Mutations

Page 1

1 2010

S N O I T A T MU

NIER I M IN BASS

S DU E V I T PEC S R E nale o ET P i t S a E OIR ransn t t e MÉM aire s n e i l g p u i grif f Ro terdisc u Z s e n r Ter oche in nale o i t a r App ansn r t d n un e e r d r ä E n i Rote terdiszipl Im in


IMPRESSUM Editeur / Herausgeber Fondation Bassin Minier c/o Chambre de Commerce, L-2981 Luxembourg www.fondationbassinminier.lu contact@fondationbassinminier.lu Comité de lecture / Beirat Guy Assa, Antoinette Lorang, Massimo Malvetti, Antoinette Reuter, Denis Scuto, Jürgen Stoldt Impression / Druck C.A.Press, L-4210 Esch/Alzette Couverture / Umschlag Hall des turbines à gaz, ARBED Esch-Schifflange, aujourd’hui siège de la société ENOVOS Gasturbinenhalle, ARBED Esch-Schifflange, heute Sitz des Unternehmens ENOVOS Photo : Atelier d’architecture et de design Jim Clemes ISSN 2078-7634 Soutenu par le Fonds National de la Recherche, Luxembourg, l‘Université du Luxembourg et PRO-SUD. Mit der Unterstützung des Fonds National de la Recherche, Luxemburg, der Universität Luxemburg und PRO-SUD.

Luxembourg, avril 2010 / Luxemburg April 2010




MUTATIONS

MÉMOIRES ET PERSPECTIVES DU BASSIN MINIER 1|2010



Terres Rouges Approche interdisciplinaire et transnationale sous la direction de Michel Pauly

Rote Erde Im interdisziplinären und transnationalen Zugriff unter der Leitung von Michel Pauly

007 Michel Pauly, Christian Schulz Terres Rouges - eine interdisziplinäre und transnationale Vortragsreihe 009 Myriam Sunnen « De Minett » comme « lieu de mémoire » 021 033 049

Michael Overbeck Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters Norbert Franz Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg Frank Wilhelm L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

063 Tonia Raus Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante 073 Marion Colas-Blaise Une approche sémio-linguistique de « La mémoire de la baleine » de Jean Portante 085 Damien Sagrillo Musik im Land der Roten Erde 101 Julie Schroell La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges 109 123

Peter Gilles Sprache im Minette Paul di Felice Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

135 Christian Schulz Die räumlichen Implikationen des Projektes Belval-Ouest


8


Terres Rouges - eine interdisziplinäre und transnationale Vortragsreihe

Terres Rouges - eine interdisziplinäre und transnationale Vortragsreihe Michel Pauly - Christian Schulz Im Sommersemester 2008 fand an der Fakultät für Sprachwissenschaften und Literatur, Geisteswissenschaften, Kunst und Erziehungswissenschaften (FLSHASE) der Universität Luxemburg im Rahmen des Studiengangs „Bachelor en cultures européennes“ eine Ringvorlesung statt, in der sich vierzehn Wissenschaftlerinnen und Wissenschaftler aus verschiedenen Disziplinen mit der zukünftigen Heimat der Universität Luxemburg beschäftigten. Wenn der Zeitpunkt dieser Auseinandersetzung mit der MinetteGegend für die Studierenden möglicherweise etwas früh kam, weil der Umzugstermin noch so weit weg scheint und die heute Eingeschriebenen davon nicht mehr betroffen sein werden, so war das doch nicht nur ein willkommener Anlass, die Rolle der Geisteswissenschaften in den Debatten über den Umzug herauszustellen. Sie bot auch die Gelegenheit, zwei Merkmale sowohl der Forschungseinheit IPSE (Identités, Politiques, Sociétés, Espaces) als auch des genannten Bachelorstudiums herauszustreichen bzw. die Studierenden damit vertraut zu machen: die Interdisziplinarität und der transnationale Zugriff. Die vierzehn Vorträge beleuchteten in der Tat Aspekte des „Landes der Roten Erde“ aus sehr unterschiedlichen Perspektiven: Geographie, Archäologie, Geschichte, französische und luxemburgische Literatur, Luxemburger Sprache und Kunstgeschichte. Dieser zugegebenermaßen eher multi- als interdisziplinäre Zugriff war zudem auch transnational, da nicht nur Forscher aus Luxemburg und Deutschland daran beteiligt waren, sondern das Thema auch unabhängig von der Staatsgrenze beleuchtet wurde und Entwicklungen in Literatur und Kunst aus verschiedenen Kulturräumen zur Sprache kamen. Gerade beim Blick über die Staatsgrenzen

ist zu bedauern, dass zwei Vorträge, jener von Alex Storoni über die physisch-geographischen Voraussetzungen des Minetteabbaus im frankoluxemburgischen Eisenerzbecken als auch jener von Thierry Grosbois über die Haltung der Luxemburger Industriellen und insbesondere der Stahlindustrie zum europäischen Einigungsprozess nach dem Zweiten Weltkrieg, aus verschiedenen Gründen hier nicht zum Abdruck kommen können. Für die Studierenden des BCE, ob sie jetzt in Germanistik, Romanistik, Geschichte oder Philosophie eingeschrieben waren, war der Besuch der Ringvorlesung Pflicht. Sie sollten erkennen, dass die Realität dieser Region eine ist, auf die man aus sehr unterschiedlichen Blickwinkeln schauen kann und muss, um sie annähernd in ihrer Ganzheit zu erkennen und zu verstehen. Es freut die Herausgeber ganz besonders, dass die Fondation Bassin Minier sofort Interesse zeigte, die Vorträge in ihrer neuen Schriftenreihe zu veröffentlichen. Die Ringvorlesung war durchaus für ein größeres Publikum als nur die BCE-Studierenden konzipiert, denn die Forschungseinheit IPSE möchte mit der Ringvorlesung und darüber hinaus mit ihren Forschungsprojekten den Einwohnern und Verantwortlichen an ihrem zukünftigen Standort zeigen, dass dieses Umfeld sie nicht kalt lässt. Vielmehr interessiert sie sich schon jetzt für dessen Fragen und Probleme und setzt sich für das Verständnis dieser Gegend mittels wissenschaftlicher Aufarbeitung ein. Die Geisteswissenschaften mögen keinen direkten wirtschaftlichen Nutzen bringen, für die Kohäsion der Region und das gegenseitige Verständnis von Einwohnern und Universitätsangehörigen wird ihr Beitrag gleichwohl nicht zu unterschätzen sein.

9



Terres Rouges

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

« De Minett » comme « lieu de mémoire » Myriam Sunnen

« De Minett » : en entendant ces mots, qui ne songe pas d’abord aux cheminées des usines, à une épaisse fumée noire ou rouge qui monte dans le ciel, aux paysages d’Esch ou de Rumelange et aux ouvriers musclés tels qu’on les voit sur bon nombre de plaques commémoratives dans les villes du sud-ouest du Luxembourg ? D’autres associations ne tardent pas à se profiler – « mär », « där», « Vun der Long op d’Zong », parti socialiste, immigration, culture alternative, sport – mais il semble que le bassin minier ait toujours été et reste même à l’heure actuelle le symbole de l’industrie luxembourgeoise. Chose plus étonnante encore : depuis que cette région a, d’après l’expression de Jean Portante, « perdu son nom1 » - c’est-à-dire depuis la fermeture de la dernière mine luxembourgeoise (1981) et l’extinction du dernier haut-fourneau (1997) – les publications sur la sidérurgie et les monuments commémoratifs n’ont cessé de se multiplier, comme si, à une époque où cette région connaît une mutation profonde, il fallait conserver à tout prix les traces du passé2. La volonté de patrimonialisation qui sous-tend toutes ces entreprises s’inscrit parfaitement dans l’esprit d’une époque qui, faute d’avoir une mémoire active et vivante, tend à « matérialiser » ce qui reste de cette mémoire. C’est du moins l’analyse qu’en propose l’un des plus grands spécialistes de l’usage de la mémoire, Pierre Nora : À mesure même que disparaît la mémoire traditionnelle, nous nous sentons tenus d’accumuler religieusement vestiges, témoignages, documents, images, discours, signes visibles de ce qui fut, comme si ce dossier de plus en plus proliférant devait devenir on ne sait quelle

preuve à l’on ne sait quel tribunal de l’histoire. Le sacré s’est investi dans la trace qui en est la négation. Impossible de préjuger de ce dont il faudra se souvenir. D’où l’inhibition à détruire, la constitution de tout en archives, la dilatation indifférenciée du champ du mémorable, le gonflement hypertrophique de la fonction de mémoire, liée au sentiment même de sa perte, et le renforcement corrélatif de toutes les institutions de mémoire3. C’est à Pierre Nora aussi que l’on doit le terme de « lieu de mémoire » qui, au cours des dernières décennies, a connu un succès considérable et qui, à notre sens, permet de comprendre la place que le bassin minier occupe dans la mémoire collective des Luxembourgeois : étroitement associé à la sidérurgie et à l’industrie lourde, il a en effet souvent été considéré comme le fondement même de l’indépendance politique et de la prospérité du Luxembourg et en ce sens, il a joué un rôle central dans la construction des identités collectives. Qu’est-ce qu’un lieu de mémoire4 ? Dès la fin des années 1970, Pierre Nora s’est interrogé sur les éléments du passé qui sont restés vivants dans le présent et qui incarnent un certain nombre de valeurs dans lesquelles les membres d’une communauté donnée se reconnaissent : monuments, traditions populaires, institutions… Sa réflexion s’inscrit dans la lignée des travaux de Maurice Halbwachs, le sociologue français qui, dans la première moitié du 20e siècle, avait consacré un ouvrage fondamental aux rapports entre la mémoire et la société (1925) et qui, surtout, publia en 1950 un livre important sur le concept de mémoire collective. Celle-

1 Voir le titre de sa contribution à BRAUN, John et alii, Bassin minier. Traces et mutations, photographies, Luxembourg1995

(« Réflexions sur un pays qui a perdu son nom »).

2 On songe par exemple aux publications d’Ed. Maroldt (surtout Leit aus Eisen. Petit illustré de la sidérurgie / Magiciens du fer.

Reise in die Stahlwelt Luxemburgs in 350 Bildern, Esch-Alzette 2005), au numéro de Nos cahiers consacré au canton d’Esch (3 / 4 de 2006), à la place réservée au haut-fourneau dans le projet de Belval et à un nombre impressionnant de films consacrés à l’acier, dont le numéro 182 de la revue forum (mars 1998) (La Terre rouge sans mémoire ni projet) propose la liste (p. 31). 3 NORA, Pierre (dir.), Les Lieux de mémoire, I. La République, Paris 1984, p. XXVII. 4 Sur ce qui suit, cf. MARGUE, Michel et KMEC, Sonja, Les « lieux de mémoire » ou Donner un sens à l’histoire, in : KMEC, Sonja et alii (éd.), Lieux de mémoire au Luxembourg / Erinnerungsorte in Luxemburg, Luxembourg 2007, p. 5-7

11


Terres Rouges

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

ci se trouve dans un rapport d’interaction constant avec la mémoire individuelle et elle joue un rôle considérable dans la construction des identités collectives. Chaque individu se définit par rapport à ceux qui l’entourent en sélectionnant de façon plus ou moins consciente des souvenirs qui lui permettent de se solidariser avec certains et de se distinguer d’autres. De même, les élites politiques et intellectuelles assurent la cohésion au sein d’un pays en investissant d’un sens symbolique un certain nombre de lieux, de dates, de personnages, de mythes ou de coutumes. Ainsi conçue, la nation ne se définit pas par des critères prétendument objectifs (communauté de race, de langue, occupation d’un même territoire…), comme on l’a longtemps cru, mais elle est considérée comme le résultat de négociations et de processus d’identification5 ; bref, la nation est une construction culturelle qui repose sur des valeurs, souvent symbolisées par des « lieux de mémoire ». Les « lieux de mémoire » au sens que Pierre Nora a donné à ce terme ne sont donc pas seulement des lieux au sens géographique du terme, ce ne sont pas non plus seulement des lieux de commémoration (tombes, monuments aux morts…), mais ce sont « les lieux où se cristallise la mémoire6 », ou encore, pour citer les auteurs de l’ouvrage sur les lieux de mémoire au Luxembourg, « des éléments de nature matérielle, symbolique ou fonctionnelle, dans lesquels une collectivité peut reconnaître son histoire et son identité7 ». Comme le montre bien l’ouvrage dirigé par Michel Margue, Sonja Kmec, Benoît Majerus et Pit Péporté, il s’agit, dans le cas du Luxembourg, du drapeau national, de figures telles que Saint Nicolas, d’événements historiques ou encore de monuments comme la « Gëlle Fra ». L’histoire mouvementée de cette dernière est particulièrement révélatrice de la dynamique propre aux « lieux de mémoire8 ». On sait que la statue dorée faisait initialement partie d’un monument commémoratif édifié en hommage aux volontaires luxembourgeois qui avaient combattu dans les armées belge et française lors de la guerre de 14-18. Après l’invasion allemande, 5

le monument fut rapidement investi d’une symbolique anti-allemande, qui ne laissa peut-être pas indifférent l’occupant : il fut en effet démoli en octobre 1940 et, comme l’affirme Benoît Majerus, il devint en partie grâce à cela « un élément d’identification pour les Luxembourgeois à l’étranger9 ». Peu commentée pendant la guerre, cette démolition joua par la suite un rôle capital dans l’historiographie luxembourgeoise et, avec le « Spengelskrich », elle constitue, toujours d’après Benoît Majerus, le premier tableau d’un « triptyque » de la résistance luxembourgeoise, les deux autres tableaux étant représentés par le « référendum » d’octobre 1941 et la « grève générale » d’août-septembre 1942. Portée disparue pendant de longues années, la « Gëlle Fra » fut retrouvée en 1981 au Stade national. Malgré l’opposition des mouvements de résistants, le monument fut reconstruit grâce à une souscription nationale et investi d’une symbolique clairement nationale et identitaire. La mise en place de la « Lady Rosa of Luxembourg » en 2001, due à Sanja Ivekovic, déclencha par la suite une vive polémique qui montre bien que la « Gëlle Fra » constitue un véritable symbole aux yeux d’un certain nombre de Luxembourgeois, hostiles, pour cette raison précisément, à toute tentative qui viserait à doter le monument d’une symbolique autre que celle dans laquelle ils se reconnaissent. Quant à la « guerre des gourdins », Sonja Kmec a démontré qu’elle a fait elle aussi l’objet d’une instrumentalisation idéologique10. Ce qui, au départ, ne représentait guère plus qu’une bagarre entre des paysans ardennais écrasés par une lourde fiscalité et des soldats français chargés de les enrôler dans l’armée révolutionnaire, a souvent été présenté dans l’historiographie luxembourgeoise comme un symbole du sens religieux et patriotique des paysans de l’Ösling et des Luxembourgeois d’une manière générale. Après la deuxième guerre mondiale, cette « guerre » devint par ailleurs le symbole de la résistance luxembourgeoise à l’enrôlement de force, pratiqué non seulement par les Français en 1798 mais aussi par les Allemands en 1942. Ayant inspiré de nombreux écrivains luxem-

MARGUE/KMEC, Les « lieux de mémoire » [voir note 4], p. 7-8, NORA, Pierre (dir.), Les Lieux de mémoire, I. [voir note 3], p. XVII. 7 MARGUE/KMEC, Les « lieux de mémoire » [voir note 4], p. 6. 8 Sur ce qui suit, voir MAJERUS, Benoît, « Gëlle Fra », in : Lieux de mémoire au Luxembourg [voir note 4], p. 291-296. 9 Ibid., p. 292. 10 Voir KMEC, Sonja, « De Klëppelkrich », in: Lieux de mémoire au Luxembourg [voir note 4], p. 141-146. 6

12


Terres Rouges

bourgeois dont en particulier Nikolaus Welter et Batty Weber, la guerre des gourdins apparaît depuis les années 1990 comme un « lieu de mémoire transnational ». Sonja Kmec précise en particulier que lors du bicentenaire de 1998, le « Klëppelkrich » fut commémoré par une représentation théâtrale organisée par l’association « Éislek ouni Grenzen ». On aura compris que l’objectif d’une étude des lieux de mémoire est de montrer que l’identité et la mémoire collectives se redéfinissent constamment et qu’elles sont largement tributaires de facteurs historiques, politiques et sociaux. Deux approches sont dès lors possibles : on peut soit s’interroger sur la production et l’exploitation d’un certain nombre de stéréotypes (le plus souvent par les élites intellectuelles et politiques), soit étudier le degré d’intériorisation de ces symboles par la population. Comme dans le volume dirigé par Michel Margue, Sonja Kmec, Pit Péporté et Benoît Majerus (et pour les raisons exposées dans l’introduction de ce livre), nous nous concentrerons ici sur la production des stéréotypes et des mythes11. Pour ce qui est de la délimitation chronologique, il va de soi que le champ d’investigation est nettement plus restreint que celui d’un lieu comme « de Kleeschen » : les gisements de fer n’ont été (re) découverts qu’en 1838, et s’il arrive que des légendes ou des traditions antérieures à cette date aient été réinterprétées a posteriori12, il va de soi que le bassin minier n’a été investi d’une charge identitaire qu’à la fin du 19e siècle et avant tout, semble-t-il, dans la première moitié du 20e. Par ailleurs, les symboles véhiculés par le bassin minier sont nettement moins variés que ceux associés à d’autres « lieux », au point que l’on peut se demander s’il est possible d’étudier la « Minette » à côté de « lieux » nationaux aussi riches que la « Gëlle Fra » ou l’Octave. 11

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

Notre propos sera précisément de voir comment l’exploitation minière est devenue un objet de fierté nationale13. On verra ainsi que la tendance à considérer la sidérurgie comme le fondement de l’indépendance politique était particulièrement prononcée lors des grandes célébrations de la première moitié du 20e siècle. Le recueil De Galgebierg publié en 1939 par Tony Hurst est par exemple présenté de façon tout à fait explicite comme une contribution à la célébration du 100e anniversaire de l’indépendance nationale. Sur une linographie d’Albert Kaiser reproduite dans la réédition de 1957, on voit même l’inscription « 100 Joer Galgebierg, 100 Joer Wuelstand14 », qui atteste bien la place de la sidérurgie dans la construction de l’identité nationale : le recueil est en effet consacré à l’homme qui (re)découvrit les gisements de fer dans la région d’Esch. Le cas des « lieux de mémoire » géographiques est particulièrement intéressant à étudier dans la mesure où, souvent, ils ont été employés à la fois sur le plan local, régional et national, voire transnational. Comme le montrent bien les photos proposées par Ed. Maroldt dans Leit aus Eisen15, les « Minettsdäpp » ont choisi les usines comme symboles de leurs villes et de leur région. Mais quand, lors des fêtes du cinquantenaire, les habitants de Dudelange, Rumelange ou Esch faisaient défiler les cheminées sur des chars16, les drapeaux et le choix des couleurs conféraient souvent à ces célébrations un caractère national, comme dans le livre de Hurst. La même remarque s’impose au sujet des nombreuses représentations littéraires et picturales du bassin minier, sur lesquelles sont venus se greffer des symboles nationaux que l’on a parfois tenté de mettre en relation avec les autres paysages régionaux.

KMEC/MARGUE, Les « lieux de mémoire » [voir note 4], p. 8.

12 Voici par exemple ce qu’écrit Nicolas Ries dans Le Beau Pays de Luxembourg, en 1928 : « Les anciennes légendes

13

14 15 16

populaires du pays des Terres-Rouges semblent avoir une signification symbolique et prophétique. Les fées de la vieille forêt du Clair-Chêne y luttent avec les génies du fer, la vierge blanche du Mont St. Jean avec les serpents sortis de leurs antres souterrains, des charbons ardents se changent en or. Les vierges blanches et les fées ne sont plus, le génie du fer a abattu les forêts druidiques. Mais de longues files de wagonnets chargés de minerai s’avancent en serpentant des galeries souterraines vers les usines d’où l’immense brasier des fourneaux fait jaillir le fer et crée la richesse. » Cité par WILHELM, Frank, « Le bassin minier luxembourgeois vu par des écrivains francophones », tiré à part de la revue Galerie, 17, no 1, 1999, p. 17 (117). Certaines idées développées ici ont déjà été exposées dans des publications antérieures. Voir nos contributions à Lieux de mémoire au Luxembourg [voir note 4] (« D’Musel », « D’Éislek », « De Minett ») ainsi que notre article « ‘Den Zolwerknapp as kê Parnass’. Le paysage dans la littérature luxembourgeoise », in : CONTER, Claude D. et GOETZINGER, Germaine (éd.), Identitäts(de)konstruktionen. Neue Studien zur Luxemburgistik, Differdange 2008, p. 33-50. HURST, Tony, De Galgebierg: [s. l.], 1957, p. 136. Voir par exemple MAROLDT, Leit aus Eisen, [voir note 2], p. 25. Ibid.

13


Terres Rouges

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

Défilé organisé à l’occasion du Cinquantenaire de la ville de Dudelange. Photo de J.-P. Conrardy, Esch-sur-Alzette 2005. Archives de la Ville de Dudelange, Fonds Jean-Pierre Conrardy.

Le paysage : voilà en effet un concept qui nous permettra de voir dans quelle mesure le bassin minier est devenu, au fil du temps, un « lieu de mémoire » investi d’une charge symbolique. Dans de nombreuses langues européennes, le terme désigne à la fois le paysage empirique, la « partie de pays », et ses représentations littéraires ou picturales17. Celles-ci ne sont évidemment jamais neutres et se présentent plutôt comme des écrans sur lesquels viennent se projeter des a priori culturels, les affects personnels de celui qui peint ou écrit, ainsi que des idéologies. Dans un important ouvrage de synthèse, l’historien genevois François Walter a montré que dès la fin du 19e siècle mais surtout à l’entre-deux-guerres s’est développée en Europe une tendance très nette à voir dans le paysage et en particulier dans les différents paysages régionaux des emblèmes nationaux18. La relation qui unit dans ce cas un paysage au

pays qu’il est censé représenter est de type métonymique et elle joue un rôle important dans le domaine de la promotion touristique. Est-il besoin de rappeler dans ce contexte l’usage que les Suisses font du Cervin ? Les Luxembourgeois étaient eux aussi conscients de l’effet que pouvaient produire de tels symboles paysagers, mais ils semblent avoir mis du temps à se mettre d’accord sur un emblème susceptible d’attirer les touristes et de symboliser la cohésion nationale. « Le Luxembourg », affirma le ministre d’État Paul Eyschen en 1903 lors d’un débat sur le développement du tourisme et l’importance des affiches destinées à le promouvoir, « se distingue par un grand nombre de belles choses, dont aucune cependant ne saurait se mesurer avec les deux curiosités dont je viens de parler [les cathédrales de Strasbourg et de Cologne]. Ce sont nos vieux manoirs qui attirent le plus les étrangers et qui les frappent. Eh bien, ils

17 Voir FRANCESCHI, Catherine, « Du mot paysage et de ses équivalents dans cinq langues européennes », in : COLLOT,

Michel (dir.), Les Enjeux du paysage, Bruxelles 1997, p.75-111. WALTER, François, Les Figures paysagères de la nation. Territoire et paysage en Europe (16e-20e siècle), Paris 2004. 19 EYSCHEN, Paul (Ministre d’État), intervention du 11 février 1903, Compte rendu des séances de la Chambre des députés, session ordinaire du 4 novembre 1902 au 10 juin 1903, p. 1049, passage cité par Simone WENY dans sa communication présentée lors du séminaire interdisciplinaire Construction identitaire : art, architecture et patrimoine, organisé à l’Université du Luxembourg le 10 mars 2006. 18

14


Terres Rouges

sont nombreux, mais il est difficile de choisir quelques vues qui frappent19. » Le fait que Paul Eyschen évoque les « vieux manoirs » est tout à fait révélateur du choix qui était fait tout au long de la première moitié du 20e siècle. À une époque où l’on commençait à se préoccuper du sort des vestiges archéologiques et des sites mais où le concept même de patrimoine industriel n’existait pas, les hauts-fourneaux n’ont jamais (ou très rarement) été choisis comme emblèmes uniques du pays, entre autres parce qu’ils n’étaient guère susceptibles d’attirer les touristes étrangers20. La « vue » la plus souvent retenue dans la publicité touristique était celle de la ville de Luxembourg, et ce choix était souvent légitimé de façon plus ou moins explicite par le fait que l’on y voyait une sorte de paysage miniaturisé, susceptible de représenter le pays tout entier21. L’écrivain francophile Marcel Noppeney affirma ainsi en 1937 dans le catalogue de l’exposition universelle que « la ville de Luxembourg accumule et synthétise les charmes imprévus et les grâces parfois paradoxales du pays tout entier, dont elle est la marraine » et il se dit convaincu que « la variété des paysages, particulière au pays tout entier, apparaît en réduction dans les aspects de la ville capitale22. » La variété du paysage est en effet un des stéréotypes les plus répandus dans la littérature touristique luxembourgeoise ainsi que dans un certain nombre d’écrits à caractère officiel. Dans ce contexte, il faut mentionner le rôle joué par la première strophe de ce qui est devenu l’hymne national. Par la présentation en trois vers successifs des trois principales rivières, elle symbolise l’unité du pays tout en reflétant un attachement de type régionaliste. Si, pour des raisons historiques, le bassin minier en tant que tel est encore largement absent des chants patriotiques de la fin du 19e siècle, il occupe une place de choix dans l’iconographie nationale de la première moitié du 20e et en particulier dans les textes et tableaux produits à l’occasion des grandes expositions universelles. À

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

titre d’exemple, on peut se référer à la fresque décorant le pavillon luxembourgeois à l’exposition de New York en 1939. Due à Harry Rabinger et Jean Schaack, elle représente de façon très schématique les trois paysages régionaux susceptibles de mettre en évidence certains sites importants du Grand-Duché : le bassin minier, la ville de Luxembourg et l’Ösling. On retrouve d’ailleurs cette juxtaposition des emblèmes respectifs du progrès économique et du passé médiéval dans de nombreux ouvrages destinés à la jeunesse datant de la même époque, comme par exemple dans la revue Morgenglocken, qui fait précéder sa rubrique « Ons Hémecht » d’un logo composé d’une aciérie et d’un château en ruines et qui propose sur sa page de couverture la même vision synthétique du paysage national. Dans une des nombreuses pièces de théâtre proposées par la revue, le bassin minier est présenté comme « en Edelstén an der Letzeburger Kro’n23 ». Lors des expositions universelles, il arrivait évidemment aussi que l’on consacre une œuvre importante à l’une des régions en question afin de mettre en évidence les atouts du pays tout entier. On cite régulièrement dans ce contexte l’exemple de la fresque monumentale intitulée « Terres rouges » que Rabinger réalisa pour l’exposition universelle de 1937 à Paris. Participant d’une esthétique expressionniste, elle propose une vision très personnelle de la ville d’Esch, complètement dominée par l’usine. Comme l’a souligné Denis Scuto24, le Luxembourg entendait par là mettre en évidence sa puissance économique, garante, en quelque sorte, de son indépendance politique. Par-delà l’effet qu’ils étaient censés produire – et qu’ils ont peut-être produit – sur les visiteurs étrangers, les tableaux de Rabinger ont sans doute aussi influencé la vision des Luxembourgeois ; peut-être les ontils même incités à percevoir le bassin minier en tant que paysage. C’est du moins ce qu’a suggéré Nicolas Ries dans un texte consacré aux œuvres du peintre : « […] il aime passionné‑

20 Voir sur ce point LORANG, Antoinette, « D’Héichiewen », in Lieux de mémoire au Luxembourg [voir note 4], p. 215-220. 21 Sur la ville de Luxembourg, voir THEWES, Guy, « La silhouette de la ville », in Lieux de mémoire au Luxembourg [voir

note 4], p. 253-257.

22 NOPPENEY, Marcel, « Le Tourisme en Luxembourg », in Le Grand-Duché de Luxembourg, publié à l’occasion de

l’exposition universelle et internationale de Bruxelles, Luxembourg : Bruxelles : 1935, p. 139 et p. 141. TRAUFFLER, Henri, « He’ch ! Du jonge Grossherzog ! », Morgenglocken. Luxemburger Kinderzeitung, 7-8 1939, p. 150. 24 SCUTO, Denis, « Art et révolution industrielle au pays de la terre rouge. Réflexions sur quelques œuvres d’art de la Collection de la Ville d’Esch-sur-Alzette », in Esch-sur-Alzette. Du village à la ville industrielle. Art et révolution industrielle au pays de la terre rouge, Esch /Alzette, 1989, p. 72-73. 23

15


Terres Rouges

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

Fresque de J. Schaack et H. Rabinger décorant le pavillon luxembourgeois à l’Exposition universelle de New York, en 1939. Photo : collection privée

ment les terres rouges et les fonds chaotiques de notre Bassin minier. Il n’est pas exagéré de dire que c’est lui qui nous a révélé la beauté sauvage des vieilles minières abandonnées. C’est là que l’expressionnisme de son coloris, l’intensification des contrastes et le paroxysme de sa vision peuvent s’en donner à cœur joie…25 ». Dans le domaine de la littérature, l’équivalent d’Harry Rabinger est d’une certaine façon Nikolaus Welter. Cet écrivain et intellectuel très influent au cours de la première moitié du 20e siècle est l’auteur d’un recueil intitulé Hochofen qui, après sa publication en 1913, a été repris dans de nombreuses anthologies et abondamment cité : le travail y est glorifié et souvent, il est mis en relation avec l’indépendance politique du pays : Sei gegrüßt mir, Land der roten Erde, Land der Arbeit du! Wachs mit Schulen und mit Schloten Einer freiern Zukunft zu! Zu der Heimat Glück und Glanze, Fern den Bahnen blut’gen Ruhms, Krön’ die Stirn dir mit dem Kranze Eines reinen Menschentums!26 On peut penser que beaucoup de Luxembourgeois voyaient, dans la première moitié du 20e siècle, le bassin minier à travers une « grille »

weltérienne. C’est en tout cas ce que suggère Arthur Hary dans un volume consacré à la région : « Man wandert kaum durch’s Erzland ohne an irgend einen Vers aus Nikolaus Welters Hochofen zu denken. Weil er wie kein anderer vor ihm das Erzland mit Seheraugen schaute und es verstanden hat auch unser Auge einzustellen für die Schönheit dieser Welt27.» Erzland comprend d’ailleurs une contribution consacrée exclusivement à Hochofen, où on lit que le recueil de Welter est « ein Kulturdenkmal unserer Zeit, so wie unsers Landes28.» Surtout, certains textes de Nikolaus Welter établissent un rapport tout à fait explicite entre le bassin minier et les autres régions du pays en insistant sur le fait que la scorie de Thomas a fertilisé les sols des plateaux de l’Ösling, comparés en l’occurrence à la Terre promise. Il n’est donc guère étonnant que les vers en question soient cités dans Jenseits der Schulmauern de Paul Staar, un inspecteur de l’école primaire qui, à l’époque de l’entre-deuxguerres, souhaitait réformer l’enseignement et renforcer l’attachement des enfants à leur pays (« Heimat ») en multipliant les promenades en plein air. C’est ainsi qu’il se représente l’instituteur idéal faisant découvrir la géographie luxembourgeoise à ses élèves: Die Klasse, die am Feldrain dem Bauer, der Thomasmehl streut, neugierig zusieht, wirft

25 RIES, Nicolas, « Harry Rabinger ou le coloriste pathétique », Les cahiers luxembourgeois, numéro spécial (6), « L’art des

jeunes », 1927-1928, p. 481-489, ici p. 488. WELTER, Nikolaus, „An das Land der roten Erde“, in Hochofen, Luxemburg 1916, p. 8. 27 « Zolverknapp », in HARY, Arthur (dir.), Erzland. Das Buch der Geschicke und Geschichte der Minettsgegend, Luxembourg 1917, p. 33. 28 Ibid., p. 70-75. 26

16


Terres Rouges

von dem nahen Bergkegel aus einen Blick nach Süden, dem Land der roten Erde, und sieht mit Nikolaus Welter im Geiste, wie „eine Wolke, gleich der Wolke, die dem Volke Jehovas vorgeschwankt im Wüstenzug, nach Norden ihren schweren Flug“ nimmt und dort, wo ihr Schoβ sich auftut, „die Schiefertrift ein Kanaan“ wird und alles grünt und blüht und reift in Gartenpracht29. D’autres procédés, moins axés sur la sidérurgie en tant que telle que sur les habitants, ont été utilisés afin de faire du bassin minier le symbole d’un certain nombre de valeurs luxembourgeoises. Si, comme cela était encore le cas au cours de la première moitié du 20e siècle, l’on fait dépendre l’appartenance nationale de facteurs climatiques et géographiques, il est tentant de définir les caractéristiques physiques et psychologiques des habitants par les propriétés géologiques de la région qu’ils habitent. La psychologie des peuples, une tradition importante qui a joué un rôle non négligeable dans la montée des nationalismes à la fin du 19e et au début du 20e siècles, a souvent recours à ce procédé30. De nombreux ouvrages sur le Luxembourg comprennent une contribution du géologue Michel Lucius, qui affirme par exemple dans le Livre du Centenaire que « l’évolution géologique de l’aire qui s’est formée entre les anciens massifs qui sont devenus depuis la France et l’Allemagne » est comme une « préfiguration de la vie de la race qui devait habiter plus tard cette terre31. » Lucius suggère dans le même contexte que cette terre « prédisposait à l’éclosion d’une âme luxembourgeoise » et que « la disposition topographique si variée de notre patrie […] donne la clef de la vie matérielle et morale d’une race saine avec ses vertus et ses

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

défauts32. » En 1956, dans le Livre du cinquantenaire de la ville d’Esch, il soutient les mêmes thèses déterministes au sujet du bassin minier33 mais, contrairement à ce que l’on pourrait attendre, il ne présente guère les Eschois (ni les « Minettsdäpp » d’une manière générale) comme des Luxembourgeois exemplaires, alors que ce procédé a souvent été appliqué aux habitants des autres régions : le professeur luxembourgeois Joseph Hess ne qualifie-t-il pas les habitants de la vallée mosellane de « gesteigerte Luxemburger » en raison de leur ténacité et d’une certaine joie de vivre qui les caractériserait34 ? Quant aux paysans de l’Ösling, leur entêtement, leur fidélité et leur esprit conservateur ont souvent été présentés comme des vertus luxembourgeoises, que Nicolas Ries attribue essentiellement au conditionnement géographique. La nature aurait, d’après l’Essai de psychologie, altéré, voire fait disparaître, une franchise initiale qui serait restée intacte chez les habitants du bassin minier, grâce à la proximité de la France : Il est assez intéressant de constater que les manifestations de notre franchise […] sont particulièrement énergiques dans les grandes agglomérations industrielles et ouvrières du sud-ouest du pays, qui confine à la France. Là, aucune trace d’hypocrisie, ni dans les sentiments ni dans les relations quotidiennes. Dans ce coin de terre, l’esprit de critique et de libre examen semble être né au contact du vent de liberté et de l’égalité soufflant de la France. C’est là aussi que les doctrines socialistes, rompant en visière aux mensonges et aux privilèges injustes, ont trouvé leurs chefs autorisés et leurs adeptes les plus fervents. Ailleurs, les circonstances, et l’influence du milieu ont empêché l’esprit de franchise de se

29 STAAR, Paul, Jenseits der Schulmauern. Ein Buch verwegener Schulmeistergedanken um Wandern, Schauen und

Verstehen im heimatlichen Lebensraum, Saarlouis 1935, p. 140.

30 WALTER, François, Les Figures paysagères de la nation [voir note 12], p. 109-113. 31 LUCIUS, Michel, « La terre luxembourgeoise », in Le Luxembourg. Livre du Centenaire, édité sous les auspices du

gouvernement grand-ducal, Luxembourg 1948, p. 507-563, p. 510.

32 Ibid., p. 509 et 510. 33 « L’histoire géologique d’une région bien délimitée par les particularités de son sous-sol est l’histoire raisonnée et

explicative de la communauté humaine qui y a pris racine. La dépendance à la fois matérielle et morale de l’homme de la configuration morphologique et des particularités chimiques et structurelles du sous-sol est naturelle et logique. L’évolution historique de l’humanité en général aussi bien que celle d’une communauté plus restreinte, mais caractérisée par un patrimoine matériel et spirituel distinctif, est en dernier lieu fonction de l’évolution géologique qui a formé l’espace dans lequel l’homme est contraint de chercher tout ce qui est nécessaire pour le développement de la vie, de la civilisation et du progrès. » LUCIUS, Michel, « La géologie de la région d’Esch », in Livre du cinquantenaire d’Esch, Esch /Alzette, 1956, p. 61. 34 HESS, JOSEPH, « Volkskundliches von der Mosel », in 25e anniversaire de la Fédération viticole du Luxembourg, 19121937, Luxembourg 1938, p. 45, passage cité également dans COLBACH, Joseph, Eis Musel. La rivière, le vin, les gens (photos de Rob KIEFFER), Luxembourg 1998.

17


Terres Rouges

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

déclarer avec la même intensité. Dans les montagnes sauvages des Ardennes, où la nature ingrate n’accorde aux habitants ses faveurs précaires qu’au prix d’un labeur opiniâtre et de ruses incessantes, la franchise initiale a tourné en opiniâtreté et en ruse. Ces deux qualités, l’entêtement et la ruse, que, d’ailleurs, ils partagent en partie avec les riverains de la Moselle et avec la plupart des montagnards, sont devenues proverbiales dans le pays35. Si les habitants du bassin minier n’ont guère été présentés comme des Luxembourgeois « accomplis », c’est peut-être en partie parce qu’il s’agit d’une région de forte immigration : ceci rendait plus difficile l’application des lois de la traditionnelle psychologie des peuples. On sait aussi qu’à la période qui nous intéresse tout particulièrement – l’entre-deux-guerres – une certaine élite, influente et engagée de façon plus ou moins directe dans la construction de la mémoire collective, avait tendance à valoriser avant tout le monde paysan et à en faire l’emblème des valeurs luxembourgeoises : des revues comme Landwûol, publiée par l’« Association luxembourgeoise pour le retour à la terre » (« Verein für ländliche Wohlfahrts- und Heimatpflege ») sont particulièrement représentatives de cette vision du passé et de la nation36. Les adeptes du « retour à la terre » et la bourgeoisie voyaient évidemment aussi d’un mauvais œil l’essor du syndicalisme et des idées socialistes, inséparable du bassin minier. Dans les romans de Jean-Pierre Erpelding, les ouvriers et les mineurs sont le plus souvent présentés comme des éléments dangereux dans la mesure où ils sont favorables au socialisme. Il s’agit d’ailleurs fréquemment de paysans ruinés, pauvres ou incapables de gérer leur patrimoine, c’est-à-dire de personnages qu’Erpelding exclut de l’univers qu’il construit dans ses romans paysans. Toutefois, même dans certains de ces romans, le bassin minier est associé à une valeur très prisée dans la société de l’époque et parfois considérée comme une caractéristique de 35 36 37 38 39 40

18

toute la population luxembourgeoise : le travail. Dans Auf der Wasserscheide, l’écrivain Jacques Kintzelé présente ainsi la fumée des usines comme « das Wahrzeichen der Heimat » à cause du rapport étroit qu’elle entretient avec le travail37. En 1917, Arthur Hary propose dans son livre sur le bassin minier un texte intitulé « Unser Minettsbassin, ein Erzieher zur Arbeit38. » Le thème apparaît aussi dans un texte de Marcel Reuland publié en 1956 dans le Livre du Cinquantenaire de la ville d’Esch-sur-Alzette, où, comme souvent, le travail est lié à la prospérité dont bénéficie le pays tout entier : An denge Gaasse wunnt de Fläiss, den aus den Uewe, gliddeg wäiss, e Feierbiirche sprangen dèt, dé blénkegt Gold duurch d’Lännche sprèt39. Dans le même ouvrage, on considérera aussi l’introduction du député-maire Antoine Krier : Le passé de la ville d’Esch répond surtout au rythme essentiel de la vie : le travail quotidien. C’est lui qui est à la base de ces 50 dernières années d’efforts inlassables voués à l’édification de cette cité salubre et hygiénique, débordante d’activités et grouillante de vie intense […]. Nulle part ailleurs que dans cette capitale du labeur ne se trouve réalisée aussi parfaitement la tendance qui considère le travail comme facteur primordial, créateur de toutes les valeurs, et qui essaie de faire abstraction des droits de naissance et de l’argent40. Comme le suggère le texte d’Antoine Krier, les habitants se sont reconnus dans les descriptions du bassin minier qui soulignaient la place essentielle qu’y occupe le travail. En revanche, il semble bien qu’ils aient refusé du moins en partie l’image réductrice de leur région, associée exclusivement à l’industrie lourde. Il est vrai que la volonté d’attirer quelques randonneurs n’y est sans doute pas étrangère, mais ce passage publié en 1962 dans une brochure est tout à fait révélateur de la volonté de lutter contre

RIES, Nicolas, Le Peuple luxembourgeois. Essai de psychologie, Diekirch 1920, p. 243-244. (1e édition: 1911). Sur le périodique et l’association, voir BLAU, Lucien, Histoire de l’extrême-droite au Grand-Duché de Luxembourg, Esch/Alzette 1998, p. 344-350. KINTZELÉ, Jacques, Auf der Wasserscheide. Ein Roman von der Luxemburger Erde, Grevenmacher [s.d.], 2e édition, p. 102. Texte signé J. B. dans Erzland. Das Buch der Geschicke und Geschichte der Minettsgegend [voir note 19], p. 68-70. REULAND, Marcel, « Festkantus fir de Cinquantenaire vun der Staadt Esch », in Livre du cinquantenaire de la ville d’Esch-sur-Alzette [voir note 25], p. 14-16, ici, p. 16. Ibid., p. 10-11.


Terres Rouges

certains stéréotypes et de mettre le bassin minier dans une lumière favorable : Cette ville bien connue comme première cité du fer du Grand-Duché est loin de se présenter dans la tenue malpropre et triste qu’on rencontre ordinairement dans les cités industrielles, dont l’atmosphère est enfumée et grisâtre. Ici ce sont de riches prairies et des champs fertiles qui entourent la ville d’Esch… Les visiteurs sont étonnés de trouver une ville ouvrière coquette à l’allure quelque peu patricienne. Les crassiers sont reculés à la périphérie de la ville. On n’y trouve ni l’air noirâtre d’un pays charbonnier, ni l’ambiance grisâtre des chantiers et des hauts-fourneaux. Le vert émeraude des mélèzes et le reflet rutilant de la minette donnent un coloris séduisant aux hauteurs qui dominent la ville du Sud-Ouest41. L’insistance sur les beautés paysagères du bassin minier reste également présente dans un certain nombre de publications plus récentes, comme par exemple Minette. À ciel ouvert (éditions Schortgen, 2005), où l’accent est toutefois mis en particulier sur l’importante métamorphose qu’a connue la région. C’est cette métamorphose aussi qui explique sans doute la place importante que le bassin minier occupe dans la littérature luxembourgeoise plus récente, voire contemporaine : la région d’Esch (et la ville de Luxembourg) y sont beaucoup plus présentes que la vallée mosellane, l’Ösling et la région de Mersch, pourtant très bien représentés dans les textes antérieurs à la crise sidérurgique. Dans certaines publications s’affiche clairement l’intention de rendre hommage aux ouvriers et aux mineurs, à une époque où de moins en moins de jeunes connaissent leurs conditions de travail. Souvent, il s’agit accessoirement ou même essentiellement de célébrer la mémoire de syndicalistes ou de défenseurs de la cause ouvrière. On songe en particulier à une pièce de théâtre comme Um Block de Fernand Barnich, qui a été créée au théâtre municipal d’Esch le 10 janvier 1976 et publiée par le « Volksbildungsverein » de Differdange en 1977. Se déroulant entre 1907 et 1935 à Rumelange, elle raconte l’histoire de Jean-Pierre

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

Bausch qui, le 7 février 1935, fit un discours à la Chambre des députés pour plaider la cause des mineurs et mettre en évidence la misère de la condition ouvrière. Que la gauche ait tout particulièrement encouragé de telles initiatives, en particulier à une époque où beaucoup de mines furent fermées, la brochure éditée à l’occasion de la représentation d’Um Block à Lasauvage en témoigne. Elle contient en effet des contributions de plusieurs syndicalistes (Mars di Bartolomeo et Léon Claus de l’OGB-L) ainsi qu’une préface du maire Nick Eickmann (POSL), qui affirme la nécessité de rendre hommage à Bausch au moment où la mine de Lasauvage n’est plus : […] Et woar eng gudd Iddi, dem Fernand Barnich säin Theaterstéck „Um Block“ ausgerechnet zu Lasauvage opzeféieren. Lasauvage, wat nëmme Biergbau woar, mat allen Traditiounen déi derzou gehéieren, Lasauvage, wat 1979 op eng drastesch Manéier huet missen erliewen, wéi séng Galerien, d’Oarbechtsplaz vun séngen Awunner, vun haut op moar zougemaach si gin. D’Biergleit hun deemols d’Welt nët méi verstanen. De „Block“ gët ëmmer méi nëmmen nach Geschicht. Et gët der ëmmer manner, déi e matgemaach hun. Eis Kanner kënnen sech d’Galeriesoarbecht nët méi viirstellen. […] Et get dofir Zäit, dass dene Männer, awer och all denen, déi fir de Räichtum am Land hiirt Liewen hu misse loossen, e literarescht, mä och en historescht Monument gesat gët42. À la même époque, d’autres auteurs font allusion aux dures conditions de vie qu’ont connues les mineurs et les ouvriers. C’est entre autres le cas de Nico Helminger, qui, dans « landschaft mit seilbahn », renonce toutefois à présenter les ouvriers comme les constructeurs de l’indépendance nationale : 1. andere denken : wintersport ich habe grubenarbeiter gespielt krater in die wiese gegraben über mir schwebten in regelmässigen abständen die erzbrocken43.

41 « Le Tourisme et le Bassin minier », in Grand Bal organisé à l’occasion de l’anniversaire de la naissance de SAR

Monsieur le Prince de Luxembourg, 29 septembre 1962 (amicale de la gendarmerie), p. 45.

42 EICKMANN, Nic, préface, in Um Block. Stéck aus dem Minett vum Fernand Barnich, brochure éditée par le comité

d’organisation „Um Block“, 1990, p. 5.

43 HELMINGER, Nico, landschaft mit seilbahn, Echternach; Luxembourg 1986, p. 9.

19


Terres Rouges

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

Si, d’une manière générale, on continue à rendre hommage aux mineurs et aux ouvriers du bassin minier, l’existence même des « Minettsdäpp » est mise en question dans un certain nombre de textes écrits suite à la fermeture de la dernière mine luxembourgeoise. Dans sa postface à un album de photographies de Jean Back, Mars Klein n’ironise pas seulement sur les efforts de patrimonialisation qui furent déployés dès cette époque, mais il affirme aussi que les habitants du bassin minier ne se distinguent plus des autres Luxembourgeois : Es gibt unterschiedliche Arten der Rekonversion einer Gegend. In Lothringen ist in den Hallen einer Schmelz ein Freizeitparadies eingerichtet. In Amerika ist ein erstes komplettes Hochofenund Stahlwerk als historisches Museum funktionstüchtig erhalten. Wir tun bescheidener: Bauen um das letzte „klassische“ Bergarbeiterbistro in Fond de Gras Ausstellungshallen für gerettete Fossilien aus dem industriellen Maschinenpark, lassen das Denkmalschutzamt Lasauvager Reihensiedlungen zu Bonbonnièren verputzen und speichern Tonbanderinnerungen von pensionierten Bergleuten. Wollen wir uns wachkneifen! Noch wird bei uns aus (importiertem) Erz Eisen gewonnen und daraus Stahl gebraut. Immer noch produziert die Schmelz ihre unverkennbaren Geräusche, Gerüche, Farben, Staubemissionen. Und immer noch geht der Minettsdapp davon aus, dass es den Minettsdapp gibt. Auch wenn die internationale Fernsehkultur aus ihm längst einen gesamtwesteuropäischen Kleinbürger fabriziert hat44. Cette distance ironique n’est pas rare dans d’autres textes relatifs au bassin minier. Dans Eisefrësser, une pièce qui a été montée par le théâtre d’Esch en collaboration avec l’association « Minettsdapp – Kultur am Süden », on voit un habitant du bassin minier qui se propose de dévorer cinquante kilos d’acier luxembourgeois afin d’établir un record. La description de

ce métal, assurée par un « animateur », constitue un véritable catalogue de stéréotypes, dont Rewenig met en évidence le caractère ridicule : 50 Kilo renge Lëtzebuerger Stol, a Batz Eise wéi aus dem Billerbuch, eng Klatz gedréint aus dem Häerz vum Minettsbuedem. Geréischtert an der Flam vum Héichuewen, an d’Form gepresst vun enger Schinn duerch fläisseg Oarbéchtsleit, die keemol hun nët Tréin nët Schweess bereit, an daper wudd’ren an der Stoolwierkglous, an d’Eisen zéien aus dem Minettsschouss, fir datt eis Heemecht wiist a blitt, wann d’Quonkefeier an den Himmel flitt45. Dans d’autres textes, le thème de la mémoire est ouvertement abordé – de façon plus explicite encore que dans Eisefrësser – ou s’avère même être le sujet central. La dernière section du poème « landschaft mit seilbahn » est assez représentative de cette tendance : aus dem gras wachsen schienen heraus wenn du dir mühe gibst kannst du sogar die hochöfen sehen an den kabeln klebt moos die kipploren rosten die seilbahn ist stillgelegt die grube ist stillgelegt nicht die erinnerung nicht die geschichte46 Mais c’est peut-être dans Miss Minett que l’on trouve la réflexion la plus explicite sur la mémoire et sur l’importance de la préserver à une époque où la fin de la sidérurgie luxembourgeoise semble proche. Nico Helminger fait ainsi dire à l’un de ses personnages qu’une fanfare de mineurs sans mineurs est un anachronisme et il met dans la bouche d’un ancien ouvrier de l’ARBED le discours suivant : ouni déi vergaangenheet wäärs du nët wat s de bas. ech erzielen dervun sou laang ech liewen.

44 KLEIN, Mars, postface, in BACK, Jean, Photographies 1983 à 1987. Lieux et portraits au bassin-minier, [s. l.] : [s. n.],

1989, section 5 de la postface (pages non paginées).

45 REWENIG, Guy, Eisefrësser, Echternach 1994, p. 8. 46 HELMINGER, Nico, landschaft mit seilbahn [voir note 35], p. 10.

20


Terres Rouges

alles gët nët vergiess, dat soen ech der! d’héichiewen sprengen se ewech an d’kamäiner, fënnefanzwanzeg kilo dinnamitt a fort mat der vergaangenheet. déi schlëmm erënnerung gët endlech dem buedem gläich gemaach. […]. d’spezialiste komme mam sprengstoff a blosen all erënnerung an de wand! zu lonkéch wollt deen zweeten héichuewen nët falen; mateneen sollten déi zwee an d’gette goen, awer deen een huet sech gewiirt, an d’spezialisten hun nach eng sendung musse bäigin, verstees de, well d’erënnerung sech gewiert huet47. On peut se demander si le bassin minier ne doit pas sa popularité dans le domaine artistique contemporain à la mutation qu’il a connue, ainsi qu’à tout ce qui le distingue de ces « lieux de mémoire » classiques que sont la vallée mosellane et l’Ösling. À l’entre-deux-guerres et même encore dans les années 1950, et notamment grâce à un certain nombre de textes patriotiques, ces régions devaient leur force symbolique à la métonymie qui permettait d’associer la terre à ceux qui la cultivaient et

« De Minett » comme « lieu de mémoire »

qui y étaient nés. Or, très critiques à l’égard de certains aspects de la société luxembourgeoise, des écrivains comme Guy Rewenig ou Nico Helminger (et d’ailleurs Roger Manderscheid) comptent précisément s’attaquer à cette vision idyllique du pays, rompre avec la tradition du « Heimatroman » dans laquelle s’inscrivent les romans d’Erpelding. D’où sans doute leur attachement à une région souvent mise en relation avec les idées progressistes, la culture alternative et le changement, et en ce sens diamétralement opposée aux campagnes servant de toile de fond à certains textes antérieurs. Par ailleurs, à une époque où l’interculturalité est de plus en plus valorisée par les médias, le brassage culturel fascine, et il est volontiers présenté comme une caractéristique essentielle du pays tout entier. Cela explique sans doute en partie le rôle joué par le bassin minier dans la mémoire collective. Quant aux friches industrielles, elles sont par excellence des « non-lieux » qui, on le sait, apparaissent comme des expressions particulièrement nettes de ce qu’on a appelé la « surmodernité48. »

47 HELMINGER, Nico, Miss Minett, Echternach 1993, p. 33. 48 Voir Marc AUGE, Non-lieux. Introduction à une anthropologie de la surmodernité, Paris 1992.

21



Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters Michael Overbeck

Le Luxembourg est un don du fer, comme l’Egypte est un don du Nil. Diesen ebenso eindrucksvollen wie häufig zitierten Vergleich stellte der ehemalige Luxemburger Börsenpräsident und Handelskammerdirektor Carlo Hemmer in den 1950er Jahren an und veranschaulichte damit den Zusammenhang zwischen der Entwicklung der modernen Eisenindustrie und dem rasanten Wandel des einstigen Agrarlandes zur Industrienation. Der wirtschaftliche Aufstieg Luxemburgs, das zu Beginn des 20. Jahrhunderts sogar zu den zehn größten globalen Stahlproduzenten zählte, nahm seinen Ausgang, als das Land 1842 dem Deutschen Zollverein beitrat und Norbert Metz im Jahr 1879 ein Patent auf das basische Thomas-Verfahren erwarb. Von nun an war es möglich, die phosphorreichen und vergleichsweise eisenarmen Erze (Minette) des Landes effizient im Hochofenverfahren zu nutzen. Bis in die 1970er Jahre war die Schwerindustrie der bedeutendste Wirtschaftszweig des Großherzogtums und auch heute noch sind die Spuren der ehemals prosperierenden Stahlindustrie vor allem im südwestlichen Teil des Landes nahezu allgegenwärtig. Zahlreiche schützenswerte Industriedenkmäler tragen wesentlich zur Unverwechselbarkeit dieser durch Eisen und Stahl nachhaltig geprägten Kulturlandschaft bei. In der öffentlichen Wahrnehmung ist Luxemburg vor allem für seine Eisenindustrie bekannt und seit 2007 Firmensitz des weltgrößten transnationalen Stahlkonzerns ArcelorMittal. Als weithin sichtbares Erbe einer inzwischen längst vergangenen Epoche sollen derzeit die still­gelegten Hochöfen des Hüttenwerkes bei Belval als Sachzeugen der Industrieentwicklung zum Wahrzeichen eines nationalen Zentrums für Industriekultur (Centre National de la Culture Industrielle – CNCI) im sogenannten „Ruhrgebiet Luxemburgs“ werden. Die Geschichte dieser traditionsreichen Eisenlandschaft beginnt jedoch bereits viele Jahrhunderte vor der Einführung des ThomasVerfahrens und somit lange vor Beginn der Industrialisierung. Gestützt auf die reichen

Erzvorkommen wird in Luxemburg bereits seit mehr als 2000 Jahren Eisen (bzw. Stahl) in verschiedenen spezialisierten Verfahren produziert und verarbeitet. Weil die Kenntnis der Metallproduktion und -verarbeitung sowie deren Entwicklung als integraler Bestandteil allgemeiner Kulturgeschichte zu verstehen ist, beschäftigt sich die Montanarchäologie mit diesen quellenarmen Zeitabschnitten, für die in der Regel kaum schriftliche Quellen oder bildliche Zeugnisse zur Verfügung stehen oder sogar gänzlich fehlen. Im Mittelpunkt dieser spezialisierten Fachrichtung steht das Montan- und Hütten­ wesen. Dabei ist die Montanarchäologie nicht an spezielle geografische Regionen oder Zeitabschnitte gebunden. Forschungsgegenstand sind sowohl Spuren der mineralischen Rohstoff­ gewinnung in Form von Bergbau­arbeiten als auch Hinterlassenschaften der Aufbereitung und Verhüttung von Metallerzen sowie der daran anschließenden Weiterverarbeitung produzierter Metalle. Die Montanarchäologie versucht extraktive Prozesse (Bergbau) archäologisch relevanter Metallerze (z. B. Eisenerze) sowie deren Aufbereitung und Verarbeitung im Rahmen chemisch-physikalischer Hochtem­pera­­tur prozesse (Verhüttung) zu rekonstruieren, um auf diese Weise den Weg von der Lagerstätte zum Fertig- bzw. Handelsprodukt nachzuzeichnen. Dabei beschränkt sich die Forschung jedoch nicht auf die Rekonstruktion spezifischer Abbaumethoden und Herstellungsprozesse, sondern schließt verstärkt weiterführende Fragestellungen nach Organisationsstruktur, Techniktransfer, Umwelteinflüssen, Handel und Güter­ austausch ein. Indem die Montanarchäolog­ie Fragen nach der kulturellen Bedeutung der Metalle sowie der zugehörigen Verarbei-­ tungs­prozesse in den jeweiligen Gesellschaften, Regio­nen und Epochen behandelt und darüber hinaus bemüht ist, diese in ihrem kulturellen, sozialen und wirtschaftlichen Umfeld zu verstehen,­ ist sie in der Lage, einen bedeutenden Beitrag zur Kultur-, Sozial-, und Wirtschaftsgeschichte der jeweiligen Forschungsregionen zu leisten. 23


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

Montanarchäologische Forschung ist inter­ disziplinäre Forschung. Die Archäologie ist mit ihren spezifischen Arbeitsmethoden ­alleine nicht in der Lage, sämtliche Fragen zu beant­worten, die bei der Erschließung monta­nistischer Boden­ denkmäler und Funde im Sinne einer umfassenden und nachhaltigen Unter­suchung gestellt werden müssen. Aus diesem Grunde ist vor allem die intensive Vernetzung und Kooperation mit wissenschaftlichen Nachbardis­ziplinen ein charakteristisches Merkmal montanarchäologischer Forschungsprojekte (siehe Abb. 01). Jeder Verfahrensschritt vom Erz zum Metall produziert charakteristische Rückstände und Bodenverfärbungen, die unter günstigen Be­dingungen sämtlich archäologisch fassbar sind. Als Feldwissenschaft bedient sich die Montanarchäologie daher einer Kombination von archä­ologischen und geologischen Methoden, die durch moderne analytische Verfahren, z. B. aus dem Bereich der Werkstoffkunde, ergänzt werden. Ein zentraler Bestandteil der Gelände­arbeit besteht in der Sammlung von aussagekräftigem Probenmaterial. So liefern zum Beispiel geologische Untersuchungen Anhaltspunkte zur Auffindung der ehemals genutzten Lager­stätten. Chemische, mineralogische sowie metallo­ grafische Analysen von u. a. Schlacken und Metall ermöglichen die Rekonstruktion technischer Prozesse und beantworten Fragen bezüglich der produzierten Metallqualitäten. Material-

ana­lysen ermöglichen darüber hinaus einen Einblick in die Fertigungstechniken bis hin zur Dokumentation individueller Fertigkeiten einzelner Handwerker. Erzprovenienzen können gegebenenfalls mittels Spurenelement­analysen nachgewiesen werden und lassen Rückschlüsse auf Transportwege sowohl der Rohstoffe als auch der Fertigprodukte zu. Aussagen zur Brennstoffversorgung und Umwelt sind anhand von Holzkohlen und Pollenprofilen möglich. Schließlich gestattet die Geschichtsforschung durch das Studium überlieferter Urkunden und Quellen die Einordnung der Funde und Befunde in einen historischen bzw. wirtschafts­historischen Gesamtzusammenhang. Seit mehr als 20 Jahren werden auch an der Westfälischen Wilhelms-Universität Münster, Abteilung für Ur- und Frühgeschichtliche Archä­ologie, interdisziplinär angelegte montanarchäologische Untersuchungen zur Geschichte des Eisens durchgeführt. Neben der Frage nach der Organisation mittelalterlicher Eisenlandschaften sollte vor allem die technologische Entwicklung vom Rennofen zum Hochofen durch die Erschließung neuer Sachquellen beleuchtet werden1. Als Fortsetzung dieses etablierten Forschungsschwerpunktes wurde im Jahr 2002 ein internationales Pilot­projekt in Kooperation der Westfälischen Wilhelms-Universität Münster mit dem Musée National d´Histoire et d´Art und dem Musée

Abb.1: Die Montanarchäologie und ihre wissenschaftlichen Nachbardisziplinen. 1 Siehe dazu die Auswahl an weiterführender Literatur am Ende dieses Beitrags.

24


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

Rural et des Calèches Peppange ins Leben gerufen2. In einem Verbund mit zwei weiteren deutschen Hochschulen sollte eine hoch- bis spätmittel­alterliche Eisenhütte des 13./14. Jahrhunderts im äußersten Süden Luxemburgs mit Hilfe naturwissenschaftlicher Analyseverfahren und unter Berücksichtigung geologischer, ökolo­gischer sowie territorialgeschichtlicher Rahmenbe­dingungen umfassend untersucht werden3. An der FundDie Eisenhütte aus dem Genoeserbusch 13./14. Jahrhundert

stelle im Genoeserbusch bei Peppange (Kanton Esch-sur-Alzette, Gemeinde Roeser) haben Prospektionen (Geländebegehung, Sondage­grabung, geomagnetische Vermessung) im Vorfeld der verschiedenen Grabungs­­kampagnen der Jahre 2003 bis 2005 gezeigt, dass sich auf dieser mittelalterlichen Eisenhütte verfahrenstechnisch unterschiedliche Prozesse überlagerten. Sie konnten sowohl verschiedenen Arbeitsschritten derselben metalltechnologischen EntwickOfen Schmiedeherd Erz Schlacke

Abb.2: Genoeserbusch. Das gesamte Hüttenareal war klar strukturiert. Im Zentrum wurden Öfen, Ausheiz- bzw. Schmiedeherde und Rohstofflager so angeordnet, dass die einzelnen Produktionsschritte möglichst effektiv ausgeführt werden konnten. Das Abfallprodukt der Verhüttung - die Schlacke - deponierten die Arbeiter hingegen auf vier Halden im Randbereich der Eisenhütte (Maßstab im Bild 1 m).

2 Der Autor dankt an dieser Stelle der Fondation Bassin Minier, die nicht nur diese Publikation in ihre neue Schriftenreihe

aufnahm, sondern auch das montanarchäologische Forschungsprojekt im Genoeserbusch finanziell förderte.

3 Projektpartner waren das Labor für Mikrosondentechnologie am Geowissenschaftlichen Zentrum (GZG) der

Georg-August-Universität zu Göttingen (Dr. A. Kronz) und die Arbeitsgruppe für Historische Geobotanik am Ökologie Zentrum der Christian-Albrechts-Universität zu Kiel (Prof. Dr. O. Nelle). Der Diplom-Biologe H. Chr. Küchelmann bestimmte darüber hinaus die Knochenfunde aus dem Genoeserbusch und der Archäologe Th. Schiermeyer M.A. bearbeitete die Keramikfunde der Eisenhütte. Die geophysikalische Vermessung vor Beginn der Ausgrabungen führte M. Posselt M.A., Firma PZP – Posselt und Zickgraf Prospektionen, durch.

25


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

lungsstufe als auch verschiedenen Stufen einer sich weiterentwickelnden Eisenmetallurgie zugeordnet werden. Durch die interdisziplinäre Zusammenarbeit zwischen Archäologie, Geochemie, Mineralogie, Botanik und Geophysik ließ sich eine breit angelegte Datenbasis erarbeiten, die anschaulich verdeutlicht, wie eng technologische Entwicklung, Ressourcen­ nutzung und sozioökonomische Bedürfnisse im Mittelalter miteinander verknüpft waren. Im Zentrum des etwa 360 m2 großen zentralen Hüttenareals ließen sich die Überreste von sechs unterschiedlich gut erhaltenen Befun-

den nachweisen, die mit der Eisenproduktion zu verbinden sind. Der größte und wahrscheinlich jüngste Ofen aus dem Genoeserbusch (Ofen 1) hatte einen äußeren Gesamtdurchmesser von max. 210 cm und war ursprünglich etwa 150-200 cm hoch (siehe Abb.4). Pfostengruben deuten da­rauf hin, dass einfache Anbauten aus Buchen­­holz den Ofen in gewissem Umfang vor der Wit­terung schützten. Eine steinverstärkte Ofenbasis verlieh dem gesamten Aufbau – der ausschließlich aus Lehm bestand – die nötige Stabilität und isolierte zusätzlich den unteren Teil des Ofens,

Abb.3: Genoeserbusch. Um neue Erkenntnisse über die älteste Eisenindustrie Luxemburgs gewinnen zu können, sind auch kleinste Reste und Abfälle des mittelalterlichen Produktionsprozesses von Interesse. Entsprechend sorgsam musste bei den archäologischen Ausgrabungen vorgegangen werden.

26


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

in dem sich der hauptsächliche Reduktionsprozess vollzog. Sauerstoff wurde durch eine einzige eiserne Windform in das Ofeninnere geblasen (siehe Abb.5)4. Die Nutzung der Wasser­ kraft zum Antrieb der wahrscheinlich paarig ange­brachten Blasebälge ist aufgrund der topografischen Lage des Fundplatz (288-292 m ü. NN) sicher auszuschließen. In der zweiten Hälfte des 13. Jahrhunderts wurden im Genoeserbusch nach­einander unterschiedliche Ofentypen betrieben. Anhand der spezifischen Bauweisen der mehr oder weniger gut erhaltenen Befunde lässt sich eine Entwicklung in der mittelalterlichen Ofenbauund Verhüttungstechnik der Region aufzeigen. Das produzierte Eisen wurde in weiteren Verarbeitungsschritten zunächst vor Ort gereinigt (sog. Ausheizen) und danach ausgeschmiedet. Zunächst musste jedoch das aufgegebene Erz in den Verhüttungsöfen zu metallischem Eisen reduziert sowie Metall und Schlacke erfolgreich voneinander getrennt werden. Zusätzlich waren der Kohlenstoff- und der Phosphor­ gehalt des Metalls zu steuern. Ein erfolg­ reicher Verhüttungsprozess konnte jedoch nur dann gewährleistet sein, wenn alle physiko-­ chemischen Vorgänge im Innern der Öfen opti­ mal aufeinander abgestimmt waren. Sicher kannten die mittelalterlichen Hüttenleute noch nicht die chemischen und physikalischen Zusammen­hänge, die bei der Eisenverhüttung von Bedeutung sind. Dafür besaßen sie aber ein

großes Erfahrungs­wissen und waren mit den lokal verfügbaren Rohstoffen ebenso vertraut wie mit den Verhüttung­söfen, die sie mit Erfolg betrieben. Einen eindrucksvollen Beleg dafür lieferte die einheitliche Pauschalchemie der Schlacken. Demnach blieben nicht nur die genutzten Rohstoffquellen, sondern auch die Prozessparameter während der Betriebsdauer der Eisenhütte weitestgehend konstant. Erst nachdem die Verhüttungsöfen über mehrere Stunden durch den Abbrand von Holz oder Reisig vorgewärmt wurden und der zum Ofenbau verwendete Lehm keinerlei Feuchtigkeit mehr enthielt, konnte mit der Beschickung begonnen werden. Dazu wurde der Ofen durch die sogenannte Gichtöffnung am oberen Ende des Schachtes mit wechselnden Lagen aus Holzkohle und gepochtem, angereichertem Erz in einem festgelegten Mengenverhältnis befüllt. Um die Eisenoxide im Erz in metallisches Eisen umwandeln zu können, musste die Eisen-­ Sauerstoffverbindung im Erz gelöst werden. Dazu war es notwendig, dem System über ein künstliches Gebläse und den Abbrand von Holzkohle Energie in Form von Wärme zuzuführen. Die in den Ofen aufgegebenen Erze wurden schließlich stufenweise zu metallischem Eisen reduziert. Aufsteigende Hitze im Ofenschacht erwärmte die Erze, die durch das Abbrennen der Holzkohle immer tiefer im Ofenschacht hinab­ sanken und so allmählich in den Bereich mit den höchsten Temperaturen unmittelbar vor der

Abb.4: Genoeserbusch. Blick auf zwei Ofenruinen im zentralen Hüttenbereich. Unmittelbar neben einem kleinen Rennofen (Ofen 2) wurde nach dessen Stilllegung ein deutlich größerer Verhüttungsofen (Ofen 1) errichtet (Maßstab im Bild 1 m).

Abb.5: Genoeserbusch. Die eiserne Windform ist als archäologischer Fund bisher einzigartig in der Großregion Luxemburg/Lothringen. Schriftquellen belegen allerdings für das Jahr 1391 dass an einer „forge“ bei Champigneulles (Lothringen) „(...) une thoveire de fert“ in Gebrauch war (Maßstab im Bild 20 cm).

4 OVERBECK, Michael, Eine schmiedeeiserne Windform des 13./14. Jahrhunderts aus dem Genoeserbusch bei Peppange,

Luxemburg. In: Durch die Zeiten..., Festschrift für Albrecht Jockenhövel zum 65. Geburtstag (Studia honoraria, Bd. 28). Rhaden / Westf. 2008, S. 435-446.

27


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

Abb.6: Genoeserbusch. Im zentralen Hüttenbereich wurden verschiedene Erzsorten gefunden (Auswahl). Der Eisengehalt wurde auf wasserfreier Basis und Fetot als FeO berechnet. A.: 36,60 % Fe2O3; B.: 74,10 % Fe2O3; C.: 82 % Fe2O3.

Einblasöffnung bzw. Windform oberhalb der Ofenbasis gelangten. Bereits im Ofenschacht wurden die Eisenoxide des Erzes durch die aufsteigenden, heißen Reduktionsgase noch im festen Zustand vorreduziert. Lediglich geringe Mengen des vorreduzierten Erzes wurden dabei bereits in dieser Phase direkt zu metallischem Eisen weiterreduziert. Im weiteren Verlauf verflüssigte sich dieses zunächst noch feste Gemisch und es kam zur wesentlichen Reduktion des Eisens sowie zur Bildung von Sekundär­schlacke, die im Genoeserbusch in glut­flüssigem Zustand aus dem Ofen abgelassen werden konnte. Anhand der aufgegebenen Erzmenge ließ sich auf der Basis von Erfahrungswerten in etwa ab­ schätzen, wann der Verhüttungsprozess unter­ brochen werden konnte. Die Temperaturen in den lediglich durch natürlichen Luftzug oder mittels Hand- bzw. Tretblasebälgen belüfteten Öfen waren in Abhängigkeit von der Art der Windführung allerdings in der Regel noch zu niedrig, um das Erz mitsamt dem darin enthaltenen Metall vollständig und über längere Zeit zu verflüssigen. Da eine vollständige Reduktion des Eisenoxides im Erz unter diesen Bedin­gungen nicht möglich war, sind eisenreiche Schlacken (ca. 40-60 % FeO) das charakter­istische Abfallprodukt im Genoeserbusch. Beim derzeitigen Stand der Forschung deutet vieles darauf hin, dass man in Luxemburg mind. bis in das 15. Jahrhundert am direkten Verfahren der Eisenproduktion festhielt. Während in den prominenten Eisenlandschaften u. a. Schwedens und Deutschlands bereits seit dem 13./14. Jahrhundert technische Vorläufer der Hochöfen flüssiges Roheisen im indirekten Verfahren bei Temperaturen > 1300 °C erzeugten, führte man im heutigen Großherzogtum

28

zunächst die traditionelle Methode der Verhüttung in vergrößerten Rennöfen fort. Einen mög­ lichen Grund dafür liefern die lokalen Rohstoffe. Chemische und mineralogische Analysen der Funde aus dem Genoeserbusch haben deutlich gezeigt, dass sowohl die Art des einsetzbaren Verhüttungsverfahrens als auch die spezifische Konstruktionsweise der Verhüttungsöfen in besonderem Maße abhängig war von der Qualität und Zusammensetzung der genutzten Erze. Dabei war es besonders überraschend, dass vor allem phosphorreiche, ooidische Erze und nicht z. B. die phosphorarmen, eisenreichen Bohnerze in die Öfen aufgegeben wurden (siehe Abb.6). Der archäologische Befund lieferte zudem zahl­ reiche Hinweise darauf, dass kalkreiche, eisenarme Erze (Zwischenmittel der Minette) im Verlauf der Erzanreicherung (Pochung) von den Hüttenleuten anhand verschiedener Kriterien wie z. B. Farbe und Gewicht als ungeeignet erkannt und ausgesondert worden sind. Sie lagen zusammen mit weiteren Verhüttungsrückständen auf den Schlackenhalden oder gehäuft in Depots neben den Verhüttungsöfen, wo sie möglicherweise noch als kalkiger Zuschlag Verwendung fanden. Der hohe Kalkgehalt des im Genoeserbusch eingesetzten Möllers führte zu einem „basischen“ Schlackenchemismus, verbesserte die Eisenausbringung aus den Erzen und wirkte sich positiv auf die Viskosität (Fließfähigkeit) der Schlacke aus. Allerdings wurde durch den hohen Kalkgehalt gleichzeitig auch die Tendenz flüssiges Roheisen zu erzeugen begünstigt. Durch die Vermeidung von zu hohen Schmelzt­emperaturen (< 1300 °C) und zu langen Reduk­ tionszeiten gelang es den Hüttenleuten, den schädlichen Phosphor aus dem Erz fast voll­ständig in der Schlacke zu binden


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

und somit aus dem produzierten Metall fernzuhalten. Das war notwendig, denn Phosphor gilt in der modernen Eisen­metallurgie als „Stahlschädling“. Seigerungen von Phosphor können im Eisen zu Heißrissen führen. Bei der Abkühlung von phosphorreichem Eisen scheidet sich zudem auch bei geringem Kohlenstoffanteil vermehrt Graphit aus. Die Folge ist ungewünschter „Kaltbruch“ oder „Kaltversprödung“ des Metalls. Eine derartige Metallqualität hätte sich von den mittelalter­lichen Handwerkern nicht effizient verarbeiten lassen. Im Genoeserbusch wurde jedoch ein niedrig temperiertes Schmelzsystem mit hohem Eisenanteil der Schlacken angewandt. In diesem Fall wirkte sich ein gewisser Phosphoranteil sogar positiv als Schlackenbildner aus, erhöhte die Härte in ferritischem Eisen und senkte die Schmelztemperaturen (Liquidustempe­raturen). Setzt man voraus, dass die analysierten Metall­ proben repräsentativ für die Produktion der Eisenhütte sind, dann war das Endprodukt der Verhüttungsöfen aus dem Genoeserbusch ein direkt schmiedbarer untereutektoider bzw. eutek­toider Stahl, dessen Kohlenstoffgehalt in der Regel nicht über 0,8 % lag. Wenige Roheisenreste legen jedoch die Vermutung nahe, dass die Hüttenleute möglicherweise bereits eine Technik beherrschten, mit der sich auch höher aufgekohlter Stahl produzieren ließ. Die Analysedaten der verschiedenen Schlackenfunde bestätigen, dass das fayalitische System – allgemein charakteristisch für die Verhüttung im Rennofen von der Eisenzeit bis in Mittel­alter – verlassen wird. Kennzeichnend ist darü­ber hinaus der hohe Glasanteil, wenn auch nur

wenige Schlacken mit Gehalten zwischen 15-28% FeO fast ausschließlich als Glas erstarrt sind. Dem Chemismus entsprechend sind hercynitischer Spinell (FeAl2O4) neben Kirschsteinit (CaFeSiO4), Wüstit (FexO), Rhönit (Ca2(Al, Fe, Ti)6(Si,Al)6O20) und Calciumphosphat (C3P, Ca3(PO4)2) die dominierenden Schlackenphasen. Analog zu den üblicherweise fayalitischen Schlacken vergleichbarer Fundplätze können die Schlacken aus dem Genoeserbusch aufgrund ihres Aluminiumreichtums als „hercynitisch“ bezeichnet werden. Das Endprodukt der Verhüttung, die so-­­ ge­nan­nte Luppe (franz.: massiot), war in unbearbeitetem Zustand ein kompaktes oder schwammartiges, halb festes, heterogenes und stark verunreinigtes Konglomerat mit zahlreichen Hohlräumen, das neben metallischem Eisen auch große Mengen Schlacke und Holzkohle enthielt. Die Luppe bildete sich in der heißes­ten Zone des Ofens (nahe den Einblasdüsen) durch eine Agglomeration von Eisenteilchen oder Anlagerung flüssiger Tropfen (Teilver­flüssigungen). Reduzierte Eisen­teilchen verklebten in „teigigem“ Zustand mit­einander und formten zumeist oberhalb oder in der Kontakt­zone mit den glutflüssigen Schlacken, die sich im un­teren Teil des Ofens auf dem Herdboden sammelten, eine Luppe. Sobald die Hüttenleute eine Luppe noch glühend aus dem Ofen gezogen hatten, zerschlugen sie diese, um die handlichen Fragmente in weiteren Verarbeitungsschritten zunächst reinigen (sog. Ausheizen) und danach ausschmieden zu können. Zwei Ausheiz- bzw. Schmiedeherde belegen

Abb.7A: Genoeserbusch. Glasig erstarrte Schlacke (27,7% FeO) mit Hercynit, Rhönit und Eisen (weiß).

Abb.7B: Genoeserbusch. Kristallin erstarrte Schlacke (54,7% FeO) mit Hercynit (hc), Wüstit (wu), Fayalit (fa)und Eisen (Fe).

29


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

zusammen mit typischen Rückständen diese Prozessschritte (siehe Abb.8). Die arbeits­inten­sive Reinigung, Homogenisierung und formgebende Weiterverarbeitung zu Halb­ fabrikaten oder Barren wurde also nicht den Dorfschmieden angelastet, sondern konnte durch die Hüttenleute selbst durchgeführt werden, die demzufolge neben dem Wissen um das erfolgreiche Verhütten geeigneter Erze zusätzlich mit besonderen Schmiedetechniken vertraut waren. Auch die Weiterverarbeitung der Luppen stellte hohe Anforderungen an die handwerklichen Fähigkeiten. Durch ein mehrmaliges Erhitzen im Ausheiz- bzw. Schmiedeherd musste u. a. die in den Luppen enthaltene Schlacke bei Temperaturen, die denjenigen in den Verhüttungsöfen entsprach, verflüssigt werden, um durch gezielte und wohldosierte Hammer­schläge ein Austreiben der einge­schlos­ senen Verunreinigungen zu erleichtern. Dabei galt es behutsam vorzugehen, um die fragilen Luppenfragmente nicht zu zerschlagen. Wurden die Luppen zu stark erhitzt, konnten sie ebenfalls auseinanderfallen, weil die einzelnen Einschlüsse aus metallischem Eisen durch Schlacke zusammengehalten wurden. Darüber hinaus waren die Luppen inhomogen und enthielten in der Regel neben kohlenstoffarmen Partien auch kohlenstoffreiches Eisen. Damit sich dieses Material überhaupt verarbeiten ließ, musste es zunächst im Ausheizherd homogenisiert werden. Zusätzlich galt es, die durch die ausge­

Abb.8: Genoeserbusch. Ausheiz- bzw. Schmiedeherd (Durchmesser ca. 80 cm). Die Wand der kreisrunden Essen, der nur wenige flache Steine Stabilität verliehen, bestand nahezu ausschließlich aus Lehm. Vor solchen einfachen Essen knieten die Hüttenleute wahrscheinlich auf dem Boden. Während ein Arbeiter mit zwei handbetriebenen Blasebälgen, die mit einer tönernen Düse verbunden waren, die Glut anfachte, schmiedete ein anderer das Werkstück aus.

30

flossene Schlacke hinterlassenen Hohlräume wieder zu schließen. Dies geschah, indem man die Luppe durch Schläge mit einem (Holz-?) Hammer verdichtete und auf diese Weise allmäh­lich kompaktierte. Bevor sich die gereinigten Metall- bzw. einzelne Luppenfragmente zu einem größeren Barren miteinander verschweißen ließen, musste zuvor die beim Erhitzen entstandene Oxidhaut des Eisens (Hammerschlag, Zunder) durch Ausschmieden sorgfältig von der Oberfläche des Werkstücks entfernt werden. Obwohl sich das Feuerverschweißen durch metallografische Analysen bisher nicht direkt an Fundobjekten aus dem Genoeserbusch belegen lässt, weisen plättchenförmige Hammerschlagfragmente in Kombination mit charakteristischen Schweißkügelchen indirekt auf einen derartigen Verarbeitungsschritt hin. Durch das Ausheizen und Schmieden gingen noch einmal 30-50% des in den Öfen produzierten Eisens verloren. Massenbilanzierungen auf der Basis chemischer Analysedaten (Erze, Produktions-, Verarbeitungsschlacke, Ofenwand, Lehm und Holzkohleasche) ließen eine Rekonstruktion der Prozesskette vom Erz zum Metall zu und ermöglichen Aussagen bezüglich der Effektivität des eingesetzten Verfahrens. Anhand der überlieferten Schlackenmenge von insgesamt etwa 21t lässt sich die wahrscheinliche Gesamtproduktion an ausgeschmiedetem Barreneisen näherungsweise auf einige Tonnen hochrechnen. Die Eisenhütte aus dem Genoeserbusch war sehr wahrscheinlich nicht kontinuierlich in Betrieb, sondern wurde in der zweiten Hälfte des 13. Jahrhunderts periodisch jeweils für mehrere Tage oder Wochen aufgesucht. Die Lage im Wald gewährleistete vor allem die räumliche Nähe zum wichtigen Rohstoff Holz. Dabei suchte man nicht einen Standort mit spezifischen und besonders geeigneten Gehölzen, sondern errichtete die Verhüttungsöfen an einem frei zugänglichen Platz mit ausreichendem Holzbestand. Insgesamt konnten im Genoeserbusch neun Gehölzgattungen durch anthrakologische Analysen nachgewiesen werden. Hainbuche und Rot-Buche prägen das Holzkohlespektrum. Damit sind die sogenannten „Harthölzer“ besonders stark vertreten. Die aus Hartholz gewonnene Kohle ermöglichte die zur Eisenproduktion notwendigen Temperaturen und war im hohen Temperaturbereich ein besonders guter Lieferant des wichtigen Reduk­


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

tions­­gases Kohlenmonoxid. Darüber hinaus waren die Kohlen aus Hartholz widerstands­ fähig gegen mechanische Belastung. Weil sie unter dem Druck des Beschickungsmaterials nicht so leicht zerdrückt werden konnten, eigneten sie sich besonders für hohe Öfen mit großem Innendurchmesser. Zu stark fragmentierte Kohlen hätten im Gegensatz dazu die Hohlräume im Beschickungsmaterial verschlossen. Ein Aufsteigen der Reduktionsgase im Ofenschacht wäre massiv behindert worden und hätte auf diese Weise den Verhüttungsprozess negativ beeinflusst. Weil die rezente Waldzusammensetzung im Umfeld der Fundstelle noch heute weitgehend dem mittelalterlichen Holzkohlespektrum entspricht, ist eine gezielte Selektion bestimmter Holzarten für diese Eisenhütte mit großer Sicherheit auszuschließen. Vielmehr wurde der verfügbare Holzbestand der umliegenden Wälder im Mittelalter möglichst vollständig genutzt. Die beprobten Holzkohlen aus dem zentralen Hüttenbereich wurden jedoch nicht aus Stammholz gewonnen. Holzstärkeanalysen ergaben überwiegend Schwachholz, das sowohl in den Verhüttungsöfen als auch zum Ausheizen bzw. Schmieden verwendet worden ist. Dementsprechend sind nur Astwerk oder Stockausschläge in den Meilern verar­beitet worden. Die nahezu ausschließliche Verwen-

dung von Schwachholz deutet auf Niederwaldnutzung hin. Niederwälder waren im Mittelalter weit verbreitet und dienten überwiegend zur Brenn- und Kohlholzgewinnung. Diese spezifische Waldwirtschaftsform entstand, indem man über Jahrzehnte immer wieder dieselben Waldparzellen nutzte, um Holz zu schlagen und auf diese Weise die Bestände ständig verjüngte. Nach der Holzentnahme ließ man den Bäumen gerade so viel Zeit, bis sich wieder neue Stockausschläge gebildet hatten. Mit der Zeit bildete sich daher eine charakteristische strauchartige Vegetation, bei der durch intensive Nutzung die Buche immer mehr verdrängt wurde. Während die Öfen liefen, mussten die Arbeiter Tag und Nacht abseits des Heimatdorfes in den Wäldern verbringen, um unter anderem regelmäßig Erz und Holzkohle aufgeben und den Verhüttungsprozess jederzeit kontrollieren und steuern zu können. Speisereste in Form von Rinder­knochen belegen zusammen mit zahl­reichen Keramikfunden (u.a. Töpfe, Kannen und Krüge), dass die Hüttenleute die benötigte Verpflegung mit in den Wald brachten, um ihre Mahlzeiten vor Ort zubereiten zu können. Schnittspuren auf den Knochenoberflächen und ein Wetzstein zeugen vom Gebrauch klingen­artiger Gegenstände (Messer), die bei der Nahrungs­ zubereitung eingesetzt worden sind. Die datier-

Abb.9: Bisher wurden mehr als 800 Holzkohlestücke aus dem Genoeserbusch durch die Mitarbeiter der Arbeitsgruppe für Historische Geobotanik am Ökologie Zentrum der Christian-Albrechts-Universität zu Kiel anthrakologisch untersucht.

31


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

baren Keramikfunde weisen darauf hin, dass die Eisenproduktion im Genoeserbusch zu Beginn des 14. Jahrhunderts aufgegeben wurde. Die Ursache für das Verlassen der Eisenhütte war nicht zu ermitteln und lässt sich daher auch nicht zuverlässig mit zeitgenössischen, histo­rischen Ereignissen wie z. B. der Maaslän­dischen Fehde oder dem Vierherrenkrieg verbinden. Der ungewöhnliche Fundreichtum und die Tatsache, dass die mittelalterlichen Hüttenleute unter anderem die eiserne Windform und mehrere Luppenfragmente – also wertvolles Roh­material – vor Ort zurückließen, könnte darauf hindeuten, dass der Platz zuletzt nicht planmäßig aufge­ geben wurde, sondern plötzlich verlassen werden musste. Der hohe Anteil zwar kalk­reicher aber eisenarmer Erze rechtfertigt allerdings noch eine zweite Theorie. Auch Erzmangel, das heißt eine Erschöpfung der üblicherweise genutzten Lagerstätte, könnte die Hüttenleute dazu gezwungen haben, die Produktion im Genoeserbusch aufzugeben und möglicherweise an anderer Stelle wieder aufzunehmen. Wie herausragend ein einzelner Hüttenplatz auch sein mag, seine Bedeutung und Funktion als Bestandteil einer vergangenen Kultur­landschaft lässt sich ausschließlich vor dem Hinter­grund aller überlieferten Hüttenbzw. Schlacken­plätze der jeweiligen Zeit­stellung in einem regionalen sowie überregionalen Zusammen­hang prüfen und bewerten. Zukünftige montanarchäologische Forschungen müssen daher erst noch zeigen, inwieweit der Genoeserbusch tatsächlich stellvertretend für die hoch- bis spätmittelalterliche Eisentechnologie Luxem-

burgs stehen kann. Systematische, großräumige Prospektionen mit dem Ziel der Lokalisierung, Kartierung und Klassifizierung sämtlicher montanistischer Bodendenkmäler, ergänzt durch gezielte Sondagen und stichprobenartige Analy­sen an bereits bekannten Fundstellen, könnten nach dem Vorbild der Untersuch­ungen z. B. in Lothringen (F)5, dem Märkischen Sauerland (D)6 oder dem Lahn-Dill Gebiet (D)7 zeigen, ob es sich im Südwesten Luxemburgs lediglich um eine flächenhafte Verbreitung von Ver­hüttungsaktivität handelt oder ob der Erzreichtum der Region zur Herausbildung einer Landschaft mit intensiver Eisenproduktion geführt hat. Die Erstellung von Verbreitungskarten und Datenbanken könnte Produktions­ zentren von der Eisenzeit bis ins Mittelalter sichtbar machen und strukturelle Veränderungen, zum Beispiel in Form einer möglichen räumlichen Verlagerung der Produktionsstandorte mit fortschreitender technologischer Entwicklung, umfassend darstellen. In diesem Zusammenhang ist vor allem der Frage nachzugehen, wann und über welche möglichen Zwischenformen die Roheisentechnologie in Luxemburg eingeführt worden ist und welche Rolle die lokalen, phosphor­reichen Erzvorkommen (insbesondere das sogenannte Raseneisenerz und Minette) dabei spielten. In einer Zeit rasanter Landschafts­ veränderung könnten Prospektionen zudem dazu beitragen, den Erhaltungszustand der noch vorhandenen Fundstellen zu dokumentieren und ausgewählte montanistische Bodendenkmäler effektiv zu schützen, um dadurch einzigartige Quellen für zukünftige Forschungen als wertvol­les

5 Im Zuge der Erforschung der ältesten Eisengeschichte Lothringens ist es z. T. durch Prospektionen gelungen, mehr als 250

Schlackenplätze zu lokalisieren, die von der Antike bis ins späte Mittelalter datieren. Der zugehörige Fundplatzkatalog wird durch mineralogische und chemische Untersuchungen an mehr als 300 Erz- und Schlackenproben ergänzt. Siehe dazu: LEROY, Marc, La sidérurgie en Lorraine avant le haut fourneau: L´utilisation du minerai de fer oolithique en réduction directe. Paris 1997. 6 Im Märkischen Sauerland und Teilen des angrenzenden Bergischen Landes (D) erbrachten montanarchäologische Prospektionen mehr als 1900 Schlackenplätze, die mit der direkten Eisenverhüttung in Rennöfen zu verbinden sind und über 200 potentielle Floß- bzw. frühe Hochofenstandorte. Siehe dazu: JOCKENHÖVEL, Albrecht / OVERBECK, Michael, Mediaeval Iron-Landscapes, Traditions and Innovation – The Genesis of Early Modern Cultural Landscapes between the Rivers Maas and Weser. In: Cultural Heritage and Landscapes in Europe – Landschaften: Kulturelles Erbe in Europa. Proceedings of the International Conference, Deutsches Bergbau-Museum Bochum, June 8-10, 2007. Bochum 2008, S. 453-466. 7 Im Umkreis des Dietzhölztales in Hessen (D) wurden durch die Universität Münster in den 1990er Jahren im Rahmen systematischer montanarchäologischer Prospektionen über 300 Schlackenplätze kartiert. Ausgewählte Fundplätze wurden vollständig ergraben. Etwa 80 Fundplätze wurden repräsentativ beprobt. 310 pauschalchemische Analysen (Schlacken-, Ofenwand- und Erzproben) und etwa 340 polierte Dünn- und Anschliffe bildeten die Grundlage dieses Forschungsprojektes. Siehe dazu: JOCKENHÖVEL, Albrecht / WILLMS, Christoph, Das Dietzhölzetal-Projekt. Archäometallurgische Untersuchungen zur Geschichte und Struktur der mittelalterlichen Eisengewinnung im Lahn-Dill-Gebiet (Hessen) (Münsterische Beiträge zur ur- und frühgeschichtlichen Archäologie, Bd.1). Rahden / Westfalen 2005.

32


Terres Rouges

Montanarchäologie in Luxemburg – Eisenverhüttung am Vorabend des Hochofenzeitalters

Kulturgut zu sichern. Auch einer grund­legenden Aufarbeitung der archivierten Bestände sowie einer gezielten Sichtung des schriftlichen Quellenmaterials durch spezialisierte Historiker kommt in diesem Zusammenhang eine besondere Bedeutung zu. Erst in einigen Jahren wird es daher überhaupt möglich sein, den Südwesten

Luxemburgs als Montanregion mit einer langen Tradition in der Produktion und Ver­arbeitung von Eisen und Stahl historisch richtig einzu­ordnen und die zeitgebundene, gegenseitige Wechselwirkung zwischen Mensch und Landschaft von der Antike bis ins Mittelalter im „Land der roten Erde“ zusammenhängend darzustellen.

Weiterführende Literatur ABDINGHOFF, Thorsten / OVERBECK, Michael, Archaeological Investigations on early Blast Furnaces in Central Europe. In: Iron in the Alps. Deposits, mines and metallurgy from antiquity to XVI century. International Conference Bienno 2.-4. October 1998. Bienno 2000, S. 128-132. ABDINGHOFF, Thorsten / OVERBECK, Michael, Die Hüttenstandorte Kerspetalsperre (Märkisches Sauerland) und Oberes Wippertal (Bergisches Land) – Ein Beitrag zur Archäologie früher Hochöfen in Mitteleuropa. In: Arch. Austr. 82 / 83 (1998 / 1999), S. 536-541. JOCKENHÖVEL, Albrecht, Der Weg zum Hochofen – die Zeit der spätmittelalterlichen und frühneuzeitlichen Massenhütten. In: PINSKER, Bernhard (Hg.), Eisenland – zu den Wurzeln der nassauischen Eisenindustrie. Wiesbaden 1995, S. 83-98. JOCKENHÖVEL, Albrecht / OVERBECK, Michael, Mediaeval Iron-Landscapes, Traditions and Innovation – The Genesis of Early Modern Cultural Landscapes between the Rivers Maas and Weser. In: Cultural Heritage and Landscapes in Europe – Landschaften: Kulturelles Erbe in Europa. Proceedings of the International Conference, Deutsches Bergbau-Museum Bochum, June 8-10, 2007. Bochum 2008, S. 453-466. JOCKENHÖVEL, Albrecht / WILLMS, Christoph, Das Dietzhölzetal-Projekt. Archäometallurgische Untersuchungen zur Geschichte und Struktur der mittelalterlichen Eisengewinnung im Lahn-Dill-Gebiet (Hessen) (Münstersche Beiträge zur Ur- und Frühgeschichtlichen Archäologie, Bd.1). Rahden / Westfalen 2005. JOCKENHÖVEL, Albrecht / WILLMS, Christoph / ABDINGHOFF, Thorsten / OVERBECK, Michael, Archaeological Investigations on the Beginning of Blast Furnace-Technology in Central Europe. In: ExtendedAbstracts. The Fourth International Conference on the Beginning of the Use of Metals and Alloys in Shimane, May 25–27, 1998, S. 65-69.

KRONZ, Andreas / OVERBECK, Michael, Mitteleuropa an der Schwelle zum Hochofenzeitalter: Archäometallurgische Untersuchungen zur hoch- bis spätmittelalterlichen Eisenherstellung in Peppange/ Luxemburg. In: Archäometrie und Denkmalpflege, Zusammenfassung der Vorträge und Poster der Jahrestagung 2007. Gemeinsam veranstaltet vom Arbeitskreis „Archäometrie und Denkmalpflege“ der Deutschen Mineralogischen Gesellschaft, vom Arbeitskreis „Archäometrie“ der Gesellschaft Deutscher Chemiker und der Gesellschaft für Naturwissenschaftliche Archäologie – Archäometrie. Potsdam 2007, S. 66-69. LEROY, Marc, La sidérurgie en Lorraine avant le haut fourneau : L´utilisation du minerai de fer oolithique en réduction directe. Paris 1997. OVERBECK, Michael, Eine mittelalterliche Eisenhütte im Genoeserbusch bei Peppingen. In: Musée info. Musée national d´histoire et d´art Luxembourg (2005), S. 62-63. OVERBECK, Michael, Eine schmiedeeiserne Windform des 13./14. Jahrhunderts aus dem Genoeserbusch bei Peppange, Luxemburg. In: Durch die Zeiten..., Festschrift für Albrecht Jockenhövel zum 65. Geburtstag (Studia honoraria, Bd. 28). Rhaden / Westf. 2008, S. 435-446. OVERBECK, Michael / BIS-WORCH, Christiane, A la recherche des origines de la sidérurgie luxembourgeoise: les sites de Peppange et d´Esch-sur-Alzette. In: Magazine - le périodique du Fonds Belval no 4 (2005), S. 32-33. OVERBECK, Michael / KRONZ, Andreas / NELLE, Oliver, Medieval iron production in Luxembourg (13th-14th century AD). Archaeological evidence of the transition from bloomery furnace to high bloomery furnace (Stuckofen) in Europe? In: CREW, Peter / CREW, Susan (Hg.), Early Ironworking in Europe II. Archaeology, technology and experiment. Plas Tan y Bwlch occasional paper No 4, Abstracts of the second International Conference at Plas Tan y Bwlch 17th-21th Sept. 2007. Plas Tan y Bwlch 2007, S. 37-40.

33



Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg Norbert Franz

Durch den weltweiten Boom der Stahlindustrie der letzten Jahre wurden all jene widerlegt, die glaubten, das Zeitalter der Eisenindustrie sei zu Ende. Tatsächlich erleben wir gegenwärtig eine neue Stufe jener Industrialisierungs­wellen, die mit der Industriellen Revolution ihren Ausgang nahmen und in der Folgezeit zunächst Teile des europäischen Subkontinents erfassten, dann Nordamerika und schließlich immer mehr Länder der Welt in allen Kontinenten. Doch gab es auch schon vor der Industriellen Revolution Eisenerzeugung und Eisenindustrie. Bekanntlich begann das „eiserne Zeitalter“ im zweiten Jahrtausend vor unserer Zeitrechnung in Vorder­asien. Bereits in der Antike beobachten wir nicht nur handwerkliche Einzelan­­ferti­gungen von Eisenwaren, insbesondere von Waffen, sondern bereits massenhafte, das heißt also industrielle Fertigung. Und bis heute blieb die eisenschaffende und eisenverarbeitende

Industrie weltweit eine Schlüsselindustrie – eine der Säulen, auf denen Wohl und Wehe der Gesamtwirtschaft ruht. Wenn wir verstehen wollen, wie die aktuelle Industrialisierungswelle einzuordnen ist, müssen wir die Geschichte befragen. Mit „Geschichte“ meine ich zunächst und vor allem die Geschichtswissenschaft, jene Geschichtsforschung und Geschichtsschreibung also, die nach den allgemeinen Regeln der Wissenschaft arbeitet. Überaus wertvoll sind allerdings auch die Erkenntnisse jener Forscher, die sich aus Liebhaberei oder aus anderen außerwissenschaftlichen Motiven dieser Problematik zuwenden. Die spannendste Frage, die die Historiker stellen können, ist jene nach den Ursachen und Verläufen jener Metamorphosen, denen die Eisen­industrie ganz offensichtlich unterlag. Dass hier ein grundlegender Wandel stattfand, zeigen die folgenden Abbildungen ganz unmittelbar:

Darstellung einer Schmiede auf einer antiken griechischen Vase Quelle: Jean-Yves Andrieux, Les travailleurs du fer, Paris 2002

35


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

Eisenwerk der Zisterzienser-Abtei Clairvaux in einer Darstellung aus dem 13. Jahrhundert Quelle: Abbildung aus Jean-Yves Andrieux, Les travailleurs du fer, Paris 2002

Die Eisenschmiede und das Fabrikantenschloss Ansenbourg im 18. Jahrhundert Quelle: Gilbert Trausch, Banque de Luxembourg, Luxemburg, ein Land vom Stahl gepr채gt, Luxemburg 1994, S. 8

36


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

Das Schmiedewerk der Familie de Wendel in Hayange (1866) Quelle: Aquarell von C. de Berthiet, in: Jacques Marseille, Les Wendel 1704-2004, Paris 2004

Die Burbacher H체tte 1875 Quelle: Walter Marzen, Die Saarl채ndische Eisen- und Stahlindustrie 1430-1993, Saarbr체cken 1994

37


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

Der Schwerpunkt der Forschungen der Geschichtswissenschaft, aber auch anderer Wissenschaftsdisziplinen sowie der Liebhabergeschichtsschreibung, über die luxemburgische Eisenindustrie liegt auf der zweiten Industri­ alisierung Luxemburgs im Süden des Landes auf der Grundlage der Minette-Erze. Diese Industri­alisierungsphase steht auch im Zentrum der meisten Beiträge dieses Bandes. Die Tat­sache, dass die Epochen vor 1870 vergleichsweise wenig beachtet wurden, ist allerdings Anlass für mich, im Unterschied zu meinen Mitautorinnen und ­­­-autoren die „Industrialisierung vor der Industriellen Revolution“1 genauer zu betrachten. Dabei möchte ich einige bislang vorliegende Forschungsergebnisse in aller Kürze zusammenfassen und zugleich Forschungs­ desiderate herausarbeiten, deren Aufarbeitung Gegenstand neuer Forschungen sein könnte. Darüber hinaus möchte ich am Fallbeispiel der Weilerbacher Hütte ein Eisenwerk vorstellen, das die Metamorphosen der Eisenindustrie von der Industrie alten Typs über die Industrielle Revolution bis zur Mitte des 20. Jahrhunderts anschaulich machen kann. Ich stütze mich im Folgenden vor allem auf die Arbeiten Marcel Bourguignons2, Georges Hansottes3, Michel Paulys4, René Lebouttes, Jean Puissants, Denis Scutos5, Guy und Marcel Steffes6, Joseph Wagners7, Denis Woronoffs8, Jean-Marie Yantes, Michel Dorbans, Jean-Paul Lehners und Monique Kieffers9 und auf meine

eigenen Untersuchungen über die Geschichte der Weilerbacher Hütte10. Trotz all dieser neueren Arbeiten ist die seit annähernd einem Jahrhundert vorliegende Studie Michel Ungeheuers11, die sowohl die Eisenindustrie ersten als auch des zweiten Typs behandelt, noch immer unverzichtbar. Bei meinen Überlegungen werde ich mich auf den Raum des Herzogtums Luxemburg in den Grenzen vor 1659 konzentrieren und zwei Leitfragen beantworten: 1. Welche Einflussfaktoren bestimmten vor allem die Entwicklung der Eisenindustrie Luxemburgs vor der Industriellen Revolution? 2. Unter welchen Bedingungen konnten Werke, die ursprünglich Industrien alten Typs waren, nach der Industriellen Revolution fortbestehen?

I. Bedingungsfaktoren der alten Eisenindustrie Luxemburgs

Die Entwicklung der Eisenindustrie Luxemburgs hatte mehrere Voraussetzungen. Neben dem Rohstoff, dem Eisenerz, zählten hierzu Energieträger, Unternehmer und Arbeitskräfte sowie Transportmittel und -wege. Die stark phosphorhaltigen Erzvorkommen im äußer­sten Süden des heutigen Großherzogtums und im angrenzenden Lothringen, die so genannten Minette-Erze, waren erst nach Erfindung des Thomasverfahrens profitabel zu verhütten. Diese reichen Eisenerzlager wurden zur Grundlage

1 Der Terminus „Protoindustrie“ bezeichnet im engeren Sinne eine frühe Form der Industrialisierung der Textilindustrie. Im

weiten Sinn wird er auch für andere frühe Industrien, darunter auch die Eisenindustrie, verwendet, vgl. PAULY, Michel, Proto-industrialisation et immigration au Luxembourg, in: ALLEGREZZA, Serge / HIRSCH, Mario / v. KUNITZKI, Norbert (Hgg.), L´immigration au Luxembourg, et après? Luxemburg 2007, S. 47-59. 2 BOURGUIGNON, Marcel, La sidérurgie, industrie commune des pays d´entre Meuse et Rhin, in: Anciens pays et assemblées d´États, 28 (1963) 93. 3 HANSOTTE, Georges, La métallurgie et le commerce international du fer dans les Pays-Bas autrichiens et la principauté de Liège pendant la seconde moitié du XVIIIe siècle (Histoire quantitative et développement de la Belgique au XIXe siècle, II/3), Bruxelles 1980. 4 PAULY, Michel, Proto-industrialisation, S. 47-59. 5 LEBOUTTE, René / PUISSANT, Jean / SCUTO, Denis, Un siècle d´histoire industrielle. Belgique, Luxembourg, PaysBas. Industrialisation et sociétés 1873-1973, Condé-sur-Noireau (France) 1998. 6 STEFFES, Guy / STEFFES, Marcel, La sidérurgie luxembourgeoise de l´époque antérieure à 1840, Luxembourg 1965. 7 WAGNER Joseph, La sidérurgie luxembourgeoise avant la découverte du gisement des minettes, Diekirch 1921. 8 WORONOFF, Denis, L´industrie sidérurgique en France pendant la révolution et l´empire, Paris 1984. 9 HERRMANN, Hans-Walter / WYNANTS, Paul (Hgg.), Wandlungen der Eisenindustrie vom 16. Jahrhundert bis 1960 (Colloques Meuse-Moselle), Namur 1997, darin S. 113-138: DORBAN, Michel / YANTE, Jean-Marie / LEHNERS, Jean-Paul, Quatre siècles de sidérurgie luxembourgeoise (1380-1815). – Ebenda, S. 139-169: KIEFFER, Monique, La sidérurgie au Grand-Duché de Luxembourg: 1840-1960. 10 FRANZ, Norbert, Luxemburger Eisenindustrielle in der südlichen Eifel – die Weilerbacher Hütte, in: Kurtrierisches Jahrbuch 38 (1998), S. 155-175. 11 UNGEHEUER, Michel, Die Entwicklungsgeschichte der luxemburgischen Eisenindustrie im XIX. Jahrhundert, Luxemburg 1910.

38


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

der zweiten Industrialisierung in Luxemburg und Lothringen. Die Erzlager im Luxemburger Gutland, in Eifel und Ardennen, die geringere Phosphoranteile enthielten, waren dagegen die wichtigste Grundlage der ersten Industri­­ali­sierung dieser Region. Das Erz wurde in kleinen Gruben und im Tagebau abgebaut12. Gesetzlicher Rahmen des Erzabbaus im Herzogtum Luxemburg und unter franzö­ sischer Herrschaft war das Reglement vom 13. August 1665, dem zufolge das Erz Eigentum des Grundeigentümers war, in dessen Boden es gefunden wurde. Ein Edikt Kaiser Karls VI. aus dem Jahre 1736 erlaubte es Adeligen ausdrücklich, Eisenwerke zu betreiben, ohne dabei ihren Stand zu verlieren13 – anders als in England war gewerbliche Arbeit von Adeligen auf dem europäischen Kontinent völlig unüblich und mit erheblichen gesellschaftlichen Sanktionen belegt. Nach der Französischen Revolution minderte das Gesetz vom 28. Juli 1791 die Rechte der Grundeigentümer zugunsten der Ansprüche des Staates. Die französische Gesetzgebung wirkte auch für die preußischen und niederländischen Bergbaugesetze als Vorbild. Das Gesetz von 1791 legte fest, dass das Eisenerz bis zu einer Tiefe von 100 Fuß (ca. 33 Meter) Eigentum des Grundeigentümers war, tiefere Bodenschichten jedoch Eigentum des Staates. Um diese tieferen Lagen auszubeuten, brauchten private Unternehmer also eine Konzession des Staates14. Als Unternehmer traten Angehörige der politischen und wirtschaftlichen Eliten auf – Teile der Geistlichkeit, insbesondere Konvente der Zisterzienser, des Adels und später Angehörige des Großbürgertums15. Bei den Arbeitskräften muss man unterscheiden zwischen einer vergleichsweise kleinen Zahl qualifizierter Fachkräfte und den zahlreichen gering qualifizierten Arbeitskräften, die für den Betrieb der Werke und den Transport der Rohstoffe und Produkte gebraucht wurden. Der Transport der Roh- und Betriebsstoffe sowie der Fertigprodukte erfolgte auf schiff­baren

Flüssen mit Hilfe relativ kleiner Lastkähne oder über Land mit Hilfe von Pferdefuhr­werken. Diese Transporte wurden in der Regel von Bauern im Nebenerwerb durchgeführt. Zwei wichtige Energieträger wurden in der Eisenindustrie eingesetzt: Holzkohle und Wasserkraft. Die Holzkohle wurde für die Verhüttung von Eisenerz genutzt. Angesichts der hohen Transportkosten war das Vorhandensein umfangreicher Wälder mit Holzeinschlag­ rechten der Hüttenherren eine Grundvoraussetzung für die Existenz der frühneuzeitlichen Eisenindustrie. Dabei traten die Hüttenherren in diesem „hölzernen Zeitalter“ in Konkurrenz zu anderen Holznutzungsarten: Holz war ein universaler Werkstoff, wurde als Baumaterial eingesetzt und als Brennstoff für die Beheizung von Wohngebäuden. Holz war somit in dieser Zeit ein wichtiger Energieträger und ein bedeuten­der Werkstoff zugleich. Insbesondere die Nutzungsrechte bäuerlicher Gemeinden kollidierten häufig mit den Nutzungsinteressen der Eisenindustrie. Die Landesherren versuchten – weithin vergeblich –, den zunehmenden Raubbau an den Wäldern durch zahlreiche Erlasse einzudämmen16. Für den Betrieb der Schmiedehämmer und Eisenspaltmühlen wurde ein anderer Energieträger genutzt: das Wasser. Das Gefälle der kleinen Flussläufe und wasserreichen Bäche in Eifel und Ardennen wurden für den Betrieb von Wassermühlen genutzt. Auch hier konkurrierte die Eisenindustrie mit anderen Formen von Mühlen: mit Getreide-, Walk- oder Papiermühlen17.

II. Die Entwicklung der luxemburgischen Eisenindustrie bis 1842

Die Anfänge der luxemburgischen Eisen­ industrie vom ausgehenden 12. bis zur Mitte des 13. Jahrhunderts wurden von dem ReformOrden der Zisterzienser getragen, die eine wichtige Rolle bei der Erschließung neuer

12 STEFFES / STEFFES, Sidérurgie, S. 17-23. – UNGEHEUER, Eisenindustrie, S. 88-96. 13 PAULY, Proto-industrialisation, S. 48.

14 LEBOUTTE, René, Vie et mort des bassins industriels en Europe 1750-2000, Paris 1997, S. 27 f. – UNGEHEUER,

Eisenindustrie, S. 97-101. – WAGNER, Sidérurgie, S. 45-47. – In napoleonischer Zeit wurden die Regelungen des Jahres 1791 durch das Gesetz vom 21. April 1810 modifiziert. 15 Besonders gut erforscht ist die Familie Wendel: GUÉNA, Yves, Les Wendel: trois siècles d´histoire, Paris 2004. – MARSEILLE, Jacques, Les Wendel 1704-2004, Paris 2004. 16 PAULY, Proto-industrialisation, S. 48. 17 WAGNER, Sidérurgie, S. 16-50.

39


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

Siedlungen und dem Aufbau von Gewerbe und Indus­trie spielten. Im Bereich der Grafschaft und dem späteren Herzogtums Luxemburg waren dies die Zisterzienserabteien von Orval und Viller-Bettnach im Tal der Fensch, unweit Thionville. In der zweiten Hälfte des 13. Jahrhunderts entwickelte sich auch in der Herrschaft Hayange eine bedeutende Eiseni­ndustrie. Die ersten Schmiedewerke im Herzogtum Luxemburg wurden Ende des 14. Jahrhunderts im Gebiet von Durbuy und um 1400 bei Thionville und Differdingen entwickelt. Im 15. Jahrhundert entwickelte sich ein Schwerpunkt der eisenschaffenden und verarbeitenden Industrie in den Wäldern von Chiny und Anlier: ein erster Hochofen entstand 1475 in Habay, ein Jahrhundert später, im Jahre 1574 waren 52 Eisenwerke in dieser Region aktiv, darunter Orval, La Soye und Châtillon18. Die Entwicklung der luxemburgischen Eisenindustrie im 16. bis 18. Jahrhundert stand im Zeichen wirtschaftlicher und politischer Konjunkturen: Ausgehend von Betrieben aus dem Raum Lüttich und Stavelot entwickelte sich ein starker Konkurrenzdruck auf die Eisenwerke im nördlichen Herzogtum Luxemburg. Die Verteuerung des Hauptenergieträgers Holzkohle führte zu einer Verknappung von Kohlholz und Holzkohle. Hinzu kamen Kriegsfolgen: Die Eisenindustrie im Tal der Fensch im Raum Thionville erlitt während der lang andauernden kriegerischen Auseinandersetzungen zwischen Frankreich und den Habsburgern erhebliche Einbußen. Im ersten Drittel des 17. Jahrhunderts erlebte die luxemburgische Eisenindustrie eine – wenn auch vergleichsweise kurze – Neugründungsphase: 1609 wurde in Dommeldingen ein Eisenwerk mit Hochofen und Schmiede gegründet, 1623 das Werk Lasauvage, 1624 die Werke von Simmern und Ansemburg, 1631 das Werk Bissen. Das erneute Aufflammen der schier endlosen Kriege zwischen Frankreich und Habsburg beendete diesen kurzen Boom, doch wurde 1651 in Colmar-Berg ein weiteres Eisenwerk gegründet. In den – zumindest im Raum Luxemburg – vergleichsweise friedlichen Jahren der ersten Hälfte des 18. Jahrhundert erlebte die Eisenindustrie eine erneute Aufschwungsphase,

die entgegen einer verbreiteten Forschungsmeinung auch darüber hinaus anhielt. In dieser Zeit wurde beispielsweise das Werk in Fischbach gegründet (1768). Der erneute Aufschwung der Eisenindustrie alten Typs war verbunden mit einem Boom der Nagelindustrie, der wiederum einen Indikator für die allgemeine Prosperität unter österreichischer Herrschaft darstellt19. Trotz der prinzipiell anhaltenden Prospe­ rität der Eisenwerke in der zweiten Hälfte des 18. Jahrhunderts litten diese unter einer tendenziell sinkenden Profitabilität. Dafür gab es vielfältige Gründe: die bereits erwähnte Holzund Holzkohleteuerung, die steigenden Löhne der Metall- und Waldarbeiter, die zunehmende Erschöpfung zahlreicher Minen. Die Landes­ herren versuchten, diese Probleme mit Hilfe einer protektionistischen Politik zu lösen. So erhoben das Fürstbistum Lüttich (1740) und das Herzogtum Luxemburg (1765) Zölle auf Barren­eisen. Damit verschärften die Landesherren die Probleme jedoch weiter20. Nach der Eroberung Luxemburgs durch französische Truppen in den Jahren 1793-95 setzte sich der Niedergang der Eisenindustrie zunächst fort. Im Zuge der militärischen Auseinandersetzungen und der Nationalisierung geistlichen und adeligen Eigentums war es zu großen Zerstörungen bei den Industrieanlagen gekommen. Signifikante Ausnahmen bildeten die Werke, die für die Rüstung arbeiteten, wie die Werke von Berchivé und Claireau, die die Waffen­manufaktur in Charleville belieferten. Doch unter dem Grand Empire Napoleons erholte sich die luxemburgische Eisenindustrie wieder. 1806 produzierten die Eisenwerke des Wälderdepartements, in dem ein Großteil des Herzogtums Luxemburg aufgegangen war, 25.000 Tonnen Eisen. Hierfür wurden 40.000 Tonnen Holzkohle und bereits 270 Tonnen Steinkohle verbraucht. In der eigentlichen Eisen­industrie wurden damals 700 Arbeiter beschäftigt, beim Erzabbau, der Holz­gewinnung und der Holzkohleproduktion mit 4300 Arbeitern ein Mehrfaches. Insgesamt waren direkt oder mittelbar 20.000 bis 25.000 Personen – Beschäftigte und Familienangehörige – von der Eisenindustrie abhängig, bei einer Gesamtbevölkerung des Wälder­departements

18 DORBAN / YANTE / LEHNERS, Quatre siècles de sidérurgie luxembourgeoise (1380-1815), S. 113-138. 19 LEBOUTTE / PUISSANT / SCUTO, Histoire industrielle, S. 22 f. – STEFFES / STEFFES, Sidérurgie, S. 39-51. –

UNGEHEUER, Eisenindustrie, S. 88-101.

40


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

von 186.000 Menschen. Somit war die eisenschaffende Industrie, einschließlich ihrer Nebengewerbe – Holzkohlegewinnung, Erzbergbau, Transportgewerbe – der wichtigste Industriezweig des Wälderdepartements. Fünf Jahre später förderten die Minen des Wälderdepartements 28.000 Tonnen Erz, wobei 250 Minenarbeiter und Wäscher beschäftigt wurden. Beim Transport der Erze von den Minen zu den Erzwäschereien wurden 56 Wagenführer eingesetzt. Die Minenarbeit einschließlich des Transports wurde als saisonales Nebengewerbe der bäuerlichen Bevölkerung betrieben21. Nach dem Zusammenbruch des ersten französischen Kaiserreichs geriet die Eisen­ industrie alten Typs rasch in eine existenzielle Krise. Dafür waren politische, soziale und wirtschaftliche Ursachen verantwortlich. Zu den politischen Krisenfaktoren gehören vor allem die Zollschranken, die nun vor den Haupt­absatzgebieten luxemburgischer Eisenwaren in Frankreich und Deutschland errichtet wurden, die schlechte Verkehrsanbindung an das Königreich der Vereinigten Niederlande, die relative Vernachlässigung des Großherzogtums durch die niederländische Regierung sowie die Folgen­ der belgischen Revolution. Zu den sozialen und wirtschaftsimmanenten Ursachen der Krise ­gehören die geringe Binnennachfrage aufgrund der Massenarmut breiter Teile der Bevölkerung, die nunmehr sehr starke Konkurrenz durch britische Importwaren, der technolo­gische Rückstand der luxemburgischen Eisenindustrie gege­nüber der „innernieder­ländischen“, genauer, belgischen Konkurrenz, die fortgesetzte Holz- und Holzkohleteuerung, der fortgesetzte Mangel an Eisen­erzen und der anhaltend schlechte Zustand des Straßen­netzes. Dennoch begründeten die Brüder Auguste, Charles und Norbert Metz durch den Kauf der Hütte in Berburg im Jahre 1837 den Vorläufer des ARBED-Konzerns. 1845 gründeten sie in Eich bei Luxemburg ein weiteres Werk, in der Hoffnung, dass hier in den

nächsten Jahren an einer Eisenbahnlinie gebaut werden würde22. Eine nachhaltige Besserung der wirt­ schaft­lichen Lage Luxemburgs brachte der Beitritt des Landes zum Deutschen Zollverein im Jahre 1842. Nun war es Teil eines großen Binnen­marktes, der gelegentlich gezielt auf bestimmte britische Eisenwarenimporte Sonder­zölle erhob.­ Auch die Verkehrs­anbindung innerhalb dieses neuen Zollgebiets war für Luxemburg vergleichsweise günstig. Allerdings war die ­luxemburgische Eisenindustrie nun dem starken Konkurrenzdruck der sich allmählich modernisierenden eisenschaffenden Indus­trie der deutschen Staaten ausgesetzt23. Die frühe luxemburgische Eisenindustrie verdankte somit ihr Entstehen den natürlichen Ressourcen, insbesondere den vergleichsweise reichen Eisenerzvorkommen, dem Holz­ reichtum des Landes, der relativ leicht verfügbaren Wasserkraft sowie den Arbeitskräften unterschiedlicher Qualifikation. Bereits unser knapper Überblick konnte einen klaren Zusammenhang wirtschaftlicher und politischer Konjunkturen der Entwicklungsgeschichte der luxemburgischen Eisenindustrie zeigen. Kriegszeiten bedeuteten in der Regel auch Zeiten des Niedergangs, Friedenszeiten waren zumeist mit konjunkturellen Aufschwungsphasen verbunden. Diese These muss freilich durch die Feststellung ergänzt werden, dass die Eisenindustrie alten Typs gegen Ende des ­Ancien Régimes an ihre natürlichen Grenzen stieß: Der Raubbau in den Wäldern führte zum starken Abschmelzen der Gewinnmargen der Betriebe und die zunehmend erschöpfen Erzlager entzogen der Eisenindustrie ihre wichtigste Grundlage. Schließlich geriet die luxemburgische Eisenindustrie aufgrund ihres technologischen Rückstands und ihres isolierten Standorts in eine tiefe Existenzkrise, für die auch der Beitritt des Landes zum Deutschen Zollverein keine nachhaltige Lösung brachte.

20 HANSOTTE, Métallurgie, S. 117-120. – WAGNER, Sidérurgie, S. 61-67. 21 FRANZ, Eisenindustrielle, S. 155-175. – UNGEHEUER, Eisenindustrie, S. 102-168. – WAGNER, Sidérurgie, S. 68-112.

– Zur Eisenindustrie zur Zeit der Ersten Republik und des Grand Empire vgl. die ausgezeichnete Studie: WORONOFF, Denis, L´ìndustrie sidérurgique en France pendant la révolution et l´empire, Paris 1984. 22 FRANZ, Eisenindustrielle. – PAULY, Proto-industrialisation, S. 49. – STEFFES / STEFFES, Sidérurgie, S. 51-59. – WAGNER, Sidérurgie, S. 113-134. 23 KIEFFER, Sidérurgie, S. 140. – LEBOUTTE / PUISSANT / SCUTO, Histoire industrielle, S. 23-25. – UNGEHEUER, Eisenindustrie, S. 168-190. – WAGNER, Sidérurgie, S. 128-211.

41


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

III. Metamorphosen der Eisenindustrie: das Fallbeispiel Weilerbacher Hütte Im Folgenden möchte ich das Beispiel eines Hüttenwerkes vorstellen, weil es die Industri­alisierung alten und neuen Typs anschaulich macht. Es handelt sich um ein Eisenwerk, dessen Eigentümer Luxemburg immer verbunden blieben, auch wenn der Betrieb wegen der Grenzziehung des Wiener Kongresses seit 1815 auf preußischem und später deutschem Staatsgebiet lag. Es handelt sich um die „Weiler­bacher Hütte“ in der Gemeinde Bollendorf. Mit Hilfe meiner Untersuchung möchte ich vier Fragen beantworten: 1. Warum überstand ausgerechnet die Weilerbacher Hütte – anders als die meisten anderen alten Hüttenwerke der Region – die Ent-Industrialisierung der Südeifel? 2. Wie wirkten sich die rasch wechselnden wirtschaftlichen und politischen Rahmenbedingungen auf die Entwicklung des Weilerbacher Hüttenwerkes aus? 3. Welche Position nahm dieses Werk innerhalb der Eisenindustrie der Region ein? 4. Welche politische, gesellschaftliche und wirtschaftliche Rolle spielten die Hüttenunternehmer selbst auf lokaler, regionaler, nationaler und internationaler Ebene?

1. Anfänge

Lange vor der Gründung des Weilerbacher Hütten­werks ließ die Abtei Echternach in der so genannten „Altschmiede“ in Bollendorf Eisenerz verhütten. Dieses Werk lag zwar verkehrs­günstig an der Sauer, litt aber erheblich unter den zahlreichen Hochwassern des kleinen Flusses.­ Daher verlegte Abt Emmanuel

Limpach, der sich sehr für das Eisenhütten­wesen interessierte, im Jahre 1775 das Werk einige Kilometer nach Süden, nach Weilerbach, wo ein zugleich flussnaher und hochwassersicherer Standort zur Verfügung stand. Darüber hinaus lieferten zwei Bäche, die von dem Ferchweiler Plateau herab in die Sauer flossen, genügend Wasser für die geplanten Hammer- und Spaltmühlenanlagen. Erze wurden aus Mersch und den nahen Eifelorten Mettendorf und Kruchten­ angeliefert. Das Merscher Erz wurde von Lastkähnen gebracht; aus den beiden Eifelorten kam es mit Fuhrwerken. Zudem sicherte der Holzreichtum der Gegend die Versorgung des Werkes mit Holzkohle. Aus der Quinter Hütte wurde ein moderner Hochofen mit Wind­gebläse beschafft. Neben der technischen Anlage entstand unter der Leitung des Architekten Paul Mungenast ein kleines Schloss mit Barockgarten, das 1780 fertig gestellt wurde. Auch der Abt lebte hier. Acht Jahre später erreichte der Konvent durch seine Intervention beim Erzbistum Trier, dass Limpach die Betriebsleitung an Paul Mungenast abtrat und sich wieder mehr seinen geistlichen Aufgaben widmete24. Als Konsequenz der Eroberung des Herzog­tums Luxemburg durch die Truppen der ­französischen Republik zwischen 1793 und 1795 kam diese Region unter ­französische ­Verwaltung. Wie zuvor im ­französischen Kernland wurden nun auch hier die Güter der geistlichen Institutionen ver­staatlicht und an kapitalkräftige Interessenten versteigert. Das Weilerbacher Hüttenwerk wurde im Oktober 1795 nationalisiert. Die Anlage lag jahrelang still, weil das französische Militär wichtige Betriebsmittel während der Belagerung der Festung Luxemburg (1794/95) beschlagnahmt hatte. Das Nationalgut Weilerbacher Hütte wurde auf einen Wert von 63.000 Livres geschätzt25.

24 Zur Geschichte der Weilerbacher Hütte grundlegend: NEU, Peter, Eisenindustrie in der Eifel. Aufstieg, Blüte und

Niedergang (Landschaftsverband Rheinland. Amt für rheinische Landeskunde. Werken und Wohnen. Volkskundliche Untersuchungen im Rheinland, Bd. 16), Köln, Bonn 1988. – COLLJUNG, Paul, Abt Emmanuel Limpach – Bauherr von Schloß Weilerbach, Schmittherr und Industrieller. In: Heimatkalender Landkreis Bitburg-Prüm, 1993, S. 70-74. – MERSCH, Jules, Les Familles Servais, in: Biographie Nationale du Pays de Luxembourg depuis ses origines jusqu´a nos jours, Bd. 20. Luxemburg 1972, S. 445. – Zu den Aspekten der Denkmalpflege bei der 1992 abgeschlossenen Renovierung des Schlosses vgl. BERENS, Michael, Schloß Weilerbach an der Sauer wurde wiederhergestellt und festlich eingeweiht. Zur Geschichte und Wiederherstellung des Schlosses, in: Heimatkalender Landkreis Bitburg-Prüm, 1993, S. 59-60. Zur Schlossbautätigkeit Mungenasts und des Echternacher Klosters vgl. SCHMITT, Michel, Die Bautätigkeit der Abtei Echternach im 18. Jahrhundert (1728-1793). Ein Beitrag zur Geschichte des luxemburgischen Bauwesens im Barockzeitalter. Luxemburg 1970, S. 204-213. Bauwesens im Barockzeitalter. Luxemburg 1970, S. 204-213. 25 LHA Koblenz, Best. 300, Nr. 118. – LEFORT, Alfred, Histoire du Département des Forêts (Le duché de Luxembourg de 1795 à 1814) d’après les archives du Gouvernement Grand-Ducal et des documents françaises inédites, in: Publications de la Section historique de l’Institut grand-ducal de Luxembourg, 50, 1905, S. 284. – Zum Vergleich der Größenordnungen: Die Gebäude und sonstigen Besitztümer des Benediktinerkonvents in Echternach wurden auf insgesamt 161.020 Livres geschätzt. – Ebenda, S. 283.

42


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

2. Die Ära Légier

a) Die Übernahme der Hütte durch Légier Am 16. März 1797 erwarben ein früheres ­Mitglied des Echternacher Benedikt­iner­konvents, Michel Luxemburger, nun in Trier an­sässig, und der Bürger Légier, der in der Stadt ­Luxemburg wohnte, die Weilerbacher Hütte. Nach dem Bestandsverzeichnis des Nationalgutes „Weilerbacher Hütte“ hatten die erworbenen Güter zum Zeitpunkt ihrer Versteigerung folgenden Umfang: zwei Schlackenpochwerke, einen Hochofen mit Formerei und Kohlenscheune, zwei Grobhämmer, einen Kleinhammer, eine Gießerei, zwei Teiche und ein Reservoir für die Wasserversorgung der Fabrikanlagen, drei „schöne Häuser“ und einen großen Garten. Diese Anlage erstreckte sich auf einer Fläche von 14 Morgen. Außerhalb dieses Geländes gehörten zu den versteigerten Gütern: die Mühle von Ferschweiler, ein Morgen Wiese, die zum Zinshof von Diesburg gehörte, sowie eine etwa gleichgroße Wiese zwischen der Sauer und dem Wald Komesbusch, ein Weiher, der Kanal für das Wasser des Gutbachs im Kammersbusch, der Kanal der Schmiede, ein Landstück am Ufer der Sauer, auf dem die Eisenerze gelagert wurden, die mit Nachen aus Ettelbruck und anderen Orten herangeschafft wurden, sowie eine Insel von etwa eineinhalb Morgen Fläche in der Sauer26. In dieser Zeit ersteigerten Légier und seine Frau auch umfangreiche Ländereien in der Umgebung, in der Regel wiederum gemeinsam mit anderen Personen27. In der Folgezeit übernahm Légier die Leitung der Weilerbacher Hütte, die sich, wie oben bereits dargestellt, in einem sehr desolaten Zustand befand. Doch als einer der wichtigsten Funktionsträger der französischen Regierung in den eroberten Gebie­ten der südlichen Niederlande konnte sich Charles Nicolas Vincent Légier zunächst kaum um seinen neuen Besitz kümmern. b) Légier als Träger öffentlicher Funktionen Nicolas Vincent Légier war am 6. Dezember 1754 als zweiter Sohn einer wohlhabenden Familie in Blois an der Loire geboren worden. 26

Nach dem Studium der Rechte wurde der junge Légier Prokurator am königlichen Gerichtshof in Paris und arbeitete zugleich als Rechts­ anwalt. 1789 schloss er sich der revolutionären Bewegung an und leitete eine Sektion der Ur­ wählerversammlungen in Paris. Im selben Jahr übte er in Paris das Amt eines Friedensrichters aus, doch schon zwei Jahre später wurde er im Zuge der Radikalisierung der Revolution wieder aus diesem Amt entfernt. Fernab von Paris arbeitete er danach als außerordentlicher Kommissar am Aufbau der französischen Verwaltung in den südlichen Niederlanden mit. Seit Juni 1793 wirkte er als Militärstaatsanwalt bei der Rheinarmee. Nach Auseinandersetzungen mit den Militärbehörden kehrte er nach Paris zurück. Wenig später beauftragte ihn die Regierung erneut, beim Aufbau der fran­zö­ sischen Verwaltung Belgiens mitzuwirken. Nach der Kapitulation der österreichischen Besatzung der Festung Luxemburg im Juni 1795 lebte er in der Festungsstadt und wurde am 18.11.1795 zum Regierungskommissar bei der Zentralverwaltung des Wälderdepartements ernannt28. Im März 1797 wurde er Abgeordneter der gesetzgebenden Versammlung, des Rats der Fünfhundert. Unter der Konsulatsverfassung war Légier seit Dezember 1799 Mitglied des Tribunats – der zweiten Kammer der Legis­lative. Nachdem er in Opposition zum napoleonischen Regime geraten war, wurde er 1802 von dieser Versammlung ausgeschlossen und lebte fortan mit seiner Familie in Weilerbach29. c) Légier in Weilerbach Der Hüttenbetrieb, der sich bis dahin noch immer in einem sehr schlechten Zustand befand, nahm nun einen raschen Aufschwung und brachte seinem Eigentümer gute Gewinne. Seine Erze bezog er vor allem aus Mersch, Kruchten und Mettendorf. Nach einer Erhebung der Bewertungskommission für das Wälderdepartement vom 14. August 1813 leitete der Eigentümer

LHA Koblenz, Best. 300, Nr. 118.

27 Ebenda, Nr. 117, 132, 156, 204. 28 HOLZBERGER, Hiltrud, Herr Légier von Weilerbach. Ein Leben in bewegter Zeit zwischen Orléans-Mons-

Luxemburg-Bollendorf. In: Landkreis Bitburg-Prüm. Heimatkalender 1996, S. 38-40. – ANL, B 860. Schreiben der Regierungskommissare für die eroberten Gebiete, Brüssel, 27 Brumiaire des 4. Jahres der Republik. – ANL, B 759. – LEFORT, Département des Forêts, S. 87f., 154-160.

29 HOLZBERGER, Légier (1996), S. 41-43. – LEFORT, Département des Forêts, S. 155.

43


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

seinen Betrieb selbst. Er beschäftigte insgesamt 25 Personen, darunter einen Hüttenmeister und einen kaufmännischen Angestellten sowie 23 Arbeiter. Fünf dieser Arbeiter hielten den Schmelzofen in Betrieb, sechs die beiden Grobhämmer und sieben die Gießerei. Wegen zahlreicher Betriebsunterbrechungen waren die Arbeiter nicht dauerhaft bei Légier beschäftigt. Das Werk verarbeitete in diesem Jahr 135.000 Kilogramm Eisenerz und er­ zeugte 86.400 Kilo­gramm Roheisen. Legier erlöste mit dieser Produktion 13.824 Franken, denen Gesamtkosten von 10.324 Franken gegenüber standen. Die Holzkohle stellte mit 46% der Kosten den wichtigsten Kostenfaktor dar, es folgte das Eisen­erz mit 40%. Die Löhne der Arbeiter – der durchschnittliche Tagelohn war 1,5 Franken machten dagegen nur einen Anteil von 3,3% der Kosten aus. Die Profitabilität lag bei einer Gewinnspanne von rund 25% bemerkenswert hoch, denn die Jahresproduktion wurde in ledig­lich 52 Tagen erbracht. Die Erzeugnisse der Hütte wurden überwiegend in der unmittelbaren Umgebung des Werks abgesetzt30. d) Die Weilerbacher Hütte und die Eisenindustrie des Wälderdepartements Die Weilerbacher Hütte war nach Produktionsausstoß und Beschäftigtenzahl eines der kleinsten Werke des Wälderdepartements. Während in Weilerbach nur sechs Hütten­arbeiter beschäftigt waren, arbeiteten in Orval, dem größten Werk des Departements, 21 Arbeiter. Bei diesen Personen handelte es sich um das Fachpersonal. Der durchschnittliche Tageslohn dieser Arbeiter belief sich auf 2 Franken und 75 Centimes. Für die nicht ständig beschäftigten Arbeiter gibt die Statistik nur die Tage an, in denen Lohnarbeit geleistet wurde. Die Löhne dieser geringer quali­ fizierten Arbeitskräfte betrugen nicht einmal die Hälfte der Facharbeiterlöhne: durchschnittlich 1,35 Franken. Hinsichtlich der Rentabilität ergibt sich ein deutlich anderes Bild. Hier lagen die kleinen Eifelhütten in Eisen­schmitt und Malberg an der Spitze, die einen Gewinn von 33 bis 37% aufweisen. Das große Werk in Orval bildet mit weniger als 12% das Schlusslicht und die Weilerbacher Hütte liegt mit 28% hinter

Grundhof und vor Dommel­dange an zehnter Stelle. Zumindest was die Rentabilität im Jahr 1811 betrifft, befindet sich die Weilerbacher Hütte im Vergleich mit den übrigen Eisen­werken des Wälderdepartements in einer überaus günstigen Position31. Dieser Versuch, die Weilerbacher Hütte in ihr industrielles Umfeld einzuordnen, führt schließlich auch zu der Frage, welche Bedeu­ tung die Eisenindustrie insgesamt für das Wälder­departement hatte. Von den 68 Eisenwerken, die im Wälderdepartement existierten, waren 1811 nur 51 in Betrieb. Sie verbrauchten rund 11 Millionen Kilogramm Roheisen im Wert von 1,8 Millionen Franken. Der Bedarf der Eisenwerke an Kohlholz, der teilweise auch aus den benachbarten Departementen gedeckt wurde, betrug rund 145.000 Raum­meter im Wert von rund 0,5 Millionen Franken. Die Holzfäller- und Köhlereiarbeiten und den Transport der Holzkohle zu den Eisenwerken erfor­ derten rund 93.000 Manntage und rund 59.000 Arbeitstage von Pferden im Gesamtwert von 215.000 Franken. Insgesamt 293 Arbeiter waren in den Eisenwerken beschäftigt; sie arbeiteten 65.090 Tage im Wert von 174.000 Franken. Das heißt, die Eisenwerkarbeiter arbeiteten pro Jahr durchschnittlich rund 222 Tage. Diese Jahresarbeitsleistung auf die Produktion der Holzkohle umgerechnet, würde bedeuten, dass hier weitere 418 Personen beschäftigt gewesen wären, insgesamt also 711. Diese grobe Schätzung gibt freilich nur eine Mindestzahl an, denn ein Großteil der Holzarbeiten wurde im Nebenerwerb durchgeführt. Insgesamt wurden 7,7 Millionen Kilogramm Eisen im Wert von 3,3 Millionen Franken produziert. Der erwirtschaftete Gesamtgewinn belief sich auf 775.000 Franken32. Eine umfangreiche Denkschrift des Präfekten aus dieser Zeit beurteilt die Bedeutung der gesamten Eisenindustrie im Wälderdepartement folgendermaßen: Die Arbeit dieses Wirtschaftszweigs sei sowohl für den Staat als auch für die Einwohner von großem Vorteil. Sie beschäftige in dem nicht sehr fruchtbaren Land 10.000 bis 12.000 Arbeiter und 6.000 bis 7.000 Pferde. Ohne sie bliebe die wichtigste Ressource des Departements und zugleich auch die wichtigste Einkommensquelle für den Staat

30 LHA Koblenz, Best. 300, Nr. 89. - Ähnliche Größenordnungen bei NEU, Eisenindustrie. 31

ANL, B 25, Nr. 289.

32 ANL, B 26.

44


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

– der Wald - wertlos33. Dieses Bild von der Bedeutung der Eisenindustrie mag etwas überzeichnet ge­wesen sein, denn die oben genannte Statistik aus dem Jahre 1806 wartet mit deutlich geringeren Zahlen auf34. Doch insgesamt war die eisenschaffende Industrie und ihre Nebenbranchen – Holzkohlegewinnung, Erzbergbau, Transportgewerbe – der wichtigste Industriezweig des Wälderdepartements. e) Rolle der Légiers in Bollendorf Aufgrund seiner gesellschaftlichen und wirtschaftlichen Stellung gehörte Légier zur höchsten Klasse der Notabeln des Wälderdepartements. So hatte Légiers Tochter den Gutsbesitzer und Verwaltungsbeamten Emmanuel-Frédéric Sarrazin geheiratet. Sarrazin wurde 1812 Maire der Gemeinde Bollendorf, zog sich aber Ende 1813 mit seiner Familie vor den heranrückenden alliierten Truppen in das Innere Frankreichs zurück35. Der inzwischen sechzigjährige Légier aber blieb in Weilerbach, das von den auf dem Wiener Kongreß versammelten europäischen Großmächten wie alle ehemals luxemburgischen Gebiete östlich der Our-Sauer-Mosel-Linie zu Preußen geschlagen worden war. Die neue Staatsgrenze trennte die Weilerbacher Hütte von ihren alten Absatzmärkten in Luxemburg und Frankreich. Nur mühsam konnte sie sich gegen ihre neuen englischen, schwedischen und belgischen Konkurrenten behaupten. Légier starb Anfang 1827 zweiundsiebzig­ jährig in Weilerbach. Seine Frau kehrte nach Frankreich zurück36. Erben von Schloß und Eisen­hütte Weilerbach, der Mühle von Fersch­weiler und der Burg Bollendorf wurde ein anderer Zweig der Sippe Légier, das Ehepaar Lefort. Johann Peter Lefort aus Echternach war Légiers Hüttenmeister. Er heiratete eine Nichte Légiers und wurde Ende 1813 Sarrazins Nachfolger als Bürgermeister von Bollendorf. Dieses Amt übte

er bis Ende März 1848 aus, als er von Revolutionären aus der Gemeinde gewaltsam zum Rücktritt gezwungen wurde. Acht Jahre später starb er. Die Weilerbacher Hütte hatte er bereits 1827, dem Todesjahr Légiers, an einen der bedeutendsten Eisenhüttenherrn Luxemburgs verkauft: an Charles Joseph Collart37.

3. Die Ära Servais

a) Die Anfänge Da Collart den Kaufpreis nicht vollständig bezahlte, verkauften Légiers Erben den Hütten­ komplex am 15. November 1832 an den Grundbesitzer Emmanuel Jean Antoine Servais aus Mersch. Dieser übertrug die Leitung der Fabrik seinen Söhnen Philippe und Bernard, deren erste Sorge es war, den stillliegenden Hochofen wieder in Stand zu setzen. Die Versorgung des Werks mit Eisenerzen sollte durch Ausweitung der Bergwerksrechte von den Erzminen der Familie Servais bei Mersch aus über die Sauer gewährleistet werden38. Bis zum Beitritt Luxemburgs zum Deutschen Zollverein im Jahre 1842 wurden die Erzeugnisse der Weilerbacher Hütte im Raum Trier und im Saarland vertrieben, danach stand ihnen auch der Markt des Großherzogtums ­offen. Die Nachteile der Grenzlage, die dem Werk seit 1815 so zugesetzt hatten, waren somit für über sieben Jahrzehnte beseitigt. 1843 wurde die Produktionstechnik des Werkes durch die Einführung eines Puddelofens erheblich verbessert. Erstmals konnte nun auch Steinkohle als Brennstoff verwendet werden, so dass das Werk allmählich von Holzkohle unabhängig wurde39. Ab 1851 wurde auch Luxemburger Minetteerz verhüttet40. Das heißt, ungefähr um die Mitte des 19. Jahrhunderts vollzog das Weiler­bacher Hüttenwerk den Wandel von der herkömm­lichen Eisenindustrie zur neuen, auf der Grundlage von Minetteerzen und Steinkohle.

33 Ebenda. 34 UNGEHEUER, Eisenindustrie, S. 103.

35 Ebenda, S. 43. – Über die kurzfristige Rückkehr Légiers auf die politische Bühne 1814 vgl. HOLZBERGER, Hiltrud, 36 37 38 39 40

Légiers letzter Auftrag im Wälderdepartement. Der französische Hüttenherr von Weilerbach vor dem Rückzug der Franzosen aus Luxemburg (1814). In: Heimatkalender Landkreis Bitburg-Prüm, 1997, S. 22-25. HOLZBERGER, Légier (1996), S. 43. Ebenda, S. 42-44. - NEU, Eisenindustrie, S. 126. MERSCH, Servais, S. 447-448. LHA Koblenz, Best. 442, Akte 5042, S. 393-296. MERSCH, Servais, S. 449. –WIDUNG, André, Der Anschluß des Großherzogtums Luxemburg an das Zollsystem Preußens und der übrigen Staaten des Zollvereins. Luxemburg 1912. – CALMES, Albert, Der Zollanschluß des Großherzogtums Luxemburg an Deutschland. 1842-1918. Erster Band: Der Eintritt Luxemburgs in den Deutschen Zollverein (1839-1842). Luxemburg 1919.

45


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

b) Die wirtschaftliche und politische Bedeutung der Familie Servais Zur Illustration der wirtschaftlichen und politischen Bedeutung der Familie Servais in der Region, aber auch auf internationaler Ebene, möchte ich hier nur ein sehr prominentes ­Beispiel anführen. Mitglieder dieser Famlie spielten im 19. Jahrhundert eine wichtige Rolle im politischen Leben des Großherzogtums. Als Fabrikanten und Ingenieure waren sie auch in Deutschland aktiv. Der bei weitem bekannteste Vertreter der Familie Servais und eine der bedeutendsten Persönlichkeiten der luxemburgischen Geschichte des 19. Jahrhunderts war Lambert Joseph Emmanuel Servais41. 1811 in Mersch geboren, besuchte er wie seine Brüder das Athenäum in Luxemburg, wo er ein glänzender Schüler war. 1829 bis 1830 studierte er Jura in Gent, bis die Turbulenzen der Belgischen Revolution den Lehrbetrieb zum Erliegen brachten. Er ging nach Paris, wo er sehr interessiert die Aufstände beobachtete und Mitglied der Gesellschaft für Menschenrechte wurde. 1831 beschloss er seine Studien an der Universität Paris und ­erwarb 1833 an der Universität Lüttich den Doktorgrad. Dann wurde er Anwalt in Arlon, wo er bis 1839 blieb. 1836 bis 1839 vertrat er den Kanton Mersch im Luxemburger Provinzialrat und wurde für zwei Jahre dessen Sekretär. 1832 gründete er gemeinsam mit Viktor Tesch die Zeitung „L´Echo du Luxembourg“, in der auch die Rechtsanwälte Charles Metz und Georges Wurth mitarbeiteten. Am 5.5.1838 gründete er gemeinsam mit anderen luxemburgischen Notabeln die „Société Centrale patriotique du Luxembourg“, die sich gegen die Teilung des Großherzogtums wandte. Vergeblich - Luxemburg wurde gemäß dem Londoner Vertrag vom 19. April 1839 geteilt. Belgien erhielt zwei Drittel des Territoriums und die Hälfte der Bevölkerung des alten Staatsgebiets. Das verkleinerte Großherzogtum umfasste Luxemburg in seinen heutigen Staatsgrenzen. Servais fand sich mit den neuen Verhältnissen ab und arbeitete von nun an aktiv in der Politik des Landes mit. Im Folgenden seien lediglich die wichtigsten Ämter und Funktionen aufgezählt, die er bis

zu seinem Tode im Jahr 1890 ausübte: Mitglied der Ständeversammlung des Großherzogtums 1842-1848. Seit 1843 Mitglied des Gemeinderates, seit 1845 Schöffe der Stadt Luxemburg. 1848 gehörte er als Mitglied der verfassungs­ gebenden Nationalversammlung des Großherzogtums dem Ausschuss an, der die neue Verfassung des Landes ausarbeitete; mehr noch, als Mitglied einer dreiköpfigen Arbeitsgruppe dieses Ausschusses formulierte er neben Charles Munchen und Charles Metz die neue Verfassung maßgeblich mit. Nach den Wahlen im August 1848 wurde er einer der drei luxemburgischen Abgeordneten in der Deutschen National­ versammlung in der Frankfurter Paulskirche. 1852 bis 1857 übte er das Amt eines Richters am obersten Gerichtshof des Großherzogtums aus. 1853 bis 1857 war Emmanuel Servais Minister für Finanzen, Landwirtschaft und Handel, 1857 bis 1867 Mitglied des Staatsrats. 1867 vertrat er neben dem Regierungschef Tornaco die Interessen Luxemburgs auf der Londoner Konferenz, in der die europäischen Großmächte über die Neutralisierung des Landes entschieden. 1867 löste er Tornaco als Staatsminister ab und leitete die Regierung in den krisenhaften Jahren bis 1874. Von 1874 bis 1887 war er Präsident des Staatsrates und wirkte von 1875 bis zu seinem Tode im Jahre 1890 als Bürgermeister der Stadt Luxemburg. Seit 1887 war er Präsident der Abgeordnetenkammer und vereidigte in dieser Funktion kurz vor seinem Tode den künftigen Großherzog Adolf aus dem Hause Nassau-Weilburg auf die Verfassung des Landes42. Emmanuel Servais hatte also an allen bedeutenden politischen Ereignissen, die das Großherzogtum Luxemburg zu seinen Leb­ zeiten berührten, selbst und zum großen Teil auch maßgeblich mitgewirkt. Eines seiner wichtigsten wirtschaftspolitischen Ziele war der Ausbau des Eisenbahnnetzes, nicht zuletzt der Prinz-Heinrich-Bahn, die auch das Sauertal hinauf­führte. Der politische Einfluss der Weilerbacher Hüttenunternehmer trug somit wesentlich dazu bei, eine der wichtigsten Voraussetzungen für das wirtschaftliche Überleben ihres Werkes zu schaffen: die Anbindung an die Eisenbahn.

41 SERVAIS, Emmanuel, Autobiographie. Luxembourg 1895. Réédition Luxembourg 1990. 42 MERSCH, Servais (wie Anm. 2), S. 473, 474, 477, 483-486, 488-490, 493-501, 503-518. – CALMES, Christian /

BOSSAERT, Danielle, Geschichte des Großherzogtums Luxemburg, Luxemburg 1996, S. 31-54, 83-91, 99-103, 122-34, 151-160, 292. – COLLART, Auguste, Am Wege zur Unabhängigkeit Luxemburgs, Luxemburg 1938, S. 407-410, 428.

46


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

c) Die Blüte der Weilerbacher Hütten- und Eisenwarenwerke In den Jahren des Zollvereins zwischen Luxemburg und Preußen erlebte die Weilerbacher Hütte ihre Blütezeit. Dabei wurde ein neuer Schwerpunkt auf die Produktion landwirtschaftlicher Geräte gelegt. Ein Bericht des Landrats des Kreises Bitburg an die Bezirksregierung in Trier vom 15.9.1852 bestätigt dies und gibt an, dass zu dieser Zeit 120 Arbeiter im Alter von 18 bis 40 Jahren 300.000 Pfund Gusserzeugnisse, 400.000 Pfund Roheisen und 250.000 Pfund Stabeisen produzierten. Die Erzeugnisse wurden im Rheinland, an Mosel und Saar und in Luxemburg verkauft. Da die englische Konkurrenz die Preise für Roheisen drückte, hätten die Betreiber der Hütte im vergangenen Jahr eine Fabrik für landwirtschaftliche Geräte angelegt, die sehr vielversprechend sei43. Mit der Produktion von Säh- und Dreschmaschinen sowie Pflügen erreichte die Weilerbacher Hütte rasch eine hervorragende Stellung vor allem auf dem lokalen Markt. Dass sich ihre Produkte nun auch international einen guten Ruf erworben hatten, zeigt die Tatsache, dass Zar Nikolaus von Russland im Jahre 1854 vier Pflüge in Weilerbach bestellte. 1868 ließen die Brüder Servais in Weilerbach eine Werkstatt für Metallbau errichten und verbesserten die technische Ausstattung der Produktions­anlagen weiter. 1869 rüsteten sie ihren Puddelofen mit einem Windfrischer der Firma Siemens aus, dem ersten seiner Art auf dem Gebiet des Deutschen Zollvereins44. 1878 übernahm Emmanuel Servais´ Sohn die Firmenleitung. Unter ihm setzte ein weiterer Modernisierungsschub ein. Emile Servais war 1847 in Luxemburg geboren, studierte nach seinem Abitur am Luxemburger Athenäum von 1863 bis 1868 an der Bergbauakademie in ­Lüttich, die er nach einem glänzenden ­Examen mit einem Ingenieurdiplom verließ. Nach einem­ Praktikum leitete er 1869 bis 1872 ein Eisenwerk der Familie Servais in Eschweiler, danach das Werk in Colmar. 1877 hatte er maßgeblichen Anteil an der Gründung der Prinz-Heinrich-Eisenbahngesell-

schaft – die zweite luxemburgische Eisenbahngesellschaft, neben der Wilhelm-von-Luxemburg-Bahn, die sich in deutschem Besitz befand. In den folgenden Jahrzehnten wirkte er in den Verwaltungsräten zahlreicher Unternehmen der luxemburgischen Eisenindustrie mit und wurde einer der Mitbegründer der luxemburgischen Ingenieur- und IndustriellenVereinigung. Doch im Zentrum seiner Arbeit stand die Leitung der Weilerbacher Hütte. Er ließ drei Turbinen aufstellen und 1879 den alten Hochofen abreißen. Die beiden alten wassergetriebenen Schmieden wurden 1882 durch eine dampfbetriebene Anlage ersetzt. Die Produktion wurde endgültig auf große Gussstücke, Baumaterialien aus Stahl und auf Maschinen konzentriert, die in der Landwirtschaft und im Weinbau verwendet wurden. Die in Weilerbach produzierten Heizöfen fanden im Großherzogtum und in der Eifel weite Verbreitung45. 1892 wurde auf dem Gelände der Fabrik eine Emaillerie und eine Vernickelungsanlage errichtet. 1902 erhielt die Gießerei über eine ­eigens gebaute Brücke einen direkten Anschluss an die luxemburgische Prinz-HeinrichBahn auf dem gegenüberliegenden Ufer der Sauer. Der größte Teil des Werkes lag nun am Sauerufer; lediglich die Dampfschmiede befand sich noch auf dem ursprünglichen Gelände des Werks. 1914 waren in den Weilerbacher Fabriken der Familie Servais 230 Personen beschäftigt. Die Arbeiter kamen wie schon in den Anfangs­zeiten der Hütte im 18. Jahrhundert aus Bollendorf und den benachbarten Dörfern Ernzen und Fersch­weiler. Das Büropersonal stammte dagegen zumeist aus Echternach46. Dank seiner günstigen Lage am Ufer der Sauer, der Anbindung an das luxemburgische Eisenbahnnetz und vor allem durch den Zollverein Luxemburgs mit dem Deutschen Reich hatte das Weilerbacher Werk die tiefgreifenden politischen, sozialen, ökonomischen und tech­nischen Umwälzungen des 19. Jahrhunderts überstanden. Alle anderen Hütten in der Süd­eifel dagegen waren, mit Ausnahme der Quinter­ Hütte bei Trier, im Laufe dieser Epoche gezwungen, ihren Betrieb einzustellen.

43 LHA Koblenz, Best. 442, Akte 4439, fol. 4. 44

MERSCH, Servais, S. 450. Ebenda, S. 450f, 592-594. 46 Ebenda, S. 453f. – NEU, Eisenindustrie, S. 126. 45

47


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

d) Niedergang durch Kriege und nationalsozialistische Repression Nach dem Ersten Weltkrieg schied Luxemburg aus der Zollunion mit dem Deutschen Reich aus. Damit war das Weilerbacher Werk wieder, wie schon ein Jahrhundert zuvor, durch hohe Zollmauern von seinen wichtigsten Absatzmärkten getrennt. In diesen schweren Jahren übernahm Emile Servais´ Sohn Maurice die Leitung des Unternehmens. Tatkräftig unterstützt durch seine Frau Marguerite gelang es ihm durch die Entwicklung neuer Produkte, insbesondere durch Gussöfen mit doppelter Luftzirkulation, das Unternehmen auch in diesen schwierigen Zeiten zu erhalten47. Nachdem bereits die Folgen der Weltwirtschaftskrise von 1929 das Weilerbacher Werk schwer getroffen hatten, musste sich der luxemburgische Staatsbürger Maurice Servais nach 1933 mit den „Germanisierungs“-Bemühungen der neuen Machthaber auseinandersetzen. 1936 arbeiteten nur noch 50 Beschäftigte in seinem Betrieb. Weil er sich im Verlauf des Krieges weigerte, in seinem Werk Rüstungsgüter zu produzieren, wurden ihm in einem solchen Maße wichtige Rohstoffe vorenthalten, dass eine wirtschaftliche Produktion von Heizöfen kaum noch möglich war. 1944 stand sein Betrieb kurz vor der Enteignung. Ein Teil des Weilerbacher Werkes wurde einer Firma zugewiesen, deren Produktionsstätten alliierten Bombenangriffen zum Opfer gefallen waren. Anfang September kam die Produktion völlig zum Erliegen, da die deutschen Truppen bei ihrem Rückzug vor den vorrückenden Amerikanern die Sauerbrücke sprengten, die das Werk mit der Eisenbahn­linie verband. Servais floh unter Lebensgefahr nach Luxemburg. Als er im März 1945 nach Weilerbach zurückkehrte, war das Werk stark beschädigt. Doch während die Schmiede völlig unbrauchbar geworden war, konnte die Gieß­erei die Produktion der Öfen wieder aufnehmen, die in dieser Zeit guten Absatz fanden. Dennoch wurde nach dem Tode von Maurice Servais im August 1951 die Liquidation der Gesellschaft eingeleitet. Am 29. Mai 1959 schloss die Weiler­bacher Eisenwarenfabrik endgültig ihre Pforten48.

Fazit Mit dem Ende der Weilerbacher Hütte brach eine Tradition ab, die bis ins 18. Jahrhundert reichte. Sie verdankte ihr Entstehen dem tech­ nischen und wirtschaftlichen Interesse des Abtes der Echternacher Abtei St. Willibrord, der die Besitztümer des Klosters im rationalistischen Geist der Aufklärung zu nutzen gedachte. Als Oberhaupt der alten Benediktinerabtei war Limpach andererseits ein typischer Vertreter der Eliten des Ancien Régime, dessen Wirkungskreis weit über die Region hinausreichte. Als ehemals geistlicher Besitz gelangte das Hüttenwerk in die Hände eines exponierten Vertreters der neuen Eliten: Bereits unter dem Ancien Régime über beachtlichen Wohlstand verfügend, war Nicolas Vincent Légier von liberaler Gesinnung, juristisch gebildet und in der Folge der Revolution zu politischem Einfluss und großem Reichtum gelangt. Auch die ersten Mitglieder der Familie Servais, die das Werk seit 1832 leiteten, können als typische Repräsentanten der Eliten ihrer Epoche gelten. Nachdem Angehörige dieser Familie bereits ­unter dem Ancien Régime und in den Epochen der französischen, niederländischen und belgischen Herrschaft in Luxemburg wichtige öffentliche Funktionen ausgeübt hatten, gelang der Familie mit dem Erwerb der Weilerbacher Hütte der Aufstieg in die Reihen der Industriellen. Typisch ist auch das politische Engagement der juristisch gebildeten, liberalen Gründer­ generation – wofür Emmanuel Servais als besonders herausragendes Beispiel gelten kann. Bei den letzten beiden Generationen der Eigentümer der Weilerbacher Hütte, die sich nicht mehr auf eine juristische, sondern auf eine technische Ausbildung stützten, ist eine Konzentration auf technische und wirtschaftliche Aktivitäten zu beobachten, während die Politik in den Hintergrund trat. Eine wichtige Existenzgrundlage der Hütte war die Bereitschaft zu technischen Innovationen, und diese erforderte eine entsprechende Qualifikation der Werks­leitung. Doch noch immer spielten die besonders intensiven Beziehungen der Familie zu den führenden Kreisen Luxemburgs für den Bestand des Werks eine besondere Rolle:

47 Ebenda, S. 454. – CALMES / BOSSAERT, Großherzogtum Luxemburg, S. 319. 48 MERSCH, Servais (wie Anm. 2), S. 456f. – NEU, Eisenindustrie, S. 126f.

48


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

Dies zeigte sich vor allem bei der Frage der An­ bindung der Weilerbacher Hütte an das luxemburgische Eisenbahnnetz. Doch die wichtigste Grundvoraussetzung für das Prosperieren der Weilerbacher Hütte war die wirtschaftliche Einheit der Gebiete links und rechts der Sauer. Die Hütte war immer dann gefährdet, wenn Kriege sie von Ressourcen und Absatzmärkten abschnitten, oder auch, als die von den Mächten des Wiener Kongresses gezogene politische Grenze entlang der Sauer wirtschaftlich wirksam war. Sie blühte im späten Ancien Regime, in der napoleonischen Epoche und während des Zollvereins zwischen Preußen und Luxemburg. Dank günstiger politischer Rahmenbedingungen und der technischen Innovationsfähigkeit ihrer Eigentümer überlebte sie zwar den Niedergang der Eisenindustrie in Ardennen und südlicher Eifel, doch wurde sie schließlich eines von ungezählten Opfern der Kriegspolitik deutscher Regierungen im 20. Jahrhundert. Das Beispiel des Weilerbacher Hüttenwerks zeigt einen zeittypischen Wechsel der wirtschaftlichen und politischen Eliten. Unser Fallbeispiel bestätigt somit die These, die wir nach unserer Skizze der

Entwicklungsgeschichte der luxemburgischen Eisenindustrie alten Typs formuliert haben: Neben dem Zugang zu Rohstoffen, Energieträgern und Absatz­märkten waren es vor allem die politischen Rahmenbedingungen, die letztlich über Prosperität oder Niedergang der Eisenindustrie entschieden. Trotz einer Fülle von Einzelforschungen zu diesem Thema sind große Forschungslücken zu diesem Themenbereich festzuhalten: Es fehlen Studien über die Zusammenhänge von Familiennetzwerken und wirtschaftlicher Entwicklung früher Eisenkonzerne des Wälderdepartements und darüber hinaus. Es fehlen Studien, die Zusammenhänge der Eisenproduktion mit anderen Wirtschaftszweigen untersuchen. Es fehlt eine zusammenhängende Sozialgeschichte der Arbeitskräfte, die in den Werken selbst oder in ihren Zuliefergewerben arbeiteten – von den Holzfällern über die Köhler und Transportarbeiter hin zu den hochqualifizierten Spezialisten, die den Kern der Betriebe bildeten. Und es fehlt eine umfassende Studie, die die politische, wirtschaftliche und kulturelle Dimension der Geschichte der luxemburgischen Eisenindustrie in ihren transnationalen Zusammenhängen analysiert.

Weiterführende Literatur BERENS, Michael, Schloß Weilerbach an der Sauer wurde wiederhergestellt und festlich eingeweiht. Zur Geschichte und Wiederherstellung des Schlosses, in: Heimatkalender Landkreis Bitburg-Prüm, 1993, S. 59-60. BOURGUIGNON, Marcel, La sidérurgie, industrie commune des pays d´entre Meuse et Rhin, in: Anciens pays et assemblées d´États, 28 (1963) 93. BRAUN, Hermann-Josef, Das Eisenhüttenwesen des Hunsrücks. 15. bis Ende 18. Jahrhundert (Trierer Historische Forschungen, Bd. 17), Trier 1991. CALMES, Albert, Der Zollanschluß des Großherzogtums Luxemburg an Deutschland. 1842-1918. Erster Band: Der Eintritt Luxemburgs in den Deutschen Zollverein (1839-1842). Luxemburg 1919. CALMES, Christian / BOSSAERT, Danielle, Geschichte des Großherzogtums Luxemburg, Luxemburg 1996, S. 31-54, 83-91, 99-103, 122-34, 151-160, 292. COLLART, Auguste, Am Wege zur Unabhängigkeit Luxemburgs, Luxemburg 1938, S. 407410, 428. COLLJUNG, Paul, Abt Emmanuel Limpach – Bauherr von Schloß Weilerbach, Schmittherr und Industrieller. In: Heimatkalender Landkreis BitburgPrüm, 1993, S. 70-74.

DOLLAR, Jacques, Historique de l´ancienne forge de La Sauvage, Bascharage 1989. DORBAN, Michel / YANTE, Jean-Marie / LEHNERS, Jean-Paul, Quatre siècles de sidérurgie luxembourgeoise (1380-1815), in: HERRMANN, Hans-Walter / WYNANTS, Paul (Hgg.), Wandlungen der Eisenindustrie vom 16. Jahrhundert bis 1960 (Colloques Meuse-Moselle), Namur 1997, S. 113-138. FRANZ, Norbert, Luxemburger Eisenindustrielle in der südlichen Eifel – die Weilerbacher Hütte, in: Kurtrierisches Jahrbuch 38 (1998), S. 155-175. FREMDLING, Rainer, Technologischer Wandel und internationaler Handel im 18. und 19. Jahrhundert. Die Eisenindustrien in Großbritannien, Belgien, Frankreich und Deutschland (Schriften zur Wirtschafts- und Sozialgeschichte, Bd. 35), Berlin 1986. GUENA, Yves, Les Wendel: trois siècles d´histoire, Paris 2004. HANSOTTE, Georges, La métallurgie et le commerce international du fer dans les Pays-Bas autrichiens et la principauté de Liège pendant la seconde moitié du XVIIIe siècle (Histoire quantitative et développement de la Belgique au XIXe siècle, II/3), Bruxelles 1980.

49


Terres Rouges

Metamorphosen der Eisenindustrie: Industrialisierung vor der Industriellen Revolution in Luxemburg

HERRMANN, Hans-Walter / WYNANTS, Paul (Hgg.), Wandlungen der Eisenindustrie vom 16. Jh. bis 1960 (Colloques Meuse-Moselle), Namur 1997. HOLZBERGER, Hiltrud, Herr Légier von Weilerbach. Ein Leben in bewegter Zeit zwischen Orléans-Mons-Luxemburg-Bollendorf. In: Landkreis Bitburg-Prüm. Heimatkalender 1996, S. 38-40. HOLZBERGER, Hiltrud, Légiers letzter Auftrag im Wälderdepartement. Der französische Hüttenherr von Weilerbach vor dem Rückzug der Franzosen aus Luxemburg (1814). In: Heimatkalender Landkreis Bitburg-Prüm, 1997, S. 22-25. KIEFFER, Monique, La sidérurgie au Grand-Duché de Luxembourg: 1840-1960, in: Hans- HERRMANN, Hans-Walter / WYNANTS, Paul (Hgg.), Wandlungen der Eisenindustrie vom 16. Jahrhundert bis 1960 (Colloques MeuseMoselle), Namur 1997, S. 139-169. LEBOUTTE, René, Vie et mort des bassins industriels en Europe 1750-2000, Paris 1997. Ders. / PUISSANT, Jean / SCUTO, Denis, Un siècle d´histoire industrielle. Belgique, Luxembourg, Pays-Bas. Industrialisation et sociétés 1873-1973, Paris 1998.LEFORT, Alfred, Histoire du Département des Forêts (Le duché de Luxembourg de 1795 à 1814) d’après les archives du Gouvernement GrandDucal et des documents françaises inédites, in: Publications de la Section historique de l’Institut grandducal de Luxembourg, 50, 1905, S. 284. MARSEILLE, Jacques, Les Wendel 17042004, Paris 2004. MARZEN, Walter, Die saarländische Eisenund Stahlindustrie 1430-1993, Saarbrücken 1994. MERSCH, Jules, Les Familles Servais, in: Biographie Nationale du Pays de Luxembourg depuis ses origines jusqu´a nos jours, Bd. 20. Luxemburg 1972, S. 445.

50

NEU, Peter, Eisenindustrie in der Eifel. Aufstieg, Blüte und Niedergang (Landschaftsverband Rheinland. Amt für rheinische Landeskunde. Werken und Wohnen. Volkskundliche Untersuchungen im Rheinland, Bd. 16), Köln, Bonn 1988. MERSCH, Jules, Les Familles Servais, in: Biographie Nationale du Pays de Luxembourg depuis ses origines jusqu´à nos jours, Bd. 20. Luxemburg 1972. PAULY, Michel, Proto-industrialisation et immigration au Luxembourg, in: ALLEGREZZA, Serge / HIRSCH, Mario / v. KUNITZKI, Norbert (Hgg.), L´immigration au Luxembourg, et après? Luxemburg 2007, S. 47-59. SCHMITT, Michel, Die Bautätigkeit der Abtei Echternach im 18. Jahrhundert (1728-1793). Ein Beitrag zur Geschichte des luxemburgischen Bauwesens im Barockzeitalter. Luxemburg 1970, S. 204-213. SERVAIS, Emmanuel, Autobiographie. Luxembourg 1895. Réédition Luxembourg 1990. SPRANDEL, Rolf, Das Eisengewerbe im Mittelalter, Stuttgart 1968. STEFFES, Guy / STEFFES, Marcel, La sidérurgie luxembourgeoise de l´époque antérieure à 1840, Luxembourg 1965. UNGEHEUER, Michel, Die Entwicklungsgeschichte der luxemburgischen Eisenindustrie im XIX. Jahrhundert, Luxemburg 1910. WAGNER, Joseph, La sidérurgie luxembourgeoise avant la découverte du gisement des minettes, Diekirch 1921. WIDUNG, André, Der Anschluß des Großherzogtums Luxemburg an das Zollsystem Preußens und der übrigen Staaten des Zollvereins. Luxemburg 1912. WORONOFF, Denis, L´industrie sidérurgique en France pendant la révolution et l´empire, Paris 1984


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone Frank Wilhelm Le recueil poétique de Paul Palgen La Pourpre sur les crassiers a été édité à MézièresCharleville par les soins de la Société des écrivains ardennais, en 1931. Comme l’auteur était en même temps ingénieur au service de l’industrie sidérurgique, il apparaît comme un témoin de premier choix d’une époque où la richesse du Grand-Duché a été – littéralement – « forgée » par des dizaines de milliers d’ouvriers et d’employés de cette importante activité économique qui, dans le petit pays, fonctionnait comme un État dans l’État. Mais dès l’entame de cette étude, il faut préciser que la dimension « luxembourgeoise » de ces poèmes ne sera guère explorée : ce serait d’ailleurs difficile, car cet aspect apparaît peu en vérité. Au contraire, il s’agit de privilégier l’approche universelle, humaniste.

I. La littérature francophone luxembourgeoise À l’époque où paraît La Pourpre sur les crassiers, dans les Ardennes françaises, le champ littéraire francophone luxembourgeois existe certes, mais atteint encore peu de masse critique et se définit essentiellement à partir de l’étranger. Il est d’ailleurs significatif que Palgen, en l’absence de structures intellectuelles regroupant les créateurs luxembourgeois, se positionne comme membre des « écrivains ardennais ». Après l’un ou l’autre poète courtisan dans l’Ancien Régime, notamment dans l’entourage des rois de France, et après les débuts de la presse francophone dans le Duché de Luxembourg grâce au Journal historique et littéraire rédigé par le jésuite François-Xavier de Feller qui s’opposait à l’esprit des Lumières, l’emploi de la langue française fut surtout le fait de la bourgeoisie luxembourgeoise héritière de l’idéologie libérale de la Révolution française, à partir du XIXe siècle. La meilleure illustration en est fournie par Mathieu-Lambert Schrobilgen, juriste, secrétaire communal et rédacteur du

Journal de Luxembourg, personnalité libérale incontournable de la capitale. Il se signalait aussi comme poète mondain formé à l’école de Voltaire, qu’il admirait et imitait dans des pièces de circonstance, spirituelles et un peu futiles, dont certaines, toutefois, traitaient de sujets politiques à la gloire du roi grand-duc Guillaume II, car ce rimeur rationaliste et francophile était aussi un orangiste militant. D’autres intellectuels de l’époque, à l’instar de certains professeurs de l’Athénée de Luxembourg, ou l’une ou l’autre dame de la haute société, publiaient, qui des essais historiques ou littéraires, qui des récits de voyage ou des poèmes lyriques en langue française, mais ces auteurs ne peuvent guère figurer comme pionniers d’une littérature spécifique. Les sujets qu’ils traitent concernent occasionnellement le Grand-Duché et touchent habituellement des thématiques plus générales, ce qui sera un des traits caractéristiques de la littérature francophone à venir. On notera que la littérature en langue allemande et la littérature en « allemand luxembourgeois » – terme utilisé d’abord pour désigner le « luxembourgeois », qui allait devenir « langue nationale » seulement en 1984 – sont nées dans le premier tiers du XIXe siècle et sont volontiers tournées vers l’évocation de la vie locale et matérielle, du fait que la pratique de ces langues est à la portée de couches plus populaires. La littérature francophone, liée à la classe sociale de la bourgeoisie cultivée à scolarité plus poussée, est plutôt portée sur l’universel, le philosophique, et évite les sujets plus terre-à-terre. Les deux premières œuvres majeures publiées par des Luxembourgeois en langue française ont paru hors des frontières nationales : le roman postromantique Marc Bruno. Profil d’artiste de l’étudiant en Droit Félix Thyes, en 1855 à Bruxelles, où il avait fait ses études, et le recueil poétique symboliste Le Prince Avril du juriste Marcel Noppeney, en 1907 à Paris, où le poète avait étudié. Le troisième des écrivains francophones luxembourgeois sera Paul Palgen, 51


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

le terme « écrivain » désignant une personne publiant des ouvrages à ambition littéraire affichée. La Pourpre sur les crassiers est le quatrième recueil de Palgen ; sa carrière sera brièvement commentée à la fin du présent survol. Force est en tout cas de constater que les premiers ouvrages francophones dignes d’intérêt ne sont pas publiés dans le Grand-Duché, lequel, visiblement, ne propose pas encore de références autonomes ni d’instance de reconnaissance. La même année (1931) où Palgen publie son premier recueil important1, en France, paraît aux éditions des Cahiers luxembourgeois le premier roman du Luxembourgeois Willy Gilson, Le Chevalier aux fleurs : désormais, le champ littéraire francophone se positionnera davantage au Grand-Duché, encore que Palgen ne publie plus qu’en France et en Belgique. Pour être à peu près complet, il faut signaler que la presse a joué un rôle certain dans la vie littéraire francophone débutante, à l’image de L’Indépendance luxembourgeoise (18711934), uniquement rédigée en français, et des revues Floréal (1907-1908) et Les Cahiers luxembourgeois (1923-1940), où le français avait la part belle.

II. Poésie et industrie lourde L’industrie lourde comme thème littéraire avait déjà donné quelques œuvres phares de la littérature française et francophone, auxquelles on peut comparer le chant de Palgen à la gloire de la sidérurgie. En France, la référence absolue en ce domaine, c’est Germinal (1885), roman dans lequel Émile Zola montre le fonctionnement d’une entreprise capitaliste, en l’occurrence une mine de charbon dans le Nord de la France, dont le propriétaire, un bourgeois cossu, exploite ses ouvriers qui finissent par se révolter. Zola s’était documenté sur le sujet de son livre au point de descendre lui-même au fond d’une mine de charbon. Dans l’exercice de son métier technique, au contact des hommes, des machines et de la matière, Palgen pouvait se documenter tous les jours pour ses poèmes à venir, même s’il finit par troquer le casque de l’ingénieur de terrain contre le costume-cravate du cadre commercial.

En 1896, le Belge Émile Verhaeren (18551916) publia à Bruxelles un recueil de poésie socialisante au lyrisme frémissant, intitulé Les Villes tentaculaires, qui remporta un franc succès. C’est surtout la pièce « Les usines » qui, pour la première fois, convoque avec les moyens d’un langage rendu comme mécanique l’univers industriel et les mutations sociales, urbanistiques et humaines : Automatiques et minutieux, Des ouvriers silencieux Règlent le mouvement D’universel tictaquement Qui fermente de fièvre et de folie Et déchiquette, avec ses dents d’entêtement, La parole humaine abolie. Plus loin, un vacarme tonnant de chocs Monte de l’ombre et s’érige par blocs ; Et, tout à coup, cassant l’élan des violences, Des murs de bruit semblent tomber Et se taire, dans une mare de silence, Tandis que les appels exacerbés Des sifflets crus et des signaux Hurlent soudain vers les fanaux, Dressant leurs feux sauvages, En buissons d’or, vers les nuages. Et tout autour, ainsi qu’une ceinture, Là-bas, de nocturnes architectures, Voici les docks, les ports, les ponts, les phares Et les gares folles de tintamarres ; Et plus lointains encor des toits d’autres usines Et des cuves et des forges et des cuisines Formidables de naphte et de résines Dont les meutes de feu et de lueurs grandies Mordent parfois le ciel, à coups d’abois et d’incendies.2 Il est probable que Palgen connaissait bien l’œuvre de son confrère belge, lequel a été reçu chez Émile Mayrisch, le premier président des ARBED (Aciéries réunies de Burbach, Eich et Dudelange, groupe fondé à son initiative, en 1911). À comparer leur thématique et leur traitement poétique, la genèse du recueil de Palgen s’inscrit dans le sillage de celui de Verhaeren, même si chez le Luxembourgeois le lyrisme est beaucoup plus personnalisé. La vision moderniste de Palgen fait encore penser au reportage

1 P. Palgen avait débuté par deux recueils symbolistes parus à Luxembourg : La Route royale (1917) et Petits Poèmes

d‘amour (1918) ; son troisième recueil, déjà plus singularisé, Les Seuils noirs. Poèmes de la guerre 1914-1917, fut publié à Luxembourg (G. Soupert) et à Paris (E. Figuière) en 1918. 2 « Les usines », Les Villes tentaculaires, Bruxelles, 1896.

52


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

étasunien de Georges Duhamel (Scènes de la vie future, 1930). En aval aussi, des œuvres artistiques dédiées à l’univers industriel permettent de mieux apprécier les vers du Luxembourgeois. En 1934, donc trois ans après La Pourpre sur les crassiers due à un écrivain proche d’une firme sidérurgique, le poète communiste français Louis Aragon publia son recueil Hourra l’Oural, un éloge dithyrambique du volontarisme économique prôné par le régime soviétique de Staline. En 1936, dans Modern Times, Charles Chaplin3, l’ironie en plus, livrait sa façon de voir le capitalisme effréné. Enfin, pour être complet, on peut signaler un recueil poétique plus récent, Mes jardins sont de terre rouge (1983), de la poétesse lorraine Anne Blanchot-Philippi4. Cette poésie de femme ne repose pas sur le culte de la violence et de l’esprit conquérant que l’on trouve chez ses confrères,

mais se distingue plutôt par l’accent qu’elle met sur l’aventure commune vécue par les hommes et les femmes impliqués dans le travail du fer.

II.1. Genèse, organisation et réception du recueil Pour ce qui est de la genèse de La Pourpre sur les crassiers, nous savons que Paul Palgen a dû mettre une dizaine d’années à composer le recueil, bien qu’il existe peu de documents de travail légués par le poète. Dès le n° VII de l’année 1924 des Cahiers luxembourgeois fondés un an plus tôt, il y avait publié le poème « Les fumées » (pp. 497-500). Et même, ce texte était donné comme « extrait » de La Vallée ardente. Poèmes du fer. Mais ce recueil annoncé n’est jamais paru, à moins que ce soit le premier titre de La Pourpre sur les crassiers.

Édition originale. Mézières-Charleville, Société des Écrivains ardennais, 1931.

3 Voir à ce sujet la brochure La Cinémathèque présente Live Cinéma 2009. Modern Times de Charles Chaplin, Luxem-

bourg, 2009.

4 Luxembourg, RTL éd. Voir Ferdinand STOLL, Anne Blanchot-Philippi ou la sorcellerie évocatrice, Luxembourg,

Publications du Centre universitaire, Études romanes n° 2, 1989.

53


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

Le recueil se compose de quatorze pièces assez longues, de plusieurs pages, organisées en strophes de vers tantôt réguliers – alexandrins, octosyllabes, hexasyllabes – tantôt libres, où les rimes finales sont plutôt exceptionnelles. Pour la forme générale, le poète reproduit plus ou moins des schémas en vigueur à la fin du XIXe siècle en France : il reste en deçà des innovations formelles d’un Apollinaire vingt ans plus tôt, par exemple, ou même du « Bateau ivre » de Rimbaud. La lecture de la Table des matières permet de voir que les cinq premières pièces – « Les fumées », « Les feux », « Les bruits », « Les crassiers », « Les côtes rouges » – sont dédiées surtout à l’évocation des éléments, du décor naturel et du traitement qu’on lui fait subir. Les pièces suivantes – « L’animateur » (ce démiurge se trouve au centre du recueil), « les ouvriers », « Les hécatombes », « Les enfants », « Les rançons » – développent la thématique proprement humaine. Les trois dernières pièces – « La nuit », « Rythmes », « Les métamorphoses » – conjurent l’ambiance poétique, la dernière – « Exportations » – braque le regard sur l’aspect économique du travail sidérurgique, dans une dimension mondialiste, avec le pressentiment de ce que l’on appelle aujourd’hui la globalisation. La réception de La Pourpre sur les crassiers est assez déceptive, vu l’originalité de son écriture : peu de comptes rendus nous sont parvenus. Pourquoi le recueil a-t-il été publié en 1931 ? Aucun texte explicatif à ce sujet émanant du poète ou de l’éditeur n’est connu. Mais on peut se demander si la grande crise économique de 1930, qui allait frapper aussi l’industrie sidérurgique luxembourgeoise, n’était pas une motivation suffisante pour publier le recueil à ce moment-là. En 1932, les actions des ARBED étaient cotées à leur cours le plus bas, soit 1.725 fr. au lieu de 14.000 avant la crise. Cela signifierait que l’ingénieur poète Palgen, qui s’était spécialisé dans la commercialisation des produits sidérurgiques à l’échelle planétaire, se serait livré, consciemment ou non, à une opération de promotion de la métallurgie. La poésie, en quelque sorte, au service de l’image de marque de tout un secteur industriel ! Enfin, l’on notera que le nombre d’exemplaires vendus de La Pourpre sur les crassiers

s’élevait à cent cinquante, deux ans après la parution du recueil, selon une lettre de l’auteur du 27 janvier 1933 citée par N. Klecker5. Huit cents exemplaires avaient été imprimés. Ces chiffres assez modestes illustrent la difficulté d’un poète d’une originalité avérée à se faire connaître : Paul Palgen en concevait une amertume certaine, même si les comptes rendus critiques étaient généralement élogieux. Ce ne sont évidemment pas les ouvriers mineurs ou sidérurgistes, même Italiens, donc latinophones, qui allaient acheter son œuvre : leur formation scolaire, leurs compétences linguistiques et leurs expériences artistiques trop élémentaires ne leur permettaient guère d’apprécier ces poèmes, à supposer qu’ils eussent la sensibilité innée pour le faire. Ainsi, les personnes représentées dans ces poèmes inspirés par l’industrie lourde sont quasiment exclues de la lecture : il y a un décalage certain entre l’énonciateur et le public potentiel. Le public atteint, voire visé par ces poèmes d’un accès difficile est nécessairement à chercher ailleurs : parmi le lectorat francophone cultivé de l’époque, la bourgeoisie intellectuelle proche des milieux industriels, en France, au Luxembourg et sans doute en Belgique, puisque l’éditeur, la Société des écrivains ardennais, recrutait dans ces trois pays. En tout cas, La Pourpre sur les crassiers valut à son auteur le prix de l’Alliance française luxembourgeoise en 1932. Pour l’histoire de la réception du recueil, il faut citer aussi les rééditions de poèmes qui en sont extraits, le recueil entier n’ayant pas été réédité à ce jour, l’original n’étant plus consultable qu’en bibliothèque. Une anthologie, Paul Palgen, Guanabará et autres poèmes, fut publiée en 1992 à Paris par l’homme de lettres belge Georges Thinès aux éditions Orphée. Le Luxembourgeois Nic Klecker, auteur en 1994 d’un Choix de poèmes de Paul Palgen, publia deux feuillets6 d’un recueil qui n’a jamais paru, intitulé Les Ouvriers, illustré par le peintre luxembourgeois Michel Stoffel (1903-1963). Ces poèmes ont paru une première fois dans le numéro de Noël des Cahiers luxembourgeois en 1951. En 2003, deux poèmes de Paul Palgen extraits de La Pourpre sur les crassiers, « Les bruits » et « Les ouvriers », furent repris dans Fir den Aarbechter mäi Papp.

5 N. KLECKER, Paul Palgen, Choix de poèmes, Mersch, CNL, 1994, p. 216. 6 KLECKER, op. cit ., entre pp. 96-97.

54


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

Lyrik, Gedichte, Poèmes, édité par l’association« De Minettsdapp » à Esch-sur-Alzette7.

II.2. L’univers industriel et la vision poétique La première pièce, « Les fumées », donne le ton. Le narrateur voit l’usine de loin, à distance, en quelque sorte depuis la colline du commandeur. Il est question de « l’or des flammes et [des] diamants des arcanes » : une mystérieuse opération se fait à travers les « sténographies éblouissantes de la foudre ». Les usines apparaissent comme des « volcans paisibles ». Le mythe biblique de Samson est mobilisé pour faire comprendre l’immensité du phénomène, qui dépasse l’homme et ses capacités. Avec les anneaux de Saturne, le processus reçoit une

dimension cosmique. Une « noce mystique » se célèbre entre les fumées des cheminées d’usine et les cerveaux des concepteurs, si bien que les projections dans les cieux ne seraient que les « fantômes de nos âmes », l’ingénieur poète étant évidemment le type d’homme prédestiné pour rendre compte de cette « unique hypostase ». Significativement, le narrateur adopte une perspective plongeante, qui le met à distance et miniaturise les hommes du fer : Du toit des collines, au ras de vos crêtes, je vous regarde, ô cheminées, urnes dont le débord fumant nourrit un peuple de pygmées […] (p. 12)

Paris, 1992. 7 Op. cit., pp. 62-64, 44-47. Voir Marie-France KREMER, Bibliographie courante de la littérature luxembourgeoise 2003,

Mersch, CNL, 2004, p. 184.

55


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

Luxembourg, 1994.

Le lecteur constate rapidement que le recueil est très éloigné de l’idée de témoignage technique, en d’autres mots : de l’idée d’un texte qui se proposerait de donner une représentation la plus fidèle, la plus objective, la plus neutre possible d’un phénomène économique et social, l’industrie sidérurgique dans le Bassin minier, qui a marqué l’histoire du Grand-Duché au point qu’il paraît constitutif de son identité nationale. Mais, l’ingénieur Palgen, qui travaillera dans quatre pays différents – Allemagne, Grand-Duché, Brésil, Belgique –, n’est ni un historien, ni un journaliste, ni un patriote apeuré, c’est d’abord un poète cosmopolite grandi dans l’univers culturel et linguistique français, qui obéit à d’autres thématiques que la littérature moralisante et frileuse. Le poème « Les Côtes rouges » est dédié à Marcel Noppeney, premier poète francophone 56

grand-ducal, lequel avait publié son propre recueil à Paris et n’avait d’autre rapport avec le monde industriel que le fait d’être le fils d’un notaire enrichi par les ventes / achats de terrains miniers. La dédicace à Noppeney est à peu près le seul élément luxembourgeois du poème, à moins que l’on considère la rougeur de la terre comme signe distinctif local. En réalité, c’est une caractéristique de toutes les régions qui possèdent du minerai de fer, par exemple la Lorraine, où l’on trouve la même appellation « Terres-Rouges » qu’à Esch-sur-Alzette. Dans ce paysage minier « construit » par le poète ingénieur, le site apparaît comme un tableau peint en camaïeu, avec un dégradé de différentes couleurs orangées, avec un jeu de lignes, de perspectives et d’angles. Le champ lexical de la physiologie induit une description clinique de corps éventré, le paysage étant assimilé


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

à un cadavre autopsié. Malgré les couleurs mordorées, c’est d’abord une nature « morte », minérale par définition. Le talent visionnaire du poète intervient au niveau de l’animation qu’il sait insuffler à son ekphrasis, par exemple dans le fait de transformer les mineurs dont l’image se réfléchit dans les flaques d’eau à des « Narcisses des miroirs / de corail rouge et d’ambre clair » : on notera les couleurs chaudes et le réemploi du vieux mythe poétique de Narcisse. Dans la mythologie grecque, Narcisse est le type du contemplatif absorbé par l’image de sa propre beauté : nous sommes loin d’une description réaliste du milieu ouvrier, ici tout est transfiguré par le langage au service d’un imaginaire débridé. Nous en sommes loin aussi avec l’image filée suivante : « lovés dans l’herbe, serpents

noirs / de câbles morts que fourmis rouges / de rouille rongent et dévorent ». Image de la décadence, liée peut-être à l’idée de crise économique au début des années 1930. Mais en (re) lisant le recueil, on constatera que l’image la plus familière aux fantasmes et aux peurs larvées du poète, c’est celle du reptile, dans toutes ses races, toutes ses appellations, avec sa beauté froide et menaçante. Le regard de ce poète plonge dans l’onirisme, dans l’exploration du subconscient. Significativement, les seuls hommes qui surgissent dans « Les Côtes rouges », ce sont les fantômes des mineurs morts dans l’exercice du métier. L’ingénieur-poète est comme Orphée qui descend au fond des enfers pour retrouver son Eurydice.

Paul Palgen. Reproduit d’après Choix de poèmes. Œuvre poétique, 1994

57


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

La Pourpre sur les crassiers développe une thématique focalisée sur l’industrie lourde en général, avec une prépondérance de l’industrie sidérurgique [sidêros : gr. : le fer ; sidêrourgos, gr. : le forgeron] ou métallurgique. Mais il y est aussi question de l’industrie charbonnière, ce qui montre bien que le poète ne vise pas uniquement un fait propre au Grand-Duché, dont le sous-sol ne renfermait que du minerai de fer. Pour ce qui est de la métallurgie, Paul Palgen évoque les trois phases essentielles de cette industrie : le travail d’extraction du minerai ; le travail de fabrication de la fonte grâce au minerai fondu dans le haut fourneau, ainsi que la fabrication de l’acier ; enfin le laminage et la mise en forme du produit fini ; subsidiairement : l’écoulement de la production. Pour la coulée de la fonte, on peut citer un texte en prose poétique de Victor Hugo, qui avait visité la forge de Luxembourg-Dommeldange, le 6 juin 1871 :

opérées dans un tonnerre étourdissant par les laminoirs qui font trembler les alentours. Dans le poème « Les feux », le point de départ n’est pas vraiment la sidérurgie, mais plutôt la magie d’un spectacle chorégraphique : celui de la danseuse américaine Loïe Fuller9 (1862-1928). Artiste de musichall autodidacte, celle-ci évoluait en costumes moulés, éclairés par des projections de films. C’est là le comparant du spectacle des feux à l’usine, encore amplifiés par les mouvements ondulatoires qui ressortissent une fois de plus aux reptations du serpent :

Nous avons vu une très belle chose, la coulée de la fonte dans le haut fourneau de la vallée des sept fontaines. Un torrent de feu liquide sort du trou fait en bas du fourneau avec des tourbillons d’étincelles qui semblent vivantes et qui se tordent comme des pieuvres de flamme. C’est en petit la coulée d’un cratère. Cette lave se répand dans le gaufrier de sable préparé pour la recevoir, et s’y refroidit, et c‘est la fonte. On l’envoie en Prusse, de fonte elle devient acier, et on en fait les canons Krupp. Voilà comment l’homme abuse de l’honnête terre qui lui donne le fer8.

Au passage on aura reconnu l’allusion à Apollon tueur du Python qui rendait des oracles. Les différents feux du travail sidérurgique, qui renvoient aux forges antiques de Vulcain, sont l’occasion de se réapproprier les vieux mythes, comme celui du dieu de la clarté. Les hauts fourneaux, espaces de fusion, de transformation et de métamorphoses presque alchimiques, deviennent des Jupiters, comparables aussi à des dragons, des tarasques. L’élément du feu lui-même, spectacle universel à la sémiotique multiple, est célébré à la manière d’Apollinaire qui avait exalté les explosions des grenades dans le ciel de France en 1914-18 et comme Palgen lui-même l’avait en partie pratiqué dans Les Seuils noirs. Le poème est construit sur une gradation, qui passe en revue les machines, l’élément igné, puis les produits sidérurgiques, puis les ouvriers, enfin le « prince » qui a conçu ce spectacle démiurgique : l’ingénieur. Ce seigneur de la technique est exposé au souffle de « Pentecôte », le souffle de l’esprit (saint), ce qui le rapproche du poète romantique inspiré par la Muse. Le crassier, entassement de rebuts industriels est une construction symbolique, elle métaphorise l’obstination de l’homme, le contraste aussi entre sa petitesse et l’immensité de ses conceptions matérielles. Dans l’évocation de

L’extraction ou l’importation du minerai de fer ainsi que le haut fourneau à minerai ont été remplacés à la fin du XXe siècle au GrandDuché de Luxembourg par les fours électriques fonctionnant sur le recyclage de métaux et non plus sur l’utilisation de minerais. La perception extatique du machinisme, présente chez Palgen dès son recueil consacré à la Grande Guerre, Les Seuils noirs, est avivée au contact de l’univers de l’usine tentaculaire, cyclopéenne. La tératologie, le bestiaire rampant lui fournissent son lexique inquiétant pour évoquer les reliquats incandescents des hauts fourneaux et les monstrueuses mises en forme

D’encre, de sang et d’or, le cœur et les artères de la nuit écorchée par Apollon noir ? Soleils qui explosent, lunes qui roulent, falaises d’ébène, Loïes Fullers, écharpes dénouées qui houlent et salves de lumières. (p. 15)

8 Voir Tony BOURG, Frank WILHELM, Le Grand-Duché de Luxembourg dans les carnets de Victor Hugo, Luxembourg,

RTL, [1985], pp. 102-103.

9 Voir Le Robert encyclopédique des noms propres, Paris, édition de 2008 publiée en 2007, p. 866.

58


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

ces dunes de déchets, inertes et sans vie, désertiques, le poète se tourne vers les mythes de l’Antiquité, emprunte le champ lexical de la vulcanologie : ce n’est pas un technicien qui parle, c’est un narrateur halluciné, comme le meilleur Victor Hugo. Certains passages semblent se souvenir des « Conquistadors » chantés par José Marie de Heredia dans ses Trophées (1893) : Acier blanc, acier bleu, oint de pourpre et d’azur, acier d’argent royale et de diamant dur qui fileras les rails et sculpteras la mine et feras s’essorer par delà les collines, les pôles et les mers, nos ailes de métal. (p. 17)

Au centre de l’usine poétisée par Palgen, il y a « l’animateur » : Des principes épars la limaille s’ordonne autour des aimants, les neurones, de son cerveau prométhéen. Oint, cerveau d’essence suprême, de sang de dragon, de saint-chrême, guilloché de lignes d’airain. Une nouvelle composante mythologique s’immisce ici dans le légendaire gréco-latin : le mythe germanique de Siegfried tueur du dragon. Dans la figure de « l’animateur », il est loisible d’imaginer l’ingénieur Émile Mayrisch, directeur de l’usine de Dudelange, fondateur

Recueil resté inédit ; poèmes publiés dans Les Cahiers luxembourgeois en 1951, couverture conçue par le peintre luxembourgeois Michel Stoffel. Reproduit d’après Choix de poèmes. Œuvre poétique, 1994.

59


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

des ARBED. Palgen le connaissait bien et le fréquentait : c’était son patron pendant une dizaine d’années. Dans le poème, c’est le type du héros moderne, l’homme d’action pragmatique, l’homme d’affaires subtil, le meneur d’hommes aussi, car l’industrie lourde nourrit des dizaines de milliers d’ouvriers encadrés par des cohortes de responsables. Le maître de forge prête son « cerveau prométhéen » à la machine et son cœur à l’alchimie du fer. Prométhée, c’est le héros antique puni durement par les dieux pour avoir convoité leur puissance et avoir volé… le feu ! En 1928, Émile Mayrisch, le héros du fer luxembourgeois, se tua dans un accident de voiture. Dans « Les ouvriers », Palgen montre que les « emmurés vivants » sont plus victimes qu’acteurs de ces formidables transformations où une violence inouïe est mise en œuvre : les usines sont voisines des cimetières. L’évocation concrète des ouvriers n’intervient toutefois que vers le milieu du recueil, comme si les hommes, dans cet univers presque inhumain, en tout cas gigantesque, étaient écrasés par ce qui les dépasse et qu’ils ont eux-mêmes conçu et construit. Cette fois, le poème vit surtout des rimes internes, des allitérations avec leurs explosives et leurs voyelles stridentes : « À coups de pics, de dynamite et de ringards ». Il y a une forme d’érotisme, voire de sadisme, dans la convocation des corps nus d’athlètes en sueur soumis aux efforts surhumains, aux endurances et aux souffrances. La concentration prolétaire et bariolée, présentée comme fatale, est tributaire de l’immigration : c’est un phénomène international dans ce type d’industrie, on ne le trouve pas seulement au Luxembourg. Le poème peut tout aussi bien avoir pu être inspiré par des choses vues par Palgen au Brésil. Comme Victor Hugo avait donné droit de cité aux enfants démunis, aux Gavroche de Paris dans ses Misérables, Paul Palgen dédie aux gosses de mineurs un long poème de commisération et d’alerte : Figures blanches que des yeux sombres mangent, voluptueux, lents, de petits sang-mêlé, princes déchus, de père on ne sait d’où, de quels royaumes de soleil et d’oranges. (« Les enfants », p. 50)

Là encore, il y a visiblement des souvenirs sud-américains du poète, car cette population exotique ne se rencontrait pas dans les cités minières luxembourgeoises. Métier périlleux entre tous, celui du mineur a exigé de nombreuses vies tuées ou de vies mutilées, relatées in absentia dans « Les hécatombes ». Pour une fois, le poème semble viser la population du Bassin minier luxembourgeois, accrue de façon exponentielle à l’époque de l’essor industriel : Morts venus de tous les hameaux du pays, de cent lieux inconnus, delà des frontières, des blonds, des bruns, des géants et des trapus, aux cent langages, aux dix mille visages, du fond des Allemagnes et des Polognes, de Catalogne, de France et d’Italie. (p. 46) Ce poème est le seul du recueil qui désigne des espaces précis, des toponymes, en l’occurrence des noms de pays impliqués par leurs immigrés ouvriers dans la production sidérurgique. Mais le Grand-Duché n’est pas cité. Le titre même de « hécatombes » – sacrifice d’une centaine de victimes – est emprunté à la Bible. C’est au dieu Moloch que les anciens Juifs sacrifient par le feu une centaine de victimes enfants. Le premier vers « Mort, qui dira tes hécatombes » rappelle le mot biblique « Mort, où est ta victoire ?10 ». « Les rançons » c’est le prix à payer par les hommes pour la réalisation de leurs rêves qui concurrencent la nature. Ce sont les ouvriers qui paient et les capitalistes qui en tirent profit. On mesurera le courage de l’ingénieur Palgen, qui faisait partie des cols blancs de cette industrie, à critiquer le système social et financier qui la fonde. Il est vrai que lui-même ne faisait pas vraiment partie du milieu possédant, même s’il possédait peut-être des actions des ARBED. Le procédé Thomas, qui permet de déphosphoriser la fonte et d’en fabriquer de l’acier avait été inventé par l’ingénieur anglais du même nom et été introduit à Dudelange dès les années 1880 grâce à l’esprit d’entreprise du directeur Émile Mayrisch : c’est une étape dans la maîtrise technique. Le poème « La nuit » développe un thème cher aux romantiques : l’ambiance lunatique,

10 Ce sera aussi le titre du roman de Daniel-Rops à paraître en 1934.

60


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

nyctalope et fantasmagorique qui transforme les choses et la perception des hommes. Ici, les bruits sont assourdis, presque confidentiels, tout semble apaisé, tamisé, susurré. Mais c’est un temps propice aux correspondances diverses, aux quêtes initiatiques : il y est question du Graal, il s’agit d’esquisser un voyage intersidéral. Le narrateur qui dit je est le porte-parole du poète, pour qui le spectacle de l’usine comme assoupie est une invitation à découvrir de nouveaux continents, vieux rêve de conquérant. Le poème « Rythmes » se signale par la multiplicité de ses champs sémantiques. Ce sont les rythmes imposés par les machines, les rythmes cardiaques, les rythmes du travail réparti en trois huit tout au long des vingt-quatre heures de la journée, les rythmes des saisons, les rythmes des cycles économiques, les rythmes du calcul programmatique. Le recueil se termine sur une présence féminine : celle des dactylographes, métier moderne qu’Apollinaire avait célébré dans son poème « Zone », dès 1913. L’ingénieur Palgen, spécialisé dans les constructions civiles, a exercé davantage le métier d’un commercial, d’un économiste, puisqu’il a vendu des produits laminés et négocié l’achat de minerai, par exemple au Brésil et plus tard à Liège.

II.3. Le poète et son œuvre On peut parfaitement lire ces poèmes sans rien savoir de leur auteur : ils ont une force convaincante qui les situe bien au-delà de l’anecdotique. La biographie peut toutefois confirmer certaines des impressions laissées par la lecture. Ainsi, l’on notera que le poète est né en 1883 à Audun-le-Tiche près d’Esch-sur-Alzette, dans le bassin minier lorrain annexé alors par la Prusse. Ses parents étaient luxembourgeois ; le père, né à Paris, était ingénieur directeur des hauts fourneaux de Hussigny-Godbrange en Meurthe-et-Moselle. Le futur poète fait ses humanités à l’Athénée de Luxembourg et des études d’ingénieur des constructions civiles à Louvain. Il fera carrière au service de l’industrie du fer : d’abord en Allemagne (1908-1914), où il a été emprisonné pour espionnage au profit de la France, puis pour les ARBED au Luxembourg (1914-1920), au Brésil (1920-1922) pour COLUMETA (Comptoir luxembourgeois des

métaux), enfin, à partir de 1924 à Liège, où il est mort en 1966 après y avoir représenté le Grand-Duché comme consul honoraire (19501957). Pendant ses activités au service des ARBED, Palgen aura été secrétaire général du COLUMETA, comme l’atteste une photo de 1922 où l’on le voit avec les membres de la direction des ARBED, avec à leur tête leur président Émile Mayrisch. En quarante ans de carrière littéraire, Paul Palgen a publié huit recueils poétiques et un roman, La Margrave aux chiens (1952). En 1918, par exemple a paru à Luxembourg et à Paris le recueil Les Seuils noirs, avec comme thème principal la fascination pour la guerre moderne fondée sur la technicité et les armées innombrables, un thème qui sera repris et amplifié dans La Pourpre sur les crassiers. Son séjour de dix-huit mois au Brésil lui inspire un recueil à thématique exotique, où il célèbre les beautés et les horreurs de l’Amérique du Sud, terre d’esclavage et d’acculturation : Guanabará. La baie aux trois cent soixante îles (Marseille, 1933). Le métissage des populations, discrètement annoncé dès 1931, y est présenté comme aspect fondamental de la société brésilienne. Au Brésil, il œuvre pour COLUMETA, société appartenant aux ARBED, qui avaient acheté à l’instigation d’Émile Mayrisch d’importantes mines de fer en Amérique du Sud afin de parer à une éventuelle pénurie de matières premières en Europe. L’avant-dernier recueil de Palgen, Poèmes en prose et en vers. 1949-1951 (Lyon, 1952), contient un texte poétique reprenant l’inspiration du livre de 1931 : « Au bord des laminoirs où trembla mon berceau ». Il y revient encore sur son imaginaire composite, où la mythologie antique et l’inspiration biblique se rejoignent dans son bestiaire personnel : Des gars mi-nus gavaient le Moloch acéphale, debout dans le rond de son col tranché, en damant à grands coups de ringards à leurs pies : han, pour ta faim – le coke – et han pour ta fringale – les minerais gris-rose et verts et mordorés. Et le monstre soudain déglutit sa provende, avec elle les hommes et leurs corps blancs, d’un bloc, fondirent comme des pains de sucre dans un chaudron de sang bouillonnant. Jamais ne fut brandi goupillon plus pesant sur

61


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

Direction centrale d’ARBED et de COLUMETA. Luxembourg, fin 1922. En bas, au centre, portant la barbe : Émile Mayrisch, présidentdirecteur de l‘ARBED. En haut à droite : Paul Palgen, secrétaire général de Columeta. Reproduit d’après Un demi-siècle d’histoire industrielle 1911-1964. Aciéries réunies de Burbach-Eich-Dudelange, s. d.

62


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

bière plus pesante que cet agglomérat de fonte et de viscères. Jamais Dies irae des Rois et des Sybilles plus fatidiquement ne plana sous des voûtes, lugubre ne couvrit des glèbes, menaçant ne poignit des êtres11. Ce texte à la syntaxe aussi tortueuse que les blocs de crassier est emblématique de l’écriture palgenienne.

III. Un témoignage d’une heureuse subjectivité Dépositaire de la vision tragique et triomphante de Verhaeren et des unanimistes comme Jules Romains, cet homme d’action séduit par le Brésil développe trois thèmes essentiels : le lyrisme démiurgique face aux enivrements personnels et aux aveuglements du monde ; l’attirance presque morbide pour la guerre moderne et l’industrie lourde ; l’enchantement par l’exotisme tropical. Le message qui se dégage de sa poésie très travaillée, au vocabulaire rare et à la syntaxe tourmentée est souvent ambigu, l’auteur semblant incanter à la fois le pouvoir surnaturel de l’homme moderne guerrier et ingénieur, et la misère et la domination qu’il engendre.

Page de garde.

Les rapports humains sont marqués par d’étranges rites qui frisent le sado-masochisme, suggérés par une écriture coruscante. Comme

on l’a vu, une image revient souvent, obsessionnelle, celle du serpent qui ondule, faisant de Palgen le poète « ophiophile » [ophis, gr : le serpent ; philein, gr. : aimer]. Cet attrait pour les reptiles renvoyant à l’antique séduction charnelle métaphorise aussi la perfection vivante, réconciliant le sensuel et le formel : Aux hans des laminoirs qui font trembler les halls au trot d’artillerie, à l’arroi d’arsenal roulant des laminoirs sur le pavé sonore, ruban d’acier, pourpre reptile agile happé jeté en proie aux cylindres mâcheurs de fer. (« Les ouvriers », p. 40) Avec son regard très artiste sur l’industrie lourde, qui insiste sur son côté démiurgique païen proche de la mythologie germanique autant que sur l’aspect moralisant biblique, sans en cacher les dimensions franchement dysphoriques frisant le sadisme, l’ingénieur poète Paul Palgen a livré un témoignage d’une heureuse subjectivité. Aussi, son univers sidérurgique baroquisé à l’extrême par des moyens relevant de l’expressionnisme pictural peut-il se lire et s’interpréter à différents niveaux. Il semble que sa dimension référentielle, qui reste par endroits indéniable, doit céder le pas à une lecture plus ambitieuse, qui s’intéresse aux questions existentielles exprimées à travers une poétique travaillée à l’extrême et fortement rythmée. Et si le travail souterrain de l’ouvrier mineur, sa tâche alchimique de transformateur du minerai en métal noble, avec son aspect volontariste et obstiné, n’était qu’une métaphore filée pour renvoyer à la quête du sens de la vie, à élaborer à travers la douleur, ou, plus intellectuellement et plus sensuellement, une métaphore de la création poétique ? En effet, dans le processus sidérurgique, il s’agit de transformer le minerai pris dans sa gangue en métal précieux, comme le poète, à partir de la fange de la vie, élabore l’or du sens serti dans l’œuvre d’art. Ainsi s’expliquerait le titre du recueil : La Pourpre sur les crassiers. Cette image paradoxale accole la matière d’un rouge écarlate symbolisant la richesse et les déchets industriels, dans une allusion à peine voilée aux Fleurs du mal de Baudelaire, parangon de la poésie symboliste.

11 Op. cit., Lyon, 1952, p. 55.

63


Terres Rouges

L’industrie sidérurgique vue par l’ingénieur luxembourgeois Paul Palgen (1883-1966), poète francophone

Bibliographie sélective PALGEN, Paul, La Pourpre sur les crassiers, Mézières-Charleville, Société des écrivains ardennais, 1931, 74 pp. ; « Les Ouvriers », illustrations de Michel Stoffel, Les Cahiers luxembourgeois, numéro de Noël [consacré à Dudelange], 1951, s. p., 13 pp. ; « Au bord des laminoirs où trembla mon berceau », Poèmes en prose et en vers. 1949-1951, Lyon, Les écrivains réunis, A. Henneuse, 1952, pp. 55-56 ; Guanabará et autres poèmes, choix et présentation de Georges Thinès, Paris, Orphée, « La Différence », 1992, 124 pp. ; Choix de poèmes. Œuvre poétique, présentation de l’œuvre poétique et choix de textes par Nic Klecker, Luxembourg, Centre d’études littéraires, « Lëtzebuerger Bibliothéik 5 », 1994, 221 pp. ; « Les bruits », « Les ouvriers », Fir den Aarbechter mäi Papp. Lyrik, Gedichte, Poèmes, [Esch-surAlzette], / [éd.] De Minettsdapp-Kultur am Süden, 2003, pp. 62-64, 44-47. [CHOME, Félix], Un demi-siècle d’histoire industrielle 1911-1964. Aciéries réunies de Burbach-Eich-Dudelange, documents réunis, classés et commentés par, Luxembourg, ARBED, s. d. TRAUSCH, Gilbert, L’ARBED dans la société luxembourgeoise, Luxembourg, ARBED, 2000. WILHELM, Frank, « L’exotisme dans la littérature luxembourgeoise de langue française », Revue francophone de Louisiane, Lafayette (LA), vol VI, n° 2, hiver 1991, pp. 5-26 [concerne Paul

64

Palgen et son recueil Guanabará] ; « ‘La Margrave aux chiens’ ou : L’imaginaire inquiétant de Paul Palgen, poète luxembourgeois de langue française », Université de Nice Sophia-Antipolis, Centre de Recherches littéraires pluridisciplinaires, Publications de la Faculté des Lettres, Arts et Sciences humaines de Nice, nouvelle série, n° 22, Imaginaires francophones, Paris, C.I.D.D. Diffusion, 1995, pp. 365-377 ; « Dictionnaire de la francophonie luxembourgeoise », La Francophonie du Grand-Duché de Luxembourg, numéro hors série des Cahiers francophones d’Europe centre-orientale, Universités de Pécs (H) et de Vienne, 1999, pp. 5-363 ; « PALGEN, Paul », Luxemburger Autorenlexikon, Mersch, Cnl, 2007, pp. 464465 ; « Le Grand-Duché de Luxembourg et ses trois littératures » [La littérature francophone luxembourgeoise], Transilvania, Sibiu, n° 8-9, 2007, pp. 140-145. WILHELM, Frank, GLESENER, Jeanne E., « L’image de la sidérurgie dans les romans des Luxembourgeois francophones Willy Gilson, Joseph Leydenbach et Nicolas Ries. Des années fastes à la crise des années 1970 », Charles Barthel, Josée Kirps, Terres Rouges, Histoire de la sidérurgie luxembourgeoise, vol. 1, Luxembourg, Centre d’études et de recherches européennes Robert Schuman, Archives nationales, Ministère de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, 2009, pp. 72-95.


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante Tonia Raus

« Quel est donc celui qui s’avance maintenant ? Moi, parce qu’il y eut un survivant au naufrage. » C’est sur ces mots, tirés de l’épilogue de Moby Dick de Melville dont l’ombre hante La Mémoire de la baleine, que se ferme le roman somme de Jean Portante, donnant à la suite de l’exploration menée à la fois dans les terres de l’enfance – ces Terres Rouges du bassin minier –, et dans les territoires de l’écriture comme une seconde naissance à l’écrivain, dans l’émergence de son étrange langue, d’aspect française, mais de respiration italienne1. C’est sous les auspices de ces mêmes mots que s’initie ce parcours au sein des Terres Rouges comme terres identitaires de Jean Portante dans La Mémoire de la baleine et Mourir partout sauf à Differdange, romans tous deux situés dans la ville natale de l’auteur, Differdange2. L’œuvre de Jean Portante se caractérise par les thèmes de la migration et de l’identité, interrogés inlassablement au fil de productions tant poétiques que narratives. Né à Differdange, Jean Portante est le fils d’immigrés italiens qui ont quitté leurs terres natales pour s’installer dans le sud du pays, avec l’espoir d’y trouver, par le travail d’abord dans les mines de minerai de fer puis dans les usines de transformation de ce même minerai, une vie meilleure pour eux et leurs familles. Portante grandit ainsi dans un milieu hybride, entre des origines italiennes bercées par la langue maternelle qui continue à être parlée dans le foyer familial et la terre d’accueil qui amène avec elle des langues nouvelles – le luxembourgeois appris dans la rue, le français et l’allemand à l’école et dans les livres – et surtout une panoplie d’us et de cou-

tumes qu’il faudra s’approprier. Cette aspiration culturelle multiple sera, semble-t-il, cultivée par la suite. Jean Portante vivra successivement ou en alternance à Luxembourg, Esch-sur-Alzette, Paris, Bruxelles, Cuba. Il serait pourtant réducteur de considérer l’œuvre de Portante uniquement par le bout de la lorgnette luxembourgeoise, malgré la forte thématique identitaire qu’elle véhicule, car sa portée se veut résolument universalisante. Parallèlement, il serait tout aussi réducteur d’aborder son œuvre au travers du prisme biographique. Si quelques éléments biographiques ont toutefois été donnés – parmi lesquels il s’agit de retenir l’origine immigrée, le goût pour les voyages et l’activité scripturale multiple –, c’est pour mieux pouvoir démontrer à quel point Jean Portante se plaît à brouiller les horizons d’attente dans un genre savamment articulé entre référentialité et fictionnalité, c’est-à-dire en d’autres termes et pour simplifier, entre autobiographie et roman.

Le pacte romanesque de Jean Portante En 1993, paraît aux éditions Phi Mrs Haroy ou la mémoire de la baleine. Ce titre énigmatique est explicité d’emblée par un sous-titre, apparemment univoque : « Chronique d’une immigration ». Le mot est lancé : « immigration ». Le roman devient dès sa parution une espèce d’emblème pour toute la population immigrée du Luxembourg, surtout pour celle italienne, celle qui s’est installée dans les Terres Rouges, qui les a exploitées et qui est au centre du récit. S’initie ainsi la « métaphore de la baleine », qui deviendra la clé de l’œuvre entière. Mi-mammifère,

1 Dans « Le travail du poumon. Mode d’emploi » – véritable mode d’emploi à l’écriture de Jean Portante – l’auteur revient

sur son étrange langue : « Que, comme la baleine, mon écriture cachait en elle, alors que d’aspect elle était française, le poumon d’une autre langue. / Que mon écriture était de forme française, mais de respiration autre dont la matérialité du texte ne savait être qu’une traduction plus ou moins efficace ». (PORTANTE, Jean, « Le travail du poumon. Mode d’emploi », in Le Travail du poumon, Bordeaux, Le Castor Astral, 2007, p. 148) 2 PORTANTE, Jean, La Mémoire de la baleine, Luxembourg, Phi / Bordeaux, Le Castor Astral, 1999 (1993), 473 p. ; – Mourir partout sauf à Differdange, Luxembourg, Phi, 2003, 264 p. Dans un souci de lisibilité, les indications de page référant aux deux romans du corpus se feront désormais dans le corps du texte, accompagnées, si nécessaire, des abréviations respectives Lmb et Mpd.

65


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

mi-poisson, la baleine symbolise l’état d’entredeux dans lequel se retrouvent les immigrés, qui ne sont plus de leur terre d’origine, sans pour autant appartenir à leur terre d’accueil3. Mais si le mot « immigration » retient l’attention, il en est de même de « chronique ». D’après les définitions du Trésor de la langue française, « chronique » renvoie à un « recueil de faits historiques regroupés par époques et présentés selon leur déroulement chronologique ». Dans un emploi spécialisé, le terme désigne l’« histoire et généalogie d’une ancienne et noble famille » et enfin, par extension, un « récit mettant en scène des personnages réels ou fictifs, tout en évoquant des faits sociaux et historiques authentiques, et en respectant l’ordre de leur déroulement ». De manière significative, une acception supplémentaire de « chronique » est donnée dans l’entrée « roman ». Etablissant un rapport direct avec le temps, un « roman-chronique » définit un « roman qui décrit l’histoire d’un groupe, d’une société sur une longue période. Le roman-chronique, ou roman de mœurs, ou ‘mémoires pour servir à l’histoire de la société’ ne peut que tourner le dos à la biographie de l’auteur, pour aller à la biographie des hommes »4. Heureuse coïncidence que cette citation venant illustrer le « roman-chronique » en soulignant sa dimension universelle aux dépens de l’histoire personnelle de l’auteur. Or, les procédés d’énonciation que le roman de Portante déploie sont autrement retors et cette explication lexicale du sous-titre de l’édition originale ne saurait les éclairer. En effet, le roman s’énonce à la première personne. Le narrateur s’appelle Claudio Nardelli – les consonances italiennes du nom sont évidentes et seront, de manière significative, convoquées régu­lièrement pour être transformées, assimilées à des noms à résonances davantage luxembourgeoises : Clodi quand le narrateur revient sur son enfance, ou Claude, pour évoquer l’adulte. Le récit est largement rétrospectif : le narrateur jette un regard en arrière sur son enfance qui se termine symboliquement à l’âge de neuf ans, l’âge de la première communion. Il retrace son vécu d’enfant dans une tonalité forcément naïve,

mais qui laisse percer les conflits suscités par son origine italienne dans cette société luxembourgeoise prospère des années cinquante. En alternance s’énonce également l’histoire de la famille du narrateur, des voyages et exils qui l’ont formée, de l’arrivée à Differdange, du travail dans les mines que subit encore le grandpère paternel, du statut d’ouvrier d’usine dont jouit le père, des aspirations d’intégration des uns et du mal du pays inconsolable des autres. Étant donné la biographie de Jean Portante, le récit de la famille Nardelli est souvent lu comme une autobiographie, une chronique historique de l’expérience migratoire de sa propre famille comme de celle de tant d’autres qui l’ont partagée. Le récit acquiert une valeur de témoignage qu’il est indéniablement au travers de la représentation, chargée d’affect, que Portante propose des Terres Rouges, indépendamment des questions de référentialité ou de fictionnalité. Pourtant, Jean Portante, au cours de ses entretiens, évoque son récit en termes de roman, de fiction donc, faisant de sa propre histoire qui certes alimente le texte, le point de départ d’une histoire universelle. Les thèmes de l’exil et de l’identité, s’ils sont développés dans les récits, sont surtout retravaillés au niveau de la langue, au niveau de l’énonciation et de la composition des romans. Mourir partout sauf à Differdange rend massivement compte de cette infiltration du thème identitaire dans le processus créatif, tout en s’inscrivant de manière directe dans la filiation de La Mémoire de la Baleine. Ainsi la quatrième de couverture annonce que : Dix ans après Mrs Haroy ou la mémoire de la baleine, Jean Portante publie Mourir partout sauf à Differdange et remet ainsi sa ville natale au centre d’un roman décapant qui brouille l’étrange espace situé entre réalité et fiction. Par la magie de l’écriture, Differdange devient un lieu ni tout à fait réel ni entièrement inventé. Une ville dans laquelle se nouent et se dénouent les destins les plus insolites. Un labyrinthe ou le « je » se multiplie à l’infini pour être tantôt écrivain, tantôt enseignant, tantôt même libraire, boucher ou policier. Si Mrs Haroy… était un livre sur la mémoire, Mourir partout

3 Dans la préface à la réédition du roman de Portante en 1999 aux éditions du Castor Astral sous le titre La Mémoire de la

Baleine, Ismaël Kadaré revient sur le titre de l’édition originale pour expliquer le sens du roman : « L’histoire de la baleine exposée par ces froides journées d’hiver à la gare de Luxembourg ne cesserait de se condenser dans sa mémoire pour une raison que le narrateur donne bien à entendre, son propre destin de fils d’émigrants italiens au Luxembourg l’identifiant à celui de tout être déplacé, migrateur, de gré ou de force, dans ce monde qui est le nôtre. Et Mrs Haroy, la baleine, avait précisément connu ce sort » (op. cit., p. 11) 4 Trésor de la langue française informatisé, dictionnaire électronique en ligne (ATILF, CNRS, Université de Nancy 2), consulté le 15 mars 2009.

66


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

sauf à Differdange, tout en renouant avec le passé « rital » des protagonistes, se situe sur cette frontière insaisissable où les souvenirs et le quotidien se déversent dans le fleuve de l’imaginaire, et vice versa… Cette présentation du roman accentue le rapprochement avec La Mémoire de la Baleine et l’importance qu’y revêtent la ville natale de l’auteur ainsi que son passé rital, au sein d’un roman principalement axé autour de sa propre écriture, où se mélangent à nouveau réalité et fiction. Mourir partout sauf à Differdange se conçoit en somme comme une quête d’identité que l’écrivain mène de pair avec les narrateurs et personnages de ses fictions. Dans un entretien qui suit la publication du roman, Jean Portante précise : Avec La Baleine on a voulu croire que je me rapprochais de l’autobiographie alors que je m’en éloignais. A partir d’éléments venus du vécu, j’ai entrepris un travail sur la mémoire possible. La famille imaginée représente la somme de ce que l’on peut vivre comme Italien au Luxembourg. Mais il est impossible de ne pas écrire de l’intérieur, tout livre est autobiographique. Mon nouveau roman tient donc lui aussi de l’autobiographie dans le même temps qu’il s’en éloigne avec un « je » pluriel, un narrateur successivement boucher, libraire, policier, femme, Italien…5 Plusieurs histoires s’inventent et se chevau­ chent : les univers fictionnels sont complètement poreux et ne se prêtent plus au processus de l’illusion référentielle. Un fil rouge tissé par le double enterrement de la mère du narrateur tente néanmoins de les relier. Le narrateur pense exaucer le dernier vœu de sa mère décédée en ramenant sa dépouille, inhumée une première fois au Luxembourg, dans ses terres natales en Italie. Or, « [s]eul un traître peut ramener chez lui un déserteur ». (p. 96) Le regret du double enterrement de la mère traverse toutes les vies imaginées du narrateur ; il est à la source même du roman, allant jusqu’à lui donner son titre. Ces considérations générales sur le parti pris romanesque de Jean Portante, qui mélange sciemment les codes de l’écriture romanesque

et de l’écriture personnelle, voire intime, seront les points de départ à l’étude des deux romans sur Differdange, en vue de saisir précisément l’ancrage identitaire qui les spécifie. D’allersretours constants entre les deux textes, en multipliant les citations afin d’illustrer le plus fidèlement possible les univers créés par Jean Portante, se dégageront des représentations récurrentes de Differdange et du monde des ouvriers immigrés. Par les fils qui se tissent entre les deux récits, un véritable diptyque finit par se former et dont les parties ne cessent de se réfléchir réciproquement, dans un dialogue entre la réalité et la fiction inspiré par la ville natale de l’auteur.

Terres Rouges, terres d’accueil L’histoire des Terres Rouges est intimement liée à celle de l’exploitation du minerai de fer. Dès le début du 20e siècle, des vagues d’immigrés italiens sont venus prêter main-forte aux ouvriers des mines, dont celles du bassin minier luxembourgeois et donc de Differdange. Cette histoire de l’immigration, dont l’histoire de la famille Nardelli dans La Mémoire de la baleine fait partie intégrante, traverse les cinq cents pages du roman. Elle est condensée au troisième chapitre, qui mérite dès lors une attention plus particulière, d’autant plus qu’il se démarque de l’ensemble du texte, tant visuellement que syntaxiquement, en étant composé d’une seule et unique phrase. Commençant par ces mots : « Quand je reviens en pensée sur ce que je crois être ma maison natale à Differdange et que je farfouille, les yeux fermés, dans ma mémoire […] » (p. 30), le chapitre se poursuit telle une remontée mémorielle et verbale du premier voyage de l’Italie vers le Luxembourg entrepris par les grands-parents du narrateur. Des logorrhées de souvenirs, vécus ou rapportés, s’énoncent et semblent se diriger vers un temps zéro des origines du narrateur, vers ce moment où le périple de sa famille, et qui en entraînera tant d’autres, commence : […] quand moi je n’existais pas encore, et quand mon père et ma mère n’existaient pas encore, et quand ce qui allait devenir ma maison natale n’existait pas encore, et quand la

5 PORTANTE, Jean, « Voyage dans l’étrange langue », propos recueillis par Françoise PIROVALLI, in La Voix, 12.03.2003.

67


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

rue Roosevelt n’existait pas encore, et quand Roosevelt était tout jeune encore et n’était pas aussi célèbre pour donner son nom à une rue de Differdange qui n’était pas encore une ville mais un tout petit village, à ce moment-là donc, quelque part dans les campagnes des Abruzzes, sur les collines qui n’étaient pas encore traversées par la Nationale 17, […] ma grand-mère portait sans doute des vêtements tout noirs déjà, quand elle a rencontré son Nando, […] quand, un beau jour, juste avant la guerre, la grande guerre, celle de quatorze, elle a entrepris, en compagnie de son Nando et d’autres Nando, le voyage vers l’infiniment loin, vers l’infiniment riche, vers l’infiniment angoissant, vers ce petit pays et ce petit village du Nord […] (p. 39-40) Ainsi, c’est à une espèce d’Urgeschichte de l’immigration italienne à Luxembourg que le narrateur semble s’atteler, cette histoire originelle du « premier Italien de là-bas [qui] a eu l’idée, il y a cent ans, de venir se perdre ici pour donner naissance au premier Italien né à Luxembourg. Après lui, tout s’est passé comme avec les poupées russes. Ce premier Italien né à Luxembourg est rentré en Italie, y est resté un peu, et est revenu à Luxembourg. Ses enfants en ont fait de même. Et les enfants de ses enfants aussi ». (p. 330) Le récit de Portante devient celui de tous les Nando et Maddalena qui ont fait le voyage de l’Italie vers le Luxembourg, de toutes les baleines qui un jour ont quitté la terre ferme pour aller se jeter dans l’immensité inconnue des océans, ce milieu qui n’était pas le leur au départ. Or, ce milieu, les grandsparents du narrateur le découvrent bien avant leur départ, par le biais d’une lettre qu’un voisin des Abruzzes reçoit d’un compatriote déjà sur place, c’est-à-dire à Differdange : […] il n’avait pas révélé le nom de l’argent qu’on gagnait à Luxembourg en ramassant du fer, en le ramenant à la fonderie, comme on ramasse de l’or, en Afrique ou ailleurs, dans les mines, d’étroits couloirs creusés dans la terre, une terre toute rouge, […] si rouge qu’après le travail on pouvait faire de la sauce spaghettis avec l’eau dans laquelle on se lavait les mains et le visage, sauf qu’avec l’or, pensa sans doute Nando, et sans doute le dit-il aussi à Maddalena, sauf qu’avec l’or on n’a pas besoin de billets, alors qu’avec le fer, si l’on veut manger, il faut d’abord le changer en billets […] (p. 42)

68

La citation est représentative de l’imaginaire qui se construit autour des Terres Rouges, terre d’accueil, mais terre hostile en même temps, terre étrangère en tout cas, à laquelle il faudra plier désormais sa vie quotidienne. Car ces vagues d’immigrations ont évidemment été d’ordre économique : le travail qui attend pourtant ces nouveaux chercheurs d’or est autrement dur, physiquement souvent intolérable. L’immigration italienne est par conséquent aussi abordée dans sa dimension davantage histo­rique et sociétale, notamment au travers des évocations récurrentes de l’épisode tragique de la grève des ouvriers de l’usine de Differdange en 1912, qui s’est soldée par le recours à la force : quatre ouvriers seront abattus. Dans La Mémoire de la baleine, c’est par l’intermédiaire de son grand-père maternel, Claudio, qui lui a du reste transmis son nom, que le narrateur fait la découverte, enfant, que « l’histoire peut être racontée de plusieurs façons ». (p. 374) Au pied de la statue d’Emile Mark, bourgmestre de la ville de 1911 à 1935, érigée dans le parc Gerlache, le parc municipal, le grand-père raconte à son petit-fils ce qui s’est passé à Differdange ce 26 janvier 1912. Le narrateur revient, au moment de l’énonciation qui correspond régulièrement au moment de l’écriture, sur cette leçon de vie qu’il apprit ce jour-là : Bien sûr, ce qu’il m’a raconté ce jour-là, au parc Gerlache, ne se trouve plus tel quel dans ma mémoire. Mais les vingt coups de feu tirés sur l’ordre du maire Emil Mark contre les grévistes italiens, je ne les ai pas oubliés. […] Dans le trajet si court entre les balles des fusils et les cœurs des ouvriers italiens il y a cette distance insurmontable qu’a toujours ressentie ma mère quand elle parle des premiers temps de sa venue à Luxembourg. Et je n’ai pas non plus oublié le nom d’Alberto Zecchetti, cet ouvrier qui ne s’est pas relevé ce jour-là, quand le cortège des manifestants s’est dispersé pour préparer la riposte. Alors, aujourd’hui, chaque fois que je passe devant la statue d’Emil Mark au milieu du parc Gerlache, je repense à ce que racontait, alors que j’avais huit ans et demi […], grandpère Claudio. Et si ça me fait parfois sourire, c’est d’un sourire amer qu’il s’agit, parce que je me dis que, si par hasard on avait érigé, comme l’aurait voulu mon grand-père, la statue d’Alberto Zecchetti à la place de celle d’Emil Mark, plus d’un promeneur autochtone se


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

serait demandé ce que faisait là, au milieu du parc Gerlache, un tel bouffeur de macaronis […]. (p. 373-374)6 D’une part, l’évocation de la ville de Differdange, de ses lieux symboliques tels le parc Gerlache et la statue d’Emile Mark sont en lien direct avec l’histoire sidérurgique – comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement étant donné que c’est par l’exploitation de son minerai de fer qu’est née la ville ? – et, d’autre part, Differdange comme son histoire sont centrales à l’histoire de la famille Nardelli et au-delà à l’histoire de cette communauté d’ouvriers immigrés italiens. C’est par le réseau que tissent entre elles l’histoire collective et l’histoire personnelle, ancrées toutes deux dans les Terres Rouges de Differdange, que le projet du diptyque romanesque de Portante prend tout son sens. De fait, dès les premiers chapitres de Mourir partout sauf à Differdange, le nom d’Alberto Zecchetti (ré)apparaît, sans pour autant être explicité. Plus loin, s’énonce une version légèrement modifiée de ce même souvenir, du grand-père maternel racontant l’histoire de Zecchetti à son petit-fils qui, devenu adulte, est le narrateur du roman : Connais-tu l’histoire de Zecchetti ? C’est mon grand-père qui parle. J’ai treize ans moins des poussières, Kennedy vient juste de se faire tuer à Dallas, une seule détonation, deux ou trois coups de feu, l’usine fume comme un Turc, il faut bien des repères historiques, et nous nous trouvons devant le même buste, en plein milieu du parc Gerlache. Nous sommes habillés comme tout le monde, pour dire combien elle est dure l’intégration. La pluie est là, bien entendu, elle tombe cependant autrement, je veux dire, elle mouille autrement les vêtements, le sol et le reste, laissant des traces blanches quand elle sèche, à cause des grains de poussière pris dans les nuages, envoyés là-haut par les cheminées de l’usine, pour rappeler qu’elle est prospère encore la cité. (p. 140)

Les traces blanches de la poussière deviennent sous la plume de Portante des traces noires qui inscrivent dans la page blanche sa propre histoire des Terres Rouges. Dans les deux romans, l’occurrence de Zecchetti implique de manière générale l’idée d’une revanche à prendre. Si elle n’est que sous-jacente dans La Mémoire de la baleine, elle est explicitement formulée dans Mourir partout sauf à Differdange : « N’oublie pas, il faut le venger, il s’agit d’une question de justice élémentaire » (p. 138), dit le grand-père au petit-fils qui se répète alors inlassablement : « Il faut venger Zecchetti ». (p. 139)

Terres Rouges, terres de mémoire Ainsi, le narrateur érige à côté du monument Emile Mark au parc Gerlache un buste imaginaire de Zecchetti et qui vient occuper […] un petit vide, une toute petite parcelle de vide, invisible presque à l’œil nu, côtoyant directement le socle du buste d’Emile Mark, le frôlant, le touchant, […], comme un frère jumeau, de jour comme de nuit, en chaque saison, veillant sur l’ancien bourgmestre comme seul sait le faire un ange gardien, ce n’est pourtant pas un ange, loin de là, une mauvaise conscience plutôt. (p. 140) Corollairement aux sujets privilégiés chez Portante de la question identitaire, de l’exil et du voyage, la mémoire et ses insondables pièges et illusions constituent une autre interrogation constante et fondamentale de l’œuvre entière. De fait, les deux romans de Portante gagnent à être associés à la notion de « lieu de mémoire », telle qu’elle a été définie par Pierre Nora, à savoir qu’un « lieu de mémoire dans tous les sens du mot va de l’objet le plus matériel et ­concret, éventuellement géographiquement situé, à l’objet le plus abstrait et intellectuellement ­construit ».7 Un livre, par sa matérialité même, peut constituer un tel « lieu de mémoire ». Sa teneur, par essence immatérielle, mobilise les imaginaires

6 Pour un traitement historique de cet épisode, voir SCUTO, Denis, « Les victimes de la grève des ouvriers italiens de l’usine

de Differdange en janvier 1912 », in REUTER, Antoinette, RUIZ, Jean-Philippe (dirs), Retour de Babel : itinéraires, mémoires et citoyenneté. (Catalogue de l’exposition tenue dans les halles de l’ancienne aciérie à Dudelange du 28 avril au 27 octobre 2007), Livre III : Rester/Être, Luxembourg, 2007, p. 38-43.

7 NORA, Pierre (dir.), Les lieux de mémoire, Paris, Gallimard, 1997, vol. 1. Voir à ce sujet la contribution ici même de

Myriam SUNNEN, « D’Minett - un lieu de mémoire ».

69


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

collectifs au travers de souvenirs, soient-ils des souvenirs écrans, qu’en l’occurrence les récits de Portante éveillent de pair chez l’auteur et le lecteur. D’une part, rapprocher les deux romans de Portante de la notion de « lieu de mémoire » se justifie de manière générale au travers des nombreuses occurrences qui renvoient aux différents signes de commémoration que la ville de Differdange a mis en place, en hommage aux travailleurs des mines. D’un ton ironique, l’auteur par ses narrateurs interposés, évoque « les blocs de minerai » qui trônent sur les carrefours avec des « locotracteurs rouillés » qui ne tractent plus que le vide (Mpd, p. 58). La commémoration passe par d’autres voies que celles figées des monuments qui finiront par tomber dans l’oubli à force de faire partie de notre environnement quotidien. Pour Portante, commémorer – dans le sens de remémorer, de remettre en mémoire – passe par l’écriture. De fait, à deux reprises, dans Mourir partout sauf à Differdange, le narrateur évoque son écriture comme la poursuite du « testament muet » que lui a légué son père, c’est-à-dire cette identité forgée par la vie dure menée par la plupart des ouvriers sidérurgiques qui parallè­lement affichaient la fierté d’avoir pu offrir à leurs familles des vies meilleures. Cette apparente contradiction sous-tend chacune des évocations du bassin minier, à l’instar de cette description du site de Terre-Rouge à Esch-sur-Alzette que le narrateur de La Mémoire de la baleine entame avec le regard rétrospectif, teinté de nostalgie, de l’adulte devenu écrivain : Parfois, en me promenant par les sentiers du Galgenbierg, à Esch, je vois à travers les pointes des pins la flamme éternelle brûler audessus du bâtiment rouge-poussière dans lequel a travaillé mon père. L’usine ressemble à un champ de ruines. Au loin, les hauts fourneaux de Belval fument encore. Mais à Terre-Rouge il n’y a presque plus rien. Tout a été rasé. Seule la centrale thermique de papa a survécu. Derrière ces murs j’imagine les trois chaudières avec le silo à charbon et le broyeur, le charbon qui sur un tapis s’engouffre dans la chambre

de combustion de la chaudière, puis les tubes d’eau, la gaine de fumée et les filtres. Le tout débouchant sur l’énorme cheminée qui s’érige en l’air comme une tour et chasse la fumée et la poussière dans le ciel nuageux. Et tandis que le charbon brûlé part en fumée, l’eau, de l’autre côté se transforme en énergie et alimente, à travers des turbines, ce qui reste encore de l’usine d’Esch. (p. 397) D’autre part, en transposant la notion de « lieu de mémoire » à l’écriture de Portante, le diptyque de Differdange peut être lu littéralement comme une actualisation du buste fabulé de Zecchetti : un monument dressé en mémoire des ouvriers des mines de Differdange ; des grévistes de 1912 qui ont osé se redresser pour leurs droits ; de toute cette communauté d’immigrés italiens, à laquelle le narrateur, mais également l’auteur, appartiennent. Car, dans Mourir partout sauf à Differdange, l’histoire de Zecchetti est explicitement mise en relation avec un livre, à savoir Les Fiancés d’Alessandro Manzoni qui de surcroît, en tant que livre de chevet du personnage de la mère, traverse en filigrane les deux romans.8 Dans Mourir partout sauf à Differdange, le roman de Manzoni sert de relais entre les deux enterrements de la mère du narrateur. Cherchant à réparer son acte de trahison, cette espèce d’exil d’outre-tombe qu’il a infligé à sa mère, le narrateur enterre Les Fiancés de Manzoni à côté du monument Emile Mark : J’ai décidé que désormais, Zecchetti reposerait à côté d’Emile Mark. Il me fallait du concret, je veux dire, une chose est de laisser ses fantasmes pourrir dans l’imagination, une autre d’étayer tout ça par quelque chose de réel. Qu’avais-je sous la main […] si ce n’est Les Fiancés de Manzoni ? […] Au bout d’un moment, la tombe de Zecchetti et de Manzoni était suffisamment profonde pour que le livre y tienne confortab­lement. Je l’ai recouvert, ai remis en place les bottes de gazon, et à l’œil nu il n’y avait plus de traces de ma double revanche. Ta place est

8 En effet, la mère du narrateur lit sa propre histoire dans le miroir que lui tend le roman d’Alessandro Manzoni, cette histoire

d’amour entre Lucia et Renzo qui prend place en Lombardie, au XVIIe siècle, sous la domination espagnole. De manière significative, I promessi sposi (1823) porte comme sous-titre Chronique milanaise du XVIIe siècle, augurant les tensions entre réalité et fiction dans les romans de Portante, dans l’aspiration commune à mêler storia et invenzione.

70


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

ici, maman. Oui, au cœur de Differdange, en plein milieu du parc Gerlache. (p. 143) Un épisode supplémentaire, le récit de l’accident qui coûte la vie au grand-père paternel et dont plusieurs occurrences sillonnent les deux romans, sert encore de catalyseur à cette dimension primordiale que l’idée de revanche revêt au sein de l’ancrage identitaire constitué par les Terres Rouges. De manière emblématique, l’épisode se retrouve au cœur de la contribution de Jean Portante au recueil Où demeurer ailleurs que là. Luxembourg, lieux intimes, édité par Corina Ciocârlie. Dans son introduction, elle définit ces « [l]ieux intimes comme des lieux préservés des assauts de l’oubli. Le monde autour se dissout, laissant ça et là des îlots de temps retrouvé »9. Le texte « La mine du Thillenberg, à Differdange », dédié au grand-père paternel de Jean Portante décédé sous l’éboulement d’une galerie du Thillenberg, fonctionne de fait à nouveau comme « lieu de mémoire ». Elle est imaginaire, ma mine. Non qu’elle n’existe pas dans la réalité, mais dans la mienne, je veux dire dans la fabrique de mes souvenirs, elle n’est palpable que par qui, comme moi, ne l’a jamais vue, n’y est jamais descendu, est resté devant la grille rouillée, devant le mur en béton armé qui en interdit l’entrée désormais.10 S’ensuit le récit du même épisode déjà rapporté dans La Mémoire de la baleine, quand le grandpère du narrateur / le grand-père de l’auteur revient chez lui, après l’école et apprend la nouvelle tragique.11 Entre les deux versions d’un même souvenir, le narrateur se mue en auteur. Par les ricochets que ce texte intimiste exerce quinze ans après sur La Mémoire de la baleine, tout un pan de l’histoire fictionnelle des Nardelli se

transforme en histoire personnelle - autobiographique - de l’auteur. La complexité du dispositif scriptural que Jean Portante met en place dans le diptyque de Differdange crée un entre-deux qui allie la mémoire probable d’une génération à la mémoire intime d’une famille, d’une enfance. Dans la poursuite du sentiment sous-jacent d’une revanche à prendre, l’auteur se demande plus loin dans le texte sur « La mine du Thillenberg » : On m’a dit que le mur qui bouche l’entrée de la mine est une barrière de protection. A-t-on peur que les morts ne sortent et viennent crier vengeance? Il y a de quoi. La richesse du pays s’est accumulée à coups de pelles et de pioches. Sans oublier le sang. Mais l’oubli a mis un drap noir sur tout ça. (p. 102) Les propos sont durs et éclairent d’une lu­ mière nouvelle, à nouveau par contrecoup, les propos similaires tenus dans les deux romans sur Differdange, tels par exemple dans La Mémoire de la baleine, précisément au sujet de « [...] l’emplacement de la mine Thillenberg dont les accès ont été murés depuis peu, comme s’il fallait plomber définitivement ce qui a été et restera la plus grande fosse commune de Differdange [...] » (p. 288). Si Jean Portante ne fait que rapporter encore la violence du travail dans les mines, s’il ne peut que dénoncer encore l’exploitation dont souffraient les ouvriers, et certainement davantage quand ils arrivaient d’Italie, composant ainsi un témoignage, à valeur littéraire incontestable, mais un témoignage parmi d’autres, la véritable vengeance, la véritable revanche se profère toutefois dans les sillons de l’écriture : dans les traces écrites, gravées, qui sauvent de l’oubli ces vies et ces morts données aux Terres Rouges.

9

CIOCARLIE, Corina (éd.), Où demeurer ailleurs que là. Luxembourg, lieux intimes, Luxembourg, Phi, 2007, p. 8. Les textes du recueil ont paru tout le long de l’année 2007 dans le Supplément Livres du Tageblatt. 10 PORTANTE, Jean, « La mine du Thillenberg, à Differdange », in CIOCARLIE, Corina (éd.), op. cit., p. 100. 11 Voici ces deux variations autour du même thème : « Aller travailler, descendre au fond de la mine, c’est aussi la guerre. Avec un ennemi invisible toutefois, d’autant plus redoutable. La dynamite disloque les parois des galeries, et il suffit presque d’un éternuement pour que tout s’écroule. / Non, ce lundi-là, quand il était rentré de l’école, sa mère n’était pas allée faire des courses. Et les ambulances qui, avec ou sans leurs sirènes, faisaient le va-et-vient dans la rue de l’Hôpital, n’étaient pas venues, comme tant de fois, pour un inconnu. Mais son père n’avait même pas eu besoin d’ambulance, parce que, lorsqu’on l’avait retiré de la galerie, son corps était déjà sans vie. Le vent faisait danser la moustache, et le corps était sans vie » (Lmb, p. 108-109) et « Papa était à l’école. Il ne se doutait de rien. Une sirène a hurlé dehors. C’était assez fréquent. L’usine et les mines, comme si elles se vengeaient du minerai arraché au sol, se nourrissaient de chair fraîche. […] Ce jour-là, ce 9 mai 1932, le gros lot était pour papa. Il ne l’a su qu’en rentrant chez lui, au bout de la rue de l’Hôpital ». (« La mine du Thillenberg, à Differdange », p. 101)

71


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

Dans Mourir partout sauf à Differdange, cette même mine semble se transformer en chantier, le grand-père en maçon. Une équivalence entre les deux métiers de mineur et de maçon qui collent à la peau et à l’identité des immigrés italiens est établie tout le long du roman, soulignant que c’est bien le statut d’ouvrier et d’artisan qui est prédominant dans la représentation de cette communauté : Dans ma famille, côté masculin bien entendu, il n’y a, mettons, que des maçons. Normal, nous venons d’Italie. Les coiffeurs et les maçons viennent d’Italie. Tout le monde le sait à Differdange. Le savait, la donne a changé. A Differdange et dans l’ensemble du bassin minier. Je veux dire, feu le bassin minier, Dieu ait son âme. Voilà belle lurette qu’on ne retire plus le moindre gramme de fer du sous-sol differ­dangeois. (p. 34) Ce statut d’ouvrier entraîne avec lui toute une gamme de discriminations dont rendent compte les deux romans. Il y a évidemment les injures qui fusent, davantage dans La Mémoire de la baleine, étant donné l’énonciation prise en charge de manière régulière par l’enfant Clodi ; et l’on sait la cruauté des cours de recréation. Au-delà, cette évocation d’un Differdange avec « […] ses habitants qui nous regardent de travers et nous traitent de boccia et de bouffeurs de macaronis et de putains d’ours quand nous ne pouvons pas les entendre » (Lmb, p.159) en dit long sur les difficultés d’intégration qu’ont rencontrées ces communautés d’immigrés. La famille Nardelli est constamment tiraillée entre les deux cultures italienne et luxembourgeoise, proches l’une de l’autre notamment par le partage de la religion catholique, et pourtant si éloignées dans leurs pratiques respectives, comme le suggère encore cette citation tirée de La Mémoire de la baleine et qui illustre bien les tensions que ce conflit provoquait : […] parce que c’est justement à ça, prétend Nico, mon meilleur copain, qu’on reconnaît les bouffeurs de macaronis, au boucan qu’ils font quand ils parlent. Un vrai Luxembourgeois, ça parle sans crier, ça ne hurle pas comme un putain d’ours. Et, dans une vraie maison luxem-

bourgeoise la musique s’écoute avec un volume modéré. [...] c’est justement ça que j’ai crié à papa et à oncle Frédy : un vrai Luxembourgeois ne hurle pas comme un putain d’ours. (p. 366) Une aspiration à l’ascension sociale, à la réussite, pointe. D’autant plus que les deux parents Nardelli, le père et la mère du petit Clodi, avaient eu la possibilité, dans leur jeunesse en Italie, d’entamer des carrières de fonctionnaires : le père en tant qu’interprète, la mère en tant qu’institutrice. Les aléas de la guerre et le désir d’une vie financièrement meilleure les feront renoncer à ces projets : Mon père nous a cependant empêchés de toutes ses forces de lui emboîter le pas […]. La phrase : un bleu de travail dans la famille, ça suffit largement, est devenue un généreux cri de guerre, la tentative de nous hisser une fois pour toutes hors d’un milieu social à l’horizon trop fermé et au porte-monnaie trop peu rempli. (p. 397) Cette dimension est également présente dans Mourir partout sauf à Differdange, où le narrateur-écrivain exerce de nombreux métiers, à l’exception de celui d’ouvrier. Dans l’une des histoires qui composent le roman, il devient boucher, non pas par choix ou vocation, mais parce qu’il a épousé la fille du boucher : Ma manière à moi de venger les humiliations d’antan, chevaux de Troie prêts à prendre de l’intérieur ce dernier rempart differdangeois de pureté gastronomique, à savoir la boucherie Meyer, située en face de la place du Marché, pénétrée comme un indicateur s’infiltre dans un milieu mafieux, ou un espion dans le service de contre-espionnage adverse. Terre de personne que cette boucherie, à présent, abritant à la fois le porc ou le bœuf abattu en territoire luxembourgeois et les salamis ou les jambons provenant de leurs frères italiens. (p. 29)

Terres Rouges, terres natales Le ton de Mourir partout sauf à Differdange comme de La Mémoire de la baleine n’est pourtant pas amer, il ne s’agit pas de régler

12 D’après le titre de l’article que Jean Sorrente a consacré à Mourir partout sauf à Differdange lors de la parution du

roman (SORRENTE, Jean, « Les incarnations romanesques de Jean Portante », in Supplément Livres, Tageblatt, n°4, 18.04.2003).

72


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

ses comptes, mais de dresser le tableau d’une époque et d’y inscrire une histoire personnelle. Des passages teintés d’ironie reprennent les clichés qui collent aux immigrés, dans l’apparente naïveté de l’enfant Clodi qui élabore ainsi toute une théorie sur « la futilité des nationalités » (p. 424), à l’occasion d’une excursion scolaire sur le Tëtelbierg et plus particulièrement sur un site de fouilles romaines : Les ancêtres des Luxembourgeois n’étaient pas Luxembourgeois ? Quelle drôle de nationalité. Nous autres, les bouffeurs de macaronis, nous descendions par contre tout droit des plus puissants des ancêtres, à savoir les Romains. [...] Quoi ? Avais-je bien entendu ? Avait-il évoqué les Romains ? Mes ancêtres à moi ? Pas possible. [...] Oui, les Romains ont habité à Differdange bien avant que Differdange ne s’appelle Differdange et Niederkorn Niederkorn. [...] Voilà les vrais ancêtres des Differdangeois : mes ancêtres à moi, les Romains. Charly et moi, Nico et moi, Josiane et moi, Michèle et moi et même monsieur Schmietz et moi, sœur Lambretta, monsieur Erpelding et moi, nous étions les branches d’un même arbre. Et j’étais le seul à le savoir. (p. 341-342) Il est dès lors révélateur que dans l’une des « incarnations romanesques »12 de Mourir partout sauf à Differdange, le narrateur-écrivain devient un anthropologue qui descendrait dans les terres à la recherche des « restes d’un ancêtre de l’homme pas encore répertorié par la science jusque-là ». (p. 244) Le travail de l’anthropologue est identifié à celui de l’écrivain qui, lorsqu’il entreprend un projet autobiographique, fouille lui aussi les tréfonds de sa mémoire pour en tirer la substance nourri­cière de son identité. Cette identité est chez Portante inextricablement liée à la terre – le rapprochement avec l’anthropologie en étant la preuve –, une terre rouge en l’occurrence. Cette corrélation s’énonce ainsi dès l’incipit du roman, éclairant par anticipation le déroulement du récit à venir : Désormais, je sais pourquoi je n’arrive pas à écrire mon roman. Cela fait plus de sept ans que je descends l’escalier qui mène à l’échec, au rien, un escalier mécanique, un ascenseur plutôt, m’enfonçant dans les sous-sols de la terre, toujours plus bas, jusqu’aux souterrains de l’imagination, dans un univers lacéré de millions de coups de pioche et de pelle ayant creusé un inter-

minable entrelacs de galeries, semblables à celles qui rampent, abandonnées, désertées, vidées de leur substance, sous les rues et maisons de Differdange, et moi, le spectre du mineur, pioche et pelle à la main, errant dans le labyrinthe des veines qui, donnant les unes dans les autres, se mangent la queue comme des serpents affamés. (p. 7) Le rapprochement entre les galeries souter­ raines des mines de Differdange et la mémoire de son enfance passée dans ces mêmes terres devient évident. Le roman s’élance dans la succession d’une multitude d’histoires que vit le narrateur, qui est en même temps l’écrivain du roman que le lecteur a sous les yeux. A la fin des deux cents pages, le roman s’est écrit, par le biais des fouilles menées dans la propre mémoire du narrateur-écrivain, donnant naissance à ces récits aussi bien fictionnels que personnels. Les Terres Rouges font l’objet dans le diptyque de Differdange d’une représentation chargée affectivement, et donc éminemment personnelle. Des images poétiques sont suscitées par l’évocation de la poussière des cheminées, le rouge de cette poussière née de l’exploitation des terres, qui teinte les occur­rences de Differdange. Or, [l]e temps passe. La preuve, il n’y a aujourd’hui plus de sang, le soir, dans le ciel de Differdange, mais beaucoup de nostalgie, de jour, dans les rues, les façades en témoignent : rouge gris elles étaient, rouge gris elles restent, comme si clandestinement, alors que tout le monde dort, on continuait à fondre du minerai de fer dans l’usine d’à côté, comme pour ne décevoir personne ou ne pas perdre la main, on ne sait jamais. (Mpd, p.144) Dans les deux romans, la représentation de Differdange est caractérisée par la nostalgie, la nostalgie non seulement de l’enfance que suscite toute remémoration entreprise par un adulte, mais de cette terre qui fut une terre d’accueil pour de nombreuses familles immigrées, qui fut une terre nourricière. A la fin du roman, le narrateur de La Mémoire de la baleine revient à Differdange et se demande : Combien de fois avais-je maudit ces hauts fourneaux et ces cheminées-là, crachant leur sale poussière au-dessus de la ville, une poussière s’engouffrant partout et menaçant à chaque moment de ralentir l’engrenage de la vie quoti73


Terres Rouges

Differdange, Terres Rouges ou l’ancrage identitaire chez Jean Portante

dienne ? Quelle idée de mettre une usine au milieu d’une ville, avait dit Sandra [...]. Mais c’est le contraire, lui avais-je répondu, l’usine était la première, la ville est venue après. (p. 470) Differdange est sa ville natale, comme elle est celle du narrateur-écrivain de Mourir partout sauf à Differdange et au-delà, celle de l’auteur Jean Portante. Un détail d’ampleur pour la place privilégiée que le bassin minier occupe dans son oeuvre. Les évocations de la maison natale dans les deux romans le rappellent : « une maison natale, c’est tout de même important ». (Lmb, p. 30) La maison natale fonctionne comme point d’ancrage identitaire, comme le symbole aussi d’une mémoire. Les nombreuses occurrences de la maison natale, rue Roosevelt à Differdange, contrebalancent dès lors les sentiments latents d’exilé chez les narrateurs des deux romans. La question de l’exil renvoie inlassablement à l’idée d’un voyage originel auquel l’auteur comme les narrateurs du diptyque sur Differdange n’ont pas participé et qui est à la source du sentiment d’aliénation ressenti : né à Luxembourg, mais de parents immigrés italiens, ils semblent appartenir irrémédiablement à une terre de l’entre-deux, un ni ni qui les assi­ mile aux baleines. Chez Portante, le thème du voyage est lié par conséquent à ce sentiment d’aliénation originelle, métaphorisé dans les deux romans par le passage du tunnel du SaintGothard qui sépare les deux côtés des Alpes ; ce

tunnel qui pourrait se faire rejoindre le mal du pays de la mère et les aspirations de réussite sociale du père, ce tunnel qui est encore comparé, dans Mourir partout sauf à Differdange, au « labyrinthe de veines […] qui trouent le sous-sol de Differdange à la manière d’un Gruyère ». (p. 104) Tous les chemins de Portante semblent ainsi mener à cette terre du bassin minier, cœur des deux romans où l’entreprise de remémoration autour de la ville de Differdange est inextricablement liée à l’entreprise romanesque et poétique, dans l’interrogation des domaines limitrophes de la fiction et de l’autobiographie. La présence des Terres Rouges dans les deux romans témoigne finalement de l’ancrage identitaire que seule l’écriture parvient à constituer chez Portante. Bouclant la boucle avec le début de ce survol du diptyque de Differdange, c’est ainsi encore la langue d’écriture de Portante, cette étrange langue qui aura le fin mot : Je porte en moi un pays physique et un pays de mémoire collective, fictive. Depuis le départ, tout a oscillé entre ces deux pôles, ce qui m’a fait prendre ce voyage pour la réalité alors qu’il était fiction. J’ai dû inventer un paysage à cette dualité : la baleine. Elle a fait le long voyage de la terre vers l’eau et n’a gardé en elle la terre que comme pays de fiction. [...] Chez moi, le poumon serait la langue, quelque chose à l’intérieur que je ne peux utiliser mais qui me rattache à la fiction de l’origine. Elle filtre mon existence même.13

13 PORTANTE, Jean, « La langue filtre mon existence », propos recueillis par Kristel PAIROUX, in Le Quotidien, 31.03.2004.

74


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante Marion Colas-Blaise

Quelle place la littérature migrante au Luxem­ bourg1 réserve-t-elle aux Terres Rouges ? Dans quelle mesure celles-ci alimentent-elles l’expérience créatrice de certaines des personnes qui sont venues s’installer sur nos terres, ou qui sont des descendants de deuxième ou de troisième génération, de celles et de ceux qui ont quitté leur pays d’origine pour un pays d’accueil ? Après une rapide caractérisation de la littérature migrante par rapport à des littératures proches – la littérature de l’exil et la littérature postcoloniale – (première partie), il s’agira, ensuite, de dégager quelques modèles rendant compte de la manière dont l’immigrant négocie son rapport à la terre d’accueil et d’en repérer les traces dans l’ouvrage La mémoire de la baleine de Jean Portante (deuxième partie). Ce même ouvrage sera à la base d’une réflexion sur la médiation opérée par la langue : il importera de montrer en quoi c’est la langue, ou plutôt, en ce qui concerne Differdange, la coexistence, selon des modalités à déterminer, de plusieurs langues qui règle l’insertion dans le tissu social (troisième partie). Enfin, on se demandera dans quelle mesure les tensions ainsi générées sont répercutées également au niveau de la manifestation linguistique, du « style » de l’auteur (quatrième partie).

1. La littérature migrante et les littératures parentes Pour baliser le champ des investigations, on pourrait mettre en exergue la phrase du poète tunisien Tahar Bekri : Toute création véritable, et cela est encore plus manifeste dans la création poétique, est un exil,

car elle est le lieu d’une vision unique, d’une quête de soi et des autres, un espace où s’élabore la langue d’écriture, langue où se meut la voix de chaque écrivain, son souffle, son rythme, sa respiration, son corps, son être.2 Cependant, à l’évidence, toute création ne relève pas d’une littérature de l’exil. Celleci mérite également d’être distinguée de la littérature postcoloniale et de la littérature migrante. D’où la nécessité d’une clarification notionnelle, afin que se précisent les frontières, certes perméables, entre différents continents littéraires parents. On se contentera, ici, de noter qu’étymologiquement, l’exil, c’est-à-dire « l’expulsion hors de la patrie », est synonyme de « malheur » ou de « tourment »3. Fréquent tout au long de l’histoire, ce phénomène concerne entre autres des intellectuels et des écrivains à des périodes de fortes persécutions politiques et religieuses (pour fuir la censure et la répression). Au XXe siècle, on retiendra notamment ceux qui, tels Thomas Mann ou Bertolt Brecht, fuient le nazisme, ou encore les dissidents russes, tel Victor Serge Soljenitsyne. S’en distingue l’émig­ration volontaire d’écrivains qui, à l’image de Henry James, de Joyce ou d’Aldous Huxley, gagnent le continent européen ou les ÉtatsUnis. On y ajoutera Ionesco, qui a quitté la Roumanie en 1938 pour « monter » à Paris. L’exil choisi peut constituer non seulement une stratégie littéraire, mais une forme de vie. Quant à la littérature postcoloniale – celle, par exemple, de Tahar Ben Jelloun ou d’Azouz Begag –, on notera brièvement qu’elle vise, surtout depuis une vingtaine d’années, à scruter les rapports entre les (anciennes) colonies françaises

1 Au sujet de la spécificité de la littérature migrante dans un contexte multilingue et pluriculturel, voir notamment Jeanne E.

GLESENER, « La littérature de l’(im)migration au Luxembourg », in CONTER, Claude D. et GOETZINGER, Germaine (éds), Identitäts(de)konstruktionen. Neue Studien zur Luxemburgistik, Luxembourg, Éditions Phi & CNL, 2008, p. 111-130. 2 BEKRI, Tahar , « Exils », in Littératures de Tunisie et du Maghreb, suivi de Réflexions et propos sur la poésie et la littérature, Paris, L’Harmattan, 1994. 3 RANVIER, Alain, notice « Exil », in ARON, Paul et alii (éds), Le dictionnaire du littéraire, Paris, PUF, 2002, p. 214.

75


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

et britanniques et la métropole colonisatrice ; l’accent est également mis sur les métissages raciaux et culturels auxquels peuvent donner lieu l’entrée en contact de deux mondes et la création peut-être d’un « tiers espace »4. La langue française devient le dépositaire de tensions fondamentales : elle est ressentie comme une langue de libération qui, en tant que langue de la colonisation, fait en même temps l’objet d’une interrogation fondamentale. Enfin, si la littérature de l’émigration a ponctué les siècles – au moment de la Révolution française, lors du peuplement du Nouveau Monde au XIXe siècle… –, la littérature migrante constitue, selon Paul Aron5, un phénomène relativement récent, lié à l’essor du capitalisme. Ainsi, en ce qui concerne le monde francophone européen, les immigrations ont d’abord frappé le sud de l’Europe (surtout l’Italie, l’Espagne, le Portugal) entre les deux guerres, avant de toucher l’Afrique du Nord et, jusqu’à un certain point, l’est du bassin méditerranéen dans les années 1960. Si l’on cherche à dégager des traits définitoires, on dira que, en mettant face à face des groupes sociaux et des réalités culturelles différents, la littérature migrante soulève avec force des questions identitaires : il s’agit moins de s’intégrer dans une nouvelle culture en abandonnant la sienne que d’opérer une « transculturation » (F. Ortiz), qu’il faudra distinguer de l’acculturation, trop souvent mise en avant. Avant un approfon­ dissement de ces notions, on en pointera, à la suite de Paul Aron, deux conséquences immédiates : i) l’impossible retour au pays d’origine – le voyage permet à l’immigré de constater le décalage entre la mémoire collective mythifiante et la réalité : le pays d’origine n’est pas une terre d’accueil dont il pourrait se sentir proche ; à l’inverse de l’écrivain postcolonial, il ne peut le considérer comme une « terre de repli » ; ii) la réflexion sur la langue, dans la mesure où celle-ci répercute les tensions liées aux contacts ou aux conflits entre les pratiques linguistiques : par exemple, entre la langue première, celle du milieu familial, qui prend une forme volontiers dialectale, et la langue du pays d’accueil, qui peut constituer la langue de la scolarisation.

2. Comment penser le rapport à l’autre ? Transculturation et métissage, plutôt qu’acculturation Comment construire la figure de l’Autre ? La question doit être envisagée selon deux perspectives, strictement complémentaires : celle du sujet collectif, dans un espace social donné, qui accueille l’Autre ; contraint d’en négocier l’entrée dans son espace, de traiter le dissemblable, la différence, l’« étrangéité », il doit aussi repenser sa propre identité, selon qu’il la considère comme « menacée » ou comme pouvant se modifier en s’enrichissant au contact de l’Autre ; enfin, la perspective de l’Autre, du groupe qui vise à prendre pied dans l’espace d’accueil et s’oblige, à cette fin, à transformer sa propre identité culturelle. Il s’agit ainsi pour nous de réfléchir aux modalités de ces transformations, aménagements, adaptations, qu’on peut éclairer sous l’angle des stratégies de traitement du dissemblable, qui permettent une médiation du rapport à l’Autre et donc un autre mode de présence à nous-mêmes. Quoiqu’apparemment contraires, les stratégies de l’exclusion et de l’assimilation reposent, en réalité, sur un accord tacite : face à l’Autre, qui est d’abord l’étranger, défini par sa dissemb­lance, il s’agit, dans les deux cas, de préserver la « pureté » du groupe d’accueil, soit en rejetant­ et en éliminant l’autre, soit en opérant une standardisation qui nie toute différence et refuse le droit à la différence, et donc une ingestion de l’autre. Dans un cas, il s’agit de préserver le soi des éléments surgis du dehors, qui sont vécus comme une menace. Dans l’autre, la fusion dans la masse signifie aussi la disparition de ce qui est différent. Soit, l’autre est privé de son existence (exclusion) ; soit il est ramené à du même. Ici et là, en traçant une frontière entre le « dedans » et le « dehors », les stratégies visent la stabilisation d’un état et elles éliminent tous les éléments dynamiques qui pourraient conduire à inventer de nouvelles formes de coexistence et mener à un renouvellement des formations culturelles. On y opposera les stratégies mixtes, qui visent sans doute à maintenir un certain équilibre, mais sans exclure l’évolution, la mobilité

4 DELVAUX, Martine & CARON, Pascal, notice « Postcolonialisme », ibid., p. 482. 5 ARON, Paul, notice « Migrante (Littérature) », ibid., p. 387-388.

76


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

internes. Quelle que soit la perspective, celle du « Nous » de la terre d’accueil, ou celle du migrant, il s’agit avant tout de produire du sens en se positionnant par rapport à l’Autre : comment « se reconnaître en l’Autre, ou se découvrir soi-même comme Autre »6 ? Faut-il, dans ce cas, parler d’acculturation du migrant ? La première acception répertoriée par Le Petit Robert met en évidence la parenté sémantique avec l’assimilation : il est question non seulement de l’assimilation des valeurs de l’Autre – ici du groupe d’accueil – mais encore de l’assimilation à l’Autre, de l’absorption par – de la fusion dans – la société d’accueil, qui entraînent la soumission des valeurs propres, de l’« étrangéité », à un mouvement d’homogénéisation et de normalisation ou uniformisation. De ce point de vue, la transculturation correspond à une expérience plus satisfaisante de reconnaissance de l’altérité en nous-mêmes. Le modèle autorise une pensée non seulement du conflit et de la tension, mais encore de la transformation. Comme le note Alexis Nouss, un chercheur canadien, le terme « transculturation », qui apparaît chez l’ethnomusicologue cubain Fernando Ortiz en relation avec la situation culturelle de son île, « désigne l’ajustement de l’immigrant à son nouveau statut par un processus de négociation entre les éléments de son ancienne culture et ceux de la nouvelle »7. Trois traits méritent alors d’être soulignés. On notera, tout d’abord, le caractère interpersonnel, interculturel et donc collectif du transculturel. Ensuite, l’hybridité résulte de la rencontre entre deux composantes culturelles telles celles à la base de l’arabesk de Turquie, mélange du fonds ottoman et des influences du monde arabe. La création originale trouve son ancrage dans l’entre-deux des cultures en présence ; l’espace médian correspond à un « hors-lieu », de l’ordre de la combinaison, du « et… et… », délesté de la valeur négative que revêt le « non lieu » (de l’ordre du « ni... ni… »). Le transculturel relève ainsi d’une pensée du compromis, de la conciliation, de la synthétisation : « ceci et son

contraire, à la fois vrai et faux, noir et blanc, bon et mauvais », écrit Alexis Nouss8. On constatera, enfin, la perte des spécificités, dans la mesure où les identités peuvent voler en éclats. Comme le note Alexis Nouss, « transculturel est l’usage d’une lingua franca à côté des langues communautaires : le latin, l’arabe, le russe à l’époque du bloc soviétique, le turc, l’angloaméricain aujourd’hui. […] le transculturel […] est statique, fixe et fixateur. Il bénéficie d’une fixation puisque les deux composantes doivent interrompre leur devenir respectif afin de trouver cette forme commune transculturelle »9. C’est ce dernier point qui nous incite à pousser la réflexion plus avant. Dans quelle mesure la littérature migrante participe-t-elle à un tel processus de transculturation ? Un autre type de modélisation serait-il envisageable, qui écarte le risque d’un figement et préserve les chances d’une vraie dynamique ? La notion de transculturation peut être confrontée avec profit à celle du métissage, tel que le décrit Alexis Nouss : il s’agit, dans ce cas, d’appartenir pleine­ment à plus d’une culture, de se prévaloir de plus d’une identité. L’exemple qu’il donne est éloquent : Alice, de Lewis Carroll, peut être des deux côtés du miroir, toute petite ou toute grande, en fonction des métamorphoses opérées. Le métissage est intrapersonnel, dans la mesure où l’opération s’opère au niveau même de l’individu, du jeune beur, par exemple, qui noue en lui l’héritage maghrébin à l’héritage français. Alexis Nouss rapproche le métissage du « bricolage » tel que peut l’entendre l’anthropologue Lévi-Strauss dans La Pensée sauvage : le bricolage permet de construire une nouvelle réalité en faisant coexister des structures, en les incorporant dans un tout, sans les unir, sans « fondre [les] composantes dans un ensemble fusionnel » ni leur faire perdre leurs spécificités10. En même temps, si pour Alexis Nouss, « le métissage, c’est le même et l’autre »11, si c’est être pleinement ceci et cela, la con­ jonction « et » pourrait être remplacée par « ou » : alors que l’hybridité signifie le mélange, la

6 LANDOWSKI, Éric, Présences de l’autre, Paris, PUF, 1997, p. 24. 7 NOUSS, Alexis, « Métissage, transculture et singularité », in OUELLET, Pierre (éd.), Politique de la parole. Singularité

et communauté, Québec, Éditions Trait d’union, 2002, p. 103.

8 Ibid., p. 106. 9 Ibid., p. 104.

10 Ibid., p. 110. 11 Ibid., p.104.

77


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

conciliation, il s’agit, précisément, d’être « tour à tour, et pleinement à chaque fois »12, alternativement. Le métissage ne fait pas perdre les traits singularisants, mais les intègre dans un projet inédit. Ainsi, dit Alexis Nouss, « le Turc n’est pas mi-occidental mi-oriental mais tout à fait occidental et tout à fait oriental. Le sujet métis n’ignore pas les frontières, il les reconnaît mais est autant à l’aise d’un côté que de l’autre »13. Le principe de base étant celui de l’alternance, le zapping pourrait constituer, selon lui, un exemple de l’expérience esthétique du métissage. C’est permettre la reconnaissance de l’altérité, son maintien, celui de la différence, plutôt que sa négation, qui entraînerait une perte de sens : « Face à face où l’autre n’est jamais réduit au même, où la distance est maintenue lors même que le dialogue s’établit »14. Le métissage est ainsi, toujours et nécessairement, en devenir, une réalité mouvante, qui exhibe les différences, les inégalités, plurielles, infiniment. L’espace correspondant n’est alors ni un « non-lieu », ni un « hors-espace », mais peut-être un « tiers espace », qui préserve la possibilité du battement15. Dans quelle mesure l’ouvrage La mémoire de la baleine fait-il s’entrecroiser les expériences de l’assimilation/acculturation, dont le « non lieu » est une figuration, de la transculturation, liée au « hors-espace », et du métissage, en rapport avec le « tiers espace » ? Plus exactement, si tout migrant s’installe dans un « entre-deux » qui est de l’ordre du « ne plus » et du « pas encore » – ce n’est plus le village d’origine, et pas encore le pays d’accueil –, dans quelle mesure l’interstice devient-il habitable, dans quelle mesure devient-il producteur de sens ? Ou encore, comment passer du « ni… ni… » à du « il y a quelque chose qui fait sens » ?

L’expérience du « non lieu » L’expérience du « non lieu » correspond très exactement à l’émigration, à la rupture, au voyage hors du pays, en direction de ce « Lussemburgo » auquel les bruits qui cir­culent ont du mal à donner une forme.

Le « non lieu » est le lieu de la privation, de la menace de l’a-signifiance, qui se traduit négativement : les difficultés à prendre pied, à avoir une emprise sur la réalité, sont manifestées figurativement par la précarité, l’étouffement des bruits, les blocages au niveau de la parole, les gestes furtifs, les mains qui soustraient le visage aux regards et essuient les larmes : […] Nando regarda Maddalena dans les yeux, parce qu’elle aussi avait une question dans les yeux, non, tout un essaim de questions qu’elle n’avait cessé de formuler dans sa tête en chemin, […], tout comme Nando n’avait cessé, depuis le même moment, de formuler ses questions à lui, inscrites dans leurs regards maintenant, gravées dans chaque trait de leur visage, […], tandis que ni Maddalena ni Nando n’osaient ouvrir la bouche, par peur d’interrompre le silence qui avait accompagné jusque-là le bruit à peine audible de leurs pas, des pas sans chaussures, avec des petits bouts d’étoffe pleins de poussière enroulés autour de leurs pieds, un bruit à peine couvert par les murmures des autres Nando et des autres Maddalena qui avaient sans doute les mêmes questions dans les yeux […]. (La mémoire de la baleine, Luxembourg, Éditions Phi/XYZ, 1993, Bordeaux, Le Castor Astral, 1999, p. 43) […] les lèvres de Maddalena étaient cachées derrière ses deux mains, tout comme y étaient cachés le nez et les yeux et le visage entier, et elles étaient tout humides les mains de Maddalena, […] et si les mains de Maddalena ainsi que celles des autres Maddalena étaient humides, c’était à cause des larmes qu’elles séchaient sans se faire remarquer de leurs Nando […]». (p. 48) Les difficultés se traduisent également et surtout par une confusion généralisée, qui rend impossibles la saisie de la réalité, l’analyse de la situation ; or, sans une telle analyse, sans l’étab­lissement de différences entre les éléments et sans l’instauration de rapports, pas de sens. Plus globalement, la rupture avec le pays d’origine entraîne un trouble identitaire. Qui

12 Ibid., p. 105. 13 Ibid., p. 106.

14 Ibid., p. 110. 15 Voir Martine Delvaux & Pascal Caron au sujet du postcolonialisme, in ARON et alii (éds), op. cit., p. 482, même si le

« tiers espace » tel que nous le concevons en relation avec le métissage n’est alors de l’ordre ni de l’hybridité, ni de l’ambivalence, mais plutôt de l’ambiguïté (cf. NOUSS, Alexis, art. cit., p. 106).

78


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

suis-je ? Comment suis-je relié à mon passé ? Ou encore, pour employer les termes du philo­ sophe Paul Ricoeur, dans quelle mesure mon Soi se réalise-t-il par la répétition et la similitude, par la permanence des rôles, des parcours narratifs et figuratifs caractéristiques de mon passé (le Soi-idem) ? Dans quelle mesure puis-je égale­ ment me projeter dans le futur, avoir des visées éthiques, esthétiques…, construire un parcours cohérent (le Soi-ipse) ? En l’occurrence, il arrive que les repères fassent défaut ; le passé n’informe plus le futur, qui, ne pouvant plus être anticipé, devient menaçant ; englobé dans la masse – « les Nando » et « les Maddalena » –, anonymisé, l’émigrant est réduit à un « non sujet », qui subit la situation plutôt que de la maîtriser : […] les questions que Nando lisait dans les yeux de Maddalena, et celles que Maddalena lisait dans les yeux de Nando, et que tous les autres Maddalena et Nando lisaient dans leurs yeux réciproques, ne parlaient pas de passé, parce que ce qui les angoissait ce n’était pas le passé, ils le connaissaient bien leur passé, […], non, c’était le futur qui leur faisait peur, parce qu’ils l’imaginaient à la fois exactement pareil et tout à fait différent du passé, et le temps s’embrouillait dans leurs têtes, le temps avec deux côtés, à gauche le passé, puis un gros trait de séparation, ensuite, dans l’hémisphère droit, le futur, et si le temps s’embrouillait dans leurs têtes, c’était parce que, les réponses aux questions du futur, ils allaient les chercher dans l’hémisphère du passé, alors que l’hémisphère du futur n’arrivait pas vraiment à répondre à leurs questions du passé, et la chose s’emmêlait encore davan­ tage dans leurs têtes puisqu’ils savaient fort bien quelles questions poser par rapport au passé, mais ignoraient en revanche quelles seraient les vraies questions de l’hémisphère du futur, si bien que les deux hémisphères n’étaient pas vraiment des hémisphères avec un gros trait de séparation au milieu, mais plutôt une seule grande boule où s’emmêlaient les ques­tions sans réponses et les réponses sans questions. (p. 44-45)

L’expérience du « hors-espace » La transculturation donne lieu, nous l’avons dit, à la production d’une nouvelle unité, à partir de deux composantes culturelles – ici l’Italie et le Luxembourg –, par hybridation et fusion, au profit d’une création inédite. La formation signi-

fiante qui naît de cette rencontre exige ainsi une mise en commun des éléments et elle se traduit par une perte des traits singuliers, le gommage des identités, au profit d’une identité mixte, qui émerge et finit par se doter de contours stables. On pourrait la résumer par la formule « l’identité de l’Italien luxembourgeois » ou « l’identité du Luxembourgeois italien ». On voit que dans les deux cas, la nouvelle identité transculturelle, qui a la fonction d’une instance de médiation entre les cultures, prend la forme d’un terme complexe où s’allient les contraires, du type « et… et… ». Dans La mémoire de la baleine, c’est le retour au pays de l’adulte qui fait visiter le village de ses ancêtres à sa femme qui sert de révélateur : les sensations – en particulier l’ouïe – permettent de reconstituer une réalité qu’il imaginait différente, de renouer avec un passé que la mémoire a transfiguré, accommodé, réarrangé. Dira-t-on que la mémoire trahit la réalité italienne ? Peut-être l’ajuste-t-elle à la vie que le héros mène à Differdange, pour constituer un tout de sens. Celui même de la « fiction autobiographique », où se mêlent souvenirs et imagination, où le re-vécu – le passé vécu à nouveau dans le présent – est immédiatement repensé, transfiguré, et mis à distance. On peut ainsi lire les phrases liminaires du roman : Le bar est encore là. Mais ce n’est plus le même bar. C’est le même et pas le même. La grande porte est devenue plus petite, moins haute. Une marquise et une enseigne lumineuse lui ont coupé la tête. Voilà ma première impression de ce premier retour. Les dimensions ont changé. Tout est soit plus petit, soit plus grand que je ne l’avais pensé. Rien n’est resté tel quel dans ma mémoire. (p. 15) Le corrélat affectif de cette re-con­naissance problématique, c’est d’abord le vertige : « Quand je me suis retourné, pour examiner à mes pieds le village, le vertige m’a pris » (p. 15). L’auteur cependant ajoute : « Tout n’est pas perdu. Le temps n’a pas touché à la musique, me suis-je dit ». Tout n’est pas perdu, justement. L’expérience n’est plus celle de l’a-signifiance, mais de la complexité du sens qui s’ébauche à partir des contraires qui s’appellent et s’allient : « L’église s’est aussitôt vidée et le prêtre nous a dévisagés longuement. Je sais que vous n’êtes pas d’ici, a-t-il fini par dire, et pourtant 79


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

quelque chose vous y rattache » (p. 18). Plus loin, l’auteur écrit : Mais la maison qui se trouve là, après la quat­rième porte, notre maison, n’est pas le lieu de ma naissance. Ce n’est qu’une maison parmi d’autres de mon enfance. J’y tiens et je n’y tiens pas. Je la reconnais et ne la reconnais pas. (p. 21) Une re-connaissance difficile, douloureuse même, qui est fondamentalement une quête du sens : celle-ci se heurte à la tentation de la monoculturalité, quand le présent congédie le passé en le virtualisant. Ce à quoi l’hybridation doit faire barrage, c’est, précisément, à ce nappage uniformisant qui se traduit par la liquidation – la soustraction, de la même façon qu’on peut parler d’un bilinguisme soustractif – d’une part du vécu : « Nous avons donc parlé, écrit Portante dans le premier chapitre du roman. J’ai tenté d’expliquer comment, en m’approchant de San Demetrio, je m’en éloignais brusquement. Comment en tentant d’imaginer dans quel état se trouverait notre maison, elle s’est effacée de mes pensées et a cédé la place à notre maison de Differdange, ma maison natale » (p. 21). Dans ce cas, contrairement à l’expérience de la transculturation, le passé se trouve virtualisé.

La création du « tiers espace » De fait, c’est la re-création littéraire, à travers l’autobiographie fictionnelle ou la fiction autobiographique, qui permet d’accéder à un troisième niveau, celui qui correspond au métissage. Il ne s’agit ni d’amputer le présent du passé, ni de hâter la fusion des éléments dans un amalgame qui en érode les contours. Il s’agit bien plutôt de maintenir le battement entre les deux cultures et les deux langues, la possibilité du vaet-vient, de l’alternance du type « ou… ou… ». Telle est l’expérience d’un véritable dé­ doublement spatial et temporel décrite par Portante lui-même, quand il relate le retour de l’adulte au pays de ses ancêtres. Il faut que le passé et le présent cessent de se combattre : plutôt que de tendre à « prendre le dessus » (p. 22), le présent italien doit se superposer au vécu luxembourgeois sans l’effacer, sans y porter atteinte ; relégué provisoirement au second plan, celui-ci doit être prêt à passer de nouveau au niveau de la réalisation dans un mouvement 80

de bascule. Ou plutôt, le passé et le présent ne valent que conjointement, à travers les rapports non dénués de tensions qu’ils nouent entre eux. L’un s’impose sur le fond de l’autre, qu’il invite à passer au premier plan en retour. Tel est le secret de l’expérience dont il parle dans le premier chapitre : Je me dis encore ceci, et c’est le prêtre de la Madonna qui en a donné le déclic : mon enfance, ou plutôt l’image que je m’en fais, m’apparaît bipolaire, désespérément mobile, un fragile va-et-vient d’une maison à l’autre, d’un pays à l’autre, d’une langue à l’autre, comme si, en réalité, deux êtres vivaient en moi, ou un être doté du don de l’ubiquité, deux êtres cohérents et antagoniques, plantés opiniâtrement dans leurs mondes si différents et si identiques à la fois, se livrant la plus insolite des guerres par peur de sombrer dans l’oubli. Je passe ainsi, sans effort, de la cuisine toute blanche de la rue Roosevelt, escorté par la voix stridente de Pol Leuck commentant à tue-tête la guerre de Corée et le retour des volontaires luxembourgeois, à la chambre à coucher de Cardabello avec ses mouches malgré le tamis vert des fenêtres, remplie encore du carillon conjoint des cloches de Santa Nunziata et de la Madonna. (p. 22) C’est grâce aux couches de profondeur de la mémoire, grâce à son épaisseur qu’il est possible de drainer vers le présent certaines au moins des expériences du passé, de les faire re-vivre, en les re-présentant cette fois-ci dans leur immédiateté : Attention, tout à l’heure j’ai peut-être dit à présent, deux fois même, mais cela ne signifie nullement qu’il s’agit du même moment. Et cela ne veut pas non plus dire que je parle du présent d’aujourd’hui, là, au moment de raconter, d’écrire. Il s’agit plutôt d’un présent de la mémoire, d’un cadeau du temps, d’une présence à l’intérieur du souvenir déclenchée sans doute par cette photo que je tiens dans mes mains. (p. 78) La mémoire ne trie-t-elle pas d’elle-même les faits importants, enfouissant dans l’oubli ceux qui ne sont pas nécessaires ou pénibles, reléguant au second plan ceux qui peuvent encore attendre ? Elle me joue vraiment de sales tours ces jours-ci, ma mémoire, et des choses que je croyais oubliées à tout jamais surgissent sou-


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

dain, jaillissant comme un jet d’eau, comme l’énorme colonne blanche s’échappant de l’évent d’une baleine. (p. 81) Il semblerait, pourtant, que le métissage ne corresponde qu’à une forme de coexistence du passé et du présent, toujours mobile, toujours en devenir, et souvent hors de portée. Finalement, si le va-et-vient s’autorise d’une structure bipolaire, peut-être ne s’agit-il pas tant de ressus­ citer le passé par la mémoire – il s’efface ou s’estompe – que de le recréer, indéfiniment : Mais aujourd’hui je sais que deux éternités, ça n’existe pas. C’est tout simplement le temps qui passe, l’oubli qui grandit, la mémoire qui rétrécit et cède le pas à la raison. La mortadelle ambre gris et les petits-beurre [les aliments qu’explorant le monde par l’odorat, le personnage associe à l’Italie et au Luxembourg] ne sont que deux héros de la guerre du temps se déroulant à l’intérieur de moi, ennemis et complices, des prétextes. De futiles prétextes me cachant sans vraiment le dissimuler ce que je sais depuis longtemps : la seule mémoire possible est précisément la mémoire possible. (p. 97-98) La mémoire des possibles – se risquera-t-on à ajouter. La mémoire subit elle-même une fiction­nalisation, celle qui autorise précisément de parler de biographie fictionnelle ou de fiction autobiographique. Le façonnement de la mémoire doit agir contre l’oubli. Ou plutôt : privilégiant l’hybridation aux dépens du métissage, souvent hors d’atteinte, la mémoire façonnée intègre l’oubli, l’effacement d’une partie du vécu. « Tout migrant sent ou sait qu’en quittant un lieu, il s’effaçonne », écrit Jean Portante16. Portant la marque d’un amalgame partiel, c’est-à-dire d’un syncrétisme qui fait émerger une seule unité indécomposable (à travers la troncation du mot « effacement »), le terme de « effaçonnement » concentre les tensions vives entre les différentes figures de l’« entre-deux », en faisant triompher le « hors-espace ». On montrera dans la troisième partie que la langue en constitue un révélateur de choix.

3. L’« étrange langue » En effet, la langue subit elle-même cet effaçonnement, devenant pour Jean Portante l’« étrange langue ». Rappelant la métaphore de la baleine et établissant une comparaison avec les aménagements que peut entraîner la traduction d’un texte, Jean Portante la décrit ainsi : Car c’est quoi une baleine ? Aujourd’hui nous savons qu’elle vit dans l’eau. Mais il n’en a pas été toujours ainsi. La science nous a appris que, avant son séjour maritime, la baleine vivait sur terre. [...] il y a, dans la baleine, une chose, une chose capitale, qu’elle a laissée telle quelle, intacte. Ses poumons. Ce qui lui permet de respirer. Le souffle. Voilà donc, que pour pouvoir vivre dans son nouvel environ­ nement, la baleine a effacé tout son corps, mais a gardé ses poumons, son âme en quelque sorte. […] La métaphore de la baleine, on l’aura compris, m’est venue pour transposer en littérature le thème de la migration. Le thème de mon moi intérieur, puisque je suis issu de l’immigration. De l’effaçonnement donc qu’on opère sur soi quand on se met en voyage. […] Cela me ramène à la traduction. Les mots qui de l’inconscient viennent à la conscience, je veux dire les mots de l’écrivain, ont fait un long séjour dans son imaginaire avant qu’un déclic ne les déverse sur la page blanche. Dès que, cependant, ils quittent leur terre pour, par l’intervention du traducteur, en rejoindre une autre, ils échappent à cet imaginaire-là pour se verser dans celui du traducteur. Il y a, comme chez la baleine, effaçonnement. […] L’Étrange langue serait alors celle qui, tout en effaçant une langue originale d’un livre, en garderait le poumon, ce qui lui a permis de respirer. (L’étrange langue, p. 224-227) L’« étrange langue », qui constitue un fait identitaire, est d’abord plurielle : elle correspond au réservoir linguistique des immigrés, éminemment variable en fonction de la compétence acquise, et ajustable en fonction des situations de communication, des usages et des besoins :

16 Cf. « L’étrange langue », in BOGGIANI, Jos et alii (éds), Paroles et images de l’immigration. Langue, Littérature et

Cinéma : témoins de la présence italienne au Luxembourg et dans la Grande Région, Luxembourg, Publications de l’Université du Luxembourg, 2006, p, 221-231.

81


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

[…] trois [langues] étaient d’usage désormais chez nous : l’italien, non seulement parce que maman ne voulait pas l’abandonner, mais aussi à cause des nouveaux venus qui […] transportaient dans leurs bagages […] le plus précieux des trésors, disait maman, à savoir la langue du pays natal, de plus en plus bizarre pour mes oreilles ; le luxembourgeois ensuite, parce que, à la différence de ma mère qui ne sortait de chez nous que pour aller faire les courses, papa […] ainsi que mon frère et moi, nous nous étions mis à accumuler des copains de travail et d’école et de rue qui n’avaient rien à voir avec notre histoire et notre passé. Des copains orientés vers le futur, parlant une langue du futur […] ; le français enfin, le symbole de la résistance de maman, de sa résistance et de son attachement au minimum possible, étant donné que le maximum n’était déjà plus à portée de main. La maison de la rue Roosevelt est ainsi devenue peu à peu notre tour de Babel à nous […]. Et malgré le fait qu’il y avait trois langues chez nous, tout le monde comprenait tout le monde […]. (La mémoire de la baleine, p. 229-230) Ce multilinguisme fonctionnel ne prend pas la forme d’un équilinguisme ou multilinguisme balancé, où toutes les langues seraient maîtrisées au même titre : si le personnage Claude parle très bien les langues du pays (français, allemand, luxembourgeois), il n’atteint pas le niveau du locuteur natif en italien. Expérience euphorique que celle de la cohabitation des langues correspondant à l’expérience du métissage. Il arrive cependant que chacune des langues en présence perde de son autonomie, soit reconfigurée à travers l’autre, donnant lieu à des interférences, mais aussi à des créations verbales qui deviennent le signe de tentatives d’appropriation par le locuteur : Mûrir. Un mot que ma mère, quand, refusant toujours, je ne sais pour quelle raison, de parler la langue de tante Lucie, elle s’était mise à appren­dre le français, prononçait toujours avec un u à l’italienne : mourir, disait-elle à tante Lucie, les raisins nécessitent beaucoup de soleil pour bien mourir, et les olives aussi […]. (p. 228) Dans ces maisons au bout de la ville donc, se sont forgés les mots nouveaux qui allaient résonner durant des années dans ma tête, comme si toute une époque y était accrochée. Il s’agis-

82

sait cependant de mots n’appartenant à aucune langue, ou communs aux trois […]. (p. 229) Parmi les créations linguistiques les plus intéressantes inventées par ma mère, deux mots sont restés dans ma mémoire, comme deux béquilles que je n’ai pas osé abandonner. Gattone et plafone, deux mots venus tout droit du français et importés par ma mère dans l’italien version maison. J’ignore si, ensuite, ces apports ont fait leur chemin académique pour finir par s’incorporer dans le trésor officiel de la langue italienne, mais je sais que Rita et Paolo et tous les autres cousins et copains de San Demetrio ont écarquillé les yeux, lorsque je leur ai demandé s’ils aimaient le gattone ou s’ils avaient vu cette énorme araignée noire collée au plafone. (p. 231) Une appropriation souvent difficile, parcourue de tensions, les langues étant vécues comme plus ou moins proches ou lointaines par le personnage Claudio lui-même, qui est pourtant bon élève.Ainsi, quand il doit se confesser, telle langue est ressentie comme un frein à l’appréhension directe de la réalité et à l’expression du Soi : D’habitude, quand je ne parlais pas, la langue ne jouait pas de rôle. Comme dans mes rêves. […] Mais dits en allemand, les péchés n’étaient plus de vrais péchés. Ils s’éloignaient comme un bateau sans capitaine. Les mots allemands en effaçaient le contenu. Lügen et mentir étaient deux choses différentes. Comme stehlen et voler. Ou bougie et bugia. L’argent que j’avais gestohlen dans le porte-monnaie de maman ou les poches de papa n’était pas de l’argent vrai. (p. 457) Le rapport à la langue, quelle qu’elle soit, est d’autant plus complexe que transitant de bouche en bouche, d’un contexte à un autre, tout mot est « habité par des voix autres », selon les termes de Bakhtine. Drainant avec lui le « trajet » qui est le sien, il résume en lui d’autres emplois antérieurs, dans un contexte fondamentalement dialogique ou auto-dialogique. Sur le fond d’une hétérogénéité « constitutive », le locuteur peut tout au plus donner l’illusion de sa maîtrise énonciative. Dans l’article « L’étrange langue », Jean Portante se demande ce qui « se passe quand un Luxembourgeois se met à écrire en français » : Écrit-il le même français que celui qui l’a en lui en tant que langue maternelle ? En apparence oui. Les mots sont les mêmes. Quand un


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

Luxembourgeois écrit arbre, il utilise le même mot qu’un Français. Il remonte en quelque sorte le chemin inverse de celui du traducteur pour remplacer les mots oraux de sa langue maternelle par les mots écrits d’une autre. Il est donc également un effaçonneur. Mais ils ont beau être les mêmes que ceux d’un Français, les mots français d’un Luxembourgeois, à l’intérieur d’eux dort un univers qui est distinct de l’univers des Français. (p. 227-228) Dans ce contexte, les noms propres, qui ont la particularité de ne pas avoir de sens lexical codifié, mais d’être des « désignateurs rigides » directs, associés en vertu d’un lien stable à une entité dans une communauté linguistique donnée, méritent une attention particulière. Ils deviennent des révélateurs privilégiés des tensions qui se nouent entre les tentatives d’ajustement ou d’adaptation à la nouvelle réalité et le maintien du même. La crise de la (dé)nomination porte en effet atteinte à la permanence, pour un univers donné, que les noms propres sont censés traduire. L’incertitude (dé)nominative va ainsi de pair avec une déstabilisation générale, voire une perte des repères telle celle qui accompagne, fatalement, le départ du pays d’origine en direction d’une terre d’accueil. Francisés, luxembourgeoisisés, les noms propres deviennent la trace tangible laissée par le changement de lieu et de mode de vie ; l’émigrant est « marqué », à vie : rentre-t-il au pays, il garde le nom qui lui a été donné en France, au Luxembourg ou ailleurs: Les femmes, en partant, s’appelaient encore Guiseppina. Quelques syllabes ont été sacrifiées à l’étranger. Le départ a raccourci les prénoms. Claudio est devenu Claude, Giovanni, Jean, Alfredo, Frédy. (p. 16) Mais les métamorphoses du nom propre répercutent aussi les stades de l’acclimatation, en symbolisant pour ainsi le type de l’« entre-deux » : alors que le métissage correspond à la juxta­ position des variantes italienne et luxembourgeoise des prénoms, auxquelles on recourt en fonction de la situation, la transculturation et le « hors espace » sont associés au nom propre hybride, à la création originale qui combine le nom italien et le nom français ou luxembourgeois : Je m’appelais Claudio. Maintenant je m’appelle Claude. Mettons. Tout comme mon frère ne

s’appelle d’ailleurs plus Nando ou Fernando, mais Ferni ou Fernand. (p. 25) Pour mon frère, et c’est devenu une règle à laquelle il tient beaucoup, tout le monde, sauf nos grand-mères Maddalena et Lucia, dit Fernand. Certes, ce n’est pas la même chose si c’est ma mère qui le dit ou un de ses copains, Marco, par exemple. Je veux dire, c’est la même chose et ce n’est pas la même chose, parce que quand ma mère l’appelle, elle a l’habitude d’accentuer la deuxième syllabe, nand, comme si elle n’arrivait pas à s’arrêter à temps et voulait à tout prix prononcer le d final ou continuer par une troisième syllabe, inexistante pourtant depuis belle lurette. Et puis, elle roule exagérément, dit mon frère, le r, au milieu du nom, et ça, il ne l’aime pas du tout. (p. 26) On se demandera, dans un dernier temps, dans quelle mesure l’écriture de Portante – son « style » – ressortit elle-même au modèle de la transculturation ou à celui du métissage.

4. Le style de l’« entre-deux » Comment les tensions entre les figures de l’« entre-deux » se traduisent-elles à hauteur non seulement du contenu, mais de l’expression ? Dans l’article « L’étrange langue », voici ce que note Jean Portante en réponse à la question initiale « qui est l’auteur d’un livre traduit ? » : Elle [la réponse] s’inscrit dans une sorte de « ni ni ». Le livre traduit ne serait ni tout à fait celui de l’auteur ni tout à fait celui du traducteur. Ou, pour le dire d’une manière un peu plus nuancée, il n’appartiendrait déjà plus à l’auteur sans pour autant encore être devenu la propriété du traducteur. Il est donc en chemin. Il erre dans un espace de personne. Tantôt il se rapproche de l’auteur pour s’éloigner du traducteur, tantôt il se rapproche du traducteur et s’éloigne de l’auteur. Il est en éternelle errance. (p. 223-224) À hauteur du plan de l’expression, les manifestations de cette « errance » peuvent être au moins doubles : on scrutera les glissements qui s’opèrent au niveau du rendu des pa­roles et des pensées des personnages, avant de mettre l’accent sur la présence, dans le texte, d’« îlots textuels ».

83


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

Les formes du rapport des paroles et des pensées des personnages Dans La mémoire de la baleine, l’entremêlement des discours, c’est-à-dire le passage entre différents styles de rendu des pensées et des paroles des personnages par le locuteur rapporteur, contribue à produire des « effets d’identité ». On verra dans le balancement d’un style à un autre, mais aussi dans le style indirect libre, voire dans ces passages où, en l’espace d’une même phrase, l’origine et la responsabilité énonciatives deviennent proprement indécidables, les signes d’une hybridation généralisée. Celle-ci peut amplifier l’impression de vertige que produit le retour du personnage adulte sur les terres de ses ancêtres : … à hauteur de la gare, non ce n’est pas encore la gare, malgré les enseignes lumineuses déjà allumées, des torrents de lumière multicolore, de part et d’autre de la route, une escorte aveug­lante presque, alors que la rangée d’arbres, à droite, interminable depuis un moment, des troncs ceinturés d’une bande blanche, s’est brusquement interrompue, momentanément, pour continuer quelques mètres plus loin, une coupure préparée par le ralentissement de la voiture transformant peu à peu la ligne des arbres en arbres individuels, comptables, depuis que Sandra a demandé à son mari de ralentir, pour mieux voir le paysage qu’elle ne connaît que par ouï-dire, et pour ne pas manquer la petite gare dont il a tant parlé, une gare qui en a vu de toutes les couleurs, pendant la guerre surtout, une gare témoin de tous les départs, mais la gare ne vient pas encore, et Claude (faudraitil dire Claudio ?) accélère de nouveau, rendant aux arbres leur anonymat d’avant, jusqu’au ralentissement suivant qui en refait des troncs à part entière, un ralentissement précédé, cette fois-ci, d’un « c’est là ? » de Sandra, suivi du coup de frein de Claude, du sursaut de la petite Lucie qui se réveille sur le siège arrière (faudrait-il dire Lucia ?) et de la voiture qui recule pour se garer dans l’intervalle entre les arbres, juste au-dessous d’un panneau publicitaire, allumé lui aussi, sur un chemin blanc qui entre dans les champs et débouche sur une sorte de mas de campagne […], alors que Sandra ouvre la portière dans cet intervalle d’un arbre à l’autre, sous l’enseigne qu’on ne voit que si on s’arrête, a-t-on expliqué à Claude il y a un moment, lors de la pause essence à la station Agip, 84

à la sortie de l’Aquila, l’enseigne et son poisson avec au fond trois ou quatre lignes ondulées, l’eau ébauchée dans la lumière, une redondance se dit Claude, d’autant plus que la mer est loin d’ici, là et là derrière les montagnes, à l’autre pied des montagnes […]. (p. 18-19) On constate qu’au départ, le locuteur-narrateur épouse le point de vue du personnage, dont il restitue le flux des pensées : l’adverbe « non », qui introduit un réajustement du dire, constitue ainsi une marque de subjectivité qui montre que le personnage découvre et interprète le paysage de proche en proche, en émettant des hypothèses qui peuvent ne pas être confirmées. Son attente peut être déçue, quand son savoir, mis en défaut, se révèle incertain, vacillant. Par la suite, les adjectifs subjectifs traduisent des évaluations axiologiques, positives ou néga­tives, ou ils renvoient à la manière dont l’expérience est vécue : on notera la valeur affective de « aveuglant » ou d’« interminable », qui ont pour corrélat thymique l’inconfort du sujet qui tente d’avoir prise sur la réalité, mais se heurte à la résistance de ce qui se dérobe à lui : l’adverbe « brusquement » indique que la confiance du sujet est ébranlée ; le sujet se retrouve quelque peu démuni, alors même que c’est son point de vue qui construit l’espace. Cette même impression de tâtonnement, voire de confusion est créée par l’enchevêtrement des paroles, sans qu’il soit toujours pos­ sible de les attribuer à une source précise : ainsi, les paroles prononcées par Sandra (la femme du personnage devenu adulte) sont d’abord rapportées au discours indirect (« … Sandra a demandé à son mari de ralentir ») ; la syntaxe du style oral (notamment le « et » de coordination après la virgule – « et pour ne pas manquer la petite gare dont il a tant parlé » – traduit le caractère quelque peu heurté d’un style qui opère par àcoups), le lexique, les répétitions suggèrent, ensuite, un possible glissement vers le discours indirect libre, quand la voix du personnage et celle du locuteur-narrateur se superposent ; on peut même supposer que s’instaure un dialogue entre les personnages, le segment « une gare qui en a vu de toutes les couleurs, pendant la guerre surtout, une gare témoin de tous les départs » pouvant être mis au compte de Claude, avant que le locuteur-narrateur qui raconte l’histoire rétrospectivement ne reprenne les choses en main : « mais la gare ne vient pas encore, et Claude (faudrait-il dire Claudio ?) accélère de nou-


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

veau…» ; il assume jusqu’à la responsabilité de la parenthèse. Plus loin, le texte reproduit au discours direct enserré par les guillemets la question de Sandra – « c’est là ? » –, avant, une fois encore, un commentaire du locuteur-narrateur. En même temps, le récit est parasité par les paroles/pensées du personnage, comme le suggèrent la précision « juste au-dessous d’un panneau publicitaire » ou encore l’expression « une sorte de (mas de campagne) », qui traduit l’approximation et renvoie à l’affleurement des pensées du personnage qui explore le paysage. Plus loin, on constate un basculement du récit assumé par le locuteur-narrateur vers le rapport direct de paroles prononcées : « sous l’enseigne qu’on ne voit que si on s’arrête, a-t-on expliqué à Claude il y a un moment ». Ce passage de discours direct annonce un autre passage de rapport direct des pensées du personnage, sous forme de monologue intérieur : « une redondance se dit Claude, d’autant plus que la mer est loin d’ici, là et là derrière les montagnes » ; on notera les répétitions et l’adverbe « ici », qui renvoie au présent de la situation d’énonciation.

L’« îlot textuel » Un phénomène remarquable, dans ce contexte, c’est celui de l’« îlot textuel » selon Jacqueline Authier-Revuz17, qui constitue lui-même une figure linguistique du mixte. Il s’agit, dans ce cas, de parler avec les mots de l’Autre ou les mots d’ailleurs, qui résistent à toutes les opérations de reformulation-traduction et sont donnés à voir dans leur littéralité. Ces emprunts sont signalés généralement par des guillemets ou des italiques – généralement, mais pas toujours, comme on le constate ici : Parfois, quand je me retrouve dans le verger, dans l’orto, et que j’y asperge les vignes, pareil à un Martien à cause du réservoir de sulfurage sur mon dos, j’entends la voix de ma mère qui m’appelle parce que le dîner est prêt ou que je dois encore faire mes devoirs scolaires ou qu’il faut aller chercher grand-père Claudio dans

une des cantines de San Demetrio. (p. 22) Il sera chanteur d’opéra ou musicien celui-là, ne cesse de dire prémonitoirement la mère Chiaramonte, tandis que son mari jure que porca madonna et Dio cane, un musicien ça ne nourrit personne, et que ce dont ils ont besoin, c’est d’un vrai métier, Emilio et Piero. (p. 77) L’absence de guillemets peut symboliser le degré d’interpénétration des idiomes, que le sujet arrive à s’approprier jusqu’à un certain point et à intégrer dans une synthèse originale. Cette impression est renforcée par l’homogénéisation syntaxique et énonciative à travers la construction indirecte – « … son mari jure que porca madonna et Dio cane, un musicien ça ne nourrit personne » –, par l’opération énonciative d’accom­modation à la situation d’énonciation du locuteur-rapporteur, qui fait en même temps jaillir l’« îlot textuel » et le met en relief. La multiplication de bribes de discours direct signi­fierait, quant à elle, une rupture au plan sémiotique. Dira-t-on que le bilinguisme ou le multilinguisme exploite alors le continuum entre deux des pôles décrits par Uriel Weinreich18, celui du bilinguisme ou multilinguisme « subordonné », auquel les dires du personnage ne s’identifient plus, et celui du bilinguisme ou multilinguisme « coordonné », qu’ils ne rejoignent pas encore ? En effet, il ne s’agit ni d’une langue en voie d’acquisition, encore balbutiante, ni, à l’opposé, de la mobilisation, en fonction des besoins, de deux ou plusieurs réseaux différents parfaitement étanches. Pour Portante, le réservoir linguistique de l’immigré est lui-même doté d’une épaisseur, qui ferait pencher du côté d’un multilinguisme de type « composé » : un seul signifié ou contenu correspond-il alors à des sig­nifiants appartenant à des langues diffé­rentes, qui entrent en résonance les uns avec les autres ? On dira, plus simplement, que les langues d’un même répertoire, d’une même compétence linguistique, sont nécessairement co-présentes, avec des modes d’existence différents – concurrentes même, le feuilleté des paliers superposés conférant non seulement une dynamique parti-

17 AUTHIER-REVUZ, Jacqueline, « Remarques sur la catégorie de l’“îlot textuel“ », Cahiers du français contemporain,

3, 1996, p. 91-115.

18 WEINREICH, Uriel, Languages in Contact. Findings and Problems, New York, Publications of the Linguistic Circle of

New York, 1, 1953. Le type « subordonné » caractérise les situations où la langue maternelle est bien acquise alors que l’autre langue est en voie d’acquisition. Ervin et Osgood reprennent la distinction entre les types coordonné et composé en insistant sur le fait que le type composé correspond assez bien au cas de l’apprentissage scolaire d’une deuxième langue, alors que le type coordonné suppose l’expérience de deux cultures et donc la distinction entre deux codes ; « Second language learning and bilingualism », Journal of Abnormal Social Psychology, Suppl. 49, 1954, p. 139-146.

85


Terres Rouges

Une approche sémio-linguistique de La mémoire de la baleine de Jean Portante

culière, mais une profondeur indéniable, celle du vécu. C’est ce que l’auteur suggère dans « L’étrange langue » : Le multilinguisme […] est un leurre. […] dès que nous nous exprimons dans une autre langue que la maternelle, dans la langue de l’Autre, nous le faisons avec le poumon de la nôtre. Je peux parler trente-six langues différentes, dans toutes dort l’effaçonnement. Et plus je parle de langues, plus le jeu de l’effaçonnement se complique. Tout se passe un peu comme si chaque langue était le silence de l’autre. Et parmi tous les silences, c’est celui de la langue maternelle qui est le plus tonitruant. Elle a beau s’être glissée en clandestine dans mon écrit, c’est elle qui poumonne en lui – si vous me permettez ce néologisme – et fait que dans ce que j’écris vit ce que je suis. (p. 229)

Conclusion Au terme de ces explorations, dira-t-on que le métissage reste un idéal ? L’expérience de la littérature d’immigration serait-elle autrement douloureuse, de l’ordre, dans le meilleur des cas, de la transculturation ? L’écriture migrante se-

86

rait-elle à jamais parcourue de tensions, tendant vers la construction moins d’un « tiers espace » que d’un « hors-espace », happée même par la réalité du « non lieu » ? C’est là ce que suggère un extrait de l’ouvrage Le travail du poumon, qui reprend la métaphore de la baleine : A-T-ELLE AGI PAR ÉTOURDERIE ? Ne devait-elle pas savoir qu’en sauvant en elle la pompe de la respiration terrestre elle se condamnerait à l’exil éternel ? Que jamais elle ne serait poisson parmi les poissons, tout comme elle n’est déjà plus citoyenne de terre ferme, tant sa traduction est allée trop loin ? La voilà, arrêtant net, à mi-chemin, son destin, figée dans une mer de personne, engoncée dans la camisole de force d’un « ni ni », ni poisson ni être terrestre, prisonnière d’une terre qui s’étend du « ne pas encore » au « ne déjà plus ». Comme ma langue. (Jean Portante, Le travail du poumon, Bordeaux, Le Castor Astral, 2007, p. 141)


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

Musik im Land der Roten Erde Damien Sagrillo

Im Schlepptau der industriellen Entwicklung konnte in der Südregion Luxemburgs eine musikalische Tradition gedeihen, die, wie ein Schmelztiegel, die Assimilation nicht-luxemburgischer mit luxemburgischen Einwohnern vorantrieb. Die Entfaltung der Musikkultur wäre im Land der Roten Erde ohne den Faktor Einwanderung wohl anders verlaufen. Musik als Dreh- und Angelpunkt für Integration hin zu einer gemeinsamen kulturellen Identität ist aus heutiger Sicht eine Realität, die wohl nur hier werden konnte. Sie ist aber auch nur ein Aspekt eines Ganzen. Mit diesem Hintergedanken werden wir in der Folge den Musikbetrieb im Land der Roten Erde von der soziologischen, der pädagogischen und der kulturellen Seite beleuchten. Zur Sprache werden Institutionen, Ausbildungsstätten, Laienmusikvereine, Festivals und Musikerbiographien kommen, die das musika-­ lische Leben in diesem Teil des Großherzogtums prägten und auch noch weiter prägen.

Die Musikausbildung im Land der roten Erde Die Dichte musikalischer Ausbildungsstätten ist im bevölkerungsreichsten Kanton Esch überproportional hoch. Immerhin existieren hier fünf kommunale Musikschulen: das Konservatorium in Esch und die Musikschulen in Düdelingen, in Differdingen, in Petingen und in Niederkerschen. (Im übrigen Land existieren lediglich weitere sechs Musikschulen in kommunaler Trägerschaft.) Daneben bieten etliche Kommunen, wie Rümelingen und Monnerich, Musikkurse in Zusammenarbeit mit dem Laienmusikverband UGDA an.

Das Konservatorium in Esch Die Gründung des Escher Konservatoriums1 war zunächst mit erheblichen Startschwierigkeiten verbunden. Zwei Escher Musikvereine, die

Chorale Uelzecht und der Cercle symphonique, nicht aber die damals schon existierende und heute noch hochangesehene Harmonie Municipale, wagten im Jahre 1913 eine erste Initiative, die dazu führte, dass die Notwendigkeit einer Musikschule bei den verantwortlichen Politikern erkannt wurde. Die mit dem Projekt verbundenen Kosten wurden allerdings als zu hoch angesehen, und nach langen Diskussionen wurde das Vorhaben von den zuständigen Instanzen im Jahre 1920 definitiv ad acta gelegt. Es gilt zu bedenken, dass die Bevölkerungszahl von Esch zu dieser Zeit bereits sehr hoch war und dass das Errichten einer musikalischen Bildungsanstalt sich daher zwingend anbot. Im Jahre 1923 schlossen sich wieder einige Escher Vereine zusammen und starteten eine neue Initiative. Diesmal waren es vier an der Zahl und diesmal war ihnen das Glück hold. Die vier Vereine bildeten zunächst eine private Interessengemeinschaft, die sich um die Organisation von Musikkursen in Esch bemühte. Nach nur zwei Jahren Arbeit waren bereits 500 Schüler eingeschrieben. Finanzielle Beihilfen kamen von privaten Geldgebern, wie der ARBED aber auch von der Gemeinde und vom Staat. Im Jahre 1926 entschloss sich dann die Gemeindeverwaltung, ihre Verantwortung zu übernehmen und die Musikkurse in einer städtischen Musikschule zu organisieren. Zum ersten Direktor wurde Alfred Kowalsky (1879-1943) (s. u.) berufen. Das Fächerangebot entsprach in den großen Linien dem gängigen Muster der Zeit: musikalische Grundausbildung, Sprech- und Gesangerziehung, Chorgesang, Instrumentalerziehung und Orchesterklasse. Jedoch war es auf die Interessen der anfänglichen Trägerorgani­sationen zugeschnitten. Die Ausbildung war anfangs auf nur elf Lehrkräfte verteilt. In den letzten Jahren haben sich die Lehrerzahl bei knapp 60 und die Schülerzahl bei ungfähr 1000 eingependelt. Im Jahre 1969 wurde die Escher Musikschule durch Gemeinderatsbeschluss in den Rang eines

1 Vgl. hierzu: REITZ, Jean, Le Conservatoire de Musique de la Ville d’Esch-sur-Alzette. Als pdf-Dokument auf der

Internetseite: http://www.villeesch.lu/esch/Pages/sitemenu/07%20culture/conservatoire.aspx (07/03/2009).

87


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

Konservatoriums erhoben. Heute ist die Institution mit ungefähr tausend Schülern – nach Luxemburg-Stadt und Ettelbrück - die drittgrößte ihrer Art im Großherzogtum. Nichtsdestotrotz hat sie sich zu einer musikalischen Hochburg entwickelt, die das Musik­leben in der ganzen Region befruchtet. Das hohe künstlerisch-pädagogische Niveau des Konservatoriums lässt sich aber wahrscheinlich auch dadurch erklären, dass in seiner Nachbarschaft Musikschulen existieren, von denen die talentiertesten Schüler nach Esch übersiedeln, um dort ihre Ausbildung fortzusetzen und zu verfeinern. Dabei darf aber keinesfalls übersehen werden, dass auch in Esch eine Musikausbildung von Grund auf möglich ist. Vor der eigentlichen musikalischen Grundausbildung, den Solfège-Jahren 1 - 3 wird ein musikalischer Kindergarten, die sog. Initiation à la musique angeboten. Alljährlich verleiht das Escher Konservatorium um die zwanzig Prix Supérieurs, den höchsten derzeit in Luxemburg möglichen Abschluss, der allerdings kein akademischer ist. Das ist angesichts der Schülerzahl ein eindrucksvolles Kontingent, welches vom Konservatorium der Stadt Luxemburg zwar übertroffen wird, aber bei mehr als doppelt so vielen Schülern. Zudem beginnen jedes Jahr um die zehn bis 15 Schulabgänger ein Musikstudium an einer ausländischen universitären Musikausbildungsstätte. Waren zu Beginn der Musikschule in den zwanziger Jahren die Streichinstrumente am beliebtesten und kamen auch ausschließlich die Lehrer von Streichinstrumenten in den Genuss einer Festanstellung, so hat sich das Bild heute grundlegend gewandelt. Zum Aushängeschild sind ohne Zweifel die Blechbläser­klassen und die nach englischer Tradition zusammengesetzte Brass Band des Konservatoriums geworden. Sie wurde vom heutigen Direktor Fred Harles im Jahre 1973 gegründet und geleitet. Mit vielbeachteten Konzerten im In- und Ausland macht sie seitdem auf sich aufmerksam. Aus ihren Reihen kommen eine Reihe von Berufsmusikern und Dirigenten von luxemburgischen Musikvereinen. Die Sichtbarkeit des Konservatoriums im Musikleben von Esch beschränkt sich allerdings nicht nur auf Konzert- und Wettbewerbsauftritte der Brass Band. Dabei handelt es sich sicherlich um die herausragendsten. Nein, es existieren

weitere Schülerensembles, die zumeist regional in Erscheinung treten. Erwähnenswert sind in diesem Zusammenhang das Sinfonieorchester und das Harmonieorchester des Konservatoriums. Daneben gibt es ein nicht nur Schülern vorbehaltenes Vokalensemble, das aber, wie viele Chöre Luxemburgs, mit Mitgliederproblemen zu kämpfen hat. Weitere Schülerensembles erfüllen rein pädagogische Aufgaben und treten im Rahmen schulischer Projekte, z. B. bei Klassenvorspielen und Vorspielen zu bestimmten Anlässen auf. Fortgeschrittene Schüler und Laureaten musizieren regelmäßig zur Umrahmung von regionalen Festlichkeiten. Schließlich ist das aus Lehrkräften zusammengesetzte Jazzensemble Crazy Eight erwähnenswert. Die pädagogische Arbeit trägt ihre Früchte in manchen, nicht aber in allen Laienmusikvereinen der Region, so z. B. in der Harmonie Municipale aus Esch und in der Harmonie Zolver.

Die Musikschulen im Süden Luxemburgs Die Musikschulen sind im Rang den drei Konser­ vatorien nachgeordnet. Neben der Gemeinde Esch betreiben die Gemeinden Düdelingen (1946), Niederkerschen (1965) und Petingen (1968) und seit geraumer Zeit auch Differdingen kommunale Musikschulen. Im Gegensatz zum Konservatorium in Esch werden hier nur die unteren Ausbildungszyklen angeboten. Außerdem organisieren die Gemeinden Kayl, Monnerich und Rümelingen Musikkurse in Zusammenarbeit mit dem Musikverband UGDA. Die Musikschule in Düdelingen wurde gleich nach dem Zweiten Weltkrieg im Jahre 1946 auf Vorschlag der lokalen Musikvereine und Chöre gegründet. Dies war in Esch zu Beginn der zwanziger Jahre nicht anders. Der Bedarf an kultureller Betätigung und an sozialem Miteinander nach den Kriegsjahren war groß. Zunächst wurden nur Kurse in solchen Instrumenten angeboten, die in den Musikvereinen zur Anwendung kamen, sowie Gesangkurse, die den Chorgesellschaften zugute kommen sollten. Ab 1951 kamen dann Klavier und Streich­ instrumente hinzu. Die Schülerzahl ist in sechzig Jahren von 150 auf 830 angewachsen.2 Im gleichen Jahr, 1946, wurde auch in Petingen die Idee geboren, eine Musikschule zu

2 Vgl. hierzu: Ville de Dudelange, Enseignement, Ecole de Musique. Auf der Internetseite http://www.dudelange.lu/

Enseignement/Ecole+de+Musique.print (07/03/2009).

88


Terres Rouges

gründen. Wie in Düdelingen stand die Idee der Ausbildung des musikalischen Nachwuchses dabei Pate.3 Doch wegen Mangels an Schülern und Meinungsverschiedenheiten zwischen den musikalischen Vereinen wurde das Projekt zunächst auf Eis gelegt. Erst im Jahre 1968 wurde das Projekt Realität. Seither wuchs auch hier die Schülerzahl beständig an, und das Fächerangebot wurde erweitert.

Musikgesellschaften und Chorvereinigungen im Land der Roten Erde Laienmusikvereinigungen entstehen traditionsgemäß dort, wo der gesellschaftliche und der industriell-ökonomische Rahmen dies begünstigen. Dies war in Luxemburg zunächst in Gegenden fernab von Esch-Alzette der Fall. In den heute u. a. von Touristen aufgesuchten Orten Wiltz, Grevenmacher, Esch-Sauer usw. entstanden die ersten Musikvereine in der Zeitspanne zwischen Ende des 18. und Mitte des 19. Jahrhunderts. Im benachbarten Saarland sind die ersten Musikvereine schon etwas früher in den dortigen Bergbaugebieten entstanden, haben sich allerdings mit dem Niedergang dieses Indus­ triezweigs z. T. wieder zurückgebildet oder sind ganz verschwunden.4 Ebenso sind im Land der Roten Erde die musikalischen Laienvereinigungen mit der Industrie gewachsen; sie haben sich aber dank materieller Unterstützung der öffentlichen Hand bis heute - trotz Mitgliederschwund - halten können. Dass sich die kulturellen Vereinigungen in der Blütezeit der industriellen Entwicklung zudem auf die Unterstützung der Konzerne verlassen konnten, braucht nicht weiter erwähnt zu werden, zumal ja dann auch im Interesse der Stahlindustrie musiziert wurde. Mit der Stahlkrise und dem damit verbundenen industriellen Wandel, der seit den siebziger Jahren des vorigen Jahrhunderts im Süden des Großherzogtums stattgefunden hat, ging auch ein kultureller Wandel einher, der dazu führte, dass die glorreiche, auf viele Mitglieder aufbauende Existenz mancher Musikgesell-

Musik im Land der Roten Erde

schaften früherer Jahrzehnte ein abruptes Ende fand. Viele Vereine sahen ihre Mitgliederzahl rundweg dezimiert. Die Harmonie Municipale aus Differdingen, die unter der Leitung von Asca Rampini (s. u.) von 1965 bis 1980 zu einem national wie international anerkannten Harmonie­ orchester aufgeblüht war, hat sich heute zu einer mittelmäßigen Formation zurückentwickelt, in der wenige Idealisten bemüht sind, dem Verein eine Zukunft zu sichern. Sicherlich ist ein Grund dafür, dass die Gemeinde Differdingen in Oberkorn und in Niederkorn zwei weitere Musikgesellschaften unterhält, aber auch, dass Differ­ dingen eben nicht das dem wirtschaftlichen Umschwung trotzende kulturelle Zentrum der Südregion Luxemburgs ist. Wiederum andere Gesellschaften, wie die Harmonie Municipale aus Esch oder die Harmonie Municipale aus Düdelingen, überlebten diesen Einschnitt relativ unbeschadet und andere, wie die Harmonie aus Zolver, blühten neu auf. Die Gesangvereine bilden neben den Musikvereinen einen zweiten Pfeiler der Laienmusik in Luxemburg. Wie in vielen Regionen des Großherzogtums leiden die Chöre augenblicklich unter Mitgliederschwund. Obschon überwiegend als Männerchöre gegründet, drehen heute hauptsächlich die Männer den Chören massiv den Rücken zu, was zu einem Ungleichgewicht der Stimmen und zu einem verfälschten Chorklang führt. Unter den vielen Chören aus dem Land der Roten Erde wollen wir hauptsächlich zwei herausgreifen: Die Escher Chorale Municipale Uelzecht wurde im Jahre 1895 als Männerchor gegründet und später zu einem gemischten Chor ausgebaut. Sie war traditionell ein mitgliederstarker Chor, um die hundert Sänger zählend, und kann, wie fast kein anderer Chor im Lande, auf eine große Vergangenheit mit erfolgreichen Produktionen zurückblicken. Auftritte mit dem früheren Rundfunkorchester von RTL, Aufführungen bedeutender Werke der Musikliteratur, Konzertreisen ins Ausland und das Wirken bekannter und langjähriger Dirigenten wie Louis Petit (1920-1946) (s. u.) und Pierre Cao (1961-1975) (s. u.) haben sie geprägt.5

3 Vgl. hierzu: KEISER, Léon, Musikschule Petingen. In: Harmonie Municipale Pétange (Hg.), 1909-1984. 75 Joer Peitenger

Musek, Pétange, 1984, ohne Seitenangabe.

4 Vgl. hierzu: MAHLING, Christoph-Hellmut, Beiträge zur Entwicklung der Werkschöre und Werkskapellen im

Saarländischen Industriegebiet. In: STEEGMANN Monica (Hg.), Musik und Industrie. Beiträge zur Entwicklung der Werkschöre und Werksorchester (= Studien zur Musikgeschichte des 19. Jahrhunderts 54), Regensburg 1978, S. 160f. 5 Vgl. hierzu: Chorale Municipale Uelzecht (Hg.), Uelzecht. Chorale Municipale Esch-sur-Alzette, Esch-sur-Alzette 1995.

89


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

Ein weiterer Traditionsverein im Süden Luxemburgs ist die Chorale Municipale Sängerfreed aus Bettemburg. Wie die Escher Uelzecht bestand sie von 1920 an zunächst als Männerchor, nach dem Zweiten Weltkrieg wurden auch Frauen aufgenommen. Die Chorale Sängerfreed konnte den Mitgliederschwund relativ unbeschadet überstehen und ist heute immer noch ein mitgliederstarker Verein. Allerdings macht sich auch hier das Ungleichgewicht zwischen Frauen- und Männerstimmen bemerkbar. Der aus Diekirch stammende Musiker und Komponist Jos Kinzé drückte ihr seinen Stempel auf. Er war von 1945-1993 (!) mit zwei mehrjährigen Unterbrechungen ihr künstle­rischer Leiter.6

Festivals In jüngster Vergangenheit haben sich Festivals als Surrogat einer ruhmvollen Vereinsvergangenheit etabliert. Oft sind es ehemalige Verantwortliche dieser Vereine, die sich um eine musikalisch-kulturelle Weiterentwicklung ihrer Heimatregion bemühen.

Diffwinds7 Dies ist der Fall beim Diffwinds-Festival, um das sich seit 1996 Francis Goergen, seit jeher eine der treibenden Kräfte der Differdinger Harmonie Municipale, verdient macht. Das im Zweijahresrhythmus im Juli in Differdingen organisierte Festival richtet sich an Jugendbläser­ ensembles in den verschiedensten Formationen, aber hauptsächlich an Harmonieorchester mit sinfonischer Bläsermusik. Die Konzerte finden vor einer Jury statt, ohne dass es sich dabei aber um einen Musikwettbewerb mit Wertungsspielen handelt. Während des Festivals treffen sich um die 60 junge Musiker in einem gemeinsamen Workshop-Orchester und erarbeiten u. a. ein speziell zu dieser Gelegenheit in Auftrag gegebenes Werk, welches dann im Rahmen des Festivals zur Uraufführung gelangt. Im Jahr 2008 stand ein Werk aus der Feder von Roland Wiltgen (s. u.) im Mittelpunkt.

Das Orgelfestival in Düdelingen8 Beim Neubau der Düdelinger Pfarrkirche im neogotischen Stil im Jahr 1912 wurde die Orgel­bauerfamilie Georg und Eduard Stahlhuth aus Aachen mit dem Bau der Orgel beauftragt. Stahlhuthorgeln fußten auf einer französisch-angelsächsischen Tradition. Zu ihrem Berater gehörte der elsässische Universalgelehrte, Friedensnobelpreisträger, Arzt, Organist und u. a. Autor der Biographie Johann Sebastian Bachs, Albert Schweitzer (18751965). Ihre Akzeptanz im deutschsprachigen Raum war begrenzt und auch in unseren Breiten besitzt das Instrument Seltenheitswert. Im Jahr 1962 wurde die Orgel den damaligen Gepflogenheiten „angepasst“, eine Anpassung, die ihr jedoch nicht gut tun sollte. Nachdem sie am Ende des vorigen Jahrhunderts fast nicht mehr spielbar war, wurde sie von der Orgelbaufirma Thomas Jann restauriert und zu einem guten Teil wieder in ihren Originalzustand zurückversetzt, ohne jedoch dabei auf nötige technische Neuerungen zu verzichten. So bekam sie z. B. eine MIDI-Schnittstelle. Seit ihrer Restaurierung in den Jahren 2001/2002 wurde ein Festival ins Leben gerufen, welches die Orgel der Düdelinger Pfarrkirche zu einem Anziehungspunkt für Solisten nationalen und internationalen Ranges gemacht hat. In regelmäßigen Abständen finden seither Orgelkonzerte bzw. Konzerte mit Orgelbegleitung statt. Eine Reihe von CD-Publikationen zeugen vom Erfolg dieses Festivals.

Das Festival Terres Rouges9 u.a.m. Alljährlich im Spätsommer findet in Esch das Festival Terres Rouges statt. Es handelt sich hierbei um ein Open Air Festival, das sich hauptsächlich, aber nicht nur an die junge Generation richtet. Bei diesem Ereignis werden, neben anderen kulturellen Darbietungen, auch Konzerte organisiert. Traditionell treten dabei die bekanntesten luxemburgischen Musikgruppen auf. Aber es werden auch ausländische Größen der modernen Musikszene engagiert.

6 Vgl. hierzu: Chorale Municipale Sängerfreed. Auf der Internetseite http://www.chorale-bettembourg.com (07/03/2009). 7 Vgl. hierzu: Diffwinds Festival. Auf der Internetseite http://www.diffwinds.lu/ (07/03/2009).

8 Vgl. hierzu: Conseil de la fabrique d’Eglise de la paroisse / Amis de l’orgue Saint-Martin, (Hg.), Die Düdelinger Kirche

und ihre Stahlhuth-Orgel, Luxembourg 2002; www.orgue-dudelange.lu. Auf der Internetseite http://www.orgue-dudelange. lu/Pages/MainFrame.htm (09/03/2009). 9 Vgl. hierzu: Festival Terres Rouges 2008. Auf der Internetseite http://www.festival-terresrouges.lu (09/03/2009).

90


Terres Rouges

Mit dem Festival Touch of Noir geht Düdelingen den Weg kultureller Interdisziplinarität, indem es Musik mit darstellender Kunst in Verbindung bringt. Musik aus Schottland und aus Irland hat die Kontinentaleuropäer schon immer fasziniert. So wurden zum Beispiel zu Beginn des 19. Jahrhunderts große Namen wie Haydn, Beethoven und Weber mit keltischer Musik in Verbindung gebracht, und dies weil sie Hunderte von schottischen und irischen Volksliedern arrangierten. Das exotisch-rustikale Miteinander von Musik und Tanz hat keltische Musik seit einigen Jahren auf die Ebene einer Massenkultur gehoben, die hierzulande auch nicht fehlen darf. In Düdelingen erfreut sich seit 1998 das Festival Zeltic immer größerer Beliebtheit. Wir wollen an dieser Stelle die Besprechung der Festivals nicht weiter fortsetzen. Zu nennen wären aber noch der seit dem Jahre 2004 organisierte Differdinger Blues Express, Rock a Field in Roeser etc. Als Modephänomene unserer Zeit, gepaart mit einem stets wachsenden Freizeit- und Kulturangebot und – bedarf, werden Festivals in der Zukunft nicht weniger werden. Hier wird Musik als Konsumgut den jungen und jüngeren Generationen vermittelt. Sie sind aber gleichzeitig Betätigungs- und Ausgleichsmedium für die Ausführenden oder, im Idealfall, Sprungbrett für eine weitere Karriere.

Institutionen Die Kulturfabrik in Esch10 Der als Kulturzentrum umgemodelte Schlachthof der Stadt Esch besteht in seiner ursprüng­ lichen Bestimmung seit 1885 und wurde wegen des beträchtlichen Bevölkerungszuwachses Eschs zu Beginn des 20. Jahrhunderts zu einem 4000 Quadratmeter und zehn Gebäude umfassenden Komplex ausgebaut, bis er im Jahr 1979 seinen Betrieb einstellte und in ein neues Gebäude umzog. Im Jahr 1980 führte zunächst ein Sekundarlehrer des Escher Jungenlyzeums mit seinen Schülern in einem ehemaligen Gefrierraum ein Theaterstück auf. In den Jahren 1982/83 stießen weitere Künstler dazu, und die Idee wurde geboren, die originelle Architektur zu bewahren und sich die vielen Gebäude, die einer jungen – nicht nur musizierenden -

Musik im Land der Roten Erde

Künstlergeneration Ort für schöpferische Inspiration waren, zueigen zu machen. Raymond Kleins Zitat vermittelt uns mit poetischer Anmut einen Eindruck über die Ausstrahlung, die das alte Bauwerk damals umgab: Auch ich verspüre die Lust, selber Neues zu schaffen, zu gestalten. Ich sage mir, daß diese sonderbare Atmosphäre es ausmacht, dieses Gebäude, das halb verfallen ist, aber auch halb unfertig, wartend, zum Träumen und Schaffen einladend.11 Die Nutzung des ehemaligen Schlachthofs geschah zunächst in Form einer quasi als illegal zu bewertenden Art von Hausbesetzung, denn der Eigentümer, die Stadt Esch, plante wegen ihrer prekären Haushaltslage, das Areal zu veräußern. Die neue Ära des alten Schlachthofs begann in einer Art Privatinitiative gemischt mit Zivilcourage und Volkszorn und mündete in eine Vereinigung ohne Gewinnzweck, der Kulturfabrik. Die spektakulären Aktionen am Rande der Legalität, wie Blockade von Straßen und des Escher Stadttheaters, fruchteten allmählich und die Unterstützung vieler Künstler und Persönlichkeiten bewirkte bei den politisch Verantwortlichen ein Umdenken dahingehend, dass aus dem alten Gebäudekomplex eine Begegnungsstätte für Kultur nicht nur, aber auch für die jüngere Generation werden sollte. Die Trägerschaft wurde von der Stadt Esch in private Hand übergeben. Zu Beginn des Jahres 1997 wurde das Escher Schlachthaus als Kulturzentrum anerkannt und mit Geldern des Staates, der Gemeinde Esch und eines Hilfsfonds der Europäischen Union renoviert und im Jahre 1998 seiner neuen Bestimmung übergeben. Heute halten hauseigene Gruppen einen regelmäßigen Konzertbetrieb aufrecht. Ebenso stehen Theateraufführungen und Ausstellungen auf der Tagesordnung. Neben einem größeren und einem kleineren Konzertsaal stellt die KuFa mehrere Proberäume zur Verfügung. Hier hat schon so manche künstlerische Karriere ihre Initialzündung erhalten. Das sog. Ratelach – die Bezeichnung stammt von einem Escher Lokalpolitiker aus der Zeit während der über den Verkauf des früheren Schlachthofs nachgedacht

10 Vgl. hierzu: Centre Culturel Kulturfabrik. Auf der Internetseite http://www.kulturfabrik.lu (09/03/2009). 11 KLEIN, Raymond, Es regnet hinein ins Escher Schluechthaus. In: Forum 123 (1990), S. 57.

91


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

wurde – ist heute zu einer gediegenen Begegnungsstätte zwischen Künstlern und deren Publikum in einem rauch- und alkoholfreien Bereich mutiert. Hausbesetzung und Demonstration für den Erhalt einer über mehrere Jahre offiziös betriebenen Institution werden zum späten Symbol einer 68er-Bewegung in einer Region mit gewachsenem Kulturbedarf. Anfangs von der öffentlichen Hand unbeachtet, ja sogar bekämpft, wird die Nachfrage nach Kultur, wie sie sich neuerdings auch in den oben beschriebenen Festivals äußert, dann als Realität anerkannt, gefördert und mit der Errichtung der Rockhal auf eine institutionelle Ebene gehoben.

Die Rockhal auf Esch-Belval12 Durch die Gesetze vom 15. Mai 2003 und vom 26. Mai 2004 stimmte das Luxemburger Parlament dem Bau und dem Betrieb eines Centre de Musiques Amplifiées auf dem ehemaligen ARBED-Gelände in Esch-Belval zu und trug damit einer Entwicklung Rechnung, die nicht nur in der Kulturfabrik begann, sondern die bereits in den Jahren zuvor in der Organisation von Großereignissen auf luxemburgischem Boden, wie z. B. Rockkonzerten, ihren Ursprung genommen hatte. Aufgrund fehlender Einrichtungen mussten diese im Freien und z. T. oft unter widrigen meteorologischen Verhältnissen, z. B. auf Krakelshaf zwischen Bettemburg und Düdelingen oder in nicht hierfür vorgesehenen Einrichtungen, wie z. B. in zweckentfremdeten Ausstellungshallen stattfinden. Den Gesetzen von 2003 und 2004 ging ein Vorhaben des Jahres 1999 voraus, das die ehemaligen Gebläsehallen von ARBED nutzen wollte, ein Plan, der aber nicht weiter verfolgt werden sollte. Die Rockhal erlegt sich eine Mission in vier Punkten auf: 1. Sie ist Organisator großer musikalischer Veranstaltungen jeglicher Ausrichtung. Es wird ein heterogenes Publikum anvisiert. 2. Sie soll ein Ort sein, wo künstlerische Projekte mit professionellem Anspruch, aber auch Projekte aus dem Amateurbereich sich in Symbiose begegnen. Hier sieht sie sich mit der Kulturfabrik auf einer Linie.

3. Sie bietet Musikgruppen den geeigneten Raum zur Probenarbeit. In der KuFa ist das auch möglich, jedoch in einem kleineren Rahmen. 4. Sie stellt die notwendigen Einrichtungen zur musikalisch-kreativen Arbeit zur Verfügung, wie z. B. Aufführungsräumlichkeiten, Studios und Multimedia. Wie schon in der Kulturfabrik sind in der Rockhal zwei Räumlichkeiten für die verschiedensten Veranstaltungen vorgesehen. 1. Der große Saal – die Main Hall – bietet 6500 Steh- bzw. 2500 Sitzplätze. 2. Im kleinen Saal – der Club - stehen 1200 Steh- und 500 Sitzplätze zur Verfügung. Hier ist der Ort für kleinere musikalische Veranstaltungen mit luxemburgischen Musikgruppen oder Musikgruppen, die sich innovativer Projekte annehmen, die weniger Publikum anziehen.

Das Escher Theater Komplementär zu diesen beiden Zentren, die vor allem mit moderner Musik ein jüngeres Publikum ansprechen, steht das Escher Stadttheater als eine alteingesessene Kulturinstitution, neben reinen Theateraufführungen, hauptsächlich für Aufführungen von klassischer Musik und musikdramaturgischen Werken. Momentan (2009-2010) werden die technischen Installationen und die Bühne renoviert, und während dieser Zeit sind die Aktivitäten in ein Zelt am Boulevard Hubert Clement ausgelagert.

Das Kulturzentrum Opderschmelz und das CNA in Düdelingen13

Im hundertsten Jahr seiner Erhebung zur Stadt beschenkte sich Düdelingen im Jahr 2007 mit einem neuen Kulturzentrum selbst. Das neue Bauwerk beherbergt auch das Centre National de l’Audiovisuel. Wie viele Gemeinden in Luxemburg setzt es, dem Wunsch der luxemburgischen Regierung entsprechend, auf Dezentra­ lisierung des Kulturangebots. Dieses in den Siebzigern durch den damaligen Kulturminister Robert Krieps initiierte Vorhaben wurde erst zu Beginn des neuen Jahrhunderts Wirklichkeit. Die Dezentralisierung der Kultur, weg von der Stadt Luxemburg und z. T. auch von Esch, hat in vielen Teilen des Landes regionale Zentren her-

12 Vgl. hierzu: Memorial A-Nr. 101 (30. Juni 2004), Centre de Musiques Amplifiées, S. 1617-1620; Rockhal. Auf der

Internetseite http://www.rockhal.lu/fr/ (09/03/2009).

13 Vgl. hierzu: Opderschmelz. Auf der Internetseite http://www.opderschmelz.lu (9/3/2009); Memorial A-Nr. 120 (15. Juli

2004), Instituts Culturels de l’Etat, Centre National de l’Audiovisuel, S. 1802f.

92


Terres Rouges

vorgebracht, so z. B. in Marnach, in Ettelbrück und in Mersch. Im April 2008 wurde als vorläufig letztes das neue Konzert- und Konferenz­ zentrum Trifolion in Echternach eröffnet. Das Centre National de l’Audiovisuel ist eine dem Kulturministerium untergeordnete und seit dem Jahr 2007 im Zentrum Opderschmelz in Düdelingen untergebrachte behördliche Kultur­einrichtung. Anfangs war es in für die Ansprüche viel zu kleinen Räumlichkeiten im ehemaligen Pensionnat de la Doctrine Chrétienne beheimatet. Seine Bedeutung geht über das Regionale hinaus - das ist bei der Rockhal nicht anders. Die zentrale Mission des CNA ist die Archivierung und Restaurierung historischer Tondokumente, Filme und Photos, verbunden mit einer Öffentlichkeitsarbeit, die das Bewusstsein über nationales Ton- und Filmpatrimonium wecken, fördern und der wissenschaftlichen Forschung zugänglich machen soll. Neu erstellte kommerzielle Musikdokumente kommen dem CNA durch den Dépôt Légal automatisch zu und sichern auf diese Weise eine universelle bibliographische Aufnahme aller in Luxemburg erstellten Ton- und Bildträger. Des Weiteren werden hier sämtliche Tonaufnahmen des früheren Sinfonieorchesters von RTL aufbewahrt. Die Notwendigkeit einer mit Ton- und Filmarchivierung betrauten Institution wurde erst relativ spät erkannt und im Jahre 1989 in die Tat umgesetzt, genau neunzig Jahre nachdem die älteste Institution dieser Art, das berühmte Phonogrammarchiv in Wien, seine Arbeit aufgenommen hatte.

Das Land der Roten Erde und seine Musiker Neben dem vorausgehenden hauptsächlich institutionell ausgerichteten Bezug zur Musik im Land der Roten Erde wollen wir uns jetzt den dort wirkenden musizierenden Menschen zuwenden. Allerdings werden wir uns selektiv auf einige wenige Musiker beschränken müssen und deren Werk bzw. Wirken mehr im Detail erörtern. Bei unserer Auswahl gehen wir jedoch nicht beliebig vor, sondern wir richten diese nach der Frage aus, inwieweit Wirken und Werk im Zusammenhang mit dem Land der Roten Erde stehen. Andere werden wir am Rande kurz erwähnen. Damit soll aber keine qualitative Wertung ihrer Arbeit verbunden sein.

Musik im Land der Roten Erde

Matthias Thill (1880-1936) Das eben formulierte Auswahlkriterium trifft auf Matthias Thill nur z. T. zu. Sein Wirken ist nicht nur von Bedeutung für seine Geburtsstadt Esch, sondern für ganz Luxemburg. Der Primär­schullehrer Mathias Thill (1880-1936) ist die wohl am wenigsten bekannte, mit Musik in Verbindung zu bringende Persönlichkeit aus dem Land der Roten Erde. Thills Werk ist heute nahezu komplett in Vergessenheit geraten, auch unter Musikern und dennoch ist es, wie nahezu kein anderes, Beleg nationaler und regionaler kultureller Identität. Und so ist auch hier der Ort einer Würdigung. Matthias Thill war kein ausübender Musiker oder Musikpädagoge, sondern ein Volksliedsammler. Er begann seine Sammel­ tätigkeit im Jahre 1901 dort, wo er wohnte und seine erste Lehrerstelle inne hatte, nämlich in der Escher Gegend und er setzte sie in weiteren Gegenden Luxemburgs bis zu seinem Tode im Jahre 1936 fort. Die bedeutendste, am meisten ausgereifte und umfangreichste Sammlung luxemburgischer Volkslieder ist somit das Ergebnis eines Entstehungsprozesses von mehreren Jahrzehnten. Das Werk umfasst 306 Nummern. Hinzu kommt eine große Anzahl an Varianten. Der kulturelle und musikethnologische Wert übertrifft die bekannteren Sammlungen von Lafontaine (Dicks) - Die Luxemburger Volkslieder älterer Zeit, 1904 - und Kintzelé (Brouilli) - Aus der Ucht, 3 Bde., 1926-1935 bei Weitem. Thill ließ sich jedes einzelne Lied von einer Gewährsperson vorsingen und brachte es sogleich und in authentischer Weise zu Papier. Später gruppierte er die Lieder nach inhaltlichen und musikalischen Variantengruppen und nach übergeordneten inhaltlichen Kategorien. Matthias Thill konnte die Früchte seines aufopferungsvollen und mühsamen Lebenswerks jedoch nicht mehr ernten. Nach seinem Tode übertrug Thills Witwe den Feinschliff bis hin zur Veröffentlichung der Luxemburger Volksliedersammlung unter dem Namen Singendes Volk an einen Kollegen von Matthias Thill, Nicolas Pletschette aus Rümelingen. Abbildung 1 zeigt die regionale Verteilung der Aufzeichnungsregionen. Aus den Umkreisungen geht hervor, dass Thill nicht aus allen Regionen Luxemburgs Lieder zusammengetragen hatte, sondern lediglich an verschiedenen, ausgewählten Orten, hauptsächlich solchen, mit

93


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

denen er aufgrund seiner pädagogischen Tätigkeit verbunden war. Aus seinen Aufzeichnungen geht ebenfalls hervor, dass er von manchen Gewährsleuten bis zu zehn und mehr Lieder bezog. Für jedes Lied der Sammlung wird der Name der/des Gewährsfrau/mannes sowie Ort und Datum der Aufzeichnung angegeben. Hinzu kommen Literaturverweise.

mit folgenden luxemburgischen und nicht-luxemburgischen Quellen hat: 1. Spedener steht für: SPEDENER, Gregor, Die Bauernhochzeit in früheren Zeiten, Luxem- burg 1933, S. 55f. 2. E. = B. III steht für: ERK, Ludwig / BÖHME, Franz-Magnus, Deutscher Liederhort, 3 Bde, ND Wiesbaden 1988, Bd. 3, Lied Nr. 1541. 3. Gaßmann, Wiggert steht für: GAßMANN, Alfred Leonz, Das Volkslied im Luzerner Wiggertal, Basel 1906, 4. Pinck, Weisen III steht für: PINCK, Louis, Verklingende Weisen. Lothringer Volkslieder, 5 Bde., Metz/Kassel 1928ff, Bd. 3.

Abbildung 2 zeigt einen Ausschnitt aus Thills Sammlung. Mit Lit. A gibt Thill die luxemburgischen Varianten zum Lied an. Unter Lit. B sind die nicht-luxemburgischen Quellenverweise aufgeführt. In dem Beispiel handelt es sich um ein Lied, welches Berührungspunkte

Weiswampach

Ulfingen

82 km

Clerf

Wiltz

Kautenbach Burscheid Diekirch Ettelbruck Echternach

Bissen Redingen

Fels

Mersch

Wasserbillig Junglinster Grevenmacher

Capellen Strassen

Wormeldingen Luxemburg Remich

Petingen

Mondorf

Differdingen Esch/Alzette Düdelingen

54 km Abb.1 – Regionen der Sammeltätigkeit Thills, SAGRILLO, Damien, Melodiegestalten im luxemburgischen Volkslied, Bonn 1997, Bd. 1, S. 123.

94


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

Abb.2 – Ein luxemburgisches Volkslied aus Singendes Volk, THILL, Matthias, Singendes Volk, Esch/A., 1937 posth.:

95


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

Bei Singendes Volk ist die Hilfestellung des Deutschen Volksliedarchivs (DVA) in Freiburg im Breisgau und seines Leiters und Begründers John Meier zu erkennen. Die mit äußerster Sorgfalt verfasste Sammlung luxemburgischer Volkslieder hat Thill mit Hilfe der am DVA üblichen Standards angefertigt. So waren und sind die Verweise zu den Varianten aus anderen Regionen im DVA gängige Praxis. Der Umstand, dass der Germanist Meier hauptsächlich Textforschung betrieb, findet seinen Niederschlag in der Sammlung Thill, die in 14 textlichthematische Rubriken unterteilt ist. Den größten Raum nehmen die Liebeslieder ein. Dies ist für eine Volksliedersammlung nicht ungewöhnlich. Die relativ umfangreiche Rubrik historische, Kriegs- und Soldatenlieder ist auf den histo­ rischen Kontext Luxemburgs als Festungsstadt zurückzuführen. Der Text dieser Lieder spiegelt als volkskundlicher Zeuge der Vergangenheit die abwechslungsreiche Geschichte Luxemburgs als Zankapfel und Objekt der Begierde größerer europäischer Nationen wider. Den Anspruch einer nach den wissenschaftlichen Erkenntnissen der Zeit zusammengestellten Sammlung wird Thill in vieler Hinsicht gerecht. Die Quellenverweise sollen das Aufspüren von Varianten in Sammlungen überregionalen Charakters oder in Sammlungen anderer europäischer Regionen erleichtern. Thill gibt Verweise zu insgesamt 14 luxemburgischen und 37 ausländischen Quellen an. Am Ende seines Werkes erstellt er ein Verzeichnis von 23 nicht veröffentlichten Liedern und dies, „weil sie entweder allzu derb und beleidigend sind oder keine interessanten Eigentümlichkeiten gegenüber bereits anderswo abgedruckten Texten und Melodien aufweisen.“14 Singendes Volk liefert bei Weitem nicht nur Erkenntnisse einer musikalischen Kultur Luxemburgs, sondern ist auch ein hilfreicher Zeuge luxemburgischer Volkskunde, der luxemburgischen Sprache und des Sprachgebrauchs sowie nationaler und regionaler Geschichte aus der Sicht singender Menschen.

Asca Rampini (1931-1999) Der Name Asca Rampini ist eng verbunden mit der Geschichte der Harmonie Municipale aus Differdingen und mit jener der italienischen

Einwanderer in der Südregion Luxemburgs. Wie Matthias Thill ist Rampini nie Berufs­ musiker gewesen, sondern Stahlarbeiter bei Hadir - seit 1967 Arbed - in Differdingen. Er war das älteste von drei Kindern einer aus Italien eingewanderten Arbeiterfamilie und erblickte auf der „Sonnenseite Differdingens“ im Wangert das Licht der Welt. Hier im Wangert, wo die Sonne allerdings nicht so hell scheint wie in der italienischen Heimat, wie es Francis Goergen in einer Laudatio auf Rampini beschreibt,15 schufen sich viele Einwanderer eine neue Existenz in der Fremde und konnten trotzdem unter ihresgleichen bleiben. Schon Rampinis Vater verdiente durch körperliche Schwerstarbeit in der Erzgrube den Lebensunterhalt für sich und seine Familie. Wie viele italienische Einwanderer fand Asca Rampini den Weg zur Musik, als intellektueller Ausgleich für alltägliche manuelle Arbeit. Seine musikalische Begabung öffnete ihm viele Türen, doch bei Weitem nicht alle. Wären seine Wurzeln nicht mit dem sozia­ len Geflecht des Arbeitermilieus, in der zu dieser Zeit die Tätigkeit in der Stahlindustrie vom Vater auf den Sohn weitergegeben wurde, verwoben, so wäre ihm eine musikalische Berufs­ karriere sicher gewesen. Eigentlich wollte er Opernsänger werden. Für Rampini war es aber bereits ein Erfolg, sich an der Escher Musikschule bei Daniel Kater in Oboe einschreiben zu können. Bald stellte sich jedoch heraus, dass die musikalische Welt in Form einer Oboe für Rampini zu klein war. Neue Musikstile, wie Jazz und Swing schwappten von jenseits des Atlantiks nach Europa herüber und Rampini widmete sich weiteren Instrumenten mit einer Art an autodidaktischem Können, das nur musi­ kalisch Hochbegabten in die Wiege gelegt ist. Die Posaune wurde bald zu seinem bevorzugten Instrument und mit ihr fand er Eintritt in die in den fünfziger und zu Beginn der sechziger Jahre bekannten Luxemburger Orchester Jean Roderes und René de Bernardi, für die er auch diverse Arrangements schrieb. Im Jahre 1965 übernahm Rampini den Taktstock bei der Differ­ dinger Harmonie Municipale, nachdem im Vorjahr auf seine Initiative hin und unter seiner Leitung die Nachwuchsformation Harmonie Prince Guillaume gegründet wurde. Rampinis musikalische Begabung, sein organisatorisches

14 THILL, Matthias, Singendes Volk, Esch/A., 1937 posth., S. 637. 15 Vgl. hierzu: GOERGEN, Francis, le trait d’union 62 (2001), S. 3.

96


Terres Rouges

Geschick und seine zwischenmenschlichen Beziehungen trugen dazu bei, dass das Orchester in den 15 Jahren, in denen er die Verantwortung trug, sich an die Spitze der luxemburgischen Musikvereine spielte und auch international Anerkennung fand. Seine Persönlichkeit, die jedoch für viele an die eines raubeinigen Stahlarbeiters erinnerte, dessen Bemerkungen seine Mitmusiker hin und wieder düpierten und weniger talentierte Zeitgenossen schon einmal mit der Realität konfrontierten, taten dieser im luxemburgischen Blasmusikwesen einmaligen Symbiose zwischen Dirigent und Orchester keinen Abbruch. In den 15 Jahren seiner Tätigkeit gewann Rampini mit der HMD nicht nur Wertungs­spiele, sondern initiierte, aufgrund seiner Erfahrung in den Tanzorchestern Roderes und de Bernardi, mit den als Show-Music getauften Galakonzerten neue Wege, auf sein Publikum zuzugehen. Lange Zeit blieb er mit seinen auf Unterhaltung zielenden Konzerten in Luxemburg konkurrenzlos. Jahre später erst erkannte ein weiterer Musikverein aus dem Süden, dass diese neue Unterhaltungsform nicht nur dem Verein große Genugtuung bringt, sondern darüber hinaus auch noch als Publikumsmagnet die Kassen aufzufüllen vermag. Das alljährliche Nonstop-Konzert der Harmonie Municipale aus Bettemburg findet bis heute statt. Heute, im medialen Zeitalter ist das Publikum, was den Unterhaltungswert von Konzertveranstaltungen lokaler Musikvereine betrifft, anspruchsvoller ge­ worden und von den Vereinsverantwortlichen wird diesbezüglich mehr abverlangt als noch vor einigen Jahrzehnten. So ist ein Großteil der Musikgesellschaften in Luxemburg dazu übergegangen, ihr alljährliches Hauptkonzert mit Showeinlagen abwechslungsreicher zu gestalten. Was Rampini vor vierzig Jahren in die Wege leitete, ist gegenwärtig im Laienmusik­wesen Luxemburgs zur Selbstverständlichkeit geworden. Größere und musikalisch leistungsfähigere Musikgesellschaften wie z. B. die Escher Harmonie Municipale beschränken sich allerdings bis heute auf die klassische Konzertform. Rampini stand von 1965-1980 an der Spitze der Differdinger Musikgesellschaft. Aller­dings blieben ihm private Schicksalsschläge in dieser Zeit nicht erspart. Aber sein Abgang im Jahre 1980 ist nur z. T. darauf zurückzuführen. Er erkannte wohl eher die Zeichen der Zeit. In den siebziger Jahren begann im Land der Roten Erde

Musik im Land der Roten Erde

die Stahlkrise und führte zu dem bereits oben angesprochenen schmerzlichen Strukturwandel, der heute größtenteils überwunden ist. Parallel dazu wurden etliche Musikgesell­schaften und Chöre ihrer Existenzgrundlage beraubt. Rampinis kompositorisches Werk ist im Zusammenhang mit seiner Dirigententätigkeit zu sehen, d. h. es ist immer seinem Orchester zugeschnitten. Ein Teil davon sind Arrangements oder Adaptationen. Ein weiterer Teil hingegen sind Originalkompositionen. Einige davon wurden vom Wiener Musikverlag Kliment publiziert. Viele wurden speziell für die ShowKonzerte geschrieben. Weil es oft für eine bestimmte Idee nicht das richtige Werk gab, passte Rampini kurzerhand das zu komponierende Werk der Idee an. Nicht nur in Differdingen, sondern auch in anderen Ortschaften der Stahlregion des Südens integrierten sich italienische Einwanderer in örtlichen Musik- sowie in Sportvereinen und bildeten nicht selten deren Rückgrat. Der Inte­ grationswille der italienischen Bevölkerung auf der einen Seite und der Aufnahmewille der luxemburgischen Bevölkerung auf der anderen Seite sind beispielhaft für einen heute als erfolgreich anzusehenden und z. T. auch abgeschlossenen Prozess. Ich wage zu behaupten, dass die künstlerischen Impulse, die durch die Einwanderer von außen nach Luxemburg herein­getragen wurden, zu einem großen Teil dazu beigetragen haben.

Roland Wiltgen (*1957) Der aus Differdingen stammende Roland Wiltgen begann seine musikalische Ausbildung am Konservatorium in Esch, wechselte dann über ins Konservatorium nach Metz; anschliessend ging er an die Ecole Normale de Musique nach Paris und schloss sein Studium am renommierten Pariser Conservatoire National Supérieur de Musique in Tonsatz ab. Seit 1983, dem Jahr seiner Nominierung, unterrichtet er die mit musikalischem Tonsatz zusammen­ hängenden Fächer am Konservatorium in Esch. Der Komposition hat Wiltgen sich schon während seiner Studienzeit gewidmet.Wiltgens Œuvre umfasst bis zum heutigen Tag um die vierzig Werke: • Kammermusikwerke, • Werke für verschieden besetzte Ensembles, wie z. B. Luxembourg Sinfonietta... ,

97


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

• Klavier- und Orgelwerke, wie z. B. Les Lunes de Jupiter... , • Werke für Harmonieorchester, • Werke für Brass Band, • Werke für elektroakustische Tonträger, • Chorwerke • und ein Auftragswerk für Luxembourg 2007 namens Tri-Partite. Wiltgens Kompositionen im und über das Land der roten Erde Roland Wiltgen erweist seiner Heimat und seinen eigenen Wurzeln mit seiner Musik die Referenz. In seinem Werkverzeichnis sind das vor allem Red Earth für Brass Band (1995), die Trilogie Schmelz (1999-2001) und das Chorwerk D’Saelerbunn (2003).16 Red Earth Im Jahre 1993 wurde Wiltgen durch Les Amis du Brass Band du Conservatoire d’Esch/Alzette damit beauftragt, ein Werk für Brass Band zu komponieren. Die Gelegenheit dazu bot sich, weil Luxemburg als europäische Kulturhauptstadt des Jahres 1995 Austragungsort der alljährlich in einem anderen Land stattfindenden europäischen Brass-Band-Meisterschaften war. Roland Wiltgen komponierte mit Red Earth das Pflichtstück des Wettbewerbes. Für den Komponisten bot sich die Gelegenheit, bis dorthin nicht ausformulierte musikalische Ideen in ein formales Ganzes einzuarbeiten. Dabei musste er aber auf eine festgefügte Instrumentierung, auf stilistische Vorgaben und auf aus der Wettbewerbssituation gewachsene Traditionen Rücksicht nehmen. Die Großform von Red Earth lässt sich von der klassischen viersätzigen Sinfonie ableiten. Allerdings wurden die vier Sätze (schnell – langsam – mittelschnell – schnell) zu einer durchgehenden Komposition zusammengefügt. Dem ganzen Werk liegt ein Anfangsmotiv mit lediglich vier Tönen zugrunde. Der Komponist verwehrt sich gegen jegliche programmatische Aussage in seinem Werk, die auf eine Beschreibung der Natur und der Lebensund Arbeitsverhältnisse im Land der Roten Erde schließen lassen würde. Red Earth sei lediglich eine Referenz an die Heimat des Komponisten mit seinen Eisenminen, seinen Hüttenwerken und den dort arbeitenden Menschen.

Schmelz I-III In einem weiteren Werk von Roland Wiltgen ist das nicht viel anders. Das Werk Schmelz ist als Trilogie konzipiert, und die drei Sätze sind als mehr oder weniger lose zusammen­ hängende Teile zwischen 1999 und 2001 entstanden. Sie liegen vor in zwei Instrumentierungen, einer für Brass Band und einer für Harmonieorchester. Obwohl der Titel Schmelz einen klaren Bezug zu einem programmatischen Inhalt erahnen lässt, existiert ein solcher, laut Auskunft des Komponisten, nicht. Dennoch lässt die Werkbeschreibung, wie sie Wiltgen auf seiner Homepage veröffentlicht, zunächst an ein Programm denken:17 « Le temps va changer », disait-on en observant la fumée qui s’échappait du complexe Arbed Belval tourner à l’est. Je n’y ai jamais mis les pieds; c’était un endroit mystérieux, presque irréel, et pourtant si proche. Sa silhouette, parfois auréolée d’un nuage rougeâtre, ses bruits, ses rythmes et ses odeurs font partie de mes souvenirs d’enfance. « Les hauts fourneaux brûlent plus longtemps que les volcans », a dit quelqu’un; et pourtant: Les temps ont changé; beaucoup d’endroits sont redevenus calmes et déserts, et les sons de jadis ne nous parviennent que par bribes. Le promeneur nostalgique peut les entendre en pensant à cette étrange parenthèse de l’histoire du bassin minier. In der Musikgeschichte sorgte die Problematik im Zusammenhang mit der Programmmusik für viel Diskussionsstoff. Hauptsächlich ein Produkt der Romantik, wurde sie seit Ende des 19. Jahrhunderts thematisiert. Heute ist Programmmusik ein willkommenes, wenn auch viel strapaziertes Instrumentarium der Musik­pädagogik. Viele Komponisten – so auch Wiltgen – verschließen sich einer Werkinterpretation, die ihren Werken Außermusikalisches zugrunde legt. Das Umsetzen von Bildern in Musik, wie bei Bilder einer Ausstellung von Mussorgsky oder das Vertonen von vorab festgelegten Programmen, wie in der Alpensinfonie von Richard Strauss, die Außermusikalisches, wie Handlungen, Situationsbeschreibungen oder ganz allgemein Gedanken, Gefühle und Empfin-

16 Vgl. hierzu: Roland Wiltgen et sa musique. Auf der Internetseite http://www.homepages.lu/wroland (12/3/2009). 17 Vgl. hierzu: Textes, Schmelz. Auf der Internetseite http://www.homepages.lu/wroland/PAGE5.HTM#Red%20Earth

(09/03/2009).

98


Terres Rouges

dungen musikalisch zu umreißen vorgeben, sind Paradebeispiele, die immer wieder für die Idee der Programmmusik herhalten müssen. Doch es stellt sich die Frage, inwieweit Musik Außermusikalisches beschreiben kann. Ist Programmmusik nicht eher eine Illusion? Und wird sie nicht, sei es bewusst durch einige wenige Komponisten selbst oder durch die Musikwissenschaft im Nachhinein, an den Zuhörer herangetragen? Wiltgens hier besprochene Werke im Zusammen­ hang mit dem Land der Roten Erde sind weitere, luxemburgische Belege für diese so viel diskutierte und von vielen Seiten umstrittene Idee. D’Saelerbunn D’Saelerbunn ist ein Werk für gemischten Chor, Streichorchester, Horn und Harfe auf einen Text von Gast Rollinger aus dem Jahre 1998.18 Wiltgen gewann im Jahr 2003 mit D’Saelerbunn einen Wettbewerb, der von der Kulturvereinigung Minettsdapp und dem Verband der luxemburgischen Laienmusiker UGDA ausgeschrieben worden war. Das Lied sollte in musikalischtechnischer Reichweite eines Laienchores sein. Der Bezug zur Region der Stahlindustrie wird bereits durch den Text hergestellt, aber auch in der Musik kommt er zum Tragen. So soll die Harfe die klickernden Geräusche der Seilbahn hörbar symbolisieren. Diese kilometerlangen Seilbahnen durchzogen die Eisenerzregion und beförderten das Eisenerz von den Gruben bis hin zu den Eisenhütten. Ihre Geräusche begleiteten die Bewohner der Erzgegend wie das Rauschen eines Gebirgsflusses viele Bewohner des Alpenlandes in ihrem Alltag; stetig im Hintergrund, mit einer zur Gewohnheit gewordenen Monotonie. Der melancholische Ton der Musik untermalt den Text von Rollinger. Beide, Text und Musik, veranschaulichen in einzigartiger Weise die jüngste Vergangenheit einer Region und ihrer Menschen, die in jahrzehntelanger harter Arbeit ihr Leben mit dem von den Seilbahnen transportierten Rohmaterial verdienten und die letztendlich zum Wohlstand des ganzen Landes beitrugen. Das Pathos dieser Aussage reflektiert Musik und Text, und wir kommen nicht an der Feststellung vorbei: Die programmatische Aussage der Musik ist unverkennbar.

Musik im Land der Roten Erde

Weitere Musiker im Land der Roten Erde19 Bei den drei oben besprochenen Persönlich­ keiten hat jede auf ihre Weise einen Beitrag zum Musikleben in der Minetteregion und in ganz Luxemburg geleistet. Ihnen gemeinsam ist, dass sie auf den ersten Blick nichts gemeinsam haben. Während Thill sich musikethnologisch betätigt hat, waren und sind die beiden anderen ausführende Musiker. Allen ist gemeinsam, dass sie hauptsächlich Pädagogen waren oder sind. Thill war Primärschullehrer, Rampini, obschon nur nebenberuflich, hat sich bei der Differdinger Harmonie in besonderer Weise dem Nachwuchs gewidmet, und diese pädagogische Tätigkeit hat dann auch, wie wir es heute wissen, Früchte getragen. Viele seiner ehemaligen Schüler sind Berufsmusiker geworden. Wiltgen ist Dozent für Tonsatz am Konservatorium in Esch. Das ist auch bei den nächsten Musikern nicht anders. Auch sie waren oder sind hauptsächlich Musikpädagogen, ihre hauptberufliche Tätigkeit, die ihnen ihre Existenz sicherte bzw. sichert und ihnen eine musikalisch-künstlerische Tätigkeit erst ermöglicht, bzw. ermöglichte. Das Phänomen, dass Musiker in ihrer Hauptbeschäftigung Musikpädagogen sind und sich erst in zweiter Instanz als ausführende Musiker betätigen, beschränkt sich nicht nur auf den Süden Luxemburgs, sondern gilt für das ganze Land und auch noch darüber hinaus. Der Zuwachs an Musikpädagogen in den letzten Jahren hat dem Musikleben in ganz Luxemburg zu einem nie gekannten Aufschwung verholfen. Auch dieses Phänomen ist nicht regional begrenzt, obschon durch die Konzentrierung an Musikschulen im Süden, die Minetteregion in besonderer Weise davon profitiert(e). Felix Krein (1831-1888)20 Felix Krein kam in Esch-Sauer zur Welt. Sein Vater und dessen Vater und Großvater übten einerseits einen „handfesten“ Beruf als Tuch­ weber aus und waren andererseits Amateurgeiger. Anscheinend beherrschte der junge Felix Krein mit zwölf Jahren bereits eine große Anzahl von Instrumenten, von der Violine bis hin zur Basstuba. Zunächst war Krein als Militärmusiker tätig und schloss mit dreißig

18 Vgl. hierzu: ROLLINGER, Gaston, D’Sälerbunn. In: Fir den Aarbechter mäi Papp, Lyrik, Gedichte, Poèmes, De

Minettsdapp, Kultur am Süden, (Hg.), Esch-sur-Alzette 2003, S. 111.

19 Vgl. hierzu: BLASEN, Léon: Letzebuerger Komponisten. In: MACKEL Eugène (Hg.), 125 Joer Letzebuerger Stadtmusek,

Luxembourg 1988, S. 24-191.

20 Vgl. hierzu: REITZ, Jean, Felix Krein, Spross einer Musikerfamilie. In: Harmonie Municipale Bascharage (Hg.),

Harmonie Municipale Bascharage: 125 Joer, Bascharage, 1997, S. 113-127.

99


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

Jahren eine Ausbildung als Dirigent ab. Im Jahre 1871 quittierte er den Dienst und ließ sich fortan in Esch-Alzette nieder. Hier übernahm er als erster Dirigent die Leitung der Stadtmusik. Ab 1872 dirigierte Krein auch die Chorgemeinschaft Orania in Niederkerschen, die sich ab 1875 in eine instrumentale Musikgesellschaft umwandelte. Im Jahr 1876 eröffnete er zusätzlich ein Musikgeschäft in Esch. Nachdem Krein im Jahre 1882 seine Dirigententätigkeit in Esch aufgegeben hatte, wechselte er in relativ kurzen Abständen von zwei Jahren zu den Musik­ gesellschaften in Niederkorn, in Differdingen, in Schifflingen und in Kayl und prägte deren Anfangsphasen mit. Als Komponist sind von Krein 66 Kompositionen überliefert, viele für die Vereine, für die er tätig war: vor allem Märsche, Walzer und Potpourris, die zu dieser Zeit von den Musikgesellschaften gespielt wurden. Möglicherweise ist jedoch eine Vielzahl seiner Werke verschollen. Charles Günther (1872-1942) Der Deutsche Charles Günther studierte in Weimar und ließ sich in Remich nieder. Im Jahre 1906 wurde er Dirigent der Escher Harmonie und hatte diesen Posten bis zu seinem Tode im Jahre 1942 inne. Seine bekannteste Komposition ist die Musik zu dem Bühnenwerk Eng Hellecht op der Musel. Außerdem schrieb er noch vokale Einzelwerke und verschiedene Orchesterstücke. Helen Buchholtz (1877-1953) Durch Zufall wurde der Nachlass von Helen Buchholtz gerettet.21 Es war zu ihrer Zeit recht ungewöhnlich, dass sich eine Frau dem Komponieren widmete. Das große Vorbild ist Clara Schumann (1819-1896). Ihre Musikausbildung erhielt Buchholtz wahrscheinlich privat, weil es die Escher Musikschule noch nicht gab. Möglicherweise konnte sie aber im Mädchengymnasium in Longwy, das sie nach der Grundschule in Esch besuchte, ihre Musikkenntnisse vertiefen. Sie stammte aus einer Familie erfolg­ reicher Escher Geschäftsleute, in der die Musik ihren Stellenwert hatte und Hausmusik groß geschrieben wurde. Hausmusik war dann auch die einzige Möglichkeit der jungen Musikerin, sich künstlerisch zu betätigen. Musikvereine,

ebenso wie Chöre waren reine Männerdomänen und blieben dies in der Minettegegend z. T. bis in die siebziger Jahre des 20. Jahrhunderts. Durch ihre Familienverhältnisse stand Helen Buchholtz auf einer materiell sicheren Grundlage. Im Jahre 1914 heiratete sie den deutschen Arzt Bernhard Geiger und nötigte ihm im Angesicht dieser existentiellen Unabhängigkeit qua Ehevertrag ab, ihre musikalische Tätigkeit zu akzeptieren und kinderlos bleiben zu dürfen. Alfred Kowalsky (1879-1943) Alfred Kowalsky war der erste Direktor der Escher Musikschule (s. o.). Er hatte bei so namhaften Komponisten wie Charles-Marie Widor in Paris (Orgel) und bei Richard Strauss in Berlin (Komposition) studiert. Er leitete die Musikschule bis zum Ausbruch des Zweiten Weltkrieges im Jahre 1939. Seine Leistung als Komponist erbrachte er durch eine Oper, Operetten, Vokalwerke und Kammermusik. Loll Weber nennt Kowalsky zusammen mit Louis Petit den „Vater der sinfonischen Konzertszene in Luxemburg“22, eine etwas gewagte Einschätzung im internationalen Vergleich, in der regionalen Dimension jedoch angemessen. Louis Petit (1890-1953) Geboren wurde Louis Petit in der Stadt Luxemburg, aber er arbeitete seit 1916 als Musiklehrer am Mädchenlyzeum und in der Industrieschule in Esch. Im Jahre 1923 war er Mitinitiator beim Aufbau der Escher Musikschule. Louis Petit machte sich vor allem einen Namen durch seine Vokalwerke und als Chordirigent der Escher Uelzecht von 1920 bis 1946. Das war sein Terrain, auf dem er sich musikalisch am besten auskannte, und es gelang ihm, den Laien­ chor zu höchsten musikalischen Leistungen zu führen. Als Musikpädagoge versuchte er, eigene Wege zu gehen und sich von einer starren Musik­ausbildung zu lösen. Hierzu legte er zwei Manuskripte vor: „Für die Neugestaltung der Musikerziehung im mittleren Unterricht“ und „Die musikalische Entwicklung beim Kind“. Alphonse Foos (1894-1945)23 Von seiner Ausbildung her war Foos nicht Musiker, sondern Deutschlehrer. Als Musiker hat

21 Vgl. hierzu: ROSTER, Danielle, Die Escher Komponistin Helen Buchholtz. In: Ville d’Esch-sur-Alzette (Hg.), 100 Joer

Esch 1906-2006, Esch-sur-Alzette, S. 374-381.

22 Vgl. hierzu: WEBER, Lol, “Gees de den Owend mat op de Concert?“ In ebd., S. 391. 23 Vgl. hierzu: HILGERT, Romain, Heimatdichtung als Nationalliteratur. In: d‘Lëtzebuerger Land (13. Dezember 2002).

Auf der Internetseite: http://www.land.lu/html/dossiers/dossier_luxemburgensia/hilgert_131202.html (11/03/2009).

100


Terres Rouges

Musik im Land der Roten Erde

er nie gearbeitet. Seiner musikalischen Begabung verdanken wir jedoch ein breitgefächertes Werk, mit dem sich aber bislang wenig beschäftigt wurde. Zu erwähnen wäre der im Jahre 1934 erschienene 14 Nummern umfassende Liederzyklus für Solostimme und Klavier nach Texten aus dem Gedichtband Klor Stonnen von Michel-Joseph Hever aus dem Jahre 1932. Aber aus seiner Feder stammt u. a. auch eine im Jahre 1935 erschienene Monographie über Nikolaus Welter: Nikolaus Welter und sein dramatisches Werk. Da Foos ein Anhänger der Nationalsozialisten war - er war Vorsitzender der Gedelit Luxemburg -, musste er am Ende des Krieges Luxemburg verlassen und starb wenig später.

aber auch als Komponist hervorgetan und sich künstlerisch viel in der Minettegegend eingebracht. Der in Esch geborene Marcel Wengler (*1946) hat sich als Komponist einen Namen gemacht und ist weit über die Grenzen Luxemburgs bekannt und tätig. Der jetzige Direktor des Escher Konservatoriums Fred Harles (*1946) leitet seine Schule seit 1978 (!) und hat daraus eine über die Region hinaus anerkannte musikalische Ausbildungsstätte gemacht. Die Brass Band des Escher Konservatoriums (s. o.) wurde von ihm gegründet und ist Aushängeschild dieser kleinen, aber leistungsstarken Institution.

Pierre Cao (*1937) Der in Düdelingen geborene Pierre Cao widmet sich hauptsächlich der Chormusik. Schon mit 18 Jahren leitete er einen Chor in seiner Heimatstadt. Später wechselte er als Dirigent zur renommierten Uelzecht nach Esch und blieb dort von 1961-1975. Er studierte am Königlichen Konservatorium in Brüssel Komposition und Dirigieren und gewann im Jahre 1968 einen Dirigentenwettbewerb. Daraufhin wurde er Assistent unter Louis de Froment beim damaligen Rundfunkorchester von RTL. In dieser Zeit enstanden eine Reihe von Schallplattenaufnahmen. Er investierte sich in der Ausbildung von Chordirigenten an den Konservatorien in Esch und in Luxemburg und leitete zahlreiche Meisterkurse. 1991 gründete er das Institut Européen du Chant Choral (INECC). Nach seiner Pensionierung als Musiklehrer am Konservatorium in Luxemburg setzte er seine Chorleitertätigkeit auf internationaler Bühne fort und ist heute künstlerischer Leiter mehrerer angesehener Chorensembles in Frankreich. Er lebt zurzeit in Paris und gastiert regelmäßig mit Chorkonzerten in der Philharmonie in Luxemburg-Kirchberg. Wir könnten die Reihe von Musikern aus Esch weiter fortsetzen und auf das Wirken des früheren beigeordneten Direktors des Konservatoriums Josy Asselborn (*1929) näher eingehen. Er hat sich als Organist und Pianist,

Résumé und Danksagung Das Thema Musik im Land der Roten Erde präsentiert sich als ein nicht abgeschlossenes Mosaik, welches sich im Laufe der Jahrzehnte vervollständigt und welches heute als Momentaufnahme, aber auch rückblickend betrachtet werden kann. Zunächst waren in der Gegend um Esch Komponisten und Musiker im Bereich der Laienmusik tätig. Später kam es mit Gründung der ersten Musikschulen zu einer ersten Phase der Professionalisierung, und heute sammeln sich die Mosaiksteine und lassen das Bild einer „musikalischen Landschaft“ erkennen, die sich stetig erweitert und diversifiziert. Dieses Phänomen ist mitnichten ein regional begrenztes. Dass musikalische Betätigung in regionaler Ausprägung ihren Weg aus dem Laienmusikbereich hinein in ein professionelles Stadium findet, scheint universelle Gültigkeit zu haben. Die Informationen im Zusammenhang mit dem Thema Musik im Land der Roten Erde fließen in spärlicher Form. Sie liegen vor als (nicht-)wissenschaftliche Artikel, Festbroschüren, Internetseiten, Gesetzestexte... Auch das Stöbern in Archiven gehörte zur Erkenntnisgewinnung dazu. Ein großer Teil des Wissens existiert jedoch nicht in geschriebener Form, sondern konnte erst durch Interviews gewonnen werden. Den vielen Helfern und Interview­ partnern sei an dieser Stelle gedankt.

101



Terres Rouges

La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges

La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges. Une étude de cas Julie Schroell

Le terrain de la Jeunesse d’Esch dans les années 1980, entouré de colonies ouvrières, avec en arrière-fond la friche industrielle de l’ancienne usine de Terres rouges et, au loin, l’usine de Belval avec les hauts fourneaux A, B et C. (Coll. Denis Scuto)

Pendant le siècle dernier, la Jeunesse d’Esch est devenue une équipe emblématique, façonnée par le contexte historique, sociopolitique, culturel et historique du Luxembourg. Des questions d’ordre sociologique, politique et culturel, en rapport avec la Jeunesse et son parcours, permettent de comprendre comment et pourquoi le club et son terrain sont devenus l’étendard d’un quartier ouvrier, la Hoehl/Frontière, et le point de ralliement d’une métropole industrielle, Esch-sur-Alzette. Dans quel sens les facteurs socioéconomiques de la région des Terres Rouges, parmi lesquels l’industrialisation, ont-ils influencé l’émergence et l’évolution du football dans cette région du pays ? L’histoire de la Jeunesse est illustrative ou représentative d’autres histoires sportives dans la région étudiée. En effet, le lien entre le développement industriel de la région et le développement du football est aussi visible à propos d’autres clubs, comme les Red Boys de

Differdange, l’Alliance de Dudelange ou l’US Rumelange. Mais plus encore que ces autres clubs du Sud du pays, la Jeunesse continue à maintenir et à véhiculer une image de toute une région, souvent associée à des facteurs extérieurs au sport, comme le monde ouvrier, l’immigration, le quartier. En effet depuis un siècle, la Jeunesse d’Esch s’est vu attribuer de nombreuses qualités devenues légendaires ; dans l’opinion publique, la Jeunesse d’Esch est souvent synonyme de « club d’ouvriers », « club de quartier », ou encore « club des Italiens ». Les diverses vertus et caractéristiques conférées à ce club centenaire par les Luxembourgeois méritent un questionnement, afin de pouvoir en déterminer le degré de réalité. A travers l’analyse socioprofessionelle des joueurs de la Jeunesse, basée sur l’étude de leur domicile et de leur profession, nous nous demanderons si ces attributs correspondent à la réalité ou plutôt à des mythes, élaborés par la mémoire collective ? 103


Terres Rouges La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges

Avant de commencer l’étude de cas et de comprendre quel rôle le football a joué dans la région des Terres Rouges, il est important de parler des origines de ce sport de ballon collectif et de son arrivée au Luxembourg.

Le football, un sport d’élite importé d’Angleterre L’histoire du football commence en GrandeBretagne au milieu du XIXe siècle, où ce nouveau sport d’équipe était considéré comme un sport réservé à l’élite. C’est ainsi qu’il se développe au sein des public schools et dans les universités, où les équipes sont constituées essentiellement de fils de la bourgeoise. À la même époque, les sports athlétiques prennent de l’importance tant au niveau de la médecine que de l’hygiène ou de la pédagogie, étant utilisés dans la perspective d’une éducation nouvelle visant à la réhabilitation du corps. Les sports répondent aussi à la demande d’un anti-intellectualisme en promouvant l’action et l’énergie vitale, vus comme une libération par les jeunes élèves soumis à la discipline. Le football est arrivé par des chemins divers en Europe continentale et dans le reste du monde. D’une part, ce sont les agents de l’expansion économique britannique dans le monde qui assurent la diffusion du football. Transporté par les matelots anglais sur les plages du Brésil ou de Marseille vers 1884, ce nouveau jeu attire le regard des curieux. Ensuite le football pénètre à l’intérieur des terres grâce aux techniciens des compagnies de téléphonie ou par le biais des compagnies des minières. En ce qui concerne la pénétration du football en Europe du Nord-Ouest, les Britanniques ont alimenté des canaux multiples. Ce sont des négociants et des courtiers, installés près des ports, ou encore des commerçants qui amènent le football dans les centres économiques et les capitales. Dans d’autres cas, il s’agit d’élèves anglais des collèges continentaux qui associent les autochtones à leur jeu. De par sa proximité géographique, le sport arrive dès les années 1860 dans les collèges anglais de Bruges, de Bruxelles et d’Anvers. En Belgique, le premier

club de football association est fondé en 1880 : l’Antwerp F. C. Pour la Suisse, la présence de nombreux élèves anglais dans des instituts scolaires privés y explique l’ancienneté de la pratique du football (1860)1. Une seconde voie de pénétration du football en Europe a été assurée par les continentaux eux-mêmes, qui ont ramené le football dans leur pays après un séjour plus ou moins long en Angleterre. Tel est le cas par exemple des professeurs d’anglais qui reviennent de leur stage linguistique accompli en Angleterre. Ils y ont appris à connaître le football, dont la pratique était directement associée à l’éducation. C’est de cette façon que le football arrive au Grand-Duché. Un professeur d’anglais, Jean « John » Roeder, introduit ce sport viril à l’école industrielle et commerciale d’Esch aux environs de 1902, après le retour de son stage en Angleterre. Roeder fonde la première équipe luxembourgeoise en décembre 1906 à Esch, le Football and Lawn Tennis Club2. La FOLA, club des classes moyennes, sera pendant de longues années le rival de la Jeunesse d’Esch. Arrivé en Europe, le football s’est développé dans un premier temps parmi les couches aisées de la population. En effet, l’adoption du football et d’autres sports anglais sur le continent révèle avant tout la volonté d’affirmer un style de vie. Le football du début du siècle constitue en outre un moyen de contrôle social, une instance disciplinaire et moralisatrice qui servait souvent à encadrer la jeunesse. Pendant ses premières années d’implantation en Europe, les pionniers du football sont des juristes, des administrateurs ou des journalistes réputés. Il est significatif dans ce contexte que la licence de football n°1 de la Fédération des Sociétés Luxembourgeoises de Sports Athlétiques fut délivrée en 1909 à un étudiant en droit, Alphonse Weicker, futur fondateur et dirigeant de ce qui deviendra la plus importante banque luxembourgeoise. Au Luxembourg, les associations du début du siècle se caractérisent par une grande instabilité et une difficile mise en place. Leur vie est souvent marquée par des restructurations et des scissions. La création de la plupart des clubs relève d’initiatives personnelles de pionniers motivés.

1 WAHL Alfred, La balle au pied, histoire du football, Paris, 2002, p.30. 2 SCUTO Denis, « Jeunesse Esch – Ein historischer Rückblick », in : Magazine N° 32, Annuaire 2002-2003, pp. 34-45.

104


Terres Rouges

La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges

La création de la Jeunesse (1907-1920) En août 1907, un élève de Jean Roeder, JeanPierre Weber, employé de l’usine d’Esch, et Henri Rizzi, électricien, sont à la base de la création du Football et Lawn-Tennis Club Jeunesse de la Frontière, la future A. S. La Jeunesse d’Esch. Ils convoquent un groupe de jeunes Eschois dans un local du quartier de la Frontière à Esch, pour concrétiser leur idée. Les premiers joueurs de la Jeunesse d’Esch ne possédaient pas de véritable terrain de jeu. Comme des nomades, ils transportaient avec eux les poteaux pour former les buts et s’installaient là où ils trouvaient de la place. Les propriétaires de ces terrains chassaient souvent les joueurs de ce sport peu apprécié à l’époque. Qu’en est-il de la Jeunesse d’Esch ? Dans la société luxembourgeoise, il est assez commun d’affirmer que depuis ses débuts, le club compte parmi ses joueurs essentiellement des ouvriers, travaillant à l’Arbed d’Esch. Quelle était la configuration des équipes de la Jeunesse d’Esch pendant les premières décennies de son existence ? Est-ce que le profil socio-professionnel des joueurs s’inscrit dans la « règle », ou forme-t-il une exception ? La légende veut que la Jeunesse d’Esch soit un club d’ouvriers depuis le départ. Qu’en est-il réellement ? Le profil professionnel des joueurs de la Jeunesse

1907-1918

25,00%

20,00%

10,00%

La démocratisation du football Apparu d’abord comme un instrument de l’élite sociale et un moyen de distinction, le football est devenu peu à peu l’apanage des couches moyennes. En effet, le football n’a pas résisté au mouvement social en cours et, dans la plupart des pays, en moins d’une génération, ce sport d’élite est accaparé par les couches populaires. Dans la plupart des pays, le football va être diffusé en milieu populaire après la Grande Guerre. A partir de 1920, le sport est complètement absorbé par les couches sociales inférieures en ville et à la campagne, grâce entre autres au développement des transports au début du XXe siècle (proximité des gares, autocars). De plus en plus, l’idée que le sport contribue à promouvoir la santé physique et mentale de la jeunesse prend le dessus et stimule dans tous les pays l’essor du mouvement sportif associatif à partir de 1920. En même temps, le développement du mouvement associatif répond à une recherche d’une nouvelle communauté, poursuivie par les populations urbaines récemment installées en ville et souvent déracinées par le changement de vie qui accompagne l’urbanisation4.

Le quartier de la Frontière : la « Hiehl », la « Grenz » et le « Brill »

5,00% 15,00%

Nous constatons que les joueurs de cette époque sont majoritairement issus de la classe moyenne et de la bourgeoisie d’Esch. Toutefois, on peut observer un lien étroit entre le monde industriel, la création des usines dans le Bassin minier à la même époque et la fondation de la Jeunesse. En effet, la majorité des joueurs travaillent au sein de l’Arbed, mais appartiennent plutôt à la classe des cadres ou des supérieurs3.

Ouvrier Arbed Employé Arbed Supérieur Arbed Fonctionnaire Employé privé Commerçants Indépendants Banques, assurances

20,00%

Bien que la première équipe « officielle » de la Jeunesse soit principalement formée d’hommes aisés, le football se répand rapidement au sein de ce quartier émergeant autour des usines nouvellement construites. Et le phénomène de démocratisation du football a rapidement pris le dessus dans le petit univers de la ville d’Esch, où cette pratique sportive ne se limitait pas aux fils de la bourgeoisie.

3 SCHROELL Julie, E stoarkt Steck Minett, analyse socioprofessionelle des joueurs de la Jeunesse d’Esch, mémoire en

histoire contemporaine, ULB, Bruxelles, 2007, p. 38.

4 WAHL Alfred, Les Archives du football. Sport et société en France (1880-1980), Paris, Gallimard-Julliard, 1989, p. 13.

105


Terres Rouges La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges

En effet, à partir de 1902, des équipes de quartiers se sont créées. Le quartier, de par sa surpopulation, se prêtait bien à la formation de jeunes footballeurs. Dans les environs de la « Brasseurschmelz » érigée en 1870 (usine de la future Arbed / Terres Rouges), le quartier de la Frontière constituait un ensemble homogène, éloigné du centre-ville, dans lequel les jeunes pouvaient se prêter au football sans déranger quiconque5. En outre, les rencontres ressemblent à des manifestations festives permettant avant tout de nouer des liens amicaux ; l’ambiance autour du stade est aussi importante que l’enjeu sportif. L’association sportive offre en effet une structure fraternelle et conviviale aux individus arrachés à leur milieu traditionnel, ainsi qu’un surcroît de sécurité. Quand la localité d’Esch-sur-Alzette reçoit le statut de ville en 1906, le nombre de ses habitants a augmenté de 100% en 30 ans, depuis la création de la première usine en 1871. Ceci est dû à l’industrialisation qui a engendré un mouvement d’exode rural. Il y a eu d’abord une migration des paysans au sein même du pays, suivie d’une internationalisation de la main d’œuvre industrielle, essentiellement allemande et italienne.

Les liens sociaux entre les habitants de ce quartier d’ouvriers expliquent aussi la création ainsi que le développement d’un club de football. En effet, les jeunes hommes du quartier se côtoyaient à la fois sur le terrain de football, à l’usine, dans la rue et au café. Pour le jeune ouvrier travaillant à l’usine du quartier, le football offre une possibilité de compensation après une longue journée de travail. Le sport permet une régénération physique et mentale, alors que la monotonie du travail manuel sollicite le corps de manière répétitive et unilatérale. En outre, la surpopulation de ce quartier au début du siècle incitait les gens à sortir dans la rue dès que possible, non seulement pour y jouer au football, mais aussi pour y vivre. Les colonies ouvrières du quartier, constituées de maisons unifamiliales avec jardin, étaient destinées aux ouvriers qualifiés, luxembourgeois ou allemands. Tous les autres travailleurs, majoritairement italiens, vivaient dans des baraques, des cafés-pensions ou des immeubles surpeuplés. L’enquête sur les conditions de logement dans ce quartier, réalisée en 1905/1906 par la Commission permanente de statistique, est assez éloquente à cet égard.

Carte postale de la Hoehl des années 1930 : en avant-plan, les wagons chargés de minerai de fer, puis la rue Hoehl avec la „Casa grande“, le seul immeuble de trois étages, derrière le terrain de foot de la Jeunesse d‘Esch et les colonies ouvrières, enfin la colline du Kazebierg. (Collection Pagliarini-Clemens) 5 SCUTO Denis, „Gedanken zur Sozialgeschichte des Luxemburger Fussballs“, in: forum, n° 128-129, p. 26.

106


Terres Rouges

La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges

Quartier italien du Brill en 1907, in: SCUTO, Industriekultur in Esch, p. 72.

Dans le quartier de la Frontière, à population à majorité ouvrière, 63% des logements sont surpeuplés, alors que pour le reste de la ville, ce taux est bien moindre. Parmi les quatre immeubles à trois étages dont dispose le quartier, le premier héberge 96 personnes, le deuxième 91, le troisième 72 et le dernier 48. La rue des Boers compte en moyenne 49 personnes par immeuble. A côté de cela, l’actuelle rue Renaudin (colonies ouvrières), compte quatre habitants par maison. En ce qui concerne la superficie des appartements du quartier, les chiffres parlent d’euxmêmes. Ainsi, la superficie de presque 60 % des logements est considérée comme insuffisante (« durchaus ungenügend », « ungenügend », « unzureichend ») par rapport au nombre d’habitants qui y résident6. La démocratisation du football dans les milieux suscite de l’intérêt, mais aussi de la réticence dans les divers milieux de la société. Si la bourgeoisie tend à maintenir le caractère élitiste du football, les partis de gauche ne sont pas nécessairement en faveur de la mixité sociale au sein des équipes. Ils préconisent bien sûr la pratique du football pour les démunis,

mais ce sport ne doit pas se confondre avec le football bourgeois. Foncièrement, ils considèrent que le sport est un moyen et non le moindre pour réduire les contradictions sociales, puisque « des gens en tenue de sport, qui ne permet plus de reconnaître le riche du pauvre, et qui ont combattu pour les mêmes couleurs, sont devenus des amis pour la vie7» . L’Église également se montre opposée à la démocratisation de ce sport. Elle n’accepte pas ce jeu, pratiqué par des hommes en culottes courtes le dimanche, jour du Seigneur.

Industrialisation et développement du football La démocratisation du football va donc de pair avec l’industrialisation et l’émergence d’une nouvelle population : le monde ouvrier industriel. Tel est le cas aussi pour la région des Terres Rouges où les équipes de football se multiplient en parallèle avec les usines. En dépit de la faible proportion initiale de joueurs-ouvriers, nous pouvons observer un lien étroit entre la création et le développement

6 Ständige Kommission für Statistik, Häuser- und Wohnungsuntersuchung in den Gemeinden Differdingen, Düdelingen,

Esch Alzette, Hollerich, Arsdorf, Mertert, Rodenburg und Klerf, Heft XVI, Teil 2, Wohnungsstatistik, Luxembourg, 1909, p.125. 7 Le Sport alsacien, 3.3.1922, in : WAHL Alfred, Les Archives du football, op. cit., p.194.

107


Terres Rouges La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges

de la Jeunesse et l’industrialisation de la ville d’Esch, où employés et cadres supérieurs des groupes sidérurgiques et même un directeur d’usine jouent au sein de son équipe. Un autre rapport entre sidérurgie et Jeunesse d’Esch est observable au niveau du comité de direction du club. En effet, dès ses origines, ce dernier est en majorité composé de personnalités appartenant au monde de la sidérurgie, et plus particulièrement à l’Arbed. Il est aussi intéressant de constater que les joueurs des premières équipes en 1907 sont en même temps membres du comité. La présence de personnalités importantes du secteur de l’industrie au sein du comité de la Jeunesse va rester une donne pendant pratiquement tout le siècle. Dans le sens inverse, ce lien permet d’expliquer le nombre important de joueurs employés au sein de la grande société sidérurgique jusque dans les années 1970. En effet, faute de recevoir une rémunération en espèces, les joueurs étaient placés comme ouvriers au sein de l’Arbed. On peut parler d’un véritable rôle d’intégration sociale grâce au sport corporatif. De même, c’est grâce aux personnalités importantes de l’industrie au sein de la Jeunesse que cette association obtient ses premiers terrains de jeu. Ainsi, le club inaugure sa première aire de jeu au Katzenberg (terrain vague) grâce aux engagements du secrétaire du Aachener Hüttenaktienverein, prédécesseur de l’usine Arbed / Terres Rouges. Plus tard, en 1920, la Jeunesse obtient son terrain actuel dans la Hoehl grâce à l’aide de directeurs d’usines (le directeur d’Arbed Mines, le directeur de la Société Minière des Terres Rouges), d’ingénieurs, de conseillers communaux et d’autres personnalités faisant partie de son comité de direction. A la même époque, nous observons un début d’institutionnalisation et le nombre de ses membres passe de 265 à 492. Une caisse de maladie pour les joueurs est créée, les réunions du conseil du club se multiplient. De manière générale, les entreprises s’intéressent beaucoup au football, y voyant la possibilité de diriger la vie sociale des ouvriers même à l’extérieur de l’usine. Les ingénieurs et les employés des diverses usines du Bassin mi-

8 WAHL Alfred, La balle au pied …, op. cit., p. 81. 9 WAHL Alfred, Les Archives du football, op. cit., p. 208.

108

nier prennent la direction des différents clubs de football dans la région sidérurgique et mettent gratuitement des terrains à disposition. C’est ainsi que les Red Boys ont reçu leur premier terrain de la société HADIR. D’un point de vue international, la mise à disposition de terrains par le biais de notables ou d’industriels a souvent permis aux clubs de mettre en place des structures administraives solides et de se professionnaliser. En Allemagne, par exemple, une entreprise de Gelsenkirchen cède pour 99 ans l’un de ses terrains au club de Schalke 04. En 1928, le club y construit un stade de 40.000 places8. Dans d’autres villes, ce sont les grands industriels ou les négociants qui prennent le pouvoir dans le football à partir des années 1930. Des hommes d’affaires influents et même des entreprises multinationales se trouvent souvent à la direction des clubs majeurs, comme Philips à Eindhoven ou Fiat [En toute logique, il faudrait écrire : FIAT] à la Juventus de Turin. La prise en main des clubs de football par des personnalités importantes du monde industriel s’inscrit parfaitement dans l’état d’esprit de l’époque : la pratique du football émerge dans les régions industrielles et devient rapidement, pour les patrons d’usines, un moyen d’encadrer et de contrôler les ouvriers. En quelque sorte, à travers ces activités orientées vers le divertissement et la détente, les employeurs espèrent limiter le mécontement social et dépolitiser les ouvriers. Dans ce sens, la démocratisation du football a une fonction instrumentale ; « il s’agit d’accréditer l’idée que le football favorise l’intégration sociale (…) et offre un moyen pour réduire les contradictions sociales ». En effet, après avoir lutté ensemble sur le terrain de jeu, les différentes classes se sentent plus unies9. Dans le cas de la Jeunesse, tout le quartier dans lequel elle évolue est conçu dans cette optique. La construction à proximité des usines de colonies ouvrières avec école, commerces, cafés, buanderie, à l’image du quartier Hoehl au centre duquel se trouve le terrain de la Jeunesse à partir de 1920, entend surtout fixer l’ouvrier à son lieu de travail.


Terres Rouges

La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges

La Jeunesse – un « club d’ouvriers » ? Mais quelle est la proportion d’ouvriers dans le club tout au long du siècle passé ? Le graphique ci-dessous démontre que le « mythe » concernant la profession ouvrière des joueurs de la Jeunesse d’Esch est largement justifié lors de certaines périodes de son histoire. Les années correspondant à un taux très élevé d’ouvriers au sein des différentes équipes sont celles de la période faste de la sidérurgie luxembourgeoise. Comme nous le montre le graphique cidessous, l’image de la Jeunesse comme « club d’ouvriers » devient légitime à partir des années 1920. En effet, jusque dans les années 1960, nous remarquons une augmentation progressive du nombre d’ouvriers, qui atteint plus de 70% du groupe de joueurs dans les années 1960. Parallèlement, le nombre d’employés et d’employés supérieurs au sein de l’Arbed diminue dans les équipes successives. La diminution du nombre d’ouvriers à partir des années 1970 trouve son explication dans la crise sidérurgique de ces années-là. A partir de cette décennie, l’augmentation du nombre de fonctionnaires, d’employés privés et de banques résulte d’une véritable explosion du secteur tertiaire à l’échelle nationale. Elle s’accompagne d’une intervention de plus en plus importante de l’Etat dans l’économie du pays. La diversification industrielle, nécessitant de plus en plus de main-d’œuvre, a pour conséquence l’augmentation du nombre de joueurs employés par les nouvelles entreprises. La tertiarisation de la société luxembourgeoise et l’essor de la place

financière que devient le Grand-Duché permettent de comprendre la plus forte proportion de joueurs occupés dans les services et le secteur bancaire à partir des années 1990. Enfin, les diverses stratégies de la Jeunesse en matière de « placement » professionnel des joueurs au fil du siècle éclairent aussi le développement de leur profil en termes d’emploi. Si, jusque dans les années 1970, les joueurs ont pu être « placés » au sein de l’Arbed, c’est la commune d’Esch qui a pris la relève à partir des années 1970. Le lien de sponsoring avec des entreprises a aussi permis le placement dans ces sociétés (supermarchés Cactus, etc.). Cependant, on observe que, depuis les années 2000, il est devenu de plus en plus difficile pour le club de procurer un travail aux joueurs et que la Jeunesse a été amenée par conséquent à leur fournir directement un salaire. Cette nouvelle donne pécuniaire a rendu possible l’augmentation du nombre de joueurs encore scolarisés10.

La Jeunesse – un « club de quartier » ? Qu’en est-il de la légende, qui veut que la Jeunesse d’Esch soit le parfait exemple d’un club de quartier ? Le « mythe » selon lequel la Jeunesse serait un « club de quartier » s’avère correspondre à la réalité pour la première moitié de l’existence du club. En effet, l’entre-deux-guerres mis à part, les premières cinquante années du club sont clairement marquées par la prédominance de joueurs habitant le quartier de la Frontière. C’est pendant l’immédiat après-guerre et les an-

Profession des joueurs de la Jeunesse 1907-2007 80,00%

Ouvrier Arbed Employé Arbed Supérieur Arbed Fonctionnaire Employé privé Commerçants Indépendants Banques, assurances Chômage Élève

70,00% 60,00% 50,00% 40,00% 30,00% 20,00% 10,00% 0,00% 1907-1918

1920-1945

1945-1949

1950-1959

1960-1969

1970-1979

1980-1989

1990-1999

2000-2007

10 SCHROELL Julie, E stoarkt Steck Minett, analyse socioprofessionelle des joueurs de la Jeunesse d’Esch, mémoire en

histoire contemporaine, ULB, Bruxelles, 2007, p. 104.

109


Terres Rouges La Jeunesse d’Esch et le rôle des sports dans la région des Terres Rouges

nées 1950 que le club compte le plus de joueurs habitant ce quartier ; pendant la même période, le taux d’ouvriers y est également majoritaire. Cependant, l’analyse du domicile des joueurs souligne que la décennie qui compte le taux le plus élevé d’ouvriers marque un changement brutal au niveau du domicile des joueurs. En effet, pendant les années 1960, le nombre de joueurs domiciliés dans d’autres quartiers eschois ou dans d’autres localités du GrandDuché dépasse de loin celui des « Hiehler ». Ce mouvement, dû à une amélioration des conditions de vie de la population en général – et de celle des ouvriers – va crescendo pendant les périodes ultérieures. L’émergence de la société de consommation semble avoir (eu) pour effet une volonté accrue de la part des joueurs de voir s’améliorer leurs conditions de logement, et les avoir incités à s’installer dans les nouveaux quartiers résidentiels d’Esch ou dans la ceinture verte à mi-chemin entre Esch et la capitale. En outre, travaillant désormais moins souvent à l’usine que dans les nouvelles entreprises installées dans la périphérie, les joueurs ont été naturellement poussés à élire domicile près de leurs nouveaux lieux de travail. D’autres facteurs d’éloignement de la ville d’Esch comme choix de logement ont été le développement de la place financière de Luxembourg-Ville et l’augmentation correspondante de joueurs travaillant dans les banques de la capitale. Enfin, depuis les années 1950, le processus de l’internationalisation du football se reflète aussi au sein de la Jeunesse. En effet, beaucoup de joueurs français, domiciliés en France, font partie du club depuis cette époque. À partir

de 2000, la proportion de joueurs domiciliés à l’étranger s’est encore accrue11.

Pour conclure L’analyse statistique a permis de mettre en évidence à quel point le profil socioprofessionnel des joueurs de la Jeunesse avait été lié, au fil d’un siècle, aux évolutions de la société luxembourgeoise. Les changements d’ordre sociologique, économique et politique de l’histoire du pays et de l’Europe se sont reflétés dans la composition des diverses équipes. Si un grand nombre de ces mutations a directement influencé la composition socioprofessionnelle des équipes, les causalités ne sont pas toujours évidentes : pour la plupart des périodes étudiées, la composition des équipes reflète parfaitement les transformations de la société, mais les caractéristiques des joueurs montrent parfois des développements paradoxaux, notamment influencés par l’histoire particulière du football européen. Il est intéressant de constater que, malgré l’évolution du profil socioprofessionnel des joueurs eschois parallèlement à la mutation de la société luxembourgeoise, la Jeunesse d’Esch contribue à sauvegarder et à véhiculer une certaine image de marque du pays vivant de la « minette ». Alors que la région des Terres Rouges a perdu depuis des décennies sa caractéristique de région ouvrière, la mémoire collective a encore tendance à être attachée à cette représentation. Il en est de même pour la Jeunesse d’Esch, devenue en 100 ans le symbole d’identification pour la région entière.

Domicile des joueurs de la Jeunesse 1907-2007 100,00%

Quartier Frontière Esch reste Grand-Duché France Allemagne

90,00% 80,00% 70,00% 60,00% 50,00% 40,00% 30,00% 20,00% 10,00% 0,00% 1907-1918

1920-1945

1945-1949

1950-1959

1960-1969

1970-1979

1980-1989

1990-1999

2000-2007

11 SCHROELL Julie, E stoarkt Steck Minett, analyse socioprofessionelle des joueurs de la Jeunesse d’Esch, mémoire en

histoire contemporaine, ULB, Bruxelles, 2007, p. 102.

110


Terres Rouges

Sprache im Minette

Sprache im Minette Peter Gilles

Der Süden Luxemburgs, besser: der Südwesten, gilt in der allgemeinen Einschätzung als eine mehr oder weniger gut abgrenzbare sprachliche, aber auch wirtschaftliche und administrative (Kanton Esch-Alzette) Teilregion des Landes. Kaum ein Luxemburger kennt nicht die sprachlichen Stereotype, die die Sprecher aus dieser Region charakterisieren. Als Stilmittel werden südliche Sprachmerkmale auch in der luxemburgischen Literatur eingesetzt, z. B. bei Guy Rewenig: Ech ginn all Dag méi queesch. Déi Stad schléit mär op de Geescht. „Ech fannen dat blöd!“ seet d‘Nada. „Wat?” Son ech. „Dass du ëmmer ‚mär‘ an ‚där‘ sees“, seet hatt. „Firwat?“ son ech. „Et as ebe blöd!“ seet hatt. Aha. Elo kréien ech de Minett sou lues mat der Baatsch ausgedriwwen! Ech erklären dem Nada, eng Sprooch wär eppes extrem Perséinleches. Eppes wat lues a laang gewuess as. Wat séch eragrieft an de Kapp a Wuerzelen zillt an der Séil. D‘Sprooch wär eng Planz, déi een nët einfach ausrappe kéint. Dat wär, wéi wann een engem Mënsch de Réckstrank géif erausoperéieren. (Guy Rewenig (1986), Mass mat dräi Hären, S. 176; in Originalorthografie, Hervorhebung PG) Wie Rewenigs Zitat belegt, ist es insbesondere das kleine Wörtchen mär, das als Parademerkmal zur Kennzeichnung des Minettes ausreicht. In diesem Beitrag1 nähere ich mich den sprachlichen Strukturen der Minette-Region aus zwei Richtungen: In Abschnitt 1 erfolgt zunächst die soziolinguistische Einordnung der Region, wie sie sich im Sprachbewusstsein und in den Spracheinstellungen (sog. ‚Attitüden’) der Luxemburger manifestiert. In Abschnitt 2 werden konkrete sprachliche Merkmale der Lautebene und des Wortschatzes beschrieben, die charakteristisch für diese Region sind.

1. Sprachsituation und Regionalbewusstsein Trotz der geringen Größe Luxemburgs haben sich hier fünf Dialektregionen herausgebildet: der Norden (Ösling/Éislek), der Osten (Sauer- und Moselgegend), das Zentrum um Luxemburg-Stadt, der Süden und der Westen um Redingen-Attert (vgl. Bruch 1953, 1954). Die Bezeichnung Minette für das südliche Gebiet verweist unmittelbar auf die wirtschaftliche Basis, die als Namengeber fungierte. Bedingt durch umfangreiche Eisenerzfunde in dieser Gegend, hat sich zwischen dem Ende des 19. Jhs. und den 1970er Jahren eine schnell wachsende und florierende Schwerindustrie mit Bergbau und Stahlwerken herausgebildet. Im Zuge dieses Aufschwungs, der in engem Zusammenhang mit der wirtschaftlichen Entwicklung von Lothringen zu sehen ist, kam es auch zu massiver Arbeitsmigration ins MinetteGebiet; zu den Migranten gehörten neben Italienern auch Luxemburger aus den ländlichen nördlicheren Gebieten. Das Luxemburger Wörterbuch (1950–1977)2 verzeichnet in diesem Zusammenhang die feste Wendung e geet op de Minett schaffen in der Bedeutung ‘zieht zur Erzgegend zum Arbeiten’. Der Begriff Minette selbst leitet sich von einer Diminutivform von frz. mine ‘kleine Mine’ her, und das Luxemburger Wörterbuch differenziert zwischen einer Bezeichnung für Eisenerz (de Minette (Maskulinum) oder d’Minette (Femininum)) und einer Bezeichnung der Region (d’Minett), die immer Maskulinum ist. Neben diesem metonymischen Terminus sind auch die geologischen Regionenbezeichnungen wie Minettsbaséng oder Bassin minier in Gebrauch. Auch die Bewohner selbst bezeichnen sich zuweilen als Minetter oder Leit aus dem/vum Minette. Eine interessante Entwicklung hat die Bezeichnung Minetts-

1 Für viele Hinweise danke ich Cristian Kollmann. 2 Das Luxemburger Wörterbuch (sowie andere luxemburgische Wörterbücher) ist im Rahmen des FNR-Forschungsprojektes

LexicoLux online zugänglich unter der Adresse: http://lexicolux.uni.lu.

111


Terres Rouges Sprache im Minette

dapp ‘Kerl aus dem Minette’ genommen: Ursprünglich als pejorativer Ausdruck für den Erzgrubenarbeiter entstanden, hat das Wort eine Bedeutungsverbesserung erfahren, indem die Bergarbeiter anfingen, sich durchaus selbstbewusst selbst als Minettsdäpp zu bezeichnen. Natürlich ist die Identifizierbarkeit von Sprachräumen, verstanden als Gebiete mit einer identifizierbaren, sich von der Umgebung abgrenzenden Sprechweise, an spezifische Sprachstrukturen gebunden: Idealerweise besitzt eine Region eine eigene Laut-, Wort- und Satzstruktur. Je deutlicher sich diese Strukturen von angrenzenden Regionen unterscheiden, desto größer ist der linguistische Abstand. Bei vollständiger Differenz liegen verschiedene Sprachen vor, bei größtenteils überlappenden Merkmalen spricht man von Dialektunterschieden. Neben diesen strukturlinguistischen Kriterien existieren aber auch außerlinguistische Merkmale, die einen Sprachraum maßgeblich mit definieren. Gemeint sind hier individuelle und kollektive Vorstellungen von und Einstellungen zu der Sprechweise einer bestimmten Region (sog. Spracheinstellungen, Sprachwertstrukturen). Diese Trennung zwischen innerlinguistischen sprachlichen Strukturen eines Sprachraumes und außerlinguistischen Meinungen und Vorstellungen über diesen Sprachraum ist zentral für jegliche neuere sprachwissenschaftliche Beschäftigung mit den Sprachräumen; und es wird sich im Verlauf dieser Analyse auch herausstellen, dass diese beiden Manifestationsbereiche nicht immer vollständig deckungsgleich sind.

Die außerlinguistischen Spracheinstellungen und Spachwissensstrukturen lassen sich z. B. durch gezieltes Fragen nach der Identifizierbarkeit der Sprechweise einer Region erheben. In der jüngsten Untersuchung von Fernand Fehlen wurden landesweit über 1000 Teilnehmer nach solchen regionenbezogenen Spracheinstellungen abgefragt (Fehlen 2009). Abb.1 zeigt die Resultate für die Frage, ob die Teilnehmer der Meinung sind, dass die Sprechweise ihrer Region erkannt werden kann. Erwartungsgemäß finden sich hohe Werte bei den als sehr dialektal geprägt bekannten Regionen des Nordens (Wiltz, Vianden, Clerf) und Westens (Redingen) sowie der Mosel (Remich), aber auch der Kanton Esch-Alzette erzielt hier mit ca. 82 % sehr hohe Werte. Dies bedeutet, dass die meisten Personen sich sehr sicher sind, dass Luxemburger heraushören können, ob eine Person aus dem Süden kommt oder nicht. Im Bewusstsein vieler Luxemburger existiert damit ein (wie auch immer geartetes) Wissen um die Region ‚Minette‘. Wichtig hervorzuheben ist jedoch, dass es sich hierbei immer um subjektive Einstellungen zur Sprache handelt, die sich auf der Grundlage zahlreicher Merkmale in einem kulturellen Konstruktionsprozess herausgebildet haben. Dazu gehört u. a. die historische Tradierung des Regionenbewusstseins (z. B. durch Redensarten), das Wissen um entsprechende regional-administrative Strukturen, die Präsenz der Region in den Medien und natürlich auch die Kenntnis von Personen mit der für den Süden typischen Sprechweise.

Graphique 12 : Peut-on identifier les habitants de votre région par leur accent? Pourcentage de OUI selon les cantons (Ceux qui savent reconnaître les variations régionales, N = 1053

Wilz Vianden Redange Clervaux Echternach Remich Esch-sur-Alzette Diekirch Capellen Grevenmacher Luxembourg-ville Luxembourg-campagne Mersch 0%

20%

40%

60%

Abb.1: Subjektive Identifizierbarkeit Regionen (aus Fehlen 2009: 17)

112

von

80%

100%

luxemburgischen


Terres Rouges

Danach gefragt, wie viele Personen in den luxemburgischen Kantonen die regionaltypische Sprechweise verwenden, kommt Fehlen (2009) zu folgenden Ergebnissen (siehe Abb.2). Auch hier nimmt der Kanton Esch-Alzette zusammen mit weiteren Kantonen, die für ihren Dialekt bekannt sind, eine Spitzenstellung ein: 40 % der Befragten gaben an, dass man von der regionalspezifischen Sprechweise auf die Herkunft fast aller Einwohner schließen kann, nur ca. 20 % gaben an, dass dies nur noch auf ältere Menschen zutrifft. Gestützt werden diese subjektiven Einschätzungen, wenn Personen danach befragt werden, mit welchem Begriff sie ihre eigene Sprechweise bezeichnen. Ungefähr 80 % der Befragten gaben an, ‚wéi am Minette‘ oder ‚Minetter‘ zu sprechen, während ca. 20 % ihre Sprechweise als ‚normaalt Lëtzebuergesch‘, also als regional unauffällige, unmarkierte Sprechweise charakterisierten (Fehlen 2009: 180). Insgesamt lässt sich bei den Befragten eine feste Überzeugung ermitteln, wonach sehr viele Personen im Süden eine identifizierbare Sprechweise verwenden bzw. daran zu erkennen sind. Die Region ‚Minette‘ besitzt damit eine klare subjektive Verankerung auch als Sprachregion; und es bleibt als nächstes zu analysieren, wie die Realität der tatsächlichen Sprachverwendung aussieht.

2. Sprachliche Merkmale der Minette-Region Wenn es sich bei der Sprechweise der MinetteRegion um einen (zumindest teilweise) eigen-

Sprache im Minette

ständigen und abgrenzbaren Dialekt handeln soll, dann müssen im nächsten Schritt der Untersuchung exklusiv im Minette vorhandene sprachliche Merkmale gefunden werden, die in den umliegenden Gebieten nicht vor handen sind. Da es sich hierbei um sprachliche Variation innerhalb der Einzelsprache ‚Luxemburgisch‘ handelt, sind regionale Unterschiede v. a. im lautlichen Bereich zu erwarten, da die übrigen sprachlichen Ebenen wie Morphologie oder Satzbau räumlich gesehen nur wenig variieren. Neben der Beschreibung der lautlichen Merkmale in 2.1 folgt in 2.2 ein Abriss des Fachwortschatzes für Bergbau und Stahlindustrie.

2.1 Lautliche Merkmale Das Luxemburgische wurde bereits relativ früh im Rahmen der Dialektologie untersucht. Die ersten umfangreichen Spracherhebungen fanden im Zusammenhang mit dem Deutschen Sprachatlas (Wrede et al. 1926–1956) und dem Luxemburgischen Sprachatlas statt (Schmitt 1963; für einen Überblick vgl. Gilles/Moulin 2008), und es folgten verschiedene Einzeluntersuchungen. Die Dialektologie, die Wissenschaft von der Beschreibung sprachlicher Variation im Raum, und die Sprachgeschichte, die Erforschung des Sprachwandels in der Zeit, stehen seit jeher in engem Wechselverhältnis zu einander. In der Erforschung des Luxemburgischen manifestiert sich dies in den diversen Forschungslinien, die ihren Beginn gegen Ende des 19. Jhs. nahmen: Im Zuge der deutschen

Graphique 16 : Combien se démarquent par leur parler ? Pourcentage selon les cantons (L21 = OUI, N = 1059) baal alleguer

fill

eng gudd Partie

nëmmen die eeler Leit

Remich Vianden Echternach Redange Capellen Diekirch Wilz Luxembourg-ville Grevenmacher Luxembourg-campagne Esch-sur-Alzette Mersch Clervaux 0%

20%

40%

60%

80%

100%

Abb.2: Anteil der Personen, die einen luxemburgischen Regionaldialekt verwenden (aus Fehlen 2009: 177)

113


Terres Rouges Sprache im Minette

Dialektologie wurde das Luxemburgische als ein Dialekt des Gesamtsprachsystems ‚Deutsch‘ gesehen, das durch seine Randlage an der germanisch-romanischen Sprachgrenze einen anderen Entwicklungsweg als die deutschländischen Dialekte eingeschlagen hat. Durch Robert Bruch wurde die Perspektive dahingehend erweitert, dass die Verschränkung von romanischer und germanischer Dialektologie und Sprachgeschichte eben gerade in der luxemburgischen Kontaktzone zwischen beiden Sprachfamilien als konstitutives Prinzip in den Vordergrund gerückt wurde (vgl. v. a. Bruch 1953, 1954). In dem von Bruch (zu) weit gespannten zeitlichen wie räumlichen Kontext ist das Luxemburgische eingebunden in langandauernde Entwicklungslinien der europäischen Sprachgeschichte zwischen Seine und Weichsel, die sich in der Zeitspanne von der Spätsteinzeit bis in unsere Tage ereignet haben. Durch die Kreuzungen und Überlappungen dieser vielfältigen Prozesse (sog. ‚Fränkischer Kreislauf‘) auf dem luxemburgischen Territorium ist es zu der Herausbildung der verschiedenen luxemburgischen Unterdialekte gekommen. Um die regionale Variation und daran anschließend die exklusiv für eine bestimmte Region konstitutiven Merkmale zu ermitteln, ist der Forscher auf umfangreiche und verlässliche Sprachdaten angewiesen. Es ist als Glücksfall

zu betrachten, dass für das Gebiet Luxemburgs gleich mehrere Erhebungen aus unterschiedlichen Zeitstufen zur Verfügung stehen, die einen validen Einblick in den permanent ablaufenden Wandel der Sprache erlauben. Die erste flächendeckende Erhebung wurde im Jahr 1889 durch John Meier mit Hilfe der sog. ‚Wenkersätze‘ durchgeführt. Bei dieser, in der älteren Dialektologie üblichen Erhebungsweise, wurden pro Ortschaft Probanden aufgefordert, ihre lokale Aussprache von vierzig, auf Standarddeutsch vorliegenden Sätzen schriftlich festzuhalten. Dabei sollte die schriftliche Fassung die tatsächliche phonetische Realisierung weitgehend getreu abbilden. Für Luxemburg liegen solche ausgefüllten Wenkerbögen für ca. 340 Ortschaften vor.3 Abb. 3 zeigt einen Ausschnitt des Wenkerbogens für die Ortschaft Lamadelaine/Rollingen, auf dem der Proband ‚seine‘ Übersetzung der ersten 14 Wenkersätze eingetragen hat. Dabei fallen bereits die ersten südlichen Merkmale auf: Das Verb ‚schneien’ in Satz 2, zentralluxemburgisch schneien, erscheint hier in der typischen Form schnéden. Die zentralluxemburgische Verbform war (Satz 6) wird korrekt mit der Minetter Form woar wiedergegeben. Interessanterweise ist bis heute diese älteste dialektologische Quelle des Luxemburgischen noch nicht umfänglich ausgewertet worden.

Abb.3: Ausschnitt aus dem Wenkerbogen der Erhebung durch John Meier aus dem Jahr 1889 für die Ortschaft Lamadelaine/Rollingen

3 Online konsultierbar über den digitalen Luxemburgischen Sprachatlas ‚LuxSA‘ unter http://www.luxsa.info.

114


Terres Rouges

Sprache im Minette

Abb.4: Ausschnitt aus dem Wenkerbogen der Erhebung durch Richard Huss aus dem Jahr 1924/25 für die Ortschaft Lamadelaine/Rollingen

Auf die gleiche Art und Weise führte 1924/25 der ungarische Linguist Richard Huss in Zusammenarbeit mit der Luxemburgischen Sprachgesellschaft seine Erhebung durch (Huss 1927). Im Zentralarchiv der evangelischen Kirche in Rumänien (Hermannstadt/Sibiu) sind heute noch ca. 360 der Originalbögen vorhanden.4 Abb. 4 zeigt die ersten Sätze dieser Erhebung, und es lassen sich interessante sprachhistorische Vergleiche anstellen: Während es 1889 noch Wanter, Mann, gefall, gebrannt, Salz hieß, finden sich 1924/25 die auffälligen südwestlichen Formen Waunter, Maun, gefaul, gebraunt, Saulz, die weiter unten ausführlicher besprochen werden. Es hat damit also den Anschein, dass in den Huss’schen Daten die regionalen Formen zuverlässiger erhoben wurden als in der Meier’schen Erhebung. Weitere systematische Untersuchungen müssen allerdings durchgeführt werden, um diesen vorläufigen Eindruck zu untermauern. Nach diesem Überblick über die älteren Sprachdatenerhebungen zum Luxemburgischen sollen nun die spezifischen Merkmale des Minette-Dialekts herausgearbeitet werden. Dabei dienen die älteren, flächendeckenden Daten als Vergleichswerte für den Kontrast zur aktuellen Struktur des Minette-Dialekts. 2.1.1 Diphthongierungen Das erste zu besprechende Merkmal betrifft die Entwicklung von Wörtern, die einen mittel-

hochdeutsch-mittelfränkischen Kurzvokal enthalten (a, i, u), der von einem Sonoranten wie l oder n gefolgt wird. Am Beginn des 20. Jhs. sind für diese Wörter die folgenden Realisierungen belegt: Während im Zentralluxemburgischen ein einfacher Kurzvokal erscheint (gefall ‘gefallen’, Mëllech ‘Milch’, fonnt ‘ gefunden’), ist es in einigen südwestlichen Ortschaften zu auffälligen Diphthongierungen von a zu au, von i zu éi und von u zu ou gekommen. mhd-mfr. a salz kalf hals hant gebrant gevallen man

> au (vor Nasal/Lateral) > Saulz > Kaulef > Hauls > Haund > gebraunt > gefaul > Maun

mhd-mfr. i milch drinken

> éi (vor Nasal/Lateral) > Méilech > dréinken

mhd-mfr. u vunden

> ou (vor Nasal/Lateral) > fount

Über die regionale Verteilung dieser Formen informiert die Karte 2 des Luxemburgischen Sprachatlasses (siehe Abb. 5). Diese Karte basiert auf den oben vorgestellten älteren Erhebungen der Jahre 1889 und 1924/25 und ist somit als historische Situation zu begreifen. Obwohl

4 Teilweise existieren auch Phonogramm-Aufnahmen, allerdings keine für das Minette.

115


Terres Rouges Sprache im Minette

Abb.5: Regionale Verteilung der Reflexe für mhd. a vor Sonorant (aus: Schmitt (Hg.) (1963), Karte 2)

die Formen in der Minette-Region vorkommen (aber nicht in der Stadt Esch-Alzette), ist erkennbar, dass sie sich auch nördlich in den Kanton Redingen hinein erstrecken. Dieses Diphthongierungsmerkmal gilt also nicht ausschließlich für den Südwesten. Dieser Schwierigkeit, vollständig exklusive Merkmale für das Minette zu finden, wird noch öfters zu begegnen sein. Es ist offensichtlich, dass die Diphthongierung von a zu au im Südwesten eine Weiterentwicklung des mittelhochdeutschen Zustandes ist. Nach Bruch (1954: 82ff.) steht diese Entwicklung im Zusammenhang mit ähnlichen Diphthongierungen in den angrenzenden romanischen Varietäten (Wallonisch, nordfran116

zösische Varietäten), und er schließt daraus, dass die Diphthongierung durch den Sprachkontakt zwischen fränkischen und romanischen Volksgruppen entstanden ist. Vergleicht man die diphthongierende Region mit der nichtdiphthongierenden zentralluxemburgischen Region, dann zeigt sich, dass der Südwesten lautgeschichtlich betrachtet einen jüngeren Zustand repräsentiert, während das Zentralluxemburgische einen lautgeschichtlich älteren Zustand bewahrt hat. Wie sieht nun der heutige Sprachgebrauch im Südwesten aus? Eine flächendeckende Erhebung des heutigen Zustands, die für einen neuen luxemburgischen Sprachatlas notwendig wäre,


Terres Rouges

ist nach wie vor ein Forschungsdesiderat. In Gilles (1999) wurden mit einer ähnlichen Methode für einige Minette-Lokalitäten Erhebungen durchgeführt, die hier nun als Vergleichswerte dienen mögen. Es ergibt sich ein einfaches (und ernüchterndes) Bild: An keinem Erhebungsort ließen sich die auffälligen diphthongierten Formen mehr feststellen. Möglicherweise finden sich heute noch einzelne verstreute diphthongierte Formen, doch kann wohl davon ausgegangen werden, dass das Merkmal mehr oder weniger vollständig abgebaut wurde. Stattdessen finden sich die zentralluxemburgischen Formen Mann, gebrannt usw. Damit ist es also hier zu einem sog. ‚Dialektausgleich‘ in Richtung auf das Zentralluxemburgische gekommen. Für die Umgebung von Esch-Alzette können noch verdumpfte, lange Monophthonge vom Typ [ɔ:] ermittelt werden ([mɔ:n] für Mann),

Sprache im Minette

doch stellte schon Palgen (1948: 9) fest, dass dieser Laut mehr und mehr ausstirbt und nur noch bei alten Leuten zu hören ist. 2.1.2 Verdumpfung von a Das nächste Merkmal betrifft Wörter, die ein mittelhochdeutsches kurzes a gefolgt von einem r enthalten. Während im Zentralluxemburgischen dieses a gedehnt wurde, ist es im Süden ‚verdumpft‘ und diphthongiert, d. h. es hat sich zu einem o-und teilweise auch u-ähnlichen Laut entwickelt, dem ein a nachklingt. Beispiele sind: hoart/huart, Oarbecht, Goart/ Guart, Moart, Schoartech. In diese lautliche Entwicklung ist auch das französische Lehnwort gare > Goar hineingeraten, das wohl schon sehr früh auf luxemburgischem Gebiet verwendet wurde und dessen a im Süden ebenfalls zu o verdumpft bzw. zu oa diphthongiert wurde.

Abb.6: Regionale Verteilung der Reflexe für mhd. a vor r im Beispielwort schwarz (aus: Schmitt (Hg.) (1963), Karte 11)

117


Terres Rouges Sprache im Minette

Aus Abb. 6 für das Wort schwarz ist zu entnehmen, dass die verdumpften Formen, also schwoarts, schwuarts, überwiegend im gesamten Süden zu finden sind, aber auch noch vereinzelt über die Hauptstadt hinaus nördlich ausstrahlen; auch das Ösling weist vergleichbare Formen auf. Obwohl diese verdumpften Formen in weiten Landesteilen vorkommen, gelten Aussprachen wie schwoarts oder hoart trotzdem als typische Formen des Minettes. Dies kann nur damit erklärt werden, dass das Minette als Region in der regionalen und überregionalen Wahrnehmung in Luxemburg eine höhere Prägnanz als andere Regionen hat. In der heutigen Sprachverwendung sind die Formen Goart, hoart usw. noch vielfach zu hören. Obwohl diese regionalen Ausspracheformen außerhalb des Südwestens teilweise negativ konnotiert sind, werden sie dennoch mit gewissem Selbstbewusstsein zunehmend auch auf öffentlicher Beschilderung verwendet. Dazu gehört z. B. die offizielle Gemarkungsbezeichnung Schlassgoart ‚Schlossgarten‘ oder die Bushaltestelle Esch-Goar. Doch ist es auch bei diesem primären Dialektmerkmal zum Abbau gekommen. Nach Gilles (1999) wird nur noch ca. ein Drittel der Wörter mit der ursprünglichen Lautung realisiert. In diesem Dialektausgleichsprozess zu Gunsten des Zentralluxemburgischen kann es auch zu Mischungen kommen, indem z. B. parallel zu den regionalen Formen woar, woaren die zentralluxemburgischen Formen haart oder Gaart verwendet werden. 2.1.3 Unterbliebene Diphthongierung zu ai und au Wörter, die zentralluxemburgisch ein ei (phonetisch [ai]) oder au enthalten, erscheinen im Südwesten nach Auskunft der historischen Quellen mit kurzem ë oder o. Während im Zentralluxemburgischen schneiden, reiden, Freiden, Leit, haut, gebaut zu hören ist, lauten die Minetter Formen schnëdden, rëdden, Frëdden, Lëtt, hott, gebott. Dem Luxemburgischen Sprachatlas ist zu entnehmen, dass es sich hierbei ebenfalls nicht um ein exklusiv südwestliches Merkmal handelt. Vielmehr sind diese Formen mit kurzem Vokal anstelle eines Diphthongs auch in einem schmalen Streifen westlich der Hauptstadt sowie in einem größeren Gebiet im Osten vorhanden. Heute hat auch dieses Merkmal weitgehenden Abbau erfahren. Nur noch selten sind in diesen Wörtern die Kurzvokale zu hören. Eine gewisse 118

Resistenz zum Abbau von lautlichen Merkmalen zeigen die Ortsnamen. So entspricht dem offiziell französischen Ortsnamen Saeul (d. i. die französische Schreibweise für Sæul oder Säul < *Sǖl) im Luxemburgischen Sëll; die lautgeschichtlich erwartbare Variante Seil ist hingegen ungebräuchlich. 2.1.4 Tilgung von ch vor t Ein häufig anzutreffendes Merkmal aus dem Bereich des Konsonantismus betrifft die Tilgung des Konsonanten ch (ausgesprochen als [ɕ] oder als [x]), wenn diesem in der gleichen Silbe ein t folgt. Zentrum Nuecht bruecht schluechte Luucht Fruucht fiicht Gesiicht gemaach(t)

Minette Nuet bruet schlueten Lut Frut fit Gesit gemeet

‘Nacht’ ‘gebracht’ ‘schlachten’ ‘Licht’ ‘Frucht’ ‘feucht’ ‘Gesicht’ ‘gemacht’

Der Grund für diese Entwicklung dürfte in einer Tendenz zur lautlichen Vereinfachung liegen, wodurch komplexe Auslautverbindungen wie -cht auf einen einfachen Konsonanten reduziert werden. Diese Formen sind im Süden auch heute noch sehr häufig anzutreffen. Der Dialektausgleich in Richtung Zentralluxemburgisch scheint hier nicht zu greifen. Tatsächlich lässt sich heute sogar eine Ausbreitung der ch-losen Formen beobachten. So ist z. B. die Form Nuet auch im Zentrum des Landes zu hören. Ferner ist zu beachten, dass die Tilgung des ch-Konsonanten in ähnlicher Form auch im äußersten Norden zu finden ist (z. B. Lut, Nait ‚Nacht‘). Dies deutet darauf hin, dass die ch-losen Formen früher deutlich weiter im ganzen Land verbreitet waren und im Laufe der Zeit durch die Ausbreitung des Zentralluxemburgischen in den Süden bzw. Norden zurückgedrängt wurden. 2.1.5 basch de, huesch de, musch de: Palatalisierung von -st zu -ʃt Nach Ausweis des Luxemburgischen Sprachatlasses (Karte 167) ist der gesamte Süden (inklusive der Moselgegend) durch den Wandel der auslautenden Konsonantenverbindung von -st zu -ʃt (graphisch <scht>) charakterisiert. Von dieser Entwicklung sind sehr viele Wörter, aber auch grammatische Endungen betroffen.


Terres Rouges

Zentrum Fënster Schwëster Gréisst héchstens

Süden Fënschter Sëschter Gréischt héchschtens

Sprache im Minette

‘Fenster’ ‘Schwester’ ‘Größe’ ‘höchstens’

In flektierten Formen wie dem Partizip Perfekt (nicht eher: Partizip Präteritum) oder der 2. Person Singular des Verbs kann ebenfalls ‚palatalisiert‘ werden: Zentrum wëssen – gewosst schwätzen – hie schwätzt mussen – dir musst du schwätz

Süden wëssen – gewoscht schwätzen – hie schwätscht mussen – dir muscht du schwätsch

‘wissen – gewusst’ ‘sprechen – er spricht‘ ‘müssen – ihr müsst’ ‘du sprichst’

Besonders auffällig ist die Nebensatzkonstruktion mit Verben in der 2. Person Singular, denn auch hier kann die ‚gestrandete‘ Flexionsendung –s nach der Konjunktion zu sch werden. Zentrum pass op, datt s de net fälls

Süden pass op, datt sch de net fällsch

Heute ist dieses Merkmal besonders an der Mosel noch recht häufig vorhanden, im Minette selbst jedoch stark abgebaut.

2.1.6 mär an där Im eingangs angeführten Zitat von Rewenig wurde die auf die beiden Pronomen mir und dir bezogene Dialektalität der Minetter Formen mär und där, die als die Schiboleths des Südens gelten können, bereits thematisiert. Obwohl auch dieses Merkmal als ‚typisch Minette‘ eingestuft wird, informiert der Luxemburgische Sprachatlas (Karte 58), dass auch der äußerste Westen und das Westösling diese Formen aufweisen. Wiederum handelt es sich hierbei also um ein Merkmal, das in verschiedenen luxemburgischen Räumen anzutreffen ist, das jedoch in landläufiger Auffassung als exklusives Minette-Merkmal gilt. In der heutigen Sprachverwendung ist dieses Merkmal noch mit einer mittleren Häufigkeit anzutreffen. Es widersetzt sich damit stärker als andere Merkmale dem nivellierenden Einfluss des Zentralluxemburgischen (vgl. Gilles 1999: 252ff.). 2.1.7 Freideg, Freiden a Fredden Die letzte Variation betrifft die Realisierung der letzten Silbe in den Wochentagen. Die auf ein mit-

telhochdeutsch-mittelfränkisches -dag zurückgehende Endung -deg in Méindeg, Dënschdeg, Donneschdeg, Freideg, Samschdeg, Sonndeg ist in den meisten luxemburgischen Regionen anzutreffen. Wie die Freitag-Karte in Abb.7 zeigt, ist es jedoch ziemlich genau die Minette-Region, in der der Wochentag auf -en endet (Freiden in einem kleinen Gebiet um Garnich, Frëdden im südlicheren Gebiet). Stärker noch als alle übrigen bisher vorgestellten Merkmale hat damit die Aussprache der Wochentage als das prototypische MinetteMerkmal zu gelten. Die Variante Freiden, die ursprünglich nur in einem kleinen Gebiet beheimatet war, dürfte heute als die Leitvariante im Süden gelten und ist nicht von Dialektausgleichstendenzen betroffen. Mehr noch, Wochentagsnamen auf -en haben sich heute in ganz Luxemburg ausgebreitet. Eine Google-Recherche5 über alle luxemburgischen Webseiten ergibt, dass die -en-Formen heute bereits zwischen 12 und 50 % vorkommen, und es erscheint unwahrscheinlich, dass alle diese Webseiten aus dem Minette stammen

5 Es sei hier jedoch darauf hingewiesen, dass die Häufigkeitsangaben bei Google-Recherchen immer mit Vorsicht zu

genießen sind. Informationen über einen quantitativen Trend lassen sich dennoch daraus ableiten.

119


Terres Rouges Sprache im Minette

Abb.7: Regionale Variation von Freitag (aus: Schmitt (Hg.) (1963), Karte 109)

(siehe Abb.8). Damit liegt hier der interessante Fall vor, dass sich eine kleinräumig belegte Variante (hier: eine Minette-Variante) in ein größeres Gebiet hinein ausbreitet. Das Minette ist also heute nicht ausschließlich durch den Abbau von alten Formen charakterisiert, sondern zeigt hier vielmehr auch, dass es Einfluss auf das Zentralluxemburgische nimmt. Insgesamt zeigt sich, dass sich die Sprachform des Minettes nach Auskunft der verschiedenen historischen dialektologischen Quellen aus der ersten Hälfte des 20. Jhs. durch zahlreiche phonetische Merkmale von den umliegenden Sprachformen, insbesondere vom Zentralluxemburgischen unterscheidet. In der heutigen Sprachverwendung jedoch sind einige 120

dieser Merkmale verschwunden, zurückgegangen oder variabel verwendet, d. h. es ist eine Mischung zwischen originären Minetter Formen und neueren zentralluxemburgischen Formen festzustellen. Die charakteristischsten Merkmale heute sind die Verdumpfung bzw. Diphthongierung von a > oa (Goar) sowie das wortbezogene Merkmal mär/där. 2.2 Gléck op, Mineur! – Lexik der Schwerindustrie Abschließend sollen noch lexikalische Merkmale des Südwestens vorgestellt werden. Im Vergleich mit dem oben untersuchten Bereich der Phonetik lassen sich hier deutlich weniger Unterschiede zum Umland feststellen. Dies ist


Terres Rouges

Sprache im Minette

100%

en eg

90%

80%

70%

60%

50%

40%

30%

20%

10%

0% Méind-

Dënschd-

Donneschd--

Freid--

Samschd-

Sonnd-

Total

en

3350

695

876

2820

6290

7350

21381

eg

7100

5060

5680

6640

7570

7780

39830

Abb.8: Häufigkeiten der -en- bzw. -eg-Endung in den Wochentagen gemäß Google-Recherche (Stand: April 2008)

auch nicht weiter verwunderlich, da der Wortschatz (ebenso wie auch die Morphologie und der Satzbau) generell weniger im Raum variieren als lautliche Phänomene. Doch bevor der für den Süden charakteristische Wortschatz der Schwerindustrie behandelt wird, ist es lohnenswert, einen Blick auf den Alltagswortschatz zu werfen, in dem sich ebenfalls einige regionale Besonderheiten herausgebildet haben. In der folgenden Zusammenstellung von Tiernamen aus dem Luxemburger Wörterbuch sind nach der zentralluxemburgischen Variante (fett gedruckt) die lokalen Varianten wiedergegeben: Päiperlek ‘Schmetterling’: Fléif(l)ank (Differdingen), Pappillon, Pappeljong (Rodingen), Päipameel (Rümlingen), Pimpampel (Düdelingen); Seejomes ‘Ameise’: Seejemonsel (Bettemburg), Seejomes (Bettemburg, EschAlz., Körich, Oberkorn, Machtum, Messancy), Jeesomes (Esch-Alz.), Purjhelli (Rodingen), Bujhelli, Bujhelchen (Rodingen); Kiewerlek ‘Maikäfer’: Mollermal (Differdingen); Kreuzotter / Kräizotter: Wipper (Beles, Zolver); Léierchen ‘Lerche’: Li(i)tväilchen (Düdelingen) Neben regionalen Varianten der germanischen Wörter wie Fléi(f)lank oder Mollermal sind für den Süden besonders diejenigen Varianten interessant, die Spuren des Sprachkontakts mit dem unmittelbar angrenzenden Französischen erkennen lassen. Die Rodinger Variante Pappillon lässt sich als direkte Übernahme erklären, während bei Pappeljong eine Anpas-

sung an die luxemburgische Phonetik vorliegt. Die Form Wipper kann als eine Entlehnung aus dem französischen vipère gewertet werden. Konstitutives wirtschaftliches und gesellschaftliches Merkmal des Minettes war bis zu ihrem Rückgang in den 1970er Jahren die Schwerindustrie. Aufgrund der teilweisen Erschließung durch deutsche Gesellschaften und durch grenzüberschreitende Kooperationen mit französischsprachigen Partnern in Lothringen und Belgien, erweist sich die Terminologie der Schwerindustrie als geprägt durch deutsche und französische Einflüsse (vgl. auch Hess 1926). Geradezu symbolisch verdichtet zeigt sich dies im Bergmannsgruß Gléck op, Mineur! Für viele Termini lassen sich germanische und romanische Entsprechungen finden: Hauer > Schlepper > Kap > Stempel > Daach > Weck > Péckel >

Mineur Rouleur Chapeau

> ‘Holzkonstruktion in der Abbaustelle’ Chandelle > ‘Stützen in der Abbaustelle’ Plafong > ‘Dach der Abbaustelle’ Coin > ‘Keil’ Piosch > ‘Spitzhacke’

Für die spezifischen Arten des lokalen Eisenerzes haben sich vielfältige Bezeichnungen herausgebildet: Stackminett, wëll giel Minett, santeg Minett, Wiseminett. Zu finden ist die Minette in verschiedenen Lagen, den Couchen: 121


Terres Rouges Sprache im Minette

déi gro, déi rout, déi giel Couche. Bezeichnungen für das Arbeitsgerät stammen häufig aus dem Französischen: Turnéckel, Tourniquet, Turnicki Volée Krampong, Krampo Kall, Cale Longeron, Logeron

> > > > >

‘Handbohrmaschine’ ‘Sprengsalve’ ‘Eisenhaken’ ‘unterschobenes Holz, Keil’ ‘Schalholz’

Das Wort Buggi ‘Lore’ stammt hingegen aus der englischen Bergbauterminologie (< engl. buggy); ebenfalls aus dem Englischen kommt der Begriff Lorri (< engl. lorry). Ein interessanter sprachhistorischer Weg lässt sich für den Kräsi ‘Kies’ nachzeichnen. Es handelt sich hierbei um ein aus der französischen Bergbauterminologie (< frz. crassier, crasse) übernommenes Fachwort für ‘gekörnte Schlacke’, also um ein Abfallprodukt der Verhüttung. Im Laufe der Zeit hat Kräsi seine fachsprachliche Konnotation eingebüßt und ist in den Alltagswortschatz übergegangen.

3. Resümee Nach Ausweis der historischen Zeugnisse aus dem Beginn des 20. Jhs. lässt sich für das Minette ein luxemburgischer Dialekt ausmachen, der sich von den umgebenden Regionen durch zahlreiche sprachliche, überwiegend phonetische Merkmale absetzt. Viele dieser Merkmale sind jedoch nicht auf die eigentliche (südwestliche) Minette-Region eingeschränkt, sondern finden sich entweder im gesamten Süden beziehungsweise im gesamten Westen des Landes. Aufgrund der erhöhten sozialen wie räumlichen Mobilität und der zunehmenden Urbanisierung des Gebietes zwischen dem Minette und der Stadt Luxemburg hat der Sprachkontakt zu einem Abbau zahlreicher, originär Minetter Merkmale geführt und es fand Dialektausgleich in Richtung zentralluxemburgischer Sprachraum statt. Obwohl also festzustellen ist, dass sich der vormalige Minette-Dialekt heute als stark abgebaut und an das Zentralluxemburgische angeglichen präsentiert, ist es dennoch bemerkenswert, dass mindestens drei Eigenschaften quasi als ‚Exportschlager‘ ihren Weg in das Zentralluxemburgische hinein gefunden haben: Wie gezeigt, haben sich (1) die ch-lose Aussprache von Wörtern wie Nuet, bruet, geduet, (2) die auf -en auslautenden Varianten der

122

Wochentage (Freiden, Samschden, Sonnden ...) und (3) die Bezeichnung Kräsi aus dem Süden heraus ausgebreitet. Wie ist nun die augenfällige Inkongruenz zu erklären zwischen dem eindeutig nachweisbaren starken Bewusstsein über/um eine abgrenzbare Minette-Sprachvarietät und der tatsächlich vorhandenen linguistischen Struktur, die linguistisch betrachtet nur noch wenige Unterschiede zum Zentralluxemburgischen enthält? Zum einen spielt hier die wirkmächtige Vorstellung hinein, wonach eine Region, zudem eine Region, die durch starkes Regionalbewusstsein konstruiert wird, auch eine eigene, abgrenzbare Sprachvarietät besitzt bzw. besitzen sollte. Zum anderen darf der psychische Faktor nicht vernachlässigt werden, wonach die mentale Vorstellung eines Raums bzw. die Grenzziehung um einen Raum sich auch dann noch als wirksam erweist, wenn der Raum als solcher nicht mehr existiert. Diese Überlegung geht zurück auf die Raum-Theorie des Soziologen Georg Simmel aus dem Beginn des 20. Jhs.: Ist sie [die Grenze, PG] freilich erst zu einem räumlich-sinnlichen Gebilde geworden, das wir unabhängig von seinem soziologisch-praktischen Sinne in die Natur einzeichnen, so übt dies starke Rückwirkungen auf das Bewußtsein von dem Verhältnis der Parteien. […] [dann] wird sie zu einer lebendigen Energie […] (Simmel 1903/1995: 141). Die Wirkmächtigkeit des Raumes, aufgefasst als mentale, historisch konstruierte Vorstellung, ‚überlebt‘ die tatsächlichen sprachlichen Verhältnisse (vgl. Auer 2004). Dies trägt dann maßgeblich dazu bei, dass sich die Überzeugung, einen eigenen Dialekt zu sprechen, wie sie sich im Sprachbewusstsein und im Sprachwissen niederschlägt, auch dann noch erhält, wenn sich eben diese Sprachverhältnisse bereits verändert haben.


Terres Rouges

Sprache im Minette

Weiterführende Literatur AUER, Peter (2004). „Sprache, Grenze, Raum“. In: Zeitschrift für Sprachwissenschaft 23 (2), S. 149-179. BRUCH, Robert (1953). Grundlegung einer Geschichte des Luxemburgischen. Luxemburg (Publications littéraires et scientifiques du Ministère de l‘Éducation Nationale 1). BRUCH, Robert (1954). Das Luxemburgische im westfränkischen Kreis. Luxemburg (Publications littéraires et scientifiques du Ministère de l‘Éducation Nationale 2). FEHLEN, Fernand (2009). BaleineBis. Une enquête sur un marché linguistique multilingue en profonde mutation - Luxemburgs Sprachenmarkt im Wandel. Luxembourg (SESOPI - RED 12). GILLES, Peter (1999). Dialektausgleich im Lëtzebuergeschen. Zur phonetisch-phonologischen Fokussierung einer Nationalsprache. Tübingen (Phonai 44). GILLES, Peter / MOULIN, Claudine (2008). “Der digitale luxemburgische Sprachatlas (LuxSA). Stand und Perspektiven“. In: Germanistische Linguistik 190-191, S. 133-148. [Stephan Elspaß/Werner König (Hg.): Sprachgeographie digital - Die neue Generation der Sprachatlanten.] HESS, Joseph (1926). „Die sprachliche Eigenart der luxemburgischen Erzindustrie“. In: Jahrbuch

der Luxemburgischen Sprachgesellschaft 2, S. 47-49. HUSS, Richard (1927). Studien zum luxemburgischen Sprachatlas. Luxemburg (Beiträge zur luxemburgischen Sprach- und Volkskunde 2). LuxemburgischeWörterbuchkommission (Hg.) / Vorsitzender: TOCKERT, J. (1950-1977). Luxemburger Wörterbuch. 5 Bände. Luxemburg. [online verfügbar unter: http://lexicolux.uni.lu] SCHMITT, Ludwig Erich (Hg.) (1963). Luxemburgischer Sprachatlas. Laut- und Formenatlas von Robert BRUCH. Für den Druck vorbereitet von Jan GOOSSENS. Marburg, 16 S. 174 Ktn. (Deutscher Sprachatlas. Regionale Sprachatlanten 2). [online verfügbar unter http://www.luxsa.info] SIMMEL, Georg (1903). Soziologie des Raumes. In: Otthein Rammstedt (Hg.) (1995). Gesamtausgabe (Bd. 7: Aufsätze und Abhandlungen 1901-1908), Frankfurt am Main, S. 132-184. WREDE, Ferdinand / MITZKA, Walther / MARTIN, Bernhard (1926-1956). Deutscher Sprachatlas auf Grund des von Georg WENKER begründeten Sprachatlasses des Deutschen Reichs und mit Einschluß von Luxemburg in vereinfachter Form bearbeitet von Ferdinand WREDE, Walther MITZKA und Bernhard MARTIN. Marburg. [online verfügbar unter: http://www.diwa.info]

123



Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier Paul di Felice

Avant d’analyser quelques œuvres significatives d’artistes nationaux et internationaux dont les sujets se rapportent au thème général du Bassin minier, précisons d’abord les notions qui figurent dans le titre et qui délimitent le champ d’investigation. Une des caractéristiques du regard de l’artiste contemporain sur les choses de la vie est la sélectivité conceptuelle à travers laquelle il questionne la vision devenue fragmentaire dans un monde de plus en plus globalisé. Plus que jamais, les artistes d’aujourd’hui montrent que même à travers des médias dits objectifs comme la photographie, il y a autant de vérités qu’il y a multitude de points de vue. On parle de regard distancié mettant en relation les différentes réalités de l’artiste avec celles de l’objet analysé et interprété de façon objective ou créative. Ce regard va au-delà, en deçà des choses, les sujets servant souvent de prétextes pour mettre en avant une démarche artistique spécifique. Ainsi, en affrontant la réalité du monde, l’artiste se distancie des représentations que nous nous faisons à travers les images dominantes, et devant ce flux d’images, il met le spectateur en situation d’arrêt sur image, privilégiant l’analyse à la description. Il est évident que les exemples qui vont suivre ont été choisis en fonction de leur originalité et de leur esthétique contemporaine. Ce choix ne se veut aucunement exhaustif. Ici, le terme « contemporain » n’est pas uniquement une désignation chronologique, mais il reflète également une conception artistique particulière, qui sera développée à l’aide des analyses d’œuvres qui ont été réalisées dans le cadre des missions photographiques et des commandes artistiques au Bassin minier, lors des deux manifestations de Luxembourg, capitale européenne de la culture en 1995 et en 2007. Il s’agit exclusivement d’œuvres artistiques, tableaux photographiques et installations ayant été exposés à Luxembourg et en dehors des frontières. En général, quand on parle de représentations artistiques du sud du pays, ce sont surtout

les exemples modernistes d’artistes ouvriers, comme Emile Kirscht ou Jeannot Bewing, auxquels on pense. Autodidactes, ayant vécu l’expérience de l’ouvrier sidérurgiste, ces artistes avaient très bien réussi à travers la peinture et la sculpture abstraite à ré-interpréter l’univers de l’usine dans l’après-guerre. Alors que cette génération voyait encore dans l’acte créatif de l’art une espèce d’auto-libéralisation, voire de sublimation du quotidien, la génération d’artistes qui émerge dans les années 90 a un regard beaucoup plus décalé sur ce monde désormais en mutation dont elle découvre souvent elle-même le territoire, la population, la culture. Dans le cadre d’une mission photographique sur le thème de Paysages : lieux et nonlieux menée en 1995 pendant l’année culturelle Luxembourg capitale européenne de la culture, deux artistes sur les dix invités ont travaillé sur le Bassin minier. Deux interprétations différentes de ces notions de lieux et non-lieux allaient conduire cette mission à terme. D’abord, évoquons la référence évidente à Marc Augé qui poursuit son anthropologie du quotidien en explorant les non-lieux, qu’il définit comme des espaces d’anonymat1. Pour lui, les non-lieux sont aussi bien les installations nécessaires à la circulation accélérée des personnes et des biens (voies rapides, échangeurs, gares, aéroport, rond-point) que les moyens de transport euxmêmes (voitures, trains ou avions), tout comme les grandes chaînes hôtelières aux chambres interchangeables, les supermarchés, les zones commerciales et industrielles. Puis, plus proche des exemples qui se rapportent au thème des Terres Rouges du Bassin minier se trouve la définition de non-lieux que donnent les artistes du landart comme Robert Smithson. Leur intérêt porte sur l’évolution et la décomposition organiques des matériaux naturels dont sont issues les interventions artistiques dans la nature, souvent dans des lieux abandonnés. Décomposées dans le temps, sans

1 AUGE, Marc, Pour une anthropologie des mondes contemporains, Champs, Flammarion, Paris 1994.

125


Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

durée fixe, ces œuvres revendiquent leur caractère éphémère et remettent en question le temps et l’espace réels. L’idée de va-et-vient, voire de mutation d’un lieu qui devient en quelque sorte un non-lieu, accompagne l’éclatement de la notion de paysage sur laquelle ont travaillé les artistes de la mission photographique. Les travaux photographiques du Belge Gilbert Fastenaekens, réalisés au Luxembourg en 1995, témoignent des mutations de l’environnement post-industriel. Après avoir réalisé à la fin des années 80, une série de photographies en noir et blanc sur le thème du travail dans les usines du Bassin minier et participé à la mission photographique de la Datar en France en 1984, Gilbert Fastenaekens s’est fait remarquer par son style personnel, sa façon d’aborder l’espace à travers le paysage naturel et urbain. L’œuvre de cette période a été réunie dans les livres Nocturne et Essai pour une archéologie imaginaire. En 1987, lors d’une mission photographique sur le territoire de Belfort (Les quatre saisons du territoire), Gilbert Fastenaekens joint à la notion de paysage, petit espace circonscrit, toute la force d’une expérience intimiste. Celle-ci prendra toute son ampleur dans le périmètre délimité d’une forêt en ChampagneArdenne, sous le titre de Noces en 1988. L’artiste Gilbert Fastenaekens décrit bien cette symbiose avec les lieux : Après un certain temps, quand je n’attendais plus rien, quand j’avais oublié les raisons de ma présence, quand toute idée de fuite ou d’urgence avait disparu, survenaient des moments rares, de sensations fortes et sereines, qui me permettaient de me sentir pleinement dans l’instant des choses. Je me sentais devenir l’arbre, la pierre, le paysage, acceptant le temps présent pour ce qu’il était, révélant par là même son sens. Je m’écoulais avec lui et ressentais humblement que le passage symbolique du temporel au spatial dissipait l’éphémère pour n’indiquer que l’instant présent dans l’espace.2 En 1995, dans le cadre de la mission luxembourgeoise, Gilbert Fastenaekens, connu pour ses nuances de noir dans ses prises de vue

nocturnes, commence une nouvelle série en couleur. Mais son jeu avec la couleur a été très subtil. Alors que les nuances dans les tons gris de la série des Noces, en noir et blanc, expriment une certaine proximité avec le motif, ici la couleur l’aide à ce que l’image ne soit pas trop séduisante afin de pouvoir l’utiliser en tant qu’effet de distanciation. Ce choix, il l’a expliqué : « Il fallait trouver un moyen d’échapper à la séduction de la couleur et de ne pas rester paralysé devant la beauté du paysage. »3 A la recherche de lieux où il pouvait trouver un certain désordre, Gilbert Fastenaekens a présenté des terrains bâtards, des sites au passé industriel qui, après la crise économique, ont été apprivoisés en paysage. Thématiquement, il est proche de ce qu’il avait réalisé en ChampagneArdenne ; formellement, il s’en libère par une approche plus conceptuelle. Les photographies de grand format (1m sur 3m), prises avec une chambre photographique, présentent des terrains vagues où la nature semble avoir repris le dessus sur l’industrie. Sur la ligne d’horizon, placée à un tiers supérieur de l’image et occupant le plan médian, se regroupent de part et d’autre différents arbres qui contrastent avec la forêt d’arrière-plan aux formes floues et au sfumato rehaussé par un tirage volontairement éclairci. Le premier plan dominant l’image aux détails nets met en scène une grande flaque d’eau claire qui répond au gris clair du ciel et qui contraste avec la terre sombre. Sa forme cartographique évolue au centre d’une surface rectangulaire. Le véritable sujet de ce paysage se trouve justement là, au milieu de l’image. Gilbert Fastenaekens fait le portrait de ce vide, le paysage ne servant que de prétexte à l’expression des troublants rapports entre l’homme et la nature. L’artiste pose la question du redevenir nature en focalisant l’attention sur cette tache claire qui, selon les interprétations, peut devenir surface réfléchissante (une sorte de miroir ne reflétant plus rien) ou trou absorbant, s’ouvrant à d’autres nouvelles couches qui se succèdent par la force de la nature. Avec le regain d’intérêt du paysage dans les années 80, beaucoup d’artistes utilisant la photographie se sont inspirés des recherches autour des expériences du groupe américain New topographics (dont faisait partie Lewis

2 FASTENAEKENS, Gilbert, Noces, Arp éditions, 2004. 3 DI FELICE, Paul, Paysages : lieux et non-lieux, Les limites d’une mission photographique sur le paysage

126


Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

Joël Tettamanti, Lux, 2005, MUDAM courtesy, © Joël Tettamanti

Baltz, autre invité de cette mission luxembourgeoise). Sans s’attacher aux aspects écologiques, comme le font les artistes américains autour de Baltz, Fastenaekens déconstruit le paysage à partir d’une image apparemment banale, tout en cherchant l’interpellation, plus par l’absence que par la présence. Il rejoint ici le travail conceptuel du Néerlandais Wout Berger qui, à travers sa série Poisoned landscapes, esthétiquement proche des tableaux de paysages néerlandais, montre des photographies des sites irrémédiablement pollués mais qui conservent un côté vierge. Ce qu’on ne voit pas sur l’image – le sol pollué – est présenté sous forme de texte qui accompagne les photographies. Si le travail de Wout Berger est beaucoup plus conceptuel, on trouve néanmoins des correspondances avec la série plus poétique et intuitive de Gilbert Fastenaekens. Les deux artistes réinterprètent le paysage en tenant compte à la fois de ses dimen-

sions culturelles et naturelles. Chez Gilbert Fastenaekens, la beauté qu’il trouve dans ce qu’il appelle « ces paysages ré-apprivoisés » est marquée par ce processus de changement dans les rapports de force entre l’homme et la nature. Comme il le dit lui-même de cette série : « […] la nature est belle, mais domptée […] ; il n’existe aucun endroit où l’homme n’a mis sa main […]. Ces images de lieux sans racines, où la mémoire s’est effacée forment en quelque sorte le complément d’un paysage qui a été pensé socialement et économiquement par l’homme. »4 Les spectateurs de l’exposition Paysages : lieux et nonlieux avaient la possibilité de confronter les recherches de ces deux artistes et par là de relativiser les interprétations d’un artiste à l’autre. A dix ans d’écart, les photographies des « nouveaux » paysages industriels du sud du Luxembourg réalisées par Joël Tettamanti, sont à cheval entre le documentaire et la photographie plasticienne. Commandées par le

4 Ibid.

127


Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

Joël Tettamanti, Lux, 2005, MUDAM courtesy, © Joël Tettamanti

MUDAM dans le cadre de Galerie : Portraits du Luxembourg, elles montrent les mutations du paysage industriel luxembourgeois. Ayant eu carte blanche pour travailler sur un aspect du Luxembourg, le Suisse Joël Tettamanti nous a révélé récemment que son choix s’était porté assez vite sur le sud du pays : Les promenades à Luxembourg se sont très vite concentrées sur ces sites. Je trouvais que c’était très intéressant de se concentrer sur ce passé presque oublié, en quelque sorte caché du Luxembourg, loin du Kirchberg et des quartiers bourgeois de Luxembourg. Sans doute aussi une référence à ma famille d’origine italienne qui elle aussi avait dû immigrer en Suisse pour des raisons économiques, comme beaucoup d’Italiens l’ont fait au Luxembourg au moment du développement de la sidérurgie.5 Mais plutôt que de s’intéresser directement aux hommes, Joël Tettamanti recherche

les lieux en pleines mutations, chargés d’un lourd passé, qui s’offrent aujourd’hui à l’artiste sous des aspects les plus insolites. L’ancienne centrale thermique de l’usine de Terre Rouge à Esch-sur-Alzette en est un bel exemple. Les éléments de béton sont des restes des cheminées qui avaient été détruites (dynamitées). Le cadrage et le principe d’all-over confèrent une dimension plastique à ces tirages de grands formats. De même, ces sites en ruines aux formes et couleurs étonnantes qui composent ces photographies parfois étranges, nous incitent à la projection imaginaire, à développer en quelque sorte le regard créatif qui tient compte de la complexité des informations visuelles véhiculées. Comme on peut le lire dans l’article du premier catalogue du Mudam : Les études de Joël Tettamanti de lieux et non-lieux traduisent l’idée de palimpseste et nous poussent à réagir face au vide, au déconstruit d’un territoire abandonné. Tout en

5 TETTAMANTI, Joël, interview non publiée 2008, archives Café Crème.

128


Terres Rouges

nous confrontant aux problèmes de l’environnement, ces états des lieux rendent aussi hommage à une région active dans le passé qui aujourd’hui n’est plus « regardée » qu’à travers l’œil du photographe.6 Qui est à l’origine de ce propos ? Ces exemples rendent compte de cette tendance des jeunes photographes, comme l’écrit Christian Gattinoni dans la Photographie contemporaine, « […] [à] privilégier désormais les vues d’espaces intermédiaires, […] des lieux transitoires ou provisoires à l’identité incertaine […] et [à] expérimenter une esthétique capable de concilier conscience politique au sens originel donné par les Grecs anciens à ce terme et enjeux purement formels7 ». De même, comme les photographies de Fastenaekens et de Berger, les travaux de Joël Tettamanti nous invitent à regarder ce qui n’est pas toujours dans notre champ de vision et à participer de façon critique à leur vision détachée d’une certaine réalité luxembourgeoise.

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

La mission Deep south, réflexion sur le sud du Luxembourg, dans le cadre des Sentiers rouges, Konscht am Besch, projet initié en 2003 par l’association CIGL, a été confiée à quatre photographes luxembourgeois : Patrick Galbats, Romain Girtgen, Jeanine Unsen et Roger Wagner. Leur rôle a consisté à capter et à retenir une situation précise du territoire à travers les thèmes suivants : nature, patrimoine architectural, espaces urbains, habitat et population. La sensibilité du photographe luxembourgeois Romain Girtgen est proche de l’esthétique de Gilbert Fastenaekens, mais correspond aussi par ses compositions et ses choix formels, comme celle de Roger Wagner, à l’école de Düsseldorf notamment représentée par des œuvres d’Andreas Gursky des années 90. Il y a une similitude avec la photographie Dudelange de Fastenaekens, mais l’approche de Girtgen est moins directe. La force de la flaque est estompée par une intégration plus forte du plan

Romain Girtgen, Bascharage, 2007, Mission photographique Deep south, CIGL courtesy, © Romain Girtgen

6 DI FELICE, Paul, Regards distanciés sur le Luxembourg, in Mudam Luxembourg Eldorado, édition Mudam,

Luxembourg 2006.

7 GATTINONI, Christian, VIGOUROUX Yannick, La photographie contemporaine, Édition Scala, Paris 2002.

129


Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

d’eau dans le paysage. La composition est plus équilibrée, la ligne d’horizon est exactement au milieu de l’image. Les détails sont plus flous, mais l’ensemble révèle davantage le site qui se caractérise par son opposition entre terrain industriel et paysage naturel. Le contraste entre le ciel vide, gris clair et le sol jaunâtre et brun est nuancé par la bande claire de l’eau qui traverse la photographie horizontalement en faisant écho au ciel, alors que les branches des arbres et les mats électriques en filigranes rythment verticalement l’espace vide de la partie supérieure de la photographie. Ces différences, on les perçoit aussi dans les propos de Romain Girtgen qui, en tant que Luxembourgeois, est concerné différemment par les vicissitudes du paysage : « Lors de cette mission photographique, j’ai fixé mon intérêt sur la recherche des vestiges de l’implantation sidérurgique et sur la documentation des changements visibles des intérêts économiques qui en résultent, afin de montrer les multiples muta-

tions de l’aménagement urbain au sud du GrandDuché. »8 La photographie est amusante et choquante à la fois. Le jeu formel y est intéressant : les poteaux et les câbles électriques rythment la composition. Chez Girtgen comme chez Galbats, nous sommes en plein « non-lieu », les repères visuels étant d’ordre purement plastique, l’image révèle de façon critique la modification radicale de notre relation à l’espace. Un des premiers photographes s’inspirant de l’école de Düsseldorf est le Luxembourgeois Roger Wagner. Dans sa série sur les intérieurs des gens du sud, réalisée dans le cadre de Deep south, il montre ses intérêts pour l’approche typologique, sérielle. L’absence / présence de l’humain, démarche récurrente dans son travail, prend ici une dimension presque théâtrale de mise en scène. Sa série joue sur cette limite entre l’enregistrement d’un moment, le hic et nunc cher aux artistes contemporains, et la construction de l’image comme processus de monumentalisation.

Romain Girtgen, Bascharage, 2007, Mission photographique Deep south, CIGL courtesy, © Romain Girtgen

8 GIRTGEN, Romain, in Deep south, réflexion sur le sud du Luxembourg, CIGL, Schifflange 2007.

130


Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

Carole Chaine, Adventices, 2007, Sentiers rouges, CIGL courtesy, © Carole Chaine

Patrick Galbats, Bascharage, 2007, Mission photographique Deep south, CIGL courtesy, © Patrick Galbats

131


Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

En jouant sur le privé et le public, la jeune photographe Jeanine Unsen ne cache pas la mise en scène dans ses photographies posées. Le concept est simple. Pour la mission de Deep south, elle a demandé à des personnes du sud de choisir un lieu de leur région qui leur importait. Pas forcément un bel endroit, mais un espace qui raconte quelque chose, qui leur tient à cœur. Pour ajouter une touche d’intimité au portrait, elle leur a demandé au préalable d’apporter un objet personnel. Les lieux et les rapports des objets ne sont pas révélés au spectateur. A lui de continuer ce témoignage révélateur et énigmatique à la fois, en projetant ses propres histoires dans ce mélange polyvalent de souvenirs visuels. Dans un autre registre, mais également dans le cadre des Sentiers rouges, Katharina Krenkel, artiste allemande, a réalisé une œuvre in situ sur un des sentiers pédestres de Schifflange. Femme sculpteur, elle utilise toujours le tricotage, le maillage qu’elle revendique comme occupation féminine, sans connotation négative de femme au foyer (sujet qui revient souvent dans son œuvre). Ces travaux nous font penser à des oeuvres telles que Cogito ergo sum,

dans lesquelles Rose Marie Trockel, artiste allemande, a utilisé sans complexe le crochet pour rappeler que les femmes sont des êtres pensants. Comme Trockel, Katharina Krenkel s’amuse à utiliser les techniques féminines traditionnelles (la couture, le tricot, la maille) tout en s’appropriant par ce jeu connoté les dispositifs du site et non-site, et en questionnant les dichotomies entre extérieur et intérieur, entre construit et vivant. Dans le texte du catalogue les Sentiers rouges, Yoann Van Parys remarque : Dans l’usage du tissu comme matériau artistique et plus encore comme matériau sculptural, on en arrive très logiquement à produire un travail qui se trouve concerné par la question du corps. Cette interrogation peut être posée dans l’œuvre de façon plus ou moins explicite : souvent elle est présente. C’est que le tissu est semblable à la peau qui nous couvre, fait notre apparence, dessine nos formes : enjeu sculptural tout autant qu’existentiel. Et conséquemment, de voir l’artiste aborder des sujets tels que ceux des origines, de la naissance, de la maternité […].9

Roger Wagner, Dudelange, 2007, Mission photographique Deep south, CIGL courtesy, © Roger Wagner

9 VAN PARYS, Yoann, in Sentiers rouges. Catalogue des œuvres réalisées dans le cadre de l’édition, CIGL, Schifflange 2007.

132


Terres Rouges

Vu l’emplacement proche des minières, il est intéressant de voir comment l’artiste récupère cette terre virile des mineurs. La question de l’immigration est métaphoriquement exprimée par l’artiste luxembourgeoise Carole Chaine, dans son installation intitulée Adventices. Celle-ci est constituée de panneaux de signalisation à l’intérieur desquels figurent des images sérigraphiées de détails de photographies de mauvaises herbes. Ces panneaux de signalisation rehaussent par leur bord rouge l’idée de l’intrusion. Leur installation près des gares, lieux de passage par excellence, accentue l’idée de plantes venues d’ailleurs ou d’herbes migratrices. Sorties hors de leur contexte habituel, abandonnées sur ces lieux urbains, elles dérangent et éveillent la curiosité du passant, du voyageur. Avec Adventices, le nom scientifique donné aux mauvaises herbes, Carole Chaine réhabilite l’image négative de ces plantes, comme elle l’exprime dans une interview dans le cadre de la publication du catalogue d’exposition : Inspirée des lectures de Gilles Clément et soucieuse de me tenir au thème fédérateur de 2007

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

sur les migrations, j’avais envie dans le cadre du projet Sentiers rouges de mettre en valeur des plantes considérées comme mauvaises. Des plantes envahissantes qui migrent sans invitation dans nos jardins et nos cultures, mais qui font partie de cet immense jardin qu’est la planète. Ces plantes envahissantes, que nous rejetons, au travers d’une classification vulgarisée, mauvaise herbe, sont dans ce projet mises en valeur. Attirer l’attention du spectateur par rapport à une plante qui le dérange et qui perturbe l’organisation de son jardin, est l’objectif. Qui est donc cet intrus ? Qui sont ces végétaux qui troublent le paysage arrangé par l’homme ? Personne ne se pose de questions sur ces graminées migratrices.10 L’approche conceptuelle est symptomatique pour cette jeune génération d’artistes vivant les vicissitudes du paysage de façon décalée et distanciée. Minimaliste, conceptuel, influencé par des artistes comme Barbara Krüger qui utilisent l’espace public pour y introduire des messages insolites, le Belge Djos Janssens a réalisé dans

Djos Janssens, A bridge too far, 2007, Sentiers rouges, CIGL courtesy, © Djos Janssens

10 Ibid.

133


Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

le cadre des Sentiers rouges cette œuvre intitulée A bridge too far. L’endroit de l’installation est banal, sans caractéristiques, à part le dédoublement du pont qui rend celui-ci insolite avant même l’intervention de l’artiste. Le long de la route de Differdange, à Soleuvre, ce lieu-dit appelé Nonnebësch en luxembourgeois a inspiré Janssens pour la réalisation de cette installation, qui consiste en un travail de lettrage sur plaques métalliques fixées horizontalement sur les deux côtés du deuxième pont et illuminées par de petites ampoules le soir. La question What’s wrong with Hollywood? en plein Bassin minier inscrite sur le pont au lieu-dit Nonnebësch nous interpelle par son effet déconstructeur auquel s’ajoute un jeu de mots savoureux par la traduction comme l’évoque l’auteur : « Nonnebësch […] holy wood ? »11 D’un côté, l’industrie du cinéma, les lieux magiques, les héros en scènes et l’architecture en papier mâché ; de l’autre, l’industrie finissante, les rêves déchus, toutes les projections d’une résistance au quotidien. Retournons à la mission photographique de 1995 afin d’analyser l’œuvre d’un grand artiste et théoricien de la photographie, l’Espagnol Joan Fontcuberta dont la résistance s’exprime à travers le détournement artistique du quotidien. Ses frottogrammes, photogrammes et chimigrammes, développés à la fin des années 80, sont à l’opposé de ces images conformes aux objectifs programmatiques de la photographie réalisée avec la chambre photographique, comme nous l’avons vu chez les photographes de Deep south, génération en quelque sorte héritière de l’école des Becher de Düsseldorf. Dans son livre Le baiser de Judas, J. Fontcuberta explique sa démarche : Dans les années 90, j’ai commencé un travail sur le paysage industriel, entendu comme dépôt d’archéologies culturelles, historiques, humaines, physiques et matérielles. La morphologie de l’usine et le monde de la technologie, qui avaient fasciné les artistes des avantgardes, apparaissent en cette fin de siècle comme le point mort d’une révolution lointaine dont les échos nous parlent d’une force et d’un dramatisme humain révolus. Le capitalisme tardif a condamné ce paysage morose à se rénover ou à mourir, et nous assistons avec mélancolie

à la métamorphose du monument en ruine. Le projet consistait techniquement à réaliser des photogrammes sur des photographies. Pour les photogrammes, je récupérai des déchets et des matériaux trouvés par hasard (pièces mécaniques abîmées, ferraille…) au cours de promenades dans des zones portuaires, près des usines ou des zones industrielles. Les photographies sur lesquelles je faisais les photogrammes sont celles qui décrivaient précisément les parages où les matériaux ont été trouvés.12 Après les collages créatifs mettant en scène le monde animal et végétal dans des confrontations que Christian Caujolle appelle les greffes photographiques13, cette série particulièrement picturale explore une autre technique empruntée aux avant-gardes artistiques, le photogramme. Comme pour ses frottogrammes, mélange de frottage du négatif et du photogramme, Joan Fontcuberta s’approprie les techniques de la photographie par empreinte directe d’artistes dada comme Christian Schad et Man Ray, inventeurs de ces procédés appelés respectivement schadographies et rayogrammes à partir de 1918. Fontcuberta, dès ses premières séries, interroge la relation de la photographie au réel. A travers ces techniques créatives qui marquent une certaine liberté par rapport au médium, il pervertit les illusions originelles de ce dernier : l’empreinte immédiate comme vérité absolue se révèle être moins vraie que la photographie prise avec un appareil. Dans Altos Hornos de Vizcaya, à Bilbao comme dans la série réalisée au moment de la mission photographique au Luxembourg, particulièrement à Esch et à Dudelange, Joan Fontcuberta confronte l’empreinte photographique de l’objet trouvé à l’image réalisée sur le site même. Le travail de laboratoire réunit ces différents éléments qui sont complétés par des virages aléatoires et qui, par cette patine liante, donnent une dimension plastique aux photographies. Ainsi, les différents éléments sortis de la réalité, transcrits dans différents langages photographiques, semblent du coup flotter dans une atmosphère onirique. Comme des palimpsestes, ces photographies se construisent couche par couche en laissant apparaître les anciennes traces en contact avec les nouvelles, mais

11 Ibid. 12 FONTCUBERTA, Joan, Le baiser de Judas, Actes Sud, Arles 2005.

134


Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

Katharina Krenkel, Wollformationen, 2007, Sentiers rouges, CGIL courtesy, © Katharina Krenkelt

aussi en révélant la stratification de la mémoire. Chez François Méchain, autre artiste invité lors de la mission photographique de 1995 et de 2001, l’acte sculptural, auquel il associe le moment photographique, est préfiguré par un travail de recherche critique sur le lieu où il explore toutes les strates mnémoniques, géographiques, historiques et politiques du paysage. Plus qu’une traduction de la vérité unique et réductrice, l’œuvre de François Méchain est d’abord un moment d’interrogation sur la représentation : « L’objet de sa prise de vue n’est plus la réflexion d’une nature et de sa lumière […] mais une réflexion sur la nature de la photographie. »14 Tout en continuant à explorer tous les registres possibles pour ses investigations, François Méchain voit de plus en plus dans l’acte créateur une manière d’appréhender le monde. L’art, pour lui, est en quelque sorte une gestion des tensions et un exercice répété, engagé et critique des choses qui nous entourent. Ainsi l’engagement de l’artiste le porte au-delà de la seule raison paysagère dans une multitude d’in-

terprétations où se joue ce que Michel Guérin appelle la « dialectique en acte entre l’ordre des concepts, l’énergie des corps et la force des choses15 ». Le travail de François Méchain procède toujours de la mise en situation des liens, des relations, des forces et des tensions. Dans Abri de fortune, tel un abri de SDF, l’artiste a créé une sculpture éphémère en tôle, perchée sur un arbre au milieu du jardin de l’ancienne villa du directeur de l’Arbed, actuellement le musée de la ville et le Centre Nei Liicht. Le dispositif a été réalisé in situ, alors que le travail photographique pour lequel la sculpture a servi de base, a été montré à la galerie de la villa. En opposant l’éphémère au durable, le vivant au construit, le politique à la métaphysique, le photographique au sculptural, l’artiste nous interpelle sans cesse pour que nous nous rendions compte de ce qui se trouve devant voire derrière l’image. Comment conclure ce petit parcours sur la région du Bassin minier si ce n’est en constatant

13 CAUJOLLE, Christian, Joan Fontcuberta, Phaidon Press, London 2001. 14 LAMBERT, Frédéric, Les hypothèses du paysage, in MECHAIN, François, Paysages de l’improbable, Marval,

Paris 1989.

15 GARRAUD, Colette, GUERIN, Michel, François Mechain, l’exercice des choses, Somogy Éditions, Paris 2002.

135


Terres Rouges

Art contemporain : Regards distanciés sur le Bassin minier

que l’analyse des œuvres rend compte de sa diversité et de sa richesse dans la représentation artistique, tout en montrant ses liens avec d’autres situations et les correspondances qu’elle entretient avec d’autres expressions à travers l’histoire récente de l’art contemporain. Notre parcours aura permis de proposer de nouvelles lectures d’œuvres encore peu connues mais néanmoins déjà intégrées à notre patrimoine.

136

Dans ces regards distanciés d’artistes contemporains, nous avons aussi pu voir comment ces derniers parviennent aujourd’hui à créer des relations de tension entre les recherches plastiques qui alimentent leur œuvre et le passage à l’acte face à une réalité sur laquelle ils ont été invités à travailler. Il en résulte de nouvelles rencontres ouvrant de nouveaux espaces, aussi bien pour ce qui concerne l’image d’une région que pour ce qui relève de celle de l’artiste.


Terres Rouges

Die räumlichen Implikationen des Projektes Belval-Ouest

Die räumlichen Implikationen des Projektes Belval-Ouest Christian Schulz

Vorbemerkungen Mit einer Fläche von insgesamt 120 ha (davon 70 ha Bauland) gehört die Reaktivierung der Industriebrache Belval-Ouest zu den derzeit größten städtebaulichen Entwicklungsvorhaben in Europa. Westlich des noch in Betrieb befindlichen Elektrostahlwerks der ARCELOR-MITTALGruppe entsteht auf dem 1996 aufgegebenen Betriebsgelände (Roheisenphase, Kokerei) zwischen Esch-sur-Alzette und Sanem ein neuer Stadtteil, der in naher Zukunft 6.000 bis 7.000 Einwohner sowie 20.000 bis 25.000 Arbeitsplätze beherbergen soll. Insgesamt 1,2 Mio. m2 Bruttogeschossfläche sind in den neuen Büround Wohngebäuden vorgesehen. Der halbstaatlichen1 Entwicklungsgesellschaft AGORA obliegt die Aufbereitung und Erschließung der Flächen, die Schaffung der planungsrechtlichen Voraussetzungen sowie die Vermarktung des Standorts, während der staatliche, dem Ministère du Développement durable et des Infrastructures unterstehende Fonds Belval ausschließlich für die öffentlichen Bauvorhaben sowie die Konservierung des industriekulturellen Erbes (s.u.) zuständig ist. Die geplanten öffentlichen Investitionen belaufen sich auf ca. 1 Milliarde Euro, davon entfallen mehr als 50% auf die Cité des Sciences, den künftigen Standort der Université du Luxembourg sowie weiterer öffentlicher Forschungseinrichtungen. Ziel des Beitrags ist es, einen Überblick über die strategisch-planerischen Facetten des Projekts zu geben und gleichzeitig dessen mög-

lichen räumlichen Implikationen zu diskutieren. Bei letzteren handelt es sich zumeist um persönliche Einschätzungen, da es an entsprechenden wissenschaftlichen Expertisen (bisher) mangelt. Im ersten Teil wird der allgemeine raumplanerische Kontext dargestellt. Im nächsten Schritt werden die Grundzüge des Masterplans für das Projektgebiet vorgestellt, bevor detaillierter auf städtebauliche Aspekte des Vorhabens eingegangen wird. Ein besonderer Schwerpunkt liegt sodann auf der Rolle der Cité des Sciences. Der abschließende Ausblick tritt den Versuch an, Entwicklungschancen und -probleme des Standorts sowie seine Bedeutung für das lokale städtische Gefüge herauszuarbeiten.

Raumentwicklungspolitischer Kontext Nicht zuletzt aufgrund seiner grenznahen Lage kann das Projekt Belval-Ouest nicht nur im nationalen, d.h. landesplanerischen Kontext gesehen werden, sondern muss zunächst in einen größeren räumlichen Zusammenhang eingeordnet werden. Auf Ebene der so genannten Großregion2 zeichnet sich seit einigen Jahren ab, dass das Großherzogtum Luxemburg aufgrund seiner wirtschaftlichen Prosperität und demographischen Dynamik zu einem Entwicklungspol geworden ist, der weit über die Landesgrenzen ausstrahlt und unter anderem große Zahlen von Grenzpendlern aus den Nachbarregionen anzieht3. Laufende Forschungsprojekte des CEPS/INSTEAD sowie der Université du

1 Anteilseigner dieser im Jahr 2000 gegründeten Kommanditgesellschaft sind zu je 50% ARCELOR-MITTAL sowie der

Luxemburgische Staat; an ihrem Conseil de Gérance wirken ferner die beiden Gemeinden Esch-sur-Alzette und Sanem mit. 2 Die „Großregion“ bezeichnet einen grenzüberschreitenden Kooperationsraum, zu dem neben dem Großherzogtum die französische Region Lothringen, die deutschen Bundesländer Rheinland-Pfalz und Saarland sowie die belgische Region Wallonien (inkl. der Deutschsprachigen und der Französischen Gemeinschaft) gehören. Mit über elf Millionen Einwohnern und einer Fläche von über 65.000 km2 handelt es sich dabei um den größten subnationalen Kooperationsraum in Europa. 3 WILLE, Christian / BLÄSER, Ralf, Grenzgänger im Großherzogtum Luxemburg. In: Geographische Rundschau 61-1 (2009), S. 36-42.

137


Terres Rouges

Die räumlichen Implikationen des Projektes Belval-Ouest

Luxembourg widmen sich diesen so genannten „Metropolisierungstendenzen“ 4 Luxemburgs und deren grenzüberschreitend interregionalen Konsequenzen5. Besonders wichtige Arbeitsmarktimpulse gehen von den hochqualifizierten (Dienstleistungs-)Arbeitsplätzen aus, wie sie in Luxemburg v.a. im Finanzsektor und dessen Umfeld, aber auch in den zahlreichen europäischen Institutionen entstanden sind6. Zwar ist das Gros dieser Arbeitsplätze in der Hauptstadt Luxemburg und den angrenzenden Gemeinden konzentriert, jedoch zeigen sich zunehmend Dezentralisierungstendenzen7 - vor allem von Back-Office-Aktivitäten, wie sie etwa bereits am Standort Belval-Ouest anzutreffen sind (s.u.). Der wirtschaftliche Aufschwung der letzten beiden Jahrzehnte hat nicht nur grenzüberschreitende Arbeitsmarktverflechtungen intensiviert, sondern auch zu einem wachsenden Druck auf den nationalen Immobilienmarkt geführt. Dies gilt sowohl für das Segment der Wohnimmobilien, das eine rasante Preisentwicklung erfuhr8, als auch für Gewerbeimmobilien. Der luxemburgische Markt für Büroimmobilien verzeichnet seit Jahren die europaweit niedrigsten Vakanzraten (derzeit knapp über 2%)9, d.h. ansiedelnde bzw. expandierende Unternehmen sind mit großen Schwierigkeiten bei der Suche nach geeigneten Flächen konfrontiert. Dieser Entwicklungsdruck sowie die unausgewogene Raumstruktur durch die Dominanz des Oberzentrums Luxemburg-Stadt sind Ausgangspunkt einer auf Dezentralisierung ausgerichteten Raumentwicklungspolitik, wie sie das Programme Directeur de l’Aménagement du Territoire10 aus dem Jahr 2003 vorgibt. Als landesplanerisches Leitbild wird hier das Konzept der „déconcentration concentrée“ (in der

deutschen Fachterminologie: dezentrale Konzentration) verfolgt, d.h. durch Förderung der Entwicklung bestimmter Mittel- und Unterzentren11 des Landes soll einerseits eine Balance zur hauptstädtischen Agglomeration geschaffen werden („déconcentration“), gleichzeitig aber auch ein disperses Siedlungswachstum in der Fläche vermieden werden („concentrée“). Wichtigste Ausgleichzentren bzw. Gegenpole zur Hauptstadt sollen dabei die so genannte „Nordstad“ im Raum Ettelbruck-Diekirch sowie der Süden mit dem Zentrum Esch-sur-Alzette werden. Das Projekt Belval-Ouest kann somit als raumentwicklungspolitisch motiviertes Vorhaben verstanden werden, das sowohl internen landesplanerischen Leitlinien folgt als auch durch Schaffung neuer Arbeitsplätze an diesem Standort den grenzüberschreitenden Verflechtungen und den überwiegend aus Nordlothringen kommenden Grenzgängern Rechnung trägt und eine weitere Zunahme der Verkehrsströme in Richtung Hauptstadt vermeiden helfen soll. Gleichzeitig wird dem Projekt eine große Bedeutung für den wirtschaftlichen Strukturwandel in Luxemburgs Süden beigemessen, sowohl im sozio-ökonomischen Sinne (Branchendiversifizierung, Schaffung von neuen Arbeitsplätzen, Zugang zu Bildung etc.) als auch im städtebaulichen Sinne durch Wiedernutzung der weitläufigen Industriebrachen zwischen Esch und Sanem. Somit ist auch die Entscheidung vom 23. Dezember 2005, den Hauptstandort der neuen Université du Luxembourg in BelvalOuest anzusiedeln, als (durchaus mutige) strukturpolitische Entscheidung zu verstehen. Die städtebaulichen Facetten des Vorhabens sollen im Weiteren anhand des Masterplans für Belval-Ouest erläutert werden.

4 SOHN, Christophe / WALTHER, Olivier, Métropolisation et intégration transfrontalière : le paradoxe luxembourgeois. In :

5 6 7 8

9 10 11

Espaces & Sociétés 134 (2008), S. 1-15. SCHULZ, Christian, Die „Metropolisierung“ Luxemburgs. In: AMANN, Wilhelm / MEIN, Georg / PARR, Rolf (Hg.), Periphere Zentren oder zentrale Peripherien? Kulturen und Regionen Europas zwischen Globalisierung und Regionalität. Heidelberg 2008, S. 89-97. Etwa im Rahmen des FNR-Projekts METROLUX, s. http://metrolux.ceps.lu, oder des jüngst angelaufenen ESPONProjekts METROBORDER, s. http://www.geo.ipse.uni.lu. WALTHER, Olivier / SCHULZ, Christian, Finanzplatz Luxemburg - vom Steuerparadies zur Investmentfonds-Kapitale. In: Geographische Rundschau 61-1 (2009), S. 30-35. WALTHER / SCHULZ, Finanzplatz (Anm. 5). Zu demographischer Entwicklung und Wohnungsmarkt s. Observatoire de l’Habitat unter http://observatoire.ceps.lu/ sowie Wohnungsbedarfsprognose 2001-2021 des Ministère des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement unter http://www.logement.lu/pdf/Wohnungsbedarfsprognose.pdf . Jones, Lang, LaSalle, Luxembourg City Report Q1 2009. Luxembourg 2009. Ministère de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire (Hg.), Programme Directeur de l’Aménagement du Territoire. Luxembourg, 2003. Centres de développement et d’attraction (CDA).

138


Terres Rouges

Die räumlichen Implikationen des Projektes Belval-Ouest

Masterplan Belval-Ouest Bei einem so genannten „Masterplan“ handelt es sich weder um ein planungsrechtlich vorgeschriebenes noch um ein städtebaulich verbindliches Dokument. Vielmehr ist es ein auf freiwilliger Basis initiiertes Instrument, das in einer frühen Phase des Planungsprozesses urbanistische und landschaftsplanerische Leitprinzipien für einen zu entwickelnden Standort erarbeitet. Es wird insbesondere für städtebauliche Großvorhaben oder für die Überplanung und Umgestaltung größerer städtischer Areale (z.B. Altstadtsanierung, Bahnhofsviertel o.ä.) genutzt und hat zumeist partizipativen Charakter. Mit der Erarbeitung des Masterplans für Belval-Ouest wurde das Büro Jo Coenen & Co. / Maastricht beauftragt, das 2002 als Sieger aus dem von AGORA organisierten europaweiten städtebaulichen Realisierungswettbewerb hervorging und heute eine Zweigstelle auf dem Standort unterhält. Der Masterplan gliedert das Entwicklungsgebiet in folgende Viertel, die jeweils unterschiedliche Nutzungsprofile erhalten sollen (siehe Abb.1): BELVAL

- im Osten den Bereich der Hochofenterrasse (28 ha), auf der im Umfeld der teilweise erhaltenen Industrieanlagen eine Mischung aus Forschungs- und Hochschuleinrichtungen, öffentlicher Verwaltung, Einzelhandel, Gastronomie sowie Kultur- und Freizeiteinrichtungen (Konzerthalle, Kino, industriehistorisches Museum) geplant ist; - westlich an die Hochofenterrasse anschließend die Square Mile (21 ha) als gehobenen Büro- und Dienstleistungsstandort, der in den Obergeschossen der Bürobauten und Einzelhandelseinrichtungen in nennenswertem Umfang auch Wohnnutzungen vorsieht (s.u.); - einen zentralen Parc Belval (33 ha) mit Sportanlagen und Schulgebäuden; - sowie die überwiegend als Wohnstandorte konzipierten Viertel Belval-Sud und BelvalNord (jeweils ca. 20 ha). Die sich in der Kurzcharakterisierung der einzelnen Viertel andeutende Nutzungsmischung soll im nächsten Abschnitt aus städtebaulicher Sicht näher erläutert werden.

MASTERPLAN - Fortschreibung - Stand 30.03.2009 DIRECTION LUXEMBOURG ROND POINT RAEMERICH

SOTEL

SOTEL

WEIHER

QUARTIER BELVAL NORD PARK BELVAL NORD PUMPSTATION

311.4

N 31

310 319

LIAISON MICHEVILLE

N 31

SS 3

339 PORTE DES SCIENCES

BELVAUX MAIRE SS 2

307.4

318.9

PLATEAU ST. ESPRIT

300.6

303 HSS 1

CITE DES SCIENCES

312 314.3

300

CIPA

305.7

308.5

PLACE DE L’UNIVERSITE

302.5

ARRET BELVAUX CENTRE

310 MAISON DES SCIENCES HUMAINES

ECOLE SANEM

314 313 304,5

DEXIA II INKUBATOR

DEXIA I

DEXIA III

Source Belval

RINGSTRASSE

HFB

PLACE AGORA

308.5

313.5 BELVAL PLAZA II SQUARE 1

SQUARE 1

HFA

AVENUE DES HAUTS-FOURNEAUX

304

308.5 RINGSTRASSE

LYCEE TECHNIQUE

HFC FUNDAMENT

AVENUE DE LA FONTE

313 304

RESTAURANT

MAISON DU NOMBRE

308.5

PORTE DE FRANCE

RINGSTRASSE

HIGHWAY

308,5

MÖLLEREI

PARC BELVAL

315.8

MAISON DU SAVOIR

GEBLÄSEHALLE

AVENUE DES SIDERURGISTES

WASSERTREPPE

318.2

WERKSGELÄNDE ARCELOR MITTAL

308.5

303.4

SQUARE 1

HOTEL BELVAL SQUARE

CENTRE SPORTIF SÜDBAND

308.5

Agora-Grenze geplante Gemeindegrenze Landesgrenze

SÜDBAND

SÜDBAND

AVENUE DU ROCK’N’ROLL

SÜDBAND

PLAZA TOWER

308.5 PLACE DU ROCK

AGORA

BELVAL PLAZA I

ACCES SUD

ROCKHAL

in Staatsbesitz nachrichtliche Übernahme Planung Fonds Belval

ARRET BELVAL LYCEE

DIRECTION FRANCE

CR 168 ARRET BELVAL

DIRECTION FRANCE P+R

QUARTIER BELVAL SÜD

PARK BELVAL SÜD

SQUARE MILE

QUARTIER THFX ORIGINE MASTERPLAN: DROITS RESERVES A JO COENEN & CO ARCHITEKTEN - COPIE ET REPRODUCTION INTERDITES ORIGINE CADASTRE: DROITS RESERVES A L’ETAT DU GRAND DUCHE DE LUXEMBOURG (BD-TOPO 1997, ORTHO 2004) - COPIE ET REPRODUCTION INTERDITES

Jo Coenen & Co Architekten Site Belval B.P.193 L-4002 Esch-sur-Alzette 00352/ 2617361

MASTERPLAN - Fortschreibung Städtebaulicher Rahmenplan Maßstab

1:2000

Erstellungsdatum

22.04.2002

Letzte Änderung

30.03.2009

Abb. 1: Masterplan Belval-Ouest

12 AGORA (Hg.), Les Quartiers (2009): http://www.belval.lu/fr/Comprendre-Belval/Les-Quartiers

139

Plancode

CO7_Ü01_V43a Format

A0

Bearbeiter

MB


Terres Rouges

Die räumlichen Implikationen des Projektes Belval-Ouest

Städtebauliche Aspekte Im Masterplan für Belval-Ouest wird den folgenden städtebaulichen Grundprinzipien besondere Bedeutung beigemessen:

Funktionsmischung Durch die bewusste Mischung verschiedener Gewerbe-, Kultur-, Freizeit- und Wohnfunktionen soll eine möglichst hohe interne Verflechtung des Standorts erreicht werden, die z.B. Wohnen in der Nähe des Arbeitsplatzes oder Freizeit­aktivitäten im direkten Umfeld des Arbeits­platzes (Kultur, Sport, Gastronomie) ermöglichen oder auch schlicht alltägliche Versorgungsfunktionen (Einzelhandel und andere Dienstleistungen) erfüllen. In einer zeitlichen Dimension soll Funktionsmischung auch dazu beitragen, weder so genannte „Schlafsiedlungen“ (Cités dortoires) mit ausschließlicher Wohnfunktion und mangelnder Versorgungsinfrastruktur entstehen zu lassen, noch die eher gewerblich genutzten Bereiche nach Büro- und Ladenschluss „aussterben“ zu lassen (CityPhänomen). So ist beispielsweise vorgesehen, dass jedes Bürogebäude im Bereich der „Square Mile“ in den Obergeschossen auch Miet- bzw. Eigentumswohnungen anbietet. Durch das teilweise bereits bestehende Kulturangebot (Rockhal, CinéBelval) und die vorgesehene Gastronomie, aber auch den Park und die geplante Sportinfrastruktur soll sowohl für in Belval wohnende als auch dort arbeitende Menschen ein breites Spektrum möglicher Aktivitäten angeboten und damit eine hohe Standortqualität erzeugt werden.

Verdichtetes Bauen und kurze Wege Was die städtebauliche Gestalt angeht, wurde eine stark verdichtete und damit flächen­ sparende Bauweise gewählt. Sie besteht aus relativ kompakten, mehrgeschossigen Gebäuden (z.T. Bürotürmen) und relativ schmalen Straßengrundrissen. Nicht nur die geringe Entfernung zwischen den Gebäuden, sondern auch die interne Erschließung (ohne Durchgangsverkehr) soll die so genannten Langsamverkehre wie Radfahren oder Zufußgehen begünstigen.

Verkehrserschließung Das wohl ambitionierteste Ziel des Projektes ist es, einen Modal-Split, d.h. eine Verteilung auf den motorisierten Individualverkehr (MIV) und den öffentlichen Nahverkehr (ÖV) bzw. Langsamverkehr (LV) im Verhältnis 60/40 zu erreichen. Dieses soll unter anderem durch eine günstige Anbindung an das nationale Schienennetz erreicht werden. Kurzfristig wird hierzu der bereits von „Belval-Usine“ in „BelvalUniversité“ umbenannte Haltepunkt der CFL zu einem attraktiven Regionalbahnhof ausgebaut. Mittel- bzw. langfristig ist der Neubau einer direkten Bahnstrecke zwischen LuxemburgStadt und Belval geplant, die die Fahrzeit auf dieser Strecke um etwa zehn Minuten verkürzen würde, vor allem aber eine höhere Frequenz der Züge ermöglichen würde. Daneben plant man derzeit auf französischer Seite die Inbetriebnahme eines Personenzuges auf bestehenden Gleisen von Thionville über Audun-le-Tiche (F) und Belval (L) zurück nach Frankreich (Longwy), um hier eine für Grenzpendler aus Lothringen interessante Querverbindung in dem sonst radial auf die Stadt Luxemburg ausgerichteten Bahnnetz zu schaffen. Ferner bestehen auf lokaler Ebene weiterhin Planungen einer Straßenbahnverbindung zwischen der Innenstadt von Esch, BelvalOuest und den westlichen Nachbargemeinden. Eine strikte Parkraumbewirtschaftung bzw. -verknappung soll die Nutzung öffentlicher Verkehrsmittel weiter begünstigen13.

Erholung und Freizeit Zu dem integrativen Ansatz gehört – wie bereits angedeutet – auch die Bereitstellung verschiedenster Freizeitangebote. Neben den Naherholungsmöglichkeiten im Park sowie den geplanten Sporteinrichtungen sind mit der Rockhal, einer Konzerthalle von internationalem Format mit zwei Sälen (max. 6500 bzw. 1200 Plätze) sowie zahlreichen Proberäumen für einheimische Bands, sowie dem Multiplex-Kino „CinéBelval“ zwei kulturelle Einrichtungen entstanden, die nicht zuletzt den auf Belval arbeitenden und lebenden Menschen zugute kommen.

13 Zur Verkehrsanbindung s. ausführlich KIES, Alex / LEHNERS, Magali, Esch-Belval – Standort der Universität

Luxemburg! Population et Territoire 12 (2007).

140


Terres Rouges

Einbindung des industriehistorischen Erbes Ein nicht nur aus städtebaulich-gestalterischer Sicht wichtiges Element der Masterplanung war die angemessene Einbindung der verbleibenden industriehistorischen Relikte dieses ehemaligen Schwerindustriestandorts. Auf diesen Punkt wird weiter unten gesondert zurückzukommen sein. Zuvor sei jedoch etwas detaillierter das Konzept der „Cité des Sciences“ vorgestellt, die in dem industriehistorisch sensibelsten Bereich der Fläche entstehen wird.

Cité des Sciences, de la Recherche et de l’Innovation Unter dem Namen „Cité des Sciences, de la Recherche et de l’Innovation“ (im Weiteren kurz: Cité des Sciences) firmiert der künftige zentrale Wissenschafts- und Forschungsstandort des Großherzogtums. Im nördlichen Teil der Terrasse des Hauts Fourneaux (s. Abb. 1) werden neben der Universität ferner die beiden Centres de Recherche Publics (CRP) Gabriel Lippmann und Henri Tudor, das ebenfalls öffentliche CEPS/INSTEAD sowie ein Gründerzentrum (Incubateur) für aus den Forschungseinrichtungen hervorgehende Start-up-Unternehmen („Spin-offs“) angesiedelt. Die von der Konzentration dieser Einrichtungen erhofften Synergien beziehen sich dabei nicht nur auf die räumliche Nähe, sondern teilweise auch auf die gemeinsame Nutzung spezieller Forschungsinfrastrukturen (z.B. Labore, Serverräume usw.). So sollen beispielsweise das sozialwissenschaftlich ausgerichtete CEPS/INSTEAD gemeinsam mit der Faculté des Lettres, des Sciences Humaines, des Arts et des Sciences de l’Education (FLSHASE) die so genannte Maison des Sciences Humaines beziehen. Dieses neben der Maison du Savoir (Hauptgebäude der Universität mit Rektorat, Verwaltung und Hörsälen) erste fertig zu stellende Gebäude soll im Jahr 2013 bezugsfertig sein. Mit Ausnahme der zentralen Universitätsbibliothek (Maison du Livre) in der ehemaligen Möllerei (s.u.) werden ausschließlich Neubauten errichtet. Inzwischen gilt als sicher, dass alle drei Fakultäten der Universität, also neben der FLSHASE und der Faculté des Sciences, de la Technologie et de la Communication (FSTC) auch die Faculté de Droit, d’Économie et de Finances (FDEF) in die Cité des

Die räumlichen Implikationen des Projektes Belval-Ouest

Sciences ziehen werden. Lediglich die der FDEF angehörige Luxembourg School of Finance (LSF) sowie die europäischen Rechtswissenschaften sollen in der Hauptstadt verbleiben. Neben den Hörsälen, Seminarräumen, Büros, Labors und Verwaltungseinrichtungen wird die Cité des Sciences auch Wohnraum für Studierende sowie Gastwissenschaftler/ -innen schaffen.

Bewertung des Vorhabens Belval-Ouest gilt derzeit als eines der größten und ambitioniertesten städtebaulichen Entwicklungsvorhaben in Europa. Neben einmaligen Gestaltungschancen in für Luxemburg sicher historischer Dimension sind hiermit nicht nur wirtschaftliche Risiken für die öffentlichen und privaten Investoren verbunden, sondern durchaus auch die Gefahr urbanistischer Fehlentscheidungen bzw. langfristiger Festlegungen, die sich als unangemessen erweisen und Folgelasten nach sich ziehen könnten. Ein wichtiger Streitpunkt etwa aus Sicht der künftigen Nutzerinnen und Nutzer der Cité des Sciences sind deren vorgebrachte Zweifel an der Umwelt- und Aufenthaltsqualität des Standorts. Trotz der angestrebten hohen architektonischen und gebäudeklimatischen Qualität der ersten Universitätsgebäude bleiben Fragen hinsichtlich der Atmosphäre der Cité des Sciences, die aus o.g. Gründen bewusst nicht als geschlossener und vor allem nicht als weitläufiger Campus nach angelsächsischem Vorbild angelegt wurde. Bei allem Verständnis für verdichtete Bauformen und großer Sympathie für die Verflechtung der Cité mit anderweitig genutzten öffentlichen Räumen wird vielfach die Frage nach den Unterschieden zu einem profanen Bürostandort mit Blockrandbebauung (wie z.B. auf dem östlichen Kirchberg) laut. Damit verbunden ist die Angst, dass innerhalb der Cité des Sciences mit Ausnahme von Innenhöfen und teilweise zugänglichen Dachterrassen sowie der geplanten Gastronomie wenige Flächen zum Verweilen einladen, die nicht unmittelbar Arbeitsfunktion (Büros, Labore, Bibliothek, Seminarräume) haben. Hinzu kommen nicht zu unterschätzende „Konsumreize“, die vom benachbarten Einzelhandel und der Gastronomie im Bereich Belval Plaza ausgehen und einer universitären Campus-Atmosphäre nicht zuträglich sein dürften.

141


Terres Rouges

Die räumlichen Implikationen des Projektes Belval-Ouest

Eine standortübergreifende Frage, die weniger für Belval-Ouest als für die gewachsenen Siedlungskerne im Umfeld virulent ist, betrifft die Integration des neuen „Stadtteils“ - die beteiligten Kommunalvertreter lehnen den Begriff der „neuen Stadt“ aus naheliegenden Gründen strikt ab - in das bisherige städtische Gefüge. Dies betrifft sowohl die bisherige sozio-ökonomische Struktur des Standorts als auch sich verändernde funktionale Beziehungen und räumliche Nutzungsmuster. Verständlicherweise – und wie an vielen anderen Altindustriestandorten auch – stehen große Teile der lokalen Bevölkerung der Entwicklung zumindest ambivalent gegenüber. Neben einer gewissen Skepsis bezüglich der zuziehenden Personen und ihrer Lebensstile werden oft eher Befürchtungen hinsichtlich steigender Immobilienpreise als Hoffnungen hinsichtlich entstehender Arbeitsplätze geäußert. Nach der zugespitzten Logik, ein ehemaliger Stahlarbeiter könne nicht als Banker oder Wissenschaftler arbeiten, werden lokale Arbeitsmarkteffekte sogar bezweifelt. Wenn auch nur wenige der in Belval entstehenden Arbeitsplätze dem lokal dominierenden Qualifizierungsprofil unmittelbar entsprechen, wird die Chance dieses längerfristig positiven Wandels oft nicht gesehen bzw. für die eigene Lebenssituation als irrelevant erachtet. Nicht unberechtigte Ängste bestehen auch seitens des lokalen Einzelhandels und insbesondere hinsichtlich der Entwicklung der Innenstadt von Esch. Bedingt durch die räumliche Entfernung und die zumindest psychologisch starke Barrierewirkung des noch produzierenden Stahlwerkgeländes zwischen dem Zentrum von Esch und Belval ist zu erwarten, dass es auf Seiten der Nutzer von Belval-Ouest eher zu geringen Kontakten mit dem Escher Stadtzentrum kommen wird. Positive Ausstrahlungseffekte des neuen Standorts, von denen auch die umliegenden Gemeinden profitieren, sind v.a. hinsichtlich des allgemeinen Imagewandels zu erwarten, werden aber in der lokalpolitischen Debatte über die Wirkungen des Entwicklungsvorhabens mitunter überschätzt. Dies gilt nicht zuletzt für den erwarteten Einfluss der studentischen Gemeinschaft, auf deren Potential beispielsweise die Standortpolitik der Gemeinde Esch abstellt. Diese hat u.a. damit begonnen, ihre Gastronomie auf diese neue Klientel vorzubereiten und private Hausbesitzer für die studentische Nachfrage nach erschwinglichem Wohnraum zu sensibilisieren.

142

Zweifelsohne wird der Zuzug von Studierenden spürbare Effekte haben, jedoch sind Zweifel hinsichtlich ihrer Dimension angebracht. Noch ist nicht abzuschätzen, wie viele der zum Zeitpunkt des Umzugs der Universität zwischen 5000 und 7500 Studierenden tatsächlich auch im direkten Umfeld wohnen werden. Zieht man den voraussichtlich weiterhin hohen Anteil von einpendelnden Studierenden aus der Großregion sowie von im Elternhaus lebenden luxemburgischen Studierenden ab, handelt es sich um eine vergleichsweise kleine studentische Gemeinschaft, die sich nur punktuell bemerkbar machen wird. Es ist auch absehbar, dass ein nicht unerheblicher Teil der zuziehenden Studierenden einen preisgünstigeren Wohnstandort im benachbarten Lothringen, etwa in Audun-le-Tiche oder in Villerupt bevorzugen wird. Damit verbunden ist die grundsätzlichere Frage der grenzüberschreitenden Implikationen des Projekts BelvalOuest. Trotz aller Koordinierungsversuche mit den benachbarten Gebietskörperschaften und trotz deren ausgeprägtem Interesse an einer Teilhabe an der von Belval ausgehenden Entwicklungsdynamik fehlt es bisher an einer konzertierten Vorgehensweise auf französischer Seite. Dies hat unter anderem damit zu tun, dass gleich zwei Départements (Moselle sowie Meurthe-et-Moselle) an Belval stoßen, d.h. die in Frankreichs zentralstaatlichem Gefüge ohnehin große Zahl zu beteiligender Stellen ist hier zusätzlich erhöht. Die sehr zögerlichen Planungen und Mittelbewilligungen für die Weiterführung der von Luxemburg aus unter Belval-Ouest hindurchführenden Schnellstraße auf französischer Seite („Liaison Micheville“) gibt ein erstes Beispiel für politische Komplexität bzw. die Ungleichzeitigkeit der Entwicklung. Die jüngst vom französischen Staatspräsidenten angekündigte Schaffung einer nachhaltigkeitsorientierten Modellsiedlung (EcoCité) auf lothringischer Seite erzeugt eine neue Dynamik, deren Folgen für das Gesamtprojekt noch nicht absehbar sind. Ein weiterer, eingangs bereits angedeuteter Konfliktpunkt liegt im Bereich des Umgangs mit dem industriekulturellen Erbe des Standorts. Zwar bescheinigt der für diesen Bereich operativ verantwortlich zeichnende Fonds Belval dem Hochofenensemble herausragende Bedeutung: « Les deux hauts fourneaux seront l’articulation centrale de la Cité des Sciences, non seulement


Terres Rouges

sur le plan urbain mais également sur le plan conceptuel, culturel et sémantique. »14 Dennoch gab der Umgang mit den Abriss- und Sicherungsarbeiten an den Hochöfen und in ihrem Umfeld vielfach Anlass zu offener Kritik. Anders als bereits 1998 von der nationalen Denkmalschutzkommission angeregt und im Regierungsbeschluss vom 14. Februar 2005 festgehalten, sollen wesentliche Elemente der Hochofenterrasse nun doch nicht in ihrem funktionalen Zusammenhang erhalten bleiben. Dies wird nicht nur von lokal engagierten Initiativen wie etwa der Amicale des Hauts Fourneaux A et B15 bemängelt. Die fortwährenden Debatten können hier nicht im Detail wiedergegeben werden, drehen sich aber im Wesentlichen um die sukzessive Ausweitung des Démantèlement der Hochöfen, die Überbauung der Fundamente des Hochofens C, die weiter unklare Zukunft der benachbarten Gasgebläsehalle (Halle des Soufflantes) sowie den ursprünglich nicht vorgesehenen Teilabriss des so genannten Highways. Bei letzterem handelt es sich um eine ehemals 538 Meter lange, auf Betonstützen stehende LKWTrasse, die unter den Hochöfen hindurch­führt und nach Vorstellung der Masterplaner nicht nur ein imposantes Zeugnis der Produktionsanlage darstellt, sondern auch einen idealen Fußweg zwischen der südlichen Erschließung des Geländes (Bahnhof) und dem Hauptgebäude der Universität, der Maison du Savoir. Deshalb war vorgesehen, die Trasse in Gänze in die künftige Nutzung zu integrieren. Im Zuge der Abriss- und Sicherungsarbeiten an den Hochöfen wurden jüngst jedoch Teile der Trasse abgerissen; weitere Abschnitte sollen nicht in Originalform erhalten, sondern abgetragen und später durch eine moderne Nachbildung ersetzt werden. Geplant ist der Bau eines Centre National de la Culture Industrielle (CNCI) zwischen den beiden erhaltenen Hochöfen, in dem indus-

Die räumlichen Implikationen des Projektes Belval-Ouest

triekulturelle Themen im weiteren Sinne, also nicht nur Technikgeschichte und die Biographie des Standorts, sondern auch sozio-kulturelle Aspekte der industriellen Arbeit und Gesellschaftsentwicklung in Südluxemburg thematisiert werden sollen. Die oben bereits erwähnte „Landmarkenfunktion“ der beiden erhaltenen Hochöfen hat als Wiedererkennungsmerkmal des Standorts besondere Bedeutung. Die Höhe des unmittelbar benachbarten DEXIA-Gebäudes sowie der (bewusst) um wenige Meter höher geplante Turm der Maison du Savoir - evtl. auch weitere zukünftige Bürobauten – werden jedoch die Sicht auf diese Landmarke aus westlicher und nördlicher Richtung enorm einschränken. Weithin sichtbar werden deshalb eher profane Bürobauten sein – auch eine Landmarke, aber sicher mit weniger identitätsstiftendem Potential.

Ausblick Der Erfolg des Standorts Belval-Ouest wird von einer Vielzahl exogener und endogener Faktoren abhängen. Zu ersteren zählt insbesondere die (krisenbedingt derzeit zurückgehende) Investitionsbereitschaft privatwirtschaftlicher Akteure, aber auch die weitere Mobilisierung öffentlicher Gelder für den Ausbau der Cité des Sciences. Die Ausgestaltung des Standorts wird maßgeblich sein für seine Akzeptanz durch die jetzigen und künftigen Nutzer. Fragen der Aufenthaltsund Umweltqualität sowie der Erreichbarkeit, Wohnstandards und Angebotsstrukturen werden über die Nachfrage mitentscheiden. Große Fragezeichen stehen hinter den ambitionierten verkehrspolitischen Zielen, den zu erwartenden Komplementärprojekten auf französischer Seite sowie hinter der Frage der Integration des Standorts in das lokale Umfeld. Diesem Aspekt sollten nicht nur die umliegenden Gemeinden besondere Beachtung schenken.

14 Fonds Belval (Hg.), Les hauts fourneaux de Belval (2009) :

http://www.fonds-belval.lu/TexteArchi_Suivant.php?menu1=2&menu2=HFAB&menu3=1&position=0&compteur=1 (letzter Abruf 14.07.2009). 15 Amicale des hauts fourneaux A et B : http://www.hauts-fourneaux.org/ (letzter Abruf 14.07.2009).

143


Autorenverzeichnis Marion Colas-Blaise

Professeur de linguistique et sémiotique françaises à l’Université du Luxembourg; directrice du Bachelor en Cultures européennes/études françaises

Paul Di Felice

Chargé de cours en Arts visuels à l’Université du Luxembourg

Norbert Franz

Privatdozent für neuere und neueste Geschichte an der Universität Trier; directeur de projet à l’Université du Luxembourg

Peter Gilles

Professeur de linguistique à l’Université du Luxembourg; responsable du Laboratoire de linguistique et de littératures luxembourgeoises

Michael Overbeck

M.A., Mitglied der Arbeitsgruppe “Archäometallurgie” an der Westfälischen Wilhelms-Universität Münster, dort derzeit Promotion im Fach Ur- und Frühgeschichtliche Archäologie, 2003-2005 Ausgrabungsleiter im Genoeserbusch bei Peppange

Michel Pauly

Professeur d’histoire luxembourgeoise transnationale à l’Université du Luxembourg; responsable des ‚Etudes luxembourgeoises‘ à l’Unité de recherches IPSE; responsable du Laboratoire d’Histoire

Tonia Raus

Doctorante à l’Université du Luxembourg et à l’Université de la Sorbonne Nouvelle – Paris 3

Damien Sagrillo

Assistant-professeur de musicologie à l’Université du Luxembourg

Julie Schroell

Licenciée en histoire contemporaine, réalisatrice et scénariste

Christian Schulz

Professeur de géographie à l’Université du Luxembourg; directeur de l’Unité de recherche IPSE

Myriam Sunnen

Docteur en littérature française; enseignante de français au Lycée Michel Rodange, Luxembourg

Frank Wilhelm

Professeur de littérature française à l’Université du Luxembourg; responsable du Centre d’études et de recherches françaises et francophones en Littérature et Linguistique

144


145


La Fondation Bassin Minier est un établissement d’utilité publique créé en 1989 qui a pour objet de contribuer à la valorisation culturelle de la région du Bassin Minier, en participant à l’organisation d’activités et à la mise en oeuvre de projets dans les domaines de la culture, de l’écologie, du tourisme et du patrimoine industriel. Partant de l’histoire industrielle, ouvrière et des migrations de la région du Bassin Minier, la Fondation est un instrument privilégié d’une transmission vivante de cette histoire et assure le rôle de témoin dynamique d’une culture qui se veut prospective. La Fondation Bassin Minier bénéficie du soutien financier du Ministère de la Culture.

Die Fondation Bassin Minier ist eine gemeinnützige Stiftung, die 1989 mit dem Auftrag geschaffen wurde, zur kulturellen Entwicklung im Luxemburger Erzbecken (Bassin Minier) beizutragen. Die Stiftung beteiligt sich an der Umsetzung und fördert Projekte in den Bereichen Industrieerbe, Kultur, Umwelt, Tourismus und Innovation. Von der Wirtschafts-, Migrationsund Sozialgeschichte des Bassin Miniers ausgehend und den Bogen spannend bis zur heutigen Entwicklung der Region als Forschungs- und Technologiestandort, möchte die Stiftung die Rolle eines Übersetzers spielen, der Geschichte mit Zukunft verbindet und Perspektiven für eine starke Region aufzeigt. Die Fondation Bassin Minier wird vom Kulturministerium finanziell unterstützt.

urg

embo

1 Lux L-298

erce, Comm ier.lu e d re in hamb ssinm ier.lu c/o C dationba assinmin n b o n f . o www ndati ct@fo a t n o c

146


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.