Hors-série n°6 AWALA YALIMAPO

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DOM/S : 9,90€ - CAL/S : 1250 CFP– POL/S : 1300 CFP

L 19734 - 6 H - F: 9,50 € - AL

HORS-SéRie 06

n°06HS - Septembre 2019

Yalimapo Awala


ya l i m a p o HORS-SéRie 06

n°06HS - Septembre 2019

Awala


édito

▲ Nuit du Sanpula 2019. Photo Rasied Mursallin

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n décembre 1984, les Amérindiens de Guyane se rassemblent à Aouara et s’adressent au gouvernement français. Le message est clair : « nous voulons demeurer Amérindiens et conserver notre langue, notre culture, nos institutions propres ». Cette prise de parole et les actions qui suivirent ont conduit, en décembre 1988, à la création de la commune de Awala-Yalimapo. Aujourd’hui, Awala-Yalimapo fête ses 30 ans. Un anniversaire qui donne l’occasion de faire un bilan, et qui a conduit à la publication de ce numéro hors-série de Une saison en Guyane. Ces articles, destinés à la fois aux habitants de la commune ainsi qu’aux lecteurs extérieurs en Guyane et dans l’Hexagone, apportent un éclairage sur la culture, l’histoire et la société contemporaine kali’na. La commune a-t-elle aidé ses habitants à « demeurer Amérindiens » ? Au fil des pages se dessinent quelques éléments de réponses à ce vaste débat, initié lors de la déclaration de décembre 1984. Logo Final

Mais parfois les images apportent des réponses plus claires que les mots. La photo de cet enfant métis lors de la dernière Nuit du Sanpula en est l’illustration. Il parle français, kali’na et comprend le créole. Il danse en souriant au premier rang, face aux chanteurs. Le ankɨsa à sa taille se balance au rythme des tambours. Il est Kali’na. Il est Guyanais. Il vit à Awala-Yalimapo. Le comité de rédaction

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4 | Cartographie de la commune

6 | Le réveil des sanpula

36| Sur le chemin de l’école kali’na

60 | «Nous voulons demeurer Amérindiens.»

14| Kawana une longue histoire de voisinage

44 | L’ombre du shamane

66 | « So na libie de tapu CD9 »

90 | Une histoire de Awala-Yalimapo Une saison en

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Sommaire

20 | Ceux qui ont traversé

28 | Du sable (de la vase) & des Hommes

50 | Jeux Kali’na : par les moustaches du jaguar

72 | Portfolio : Oiseaux

96 | Visiter Awala-Yalimapo

100 | Les livres

80 | Être Kali’na demain

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La commune de Awala-Yalimapo

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wala-Yalimapo est souvent présentée comme une “ commune amérindienne ”. Si la majorité des habitants sont des Amérindiens kali’na, au niveau réglementaire Awala Yalimapo est une commune comme les autres. Toutefois, afin d’adapter le cadre réglementaire aux traditions et habitudes de vie kali’na, la municipalité a pris certaines dispositions. Depuis 1992, la quasitotalité de la commune est classée en Zone de droit d’usage collectif, ce qui permet aux habitants d’utiliser

leur territoire pour leur besoins quotidiens : abattis, chasse, pêche, collecte des palmes… De plus, sur Awala-Yalimapo le foncier est collectif et ne peut être acheté. Les habitants sont propriétaires de leur maison, pas du terrain. Les barrières autour des habitations sont aussi interdites. Par ailleurs, une partie du pouvoir du conseil municipal est partagé avec les chefs coutumiers. Par exemple, ce sont eux que l’on consulte en premier lorsque l’on souhaite construire sa maison sur la commune.

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Le rĂŠveil des

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sanpula K Le sanpula est le tambour traditionnel kali’na. Présent dans tous les foyers il y a encore quelques décennies, il tendait à disparaître de AwalaYalimapo au début des années 2000. Mais après le crépuscule des tambours vint la Nuit du Sanpula.

iyapane, Victor Kilinan, Nasja Lando… Awala est le village de grands wale yopotolɨ. Ces leaders des formations de tambour qui donnent le tempo et lancent, pendant toute une nuit, les chants repris ensuite pa r l ’ensemble du groupe. Pourtant cette musique disparaissait lentement de la commune. Il ne restait plus que quelques tambours et seuls de rares anciens savaient encore les fabriquer. Les chants se perdaient et n’étaient plus connus que d’un petit nombre de personnes. Ipakanamon, le seul groupe à jouer régulièrement du tambour traditionnel, avait cessé son activité. Or, le sanpula est un élément essentiel des cérémonies liées au deuil (voir encadré), qui sont au cœur de l’identité kali’na. À Awala-Yalimapo, les autorités coutumières et certaines grandes familles avaient œuvré à faire revivre ces cérémonies traditionnelles. Lors de ces évènements, il devenait nécessaire de faire venir des chanteurs et des tambours des autres villages amérindiens du territoire, comme Paddock ou Galibi. Car à cette même période, au Suriname, des groupes de sanpula jouaient régulièrement et enregistraient des disques. La musique de ces formations, comme Paremuru ou Mutusji, était écoutée et appréciée à Awala-Yalimapo. Face à cette situation, certains élus décident en 2010 de monter un programme afin de “ sauver ” les sanpula sur la commune. Ce projet comprend la création d’une école de tambour et de danse, appelée Yuwae, la fabrication de sanpula et le lancement d’une soirée musicale : la Nuit du Sanpula. Une saison en

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Kawana Une longue histoire de voisinage Les tortues marines font depuis toujours partie du quotidien des habitants de Awala-Yalimapo. Animal traditionnellement craint dont ils consommaient les œufs, puis animal étudié et protégé générant une activité touristique, kawana a joué un rôle important dans l’histoire du territoire.

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out à la fois craintes et respectées, longtemps ressource alimentaire et économique pour les villageois, les tortues marines n’ont cessé d’être présentes dans l’histoire du “ pays kali’na ” des estuaires de la Mana et du Maroni. Les esprits des tortues marines, ces êtres hybrides, aquatiques et terrestres, qui apparaissent dans la nuit sortant des profondeurs de l’océan, occupent ainsi une place significative dans les récits traditionnels que les anciens peuvent aujourd’hui encore délivrer, qui rappellent les risques liés à un comportement non respectueux des interdits qui les entourent. Depuis une trentaine d’années, les liens avec ces animaux ont sensiblement changé, notamment pour les générations qui ont participé aux opérations de préservation des tortues aux côtés des équipes non kali’na. Mais tous ont en mémoire les mises en garde de leurs aînés, inquiets de cette familiarité imprudente avec l’animal. Une ressource saisonnière Si dans la plupart des familles des villages kali’na on ne mangeait guère la viande des tortues marines, les œufs qu’elles pondent en quantité sur les plages étaient traditionnellement ramassés et consommés. De la même manière que les Kali’na désignaient une “ saison des toucans”, ou une “ saison des iguanes ”, il y avait une “ saison des tortues”, au cours de laquelle on savait que cette ressource deviendrait abondamment disponible pour la consommation familiale – œufs préparés en omelette ou boucanés - ou pour la vente à l’extérieur des villages. De fait, ce que les auteurs anciens appelaient la “ pêche à la tortue ” a été pratiquée tout au long de l’histoire de la Guyane, représentant une part marginale mais non négligeable des ressources vivrières de la colonie – pour la consommation locale ou pour l’approvisionnement des navires en viande salée. Et il n’y a, somme toute, pas si longtemps, alors que se fermaient les portes du Bagne à Saint-Laurent-du-Maroni au début des années 1950, l’administration pénitentiaire incitait toujours les Kali’na à capturer des tortues pour la nourriture des derniers bagnards ou pour l’approvisionnement de la porcherie de Saint-Laurent. Aujourd’hui, à Awala-Yalimapo, lorsque l’on débat des contraintes imposées par la protection de l’espèce, les plus anciens évoquent avec une certaine ironie cette époque, et rappellent  Au début des années 1990, la plage de Yalimapo accueillait la ponte de près de la moitié des tortues luths (kawana en kali’na) du monde. Photo Thierry Montford Une saison en Guyane HS-06

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ď ąSur la terrasse de Ferdinand AwatjalĂŠ le drapeau du Suriname figure en bonne place (photo Johan Chevalier)

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Ceux qui ont traversé

Lorsque la guerre civile du Suriname éclate, de nombreux Amérindiens des villages du bas Maroni viennent se réfugier de l’autre côté du fleuve, en Guyane. Ils deviennent alors les epatosan : « ceux qui ont traversé ». Une saison en

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Du sable (de la vase) & des hommes vivre sur un territoire mouvant

Vue aérienne du village de Awala, avec à gauche le bras mort de l’ancien estuaire de la Mana (octobre 2016). Photo Pierre-Olivier Jay

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L’image de Awala-Yalimapo est bien souvent associée à la culture kali’na et aux plages de sable accueillant la ponte des tortues marines. Si cette image semble immuable, force est de constater que le territoire côtier de la commune connaît depuis près d’un siècle des fluctuations importantes.

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Sur le chemin de Une saison en

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Aujourd’hui les enfants de Awala-Yalimapo bénéficient d’une école bilingue. Mais la scolarisation des jeunes kali’na du territoire n’a pas toujours été aussi respectueuse de leur culture. Le chemin aboutissant à cette école républicaine kali’na est le fruit d’un long combat après des années de souffrance.

l’école kali’na

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n 1882, l’école devient obligatoire et laïque en France. Pour les enfants kali’na l’école attendra un peu… et la laïcité plus encore. C’est au début des années 1930 que des religieux de Mana se rendent au village kali’na de la pointe Isère pour convaincre les parents de leur confier leurs enfants afin de les scolariser. L’école est alors bien différente de celle que l’on connaît aujourd’hui comme en témoignent les écrits d’une sœur de l’époque : « une œuvre toute nouvelle vient de s’offrir à notre zèle : celle des Indiens ou Peaux-Rouges de la pointe Isère. Le bon père nous amena une dizaine d’Indiennes de 6 à 16 ans, pour leur enseigner, avec les vérités de la religion, les premiers éléments du ménage et de la couture. Leur docilité et leur candeur font notre joie ». Jusqu’à une trentaine de jeunes kali’na sont ainsi scolarisés à Mana, les filles à «l’école des sœurs», les garçons, logés chez le curé, suivent les cours de l’école publique. En 1950, le nombre d’Amérindiens scolarisés diminue fortement. Dans le cadre du Service des populations primitives en Guyane française, créé en 1952, le préfet Robert Vignon confie alors l’éducation des jeunes Amérindiens à une structure spécifique : les Homes Indiens. À partir de cette période, la scolarisation des Kali’na de ce territoire est officiellement confiée aux pères spiritains pour les garçons et aux sœurs de de la congrégation Saint-Joseph de Cluny pour les filles. Initialement ces Homes semblent poursuivre un double objectif. Tout d’abord l’apprentissage du français, des mathématiques ou de l’histoire. Des notions relatives à la santé étaient aussi inculquées afin de lutter contre les épidémies qui touchaient les Amérindiens depuis des décennies. De cet enseignement, les écoliers gardent souvent de bons souvenirs. Mais les Homes ont aussi un second objectif. Comme l’écrit une sœur à cette époque : « notre œuvre sur cette terre de Guyane, est assez polyvalente, mais l’un des principaux centres d’intérêt est très certainement l’ évangélisation du milieu indien ». Pour aller en classe, ces jeunes élèves passent devant les fresques illustrant la vie traditionnelle kali’na Photo J. Chevalier. Une saison en

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Le Pays d’Art et d’Histoire des estuaires Malani-Amana

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alimapo et Awala seraient un peu à l’étroit à Awala-Yalimapo. Cette commune à trait d’union, c’est déjà une unité multiple, une composition ouverte sur d’autres relations. Sur l’autre rive d’un fleuve-chemin que l’Histoire coloniale a érigé en frontière administrative. Galibi est également composé de deux villages, Langamankondre et Cristiaankondre. Cette continuité historique, politique, culturelle et naturelle entre les deux rives de l’embouchure du Maroni, peu la connaissaient. On venait à Galibi et à Awala-Yalimapo pour voir des tortues et des plages. Tandis que des touristes se demandaient même où

étaient passés les Indiens de la carte postale et géographique. En se rendant sur place, on sait maintenant un peu mieux qui sait vivre depuis plus de 200 ans à la confluence des estuaires du Maroni et de la Mana. Laissant de côté les clichés, le Pays d’Art et d’Histoire des estuaires Maroni-Mana (PAHEM-M) nous invite à découvrir une histoire et une culture en mouvement, voire à y participer si affinité. Le tout devant le regard des tortues marines. Les communes de Awala-Yalimapo et de Galibi ont rejoint en 2014 le réseau des Villes et Pays d’Art et d’Histoire (VPAH). Ce label, administré par la direction générale des Patrimoines du ministère de la Culture, est attribué sur candidature à des collectivités ayant su démontrer l’efficacité de leur politique culturelle. Il repose sur un projet de territoire impliquant ses habitants, conscients de la valeur de leur patrimoine autant qu’engagés dans sa préservation et sa valorisation. Le PAHEMM a ceci d’original qu’il repose essentiellement sur du patrimoine immatériel au sens de la convention de 2003 de l’UNESCO : pratiques culturelles, savoirs et savoir-faire vivants, transmis et donc recréés de génération en génération. De plus, il s’agit du seul VPAH transfrontalier extraeuropéen. Transfrontalier, car à l’image du fleuve qui la matérialise, la frontière que comprend ce territoire a toujours été vécue comme un moyen d’échange ou de passage. Un poste de chargée de mission patrimoine a été créé, sur lequel a été recrutée une ancienne étudiante de l’Université de Guyane et native de Yalimapo. Elle est chargée de coordonner la programmation culturelle de la commune, en coopération avec Galibi. En projet, un centre d’interprétation rouvrira sous d’autres auspices les portes des anciens bâtiments réhabilités de l’administration pénitentiaire. Ancienne infirmerie ou encore écloserie pour tortues, désaffectées dans les années 1990, ces édifices sont inscrits sur liste des monuments historiques. Bien

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au-delà de “ l’artisanat amérindien ”, le PAHEMM invite à découvrir patiemment une culture riche et trop méconnue. Architecture et manière d’habiter, archéologie, littérature orale, arts graphiques, rituels, connaissances concernant la nature et l’univers, etc., rien ne peut être dissocié d’une totalité qui fait sens et histoire. Au-delà d’un label culturel, donc d’un soutien technique et financier à une programmation ayant déjà fait ses preuves, le pays d’art et d’histoire des estuaires Maroni-Mana recèle une portée historique et symbolique profonde. En attribuant ce label, l’État français a officiellement reconnu la présence historique des Amérindiens dans un territoire national qui lui succède et avec lequel il compose. Au-delà de génériques et archétypales “ communautés d’habitants tirant traditionnellement leurs moyens de subsistance de la forêt ”, un peuple ayant construit son histoire, dans la résistance, la persistance, la réinvention, les emprunts, les échanges, les doutes et les victoires. Tel qu’au-delà d’un demimillénaire d’archives européennes attestant de cette Histoire, en se saluant chaque jour sur l’une ou l’autre rive, on se dise, après tout ça : Monto man ! Littéralement « tu es là ». Texte Thomas Mouzard Photos Rasied Mursallin Illustration James Tiouka

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L’ombre du shamane

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Le monde spirituel kali’na est particulièrement riche. Derrière la figure centrale du shamane, appelé pɨiyai localement, se trouve un univers complexe accordant une place importante aux esprits. Petite initiation. Il parle aux esprits Les Occidentaux considèrent souvent les shamanes comme des guérisseurs possédant, éventuellement, des pouvoirs d’ordre magique. Si le pɨiyai kali’na peut guérir certains maux, son rôle est avant tout de dialoguer avec les esprits. Le monde spirituel kali’na accorde une place particulièrement importante aux esprits. Toutes les entités naturelles ont le leur : l’esprit de l’eau (tuna akɨlɨ), l’esprit de la forêt (itulu akɨlɨ), l’esprit d’une espèce animale, par exemple celui des tortues marines (katalu yumɨn)… Un animal ou un arbre en particulier peut posséder un esprit individuel, et même plusieurs pour les grands arbres comme certains fromagers (kumaka). À leur mort, les hommes peuvent aussi se transformer en esprits errants (akatonpo). Si certains de ces esprits sont bons, beaucoup sont mauvais. Les fâcher, notamment en ne respectant pas certains interdits, n’est pas sans conséquences négatives. Le pɨiyai est la personne qui fait le lien entre le monde des humains et celui des esprits. Lorsqu’une personne en souffrance vient le consulter, le shamane kali’na va communiquer avec ses esprits alliés, ses yakuwa, afin de comprendre l’origine du mal. Ces mêmes esprits alliés interviennent ensuite sur le corps du malade ou dictent au shamane ce qu’il doit faire.

yakuwa choisissent alors ou non de s’associer aux apprentis. Une fois unis, le pɨiyai peut conserver certains de ces yakuwa en lui ou dans sa malaka, un instrument sacré réalisé à partir d’une calebasse. C’est la maison des yakuwa. Aussi le shamane prend soin de son instrument, parle aux yakuwa présents à l’intérieur et ne doit pas le faire tomber. Lorsqu’il officie, le pɨiyai se retire dans un tokai, petit carbet de feuilles hermétiquement clos, spécialement conçu pour sa pratique shamanique. Il enfume le tokai avec des cigares à base de feuilles de tabac et d’écorces d’arbres (ulemali) afin de permettre la communication avec les esprits. Il joue de sa malaka et entonne les chants sacrés (alemi) pour appeler les esprits alliés. à la mort d’un pɨiyai, ses esprits protecteurs peuvent rester et protéger la famille et les personnes soignées. La famille doit impérativement conserver son malaka dans la boite en vannerie tressée (yamatu) qui contenait tous ses instruments de travail, jusqu’à ce qu’un des descendants prenne la relève.

Plus généralement, le pɨiyai est le garant de l’harmonie entre les Kali’na et leur environnement physique et spirituel. Ainsi, la création du village de Yalimapo à l’emplacement du bagne des Hattes n’a été possible que grâce au travail de puissants pɨiyai, capables de faire partir les esprits des bagnards encore présents sur le site. Il existe différents types de shamanes généralement nommés en fonction des végétaux employés lors de leur formation. Le plus classique est le pɨiyai takini, du nom de l’arbre sacré (Brosimum acutifolium) dont le shamane doit boire le jus d’écorce macérée pour valider sa formation. Mais il existe également des shamanes kuwasini, du nom d’un autre arbre sacré, et certains anciens évoquent des pɨiyai particulièrement puissants initiés au piment (pomɨi) ou au tabac (pota). Lors de la formation, les maîtres pɨiyai kali’na présentent les apprentis shamanes aux esprits alliés. Les

 Tokai kali’na. Photo Suzie Vianes-Bernus

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Le monde secret des tulala Le monde des shamanes kali’na est principalement un monde d’hommes. Au point que les jeunes femmes n’ont pas le droit de servir à boire ou à manger à un pɨiyai, même au sein de leur propre foyer. L’univers spirituel des femmes kali’na n’en est pas moins riche et puissant. Tout d’abord, les veuves de shamanes ayant atteint la ménopause peuvent elles-mêmes devenir pɨiyai. Surtout, les femmes possèdent la connaissance des tulala, ces plantes ayant des pouvoirs particuliers. Comme le souligne Rita Malajuwara, « les tulala ce n’est pas pour la santé ». Si les Kali’na utilisent certaines plantes médicinales, les tulala portent sur d’autres domaines. Ainsi le tulala tukuluwe, du nom kali’na des petites colombes généralement observées en couple, permet de conserver son ou sa bien-aimé(e) à ses côtés, de garantir sa fidélité. Le tulala “ feuille d’iguane", fera fermer leur bouche aux bavards, à l’image de l’iguane qui mange ces feuilles et que l’on n’entend jamais. D’autres tulala permettent de stopper les violences, de favoriser la fertilité, de désenvoûter… mais aussi d’empoisonner. Les tulala ne sont pas considérés localement comme de la magie. Il s’agit de plantes qui, lorsqu’elles sont traitées et utilisées d’une certaine façon, possèdent un pouvoir. Certaines sont administrées en bain, d’autres en ingestion ou doivent juste être portées sur soi. Vous souhaitez connaître le nom de ces plantes et ces préparations ? Bon courage. Car le monde des tulala est secret. À tel point que généralement, au sein des villages, les tulala ne se donnent pas. Ils se volent. Raison de plus pour conserver à l’abri des regards et des mots ces jardins secrets.

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Une crise de vocation Il y a quelques décennies, quasiment chaque chef de famille kali’na était un pɨiyai. Aujourd’hui, il ne reste que deux shamanes à Awala-Yalimapo, un seul pratiquant encore occasionnellement. Car être un pɨiyai est à la fois contraignant et dangereux. Contraignant, car le shamane doit respecter de nombreux interdits : ne pas côtoyer sa femme pendant ses menstruations, ne pas manger certains aliments… De plus, la pratique shamanique ne peut s’exercer pendant la journée. Elle nécessite de longues nuits de veille pour soigner les malades, mais aussi de dialoguer régulièrement avec les esprits et ainsi entretenir ses pouvoirs. Le tout sans rétribution, car les vrais pɨiyai kali’na ne demandent pas d’argent. Comme le disait l’un des derniers pɨiyai de Awala, Yaluwai Inainulawa : « L’argent tue les yakuwa ! » Devenir pɨiyai est aussi dangereux, car la sève du takini, bue à la fin de l’initiation est toxique. Michel Thérèse, chef coutumier de Awala, rappelle que « deux des derniers apprentis pɨiyai formés à Galibi au Suriname sont morts après l’avoir ingérée ». Malgré la concurrence de la médecine occidentale et des diverses religions, le besoin de consulter les pɨiyai est toujours présent. Les habitants de Awala-Yalimapo vont donc consulter les shamanes des villages proches comme Galibi ou village Pierre à Saint-Laurent-du-Maroni. Ils se déplacent même parfois jusqu’à Paramaribo, la capitale du Suriname. Mais la pratique de ces shamanes est souvent bien différente de celle des pɨiyai traditionnels kali’na. Des apports venant des cultures busi nenge ou asiatiques sont notamment intégrés, tels le rhum ou les plantes… et souvent le paiement de la prestation. Si sur le plan médical la disparition des shamanes kali’na est en partie palliée par les apports de la médecine occidentale, au niveau spirituel, elle laisse un grand vide. Faute de spécialistes amérindiens capables de décrypter leurs relations entre eux et avec leur environnement, certains Kali’na se tournent aujourd’hui vers la religion ou les sectes pour donner un sens à leur vie. La préservation du monde spirituel kali’na apparaît donc aujourd’hui nécessaire au bien-être de la communauté. Avant que ces savoirs ne disparaissent, il semble urgent d’aider la nouvelle génération à reprendre les malaka de leurs aînés afin que perdure une lecture kali’na du monde. Texte Jocelyn Thérèse & Johan Chevalier Photos Karen Paulina Biswell

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Jeux Kali’na

Par les moustaches du jaguar Organisés initialement pour rassembler les différents peuples amérindiens de Guyane, les Jeux Kali’na sont aujourd’hui l’un des grands évènements sportifs de la région. Et si les Amérindiens de tout le territoire sont effectivement présents, c’est la Guyane dans sa diversité qui se retrouve chaque année à Yalimapo. L’équipe Meku Makon remporte régulièrement l’épreuve de la remontée de pirogue

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Oiseaux

par Tanguy Deville

Portfolio

Forêt

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i Awala-Yalimapo est principalement connue pour la ponte des tortues marines, la commune accueille aussi une grande diversité d’oiseaux. Certaines espèces sont plutôt observées en forêt, d’autres sur la plage ou les marais et même dans le village. Petite présentation de ces espèces avec une sélection de photos réalisées à Awala-Yalimapo. Les noms français des espèces sont suivis du nom kali’na entre parenthèses.

 Manakin tijé dans le sous-bois près du village de Ayawande. ► Les manakins auréoles se regroupent sur des places de chant comme celle du sentier Kanawa à l’entrée de Awala.  Le chant du petit-duc choliba (akolototo) est entendu régulièrement dans la forêt bordant les villages. L’observation des jeunes est plus rare.

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Visiter le village de Yalimapo : Où dormir ? Où se restaurer ?

Gîte Yalimalé

Hébergement touristique, restauration sur réservation uniquement 05 94 34 71 05 / 06 94 44 95 00

V il lage ar t i s anal

Plage de Yalimapo Ancien bagne

Pointe de Panato

Aire de Pique-Nique Toilettes

La Graine d’A wara Réservation des repas la veille pour le lendemain de préférence CB acceptée 05 94 34 12 82 06 94 49 39 39 sarl.lga19@orange.fr

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Carbet Kudawyada

Vente de produits du terroir, hébergement en carbet traditionnel (hamacs et lits), restauration sur réservation uniquement. Chèque et espèces acceptés 06 94 26 33 27

Auberge de jeunesse SIMILI 05 94 34 16 25 ajs.simili@gmail.com

Aire de Pique-Nique Maison de la réserve de l’Amana 05 94 34 84 04

Plage de Simili

Ayawa n d e

Une trentaine de personnes vivent dans le village d’Ayawande, sur les rives de la crique Coswine à trente minutes de pirogue de Yalimapo.

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Visiter le village de Awala : Où dormir ? Où se restaurer ?

Gîte Chez Rita

Hébergement en carbet et en chambres climatisées, repas sur réservation uniquement 05 94 34 18 09 06 94 38 19 13 gitechezrita@gmail.com

Aire de Pique-Nique Place Itakalé

ULM Guyane

L a G u ya ne v u e d’en h aut

Baptême, école de pilotage et travaux aériens 11 rue Bruno Aubert 97 360 Mana ulmguyane@gmail.com / www.ulmguyane.com 06 94 42 79 18

Médiathèque Mailana

Illustrations Pitou & Géraldine Jaffrelot Photos Béatrice Tan & P-O Jay Une saison en

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Lagune

Awala Soupe Restauration rapide et sur commande, carbet hamacs, espèces uniquement 06 94 24 60 10

Mairie 05 94 34 76 76 Vers le sentier Kawana

Poste Épicerie

Point d’information touristique Centre de santé 05 94 34 10 60 Une saison en

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Livres

Na’na Kali’na : une histoire des Kali’na en Guyane Gerard Collomb & Felix Tiouka – 2000 – éd. Ibis Rouge 148 p. Installés sur le littoral des Guyanes lors de l’arrivée européenne, les Kali’na ont subi directement les effets désastreux de la « rencontre » avec les Européens. L’ouvrage restitue l’histoire de ce passé douloureux qui est resté gravé dans la mémoire collective des Kali’na de Guyane française et de la rive surinamaise du Maroni. Prenant appui sur le travail de l’anthropologue et de l’historien et sur la vision politique du militant, ce livre dessine des repères pour une histoire du peuple kali’na en Guyane, et contribue à rendre à la culture kali’na une place que l’histoire lui a volée.

Kali’na Jil Silberstein - éd. Albin MIchel - 2002 - 492 p.

PETIT GUERRIER POUR LA PAIX Hélène Ferrarini & Alexis Tiouka Éd. Ibis Rouge - 2017 - 128 p.

Jil Silberstein a été accueilli pendant plusieurs semaines dans l’intimité d’une famille kali’na, la famille Thérèse. Emblématiques du conflit permanent qui oppose tradition et modernité, les voix des hommes et femmes de cette famille qu’il a réunies dans ce livre nous révèlent un portrait pudique d’une culture – la culture kali’na –, et donne à partager des valeurs et une conception de l’existence. Ces voix disent aussi les souffrances, les difficultés vécues, mais expriment surtout une fierté retrouvée, à travers un combat pour la reconnaissance des droits ancestraux d’un peuple sur sa propre terre.

Dans cet entretien avec Hélène Ferrarini, Alexis Tiouka raconte son enfance tiraillée entre les bancs de l’école de la République, les Homes indiens et son très cher village kali’na de Awala -Yalimapo. Son arrivée en France hexagonale à l’âge de 20 ans sera une prise de conscience, et réveillera le «petit guerrier» qui sommeillait en lui : il rencontre des Amérindiens des États-Unis et du Canada, et galvanisé par le témoignage de leurs combats, il décide d’en faire autant en Guyane. C’est le début du mouvement autochtone avec le grand rassemblement de 1984, qu’il entamera avec d’autres leaders comme son frère Félix Tiouka. Il représentera les Amérindiens de Guyane à l’ONU lors des discussions sur les droits des peuples autochtones dans les années 1990-2000.

PAROLES KALI’NA: Entretiens avec deux Amérindiens d’en France Thomas Appolinaire & Félix Tiouka - éd. Jean-Ugo Pandolfi-Crozier - 2018 - 156 p. Thomas Appolinaire (+1989) et Félix Tiouka se sont engagés dès le début des années 1980, aux côtés d’autres militants amérindiens de Guyane, dans la création de l’Association des Amérindiens de Guyane française et l’organisation du 1er rassemblement des Amérindiens de Guyane en 1984. Depuis bientôt quatre décennies, à partir de ces premières luttes, les peuples autochtones de Guyane ont su prendre place, progressivement, dans l’espace politique national et international. Les témoignages de ces deux militants qui sont rassemblés dans cet ouvrage datent de 1989 et nous disent ce que furent leurs combats dans ces années 1980, et le sens qu’ils ont voulu leur donner.

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Entre deux mondes Gérard Collomb & Martijn Van der Bel - éd. Comité des travaux historiques et scientifiques - CTHS - 2014 - 350 p.

Encyclopédie des Caraïbes W. Ahlbrinck- gratuit en ligne - 1931 - 352 p. En 1913, le père Willem Ahlbrinck arriva comme missionnaire au Suriname auprès des Kali’na, sur le Maroni et plus à l’ouest, près de Paramaribo et sur la rivière Coppename. Basé à Albina, il séjourna plus de dix ans dans les villages, amassant une somme impressionnante d’informations sur la langue et la culture kali’na, qui donna la matière des 600 pages de son “Encyclopédie des Caraïbes”, publiée en néerlandais en 1931. Traduit grâce à J-M. Hurault, ce travail a été numérisé, accompagné de plus de 150 clichés photographiques du début du 20e siècle, et est accessible en ligne : https://issuu.com/unesaisonenguyane/ docs/ahlbrinck500

Au tournant des 16e et 17e siècles, les côtes des Guyanes attiraient des navigateurs anglais, hollandais et français qui venaient commercer avec les Amérindiens et parfois tentaient de s’installer. Ils visitaient les rivières de Guyane, échangeant avec les habitants du bois de teinture, du roucou, du coton, des vivres, contre des produits européens. Leurs récits, rassemblés dans cet ouvrage, décrivent un univers autochtone aujourd’hui oublié, et donnent à comprendre les relations complexes qui se nouaient entre Européens et Amérindiens dans cette région, avant que la Colonie, dans la seconde moitié du 17e siècle, ne referme cette page méconnue de l’histoire de la Guyane.

1491 Charles C. Mann – éd. Albin Michel – 471p. Pour écrire cette somme sur les Amériques avant Christophe Colomb, Charles C. Mann a beaucoup lu et rencontré les meilleurs spécialistes mais son ouvrage est bien plus qu’une simple synthèse. L’auteur a confronté les points de vue et reposé les questions différemment. La lecture de cet ouvrage est donc indispensable à tout esprit critique qui veut aller au-delà de l’histoire officielle souvent imposée par les manuels scolaires.

Langues de Guyane Sous la direction de Odile Renault Lescure & Laurence Goury éd. Vents d’ailleurs/IRD, Collection Cultures en Guyane - 2009 - 188 p. Langues de Guyane s’intéresse aux langues classifiées «langues de France» parlées en Guyane (langues amérindiennes, créoles et asiatiques). Un chapitre est consacré par O. Lescure à la langue kali’na, qui rappelle son histoire, présente son écriture et des exemples de textes, et donne des éléments pour en comprendre la grammaire.

L’art céramique des kali’na Marie-Chantal De Tricornot - éd. Vents d’ailleurs - 2007 - 157 p. Ancré dans une tradition séculaire amazonienne, l’art céramique des Kali’na de Guyane connaît un nouvel essor, entre modernité et tradition. Ce superbe ouvrage, richement illustré, est le fruit d’une collaboration avec les potières et d’un travail de recherche dans les grands musées européens. Il révèle au public un art méconnu, parmi les plus belles productions de la céramique amazonienne.

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Découvrez d’autres articles de nos archives sur le sujet sur www.une-saison-en-guyane.com Vanneries amérindiennes en Guyane Une saison en Guyane - n° 10

▼ essai de remontage de l’urne tukuwari, par hélène. Cl. C. Coutet.

les urnes funéraires de

vanneries vanneries amérindiennes amérindiennes DE DE GUYANE GUYANE

Des usages et des symboles

Q

Yalimapo

uand on pénètre dans un village ou un carbet amérindien, les objets qui attirent notre regard sont bien souvent des vanneries. Elles constituent le mobilier le plus important de l’habitat amérindien. De nos jours en Guyane, on connaît plutôt les grandes corbeilles palikur, les éventails à feu en fibres d’awara des Kali’na, les pochettes nommées pagras en créole ou bien les fameux manarés en arouman. Mais nombre d’autres vanneries demeurent encore utilisées de nos jours dans les foyers amérindiens du littoral et de l’intérieur. La grande majorité des vanneries est tressée grâce aux fibres d’aroumans (Ischnosiphon obliquus et I. arouma, Marantacées) mais les vanniers utilisent également avec grande dextérité les fibres du palmier awara (Astrocaryum vulgare), du kunana (Astrocaryum paramaca), du muru-muru (A. sciophilum), du comou (Oenocarpus bacaba) ou du wassay (Euterpe oleracea) ou bien la liane franche (Heteropsis flexuosa, Aracées) et la liane sipo (Thoracocarpus bissectus, Cyclanthacées). De nombreuses autres plantes sont également indispensables pour ligaturer les bords, consolider les hottes, teinter les fibres ou faire office de bretelles. Au total, plus de 100 espèces botaniques entrent dans la confection des vanneries en Guyane. De riches motifs figuratifs ou stylisés ornent tous ces objets de grandes qualités esthétiques. Ces représentations graphiques et ces formes sont issues d’une représentation du monde particulière plongeant leurs racines dans les mythes et les savoirs empiriques de ces peuples.

Culture

dossier Amérindien

précoLombIeN

Les urnes funéraires de Yalimapo - Une saison en Guyane - Hors série n° 2 Archéologie

des formes et des usaGes

En Guyane française, il existe plus de 200 formes de vanneries différentes tressées par les Amérindiens, les Créoles ou les Noirs-Marrons. Seuls les sept peuples amérindiens de Guyane (Arawak-Lokono, Apalaï, Kali’na, Palikur, Teko, Wayana et Wayãpi) continuent à en tresser la majeure partie. Ces vanneries participent à toutes les phases de la vie de ces communautés. On les utilise pour la chasse, la pêche, l’agriculture, le transport, la cueillette, le jeu, les cérémonies, le séchage du coton, mais surtout pour la cuisine. En effet, près de 50 % des vanneries tressées par les nations amérindiennes de Guyane servent à transformer le tubercule de manioc en aliment prêt à consommer. manioC et vanneries

Le manioc est fondamental dans l’alimentation des sociétés forestières de Guyane. C’est la forme amère qui est majoritairement cultivée et consommée chez les Amérindiens. Pour rendre comestible ce tubercule, les Amérindiens ont dû mettre au point tout au long de leur histoire des outils élaborés afin de le transformer en aliments divers et variés. Ce tubercule hautement valorisé est présent tous les jours dans leur vie que ce soit sous formes de galette (cassave), de farine torréfiée (couac), de condiment (tukupi ou couabio), de boisson (cachiri) ou d’empois (takaka). La presse à manioc ou couleuvre, tressée en arouman, est l’outil fondamental intimement lié à la consommation du manioc amer. Elle est le

▲ Catouri en liane franche ▼Artisan tressant une vannerie ajourée en arouman.

▲Kumalak (wayana) : milan à queue fourchue (Elanoides forficatus)

▲Tepisi

wayãpi : couleuvre à manioc

►Pëmït wayana : corbeille à farine avec pieds. Une saison en

Une saison en Guyane hors-série n°2

Guyane hors-série n°2

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Portfolio Karen Paulina Biswell, la dernière lune Une saison en Guyane - n° 20

La Dernière Lune

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vant de se jeter à quelques encablures de l’embouchure du Maroni, la crique Coswine suit un parcours sinueux au cœur de marais et de mangroves sans âge. Si l’on s’aventure dans ses méandres, le lit de la crique s’élargit et la couleur de ses eaux évolue étrangement ; le cacao laiteux typique du Maroni, laisse place à un vert bleu aux reflets outremer. Les amérindiens kali’na de Ayawandé, l’unique village sur les rives de la Coswine, ont baptisé cette portion de la crique, Palanapo (prononcer palanabo) : la « vieille mer ». Selon Frans Carlos Kajiralé, octogénaire encore vaillant du village, cette zone mystérieuse fut une malédiction et un tombeau pour les bagnards. A l’écoute des récits inquiétants du vieil homme, on devine que la région de MalakamƗ) (le terme kali'na désignant Coswine) est un lieu chargé d’histoire, celle des amérindiens, celle du Bagne, et de celle de leur cohabitation. Niché sur une bute de sable qui domine la rivière, accessible grâce un ponton métallique flambant neuf, et pourvu d’une source d’eau potable limpide assez miraculeuse, Ayawandé est un havre de paix. C'est un couple kali'na originaire du village de Akalimali dans la Basse-Mana qui le fonda au début du XXe siècle. Leur fille, Maria-Thersera Oeloe Kanamo, mourut centenaire au début des années 2000, elle expliqua que le nom du village venait de graines d'un arbre très présent sur le site, et avec lesquelles ils confectionnaient des colliers. Aujourd’hui, seul la famille Kajiralé habite encore ici, mais depuis que le transport fluvial des enfants n’est plus assuré vers Awala, c’est surtout pendant les vacances que le village s’anime désormais.

Coswine Bagne, balata & village kali’na

Portfolio Karen Paulina Biswell

’exposition « Nuno Onoï », de karen Paulina Biswell, nous invite à découvrir une des facettes cachées de l’identité et de la culture du peuple kali’na. Un regard métissé, une lecture risquée, une technique inspirée pour saisir et donner un sens au respect, à la dignité et à la fierté du féminin. L’exposition nous entraîne dans une compréhension de la relation intime entre fécondité et fertilité, telle que les valeurs de la société kali’na les ont transmises et les transmettent encore aujourd’hui, de génération en génération. La force des images transcende la pureté de l’être humain, illuminée par une peinture corporelle vivace et vivante, source de vie issue du monde végétal. La lumière et les ombres sur les visages et sur les corps nous invitent à poursuivre dans cette harmonie et cet équilibre qui subliment la féminité. « Nuno Onoï » n’est pas seulement la dernière lune, mais bien la première lune du commencement et du début : comme le manioc, qui a 9 mois rythme le début du cycle de la vie des femmes. « Nuno Onoï » est également une belle rencontre de l’intimité et de la pudeur. Point de mot, ni de parole, encore moins une exhibition humaine, mais une interrogation, un questionnement. A travers une reconstruction de nous-même, du regard, de la réalité face la part de féminité qui existe en chacun de nous. Enfin, cette belle exposition est un cheminement, une quête, un imaginaire qui forment et forgent, au quotidien, notre humanisme et universalité dans une constante recherche du respect de notre diversité et nos particularismes. Texte de Felix Tiouka

▲Totem de la route de l’Art : le village de Coswine, accessible uniquement par le fleuve, est l’un des 55 stop de la Route de l’Art. Photo P-O Jay

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Awala-Yalimapo, territoire Kali’na hier et aujourd’hui - Une saison en Guyane - n° 10

AwALA AwALA yALimAPO yALimAPO TERRITOIRE TERRITOIRE KALI’NA KALI’NA

hier hier et et aujourd’hui aujourd’hui

un hamac au bord de la plage sous les cocotiers. Des Amérindiennes fabriquant des colliers à l’ombre d’un carbet. D’imposantes tortues marines déposant leurs œufs dans le sable sous un ciel étoilé. Voila des clichés souvent associées à Awala Yalimapo. Pourtant, à bien observer l’histoire récente de ce territoire, cette impression de calme et d’intemporalité est trompeuse. En quelques décennies, la vie des Kali’na d’Awala Yalimapo a évolué de manière spectaculaire…Focus sur une commune en mouvement.

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Le peintre kali'na, né à Bigiston, magnifia la culture améridienne en développant une démarche artistique singulière.

Fritz Stjura

entre maroni et mana : un paYs kali’na

L

F

e nombre d’Amérindiens présents sur le territoire guyanais à l’arrivée des premiers colons est difficilement quantifiable aujourd’hui. Toutefois, la majorité des chercheurs s’accorde à dire qu’il était important. Pour certains il est même possible que la population amérindienne à cette époque ait été supérieure en nombre à la population guyanaise actuelle.

ritz Stjura1 est né dans le village que les Kali’na appellent Timelen, connu sous le nom de Bigiston, sur la rive surinamienne du Maroni, un peu en amont d’Albina. Sa famille s’est installée du côté français, au village de Terre-Rouge (Saint-Laurent-duMaroni) en 1974, peu avant l’indépendance du Suriname. Après quelques années, à la suite de désaccords au sein du village, la famille se rend vers Yanu (Bellevue) à Iracoubo. Fritz reste ensuite quelque temps à Cayenne, mais revient vers 1995 à Yanu, dans un carbet situé un peu à l’écart de la maison familiale, dans la partie du village rassemblant les familles originaires du Suriname. Sa disparition brutale en mai 1995, à 38 ans, a consterné tous ceux qui appréciaient, au-delà de l’artiste, l’humanisme et la grande gentillesse de l’homme. Nous avions souvent échangé, occasion de plusieurs entretiens dont je tire ces quelques lignes en espérant qu’elles portent témoignage.

Positionné à la fois en bord de mer et à l’embouchure des fleuves Maroni et Mana, le territoire de la commune d’Awala Yalimapo devait être particulièrement attractif et, accueillir une population très importante. Les nombreuses découvertes de céramiques ainsi que la présence des champs de culture surélevés de Piliwa en atteste. De même, lorsque l’anglais Lawrence Keymis longe les côtes des Guyanes en 1596, il note à l’embouchure du Maroni la présence d’un très gros village kali’na (« very great town » dans le texte original), déjà nommé “ Iaremappo ”. Au cours des décennies suivantes, les maladies apportées par les colons, bien plus que les combats, ont considérablement réduit le nombre d’Amérindiens (cf. article p.40). Au milieu du XIXème siècle, le nombre de Kali’na vivant en Guyane et à l’Est du Surinam ne s’élevait probablement plus qu’à quelques centaines.

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Portfolio David Damoison, la route de l’Art - Une saison en Guyane - n° 10 L a Route de l’ art

le photographe david damoison arpente le “ tout-monde ” cher à édouard Glissant depuis plus de 20 ans. dans le cadre de la 7ème biennale du marronnage en 2010, son “ voyage des sens ” l’amène pour la première fois à marronner sur les chemins de traverse guyanais. a l’occasion de son quatrième séjour amazonien, en conjuguant au présent les forces créatives si nombreuses ici, il travaille, avec l’association “ Chercheurs d’art ”, à dévoiler “l’art que cache la forêt”

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David Damoison s’inscrit dans cette école humaniste et engagée, qui de Dorothea Lange ou Walker Evans immortalisant l’Amérique de la Grande Dépression à Willy Ronis ou Brassaï et ses figures nocturnes des rues parisiennes, a su faire entrer dans la postérité les armées populaires du quotidien et du “ pays réel ” sans misérabilisme

▼ Albert Vola, PK 10 rd 9, Saint-Laurent-du-maroni

aucun. Sur les traces de l’ethnologue et photographe Pierre Verger, ou de Edward Sheriff Curtis, il documente aussi inlassablement les sociétés créoles et africaines, dans leur quotidien, leurs religions, leurs fêtes, leurs exils et leurs appartenances multiples. Il compose, sans exotisme, au plus près des corps, des visages et des figures des sujets emportés par le mouvement de la créolisation. Il était normal qu’il rencontre CHE, alias “ Chercheurs d’Art ”, association engagée depuis 25 ans à Mana et dans l’ouest guyanais, dans la promotion de l’art contemporain par l’évacuation des classements réducteurs qui enferment les artistes et leurs œuvres (arts premiers, arts décoratifs, arts populaires, savants, artisanat, etc...). David Damoison est ainsi devenu le photographe de “ Route de l’Art ”, projet au long cours mûri depuis maintenant 12 ans par Chercheurs d’Art : « Il s’agit d’identifier, d’inventorier, des hommes et des femmes, des pratiques, des objets, des savoirs, des savoir-faire, ... le long des routes de Mana, Charvein, Javouhey, Saint-Laurent, Awala-Yalimapo, … au cœur des bourgs, des campoes donc suivant un découpage territorial et technique et jamais ethnique ! » explique le plasticien et chef de projet

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Patrick Lacaisse. Ce colossal travail concerne plus d’un millier d’œuvres, 150 à 200 artistes et 60 sites géographiques différents. Il débouchera sur l’édition d’un guide/catalogue devenant livre d’art grâce à David Damoison, et une signalétique de bord de route, à la fois reconnaissance et labellisation, et une exposition d’art contemporain inaugurale réunissant dans une vision historique contemporaine toutes les techniques présentes sur la “ route de l’art ” en transgressant les catégories d’art et d’artisanat, de culture populaire ou savante, vernaculaire ou mondialisée : bijoux, céramiques, corps tresses, ornements, accessoires, céramiques, textiles, vanneries, forge, peintures, bois, sculpture, calebasses, … L’ouvrage fera apparaître “ quatre-vingts ” portraits à travers “ sept parcours : la RN1 à partir d’Organabo ; le bourg de Mana ; Awala-Yalimapo et Coswine ; la RD8 par Charvein de Mana à Saint-Laurent ; Javouhey ; Saint-Laurent et ses quartiers ; et la dernière : Saint-Jean, Terre rouge ”. Les photographies de ce port-folio introduisent cette aventure.

C

onquistadors et autres explorateurs européens, venus chercher aux Amériques gloire et fortune, n’hésitaient pas à user de violence envers les populations rencontrées. Les Indiens, décrits dans les premiers temps comme pacifiques, vont rapidement changer d'attitude suite aux pillages dont ils sont les victimes. Amerigo Vespucci, longeant les côtes de l’actuel Venezuela en 1499 vers l’Orénoque, écrivait : « Il nous arriva d’engager avec ces tribus de fréquents combats, car ils ne voulaient à aucun prix nous permettre de débarquer dans leur pays. » (Quatuor navigationes 1507) Après les aventuriers, vinrent les marchands. Dès le milieu du XVIe siècle, des négociants normands commercent le long des côtes guyanaises. Ils échangent outils, couteaux, hameçons et verroteries contre bois précieux, peaux et hamacs avec des profits conséquents. Dans leur course aux gains, ils volent, tuent et enlèvent hommes et femmes pour les réduire en esclavage. Si la rencontre entre l’Ancien et le Nouveau monde est marquée par la violence, celle-ci prend une nouvelle ampleur avec l’arrivée

des premiers colons. A peine débarqué, le moindre condottière plante une grande croix, fait célébrer la sainte messe, crie vive le roi et se prétend dès lors seigneur et maître de contrées immenses. L’Amérique n’était pourtant pas Terra nullius, (terre n’appartenant à personne) et les Galibis de Guyane se chargeront de le rappeler aux envahisseurs. Quand débute cette histoire, les Indiens avaient déjà fait échouer au moins trois tentatives de colonisation Européenne de la Guyane. le fou au manteau d’éCarlate

En 1643, une Compagnie formée à Rouen obtient du roi de France la concession de toute la région comprise entre l’Orénoque et l’Amazone. Le gouverneur normand, Charles Poncet de Brétigny, débarque en Guyane en novembre 1643, avec près de 300 hommes. Ils établissent un petit fortin en bois sur la colline escarpée de Ceperou qui domine l’océan, la rivière de Cayenne et les terres environnantes. Les lieux ont déjà été occupés par les Hollandais, puis abandonnés après leur guerre perdue contre les Galibis. De cette époque, les Français découvrent un puits comblé et empoisonné. Ils vont le dégager et y laisser une sentinelle nuit et

▲détail du planisphère de

Martin Waldseemüller (1507), avec la 1ère mention de l’Amérique.

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L esLguerres es guerres entre entre i ndiens i ndiens et Fet r AnçAis Fe r AnçAis e dAns dAns LA g LAuyAne g uyAne du XVii du XVii siècLe siècLe TERRA NuLLIuS

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DeDe terre terre etet dede sang sang

David Redon, avec la collaboration de Chercheurs d’Art - Légendes : Patrick Lacaisse/Chercheurs d’Art

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▼ Coll. Dominique Sainte-Marie

1 : Fritz Stjura (ou Stjoera, sa famille est originaire du Suriname) et non “Fritz St. Jura”, ou “Fritz Saint-Jura” comme il arrivait souvent que l’on écrive son nom. 2 : Terre-Rouge et Paddock sont deux villages kali’na près de Saint-Laurent-du-Maroni. Fritz avait décoré un mur de la salle polyvalente de Terre-Rouge.

◄ «Français aidant des Indiens dans une bataille». Th. de Bry, XVIe siècle.

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▲ Coll. Françoise Capus

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un vernis végétal, le kumete, coloré de noir de suie ou de rouge avec le roucou

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Je n’ai jamais appris à dessiner, mais j’étais toujours en train de dessiner, tout ce que je voyais… Petit, je restais près de ma mère quand elle faisait de la poterie, je voulais faire des dessins comme elle, mais elle me disait : “non, ce n’est pas pour les garçons… ” Alors j’ai voulu trouver une manière de faire comme elle, je dessinais, je dessinais jour et nuit, avec la lampe à pétrole, avec des crayons, avec du charbon de bois, j’apprenais comme ça… J’aimais tellement le dessin ! Je pensais à ma mère quand elle vendait ses poteries, je me disais qu’avec cet argent elle allait m’acheter un crayon ou bien un cahier. La poterie ça donne la vie. Chaque fois qu’il y a une fête traditionnelle ou une cérémonie chez les Amérindiens, jusqu’à maintenant on utilise des poteries, des samaku pour mettre de l’eau,

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▼ rené Blaise, Awala. Une fois gravée, la calebasse est recouverte dans le creux avec

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«APRÈS, IL Y A LA CHANSON…»

De terre et de sang, Les guerres entre indiens et Français dans la Guyane du XVIIe siècle - Une saison en Guyane - n° 10 Culture

damoison

ARTS VISUELS

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portfolio portfolio david

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« À 18 ans, je suis venu m’installer avec toute ma famille à Terre Rouge2. Là, j’ai commencé à travailler sérieusement la technique du dessin, jour et nuit. Je faisais des agrandissements d’après des photographies de personnes, toute la nuit. J’étais libre, je n’avais pas de travail… Je me demandais : “Comment je vais m’en sortir, comment je vais me sortir du milieu dans lequel j’ai été élevé ? ” Parce que j’avais bien vu, depuis tout petit, que la vie était très dure pour mes parents, la chasse, les transports jusqu’à la maison, ma mère travaillait du matin au soir pour nous nourrir. À l’époque, beaucoup de gens partaient à Paramaribo pour apprendre des métiers, mais ensuite ils ne revenaient pas. Ou alors ils partaient en France, en Hollande. Moi je ne voulais pas partir, je voulais délivrer un petit message pour les enfants d’aujourd’hui. Jusqu’à maintenant, j’ai ça dans la tête… »

▲Autoportrait de Fritz Stjura - Coll. particulière

▲Carte de l'estuaire du Maroni et de la Mana. Jesse de Forest (1623) ►Stéréographie du bagne des Hattes. Une saison en

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Fritz Stjura -Une saison en Guyane - n° 18

soCiété

dossier Amérindien

UNE OCCUPATION AMÉRINDIENNE ANCIENNE Bénéficiant d’eaux poissonneuses et d’une position stratégique, à la confluence entre deux voies fluviales de pénétration vers l’intérieur, la portion de côte Atlantique qui sépare les estuaires de la Mana et du Maroni est, depuis très longtemps, une terre amérindienne. Le nom de Coswine est issu de la langue arawak, wini signifiant l'eau. L’archéologie date ainsi la présence amérindienne au XIe-XIVe siècle tandis que l’actuelle occupation kali’na est attestée dès le XVIe siècle par les premiers voyageurs européens à toucher les côtes de la Guyane. Les colons européens n’investissent la région que très tardivement. Les plaines littorales basses et marécageuses de cette frange côtière, zone tampon entre Guyane française et hollandaise, font ainsi longtemps office de refuge pour des amérindiens progressivement refoulés vers l’ouest par l’avancée de la colonisation. Les premières installations coloniales - un poste militaire marquant, à l’embouchure du Maroni, la frontière avec le Suriname - apparaissent à la fin du XVIIIe siècle. Il faut encore attendre 1828, et la fondation du bourg de Manapour que soit fondé le premier établissement d’importance dans l’ouest guyanais. Mais c’est l’implantation du bagne au Maroni qui va le plus fondamentalement bouleverser les logiques qui régissaient

Histoire

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Coswine - Bagne, balata et village kali’na Une saison en Guyane - n° 10

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PORTRAIT

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jour « afin d’empêcher les sauvages de faire encore la même chose. » (Boyer 1654) Français et Galibis sont pourtant alliés contre leurs ennemis communs, Hollandais et Indiens Aroüagues, et échangent des articles européens contre de la nourriture. Les colons se contentent en effet de chasser « et à peine défrichèrent-ils quelque coin de terre pour y cultiver des légumes », témoigne Boyer. Selon ce chroniqueur, l’insuffisance de nourriture mais également la violence et le despotisme du gouverneur envers ses propres hommes, les poussent à la révolte. Mais Brétigny profite de leurs mésententes pour reprendre le commandement, et, plus intraitable que jamais, essaye alors d’imposer ses règles aux Galibis. Après la disparition en mer du seul chef Indien qui le soutenait, les autres, écrit Boyer, ne cherchèrent plus « que l’occasion de se défaire de nous. » En mai 1645, Bretigny fait arrêter deux Galibis accusés d’avoir comploté contre sa personne. Les prisonniers parviennent cependant à s’échapper à la nage... Furieux, le gouverneur

se lance immédiatement à leur recherche avec 16 soldats et « quantité de poudres et de plomb. » Pensant les surprendre, ils remontent une rivière, mais échoient sur un campement de Galibis : « Monsieur de Bretigny, saisi de peur, s’embarqua dans son canot avec tout son monde, où il ne fut pas plutôt entré qu’il se vit environné de tous côté d’un si grand nombre de sauvages que les deux bords de la rivière en étaient tous couverts ; et la salve des coups de flèches qu’ils lui firent fut si dru, qu’il n’y en eut jamais que deux de sauvés à la nage, qui furent pourtant repris bientôt après et faits leurs esclaves. Le premier coup qu’un borgne lui décocha fut entre les deux yeux, que ce misérable mourant tachait de couvrir avec son manteau d’écarlate, en leur demandant quartier. » Boyer 1654 Les Galibis attaquent alors toutes les habitations françaises et hollandaises de la région avant de se regrouper pour donner l’assaut final au fort de Ceperou. « Ils furent en si grand nombre, raconta Paul Boyer, que l’on eut dit que chaque

▲L’arrivée de la Compagnie des 12

seigneurs à Cayenne en 1652. Affiche de Israel Silvestre, 1653.

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N° ISSN : 1966-6446 Société éditrice : Atelier Aymara EURL de presse au capital de 5 000 € 24 rue Louis Blanc - 97300 Cayenne Guyane française tel. +594 (0) 5 94 31 57 97 www.une-saison-en-guyane.com Rédaction [redaction@atelier-aymara.net] Directeur de la publication/Rédacteur en chef  Pierre-Olivier Jay [pierre@atelier-aymara.net] Coordination/Rédacteur en chef Johan Chevalier [johan.chevalier@orange.fr] Chargée de communication Daniela Norena Comité de rédaction Dennis Lamaison

Eveline Périgny Félix Tiouka Jean-Paul Fereira Josy Joseph Johan Chevalier Rasied Mursallin Traduction Kali’na Daniel François Jean-Paul Fereira photo couverture  Samia Maquigny (photo N&B) Rasied Mursallin ( photo couleurs) illustrations/infographies  Damien Chevallier Frédéric Tiouka Geraldine Jaffrelot James Tiouka Maël Dewynter Morgane Jolivet Patrick Gallier Pitou Yann Kayamaré

Crédits photo Audrey Antoncsak Béatrice Tan Cary Markerink Claude Baumann Claude Coutet ESA Felix Tiouka Fonds Arnauld Heuret IGN Jacques Fretey Jean-Marcel Hurault Jody Amiet Johan Chevalier Karen Paulina Biswell Maria-Teresa Prost Nicolas Quendez Patrick Chauvel Philippe Giraud Pierre-Olivier Jay Tanguy Deville Thierry Montford Rasied Mursallin Samia Maquigny Suzie Vianes-Bernus Willem Ahlbrinck

Auteurs Daniel François Dennis Lamaison Éveline PérignyBaumann Françoise Armanville Gérard Collomb Jocelyn Thérèse Johan Chevalier Marquisar JeanJacques Morgane Jolivet Rasied Mursallin Thomas Mouzard Tiffanie Harinawari Youani Tiouka

Françoise Armanville Frédéric Tiouka Gérard Collomb Marion Rodet Martijn van den Bel Michel Thérèse Pierre et Françoise Grenand Pauline Bilbault Karen Paulina Bisawell Stephen Rostain Sylvain Lieutenant Sylviane Galima Yann Le Métayer

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Guyane HS-06


un territoire, des projets, un avenir

Communauté de Communes de l’Ouest Guyanais (CCOG) 02, rue Bruno AUBERT, Z.A Gaston CESAIRE, BP 26, 97360 MANA, Guyane Française Tel : 0594 34 34 94 Fax : 0594 34 84 37 Courriel : info@ouestguyane.fr



Le programme LEADER ... partenaire des projets de Awala-Yalimapo depuis 2007

ZZ Une trentaine de projets financés depuis 2007 ZZ Plus de 650 000 € mobilisés pour la commune de Awala-Yalimapo ZZ Près de 90 000 € mobilisés par les acteurs privés

ZZ Des associations actives avec 3 programmes d’animations financés ZZ Deux entreprises touristiques accompagnées ZZ Une dynamique importante de la commune avec 23 projets financés pour valoriser et promouvoir le patrimoine culturel et naturel


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