1745, Jean Lambert Joseph Fyon entre tôt dans la vie politique verviétoise : il est conseiller en 1769 puis bourgmestre à deux reprises de 1772 à 1774 et de 1777 à 1778. Sous l’Ancien Régime, il est également maître des postes impériales. Au moment de la Révolution liégeoise de 1789, Fyon s’érige en représentant de l’aile radicale du mouvement et parvient à se faire élire à nouveau bourgmestre ; il inaugure ainsi une carrière politique et militaire qui le conduira dans les plus hautes sphères du pouvoir. Devant l’intervention des troupes impériales dans le marquisat de Franchimont, il est nommé colonel du 2e régiment d’infanterie des forces liégeoises le 26 avril 1790. Après la première restauration du prince-évêque, il s’exile à Paris où il prend la tête du « comité des Belges et des Liégeois réunis ». 31


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En 1792, il fait partie des troupes de La Fayette 1 puis entre à Liège avec le général Dumouriez. Il poursuit sa carrière militaire au sein de l’armée républicaine jusqu’en septembre 1793. Le 4 décembre de la même année, il est arrêté pour conspiration contre la République et interné à Saint-Lazare. Libéré grâce à l’aide de Bassenge et Robespierre, il est incarcéré une seconde fois entre avril et juillet 1794. Après l’annexion de la principauté de Liège, il est élu député du département de l’Ourthe au conseil des Anciens. Resté fidèle à ses convictions révolutionnaires, il s’oppose au Directoire et à Napoléon, refusant de voir le régime changer à nouveau. Inscrit sur la liste de proscription en 1801, il rentre sur ses terres et décède à Liège le 2 septembre 1816.

La bataille de Jemappes et l’entrée de Dumouriez en Wallonie La bataille de Jemappes décida du sort des territoires de la Belgique actuelle dans le sens où elle ouvrit la voie à la pénétration des idéaux et des principes révolutionnaires dans nos régions. Entrés dans le comté de Hainaut par Quiévrain le 23 octobre 1792, les troupes françaises sont menées par le général Charles-François Dumouriez, à la tête des armées du Nord. Décidés à s’installer chez nous et à annexer nos territoires, les Français rencontrent les troupes autrichiennes menées par le duc de Saxe-Teschen devant Jemappes et Cuesmes au matin du 6 novembre. L’artillerie française démonte les batteries ennemies dès midi et provoque leur capitulation avant la fin de la journée. Le 7 novembre, vers 11 h du matin, Dumouriez et ses troupes entrent à Mons. Sur la Grand-Place, l’aigle bicéphale est démontée et mise en pièce avant d’être remplacée par un bonnet phrygien. La population montoise accueille dans la joie et dans l’allégresse les libérateurs français qui devaient leur apporter les bienfaits des idéaux révolutionnaires. Les Français poursuivent ensuite leur promenade de santé jusqu’à Liège, qu’ils atteignent le 28 novembre 1792. Seul le territoire du duché de Luxembourg reste en dehors du conflit. S’ouvre ensuite une période que l’on peut qualifier de « première occupation française » dans nos régions bien qu’étant pourtant de courte durée. Mons/Jemappes, le monument au coq Construit bien après les faits, le monument au coq est aujourd’hui le principal lieu commémoratif de la bataille de Jemappes. L’idée est lancée à partir de 1890 mais ne se concrétise qu’au début du XXe siècle. Un comité d’action mené notamment par le militant wallon Jules Destrée se constitue en mai 1909 et sélectionne le sculpteur arlonais Jean-Marie Gaspar, grand spécialiste de la sculpture animalière. Inauguré avec faste le 24 septembre 1911 à l’occasion du 1

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Voir l’article sur le monument La Fayette à Rochefort dans le présent chapitre.

Le monument au coq de Jemappes. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Congrès international des Amitiés françaises, le monument se présente sous la forme d’un obélisque de granit de 16 m de hauteur surmonté d’un coq en cuivre qui symbolise la puissance révolutionnaire de la France. Tourné vers l’est, l’animal se dresse vers le ciel, les ergots en bataille et le cou gonflé par le cri qu’il pousse. Sur le socle, une brève inscription : Jemappes 1792. La sculpture est détruite par les Allemands dès le 24 août 1914, et un nouveau coq réalisé par le sculpteur Charles Samuël est installé au sommet de l’obélisque le 21 mai 1922. Épargné par la Seconde Guerre mondiale, il trône toujours en haut du monument situé de nos jours au cœur d’une cité sociale. Moins connu et pourtant toujours visible, le « canon de Jemappes » témoigne encore lui aussi de cette bataille qui fédéra l’esprit révolutionnaire en Wallonie. Située à l’origine sur la place Fauviau à Wasmes, cette pièce d’artillerie utilisée par les hommes de Dumouriez a été réinstallée devant l’ancienne maison communale de Jemappes, sur la place principale de la localité.


Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

L’ancien hôtel du marquis de Gages à Mons. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

Mons, l’ancien hôtel du marquis de Gages Construite en 1767-1768 sur les plans de l’architecte Fonson, cette riche demeure classique fait partie des nombreux très beaux hôtels de maîtres du centre historique de Mons. La façade se développe sur quatorze travées de deux niveaux en pierre et brique enduite. À droite de la façade, un portail de style Louis XV-Louis XVI surmonté d’un gardecorps en fer forgé conduit vers une petite cour intérieure. L’hôtel a bénéficié en 2013 d’une restauration menée par la Ville de Mons. C’est dans cet hôtel que séjourna le général Dumouriez au lendemain de l a bataille de Jemappes lors des quelques jours qu’il passa à Mons avant de se diriger vers Liège. Awans/Hognoul, la ferme du Tombeu Située un peu à l’écart du village de Hognoul, la ferme du Tombeu, également appelée ferme Lejeune, a été construite en brique et calcaire entre le XVIIe et le XIXe siècle. Elle est aujourd’hui un des témoins des opérations militaires menées par les troupes françaises contre les Autrichiens dans nos

Le boulet français encastré dans un mur de la ferme du Tombeu à Hognoul © IPW

régions à la fin de l’année 1792 et plus particulièrement sur les hauteurs de Liège la veille de l’entrée des armées républicaines dans la capitale principautaire. Encastrée dans le soubassement de l’édifice, une pierre calcaire renferme un boulet de canon autour duquel on peut lire « DUMOURIEZ / REP : [ublique] FRAN : [çaise] / 27 N : [ovembre] 1792 ». Ce boulet de canon, subitement arrêté par le mur de la ferme, est par la suite devenu un discret monument commémoratif à la gloire du général français, l’inscription étant venue s’inscrire autour du vestige de la bataille.

Quelques traces liées à la première occupation française de la Wallonie Liège, l’hôtel de ville Édifié entre 1714 et 1729 sur la place du Marché en lieu et place de l’ancienne maison de ville gothique détruite par un bombardement français en 1691, l’hôtel de ville de Liège est un des plus beaux bâtiments classiques de Wallonie. Construit 33


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en calcaire et brique enduites sur un plan en U, on y accède par un imposant escalier pour pénétrer dans le hall d’entrée d’exception, dont une restauration minutieuse s’est achevée à l’été 2014. La façade principale est surmontée d’un fronton comportant les armoiries du prince-évêque Joseph-Clément de Bavière et des deux bourgmestres de Liège en fonction lors de l’édification du bâtiment. Reconnu patrimoine exceptionnel de Wallonie, il compte de nombreux salons et pièces richement décorés. Le 29 janvier 1793, quelques semaines après l’arrivée des troupes françaises de Dumouriez, le conseil municipal provisoire se réunit à l’hôtel de ville pour procéder à la publication des résultats du vote de réunion à la France comme cela avait été le cas dans d’autres municipalités. Un véritable plébiscite ressort de ce vote : 966 oui pour 40 non ! La majorité des sections de la ville a choisi la voie du scrutin secret mais d’autres ont préféré l’acclamation ou la prononciation à haute voix. Les plébiscites sont organisés aux quatre coins de la ville, certains dans des hauts lieux patrimoniaux. C’est ainsi que la 28e section se prononce le 20 janvier 1793 dans l’église Saint-Jacques. Le 17 février suivant, l’administration centrale provisoire du pays de Liège procède à la ratification du vote.

La salle du conseil communal à l’hôtel de ville de Liège. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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D’autres opérations plébiscitaires se déroulent en principauté tout au long du mois de février de la même manière que dans la capitale. En pays wallon, de nombreux villes et villages y prennent part et se prononcent majoritairement en faveur du rattachement à la France. Le 22 février, l’administration provisoire peut déclarer que le pays de Liège a « émis son vœu pour la réunion à la République française ». Mons, la collégiale Sainte-Waudru Reconnue patrimoine exceptionnel de Wallonie, la collégiale Sainte-Waudru et son chapitre de chanoinesses ont de tous temps caractérisé l’histoire montoise. Un sanctuaire a existé depuis la fondation d’un monastère par la sainte vers la moitié du VIIe siècle. L’église actuelle a été érigée de 1450 à 1491 et constitue un des chefs-d’œuvre du style gothique dans notre région. Homogène, le sanctuaire comporte une tour occidentale inachevée, une triple nef de sept travées et un vaste chœur entouré d’un déambulatoire ourlé de chapelles. L’édifice étonne tant par sa sobriété que par ses dimensions. Sous l’Ancien Régime, la collégiale et son chapitre ont été mêlés à la petite et grande histoire du comté de Hainaut. Les événements révolutionnaires et le sort réservé à la religion à la fin du XVIIIe siècle ont également placé la collégiale SainteWaudru au centre de l’attention. Le 8 novembre 1792, deux jours après la victoire française de Jemappes, le peuple montois est convoqué à SainteWaudru où l’on procède à la nomination de trente administrateurs provisoires de la ville de Mons, sorte de nouveau pouvoir communal. Cette nomination se fait « au nom du peuple comme seul souverain » et sous l’invocation « de la liberté et de l’égalité ». Ces administrateurs prêtent serment le lendemain au balcon de l’hôtel de ville. Le 11 février 1793, les citoyens de la ville sont à nouveau appelés à se réunir dans la collégiale pour un événement d’une importance plus symbolique encore, se prononcer sur la forme du gouvernement qu’ils souhaitent adopter. Dès 8 heures, tous les membres de la société des amis de la liberté et de l’égalité 2 se rassemblent dans l’église, ainsi que de nombreux militaires français et quantité de bourgeois. Le général Ferrand monte en chaire pour exposer aux Montois combien il est avantageux de se réunir à la République. Les événements prennent une tournure quelque peu houleuse : les membres du club de l’égalité et les militaires se prononcent en faveur d’une annexion alors que les bourgeois sont résolument contre. Le ton monte et ces derniers décident de quitter la vénérable collégiale mais en sont empêchés par des hommes en armes gardant les portes de SainteWaudru. Quelques personnes en sortent blessées mais le vote en faveur du rattachement est obtenu. C’est donc par la force et les armes que les Montois proclament leur souhait d’être rattachés à la République ! Le 17 février 1793, un placard des administrateurs provisoires de la ville de Mons 2

Voir l’article consacré à l’ancien couvent des Jésuites de Mons dans le présent chapitre.


Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

Vue aérienne du centre historique de Mons avec, à gauche, la collégiale Sainte-Waudru. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

annonce l’adhésion « libre et de bon cœur au vœu général de se réunir à la France, exprimé unanimement par le peuple à Sainte-Waudru »… Le 5 mars 1793, plus de deux ans avant les autres composantes des Pays-Bas autrichiens, l’ancien comté de Hainaut est réuni à la République française et forme le 86e département sous le nom de département de Jemappes, cas unique de rattachement d’une ancienne province qui fut pourtant plus qu’éphémère. Le 27 mars, les troupes autrichiennes font leur retour à Mons après la défaite de Dumouriez à Neerwinden et sa capitulation à Ath. Tournai, la cathédrale Notre-Dame Inscrite depuis 2000 sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, la cathédrale de Tournai est exceptionnelle à plus d’un titre. L’édifice impressionne par ses dimensions (transept de 67 m, chœur de 54 m de long sur 33 m de haut) et par l’impression de grandeur que donnent ses cinq hautes tours. La cathédrale, depuis sa première édification, joue un rôle dans la vie politique de la ville. L’évêque est alors étroitement lié au pouvoir et le vingtième chapitre de l’ordre de la Toison d’Or se tient à Notre-Dame en 1531. C’est là également que

sont conservés les papiers des États du baillage de TournaiTournaisis qui siègent à quelques mètres de là. À la suite des événements révolutionnaires et de l’arrivée des troupes françaises dans nos régions, la cathédrale joue à nouveau un rôle dans l’évolution politique de la ville. Comme cela s’était passé à Mons pour l’ancien comté de Hainaut, les habitants de Tournai se trouvent également libérés de la tutelle autrichienne. Après avoir procédé à l’installation d’un nouveau pouvoir municipal dans la capitale du comté de Hainaut, les membres du comité révolutionnaire poursuivent leur mission et se rendent dans les principales villes et communes hennuyères. Ils arrivent le 11 novembre 1792 dans la capitale du Tournaisis voisin. Le lendemain, c’est dans la cathédrale qu’est organisée l’élection des administrateurs provisoires de la province du Tournaisis. La même élection a enfin lieu le 13 novembre à Charleroi qui décide de s’appeler désormais Char-sur-Sambre ; ce nom évolue encore par la suite en Charles-sur-Sambre puis Libre-sur-Sambre jusqu’en 1800. Au contraire des administrateurs montois et carolorégiens qui exerçaient leur autorité sur la ville et sa banlieue, les administrateurs provisoires tournaisiens exerçaient la leur sur la totalité du territoire de l’ancien baillage. 35


Sur les traces de la Wallonie française

Vue aérienne de la cathédrale Notre-Dame de Tournai. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Mons, l’ancien collège des Jésuites Sis au nº 2 de la rue Marguerite Bervoets, une partie de l’ancien couvent des Jésuites a connu diverses affectations depuis sa fondation en 1598. Primitivement installés rue des Cinq Visages, les Jésuites érigent un nouveau bâtiment à l’emplacement actuel en 1611. Les agrandissements de l’institution englobent ensuite progressivement le bloc d’immeubles construits entre les rues d’Enghien, de la Tour Auberon, des Telliers et Bervoets. Les Jésuites sont expulsés de ce bâtiment en 1773 après la suppression de leur ordre par le pape Clément XIV. L’édifice qui subsiste de nos jours est un ensemble massif de tradition gothique daté de 1623 et composé de deux ailes perpendiculaires de deux niveaux de brique et pierre bleue. 36

Dès le soir du 7 novembre 1792, jour de l’entrée à Mons du général Dumouriez, une assemblée se tient dans la salle du concert Bourgeois, rue des Belneux. Cette sorte de club accueille le général français qui entend y faire connaître les intentions de la République aux Montois. Il s’agit de la séance inaugurale d’un club révolutionnaire qui marque profondément la ville de Mons à l’époque, la « Société des amis de la liberté et de l’égalité ». La présence du vainqueur de Jemappes donne immédiatement du prestige au club dont le nombre des membres atteint deux cents personnes après quelques semaines. Certains sont administrateurs provisoires de la ville de Mons, d’autres siègent à l’assemblée générale des représentants du peuple souverain du Hainaut. Après avoir occupé quelques semaines la salle du concert bourgeois, puis la salle


Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

La Convention Après les événements du printemps 1789, la France se dote de nouvelles institutions. Celles-ci n’ont de cesse de changer et d’évoluer jusqu’à la fin du siècle. Le 17 juin 1789, les États généraux s’érigent en Assemblée nationale, devenue Assemblée nationale constituante le 7 juillet 1789. Son but est de doter la France d’une constitution ; celle-ci prévoit la mise en place d’une monarchie constitutionnelle. Le 1er octobre 1791, ses travaux terminés, la constituante laisse la place à l’assemblée législative qui siège moins d’un an. Le 21 septembre 1792 se réunit pour la première fois une nouvelle assemblée, la Convention, sous laquelle des décisions lourdes de sens sont prises. Sous ce nouveau régime, la Convention vote le jour même de sa première séance l’instauration de la République et la fin de la monarchie. La France entre en guerre et remporte ses premières victoires : le général Dumouriez, vainqueur à Jemappes, entre dans les Pays-Bas autrichiens au nom de la République. La Convention vote aussi la mort de Louis XVI, guillotiné le 21 janvier 1793. La Terreur s’installe alors que la Convention assume les pouvoirs exécutifs et législatifs, pourtant censés être séparés depuis l’adoption de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Un gouvernement révolutionnaire est mis en place et l’on crée le comité de salut public et le comité de sûreté générale 1. Après le retour des Français dans nos régions suite à la bataille de Fleurus de juin 1794, c’est encore à la Convention que l’on doit l’œuvre d’annexion des « départements réunis », votée le 1er octobre 1795, peu avant la destitution de cette assemblée. La dernière session a lieu le 26 octobre 1795. 1

Sur la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et le comité de salut public, voir plus haut les encarts qui leur sont consacrés.

La plaque commémorant le passage de Danton à Mons en 1793 © IPW

Saint-Georges sur la Grand-Place, le club s’installe définitivement dans la chapelle du collège des Jésuites. Le bureau siège à la place de l’autel. Derrière le fauteuil du président est installée une pierre de la Bastille, offerte au club 3. Le 11 février 1793, le club accueille des hôtes de prestige. Les citoyens De Lacroix et Danton, députés de la Convention nationale, prennent part à la réunion. Danton y prononce une 3

Voir l’article sur le musée de la Vie montoise dans le chapitre consacré aux monuments et sites divers liés à la période française.

diatribe enflammée en faveur de la réunion du Hainaut à la France : « c’est sur les débris des trônes qu’il faut élever l’édifice de la liberté ; il est temps de revendiquer les droits de l’homme dans toute leur étendue, et de faire disparaître à jamais jusqu’aux vestiges de notre ancien esclavage ; c’est en électrisant nos cœurs au feu sacré de la liberté que nous pourrons combattre ses ennemis les plus acharnés ». Une plaque commémorative se trouve aujourd’hui sur la façade de l’ancien collège afin de rappeler cette soirée mémorable. Coulée dans le bronze et décorée d’attributs républicains (bonnet 37


Sur les traces de la Wallonie française

phrygien et faisceaux), elle comporte l’inscription suivante : « Ici siégea au lendemain de la bataille de «Jemmape» la société des amis de la liberté et de l’égalité où se fit entendre la voix de Danton le 11 février 1793 ». L’euphorie est toutefois de courte durée. La manière avec laquelle est forcé le vote de réunion à la France et la défaite de Neerwinden quelques jours plus tard font trembler le club sur ses fondations. Aux yeux du gouvernement autrichien, les clubistes apparaissaient comme les pires ennemis de l’ordre ancien qu’il fallait rétablir. Le 15 avril 1793, toute réunion de la société des amis de la liberté et de l’égalité est interdite. Le couvent retrouve sa liberté avant d’être supprimé en 1796 et d’accueillir la bibliothèque de l’école centrale du département de Jemappes 4. Mons, la Grand-Place et ses bâtiments En plein cœur de Mons, l’exceptionnelle Grand-Place et son hôtel de ville, reconnus patrimoine exceptionnel de Wallonie, comptent parmi les ensembles architecturaux les plus impressionnants de Belgique. Au centre de la place, la maison communale domine l’ensemble et attire le regard : son imposante façade gothique construite entre 1458 et 1477 est surmontée par un élégant campanile érigé en 1717-1718. Parmi les nombreuses œuvres d’art conservées dans la maison communale 4

se trouvent deux portraits d’officiers de l’Empire, le général André-Joseph Boussart et le colonel Ignace-Louis Duvivier 5. À l’intérieur sont présentes également les armoiries des divers États dont la ville de Mons a fait partie tout au long de l’histoire, parmi lesquels la République et l’Empire français. Comme cela fut le cas pour d’autres villes, la Grand-Place de Mons participe à la célébration du pouvoir nouveau. À Mons plus que nulle part ailleurs, ces célébrations républicaines prennent une tournure différente. La capitale de l’ancien comté de Hainaut est la première à se convertir aux idées nouvelles et, l’espace de quelques mois, à vivre à l’heure de Paris. Quelques mois avant les premières campagnes militaires de la République, l’hôtel de la Couronne, situé à la gauche de l’hôtel de ville, accueille brièvement en juin 1792 le comte de Provence (le futur Louis XVIII), en fuite. Le premier événement notoire est organisé sur la place de Mons le 6 janvier 1793. La société des amis de la liberté et de l’égalité y orchestre une fête civique en mémoire des soldats français tués à Jemappes. Un feu de joie voit disparaître l’aigle, la couronne, le sceptre, les armoiries du Hainaut… Une nouvelle fête est organisée le 6 février suivant, cette fois en présence de quelques représentants des communes du Hainaut. 5

Voir l’article sur l’ancien couvent des Ursulines à Mons dans le chapitre consacré aux monuments et sites divers liés à la période française.

Vue aérienne de la Grand-Place de Mons. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine 38

Sur le général Boussart, voir la notice consacrée aux frères Boussart à Binche dans le chapitre « Monuments liés à des personnages historiques de la période française » ; sur le colonel Duvivier, voir la notice sur le cimetière de Mons dans le chapitre consacré au patrimoine funéraire.


Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

Rochefort, le monument La Fayette Le marquis de La Fayette, héros français de la guerre d’indépendance américaine avant de devenir une personnalité de la Révolution française, est certainement un des acteurs politiques français du XVIIIe siècle parmi les plus célèbres. En 1792, il prend part aux opérations militaires dans nos régions et se bat dans les environs de Philippeville. Toutefois, au cours de l’été, des divergences entre l’Assemblée nationale et La Fayette surviennent et prennent rapidement une tournure houleuse. Le 19 août, il est déclaré traître à la Nation et décide le même jour de gagner les Provinces-Unies d’où il pourra s’embarquer pour les États-Unis. Alors qu’il se trouve dans le comté de Namur, à Rochefort, il est arrêté par les troupes autrichiennes et déclaré prisonnier de guerre. Emmené à Namur, il passe la nuit à l’hôtel d’Harscamp avant d’être conduit à Nivelles et finalement emprisonné à Luxembourg. Le marquis connaît ainsi les geôles autrichiennes puis prussiennes jusqu’à sa libération sur intervention de Bonaparte en 1797. Aujourd’hui, un monument rend hommage au marquis de La Fayette et commémore cet épisode de sa vie qui s’est déroulé chez nous. Ce monument comporte un buste sculpté par Marcel Collet d’après un crayon exécuté en 1790. En-dessous, une inscription « Le 19 août 1792, au mépris de tout droit, La Fayette, défenseur de la liberté, fut arrêté à Rochefort par les Autrichiens ». Il a été inauguré en 1934 à l’occasion du centième anniversaire de la mort de La Fayette.

Le monument Lafayette à Rochefort est protégé par un vénérable tilleul. Photo asbl Le Marronnier/benjamin.stassen@skynet.be

Soumagne/Ayeneux, le monument de la bataille du 4 mars 1793 Un petit monument commémorant des combats entre Français et Autrichiens se trouve le long de la chaussée de Wégimont à Ayeneux. Cette stèle de pierre d’environ un mètre de hauteur témoigne elle aussi du retour des Autrichiens dans nos régions dans le but de restaurer l’Ancien Régime. Recomposée sous les ordres du prince de Cobourg, l’armée autrichienne lance en mars 1793 une contre-offensive dans le but de prendre la ville de Bruxelles. Le monument commémoratif comporte une plaque gravée de l’inscription suivante : « Ici, le 4 mars 1793, l’arrière-garde française aidée par les paysans de Soumagne, arrêta pendant toute la journée l’offensive autrichienne ». Cette « victoire » à Soumagne s’inscrit entre la prise de Maestricht (1-2 mars) et celle de Liège (5-7 mars) avant la défaite des Français, quelques jours plus tard, le 18 mars, à Neerwinden, dans le sud de l’actuel Brabant flamand. Les Autrichiens rétablissent le princeévêque François-Antoine de Méan sur son trône à Liège avant d’entrer dans Bruxelles le 26 mars. Accueillis favorablement par la population brabançonne, ils restaurent les Pays-Bas autrichiens dans leur statut d’avant Jemappes et désignent l’archiduc Charles d’Autriche, frère de l’empereur François Ier et s’étant distingué à Neerwinden, en tant que nouveau gouverneur général.

Le monument commémoratif des combats de 1793 à Ayeneux © IPW

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Sur les traces de la Wallonie française

Ath, le château Bourlu Autrefois précédé d’une cour d’honneur, ce très bel hôtel de maître de style Louis XVI a été construit entre 1767 et 1770 par le chevalier L.-F. Carton. Il s’agit d’un imposant bâtiment de treize travées à deux niveaux en double corps enduit de blanc et se terminant par deux courtes ailes perpendiculaires. Récemment restauré, l’édifice est aujourd’hui le principal témoin de la fin de la première occupation de nos régions par les Français. C’est ici que Dumouriez acte sa trahison et permet aux Autrichiens de reprendre leurs possessions dans les Pays-Bas au début de l’année 1793. Vainqueur à Valmy et à Jemappes, entré triomphalement à Liège, Dumouriez fut celui qui apporta chez nous le souffle révolutionnaire, avec une relative réussite. Forte de ces premières victoires, la jeune République charge le général au début de l’année 1793 de poursuivre sa route et d’aller conquérir les Provinces-Unies. Le 18 mars 1793, Dumouriez est défait par les Autrichiens lors de la bataille de Neerwinden, petit village de l’actuelle commune de Landen, à quelques encablures de Liège, et passe à l’ennemi ! Menacé d’être injustement traduit devant l’Assemblée nationale, d’arrestation et de comparution devant le tribunal révolutionnaire, Dumouriez s’allie au prince Frédéric-Josias de Cobourg et aux armées impériales. Sur la route de Valenciennes et de Paris, il est abandonné par ses soldats et forcé de signer sa trahison au château Bourlu le 27 mars 1793, avant d’entamer une vie de fugitif et de se fixer au Danemark. Le rétablissement de l’Ancien Régime se fait rapidement et sans terreur dans les Pays-Bas. La répression est plus marquée dans le pays de Liège.

Le château Bourlu à Ath. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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Chapuis à Verviers, Bouquette à Huy et Behogne à Jehay Né à Verviers le 12 avril 1761, fils de médecin, Grégoire-Joseph Chapuis étudie la médecine dans sa ville natale, puis à Bréda et à Paris, où il décroche ses derniers diplômes en 1785 ; il est ensuite reçu maître-chirurgien à Liège en 1786 et se fait rapidement connaître pour ses talents, notamment sa maîtrise de la césarienne. Il s’intéresse également à l’illettrisme, touchant la majorité de la population à la fin du XVIIIe siècle. Avec plusieurs amis, il fonde la « Chambre des Zélés », une société d’instruction et de bienfaisance dont le but est de secourir des familles pauvres et d’ouvrir une école du soir où l’enseignement se donne tous les jours moyennant une modique rétribution. Les Révolutions de 1789 viennent toutefois troubler l’existence paisible du chirurgien. La fuite du prince-évêque César-Constantin de Hoensbroeck et l’arrivée des idées nouvelles en provenance de Paris bouleversent la donne à Verviers qui, comme Liège, se dote d’une administration nouvelle. Quelques mois plus tard, Chapuis rejoint le mouvement afin d’éclairer le peuple. Sa première action militante est organisée en plein air ; il réunit ses concitoyens et leur explique les droits de l’homme et du citoyen. Chaque réunion est couronnée de succès si bien qu’à l’été 1790, cellesci sont organisées trois fois par semaine. En 1791, le régime principautaire est restauré et Chapuis doit attendre l’arrivée des troupes françaises, en novembre 1792, pour voir sa carrière évoluer à nouveau. Profitant d’une première fuite du nouveau prince-évêque François-Antoine de Méan, Verviers se donne une nouvelle administration municipale à laquelle se joint Grégoire-Joseph Chapuis qui devient membre du comité de surveillance. La défaite des troupes françaises face aux armées autrichiennes en mars 1793 le force à fuir. Il est toutefois rappelé à Verviers en mai où il est rapidement arrêté, jeté en prison à Liège et soumis à un rude traitement. Le 17 septembre 1793, il comparaît devant les échevins de Liège et doit répondre de quarante-sept chefs d’accusation parmi lesquels celui d’avoir marié des personnes alors qu’il était officier municipal et d’avoir propagé un discours en faveur des droits de l’homme. Le 30 décembre, il est condamné à mort pour l’exemple ! Le prince-évêque reste sourd aux nombreuses demandes de grâce qui affluent de toutes parts ! Le 2 janvier 1794, Chapuis est conduit à Verviers et décapité sur la place du Sablon. Alors que la guillotine s’était assez rapidement répandue à l’époque, les décapitations étaient encore effectuées au moyen d’une hache dans la principauté de Liège. L’arme de son bourreau tomba sept fois avant d’abattre la tête du chirurgien ! La répression fait deux autres victimes en région hutoise quelques semaines plus tard. Selon la légende, le fripier hutois Jean-Denis Bouquette avait accroché au revers de la manche du prince-évêque César-Constantin de Hoensbroeck, une cocarde patriotique en lui disant : « Regardez grand-père, que cela vous va bien. N’ayez pas peur, vous ne pouvez mal ». Coupable d’avoir mis des scellés sur des maisons religieuses, d’avoir collaboré à l’arrestation de l’abbé-seigneur de Leffe et


Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

1795, des révolutionnaires avaient organisé une cérémonie en sa mémoire et installé un cénotaphe à l’emplacement de son exécution. Il faut toutefois attendre 1880 pour que la statue du révolutionnaire soit inaugurée ; elle est l’œuvre du bruxellois Joseph-Antoine van den Kerckhove et repose sur un piédestal en pierre bleue de 4 m de largeur. Chapuis est représenté debout, un billot à ses pieds. Sur les faces du socle figurent plusieurs inscriptions : « G.J. Chapuis / ses concitoyens / 1880 / éducateur et bienfaiteur du peuple / 12 avril 1761 / 2 janvier 1794 / mort pour l’indépendance du pouvoir civil ». En 1994, à l’occasion du bicentenaire de son exécution, un monument en hommage à Jean-Denis Bouquette a été installé à Huy, au croisement de la rue Mont Falise et de la chaussée de Waremme, à l’initiative de l’asbl « Animation du Mont Falise ». Il est constitué de piquets de fer symbolisant les fourches sur lesquelles la tête du supplicié fut exposée et d’une boule de fer enfermant une mitre symbolisant l’intransigeance du prince-évêque. Enfin, une colombe de fer survole le monument dans le but d’évoquer l’amour et la tolérance.

La bataille de Fleurus et le retour en force des Français

La statue de Grégoire-Joseph Chapuis sur la place du Martyr à Verviers © IPW

de s’être fait propagandiste du « système français », Bouquette est lui aussi décapité à Huy le 20 mars 1794, sa tête fichée sur une pique est exposée au thier de Falise. La tête de Bouquette est ensuite jetée dans une fosse à la Buissière où les soldats français la récupèrent quelques semaines plus tard, en juillet 1794, lorsqu’ils effectuent leur retour après la victoire de Fleurus. Un cortège patriotique conduit la tête de Bouquette jusqu’à la Grand-Place où elle est enterrée à proximité du Bassinia, à l’endroit même où fut ensuite planté l’arbre de la liberté. Peu après Bouquette à Huy, Augustin Behogne est à son tour décapité à la hache, le 26 mars 1794, à Jehay, pour avoir pris la tête du mouvement révolutionnaire dans cette localité et organisé notamment un pillage dans l’ancienne abbaye de la Paix-Dieu 6. Une statue rend hommage à Chapuis à Verviers, sur la place où il fut décapité et qui depuis la fin du XIXe siècle porte le nom de « place du Marty ». Il est le seul des patriotes de 1789 à avoir sa statue sur une place publique. Dès le 2 janvier 6

Sur cet événement, voir l’article consacré à l’ancienne abbaye de la PaixDieu à Jehay dans le chapitre consacré aux monuments et sites divers liés à la période française.

Moins de deux ans après la victoire de Jemappes et la trahison de Dumouriez, les troupes républicaines françaises sont de retour dans nos régions, cette fois dans le but de les conquérir définitivement. Dès le mois de mai 1794, ils passent pour la première fois la Sambre et s’installent dans les environs de Thuin où ils doivent faire face à la résistance des Autrichiens. Partout où elle passe, l’armée française se livre à des pillages et des destructions 7. Le 26 juin 1794 a lieu une des plus importantes batailles de l’histoire de France à l’époque républicaine. Devant Fleurus, le général Jourdan remporte une victoire capitale qui ouvre aux Français les portes de la Belgique et l’annexion de nos territoire pour près de vingt ans. Binche/Buvrinnes, le calvaire de la ferme du Buttiau La ferme de Bultia ou du Buttiau, datée par ancres de 1723 et 1827, se présente sous la forme d’un spacieux quadrilatère de briques blanchies bâti, selon la tradition, sur le site d’une villa romaine. Un calvaire, placé sur les hauteurs de la ferme, rend hommage à des soldats morts le 12 mai 1794 lors d’un combat entre Français et Autrichiens. Merbes-le-Château/Labuissière, le monument Kléber Au hameau de Labuissière se trouve une stèle en hommage à Jean-Baptiste Kléber, général français qui s’est illustré pendant les guerres de la Révolution et pendant la campagne d’Égypte. Il fut assassiné au Caire le 14 juin 1800. Sur le monument se 7

Voir plus loin « Les traces de la campagne destructrice des armées françaises en Wallonie ».

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Sur les traces de la Wallonie française

Le monument au général Kléber à Labuissière. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

trouve l’inscription suivante, témoin de combats menés à cet endroit le 23 mai 1794 : « Le 4 prairial, le général J.-B. Kléber, dans ce village lut à ses troupes une proclamation restée célèbre. Il y battit les coalisés de l’excellent stratège autrichien le prince de Kaunitz. Monument offert à la commune par la confrérie Ovi Merbienne, a été inauguré le 19 mars 1977 par le consul de France M. Ch. Dianous de la Perrotine (…) ». Châtelet, l’école Sainte-Marie Ancien couvent des Dominicaines, l’école Sainte-Marie est située en retrait de la voirie autour d’une cour pavée encadrée par des bâtiments en brique et calcaire édifiés à la fin du XVIIIe siècle. L’aile principale est composée de sept travées, interrompues par une tourelle circulaire de trois niveaux surmontée d’une toiture hexagonale à bulbe. De part et d’autre de la cour arrière, deux grandes ailes néogothiques ont été ajoutées au XIXe siècle. 42

La cour de l’école Sainte-Marie de Châtelet. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

Le 28 mai 1794, les Français occupent Châtelet. Une de leurs premières actions consiste à chasser les sœurs de leur couvent pour y installer un hôpital militaire. La chapelle est saccagée, on y organise un bal improvisé où l’on témoigne de la fureur anticléricale qui caractérise cette seconde vague d’invasion française dans nos régions. Charleroi/Marchienne-au-Pont, le château de Cartier Ensemble homogène de brique et pierre calcaire typique de l’architecture de nos régions, le château de Cartier a été édifié aux XVIIe et XVIIIe siècles. Il survit à la période révolutionnaire et traverse les décennies avant d’être victime d’un incendie en 1932. Restauré depuis, le château a de nos jours conservé sa cour d’honneur et son porche ainsi que deux ailes de logis. Occupés à tenter de passer la Sambre dans les premiers jours de l’invasion en mai 1794, les Français s’arrêtent devant


Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

Marchienne-au-Pont. Privés de nombreuses choses depuis des semaines, les soldats sont épuisés et leur moral au plus bas. Les représentants du peuple décident pourtant de poursuivre les opérations et établissent leur quartier général au château de Cartier, sur la rive droite de la Sambre. De là, l’armée républicaine lance le 30 mai le siège de la forteresse de Charleroi et entame les premiers tests d’utilisation d’un aérostat à des fins militaires. Auvelais, le boulet de canon français Le moulage d’un boulet de la bataille de Fleurus se trouve encore à Auvelais et est entouré de l’inscription « 24 juin 1794 », gravée dans la pierre. Charleroi/Jumet, le monument du ballon La bataille de Fleurus est entrée dans l’histoire à plus d’un titre. C’est au cours de cette bataille qu’est utilisé pour la première fois un ballon d’observation à des fins militaires. Le ballon « l’entreprenant », véritable arme secrète des armées républicaines, prend son premier envol au-dessus de la Belgique, à Marchienne-au-Pont, en présence du général Jourdan le 24 juin 1794. Il atteint alors plus de 400 m d’altitude. Cette première tentative réussie lance le coup d’envoi de l’utilisation du ballon pour la suite des opérations. Le 25 mai, Jourdan envoie l’engin à Jumet dans le but de relever les dégâts causés par les bombardements français à la forteresse de Charleroi. De cette manière, le général observe l’ennemi, se renseigne sur lui et compte dans son jeu une arme nouvelle, tant sur le plan stratégique que psychologique. Le 26 juin, jour de la bataille de Fleurus, le ballon se trouve toujours non loin du moulin à vent de Jumet. À son bord, deux officiers qui communiquent avec la terre au moyen de signaux mais également de messages placés dans des sacs de sable lestés depuis l’aérostat. Même si l’on ne sait exactement quelle fut la place jouée par le ballon dans la victoire, il est un fait certain que cet épisode est entré dans l’histoire. De nos jours, un monument situé sur la place Gohyssart à Jumet commémore cet événement peu banal de l’histoire militaire. Œuvre du sculpteur Giuseppe Miggiano intitulée Le ballon de l’an II, il représente une montgolfière. Réalisé en inox, cuivre émaillé et en argent, le monument mesure 3 m socle compris et a été inauguré le 16 mai 1997. Les représentants du peuple ou représentants en mission Le 2 novembre 1791, l’Assemblée nationale législative envoie certains de ses députés en mission dans les départements et auprès des armées afin de veiller au maintien de l’ordre et à l’application des lois. La Convention généralise le procédé et instaure un véritable système.

Le monument du ballon de Jumet. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

Beyne/Heusay, la chapelle Sainte-Anne Située au sommet du plateau dominant la vallée de la Vesdre et de la Meuse à hauteur de Vaux-sous-Chèvremont, la chapelle Sainte-Anne est un édifice de calcaire de la fin du XIXe siècle. La petite construction classée porte l’inscription « Sainte-Anne 1889 » et abrite, derrière une grille en fer forgé, une potale plus ancienne. Érigé près d’un siècle après les faits, l’édifice mêle la symbolique religieuse et la symbolique révolutionnaire en rendant hommage à des soldats français tués au cours d’un combat contre les Autrichiens en juillet 1794. À l’intérieur, une plaque commémorative rappelle cet état de fait : « Chapelle dédiée à sainte Anne d’Auray en Bretagne. Les tilleuls et la potale datant de 1794 évoquent le souvenir de cinq soldats bretons tombés lors de l’offensive française ». Aujourd’hui, seuls trois des cinq arbres subsistent. 43


Sur les traces de la Wallonie française

La chapelle Sainte-Anne à Beyne-Heusay © IPW

La seconde occupation et la mise en place d’un régime nouveau L’avance des armées françaises à travers nos territoires après la victoire de Fleurus est des plus rapides. Le régime qui va se mettre en place durant un an est radicalement différent de celui établi après la bataille de Jemappes. En 1792, les Français étaient accueillis comme des libérateurs et des plébiscites en faveur de la réunion de nos territoires à la France avaient eu lieu aux quatre coins de la Wallonie. Les Français souhaitaient insuffler l’esprit de liberté et d’égalité de la Révolution au-delà des frontières de la France. En 1794, les Français considèrent les territoires wallons comme un pays conquis et vont imposer leur vision des choses. Cette période troublée et difficile pour la jeune République a coïncidé avec la restauration autrichienne dans nos régions. En 1792, on encourage la réunion à la France ; en 1794, on prépare l’annexion. Le pays conquis est systématiquement dépouillé, on y envoie des représentants en mission dont les pouvoirs sont illimités et qui sont chargés de veiller aux réquisitions, de surveiller les généraux 44

près des armées et surtout d’établir les bases d’une future administration des pays conquis. Seule consolation pour les futurs « Belges », le régime de Terreur vient de s’achever avec l’exécution le 28 juillet de Robespierre. Jusqu’à l’annexion officielle d’octobre 1795, les anciens « pays » de Wallonie vivent dès lors une « seconde occupation française ». Liège, le pont des Arches Héritier de nombreux ponts dont le premier date de 1034, l’actuel pont des Arches a été inauguré le 18 décembre 1947. Septième du nom, il est composé de trois arches en béton armé et décoré d’un ensemble de sculptures, statues en rondebosse ou bas-reliefs personnifiant les grands événements de l’histoire liégeoise ou de son folklore. Sous le régime français, il est rebaptisé « pont de la Victoire » en 1795. Une plaque commémorative inaugurée en 1935, détruite avec le pont pendant la Seconde Guerre mondiale et replacée en 1957, rappelle le motif de ce nom : « Pont de la Victoire. Ici, les Liégeois ont vu briser leurs fers. Neuf Thermidor An II de la République française. Inscription apposée sur le pont des Arches en 1796 pour


Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

commémorer la victoire des troupes françaises qui, le 17 juillet 1794, prirent d’assaut le pont occupé par l’armée autrichienne ». Aywaille/Sougné-Remouchamps, le monument de la Redoute Une autre bataille ayant suivi celle de Fleurus a eu lieu dans la région liégeoise le 18 septembre 1794 alors que les Français s’attachaient à conquérir définitivement nos territoires avant de préparer leur annexion. Depuis la fin juillet, ils occupaient Liège et la citadelle ainsi que la rive gauche de la Meuse jusqu’aux abords de Maestricht. La rive droite et la Chartreuse étaient toujours aux mains des Autrichiens. L’Ourthe formait alors une frontière entre les deux armées qui s’observaient plus qu’elles ne se combattaient. Les Français, vainqueurs des Autrichiens à Fleurus le 26 juin, souhaitent parvenir jusqu’au Rhin mais s’arrêtent dans un secteur tranquille pendant près d’un mois et demi jusqu’au brutal sursaut du matin du 18 septembre sur les bords de l’Ourthe et de l’Amblève : des canonnades se font entendre à Esneux, Comblain-au-Pont,

Aywaille, Remouchamps et Sprimont. Sous les ordres de Scherer, Marceau, Mayer et Haquin, les Français se lancent à l’assaut des positions autrichiennes dont les soldats se retrouvent chassés en quelques heures et refoulés vers le nordest. Une nouvelle défaite survient à Clermont le 20 septembre et provoque le repli des armées impériales derrière la Roer. Le 6 octobre, les troupes républicaines atteignent leur but : l’avant-garde est au bord du Rhin. Au sommet de la célèbre côte de la Redoute trône un monument rappelant ces faits. Il est le fruit des efforts d’un comité du souvenir créé à Aywaille en 1954 sous la houlette de Louis Thiry. Cet imposant bloc de granit comporte dans sa partie haute une médaille représentant le coq français et, dans sa partie basse, l’inscription « Ici, l’armée française vainquit les troupes autrichiennes. 18 septembre 1794 ». Non loin de là, à SougnéRemouchamps également, se trouve une croix en bois décorée d’un christ en plomb et dénommée « croix rouge » ou « croix des Français ». Elle aurait été plantée en 1794 en mémoire de soldats tués au cours des combats contre les Autrichiens.

Le monument de la Redoute à Sougné-Remouchamps. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française

La croix dite « des Français » à Sougné-Remouchamps. Photo de 1945 © Bruxelles, KIK-IRPA

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Liège, l’ancienne abbaye du Val des Écoliers Situés sur l’île d’Outremeuse, les bâtiments de l’ancienne abbaye du Val des Écoliers ont été à plusieurs reprises réaffectés au fil des siècles. Un prieuré est érigé pour la première fois en 1231. Si l’église, menaçant ruine, est démolie en 1810, nous conservons aujourd’hui quelques bâtiments abbatiaux du XVIIIe siècle ainsi que l’ancienne salle capitulaire gothique du XIVe siècle. Les bâtiments sont de nos jours occupés par la faculté d’architecture de l’Université de Liège. Réquisitionnée à la Révolution, l’abbaye est transformée en « hospice de l’Égalité » le 24 octobre 1794 dans le but de soigner les soldats venus libérer les Liégeois pour la seconde fois. Profitant de l’importance des locaux, le docteur Gruysard, médecin de l’armée de Jourdan, y ouvre un cours d’anatomie, une grande nouveauté à Liège. Par la suite, les Français transforment le bâtiment en caserne militaire, fonction encore tenue par l’ancienne abbaye sous les régimes hollandais et belges avant d’être affectée à l’enseignement.

Mons, l’ancien hôtel de Sécus Cet important hôtel de maître construit dans la seconde moitié du XVIIIe siècle appartient à l’origine à la famille de Sécus. Il est transformé en 1859 en établissement d’enseignement dirigé par les sœurs de Sainte-Marie puis par les Ursulines et est actuellement la propriété du Service public fédéral Justice ; il fait office d’annexe au tribunal de Mons. Jadis enduite et élevée en brique et pierre bleue, la façade superpose deux niveaux de sept travées et est caractérisée par la présence d’un riche portail en pierre au niveau de la seconde travée. Dans les jours ayant suivi la victoire de Fleurus, la maison de maître est affectée le 2 juillet 1794 au commissaire civil Jasmin Lamotze chargé d’administrer provisoirement ce qui deviendra par la suite le département de Jemappes. L’hôtel de Sécus peut à certains égards être considéré comme une préfecture provisoire. Parmi les premières actions du commissaire figure celle de nommer les membres des administrations de district qui se réunissaient dans l’ancien hôtel du

La salle capitulaire de l’ancienne abbaye du Val des Écoliers à Liège. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française

Le 12 juillet 1794, l’hôtel est affecté au directoire du district de Mons, institution provisoire vouée à devenir l’institution préfectorale une fois l’annexion avalisée par le législateur français en 1795. Les occupants de l’hôtel de Gomegnies étaient étroitement liés à celui qui siégeait dans l’hôtel de Sécus, dont ils dépendaient directement. Leur travail consistait à parcourir le futur département afin de procéder à l’installation des nouvelles municipalités. Le schéma était toujours le même : destitution du mayeur et des échevins, prestation de serment des nouveaux administrateurs (maintenir la liberté et l’égalité, mourir à leur poste, s’il le fallait, en les défendant), déclaration de l’installation du nouveau pouvoir. La grande majorité de ces opérations prit fin en novembre 1794.

Les traces de la campagne destructrice des armées françaises en Wallonie Le passage des troupes françaises ayant suivi les victoires de Jemappes (novembre 1792) et Fleurus (juin 1794) n’a pas été qu’une promenade de santé. Aux quatre coins de la Wallonie, de nombreux bâtiments représentant des facettes de l’Ancien Régime font les frais de l’ire des républicains. C’est ainsi que bon nombre d’édifices religieux souffrent de ce passage : pillages, destructions, incendies. Si de nombreux bâtiments sont dépouillés mais conservés pour être réaffectés, de grands ensembles architecturaux médiévaux et modernes sont entièrement mis à sac. Aujourd’hui encore, il ne reste que des ruines des très belles abbayes d’Orval, de Villers-la-Ville, d’Aulne ou de Clairefontaine. Plusieurs châteaux, témoins du système seigneurial voué à disparaître, font eux aussi les frais de cette volonté de faire table rase du passé, peu importe les moyens utilisés.

L’ancien hôtel de Sécus à Mons. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

comte de Gomegnies (voir ci-dessous). Le commissaire se charge ensuite d’organiser toutes les communes de l’ancien comté de Hainaut en municipalités à l’instar de ce qui se faisait en France. Mons, l’ancien hôtel de Gomegnies Fortement remanié au XIXe siècle, l’ancien hôtel de Gomegnies a été érigé pour la première fois au XVIIIe siècle. Sa façade arrière de type tournaisien en est encore aujourd’hui le témoin. L’imposante façade à rue a pour sa part été transformée et présente une composition symétrique à trois niveaux de neuf travées construites en brique et pierre. L’édifice abrite actuellement un établissement provincial d’enseignement. 48

Aiseau-Presles/Aiseau, les ruines du château d’Aiseau Siège d’une seigneurie dépendant du duché de Brabant enclavée entre des terres liégeoises et namuroises, le château d’Aiseau a été reconstruit en 1721 sur les bases d’un château médiéval. Ce dernier édifice est entièrement détruit en 1794 par l’occupant français. Cette campagne destructrice n’a laissé que peu de témoignages. Plus rien ne subsiste des bâtiments autrefois entourés de fossés si ce n’est le corps d’entrée, auparavant résidence des domestiques, aménagé en habitations au XIXe siècle. Arlon/Autelbas, les ruines de l’abbaye de Clairefontaine Les origines du hameau de Clairefontaine sont indissociables de la fondation par la comtesse de Luxembourg Ermesinde d’une abbaye dans la première moitié du XIIIe siècle dans le but d’en faire une nécropole de famille. Le monastère s’affilie à l’ordre de Cîteaux en 1258, s’installe dans le creux d’une vallée boisée et se développe au fil des siècles : abbatiale, bâtiments abbatiaux, moulin, scierie, logements d’ouvriers, maison de justice. Le tout est ravagé en 1794 par des soldats français et laissé à l’état de ruines. Au XIXe siècle, de


Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

Vue partielle des ruines de l’abbaye de Clairefontaine © IPW

nouvelles constructions réutilisant les matériaux de la défunte abbaye s’implantent non loin de là. Aujourd’hui, les ruines de l’abbaye résultant des fouilles menées par la Région wallonne sont visitables. Elles présentent les vestiges de l’abbatiale des XIIIe et XIVe siècles et en particulier de la chapelle Sainte-Marguerite. Beauraing, les ruines du château de Beauraing Actuellement castel Sainte-Marie, le château de Beauraing trouve son origine au XVe siècle lorsqu’il constitue une seigneurie du comté de Namur. L’imposant ensemble est incendié par les révolutionnaires français en 1793 mais sera entièrement reconstruit entre 1855 et 1857. Un nouvel incendie en

1889 fait disparaître ces modifications. Aujourd’hui, les ruines ont été restaurées et aménagées et permettent de se rendre compte de l’état de l’édifice au Moyen Âge et à l’Époque moderne, mais témoignent également du sort funeste réservé à l’ensemble par les troupes françaises au moment de la première occupation de nos contrées après la bataille de Jemappes. Dinant/Leffe, l’abbaye de Leffe À l’origine prieuré fondé au VIIe siècle, le monastère devient une abbaye indépendante aux alentours de 1200. Détruite par deux fois au XVe siècle, elle est complètement transformée aux XVIIe et XVIIIe siècles. Déjà fortement pillée et ravagée par les 49


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L’abbaye de Leffe. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

soldats français en 1794, l’abbaye est supprimée et nationalisée en 1796. Les bâtiments servent de carrière à ciel ouvert avant de renaître sous l’impulsion du retour d’une communauté de moines en 1902. De grands travaux de restauration ont encore lieu entre 1950 et 1980. De l’abbatiale dévastée par les Français, seul subsiste un portail baroque daté de 1715. D’autres vestiges des bâtiments modernes ont été conservés : l’église de la communauté a été aménagée dans une ancienne grange du XVIIIe siècle, la cour centrale est encore fermée par une aile de bâtiment de la même époque et quelques éléments d’architecture du XVIIe siècle sont préservés dans l’aile sud. Florenville/Villers-devant-Orval, les ruines de l’abbaye d’Orval Les origines de l’implantation d’une abbaye à Orval remontent à 1070 lorsque des moines bénédictins venus de Calabre s’installent sur des terres offertes par le comte de Chiny Arnoul Ier. Le 9 mars 1131, l’abbaye passe à l’ordre de Cîteaux et est dotée d’un vaste territoire d’environ 1200 ha pris sur la forêt comtale. L’abbaye se développe considérablement jusqu’au XIVe siècle et possède de nombreux bâtiments, reconstruits et agrandis dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. La révolution en stoppe net la progression et un terrible incendie dévaste le site en 1793. Les ruines des 50

Ruines de l’abbaye d’Orval © IPW


Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

bâtiments médiévaux et classiques tombent dans l’oubli pendant plus d’un siècle avant que débute le sauvetage, favorisé ensuite par l’implantation d’une nouvelle communauté et l’édification d’une nouvelle abbaye entre 1926 et 1947. Le début des ennuis commence pour les moines d’Orval après la bataille de Valmy du 20 septembre 1792. Cette bataille menée en Champagne-Ardenne est considérée comme la première victoire décisive de l’armée française pendant les guerres de la Révolution. Effrayés de voir le conflit se porter plus au nord, les moines partent se réfugier à Luxembourg. L’arrivée de 600 soldats autrichiens qui s’installent à l’abbaye entre le 27 octobre et le 8 décembre 1792 ramène quelque peu le calme et provoque le retour de la communauté. Le 8 décembre s’ouvre un second exil ; seul l’abbé faisant fonction et quelques frères restent à Orval. Les premiers mois de 1793 sont relativement calmes avant la reprise des hostilités non loin de là. Au mois de juin, des combats ont lieu autour d’Arlon et une colonne de soldats français menés par le général Loison fait route vers l’abbaye. Le 23 juin, les murs d’enceinte de l’abbaye sont bombardés et permettent aux pillards de saccager les lieux. Afin de faire disparaître les traces de ces pillages, l’abbaye est incendiée le soir même : les deux églises, le couvent, les forges et le moulin sont détruits par les

flammes. Parmi les pertes inestimables dues aux armées françaises, celle de la bibliothèque, riche en livres rares et manuscrits précieux, pratiquement totalement anéantie… Liège, les vestiges de la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert Chef-d’œuvre de l’art gothique, deuxième plus haute cathédrale d’Europe au moment de son édification, la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert de Liège devait certainement être un des édifices les plus remarquables construits dans nos régions au Moyen Âge. Ses dimensions impressionnent : 97 m de long, 60 m de hauteur pour les tours occidentales et 130 m pour la grande tour. L’édifice fait pourtant les frais des événements révolutionnaires dès la première occupation de la principauté par les Français suite à la bataille de Jemappes. Le 19 février 1793, l’administration centrale du ci-devant pays de Liège décide de démolir la cathédrale. La défaite de Dumouriez à Neerwinden le 18 mars suivant et le rétablissement du pouvoir principautaire qui suit retarde la mise en œuvre de cette funeste décision. La victoire de Fleurus du 26 juin 1794 et l’annexion définitive de la principauté le 1er octobre 1795 ramènent la démolition à l’ordre du jour. Dans un premier temps, la cathédrale est

Les ruines de la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert © Trésor de Liège

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dépouillée au profit de la République ; seul le Trésor, emmené à l’étranger par les chanoines, évite le pillage ou la destruction. Ensuite, les Liégeois eux-mêmes procèdent à la démolition de l’édifice ; opération longue et ardue qui s’accomplit sur plusieurs années. Cette démolition proprement dite commence dès l’été 1794, après Fleurus et la fuite du prince-évêque de Méan. Les deux tours de sable sont détruites en 1803 alors que s’entasse un monceau de ruines sur l’espace qui ne porte pas encore le nom de « place Saint-Lambert ». Un long moment d’indécision s’ouvre ainsi qui provoque l’étonnement de Napoléon qui, lors de son passage en 1803, est choqué de l’état dans lequel se trouve cet espace public. Les ruines ne sont toutefois définitivement évacuées qu’en 1819 et la nouvelle place nivelée en 1827 ! Lobbes, les ruines de l’abbaye de Lobbes Fondée par saint Landelin au VIIe siècle, l’abbaye de Lobbes devient un des plus importants foyers culturels de la région au Moyen Âge. Elle est également renommée pour la richesse de son patrimoine et l’importance de son domaine foncier. Le 14 mai 1794, l’abbaye de Lobbes est mise à sac et incendiée, le même jour que l’abbaye voisine d’Aulne. Ici aussi, les moines et l’abbé avaient abandonné les lieux devant la menace du bonnet phrygien en laissant leurs richesses, objets de culte

et joyaux architecturaux aux pilleurs. Laissée dans un état désastreux, elle est définitivement détruite en 1817 afin d’utiliser les matériaux pour la restauration de la forteresse de Charleroi. Aujourd’hui ne subsistent en bord de Sambre que de très rares vestiges de cet ensemble d’exception. Nous trouvons ainsi une partie du mur d’enceinte avec sa porte nord-ouest dite « la Portelette » ou encore l’ancienne ferme abbatiale. Morlanwelz-Mariemont, les ruines du palais de Charles-Alexandre de Lorraine Le prestigieux site de Mariemont doit son nom à la sœur de Charles Quint, Marie de Hongrie, nommée gouvernante générale des Pays-Bas espagnols en 1531. En 1545, elle choisit le site pour en faire sa résidence d’été. De son pavillon de chasse incendié par les troupes du roi de France en 1554, rien ne subsiste actuellement. Après l’incident, le site est abandonné durant plusieurs décennies avant d’être redécouvert par les archiducs Albert et Isabelle au début du XVIIe siècle. Les vestiges de leur palais ont eux aussi définitivement disparu. Une nouvelle période d’abandon du site s’ouvre en 1678 pour ne se terminer qu’en 1734 lorsque l’archiduchesse MarieÉlisabeth, gouvernante générale des Pays-Bas autrichiens, décide également de s’y installer. En 1754, le nouveau gouverneur Charles de Lorraine découvre à son tour le domaine et

Vue des ruines du palais de Charles-Alexandre de Lorraine au sein du parc du domaine royal de Mariemont © IPW

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Jemappes et Fleurus : les deux occupations françaises

Vue aérienne des vestiges de l’abbatiale de Stavelot. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

travaille à l’embellir considérablement. Il érige une vaste demeure de plaisance et aménage un grand parc. En 1794, les révolutionnaires français pillent son château et incendient le domaine aux cris de « guerre aux châteaux, paix aux chaumières ». La résidence d’été des gouverneurs des Pays-Bas n’est toutefois pas entièrement détruite par les soldats républicains : leur œuvre de désolation est achevée par les habitants des environs à la mi-décembre. Leur ire est motivée par le pillage : fer et plomb apportaient en effet un apport financier non négligeable. Le 8 janvier 1795, le citoyen Jourez, administrateur du district de Binche, se rend sur place pour constater les dégradations et découvre l’état désastreux dans lequel se trouve le parc : connu pour dissimuler de la houille, il a été raviné en tous sens pour en extraire du charbon. Aujourd’hui, les ruines de ces bâtiments prennent place dans un vaste parc arboré géré par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Stavelot, les vestiges de l’abbatiale Saint-Remacle Véritable témoin d’un pouvoir souverain sous l’Ancien Régime, le site de l’abbaye de Stavelot a subi les affres du temps pour parvenir jusqu’à nous avant sa restauration complète par la Région wallonne achevée en 2002. Ancienne abbaye bénédictine fondée au milieu du VIIe siècle par saint Remacle, elle devient au fil des siècles un complexe de grande importance dont subsistent actuellement les vestiges archéologiques de l’abbatiale, la porte de l’abbaye, les bâtiments de service à sa gauche, la façade sur cour du Conseil de la principauté abbatiale de Stavelot-Malmedy à sa droite et les bâtiments abbatiaux disposés autour du cloitre. Comme bien d’autres édifices religieux, la très belle abbatiale fait les frais du passage des troupes françaises à Stavelot. Le seul témoin conservé de cette église se trouve en face

des vestiges archéologiques. Miraculeusement épargnée, une tour carrée de moellons de grès et de calcaire présentant des bases romanes témoigne de la consécration du bâtiment par l’abbé Poppon, en 1040. La tour est ensuite, dans sa partie supérieure, le témoin de la reconstruction de l’église par Guillaume de Manderscheidt en 1536. Thuin/Gozée, les ruines de l’abbaye d’Aulne Fondée au VIIe siècle sur un domaine planté d’aulnes qui lui donna son nom, l’abbaye s’affilie à l’ordre cistercien en 1147. Les moines procèdent à plusieurs campagnes d’édification dont témoignent les vestiges actuels. L’église, de style gothique, a été construite entre le XIIe et le XVe siècle puis

Les ruines de l’abbaye d’Aulne à Gozée. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française

remaniée aux XVIe et XVIIIe siècles. Le long de la Sambre se trouvent des bâtiments industriels, dont subsiste le moulin. Le 10 mai 1794, les soldats français occupent la ville de Thuin alors que de faibles troupes prussiennes et autrichiennes se trouvent à l’abbaye d’Aulne, déjà abandonnée par l’abbé et les moines qui avaient fui vers Nivelles sans prendre la peine d’emporter leurs biens avec eux. L’avant-garde française approche de l’abbaye dans l’après-midi mais celle-ci n’est pas défendue. Les Français en pillent les richesses avant de commettre les pires excès : le 14 mai, les bâtiments sont en feu. Les soldats ne sont pas les seuls responsables du drame : de nombreux habitants des environs prennent eux aussi part aux pillages. Villers-la-Ville/Tilly, les ruines de l’abbaye de Villers-la-Ville La première implantation d’une abbaye sur le site de Villersla-Ville a lieu en 1146 lorsque des moines de l’abbaye de Clairvaux s’installent à cet endroit suite à l’intervention de saint Bernard. Les bâtiments primitifs sont ensuite remplacés et augmentés entre 1197 et 1209. Une intense activité de construction et d’expansion se poursuit tout au long du XIIIe siècle et pendant la première moitié du XIVe siècle. Les derniers travaux d’envergure sont entrepris au XVIIIe siècle par Laurent-Benoît Dewez, architecte attitré des abbayes. Le site est lourdement pillé pendant la Révolution brabançonne et une seconde fois lors du passage des armées françaises en 1794. Supprimée et mise en vente en 1797 après un grave incendie, l’abbaye sert ensuite de carrière avant de devenir

propriété de l’État belge en 1892. Les ruines sont alors classées, restaurées, protégées et aujourd’hui mises en valeur par l’Institut du Patrimoine wallon. Virton/Latour, l’ancien château des Baillet-Latour Réduit à l’état de « masure » par les troupes françaises le 17 avril 1794 et progressivement restauré depuis les années 1960, l’ancien château des Baillet-Latour témoigne de l’histoire féodale du lieu. L’installation d’une seigneurie à cet endroit est attestée depuis le XIe siècle. Plusieurs fois assiégée et reconstruite, la forteresse est une dernière fois détruite en 1657. Vendu en 1659 à Mathieu Baillet, le château est restauré dans le dernier tiers du XVIIe siècle. La famille des châtelains est particulièrement proche du pouvoir autrichien : elle obtient reconnaissance de noblesse en 1674 et devient propriétaire d’une seigneurie haute-justicière. À la fin de l’Ancien Régime, l’impératrice Marie-Thérèse érige la seigneurie en comté en remerciement de services rendus par la famille. C’est dans ce contexte que le château est pillé et incendié par les troupes révolutionnaires françaises. Il n’est pas restauré par la famille de Baillet qui reste proche de l’ancien pouvoir sous le régime français : Charles-Antoine-Maximilien de Baillet (1737-1806) devient maréchal en 1796, commandant de l’armée d’Allemagne en 1797, président du conseil aulique autrichien en 1805 et propriétaire du régiment des Dragons de Latour, corps de soldats wallons au service de l’Autriche pendant les guerres napoléoniennes. Aujourd’hui, le château en quadrilatère a en partie été relevé de ses ruines et aménagé en hôtel-restaurant.

Vue aérienne des ruines de l’abbaye de Villersla-Ville. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie franรงaise LES INSTITUTIONS FRANร AISES EN WALLONIE



LES INSTITUTIONS FR ANÇAISES EN WALLONIE

Henri Pirenne a écrit que « le régime français avait transformé notre pays plus profondément en vingt ans qu’au cours des vingt siècles précédents ». En effet, l’héritage français en matières administrative, institutionnelle et judiciaire est considérable. L’œuvre de réorganisation, de simplification, de modernisation et de regroupement des institutions est non seulement importante mais également brillamment réussie. La plupart des institutions que nous connaissons aujourd’hui sont les héritières directes des grands changements opérés par les Français durant les vingt années qui ont suivi la Révolution française : institutions communales, judiciaires, provinciales… Si les temps paraissent troublés au niveau politique et si le continent souffre des nombreuses guerres menées par les révolutionnaires puis sous l’Empire, et si la chute de Napoléon et la Restauration par le Congrès de Vienne en 1814-1815 apparaissent de nos jours comme un retour en arrière, il ne faut pas oublier les profondes modifications que les grandes Nations victorieuses de l’Aigle n’ont pu effacer. Sous le régime hollandais, la Belgique est divisée en provinces, qui sont les héritières directes des départements français ; l’organisation judiciaire reste similaire et les Hollandais profitent encore des innovations françaises. Ne retenons que quelques exemples significatifs d’un monde nouveau et d’un bouleversement de la manière de vivre : code civil, code pénal ou uniformisation des poids et mesures figurent parmi les créations françaises les plus durables !

Préfectures et sous-préfectures En matière administrative, nous l’avons déjà remarqué, les Français font radicalement table rase du passé. Les possessions liégeoises, stavelotaines et autrichiennes fusionnent et leurs systèmes administratifs et judiciaires disparaissent au profit d’un ordre nouveau. Le but du législateur français : moderniser et uniformiser. L’héritage d’Ancien Régime, compliqué et désuet, agissait comme un frein sur les structures de l’État. Le régime républicain puis impérial balaye cet héritage

L’instauration du système métrique Sous l’Ancien Régime, peser et mesurer est complexe et hétérogène. De nombreuses mesures différentes coexistent et varient d’une région à l’autre. Le 8 mai 1790, l’Assemblée nationale constituante entend uniformiser les poids et mesures et en confie la tâche à l’Académie des sciences. Le 1er août 1793, la Convention adopte le mètre comme unité de longueur, le gramme et le kilogramme comme unité de poids et le litre comme unité de capacité (sauf pour le bois pour lequel on utilise le stère), l’are et l’hectare comme unité de surface et enfin le franc est divisé en centimes. Le 7 avril 1795, elle adopte le système décimal comme système de base pour les nouvelles mesures et le rend obligatoire. pour constituer un monde nouveau. Quelques faibles tentatives apparaissent lors de la première occupation de nos territoires, entre novembre 1792 et mars 1793. Toutefois, il faut attendre la victoire de Fleurus de juin 1794 et l’annexion définitive le 1er octobre 1795 pour voir les structures administratives nouvelles mises en place pour de bon. En 1794, seuls les anciens Hennuyers profitent du nouveau régime au sein d’un département de Jemappes ressuscité 1. Le 16 novembre 1794 est toutefois installée une organisation cohérente des territoires conquis : les représentants du peuple décident de la création de huit administrations d’arrondissement en Belgique. En Wallonie, nous retrouvons ces institutions provisoires à Tournai, Mons, Namur, Liège et Saint-Hubert. Pour chapeauter le tout, l’ « administration centrale et supérieure de la Belgique » est installée dans l’hôtel d’Arenberg à Bruxelles (aujourd’hui, palais d’Egmont, résidence du ministère des affaires étrangères). Ces administrations provisoires laissent la place aux préfectures une fois le travail d’annexion abouti. Le 1er octobre 1795, la Convention procède au vote de 1

Voir l’article sur la collégiale Sainte-Waudru à Mons dans le chapitre consacré aux traces liées à la première occupation française de la Wallonie.

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Sur les traces de la Wallonie française

l’annexion de treize départements réunis, neuf en Belgique et quatre en Allemagne 2. Dans chaque département, un préfet se trouve à la tête d’une administration centrale élue composée de cinq membres. Sur le territoire wallon, nous trouvons trois préfectures : Mons, Namur et Liège. La préfecture du département des Forêts est située à Luxembourg et celle du département de la Dyle à Bruxelles. Aujourd’hui, seul le bâtiment qui abritait la préfecture du département de Jemappes a disparu. L’ancien hôtel du gouvernement qui accueillait des institutions du comté de Hainaut fut transformé en hôtel de la préfecture par les Français puis en palais provincial par les Hollandais et les Belges. Il se situait à l’emplacement de l’actuel palais provincial du Hainaut, construit dans les années 1950. Sur le territoire wallon se trouvaient également plusieurs sous-préfectures : Huy et Malmedy pour l’Ourthe, Neufchâteau pour les Forêts, Charleroi et Tournai pour Jemappes, Nivelles pour la Dyle, Dinant, Marche-enFamenne et Saint-Hubert pour la Sambre-et-Meuse. Ces 2

Sur ces départements, voir le chapitre « Un nouveau découpage administratif de la Wallonie » en début d’ouvrage.

villes, sauf en ce qui concerne Malmedy et Saint-Hubert, sont aujourd’hui encore chefs-lieux d’arrondissements administratif et judiciaire. Liège, l’hôtel de Hayme de Bomal et la maison Curtius Vaste édifice en calcaire et brique enduite ou peinte, l’hôtel de Hayme de Bomal est construit sur un plan en U. Il présente deux façades à rue dont une première, discrète, s’ouvre sur la place Saint-Barthélemy et une seconde, plus majestueuse, expose son riche décor sur le quai de Maestricht. L’hôtel de maître a été érigé entre 1775 et 1778, probablement par Barthélemy Digneffe, pour le compte du bourgmestre Jean-Baptiste Hayme de Bomal. L’hôtel a aujourd’hui intégré le complexe muséal du Grand Curtius après avoir été pendant de longues années affecté aux collections du musée d’armes de la ville de Liège. Il comporte une cour intérieure agrémentée d’une fontaine et de somptueux salons richement décorés accessibles par un élégant escalier d’honneur. Il s’agit encore d’un des plus beaux exemples d’architecture et d’arts décoratifs néoclassiques conservés en Belgique. Quelques années à peine après son édification, l’hôtel de Hayme de Bomal passe entre les mains de la famille

La façade de l’hôtel de Hayme de Bomal, du côté du quai de Maestricht © IPW

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Les institutions françaises en Wallonie

La maison Curtius à Liège abritait autrefois les services administratifs du département de l’Ourthe. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

d’Ansembourg. Comme de nombreuses autres demeures possédées par des personnalités de la noblesse ou de la haute bourgeoisie d’Ancien Régime, il est envahi, pillé et souillé par des révolutionnaires avant d’être affecté, le 6 août 1795, par le comité révolutionnaire comme logement pour les représentants du peuple. Le bâtiment est ainsi pour la première fois lié à des fonctions administratives : les commissaires envoyés à Liège par la Convention pour organiser ce qui deviendra le département de l’Ourthe y trouvent un logement de fonction. En 1800, à l’arrivée du premier préfet Antoine Desmousseaux, l’hôtel de Hayme de Bomal devient la préfecture du département. Il abrite les logements de fonctions du préfet du département de l’Ourthe. Les bureaux de l’administration départementale sont installés non loin de là, dans la maison Curtius, très bel édifice de style Renaissance mosane édifié en bord de Meuse au XVIIe siècle.

Ce rôle administratif perdure après le départ des Français : les Hollandais affectent le bâtiment aux services du gouvernement provincial en 1815. Bonaparte et Joséphine logent à cet endroit les nuits des 1er et 2 août 1803 à l’occasion de la visite du Premier Consul dans les départements réunis. L’empereur Napoléon Ier et Marie-Louise y font une seconde visite le 7 novembre 1811. Aujourd’hui, une plaque commémorative apposée sur la façade du quai de Maestricht rappelle cette visite et l’affectation du bâtiment au début du XIXe siècle : « Dans cette maison, palais du gouvernement et hôtel de la préfecture sous le régime français, le général Bonaparte, Premier Consul de la République, accompagné de madame Bonaparte a séjourné du 13 au 15 thermidor an XI (1-3 août 1803). Devenu Napoléon, empereur des Français, il y logea avec l’impératrice Marie-Louise dans la nuit du 7 au 8 novembre 1811 ».

La plaque commémorative des deux visites de Napoléon à Liège sur la façade de l’ancienne préfecture de l’Ourthe © IPW

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Sur les traces de la Wallonie française

Bonaparte, Premier Consul, peinture d’Ingres conservée au musée des Beaux-Arts de Liège © Ville de Liège

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Les institutions françaises en Wallonie

Longtemps exposée dans l’hôtel Hayme de Bomal, une célèbre peinture d’Ingres se trouve aujourd’hui au musée des Beaux-Arts de Liège. Intitulée Bonaparte, Premier Consul, la toile a été peinte en 1804 à la demande de Napoléon qui n’a probablement jamais accordé de séance de pose à l’artiste. Il est représenté âgé de 34 ans, posant sa main sur un document sur lequel est inscrit « Faubourg d’Amercœur rebâti », témoin de la volonté du Premier Consul d’aider financièrement les habitants de ce quartier liégeois bombardé par les Autrichiens à reconstruire leurs habitations. Il porte le costume rouge de consul de la République et pose devant une fenêtre ouverte au travers de laquelle on aperçoit la citadelle et la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert du temps de sa splendeur. Au moment de la réalisation du portrait, la cathédrale était en effet déjà en cours de démolition 3. L’œuvre fut ensuite offerte par Napoléon à la ville de Liège, comme cela fut d’ailleurs le cas pour d’autres villes 4. Malmedy, l’ancien monastère L’ancien monastère bénédictin de Malmedy possède une longue histoire qui remonte au VIIe siècle. La ville se développe autour de son abbaye, qui subit de nombreuses épreuves à travers le temps. Détruite par des raids normands et hongrois aux IXe et Xe siècles, elle est également à plusieurs reprises la proie des flammes. Les bâtiments sont renouvelés par le prince-abbé de Stavelot-Malmedy Guillaume de Manderscheidt entre 1535 et 1539. Les bâtiments conventuels conservés de nos jours datent de 1708, comme le renseignent les restes d’une inscription en ancrage située dans le cloître, et présentent une belle unité architecturale. Ils se composent de quatre ailes et deux avant-corps latéraux élevés en calcaire et moellons divers sur deux niveaux coiffés de hautes bâtières d’ardoises. Les bâtiments, annexés à la cathédrale, forment un grand cloître entourant une cour intérieure. L’édifice cesse d’être un monastère à la Révolution pour connaître de nombreuses affectations. Relativement préservé des excès révolutionnaires malgré des dégâts commis en 1793, l’ancien monastère de Malmedy est rapidement réaffecté pour les besoins du nouveau pouvoir. L’importance et le bon état des bâtiments, situés en plein centre de la localité, en font un endroit idéal pour l’installation d’administrations. La sous-préfecture d’arrondissement de Malmedy s’y établit au début du XIXe siècle. Vendu comme bien national, le monastère est alors la propriété de l’arrondissement. Le tribunal de première instance occupe quant à lui une partie du rez-de-chaussée de l’ancienne abbaye. Le monastère abrite aujourd’hui, dans une partie des bâtiments restaurés en 2005, le Trésor de la cathédrale de Malmedy, ainsi que le Malmundarium, cœur touristique et culturel de la ville. 3 4

Voir l’article sur les vestiges de la cathédrale de Liège dans le chapitre consacré aux campagnes destructrices des armées françaises. Des portraits similaires sont notamment conservés à Anvers et Bruges parmi d’autres nombreuses villes de l’Empire.

L’ancien monastère de Malmedy. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Les biens nationaux On entend sous la dénomination de « biens nationaux », l’ensemble des biens mis à la disposition de l’État pendant la Révolution. Ceux-ci peuvent être distingués en deux catégories : les biens ecclésiastiques et les biens des émigrés, tous confisqués par l’État. Les biens et propriétés du clergé ont été mis en vente en vertu des décrets des 13 mai et 16 juillet 1790 ; ceux des émigrés (pour la plupart des membres de la noblesse ayant fui la Révolution) en vertu des décrets du 2 septembre 1792 et du 3 juin 1793. Bien souvent, des paysans aisés et des bourgeois acquièrent ces propriétés pour y installer leurs activités agricoles et industrielles. Certaines restent propriété de l’État, qui y installe ses administrations. Entre 1789 et 1815, le nombre de propriétaires terriens a doublé grâce à cette pratique de vente de biens confisqués. Namur, le palais provincial Ancienne demeure des évêques de Namur de 1732 à la Révolution et siège des institutions provinciales depuis 1830, cet imposant palais classique est un des plus beaux édifices de Wallonie tant par son architecture que par sa décoration intérieure. Construit en brique enduite et pierre bleue sur un plan en U, il comporte un haut frontispice au centre de l’aile principale. À la fin du XVIIIe siècle, comme cela fut le cas pour bien d’autres bâtiments religieux, l’ancien siège de l’évêché est nationalisé et devient la propriété de l’arrondissement de Namur qui affecte les locaux à la préfecture du département de Sambre-et-Meuse. L’ancienne église des Capucins, détruite en 1944, abrite pour sa part le tribunal criminel. Revenant de Liège sur la route de Paris, la Premier Consul Bonaparte visite également le chef-lieu du département de Sambre-et-Meuse. Il fait son entrée à Namur le 3 août 1803 61


Sur les traces de la Wallonie française

La salle du conseil du palais provincial de Namur, autrefois préfecture du département de Sambre-et-Meuse. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

au bruit de l’artillerie et sous les acclamations habituelles des citoyens sur son passage. Au cours des deux nuits qu’il passe dans l’ancienne capitale comtale, Napoléon loge à l’hôtel de la préfecture, au balcon duquel il assiste à un combat d’échassiers sur la place Saint-Aubain le soir de son arrivée. Le lendemain, il demeure toute la matinée dans son bureau à travailler avec ses ministres. Il assiste ensuite à l’audience du Conseil général, sorte de « conseil du département », créé par la loi du 22 décembre 1789 afin de doter chaque département d’une assemblée représentative. Supprimé en 1793, il est rétabli par le Premier Consul le 17 février 1800. Ses membres ne sont pas élus mais nommés par le gouvernement. Au soir de sa seconde journée, Napoléon assiste à une nouvelle démonstration d’échassiers avant de passer en revue les troupes de la garnison et de quitter Namur le 5 août à trois heures et demie du matin. 62

Saint-Hubert, l’abbaye L’avancée des armées françaises en Wallonie après la victoire de Fleurus est en grande partie une promenade de santé. La conquête du duché de Luxembourg est toutefois bien plus compliquée. Le blocus de Luxembourg-Ville, entamé le 21 novembre 1794, est long et difficile. Alors que les troupes du général Debrun font face à la forteresse, les Français sont déjà maîtres de tout l’ancien duché et ressentent la nécessité d’y organiser une administration civile comme cela était le cas dans les autres anciens « pays » conquis. Bernard Stevenotte, directeur de forge à Neupont (Wellin), est nommé commissaire civil et chargé de cette mission. La petite ville de Saint-Hubert est ainsi choisie pour abriter cette administration provisoire pour sa position avantageuse sur la route reliant Bruxelles à Luxembourg. Les bâtiments de l’ancienne abbaye, en grande partie laissés à l’abandon, constituaient le


Les institutions françaises en Wallonie

L’abbaye de Saint-Hubert, éphémère chef-lieu du département des Forêts avant de devenir une sous-préfecture du département de Sambre-et-Meuse © IPW

lieu idéal pour ce genre d’affectation : les bâtiments abbatiaux sont récents, en bon état et surtout d’une superficie plus qu’agréable. Le 9 janvier 1795, les représentants du peuple auprès des armées du Nord et de Sambre-et-Meuse arrêtent que « l’administration d’arrondissement de la ci-devant province de Luxembourg, dont le chef-lieu est provisoirement fixé à Saint-Hubert, sera composée de neuf membres et d’un agent national ». L’administration est officiellement installée le 31 janvier suivant. La capitulation de la place forte de Luxembourg quelques mois plus tard met fin au statut de préfecture provisoire de Saint-Hubert. Le 16 juin 1795, les services sont transférés à Luxembourg et les bâtiments abbatiaux à nouveau vidés de leurs occupants. Le sort de la ville évolue encore : après avoir été le siège d’une administration d’arrondissement provisoire du département des Forêts, Saint-Hubert et sa région sont annexés au département de

Sambre-et-Meuse et dépendent dès lors de la préfecture de Namur. Les bâtiments connaissent par la suite de nouvelles affectations tout au long du régime français. L’abbaye accueille ainsi un tribunal de police correctionnelle puis un tribunal civil de 1re instance ainsi qu’une sous-préfecture du département de Sambre-et-Meuse en 1800. C’est à cet endroit également que se trouvent les bureaux de l’inspectorat des bois et des forêts. Enfin, l’ancien hôpital abbatial est pour sa part transformé en gendarmerie. Tournai, le séminaire épiscopal Le séminaire de Tournai est installé dans des bâtiments conventuels construits par les Jésuites et occupés par ceux-ci entre 1595 et 1773. De 1779 à 1797, les locaux sont habités par les religieux de l’abbaye de Saint-Médard. Ce très bel ensemble 63


Sur les traces de la Wallonie française

Le séminaire épiscopal de Tournai, siège d’une sous-préfecture du département de Jemappes entre 1800 et 1808. Collection privée

Portrait de Monseigneur Hirn, évêque concordataire de Tournai, avec ses attributs de baron de l’Empire, propriété du séminaire épiscopal de Tournai. © Bruxelles, KIK-IRPA

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architectural est organisé autour d’une chapelle de style gothique tardif érigée dans les premières années du XVIIe siècle. Au nord-est de l’église se trouve une cour rectangulaire bordée de trois ailes de bâtiments datés de 1640 et 1679. Une aile de style classique construite en 1731 se trouve à front de rue. Les événements révolutionnaires et l’arrivée des Français sonnent pour un temps le glas d’une occupation ecclésiastique des lieux. Dès juillet 1794, les bâtiments sont réquisitionnés au profit de l’armée républicaine. Le 16 janvier 1797, les religieux doivent abandonner leur abbaye qui est réaffectée immédiatement : le 23 janvier, un arrêté départemental affecte les locaux à l’entreposage et à la vente du mobilier national. Une fois les divers biens saisis vendus, le bâtiment se retrouve bien vite sans utilité. En 1799, le maire de Tournai sollicite l’autorisation du préfet pour transformer l’ancienne abbaye en manège pour les chevaux mais se heurte à un refus. En mai 1800, la création par Napoléon d’une sous-préfecture à Tournai bouleverse une nouvelle fois l’histoire des lieux. Les fonctionnaires s’y installent la même année. Le 8 septembre 1803, Monseigneur Hirn, nouvel évêque concordataire de Tournai, fait son entrée dans la cité. Rapidement, il demande la réaffectation des bâtiments de la sous-préfecture pour l’établissement d’un séminaire épiscopal qui faisait cruellement défaut à Tournai. L’évêque obtient finalement gain de cause le 7 janvier 1808 lorsqu’un décret impérial fixe la création


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d’un séminaire épiscopal dans l’ancien collège des Jésuites. Voilà ainsi plus de deux siècles que les prêtres du diocèse de Tournai sont formés à cet endroit et ont pris la place de fonctionnaires départementaux. Aujourd’hui, plus rien ne témoigne de cette très brève occupation des lieux par une souspréfecture du département de Jemappes.

Institutions judiciaires L’œuvre réformatrice des Français est particulièrement sensible en matière de droit. Le système judiciaire mis en place sous les divers régimes post-révolutionnaires diffère en tous points de la justice d’Ancien Régime. Dès 1789, la Révolution s’attache à réformer le droit pénal dans le but de détruire la justice royale et ce qu’elle représentait : abus, excès, inégalité. Les idéaux nés des Lumières tendent à une justice populaire et citoyenne fondée sur le respect de la loi, sur des peines équitables et sur l’égalité pour tous devant la loi. Les diverses assemblées législatives abolissent ainsi la torture et les supplices sanglants, prévoient le double contrôle de la loi et du jury, l’élection des juges par le peuple. Les pouvoirs sont également séparés : le pouvoir législatif se trouve entre les mains d’une assemblée nationale élue par les citoyens et totalement indépendante du pouvoir judiciaire, et inversement. Sous l’Ancien Régime, c’est le chef de l’État qui possédait entre ses mains tous les pouvoirs. Lorsque la République prend à nouveau possession de la Belgique en 1794, l’esprit en vigueur en France préside à la création de quatre tribunaux révolutionnaires à Bruxelles, Anvers, Mons et Liège. Ceux-ci sont chargés de traquer et de juger tout qui fait preuve d’une attitude allant à l’encontre des principes et des valeurs de la Révolution. Le discours est très menaçant mais les actes dépassent rarement la parole : seules 22 personnes sont condamnées à mort à cette époque dont quatre à Liège et neuf à Mons. Ces tribunaux fonctionnent pendant toute la durée de l’occupation. La loi du 1er octobre 1795 entérinant l’annexion de nos territoires en supprime de facto l’existence. Les citoyens belges deviennent citoyens français et héritent des institutions de la mère-patrie. Un tribunal criminel est créé dans le chef-lieu de chaque nouveau département ; nous en trouvons dès lors un à Liège, Mons et Namur pour la Wallonie. Les membres de ce tribunal sont choisis parmi les membres du tribunal civil, eux-mêmes le plus souvent issus des instances judicaires d’Ancien Régime ayant poursuivi leur carrière de magistrat pour le compte du nouveau régime. Sous le Consulat et l’Empire, Napoléon procède à une première réforme du système judiciaire. En 1800, la justice est centralisée et les juges sont à présent nommés par le pouvoir exécutif au lieu d’être élus par le peuple. Un tribunal de première instance est créé dans chaque arrondissement départemental. Le tribunal d’appel devient cour d’appel en 1804 puis cour impériale en 1810. Avec le Code d’Instruction criminelle de 1808 – toujours en vigueur – apparaît la Cour

Le Code civil La décision de rédiger un Code civil a été prise pour la première fois par la Convention le 22 août 1793 dans le but de remplacer et d’unifier la législation d’Ancien Régime. Les travaux entrepris à l’époque servent ensuite de base à Bonaparte et Cambacérès pour la rédaction du Code civil à partir de 1800. Trente-six lois, votées entre 1801 et 1803, sont regroupées le 21 mars 1804 dans le « Code civil des Français », qui devient « Code Napoléon » en 1807. On y trouve 2281 articles qui régissent le droit des personnes et des biens. Parmi les nouveautés instaurées, on retrouve des principes novateurs qui aujourd’hui encore font partie de notre quotidien : état-civil tenu par les mairies et non plus par les paroisses, sécularisation du mariage et primauté de celui-ci sur le mariage religieux, instauration du divorce, etc. Bien que beaucoup modifié depuis le 3e République, il reste encore aujourd’hui le fondement du droit civil français. Son champ d’action est en effet important : droit des personnes, droit de la famille, droit des biens, droit des obligations et des contrats. Il a inspiré le système juridique de nombreux pays parmi lesquels la Belgique. d’assises, installée dans chaque chef-lieu de département, qui juge les crimes avec le concours d’un jury de douze citoyens. En Wallonie, une seule cour d’appel existe et est fixée à Liège. L’œuvre de l’empereur atteint son apogée lorsqu’est publié le Code civil, véritable bible de l’unification de la législation civile depuis la Révolution. Huy, l’ancien couvent des frères Mineurs Le couvent des frères Mineurs témoigne de la présence de cet ordre franciscain à Huy depuis 1225. De leurs premières constructions subsiste l’église, modifiée aux XIVe, XVIe et XVIIe siècles. Le reste des bâtiments est reconstruit à partir de 1687 et témoigne parfaitement du style Renaissance mosane. Trois ailes de bâtiments forment un carré avec l’église

Le couvent des frères Mineurs à Huy, siège d’un tribunal de première instance sous le régime français. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française

et abritent actuellement les collections du musée communal de Huy. Nationalisé sous le régime français, le couvent est transformé en gendarmerie au début du XIXe siècle et abrite également le tribunal de première instance de l’arrondissement de Huy. Liège, le palais des princes-évêques Construit pour la première fois avant même l’institution d’une principauté épiscopale en 985, le palais de Liège a connu les affres du temps, des raids normands de 881 au grave incendie de 1185 et aux conflits entre Liège et le duché de Bourgogne au XVe siècle. C’est sous le règne du richissime bâtisseur Érard de la Marck (1505-1538) que la renaissance du palais a lieu. L’édifice actuel en est encore en grande partie l’héritier : articulation autour de deux cours en enfilade dont la première est caractérisée par une série de colonnes aux motifs Renaissance. Tout au long des XVIIe et XVIIIe siècles, les princes-évêques n’ont de cesse d’imprimer leur marque dans l’intérieur de leur résidence dont ils modernisent les locaux. La façade actuelle est reconstruite à partir de 1734 suite à un nouvel incendie dévastateur. Bâtiment emblématique du pouvoir et du centre de Liège, le palais des princes-évêques est la résidence du chef de l’État

sous l’Ancien Régime. Il est également le lieu de réunion des États de la principauté et abrite les organes principaux du gouvernement. S’il perd ses fonctions de résidence princière et épiscopale après la Révolution et l’annexion en 1795, le palais ne connaît pas de modification d’envergure depuis si ce n’est l’ajout d’ailes néogothiques de part et d’autre. Le bâtiment est également resté au centre de la vie politique liégeoise et nationale depuis lors : investi par les Français pour ses qualités indéniables (situation géographique, superficie), il devient le siège des institutions judiciaires sous le régime républicain. Les institutions consulaires et impériales augmentent encore son importance sur l’échiquier politique. De cette affectation judiciaire apportée par les Français, rien n’a changé. Aujourd’hui encore, le palais abrite, dans sa partie droite, le palais de justice. Le régime belge affecte également le bâtiment à la résidence du gouverneur de la province de Liège, fonction qu’il occupe toujours actuellement. Aux premières heures de la Révolution, le palais est épargné. Il faut dire que les premières années qui suivent le soulèvement populaire sont confuses à Liège où les deux derniers princes-évêques prennent la fuite et sont chacun rétablis dans leurs États à deux reprises. La bataille de Fleurus et l’arrivée des Français signe pour de bon la fin de l’occupation princière au palais de Liège. Le 27 juillet 1794, la foule envahit l’édifice

La façade principale du palais des princes-évêques à Liège. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Les institutions françaises en Wallonie

et procède à un pillage en règle de tout ce que le princeévêque n’a pu emporter, c’est-à-dire la majorité des richesses. Cet envahissement populaire fait disparaître les blasons et portraits rappelant le régime déchu. Ensuite, on procède à une totale laïcisation du bâtiment qui est préservé dans sa totalité pour des raisons pratiques évidentes. Déjà lors de la première occupation de nos régions par les armées républicaines, le général Dumouriez avait choisi le palais pour y loger lors de son passage en novembre 1792. Sous la seconde occupation, l’édifice devient le palais de justice de la République et, en son sommet, un carillon vient remplacer le globe et l’aigle impériale. Le palais abrite ainsi, jusqu’à l’annexion, le tribunal révolutionnaire de Liège, installé dans l’ancienne chapelle du prince. Ce tribunal criminel est installé le 12 octobre 1794, il est composé de dix membres et étend sa juridiction sur les anciens pays de Liège, Franchimont, Stavelot, Logne et Limbourg. On y trouve 8 juges, un greffier et un accusateur public. L’ancien « palais des princes-évêques » est rebaptisé « palais national ». En tant que chef-lieu de département, Liège devient le siège des juridictions d’instance et d’appel sous le régime français. Les salles jusqu’alors occupées par le Synode, la Cour féodale et l’Échevinage, institutions abolies, sont réaffectées en dépôt d’archives. Après l’annexion, le tribunal d’appel du département de l’Ourthe s’installe dans l’aile ouest. Le palais abrite alors non seulement les institutions judiciaires, mais également les institutions centrales. C’est au préfet Desmousseaux que l’on doit, en 1800, le départ de ces dernières vers l’hôtel de Hayme de Bomal. La destinée du palais est désormais écartée de celle du pouvoir central et conserve une fonction essentiellement judiciaire. Chaque changement de régime en France à l’époque est accompagné de changements institutionnels : nouvelle constitution, réforme administrative, réforme judiciaire… L’Empire ne déroge pas à la règle. Créée par la loi du 20 avril 1810 et établie le 20 mai 1811, la cour impériale de Liège s’installe logiquement au palais. Sa juridiction s’étend sur les départements de la Lippe, de la Meuse inférieure, de l’Ourthe, de la Roer et de Sambre-et-Meuse. Il s’agit bien ici d’une « super » cour de justice dont l’importance est considérable qui est installée dans l’ancienne capitale principautaire. La cour impériale est divisée en quatre chambres : deux chambres civiles, composées de 7 à 9 conseillers et tenant chacune quatre audiences par semaine ; une chambre des mises en accusation, composée de 3 conseillers et tenant audience tous les lundis ; une chambre des appels de police correctionnelle, composée de 7 conseillers. Hormis ces institutions strictement judiciaires, le palais abrite d’autres administrations parmi lesquelles celle des domaines nationaux, chargée de procéder à la vente d’immeubles déclarés « biens nationaux ». On y trouve également, à partir de 1800, une prison pour femmes, installée dans la partie orientale du palais, autour de la seconde cour où les arcades des galeries sont murées afin d’augmenter l’espace carcéral.

Antoine Desmousseaux (1757-1830) Avocat au parlement de Paris avant la Révolution, il est élu substitut du procureur de la commune de Paris en 1791. Il devient administrateur du département de la Seine en 1799 mais ne siège que peu de temps. Le 2 mars 1800, il est nommé préfet du département de l’Ourthe où il reste quelques années avant de devenir préfet de la Haute-Garonne le 4 avril 1806. Baron d’Empire en 1810, il devient préfet de la Somme le 12 mars 1813 puis préfet de l’Escaut le 25 mars de la même année. Il ne peut toutefois se maintenir à Gand que jusqu’au 2 février 1814. Retourné à la vie privée après la chute de l’Empire, il meurt à Dreux le 7 juillet 1830.

La pierre des lois publiées dans le département de l’Ourthe sur la façade du palais des princes-évêques à Liège © IPW

Aujourd’hui, si les blasons, armoiries et portraits des princes d’Ancien Régime ont été restaurés, le palais garde encore quelques maigres traces physiques qui viennent rappeler la période française. Sur la façade principale, à gauche du porche d’entrée, une pierre discrète est encore visible. Appelée « pierre noire », il s’agit de l’endroit sur lequel étaient placardées les lois publiées dans le département et que le régime utilisa à partir du 12 mars 1796. On peut encore y lire, en lettres dorées sur sa partie supérieure « Loix publiées dans le département de l’Ourte ». Dans le grandiloquent programme iconographique du palais provincial construit à partir de 1836 67


Sur les traces de la Wallonie française

La salle du conseil provincial de Liège dans laquelle se trouvent des phylactères portant les noms des deux préfets du département de l’Ourthe. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

dans le but de célébrer plusieurs siècles d’histoire liégeoise, la période française ne fut pas oubliée. Parmi les noms présents dans les phylactères du plafond de la salle du Conseil provincial figurent les noms des deux préfets du département de l’Ourthe, Antoine Desmousseaux (1800-1806) et CharlesEmmanuel Micoud d’Umons (1806-1814). Marche-en-Famenne, l’ancien couvent des Jésuites Les Jésuites, présents dans toutes les grandes villes wallonnes à l’Époque moderne, s’installent à Marche en 1627. De leur présence subsiste un ensemble architectural de premier plan, au centre de la ville. La Maison des Pères, construite entre 68

1650 et 1671, abritait les logements de la communauté. L’église, érigée en brique et pierre bleue en 1732, comporte une nef unique et un chœur semi-circulaire. Enfin, plusieurs bâtiments annexes telle une écurie ou des classes dédiées à l’enseignement que prodiguait la communauté, se trouvent le long de la rue des Brasseurs. Les bâtiments ont aujourd’hui été brillamment restaurés et réaffectés. Ils abritent depuis les années 1990 un hôtel-restaurant. En 1773, les Jésuites quittent Marche à la suite de la dissolution de leur ordre par le Vatican. Leurs bâtiments sont réaffectés en collège royal en 1777 par l’impératrice MarieThérèse. Sous le régime français, le couvent change une fois


Les institutions françaises en Wallonie

L’ancien couvent des Jésuites à Marche-enFamenne. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

encore d’affectation et accueille un tribunal de première instance à partir de 1806. En effet, l’ancien hôtel de ville, abritant jusque-là cette institution judiciaire, venait d’être détruit dans un incendie. Neufchâteau, le presbytère et l’Institut Saint-Michel Ancienne maison prévôtale des comtes de Rochefort située à deux pas de l’ancien site castral de Neufchâteau, l’actuel presbytère est un bel édifice classique daté de 1714 par des ancres situées au-dessus de la porte. Modernisé dans l’esprit néoclassique au milieu du XIXe siècle, le bâtiment comporte un large double corps de deux niveaux sur cinq travées espacées de baies à linteau bombé. La porte est précédée d’un perron à double volée d’escaliers et garde-corps. Sous le régime français, le bâtiment est transformé en gendarmerie et témoigne aujourd’hui d’un autre aspect institutionnel hérité de la période républicaine. Bien qu’ayant existé sous des formes différentes auparavant, la gendarmerie est officiellement créée par la loi du 16 février 1791. La loi du 17 avril 1798 précise que « le corps de la gendarmerie nationale est une force instituée pour assurer dans l’intérieur de la République le maintien de l’ordre et l’exécution des

Le perron du presbytère de Neufchâteau © IPW

lois ». Apportée dans nos régions suite à l’annexion, l’institution perdure en Belgique durant plus de deux siècles avant d’être dissoute et intégrée à la police fédérale en 2001 après la réforme des polices. De par son statut de sous-préfecture du département des Forêts, Neufchâteau abrite un tribunal de première instance sous le régime français, installé dans le bâtiment ancien de l’Institut Saint-Michel. Comme les autres tribunaux du département, il dépend du tribunal d’appel de Metz. Le ressort du tribunal chestrolais s’étend sur les cantons de Neufchâteau, Paliseul, Sibret, Bastogne, Fauvillers, Houffalize, Florenville, Étalle et Virton. À côté de ces deux bâtiments est inaugurée en 1808 une nouvelle prison, à l’emplacement actuel des bâtiments de l’Institut SaintMichel construits dans les années 1970. Cette prison fonctionne place du château jusqu’à son transfert en 1875 sur la place Charles Bergh. La prison française est transformée en hospice jusqu’à sa démolition en 1967. Seul témoin d’époque, l’ancienne porte de la prison existe toujours ; elle a été déplacée contre un mur non loin de la tour Griffon. Visible dans le passage couvert de la ruelle Lepée, elle est surmontée d’un fronton triangulaire en grès jaune et est décorée de chaînes de part et d’autre. 69


Sur les traces de la Wallonie française

Nivelles, l’ancien couvent des Carmes Érigé à partir de 1677 mais achevé en 1718, le couvent des Carmes ne présente plus aujourd’hui qu’une partie des bâtiments qui existaient sous l’Ancien Régime. L’église disparaît presque totalement avant 1860 ; seuls de très rares vestiges subsistent aux flancs de deux maisons de la rue de Mons. Il en est de même des autres bâtiments conventuels : quelques éléments disparates du cloître dans le mur de clôture de la parcelle, grosse bâtisse de deux niveaux en brique et pierre bleue au fond du domaine. L’ensemble, aujourd’hui propriété privée, a été récemment entièrement restauré. Supprimé en 1796, le couvent est vendu comme bien national et transformé en palais de justice et en prison sous le régime français. Nivelles abrite en effet à l’époque un tribunal de première instance de par sa position de sous-préfecture du département de la Dyle. Cette affectation est toutefois de courte durée. Sous le régime hollandais et jusqu’en 1891, le tribunal de Nivelles s’installe en effet dans l’ancien palais abbatial, de même que l’administration communale. À partir de 1803, le couvent abrite également une prison à la demande du préfet, les deux autres maisons d’arrêt nivelloises ne présentant selon lui aucune sécurité contre les évasions. L’utilisation du lieu comme maison d’arrêt se poursuit bien après la chute du régime français : la prison est désaffectée en 1903 et démolie en 1909. Tournai, le palais des États de Tournai-Tournaisis En 1734, une élégante bâtisse est construite dans l’aile nordouest de l’évêché, situé à quelques pas de la cathédrale, dans

le but d’y installer le siège des États du baillage de TournaiTournaisis. De l’édifice lourdement endommagé au cours de la Seconde Guerre mondiale ne subsiste que la façade à rue, construite en brique et pierre sur quatorze travées de deux niveaux. La travée centrale est encadrée de pilastres et présente une large porte sous un arc en plein cintre. La composition est richement décorée : feuillages, coquilles, cornes d’abondance, fleurs. Sous le régime français, les bâtiments sont réquisitionnés afin d’y installer les tribunaux parmi lesquels le tribunal de première instance, installé à Tournai comme dans chaque chef-lieu de sous-préfecture. Verviers, l’hôtel de ville Construit entre 1775 et 1780, l’hôtel de ville de Verviers combine élégamment les styles Louis XV et Louis XVI. Œuvre de l’architecte liégeois Jacques-Barthélemy Renoz, il est constitué de trois volumes avec un avant-corps orné d’un fronton courbe et de la devise « Publicité, sauvegarde du peuple », datant de la Révolution de 1830 et faisant référence à la publicité des débats des élus. L’intérieur conserve une décoration remarquable. Un escalier supportant une rampe en fer forgé de style Louis XVI (1780) mène aux étages où se trouvent plusieurs pièces de grand intérêt. Parmi elles, le salon royal, décoré de figures allégoriques et éclairé de cinq grandes fenêtres auxquelles répondent cinq portes. L’hôtel de ville de Verviers est reconnu patrimoine exceptionnel de Wallonie. Sous le régime français, l’édifice continue à jouer son rôle en abritant les services de la municipalité de Verviers.

L’ancien palais des États de Tournai-Tournaisis, siège d’un tribunal sous le régime français. Collection privée.

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Les institutions françaises en Wallonie

L’hôtel de ville de Verviers, éphémère siège des institutions judiciaires au début du régime français © IPW

Il est même l’éphémère siège des instances judiciaires avant le transfert des tribunaux dans l’ancien couvent des Carmes dès 1796. Dans cet ancien établissement religieux sont ainsi installés un tribunal de police correctionnelle, un jury d’accusation, une justice de paix et une prison. Le couvent a été démoli dans la seconde moitié du XIXe siècle afin d’édifier à cet endroit l’actuel palais de justice.

Les écoles centrales Liège, les bâtiments de l’ancien collège des Jésuites wallons L’université de Liège, installée depuis 1817 au centre de la ville, conserve malgré les destructions et aménagements successifs quelques éléments du collège des Jésuites wallons, installé à cet endroit depuis 1582. Situés dans la cour intérieure et abritant notamment les services de la bibliothèque générale, les bâtiments historiques du « collège-enîle » ont été érigés en brique et calcaire sur les plans du

maître-maçon Paquay Barbière dans la première moitié du XVIIIe siècle sur deux niveaux. L’aile principale, face à la salle académique, est longue de treize travées dont les cinq centrales sont en léger retrait et donnent l’illusion de deux ailes latérales. Une aile perpendiculaire dans la même cour subsiste également bien que sensiblement réaménagée au fil du XIXe siècle. Ces bâtiments sont caractéristiques de l’architecture liégeoise de l’époque : volumes de brique et calcaire, rythmés par des cordons de pierre prolongeant les seuils des fenêtres. Quelques mois après les premiers faits révolutionnaires, comme cela fut le cas à Mons 5, une « Société des amis de la liberté et de l’égalité » est fondée à Liège en 1790. Créée à l’image de la société des Jacobins de Paris, elle doit cesser ses activités en janvier 1791, suite à l’occupation autrichienne de la ville et au rétablissement de l’Ancien Régime. Quelques jours après la libération de Liège par les troupes de Dumouriez en 5

Voir l’article sur l’ancien couvent des Jésuites de Mons dans le chapitre consacré aux deux occupations françaises.

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Sur les traces de la Wallonie française

novembre 1792, elle reprend vie. Ses séances se tiennent dans l’église du Grand Collège, au sein du complexe des Jésuites wallons. Comme à Mons, cette société ne survit que quelques temps seulement. Ensuite, après le retour des Français en 1794, l’armée investit les lieux et y installe une boulangerie : seize fours sont construits et l’église est transformée en magasin pour le grain et la farine. Après l’annexion et la décision à Paris de créer une école centrale dans chaque préfecture, l’ancien collège est transformé en école centrale du département de l’Ourthe par arrêté de l’administration centrale du département du 7 avril 1797. Après une série de travaux de rénovation et d’aménagement, l’installation du corps professoral a lieu le 22 septembre 1797 à l’occasion de la fête de la fondation de la République. Comme le prévoit la loi, neufs chaires y sont créées : dessin, histoire naturelle, langues anciennes, mathématiques, chimie et physique expérimentales, grammaire générale, belles-lettres et législation. Les premiers cours s’ouvrent le 21 décembre suivant. L’école accueille jusqu’à 200 élèves ; bien moins que le collège d’Ancien Régime (300 à 350) mais plus que les écoles centrales de Namur, Bruges, Maestricht et même Bruxelles. Parmi ceux-ci, certains se distinguent par la suite : J. de Behr devient premier président de la cour d’appel de Liège ; P. Poswick, ministre de la Justice ; Closson et Raikem professeurs à la faculté de Médecine de l’Université de Liège ; T. Teichman, gouverneur de la province d’Anvers ; H. Rutxhiel devient un des sculpteurs en vogue sous l’Empire à Paris. L’école est supprimée à la fin du régime consulaire. Le décret impérial du 17 mars 1808 offre une nouvelle affectation aux bâtiments en créant et organisant l’Université impériale. Dans ce décret, Liège est désignée comme siège d’une académie, c’est-à-dire d’une faculté des Lettres et d’une faculté des Sciences. Le Strasbourgeois Franz-Antoine Percelat est désigné comme recteur de cette nouvelle académie qui est la seule université pour les départements de l’Ourthe, de la Meuse inférieure, de la Roer et de Sambre-etMeuse. Cette nouvelle affectation prestigieuse renforce encore le rôle primordial de Liège sous l’Empire par rapport aux autres villes de la région. En effet, en Wallonie, seule Liège compte une université impériale, une cour d’appel et une sénatorerie. La faculté des Sciences de Liège est officiellement créée par un arrêté du 25 septembre 1811, date que l’on peut considérer comme celle du début de l’aventure universitaire en cité ardente. Déjà, l’institution prend ses quartiers dans les bâtiments de l’ancien collège des Jésuites wallons. Un décret impérial du 4 janvier 1813 offre également à l’université les bâtiments de l’ancien couvent des Croisiers tous proches afin de s’agrandir. Situés autrefois dans la rue du même nom, ces bâtiments ont été démolis. Mons, l’ancien couvent des Ursulines Venue de Givet, une congrégation de sœurs Ursulines s’installe à Mons en 1648 en face de la collégiale Sainte-Waudru. Prospère, la communauté érige un grand quartier d’habitation entre 1659 et 1662. Une seconde campagne de construction 72

s’étend de 1705 à 1728 sur les plans de l’architecte ClaudeJoseph de Bettignies. Le complexe constitue encore de nos jours un ensemble architectural de grande qualité et emblématique du centre historique de Mons. Le long du square Roosevelt se trouve une longue façade de brique et pierre sur deux niveaux de vingt-sept travées, coupées par un portail. À l’arrière se situe la chapelle, construite parallèlement à la façade qu’elle surplombe. Le complexe est aujourd’hui réaffecté en artothèque. En 1793, le couvent est supprimé mais les Ursulines continuent à occuper les locaux après avoir réussi à se faire reconnaître au titre de communauté enseignante. Le 5 décembre 1797, un arrêté départemental crée officiellement l’école centrale du département de Jemappes et en fixe le siège à Mons. Pour des raisons évidentes d’économie, les administrateurs du département souhaitent réaffecter un bâtiment déjà existant mais la sélection est longue et hésitante. Le choix se porte finalement sur le bâtiment des Ursulines et est acté par un arrêté préfectoral du 4 janvier 1798. Le 4 avril suivant, les religieuses quittent leur couvent et des travaux sont entrepris afin de transformer les bâtiments en école. L’existence et l’organisation mêmes des écoles centrales ne cessent de susciter la discussion dans les plus hautes sphères de l’État. Sous le Consulat, en 1802, leur suppression pure et simple est décidée. Sur avis favorable du préfet, deux nouvelles écoles d’enseignement secondaire ouvrent à Mons, sous l’égide d’anciens professeurs de l’école centrale. L’une d’elles disparaît dès 1810. La seconde, installée dans les locaux de l’ex-séminaire des Jésuites devenu collège de Houdain, se maintient après la chute de l’Empire. Le pensionnat de l’établissement est, quant à lui, installé dans l’ancien collège de Houdain, aujourd’hui partie intégrante de l’Université de Mons. Son installation est fixée par arrêté du 12 janvier 1799 afin d’y loger les élèves de l’école centrale qui ne résidaient pas à Mons. La bibliothèque de l’école centrale est pour sa part installée dans les bâtiments de l’ancienne abbaye d’Épinlieu, aujourd’hui académie de musique. Fondée par arrêté du 13 avril 1797, cette bibliothèque est constituée des volumes saisis aux communautés religieuses du département peu après l’annexion. Chaque école centrale doit en effet posséder une bibliothèque centrale. Celle de Mons ouvre au public le 5 mai 1802, quelques jours seulement après la suppression des écoles centrales à Paris et quelques mois avant la fermeture de celle du département de Jemappes. Le sort des bibliothèques n’est ainsi plus lié à celui des écoles centrales. Maintenues, elles sont confiées aux bons soins des administrations municipales entre 1803 et 1804. En 1811, la ville de Mons décide de la transférer dans les locaux de l’ancien collège des Jésuites qui avait quelques années auparavant été le siège de la Société des amis de la liberté et de l’égalité 6. Si ce n’est entre 1962 et 1988, la bibliothèque créée par les Français à la fin du XVIIIe siècle n’a plus quitté les locaux des Jésuites depuis ! 6

Voir l’article sur l’ancien couvent des Jésuites de Mons dans le chapitre consacré aux deux occupations françaises.


Les institutions françaises en Wallonie

Vue aérienne de l’église Saint-Loup de Namur et, à gauche, de l’athénée royal François Bovesse, autrefois école centrale du département de Sambre-et-Meuse © Ville de Namur

Namur, l’athénée royal François Bovesse À gauche de l’église Saint-Loup se trouve un élégant bâtiment construit par les Jésuites avec l’aide des États du comté de Namur et des échevins de la ville dans la première moitié du XVIIe siècle. Après la suppression de la compagnie de Jésus en 1773, l’église est érigée en paroisse et les bâtiments conventuels connaissent quelques vicissitudes. Ce très bel ensemble traditionnel en brique et pierre bleue est formé par un bâtiment en L et par une aile basse côté rue, délimitant une cour intérieure rectangulaire divisée en deux par une galerie. D’autres bâtiments des XVIIIe, XIXe et XXe siècles délimitent une troisième cour. Après la suppression des Jésuites, les bâtiments du collège sont réaffectés pour y installer un des collèges royaux créés par l’impératrice Marie-Thérèse. Le « collège royal des Humanités » est organisé par l’État et fonctionne jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. Sous le régime français, comme d’autres anciens collèges des départements réunis, celui de Namur est réaffecté dans le but d’y installer l’école centrale du département de Sambre-et-Meuse. Comme dans les autres établissements du même genre, les matières sont professées le plus souvent par d’anciens religieux, Jésuites ou Augustins. D’existence relativement courte, elle fonctionne

à partir de 1798 et est supprimée en 1802, sur décision du Premier Consul. La municipalité de Namur reprend les bâtiments en charge dans le but d’y créer un collège communal, en fonction dans les bâtiments du collège entre 1803 et 1816. Actuellement, l’édifice n’a pas changé de vocation et abrite l’athénée royal François Bovesse.

Institutions diverses Bouillon, l’ancien palais ducal L’actuel hôtel de ville de Bouillon servait de palais ducal sous le règne de la famille de la Tour d’Auvergne. Ce vaste ensemble enduit composé d’un bâtiment du XVIIe siècle, fortement reconstruit au XIXe siècle, situé à la pointe nord de l’esplanade du château et dominant la place Ducale était donc la résidence du gouvernement bouillonnais. Nationalisé après la Révolution, il est investi par les républicains et transformé en mairie et siège de la justice de paix après l’annexion. L’ancienne résidence du gouverneur du duché de Bouillon toute proche abrite elle aussi pendant quelques temps les services de la mairie sous le régime français. 73


Sur les traces de la Wallonie française

L’ancien palais ducal de Bouillon, siège d’institutions sous le régime français © IPW

Liège, l’hôtel des comtes de Méan Si la façade à rue de ce très bel hôtel de maître a été reconstruite en 1878, l’ancien hôtel des comtes de Barbanson puis de Méan possède une histoire bien plus longue encore. La remarquable façade Renaissance à l’arrière date de 1620 et est ornée, au rez-de-chaussée, de quatorze arcades cintrées. Le bâtiment, construit sur un plan en U, s’articule autour d’un noyau du XVe siècle, progressivement agrandi et transformé au fil des siècles. Couplé à l’hôtel voisin de Sélys-Longchamps, l’hôtel des comtes de Méan a récemment bénéficié d’une restauration minutieuse. Les deux hôtels abritent aujourd’hui un complexe hôtelier de grand luxe. Anecdote institutionnelle parmi d’autres, la maison de maître abrite le conseil de surveillance et de passeport à l’époque française. Namur, l’Institut Saint-Louis Dans l’îlot actuel se trouve un bâtiment du XVIIIe siècle, vestige du couvent des Capucins. Il s’agit d’une grosse bâtisse en brique et pierre bleue sur soubassement appareillé, surmontée d’un clocheton octogonal. Supprimé et vendu comme 74

bien national après la Révolution, le couvent est transformé en prison après l’annexion. Cette trace, pouvant à certains égards paraître minime ou anecdotique, témoigne toutefois, comme d’autres, de la généralisation du modèle carcéral sous le régime français. Cette fois, il s’agit bien d’une invention « belge » reprise par les Français. Le premier « nouveau » modèle de prison est en effet « inventé » dans les Pays-Bas autrichiens suite à l’ouverture des maisons d’arrêt de Gand en 1775 et de Vilvorde en 1779. Grandpré, responsable du bureau des prisons à partir de 1792, propose à la République de suivre l’exemple « belge » dans lequel on retrouve déjà les caractéristiques du modèle carcéral moderne : punition par le travail, séparation entre criminels et vagabonds. Les tribunaux criminels révolutionnaires vont ainsi généraliser la peine de prison et par là, provoquer les premiers effets pervers du système : les prisons sont, sous le régime français, pour la plupart installées dans des bâtiments reconvertis, souvent dans d’anciens couvents dont les locaux ne se prêtaient pas à une telle utilisation. À peine créées, les maisons d’arrêt deviennent synonymes de surpopulation et d’insalubrité.


Sur les traces de la Wallonie française QUELQUES MONUMENTS WALLONS CONSTRUITS PENDANT LA PÉRIODE FRANÇAISE



QUELQUES MONUMENTS WALLONS CONSTRUITS PENDANT LA PÉRIODE FR ANÇAISE

Bien que novatrice en matière administrative et industrielle, la période française ne fut guère favorable aux arts et aux lettres. Rares sont les bâtiments érigés sur le sol wallon entre la fin de l’Ancien Régime et la chute de Napoléon. Les guerres incessantes et l’omniprésence de grandes figures politiques en sont les principaux responsables. En effet, à partir de la campagne militaire de 1794 et du vote de rattachement à la France en 1795, nos régions se trouvent dans une forte instabilité politique qui n’est pas propice à la construction. Le néoclassicisme avait déjà touché nos régions à la fin de l’Ancien Régime mais le Consulat et l’Empire sont caractérisés par une étonnante absence de monuments remarquables ! Entre 1792 et 1815, bon nombre d’édifices significatifs pour l’histoire de l’architecture ont été construits en Belgique mais la majorité d’entre eux se trouvent en dehors du territoire wallon. Plusieurs Wallons profitent de l’annexion pour parfaire leurs connaissances à la prestigieuse école spéciale d’architecture de Paris mais leurs grandes réalisations ne datent pas de l’époque française (citons notamment les Liégeois JeanNoël Chevron et Auguste Duckers, grands architectes du régime hollandais). Certaines très belles réalisations ont également disparu depuis, telle la manufacture impériale des tapis de Tournai, chef-d’œuvre de Bruno Renard. Quelques édifices de moindre importance sont érigés en style Empire ou sont pourvus d’éléments de décor du même style. C’est notamment le cas de l’hôtel de Graty (rue d’Enghien), de l’hôtel Duvivier (rue du Onze Novembre) et de l’hôtel des frères Honorez (rue de Nimy) à Mons. D’autres interventions constituent une intervention mineure en termes de grande architecture : le château de Waroux à Alleur est doté à l’époque d’un péristyle Empire et le parc d’Enghien est agrémenté d’une porte monumentale en 1809. Beauraing/Vonêche, le château de Vonêche Partie intégrante du site des cristalleries impériales de Vonêche 1, le château est une des plus belles réalisations construites sous l’Empire conservées sur le territoire wallon. 1

Voir la notice sur les cristalleries impériales dans le chapitre consacré aux prémices de la Révolution industrielle en Wallonie.

Le château de Vonêche. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Achevé en 1806, il est habité par le propriétaire des cristalleries jusqu’en 1844 avant d’être vendu au comte Félix Cornet de Ways-Ruart qui crée un parc et l’orangerie. De style Louis XVI, le château est érigé en brique enduite et calcaire sur deux niveaux de neuf travées. La façade principale est largement ouverte et dotée en son centre d’un portail mouluré en plein cintre. L’édifice est également caractérisé par son imposante toiture à la Mansart, ponctuée de trois niveaux de lucarnes dont celles du bas éclairent un étage mansardé. Au centre, un belvédère garni de balustrades en bois et surmonté d’une couverture bulbeuse coiffe le sommet de cette toiture.

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Sur les traces de la Wallonie française

Gembloux/Bossières, le château de Golzinne Sur le site de l’ancien château médiéval des comtes de Namur détruit en 1430 se trouve un petit château néoclassique édifié en 1804 à la demande de Charles-Alexis-Joseph Demanet. La légende dit que la première pierre de l’édifice fut posée le jour même du sacre de Napoléon. L’édifice présente un volume presque cubique de deux niveaux comprenant une travée de part et d’autre d’un frontispice Empire. L’ensemble est caractéristique de l’architecture de l’époque : quatre colonnes ioniques délimitant trois travées sous entablement, portes moulurées en plein cintre, emmarchement encadré de lions.

L’édifice est actuellement enduit en blanc sur un soubassement de pierre bleue et coiffé d’une toiture d’ardoise. Le château est un formidable témoin de l’architecture et de la décoration néoclassiques en Wallonie bien que sa richesse ne dépasse pas celle du château de Longchamps. Liège, l’ancien hôtel de Sauvage L’hôtel de Sauvage n’est pas une réalisation architecturale de la période française. Les bases de l’édifice remontent au XVIe siècle bien que l’immeuble acquiert ses proportions actuelles dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Les exceptionnels salons

Salon de musique de l’hôtel de Sauvage à Liège. Photo de 1957 © Bruxelles, KIK-IRPA

Salon Napoléon III de l’hôtel de Sauvage à Liège. Photo de 1957 © Bruxelles, KIK-IRPA

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Quelques monuments wallons construits pendant la période française

qu’il renferme témoignent toutefois de la qualité des décorations intérieures de style Empire héritées du régime français. Le plan de l’immeuble est composé d’une série de pièces en enfilade auxquelles on accède par un vestibule dans lequel se trouve un escalier aux barreaux en fonte, témoin privilégié de l’architecture de la première moitié du XIXe siècle. Le salon de musique, bijou de l’art néoclassique, rivalise avec les plus belles réalisations parisiennes de l’époque et constitue de nos jours un des très rares exemples de décoration Empire conservées en Belgique. Construit sur un plan rectangulaire, il se termine par une exèdre dont l’entablement repose sur six colonnes et est décoré de stucs évoquant la Musique.

présente un important développement de neuf travées sur deux niveaux avec fenêtres à linteau droit, groupées symétriquement et axées sur les trois travées centrales précédées d’un perron et surmontées d’un attique sous fronton triangulaire. La façade arrière, plus richement décorée, présente sensiblement la même composition mais est composée de onze travées dont les trois centrales sont elles aussi précédées d’un perron et surmontées d’un attique sous fronton triangulaire. L’édifice est flanqué de dépendances de part et d’autre ; cellesci sont rythmées d’arcades cintrées percées d’oculi et de fenêtres à linteau.

Mons/Havré, le château de Beaulieu Le château de Beaulieu est sous l’Ancien Régime un fief qui relève directement du comte de Hainaut. La bâtisse, la ferme et la terre deviennent au XVIIIe siècle la propriété de la riche famille Duval de Beaulieu 2. Celle-ci fait ériger vers 1800 une grande demeure et des dépendances de style néoclassique, une des rares demeures de plaisance érigées dans notre région sous le régime français. La façade avant, enduite,

Verviers, l’ancien hôtel Simonis Actuelle maison décanale de la paroisse Saint-Remacle et maison des vicaires, l’ancien hôtel Henri Simonis compte au nombre des demeures de prestige du centre de Verviers. Cette demeure aristocratique a été érigée en 1806 et constitue encore aujourd’hui un témoin de l’importance de Verviers sur le plan industriel dès les premières années du XIXe siècle 3. La façade, de style néoclassique, compte trois niveaux de cinq travées, dont les deux de gauche pourraient avoir été construites

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Voir l’article sur la chapelle Saint-Jacques de Beaulieu à Havré dans le chapitre consacré au patrimoine funéraire.

Voir le chapitre suivant, consacré aux prémices de la Révolution industrielle en Wallonie.

La façade arrière du château de Beaulieu à Havré. Photo de 1980 © Bruxelles, KIK-IRPA

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Sur les traces de la Wallonie française

L’hôtel Simonis à Verviers © IPW

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Quelques monuments wallons construits pendant la période française

ultérieurement. La dernière travée à droite est percée d’une porte cochère s’ouvrant sur un vestibule qui traverse l’édifice de part en part et permet d’accéder à la cour intérieure et le jardin, où se trouvent également les dépendances, construites quant à elles en 1727 par le propriétaire précédent. La maçonnerie de l’ouvrage est mixte et traditionnelle de nos régions : les façades alternent brique et pierre bleue. L’intérieur est lui aussi caractéristique de l’époque de son édification au temps de l’Empire ; il comporte notamment de beaux plafonds en stuc et des cheminées en marbre. La maison est cédée en 1830 par la veuve de Henri Simonis à son neveu, l’industriel Raymond de Biolley qui l’échange en 1839 contre l’ancienne église désaffectée de la place du Marché. Le conseil de fabrique dispose ainsi depuis lors d’une résidence pour le curé-doyen.

Verviers, l’hôtel de Biolley Parmi les grandes figures verviétoises de la fin de l’Ancien régime figurent les membres de la famille Biolley. Raymond Biolley est le troisième de la lignée après l’installation de Jean Biolley au début du XVIIIe siècle et conduit la famille au sommet de la gloire. Pour la signifier, il désire se faire construire une demeure élégante et confie sa réalisation à l’architecte Henri Douha. De style Louis XVI et situé aux numéros 28-34 de la place Sommeleville, l’immeuble d’origine comporte neuf travées, dont trois en avant-corps légèrement en saillie, trois niveaux et une toiture à la Mansart avec deux lots de trois lucarnes et un fronton triangulaire. La composition est parfaitement symétrique bien que l’avantcorps soit traité différemment. Le premier étage est décoré de panneaux sculptés de draperies et de guirlandes. L’intérieur

Vue partielle de la façade d’origine de l’hôtel de Biolley © IPW

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Sur les traces de la Wallonie française

Vue d’un salon intérieur de l’hôtel de Biolley © IPW

est lui aussi richement décoré, surtout dans les trois salons. Depuis l’époque de son édification sous le régime français, l’immeuble a subi les affres du temps. À droite est construite une annexe dont l’intégration est assez réussie bien que l’ensemble ait perdu sa symétrie. L’action des propriétaires successifs au XXe siècle est, elle, bien plus discutable. En 1932, les lucarnes, brisis et fronton sont supprimés pour transformer l’étage en appartements. En 1952, le rez-de-chaussée est défiguré à des fins commerciales : les bossages des façades disparaissent sous un enduit, les baies de l’avant-corps sont modifiées et de nouvelles ouvertures sont percées ! Un projet de réaffectation en espace muséal rendra à l’avenir son 82

lustre d’antan à l’hôtel de Biolley en corrigeant les erreurs du siècle dernier. À quelques pas de là, le bâtiment situé au 8 de la place Sommeleville était lui aussi lié à la famille Biolley. Il appartenait à Édouard de Biolley (1799-1851), bourgmestre de Verviers, colonel de la garde civique sous le régime belge mais surtout industriel de premier plan. Construit dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, l’édifice est toutefois profondément remodelé dans les premières années du XIXe siècle en style Empire. Cette rénovation apporte à la façade principale un balcon, un troisième étage ainsi qu’une travée supplémentaire percée d’un portail.


Quelques monuments wallons construits pendant la période française

Waremme/Longchamps, le château de Longchamps Siège d’une seigneurie d’Ancien Régime, propriété à la fin du Moyen Âge de Fastré de la Neuville, dit de Longchamps, le château reste dans cette famille jusqu’au début du XVIIIe siècle. En 1710, Marie-Françoise de Longchamps lègue la propriété à sa fille Marie-Catherine qui vient d’épouser Waltère de Sélys ; le bien passe donc dans l’apanage de la famille de Sélys-Longchamps. Au début du XIXe siècle, Michel-Laurent de Sélys-Longchamps confie la construction d’un nouveau château à l’architecte parisien Aimé Dubois. L’entrepreneur liégeois Duckers et le sculpteur figuriste parisien Mongin sont chargés de la réalisation. Michel-Laurent de Sélys-Longchamps est une figure du régime français. Député du département de l’Ourthe, maire de Liège, il poursuit sa carrière en France en tant que juge au tribunal de première instance de la Seine et au Sénat conservateur. Considéré comme la plus belle réalisation Empire de Wallonie, le château de Longchamps est précédé d’une drève de chênes et de peupliers et est entouré d’un vaste parc composé d’arbres remarquables. Les bâtiments de la nouvelle demeure sont construits sur un plan en L autour d’une cour. La façade principale de deux niveaux et sept travées est percée en son centre d’un portique en serlienne (voûte en berceau

plein cintre s’appuyant sur une double paire de colonnes ioniques) décoré de deux médaillons portant les initiales SL entrelacées. Le tout est surmonté d’un balcon situé à hauteur du second niveau. La façade ouest, similaire bien que composée de quatre travées, est flanquée d’un petit pavillon rectangulaire qui ajoute une touche d’originalité à l’ensemble. Véritable témoin de l’histoire de son temps, il est construit sur le modèle d’une tente de bivouac de l’armée napoléonienne utilisée au cours de la campagne d’Égypte. Ses faces latérales sont percées de deux portes-fenêtres à encadrement de stuc imitant des tentures drapées. La décoration intérieure du château constitue un exceptionnel ensemble de style Empire. On y trouve notamment un grand salon orné de pilastres corinthiens et décoré de guirlandes retenues par des torches enrubannées. La salle à manger est parée de faux-marbre et décorée d’une frise de palmettes et d’une frise en grisaille comportant des putti. La salle de billard imite elle aussi la tente de Napoléon ; elle est ornée de fausses draperies rythmées par des pilastres et des frises d’arceaux trilobées. Les chambres sont ornées de stucs et de papier peint d’époque. La totalité du château et de ses dépendances ont été classés comme monument, site et ensemble architectural le 4 février 2014.

Le château de Longchamps avec, à gauche, la tente napoléonienne. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française

L’intérieur de la tente napoléonienne du château de Longchamps. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française LES PRÉMICES DE LA RÉVOLUTION INDUSTRIELLE



LES PRÉMICES DE LA RÉVOLUTION INDUSTRIELLE

Les révolutions qui éclatent en France et dans nos régions en 1789 ne facilitent pas la vie économique. Entre 1789 et 1799, l’économie est relativement instable. Il faut attendre l’arrivée au pouvoir de Napoléon et les changements administratifs et organisationnels opérés sous le Consulat et l’Empire pour voir la tendance s’inverser. On ne peut pas dire que la Révolution industrielle démarre à proprement parler sous le régime français car la base est déjà là. L’apport français en la matière est essentiellement venu des réformes administratives et juridiques majeures plutôt que d’évolutions technologiques d’envergure qui apparaissent seulement sous le régime hollandais. La technologie ne s’impose pas, juste l’encadrement qui était indispensable à son éclosion. La bourgeoisie rurale et industrielle, enfin débarrassée de son statut de membre du Tiers-État, s’empare du pouvoir à la faveur de ce brutal changement de régime. Elle acquiert notamment près des troisquarts des biens nationaux mis en vente et les transforme en usines. C’est ainsi que d’anciens couvents ou domaines épiscopaux et impériaux deviennent le siège de manufactures comme l’abbaye de la Ramée à Jauchelette dans laquelle une tentative d’installation d’une féculerie et d’une distillerie de sucre ne connut pas le succès. Sous le régime français, l’industrie s’implante essentiellement dans les villes dans lesquelles l’enseignement technique est fortement développé ; le nombre d’ingénieurs formés dans les écoles industrielles explose sous l’Empire. L’apparition du système métrique lance les bases d’une standardisation qui était primordiale pour le développement de l’industrie tout au long du XIXe siècle. Arrivés d’Angleterre, les machines de Newcomen se généralisent dans le travail d’extraction de la houille. La présence de Cockerill en Wallonie ouvre l’âge d’or de l’industrie textile en bord de Vesdre : Verviers devient le laboratoire de la mécanisation et vit une des plus importantes périodes de son histoire, qui fera d’elle une des villes les plus dynamiques de Wallonie au XIXe siècle. La Wallonie se spécialise déjà dans certains domaines qui font sa renommée dans le monde entier tout au long du XIXe siècle : le Borinage ouvre de nombreux charbonnages sous l’Empire, Liège se spécialise dans l’industrie armurière, Namur dans l’industrie verrière et Verviers dans l’industrie

Portrait de John Cockerill par Barthélemy Vieillevoye (1841) conservé au château de Seraing © Bruxelles, KIK-IRPA

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textile. La situation géographique wallonne s’y prête admirablement : au centre de l’Europe, non loin de Paris, la Wallonie possède un riche sous-sol et des voies d’eau navigables qui facilitent le développement du commerce et de l’industrie. Le blocus continental imposé à l’Angleterre par Napoléon est aussi une aubaine pour la Wallonie : les produits et les progrès techniques anglais ne parviennent pas jusqu’à nous et évitent aux industriels wallons une concurrence qui aurait été désastreuse. À l’intérieur du continent, en grande partie aux mains de l’empereur, les barrières douanières sont supprimées et un vaste marché européen se développe au gré des conquêtes napoléoniennes. La production industrielle wallonne y trouve des débouchés hors du commun. Seules la chute de l’Aigle et la fin de l’Empire provoquent une récession économique logique. La séparation de nos provinces d’avec la France est suivie d’une crise sévère, causée par la désintégration subite du marché économique européen unifié par Napoléon et morcelé par les grandes puissances au congrès de Vienne. Sous Louis XVIII, la France renoue avec le protectionnisme et le reste du continent est inondé de produits anglais.

Vue aérienne du site du Grand-Hornu. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Boussu/Hornu, vers le Grand-Hornu Le site du Grand-Hornu a connu son développement le plus considérable sous le régime hollandais, sous l’égide d’Henri de Gorge. Cependant, les premiers bâtiments du complexe sortent de terre dès 1810. Dès la fin du XVIIIe siècle, des prospections et de timides débuts d’exploitation de la houille sont entrepris sur le site. À l’époque, les terrains, essentiellement réservés à l’agriculture, appartiennent à l’abbaye de SaintGhislain. Après la Révolution, une concession est attribuée à Sébastien Godonnesche, fermier des octrois de Valenciennes, qui décède dans les premières années du XIXe siècle. En 1810, en pleine période de renouveau technologique sous l’impulsion des réformes impériales, Henri de Gorge, garde-magasin des chauffages militaires originaire du Quesnoy, reprend la concession. Pendant près de vingt ans s’étale ensuite un chantier de construction d’importance devant faire du GrandHornu une cité ouvrière idéale. Les bâtiments constituent encore de nos jours un très bel exemple d’intégration architecturale et économique. À côté des bâtiments industriels se trouve une cité au plan géométrique et aux maisons en ligne


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permettant aux ouvriers de loger sur le lieu même de leur travail. On y trouve également une école dans laquelle sont formés les porions et les géomètres et divers lieux de loisir (bibliothèque, jardin public…). Devenu musée d’art contemporain et brillamment restauré, le Grand-Hornu a été classé dans son ensemble en 1993 avant de d’être reconnu successivement patrimoine exceptionnel de Wallonie et patrimoine mondial de l’Unesco. Beauraing/Vonêche, les cristalleries impériales de Vonêche Les débuts de l’aventure verrière à Vonêche remontent à la fin de l’Ancien Régime, lorsque le promoteur Pierre-Nicolas Mathys engage le maître souffleur Gaspard Andrès pour installer une verrerie créée le 4 août 1778 en vertu d’un octroi accordé par l’impératrice Marie-Thérèse et dont la production commence le 10 décembre 1779. La mort prématurée d’Andrès et l’inexpérience de ses successeurs entraînent la fermeture de l’entreprise en 1793. Le 10 mars 1802, AiméGabriel d’Artigues, riche industriel parisien, rachète la verrerie et la transforme en cristallerie. Il rénove et agrandit les installations et fait de Vonêche la plus importante cristallerie de tout l’Empire français ! La proximité de vastes fonds sableux et d’importantes forêts, ainsi que la participation importante d’Artigues dans les mines de plomb d’Aixla-Chapelle contribuent à faire de Vonêche un centre de production possédant la mainmise sur les composants nécessaires à la fabrication du cristal. Les fastes de l’Empire et l’essor économique de la haute bourgeoise permettent aux cristalleries de disposer d’une importante clientèle désireuse de se procurer des objets de luxe. En 1810, entre 600 et 700 ouvriers y travaillent mais la chute de Napoléon entraîne une perte de débouchés et une diminution radicale du personnel (400 ouvriers en 1816). Intégrée au royaume des Pays-Bas, la cristallerie perd l’important débouché du marché français. AiméGabriel d’Artigues rachète alors les cristalleries de Baccarat en Lorraine et y transfère ses activités. En 1826, le chimiste François Kemlin et l’ingénieur Auguste Lelièvre, collaborateurs d’Aimé-Gabriel d’Artigues, quittent l’entreprise pour aller fonder les cristalleries du Val-Saint-Lambert à Seraing. Les activités cessent définitivement à Vonêche en 1830. Le propriétaire reste le seul habitant du lieu et réside dans son très beau château 1, édifié au plus fort de sa gloire. Bernissart/Pommerœul, le souvenir du canal de Mons à Condé Le développement des voies navigables sous le régime français est très favorable au département de Jemappes, producteur de charbon. Dès les premières années de l’annexion, l’idée d’un canal entre Mons et Condé le long du cours de la Haine germe dans l’esprit des décideurs et des industriels. Le gouvernement français souhaite notamment créer un 1

Voir l’article sur le château de Vonêche dans le chapitre consacré aux principaux bâtiments construits sous le régime français.

important réseau de canaux sur le territoire national dont un devrait relier Paris à la Belgique. Le 15 janvier 1801, les Consuls chargent le ministre de l’Intérieur d’étudier le dossier. Plusieurs années de réflexion et de changements d’avis retardent pourtant le projet qui refait surface après la publication d’un décret impérial du 3 avril 1806. Le 1er mars 1807, Jacques-François Piou, ingénieur en chef du Corps impérial des ponts et chaussées, propose un nouveau tracé en ligne droite de Mons à Condé. Ce projet est approuvé par décret impérial le 18 septembre 1807 ; les travaux débutent un mois plus tard et durent plusieurs années. Au moment de la chute de l’Empire en 1814, le chantier est toujours en cours, majoritairement du côté français. Les travaux sont rapidement achevés du côté belge, grâce à l’intervention de Guillaume d’Orange ; le canal est alors provisoirement relié à la Haine. Plusieurs fois modernisé au cours du XIXe siècle, il change de visage à plusieurs reprises au fil des décennies et rares sont les témoins de sa physionomie à l’époque napoléonienne. Quelques vestiges d’époque sont visibles du côté de Pommerœul. Dans le Hainaut également, un autre projet voit le jour sous le régime français. Un décret des Consuls du 4 mai 1803 ouvre la voie à la création d’un canal entre Charleroi et Bruxelles. Ce projet ne se concrétise toutefois pas sous Napoléon ; les travaux débutent en 1827, sous l’impulsion du régime hollandais. Dour/Élouges, le château « Belle-Vue » C’est peu avant la première occupation de nos régions par les Français que débute l’aventure de l’extraction de la houille à Élouges. Guillaume Castiau, déjà propriétaire de concessions charbonnières dans la région montoise depuis 1785, devient mandataire d’une association créée à Dour et Élouges le 25 juin 1792. C’est dans cette petite localité du Borinage qu’est fixé le siège social et qu’est édifié, parmi les puits d’extraction, un grand immeuble destiné à abriter les services administratifs. À l’origine surnommé « le grand bureau », il est rapidement baptisé « Belle-Vue », nom repris ensuite pour l’ensemble de la concession. Le charbonnage se développe rapidement sous le Consulat et l’Empire. En 1805, on compte déjà dix fosses dont six en exploitation, la présence d’une pompe à feu et la première machine à rotation établie dans le bassin borain. Le charbonnage de Belle-Vue s’impose pour un temps comme le plus puissant de la région. Entre 1805 et 1810, il occupe quatre cents ouvriers, le plus grand nombre sous l’Empire, et vend les plus grandes quantités de charbon. C’est aussi à cette époque que sont construites quelques maisonnettes ouvrières, qui étaient peut-être au moment de leur création utilisées comme forges ou écuries avant d’être reconverties en logements. Cette réussite illustre parfaitement l’importance hennuyère sur le plan minier : avec une production de 900.000 tonnes par an, le département de Jemappes extrait à lui seul plus de houille que le reste de la France ! Parfois pompeusement affublé du titre de « château », il s’agit du plus ancien bâtiment conservé de nos jours sur le 89


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site. Construit en brique et pierre bleue, il possède au rez-dechaussée et au premier étage des fenêtres encadrées de montants à chaînage surmontés d’un linteau en intrados. Celles du second étage, probablement construites par la suite, sont plus simples. Gouvy/Cierreux, la tannerie Beaupain L’exploitation industrielle de la vallée du Glain dans la région de Gouvy remonte au XVIe siècle lorsque le comte de Salm autorise l’implantation d’un moulin banal à Cierreux. Une foulerie, édifiée vers 1762 tout à côté, a disparu dans les années 1930. En 1808, Mathieu Beaupain devient propriétaire du moulin puis maître de la ferme toute proche trois ans plus tard. Entre 1809 et 1819, il édifie une tannerie, qui encore de nos jours est le bâtiment le plus emblématique du site. Cette haute bâtisse couverte de chèrbins a été classée comme monument en 1982. Les deux premiers niveaux sont construits en moellons alors que les trois supérieurs, réservés au stockage et au séchage des peaux, sont édifiés en pans-de-bois. La force utile à l’activité industrielle était puisée sur le bief du

La tannerie Beaupain à Cierreux. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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moulin, quelque peu en amont ; le site est en effet caractérisé par la présence de trois petits cours d’eaux et d’une chute d’eau séparant les deux usines. Mathieu Beaupain poursuit l’exploitation des autres bâtiments et transforme la foulerie en moulin à huile. Riche et influent, l’industriel et ses fils occupent même des fonctions communales dans la région. JeanGuillaume Beaupain, le fils de Mathieu, est bourgmestre de Bovigny entre 1816 et 1840. Hélécine/Opheylissem, l’ancienne abbaye d’Heylissem Abbaye de Prémontrés fondée en 1135, Heylissem sert d’avant-poste dans la défense du duché de Brabant aux alentours de 1300 avant d’être ravagée par un incendie en 1507. Restaurée par la suite, elle est à nouveau lourdement dévastée au cours des guerres de religion, notamment en 1568. Le monastère est rebâti selon les plans de Laurent-Benoît Dewez et François Roufflart entre 1760 et 1780 qui en font une des plus belles réalisations classiques de Wallonie. Malgré les affres de la Révolution et la reconversion des bâtiments au début du XIXe siècle, l’ensemble conservé de nos jours est encore


Les prémices de la Révolution industrielle

L’ancienne abbaye d’Heylissem abritait une filature de coton sous le régime français. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

exceptionnel à plus d’un point. Consacrée en 1780, l’église de style Louis XIV est caractérisée par son immense dôme qui surplombe les toitures de l’aile principale. L’ensemble est restauré en profondeur dans le dernier quart du XIXe siècle par Alphonse Balat, architecte attitré du roi Léopold II, dont la mission était d’effacer les traces de l’occupation des décennies précédentes. La façade principale est caractérisée par un haut frontispice structuré par des pilastres corinthiens. Dès les premières années des troubles révolutionnaires, le sort de l’abbaye bascule. Après la défaite française de Neerwinden en 1793, l’abbaye est ravagée une première fois par les armées ; de nombreux moines sont forcés de s’exiler. La plupart reviennent toutefois en 1795, pour quelques mois seulement. L’année suivante, l’abbaye est supprimée ; un commissaire de la République procède à l’inventaire des biens le 26 septembre 1796. Déclarée bien national, l’abbaye voit ses domaines morcelés et est mise en vente. C’est un moine défroqué de l’abbaye Saint-Pierre de Gand qui acquiert l’ensemble le 22 avril 1797 dans le but de procéder à une opération financière avantageuse. Il revend en effet les

bâtiments peu après à deux Français résidant dans la région, les frères Thiberghien, qui décident de transformer l’abbaye d’Heylissem en une filature de coton et une fabrique de tissus. L’entreprise profite des bienfaits économiques apportés par le régime français et obtient une médaille d’or à l’exposition de Paris en 1806. Pourtant, elle fait également les frais de la chute de l’Empire et périclite après la défaite de Waterloo. Revendue en 1821, elle est transformée en usine de fabrication d’eau de vie de pommes de terre par L.G Vanden Bossche, qui cesse les activités en 1870 pour faire transformer les lieux. La province du Brabant acquiert le domaine en 1962 et procède à sa restauration. La Hulpe, les papeteries du Grand Étang Aujourd’hui reconverties en bureaux, les anciennes papeteries de La Hulpe ou du Grand Étang trouvent leur origine en 1664. L’aile principale se dresse le long de la rue, en contrebas de l’étang. Construite en calcaire et brique blanchie, elle est constituée de trois volumes successifs couverts d’ardoises érigés entre la seconde moitié du XVIIIe siècle et la première 91


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Les papeteries du Grand Étang à La Hulpe. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

moitié du XIXe siècle. C’est à cette période que l’activité souffre des conséquences des diverses révolutions qui entraînent alors une dépression économique. Le 4 février 1803, le banquier d’origine irlandaise Daniel-Patrice Hennessy achète la manufacture en vente publique. Il renouvelle le matériel et transforme la papeterie en une usine moderne et performante. La fabrique est alors activée par moulins à eau et est divisée en deux parties autonomes qui fabriquent du papier blanc pour l’une et du papier bleu pour l’autre. Sous l’Empire, la plus grande partie de la production est envoyée en France afin d’approvisionner l’imprimerie impériale de Paris. Liège, la manufacture impériale des armes de Liège La fabrication d’armes civiles et militaires est une vieille spécialité liégeoise qui, au fil des siècles, se perfectionne et étend sa renommée. La Révolution industrielle permet à la région liégeoise de devenir un des plus importants centres armuriers du monde, une fois encore sous l’impulsion de Napoléon. Au début du XIXe siècle, la production est encore manuelle et les édifices qui renferment ces activités sont les demeures de marchands dits « fabricants » ; les ouvriers chargés d’assembler les armes travaillent alors le plus souvent à domicile. Il s’agit généralement de demeures qui se confondent avec d’autres dans le paysage urbain ou de demeures de prestige de construction plus ancienne mais que les grands 92

manufacturiers se sont réappropriés. Plusieurs témoins subsistent dans les quartiers de Saint-Léonard et Coronmeuse, à cheval entre les communes de Liège et Herstal. L’hôtel Gosuin, situé place Coronmeuse, évoque aujourd’hui encore la personnalité de Jean Gosuin, cloutier de formation, directeur de la manufacture de Charleville avant d’arriver à Liège où il fonde une nouvelle usine qui connaît rapidement un succès grandissant. Le 24 mars 1803, son entreprise reçoit le monopole de la fabrication des armes militaires pour 6 ans. Les nombreuses campagnes menées par Napoléon à travers l’Europe offrent une quantité de travail considérable à cette manufacture privée. Gosuin vend les armes à l’État à un prix convenu de 29 F/pièce et engage de plus en plus : son entreprise passe de 51 ouvriers en 1799 à 1500 en 1813 ! Fort de son succès, Gosuin acquiert un très bel hôtel de maître érigé à la fin du XVIIIe siècle. La demeure présente une haute façade de brique et calcaire de sept travées sur trois niveaux surmontée d’un fronton sur lequel figure une représentation de la Justice et de sa balance. Celle-ci est entourée de motifs caractéristiques de l’activité du fabricant (deux canons et une pile de boulets) et de l’époque (la Justice s’appuie sur des faisceaux républicains). Non loin, au début du quai Saint-Léonard, subsistent les bâtiments de la manufacture nationale puis impériale des armes de Liège. Il s’agit de plusieurs habitations construites


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Le fronton de l’hôtel Gosuin, place Coronmeuse à Herstal © IPW

Pièce de canon réalisée en 1812 par la fonderie impériale de Liège et conservée dans la cour intérieure de l’hôtel de Hayme de Bomal © IPW

au XVIIIe siècle sises aux numéros 25-26 et 33-34. Prises en location par Jean Gosuin dès 1792 afin d’accroître la surface de ses installations, ces demeures ne témoignent en rien de leur passé. Dans ces maisons se trouvaient une salle de révision pour les canons, une salle de réception des fusils, des dépôts de pièces et de produits finis, des magasins de matière première et un entrepôt de bois de fusils. Après la période française, ces installations sont rachetées par le fabricant d’armes Pierre-Joseph Malherbe qui y exerce ses activités jusque dans

La plaque commémorative du banc d’essai des armes à feu de Liège © IPW

la seconde moitié du XIXe siècle. D’autres bâtiments n’ont pourtant pas été conservés. La fonderie de canons, créée en 1803 et implantée sur le quai de Coronmeuse, a cessé ses activités en 1940. Les bâtiments ont ensuite été détruits pour ériger l’actuel athénée Liège-Atlas. Cette fonderie de canons possédait sous l’Empire six hauts fourneaux et six machines à vapeur. Sa production était assez importante bien que tout se faisait à la main. Autre établissement caractéristique de l’époque, le « banc d’épreuve 93


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des armes à feu », créé dès 1672, mais installé par la suite dans la rue Saint-Léonard, a lui aussi disparu. Aujourd’hui, une plaque commémorative apposée sur la façade du nº 243, rappelle cet état de fait. Elle comporte dans sa partie supérieure une représentation du perron liégeois au-dessus d’une inscription « Lieu où a été par Décret impérial du 14 déc[embre] 1810 et l’arrêté de la Préfecture de l’Ourthe du 13 mai 1811, établi le Banc d’Épreuve officiel des Armes à Feu de Liège, pour le bien du Commerce, de la Sécurité des utilisateurs et le Renom de l’Armurerie liégeoise ». Mons, l’abbaye du Val des Écoliers Imposant monastère augustinien établi à Mons en 1252 et érigé en abbaye en 1617, l’abbaye du Val des Écoliers est supprimée en 1796, comme de nombreux autres établissements religieux. Les bâtiments périssent ensuite lentement avant de menacer ruine. En 1876, la ville de Mons en décrète la

La tour de l’ancienne abbaye du Val des Écoliers à Mons. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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démolition dans un souci d’urbanisme. Aujourd’hui, seule une tour subsiste et rappelle l’existence d’un couvent à cet endroit. Entourée de verdure, cette tour de style classique de trois niveaux a été érigée en grès de Bray, pierre d’Écaussinnes et brique. Restaurée en 1892, elle comporte à l’ouest un portail classique surmonté d’une niche à ailerons et fronton triangulaire sous un cartouche aux armes de l’abbé M. J. d’Honner, commanditaire de la construction de l’édifice en 1739. Sous le régime français, l’abbaye est réaffectée à de nombreuses reprises. Les Français la transforment en arsenal, salle de réunion et magasin. Les lieux sont ensuite partiellement investis par l’Anglais Mather et le Français Foissey pour y installer une usine de filage. Parallèlement, en 1805, la municipalité de Mons y installe un hôpital civil qui fonctionne jusqu’à l’abandon du site en 1876. Mons/Obourg-Saint-Denis, l’abbaye Saint-Denis-en-Brocqueroie Implantée à quelques kilomètres de Mons, l’abbaye SaintDenis-en-Brocqueroie a été fondée en 1081 par des moines bénédictins venus de l’abbaye de Saint-Denis sous l’impulsion de la comtesse Richilde de Hainaut. Les moines y aménagent un chapelet d’étangs, un moulin et un enclos monastique au bord de l’Obrecheuil, petit affluent de la Haine. L’abbaye entretient des relations privilégiées avec les chanoinesses de Sainte-Waudru tout au long de l’Ancien Régime avant de connaître une destinée nouvelle après la Révolution. Forcés d’abandonner leurs installations, les moines quittent un ensemble architectural d’une grande harmonie. Le site abbatial est toutefois épargné par la Révolution : ses nombreuses qualités (cours d’eau puissant et bâtiments vastes et solides) attirent l’attention des industriels. Le 3 mars 1798, l’abbaye est vendue comme bien national à Constant Duval de Beaulieu, maire de Mons de 1800 à 1815 et homme d’affaires davantage préoccupé par le développement technique et industriel que par la religion. Le bien ne reste que peu de temps entre ses mains ; l’abbaye est revendue le 23 janvier 1804 à Désiré-François Tiberghien, déjà propriétaire de l’abbaye d’Heylissem 2, qui réaffecte les bâtiments en filature de coton. L’entreprise prospère rapidement. En 1808, on compte déjà 424 ouvriers fileurs, dont la plupart sont des femmes. Dans les dernières années de l’Empire, les effectifs passent à plus de 2500 ouvriers. Certains considèrent même l’industrie de coton d’Obourg-Saint-Denis comme la plus importante filature de tout l’Empire à cette époque. C’est probablement la chute du régime et la défaite finale de Napoléon en 1815 qui occasionnent les premiers soucis à l’entreprise qui se maintient toutefois et procure du travail à quelques centaines de personnes jusqu’en 1957 lorsque les activités sont définitivement transférées sur un autre site. Un incendie provoque en 1959 la disparition de tous les aménagements 2

Voir plus haut.


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industriels réalisés dans l’aile des dortoirs et des réfectoires. Les vestiges de l’activité sont toutefois encore assez importants pour considérer l’ancienne abbaye comme un site d’archéologie industrielle. Nous y trouvons une haute cheminée, les vestiges d’une machine hydraulique et le château de la famille Tiberghien. Depuis 1978, le site abrite un habitat groupé composé d’une vingtaine d’unités familiales réparties dans les anciens bâtiments abbatiaux et industriels. Tournai, la fabrique impériale de tapis La production de tapisseries de grande qualité fait la renommée de la ville de Tournai depuis la fin du Moyen Âge. Comme cela fut le cas pour bien d’autres manufactures, son sort évolue sous le régime français lorsque l’industrie est reprise par Piat François Joseph Lefebvre, qui rénove l’entreprise à partir de 1779. Après l’annexion, la manufacture emploie près de 800 ouvriers. Profitant de la vente des biens nationaux, Lefebvre achète l’ancien couvent des Clarisses sur lequel il fait édifier un nouveau bâtiment. Parmi les clients les plus prestigieux figure l’empereur lui-même, qui commande de nombreuses tapisseries entre 1809 et 1812 parmi lesquelles le « tapis de la Légion d’honneur ou des seize cohortes », destiné au château de Fontainebleau et aujourd’hui conservé au

Musée de la Légion d’honneur à Paris 3. L’usine emploie alors près de 5000 ouvriers ! Réalisée à la demande de la Société Piat-Lefebvre, la façade de la fabrique présentait un caractère somptueux inhabituel pour ce genre de bâtiment. Elle fut édifiée entre 1809 et 1812 sur les plans de l’architecte du Grand-Hornu Bruno Renard, au moment où l’entreprise connaissait sa plus grande prospérité. Disparue à la fin du XIXe siècle, il n’en reste plus aujourd’hui qu’une des quatre entrées néoclassiques d’origine. Enduite de peinture, elle présente des murs à refends profonds et crossettes sous soubassement de pierre. Au centre, un portail, dont le cintre est frappé d’une clé triple, repose sur des impostes en épais bandeau. Sous la corniche figure une frise décorée de rosaces et de triglyphes. Verviers, l’usine Simonis L’ancienne usine textile Simonis est résolument un des plus beaux témoins de l’architecture industrielle du début du XIXe siècle conservé en Wallonie. Situé le long de la Vesdre, le bâtiment est le plus ancien témoin d’une époque où bon 3

Les dessins préparatoires à la réalisation de cette tapisserie sont visibles au musée des arts décoratifs de Tournai. Le musée conserve également des porcelaines à l’effigie de Napoléon.

L’ancienne usine Simonis à Verviers. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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nombre de ces usines s’implantaient à cet endroit. L’entreprise, une foulerie, appartient à la famille Dauchap au XVIIIe siècle avant d’être successivement vendue à Jean-François Biolley en 1760 puis Jean-François Simonis le 23 avril 1801. Ces deux grandes familles d’industriels verviétois provoquent le déclic qui fera de Verviers une des plus importantes villes industrielles d’Europe au XIXe siècle. Dans les dernières années du siècle précédent, Biolley et Simonis désirent acheter des machines textiles anglaises mais les droits d’invention exorbitants en empêchaient l’exportation. William Cockerill enfreint cette défense et débarque avec ses deux fils sur le continent, en Russie puis en Allemagne. Il arrive à Verviers en 1799 et conclut un contrat d’exclusivité avec les familles Simonis et Biolley qui se voient réserver le monopole par le mécanicien anglais. La production explose instantanément : les machines textiles permettent en effet de remplacer deux cents bras et connaissent un important succès. L’édifice le plus ancien des usines Simonis est érigé à la même époque, dans les premières années du XIXe siècle. De plan rectangulaire, l’usine compte sept niveaux, dont deux sous le toit, de dix-huit travées de long et trois travées de large. La façade ouest est percée au rez-de-chaussée de trois portes-fenêtres cintrées, et de baies à linteaux droits aux

étages. Le long de la rue de Limbourg, la façade principale comporte des baies à linteaux droits et trois hautes portes fenêtres à arcade en plein cintre d’une hauteur de deux niveaux à l’extrémité droite. La bâtisse, de style néoclassique, diffère des bâtiments industriels qui sont construits par la suite en Wallonie. Avant le véritable départ de la Révolution industrielle, l’architecture dans le domaine est encore très influencée par l’architecture traditionnelle régionale dont on retrouve toutes les caractéristiques ici : utilisation mêlée de brique et pierre calcaire, baies à linteaux droits, toitures mansardées la plupart du temps percées de lucarnes. L’ensemble a depuis été brillamment restauré et réaffecté en logements et constitue un bel exemple de réhabilitation d’un bâtiment industriel. Verviers, l’ancienne usine Bettonville Située dans le quartier industriel de Hodimont, l’ancienne usine Bettonville ou Dethier est aujourd’hui reconvertie en centre touristique de la laine et de la mode, musée de l’histoire de l’industrie textile à Verviers. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, une entreprise s’installe à cet endroit sous l’impulsion de l’industriel verviétois Pierre-Jean-Baptiste Dethier ; la propriété est agrandie par son fils en 1769 mais

L’ancienne usine Bettonville à Verviers, siège du centre touristique de la laine et de la mode. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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l’exploitation des Dethier cesse en 1813. L’usine est ensuite utilisée comme filature de coton jusqu’à sa vente en 1855 à Lambert Bettonville qui la transforme en fabrique de draps et filature de laine. L’usine cesse ses activités dans les années 1970. Le remarquable site conservé aujourd’hui se compose du bâtiment industriel à proprement parler, de la maison de maître et de trois autres maisons de style Louis XIII, le tout disposé en forme de U. L’habitation du fabricant a été érigée en 1802 par l’architecte liégeois Beyne en style néoclassique ; elle est assez comparable à l’hôtel de Biolley 4 édifié à la même époque. La façade compte trois niveaux de neuf travées dont les trois centrales sont surmontées d’un fronton triangulaire. La toiture est mansardée et percée de lucarnes. L’exceptionnel bâtiment industriel date de la même époque. Construit selon 4

Voir l’article sur l’hôtel de Biolley dans le chapitre consacré aux principales réalisations architecturales sous le régime français.

les plans du même architecte entre 1804 et 1806 à l’emplacement de l’ancienne usine, il fait partie du grand projet d’agrandissement opéré sous l’Empire. Édifiée sur trois niveaux, l’usine comporte deux ailes en L qui viennent s’accoler à la demeure patronale. La petite aile compte neuf travées alors que la grande aile en compte dix-sept. L’ensemble présente une succession de belles portes vitrées au rez-de-chaussée et des baies à linteau droit aux étages. Sous la corniche, la hauteur de l’édifice atteint 11 m, le tout couvert d’une toiture à la Mansart percée de lucarnes à fronton triangulaire. D’autres bâtiments se sont ajoutés à l’ensemble dans les décennies suivantes mais aucun n’a été préservé. Verviers, la cité des Grandes Rames La cité des Grandes Rames, construite en 1808, est traditionnellement considérée comme la plus ancienne cité ouvrière d’Europe. C’est à nouveau aux familles Biolley et Simonis que l’on doit la construction de ces bâtiments où s’entasseront des

La cité des Grandes Rames à Verviers © IPW

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générations d’ouvriers. Situés à la limite du territoire municipal, ils sont proches des usines et fabriques qui s’implantent en nombre au début de cette période prospère. Cette rapide explosion industrielle provoque rapidement des problèmes démographiques et dès lors de logement qui se posent d’ailleurs tout au long du XIXe siècle. La construction de la première maison débute sur le site le 25 avril 1808 sous la direction de l’architecte Henri Douha. L’édifice doit être fonctionnel et bon marché, il est dénué d’ornements, d’esthétisme et de variété. Cinq autres maisons identiques sont construites par la suite et habitables dès août 1809 ; elles précèdent quatre autres habitations qui complètent l’ensemble après 1810. Mis à part les disgracieux escaliers extérieurs en béton ajoutés lors de sa restauration, le site est encore aujourd’hui l’héritier de cette époque et a conservé son aspect d’origine : dix maisons identiques et mitoyennes formant deux gros blocs parallèles. Chaque maison est élevée en brique rouge et calcaire sur quatre niveaux de cinq travées et couverte d’un long toit brisé. Chaque étage est divisé en quatre pièces organisées autour d’un couloir central. Chaque maison possède une cave, une cuisine et un grenier aménagé dans lequel sont installés, au XIXe siècle, des métiers à tisser. Chaque chambre abrite alors un ménage de quatre à six personnes pour une superficie de 23 m² ! L’eau courante n’est installée qu’en 1876 et le raccordement à l’égout en 1883… Après avoir été désaffectés, inoccupés et menacés de démolition, les bâtiments sont vendus par le CPAS de Verviers à une société de logements sociaux en 1991 qui procède à une rénovation de l’ensemble et son aménagement en habitations. Le crucifix, les arbres et le grillage présents contre un des pignons de l’ensemble ont été classés en 1983. Les maisons sont pour leur part reprises à l’inventaire du patrimoine monumental de Belgique.

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Sur les traces de la Wallonie française MONUMENTS ET SITES DIVERS LIÉS À LA PÉRIODE FRANÇAISE



MONUMENTS ET SITES DIVERS LIÉS À LA PÉRIODE FR ANÇAISE

Bornes, frontières et bâtiments de l’octroi Ath/Ghislenghien, l’ancienne barrière de la chaussée Située sur la chaussée de Bruxelles, l’ancienne barrière de la chaussée était autrefois une exploitation agricole, construite en 1799 comme indiqué sur la porte du logis. L’ensemble est constitué de plusieurs bâtiments construits en brique et calcaire sous de hautes bâtières de tuiles. Après son édification, le bâtiment sert aussi de poste frontière et de douane sous le régime français. Havelange/Bouillon, le lieu-dit « La Pyramide » À l’est d’Havelange se situe le petit hameau de Bouillon. Au lieu-dit « La Pyramide » se trouve un étonnant monument isolé sur un sommet dénudé au sud du hameau. Érigé en pierre bleue dans le premier quart du XIXe siècle, il se compose d’un haut piédestal en grand appareil surmonté d’un obélisque élancé à bossages et orné de guirlandes de style

L’ancienne barrière de la chaussée à Ghislenghien. Photo de 1950 © Bruxelles, KIK-IRPA

L’imposant obélisque d’Havelange, héritier des travaux de triangulation cartographique sous l’Empire. Photo J. Massaux © SPWPatrimoine 101


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Empire dans sa partie supérieure. Le tout était vraisemblablement surmonté d’une terminaison sphérique à l’origine, aujourd’hui disparue. Ce monument quelque peu original est un des rares héritiers de la campagne de triangulation cartographique de la région du Rhin et du nord de la Belgique, réalisée entre 1801 et 1813 par le colonel Tranchot à la demande de Napoléon 1. Sambreville/Moignelée, la maison de l’octroi Située rue de Fleurus, une petite maison basse en briques autrefois chaulées construite dans les premières années du XIXe siècle, servait autrefois d’octroi.

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Voir ci-dessous l’article consacré à la borne Tranchot à Waimes.

L’octroi Aboli le 19 février 1791 par l’Assemblée nationale, l’octroi est une taxe créée sous l’Ancien Régime dont devait s’acquitter tout qui souhaitait entrer dans les murs d’une ville. Les finances de l’État sont toutefois toujours aussi désastreuses après la Révolution et de nombreuses villes accumulent rapidement un déficit important. L’octroi est donc progressivement rétabli sous le Directoire pour subvenir aux besoins des communes, des hôpitaux et des hospices. Il est rétabli par le gouvernement par les lois des 18 octobre et 1er décembre 1798. Cette taxe locale frappe les boissons, le bétail, le bois, le fourrage et les produits alimentaires. Malgré le fait que l’octroi constitue la source principale de revenus de la municipalité, il est extrêmement impopulaire. La mesure se poursuit pendant quelques décennies et est supprimée en Belgique en 1860. En France, l’octroi ne disparaît officiellement qu’en 1948. Seneffe/Arquennes, la ferme de la petite barrière Ce petit ensemble en U de la seconde moitié du XVIIIe siècle sert d’octroi sous le régime français.

La maison de l’octroi à Moignelée. Photo F. Dor © SPW-Patrimoine

La ferme de la petite barrière à Arquennes. Photo F. Dor © SPW-Patrimoine

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Monuments et sites divers liés à la période française

Verviers, l’octroi du boulevard des Gérardchamps En juillet 1803, la municipalité de Verviers décide d’appliquer la loi du 19 mai 1802 qui lui permet d’établir un bureau public de pesage, mesurage et jaugeage, autrement dit un bureau d’octroi. L’autorisation officielle parvient à la mairie le 21 avril 1804 et le système est inauguré le 21 mai suivant. La ville conclut également un partenariat avec la municipalité toute proche de Hodimont afin de mettre la perception des taxes en commun. Sous le régime français, six bureaux d’octroi sont édifiés sur le territoire des deux communes. Le bureau central se trouve dans le couvent des Sépulcrines, qui sera ensuite transformé en collège impérial en 1807, lequel donnera son nom à la rue du Collège et dont ne subsiste aujourd’hui que la chapelle Saint-Lambert. Actuellement, deux témoins subsistent dont un, situé dans la rue de la Grappe, a été érigé sous le régime hollandais. Le second, établi à la limite de Verviers-Centre, est un petit édifice néoclassique édifié au début du XIXe siècle. Élevé en brique peinte et calcaire, il est caractérisé par son péristyle formé de trois arcades cintrées retombant sur des colonnes et des pilastres d’ordre toscan. L’édifice, déplacé de quelques dizaines de mètres en 1969, est un bel exemple de style Empire dans nos régions.

L’octroi du boulevard des Gérardchamps à Verviers. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Viroinval/Le Mesnil, les bornes du cadastre Dans les bois de Le Mesnil se trouvent plusieurs bornes de cadastre plantées par les Français à partir de la première occupation de nos régions. Elles constituent de nos jours un des très rares témoins des entreprises de bornages réalisées sous le régime français. On y trouve une série de quatorze petites bornes en pierre de taille de 30 à 40 cm de hauteur environ plantées entre 1793 et 1806. Waimes, la borne Tranchot Après la paix de Lunéville de 1801, les régions situées à l’ouest du Rhin deviennent françaises. Napoléon donne ensuite rapidement l’ordre d’effectuer des relevés des territoires situés sur la rive gauche du fleuve dans le but de réaliser une nouvelle cartographie. L’entreprise est confiée à l’astronome Joseph Tranchot, colonel dans le corps des ingénieurs géographes. Son bureau est établi à Aix-la-Chapelle entre 1801 et 1807, à Trèves ensuite jusqu’à la chute du régime. Au cours de leurs douze années de travail, les ingénieurs-géographes font des relevés topographiques des trois quarts du territoire initialement prévu. Le site de la Baraque Michel conserve une trace de cette campagne. Proche du signal de Botrange, la « pyramide Tranchot » marque un point géodésique choisi par

La pyramide Tranchot sur le site de la baraque Michel. Photo de 1935 © Bruxelles, KIK-IRPA

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l’astronome pour l’établissement de sa carte en 1801. La borne, en forme de pyramide tronquée, est taillée dans le calcaire et porte, sur une de ses faces, l’inscription « Botrange / A / Tranchot » au-dessus de laquelle sont gravés un triangle et trois cercles imbriqués les uns dans les autres. Wavre, la ferme de la barrière Située au no 246 de la chaussée de Bruxelles, la ferme de la Barrière est un beau bâtiment clôturé daté de 1775 et érigé sur un niveau et demi de brique et grès. Le rez-de-chaussée est éclairé de hautes fenêtres à linteau bombé. Le bâtiment sert d’octroi sous le régime français.

Monuments liés à des personnages historiques de la période française Ans, le monument Hubert Goffin Un monument situé sur la place Nicolaï à Ans témoigne de la vie des mineurs dans la région liégeoise au début du XIXe siècle. Sous l’Empire, 600 houillères occupent près de 70000 ouvriers dans les départements de l’Ourthe, de la Meuse inférieure, de Sambre-et-Meuse et de Jemappes. Les mines wallonnes assurent l’approvisionnement de 30 % du marché français grâce à l’utilisation d’innovations techniques et à l’introduction chez nous de la législation minière française entre 1791 et 1810. Cette belle réussite a toutefois ses

Hubert Goffin et son fils dans la mine, gravure de Léonard Jehotte, collections du cabinet des estampes et des dessins de la ville de Liège © Bruxelles, KIK-IRPA

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revers ; les ouvriers travaillent dans des conditions dangereuses et sans véritables mesures de sécurité. Pendant la période napoléonienne, plus de nonante-sept accidents miniers surviennent dans la région liégeoise. On dénombre 27 morts dans la fosse de Marihaye en 1802 ; 18 personnes décèdent suite à un coup de grisou à Sclessin en 1805 ; 9 morts dans la mine du Vieux Horloz à Saint-Nicolas le 11 novembre 1806 ; 67 mineurs périssent asphyxiés dans la même houillère le 10 janvier 1812 ; 25 suite à une rupture de câble en 1812 dans la fosse du Hardy à Ans. Voilà ici quelques exemples parmi d’autres de catastrophes minières sous l’Empire. Parmi celles-ci, une retient particulièrement l’attention et reste de nos jours très présente dans l’historiographie. Hubert Goffin descend d’une famille de mineurs qui exploitent la houille en région liégeoise depuis la fin du XVIe siècle. Né en 1771, il devient sous le régime français maître mineur à la mine du Beaujonc, sur le territoire d’Ans. Le 28 février 1812, Hubert Goffin et son fils Mathieu travaillent dans la mine lorsque survient un accident. Une digue rompue en surface provoque l’inondation de la bure : 30000 m³ d’eau dévalent dans le fond du puits et emprisonnent 127 mineurs dans un espace réduit pendant cinq jours. Goffin et son fils organisent les secours, refusent de quitter leurs compagnons et aident les mineurs à évacuer la mine dans un panier avant que l’eau ne les empêche de sortir. Le 4 mars 1812, les sauveteurs parviennent jusqu’à eux et ramènent les ouvriers à la surface. Goffin et son fils remontent les derniers.

Les événements de la mine du Beaujonc et la personnalité courageuse de Goffin plaisent particulièrement à l’empereur qui décide de récompenser le courage du contremaître en lui décernant la croix de chevalier de la Légion d’honneur dès le 12 mars 1812. Hubert Goffin se voit également octroyer une pension à vie de 600 francs et l’on permet à Mathieu d’entamer des études aux frais de l’État au lycée impérial de Liège. Hubert Goffin est le seul et unique ouvrier à recevoir la prestigieuse récompense sous le premier Empire ! Le courage des Goffin inspire également les artistes : un tableau représentant la remise de la Légion d’honneur par le préfet de l’Ourthe Micoud d’Umons est conservé à l’hôtel de ville de Liège. La peinture, réalisée par le peintre J. C. Bordier du Bignon est exaltante, pleine d’emphase et témoigne bien du cérémonial napoléonien. Le préfet du département de l’Ourthe, conscient des nombreux accidents et des conditions de travail des mineurs, pousse la réflexion plus loin. Dès 1811, il avait fait part de ses inquiétudes à Paris, sans succès. Suite à la catastrophe de la mine du Beaujonc, Micoud d’Umons présente le 2 juillet 1812 un projet de caisse permanente de secours. Napoléon signe le décret le 26 mai 1813 et ouvre la voie à une (maigre) amélioration du sort des ouvriers. La première réunion du conseil d’administration de la « Caisse de prévoyance en faveur des ouvriers houilleurs du département de l’Ourthe » se déroule à l’hôtel de ville de Liège le 15 juillet 1813. Cette caisse fonctionne normalement jusqu’à la chute de Napoléon et la désorganisation des

Remise de la croix de la Légion d’honneur à Hubert Goffin, tableau de Jacques Bordier du Bignon, propriété du musée des Beaux-Arts de Liège, en dépôt à l’hôtel de ville © Bruxelles, KIK-IRPA

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services préfectoraux en septembre-octobre 1814. Guillaume d’Orange ne manifeste par la suite aucun intérêt pour la question… Quant à Hubert Goffin, appelé pour sa compétence dans la houillère du bois de Saint-Gilles à Sclessin, il périt dans un incendie de la galerie le 8 juillet 1821. Un siècle après les événements, la commune d’Ans a souhaité commémorer le souvenir du héros du pays et lui a élevé un monument sur la place communale. Œuvre du grand sculpteur liégeois Oscar Berchmans et inaugurée en 1912, elle représente Hubert Goffin prenant son fils sous le bras. Tous deux portent leurs habits de mineurs et regardent vers le ciel. Sur le haut socle figurent les noms des deux mineurs et les dates « 1812-1912 ». À l’arrière, une plaque est gravée des noms des mineurs originaires de la localité ayant péri dans la catastrophe. Une nouvelle plaque, installée le 4 mars 2012 à l’occasion du bicentenaire de la catastrophe, a été placée à l’avant du monument en présence des autorités provinciales et communales et du consul général de France à Bruxelles.

Le monument Goffin à Ans © IPW

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Binche, la mémoire des frères Boussart La ville de Binche conserve plusieurs souvenirs liés aux frères Boussart, militaires qui se sont illustrés sous l’Empire. AndréJoseph Boussart (1758-1813) entame sa carrière en qualité d’officier dans les troupes autrichiennes avant de prendre le parti des troupes belges en 1789 et de passer à la France en 1791. Il fait la campagne de 1792 vers la Belgique puis fait partie de l’armée d’expédition d’Égypte en 1797. Sous l’Empire, il participe aux campagnes de Prusse en 1806 et d’Espagne en 18101811. Promu baron d’Empire en 1809, il est nommé général de division le 16 mars 1812. Il meurt le 11 août 1813 à Bagnèresde-Bigorre. Son frère cadet, Félix Boussart (1771-1814), est lui aussi volontaire parmi les troupes belges de la Révolution et passe également à l’armée française en 1791. Il fait les campagnes de l’armée du Nord en 1792-1793, sous le commandement de son aîné. Suivant à nouveau son frère, il participe à la campagne d’Égypte. Il est fait prisonnier de guerre lors de la capitulation de Dresde le 11 novembre 1813. Blessé, il est soigné dans la maison des invalides de Pest où il décède le 23 janvier 1814. Le monument à l’indépendance, situé en face de la gare, dans le square Eugène Derbaix, est en partie un hommage aux frères Boussart. Conçu par l’architecte Dufour et le sculpteur De Beule en 1931, il rend hommage aux révolutionnaires de 1789, aux volontaires de 1830, ainsi qu’aux soldats et déportés de la Première Guerre mondiale. Le personnage représentant la révolution de 1789 porte un uniforme que l’on pourrait comparer à celui que devait porter André-Joseph Boussart à l’époque bien que l’on ne puisse l’affirmer. Le sculpteur s’en est peutêtre inspiré. Un autre monument, cette fois directement dédié aux deux frères, se trouve dans le parc communal de Binche. Cette haute stèle de pierre bleue comporte des inscriptions sur ses deux faces. Un buste en bas-relief d’André-Joseph Boussart, entouré d’une couronne de laurier et du monogramme de Napoléon, se trouve sur une face, au-dessus de l’inscription suivante : « Au général André Boussart, baron de l’Empire, commandeur de la Légion d’honneur, 1758-1813 ».

Le monument à l’indépendance devant la gare de Binche. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine


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De l’autre côté se trouve l’aigle impériale et le même monogramme, ainsi que l’inscription suivante : « Au lieutenant-colonel Félix Boussart, membre de la Légion d’honneur, 17711813, et à ses frères d’armes binchois ». Ce monument indique que le cadet est décédé en 1813. Son acte de décès de la maison des invalides de Pest indique toutefois qu’il est décédé dans les premiers jours de 1814. Enfin, un médaillon en fonte d’une quarantaine de centimètres représentant André-Joseph Boussart est conservé à l’hôtel de ville de Binche. Chimay, les souvenirs de Thérésia Cabarrus Thérésia Cabarrus est une des figures de la période française à Chimay. Née à Madrid, elle est la fille d’un riche financier qui fonda la banque d’Espagne. Divorcée en 1793, elle fuit la Révolution et part s’installer à Bordeaux. Elle épouse à cette époque en secondes noces Jean-Lambert Tallien, grand révolutionnaire et journaliste français, conventionnel et membre du conseil des Cinq-Cents. Grâce à lui, elle échappe à la guillotine. Divorcée à nouveau en 1802, elle épouse ensuite François de Riquet, comte de Caraman et prince de Chimay, le 3 août 1805. Elle était surnommée alors « Notre-Dame de Thermidor ».

La pierre tombale de Theresia Cabarrus dans le chœur de la collégiale de Chimay. Photo de 1977 © Bruxelles, KIK-IRPA

Sur la Grand-Place, à proximité de la collégiale, se trouve la statue de la princesse de Chimay. Elle repose dans la crypte de la collégiale Saints-Pierre-et-Paul ; le monument funéraire de son époux se trouve dans le chœur de l’église. Sur celuici, son épitaphe indique « À la mémoire de Marie-ThérèseIgnace, comtesse de Cabarrus, princesse de Chimay, née à Madrid le 31 juillet 1773, décédée à Chimay le 15 janvier 1835 ». Le château de Chimay conserve lui aussi des témoins de cette époque : un portrait de Tallien, un portrait d’Émilie Pellapra, fille naturelle de Napoléon, ainsi que la robe et le bonnet de baptême du roi de Rome, fils de Napoléon. Huy/Ben-Ahin, le château de l’abbaye de Solières Le château dit de « l’abbaye » de Solières trouve son origine en 1214 lorsqu’il est le siège d’une confrérie mixte des ordres de saint Augustin de 1230 à 1261 et de saint Bernard de 1230 à la fin de l’Ancien Régime. Le château actuel a été construit à l’emplacement de l’aile est du cloître et remanié en bâtiment conventuel dans la seconde moitié du XVIIe siècle. L’édifice redevient un château après la suppression du couvent en 1793 et devient en 1807 possession du receveur général du département de l’Ourthe Charles Desoer, également propriétaire du château de Kinkempois près de Liège. Il s’agit d’une construction classique d’une grande symétrie présentant une façade de deux niveaux de hauteur dégressive de treize travées cantonnées de pilastres à refends. Les trois travées centrales sont surmontées d’un fronton triangulaire aux armes des Desoer. L’imposante toiture comporte en son centre un pavillon à la Mansart surmonté d’un campanile octogonal et d’une toiture en dôme agrémentée d’une girouette.

L’ancienne abbaye de Solières à Ben-Ahin © IPW

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Receveur général Sous l’Ancien régime, agent chargé de percevoir la taille (impôt direct sur les biens fonciers) et la capitation. La fonction est supprimée en 1790. À partir de septembre 1798, chaque chef-lieu de département se voit doté d’un receveur général dont la mission est d’administrer les finances. Liège, le seigneur d’Amay Située dans le quartier du Carré, la maison dite du Seigneur d’Amay est une luxueuse demeure patricienne construite dans le premier quart du XVIe siècle, ce qui en fait une des plus anciennes constructions civiles de Liège. Elle comporte toutes les caractéristiques de l’architecture liégeoise de l’époque : utilisation de brique et de pierre calcaire, baies à croisées, linteaux en accolades, soubassement de calcaire, jambages chainés. Actuellement en attente d’une réaffectation, le bâtiment est la propriété d’une personnalité de l’Empire pendant la période française. Né à Paris le 10 janvier 1753, LouisPierre Saint-Martin est d’abord avocat avant d’entrer dans les ordres. Une fois devenu prêtre, il milite activement au sein des instances de la franc-maçonnerie ; c’est ainsi qu’en 1789, il s’ouvre aux principes de la Révolution sans pour autant renier ses sentiments religieux. Sous la République, il retrouve son

Le cloître de l’hospice d’Harscamp à Namur. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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métier d’origine et est élu au tribunal de cassation en 1797. Il est ensuite nommé membre du tribunal de révision de Trèves, préfecture du nouveau département de la Sarre. Après l’instauration de l’Empire, Napoléon réorganise le système judiciaire. Un décret impérial du 23 janvier 1805 détache le département de la Roer de la circonscription d’appel de Trèves pour la transférer à Liège. Saint-Martin et huit autres juges quittent ainsi la Sarre pour l’Ourthe. Arrivé en cité ardente, il prend en location la maison dite du Seigneur d’Amay ; il l’habite seul avec un domestique et une cuisinière. En 1810, il acquiert définitivement la bâtisse et poursuit ses activités jusqu’à la chute de l’Empire. Un arrêté royal du 29 octobre 1816 le rétablit dans ses anciennes fonctions de conseiller à la cour de Liège, devenue entre temps cour supérieure de justice. C’est ainsi que Saint-Martin achève sa carrière sous le régime hollandais. Il décède dans sa demeure de la rue d’Amay le 14 janvier 1819. Namur, l’ancien hôtel d’Harscamp L’actuel hospice d’Harscamp abritait sous l’Ancien Régime le couvent des Fransiscains, installés à Namur à partir de 1224 et devenus Récollets en 1637. Supprimé après la Révolution, l’établissement est vendu en 1807 à la commission des Hospices de Namur, pour y réaliser le vœu d’Isabelle d’Harscamp. Situés à côté de l’imposante église Notre-Dame, les bâtiments conventuels ont en grande partie été démolis en


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1974. De nos jours subsiste une façade néoclassique du début du XIXe siècle, érigée en brique et pierre bleue sur cinq travées de deux niveaux. Au centre se trouve un petit cloître en quadrilatère construit à la demande des Récollets à la fin du XVIIIe siècle. Chacun de ses côtés est constitué de sept travées d’arcades en plein cintre. Parallèlement à la Meuse est également conservée une aile de la première moitié du XVIIIe siècle de vingt-sept travées. En 1789, en plein troubles révolutionnaires à Paris, le couvent accueille pendant quelques jours le comte d’Artois, frère de Louis XVI et futur Charles X, alors en fuite. En août 1792, c’est également à cet endroit qu’est brièvement retenu La Fayette, arrêté peu de temps auparavant à Rochefort 2. Nivelles, la statue de Louis Seutin Dans le petit square situé devant la gare figure une statue représentant Louis Seutin. Né à Nivelles le 19 octobre 1793, il entame sous l’Empire des études de médecine à l’école de 2

Voir la notice consacrée au monument La Fayette à Rochefort dans le chapitre consacré aux deux occupations françaises.

l’hôpital Saint-Pierre à Bruxelles. Rattrapé par la conscription, il est enrôlé comme chirurgien-aide-major dans les armées napoléoniennes et pratique son métier en 1813 et 1814 sous les ordres de Dominique Larrey, baron d’Empire et chirurgien en chef de la Grande Armée. Il est alors chargé de soigner les blessés de diverses batailles menées en Allemagne. Licencié du service militaire après la chute de l’Empire, il rentre en Belgique en 1814 pour y poursuivre sa carrière. L’année suivante, pendant la bataille de Waterloo, il travaille pour les forces hollando-belges dans une clinique improvisée non loin du champ de bataille. Il y détient le record d’amputation sur une journée, avec pas moins de 32 opérations du genre réalisées à partir de 11 heures du matin ! Il devient par la suite médecin en chef de l’armée belge en 1831, médecin du roi en 1834, professeur de clinique opératoire à l’université de Bruxelles, sénateur de 1853 à 1862 et est fait baron par Léopold Ier. Il décède à Bruxelles le 29 janvier 1862. Le monument, inauguré le 21 juin 1903 par le prince Albert, est l’œuvre du sculpteur Jean-Joseph Hérain. On y trouve un buste en bronze du chirurgien portant un costume civil et une toge académique sur son épaule droite. Il est situé au sommet d’une haute stèle de pierre bleue sur laquelle se trouvent les armoiries de la ville de Nivelles et l’inscription « Au baron Seutin, chirurgien, sa ville natale ». Au pied du monument, une statue de femme lourdement drapée en bronze personnifie la Science émergeant de la nuit. Le monument contient le cœur de Seutin, légué à la ville de Nivelles par le chirurgien dans son testament. La conscription La conscription est synonyme de service militaire obligatoire sous la Révolution. Le principe est proposé pour tous les Français par l’Assemblée nationale constituante le 12 septembre 1789, mais refusé. C’est Jourdan qui fait adopter le principe par le Directoire le 5 septembre 1798 pour les hommes âgés de 20 à 25 ans. Les conscrits étaient divisés en cinq classes selon leur âge ; les plus jeunes étaient appelés en premier lorsque le besoin de troupes « fraîches » se faisait sentir. Les hommes mariés et ceux souffrant d’une déficience physique étaient exemptés. Les plus riches pouvaient aussi y échapper, moyennant finance, en payant un remplaçant par exemple. La loi du 26 août 1805 fixe les modalités de la conscription pour l’Empire, sans cesse en manque de soldats pour mener ses incessantes campagnes à travers l’Europe. Ce principe rend le nouveau régime impopulaire et ouvre la voie de nombreuses dérives : corruption des fonctionnaires, fausses pièces d’identité, mariages arrangés, insoumission, désertion…

Le monument en hommage à Louis Seutin à Nivelles © J. Tordoir

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Seraing, le château Cockerill Le château de Seraing est une des résidences préférées des princes-évêques de Liège depuis le Haut Moyen Âge jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. D’abord simple maison de plaisance située en bord de Meuse, détruite puis reconstruite, la demeure devient un luxueux château au XVIIIe siècle, richement décoré et entouré de splendides jardins. Aujourd’hui dépourvu de bon nombre de ses dépendances et perdu dans la végétation industrielle serésienne, l’ensemble témoigne des campagnes d’édification menées par les princes-évêques Georges-Louis de Berghes, JeanThéodore de Bavière, Charles-Nicolas d’Oultremont et François-Charles de Velbrück. L’édifice présente ainsi une grande unité de style : les divers corps ont les mêmes proportions, les briques rouges s’allient aux pierres de taille et les façades présentent une architecture classique des plus élégantes. La fuite du dernier prince-évêque et les événements révolutionnaires bouleversent l’histoire de la demeure, toutefois préservée car dotée de grands espaces. Les blasons princiers des frontons sont martelés puis détruits à cette époque. Après la période française, le château fut acheté par les frères Cockerill en 1817.

La cour intérieure du château Cockerill à Seraing © IPW

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Pillé et mis à sac à la Révolution par les Liégeois tout comme le fut le palais des princes-évêques, le château attire l’attention des Français dès leur arrivée à Liège après la bataille de Fleurus. L’édifice est réquisitionné, mis à la disposition du ministre de la Guerre et transformé en hôpital militaire entre 1794 et 1797. Le château prend à l’époque le nom d’« hôpital Égalité ». L’organisation de cette institution dépend donc du ministère de la Guerre et son personnel est composé d’officiers de santé et d’infirmiers. Les frais engendrés par l’hôpital sont à la charge du gouvernement. Après la suppression de l’hôpital, le château reste abandonné quelques années et se dégrade rapidement. La Constitution de l’an VIII, adoptée le 24 décembre 1799, procure de nouvelles destinées à l’ancienne demeure princière. Ce nouvel ensemble législatif crée le Sénat conservateur qui compte 24 membres. Le 1er janvier 1803, le Premier Consul crée les sénatoreries qui correspondent aux arrondissements d’appel. Les titulaires sont nommés à vie et sont considérés comme des « super-préfets » chargés de missions d’importance dans plusieurs départements. Chaque sénateur est doté d’une habitation et doit résider au moins trois mois dans sa sénatorerie. Par arrêté gouvernemental du


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5 septembre, le château de Seraing est affecté comme maison d’habitation au sénateur de Liège, non encore nommé. Le 28 septembre 1803, Bonaparte offre la sénatorerie de Liège à Gaspard Monge, mathématicien, créateur de la géométrie descriptive et un des fondateurs de l’école polytechnique de Paris en 1795. Monge et sa famille ne s’installent pourtant jamais dans leur résidence, trop délabrée à leur goût et constituant un cadeau empoisonné. Le château nécessite en effet de lourdes campagnes de remise en état et le sénateur refuse d’en assumer les frais. Après plusieurs années de doute, l’administration départementale de l’Ourthe marque son intérêt pour le rachat du château de Seraing. Le décret impérial du 29 août 1813 affecte la demeure et ses dépendances au préfet qui doit se charger d’y installer un dépôt de mendicité pour le département de l’Ourthe. En décembre de la même année, les armées coalisées forcent les frontières de la France ; le château ne connut jamais cette nouvelle affectation. Lors des tous derniers jours du régime, le château est occupé militairement pendant les campagnes de 1814-1815. Il sert entre autres de lieu de cantonnement aux troupes prussiennes et de magasin à poudre.

Tournai, l’ancienne auberge du roi de Rome L’édifice situé au no 21 de la rue des Maux était autrefois appelé « auberge du roi de Rome », en hommage au fils et héritier de Napoléon. L’édifice a aujourd’hui été transformé en habitation et un commerce s’est installé au rez-de-chaussée. Toutefois, quelques éléments de façade rappellent encore son ancienne appellation. Le rez-de-chaussée est décoré de part et d’autres de colonnes surmontées d’une couronne de lauriers. Le balcon en fer forgé du premier étage est également décoré d’une couronne de lauriers et de lances rappelant les fonctions militaires. Enfin, l’aigle impériale se trouve toujours au centre de l’édifice, entre le premier et le second étage.

Monuments anciens dont la vocation a évolué sous le régime français Dinant, l’ancien couvent des Capucins Situés le long de la rive gauche de la Meuse, les bâtiments de l’ancien couvent des Capucins ont été érigés à partir de 1613, année de l’installation de l’ordre à Dinant. L’établissement se compose d’un quadrilatère élevé en brique et calcaire sous

L’ancien couvent des Capucins à Dinant © Bruxelles, KIK-IRPA

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bâtière d’ardoise et complété au nord et à l’ouest de nouveaux bâtiments dans le dernier quart du XIXe siècle. Sous le régime français, le couvent est supprimé puis nationalisé en 1797 et transformé en hospice civil et orphelinat vers 1811. Gembloux, l’ancienne abbaye Actuelle faculté agronomique dépendant de l’Université de Liège et rebaptisée Gembloux Agro-Bio Tech, l’ancienne abbaye bénédictine de Gembloux se situe sur un éperon rocheux

Vue de l’entrée de l’ancien haras au sein de l’abbaye de Gembloux. © Bruxelles, KIK-IRPA

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dominant la vallée de l’Orneau. Reconstruite en style classique par l’architecte Laurent-Benoît Dewez dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, elle présente encore aujourd’hui un riche patrimoine immobilier. L’ensemble est composé d’un vaste quartier abbatial avec une cour d’honneur, de l’ancien quartier des moines, d’une ferme, de l’église abbatiale et de son cloître. Comme bon nombre de ses consœurs, l’abbaye est supprimée en 1795 et ses bâtiments mis en vente en 1797. L’abbaye, l’église et la ferme sont acquises par le français JeanBaptiste Paulée qui, sous l’Empire, transforme les bâtiments


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en haras dans le but d’y élever une race ardennaise. Deux grands médaillons représentant des chevaux et situés de part et d’autre de la porte principale, en sont les seuls vestiges actuellement.

Napoléon en Wallonie Dison/Andrimont, le pont Napoléon Construit en 1803 sur le chemin du vieux moulin, à la limite entre Bilstain et Andrimont, un petit pont porte le nom de Napoléon. Flémalle, le château de Chokier Situé à l’aplomb d’un rocher dominant la Meuse, le château de Chokier est une des places fortes liégeoises au Moyen Âge. Déjà cité au XIIIe siècle, il passe entre diverses mains sous l’Ancien Régime avant d’échoir à la famille de Berlo entre 1639 et 1800. L’édifice actuel a été construit dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et a perdu son aspect de place forte pour celui de demeure de plaisance. Le château est construit sur un plan en U ouvert au nord vers des jardins potagers et des terrasses. Du côté de l’aile ouest subsiste une tour circulaire datant de la fin du Moyen Âge. La façade côté Meuse

est la plus impressionnante ; constituée de sept travées, elle est surmontée d’un fronton triangulaire aux armes de la famille de Berlo, sculptées en 1788. Napoléon y fait un bref passage alors qu’il se rend dans le département de l’Ourthe. Le château de Chokier, comme le château de Flémalle-Grande malheureusement disparu, appartenait au général comte Louis-Henri Loison (17711816). Brillamment victorieux au cours des campagnes de la République et de l’Empire, il est à deux reprises commandant de la 25e division militaire établie à Liège. C’est à cette occasion qu’il acquiert les deux châteaux. Sous la République, il se trouve à la tête des troupes qui dévastent l’abbaye d’Orval 3. Il participe entre autres sous l’Empire à la bataille d’Austerlitz et aux campagnes du Portugal et de Russie. Titré comte d’Empire en 1810, il meurt sur ses terres de Chokier le 30 décembre 1816. Huy, la chaussée Napoléon Ce quai au pied du fort de Huy doit son nom aux travaux que le Premier Consul ordonna, après un passage difficile sous une porte trop basse et une chaussée étroite, le 3 août 1803. 3

Voir le chapitre consacré aux campagnes destructrices des armées françaises.

Le château de Chokier à Flémalle surplombe la vallée de la Meuse. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française

L’imposant portail d’entrée de l’ancienne abbaye Saint-Victor de Huy © IPW

Huy, l’ancienne abbaye Saint-Victor L’abbaye Saint-Victor de Huy était à l’origine un prieuré clunisien fondé au XIIe siècle par Ermesinde, fille du comte de Luxembourg. Des moniales se fixent à Huy en 1144 et construisent un ensemble de bâtiments, tous détruits en 1595 lors de la prise du château de Huy par les Hollandais. Suite au désastre, le prieuré est élevé au rang d’abbaye par le pape Alexandre VII en 1636 et reconstruit une première fois. En 1723, l’abbesse Lutgarde Mottet entreprend une dernière fois la reconstruction des bâtiments que les Bénédictines quittent à la Révolution. Aujourd’hui, malgré la destruction des ailes est et ouest et de l’église, il reste un assez bel ensemble des bâtiments abbatiaux. On y accède par un beau portail calcaire surmonté d’un fronton aux armes de Lutgarde Mottet. Sous une haute niche se trouve un chronogramme indiquant la date de 1724. À l’arrière du portail se trouve un long bâtiment fortement reconstruit en 1947 après avoir été bombardé lors de la Seconde Guerre mondiale. Déclarée bien national, l’abbaye est acquise en 1798 par J. Ouwerx, gendre du maire de Huy. Le 8 novembre 1811, Napoléon déjeune à l’abbaye en compagnie de l’impératrice, sur la route qui le mène de Liège à Givet. 114

Liège, l’hôtel Van den Steen de Jehay Construit au début du XVIe siècle par Gérard Chevalier, chanoine tréfoncier, ce bel hôtel de maître est achevé dans la seconde moitié du même siècle par Gérard Chevalier, neveu du précédent. Il est ensuite restauré dans la seconde moitié du XVIIIe siècle sur les plans de Jacques-Barthélemy Renoz, architecte particulièrement productif en principauté à cette époque. Il tire son nom actuel de la famille Van den Steen de Jehay, occupant des lieux entre 1641 et 1866. L’hôtel est ensuite divisé en six lots lors d’une vente publique organisée en 1872 ; il s’agit des bâtiments situés entre les numéros 29 et 39 du Mont-Saint-Martin actuellement. Le nº 33 constitue l’entrée principale originelle, remaniée par Renoz et conservant une ample porte flanquée de deux grosses colonnes d’ordre toscan et surmontée d’une fenêtre munie d’un balcon de ferronnerie. Les baies du dernier étage sont couronnées d’un fronton triangulaire mordant dans la corniche de frise. Les nºs 37-39 constituent l’ancien corps d’habitation de la demeure et sont caractérisés par leur imposante toiture. Datée du XVIe siècle puis restaurée par Renoz, la riche bâtisse comprend un rez-de-chaussée entièrement élevé en calcaire et percé de deux portes. Les deux étages supérieurs, de hauteur


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dégressive, sont construits en brique et tuffeau et éclairés chacun par cinq baies à croisée. Plusieurs personnalités d’importance séjournent à cet endroit sous le régime français. En 1795, le représentant de la Convention Robert s’y installe au cours de la mission d’étude de la situation de l’ancien pays de Liège que l’on venait de lui confier. Au début du siècle suivant, l’hôtel héberge le second Consul, Cambacérès, venu rendre visite aux autorités du département de l’Ourthe. Enfin, le préfet et Bonaparte y sont accueillis en 1803. Thuin, l’athénée royal Sur la façade de l’ancien « collège impérial » devenu athénée sous le régime belge, une plaque commémorative a été apposée en 2003 : « Bicentenaire de la création des lycées et collèges par Bonaparte Ier consul À Thuin, le 19 janvier 1803 Don du souvenir napoléonien ». Cette simple plaque commémorative rappelle aujourd’hui l’action menée par le Premier Consul dans sa réforme de l’enseignement. Les lycées sont créés par Bonaparte en vertu de la loi du 1er mai 1802 dans le but de former l’élite de la nation.

Les lycées de garçons sont créés à partir des anciennes « écoles centrales 4 » et assurent une formation en lettres et sciences (les lycées de filles n’apparaissent pas avant 1880 en France). Parmi les douze premiers lycées impériaux inaugurés en 1803, seul un figure dans notre pays et se situe à Bruxelles. D’autres suivront à Mons, Liège et Namur (un lycée impérial dans chaque préfecture). La même loi prévoit la création des collèges, pris en charge par les villes. Walhain/Nil-Saint-Vincent, l’ancienne maison communale Sur la façade de l’édifice, une plaque commémorative évoque la signature d’un décret par Napoléon concernant la commune : « En vertu du décret signé à Moscou le 2 septembre 1812 par l’empereur Napoléon Ier, les communes de Nil-SaintMartin et Nil-Saint-Vincent ont été réunies pour former la commune de Nil-Saint-Vincent-Saint-Martin ». 4

Voir les articles sur les écoles centrales des départements de Jemappes, de l’Ourthe et de Sambre-et-Meuse dans le chapitre consacré aux institutions.

La plaque en hommage à la création des lycées par Napoléon à Thuin. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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L’hôtel de la Couronne à Henri-Chapelle © IPW

Welkenraedt/Henri-Chapelle, l’hôtel de la Couronne Situé au centre de la localité, sur la route principale, l’hôtel de la Couronne est une ancienne auberge dont les bâtiments datent du début du XVIIIe siècle comme l’indique le millésime 1706 présent sur un panneau orné d’une couronne et des lettres GG. Un autre panneau armorié, présent sur le linteau de la porte de la façade côté cour, est lui aussi frappé d’une couronne et du millésime 1704. Construits en moellons de calcaire, les bâtiments forment un L et sont éclairés par des fenêtres au linteau bombé à clé datant de la seconde moitié du XVIIIe siècle. La cour est accessible par un portail daté de la fin du XVIIe ou du début du XVIIIe siècle. L’hôtel était le lieu le plus fréquent des réunions des États du duché de Limbourg à partir de 1704 et accueillait également un tribunal souverain avant la chute de l’Ancien Régime. L’édifice a profité récemment d’une belle restauration et abrite encore de nos jours un hôtel-restaurant. L’hôtel accueille brièvement Napoléon en septembre 1804. L’empereur y passe la nuit sur la route qui le mène à Aix-la-Chapelle.

La France et l’Église, de la Révolution à l’Empire Amay/Jehay, l’ancienne abbaye de la Paix-Dieu L’ancienne abbaye de la Paix-Dieu, située au creux d’un vallon, présente encore aujourd’hui un ensemble architectural harmonieux et de grande qualité. La fondation de cette abbaye cistercienne remonte au milieu du XIIIe siècle, lorsqu’une communauté de moniales s’établit 116

sur le site en 1244. Les bâtiments aujourd’hui conservés, de style Renaissance mosane, ont été édifiés aux XVIIe et XVIIIe siècles mais ont subi de lourds dégâts après la vente de l’abbaye comme bien national en 1797 et suite à la dispersion des religieuses. Seule la ferme fut alors épargnée. Le renouveau de la Paix-Dieu s’organise dans le milieu des années 1990 alors que les autorités wallonnes souhaitent y créer un « Centre de perfectionnement aux métiers du patrimoine ». La Région wallonne acquiert les anciens bâtiments conventuels, à l’exception de la ferme et de l’infirmerie, en 1997. Une vaste campagne de restauration est depuis lors entreprise et a vu, depuis près de vingt ans, la restauration de l’aile de l’abbesse, du quartier des hôtes, du moulin, des jardins en terrasse et du colombier et la construction de bâtiments contemporains utiles aux missions de la Paix-Dieu, à savoir un atelier et une conciergerie. Depuis 1999, le centre des métiers du patrimoine est géré par l’Institut du Patrimoine wallon. Il poursuit ses missions de préservation et de transmission des savoirs et savoir-faire dans le domaine du patrimoine architectural. Comme bien d’autres complexes ecclésiastiques, l’abbaye de la Paix-Dieu vit des heures douloureuses à la fin de l’Ancien Régime. À Jehay souffle aussi le vent de la révolution, menée par Augustin Behogne et une bande de patriotes. Originaire de Hannut et membre du club des patriotes d’Amay, il s’était installé à Jehay après son mariage avec une fermière de la région. Les sources permettant de retracer son action font toutefois défaut, seul le témoignage du jardinier du château de Jehay nous donne des indications sur les actions menées par Behogne : pillage du moulin de la Paix-Dieu, violences et injures envers l’abbesse et les sœurs,


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La fête civique dans l’ancien cloître de la Paix-Dieu © Collection particulière

Vue de l’infirmerie de l’abbaye de la Paix-Dieu © IPW

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appropriation de terres et proclamations du rattachement à la France. La seconde restauration du prince-évêque le 21 avril 1793 signe la fin des actions du révolutionnaire : Behogne est arrêté, jugé et condamné à mort. Il est décapité à la hache le 26 mars 1794 à Jehay. En attendant qu’une salle du centre de la Paix-Dieu commémore son nom, Behogne s’est effacé des mémoires, au contraire de Chapuis et Bouquette 5. Après l’annexion de la principauté à la République française, le régime municipal français est progressivement établi dans nos régions entre 1795 et 1797 ; les ordres sont supprimés et les biens des monastères, abbayes et prieurés sont mis en vente. Le 7 août 1796, une fête civique est célébrée au sein de l’abbaye ; il s’agit d’une fête au cérémonial grandiose et à la décoration exubérante. Un autel dédié à la Patrie est érigé dans la cour et un bûcher dressé dans le but d’y brûler les symboles de l’Ancien Régime. Disparaissent ainsi les blasons des familles aristocratiques, mitres et crosses… Tout au long de la fête sont présents les symboles républicains : bonnet phrygien, statues de la Liberté et de la Loi et discours anti-royalistes. Au cours de cette même journée, le peintre Léonard Defrance organise une cérémonie en hommage à Augustin Behogne. Le 29 août 1797, en vertu de la loi autorisant la vente des biens nationaux, l’abbaye de la Paix-Dieu est acquise par la citoyenne Mottard suite à une vente publique. Le site abritait toutefois depuis janvier 1796 les services de l’administration municipale de Bodegnée 6. Entre le 29 août 1797 et le 21 mars 1799, la municipalité verse un loyer à la propriétaire de l’abbaye pour y occuper les locaux de l’ancienne infirmerie abbatiale dans laquelle fonctionnent les services administratifs. Ces derniers ont toutefois, de manière éphémère, occupé une partie du château de Jehay par la suite comme le précise une lettre de l’administration municipale datée du 15 mai 1798. Les édiles se seraient finalement installés chez un particulier au début du XIXe siècle. Après 1800 et le départ des fonctionnaires municipaux, madame Mottard procède au démontage du cloître et de la cour d’honneur afin d’en vendre les matériaux. L’aile de l’abbesse est vendue en 1857 et transformée en distillerie ; l’abbatiale sert de grange et l’aile de l’abbesse en étable jusqu’en 1954. Le quartier des hôtes est laissé à l’abandon alors que la brasserie et le moulin continuent de fonctionner respectivement jusqu’en 1878 et 1970. Liège, la cathédrale Saint-Paul et l’ancienne abbaye de Beaurepart Fondée aux alentours de 970 puis reconstruite en style gothique entre les XIIIe et XVIe siècles, la cathédrale Saint-Paul impressionne par ses dimensions et sa riche ornementation. Sa voûte est décorée de rinceaux peints et son chœur orné 5 6

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Voir la notice sur Chapuis, Bouquette et Behogne dans le chapitre consacré aux deux occupations françaises. Bodegnée constitue une commune à part entière jusqu’en 1822 lorsqu’elle est fusionnée avec Jehay pour former la commune de Jehay-Bodegnée. Celle-ci intègre la commune d’Amay après la fusion des communes en 1977.

de vitraux Renaissance. Devenue cathédrale au début du XIXe siècle, l’église est alors enrichie d’un nouveau mobilier néogothique, ainsi que du mobilier d’églises détruites après la Révolution, comme le Christ gisant de Jean Del Cour. Elle devient aussi le dépositaire du trésor de l’ancienne cathédrale Saint-Lambert 7. Récemment dotée de nouvelles verrières contemporaines et reconnue patrimoine exceptionnel de Wallonie, la cathédrale de Liège s’apprête à entamer un important chantier de restauration qui vise à lui redonner son lustre d’antan. Dès les premières heures de la Révolution, la collégiale Saint-Paul fait les frais du changement de régime, tant de la part des Liégeois que des Français. Le 1er octobre 1795, la principauté est annexée à la France et soumise aux lois républicaines. Le chapitre collégial est supprimé et l’église SaintPaul est transformée en abattoir et en boucherie. Elle est pillée de ses objets de culte, la plupart de ses verrières sont brisées, le plomb des vitraux retiré pour en faire des balles, le pavé est enfoncé et plusieurs cloches sont volées. Partie intégrante d’un projet devant doter des dizaines de musées nationaux sur tout le territoire français, Saint-Paul (comme de nombreuses autres églises belges) est dépouillée d’une partie de son patrimoine. C’est ainsi qu’en 1797 la Conversion de saint Paul de Bertholet Flémal, chef-d’œuvre du baroque liégeois, est détaché du maître-autel de la collégiale et emporté en France. L’œuvre est aujourd’hui visible au musée des Augustins de Toulouse. En 1801, le Concordat entre le Premier Consul et le pape Pie VII ouvre la voie à la pacification religieuse. Saint-Paul redevient un lieu de culte et le nouvel évêque de Liège, Monseigneur Zaepffel, organise son diocèse. Les chanoines retrouvent leur église, élevée au rang de cathédrale en 1803 et choisie pour remplacer la défunte cathédrale Saint-Lambert pour sa position centrale et ses dimensions imposantes. Le nouvel évêque de Liège est un pur produit de la politique religieuse menée par Napoléon. Né en 1744 en Alsace, chanoine de la collégiale Saint-Pierre-le-Jeune de Strasbourg et chanoine de la collégiale Notre-Dame de Saverne, il émigre en Allemagne après la Révolution. Il séjourne alors dans le pays de Bade jusqu’au Concordat. La nouvelle politique menée par Napoléon est bénéfique au religieux qui bénéficie des premières nominations épiscopales orchestrées par le Premier Consul. Jean-Évangéliste Zaepffel profite ainsi de ses relations familiales (il est le grand-oncle du général Clarke, ministre de la Guerre et futur général d’Empire) pour se faire nommer à la tête du nouveau diocèse de Liège le 30 avril 1802. La cérémonie d’installation a lieu dans l’ancienne capitale principautaire le 22 août suivant. Privé d’un évêque et d’une cathédrale depuis plusieurs années, le diocèse de Liège doit être réorganisé : Zaepffel réforme les administrations de bienfaisance du département de l’Ourthe et choisit l’ancienne collégiale Saint-Paul pour installer le siège de sa nouvelle 7

Voir l’article dédiée aux ruines de la cathédrale Saint-Lambert dans le chapitre consacré aux campagnes destructrices de l’armée française.


Monuments et sites divers liés à la période française

La cathédrale Saint-Paul de Liège. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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cathédrale. Le 14 mai 1803, l’évêque signe le décret qui élève la collégiale au rang de cathédrale. Non loin de la nouvelle cathédrale se trouve l’ancien couvent de Beaurepart, dont le sort est lui aussi lié au Concordat et à la politique menée par Jean-Évangéliste Zaepffel. Construit par les frères Mineurs et occupé à partir de 1243 par les chevaliers de l’Ordre teutonique des Vieux-Joncs, le couvent est cédé aux Prémontrés en 1288. Les bâtiments conventuels sont occupés par les troupes républicaines françaises entre 1792 et 1794. Les Prémontrés en reprennent ensuite possession, entre 1795 et 1799. Les lieux sont ensuite transformés en arsenal par les autorités départementales. Situés le long de la Meuse, les bâtiments actuels sont le fruit de plusieurs campagnes de construction. Au sud-est, le logis abbatial a été érigé dans la seconde moitié du XVIe siècle et constitue le bâtiment principal sur lequel s’appuient les quatre ailes du cloître. L’église abbatiale a été érigée sur les plans de l’architecte liégeois Barthélemy Digneffe entre 1762 et 1770, à l’emplacement de l’ancienne église gothique. L’abbaye est affectée à la résidence de l’évêque de Liège en 1809 par décret impérial, alors que Liège vient d’accueillir un nouveau prélat. Décédé le 17 octobre 1808, chevalier de la Légion d’honneur, Monseigneur Zaepffel est inhumé dans la chapelle du château de Lexhy (Grâce-Hollogne). C’est le grand vicaire de Paris, François-Antoine Lejéas, qui obtient les faveurs impériales. Il est nommé évêque de Liège le 9 février 1809 et prête serment le 19 mars suivant. Après avoir successivement reçu une nouvelle cathédrale et un nouvel

évêque, le diocèse de Liège reçoit donc un bâtiment dans lequel installer les services épiscopaux. L’évêque y installe également le Grand Séminaire de Liège, supprimé en 1797 et rétabli dix ans plus tard. Le bâtiment abrite encore de nos jours les services du diocèse de Liège et le séminaire épiscopal. Wavre/Limal, l’ancienne cense des Carmes La cense des Carmes ou du Petit Sart, est une ancienne exploitation signalée depuis 1598 et acquise par les Carmes en 1727. Située au bord de la Dyle, il s’agit d’une petite ferme clôturée entièrement enduite et transformée en habitation dans l’Entre-deux-Guerres. Du bâtiment d’origine subsistent une porte charretière en arc cintré, deux autres petites portes cintrées du côté de la rue et une autre dans une dépendance. Une inscription située à droite de la porte d’entrée rappelle l’origine des bâtiments : « Ici s’élevait au xviiie siècle une cense dépendant de la communauté des Carmes Chaussés de Wavre, supprimée le 3 vendémiaire an V ». Cette brève inscription entretient le souvenir d’une facette parmi les plus connues de la période française, celle de ses relations avec l’Église. Les premières années du régime républicain sont caractérisées par un profond anticléricalisme. Parmi les mesures adoptées, la suppression des ordres religieux, la réquisition de leurs biens matériels et la nationalisation de ceux-ci dans le but de les revendre. Rares sont les lieux qui aujourd’hui conservent la marque de cet état de fait, comme c’est le cas ici avec cette inscription, faisant aussi référence au calendrier républicain (24 septembre 1796).

La plaque commémorative de l’ancienne cense des Carmes à Limal. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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Monuments et sites divers liés à la période française

À propos de quelques temples de la Loi en Wallonie Les années situées entre les événements révolutionnaires et la signature du Concordat entre le pape et le Premier Consul sont désastreuses pour le clergé : anticléricalisme, suppression des ordres religieux, pillage et destructions des abbayes et de lieux de culte… Les prêtres sont forcés de prêter un serment à la loi républicaine sous peine de se voir interdire l’exercice du culte. Certains lieux de culte sont réquisitionnés, vidés de leurs symboles religieux et transformés en temples laïcs à la gloire de la République. Appelés tantôt « temples de la Loi », « temples de la Raison » ou encore « temples décadaires », ils sont caractéristiques de l’idéologie révolutionnaire. Ce culte de l’Être suprême est constitué d’événements et de fêtes civiques et religieuses et est interdit en 1803. De très nombreux lieux de culte ont ainsi été transformés pendant quelques années seulement, en Wallonie comme dans le reste du territoire français. Certains de ces lieux de culte détournés ont aujourd’hui disparu, c’est notamment le cas de l’ancienne église Saint-Martin d’Arlon, démolie en 1935. D’autres ont bien entendu survécu et retrouvé depuis leur fonction originelle. Une recherche approfondie permettrait d’en détailler une liste exhaustive et aurait été fastidieuse dans le cadre de la présente étude. Nous souhaitons toutefois attirer l’attention sur quelques-uns de ces temples de la Loi, dont la petite et la grande histoire ont laissé des traces marquantes dans l’historiographie.

Liège, la basilique Saint-Martin Bâtiment emblématique du Mont-Saint-Martin, l’ancienne collégiale Saint-Martin a été fondée vers 963 par l’évêque de Liège Éracle, également fondateur de la collégiale SaintPaul. Devenue paroissiale après la Révolution et ensuite élevée au rang de basilique, l’église actuelle a été érigée à partir du XIVe siècle pour remplacer l’édifice primitif ravagé par un incendie en 1312. Le chœur a été édifié de 1511 à 1530 et la nef de 1540 à la fin du XVIe siècle. Consacrée à la Victoire après l’annexion française, l’église accueille entre autres manifestations civiles la fête de la célébration de l’anniversaire de la fondation de la République le 23 septembre 1800.

Le calendrier républicain L’instauration d’une République et la rupture créée par la Révolution française se sont fait sentir dans de nombreux domaines. Dans un véritable esprit de refus du passé, la Convention confie au comité d’instruction publique, composé de savants et d’hommes de lettres, le projet de l’élaboration d’un nouveau calendrier. Celui-ci est composé de douze mois de trente jours chacun avec cinq jours supplémentaires (six pour les années bissextiles). Chaque mois est divisé en trois décades, correspondant aux anciennes semaines. Les jours de la décade sont désormais nommés primidi, duodi… jusque décadi. Le poète Fabre d’Églantine invente de nouveaux mots pour les mois de l’année : vendémiaire, brumaire et frimaire en automne, nivôse, pluviôse et ventôse en hiver, germinal, floréal et prairial au printemps et messidor, thermidor et fructidor en été. La première année de la République débute le 1er vendémiaire de l’an I (22 septembre 1792) bien que le calendrier n’ait été adopté officiellement par la Convention que le 15 vendémiaire de l’an II (5 octobre 1793). Le 22 fructidor de l’an XIII (9 septembre 1805), l’empereur signe l’abolition du calendrier républicain et la restauration du calendrier grégorien à partir du 1er janvier 1806.

La basilique Saint-Martin, sur les hauteurs de Liège. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Marche-en-Famenne, l’église Saint-Remacle L’actuelle église Saint-Remacle est l’héritière de plusieurs édifices religieux construits à son emplacement. De style gothique flamboyant, elle a été érigée entre 1484 et la première moitié du XVIe siècle. Elle se compose de trois nefs de trois travées, d’un transept haut et d’un chœur à trois pans. Sous le régime français, l’édifice est choisi pour abriter le temple de la Raison de la localité. Partie intégrante du processus d’éradication des signes religieux, la croix sommant l’église est déposée par les Français le 6 août 1798. Plus tard, les cloches de l’église connaissent le même sort. Saint-Remacle cesse vraisemblablement de servir au culte républicain après la signature du Concordat, quelques années seulement avant d’être victime du grave incendie qui ravage le quartier en 1806 et nécessite plusieurs campagnes de restauration.

L’église Saint-Remacle à Marche-en-Famenne. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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Mons, l’église Sainte-Élisabeth Située à l’emplacement d’un hôtel particulier légué par une veuve pieuse pour y édifier une chapelle dédiée à sainte Élisabeth, l’église a été construite en style gothique brabançon entre 1516 et 1588. Plusieurs fois remaniée et réparée ensuite, elle disparaît dans un incendie en 1714. L’édifice actuel a été érigé sur les plans de l’architecte C. J. de Bettignies de 1714 à 1730 en pierre et brique. L’église est caractérisée par sa haute et élégante tour en façade surmontée d’un campanile à lanterne et lanternon superposés. L’édifice comporte une triple nef de sept travées bordées de chapelles, un chœur de trois travées et un chevet à trois pans. Le 24 novembre 1794, trois commissaires de l’administration municipale de Mons choisissent l’église SainteÉlisabeth, située à l’entrée de la rue de Nimy, non loin de

Intérieur de l’église Sainte-Élisabeth à Mons. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine


Monuments et sites divers liés à la période française

l’hôtel de ville et de l’hôtel de la préfecture, pour y installer un temple de la Loi. Dès le lendemain, des travaux sont entrepris : les signes de la religion sont ôtés du frontispice, les autels enlevés, les confessionnaux transformés en guérites à l’entrée de l’église pour y installer des sentinelles. Les articles de la Déclaration des droits de l’homme sont inscrits en grands caractères sur les piliers de la nef et le drapeau tricolore est suspendu à la voûte. Dans le chœur sont inscrites les tables de l’acte constitutionnel de la République française. L’inauguration du temple a lieu le 21 janvier 1795, jour anniversaire de la mort du roi de France. Les Montois ne voyaient pas ces bouleversements d’un bon œil et, des années durant, les paroissiens de Sainte-Élisabeth militent pour le rétablissement du culte catholique dans leur église. Le 5 janvier 1797, l’administration centrale du département de Jemappes autorise, par intermittence, la pratique du culte décadaire et celle du culte catholique dans l’église. Le 13 avril suivant, le temple est définitivement transféré dans la chapelle SaintGeorges, contiguë à la maison communale. Les paroissiens rebénissent Sainte-Élisabeth et procèdent immédiatement à son nettoyage : toute trace d’un « culte républicain » disparaît pour de bon. Tournai, l’église des Dominicains Rares sont aujourd’hui les vestiges de l’église de l’ancien couvent des Dominicains, devenue temple de la Loi au début du régime français. De cet édifice subsiste une partie de la façade de chaque bas-côté, intégrée à des habitations.

Souvenirs et réminiscences de la période française en Wallonie Ciney/Braibant, le château et la ferme de Halloy Occupant un méandre du Bocq, le site de Halloy est un bel ensemble calcaire composé du château, dont la cour d’honneur est bordée d’une dépendance à gauche et d’une ferme clôturée à droite. Le tout est le résultat de plusieurs phases de construction s’étalant du XVIe au XXe siècle. Sur l’aile de dépendance bordant la cour, on peut lire les dates « 1802 » et « AN 10 » sur les linteaux de fenêtre de l’étage, rare exemple conservé de datation d’une construction utilisant les calendriers grégorien et républicain. Fosses-la-Ville/Le Roux, le monument en hommage aux marcheurs Le village de Le Roux fait partie de ces localités de l’EntreSambre-et-Meuse caractérisées par leurs marches historiques. Un monument rendant hommage aux marcheurs est situé dans la rue Lieutenant Cotelle. Il est composé de trois blocs de pierre ornés de plaques commémoratives. La première stèle porte l’inscription « Hommage à sainte Gertrude, patronne des marcheurs napoléoniens de Le Roux ». La stèle du milieu rend hommage à 29 soldats du village, enrôlés dans les armées impériales, au-dessous de l’inscription suivante :

« Lorsque la Belgique était française, sous l’Aigle napoléonien, des jeunes hommes de Le Roux furent enrôlés dans la Grande Armée. On les appelait conscrits ». Ce texte commémoratif évoque gentiment la vérité : ces 29 jeunes hommes ont été enrôlés contre leur volonté, selon le principe de la conscription. Enfin, le troisième bloc de pierre est orné d’une plaque portant l’inscription suivante : « Hommage aux marcheurs de Le Roux qui perpétuèrent les traditions des marches napoléoniennes depuis 1841 ». Herve, le collège royal Marie-Thérèse Le collège royal Marie-Thérèse est encore aujourd’hui un des rares témoins de la politique religieuse et d’enseignement de l’impératrice d’Autriche dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. La suppression de la compagnie de Jésus par le pape Clément XIV en 1773 provoque dans les Pays-Bas autrichiens la suppression de dix-sept collèges et incite MarieThérèse à créer des collèges royaux sur le modèle des collèges thérésiens autrichiens. L’établissement de Herve, actuellement le seul à toujours porter le nom de sa fondatrice, est créé le 9 mars 1777. Les anciens bâtiments du collège englobent les constructions du refuge des Récollets de Bolland et sont inaugurés le 1er janvier 1778. Le collège est toutefois supprimé dès 1794 par les troupes françaises qui réquisitionnent les bâtiments. De leur passage, nous conservons une trace discrète mais révélatrice. Sur une des portes du collège a été gravée l’inscription « République française une et indivisible ». En 1803, après la pacification religieuse apportée par le Concordat, un établissement scolaire privé intègre l’ensemble qui renoue définitivement avec l’enseignement. Liège, l’abbaye Saint-Laurent L’ancienne abbaye bénédictine de Saint-Laurent a été fondée à la suite de la construction en 968 d’un oratoire dédié à saint Laurent par l’évêque de Liège Éracle. L’évêque Réginard offre au monastère sa charte de donation en 1034. L’abbaye reste jusqu’à l’annexion française un foyer intellectuel de premier plan jouissant d’un rayonnement exceptionnel. Les bâtiments subsistant s’articulent autour de deux cours jointives plantées d’arbres. La cour d’honneur est bordée par l’hôtel abbatial construit aux XVIIe et XVIIIe siècles, par le bâtiment dit « du Vivier » et par une aile néogothique érigée en 1904 pour remplacer les anciennes écuries. Au centre, autour du puits, sont disposées les colonnes d’origine de la première cour du palais des princes-évêques. La seconde cour est constituée par les trois côtés du cloître, lui aussi du XVIIIe siècle, surplombant la ville et fermé à l’origine par l’imposante église abbatiale, détruite en 1809. Comme de nombreux autres établissements conventuels, l’abbaye Saint-Laurent voit son sort basculer avec la fin de l’Ancien Régime. En 1790, au plus fort de la Révolution, le prince-évêque de Liège appelle à l’aide ses voisins et des troupes prussiennes s’installent à l’abbaye et en perturbent l’activité religieuse. En 1792, à l’initiative du dernier princeévêque François-Antoine de Méan, Saint-Laurent accueille 123


Sur les traces de la Wallonie française

Vue aérienne de l’abbaye Saint-Laurent à Liège. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

des réfugiés de prestige : le comte d’Artois, frère cadet de Louis XVI et futur Charles X et sa famille venus de Namur 8. Après l’entrée triomphale du général Dumouriez à Liège en novembre 1792 et l’occupation de nos régions par les Français, les moines se résignent à accueillir des troupes et à transformer leur abbaye en hôpital militaire, à dater du 1er février 1793. Les soldats républicains, les malades, les blessés et même les galeux et les vénériens sont accueillis au rez-dechaussée, dans le cloître et dans l’abbatiale. Après la débâcle de Dumouriez à Neerwinden, les moines réinvestissent leurs biens pour quelques mois seulement. La victoire de Fleurus et la seconde occupation de Liège par les troupes républicaines sonnent le glas de l’abbaye. En 1795, elle devient officiellement l’ « Hôpital de l’Égalité ». Le 1er septembre 1796, les biens de l’abbaye sont saisis et dispersés. En 1809, l’abbaye est sécularisée et l’abbatiale démolie. En 1814, au cours des dernières campagnes napoléoniennes, quelques soldats de la Grande Armée considérés comme prisonniers de guerre figurent au 8

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Voir l’article consacré à l’hospice d’Harscamp de Namur dans le présent chapitre.

nombre des « patients » de l’hôpital, au même titre que des Suédois, Hollandais, Prussiens, Autrichiens et Russes. Les Hollandais transforment l’ancienne abbaye en caserne militaire dès 1815 sans supprimer l’hôpital créé auparavant par les Français. Cet hôpital militaire fonctionne jusqu’en 1970. Liège, la société libre d’Émulation Édifiée et inaugurée par le prince-évêque François-Charles de Velbrück en 1773 pour permettre l’expansion de l’esprit artistique et scientifique, la société libre d’Émulation est lourdement endommagée par un incendie le 20 août 1914. Les travaux de reconstruction sont terminés en 1934 selon les plans de l’architecte Julien Koenig. Les bâtiments situés à l’arrière de l’édifice et accessibles par la rue Charles Magnette ont pour leur part été préservés. Partie intégrante de l’ancien couvent des sœurs du Val Sainte-Anne ou Sœurs-de-Hasque, ils appartiennent aujourd’hui à la société libre d’Émulation. Le très bel édifice de style mosan a été édifié vers 1618 et restauré en 1921. De plan rectangulaire, il est flanqué d’une tourelle polygonale encadrée de chaînages et surmontée d’un pavillon à bulbe. La façade principale est ornée d’une niche abritant


Monuments et sites divers liés à la période française

La maison Renaissance de la société libre d’Émulation à Liège. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

une Vierge à l’enfant. C’est à cet endroit qu’est organisé un concert en présence du général Dumouriez et de son étatmajor, le 2 décembre 1792. Essoufflée et quelque peu oubliée après la Révolution, la société libre d’Émulation fut recréée en 1809 sous l’égide du préfet de l’Ourthe Micoud d’Umons et divisée en plusieurs branches : le comité des sciences physiques et médicales, le comité pour la littérature et les beaux-arts, le comité pour l’agriculture et l’économie rurale et le comité pour les arts, manufactures et l’amélioration de l’industrie. La société devient l’un des hauts lieux de la science médicale à l’époque dans nos régions ; elle dispense des cours d’anatomie, de physiologie, de nombreux médecins et chirurgiens en deviennent membres correspondants. Le 19 novembre 1809, l’institution change de nom et devint la « Société libre d’Émulation et d’encouragement pour les sciences et les arts ». Parmi les membres de cette société de prestige, on retrouve bon nombre de personnalités du département : les industriels Biolley et Simonis, le mécanicien John Cockerill, le banquier Gérard Nagelmackers, des exploitants de houillères et des fabricants en tout genre. Afin de concrétiser sa politique de

Charles-Emmanuel Micoud d’Umons (1753-1817) Ancien administrateur du mont-de-piété, il est nommé préfet de l’Ourthe le 17 avril 1806. Il rentre en France en janvier 1814, au moment des dernières heures de l’Empire. Il est ensuite préfet de l’Aisne pendant les Cent-Jours puis retourne à la vie privée après la seconde abdication de Napoléon. développement industriel, la société a recours à des prix et des expositions. Le 16 février 1813, la société est également à l’origine de la création d’un athénée des arts, successeur de l’académie de dessin créée par Velbrück sous l’Ancien Régime. Cette école ne survit toutefois pas longtemps et ferme ses portes dès la chute de l’Empire. Le renouveau insufflé par le préfet ne s’éteint toutefois pas avec la fin du régime français, la société d’Émulation poursuit ses activités au gré du développement de la Révolution industrielle. La maison Renaissance de l’Émulation conserve également une taque de foyer carrée de 70 cm de côtés représentant Napoléon. Coulée vers 1801-1810, elle se trouvait 125


Sur les traces de la Wallonie française

La taque de foyer représentant Napoléon à cheval conservée à la société libre d’Émulation à Liège. © Bruxelles, KIK-IRPA

autrefois dans la salle polyvalente mais a récemment été déposée en réserve. On y voit l’empereur en habits militaires, à cheval et entouré de drapeaux. Liège, le Musée de la Vie wallonne L’ancien couvent des frères Mineurs, dont les bâtiments actuels ont été édifiés à partir de 1655, constitue un ensemble architectural d’une grande importance au cœur de Liège. De style Renaissance mosane, le couvent est construit autour d’un quadrilatère en brique et calcaire de deux étages percés de baies et couverts de bâtières d’ardoises. Gravement sinistrés au cours de la Seconde Guerre mondiale, les bâtiments 126

conventuels ont été rénovés entre 1963 et 1970 en respectant le style ancien tout en s’adaptant à une affectation muséale. Une nouvelle rénovation dans le même esprit est menée avec plus d’audace en 2008, dans la foulée du renouvellement de la scénographie du Musée de la Vie wallonne. Parmi les très riches collections de l’institution se trouve une guillotine, utilisée à Liège pour les exécutions capitales sous le régime français à partir de 1796. Conservée un temps par les Hollandais, elle fonctionne sur la place aux Chevaux (actuelle place de la République française) jusqu’en 1824. On y trouve aussi le sabre et la jambe de bois de Jean-Joseph Charlier dit « jambe de bois », héros de la Révolution belge


Monuments et sites divers liés à la période française

de 1830 ayant vraisemblablement perdu sa jambe droite à la bataille de Waterloo. Dès l’âge de 20 ans, il entre dans l’armée et participe à la campagne d’Allemagne entre 1813 et 1814 dans les rangs de l’armée française. Liège, la maison de la métallurgie et de l’industrie Ce musée liégeois qui retrace au travers de ses collections l’histoire des industries et des techniques est installé dans l’ancienne usine Espérance-Longdoz fondée en 1846 pour le laminage du fer et la fabrication du fer-blanc. Parmi les neuf salles d’exposition, celle consacrée aux métaux non ferreux présente une trace liée à l’épopée napoléonienne. À la veille de son départ pour l’île d’Elbe, l’empereur offre une baignoire en zinc à son secrétaire particulier, le baron Agathon Jean François Fain. Cette belle baignoire l’avait suivi dans ses campagnes de Russie, d’Allemagne et de France. Napoléon avait lui-même reçu cet imposant objet de la part de JeanJacques Daniel Dony, chimiste et industriel liégeois, inventeur du procédé industriel d’exploitation du zinc dans les premières années du XIXe siècle. La première usine à zinc fondée dans le monde le fut en 1809 dans le quartier Saint-Léonard à Liège. Cette baignoire figure depuis 1997 dans les collections de la maison de la métallurgie et de l’industrie de Liège et est très justement surnommée « baignoire de Napoléon ». Mons, le Musée de la Vie montoise Le Musée Jean Lescarts ou Musée de la Vie montoise est installé dans l’infirmerie de l’ancien couvent des filles de NotreDame, transformé en musée de folklore en 1934 et situé aujourd’hui à côté du Musée des beaux-arts. Il s’agit d’une très belle bâtisse en brique et pierre bleue construite en 1636 dans le pur style de l’époque. Parmi les collections du musée se trouvent plusieurs souvenirs de la période française. On y trouve des cachets de la période napoléonienne, le sabre du colonel Ignace-Louis Duvivier 9, ainsi qu’une plaque commémorative de l’inauguration des travaux du canal de Mons à Condé le 18 octobre 1807 10. La première pierre de la colonne départementale de Jemappes y est également conservée. Dans chaque préfecture, une colonne avait été élevée sur une place publique sous le Consulat. À Mons, le monument devait se trouver sur la Grand-Place mais ne fut jamais érigé… Seule une cérémonie de pose de la première pierre fut organisée le 14 juillet 1800. De cet événement est conservée une dalle en marbre blanc de 60 cm de longueur sur 50 cm de largeur, gravée de l’inscription suivante : « Le 25 messidor an 8 de la République française, anniversaire du 14 juillet 1789, J. B[aptis]te E[tien]ne Garnier, préfet du département de Jemmappes [sic] a posé cette 1re pierre de la colonne départementale élevé [sic] en l’honneur des braves du département morts pour la défense de la République ». La guillotine du régime français conservée au Musée de la Vie wallonne à Liège. Photo G. Destexhe © Province de Liège – Musée de la Vie wallonne

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Voir le chapitre consacré au patrimoine funéraire. Voir la notice sur le canal Mons-Condé dans le chapitre consacré aux prémices de la Révolution industrielle.

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Sur les traces de la Wallonie française

La première pierre de la colonne départementale conservée au Musée de la Vie montoise © Bruxelles, KIK-IRPA

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Les pièces les plus significatives de cette période proviennent de France et ont été offertes à la ville de Mons. Il s’agit de pierres de la prison de la Bastille, détruite dès les premières heures de la Révolution française à Paris. À l’époque, la remise d’une maquette de la prison ou de simples pierres aux municipalités et clubs révolutionnaires était fréquente. Sous la République, elles étaient considérées comme de véritables objets de culte mais perdent ce statut sous l’Empire, lorsqu’elles sont souvent remisées dans les caves et greniers des hôtels de ville. Avec la Restauration, beaucoup sont détruites ou tout simplement oubliées. La pierre conservée à Mons a été offerte à la société des amis de la liberté et de l’égalité 11 à la suite de la bataille de Jemappes. Cette pierre, entourée d’un cadre en bois peint des couleurs françaises, est ornée d’un bas-relief représentant un bonnet phrygien posé sur un piédestal sur lequel est inscrit « vivre libre ou mourir ». Ce bas-relief est entouré d’une longue inscription : « Aux amis de la liberté de Mons. Cette pierre tirée des cachots de la Bastille détruite par le patriote et républicain Palloy r’appellera [sic] à tous ceux qui veulent être libres que les Français ont détruit les monuments du despotisme, terrassé les despotes et qu’ils préfèrent la mort à l’esclavage. Exemple à suivre par tous les peuples amis de la liberté. Donné aux citoyens de Mons lors de la fameuse bataille gagnée par l’armée française sur les despots [sic] le 6 novembre 1792, l’an premier de la République française ». La pierre avait à l’origine été placée dans la salle Saint-Georges avant d’être transférée au musée. Le musée possède un second exemplaire du même genre.

Plus petite que la précédente, elle porte simplement les inscriptions « cette pierre vient des cachots de la Bastille » et « donné le 14 juillet 1790 par Palloy patri[o]te ». La ville de Mons fut probablement gratifiée de cet honneur au cours de la première occupation française dans nos régions. Depuis 1790, chaque préfecture reçut en effet une pierre de la prison et, en 1793, Mons était la seule ville de Wallonie à accueillir le siège d’une préfecture.

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Voir l’article sur l’ancien collège des Jésuites de Mons dans le chapitre consacré aux deux occupations françaises de la Wallonie.

Morlanwelz-Mariemont, le musée de Mariemont Jusqu’en 1773, une société commanditée par le gouverneur général des Pays-Bas autrichiens Charles de Lorraine exploitait du charbon dans la forêt de Mariemont. Les travaux d’extraction reprennent ensuite dès les premières heures du régime français alors que le domaine royal a été déclaré bien national et que l’ancien palais a été ravagé par les révolutionnaires 12. La concession change plusieurs fois de mains dans les années qui suivent l’annexion et la situation est quelque peu chaotique. Il faut attendre le 23 mars 1801 et l’intervention du Premier Consul pour stabiliser la situation, en accord avec les autorités départementales. La concession des exploitations charbonnières est alors définitivement accordée à Jean-Baptiste Hardenpont, marchand de charbon et membre de l’administration municipale de Mons. L’inauguration officielle a lieu le 31 mars suivant mais la société n’existe sous cette forme que quelques mois. La concession est en grande partie rachetée par Nicolas Warocqué qui crée en 1802 la société des charbonnages du parc de Mariemont. Ce fondateur Voir l’article sur le domaine royal de Mariemont dans le chapitre consacré aux campagnes destructrices des armées françaises.


Monuments et sites divers liés à la période française

d’une véritable dynastie de maîtres charbonniers est à l’origine de la renaissance du site. Il acquiert un immense domaine de 27 ha en 1819 et s’y fait construire un château de plaisance, disparu aujourd’hui. Le domaine appartient de nos jours à la Fédération Wallonie-Bruxelles et abrite, dans un superbe parc arboré, le musée royal de Mariemont. Parmi les collections du musée, une plaque de bronze rappelle la destinée des lieux sous le régime français. Réalisée à la demande de J.-B. Hardenpont, on peut y lire « Bonaparte, Premier Consul de la République ; Chaptal, ministre de l’Intérieur ; Garnier, préfet du département de Jemmape [sic]. Concession des mines de Marimont [sic] accordée au citoyen Hardempont, par arrêté des consuls du 16 pluviôse an 9 ». Namur, le musée archéologique Située en bordure de la Sambre, l’ancienne halle des bouchers de Namur a été bâtie de 1588 à 1590 sur ordre du gouvernement du roi d’Espagne Philippe II par Conrad II de Nuremberg et Bastien Sion, maîtres des ouvrages du comté de Namur. Reconnue patrimoine exceptionnel de Wallonie, la « halle al’Chair » est construite en brique et pierre bleue et constitue un des derniers témoins de l’architecture traditionnelle mosane de la fin du XVIe siècle. Élevé sur trois niveaux surmontés d’une grande toiture ardoisée ponctuée de lucarnes, le bâtiment est imposant et caractérisé par de hautes fenêtres à croisée. Boucherie à l’origine, l’édifice connaît dans les siècles suivants de nombreuses affectations : école dominicale de l’évêché de Namur, magasin, arsenal, hôpital, temple protestant, salle de théâtre, salle du Conseil communal, école primaire et, enfin, depuis 1855 et pour quelques mois encore, siège du musée archéologique de Namur. Tout comme à Mons pour le département de Jemappes 13, le musée de Namur possède dans ses collections la première pierre de la colonne départementale de Sambre-et-Meuse. La cérémonie de pose de cette pierre avait elle aussi eut lieu le 14 juillet 1800, en présence du préfet Emmanuel Pérès. Contrairement à Mons, cette colonne fut bien érigée sur la place d’Armes de Namur. Simple, le monument se composait d’une colonne carrée en pierre de deux mètres de hauteur. Cette colonne fut détruite en 1814 au moment de la chute de l’Empire et de l’arrivée des troupes coalisées dans nos régions. La « première pierre » resta enfouie sous le pavement et a été retrouvée en 1865 et déposée au musée. Cette pierre carrée de 85 cm de large est polie et recouverte de l’inscription suivante : « Première pierre de la colonne à ériger à la mémoire des braves du département de Sambre et Meuse morts pour la défense de la patrie, posée par le citoyen Pérès, préfet du département de Sambre et Meuse, le 25 messidor an VIII de la République française ». La pierre se trouve toujours au musée aujourd’hui ; elle est encastrée dans un mur du grand escalier. Comme à Mons, le musée archéologique de Namur compte également dans ses collections une pierre de la Bastille. 13 Voir ci-dessus, l’article consacré au Musée de la Vie montoise.

Les colonnes départementales Un arrêté consulaire du 29 ventôse an VIII (20 mars 1800) proposé par Lucien Bonaparte ordonnait qu’une colonne commémorative soit élevée dans le chef-lieu des 108 départements français en l’honneur des guerriers morts pour la patrie. Chaque préfecture était chargée d’organiser un concours pour en désigner l’architecte. L’arrêté prévoyait que le monument devait être élevé sur la plus grande place de la ville et que l’on y inscrive les noms de tous les militaires domiciliés dans le département qui, après s’être distingués par des actions d’éclats, seraient morts sur le champ de bataille.

Emmanuel Pérès de la Gesse (1752-1833) Avocat au parlement de Toulouse sous l’Ancien Régime, il est élu aux États généraux puis à la Convention où il refuse de voter la mort de Louis XVI. Élu député de la Haute-Garonne au conseil des Cinq-Cents en 1796, il passe au conseil des Anciens deux ans plus tard. En récompense de son ralliement à Bonaparte après le coup d’état, il est élu préfet de Sambre-et-Meuse le 2 mars 1800. Baron d’Empire en 1810, il se retire de la vie publique le 3 janvier 1814. Olne/Hansez, une ferme traditionnelle de la région Une petite ferme située sur La Heid conserve elle aussi une trace discrète de l’époque française. Construite à la fin du XVIIIe siècle, elle compte également une dépendance sur laquelle se trouve une pierre gravée de l’inscription « L’an V du règne républicain » (1796-1797). Philippeville, l’hôtel de ville À l’intérieur est conservé l’uniforme du capitaine JeanBaptiste-Joseph Cardron, né à Philippeville en 1786. En 1804, il s’engage dans le 9e léger de Longwy et entame sa carrière militaire. Avec son régiment, il combat comme sous-lieutenant en Espagne en 1810 et est blessé à Chiclana. Devenu lieutenant, il sert en Saxe en 1813 et est une fois encore blessé à Bautzen. Nommé capitaine à la fin de cette année, il reçoit le commandement de la compagnie de carabiniers du 4e bataillon. Resté fidèle à l’empereur dès les premiers jours de la débâcle en 1814, il démissionne après la bataille de Waterloo et rentre à Philippeville. Admis au service de l’armée des Pays-Bas en 1817, il démissionne moins de deux ans plus tard. En 1830, il prend une parte active aux événements révolutionnaires belges et se voit confier le commandement de l’escorte chargée de conduire les prisonniers hollandais à Namur. Il décède à Philippeville le 25 juillet 1845. Rixensart, le château Reconnu patrimoine exceptionnel de Wallonie, le château de Rixensart a été construit au XVIIe siècle en lieu et place d’un donjon du XIIIe siècle. Érigé en style traditionnel en brique et pierre blanche, il est composé d’une avant-cour, d’un 129


Sur les traces de la Wallonie française

quadrilatère flanqué de tours d’angles et de l’église paroissiale Sainte-Croix, ancienne chapelle castrale. L’accès à l’ensemble se fait par une tour-porche qui mène dans la cour, vers l’entrée principale du château, ornée d’un portail de style baroque. À l’intérieur sont conservées des armes ramenées par le savant Monge de sa participation à l’expédition d’Égypte 14. Soignies/Naast, l’ancienne école française Précédée d’un jardinet dont l’entrée est marquée par deux colonnes ioniques à base décorée de festons avec la date de 1803, l’ancienne école française de Naast présente une façade d’un niveau et demi de quatre travées. Celle-ci est percée de baies à encadrement mouluré et reliées par des chaînes à hauteur des linteaux et des appuis de fenêtres. La travée d’entrée de l’édifice est surmontée d’un entablement à frise orné de motifs feuillagés et d’un cartouche sur lequel est gravée l’inscription « LA(N) XII RE(PUBLIQUE) / ECOLE FRANCAISE – PENSIONNAT / MDCCCIII ». 14

Sur Gaspard Monge, voir l’article sur le château de Seraing dans le chapitre consacré aux monuments liés à des personnages historiques de la période française.

Verviers, le musée d’archéologie et de folklore Le musée d’archéologie et de folklore de Verviers est installé dans l’ancienne maison Cornet, une belle bâtisse de trois niveaux de style Louis XV érigée en 1757 par le bourgmestre de Verviers. Parmi les riches collections du musée figurent plusieurs souvenirs du général de brigade Henri-Antoine Jardon, tué au combat de Négrelos au Portugal le 25 mars 1809. Outre des portraits, armes et souvenirs personnels, on trouve également l’uniforme du militaire. Né à Verviers en 1768, il s’intéresse très tôt à la chose militaire. Il prend part aux événements de 1789 en tant que sous-lieutenant et combat les troupes du cercle de l’Empire. En 1790, il se réfugie en France après l’invasion de la Belgique par les Autrichiens et prend du service dans la légion liégeoise en 1792. Il fait ainsi partie des volontaires au service de la jeune République française et est rapidement nommé capitaine. Devenu général de brigade, il intègre l’armée du Nord pendant les campagnes de 1794 et commande ensuite le département de la Dyle. En 1808, il suit l’empereur en Espagne et prend part à la campagne du Portugal l’année suivante. Blessé, il décède le 25 mars 1809 à São Martinho do Campo, non loin de Braga. Son nom est gravé sur l’arc de Triomphe à Paris. Le musée compte également dans ses réserves un buste de Napoléon, autrefois situé sur la pompe du Brou, installée dans la rue du même nom. L’idée d’installer une pompe à cet endroit remonte au 17 juin 1836, époque où de nombreux admirateurs de l’empereur subsistent à Verviers. La pompe est inaugurée le 15 août 1837 et est constituée d’un socle et d’un corps de pilier massif en pierre, le tout sommé du buste de Napoléon, coulé à Verviers, dans la fonderie de MM. Houget et Teston. Entre 1848 et 1880, la section verviétoise de l’association des anciens frères d’armes de l’empire français y fête chaque année le souvenir de l’empereur. La construction en 1878 du barrage de la Gileppe eut comme conséquence de voir disparaître une à une les pompes de la ville de Verviers ; celle du Brou est démontée et revendue à la commune de Dison en 1886. Le buste de Napoléon est acquis à cette époque par Houget à titre privé ; sa famille en fait don au musée de Verviers par la suite. L’œuvre s’y trouve toujours dans les réserves.

Portrait du général Jardon à cheval, lithographie, s.d. Photo J. Spitz © Collections Musées de Verviers

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Sur les traces de la Wallonie franรงaise LE PATRIMOINE FUNร RAIRE



LE PATRIMOINE FUNÉR AIRE

Le patrimoine funéraire de la période française est lui aussi riche et varié. Aux quatre coins de la Wallonie, nous trouvons ainsi des tombes de prêtres réfractaires, de soldats de la Grande Armée, de révolutionnaires. Sous l’impulsion de Napoléon, les cimetières se décentrent et évoluent au début du XIXe siècle. Alors Premier Consul, Bonaparte décrète que « chaque citoyen a le droit d’être enterré quelle que soit sa race ou sa religion » ; les comédiens et autres excommuniés reçoivent ainsi le droit de sépulture qui leur était jusque-là interdit. Une ordonnance royale française de 1776 interdisait déjà d’enterrer les morts intra muros mais il faut attendre le décret impérial du 12 juin 1804 afin que soit prohibée l’inhumation dans les églises et les enceintes des villes. L’inventaire des sépultures et monuments funéraires de la période française est important. Nous ne signalons ici qu’une série de monuments qui témoignent clairement des bouleversements de la période française ou dont l’iconographie et les inscriptions commémorent de manière claire le régime. Amay, le monument funéraire de Jean-Mathias Jansen Dans le cimetière communal d’Amay se trouve la sépulture de Jean-Mathias Jansen, caporal en 1796, sergent en 1799 puis nommé lieutenant dans l’infanterie de ligne en 1812. Sa tombe a été restaurée par la délégation belge de l’association pour la conservation des monuments napoléoniens en 1987. À cette occasion une plaque de l’ACMN y a été apposée. On y retrouve le monogramme de l’empereur, une aigle et des palmes. Le monument funéraire possède une longue inscription sur laquelle est résumée la carrière du défunt : « Ici repose JeanMathias Jansen (1772-1852), soldat en 1789, capitaine en 1813. Campagnes : 1803-1809 Allemagne, 1811-1812 Espagne, 18131814 Italie. Fait chevalier de la Légion d’honneur le 15 mars 1814 pour sa brillante conduite à la bataille de Mincio le 15 février 1814 ».

Andenne/Petit-Waret, la tombe de Pierre Stiénon Le cimetière de Petit-Waret, section de la localité de Landenne, abrite la tombe d’un soldat des guerres napoléoniennes. L’épitaphe de Pierre Stiénon précise qu’il fut « décoré de la croix de fer de Napoléon Ier » ; le soldat fut en fait décoré de la médaille de Sainte-Hélène, qu’il demanda à Napoléon III sous le Second Empire. Pierre Stiénon est décédé le 3 mai 1877 à l’âge de 93 ans. Andenne/Seilles, la stèle d’Édouard de Mercx de Corbais Dans le chœur de l’église Saint-Étienne de Seilles se trouve une stèle à la mémoire du chef d’escadron Édouard de Mercx de Corbais. Officier au service de l’Autriche entre 1805 et 1809, il passe au service de l’empire français comme capitaine au 8e chevau-légers lanciers et prend part à la douloureuse campagne de Russie au cours de laquelle il est grièvement blessé et fait prisonnier. Transféré à Saratov, sur la Volga, il parvient à s’échapper le 4 août 1813, après 9 mois de captivité et à rejoindre le QG impérial à Dresde. Napoléon le promeut chef d’escadron pour sa bravoure. Il participe ensuite aux batailles de Kulm, Pirna, Leipzig et Hanau, où il est une fois encore blessé. En 1814, il prend part à la bataille de Paris avant le premier exil de l’empereur. Il rejoint ensuite l’armée néerlandaise et sert en Belgique dans les rangs de l’armée des Pays-Bas pendant la campagne de 1815. Édouard de Mercx de Corbais est inhumé dans la sépulture de famille, dans le cimetière jouxtant l’église. Anhée/Denée, la pierre tombale de Ghislain Aigret Né le 26 janvier 1793 à Bioul, Ghislain Aigret entame sa carrière militaire en 1812 en tant que conscrit. Il intègre le 1er régiment d’artillerie à pied de Strasbourg. Devenu par la suite canonnier au corps impérial d’artillerie, il est porté déserteur le 14 février 1814 à Maestricht et réformé en 1815 par le 133


Sur les traces de la Wallonie française

La dalle funéraire d’Édouard de Mercx de Corbais dans l’église de Seilles. Photo de 1944 © Bruxelles, KIK-IRPA

conseil de milice. Il conserve néanmoins le droit de revendiquer sa participation aux campagnes de 1813 et 1814. Il meurt à Denée le 21 mai 1868 après avoir reçu de Napoléon III la médaille de Sainte-Hélène. Sa dalle funéraire est encastrée dans un mur de l’église Saint-Rémy de Denée ; le reste de la tombe semble perdu. On y lit une inscription difficilement déchiffrable : « Sous cette tombe reposent M. Ghislain Aigret, décoré de la médaille de Sainte-Hélène (…) ». Aubange/Athus, la tombe d’un prêtre réfractaire Dans le cimetière d’Athus se trouve une dalle de schiste datée de 1851. Elle rend hommage à un prêtre ayant été déporté pour avoir refusé de prêter le serment de fidélité à la République. La dalle est gravée de l’inscription suivante : « En généreux confesseur a courageusement refusé de prêter le serment schismatique prescrit par la constitution civile du 134

La pierre tombale de Ghislain Aigret à Denée. Photo de 1972 © Bruxelles, KIK-IRPA

clergé de France, préférant la prison et l’exil au sacrifice de sa conscience et a langui pendant trois ans dans les cachots de l’île de Ré. Dieu le récompense ». L’île de Ré, fortifiée par Vauban sous Louis XIV, abrite notamment une importante prison. Sous la Révolution, le Consulat et l’Empire, elle voit passer entre ses murs des royalistes, des Jacobins, des Girondins, et des réfractaires. Après 1815, les républicains et les napoléoniens prennent leur place ! Les prêtres réfractaires comptent parmi les plus nombreux prisonniers de la citadelle de l’île de Ré. Leur incarcération à cet endroit est décidée par l’Assemblée législative le 26 août 1792. Arrêtés en France, puis dans les départements réunis après l’annexion, ils y sont conduits par petits groupes. À la fin du XVIIIe siècle, on y compte plus d’un millier de ministres du culte qui avaient refusé de prêter le serment. Le Concordat de 1801 mit fin à cet état de fait.


Le patrimoine funéraire

Le Consulat Régime remplaçant le Directoire et mis en place au lendemain du coup d’État du 18 brumaire de l’an VIII (9 novembre 1799), le Consulat est organisé par la Constitution de l’an VIII, promulguée le 13 décembre 1799. Le pouvoir est confié à trois consuls. Le Premier Consul détient la réalité du pouvoir, les deux autres ne disposent que d’une voix consultative. Le nouveau régime est ainsi caractérisé par un pouvoir personnel, détenu par Bonaparte. En 1802, avec l’instauration de la Constitution de l’an X, Bonaparte est proclamé consul à vie, dernière étape avant le sénatus-consulte du 18 mai 1804 et la Constitution de l’an XII qui actent la disparition du Consulat au profit d’un régime impérial. Brunehaut/Hollain, la dalle funéraire d’Albéric du Chastel de la Howardries Membre de la prestigieuse famille du Chastel de la Howardries, seigneurs du lieu sous l’Ancien Régime, Albéric du Chastel est né en 1788. Entré au service militaire, il entame sa carrière au service de la France au grade de souslieutenant en 1809. Il participe à la campagne de Russie et prend part à la campagne de 1815 en qualité de capitaine du 2e chasseurs à cheval. C’est dans ce régiment qu’il combat à la bataille des Quatre-Bras. Il poursuit sa carrière dans l’armée hollandaise avant d’entrer en politique. Il est membre de la chambre des représentants du royaume des Pays-Bas entre 1819 et 1830. Resté célibataire, il obtient le 2 novembre 1857 la reconnaissance de la noblesse belge et est titré comte. Il repose dans l’église Saint-Martin de Hollain. Sa dalle funéraire a été sculptée dans du marbre blanc en 1864. Elle comporte dans sa partie supérieure les armoiries du défunt ainsi que sa devise « Porte en soy honneur et foy » et, dans sa partie inférieure, l’épitaphe suivante : « À la mémoire de Monsieur Albéric Ernest Henri Marie-Joseph, comte du Chastel de la Howardries, en son vivant chevalier de la Légion d’honneur, commandeur de l’ordre du lion néerlandais, chevalier grande croix de l’ordre grand ducal, de la couronne de chêne, bourgmestre d’Hollain, né à Tournai le 31 décembre 1788, décédé pieusement à Hollain le 27 avril 1864 (…) ». Brunehaut/Rongy, le monument de la famille de Roisin Dans l’église Saint-Martin, reconstruite en 1923, a été replacé un obélisque en mémoire de la famille de Roisin. Parmi les membres de cette famille, François fut sous-lieutenant de cuirassiers pendant les campagnes napoléoniennes comme l’indique son épitaphe : « À la mémoire de Baudry F. baron de Roisin, officier au 4e cuirassiers au service de la France, tombé au champ d’honneur le 21 octobre 1812 près de Polotsk en Russie ». Il s’agit ici d’un cénotaphe, le corps du malheureux n’ayant jamais été rapatrié de Russie. Au-dessus de son épitaphe se trouvent les armoiries de la famille de Roisin,

La dalle funéraire d’Albéric du Chastel de la Howardries à Hollain. Photo de 1977 © Bruxelles, KIK-IRPA

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Sur les traces de la Wallonie française

Le monument funéraire de la famille de Roisin dans l’église de Rongy © Bruxelles, KIK-IRPA

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Le patrimoine funéraire

sculptées dans du marbre blanc. L’autre face du monument est ornée d’une cuirasse et d’un casque. Le cénotaphe rend également hommage à Baudry L. N., baron de Roisin, seigneur de Rongy, membre de l’ordre équestre du comté de Hainaut, décédé en 1760 ainsi qu’à une baronne de Roisin, ancienne chanoinesse du chapitre de Maubeuge décédée en 1832. Bütgenbach/Elsenborn, un mémorial prussien En 1913, alors qu’Elsenborn se trouve dans l’empire allemand, un petit mémorial est érigé non loin de l’église SaintBartholomé. Il rend hommage à quatorze soldats originaires de la localité tombés lors des batailles menées par Napoléon un siècle plus tôt. Le monument est érigé dans cette commune frontalière de la Belgique, non loin d’un camp militaire fondé par les Allemands en 1894 et récupéré par la suite par l’armée belge. Court-Saint-Étienne, les monuments en hommage à Albert Goblet d’Alviella Parmi les membres de cette illustre famille enterrés dans le cimetière de Court-Saint-Étienne se trouve Albert Joseph

Goblet d’Alviella. Né à Tournai le 26 mai 1790, fils d’un magistrat et membre du conseil municipal de la ville, il entre en 1802 à Saint-Cyr et obtient le prix impérial de mathématiques au concours général en 1807. Il intègre en 1809 la prestigieuse école polytechnique de Paris et en sort officier du génie en 1811. Sous-lieutenant à l’époque, il fait la campagne d’Espagne dans la Grande Armée et se distingue au siège de Saint-Sébastien en 1813. Il est ensuite décoré de la croix de la Légion d’honneur. Après la capitulation de l’empereur, il quitte le service de la France et intègre les troupes de Guillaume Ier des Pays-Bas en février 1815. C’est dans les troupes hollando-belges qu’il combat aux Quatre-Bras et à Waterloo en qualité d’officier d’ordonnance. Il prend part aux journées de septembre en 1830 et poursuit une carrière prestigieuse au service de la jeune Belgique : ministre de la guerre du gouvernement provisoire, député libéral de l’arrondissement de Tournai, aide de camp de Léopold Ier, ministre plénipotentiaire à Londres, Berlin et Lisbonne, ministre des affaires étrangères et ministre d’État ! Il décède à Bruxelles le 5 mai 1873. Deux monuments commémorent son souvenir à CourtSaint-Étienne, patrie de son fils unique, le comte Louis

Le buste d’Albert Goblet d’Alviella sur le monument de la place communale de Court-Saint-Étienne © J. Tordoir

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Sur les traces de la Wallonie française

Goblet d’Alviella, époux de Coralie d’Auxy, propriétaire du château de Court-Saint-Étienne. Un monument a été érigé sur la place communale en 1887 à l’initiative de son petit-fils, Eugène Goblet d’Alviella. Un buste en bronze réalisé par le sculpteur Jef Lambeaux est installé dans une niche se trouvant au centre d’une pyramide tronquée de pierre bleue décorée des armoiries familiales. D’une hauteur totale de 4 m, le monument repose sur un piédestal sur lequel se trouve l’inscription suivante : « L[ieutenan]t général comte Goblet d’Alviella, inspecteur général du génie, ministre de la guerre et des affaires étrangères, ministre plénipotentiaire et ministre d’État, 1790-1873 ». Le défunt repose dans le mausolée familial, situé dans le cimetière communal. Ce splendide monument funéraire a été érigé en 1887 par l’architecte Adolphe Samyn à la demande du comte Eugène Goblet d’Alviella. De style éclectique, on y accède par une allée bordée d’ifs dont l’entrée est gardée par deux sphinx. Réalisé en pierre bleue, le mausolée comporte une multitude d’éléments iconographiques empruntés à l’art égyptien, à la Grèce antique, à l’architecture romane… une plaque commémorative placée à l’intérieur mentionne les membres de la famille qui y sont enterrés, parmi lesquels Albert Goblet d’Alviella et son épouse, transférés sous ce monument après son édification. Écaussinnes/Écaussinnes-Lalaing, la sépulture de Charles van der Burch Au chevet de l’église Sainte-Aldegonde d’ÉcaussinnesLalaing se trouve la tombe de la famille van der Burch, dans laquelle se trouve Charles Albert Louis Alexandre Henri van der Burch. Né à Aubry-du-Hainaut en France le 24 avril 1779, il est l’aîné de trois frères et intègre rapidement la sphère royale en étant page de Louis XVI. À la différence de ses deux frères cadets, Charles n’entre pas au service de l’empereur et ne prend pas part aux campagnes militaires d’Empire, en signe d’attachement à l’Ancien Régime. Il épouse en 1796 Marie Félicité de Rodoan, apparentée au baron von Vincent, gouverneur général autrichien des provinces belges du 5 mai au 30 juillet 1814. Au cours de la campagne de France, il reçoit le 13 février 1814 la permission de créer un régiment de cavalerie de la part de Charles-Auguste de Saxe-Weimar, commandant en chef des troupes alliées en Belgique. Ce régiment porte le nom de « chevau-légers van der Burch » et son créateur en devient colonel dès le 14 février 1814. Le régiment prend le nom de « chevau-légers belges » le 1er septembre et son commandement est confié le 17 novembre au lieutenant-colonel Mercx de Corbais 1. Il poursuit ensuite une carrière d’importance : aide de camp de Guillaume Ier d’Orange, chevalier de l’ordre de SaintVladimir de Russie, commandeur de l’ordre du lion néerlandais puis chevalier de l’ordre de Léopold. Il décède au château d’Écaussinnes le 4 mars 1854. Sa pierre tombale est ornée de ses armoiries et d’une longue épitaphe : « Ici repose le corps de Charles Albert Louis Alexandre Henri, comte van 1

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Voir plus haut.

der Burch et d’Hubersart, lieutenant général, commandeur de l’ordre du lion Belgique, chevalier des ordres de Léopold et de Saint-Vladimir de Russie. Il fut aide de camp de S.M. Guillaume Ier, roi des Pays-Bas, commandant militaire de la province de Brabant, président de l’ordre équestre de la province de Hainaut, membre de la première chambre des ÉtatsGénéraux du royaume des Pays-Bas, conseiller militaire à la haute cour militaire du royaume de Belgique (…) ». Ellezelles/Wodecq, la dalle funéraire du général-major Loix Né le 1er septembre 1784 à Wodecq, Désiré-Joseph Loix s’engage comme volontaire au 82e régiment d’infanterie de ligne le 10 octobre 1805. L’essentiel de sa carrière sous l’Empire se déroule dans la péninsule ibérique où son régiment se trouve entre 1807 et 1813. Il participe entre autres au siège d’Almeida, du 24 juillet au 28 août 1810. Avant la chute de l’Empire, compte-tenu de ses capacités et de sa bravoure, Loix est promu capitaine et participe aux batailles menées dans les Pyrénées en 1814. Il est ensuite intégré dans l’armée des Pays-Bas avec son grade de capitaine et participe aux combats du 18 juin 1815. Démissionnaire de l’armée néerlandaise le 12 novembre 1830, il devient lieutenant-colonel de l’armée belge. Il décède le 15 décembre 1852. Désiré-Joseph Loix repose aujourd’hui à l’ombre de l’église Saint-Quentin. Son monument funéraire est encastrée contre un mur de la tour et comporte l’inscription suivante : « À la mémoire de M. D. J. Loix, général-major, officier de l’ordre de Léopold, chevalier de la Légion d’honneur, né à Wodecq le 1er 7bre 1784, décédé à Mons le 15 Xbre 1852. Entré au service en 1805, il fit les campagnes d’ouest, celles d’Espagne et de Portugal ». Enghien, les monuments de l’église des Capucins Parmi les membres de la prestigieuse famille d’Arenberg inhumés dans la chapelle des Capucins d’Enghien figurent deux personnages liés à l’histoire impériale. Le prince Louis d’Arenberg fut membre du Sénat de Paris en 1806 et fait comte d’Empire par Napoléon en 1808. Le duc ProsperLouis d’Arenberg épousa quant à lui la nièce de l’impératrice Joséphine, Stéphanie Tascher de la Pagerie, en premières noces. Il fut colonel du 27e chasseurs à cheval entre 1808 et 1811. Érezée, la croix Ledoyen Anciennement au cimetière et aujourd’hui située dans l’église Saint-Laurent-et-Saint-Monon d’Érezée, se trouve une croix funéraire d’un prêtre réfractaire, lui aussi déporté sur l’île de Ré. La croix est gravée de l’inscription suivante : « Ci-gît le corps de Henri Joseph Ledoyen, curée d’Érezée où il est décédé le 27 mars 1831 à l’âge de 68 ans, administré des Sacrements de notre mère la Sainte Église, qui fut déporté à l’île de Rhé [sic] l’an 1798 ayant été mis dans 36 prisons. RIP. Amen ». Cet épitaphe se trouve de part et d’autre de la croix funéraire, décorée de symboles religieux : chandeliers, calice, hostie…


Le patrimoine funéraire

Les prêtres réfractaires Le 12 juillet 1790, l’Assemblée nationale constituante vote la « constitution civile du clergé » dans le but d’appliquer au domaine religieux les principes révolutionnaires déjà en vigueur en matières administrative, judiciaire et financière. Désormais, les départements et les diocèses correspondent, les curés et évêques sont élus par les citoyens de la paroisse ou du département. Les curés doivent prêter un serment afin de recevoir un traitement de l’État. Le clergé est massivement réfractaire à ces mesures. Le décret du 19 fructidor an V (5 septembre 1797) ordonne à tous les prêtres et religieux de prêter un serment de fidélité à la République et de haine à la royauté. La mise en application du décret est immédiate et oblige les religieux à faire un choix. Peu furent les prêtres dits « assermentés » qui firent allégeance à un régime fortement anticlérical. Plus nombreux, les « insermentés » estimaient plus importante leur fidélité à l’Église. Beaucoup furent déportés en Guyane ou sur l’île de Ré et y perdirent la vie. était Récollet à Bastogne au moment de la suppression vers 1796, il fut ensuite nommé vicaire à Bastogne, où il exerça jusqu’en 1813 (…) ». Ferrières/Vieuxville, la tombe de E.J. Regnier Dans le cimetière de Vieuxville se trouve une tombe discrète qui rappelle le souvenir d’une des figures de la seconde occupation française dans nos régions. Étienne-Joseph Regnier, révolutionnaire français, était le commandant de la section d’artillerie du troisième bataillon de la Côte-d’Or pendant les premières heures de la République. Suite à l’arrivée des Français en principauté après la bataille de Fleurus, il est envoyé à Liège pour y tenir le rôle d’accusateur public auprès du tribunal criminel révolutionnaire. Le monument funéraire a été taillé dans la pierre en 1819.

La croix Ledoyen à Érezée. Photo de 1973 © Bruxelles, KIK-IRPA

Fauvillers/Strainchamps, la dalle funéraire de Nicolas Hesse Cette dalle de schiste, autrefois adossée au mur de clôture du cimetière de Strainchamps et aujourd’hui déplacée, évoque le sort des ecclésiastiques après la suppression des ordres religieux en 1796. On y trouve l’inscription suivante : « Ci-gît le corps de sire N[ico]las Hesse, né à Luxembourg le 18 VIIIbre 1758, décédé le 30 mai 1837 à l’âge de 81 ans. Il entra au couvent de Luxembourg de l’ordre de Saint-F[ran]çois, de là il fut reçu à celui de Tournay où il fut ordonné prêtre en 1784, il

La tombe de l’accusateur public dans le cimetière de Vieuxville. Photo de 1943 © Bruxelles, KIK-IRPA

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Sur les traces de la Wallonie française

Accusateur public Fonction créée au cours de la Révolution française par le décret du 1er décembre 1790, on trouve un accusateur public auprès de chaque tribunal criminel. Il est chargé de poursuivre l’accusation et de surveiller les officiers de police du département. Les autres juges du tribunal sont élus. Le 17 août 1792, un décret fixe le nombre d’accusateurs publics à deux pour chaque tribunal. Le 10 mars 1793, un décret crée le tribunal révolutionnaire ; un accusateur public est attaché à chacune de ces juridictions et est assisté de deux substituts. À Liège, c’est au Français Étienne-Joseph Regnier, capitaine commandant de la section d’artillerie du troisième bataillon de Côte-d’Or, qu’est confié le poste. Floreffe, la tombe de Corneille Stevens Né à Wavre en 1747 et ordonné prêtre en 1774, Corneille Stevens devient chanoine de la cathédrale de Namur peu après. Après la bataille de Fleurus de 1794, il fuit en Allemagne en compagnie de l’archevêque de Malines dans le but d’éviter de se voir imposer la constitution civile du clergé. Il rentre à Namur après le coup d’état de Napoléon en 1799 et devient grand vicaire du diocèse le 4 septembre. Le siège est alors vacant dans le chef-lieu de Sambre-et-Meuse et Stevens occupe le poste jusqu’à la nomination d’un premier évêque concordataire en 1802. Stevens rejette ce concordat, estimant que Napoléon s’y voit accorder trop de pouvoirs. Influent et actif dans l’opposition à la politique religieuse de l’empereur, il se retrouve à la tête d’un mouvement de protestation, le Stévenisme, et passe à la clandestinité. Sa tête est mise à prix et il est traqué durant tout le reste de la période française. Après la chute de l’Empire, il se réconcilie avec l’évêque de Namur Charles Pisani de la Gaude et quitte le mouvement qu’il avait jusque-là dirigé. Il meurt à Wavre en 1828 et est inhumé dans l’église Saint-Jean-Baptiste. Une dalle funéraire est apposée contre le mur du champ de repos et comporte une inscription latine. Lorsqu’un nouveau cimetière est aménagé à Wavre en 1855, la pierre est enlevée de l’endroit et placée au nouveau champ des morts. Ce n’est que par la suite que cette sépulture est transférée à l’abbaye de Floreffe. Hamois/Achet, la tombe de Jean-Joseph Meunier Le cimetière communal d’Achet abrite la sépulture d’un grognard de l’Empire. Né le 26 décembre 1790, ce jeune berger intègre le 4e bataillon du 30e régiment d’infanterie de ligne en qualité de grenadier le 3 mars 1813, en vertu du processus de conscription. Il participe à la campagne d’Allemagne de 1813 et perd un doigt à la bataille des Nations, du 16 au 19 octobre 1813. Cette blessure lui vaut le droit d’obtenir son congé de réforme le 16 avril 1814. Sous le Second Empire, il obtient de Napoléon III la médaille de Sainte-Hélène. Il décède à l’âge de 98 ans le 30 août 1889. 140

Hannut/Blehen, la pierre tombale de Ferdinand de Collaert Parmi les monuments remarquables du village de Blehen figure la chapelle Saint-Donat, située en plein champ et érigée en 1755 en brique et calcaire. À l’intérieur, à côté d’un bel autel baroque se trouve la pierre tombale du colonel de Collaert. On y trouve l’inscription suivante : « Ci-gît Ferdinand Joseph Gérard de Collaert, né à Blehen le 16 décembre 1752. En son vivant chevalier de la Légion d’honneur, colonel du 11e régiment de hussards au service de l’Empire français. Entre autres campagnes, il fit celle de Russie en 1812 et 1813. Les champs de bataille de la Moscova et de Mojaisk furent les témoins de son intrépidité. La mort l’épargna lorsqu’il affrontait devant l’ennemi. Il l’attendait avec calme et résignation dans sa retraite à Tongres où il mourut en héros chrétien le 28 octobre 1836 ». Jodoigne/Zétrud-Lumay, la dalle funéraire du comte Eugène d’Astier Né le 13 juin 1796 à Zétrud-Lumay, il entre au service dès 1810 et a peut-être servi au 27e régiment de chasseurs à cheval bien qu’aucun document ne puisse nous le confirmer. Il devient sous-lieutenant en 1814 et passe ensuite dans l’armée des Pays-Bas où il est nommé premier lieutenant le 11 novembre 1814. Il sert dans le 2e régiment de carabiniers belges pendant la bataille de Waterloo. Gravement blessé, il agonise longuement avant de décéder le 19 juillet 1817. Il est inhumé dans la chapelle Notre-Dame-de-Bon-Secours située au milieu des champs dans son village natal. Au sol, se situe sa dalle funéraire gravée dans les marbres blanc et noir. On y retrouve des armoiries dans la partie supérieure et son épitaphe dans la partie inférieure : « Ci-gît Messire Eugène comte d’Astier, lieutenant en 1er au rég[imen]t des cuirassiers belges (…) présent à la bataille de Waterlo [sic] le 18 juin 1815. Décédé à Bruxelles le 19 juillet 1817 âgé de 21 ans ». La chapelle abrite également la sépulture de ses deux frères, eux aussi combattants des guerres d’Empire : Honoré-Dominique d’Astier, officier au service de la France jusqu’en 1814 et Henri-LouisMarie d’Astier, sous-lieutenant au régiment des chevau-légers belges, capitaine au 27e chasseurs à cheval. Liège, le cimetière de Robermont Le site du cimetière de Robermont était occupé par une abbaye sous l’Ancien Régime. Dès le 25 décembre 1792, les Français ordonnent aux religieuses de quitter leur établissement afin d’y installer les troupes républicaines. À l’approche des armées impériales au début de l’année 1793, les Français abandonnent les lieux. Le site est ensuite pillé par les habitants du coin. Les combats entre Français et Autrichiens en juillet 1794 finissent de ravager l’ancienne abbaye. Dans les locaux encore quelque peu salubres, les Français parquent ensuite des bestiaux destinés aux troupes, qui prennent possession des lieux au cours de l’hiver 1795. Les religieuses reviennent quelques mois dans leur monastère mais leur communauté est supprimée en 1796 et le couvent déclaré bien national. Le site de l’abbaye est vendu en 1797. La ville de Liège achète le jardin


Le patrimoine funéraire

La chapelle Notre-Dame-de-Bon-Secours à ZétrudLumay. Photo de 1944 © Bruxelles, KIK-IRPA

dans le but de l’utiliser comme cimetière : le lieu est bien localisé et met la ville à l’abri des maladies. Liège devance ainsi le décret impérial de 1804 en décidant de transférer les sépultures extra-muros. Dès le 27 janvier 1810, la municipalité doit arrêter un premier agrandissement du cimetière qui, aujourd’hui encore, est le plus grand cimetière communal. On y trouve de très belles sépultures dans un vaste parc arboré que l’on considère souvent, à raison, comme le « Père-Lachaise liégeois ». Parmi les personnalités inhumées à Robermont, on retrouve des révolutionnaires et des soldats d’Empire. Englebert Botty C’est au grenadier de la garde impériale, sorte d’armée dans l’armée composée des meilleurs éléments et qui avait le pas sur le reste de l’armée. Sa tombe, plus que modeste, comporte une petite plaque sur laquelle est gravée cette inscription laconique « Grenadier de la Garde impériale de la période 1792-1815 ». Louis Brixhe Né à Spa en 1787, fils d’un révolutionnaire qui fut membre des Cinq-Cents, il entre à l’école militaire de Fontainebleau le 8 juin 1806. Il participe aux campagnes de Pologne dès

La dalle funéraire du comte Eugène d’Astier dans la chapelle NotreDame-de-Bon-Secours. Photo de 1972 © Bruxelles, KIK-IRPA

1806 et 1807. Devenu sous-lieutenant au 13e dragons, il sert en Espagne en 1809 et au Portugal en 1810. Il est promu lieutenant le 1er avril 1811 et fait chevalier de la Légion d’honneur par décret impérial du 28 juin 1813. Capitaine la même année, il participe à la campagne de Saxe puis à la campagne de France en 1814. Il quitte le service de la France après la chute de l’Empire. En octobre 1830, il est membre de la commission de guerre de la jeune Belgique et devient le premier colonel de la gendarmerie belge. Pensionné en 1835, il meurt à Liège le 4 décembre 1876. Enterré avec plusieurs membres de sa famille, sa sépulture est sobrement décorée d’un bloc de granit gravé d’inscriptions parmi lesquelles on retrouve celleci : « Louis G. M. Brixhe, général, décédé à Liège le 4 Xbre 1875 à l’âge de 80 ans ». 141


Sur les traces de la Wallonie française

La tombe de Jacques-Joseph Fabry au cimetière de Robermont © IPW

Eugène Crossée Né le 5 novembre 1796 à Dolembreux, il s’engage dans les gardes d’honneur le 5 juillet 1813. Il participe à la campagne de Saxe la même année et à la campagne de France en 1814, après laquelle il quitte le service de l’Empire le 7 juin 1814. Il sert ensuite probablement les Pays-Bas et termine sa carrière comme général-major de l’armée belge. Il décède en activité le 27 août 1855. Il repose dans un très beau monument de petit granit de style néogothique sur lequel se trouve l’inscription : « À la mémoire de Crossée Jh Victor, général-major, officier de l’ordre de Léopold, né à Dolembreux le 5 novembre 1796, décédé au camp de Beverloo le 27 août 1855 ».

prince-évêque, il prend le chemin de l’exil vers Bouillon puis Paris. De retour à Liège après l’entrée en ville du général Dumouriez en novembre 1792, il est nommé président du conseil municipal et devient membre de la convention nationale liégeoise, organe législatif révolutionnaire qui fut notamment à l’origine de la démolition de la cathédrale SaintLambert, et se prononce en faveur de la réunion du pays de Liège à la France. En février 1793, il préside pour quelques jours l’administration générale provisoire du pays de Liège avant le retour des troupes autrichiennes. Fabry doit à nouveau se réfugier à Paris avec d’autres révolutionnaires liégeois avant d’y revenir après la libération de Liège en juillet 1794. Observateur de la mise en place du régime français dans nos régions, il se retire pourtant de la vie politique. Sa monumentale sépulture gravée dans la pierre représente un tombeau de style classique, surmonté d’une croix et orné de l’inscription suivante : « Ici reposent les cendres de Jacques Joseph Fabry, ancien bourgmestre de la ville de Liège, décédé le 25 pluviôse an 6 (11 février 1798) (…) ».

Jacques-Joseph Fabry Une des figures de la Révolution liégeoise est enterrée dans la parcelle 40. Mort le 11 février 1798 dans les derniers feux de la République, il était devenu bourgmestre d’une municipalité liégeoise dès le 18 août 1789. Farouche ennemi du

Charles de Goeswin Capitaine au service de l’Autriche puis de la France, il entre dans la Grande Armée et obtient la Légion d’honneur. Il devient lieutenant-colonel au service des Pays-Bas après la chute de l’Empire et prend sa retraite en 1823. Sa sépulture est

La sépulture de Louis Brixhe au cimetière de Robermont © IPW

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Le patrimoine funéraire

constituée d’une croix de pierre entourée d’une petite grille en fer forgé. On y lit l’épitaphe suivante : « Ici repose le baron Charles Ernest de Goesvin [sic], colonel et chevalier de la Légion d’honneur, né à Liège le 7 février 1777, y décédé le 31 octobre 1858 ». Jean-Nicolas L’Olivier Volontaire au service de Napoléon dès l’âge de 12 ans, il devient caporal, sergent, sous-lieutenant puis lieutenant de l’armée impériale. Blessé à la bataille de Wagram, il est à nouveau blessé et fait prisonnier en France pendant la campagne de 1814. Il parvient à s’enfuir et est décoré de la Légion d’honneur. En 1815, il se met au service de l’armée hollandaise et choisit le camp des patriotes en 1830. Son imposant tombeau de petit granit est entouré d’une grille en fer forgé et orné d’une plaque sur laquelle est gravée l’inscription suivante : « Ici reposent Monsieur Jean-Nicolas-Marie l’Olivier, lieutenant-général, commandant de la 3e division territoriale et d’infanterie, commandeur des ordres de Léopold, de la branche Ernestine de Saxe et de la Légion d’honneur (1792-1856) et son épouse (…) ».

La tombe de Jean-Nicolas L’Olivier au cimetière de Robermont © IPW

Insigne napoléonien qui référence les monuments d’Empire sur la tombe de Jean-Nicolas L’Olivier © IPW

Jean Leboutte Né à Liège le 6 décembre 1784, Jean Nicolas François Leboutte entre comme volontaire dans la jeune garde impériale le 10 septembre 1804 et devient grenadier d’élite. Il participe notamment aux batailles d’Austerlitz en 1805 et d’Iéna en 1807. Il fait ensuite les campagnes d’Espagne (1808, 18111812), d’Autriche (1809) et de Russie. Il devient capitaine en 1813 et participe à la campagne de Saxe la même année et à celle de France en 1814. Lors du premier exil de Napoléon, il reste dans l’armée française et est fait chevalier de la Légion d’honneur par Louis XVIII le 30 août 1814. Au retour de l’empereur, il participe aux diverses campagnes de 1815 et notamment à la bataille de Waterloo. Admis dans l’armée des PaysBas en 1818, il intègre ensuite l’armée belge dès le 23 octobre 1830. Aide de camp honoraire de Léopold Ier en 1831, il est promu général-major en 1841 et retraité en 1856 au grade de lieutenant-général. Il décède à Liège le 27 février 1867 après avoir reçu la médaille de Sainte-Hélène de Napoléon III. Sa tombe, des plus simples, est composée de grandes dalles de granit superposées en forme de cercueil. On y trouve l’inscription suivante : « À la mémoire de Jean-François-Nicolas Leboutte, lieutenant général, aide de camp honoraire du roi, décoré de la Croix de Fer, commandeur de l’ordre de Léopold, officier de la Légion d’honneur, médaillé de Sainte-Hélène ». Pierre Raikem Né le 9 novembre 1794 à Liège, il entame vraisemblablement sa carrière militaire dans les rangs de l’armée française en 1813 ou 1814. Il a plus que probablement servi sous l’Empire car Napoléon III lui a décerné la médaille de Sainte-Hélène. Il poursuit sa carrière au service des Pays-Bas (avec lesquels il prend part à la bataille de Waterloo), puis de la Belgique. Devenu officier de l’ordre de Léopold en 1851 et généralmajor en 1853, il est pensionné en 1857 et décède à Liège le 6 mai 1862. Sa sépulture est composée d’une simple stèle 143


Sur les traces de la Wallonie française

de petit granit gravée de l’inscription suivante : « Ici repose Pierre Joseph Raikem, général-major, décédé le 6 mai 1862 à l’âge de 68 ans (…) ». Pierre Thuillier 1781-1850, soldat de la Grande Armée. Jean-Charles van Landewyck Né de père belge en 1794 à Valenciennes, il s’engage comme volontaire au 112e de ligne le 22 mars 1805. Blessé à deux reprises en Allemagne en 1813, il a le grade de sergent au moment de recevoir son congé de l’armée en 1814. Devenu colonel du 6e régiment d’infanterie de l’armée belge, il meurt en service le 30 octobre 1847. Sa pierre tombale, sculptée dans du petit granit, comporte la dédicace suivante : « Les officiers du 6e régiment d’infanterie à leur colonel van Landewyck JeanCharles décédé le 30 octobre 1847 à l’âge de 55 ans. R.I.P. ». Jean-Nicolas Wery Autre soldat de la Grande Armée, Wery devient soldat au 4e voltigeur en 1809 et fusilier-chasseur en 1812. Avec ce corps d’armée, il participe à la campagne de Russie avant de rejoindre le 2e régiment de chasseurs à pied de la Garde impériale. Il obtient la médaille de Sainte-Hélène des mains de Napoléon III qui avait décerné cet honneur à tous les anciens

Plaque de l’association pour la conservation des monuments napoléoniens apposée sur la tombe de Jean-Nicolas Wery © IPW

La Légion d’honneur

La sépulture de Jean-Nicolas Wery dans le cimetière de Robermont © IPW

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Le décret du 19 mai 1802 crée une nouvelle distinction honorifique dont le nom est inspiré de la Rome antique et de la Legio honoratorum conscripta. Bonaparte désire fonder un ordre qui donnerait un souffle nouveau à l’élite de la France après dix années de guerre et de révolution. Les meilleurs Français se retrouvent dans cet ordre et se voient décerner la médaille pour s’être démarqués dans leur domaine et avoir ainsi donné l’exemple au reste du pays. Le Premier Consul préside cet ordre et est assisté d’une sorte de conseil d’administration. Chaque lauréat reçoit un traitement, allant de 250 à 5000 francs en fonction du titre décerné : légionnaire, officier, commandant et grand officier. Sous l’Empire, la Légion d’honneur évolue vers un ordre de chevalerie. Le décret du 11 juillet 1804 crée une décoration, l’étoile à cinq rayons doubles émaillée de blanc. L’insigne est en or pour les grands officiers, les commandants et les officiers et en argent pour les légionnaires. Le 30 janvier 1805 est créé le grade de grand cordon ; le 1er mai 1808, la Légion d’honneur est intégrée à la noblesse d’Empire : les membres de l’ordre portent désormais le titre de chevalier. Sous la Restauration, dès 1814, Louis XVIII rétablit tous les ordres monarchiques supprimés à la révolution mais conserve la Légion d’honneur.


Le patrimoine funéraire

soldats de son oncle qui en faisaient la demande. Cette récompense est d’ailleurs mentionnée dans son acte de décès en 1859. La stèle, classique, est surmontée d’une croix et taillée dans le petit granit. On y trouve l’inscription suivante : « Ici reposent les restes mortels de Nicolas Joseph Wery, ancien soldat de l’Empire aux chasseurs de la Garde impériale, ayant suivi Napoléon Ier dans les désastreuses campagnes de Russie en 1812, 1813 et 1814. Décédé le 12 S[eptem]bre 1859 à l’âge de 71 ans. Il est regretté de sa famille et de ses amis ». Meix-devant-Virton/Gérouville, la tombe de Christophe Jacmin Dans le cimetière communal de Gérouville se trouve la tombe d’une autre figure wallonne des armées napoléoniennes. Christophe-Charles Jacmin, caporal en 1804 puis sergentmajor, sert au 32e de ligne en Autriche, en Prusse, en Pologne et en Espagne entre 1808 et 1814. Promu sous-lieutenant en 1812 et lieutenant en 1813, il a probablement intégré la Garde impériale pendant les Cent-Jours : « Charles Jacmin, officier de la Garde impériale, chevalier de la Légion d’honneur, 17791842 ». Originaire de Verdun, il s’installe à Gérouville en 1825 et meurt à Arlon en 1842.

Mons, le cimetière Pierre François Blondel Un haut monument néoclassique de facture traditionnelle abrite la sépulture de la famille Blondel-Guillochin. Posé sur un socle de trois niveaux, il est orné en son sommet d’une croix posée sur un globe et de feuilles d’acanthes. Des plaques de marbre comportent les épitaphes des défunts parmi lesquelles celle-ci : « D.O.M. Ici reposent les corps de Mr Pierre François Blondel, avocat général à la cour impériale de Douai (…) pieusement décédé à Hyon le 22 août 1854 à l’âge de 56 ans (…) ». Narcisse Capiaumont Une haute colonne enrobée dans un drap funéraire abrite la sépulture d’un soldat des campagnes de la République. Le monument est posé sur un socle de trois niveaux dont la base présente un fronton triangulaire sur lequel s’inscrit une médaille de la Légion d’honneur. L’épitaphe du défunt est gravée sur le socle à l’avant du monument : « Monument élevé à la mémoire de Monsieur Narcisse Albert Philippe Capiaumont, chevalier de l’ordre royal de la Légion d’honneur, décédé à Mons

Le cimetière de Gérouville dans lequel repose Christophe Jacmin © IPW

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Sur les traces de la Wallonie française

le 19 décembre 1847 à l’âge de 76 ans. Il fit les campagnes de 1792 et 1793, en qualité de capitaine, et fut blessé à la bataille de Jemappes. Une prière s’il vous plaît, pour le repos de son âme ». Le monument des frères Duvivier Parmi les très belles sépultures présentes au cimetière de Mons se trouve l’imposant monument funéraire des frères Duvivier, très certainement une des plus belles tombes napoléoniennes hors de France. Réalisée par l’entrepreneur Émile Hoyaux, elle est l’œuvre de l’architecte Charles Damas Vincent (1820-1888). L’originalité de ce mausolée réside dans le fait qu’il est basé sur la notion de fratrie, thème moins fréquent dans l’architecture et la symbolique funéraires. IgnaceLouis Duvivier est capitaine adjudant-major aux chevaulégers polonais de la Garde impériale en 1807, chevalier de l’Empire en 1810 et major du 4e chasseurs à cheval en 1811 ; il sert entre autres en Russie et en Saxe. En 1814, il est nommé adjudant-commandant, chef d’état-major de la division Pajol. Lors de la campagne de 1815, il s’éloigne toutefois des armées napoléoniennes et commande le 8e hussards dans l’armée des Pays-Bas sous les ordres de Wellington. Son frère, Vincent

La tombe des frères Duvivier au cimetière de Mons © D. Timmermans

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Duvivier, est sous-lieutenant. Il sert au 3e dragons pendant la campagne d’Égypte avant d’être nommé capitaine en 1800. Il devient ensuite chef d’escadron au 21e dragons et participe aux célèbres batailles d’Austerlitz, Iéna et Eylau. Il est admis à la retraite en 1807. Le monument comporte un grand nombre d’inscriptions parmi lesquelles les noms de nombreuses batailles auxquelles ont participé les frères Duvivier : Liège, Benthein, Arcole, Les pyramides, Aboukir, Saint-Jean d’Acre, Mont Thabor, Héliopolis, Marengo, Austerlitz, Iéna, Eylau, Somosierra, Wagram, Moscowa, Leipzig, Paris et Waterloo. De part et d’autre du monument se trouvent les épitaphes des défunts : « Vincent Marie Constantin Duvivier, lieutenant-général officier des ordre [de] Léopold et de la Légion d’honneur, chev[alier]de 4e classe [de l’]ord[re] mil[itaire] de Guillaume Ier, né à Mons le 12 décembre 1774, y décédé le 8 novembre 1851 » ; « Ignace Louis baron Duvivier, lieutenant-général grand-officier de l’ord[re] de Léopold, commandeur de l’ord[re] de la Légion d’honneur, chev[alier]de 3e classe [de l’] ord[re] mil[itaire] de Guillaume Ier, né à Mons le 13 mars 1777, y décédé le 5 mars 1853 ». L’iconographie du monument est


Le patrimoine funéraire

elle aussi des plus riches. À gauche, aux côtés des épitaphes de Vincent et Ignace Duvivier, on trouve des attributs militaires avec des feuilles de chêne et de laurier et une évocation de la carrière des défunts : culasse de canon, boulet, écharpe d’officier, chapka (Ignace a servi dans un régiment polonais), casque et cuirasse d’officier de cuirassier, Légion d’honneur, carabine de cavalerie, sabre d’officier de dragons. On y voit également plusieurs hampes de drapeaux : un français avec aigle impériale, un belge avec le lion, un islamique au croissant pour évoquer la campagne d’Égypte et la hampe à fer de lance. À droite, sous les épitaphes de Charles et Auguste, avocat et officier municipal, figurent des symboles relatifs à la justice, à la politique, au développement économique et industriel : épis de blé, roue dentée, balance, toque de juge, tables de la Loi. Enfin, le monument comporte à l’arrière d’autres inscriptions dédicatoires dont une à la mémoire de PhilippeGhislain Duvivier, capitaine au 20e dragons. Celle-ci figure au dos du monument et évoque la mémoire de ce soldat mort en Égypte le 14 prairial an VII. Un quatrième frère, avocat, est lui aussi commémoré. Bien que n’ayant pas suivi la voie militaire comme ses frères cadets, Charles Duvivier poursuit sa carrière administrative au sein des institutions françaises, comme le précise son épitaphe : « Charles-Maximilien Hubert Duvivier, avocat, administrateur du dépa[rtem]ent de Jemmape [sic], officier municipal à Mons, agent du caissier de l’État, né à Mons le 8 mai 1767, y décédé le 5 octobre 1846 ».

Jean-Antoine Malherbe Non loin du monument Duvivier se trouve une autre sépulture, celle de Jean-Antoine Malherbe, né à Cornesse, non loin de Verviers, en 1782. Lieutenant en 1809, il devient capitaine d’état-major en 1812. Au cours des campagnes napoléoniennes, il sert à Smolensk, à la Moscowa, à Malojaroslavetz, au passage de la Bérézina, au siège de Thorn et au blocus d’Hambourg. Il est nommé chef de bataillon le 30 mars 1814. Sa tombe a récemment été restaurée par l’association pour la conservation des monuments napoléoniens. Elle est constituée d’un gros bloc de granit surmonté d’une urne funéraire, décoré de sabliers ailés et gravé de l’inscription suivante : « Jean Antoine Malherbe, lieutenant général, né à Cornesse (Liège) le 27 septembre 1782, décédé à Mons le 21 décembre 1858 ».

Charles Antoine Joseph Fontaine de Fromentel Le monument néoclassique de la famille Fontaine de Fromentel comporte un panneau gravé d’une épitaphe et est surmonté d’une pierre sculptée aux armes de la famille. Garde d’honneur de Napoléon, le défunt a notamment pris part aux batailles de Leipzig, Hanau, Montmirail et Château-Thierry. Son engagement militaire lui permet de recevoir le grade de lieutenant sur le champ de bataille, la croix de la Légion d’honneur et la médaille de Sainte-Hélène. Après la chute de l’Empire, il entre en politique. Il est conseiller communal de Mons de 1836 à 1867, échevin de 1840 à 1867 et officier d’étatcivil. « Priez pour le repos de l’âme de Charles Antoine Joseph Fontaine de Fromentel, ancien échevin de la ville de Mons, chevalier des ordres de Léopold, Légion d’honneur, décoré de la médaille de Sainte-Hélène, né le 30 août 1793, décédé le 22 décembre 1875. R.I.P. ». Michel Joseph Hennekinne Michel Joseph Hennekinne occupe de hautes fonctions administratives sous le régime français tout en étant parallèlement agent municipal puis communal sous la République, l’Empire et le régime hollandais. Il repose sous un monument néoclassique orné de flambeaux, décoré de couronnes et surmonté d’une croix. Il porte l’épitaphe suivante : « À la mémoire de Michel Joseph Hennekinne, receveur général du département de Jemappes, né à Mons le 17 juillet 1757, décédé le 19 janvier 1829 ».

La sépulture de Jean-Antoine Malherbe au cimetière de Mons © D. Timmermans

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Sur les traces de la Wallonie française

Mons/Havré, la chapelle Saint-Jacques de Beaulieu La chapelle Saint-Jacques fait office de chapelle castrale 2 pour la famille Duval de Beaulieu. Il s’agit d’un petit édifice de plan rectangulaire construit au début du XIIIe siècle mais lourdement remanié au début du XIXe siècle afin de le transformer en chapelle funéraire. On y adjoint ensuite un porche néo roman vers 1890. On y trouve entre autres les boiseries du couvent des Dominicains de Mons, démoli peu après la Révolution pour y ériger l’hôtel particulier de Constant Duval de Beaulieu. Le domaine appartient à une famille de haute noblesse, dont les membres s’illustrent sous l’Empire et deviennent comtes Duval de Beaulieu en 1809. Plusieurs membres de la famille enterrés dans la chapelle ont joué un rôle sous le régime français. Constant Duval de 2

Voir l’article sur le château de Beaulieu dans le chapitre consacré aux monuments construits sous le régime français.

La façade de la chapelle Saint-Jacques de Beaulieu à Havré. Photo de 1980 © Bruxelles, KIK-IRPA

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Beaulieu (1751-1828) est maire de Mons entre 1800 et 1815. Dieudonné Duval de Beaulieu (1786-1844) occupe de nombreux postes administratifs importants sous l’Empire, notamment auditeur du Conseil d’État en 1806 et intendant de la province de Burgos en 1809. Il poursuit une carrière politique sous les régimes hollandais et belge. Édouard Duval de Beaulieu de Blaregnies (1789-1873) entre au service de la France en 1804 et prend part aux campagnes impériales (Prusse, Pologne, Espagne, Russie). Il est décoré sur le champ de bataille de La Moskova et nommé officier de la Légion d’honneur à Leipzig en 1813. Sous la Restauration, il rejoint les troupes des Pays-Bas et donne sa démission en 1819. Namur, le mausolée de monseigneur Pisani de la Gaude Second évêque concordataire de Namur, Joseph Pisani de la Gaude repose dans la cathédrale Saint-Aubain. Né à Aix-enProvence en 1743, avocat dans un premier temps, il embrasse

Le mausolée de monseigneur Pisani de la Gaude, évêque concordataire de Namur, dans la cathédrale SaintAubain. Photo de 1942 © Bruxelles, KIK-IRPA


Le patrimoine funéraire

la carrière ecclésiastique sous l’influence de son oncle, l’évêque de Saint-Paul-Trois-Châteaux, et est ordonné prêtre en 1773. Il devient rapidement vicaire du diocèse de son oncle avant d’être nommé évêque de Vence en 1783. Chassé de son siège épiscopal par les révolutionnaires en 1791, il s’exile en Italie (Nice, Rome, Venise et Pesaro). Suite à la pacification religieuse apportée par le Concordat de 1801, il peut rentrer en France mais se retrouve sans emploi : la réorganisation des diocèses voulue par Napoléon a fait disparaître le diocèse de Vence. À Namur, un premier évêque concordataire avait été nommé par Napoléon en 1802. Il s’agit ici aussi d’un Français. Né en Moselle, Claude de Bexon ne supporte pas sa charge bien longtemps et démissionne en septembre 1803. Suite à cette démission, l’ancien évêque de Vence est nommé à ce poste le 3 février 1804 par Bonaparte et confirmé par le pape le 28 mai suivant. Le diocèse est en crise et doit gérer une sorte de schisme local mené par les Stévenistes 3. Pisani prend possession de son diocèse le 15 août et entame son action, caractérisée par la reconstruction et la réorganisation de la vie pastorale. Fait baron d’Empire, il poursuit son travail après la chute du régime et meurt à Namur le 23 février 1826. Réalisé en 1826 par le sculpteur Philippe Parmentier, son monument funéraire représente le défunt dans ses habits épiscopaux, couché, le bras droit reposant sur deux coussins. Au-dessus figurent les armoiries de l’évêque représentant un arbre surmonté de deux étoiles. Elles sont accompagnées de sa devise « Gemino sub sydere tuta » (en sûreté sous les deux étoiles). Le gisant et les armoiries sont sculptés dans du marbre blanc et situés sur un haut socle de marbre noir, le tout situé dans une niche. Une longue inscription latine figure sur le socle du monument : « Æternae memoriae ill[ustrissi] mi ac R[everendissi]mi D[omi]ni D[omi]ni Caroli-FrancisciJoseph Baronis de Pisani de la Gaude Episcopi qui per XXII anni Ecclesiam Namurcen[sem] pie sapitenter feliciterq[ue] rexit et operibus bonis virtutisbus[que] in obdorm[itiona] die XXIII februari MDCCCXXVI ÆT[ATE] LCCCII R.I.P. » (« À l’éternelle mémoire […] de Charles-François-Joseph, baron de Pisani de la Gaude, évêque qui, avec sagesse et bonheur a dirigé pendant 22 années l’Église de Namur, mort le 23 février 1826 […] »). Namur/Vedrin, la croix de Jean-Joseph Cartiaux Le long de la rue François Lorge à Vedrin se trouve une croix couverte fort élémentaire. En bois, elle comporte une petite plaque sur laquelle est simplement inscrit : « Jean-Joseph Cartiaux, prisonnier à l’île de Cabrera de 1808 à 1814 ». Ce discret monument commémoratif nous renseigne sur une des facettes moins bien connues de la période napoléonienne. En 1808, alors que l’armée française se trouve en Espagne, l’empereur doit faire face à une insurrection dans le sud du pays, dans la ville de Baylen. Face à la puissance de résistance espagnole, le général Dupont de l’Étang est contraint 3

Voir l’article consacré à la tombe de Corneille Stevens à Floreffe dans le présent chapitre.

La croix commémorative de Jean-Joseph Cartiaux à Vedrin © IPW

à la capitulation le 24 juillet 1808. Cette grande victoire espagnole constitue aussi le premier échec important des armées napoléoniennes et montre que la France n’est pas invincible. Le traité signé prévoit le rapatriement des troupes françaises à Rochefort mais déplaît aux Anglais et suscite l’indifférence de Napoléon qui n’apporte aucune aide aux prisonniers français. Tout d’abord dispersés dans les campagnes espagnoles, les soldats français sont faits prisonniers après la victoire de la Grande Armée à Madrid en décembre 1808 et enfermés dans des bateaux ancrés dans la rade de Cadix pendant quatre mois. Ces prisonniers sont ensuite transférés à Cabrera, une petite île de l’archipel des Baléares, au sud de Majorque. Ce sont 2.979 sous-officiers et soldats qui y débarquent le 2 mai 1809, suivis de 1.248 autres prisonniers le 149


Sur les traces de la Wallonie française

9 mai et d’un troisième contingent le 11 mai. On estime le nombre total de prisonniers emmenés à Cabrera entre 1809 et 1814 à 11.800 hommes. L’île, un désert de cailloux, ne possédait ni maison ni eau. Les prisonniers y survivent dans des conditions miséreuses pendant de nombreuses années. À la fin du régime impérial français, un premier convoi délivre les prisonniers les plus malades le 16 mai 1814. Une semaine plus tard, le restant des 3.700 survivants est transporté à Marseille. Parmi eux, un soldat belge des armées napoléoniennes, discrètement commémoré au bord d’une route de la campagne namuroise. Neufchâteau, la chapelle Collard et la chapelle Gourdet Située sur une hauteur au milieu des champs entre les villages de Grandvoir et Tournay se trouve la chapelle Collard qui garde aujourd’hui le souvenir d’une famille de notables de l’Empire. Né en 1752, Pierre-Joseph Collard se rallie dès 1795 à la République française, chose plus rare pour un habitant de l’ancien duché de Luxembourg. Il devient successivement juge de paix à Luxembourg, membre du conseil des Cinq-Cents entre 1797 et 1799, puis du corps législatif de 1799 à 1805. En 1811, il est nommé président du tribunal de première instance de Neufchâteau. Il poursuit sa carrière sous le régime hollandais jusqu’en 1820 avant d’abandonner la vie politique. Il meurt au château de Grandvoir en 1843. Son frère, Jean-Herman-Joseph Collard, se rallie lui aussi aux idées révolutionnaires et devient commissaire du Directoire à Neufchâteau puis sous-préfet de Neufchâteau de 1800 à 1811. Il est ensuite membre du corps législatif entre 1811 et 1814. Sur la route le menant à Grandvoir, il est brutalement assassiné le 3 décembre 1814, quelques mois après la chute de l’Empire. Tous deux sont inhumés dans la chapelle-crypte érigée en style néoclassique pour la famille Collard en 1843. Dans la chapelle Gourdet se trouve une dalle commémorative mentionnant les noms de soldats de l’armée napoléonienne tués au cours des campagnes d’Espagne et de Russie comme l’indique leur épitaphe : « Louis Gourdet, tué au siège de Saragosse l’an 1809, âge de 21 ans, et son frère Henri Gourdet mort l’an 1812 pendant la campagne de Russie, âge de 21 ans ». L’édifice a été érigé par la famille aux alentours de 1860.

Le conseil des Cinq-Cents Composé de 500 membres comme son nom l’indique, il est élu pour 3 ans et renouvelable annuellement par tiers. De 1795 à 1799, il est à l’initiative des lois qui doivent être votées par le conseil des Anciens pour être promulguées. Oupeye/Hermalle-sous-Argenteau, la tombe de Charles de Thierry Dans le cimetière communal du village se trouve la tombe, récemment restaurée, de Charles de Thierry, chasseur à cheval de la Garde impériale de 1806 à 1811 puis capitaine au 5e hussards en 1813. Il poursuit ensuite sa carrière dans l’armée belge. La très belle stèle est décorée d’ornements militaires parmi lesquels un casque du 1er lanciers dans lequel il servit sous Léopold Ier, un sabre et des médailles. Dans la partie inférieure, son épitaphe : « Charles Ferdinand Eugène de Thierry, colonel au régiment des lanciers, décédé à Hermalle sous Argenteau le 9 février 1842 à l’âge de 54 ans. Qui vécut bien, qui aima bien, qui mourut bien (…) ».

Le Directoire Régime politique français ayant suivi la Convention, le Directoire est créé par la Constitution de l’an III et installé le 26 octobre 1795. Sous ce régime, le pouvoir législatif est confié à deux chambres : le conseil des Cinq-Cents et le conseil des Anciens. Le pouvoir exécutif est confié à cinq directeurs (les membres du Directoire), élus par les chambres et renouvelables à raison d’un chaque année. Sous le Directoire, la France poursuit sa guerre contre l’Autriche et envoie les troupes du général Bonaparte en Égypte. Comme ses prédécesseurs, ce régime ne survit que peu de temps. Le coup d’État de Bonaparte en 1799 supprime de facto le Directoire pour ouvrir la voie à un nouveau régime, le cinquième en dix ans.

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La tombe de Charles de Thierry à Hermalle-sous-Argenteau. Photo Lem © Maison du Souvenir d’Oupeye


Le patrimoine funéraire

Soumagne/Ayeneux, la chapelle du domaine provincial de Wégimont Au sein du domaine de provincial de Wégimont se trouve l’ancienne chapelle des Carmes, édifiée en 1643 par Catherine de Druyn pour y installer la sépulture de son époux, le baron Charles Ernest de Lynden. L’édifice est ensuite devenu le caveau de la famille d’Oultremont. Parmi les membres de la famille inhumés à cet endroit se trouve Ferdinand d’Oultremont, sous-lieutenant au 2e carabiniers en 1813. Une plaque commémorative, inaugurée en 1989 à l’initiative de la délégation de Belgique de l’association pour la conservation des monuments napoléoniens, porte l’inscription suivante : « Dans cette chapelle repose le comte Ferdinand d’Oultremont tombé à Vitry-le-François le 23 mars 1814 ». La plaque rappelle la participation du défunt à la campagne de France de 1814 qui vit la chute et la première abdication de Napoléon.

La chapelle d’Oultremont au sein du domaine provincial de Wégimont © IPW

Tintigny, la dalle funéraire de Charles Goffin Située dans le cimetière de Tintigny, dressée contre le mur de l’église, se trouve la dalle funéraire d’un ancien curé de la localité. D’une hauteur de 170 cm sur une largeur de 69 cm, elle a été gravée en 1854 et décorée d’une croix entourée de deux étoiles et de deux chandeliers d’église et décorée d’un calice surmonté de l’Hostie. À son pied se trouve un crâne. Il s’agit ici d’un

La dalle funéraire de Charles Goffin dans le cimetière de Tintigny © Bruxelles, KIK-IRPA

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Sur les traces de la Wallonie française

programme traditionnel de l’iconographie funéraire liée à un membre du clergé. Dans la partie inférieure se trouve un cartouche gravé d’une inscription latine rappelant le sort réservé au prêtre suite à la Révolution : « À la mémoire du révérend Charles Goffin qui, aux époques calamiteuses, s’est exilé 15 mois dans l’île de Ré, puis pour 25 ans à Sainte-Marie, il est mort pieusement à Tintigny le 16 juillet 1854 à l’âge de 76 ans ».

Tintigny/Rossignol, le monument Clesse La pierre tombale d’un autre prêtre réfractaire se trouve aujourd’hui encastrée dans un mur de l’église Saint-Nicolas. La dalle funéraire a été sculptée dans l’ardoise en 1841. Elle se présente sous la forme d’un haut bloc d’ardoise surmonté d’un fronton triangulaire sur lequel est sculptée une croix. Le bloc est pour sa part décoré d’un calice et d’une hostie, et

Le monument Clesse dans l’église de Rossignol. Photo de 1971 © Bruxelles, KIK-IRPA

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Le patrimoine funéraire

gravée de l’épitaphe du défunt : « Ici repose le corps de […] Clesse, curé de Rossignol. Né à Tintigny le 4 juin 1763, ordonné prêtre à Trèves le 10 7bre 1789. Il fut confesseur de la foi en refusant de prêter le serment exigé par la loi du 10 fructidor en V [sic]. Condamné à l’exil perpétuel, il fut déporté à l’ile de Rhé [sic]. Rendu à la liberté en 1800, il revint dans son pays où il exerça dignement le S[ain]t ministère et mourut à Rossignol le 10 juillet 1841. Pleuré comme un père par ses paroissiens qu’il aimait comme ses enfants. R.I.P. ». Tournai, les cimetières du sud et du nord Les cimetières de la ville de Tournai abritent plusieurs monuments funéraires de personnages liés au régime français. Dans le cimetière du sud se trouvent les sépultures suivantes : - Louis-Lamoral de Clément de Taintignies, né à Féchain (Nord de la France) le 5 août 1789, page à la cour de France, lieutenant dans le 1er hussards, officier d’ordonnance de Napoléon et chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur. Décédé à Tournai le 24 avril 1834 ; - Louis-Charles Benjamin van der Burch, né à Aubry-duHainaut, dans le fief familial, le 18 juin 1786. Entré au service de l’armée comme ses frères, il sert dans le 27e chasseurs à cheval. Sous l’Empire, il termine sa carrière au grade de capitaine en 1813 et est fait chevalier de la Légion d’honneur. Il meurt à Bruxelles le 20 mai 1847. Il repose dans un monument entouré d’une grille en fer forgé et entouré des armoiries familiales ; - à droite de la sépulture précédente se trouve la tombe de Jean-Baptiste Louis Joseph Deleplanque, volontaire au 2e chasseurs à cheval à partir de 1805. Il prend part aux batailles d’Iéna, Pułtusk, Eylau et au siège de Saragosse. Il est blessé au siège de Leipzig puis devient aide de camp du général Pajol pendant la campagne de 1815. Il est à nouveau blessé à la bataille de Waterloo et est décoré de la Légion d’honneur. Il termine sa carrière au grade de général de l’armée belge et repose aujourd’hui sous un obélisque décoré d’ornements militaires. Ce monument funéraire a été récemment restauré par l’association pour la conservation des monuments napoléoniens ; - Camille Ysebrant de Lendonck (1799-1863), sous-lieutenant au 4e bataillon belge pendant les campagnes de 1814 et 1815 ; - Charles-Henri Joseph de Rasse, né à Tournai le 3 décembre 1774, chevalier d’Empire, maire et bourgmestre de la ville de 1804 à 1818. Sous le régime français, il met en place un corps de police municipal et un service d’incendie. Il contribue à l’amélioration de la ville par la construction de nouvelles routes et la création de parcs. Il décède à Tournai en janvier 1818.

Le monument des frères Debève dans le cimetière de Wavre (voir page suivante) © J. Tordoir

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Sur les traces de la Wallonie française

Dans le cimetière du nord, on peut observer deux autres sépultures : - Léopold Charles Lamoral van de Kerckhove d’Hallebast, né à Velaines le 30 juillet 1796. Colonel de cavalerie sous l’Empire et médaillé de Sainte-Hélène, il est également fait officier de l’ordre de Léopold sous le régime belge. Il décède à Tournai le 23 mai 1876 ; - Jean Joseph Xavier Stienon, colonel sous l’Empire, chevalier de la Légion d’honneur et décoré de la médaille de SainteHélène, décédé à Tournai le 20 juin 1869 à l’âge de 90 ans. Tubize/Clabecq, les monuments en hommage à Jules-Joseph de Sayve Dans le parc communal de Clabecq se trouve un monument des plus originaux. Il s’agit d’une colonne de pierre ornée d’une tête de cheval et des inscriptions « Bayard » et « La Moscowa ». Ce monument commémoratif indique l’endroit de la sépulture de la monture de Jules-Joseph de Sayve, chef d’escadron au service du prince Eugène de Beauharnais, membre de la famille impériale, fils adoptif de Napoléon et vice-roi d’Italie. Avec lui, Sayve participa aux campagnes de 1809 en Italie, Autriche et Hongrie et à la campagne de Russie en 1812. Au cours de la bataille de la Moscowa, son cheval le sauva de la mort au passage de la Bérézina. De retour en Belgique, il fut choyé par son maître avant d’être enterré à cet endroit. Le chef d’escadron repose quant à lui dans l’enclos familial au cimetière de Clabecq. Wavre, le monument des frères Debève Le cimetière de Chéremont à Wavre compte au nombre de ses sépultures le monument commémoratif des frères Debève. L’aîné, Jean-Baptiste, est né le 10 septembre 1788 à Bois-deLessines. Il participe à de nombreuses campagnes de l’Empire et est naturalisé Français le 14 février 1825 et fait chevalier de la Légion d’honneur la même année. Resté au sein de l’armée française, il meurt à Douai le 27 septembre 1843 où il est inhumé. Son frère Benoît-Joseph, né le 14 août 1793, est chasseur à cheval de la garde et décoré de la médaille de Sainte-Hélène. Il est décédé et enterré à Wavre en 1873. Le monument n’est donc pas une sépulture mais bien un monument commémoratif. Il se présente sous la forme d’une haute colonne reposant sur un socle carré, surmontée d’une urne funéraire et décorée de la croix de la Légion d’honneur. On y trouve les épitaphes des deux frères « J.-B. Debève, capitaine de cavalerie, chevalier de la Légion d’honneur » et « B.J. Debève, chasseur de la garde impériale décoré de la médaille militaire de Sainte-Hélène ». On y trouve aussi les noms de célèbres batailles auxquelles ils ont pris part : Austerlitz, Iéna, Eylau, Waterloo… Quelques autres sépultures de soldats et d’officiers d’Empire Beaucoup de monuments funéraires en Wallonie commémorent des personnalités du régime français, souvent des militaires ayant pris part aux guerres napoléoniennes. Ainsi : 154

- contre un mur de l’église Saint-Quentin de Grandrieu (commune de Sivry-Rance) se trouve enchâssée la pierre tombale de Pierre Jacquiez, soldat de la Grande Armée ; - Antoine Joseph Counet, médaillé de Sainte-Hélène, repose dans le cimetière de Jalhay ; - le cimetière de Mariembourg abrite la sépulture du sergent d’artillerie Jean-Pierre Kuntz (1782-1851), blessé à la bataille de Leipzig ; - contre le mur intérieur situé à gauche de l’entrée du cimetière Saint-Pierre à Nivelles se trouve la pierre tombale d’Auguste de Prelle de la Nieppe, officier au 3e régiment des Gardes d’Honneur pendant les campagnes de 1813 ; - Jean-Hubert Lozet, ancien officier des armées impériales, repose au cimetière de Neufchâteau ; - le caveau de la famille de Senzeilles à Serinchamps (commune de Ciney) abrite la sépulture du baron Arnould Charles Eugène Florent Michel de Senzeilles, lieutenant au 4e hussards et chevalier de la Légion d’honneur ; - sous l’église Saint-Ursmer d’Ormeignies (commune d’Ath) se trouve une crypte dans laquelle reposent les comtes de Rouillé et leur famille. Un monument quadrilatéral sommé d’une croix en fer forgé en indique l’endroit. Parmi les défunts enterrés dans la crypte se trouvent Auguste Hilaire, comte de Rouillé (1780-1841), chevalier de la Légion d’honneur et Édouard Louis Isidore, comte de Rouillé (1786-1865), capitaine de cavalerie dans la Garde impériale, ayant pris part aux campagnes napoléoniennes entre 1806 et 1815, chevalier de la Légion d’honneur et médaillé de Sainte-Hélène ; - Edmond d’Hoffschmidt de Resteigne (1777-1861), engagé dans les armées napoléoniennes en 1805, sert en qualité de sous-lieutenant dans le régiment des chevau-légers entre 1806 et 1809. Il fait la campagne d’Allemagne entre 1807 et 1808 et obtient sa démission pour santé déficiente le 1er mars 1809. Décédé à l’âge de 83 ans, il repose au cimetière de Resteigne (Rochefort).


Sur les traces de la Wallonie franรงaise LE PATRIMOINE NATUREL



LE PATRIMOINE NATUREL

Les arbres de la liberté De la période française subsistent quelques témoins naturels dont la fonction idéologique a évolué en même temps que les régimes mis en place dans nos régions. Lors de la première occupation de la Wallonie après la bataille de Jemappes, les Français importent chez nous le concept d’arbre de la liberté, directement inspiré de la tradition de « l’arbre de mai », planté pour célébrer l’arrivée du printemps. Cette pratique est officialisée en 1792 par l’Assemblée législative alors que plusieurs initiatives du genre avaient eu lieu en France depuis 1790. Les Bruxellois s’en étaient d’ailleurs inspiré lors de la Révolution brabançonne. L’arbre de la liberté a pour but de symboliser le renouveau apporté par la vague de liberté ayant soufflé avec les révolutions. On le dresse sur une place publique la veille du premier mai et la cérémonie prend des couleurs toutes politiques : l’arbre est décoré de cocardes républicaines et de rubans et souvent surmonté d’un bonnet phrygien. Un grand nombre d’arbres de la liberté sont plantés chez nous mais une grande majorité disparaît rapidement. Les premiers sont abattus par les Autrichiens après la restauration et il faut recommencer lors de la seconde occupation. De cette seconde vague de plantation, certains meurent simplement, d’autres sont abattus. La pratique symbolique ne disparaît toutefois pas avec la chute de l’Empire : si nous ne conservons que peu de témoins d’arbres de la liberté français, il reste encore en Wallonie quelques beaux exemples d’arbres de la liberté plantés après l’indépendance en 1830. Parmi les arbres disparus, nous trouvons celui planté sur la Grand-Place de Mons dès l’entrée en ville du général Dumouriez en novembre 1792. L’arbre était au centre de fêtes patriotiques, organisées sur l’espace public, rebaptisé de manière éphémère « place de l’Égalité ». Un tilleul baptisé « arbre de Dumouriez » est planté sur le quai de Fragnée à Liège le 28 novembre de la même année. Trois arbres sont successivement plantés sur la place du Marché à Liège, le premier dès le

Le tilleul de Wellin, planté peu après la Révolution. Photo asbl Le Marronnier/benjamin.stassen@skynet.be

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Sur les traces de la Wallonie française

Les hêtres dits de l’Aiglon dans les bois de Hampteau. Photo asbl Le Marronnier/benjamin. stassen@skynet.be

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Le patrimoine naturel

mois d’août 1789 ; il est arraché en décembre 1790. Le second est planté en l’honneur des libérateurs le 2 décembre 1792 et abattu par les Autrichiens le 5 mars 1793. Enfin, le troisième est planté le 30 mars 1793 et meurt naturellement vers 1798. D’autres sont plantés à Saint-Rémi, Beauvechain, Logne, Herve, Huy, Antoing… La plupart sont arrachés après le rétablissement de l’Ancien Régime. D’autres ont toutefois subsisté bien que les rares sources que nous possédons ne nous donnent que très peu d’indications : - à Fayt-le-Franc un arbre dit « tilleul de Dumouriez » aurait été planté en 1792 par les sans-culottes ; - un autre tilleul, situé à l’angle de la rue des Houchettes et de la rue Dubois à Wellin aurait été planté au lendemain de la Révolution française ; - situé contre le mur de clôture du cimetière jouxtant l’église de Bois-de-Lessines, un tilleul planté en 1792 a lui aussi survécu aux soulèvements populaires ; - à Roy (Marche-en-Famenne), le frêne de la liberté se dresse toujours non loin de l’église paroissiale. Il aurait été planté vers 1793-1795 ; - un tilleul, réputé planté en 1795, se trouve sur la petite place du hameau de Hattain dans l’entité de Genappe ; - à Waremme, devant le nº 6 de l’avenue Leburton, subsiste un tilleul appelé « arbre de la liberté », planté le 22 septembre 1797 pour commémorer l’anniversaire de l’instauration de la République ; - plusieurs arbres de la période révolutionnaire française sont identifiés comme étant des arbres de la liberté. Rien ne permet toutefois de l’affirmer avec certitude. On les retrouve à Jalhay, La Gleize, La Roche-en-Ardenne, Nil-Saint-Martin et Paliseul.

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Bonaparte » a été planté en 1810 en l’honneur des noces de l’empereur. Il se trouve sur les hauteurs du bois de Gerhène, non loin de la chapelle Sainte-Agathe ; à Florée (Assesse), une allée de tilleuls a été plantée en 1804 pour commémorer le couronnement de Napoléon ; une plaque commémorative rappelle leur plantation ; à Lorcé (Stoumont), on retrouve deux des cinq hêtres plantés eux aussi à l’occasion du couronnement de l’empereur ; deux « hêtres Bonaparte » subsistent également à l’ancien arrêt du vicinal à Burnontige (Ferrières) ; à Porcheresse (Havelange), cinq tilleuls nommés « arbres des soldats » ont été plantés pour commémorer le souvenir de cinq soldats tués à l’époque napoléonienne. Cette démarche commémorative n’est pas isolée ; nous retrouvons encore trois tilleuls commémorant des soldats tués au combat autour de la chapelle Sainte-Anne de Beyne-Heusay 1 ; à Florennes se trouve un « arbre de Napoléon », également surnommé « arbre de la trahison ». Situé devant la ferme du château de Florennes, il fut le témoin de la trahison du comte de Bourmont, lieutenant-général français passé aux alliés avant la bataille de Waterloo.

Plus atypique, le cèdre d’Argenteau témoigne lui aussi à sa façon du régime français : en 1805, le comte FrançoisJoseph-Charles de Mercy-Argenteau-Dochain fut nommé chambellan de l’empereur. À cette occasion, il fit planter un cèdre du Liban dans le parc de son château. L’arbre est aujourd’hui considéré comme un des plus beaux spécimens que compte la Wallonie.

Les arbres « napoléoniens » Sous le Consulat et l’Empire, la plantation d’arbres prend une signification toute différente : ils servent à commémorer l’empereur, des membres de sa famille ou des événements liés à son règne. De nombreux arbres ont ainsi été plantés en 1810 à l’occasion du mariage de l’empereur avec l’archiduchesse Marie-Louise ou en 1811 pour marquer la naissance de l’héritier du trône. Comme les arbres de la liberté, nous en retrouvons plusieurs survivants aux quatre coins de la Wallonie : - dans les bois de Hampteau (Hotton) se trouvent encore trois des quatre hêtres plantés en 1811 et dénommés « hêtres de l’Aiglon » ; - à Habay-la-Neuve subsistent trois des quatre chênes plantés le 20 mars 1811 à côté de la chapelle Bonhomme ; ils commémorent eux aussi le naissance du roi de Rome ; - sept hêtres appelés « arbres Napoléon » se trouvent encore entre le bois carré et le bois d’Aywaille dans la vallée de l’Amblève à Behê ; - à Haut-Fays (Daverdisse), le « gros hêtre » ou « hêtre

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Voir l’article sur cette chapelle dans le chapitre consacré aux deux occupations françaises en Wallonie.

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Sur les traces de la Wallonie française

Le hĂŞtre Bonaparte Ă Haut-Fays. Photo asbl Le Marronnier/benjamin. stassen@skynet.be

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Sur les traces de la Wallonie franรงaise LA CAMPAGNE DE 1815 ET SON RICHE PATRIMOINE COMMร MORATIF



LA CAMPAGNE DE 1815 ET SON RICHE PATRIMOINE COMMÉMOR ATIF

Après une longue série de batailles victorieuses, de sérieux revers contraignent l’empereur à stopper sa progression vers l’est. Entreprise en juin 1810, la campagne de Russie est un désastre et constitue une véritable erreur, la seconde d’importance après l’échec espagnol. Face au rouleau compresseur de l’armée russe et dans des conditions climatiques dantesques, Napoléon perd la quasi-majorité de la Grande Armée. La défaite à la bataille de la Bérézina, du 25 au 29 novembre 1812, est encore aujourd’hui synonyme de fiasco. Revenu à Paris, sa popularité est intacte mais son aura internationale est sérieusement entamée. Ses ennemis savent désormais que la machine napoléonienne n’est pas invincible. En 1813, une nouvelle armée française de 300.000 hommes se bat en Saxe contre les troupes coalisées du roi de Prusse, de l’empereur d’Autriche et du tsar de Russie. La bataille des Nations, à Leipzig, les 18 et 19 octobre 1813 se solde par une défaite totale de l’empereur : l’Empire a signé son arrêt de mort. Suivent près de deux années de déroute et de déconvenues pour Napoléon. En 1814, il se bat dans son propre pays au cours de ce que l’on a appelé la « campagne de France ». La coalisation internationale entend défaire l’empereur sur son propre terrain. Dès les premiers jours de janvier 1814, la plupart des préfets présents dans les départements réunis quittent leur poste pour rentrer en France. Liège, Mons et Namur se retrouvent sans véritable administration pour plusieurs mois. Les événements s’enchaînent ensuite rapidement : le 31 mars 1814, les alliés entrent dans Paris ; le 4 avril, Napoléon est contraint à l’abdication en faveur du très jeune roi de Rome ; le 6 avril, il doit renouveler cette abdication, cette fois sans condition. Déchu, l’empereur est exilé et prend la route de l’île d’Elbe. Pendant ce temps s’ouvre dans la capitale autrichienne une réunion des représentants russes, autrichiens, prussiens et britanniques dans le but de redessiner la carte de l’Europe et de retirer à la France ses territoires conquis au cours des guerres républicaines et impériales. Au Congrès de Vienne, nos territoires sont offerts à Guillaume d’Orange pour lequel est créé un royaume des Pays-Bas en 1814.

Le 26 février 1815, après dix mois d’exil, Napoléon s’échappe de l’île d’Elbe et débarque à Antibes le 1er mars avec quelques centaines d’hommes. L’Aigle n’a pas dit son dernier mot et s’apprête à abattre sa dernière carte. Parti de Méditerranée, il arrive vingt jours plus tard au palais des Tuileries pour entamer le dernier acte de sa tragédie. La période qui suit, appelée les « Cent-Jours », est caractérisée par les efforts incroyables entrepris par Napoléon pour reconquérir son empire. Fort d’une aura hors du commun, il parvient en un temps record à mobiliser une armée de fidèles et se lance dans sa dernière campagne. Entré en Belgique, il se bat tout d’abord dans l’actuelle entité de Sombreffe : la bataille de Ligny du 16 juin 1815 est considérée comme la dernière victoire de l’empereur. Le même jour, dans la région de Genappe, se déroule la bataille des Quatre-Bras. Deux jours plus tard, le dernier combat de Napoléon est certainement celui resté le plus célèbre. L’armée française est lourdement défaite le 18 juin 1815 à la bataille de Waterloo. Lors de sa retraite vers la France, quelques combats ont encore lieu autour de Wavre et de Namur entre le 18 et le 21 juin. Le 18 juillet, dans la rade de Rochefort, Napoléon embarque vers un second exil sur l’île de Sainte-Hélène, possession britannique située à près de 2.000 km au large de l’Angola. C’est à cet endroit que Napoléon meurt le 5 mai 1821 après six années de garde surveillée. Nombreuses sont les traces de ces trois dernières batailles de l’Empire en Wallonie, points d’orgue d’une « route Napoléon en Wallonie » labellisée par le Commissariat général au Tourisme en vue des manifestations du bicentenaire de 1815. La grande majorité d’entre elles sont contemporaines. Il s’agit de plaques commémoratives, de stèles ou de monuments érigés et apposés tout au long des XIXe et XXe siècles en mémoire des événements. D’autres monuments ont été les témoins directs de ces batailles : quartiers généraux, hôpitaux, postes d’observation ont été installés à la hâte dans des édifices de la région. Nous avons choisi ici de les faire apparaître dans la mesure du possible dans l’ordre chronologique 163


Sur les traces de la Wallonie française

des événements ou de leur inauguration par souci de cohérence et par facilité de lecture.

Quelques traces liées à la Restauration Dès les premiers mois de l’année 1814, les préfets « wallons » quittent leur poste pour rejoindre Paris et l’empereur. Les troupes coalisées marchent vers la France et débutent l’occupation des « départements belges » dès le mois de février. À partir du 11 février 1814, les alliés assument l’administration des provinces belges, comme le prévoyait la convention de Bâle du 11 janvier 1814. Après la défaite de Napoléon, le traité de Paris du 30 mai 1814 prévoit que les provinces belges ne font plus partie de la France, à l’exception des cantons de Beaumont, Chimay, Couvin, Dour, Florennes, Gedinne, Mariembourg, Merbes-le-Château, Philippeville et du duché de Bouillon. Le 9 juin 1814, le Congrès de Vienne arrête que « les anciennes Provinces-Unies des Pays-Bas et les ci-devant provinces de Belgique formeront conjointement, sous la souveraineté de S.A.R. le prince d’Orange-Nassau, le royaume des Pays-Bas ». Le gouvernement de la Belgique est officiellement confié à Guillaume d’Orange le 1er août suivant. Les troupes prussiennes occupent toujours alors la rive droite de la Meuse et les cantons d’Eupen, Malmedy et Saint-Vith. Ces trois cantons sont détachés de l’ancien département de l’Ourthe et rattachés au royaume de Prusse en janvier 1815. La « Belgique » est administrée par les Prussiens Heinrich von Lottum et Christian Delius depuis Bruxelles. Quelques édifices wallons témoignent de la période située entre l’abdication et l’exil de Napoléon sur l’île d’Elbe et son retour au pouvoir avant la campagne de 1815. Certains ont déjà été évoqués dans d’autres chapitres, en raison de leur importance ou de leur affectation. C’est le cas du château de Seraing, occupé par les Prussiens sous la Restauration, ou de l’abbaye SaintLaurent à Liège.

Liège, l’hôtel d’Ansembourg et l’ancien hôtel de l’Aigle noire Construit entre 1738 et 1741 par un riche banquier liégeois, l’hôtel d’Ansembourg, situé au no 114 de la rue Féronstrée, possède une façade classique en brique et calcaire. Son riche intérieur est caractéristique des arts décoratifs liégeois du XVIIIe siècle dont il en constitue un des plus beaux exemples : tapisseries, mobilier, cuirs peints, plafonds en stucs. Acquis par la ville de Liège en 1903, l’hôtel de maître abrite aujourd’hui le musée des Arts décoratifs ou musée d’Ansembourg. Dans les premiers jours de la débâcle de 1814, l’hôtel accueille Jean-Baptiste Bernadotte. L’entrée de troupes russes et prussiennes dès les premiers jours de l’année a mis fin au régime français à Liège : le préfet Micoud d’Umons a rejoint la France début janvier, laissant le département de l’Ourthe sans administration. Né en 1763, maréchal d’Empire, Bernadotte est proche de Napoléon au début de l’Empire avant de s’en éloigner. Élu roi de Suède en 1810 sous le nom de Charles XIV, il se rapproche de la Russie et de la Prusse. C’est alors qu’on lui fait miroiter le trône de France qu’il arrive à Liège, le 27 février 1814. Accueilli par les vivats de la foule, il se rend à l’hôtel d’Ansembourg accompagné de sa suite où il donne audience aux autorités du département (ou ce qu’il en restait). Durant son long séjour chez nous, il assiste à diverses réjouissances parmi lesquelles un concert à l’Émulation. Il assiste également à un bal à l’hôtel de l’Aigle noire, situé plus haut dans la rue Féronstrée mais dont la façade a aujourd’hui été lourdement remaniée. C’est dans cet hôtel que logent les officiers généraux et supérieurs. C’est également à cet endroit que Bernadotte rencontre le maréchal Blücher et le comte Henry de Stolberg-Wernigerode, chargé par la Prusse d’administrer les territoires libérés de l’occupation française à la suite des guerres de 1812-1814. Il quitte Liège le 8 mars pour Bruxelles, d’où il prend la route de Paris. Après la restauration officielle des Bourbons sur le trône de France, Bernadotte retourne à Stockholm où il décède sur le trône le 8 mars 1844.

La Restauration On appelle « Restauration » la période qui a suivi l’abdication et le premier exil de Napoléon après la campagne de France de 1814. Cette période doit son nom au fait que la dynastie des Bourbons fut rétablie sur le trône de France, 25 ans après les premiers événements révolutionnaires et 21 ans après l’exécution de Louis XVI. Le fils et héritier de ce dernier étant décédé, c’est à son frère cadet, le comte de Provence, que revient le titre, sous le nom de Louis XVIII. Cette première restauration ne dure que peu de temps et est caractérisée par de premières erreurs royales qui, en 1830, pousseront le peuple à se révolter une fois de plus. La fuite de Napoléon de l’île d’Elbe et son retour en France le 1er mars 1815 force le roi à s’exiler entre le 20 mars et le 8 juillet. Après la défaite de Waterloo et le second exil de Napoléon, la monarchie est restaurée une seconde fois. Louis XVIII meurt en 1824 et laisse le trône à son frère, le roi Charles X.

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Le salon aux tapisseries d’Audenarde du musée d’Ansembourg à Liège. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

La bataille de Ligny En juin 1815, Napoléon est de retour à Paris depuis trois mois mais a été mis au ban des nations. Il sait que ses ennemis coalisés pourraient rapidement envahir la France à nouveau. Sa seule solution consiste à lancer une nouvelle campagne contre les concentrations prussiennes et hollando-britanniques. Rapidement entrées en Belgique, les troupes impériales s’emparent facilement de la ville de Charleroi le 15 juin. Le premier grand affrontement de la campagne de 1815 a lieu non loin des champs de batailles victorieux de 1794 dans la région de Fleurus. Les armées coalisées retrouvent les Français le 16 juin autour des villages de Ligny et Saint-Amand. La bataille est remportée par les Français et est considérée à juste titre comme la dernière victoire de Napoléon. Au même moment, les troupes françaises se battent également aux Quatre-Bras. Ces batailles auraient pu changer le cours de l’histoire. L’ultime affrontement à Waterloo le 18 juin en voulut autrement ! Ligny est une des batailles les plus sanglantes menées chez nous. Bien que courte (quelques heures seulement), elle fait un nombre considérable de victimes. Selon les auteurs et les sources, les Français perdent de 7.000 à 12.000 hommes (tués ou blessés), les Prussiens perdent quant à eux entre 11.000 et 18.000 hommes, une véritable boucherie !

Beaumont, l’ancien château des Caraman-Chimay L’hôtel de ville de Beaumont, situé sur la Grand-Place, partage avec l’institut de la Trinité-Notre-Dame les locaux d’une ancienne propriété achetée en 1805 par les Riquet-de Caraman, propriétaires des châteaux de Chimay et de Beaumont. La maison communale est totalement enserrée par l’ancien hôtel princier. La façade principale a été reconstruite en style néogothique entre 1853 et 1855 mais l’arrière de l’édifice conserve des parties plus anciennes, ouvertes sur un beau parc. Venu de France, Napoléon s’apprête à entrer en Belgique alors que ses armées reprennent Thuin dans le but de se diriger vers Charleroi. Le 14 juin 1815, il est à Beaumont, aux portes de notre pays. Il passe la nuit dans le château des CaramanChimay. En 1992, une plaque surmontée d’un aigle a été apposée sur la façade, à gauche de l’entrée, par la section belge des amitiés internationales napoléoniennes : « Ici l’empereur Napoléon Ier passa la nuit du 14 au 15 juin 1815 ». À l’étage, dans le bureau de la direction, se trouve une autre plaque commémorative : « Napoléon Bonaparte a couché dans cette chambre dans la nuit du 14 au 15 juin, c’est ici qu’il donna ses ordres à ses généraux et prit ses dispositions pour se porter au devant des armées alliées 4 jours avant la bataille de Waterloo ».

La plaque commémorative du passage de Napoléon à Beaumont. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française

Merbes-le-Château/Fontaine-Valmont, la ferme de Dansonspenne Exploitation agricole créée au IXe siècle par les moines de l’abbaye de Lobbes, elle passe à l’abbaye d’Aulne en 1171. L’ensemble est reconstruit aux XVIe et XVIIe siècles et réorganisée aux XVIIIe et XIXe siècles. L’édifice, imposant, est aujourd’hui distribué en trois groupes de bâtiments. Le premier, à l’est, est constitué d’une chapelle, d’une ancienne métairie et d’un logis ; les deux autres, au sud et au nord, sont composés de diverses dépendances. En route pour la campagne de Belgique, le maréchal Ney y passe la nuit du 14 au 15 juin 1815. Né en Lorraine en 1769, Michel Ney figure dans la première promotion des maréchaux d’Empire nommés par Napoléon en 1804. Duc d’Elchingen, prince de la Moskova, il a participé aux guerres révolutionnaires et à de prestigieuses campagnes sous l’Empire (Austerlitz, Iéna, Eylau, Friedland, Smolensk, la Moskova, la Bérézina ou encore Leipzig parmi d’autres). Après avoir pris part à la campagne de France, il se rallie aux Bourbons sous la Restauration mais rejoint le camp de l’empereur pendant les Cent-Jours. Il retrouve Napoléon en Belgique et participe aux batailles des Quatre-Bras et de Waterloo en juin 1815. Ce ralliement à l’empereur lui vaut d’être arrêté sous la seconde restauration : il passe en conseil de guerre et est fusillé le 7 décembre 1815 à Paris. Florennes, l’ancienne auberge Vincent Siège d’une auberge en 1815 et situé place Verte, l’édifice abrite aujourd’hui un fleuriste. C’est à cet endroit que le comte de Bourmont installe son quartier-général le 14 juin 1815. Né le 2 septembre 1773, Louis Auguste Victor de Ghaisne, comte de Bourmont, entre dans l’armée en 1788. Il prend part à la bataille de Valmy en 1792 et à celle de Wissembourg l’année suivante. Accusé d’être royaliste, il est arrêté et emprisonné

au Temple de 1801 à 1804 après une évasion qui le conduit au Portugal. Rentré en France en 1808, il rejoint l’armée d’Italie en 1810 puis prend part aux campagnes de 1813 et 1814. Sous la première Restauration, il est placé à la tête de la 6e division militaire et rejoint le maréchal Ney pendant les CentJours. Craignant pour l’indépendance nationale, il se rallie à Napoléon bien que royaliste. Le 23 avril 1815 est prononcée la déchéance des Bourbons, décision de l’empereur qui fait définitivement basculer le comte de Bourmont : alors qu’il se trouve à Florennes, il décide le 15 juin 1815, à la veille de la bataille de Ligny, d’abandonner son commandement et de déserter en compagnie de son état-major. Charleroi, le siège de la Banque nationale Dès le 15 juin 1815, les Français se trouvent aux abords de Charleroi. Des combats ont lieu à Jumet et Gilly contre les troupes prussiennes alors qu’arrive l’empereur. Vers midi, Napoléon établit son premier quartier général au château Puissant, demeure de la veuve d’un maître de forges, qui a été détruit depuis. Il se rend ensuite dans la ville haute où il rencontre les maréchaux Ney et Grouchy, auxquels il confie respectivement le commandement de l’aile gauche et de l’aile droite de l’armée. Ney dirige les troupes lors de la bataille des Quatre-Bras, Grouchy se bat à Ligny. L’empereur passe la nuit du 15 au 16 juin à cet endroit ; il y est l’hôte de Catherine d’Heusy et de son fils, Ferdinand Puissant. En 1871, la demeure est vendue à la Banque nationale de Belgique, qui fait démolir le château en 1912 pour y ériger un nouveau bâtiment. Afin de rappeler la destinée des lieux au cours de la campagne de 1815 une plaque commémorative a été apposée sur la façade de la banque à l’initiative de la société belge d’études napoléoniennes le 21 septembre 1952. Décorée de l’aigle impériale et du chiffre de Napoléon, on peut y lire « Ici s’élevait le Château Puissant dans lequel, deux jours

La plaque commémorative de l’emplacement du château Puissant à Charleroi © D. Timmermans

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La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

avant Waterloo, Napoléon Ier, Empereur des Français, établit son quartier général la nuit du 15 juin 1815 ». Le mur portant cette plaque a depuis été détruit, la plaque a été enlevée et non encore replacée. Charleroi, la plaque au général Letort Le 15 juin 1815, l’empereur se trouve à Charleroi et est protégé par des escadrons de service de sa garde, placés sous le commandement de son aide de camp, le général Louis Michel Letort. Dans l’après-midi, le général se lance à l’assaut de deux carrés prussiens entre Gilly et Farciennes. Rapidement maîtrisés, les Prussiens fuient vers Farciennes et Lambusart mais, dans la bataille, le général est blessé d’une balle dans le ventre. Transporté dans une maison de l’actuelle ville basse, il décède malgré les soins qu’on lui procure. Une plaque commémorative, installée sur la façade de l’immeuble situé au no 88 du boulevard Tirou, lui rend hommage : « Le Général Comte Letort, Aide de Camp de l’Empereur Napoléon Ier, est mort dans cette maison le 16 juin 1815 ».

Fleurus, la ferme de Martinrou Située chaussée de Charleroi, la ferme de Martinrou est un grand quadrilatère en brique et calcaire remontant au XVIIe siècle. De cette époque est uniquement conservée une aile d’étables. Un beau portail du XVIIIe siècle ouvre sur une cour pavée et donne accès au logis, rebâti dans un style néotraditionnel pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans la nuit du 15 au 16 juin, l’édifice et ses annexes abritent l’avantgarde de la cavalerie française. Sombreffe, le presbytère L’après-midi du 15 juin 1815, le feld-maréchal prussien Blücher est informé des combats de Charleroi et de la déroute de ses troupes. Il quitte Namur pour venir s’installer dans la région de Sombreffe. Il installe son quartier général au presbytère et y passe la nuit du 15 au 16 juin. Il en profite pour convenir d’un rendez-vous avec le duc de Wellington alors à Bruxelles. Le 16 juin 1815, ils se rencontrent au moulin de Brye, dit aussi de Bussy, à Fleurus où Blücher vient d’établir un nouveau

La plaque au général Letort à Charleroi © D. Timmermans

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Sur les traces de la Wallonie française

Le presbytère de Sombreffe. Photo de 1968 © Bruxelles, KIK-IRPA

Fleurus, le moulin Naveau et le monument aux trois victoires françaises Le 16 juin 1815, Napoléon arrive à Fleurus vers 11h du matin. Il s’installe dans l’auberge de la Barrière, située en contrebas du moulin Naveau et démolie en 1999. Il y prend une collation et y rencontre le maréchal Grouchy. Situé à l’intersection de la rue de l’Observatoire et de la chaussée de Charleroi, le moulin est considéré comme l’observatoire de Napoléon pendant la bataille de Ligny. Remontant probablement à la fin du XVIIIe siècle, il s’agit d’un ancien moulin à vent aujourd’hui dépourvu de ses ailes. Une plaque commémorative a été apposée au-dessus de la porte d’entrée ; on y lit simplement « Observatoire de Napoléon. 16 juin 1815 ». À côté du moulin se trouve un imposant monument commémoratif des « trois victoires françaises de Fleurus ». Il a été érigé le 13 septembre 1936 par un comité franco-belge et porte l’inscription : « Aux victoires françaises de Fleurus. Luxembourg 1690 – Jourdan 1794 – Napoléon 1815 ». Les trois noms de batailles sont surmontées d’un bas-relief illustrant chaque victoire : une fleur de lys symbolise celle des troupes de Louis XIV menées par le maréchal de Luxembourg contre les troupes hollando-autrichiennes le 1er juillet 1690 ; un bonnet phrygien rappelle la victoire de Jourdan le 26 juin 1794 ; l’aigle impériale illustre la dernière bataille victorieuse de Napoléon à « Ligny-sous-Fleurus » le 16 juin 1815.

Le boulet de canon encastré dans le presbytère de Sombreffe © Les Amis de Ligny

quartier général. L’édifice, aujourd’hui disparu, se trouve alors en plein milieu du futur champ de bataille de Ligny. Le presbytère de Sombreffe témoigne encore de ces événements historiques. Construit vers 1770-1780 par l’abbaye de BonneEspérance, il s’agit d’un bel édifice en brique et pierre bleue de style classique. Le mur du cimetière et le mur du couloir du presbytère gardent les stigmates des combats menés dans la région : deux boulets de canons y sont encore figés. Une des portes est elle aussi encore marquée de coups de sabre donnés par le feld-maréchal lui-même selon la légende ; ils ont été surnommés « les coups de la colère de Blücher ». 168

Le moulin Naveau à Fleurus © D. Timmermans


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

La plaque signalant l’observatoire de l’empereur sur le moulin Naveau © D. Timmermans

Le monument aux trois victoires françaises de Fleurus © D. Timmermans

Fleurus, l’ancien château Zualart Compris dans un ensemble de bâtiments disposés en U autour d’une cour carrée, le château se situe le long de la rue de Bruxelles et a sans doute été érigé dans le dernier tiers du XVIIIe siècle. L’édifice compte deux niveaux de neuf travées groupées par trois, chacune surmontée d’une lucarne à croupe. Le bâtiment est utilisé comme quartier général par l’armée française pendant la bataille de Ligny. Dans le parc se trouve la stèle du boulet. En 1912, un vaste complexe scolaire est aménagé au départ château Zualart.

Fleurus/Saint-Amand, la ferme de la Haye Important quadrilatère en brique et moellons calcaires blanchis ou enduits, la ferme de la Haye comporte des bâtiments d’époques différentes. Le logis remonte au XVIIe siècle et la plupart des dépendances du XVIIIe siècle. Quelques transformations ont encore lieu au XIXe siècle. Au cours de la bataille de Ligny, le 4e corps d’infanterie de l’armée française est mené par le général Girard. Le 16 juin à 15h30, il se porte à l’attaque et s’empare du hameau de La Haye, entre les villages de Saint-Amand et Wagnelée. Au 169


Sur les traces de la Wallonie française

cours de cette bataille, Girard est mortellement blessé : tombé de son cheval, il est emmené à Charleroi pour y recevoir les soins du chirurgien-major d’Héralde. Touché à trois reprises par des balles prussiennes, il est soigné le 17 juin à Charleroi et transféré à Reims puis Paris, où il décède le 27 juin. Une plaque commémorative a été apposée sur la ferme de la Haye le 31 mars 1990 à l’initiative de l’association pour la conservation des monuments napoléoniens : « Ferme de la Haye. Ici est tombé, mortellement blessé, le 16 juin 1815, le général Girard ». Né le 21 février 1775, Jean Baptiste Girard s’engage comme volontaire aux armées en 1793, devient général de brigade en 1806 et baron d’Empire en 1808. Le 21 juin 1815, Napoléon décide de le nommer duc de Ligny. Le titre n’a jamais pu être officiellement reconnu, compte tenu de la seconde abdication de l’empereur et de la mort du principal intéressé. Sombreffe, le château Le château de Sombreffe est un château fort de plaine, autrefois entouré de douves. Il faisait partie d’une importante ligne de défense qui séparait le comté de Namur et le duché

Le château de Sombreffe. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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de Brabant. Il est entouré d’une vaste esplanade fortifiée autrefois flanquée de huit ou neuf tours circulaires. L’imposant donjon-porche se situe au centre ; il est composé de trois niveaux surmontés d’une flèche pyramidale. Aujourd’hui transformé en exploitation agricole, le site comprend également un châtelet à deux tours et une partie des murailles ponctuées de deux tourelles. Au cours de la bataille de Ligny, il est réquisitionné par l’armée prussienne afin d’y installer l’état-major du 2e corps de l’armée commandé par le lieutenant-général Von Pirch. Le château sert aussi d’ambulance à partir du 16 juin 1815. Sombreffe/Ligny, la ferme d’En-Bas Incendiée lors des combats, il n’en reste plus de nos jours que deux ailes de bâtiments datant du XVIIIe siècle. Le lieu est transformé en forteresse par Blücher le 16 juin 1815. Une plaque commémorative surmontée d’un aigle entouré des dates de 1815 et 1965 se trouve sur la façade ; elle porte l’inscription suivante : « Ferme d’En-Bas. Dernier bastion de la résistance prussienne à Ligny, cette ferme soutint le 16


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

juin 1815 les furieux assauts des troupes impériales françaises du général Gérard. Prise et perdue plusieurs fois, elle fut finalement enlevée par Napoléon à la tête de sa garde ». Sombreffe/Ligny, la ferme de la Tour ou ferme d’En-Haut Classée comme monument, la ferme conserve son porche de 1733 alors que le reste de l’édifice a été reconstruit au XIXe siècle. Elle possède elle aussi une plaque commémorative. Celle-ci est également surmontée d’un aigle entouré des dates de 1815 et 1965 et de l’inscription suivante : « Ferme d’En-Haut. Défendue par les Prussiens de Blücher, cette ferme fut enlevée le 16 juin 1815 par la Garde impériale épaulant deux divisions du 4e corps d’armée du général Gérard. Napoléon y pénétra le soir de cette glorieuse journée ». Cette plaque en bronze, comme la précédente, a été offerte par la Société de la Légion d’honneur en 1965 ; elle est l’œuvre du sculpteur Oscar Declercq. Fleurus, le château de la Paix Actuel hôtel de ville de Fleurus et situé dans un petit parc, le château de la Paix est un bel édifice classique construit en brique et calcaire à la fin du XVIIIe siècle. La façade principale compte deux niveaux de sept travées dont les trois centrales sont surmontées d’un fronton triangulaire. C’est à cet endroit que Napoléon passe la nuit après la bataille de Ligny. Il y prépare la suite des opérations et son départ vers Bruxelles. La chambre où il passa la nuit existe toujours et abrite aujourd’hui des bureaux. L’empereur quitte les champs de bataille vers 22 ou 23h et se retire dans le château au son du corps de musique du 1er grenadiers qui entonne la marche « La Victoire est à nous ». Au soir de la défaite des Quatre-Bras et de l’exceptionnelle victoire de Ligny, Napoléon est persuadé que l’armée prussienne est hors jeu bien que non entièrement anéantie. Une plaque commémorative se trouve aujourd’hui sur un petit monument dans le jardin du château : « Dans ce château, (…) Napoléon a établi son quartier général dans la nuit du 16 au 17 juin 1815 après la victoire de Ligny sous Fleurus ».

Le château de la Paix à Fleurus avant restauration © D. Timmermans

La plaque commémorative apposée sur la façade du château de la Paix © D. Timmermans

Fleurus, l’église Saint-Victor D’origine romane, l’église de Fleurus a été remaniée à de nombreuses reprises. Son aspect actuel date principalement des XVIIIe et XIXe siècles avec une tour précédant une nef de cinq travées suivie d’un chœur à pans coupés. L’intérieur a été revu en style néoclassique au XIXe siècle. L’édifice a été transformé en hôpital de fortune après la bataille de Ligny. Sombreffe/Ligny, le centre Général Gérard Cette ancienne ferme des XVIIe et XIXe siècles, érigée en brique et pierre, comporte un grand corps de logis, une grange et quelques annexes plus modestes. Progressivement abandonnée et menaçant ruine, elle est acquise par le syndicat d’initiative de Ligny en 1976. Après quinze années de restauration, un complexe historique et culturel est inauguré en 1991. L’édifice abrite aujourd’hui le musée Napoléon ou musée des amis de Ligny. Sur la façade se trouve une plaque commémorative qui rend hommage à un protagoniste de la bataille : « À la mémoire du général J. Le Capitaine né à Lapenty en 1765, tué à Ligny le 16 juin 1815 ». Une seconde plaque se trouve dans la cour de la ferme : « À la vieille garde impériale. Que la bataille vienne à prendre un mauvais tournant et l’empereur faisait donner la vieille garde ; on savait alors dans le reste de la troupe que ce corps prestigieux enfoncerait les lignes ennemies ». Le musée conserve de nombreux objets en provenance du champ de bataille (armes, boulet, fourreau de sabre, boutons…) et d’autres objets d’intérêt (un diplôme de Sainte-Hélène, gravures, un Code 171


Sur les traces de la Wallonie française

Sombreffe/Ligny, le mémorial du bicentenaire À l’entrée du village de Ligny se trouve un monument commémorant le bicentenaire de la naissance de Napoléon. Érigé en 1969, on y trouve un canon, « le Formidable », coulé à Douai le 14 septembre 1811. Il est gravé du chiffre de l’empereur entouré de feuilles de laurier. On y trouve l’inscription : « La Légion d’honneur, en hommage à l’œuvre civile et militaire de Napoléon, 1769-1969 ». À cet endroit, l’association « Les amis de Ligny » organise depuis 1964 des manifestations rappelant la dernière victoire de l’empereur : reconstitutions de la bataille du 16 juin 1815, salon du livre napoléonien…

La bataille des Quatre-Bras

La plaque au général Le Capitaine sur la façade du centre Général Gérard à Ligny © Les Amis de Ligny

civil…). Une salle est consacrée à l’empereur et sa famille au rez-de-chaussée, une seconde est plus particulièrement dédiée aux batailles de Ligny et de Waterloo. Sombreffe/Ligny, la stèle aux grognards Le 31 mai 2009 a été inaugurée une stèle en hommage aux grognards de l’Empire ayant pris part à la bataille de Ligny. Décorée d’une aigle impériale, elle a été offerte par Ben Weider et a été réalisée grâce à la contribution des « Amis de Ligny » et de l’association pour la conservation des monuments napoléoniens. On peut y lire l’inscription suivante : « Hommage aux valeureux grognards de l’empereur, artisans de sa dernière victoire. Ligny, 16 juin 1815. Ce monument est un don de Ben Weider, président de la société napoléonienne internationale. Les amis de Ligny. ACMN ». Les grognards « Grognard » est le nom donné au soldat de la vieille garde de Napoléon. Il s’agit des membres les plus expérimentés de la Grande Armée mais aussi les plus fidèles à l’empereur. Napoléon lui-même les avait surnommés comme cela car ils se plaignaient continuellement de leurs conditions de vie : ils grognaient mais le suivaient toujours ! Sous le Second Empire, les grognards encore en vie reçurent la médaille de Sainte-Hélène, décernée par Napoléon III à tout qui en faisait la demande.

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Le 16 juin 1815, au moment où une partie de l’armée française se bat à Ligny, le carrefour des Quatre-Bras à Baisy-Thy est le centre de combats violents opposant les troupes alliées du prince d’Orange et du duc de Wellington à celles du maréchal Ney. Après le passage de la Sambre à Charleroi la veille, le but est de marcher le plus vite possible sur Bruxelles. Le hameau des Quatre-Bras se situe à l’intersection des routes CharleroiBruxelles et Namur-Nivelles. On y trouve à l’époque une ferme, une auberge et quelques métairies. Au contraire de Ligny, cette bataille ne peut être considérée comme une victoire de l’armée française. Il ne s’agit pas non plus d’une victoire des troupes coalisées. L’issue des combats doit plutôt être prise comme un « match nul », les deux camps s’étant neutralisés sans pour autant parvenir à prendre l’avantage. Le lendemain, toutefois, Wellington entame un retrait stratégique vers le nord où va se dérouler l’ultime bataille du 18 juin. La bataille des Quatre-Bras est extrêmement meurtrière ; chacun des adversaires perd environ 5000 hommes, morts ou blessés. Erquelinnes/Solre-sur-Sambre, le château de Solre-sur-Sambre Ancien siège d’une seigneurie, le château fort de Solre-surSambre est situé en contrebas du village actuel, dans une plaine marécageuse irriguée par la Thure. La forteresse fut érigée dans le but de protéger le comté de Hainaut face à une enclave liégeoise. Les travaux s’achèvent en 1486, bien que la forteresse ait été remaniée par la suite : le donjon-porche du XIIIe siècle en constitue le point de départ et se dressait seul à l’origine au bord de la rivière. Au XIVe siècle, une enceinte de 14 m sur 43 épaulée par quatre tours d’angles vint renforcer la défense du château. Le château abrite le général Drouet d’Erlon dans la nuit du 14 au 15 juin 1815, avant la bataille des Quatre-Bras. Né à Reims en 1765, il prend part aux guerres de la Révolution entre 1792 et 1794. Pendant les campagnes de l’Empire, il combat entre autres à Austerlitz. Napoléon le fait comte d’Erlon le 28 janvier 1809. Au moment de la campagne de 1815, il est nommé commandant du 1er corps d’observation à l’armée du Nord le 6 avril puis est nommé pair de France le 2 juin. Bien que présent dans la région, il ne prend part ni


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

Le château de Solre-sur-Sambre, lieu d’étape du général Drouet d’Erlon © F.-E. de Wasseige

à la bataille de Ligny, ni à la bataille des Quatre-Bras, mais bien à celle de Waterloo, au cours de laquelle il s’empare de la ferme de la Haie Sainte. Après la défaite, il est proscrit et se réfugie à Munich et Bayreuth. Il est condamné à mort par contumace le 10 août 1816, mais est amnistié à l’occasion du sacre de Charles X le 25 mai 1825. Nommé maréchal de France le 9 avril 1843, il meurt à Paris le 25 janvier 1844 et est enterré dans sa ville natale. Erquelinnes/Solre-sur-Sambre, le monument Drouet d’Erlon Un monument a été érigé en hommage au général dans la rue Mont-de-Solre en 1995. Il se présente sous la forme d’un bloc de granit surmonté d’un aigle et sur lequel se trouve une plaque commémorative portant l’inscription suivante : « Au 1er corps d’armée et son général J.-B. Drouet, comte d’Erlon. Bivouac des 14 et 15 juin 1815 ». Plus bas, une petite plaque de marbre en forme de giberne, plus discrète, est gravée d’une aigle couronnée et de l’inscription « À nos conscrits, 17981815 ». L’inaction du 1er corps d’armée malgré sa présence dans la région à l’époque reste un mystère. Pourquoi Drouet d’Erlon et ses hommes ne prirent-ils part à aucune des deux batailles du 16 juin alors qu’ils étaient en mesure d’intervenir ? Il semble que des ordres confus et contradictoires aient mené le général à rester à l’écart, mais rien ne nous permet d’imposer un avis précis sur la question.

Le monument commémoratif du bivouac des troupes du général Drouet d’Erlon à Solre-sur-Sambre © D. Timmermans

Thuin/Leers-et-Fosteau, le château-ferme du Fosteau Siège d’une seigneurie créée en 1235 comme avouerie de l’abbaye de Lobbes, le château-ferme est groupé autour d’une vaste cour polygonale. On y trouve une maison forte des XIVe et XVe siècles, réaménagée en 1599, et une basse-cour fortifiée des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Une seconde ferme construite en 1839 complète l’ensemble ponctué de sept tours. Le site, exceptionnel, comprend également une glacière, une cour d’honneur, une pièce d’eau et des jardins à la française. À l’intérieur sont conservé une chapelle castrale, la salle des gardes et son imposante cheminée, ainsi qu’une pharmacie ancienne. C’est à cet endroit que le comte de Reille passe la nuit du 14 au 15 juin après avoir repris la ville de Thuin. Né en 1775 à Antibes, Honoré Charles Reille participe à de nombreuses 173


Sur les traces de la Wallonie française

Le château-ferme du Fosteau à Leers-et-Fosteau © F.-E. de Wasseige

batailles des campagnes d’Empire parmi lesquelles Austerlitz et Wagram. Le 14 février 1815, il devient grand-croix de la Légion d’honneur. Devenu général d’infanterie, il est envoyé à Valenciennes le 31 mars 1815 ; il prend ensuite part à la bataille des Quatre-Bras. Il poursuit sa carrière après la seconde chute de Napoléon et est fait maréchal par le roi Louis-Philippe Ier en 1847. Il décède à Paris le 4 mars 1860. À l’intérieur du château-ferme du Fosteau, un cabinet a été aménagé en hommage au général Reille. Charleroi/Marchienne-au-Pont, le château de Cartier Construit au début du XVIIe siècle à l’emplacement d’une demeure seigneuriale plus ancienne, le château Bilquin de Cartier est un vaste ensemble composé de bâtiments en brique et pierre calcaire disposés autour d’une cour d’honneur accessible par un porche. On y trouve encore deux ailes de logis et quelques éléments défensifs du mur nord. Venu de Solre-sur-Sambre dans le but de se diriger vers les zones de combat, le général Drouet d’Erlon loge à cet endroit dans la nuit du 15 au 16 juin 1815. À l’époque, le château conserve encore une seconde cour et sa muraille 174

fortifiée dominant la Sambre. C’est à Marchienne-au-Pont que l’avant-garde française passe la Sambre dans le but de rejoindre Gosselies ; c’est le 1er corps d’armée conduit par Drout d’Erlon, fort de plus de 20.000 hommes, suit. Charleroi/Jumet, la chapelle Notre-Dame des Affligés Ancien lieu de culte et de pèlerinage connu depuis le XVIe siècle, la chapelle actuelle a été érigée en brique et calcaire sur un plan octogonal en 1677. En 1707, un porche agrandit l’ensemble en venant s’accoler au plan d’entrée. La chapelle est sommée d’un clocheton piqué d’une croix, sur une toiture d’ardoises en dôme. Dans les jours ayant précédé les batailles de Ligny et des Quatre-Bras, la chapelle est transformée en hôpital civil suite aux combats menés dans la région de Charleroi contre les Prussiens le 15 juin 1815. Ici, les hommes de la 7e division d’infanterie se reposent et se font soigner sous une chaleur accablante. Genappe/Baisy-Thy, la ferme de Gemioncourt Située à environ un kilomètre du carrefour des Quatre-Bras, la ferme de Gemioncourt est un vaste quadrilatère des XVIIIe


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

La chapelle NotreDame-des-Affligés à Jumet. Photo de 1941 © Bruxelles, KIK-IRPA

La plaque commémorative sur le portail de la ferme de Gemioncourt © D. Timmermans

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Sur les traces de la Wallonie française

et XIXe siècles, ancienne dépendance de l’abbaye de Villersla-Ville. Érigée en brique et pierre bleue, elle est caractérisée par sa cour barlongue, une belle tour-colombier à l’angle nord-ouest et un beau portail en anse de panier coiffé d’un toit d’ardoise. La ferme est actuellement la propriété d’une famille allemande qui l’exploite personnellement. La ferme est prise le 16 juin 1815 vers 15h par la brigade Gautier, de la division Foy, suite à de terribles affrontements entre un régiment de cavalerie belge commandé par le lieutenant-colonel Mercx de Corbais 1 et deux régiments de cavalerie française. Le 4 juin 1988, l’association pour la conservation des monuments napoléoniens a inauguré une plaque commémorative à droite du portail de la ferme : « À la mémoire des soldats de la Grande Armée tombés devant ces murs le 16 juin 1815 ». Cette plaque est le seul « monument » à la mémoire des Français disparus au cours de la bataille des Quatre-Bras. Genappe/Baisy-Thy, la ferme des Quatre-Bras Située au carrefour des grands-routes, la ferme des QuatreBras est un quadrilatère avec cour carrée pavée dont les 1

Voir l’article sur Édouard Mercx de Corbais dans le chapitre consacré au patrimoine funéraire.

bâtiments datent essentiellement des XVIIIe et XIXe siècles. C’est à hauteur de cette ferme que, lors de la bataille qui porte le même nom, les troupes anglo-hollandaises sont forcées de battre en retraite face à l’armée française. Le bâtiment est aujourd’hui dans état déplorable, à l’abandon depuis plus de dix ans. Plusieurs tentatives de destruction ont pour l’instant échoué et des associations tentent de sauver l’ensemble. Une plaque commémorative se trouvait sur le mur de la ferme, côté route de Sombreffe, et portait une inscription bilingue : « Aan de Nederlanders en hun medestryders verdedisers van Quatre Bras / 15-16-VI-1815 / À la mémoire des Néerlandais et leurs alliés défenseurs de Quatre Bras ». Elle s’est depuis lors dessoudée de la façade, compte tenu de l’état de dégradation de la maçonnerie, et a été volée en 2011. Les Bons Villers/Frasnes-lez-Gosselies, la ferme du Grand Champ Ensemble de bâtiments agricoles entourés d’un mur de briques percé d’un porche du XVIIIe siècle, la ferme du Grand Champ conserve des bases du XVIIe siècle mais possède des bâtiments datant essentiellement des deux siècles suivant. On y trouve un vaste logis de neuf travées sur deux niveaux, prolongé par un long corps d’étables. La ferme est transformée

La plaque commémorative située sur la façade de la ferme des Quatre-Bras à Baisy-Thy © D. Timmermans

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La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

en hôpital pour les troupes françaises après la bataille des Quatre-Bras. Genappe/Baisy-Thy, le monument du duc de Brunswick Parmi les protagonistes célèbres de la bataille des QuatreBras figure le duc Frédéric-Guillaume de Brunswick. Brièvement duc de Brunswick en 1806 avant l’invasion de son duché par Napoléon, il retrouve son titre en 1813 après la campagne de Saxe. Une de ses premières actions est alors de lever des troupes fraîches et de rejoindre le camp des alliés. Le 16 juin 1815, il commande le contingent brunswickois de 5.400 hommes rattaché à l’armée de Wellington et est mortellement blessé. Il est transporté dans une ferme afin d’être soigné mais le chirurgien arrive trop tard. Son corps est embaumé à Bruxelles puis envoyé à Brunswick. Un monument a été érigé en sa mémoire au bord de la route de Charleroi. Il s’agit d’un haut bloc de granit de 9 m de hauteur surmonté d’un lion de cuivre de 3 m tenant sous sa griffe l’écusson de Brunswick. Cette taille imposante en fait le plus grand de tous les cénotaphes érigés à la mémoire des soldats décédés pendant la campagne de 1815. Sur une des faces de la stèle se trouve un médaillon en buste du duc entouré

Le monument en mémoire au duc de Brunswick à Baisy-Thy © D. Timmermans

d’une couronne de lauriers et une inscription en allemand : « Frédéric-Guillaume, duc de Brunswick et Lunebourg, est tombé non loin de cette place en combattant à la tête de ses troupes le 16 juin 1815 ». Sur la face opposée se trouve l’inscription suivante : « À la mémoire du héros et de ses guerriers tombés avec lui pour l’Allemagne – La patrie reconnaissante. MDCCCLXXXX ». En effet, le monument a été érigé en 1890 sur un terrain de 25 m de côtés acquis par un comité constitué à Brunswick. Le monument a été financé par souscription publique. Genappe/Baisy-Thy, le monument aux Belges À 400 m du carrefour des Quatre-Bras se trouve un monument en hommage aux Belges ayant pris part à la bataille du 16 juin 1815. Il s’agit de commémorer les soldats « belges » ayant rejoint les troupes alliées au début de l’année ; certains servaient autrefois dans l’armée française et se retrouvent dès lors face à d’anciens camarades sur les champs de bataille. Inauguré en 1826, le monument en forme de stèle comporte, sur la frise, la date « 1815 – 16 juin » et en dessous, l’inscription suivante : « À la mémoire des Belges tués à la bataille des Quatre-Bras pour la défense du drapeau et l’honneur des armes ». Sur les deux côtés se trouvent des inscriptions

Le monument aux Belges tombés pendant la bataille des Quatre-Bras © D. Timmermans

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Sur les traces de la Wallonie française

en néerlandais : « Ter nagedachtenis der Belgen te QuatreBras voor de verdediging van het vaandel en de eer der wapens gesneuveld » et « Zij streden als leeuwen tegen troepen sterker in getal » 2. Genappe/Baisy-Thy, les monuments aux cavaleries belge et néerlandaise Aux abords des lieux de la bataille se trouve également le plus moderne des monuments commémoratifs des QuatreBras. Inauguré le 21 septembre 1990, il est dédié aux cavaliers néerlandais tombés durant la campagne de 1815. Très symbolique, il représente l’action des forces néerlandaises ralentissant les Français et est pourvu d’une plaque commémorative. Juste à côté se trouve une stèle inaugurée le 13 février 2014, le jour même du bicentenaire de la fondation, le 13 février 1814, des régiments de cavalerie des Lanciers et des Hussards par le comte Charles-Albert van der Burch 3. On y trouve une plaque commémorative sur laquelle se trouve une inscription bilingue dont voici le texte français : « 16 juin 1815. Ici se 2 3

La première est la traduction de l’inscription française. La seconde signifie « Ils se sont battus comme des lions contre des troupes plus fortes en nombre ». Voir l’article sur la sépulture de Charles-Albert van der Burch dans le chapitre consacré au patrimoine funéraire.

Le monument à la cavalerie néerlandaise à Baisy-Thy © D. Timmermans

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Le monument à la cavalerie belge à Baisy-Thy © D. Timmermans


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

reforma le 5e r[é]g[imen]t de dragons légers. Après son combat contre le 6e r[é]g[imen]t de chasseurs à cheval français, le 5e r[é]g[imen]t de dragons légers donna naissance au 1er r[é] g[imen]t de lanciers belges et nederlandse r[e]g[imen]t huzaren Prins Alexander ». Genappe/Baisy-Thy, le mémorial britannique et hanovrien Non loin du monument néerlandais se trouve un imposant bloc de granit sur lequel sont gravés les noms de l’ensemble des unités britanniques et hanovriennes qui prirent part à la bataille du 16 juin 1815. Le monument a été inauguré le 7 juin 2002.

La bataille de Waterloo Le 18 juin 1815, toujours sur le chemin de Bruxelles, l’empereur mène son dernier combat. Le champ de bataille, immense, se situe aujourd’hui sur les communes de Waterloo et de Braine-l’Alleud. Malgré quelques succès parmi lesquels la prise de la ferme de la Haie Sainte ou la victoire du Français Durutte sur les troupes du Hanovrien von Ompteda, l’issue ne nous est que trop bien connue : les troupes impériales sont écrasées par la coalition alliée composée de Britanniques, Néerlandais (Hollandais et Belges) et Allemands (Prussiens, Hanovriens, Brunswick). Plusieurs raisons expliquent cet échec : ordres contradictoires donnés aux maréchaux, mauvaises transmissions, manque de coordination. Parmi les raisons de la défaite compte également le découragement d’une partie des effectifs. Bien que psychologiquement et moralement supérieure à ses adversaires, l’armée française compte encore des royalistes dans ses rangs, ainsi que bon nombre d’officiers supérieurs lassés de vingt années de guerres républicaines et impériales et qui commençaient à apprécier les premiers mois de paix. Le patrimoine commémoratif de cette célèbre bataille est important. Les premiers monuments fleurissent aux abords des champs de batailles quelques années seulement après la défaite de Napoléon. Imposants et lourds de sens, ils sont l’initiative des alliés, des vainqueurs. Une série de plaques et de stèles commémoratives rendent ensuite hommage à l’empereur et aux Français, la plupart dans la seconde moitié du XXe siècle. Elles sont le fruit du devoir de mémoire entretenu par de nombreuses associations napoléoniennes. Mont-Saint-Guibert, le moulin « Al’Poudre » Cet ancien moulin à huile mentionné depuis le XVIIe siècle prend son nom actuel sous l’Empire après avoir servi de magasin à munitions pour les armées françaises. Situé au bord de l’Orne, il s’agit d’une ferme-moulin typiquement brabançonne. In fine, il remplit les fonctions de magasin à fourrage en 1815 peu avant les batailles de Ligny et de Waterloo. Le moulin fonctionne jusqu’en 1963 et abrite aujourd’hui un centre de mariages et de réceptions.

Lasne-Plancenoit, la maison De Coster Également appelée maison Lacoste et située au sud de la ferme de la Belle-Alliance, la maison appartenait à un habitant de la région, Jean-Baptiste De Coster, guide de Napoléon en juin 1815. Fortement réaménagée en 1947, il ne subsiste de l’époque que la grange et le petit bâtiment annexe. Cabaretier, Jean-Baptiste de Coster est choisi par l’empereur au matin de la bataille ; il suit Napoléon tout au long de cette journée et l’accompagne même dans sa retraite jusqu’à Charleroi. Après la bataille, il devient un « personnage » de la région et se fait régulièrement rétribuer afin de distiller ses souvenirs ; souvenirs qui bien souvent diffèrent d’un jour à l’autre… Lasne/Plancenoit, la ferme de la Belle Alliance Ancien relais de poste construit au XVIIIe siècle, transformé par la suite en cabaret et fortement remanié au cours des deux siècles suivants, la ferme de la Belle Alliance conserve de la bâtisse d’origine un pignon et deux portes à linteau. Le 17 juin 1815, l’empereur s’y arrête en fin d’après-midi. Il y donne des ordres avant de regagner la ferme du Caillou pour y établir son quartier général. Le lendemain, au cours de la bataille de Waterloo, des troupes françaises occupent la ferme de la Belle Alliance. L’édifice porte toutefois son nom actuel en raison d’un autre épisode lié à la bataille du 18 juin. C’est à cet endroit que se rencontrent le duc de Wellington et le maréchal Blücher après la victoire, qu’ils s’embrassent et se félicitent de l’issue heureuse du combat. De là, le maréchal prussien reprend la route vers Wavre et Namur afin de continuer la poursuite des troupes impériales. Une dalle de pierre gravée de caractères dorés avait été encastrée dans la façade de la ferme. Elle se trouve aujourd’hui contre le mur dans la cour de la ferme du Caillou. On y lit le texte suivant : « BelleAlliance. Rencontre des généraux Wellington et Blücher lors de la mémorable bataille du XVIII juin MDCCCXV, se saluant mutuellement vainqueurs ».

La ferme de la Belle-Alliance à Plancenoit © Bruxelles, KIK-IRPA

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Sur les traces de la Wallonie française

La plaque commémorative de la ferme de la Belle-Alliance, lorsqu’elle ornait encore la façade de l’immeuble © Bruxelles, KIK-IRPA

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La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

La ferme et la chapelle du Chantelet à Vieux-Genappe © D. Timmermans

Genappe/Vieux-Genappe, la ferme du Chantelet Cette ferme traditionnelle de la région est surtout connue aujourd’hui pour sa remarquable chapelle classée. Fondée par les Ghoubault, seigneurs du lieu à partir de 1612, la chapelle du Chantelet est une petite bâtisse de style baroque en brique et pierre blanche composée de deux travées et d’un chœur à trois pans. Située à côté de la ferme du Caillou, elle comporte une belle façade panneautée, creusée d’une porte en plein cintre à bossages et terminée par un fronton à volutes. Au-dessus de l’entrée, une niche abrite une statue de sainte Gertrude. Elle a été édifiée en 1661-1662 et restaurée une première fois en 1957. Classée comme monument en 2000, elle a ensuite bénéficié d’une nouvelle restauration brillamment exécutée. Le 6 juin 1987, l’association pour la conservation des monuments napoléoniens a fait apposer une plaque sur le mur de la ferme : « Ferme du Chantelet. Le maréchal Ney, duc d’Elchingen, prince de la Moscowa, logea dans cette ferme du 17 au 18 juin 1815 ». Wavre, le château de la Bawette Portant le nom d’un lignage attesté à Wavre depuis le XIVe ou le XVe siècle, le château de la Bawette est transmis par mariage en 1736 puis passe entre diverses mains. Situé en dehors de la ville, l’édifice a été considérablement modifié au XIXe siècle bien que conservant des parties plus anciennes. Le corps de logis est ainsi millésimé 1662. La façade principale est ornée d’un fronton aux armes des Hardy de Beaulieu, actuels propriétaires du lieu, réalisé en 1959. Le général des armées de Saxe, Johann Adolf von Thielmann, commandant le 3e corps, y installe son quartier général le soir du 17 juin après avoir combattu à Ligny. La cavalerie de Lottum et la division Borke, qui formaient l’arrière-garde, arrivent en pleine nuit et bivouaquent sur la rive droite de la Dyle. Au matin du 18 juin, Thielmann et ses hommes quittent Wavre pour rejoindre le gros de l’armée à

La plaque commémorative située sur un mur de la ferme du Chantelet © D. Timmermans

Le château de la Bawette à Wavre © J. Tordoir

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Sur les traces de la Wallonie française

Plancenoit alors que l’avant-garde du maréchal Grouchy arrive dans leur direction. Thielmann est forcé de se replier sur Louvain et de laisser la Bawette entre les mains du général Hobe. Le 19 juin, c’est au tour de Grouchy de s’installer au château de la Bawette et d’y installer un inutile quartiergénéral dans le but de poursuivre sa route vers Bruxelles. C’est là, à 10h30, qu’il apprend la défaite de Waterloo de la veille et se voit forcé de se replier sur Wavre afin d’y entreprendre sa retraite sur Namur. Braine-l’Alleud/Hougoumont, le château et la ferme de Goumont ou de Hougoumont. Déjà signalé en 1474, le domaine de Goumont change plusieurs fois de propriétaires au fil des siècles. La ferme actuelle date en grande partie du XVIIe siècle bien que les ailes nord et est aient été incendiées lors des combats de juin 1815. L’ensemble se situe autour d’une cour oblongue délimitée par un mur de clôture auquel s’adossent des vestiges du château et de la chapelle castrale, préservés à la demande du comte de Robiano au XIXe siècle. L’habitation, de type traditionnel, a été élevée en brique et grès aux XVIe et XVIIe siècles sur deux niveaux de six travées englobant le portail et un second passage, à l’ouest. Dans le prolongement se trouvent les dépendances et les communs, ainsi qu’une grange en long percée d’un portail cintré.

La ferme d’Hougoumont © Bruxelles, KIK-IRPA

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La ferme est un des lieux stratégiques de la bataille de Waterloo. Dès le 17 juin, les troupes anglaises se retranchent dans la cour ; un bataillon du régiment de Nassau et deux compagnies hanovriennes défendent le bois tout proche. Le 18 juin, elle est attaquée vers 11h30 par les troupes françaises menées par le prince Jérôme Bonaparte, frère de l’empereur. Le combat dure huit heures, le verger et le jardin de la ferme changent sept fois de main. Toutefois, les Français ne parviennent jamais à pénétrer à l’intérieur des bâtiments. Wellington dit d’ailleurs que « le tournant de la bataille se joua lorsque se fermèrent les portes de Hougoumont ». Dans l’après-midi, un obus incendie la principale grange et le feu se propage ; plusieurs centaines de blessés périssent dans les flammes. Plus de 6.000 hommes sont mis hors de combat à Hougoumont. Au soir du 18 juin, 300 Anglais et 800 Français sont enterrés à la hâte devant la porte de la ferme. Aujourd’hui, plusieurs plaques et monuments commémoratifs ont pris place au niveau de la ferme d’Hougoumont : - à côté de la porte nord se trouve une plaque en hommage au 3e régiment de Footguards ou Scots Guards. On y retrouve l’emblème et la devise de l’Écosse : un chardon et l’inscription « Nemo me impune lacessit » 4 ; 4

Personne ne me provoque impunément.


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

- sur le mur extérieur de la chapelle a été apposée une plaque le 10 avril 1907 à l’initiative de la brigade des Guards. Elle commémore la présence de trois régiments des Footguards et de trois régiments de cavalerie britannique le 18 juin 1815. Elle porte une triple inscription, en français, anglais et allemand : « On est prié de respecter cette chapelle, où pendant la mémorable journée du 18 juin 1815 tant de vaillants défenseurs d’Hougoumont ont rendu leur dernier soupir ». Cette plaque, autrefois située dans un bâtiment aujourd’hui détruit, est actuellement stockée dans la chapelle ; - sur le mur de la chapelle également, une seconde plaque a été installée en mémoire aux First regiment of Footguards, plus connu sous le nom de Grenadier Guards : « In memory of the officers and men of the light companies of the 2nd and 3rd batalions who died defending Hougoumont, 18th June 1815. This tablet was erected in 1977 by their successors of the first of grenadier guards » 5 ; - sur le mur de la grange se trouve une plaque commémorative du Royal waggon train : « In memory of the officers and men of the royal waggon train who took part in the defense of Hougoumont 18th June 1815. This tablet was erected in 1979 by the Royal Corps of Transport, the successors of the Royal Waggon Train » 6 ; - une pierre blanche a été encastrée dans le mur du verger en 1889 pour marquer l’endroit de la mort du capitaine Craufurd du 3e régiment des Guards : « In memory of Captain Thomas Craufurd of the 3rd Guards, eldest son of the baronet of Kilbernie, killed in the extreme south west of this wall. This stone was placed by his kinsman, Sir William Fraser of Morar, Baronnet, 1889 » 7 ; - un monument a été érigé dans le verger en 1912 à l’initiative de la société d’études historiques et de l’asbl « Les amis de Waterloo » en hommage aux soldats français. Il s’agit d’une stèle de granit ornée d’un aigle napoléonien et d’une couronne de laurier encastrant une croix de la Légion d’honneur. On y trouve l’inscription suivante : « Aux soldats français morts à Hougoumont, 18 juin 1815 » et une citation de l’empereur : « La terre paraissait orgueilleuse de porter tant de braves » ; - une double plaque commémorative en pierre rappelant l’action des Coldstream Guards a été placée en 1945 sur le mur à droite de la porte sud par le colonel Strathden. La première pierre est décorée de l’écusson de ce régiment d’infanterie britannique. On y trouve, au centre, le drapeau 5

6

7

En mémoire des officiers et des hommes des second et troisième bataillons qui moururent en défendant Hougoumont le 18 juin 1815. Cette plaque a été apposée en 1977 par leurs successeurs du 1st grenadier guards. En mémoire des officiers et des hommes du Royal waggon train qui prirent part à la défense d’Hougoumont le 18 juin 1815. Cette plaque a été apposée en 1979 par le Royal Corps of Transport, successeur du Royal waggon train. En mémoire du capitaine Thomas Craufurd du 3e Guards, fils aîné du baron de Kilbernie, tué à l’extrémité sud-ouest de ce mur. Cette pierre a été placée par son parent, Sir William Fraser de Morar, Baron, 1889.

La plaque en hommage aux trois régiments de Foot Guards sur le site de la ferme d’Hougoumont © D. Timmermans

La plaque en hommage au First regiment of Foot Guards sur le site de la ferme d’Hougoumont © D. Timmermans

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Sur les traces de la Wallonie française

La plaque en hommage aux Coldstream Guards sur le site de la ferme d’Hougoumont © D. Timmermans La plaque en hommage au Royal Waggon Train sur le site de la ferme d’Hougoumont © D. Timmermans

anglais, entouré d’une ceinture militaire sur laquelle s’inscrit la devise « honni soit qui mal y pense », le tout entouré d’une étoile à multiples branches. Une seconde pierre comporte l’inscription bilingue suivante : « In memory of the officers and men of the 2nd battalion Coldstream Guards who, while defending Hougoumont farm, successfully held this south gate from successive attacks throughout 18th June 1815 / À la mémoire des officiers et soldats du 2e bataillon des Coldstream Guards qui ont participé à la défense de Hougoumont et ont résisté à toutes les attaques dirigées contre la porte sud le 18 juin 1815 » ; - le 6 juin 1987, une plaque « À la mémoire du général Bauduin, tombé devant ces murs le 18 juin 1815 » a été inaugurée par l’association pour la conservation des monuments napoléoniens. 184

La plaque en hommage au général Bauduin sur le site de la ferme d’Hougoumont © D. Timmermans


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

À côté de ces nombreuses plaques commémoratives, la ferme de Hougoumont abrite également plusieurs sépultures. Dans le verger se trouvent deux pierres tombales d’officiers anglais : celle du capitaine John Lucie Blackman, du régiment des Guards, mort à 21 ans, et celle du sergent-major Edward Cotton, installé à Waterloo après la bataille. Selon ses vœux, il fut inhumé à cet endroit en 1849 après avoir été le premier guide touristique du champ de bataille 8. Aujourd’hui, seules subsistent les pierres tombales ; les corps ont été exhumés en 1890 et placés dans le mémorial britannique du cimetière d’Evere. 8

Voir l’article sur le palais de cire à Braine-l’Alleud dans le présent chapitre.

Waterloo, le musée Wellington Demeure de style Louis XV, l’actuel musée Wellington a été érigé dans le troisième quart du XVIIIe siècle sur deux niveaux de six travées, en brique et pierre bleue. Cette belle auberge typiquement brabançonne sert de relais de poste au moment de son édification : cette affectation spécifique et sa bonne situation géographique ont attiré l’attention du duc de Wellington. Le 17 juin 1815, il choisit l’endroit pour y installer son quartier général d’état-major. Il y séjourne personnellement les 17 et 18 juin et y rédige, au soir de la bataille, le communiqué de la victoire.

Le musée Wellington à Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA

Une salle d’exposition du musée Wellington. Photo G. Focant © SPWPatrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française

L’auberge abrite aujourd’hui un musée dédié à la personnalité du duc de Wellington et, au sens large, à la bataille de Waterloo. Le bâtiment, en danger, fut sauvé en 1955 à l’initiative de l’historien Jacques-Henri Pirenne et reconverti en espace muséal. La commune de Waterloo acquit le bien en 1958, le terrain situé à l’arrière en 1961 et les dépendances en 1972. On y trouve notamment les chambres de Wellington et du colonel Gordon, son aide de camp, décédé le 18 juin 1815 9. Différentes pierres tombales ont été transférées à cet endroit et plusieurs plaques commémoratives y trouvent leur place : - dans le jardin se trouve la stèle funéraire du major Arthur Rowley Heyland. Né en 1781 à Belfast, il participe aux guerres continentales de 1811 à 1814, notamment en Espagne et en France. Membre du 14e régiment de ligne britannique, il participe également à la campagne de 1815. Tué d’une balle dans la nuque le 18 juin 1815, il est enterré en face de l’hôtel des Colonnes à Mont-Saint-Jean. Il repose sous un monument cubique en pierre bleue entouré d’une grille en fer forgé. Des travaux d’élargissement de la route en 1889 provoquent le déplacement du monument funéraire, sans respect pour le corps du défunt, qui bizarrement n’est pas transférée au monument d’Evere comme cela fut le cas pour d’autres soldats. La pierre tombale est par la suite transférée au musée Wellington. On y trouve l’inscription suivante : « Sacred to the memory of Major Arthur Rowley Heyland of his Britannic Majesty’s fortieth Regiment of foot, who was buried on this spot. He fell gloriously in the Battle of Waterloo on the 18th June 1815. At the moment of victory and in command of the regiment age 34 years » 10. Le monument tient lieu de cénotaphe ; - à côté se trouve la pierre tombale du colonel Henry Walton Ellis. Né en 1783 à Worcester, il sert en Espagne et au Portugal entre 1810 et 1814 avec le 23e régiment des Foot Guards. Chevalier de l’Ordre du Bain, il est nommé colonel en juin 1814, un an avant de prendre part à la bataille de Waterloo. Touché à la poitrine à Mont-SaintJean, il décède le 20 juin 1815 des suites de ses blessures. Il est d’abord enterré à Braine-l’Alleud puis transféré au cimetière de Wavre. Le déplacement de ce cimetière à deux reprises en 1909 et 1920 et sa désaffectation entre 1955 et 1975 provoque la perte du corps du colonel. Sa pierre tombale est alors transférée au musée Wellington. Elle comporte une double inscription en français sur une face et en anglais sur l’autre : « To the memory of colonel Sir H. W. Ellis K.C.B. 11 25th reg[iment] of Welsh fusiliers, killed in 9 10

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Voir la notice sur le monument Gordon à Plancenoit dans le présent chapitre. Dédié à la mémoire du major Arthur Rowley Heyland, du 40e régiment à pied de sa majesté britannique, qui a été enterré à cet endroit. Il tomba glorieusement à la bataille de Waterloo le 18 juin 1815. Au moment de la victoire et aux commandes de son régiment, il était âgé de 34 ans. Knight Commander of the Order of the Bath (Chevalier de l’Ordre du Bain).

La tombe du major Arthur Rowley Heyland au musée Wellington © Bruxelles, KIK-IRPA

action at Waterloo 18 June 1815 / À la mémoire du chevalier H. W. Ellis, K.C.B., colonel du 25e régiment des fusiliers royaux de Galles, tué au combat à Waterloo le 18 juin 1815 » ; - contre un mur se trouve un fragment de la pierre tombale du lieutenant-colonel Richard Fitzgerald. Né en 1774, il sert en Espagne en 1814 et est tué d’un coup de feu à la tête pendant la bataille de Waterloo. Il est enterré dans le cimetière de Wavre mais sa sépulture disparaît lors du transfert du champ des morts en 1909. Seule une pierre subsiste et a été déposée au musée Wellington. Elle porte l’inscription suivante : « D.O.M. Sacred to the memory of Lieutenant-Colonel Richard Fitz-Gerald of the 2nd regiment of Life Guards of his Britannic Majesty’s who fell gloriously at the Battle of Belle Alliance, near this town on the 18 June 1815 in the 41st year oh his life, deeply and deservedly regret by his family and friends. To a manly loftinefs [sic] of soul he united all the virtues that could render him an ornament to his profession and to private and social life. Aux mânes du plus vertueux des hommes, généralement estimé et regretté de sa famille et de ses amis, le Lieutenant-Colonel Richard Fitz-Gerald de la Garde du Corps de Sa Majesté Britannique, tué glorieusement à la bataille de la Belle Alliance le 18 juin 1815. R.I.P. » ;


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

- dans le jardin a été reconstruit un monument autrefois situé dans le jardin de la maison Pâris 12. Il est censé renfermer la jambe de Lord Uxbridge, amputé suite à la blessure infligée pendant la bataille de Waterloo. Après l’opération, le tenancier de l’auberge enterra la jambe dans son jardin et la recouvrit d’un monticule de fleurs. Le membre fut par la suite exhumé et placé dans une boite de verre dans le but d’être exposé aux visiteurs du champ de bataille. La visite de son fils en 1876 provoqua l’indignation de la famille. En 1880, la jambe de Lord Uxbridge fut enterrée dans le cimetière de Waterloo ; elle fut perdue après la désaffectation de la nécropole. L’endroit qui avait alors « abrité » la jambe à Waterloo fut transformé en mausolée. Détruit en 1991, il fut reconstruit au musée Wellington. Une dalle de pierre bleue a ainsi été encastrée dans un mur de briques rouges. Elle porte une inscription bilingue dont voici l’épitaphe : « Ci est enterrée la jambe de l’illustre, brave et vaillant comte d’Uxbridge, lieutenant général de S.M. britannique, commandant en chef de la cavalerie anglaise, belge et hollandaise, blessé le 18 juin 1815, à la mémorable bataille de Waterloo, qui par son héroïsme, a concouru au triomphe de la cause du genre humain, glorieusement décidée par l’éclatante victoire du dit jour ». D’autres plaques rappellent le passage à cet endroit du roi d’Angleterre Georges IV en 1821 et du roi de Prusse Frédéric III en 1825. 12

Voir l’article consacré à la maison Pâris dans le présent chapitre.

Lord Uxbridge, mort en 1854, est pour sa part enterré en Angleterre, sans une de ses jambes. Genappe/Vieux-Genappe, la ferme du Caillou Grosse bâtisse de style néoclassique, la ferme du Caillou a été érigée en brique et pierre en 1757. Elle est un des endroits-clés de la bataille de Waterloo et un des principaux lieux de mémoire. Le 17 juin 1815, l’empereur s’y installe et y établit son plan de bataille au matin du 18 juin. La ferme est partiellement incendiée par les troupes prussiennes le 19 juin. Elle est vendue à Jean-Joseph Aubry le 20 novembre 1818 et reconstruite par son nouveau propriétaire. Le lieu devient un cabaret et un relais pour les diligences. En 1865, la ferme du Caillou est acquise par l’architecte provincial Émile Coulon qui la transforme en maison de campagne. La ferme est à nouveau vendue en 1905 avant de finalement être acquise par la société belge d’études napoléoniennes le 13 septembre 1950. Le site est depuis aménagé en musée napoléonien. On y trouve plusieurs plaques et monuments commémoratifs : - sur la façade principale, au-dessus de l’entrée, se trouve une petite plaque surmontée d’un aigle : « Le Caillou : c’est dans cette maison que Napoléon passa la nuit du 17 au 18 juin 1815 » ; - une autre plaque, en bronze, se trouve à l’intérieur de l’édifice. Elle énumère les personnes présentes aux côtés de Napoléon avant la bataille : « Au Caillou, quartier général

La ferme du Caillou à Vieux-Genappe © Bruxelles, KIK-IRPA

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Sur les traces de la Wallonie française

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La statue de Napoléon dans le jardin de la ferme du Caillou © D. Timmermans

impérial, ont été présents les 17 et 18 juin 1815 : Napoléon Ier, empereur des Français, le prince Jérôme, le major général de l’armée Maréchal Soult, duc de Dalmatie. Le maréchal Ney, duc d’Elchingen, prince de la Moskowa. Le grand maréchal du palais, général Bertrand. Le chef d’étatmajor général, général Bailly de Monthion. Les généraux Corbineau, Dejean, Drouot, Flahaut, Gourgaud, La Bedoyère, Lebrun, Milhaud, Morand, Mouton, Pelet, Petit, Reille, Rogniat. Les colonels Bussy, de Forbin, Laurent, Zenowicz. Le secrétaire d’état Maret, duc de Bassano. Le grand prévôt de l’armée, général Radet. Les écuyers de Canisy, de Mesgrigny, Fouler de Relingue. Les secrétaires Fain, Fleury de Chaboulon. Les chirurgiens Larrey, Percy. 188

Les pages de Turenne, Gudin. Le vaguemestre 13 capitaine Coignet. Le valet de chambre Marchand. Le mameluk Ali. De garde, dans le verger, le 1er bataillon du 1er chasseurs de la Garde impériale, commandant During » ; le musée abrite la reconstitution de la chambre de l’empereur, dans laquelle se trouve une plaque commémorative reprenant l’inscription suivante : « C’est dans cette chambre que Napoléon Ier passa la nuit du 17 au 18 juin 1815 ». On peut notamment y apercevoir le lit de camp qu’il utilisa au cours de ses dernières campagnes guerrières ; dans le jardin se trouve une statue en bronze de l’empereur inaugurée en juin 2002. Elle comporte l’inscription suivante sur son socle : « Don des chevaliers d’Amalfi en mémoire des soldats italiens et polonais ayant combattu pour la liberté de leur Patrie et la Démocratie sous les aigles de l’empereur Napoléon Ier. Œuvre réalisée par le sculpteur de notre ordre Luigi di Quintana Bellini Trinchi, principe de Cagnano » ; dans le jardin également, une stèle commémore le bivouac du 17 juin 1815 : « Dans ce verger a bivouaqué pendant la nuit du 17 au 18 juin 1815 le 1er bataillon du 1er régiment des chasseurs à pied de la Garde impériale, commandant During. Ce bataillon s’étant illustré à Marengo, Ulm, Austerlitz, Iéna, Friedland, Essling, Wagram, Smolensk, La Moskowa, Hanau, Montmirail. 1815-1965 ». Cette stèle a été placée par la société belge d’études napoléoniennes ; dans le jardin, un ossuaire édifié en 1912 et reconstruit en 1954 rassemble des ossements trouvés au hasard sur le champ de bataille. On y trouve l’épitaphe « Pro Imperatore Saepe, Pro Patria Semper » 14.

Walhain/Walhain-Saint-Paul, la ferme de Marette Bel ensemble en quadrilatère, la ferme de Marette est composée de bâtiments datés des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. On accède à une cour par un porche à l’est ; l’important corps de logis, autrefois chaulé, retouché vers 1800, est situé à droite. À l’angle du mur d’enceinte se trouve une petite chapelle mariale en pierre bleue et brique de style néoclassique construite dans la première moitié du XIXe siècle. À droite, dans la cour, se trouve la demeure du notaire Hollert. La nuit du 17 au 18 juin 1815, Grouchy y passe la nuit et y fait une halte prolongée au jour de la bataille. Au matin du 18 juin 1815, il écrit à Napoléon pour lui préciser sa position et lui demander ses ordres. Le maréchal prend son repas de midi lorsqu’il reçoit la visite du général Gérard venu lui expliquer les événements. Alors que Gérard lui demande de prendre la route des champs de bataille, Grouchy refuse et persiste à attendre les ordres de l’empereur. Les conséquences de cette attitude sur le sort de la chute de Napoléon suscitent encore deux siècles plus tard le questionnement chez les historiens. La commune de Walhain a fait apposer une plaque sur la façade ; elle comporte l’inscription suivante : « 18 juin 1815. Ici stationnait le maréchal Grouchy alors que Waterloo s’embrasait ». 13 14

Militaire chargé du service postal dans une unité militaire. Pour l’empereur souvent, pour la patrie toujours.


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

La ferme de Marette à Walhain-Saint-Paul. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

Lasne/Plancenoit, la ferme de la Haie Sainte Vaste ensemble autrefois en quadrilatère, la ferme de la Haie Sainte a été érigée aux XVIIe et XVIIIe siècles et restaurée au siècle suivant. Les bâtiments de pierre blanche, pierre bleue et briques chaulées s’articulent autour d’une cour rectangulaire. Au bord de la chaussée de Charleroi se trouve un porchecolombier creusé d’un portail en plein cintre et surmonté d’une toiture d’ardoise. La ferme, relativement épargnée lors des combats de 1815, se présente aujourd’hui dans un aspect relativement conforme à celui de l’époque. L’endroit constitue un poste-clé dans le schéma défensif de Wellington. Conserver cette position devait permettre de fermer la route de Bruxelles à l’armée française. Les alliés défendent ainsi la ferme de la Haie Sainte contre Ney, Drouet d’Erlon et Napoléon lui-même. Le combat est lui aussi sanglant, le lieutenant belge De Moreau est criblé de balles, sans pour autant perdre la vie. Sur les mille hommes des 1er et 2e bataillons de la légion allemande, seuls 42 survivent à cet assaut. Du côté de l’Empire, l’armée française, bien que victorieuse, perd environ deux mille hommes. Deux plaques commémoratives ont par la suite été installées sur les murs de la ferme, en mémoire des combats du 18 juin 1815 : - en 1847, une plaque en fer disposée en losange est installée dans le haut pignon situé en bordure de la chaussée. Elle commémore l’action des officiers, sous-officiers et soldats du 2e bataillon de la légion allemande et remplace une plaque de marbre blanc installée à cet endroit dès 1822 par le prince Georges de Hanovre. La plaque porte l’inscription allemande suivante : « Die Officiere Des 2ten Leichte Bataillons Königlich Deutscher Legion, Ihren An der Vertheidigung Dieser Meyerey Am 18ten Juni 1815 Gefallenen Waffenbrüdern Major H.Bösewiel Capita W.Schaumann Fähndrich F. von Robertson Und 46 Unterofficiere Und Jäger vom 2ten Leichte Bataillon.

La ferme de la Haie Sainte à Plancenoit © Bruxelles, KIK-IRPA

Wiederhergestellt Durch Seine Königliche Hoheit Den Kronprinzen Georg von Hannover am 18 Juni 1847 Und Zugleich Gewidmet Den Ebendaselbst bei Dieser Gelengenheit Gefallenen : Capitain H. von Marschalck vom 1ten Leichte Bataillon Capitain C. von Wurme vom 5ten Linien Bataillon In Anerkennung Des Von Ihnen Bewiesenen Hannöverschen Heldenmuths » ; 15 15

Les Officiers du 2e bataillon léger de la légion royale allemande À leurs frères d’armes tombés à la défense de cette ferme le 18 juin 1815. Major H. Bösewiel, capitaine W. Schaumann, porteur de drapeau F. von Rovertson et 46 sous-officiers et chasseurs du 2e bataillon léger. Ré-établi par son altesse royale le prince royal Georges de Hanovre le 18 juin 1847 et aussitôt dédié par celui-ci même à ceux tombés à cette occasion. Capitaine H. von Marschalk du 1er bataillon léger, capitaine C. von Wurme du 5e bataillon de ligne. En reconnaissance du courage hanovrien héroïque qu’ils ont démontré.

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Sur les traces de la Wallonie française

- une seconde plaque orne depuis 1998 le mur d’une petite annexe située au nord du corps de logis. Elle est dédiée au major britannique Baring et au colonel allemand Von Ompteda par la ville anglaise de Bexhill-on-Sea qui fut une ville de garnison de la King’s German Legion de 1804 à 1814. Elle porte l’inscription anglaise suivante : « To Ma[jor] Baring and the 2nd Light B[a]t[talio[n K[ing] G[erman] L[egion]’s Heroic Defence of La Haie Sainte 18 June 1815. Also to Col[onel] von Ompteda who fell Leading a Brave Counter-Attack After the Fall of The Farm. Dedicated by Bexhill-on-Sea England A King’s German Legion Garrison 1804-1814 » 16. Une traduction allemande figure dans la partie inférieure de la plaque qui est décorée de l’écusson de la garnison. Sur fond bleu, on y trouve une couronne entourée d’un sabre et d’un fusil et de la devise de la King German Legion « Take pride in our heritage » 17 ; - en 1965, la société belge d’études napoléoniennes a placé près du porche une plaque à la mémoire des combattants français : « À la mémoire des combattants français qui se sacrifièrent héroïquement devant les murs de la Haie Sainte le 18 juin 1815 » ; - enfin, une quatrième plaque se situe à droite du portail de la ferme. Elle rend hommage à la prise de la ferme par le maréchal Ney et au 13e léger : « Le 18 Juin 1815 vers 18h30, la ferme de la Haye Sainte fut enlevée par le maréchal Ney grâce aux assauts héroïques des sapeurs du 1er régiment du génie du colonel Lamare, 2e compagnie du 2e bataillon et du 13e régiment d’infanterie légère de la division Donzelot ». Décorée du traditionnel aigle impérial, elle a 16

17

Au major Baring et au second bataillon de la King German Legion pour leur défense héroïque de la Haie Sainte le 18 juin 1815 ; ainsi qu’au colonel von Ompteda, tombé en menant avec ses braves une attaque après la chute de la ferme. Dédié à la garnison de la King German Legion, installée à Bexhill-on-Sea de 1804 à 1814. Soyez fiers de notre héritage.

La ferme de Mont-Saint-Jean à Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA

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été apposée à l’initiative de la fondation Napoléon et de l’association franco-européenne de Waterloo ; Waterloo, la ferme de la Papelotte Vaste quadrilatère reconstruit vers le milieu du XIXe siècle après avoir été incendiée en 1815, la ferme de la Papelotte comporte un porche d’entrée surmonté d’un belvédère octogonal, un corps d’habitation, ainsi que des écuries et des étables. Au coin du chemin d’accès se trouve une chapelle néoclassique millésimée 1867. Située à deux kilomètres de la butte du lion, cette ferme est en 1815 un point d’appui essentiel pour les troupes du duc de Wellington. Elle est occupée par le 3e bataillon du régiment de Nassau et prise d’assaut par les hommes de Drouet d’Erlon qui ne parviennent pas à la prendre. Les hommes du général comte Durutte la reprennent dans l’après-midi avant de la perdre une dernière fois au profit des troupes de Nassau dans la soirée. C’est également près de cette ferme que le corps d’armée prussien du général Von Zieten débouche sur le champ de bataille, décidant de la défaite de Napoléon. Waterloo, la ferme de Mont-Saint-Jean Située à la limite entre Braine-l’Alleud et Waterloo, la ferme de Mont-Saint-Jean est un vaste quadrilatère en brique, pierre bleue et blanche, daté de 1778 sur le porche-colombier. Celuici est surmonté d’une croix de Malte, rappelant l’appartenance de l’édifice à l’ordre sous l’Ancien Régime. L’ensemble, clôturé, comprend un long corps de logis, une ancienne chapelle et des dépendances. Wellington se serait installé dans la ferme au matin du 18 juin. Au cours de la journée, elle est transformée en hôpital par les Britanniques. Beaucoup de blessés y demeurent dans les jours qui suivent la bataille de Waterloo. Les morts sont enterrés dans les champs aux alentours. Le 5 juin 1981, une plaque commémorative a été inaugurée à l’initiative du Waterloo committee. Placée à droite du portail par le Royal


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

Army Medical Corps, elle porte l’inscription suivante : « In memory of deputy inspector Gunning, principal medical officer of the 1st corps, the surgeons and other members of the field hospital which was established in this farm to care for the wounded of this battlefield 18th June 1815. This tablet was erected in 1981 by the Royal Army Medical Corps » 18. Genappe/Vieux-Genappe, la ferme de Hulencourt Citée pour la première fois en 1234 comme dépendance de l’abbaye d’Afflighem, la ferme de Hulencourt, dite aussi de Hélincourt, est une vaste ferme clôturée des XVIe, XVIIe et XIXe siècles. Le porche, comprenant encore un blason abbatial, est millésimé 1680. L’ensemble, précédé d’une drève, comporte un logis, une chapelle, des écuries et une grange en long. Au soir de la bataille de Waterloo, la 6e brigade de cavalerie légère britannique y passe la nuit. Les hommes bivouaquent dans le jardin ; le général-major Vivian s’installe dans la ferme. Depuis 1989, la ferme a intégré un golf et n’est pas visitable. Montigny-le-Tilleul, la maison 10, rue de Marbaix Le prince Jérôme Bonaparte et son état-major ont passé la nuit du 18 au 19 juin 1815 dans cette demeure, après la bataille de Waterloo. Né en 1784 à Ajaccio, Jérôme est le plus jeune frère de Napoléon. Entré dans la marine en 1800, il participe à quelques campagnes dans les premières années de l’Empire. En 1807, il épouse Catherine de Wurtemberg, fille du roi Frédéric Ier et devient quelques jours plus tard roi de Westphalie. Reconnu par les grandes puissances, il prend part à la campagne de Russie en 1812 et doit quitter son royaume en 1813 suite aux désastres militaires de Russie et de Saxe. Il retourne pourtant à la cour de Wurtemberg après le premier exil de son frère sur l’île d’Elbe. En 1815, il suit son frère en Belgique et participe aux batailles des Quatre-Bras et de Waterloo. Après la défaite, il se replie sur Paris en compagnie du maréchal Grouchy mais quitte la France après la seconde abdication de Napoléon. Il rejoint à nouveau son épouse, vit entre Vienne et Trieste et ne rentre en France qu’en 1848 après l’arrivée au pouvoir de son neveu, le prince Louis-Napoléon Bonaparte. Sous la Seconde République, il est gouverneur général des Invalides, maréchal de France en 1850 et président du Sénat en 1851. Sous le Second Empire, il est titré prince impérial et réside au palais royal, jusqu’à sa mort en 1860. Il repose aux Invalides, non loin de ses frères ainés, Napoléon et Joseph.

coiffée d’une toiture en cloche millésimée 1762. Elle est percée d’un portail de style Louis XV. À l’intérieur, les trois nefs et le transept de style gothique datent de la seconde moitié du XVIe siècle. Dès le 19 juin 1815, l’église devient un hôpital de fortune. Des blessés de toutes nationalités y sont soignés par les médecins, des religieuses et des infirmières de Braine-l’Alleud et des environs. Un monument commémorant cet épisode des combats de 1815 a été inauguré dans l’église en 1965. Il a été réalisé par le sculpteur genappien Albert Desenfans à la demande du Syndicat d’initiative à l’occasion du 150e anniversaire de la bataille de Waterloo. Il s’agit d’un bas-relief représentant Simon de Cyrène aidant Jésus à porter sa croix devant des figures de femmes en lamentation. Il s’agit ici d’évoquer les Brainois aidant les blessés à supporter leurs souffrances au lendemain de la bataille. Enfin, le monument comporte l’inscription suivante : « Cette église servit d’hôpital au lendemain de la bataille. Charitablement, les Brainois vinrent en aide aux blessés. Juin 1815 ». Braine-l’Alleud, la stèle Demulder et le monument Mercer Deux monuments commémoratifs se trouvent non loin l’un de l’autre, sur le chemin des vertes bornes à Brainel’Alleud. Le premier rend hommage au lieutenant de cavalerie Augustin Demulder, affecté au 5e régiment de cuirassiers. Né à Nivelles en 1775, il est tué au cours des charges menées contre les carrés alliés par le maréchal Ney. Inauguré le

Braine-l’Alleud, l’église Saint-Étienne Située au cœur de la localité, l’imposante église Saint-Étienne a été relativement agrandie en style néogothique entre 1865 et 1888. Elle est caractérisée par sa grosse tour carrée classique, 18

En mémoire de l’inspecteur adjoint Gunning, officier médical principal du 1er corps, aux chirurgiens et autres membres de l’hôpital de campagne qui fut établi dans cette ferme pour prendre soin des blessés de ce champ de bataille le 18 juin 1815. Cette plaque a été érigée en 1981 par le Royal Army Medical Corps.

La stèle du lieutenant Demulder à Brainel’Alleud © D. Timmermans

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Sur les traces de la Wallonie française

La stèle du capitaine Mercer à Braine-l’Alleud. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

20 juin 1986, le monument est constitué d’une stèle de pierre bleue portant l’inscription suivante : « En mémoire du lieutenant Augustin Demulder du 5e cuirassiers, né à Nivelles en Brabant en 1775, chevalier de la Légion d’honneur, blessé à Eylau 1807, à Essling 1809, à Hanau 1813, tué à Waterloo, et en mémoire de tous les cavaliers qui chargèrent avec lui le 18 juin 1815. Cette pierre a été placée par le Waterloo comitee en association avec la société belge d’études napoléoniennes, 1986 ». Un second monument rappelle l’endroit où se trouvait la batterie du capitaine Alexandre Cavalie Mercer pendant la bataille de Waterloo. Membre du Royal horse artillery company, il commandait la batterie Dickson en l’absence de son supérieur. La stèle porte l’inscription suivante : « This stone marks the last position of G. Troop, Royal Horse Artillery, commanded by Captain A.C. Mercer. During the battle of Waterloo, 18 june 1815, from here the troop took a conspicuous part in defeating the attacks of the French cavalry » 19. 19

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« Cette pierre marque la dernière position des troupes de la Royal Horse Artillery, commandée par le capitaine Mercer. Pendant la bataille de Waterloo, 18 juin 1815, la troupe prit une part remarquable en défaisant les attaques de la cavalerie française ».

Genappe, l’auberge du « Roy d’Espagne » Maison mitoyenne à double corps de deux niveaux, l’auberge comporte une remarquable porte en pierre bleue de style Louis XV datée de 1760. Il s’agit d’une habitation traditionnelle de la région qui, au cours de la campagne de 1815, a vu

La plaque commémorative sur l’auberge « du Roy d’Espagne » à Genappe © D. Timmermans


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

passer divers protagonistes des combats. Le 16 juin 1815, le duc de Wellington loge à cet endroit en compagnie de son étatmajor. Lors de la bataille des Quatre-Bras, le prince Jérôme Bonaparte et le général Reille y dorment à leur tour. Au soir de la bataille du 18 juin 1815, elle abrite le maréchal Blücher. C’est également à cet endroit que décède le 20 juin Philibert Duhesme, mortellement blessé en commandant la jeune garde française. Une plaque fut placée sur la façade en 1961 pour rappeler cet événement : « Le Général français Comte Duhesme, commandant la jeune garde impériale, blessé à Plancenoit, mourut ici le 20 juin 1815 ». Il est enterré à Ways 20. Signalons encore qu’en 1792, l’auberge avait été l’un des lieux d’étapes de la fuite du comte de Provence, futur Louis XVIII. Genappe/Ways, le mausolée du général-comte Duhesme À côté de l’église Saint-Martin de Ways se trouve la tombe du général Duhesme, mort à l’auberge du Roy d’Espagne. Sa famille lui fit élever ce monument de pierre bleue en 1820. Il porte l’inscription suivante : « Ici repose Guillaume Philibert 20

Voir ci-après.

Le mausolée du général-comte Duhesme à Ways © D. Timmermans

Comte Duhesme, Lieutenant Général des Armées françaises, Grand Officier de la Légion d’honneur, Chevalier de l’Ordre de S[ain]t Louis et de la Couronne de Fer. Né à Bourgneuf, dép[artement] de Saône et Loire le 7 juillet 1766. Atteint d’un coup mortel au champ d’honneur le 18 juin 1815. Décédé à Genappe le 20 du même mois ». À l’arrière se trouve une seconde inscription : « Sa veuve et ses enfants ont mis sous la protection de ce saint lieu et des braves de tous les pays la dépouille mortelle du guerrier intrépide qui fut aussi le modèle des époux et des pères ». Wavre, l’hôtel de ville Ancien couvent des Carmes installés à cet endroit à partir de 1662, l’hôtel de ville de Wavre a pris place dans l’église du couvent. Érigée en brique et grès ferrugineux entre 1695 et 1720, elle possède un haut chevet rectangulaire, un haut vaisseau de sept travées ainsi qu’une étroite et haute façade baroque à deux niveaux sous un sobre fronton à contre-courbes. L’entrée se fait par un portail à bossages entre deux niches. Le couvent est supprimé à la Révolution et les biens des Carmes sont aliénés en plusieurs lots. L’église est désaffectée vers 1850. Elle souffre terriblement de bombardements pendant la Seconde

L’actuel hôtel de ville de Wavre, transformé en hôpital en juin 1815 © IPW

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Sur les traces de la Wallonie française

Guerre mondiale avant d’être entièrement restaurée et réaménagée entre 1958 et 1961. Lors des événements de juin 1815, le couvent sert d’ambulance pour soigner les blessés. L’ancien hôtel de l’Escailles, non loin de là, est lui aussi transformé en hôpital de campagne. On y trouve notamment le célèbre chirurgien Seutin, commémoré sur une place publique à Nivelles 21. Nivelles, le couvent des Récollets et le cimetière Saint-Pierre Fondé vers 1232 par les Frères Mineurs de Cologne et repris par les Récollets en 1598, le couvent a été reconstruit à partir de 1524 en commençant par l’église dédiée aux saints Jean et Nicolas. Les bâtiments conventuels datent de 1586 et ont été agrandis et embellis vers 1740-1750. L’ensemble est déclaré bien national sous le régime français et vendu en 1797. Il sert d’hôpital militaire en 1815. Il accueille notamment des soldats blessés à Waterloo. Une pierre commémorative a été encastrée dans la façade. Elle porte l’inscription « 1815. Hôpital pour 21

Voir l’article sur la statue de Louis Seutin à Nivelles dans le chapitre consacré aux traces diverses de la période française en Wallonie.

Le couvent des Récollets à Nivelles. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine© IPW

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les militaires français » et est décorée de trois bandes bleublanc-rouge, couleurs françaises mais aussi nivelloises. Cette plaque a été apposée en même temps que deux autres en 1969 pour le bicentenaire de la naissance de Napoléon ; elles rappellent quelques souvenirs du régime français à Nivelles. La seconde se trouve sur la façade du musée communal 22 et la troisième sur le mur du cimetière Saint-Pierre. On y trouve les mêmes couleurs et un énoncé des soldats décédés dans l’hôpital des Récollets : « 1815. † Français – 104 / † Prussiens – 13 / † Anglais – 8 / † Hollando-Belges – 4 ». Il n’y a toutefois qu’une trace de sépultures de soldats tués à la bataille de Waterloo dans ce cimetière. Le couvent des Récollets devient ensuite une école en 1818. Les bâtiments ont été fortement endommagés par un bombardement en 1940 et restaurés dans les années 1960. Lasne/Plancenoit, le monument Gordon Non loin de la ferme de la Haie Sainte, sur la chaussée de Charleroi, se trouve un monument composé d’une colonne brisée cannelée sommée d’une couronne de lauriers 22

Voir plus bas.


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

Le monument Gordon à Plancenoit. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

et reposant sur une base parallélépipédique rendant hommage au lieutenant-colonel écossais Alexander Gordon. Âgé de 29 ans en 1815, il fait partie du 3e régiment des Footguards et occupe la position prestigieuse d’aide de camp du duc de Wellington. Gravement blessé à la jambe pendant la bataille de Waterloo, il est emporté au quartier général de Wellington où il doit être amputé. Il ne survit toutefois pas à l’opération. Sa famille lui fait élever ce monument dès 1817 ; il comporte une longue inscription en anglais sur le flanc nord : « Sacred to the memory of Lieutenant-Col[onel] the Hon[orable] Sir Alexander Gordon Knight Commander of the most Honourable Order of the Bath Aide-de-Camp to field Marshall the Duke of Wellington and also brother to George Earl of Aberdeen, who in the twenty-ninth year of his age terminated a short but glorious career on the 18th of June 1815 whist executing the orders of his great commander in the battle of Waterloo. Distinguished for gallantry and good conduct in the field, he was honoured with repeated marks of approbation by the illustrious hero with whom he shared the danger of every battle in Spain, Portugal and France and received the most flattering proof of his confidence. On many

Bas-relief sur le monument en hommage à Alexander Gordon. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

trying occasions, his zeal and activity in the service obtained the reward of ten medals and the honourable distinctions of the Order of the Bath. He was justly lamented by the Duke of Wellington in his public despatch as an officer of high promise and a serious lose to the country nor less worthy of record for his virtues in private life. His unaffected respect for religion, his high sense of honour, his scrupulous integrity and the most amiable qualities which secured the attachement of his friends and the love of his own family in testimony of feelings which no language can express a disconsolable sister and five surviving brothers have erected this simple memorial to the object of their tenderest affection ». Une traduction française se trouve sur le flanc sud : « À la mémoire de l’honorable Sir Alexander Gordon, lieutenant-colonel, chevalier, commandeur du très honorable Ordre du Bain, aide de camp du Feld-Maréchal duc de Wellington. Il termina à 29 ans sa courte mais glorieuse carrière, en exécutant les ordres de son illustre général à la bataille de Waterloo. Sa bravoure et ses talents distingués lui méritèrent l’approbation du héros dont il partagea les dangers en Espagne, au Portugal et en France et qui lui donna les preuves les plus flatteuses de la confiance 195


Sur les traces de la Wallonie française

dans d’importantes occasions. Son pays reconnaissant lui a décerné, en récompense de son zèle, sept médailles et l’honorable distinction de l’Ordre du Bain. Il n’était pas moins recommandable par ses vertus privées, son respect sincère pour la religion, l’élévation de ses principes d’honneur, sa probité sévère et les aimables qualités qui lui avaient acquis l’attachement de ses amis et l’amour de sa famille. En témoignage de ces sentiments qu’aucun langage ne saurait exprimer, une sœur inconsolable, et cinq frères qui lui survivent ont élevé ce modeste monument à l’objet de leurs plus chères affections, dont les rares qualités ont illustré leur nom et leur famille ». Le monument, de style néoclassique, est imposant. La colonne brisée, symbolisant la courte carrière du défunt, mesure 5 m de hauteur. Le monument est également riche quant à son iconographie. Sur la face est du piédestal se trouve un bas-relief représentant des armes surmontées de l’insigne des Scot guards (chardon et devise écossaise). La face ouest est décorée du blason du père du défunt, Lord Aberdeen (couronne, feuilles de chêne, deux bras bandant et la devise Fortuna sequatur). Enfin, sur la base du socle, se trouvent des inscriptions additionnelles partiellement illisibles : « Repaired 1863 by his brother. Repaired in 1870 and 1886 by his great nephew (...) Admiral the Honorary J. Gordon (...) by the Earl of Aberdeen Repaired in 1887 by his family. Repaired by subscription of the Gordon family and clan » 23. Comme de nombreux autres officiers, la dépouille d’Alexander Gordon a été transferée en 1890 dans le mémorial des Britanniques morts à Waterloo au cimetière d’Evere. Lasne/Plancenoit, le monument aux Prussiens Au nord de la localité de Plancenoit se trouve un monument à l’allure résolument néogothique. Composé d’une flèche de fer peint sur un soubassement de pierre bleue, il rend hommage aux soldats prussiens tués au cours de la bataille de Waterloo. Érigé en 1818 pour célébrer les performances des troupes de Blücher, il est situé à un endroit où une batterie française aurait fait subir de lourdes pertes aux Prussiens. L’ensemble est sommé d’une croix représentant la décoration de la Croix de Fer, créée en 1813 par le roi de Prusse FrédéricGuillaume III. La base de la flèche est décoré de quatre gâbles et de pinacles surmontés de fleurons dorés et porte une inscription en lettres gothiques sur sa face sud : « Die gefallenen Helden ehrt dank- bar König und Vaterland. Sie ruhn in Frieden Belle-Alliance den 18. Juni 1815 » 24. L’utilisation du terme « Belle-Alliance » est toute caractéristique ; c’est en effet sous cette dénomination que les Prussiens connaissent la bataille de Waterloo. Le terme est également parfois utilisé par les Britanniques 25. 23

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Restauré en 1963 par son frère. Restauré en 1870 et 1886 par son petit neveu (…) Amiral, l’honorable J. Gordon (…) par le comte d’Aberdeen. Restauré en 1887 par sa famille. Restauré par souscription de la famille et du clan Gordon. Aux héros tombés, le roi et la patrie reconnaissants. Ils reposent en paix. Belle-Alliance. 18 juin 1815. Voir notamment la plaque du lieutenant-colonel Fitzgerald au musée

Le monument aux Prussiens à Plancenoit. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

La croix est abattue par des soldats Français venus prêter main forte à l’armée belge lors du siège d’Anvers en 1832. Le maréchal Gérard, qui avait combattu les Prussiens à Wavre en 1815, fait cesser ce vandalisme et rétablir la croix au sommet du monument. Le monument a ensuite été restauré à de nombreuses reprises et pour la dernière fois en 1997. Lasne/Plancenoit, le monument aux Hanovriens Juste en face du monument Gordon se trouve le monument dédié aux Hanovriens. Érigé en 1818, il prend la forme d’une pyramide tronquée portant des inscriptions sur plusieurs de ses faces. Cette stèle commémorative a été érigée en pierre bleue, mesure près de 5 m de hauteur et rend hommage à une légion de l’armée britannique, la King’s German Legion, constituée de bataillons de soldats Hanovriens qui, après l’invasion du Hanovre par l’armée française, avaient émigré au Royaume-Uni. Le Hanovre, la Grande-Bretagne et l’Irlande avaient en effet le même souverain depuis que l’électeur de Hanovre Georg-Ludwig était devenu roi d’Angleterre sous le nom de George Ier en 1714. Sur la face ouest se trouve l’inscription suivante : « Dem Andenken ihrer Waffen Gefahrten welche in der ewig denkwürdingen Schlacht Von 18 Juni 1815 Wellington dans le présent chapitre.


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

Le lion de Waterloo surplombe la morne plaine. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Le monument aux Hanovriens à Plancenoit. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Den Helden tod hier starben » 26. À l’est, une inscription en anglais : « To the memory of their companions in arms who gloriously fell on the memorable 18th day of June 1815. The monument is erected by the officers of the infantry of the King’s German Legion » 27. Sur les faces nord et sud sont énumérés les noms d’officiers de plusieurs régiments ayant eux aussi perdu la vie à cet endroit au cours de la bataille de Waterloo. Braine-l’Alleud, les sites touristiques liés à la bataille de Waterloo La butte du lion La butte du lion est certainement le monument commémoratif de la bataille le plus connu mais également le plus visité. 26 27

En souvenir de vos compagnons d’armes, lesquels dans la bataille à jamais mémorable du 18 juin 1815 moururent ici en héros. En mémoire des compagnons d’armes qui sont glorieusement tombés en ce mémorable 18e jour de juin 1815. Ce monument est érigé par les officiers d’infanterie de la King German Legion.

Ce que les touristes ignorent la plupart du temps, c’est que le monument n’a pas été construit pour commémorer l’action des Français ou de Napoléon. La butte et son lion ont été érigés par les Hollandais entre 1824 et 1826, au départ pour rappeler la blessure reçue à cet endroit par le prince d’Orange ; le caractère imposant de l’édifice tend à souligner l’importance du combat mené le 18 juin 1815. Le gouvernement hollandais dote également le lieu d’une symbolique toute politique : le lion, menaçant, regarde vers la France. Le lion, haut de 4,45 m et large de 4,50 m, pèse 28 tonnes. Il symbolise l’Angleterre et les Pays-Bas et pose une de ses pattes avant sur un globe. Réalisé en fer et en fonte dans les ateliers Cockerill à Seraing, il est l’œuvre du sculpteur malinois Jean-Louis Van Geel, élève de David. Il est posé sur un piédestal de pierre bleue, lui-même posé sur trois degrés. Sur les faces est et ouest, une simple date constitue la seule inscription du monument : « XVIII JUNI MDCCCXV ». Le monument est supporté par une colonne de briques qui descend jusqu’en dessous de la base de la butte. Celle-ci forme un cône de 40,5 m de hauteur et de 520 m de circonférence. 300.000 mètres cubes de terre du champ de bataille ont dû être enlevés pour former cette éminence visible de loin. Il faut gravir 226 marches de pierre bleue pour parvenir sur la plate-forme située au pied du lion. L’ensemble a été conçu par l’architecte des palais royaux Charles Van der Straeten. Le 11 juin 1988, une table d’orientation a été placée au sommet du monument à l’initiative des asbl Waterloo committee et Waterloo-Relais de l’Histoire. Elle a été réalisée par le sculpteur Yves Bosquet. Devenu entre-temps une attraction touristique incontournable, la butte du lion offre un panorama exceptionnel sur la région mais aussi sur ce qui fut le champ de bataille sur lequel s’affrontèrent la cavalerie française et l’infanterie anglaise. 197


Sur les traces de la Wallonie française

Le bâtiment du panorama de la bataille de Waterloo avec, à l’arrière-plan, la butte du lion. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Le panorama de la bataille de Waterloo Au pied de la butte du lion se trouve une rotonde édifiée en 1912 sur les plans de l’architecte Frantz van Ophem. L’édifice a été érigé grâce à un appel de fonds lancé en février 1911 avec l’appui du consul de France. Parmi les investisseurs, on retrouve bon nombre de descendants d’officiers belges et hollandais ayant participé à la bataille. Cette rotonde abrite le « panorama de la bataille de Waterloo », vaste toile circulaire de 12 m de hauteur sur 110 m de long, représentant les principaux faits de la bataille. Elle a été réalisée par le peintre belge Louis Dumoulin, assisté par des peintres ayant chacun leur spécialité : les Français Raymond Desvarreux, Pierre-Victor Robiquet (peintre animalier), Louis-Ferdinand Malespina et Meir (portraitiste) et du Belge Vinck (avant-plan). Le concept du panorama date du XIXe siècle et présente généralement des paysages ou des scènes religieuses. Ici, l’œuvre détaille un moment-clé de la bataille : on y retrouve les lanciers polonais, la charge du maréchal Ney, Napoléon et son état-major, et la résistance anglaise autour de Wellington. Le bâtiment et la peinture ont été classés en 1998 et rénovés en 2008. L’ensemble a été reconnu patrimoine exceptionnel de Wallonie en raison de son caractère unique ; il s’agit en effet d’un des rares exemplaires du genre conservés en Europe possédant encore les trois éléments caractéristiques des panoramas du XIXe siècle : le toile, le bâtiment et les faux-plans. Le palais de l’empire, musée de cire Juste en face du panorama se trouve l’hôtel du musée, édifié en 1818 par le sergent-major Cotton. Cet officier du 7e hussards britanniques ayant participé à la bataille ne rentra pas en Angleterre après les événements et édifia cet immeuble pour accueillir les premiers visiteurs du champ de bataille. Il s’improvisa premier guide touristique de Waterloo. Ce musée présente tous les grands acteurs de la bataille, représentés en cire par les artistes du musée Grévin en 1949. 198

Détail de la grande toile du panorama de la bataille de Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

Détail de la grande toile du panorama de la bataille de Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA

Waterloo, l’église Saint-Joseph Ancienne chapelle forestière du roi d’Espagne Charles II, l’église Saint-Joseph a été érigée en style baroque entre 1687 et 1690. Elle a été modifiée par Émile Coulon en style néoclassique en 1855. Le chœur et la tour, de même style, ont été achevés en 1857 par Joseph Dumont. Le fronton du péristyle conserve une longue dédicace latine qui rappelle les origines de l’édifice. L’église est caractérisée par son imposant dôme surmonté d’un grand lanternon lumineux et est aujourd’hui un haut lieu de mémoire de la bataille du 18 juin 1815. Outre un buste du duc de Wellington et deux bas-reliefs, on y trouve vingt-sept plaques commémoratives rendant hommage aux victimes alliées : - un imposant monument situé à gauche de l’entrée de la chapelle rend hommage aux soldats britanniques. Taillé dans le marbre blanc et surmonté d’un fronton triangulaire, il comporte un bas-relief réalisé par le sculpteur Guillaume Geefs et une plaque comportant l’inscription suivante : « In Honoured Memory of All British Officers,

Non Commissioned Officers and Soldiers Who fell in battle Upon the 16th, 17th ans 18th of June 1815. This tablet was erected by a few Brothers in Arms and Countrymen A.D. MDCCCLVIII. Glory encircles with the same noble diadem the humble as well as Exalted » 28. Juste devant ce monument se trouve un buste en marbre blanc de Wellington réalisé en 1855 par le sculpteur britannique George Gammon Adams. Il repose sur un socle de marbres noir et rouge ; - de l’autre côté de la chapelle, à droite de l’entrée, se trouve le monument aux soldats de l’armée des Pays-Bas. Érigé sous les auspices de Frédéric de Nassau, frère du roi des Pays-Bas Guillaume III et ayant pris part à la bataille de Waterloo, il est l’œuvre du sculpteur Léopold Wiener. Réalisé en bronze, on y retrouve une représentation de la Victoire. Une plaque en bronze comportant une inscription 28

À la mémoire de tous les officiers, sous-officiers et soldats qui sont tombés au cours des batailles des 16, 17 et 18 juin 1815. Cette plaque a été érigée par quelques frères d’armes et compatriotes en 1858. La gloire couronne du même noble diadème le humble que le haut placé.

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Sur les traces de la Wallonie française

Le monument aux soldats britanniques dans la chapelle royale de Waterloo © D. Timmermans

latine se trouve sur le socle du monument : « Auspice illustrissimo principe Frederico Nassovio in perpetuam memoriam insignis victoriae anno MDCCCXV DIE JUNI XVIII relatae Waterl. Sodal. Aere et cura hoc monumentum est erectum » 29. Vingt-sept plaques commémoratives se trouvaient autrefois à côté de ces deux monuments dans la chapelle royale. Elles ont depuis été transférées dans l’église elle-même où elles se trouvent en compagnie de trois autres. On y retrouve des plaques en mémoire de victimes de la bataille de Waterloo mais également des batailles de Ligny et des Quatre-Bras. Dans le bas-côté gauche de la nef, on trouve quinze de ces plaques : - plaque aux officiers, sous-officiers et soldats du 2nd Battalion / 30th Foot Guards ; 29

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Sous les auspices de l’illustrissime Frédéric de Nassau, ce monument a été érigé en mémoire perpétuelle de la remarquable victoire du 18 juin 1815 par le financement et les soins de ses compagnons d’armes de Waterloo.

Le monument aux soldats de l’armée des Pays-Bas dans la chapelle royale de Waterloo © D. Timmermans

- plaque au cornette Alexander Hay, 16th Light Dragoons. La plaque a été offerte par ses frères et sœurs ; - plaque aux officiers de l’armée des Pays-Bas morts à Waterloo. On y trouve une liste de noms d’officiers belges et hollandais ; - plaque aux officiers de l’armée des Pays-Bas morts aux Quatre-Bras ; - plaque au premier lieutenant Claude François Sd van Haren ; - plaque aux officiers du 6e hussards hollandais ; - plaque aux officiers du 3e bataillon du régiment des Royal Scots tombés aux Quatre-Bras et à Waterloo ; - plaque aux officiers du 1er régiment de Foot Guards tombés aux Quatre-Bras et à Waterloo. La plaque a été installée par les compagnons d’armes du régiment. On y trouve notamment le nom du major Stables 30 ; - plaque au colonel Sir Henry Walton Ellis du 23rd Royal Welsh Fusiliers. La plaque a été installée par le lieutenantcolonel Ross et les officiers du régiment ; 30

Voir la notice consacrée à la tombe du major Edward Stables à Waterloo dans le présent chapitre.


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

La plaque en hommage au lieutenant-colonel Canning dans l’église Saint-Joseph de Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA

Treize autres plaques sont situées dans le bas-côté droit de la nef :

La plaque en hommage au colonel Walton Ellis dans l’église Saint-Joseph de Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA

- plaque aux officiers, sous-officiers et soldats du 79th Regiment of Highlanders tombés aux Quatre-Bras et à Waterloo ; - plaque aux officiers, sous-officiers et soldats de la Grande Armée tombés en juin 1815. Cette dalle de marbre blanc est décorée de l’aigle impériale et a été inaugurée le 15 juin 1990 par l’association franco-européenne de Waterloo. Il s’agit du seul monument en hommage aux morts français installé dans l’église ; - plaque au major Robert Cairnes, Royal Horse Artillery ; - plaque au colonel William Fuller du 1st Dragoon Guards, érigé par son frère le général Fuller (Coldstream Guards) ; - plaque au capitaine George Battersby du 1st Regiment of Dragoon Guards ; - plaque aux officiers du 7th (Queen’s own) Hussars tombés le 17 juin 1815.

- plaque aux officiers du 2nd Battalion / 3rd Foot Guards ; - plaque au lieutenant-colonel Charles Fox Canning, 3rd Foot Guards. Il s’agit d’une des plus belles plaques de l’église, surmontée d’un petit fronton sculpté en bas-relief. Canning fut aide de camp de Wellington entre 1809 et 1814 au cours des campagnes dans la péninsule ibérique ; - plaque au lieutenant-colonel Richard Fitzgerald du 2nd Life Guards. La tablette a été érigée par sa sœur 31 ; - plaque au lieutenant George Orlando Gunning, 10th Hussars ; - plaque aux officiers, sous-officiers et soldats du 28th Regiment of Foot Guards tombés aux Quatre-Bras et à Waterloo ; - plaque aux officiers du 33rd Regiment of Foot Guards tombés aux Quatre-Bras et à Waterloo ; - plaque au Ritmeester baron van Pallandt, 4e Regiment Lichte Dragonders ; - plaque aux officiers, sous-officiers et soldats de la Royal British Artilery et de la King’s Dragoon Artillery ; - plaque au major Frederick Howard du 10th Hussars ; - plaque aux officiers et soldats du 12th Light Dragoons tombés à Waterloo ; - plaque au major John Dorset Bringhurst du 1st Regiment King’s Dragoons Guards ; - plaque au lieutenant William Livingstone Robe de la Royal Horse Artillery ; - plaque aux officiers du 15th Hussars. 31

Sur Fitzgerald, voir la notice consacrée au musée Wellington à Waterloo dans le présent chapitre.

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Sur les traces de la Wallonie française

Les plaques en hommage au major Dorset et au lieutenant Livingstone Robe dans l’église Saint-Joseph de Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA

La plaque en hommage au général-major Van Merlen dans l’église Saint-Joseph de Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA

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La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

Enfin, deux plaques se trouvent dans le narthex gauche : - plaque au général van Merlen, commandant de la 2e brigade de cavalerie légère de l’armée des Pays-Bas ; - plaque au major William Norman Ramsay de la Royal Horse Artillery. Lasne/Plancenoit, le monument à l’Aigle blessé et la stèle des soldats polonais Réalisé par le sculpteur Jean-Léon Gérôme et érigé à l’initiative de trois particuliers le 28 juin 1904 sur un terrain au croisement du chemin de Plancenoit, endroit qui selon la légende aurait été la portion de terrain occupée par le dernier carré de la Garde impériale et où le général Cambronne aurait prononcé ses mots célèbres, l’Aigle blessé commémore les soldats français morts au champ d’honneur et donc pas la défaite de Waterloo. L’oiseau de proie, dans un triste état, déploie ses ailes percées de balles et est perché sur un rocher qui évoque celui de Sainte-Hélène. Il retient pourtant le drapeau qui tombe là où on peut lire le nom de grandes victoires napoléoniennes, au contraire de la déroute de Waterloo ; sur son socle, la dédicace « Aux derniers combattants de la Grande Armée » est inscrite comme un dernier témoignage de souvenir. À partir du 16 juin 1928, un pèlerinage à l’Aigle blessé est organisé à l’initiative de l’Avant-Garde wallonne. Organisé tous les ans et rassemblant une foule grandissante, ce pèlerinage constitue une récupération du symbole par le Mouvement wallon. De plus en plus anecdotique après la Seconde Guerre mondiale, le pèlerinage reprend à la fin des années 1980 sans toutefois redevenir une manifestation de masse. Au pied du monument, une stèle en hommage aux soldats polonais a été inaugurée le 18 juin 1990 par l’association pour la conservation des monuments napoléoniens, en collaboration avec l’armée polonaise. Elle rappelle le sacrifice de l’escadron des chevau-légers polonais à Waterloo. La stèle est décorée d’un aigle, coulé en Pologne, et de l’inscription suivante : « Aux officiers, sous-officiers et soldats de l’escadron polonais tombés à Mont-Saint-Jean le 18 juin 1815. Forces armées polonaises. ACMN ». Lasne/Plancenoit, le monument aux Belges Un monument rendant hommage aux Belges morts pendant la bataille de Waterloo devait être érigé pour le centenaire de l’événement en 1915. Un comité est créé pour ce faire en 1911 et regroupe notamment de hauts gradés de l’armée belge. Installé au carrefour de la chaussée de Charleroi et du chemin de la Croix, il devait être inauguré le 13 septembre 1914 mais l’invasion de la Belgique le 4 août par l’armée allemande annula l’initiative. Érigé grâce à une souscription publique, le monument est l’œuvre de l’architecte Callewaerts et se présente sous la forme d’une imposante stèle de pierre bleue décorée d’un drapeau en bronze déchiré par la mitraille et surmontant un trophée d’armes (canon, glaive, sabre, lances, tambour) timbré d’un écusson au lion belge entouré de lauriers. Il porte une inscription en français

Le monument à l’Aigle blessé à Plancenoit. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

et en néerlandais, la même que celle présente sur le monument aux Belges de la bataille des Quatre-Bras à Baisy-Thy : « Aux Belges morts le XVIII juin MDCCCXV en combattant pour la défense du drapeau et l’honneur des armes ». À Waterloo comme aux Quatre-Bras, ces monuments rendent hommages aux « Belges » ayant pris part aux batailles. Il s’agit ici d’un hommage de l’État belge, dans son travail de devoir de mémoire au XXe siècle ; il fait bien entendu références aux hommes vivant sur le territoire de ce qui, en 1815, n’était pas encore la Belgique mais bien les provinces du sud du royaume des Pays-Bas. À Waterloo, on estime à 1.200 le nombre de Belges morts pendant la bataille. 203


Sur les traces de la Wallonie française

Verhoeven. La première pierre est posée le 22 septembre 1912, mais la Première Guerre mondiale vient interrompre le chantier. Laissé inachevé, le monument reste en l’état jusqu’à la reprise des travaux en 1954 ! La colonne est finalement inaugurée le 24 juin 1956 ; elle est située au sommet d’un petit escalier, repose sur un piédestal et mesure 18 m de hauteur. La face ouest du piédestal, face à la chaussée de Charleroi, est ornée d’un médaillon représentant l’écrivain et réalisé par le sculpteur Victor Demanet. Sur la face sud, se trouve une plaque portant l’inscription suivante : « Un jour viendra où il n’y aura plus d’autres champs de bataille que les marchés s’ouvrant au commerce et les esprits s’ouvrant aux idées ». Il s’agit d’un extrait du discours tenu par Victor Hugo au Congrès de la paix à Paris le 22 août 1849. Sur la colonne est apposé un blason portant la date de 1956 et figurant un coq. Le monument, classé en 1979 et fortement dégradé, a été acquis par la province du Brabant wallon et restauré en 2012-2013. Lasne/Plancenoit, les plaques et stèles commémoratives Plusieurs stèles et plaques commémoratives sont situées sur le territoire de la localité de Plancenoit, en plus d’imposants monuments commémoratifs. La grande majorité de celles-ci a été érigée dans les années 1990 à l’initiative de la Fondation Napoléon et de l’association franco-européenne de Waterloo dans le but de rappeler le souvenir de quelques faits remarquables et autres exploits de la Grande Armée sur les lieux où ils se sont déroulés. Plusieurs de ces stèles ont été récemment restaurées par ces mêmes associations, avec le concours de l’association pour la conservation des monuments napoléoniens :

Le monument aux Belges tombés au cours de la bataille de Waterloo. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Lasne/Plancenoit, la colonne Victor Hugo En 1911, à l’occasion du cinquantième anniversaire du séjour de Victor Hugo à Mont-Saint-Jean, l’historien Hector Fleischman et le peintre militaire Maurice Dubois prennent l’initiative de l’érection d’un monument commémoratif. Le but est d’associer le souvenir de la bataille de Waterloo à celui du grand écrivain. Connu pour ses célèbres vers « Waterloo, morne plaine », écrits à Jersey en 1852, Victor Hugo attendit toutefois 1860 avant de venir visiter les lieux de la bataille. Il séjourna deux mois à l’hôtel des colonnes, où il acheva la rédaction des « Misérables ». Des souscriptions levées en France et en Belgique permettent de confier la tâche à l’architecte parisien Manuel Ley et à l’architecte bruxellois Jean 204

- une plaque commémorative se trouve sur un ancien relais de poste érigé en 1765 au bord de la chaussée de Charleroi. Elle porte l’inscription suivante : « À la mémoire du corps de santé français qui prodigua le 18 juin 1815 ses soins les plus dévoués » ; - au carrefour du chemin de Fichermont et de la route de Charleroi se trouve la stèle du 27th Inniskilling, régiment d’infanterie britannique. Cette petite stèle de granit a été érigée en 1990 pour le 175e anniversaire de la bataille. On peut y lire l’inscription suivante : « In memory of the heroic stand by the 27th Inniskilling regiment of foot at the battle of Waterloo on 18th June 1815 when, of the 747 officers and men of the regiment who joined battle, 493 were killed or wounded. A noble record of stubborn endurance of them the Duke of Wellington said “ah they saved the center of my line”. Erected by their successors the Royal Irish Rangers (27th [Innsikilling], 83rd, 87th), 18 June 1990 » 32 ; 32

À la mémoire de la résistance héroïque du 27 e régiment à pied Inniskilling lors de la bataille de Waterloo, 18 juin 1815, alors que sur les 747 officiers et hommes du régiment qui participèrent à la bataille, 493 furent tués ou blessés. Comme preuve de leur résistance acharnée, le duc de Wellington dit « Ah, ils ont sauvé le centre de ma ligne ». Érigé par leurs successeurs du Royal Irish Rangers (27e Inniskilling, 83e et 87e), 18 juin 1990.


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

La stèle en hommage au régiment britannique Inniskilling. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

- au bout de la rue de la Croix, vers le monastère de Fichermont, se trouve la stèle du 21e de ligne de la division Marcognet, engagé contre les troupes anglaises du général Pack. Pierre-Louis Binet (1765-1854), baron de Marcognet, prend part aux guerres révolutionnaires avec l’armée du Rhin. Baron d’Empire en 1808, il participe aux campagnes d’Espagne et de France. On y trouve le texte commémoratif suivant : « En ce lieu, le 18 juin 1815, le 21e régiment d’infanterie de ligne de la division Marcognet attaqua héroïquement les unités anglo-écossaises formant la brigade du major-général Pack » ; - sur un rond-point de l’avenue Wagram, une stèle en mémoire des chasseurs à cheval du colonel Nicolas a été inaugurée le 6 novembre 1993. On y lit l’inscription suivante : « En ces lieux le 18 juin 1815, le 11e régiment de chasseurs à cheval du colonel Nicolas, division Subervie, sabra avec succès les Prussiens du colonel von Hiller » ; - non loin du monument prussien se trouve une stèle ornée elle aussi de l’aigle impériale érigée le 19 octobre 1991. Elle

évoque le général Duhesme 33, la Jeune Garde et le général prussien von Bülow : « En ce lieu, le 18 juin 1815 à 5 heures du soir, la Jeune Garde de l’empereur Napoléon, sous les ordres du général comte Duhesme, s’opposa glorieusement aux Prussiens du général Bülow ». Cette inscription se trouve sur une plaque sous laquelle figure la dédicace « À la jeune garde. AFEW. Fond. Napoléon ». La stèle a été récemment restaurée ; - à la limite avec Lasne, au carrefour de la rue d’Anogrune et de la rue Là Haut, se trouve une stèle évoquant le colonel Roussille, le général Simmer et von Bülow. Elle se présente sous la même forme que les précédentes : bloc de granit décoré d’une aigle impériale et d’une inscription. Cette stèle porte le texte suivant : « En ce lieu, le 33

Sur le général comte Philibert Duhesme, voir les articles consacrés à l’église Sainte-Catherine de Plancenoit, sur l’auberge du Roy d’Espagne à Genappe et sur son mausolée à Ways (Genappe) dans le présent chapitre.

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Sur les traces de la Wallonie française

La stèle en hommage à la division Marcognet © D. Timmermans

La stèle en hommage à la jeune garde © D. Timmermans

La stèle en hommage au colonel Roussille © D. Timmermans

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La stèle en hommage au colonel Nicolas © D. Timmermans


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

La stèle en hommage à la division Durutte © Bruxelles, KIK-IRPA

18 juin 1815, le 5e régiment d’infanterie de ligne du colonel Roussille, division Simmer, s’opposa héroïquement au corps prussien du général von Bülow » ; - à proximité du monument aux Hanovriens se trouve une stèle rendant hommage au 8e régiment de ligne et au général Durutte. Elle se présente sous la même forme que les autres monuments érigés par les mêmes associations : une aigle impériale au sommet d’une inscription commémorative. « En ce lieu, le 18 juin 1815, le 8e régiment d’infanterie de ligne de la division Durutte attaqua avec succès la 2e légion allemande du colonel von Ompteda ». Cette stèle commémore les mêmes affrontements que ceux du monument hanovrien, cette fois pour l’armée française. Elle évoque la personnalité de Pierre François Joseph Durutte, né à Douai en 1767, général de division en 1803, ayant pris part à de nombreuses guerres impériales et notamment à la bataille de Wagram. Titré comte d’Empire, il reste fidèle à Napoléon pendant les Cent-Jours et prend part à la campagne de 1815. Il décède et est inhumé à Ypres en 1827. Son nom est gravé sur l’arc de triomphe. La stèle évoque également le colonel Christian Friedrich Wilhelm von Ompteda (1765-1815), officier des troupes de Hanovre à la tête d’une brigade des armées de Wellington. Victime d’une balle, il décède le 18 juin 1815 à la ferme de la Haie Sainte ; - non loin de la ferme de la Belle Alliance se trouve une stèle ornée de l’aigle impériale dédiée au général Milhaud

et à ses cavaliers. Jean-Baptiste Milhaud (1766-1833), général et comte d’Empire, poursuit parallèlement une carrière politique et militaire. Député de la Convention, il fait les campagnes d’Espagne et de Russie sous l’Empire avant de prendre part aux batailles de Ligny et de Waterloo en juin 1815. Son nom est gravé sur l’arc de triomphe. La stèle qui lui rend hommage porte l’inscription suivante : « De ce lieu partit le 18 juin 1815 le 5e régiment de cuirassiers du corps de cavalerie de Milhaud pour charger les carrés de l’infanterie britannique ». Elle a été inaugurée le 19 octobre 1991 par le général de Pouilly, vice-président des anciens cuirassiers du 5e régiment ; - également à proximité de la ferme de la Belle Alliance, au bord de la chaussée de Charleroi, se trouve une stèle en hommage au 6e régiment d’artillerie, similaire aux autres monuments commémoratifs érigés par la fondation Napoléon et l’association franco-européenne de Waterloo. Sous l’aigle impériale se trouve l’inscription suivante : « De la Belle Alliance à Papelotte, le 18 juin 1815, des unités du 6e régiment d’artillerie à pied du colonel Hulot, ont appuyé de leurs feux efficaces les attaques du 1er corps d’armée français ». Cette stèle a été inaugurée le 7 novembre 1992 et évoque la mémoire d’Étienne Hulot (1774-1850), baron d’Empire, grand officier de la Légion d’honneur, entré au service en 1793 et ayant pris part aux guerres de la Révolution et de l’Empire. Il prend notamment part à 207


Sur les traces de la Wallonie française

La stèle en hommage au général Milhaud © D. Timmermans

la bataille d’Eylau, à la guerre d’Espagne et à la campagne de Saxe. Pendant les Cent-Jours, il est attaché au 4e corps d’armée sous les ordres du général Gérard et participe aux batailles de Ligny et de Waterloo. Hulot termine sa carrière militaire au grade de général de division ; son nom est inscrit sur l’arc de triomphe. Lasne/Plancenoit, l’église Sainte-Catherine Située sur un promontoire dans le village, l’église SaintCatherine est une réalisation néogothique de l’architecte provincial Émile Coulon érigée en 1857-1859. Elle renferme un mobilier de la même époque. Plusieurs monuments et plaques commémoratives ont été apposés dans et autour de l’église au fil des ans : - une plaque a été installée en 1965 sur la façade extérieure de l’église par la société belge d’études napoléoniennes. Elle est dédiée aux 4000 hommes de la jeune garde impériale qui résistèrent aux assauts des troupes du 4e corps d’armée prussien du général von Bülow : « Dans ce village de Plancenoit s’est illustrée le 18 juin 1815 la jeune garde de l’empereur Napoléon commandée par le général comte Duhesme qui y fut mortellement blessé » ; - une autre plaque décorée de l’aigle impériale se trouve sur la façade ; elle y a été apposée par la fondation Napoléon et l’association franco-européenne de Waterloo. « Au 208

La stèle en hommage au colonel Hulot © D. Timmermans

Lieutenant M. Louis, 3e Tirailleurs de la Garde, né à Jodoigne le 3 avril 1787, tombé à Plancenoit le 18 juin 1815 » ; - à l’intérieur, sur le mur gauche de la nef, à côté d’un autel dédié à la Vierge, se trouve une plaque de marbre blanc portant l’inscription suivante : « À la mémoire de Jacques (…) Tattet, Lieutenant d’artillerie de la Vielle [sic] Garde, membre de la Légion d’Honneur, tué au début de la bataille du 18 juin 1815 à l’âge de 22 ans » ; - sur le chevet de l’église se trouve une plaque inaugurée le 6 novembre 1993 et placée à l’époque contre le mur de clôture du cimetière. Elle évoque le souvenir du colonel Caron et de ses unités : « En ces lieux, le 18 juin 1815, les 1re et 2e compagnies du 8e régiment d’artillerie à pied du colonel Caron ont appuyé de leurs feux efficaces le 6e corps d’armée français ». Né en 1774 dans la Somme, Augustin Joseph Caron participe entre autres aux campagnes d’Espagne et du Portugal (1809-1813) puis à la campagne de 1815. Resté profondément attaché à l’Empire, il est fusillé le 1er octobre 1822 pour avoir participé à un complot bonapartiste. Waterloo, la stèle Picton Non loin du monument aux Belges, à la limite entre Waterloo et Plancenoit, se trouve la stèle en hommage au lieutenantgénéral britannique Thomas Picton. Inaugurée en 1980 à l’initiative du Waterloo committee, elle porte l’inscription suivante : « To the gallant memory of L[ieutenan]t General


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

La plaque en hommage au lieutenant Louis sur la façade de l’église de Plancenoit © D. Timmermans

La plaque en hommage au lieutenant Tattet dans l’église Sainte-Catherine à Plancenoit © D. Timmermans

La plaque en hommage aux troupes du colonel Caron sur le chevet de l’église de Plancenoit © D. Timmermans

Sir Thomas Picton, commander of the 5th division and the left wing of the army at the battle of Waterloo. Born 1758, died near this spot in the early afternoon, 18th June 1815, leading his men against Count Drouet d’Erlon’s advance » 34. Déjà sévèrement blessé deux jours plus tôt à la bataille des Quatre-Bras, Picton poursuit ses efforts à Waterloo. Il repose aujourd’hui dans la crypte de la cathédrale Saint-Paul de Londres, à côté du duc de Wellington. 34

En galante mémoire du lieutenant-général Sir Thomas Picton, commandant la 5e division et l’aile gauche de l’armée à la bataille de Waterloo. Né en 1758, mort non loin d’ici au début de l’après-midi du 18 juin 1815, à la tête de ses hommes luttant contre l’avance du comte Drouet d’Erlon.

La stèle Picton à Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA

Waterloo, la tombe du lieutenant-colonel Edward Stables Le lieutenant-colonel Edward Stables est tué le 18 juin 1815 alors qu’il sert dans le bataillon des grenadiers de la garde. Il est enterré dans le jardin d’une habitation située sur la chaussée de Bruxelles à Joli-Bois et un tombeau de pierre est édifié en son hommage. En 1894, son corps est exhumé et replacé dans le mémorial britannique d’Evere et le tombeau disparaît 209


Sur les traces de la Wallonie française

La tombe du lieutenant-colonel Stables à Waterloo © Bruxelles, KIK-IRPA

dans l’oubli. Une plaque en marbre qui se trouvait sur la face sud de la tombe est alors déposée au musée Wellington, en perpétue le souvenir et porte une inscription en latin : « Hic jacet Edwardus Stables Olim de Hormeadbury, in Comitatu Hertfordiensi in exercitu Britannico stallitum regiorum Tribunus in Hispania militam iniit, sub insigni duce John Moore, Equit. Balm, Mox, per landem, per varios trimphos gloriosissimo liberatam, sub insignissimo principe, Arthuro Duce de Wellington, Galliam feliciter intravit ; Tandem in prollie Waterloviensi, Agmini quadrato imperam, Dum monitu et exemplo militum animos in hostem accendebat, Egregia morte peremptus est. Abreptum lugent amici, Commilitones, Patria, Obiit annis aetatis suae XXXIII » 35. 35

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Ci-gît Edward Stables de Hormeadbury, du comté de Hertfordshire, officier des troupes royales britanniques. Il commença sa carrière militaire en Espagne sous les ordres de l’illustre commandant John Moore, chevalier de l’Ordre du Bain. Très vite, à travers celle-ci, libéré par diverses victoires glorieuses, il fut heureux d’entrer en France sous les ordres du très illustre prince Arthur, duc de Wellington. Enfin, commandant un bataillon formé en carré à la bataille de Waterloo, tandis qu’il encourageait par ses paroles et son exemple le courage des soldats contre l’ennemi, une mort glorieuse le faucha. Ses amis, ses compagnons d’armes, sa Patrie, pleurent cette fin brutale. Il est mort dans sa 33e année.

Toutefois, un groupe de passionnés britanniques retrouve et restaure le monument funéraire en 1992. Les autres plaques du tombeau sont découvertes dans le grenier de l’habitation toute proche. Le monument, aujourd’hui devenu cénotaphe, porte l’inscription suivante : « Sous cette pierre, pendant près de quatre-vingts ans ont reposé près de l’écurie les restes du lieutenant-colonel Edward Stables de Hormeadbury qui a servi dans les guerres continentales sous Sir John Moore et le duc de Wellington et tomba glorieusement le 18 juin 1815 tout en commandant un bataillon des Grenadier Guards. Ses restes ont été replacés au monument de Waterloo à Evere le 13 décembre 1894. Cette tombe a été restaurée par Sir Francis Plunkett ». Charleroi, le monument aux armées françaises Sur l’esplanade de la gare de Charleroi-Sud se trouve un monument en hommage aux armées françaises. Érigé par l’association franco-européenne de Waterloo en collaboration avec les autorités françaises et la ville de Charleroi, il a été inauguré le 19 septembre 1997. Il représente un tambour posé sur un socle de quatre niveaux sur lesquels se trouvent diverses inscriptions faisant référence à la présence des armées françaises dans la région : « Jemappes 1792 – Fleurus 1794 – Ville


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

Wavre, le pont du Christ Dans les heures qui suivent la terrible bataille de Waterloo, la ville de Wavre souffre considérablement des combats des 18 et 19 juin 1815. Une vingtaine à une trentaine de maisons sont incendiées par les Français dans le quartier du Sablon et d’autres sont ravagées à Basse-Wavre et Bierges. Traversant la Dyle, un petit pont qui fut rebâti en 1845 doit son nom à un christ érigé en 1702. Aujourd’hui intégré aux aménagements modernes du centre de Wavre, ce pont fut le théâtre de sérieux combats au soir du 18 juin 1815. Son emplacement était en effet stratégique car il était le principal passage menant à la ville. Les troupes prussiennes, barricadées sur la place du Sablon, attendent les Français tentant de pénétrer à Wavre. De chaque côté, les pertes sont estimées à 2500 hommes. Une plaque commémorative rappelle ces furieux affrontements : « Le 18 juin 1815, ce pont fut l’enjeu d’un combat entre les troupes de Grouchy et de Blücher ». Le 9 mai 2009, une

Le monument aux armées françaises sur l’esplanade de la gare de Charleroi-Sud © D. Timmermans

de Charleroi / Ligny 1815 – Waterloo 1815 – Ministère français des anciens combattants / Louvain 1831 – Anvers 1832 – Fondation Napoléon et tant d’autres donateurs / Charleroi 1914 – Gembloux 1940 – Association franco-européenne de Waterloo ».

Les combats de Wavre et de Namur et la retraite de l’empereur Après la débâcle du 18 juin 1815, l’armée française tente de sauver les meubles. Le but du maréchal Grouchy est de battre en retraite par Namur et de préserver ce qu’il reste de l’armée impériale. Entre Wavre et Namur, du 18 au 21 juin, se déroulent des combats contre les Prussiens, sans doute des épisodes moins connus de la campagne de 1815 qui ne s’est pas achevée avec la bataille de Waterloo. Sous les ordres de Grouchy, les rescapés de l’armée impériale tentent de sauver l’honneur : les Français restent dignes et courageux dans la retraite alors que l’Aigle prend la route de Paris. Sur son chemin, il fait encore quelques haltes en terres wallonnes.

Le pont du Christ à Wavre. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie française

seconde plaque a été inaugurée ; elle rend hommage à des soldats ayant pris part aux combats : « Aux soldats du bataillon STOFFEL, du 2e régiment étranger (suisse), créé le 24 avril 1815 – intégré à la 10e division du 3e corps d’armée français (armée du Nord) – qui prirent part à la campagne de Belgique et qui furent décimés, à Wavre, en conquérant à deux reprises le Pont du Christ, dans la soirée du dimanche 18 juin 1815 ». Wavre, l’église Saint-Jean Baptiste Signalée par son clocher caractéristique, l’église de Wavre a été érigée en style gothique ogival dans la seconde moitié du XVe siècle bien que les travaux se soient poursuivis au cours des deux siècles suivants. Elle est composée d’un chœur de deux travées, d’un transept saillant et de trois nefs de quatre travées. L’édifice a été érigé en brique et grès ferrugineux. Au soir du 18 juin 1815, Français et Prussiens se battent à Wavre, Limal et Bierges avant de se diriger vers Namur. Située en plein centre, l’église est touchée par les affrontements du 18 juin : un boulet s’encastre dans un des piliers de la nef et s’y trouve toujours. Il a été conservé et entouré d’une plaque commémorative sur laquelle est dessiné un guerrier ailé foudroyant un homme allongé nu, qu’il foule au pied. Sur son bouclier figure la date de 1815. Enfin, une inscription latine figure sur cette plaque : « Quid vis irrita acies contre hac petram ? Ecce nedum plus ultra ! Sic inconsulta transit gloria mundi » 36. La pose de cette plaque en 1970 est l’initiative du curé de la paroisse. Une autre plaque située dans l’église précise : « Le 18 juin 1815, l’artillerie française bombarde les troupes prussiennes retranchées dans Wavre. Hommage aux victimes. Un boulet est encastré dans un pilier de l’église ». Wavre/Bierges, l’ancien moulin et le monument Gérard Déjà mentionné en 1674, l’ancien moulin seigneurial de Bierges conserve des bâtiments des XVIIIe et XIXe siècles groupés autour d’une cour carrée. Le moulin a été érigé en brique et grès ferrugineux sur la rive droite de la Dyle. Sur la rive gauche se trouvent la grange et les écuries, séparées par un porche. Le 19 juin 1815, le moulin est témoin de l’affrontement entre les Prussiens, défendant le bâtiment, et les Français, positionnés sur l’autre rive de la rivière. C’est au cours de ces combats que le général Gérard est touché d’une balle en pleine poitrine. Il est ensuite transféré dans la demeure du notaire Hollert afin d’y être soigné, à l’endroit même où la veille il avait sommé Grouchy de marcher au canon. Un monument inauguré derrière le moulin de Bierges le 28 septembre 1958 rend hommage au général MauriceÉtienne Gérard, commandant le 4e corps des troupes impériales en 1815. Resté dans l’armée, il est nommé maréchal par le roi Louis-Philippe en 1830 et se porte au secours de la jeune Belgique en 1831 et 1832 face aux Hollandais. Il est donc connu chez nous sous ce double aspect ; c’est également la raison pour laquelle ce monument a été offert par le comité 36

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« Que veux-tu entendre, fer courroucé, contre cet édifice ? Certes tu n’iras pas plus loin. Ainsi passa la gloire écervelée du monde ».

Le monument Gérard à Bierges © IPW

des fêtes pour la commémoration des journées de septembre 1830. Sculpté dans la pierre bleue, le monument est orné d’un portrait en médaillon du général. En dessous, figure l’inscription suivante : « En ces lieux fut blessé le 18 juin 1815 le général Gérard, héros de l’Empire et défenseur de notre indépendance nationale ». Le général fut un des artisans de la retraite française, sous la conduite de Grouchy, menée dans un premier temps non loin de Waterloo. Wavre/Limal, la ferme de la Bourse La ferme de la Bourse est une des belles exploitations agricoles traditionnelles situées à Limal. Appelée également « cense del Bourse », elle est caractérisée par son double porche millésimé 1702 et a de nos jours été reconvertie pour abriter plusieurs logements particuliers. L’ensemble des bâtiments, construits en pierre bleue et briques chaulées, s’articule autour d’une cour carrée. Après avoir quitté la demeure du notaire Hollert, le maréchal Grouchy passe le reste de la journée du 18 juin dans cette exploitation agricole de Limal. À l’aube du 19 juin, les hommes de l’armée impériale parviennent à refouler les Prussiens vers Bierges et prennent la localité de Limal. Dans les années 1950, des traces de balles étaient encore visibles sur les murs de la ferme, ultimes témoignages des combats de retraite de l’armée française.


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

Le porche d’entrée de la ferme de la Bourse à Limal © J. Tordoir

Lasne/Lasne-Chapelle-Saint-Lambert, le monument von Schwerin Un monument en calcaire de 5 m de hauteur rend hommage au comte Guillaume von Schwerin, colonel à la tête de la 1re brigade de la réserve de cavalerie du 4e corps d’armée de von Bülow. Il est tué dans les premiers combats qui opposent les Prussiens à la Garde impériale après la bataille de Waterloo. Mortellement blessé à 15h30 le 18 juin, il est enterré à la hâte non loin du monument actuel avant d’être inhumé plus dignement en 1818. La comtesse Sophie Daenhoff fait alors ériger le monument commémoratif et enterrer les restes du colonel en dessous de celui-ci. Elle offre également deux cloches à l’église de Lasne. Le monument se présente sous la forme d’une colonne de 5 m de hauteur posée sur une base octogonale, elle-même reposant sur un socle cubique. Une plaque en bronze y est apposée et porte des inscriptions en allemand : « Whilhelm Graf v[on] Schwerin, koenigl[isch] Preus Obrist und Ritter gefallen am Siege al 18 [ J]un[i] 1815 [i]n der Fremde für die Heimath » 37. 37

« Guillaume, comte de Schwerin, officier royal et supérieur et chevalier, tombé à la bataille le 18 juin 1815, à l’étranger, pour son pays ».

Le monument von Schwerin à LasneChapelle-Saint-Lambert © D. Timmermans

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Sur les traces de la Wallonie française

Namur, l’ancienne porte de Bruxelles Le 20 juin 1815, les Français sont à Namur ; ils y entrent la veille et se positionnent derrière les murailles de la porte de Bruxelles. De l’autre côté, les troupes prussiennes de von Zastrow tentent de forcer le passage. Lors d’un assaut, il est touché d’une balle en pleine poitrine et s’effondre. Devant l’impossibilité de faire sauter la porte, les Prussiens pénètrent dans l’enceinte par les fenêtres du poste d’octroi jouxtant la porte de Bruxelles. La campagne de 1815 s’achève avec ces derniers affrontements à Namur. Grouchy évacue la ville le 22 juin et se retire en France via Dinant, Givet, Reims et Soissons. La porte de Bruxelles a depuis été détruite. Elle se situait non loin de l’entrée du parc Louise-Marie située au niveau du square d’Omalius. Une plaque commémorative a été apposée sur un des piliers du parc par l’association pour la conservation des monuments napoléoniens en 1986 : « Ici s’élevait la porte de Bruxelles. Le 20 juin 1815, cette porte fut témoin des combats opposant l’arrière-garde du maréchal Grouchy à l’armée prussienne ».

La plaque commémorative située à l’entrée du parc Louise-Marie à Namur © IPW

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Namur, la stèle du commandant von Zastrow À l’entrée du cimetière de Belgrade se trouve la stèle du colonel prussien Heinrich von Zastrow, tué le 20 juin 1815 en combattant l’arrière-garde de Grouchy. Il s’agit ici d’un monument commémoratif, les restes du défunt reposant au cimetière allemand de Lommel. Entouré d’une petite haie de buis, le monument se présente sous la forme d’un bloc de calcaire surmonté d’un casque militaire antique. Il est décoré de croix et de feuilles de lierre et est gravé d’une inscription difficilement déchiffrable en allemand : « Heinrich von Zastrow, Oberst und Commandeur des koeniglich preussichen Infanterie Regimentes Colberg er fiel an der Spitze (seiner Truppen in Kampfe fürs Vaterland) an 20 juni 1815 » 38. Récemment, une nouvelle plaque a été apposée devant le monument : « Grabmal des Heinrich von Zastrow, Oberst un Kommandeur des königlich preussischen 38

« Heinrich von Zastrow, supérieur et commandeur de l’infanterie royale du régiment prussien Colberg, il tomba (ses troupes dans la lutte pour la patrie) le 20 juin 1815 ».


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

Le monument commémoratif du commandant von Zastrow à l’entrée du cimetière de Belgrade à Namur © IPW

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Sur les traces de la Wallonie française

Infanterieregimentes nr. 9 gefallen vor Namur in Kampf gegen Napoleonische Truppen unter Marschall Grouchy am 20 Juni 1815 » 39. Il s’agit aujourd’hui du seul monument commémorant les combats de 20 juin 1815. Le monument aux morts français érigé dans le cimetière de Belgrade en 1857 a été détruit depuis. Nivelles, le musée communal Ancien refuge de l’ordre des Trinitaires d’Orival, cette belle demeure de style Louis XV abrite aujourd’hui les collections du musée communal d’archéologie, d’art et d’histoire. On accède à cet édifice monumental de 1763-1764 par deux 39

Le monument funéraire de Heinrich von Zastrow, supérieur commandant du régiment d’infanterie royal prussien nº 9 tombé devant Namur dans la lutte contre les troupes napoléoniennes du maréchal Grouchy le 20 juin 1815.

L’intérieur de la chapelle Saint-Pierre à Boneffe. Photo de 1971 © Bruxelles, KIK-IRPA

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portails donnant sur une cour pavée. La façade donnant sur la cour s’élève sur deux niveaux de cinq travées et s’organise en double corps. À l’intérieur, un grand hall d’entrée aux plafonds recouverts de stucs rocaille abrite un très bel escalier orné de fleurs. En 1804, le propriétaire du bâtiment fait don de l’édifice aux pauvres de la ville. La maison devient propriété du bureau de bienfaisance qui y installe un atelier de charité de tisserands qui fonctionne jusqu’en 1812. Une inscription sur la façade en rappelle le souvenir : l’inscription « 1805. Atelier de travail » côtoie les couleurs du drapeau français. Dans la nuit du 20 au 21 juin 1815, l’édifice accueille le duc de Wellington. Éghezée/Boneffe, la chapelle Saint-Pierre Située à l’angle de la rue de Taviers-Branchon, la chapelle Saint-Pierre est un petit édifice carré en briques peintes et pierre bleue de style néoclassique. Sommée d’un clocheton


La campagne de 1815 et son riche patrimoine commémoratif

cubique coiffé d’une pyramide elle-même surmontée d’une croix, l’édifice comporte une inscription, sur le devant de l’autel « Saint Pierre, protégez-nous comme vous nous avez protégés des cosaques en 1814, de Blücher en 1815 ». Elle rappelle le passage de troupes russes et prussiennes dans la région lors des dernières campagnes napoléoniennes. Les cosaques, cavalerie légère de l’armée russe, traversent la Wallonie depuis l’est dans les premiers mois de 1814 afin de rejoindre Paris et la campagne de France. Blücher et les troupes prussiennes figurent parmi les protagonistes les plus importants de la campagne de 1815. Mariembourg, un souvenir des troupes impériales Au lendemain de la bataille de Waterloo, c’est en vaincu que l’empereur prend la route de la France et de Paris. Le 19 juin 1815, vers 13h, il atteint la ville de Mariembourg. Le 24 juin suivant, la ville est assiégée par les troupes du prince

Auguste de Prusse : près de 7.000 soldats prussiens affrontent les troupes du commandant Alliot qui n’étaient composées que de 315 civils et militaires. La place forte est forcée de capituler le 30 juillet 1815 après près de six semaines de siège. Aujourd’hui, une plaque commémorative installée sur l’immeuble situé à l’intersection de la rue de France et de la place Marie de Hongrie rappelle ces événements moins connus de la campagne de Belgique : « Hommage aux glorieux défenseurs de la forteresse assiégée par les Prussiens en 1815 ». Cette plaque a été apposée le 4 juillet 1965 à l’occasion d’une reconstitution historique des événements. Philippeville, le café de la maison du peuple Le 19 juin 1815, Napoléon arrive à Philippeville vers 9h du matin depuis Charleroi. Il s’arrête à l’hôtel du Lion d’Or, tenu par un vétéran des campagnes impériales. Il s’y restaure et s’y

La plaque commémorative du siège de la place forte de Mariembourg en 1815. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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repose avant de prendre la route de Paris via Mariembourg, Rocroi, Maubert-Fontaine, Mézières et Laon. Située à l’angle de la place d’Armes et des rue de la Roche et du Moulin, cet immeuble daté de la seconde moitié du XVIIIe siècle était affecté à l’hôtellerie. Le bâtiment fut réaménagé aux alentours de 1910 en maison du peuple : les façades sont à l’époque chaulées et un clocheton est adjoint à l’ensemble. Soignies/Horrues, la borne du capitaine Située dans un enclos grillagé en bordure d’une prairie, une petite borne rappelle le décès accidentel du capitaine prussien Carl Börries, baron von Ulsar, au cours de la campagne de 1815. Le monument est composé d’une base quadrangulaire surmontée d’un monolithe terminé en pavillon et gravé d’inscriptions commémoratives sur les quatre faces. Un socle évasé a été ajouté en 1915 par des soldats allemands.

L’ancien hôtel puis maison du peuple de Philippeville. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

La borne du capitaine, au bord d’un sentier à Horrues. Photo J. Massaux © SPW-Patrimoine

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Sur les traces de la Wallonie franรงaise INDEX BIBLIOGAPHIE


INDEX

Index des noms de personnes Adams George Gammon 199 Aigret Ghislain 133, 134 Albert Ier, roi des Belges 109 Alexandre VII, pape 114 Alliot Claude 217 Andrès Gaspard 89 Arnoul Ier, comte de Chiny 50 Aubry Jean-Joseph 187 Baillet Mathieu 54 Bailly de Monthion François Gédéon 188 Balat Alphonse 91 Barbière Paquay 71 Baring Georg 190 Bassenge Jean-Nicolas 31, 32 Battersby George 201 Beaupain Jean-Guillaume 90 Beaupain Mathieu 90 Behogne Augustin 40, 41, 116, 118 Belly de Bussy David Victor 188 Bertrand Henri Gatien 188 Bettonville Lambert 97 Berchmans Oscar 106 Bernadotte Jean-Baptiste 164 Biolley Édouard 82, 96, 97, 125 Biolley Jean 81 Biolley Jean-François 96 Biolley Raymond 81 Binet Pierre-Louis 205 Blackman John Lucie 185 Blondel Pierre François 145 Blücher, voir Von Blücher Bonaparte Jérôme 182, 188, 191, 193 Bonaparte Joseph 191 Bonaparte Lucien 129 Bonaparte Napoléon, voir Napoléon Ier Bordier du Bignon Jacques-Charles 105 Börries von Ulsar Carl 218 Bösewiel H. 189 Botty Englebert 141 Bouquette Jean-Denis 40, 41, 118 Boussart André-Joseph 38, 106, 107 Boussart Félix Nicolas Joseph 106, 107 Boutteville Louis-Ghislain 15 220

Bringhurst John Dorset 201 Brixhe Louis 141, 142 Bussy, voir Belly de Bussy Cabarrus Thérésia 107 Cairnes Robert 201 Callewaerts 203 Cambacérès, voir de Cambacérès Cambronne Pierre 203 Canning Charles Fox 201 Capiaumont Narcisse Albert Philippe 145 Cardron Jean-Baptiste-Joseph 129 Caron Augustin Joseph 208, 209 Cartiaux Jean-Joseph 149 Carton L.-F. 40 Castiau Guillaume 89 Chapuis Grégoire-Joseph 40, 41, 71, 118 Charles II, roi d’Espagne 199 Charles X, roi de France 109, 124, 164, 173 Charles XIV Jean, roi de Suède, voir Bernadotte Jean-Baptiste Charles Quint 52 Charlier Jean-Joseph 126 Chevalier Gérard 114 Chevron Jean-Noël 77 Clarke Henri-Jacques-Guillaume 118 Clément XIV, pape 36, 123 Cockerill John 87, 110, 125 Cockerill William 96 Coignet Jean-Roch 188 Collard Jean-Herman-Joseph 150 Collard Pierre-Joseph 150 Collet Marcel 39 Corbineau Jean-Baptiste Juvénal 188 Cornesse J.-G. 25 Cornet de Ways-Ruart Félix 77 Cotton Edward 185, 198 Coulon Émile 187, 199, 208 Counet Antoine Joseph 154 Craufurd Thomas 183 Crossée Eugène 142 D’Arenberg Louis 138 D’Arenberg Prosper-Louis 138 D’Artigues Aimé-Gabriel 89 D’Astier Eugène 140, 141 D’Astier Henri Louis Marie 140

D’Astier Honoré Dominique 140 D’Autriche Albert, gouvernant des Pays-Bas 52 D’Autriche Charles, gouvernant des Pays-Bas 39 D’Autriche Isabelle, gouvernante des Pays-Bas 52 D’Autriche Marie-Élisabeth, gouvernante des Pays-Bas 52 D’Autriche Marie-Louise, impératrice des Français 59, 159 D’Autriche Marie-Thérèse, impératrice d’Autriche 54, 68, 73, 89, 123 D’Auxy Coralie 138 D’Harscamp Isabelle 108 D’Héralde Dominique 170 D’Heusy Catherine 166 D’Hoffschmidt de Resteigne Edmond 154 D’Honner M.J. 94 D’Orange Guillaume, roi des Pays-Bas 89, 106, 137, 138, 146, 163, 164, 172 D’Oultremont Charles-Nicolas, prince-évêque de Liège 110 D’Oultremont Ferdinand 151 Daenhoff Sophie 213 Danton Georges 37, 38 De Baillet Charles-Antoine 54 De Bavière Jean-Théodore, princeévêque de Liège 110 De Bavière Joseph-Clément, princeévêque de Liège 34 De Beauharnais Eugène 154 De Beauharnais Joséphine, impératrice des Français 59, 138 De Behr J. 72 De Berghes Georges-Louis, princeévêque de Liège 110 De Bettignies Claude-Joseph 72, 122 De Bexon Claude, évêque de Namur 149 De Bouillon Godefroid 28 De Brunswick Frédéric-Guillaume 177 De Cambacérès Jean-Jacques 65, 115 De Canisy, voir De Carbonnel De Carbonnel de Canisy Louis-Emmanuel 188 De Chestret Jean-Remy 25, 31 De Clément de Taintignies Louis-Lamoral 153 De Cobourg Frédéric-Josias 39, 40 De Collaert Ferdinand 140


Index

De Coster Jean-Baptiste 179 De Cyrène Simon 191 De Flahaut Charles 188 De Forbin-Janson Charles 188 De Ghaisne Louis Auguste, comte de Bourmont 159, 166 De Goeswin Charles 142 De Gorge Henri 88 De Grouchy Emmanuel 166, 168, 182, 188, 191, 211, 212, 214, 216 De Hanovre Georges 189 De Hanovre Georg Ludwig, voir Georges Ier De Hoensbroeck César-Constantin, prince-évêque de Liège 31, 40 De Hongrie Marie, gouvernante des Pays-Bas 52 De la Marck Érard, prince-évêque de Liège 66 De la Tour d’Auvergne GodefroyCharles-Henri 28, 29 De Longchamps Fastré 83 De Longchamps Marie-Catherine 83 De Longchamps Marie-Françoise 83 De Lorraine Charles-Alexandre, gouvernant des Pays-Bas 52, 128 De Manderscheidt Guillaume, princeabbé de Stavelot-Malmedy 53, 61 De Méan François-Antoine, princeévêque de Liège 39, 40, 52, 123 De Mercy-Argenteau-Dochain François-Joseph-Charles 159 De Méricourt Théroigne 29, 30 De Mesgrigny Adrien 188 De Moreau 189 De Nassau Frédéric 199, 200 De Nuremberg Conrad II 129 De Prelle de la Nieppe Auguste 154 De Prusse Auguste 217 De Rasse Charles Henri Joseph 153 De Riquet François, prince de Chimay 107 De Rodoan Marie Félicité 138 De Roisin François 135 De Rouillé Auguste 154 De Rouillé Édouard 154 De Saxe-Weimar Charles-Auguste 138 De Sayve Jules-Joseph 154 De Sélys-Longchamps Michel-Laurent 83 De Sélys-Longchamps Waltère 83 De Senzeilles Arnould 154 De Stolberg-Wernigerode Henry 164 De Thierry Charles 150 De Velbrück François-Charles, princeévêque de Liège 31, 110, 124, 125 De Wurtemberg Catherine 191 Debève Benoit-Joseph 154 Debève Jean-Baptiste 154 Defrance Léonard 118

Dejean Jean-François Aimé 188 Declercq Oscar 171 Deleplanque Jean-Baptiste 153 Delius Christian 164 Demanet Charles-Alexis-Joseph 78 Demanet Victor 204 Demulder Augustin 191, 192 Desenfans Albert 191 Desoer Charles 107 Desmoulins Camille 30 Desmousseaux Antoine 59, 67, 68 Destrée Jules 32 Desvarreux Raymond 198 Dethier Laurent-François 26 Dethier Pierre-Jean-Baptiste 96 Dewez Laurent-Benoît 54, 90, 112 Di Quintana Bellini Trinchi Luigi 188 Dianous de la Perrotine Ch. 42 Digneffe Barthélemy 27, 58, 120 Dony Jean-Jacques Daniel 127 Douha Henri 81, 98 Drouet d’Erlon Jean-Baptiste 172-174, 189, 190, 209 Drouot Antoine 188 Du Chastel de la Howardries Albéric 135 Dubois Aimé 83 Dubois Maurice 204 Duckers Auguste 77 Duhesme Philibert 193, 205, 208 Dumont Joseph 199 Dumoulin Louis 198 Dumouriez Charles-François 29, 31-37, 40, 41, 51, 67, 71, 124, 125, 142, 157, 159 Dupont de l’Étang Pierre 149 Durutte Pierre François Joseph 179, 190, 207 Duval de Beaulieu Constant 94, 148 Duval de Beaulieu Dieudonné 148 Duval de Beaulieu de Blaregnies Édouard 148 Duvivier Charles 147 Duvivier Ignace-Louis 38, 127, 146, 147 Duvivier Philippe-Ghislain 147 Duvivier Vincent 146, 147 Éracle, évêque de Liège 121, 123 Ermesinde, comtesse de Luxembourg 48, 114 Fabre d’Églantine 30, 121 Fabry Jacques-Joseph 25, 31, 142 Fain Agathon Jean François 127, 188 Ferrand 34 Fitzgerald Richard 186, 196, 201 Fleischman Hector 204 Flémal Bertholet 118 Fleury de Chaboulon Pierre Alexandre 188 Fonson Emmanuel-Henri 33 Fontaine de Fromentel Charles Antoine Joseph 147

Fouler de Relingue Albert Louis Emmanuel 188 Fraser of Morar William 183 François Ier, empereur d’Autriche 39 Frédéric Ier, roi de Wurtemberg 191 Frédéric III, roi de Prusse 187 Frédéric-Guillaume II, roi de Prusse 27 Frédéric-Guillaume III, roi de Prusse 196 Fyon Edmond 31 Fyon Jean-Joseph 25, 31 Garnier Jean-Baptiste-Étienne 127, 129 Gaspar Jean-Marie 32 Geefs Guillaume 199 Georges Ier, roi d’Angleterre 196 Georges IV, roi d’Angleterre 187 Gérard Louis 27 Gérard Maurice-Étienne 171, 172, 188, 196, 208, 212 Gérôme Jean-Léon 203 Girard Jean-Baptiste 169, 170 Goblet d’Alviella Albert Joseph 137, 138 Goblet d’Alviella Eugène 138 Goblet d’Alviella Louis 137 Godonnesche Sébastien 88 Goffin Charles 151, 152 Goffin Hubert 140, 105, 106 Goffin Mathieu 105 Gordon Alexander 186, 194-196 Gosuin Jean 92, 93 Gourdet Henri 150 Gourdet Louis 150 Gourgaud Gaspard 188 Grouchy, voir De Grouchy Guillaume III, roi des Pays-Bas 199 Gunning George Orlando 191, 201 Hamilton-Gordon George, comte d’Aberdeen 195, 196 Haquin Honoré Alexandre 45 Hardempont Jean-Baptiste 129 Hay Alexander 200 Hayme de Bomal Jean-Baptiste 58 Hennekinne Michel Joseph 147 Hennessy Daniel-Patrice 92 Hérain Jean-Joseph 109 Hesse Nicolas 139 Hirn François-Joseph, évêque de Tournai 64 Hollert 188, 212 Howard Frederick 201 Hoyaux Émile 146 Huchet de la Bedoyère Charles 188 Hugo Victor 204 Hulot Étienne 207, 208 Ingres Jean Auguste Dominique 60, 61 Jacmin Christophe 145 Jacquiez Pierre 154 Jansen Jean-Mathias 133 Jardon Henri-Antoine 130 221


Sur les traces de la Wallonie française

Jésus 191 Joseph II, empereur germanique 11 Jourdan Jean-Baptiste 41, 43, 47, 109, 168 Kemlin François 89 Kléber Jean-Baptiste 41, 42 Koenig Julien 124 Kuntz Jean-Pierre 154 L’Olivier Jean-Nicolas 143 La Bedoyère, voir Huchet de la Bedoyère La Fayette, Gilbert du Mortier de 32, 39, 109 Lambeaux Jef 138 Lamotze Jasmin 47 Larrey Dominique 109, 188 Le Capitaine Jacques 171, 172 Le Pestre de Vauban Sébastien 134 Leboutte Jean 143 Lebrun Anne-Charles 188 Ledoyen Henri-Joseph 138, 139 Lefebvre Piat François Joseph 95 Lejéas François-Antoine, évêque de Liège 120 Lelièvre Auguste 89 Léopold Ier, roi des Belges 6, 109, 137, 143, 150 Léopold II, roi des Belges 91 Lescarts Jean 127 Letort Louis Michel 167 Ley Manuel 204 Loison Louis-Henri 51, 113 Loix Désiré-Joseph 138 Louis XIV, roi de France 28, 134, 168 Louis XVI, roi de France 37, 109, 124, 129, 138, 164 Louis XVIII, roi de France 38, 88, 143, 144, 164, 193 Louis-Napoléon Bonaparte, voir Napoléon III Louis-Philippe Ier, roi des Français 174, 212 Lozet Jean-Hubert 154 Malespina Louis-Ferdinand 198 Malherbe Jean-Antoine 147 Malherbe Pierre-Joseph 93 Marceau François-Séverin 45 Maret Hugues-Bernard 188 Mathys Pierre-Nicolas 89 Mayer Jean Adam 45 Meir 198 Mercer Alexander Cavalie 191, 192 Mercx de Corbais Édouard 133, 134, 138, 176 Meunier Jean-Joseph 140 Micoud d’Umons CharlesEmmanuel 68, 105, 125, 164 Miggiano Giuseppe 43 Milhaud Édouard Jean-Baptiste 188, 207, 208 Monge Gaspard 111, 130 Mongin Pierre-Antoine 83 Moore John 210 Morand Charles-Antoine 188 Mottet Lutgarde 114 Mouton Georges 188 222

Nagelmackers Gérard 125 Napoléon Ier, empereur des Français 4, 5, 8, 29, 31, 32, 39, 52, 57, 59-62, 64, 65, 77, 78, 83, 87-89, 92, 94, 95, 102, 103, 105-108, 111, 113-116, 118, 125127, 129, 130, 133, 135, 137, 138, 140, 143-145, 147, 149-151, 153, 154, 159, 160, 163-168, 170-172, 174, 177, 179, 187-191, 194, 197, 198, 205, 207, 208, 217 Napoléon III, empereur des Français 133, 134, 140, 143, 144, 172, 191 Ney Michel 166, 172, 181, 188-191, 198 Nicolas Jean-Baptiste 205, 206 Ouwerx J. 114 Pack Denis 205 Paget Henry William 187 Palloy Pierre-François 128 Parmentier Philippe 149 Paulée Jean-Baptiste 112 Pelet Jean-Jacques 188 Pellapra Émilie 107 Percelat Franz-Antoine 72 Pérès de la Gesse Emmanuel 129 Petit Jean-Martin 188 Philippe II, roi d’Espagne 129 Picton Thomas 208, 209 Pie VII, pape 118 Piou Jacques-François 89 Pirenne Henri 57 Pirenne Jacques-Henri 186 Pirson François 28 Pisani de la Gaude Charles, évêque de Namur 140, 148, 149 Plunkett Francis 210 Poppon, abbé de Stavelot-Malmedy 53 Puissant Ferdinand 166 Radet Étienne 188 Raikem Pierre 143, 144 Ramsay William Norman 203 Réginard, évêque de Liège 123 Regnier Étienne-Joseph 139, 140 Reille Honoré Charles 173, 174, 188, 193 Renard Bruno 77, 95 Renoz Jacques-Barthélemy 70, 114 Richilde, comtesse de Hainaut 94 Robe William Livingstone 201, 202 Robespierre Maximilien 15, 32, 44 Robiquet Pierre-Victor 198 Rogniat Joseph 188 Romme Charles-Gilbert 30 Roufflart François 90 Roussille Jean-Isaac 205, 206, 207 Rowley Heyland Arthur 186 Rutxhiel Henri 72 Saint Bernard 54 Saint Landelin 52 Saint Remacle 53

Saint-Martin Louis-Pierre 108 Samuël Charles 32 Samyn Adolphe 138 Schaumann W. 189 Scherer Barthélemy 45 Seutin Louis 109, 194 Simmer François Martin Valentin 205, 207 Simonis Henri 79, 81 Simonis Jean-François 96, 125 Sion Bastien 129 Soult Jean-de-Dieu 188 Stables Edward 200, 209, 210 Stévenotte Bernard 62 Stevens Corneille 140, 149 Stiénon Jean Joseph Xavier 154 Stiénon Pierre 133 Tallien Jean-Lambert 107 Tascher de la Pagerie Stéphanie 138 Tattet Jacques 208, 209 Teichman Théodore 72 Thiry Louis 45 Thuillier Pierre 144 Thys Célestin, prince-abbé de Stavelot-Malmedy 29 Tiberghien Désiré-François 94, 95 Tranchot Joseph 102-104 Uxbridge, voir Paget Van de Kerckhove d’Hallebast Léopold 154 Van den Kerckhove Antoine 41 Van der Burch Charles Albert 138, 178 Van der Burch Louis-Charles 153 Van der Straeten Charles 197 Van Geel Jean-Louis 197 Van Haren Claude François 200 Van Landewyck Jean-Charles 144 Van Merlen Jean-Baptiste 202, 203 Van Ophem Frantz 198 Van Pallandt Willem 201 Vauban, voir Le Pestre de Vauban Sébastien Verhoeven Jean 203, 204 Vincent Charles Damas 146 Vinck 198 Vivian Richard Hussey 191 Von Blücher Gebhard 164, 167, 168, 170, 171, 179, 193, 196, 211, 217 Von Bülow Friedrich Wilhelm 205, 207, 208, 213 Von Hiller Johann 205 Von Lottum Heinrich 164, 181 Von Marschalk H. 189 Von Ompteda Christian Friedrich Wilhelm 179, 190, 207 Von Pirch Georg 170 Von Rovertson F. 189 Von Schwerin Guillaume 213 Von Thielmann Johann Adolf 181, 182


Index

Von Vincent Nikolaus Karl 138 Von Wurme C. 189 Von Zastrow Heinrich 214-216 Von Zieten Hans Ernst 190 Walton Ellis Henry 186, 200, 201 Warocqué Nicolas 128 Weider Ben 172 Wellesley Arthur, duc de Wellington 146, 167, 172, 177, 179, 182, 185-187, 189, 190, 193, 195, 196, 198, 199, 201, 204, 207, 209, 210, 216 Wellington, voir Wellesley Arthur Wery Jean-Nicolas 144, 145 Wiener Leopold 199 Ysebrant de Lendonck Camille 153 Zaepffel Jean-Évangéliste, évêque de Liège 118, 120 Zenowicz Georges 188

Index des noms de lieux Achet 140 Aiseau 48 Aiseau-Presles 14, 18, 22, 48 Ajaccio (F) 191 Amay 14, 22, 116, 118, 133 Amel-Amblève 14, 22 Andenne 14, 19, 22, 133 Anderlues 14, 22 Andrimont 113 Anhée 14, 22, 133 Ans 14, 22, 104-106 Anthisnes 14, 22 Antibes (F) 163, 173 Antoing 14, 22, 159 Anvers 18, 61, 65, 196, 211 Arlon 14, 22, 48, 51, 121, 145 Arquennes 102 Arzfeld (D) 19 Assesse 14, 22, 159 Ath 14, 22, 35, 40, 101, 154 Athus 134 Attert 14, 22 Aubange 14, 22, 134 Aubel 14, 22 Aubry-du-Hainaut (F) 138, 153 Autelbas 48 Awans 14, 22, 33 Ayeneux 39, 151 Aywaille 14, 22, 45, 159 Baelen 14, 22 Bagnères-de-Bigorre (F) 106 Baisy-Thy 172, 174, 176-179, 203 Bassenge 14, 19, 22 Basse-Wavre 211

Bastogne 14, 22, 69, 139 Bayreuth (D) 173 Beaumont 11, 14, 18, 22, 164, 165 Beauraing 14, 22, 49, 77, 89 Beauvechain 14, 18, 22, 159 Beho 19 Belfast (UK) 186 Belœil 14, 22 Ben-Ahin 19, 107 Berloz 14, 22 Bernissart 14, 22, 89 Bertogne 14, 22 Bertrix 14, 19, 22 Beyne-Heusay 14, 22, 43, 44, 159 Bexhill-on-Sea (UK) 190 Bierges 211, 212 Bierwart 19 Bièvre 14, 22 Bilstain 113 Binche 14, 22, 38, 41, 53, 106, 107 Bioul 133 Bitburg (D) 19 Blegny 14, 22 Blehen 140 Bodegnée 118 Boignée 19 Bois-de-Lessines 154, 159 Bois-et-Borsu 19 Bomal (Durbuy) 19 Boneffe 216 Bossières 78 Bordeaux (F) 107 Bouillon 14, 19, 22, 28, 29, 73, 74, 142 Bouillon (Havelange) 101 Boussu 14, 22, 88 Bovigny 19, 90 Braga (P) 130 Braibant 123 Braine-l’Alleud 14, 18, 22, 179, 182, 185, 186, 190-192, 197 Braine-le-Château 14, 18, 22 Braine-le-Comte 14, 18, 22 Braives 14, 22 Brakel 18 Brugelette 14, 22 Bruges 61, 72 Brunehaut 14, 18, 22, 135 Bruxelles 15, 18, 39, 57, 58, 62, 65, 72, 89, 109, 115, 137, 140, 153, 164, 167, 171, 172, 177, 179, 182 Brye 167 Büllingen-Bullange 14, 19, 22 Burdinne 14, 22 Burg-Reuland 14, 22 Burnontige 159 Bütgenbach 14, 22, 137

Buvrinnes 41 Celles 14, 22 Cerfontaine 14, 22 Chapelle-lez-Herlaimont 14, 18, 22 Charleroi 14, 18, 22, 35, 42, 43, 52, 58, 89, 165167, 170, 172, 174, 177, 179, 210, 211, 217 Charleville (F) 92 Chastre 14, 22 Châtelet 14, 18, 22, 42 Chaudfontaine 14, 22 Chaumont-Gistoux 14, 22 Chièvres 14, 22 Chimay 14, 22, 107, 164 Chiny 14, 22 Cierreux 90 Ciney 14, 22, 123, 154 Clabecq 154 Clavier 14, 22 Colfontaine 14, 22 Comblain-au-Pont 14 22, 45 Comines-Warneton 14, 18, 19, 22 Cornesse 147 Corswarem 19 Courcelles 14, 18, 22 Court-Saint-Étienne 14, 22, 137, 138 Couvin 14, 22, 164 Crisnée 14, 22 Cuesmes 32 Dalhem 14, 22 Daverdisse 14, 19, 22, 159 Denée 133, 134 Dinant 14, 22, 49, 58, 111, 214 Dison 14, 22, 113, 130 Doische 14, 22 Dolembreux 142 Donceel 14, 22 Douai (F) 145, 154, 172, 207 Dour 14, 22, 89, 164 Dudeldorf (D) 19 Durbuy 14, 19, 22 Eben-Emael 19 Écaussinnes 14, 22, 138 Écaussinnes-Lalaing 138 Éghezée 14, 22, 216 Ellezelles 14, 22, 138 Élouges 89 Elsenborn 137 Enghien 14, 22, 77, 138 Engis 14, 22 Érezée 14, 22, 138, 139 Erquelinnes 14, 22, 172, 173 Esneux 14, 22, 45 Estaimpuis 14, 18, 22 Estinnes 14, 22 Étalle 14, 22 223


Sur les traces de la Wallonie française

Eupen 14, 22, 164 Everbeek 18 Evere 185, 186, 196, 209, 210 Ezemaal 19 Faimes 14, 22 Farciennes 14, 18, 22, 167 Fauvillers 14, 22, 69, 139 Fayt-le-Franc 159 Fernelmont 14, 19, 22 Ferrières 14, 22, 139, 159 Fexhe-le-Haut-Clocher 14, 22 Flémalle 14, 22, 113 Fléron 14, 22 Fleurus 4, 8, 14, 15, 18, 22, 25, 37, 41, 43-45, 47, 48, 51, 52, 57, 62, 66, 110, 124, 139, 140, 165, 167-169, 171 Flobecq 14, 22 Florée 159 Floreffe 14, 22, 140, 149 Florennes 14, 22, 159, 164, 166 Florenville 14, 22, 50, 69 Fontaine-l’Évêque 14, 22 Fontaine-Valmont 166 Forville 19 Fosses-la-Ville 14, 22, 163 Fourons 19 Frameries 14, 22 Franc-Waret 19 Frasnes-lez-Anvaing 14, 22 Frasnes-lez-Gosselies 176 Froidchapelle 11, 14, 18, 22 Gedinne 14, 22, 164 Geer 14, 19, 22 Gembloux 14, 22, 78, 112, 211 Genappe 14, 22, 159, 163, 174, 176179, 181, 187, 191-193, 205 Gerpinnes 14, 18, 22 Gérouville 145 Gesves 14, 22 Ghislenghien 101 Gilly 166, 167 Givet (F) 72, 114, 214 Gouvy 14, 19, 22, 90 Gozée 53 Grâce-Hollogne 14, 22, 120 Grandrieu 154 Grez-Doiceau 14, 22 Habay 14, 22 Habay-la-Neuve 159 Ham-sur-Heure-Nalinnes 14, 18, 22 Hamoir 14, 22 Hamois 14, 22, 140 Hampteau 158, 159 Hannut 14, 22, 116, 140 Hansez 129 Harre 19 224

Hastière 14, 22 Hattain 159 Haut-Fays 159, 160 Havelange 14, 22, 101, 159 Havré 79, 148 Hélécine 14, 22, 90 Henri-Chapelle 116 Hensies 14, 22 Herbeumont 14, 22 Hermalle-sous-Argenteau 150 Héron 14, 22 Herstal 14, 22, 92, 93 Herve 14, 22, 123, 159 Hingeon 19 Hodimont 96, 103 Hognoul 33 Hollain 135 Honnelles 14, 22 Hormeadbury (UK) 210 Hornu 88 Horrues 218 Hotton 14, 22, 159 Houffalize 14, 22, 69 Hougoumont 182 Houyet 14, 22 Huy 14, 22, 40, 41, 58, 65, 66, 107, 113, 114, 159 Hyon 145 Incourt 14, 22 Ittre 14, 18, 22 Izier 19 Jalhay 14, 22, 154, 159 Jauchelette 87 Jehay 40, 41, 116, 118 Jemappes 8, 25, 32-41, 44, 48, 49, 51, 128, 146, 157, 210 Jemeppe-sur-Sambre 14, 22 Jodoigne 14, 22, 140, 208 Joli-Bois 209 Jumet 43, 166, 174, 175 Juprelle 14, 22 Jurbise 14, 22 Kelmis-La Calamine 14, 22 Kinkempois 107 Kronenburg (D) 19 La Bruyère 14, 22 La Gleize 159 La Hulpe 14, 22, 91, 92 La Louvière 14, 22 La Roche-en-Ardenne 14, 22, 159 Labuissière 41, 42 Lambusart 167 Lanaye 19 Landen 19, 40 Landenne 19, 133 Laon (F) 218 Lasne 14, 22, 178, 189, 194, 196, 203-205, 208, 213

Lasne-Chapelle-Saint-Lambert 213 Latour 54 Leers-et-Fosteau 173, 174 Léglise 14, 22 Leffe 40, 49, 50 Leipzig (D) 4, 133, 146-148, 153, 154, 163, 166 Le Mesnil 103 Lens 14, 22 Le Quesnoy (F) 88 Le Rœulx 14, 22 Le Roux 123 Les Avins 19 Les Bons Villers 14, 18, 22, 176 Lessines 14, 22 Leuze-en-Hainaut 14, 22 Libin 14, 22 Libramont-Chevigny 14, 22 Liège 4, 6, 18, 22, 25, 27, 30-34, 39, 40, 44, 45, 47, 51, 57-61, 65-68, 71, 72, 74, 78, 83, 87, 92, 93, 104, 105, 107, 108, 110, 111, 113115, 118-121, 123-127, 139-146, 157, 163, 164 Lierneux 14, 22 Ligny 8, 163, 165, 166-174, 179, 181, 200, 207, 208, 210 Limal 120, 212, 213 Limbourg 14, 22 Lincent 14, 22 Lobbes 14, 18, 22, 52, 166, 173 Longchamps 83, 84 Lontzen 14, 22 Lorcé 159 Luxembourg (L) 39, 51, 58, 62, 63, 139, 150 Maestricht (NL) 19, 39, 45, 72, 133 Malmedy 14, 22, 27, 29, 58, 61, 164 Manage 14, 22 Manderfeld 19 Manhay 14, 19, 22 Marche-en-Famenne 14, 22, 58, 68, 69, 122, 159 Marchienne-au-Pont 42, 43, 174 Marchin 14, 19, 22 Marcourt 29, 30 Mariembourg 11, 19, 154, 164, 217, 218 Martelange 14, 22 Maubert-Fontaine (F) 218 Meix-devant-Virton 14, 22, 145 Merbes-le-Château 14, 22, 41, 164, 166 Messancy 14, 22 Mettet 14, 22 Mézières (F) 218 Modave 14, 22 Moignelée 102 Momignies 14, 22 Mons 14, 22, 32-38, 47, 48, 57, 65, 71, 72, 77, 79, 89, 94, 115, 122, 127-129, 138, 145-148, 157, 163 Mont-de-l’Enclus 14, 18, 22 Mont-Saint-Guibert 14, 22, 179


Index

Mont-Saint-Jean 186, 190, 203, 204 Montigny-le-Tilleul 14, 18, 22, 191 Morlanwelz 14, 22, 52, 128 Mouscron 14, 18, 19, 22 Munich (D) 173 Musson 14, 22 Naast 130 Namur 14, 19, 22, 39, 57, 58, 61-63, 65, 7274, 87, 108, 115, 124, 129, 140, 148, 149, 163, 167, 179, 182, 211, 212, 214-216 Nandrin 14, 22 Nassogne 14, 22 Neerhespen 19 Neerwinden 4, 31, 35, 38-40, 51, 91, 124 Neuerburg (D) 19 Neufchâteau 14, 22, 58, 69, 150, 154 Neupont 62 Neupré 14, 22 Nil-Saint-Martin 115, 159 Nil-Saint-Vincent 115 Nivelles 14, 22, 39, 54, 58, 70, 109, 154, 191, 192, 194, 216 Obourg-Saint-Denis 94 Ohey 14, 22 Olne 14, 22, 129 Onhaye 14, 22 Opheylissem 90 Oreye 14, 22 Ormeignies 154 Orp-Jauche 14, 22 Otrange 19 Ottignies-Louvain-la-Neuve 14, 22 Ouffet 14, 22 Oupeye 14, 22, 150 Overhespen 19 Pailhe 19 Paliseul 14, 19, 22, 28, 69, 159 Paris (F) 25-31, 38, 40, 67, 72, 77, 88, 89, 91, 92, 95, 108, 109, 111, 128, 130, 133, 137, 138, 142, 146, 163-166, 170, 173, 174, 191, 204, 211, 217, 218 Pecq 14, 18, 22 Pepinster 14, 22 Péruwelz 14, 18, 22 Perwez 14, 22 Pest (HU) 106, 107 Petit-Waret 133 Philippeville 11, 14, 19, 22, 39, 129, 164, 217, 218 Plancenoit 179, 182, 186, 189, 193197, 203-205, 208, 209 Plombières 14, 22 Polleur 25-27 Pommerœul 89 Pont-à-Celles 14, 18, 22 Pontillas 19 Porcheresse 159 Profondeville 14, 22

Quaregnon 14, 22 Quévy 14, 22 Quiévrain 14, 22, 32 Raeren 14, 22 Ramillies 14, 22 Rebecq 14, 18, 22 Reims (F) 170, 172, 214 Remicourt 14, 22 Remouchamps 45, 46 Rendeux 14, 22, 29 Resteigne 154 Rixensart 14, 22, 129 Rochefort 14, 22, 32, 39, 109 Rochefort (F) 149, 163 Roclenge-sur-Geer 19 Rocroi (F) 218 Rongy 135, 136 Rossignol 152, 153 Rouvroy 14, 22 Roy 159 Rumes 14, 22 Saint-Amand 165, 169 Saint-Georges-sur-Meuse 14, 22 Saint-Ghislain 14, 22, 88 Saint-Hubert 14, 19, 22, 57, 58, 62, 63 Saint-Léger 14, 22 Saint-Nicolas 14, 22, 105 Saint-Rémi 159 Saint-Sébastien (E) 137 Saint-Vith 14, 19, 22, 164 Sainte-Ode 14, 22 Sambreville 14, 22, 102 São Martinho do Campo (P) 130 Saragosse (E) 150, 153 Schleiden (D) 19 Schönberg 19 Sclessin 105, 106 Seilles 19, 133, 134 Seneffe 14, 18, 22, 102 Seraing 14, 22, 25, 87, 89, 110, 111, 130, 164, 197 Serinchamps 154 Sibret 69 Silly 14, 22 Sivry-Rance 14, 22, 154 Soignies 14, 22, 130, 218 Soissons (F) 214 Solre-sur-Sambre 172-174 Sombreffe 14, 19, 22, 163, 167, 168, 170-172, 176 Somme-Leuze 14, 22 Sougné-Remouchamps 45, 46 Soumagne 14, 22, 39, 151 Spa 14, 22, 25, 26, 141 Sprimont 14, 22, 45 Stavelot 14, 22, 27, 29, 53 Stoumont 14, 22, 159

Strainchamps 139 Sugny 19 Tellin 14, 22 Tenneville 14, 22 Theux 14, 22, 25, 27 Thimister-Clermont 14, 22 Thuin 14, 18, 22, 41, 53, 54, 115, 165, 173 Tilly 54 Tinlot 14, 22 Tintigny 14, 22, 151-153 Tournai 14, 18, 22, 35, 36, 57, 58, 63-65, 70, 77, 95, 111, 123, 135, 137, 153, 154 Trois-Ponts 14, 22 Trooz 14, 22 Tubize 14, 18, 22, 154 Valenciennes (F) 40, 88, 144, 174 Vaux-sous-Chèvremont 43 Vaux-sur-Sûre 14, 22 Verlaine 14, 22 Verviers 4, 6, 14, 22, 25, 31, 40, 41, 70, 71, 79-82, 87, 95-98, 103, 130, 147 Vezin 19 Vielsalm 14, 19, 22 Vieuxville 139 Vieux-Genappe 181, 187, 191 Villers-devant-Orval 50 Villers-la-Ville 14, 18, 22, 48, 54, 175 Villers-le-Bouillet 14, 22 Villers-Sainte-Gertrude 19 Viroinval 14, 22, 103 Virton 14, 22, 54, 69 Visé 14, 22 Vonêche 77, 89 Vresse-sur-Semois 14, 19, 22 Vyle-et-Tharoule 19 Waimes 14, 22, 103, 103 Walcourt 14, 22 Walhain 14, 22, 115, 188 Walhain-Saint-Paul 188, 189 Wanze 14, 22 Waremme 14, 22, 83, 159 Wasmes 32 Wasseiges 14, 22 Waterloo 4, 8, 14, 22, 91, 109, 127, 129, 137, 140, 143, 146, 153, 154, 159, 163-167, 172, 173, 179, 182, 183, 185-187, 189-192, 194-204, 207-213, 217 Wavre 14, 22, 104, 120, 140, 153, 154, 163, 179, 181, 182, 186, 193, 196, 211, 212 Ways 193, 205 Welkenraedt 14, 22, 116 Wellin 14, 19, 22, 62, 157, 159 Woedcq 138 Wonck 19 Worcester (UK) 186 Yvoir 14, 22 225


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229


TABLE DES MATIÈRES

PRÉFACE ..................................................................................................................................................................................................................................

4

REMERCIEMENTS ................................................................................................................................................................................................................

7

INTRODUCTION ...................................................................................................................................................................................................................

8

UN NOUVEAU DÉCOUPAGE ADMINISTRATIF DE LA WALLONIE ......................................................................................................... Un état de la Wallonie vers 1789 .................................................................................................................................................................................................. - Carte des anciens « pays » de Wallonie ........................................................................................................................................................................................... Les bouleversements de la période française................................................................................................................................................................................ La carte de la Wallonie sous le régime français............................................................................................................................................................................ - L’organisation du Nord de la France en départements .................................................................................................................................................................... - Carte de la Wallonie française ......................................................................................................................................................................................................

9 11 12 15 15 16 20

JEMAPPES ET FLEURUS : LES DEUX OCCUPATIONS FRANÇAISES ........................................................................................................ À l’ombre de la Révolution française ........................................................................................................................................................................................... La bataille de Jemappes et l’entrée de Dumouriez en Wallonie ................................................................................................................................................... Quelques traces liées à la première occupation française de la Wallonie ....................................................................................................................................... La bataille de Fleurus et le retour en force des Français ............................................................................................................................................................... La seconde occupation et la mise en place d’un régime nouveau ................................................................................................................................................ Les traces de la campagne destructrice des armées françaises en Wallonie ..................................................................................................................................

23 25 32 33 41 44 48

LES INSTITUTIONS FRANÇAISES EN WALLONIE..................................................................................................................................... Préfectures et sous-préfectures..................................................................................................................................................................................................... Institutions judiciaires ................................................................................................................................................................................................................. Les écoles centrales...................................................................................................................................................................................................................... Institutions diverses .....................................................................................................................................................................................................................

55 57 65 71 73

QUELQUES MONUMENTS WALLONS CONSTRUITS PENDANT LA PÉRIODE FRANÇAISE ............................................................. 75 LES PRÉMICES DE LA RÉVOLUTION INDUSTRIELLE ............................................................................................................................. 85 MONUMENTS ET SITES DIVERS LIÉS À LA PÉRIODE FRANÇAISE ....................................................................................................... 99 Bornes, frontières et bâtiments de l’octroi .................................................................................................................................................................................... 101 Monuments liés à des personnages historiques de la période française ....................................................................................................................................... 104 Monuments anciens dont la vocation a évolué sous le régime français ........................................................................................................................................ 111 Napoléon en Wallonie ................................................................................................................................................................................................................. 113 La France et l’Église de la Révolution à l’Empire ........................................................................................................................................................................ 116 Souvenirs et réminiscences de la période française en Wallonie .................................................................................................................................................. 123 230


Table des matières

LE PATRIMOINE FUNÉRAIRE ........................................................................................................................................................................ 131 LE PATRIMOINE NATUREL ............................................................................................................................................................................ 155 Les arbres de la liberté ................................................................................................................................................................................................................. 157 Les arbres « napoléoniens » ......................................................................................................................................................................................................... 159 LA CAMPAGNE DE 1815 ET SON RICHE PATRIMOINE COMMÉMORATIF ........................................................................................... 161 Quelques traces liées à la Restauration ........................................................................................................................................................................................ 164 La bataille de Ligny ..................................................................................................................................................................................................................... 165 La bataille des Quatre-Bras ......................................................................................................................................................................................................... 172 La bataille de Waterloo .............................................................................................................................................................................................................. 179 Les combats de Wavre et de Namur et la retraite de l’empereur ................................................................................................................................................... 211 INDEX ................................................................................................................................................................................................................. 220 Index des noms de personnes ...................................................................................................................................................................................................... 220 Index des noms de lieux............................................................................................................................................................................................................... 223 BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................................................................................. 226 TABLE DES MATIÈRES .................................................................................................................................................................................... 230

231


Le livre 1789. Plusieurs foyers de révolutions éclatent en Wallonie dont les plus célèbres sont la révolution liégeoise et la révolution brabançonne. En 1792 et 1794, les armées républicaines pénètrent à deux reprises sur le sol wallon et entament l’occupation de nos territoires. Les Français préparent l’annexion, officiellement entérinée par la Convention le 1er octobre 1795. Ce rattachement marque irrémédiablement la fin de l’Ancien Régime dans nos contrées après plusieurs années de troubles révolutionnaires et de campagnes militaires. Suivent près de vingt années de régime français, caractérisées par une série de bouleversements qui changent radicalement la face de l’histoire et laissent des traces encore perceptibles aujourd’hui. Si cette période a été étudiée sous de nombreux aspects, les traces matérielles qui en subsistent n’avaient jamais fait l’objet d’un recensement systématique sur l’ensemble du territoire de la Wallonie actuelle, si ce n’est pour la campagne de 1815. Le bicentenaire de la bataille de Waterloo était l’occasion de rappeler les faits liés à la chute de Napoléon mais surtout les vingt années qui l’ont précédée. Grâce à de nombreuses notices richement illustrées et à deux cartes inédites de la Wallonie sous le régime français, le lecteur partira sur les traces de cette époque qui sont parvenues jusqu’à nous. Cet ouvrage permettra au lecteur de découvrir ou redécouvrir par l’intermédiaire de ces éléments patrimoniaux l’histoire de nos contrées entre 1789 et 1815, autant de témoignages, quelquefois bien discrets, que nous ont laissés la République, le Consulat et l’Empire.

L’auteur Licencié et agrégé en Histoire de l’Université de Liège, Frédéric Marchesani poursuit depuis 2007 ses activités d’historien au sein de la cellule Publications de l’Institut du Patrimoine wallon (IPW), tout en étant collaborateur scientifique au Trésor de la cathédrale de Liège. Il est déjà l’auteur de divers ouvrages, dont trois édités par l’IPW : Sur les traces du Mouvement wallon (avec Freddy Joris, 2009), Le Théâtre de Liège. Du Théâtre royal à l’Opéra royal de Wallonie (2012) et Sur les traces des anciens « pays » de Wallonie (2013).

Prix de vente : 35 € ISBN : 978-2-87522-151-3

Institut du Patrimoine wallon (IPW) 79, rue du Lombard B-5000 Namur


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