SOMA #31

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NumĂŠro trente-et-un / Dinosaures et skatologie


The Pro Classics series includes the classic Vans shoes you know and love but updated and upgraded to meet the demanding requirements of the Vans pro team. Available exclusively where boards are sold, Vans Pro Classics last longer and provide the extra support and cushioning today’s skateboarders, like Nassim, need. See the full list of features at skate.vans.com

Š2012 VANS, INC. PHOTO: JELLE KEPPENS


Nassim Guammaz nose blunt



SKATEBOARDING

GASTÓN FRANCISCO PHOTO


NUMERO 31

Directeur de la publication Fred Demard [fred@somaskate.com] Rédaction en chef David Turakiewicz [tura@somaskate.com] & Fred Demard Publicité David Turakiewicz [tura@somaskate.com] assisté de Thomas « Zeb » Busuttil [thomas@somaskate. com] Mise en page Tura Secrétaire de rédaction Valéry Blin Photographes Alex Pires / Khalid Chhiba / Johan Verstappen / Kab / Fabien Ponsero / Loïc Benoît / Yoann Kim / Jelle Keppens / Guillaume Périmony / Nohan Ferreira / Manuel Schenck / Cédric Crouzy / Guillaume Ducreux / Fred Ferand / Damien Marzocca / Paul Labadie

Soma est édité par Les éditions du garage SARL 13, rue de l’Isère 38000 Grenoble

info@somaskate.com

ISSN : 1959-2450

Imprimé en France. Toute reproduction, même partielle, publication, édition, ou sous n’importe quelle autre forme est interdite sous peine de nous voir débarquer au milieu de la nuit la gueule enfarinée mais décidés à vous péter la vôtre, ou éventuellement d’un procès en bonne et due forme qui vous coutera aussi cher qu’une séance de chirurgie réparatrice. Merci à pas mal de gens et en particulier Maxime Verret pour le coup de main, ainsi que monsieur Yannosh. Liste de diffusion, informations, anciens numéros, vidéos, commentaires désabusés, publicités et autres blogueries... Tout est sur

www.somaskate.com

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Yann Garin ollie one foot, Paris Photo par Alex Pires



SOMMAIRE

PAGE 10 - L’intro Objectif lune.

PAGE 14 - Le jeune

Le coeur brisé par la Bones Brigade, il errait dans les étroites ruelles de la vieille ville...

PAGE 16 - Le vieux

PAGE 52 - French Old School Skate Jam

Comment dit-on « décathlon », en anglais ? 27 ou 37, c’est du pareil au même.

PAGE 20 - L’matos

Des chaussettes avec un pistolet dessus, un caleçon avec des biscottes, un cube en mousse marseillais, une bouteille d’alcool tchèque... Vous êtes refaits.

PAGE 28 - Shut up and singles

La photo d’Eniz fait un peu tâche, au milieu de toute cette grisaille.

PAGE 36 - In search of the Mirapontus

Barcelone et Badalone en été, faut oublier, C’est du côté de Malmö et Copenhague que ça se passe, maintenant.

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PAGE 46 - Le Vans Downtown Showdown à Amsterdam

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Séphane « Toxic » Guillaume FS ollie, Paris. Photo par Khalid Chhiba

Le rendez-vous annuel qui effraye les jeunes. A juste titre.

PAGE 56 - Le Tour Sans Fin « Into the wild »

De Bordeaux à Lyon, en passant par la lune.

PAGE 68 - Shut up and sequences

Un crook BS lip, un switch heel sur un double set et flip FS air sur un hip. Ou pas.

PAGE 78 - Le CPH Pro de ouf Tintin Marzocca à la compète de skate.

PAGE 82 - Steve Caballero

C’est un putain de compétiteur en fait, le mec.

PAGE 86 - J Mascis

J Mascis VS Valéry Blin, ambiance grosse déconne.

PAGE 88 - Le Vrac

Encore du Dinosaur Jr, des bouquins pour continuer de faire intello et même du Koston.



INTRO The bright side of the moon

Une route de campagne qui n’en finit plus, de chouettes paysages qui défilent, Pink Floyd dans l’poste, les copains à côté et derrière, les boards et les tentes dans le coffre. On se dit que c’est un beau pays quand même… Malgré tout.

Mais bon, c’est quand qu’on arrive ? On traverse des villages, de beaux villages, pittoresques à souhait, mais sans intérêt immédiat. Les Limousines nous regardent passer en broutant l’herbe grasse et en se fichant royalement qu’on se perde, la forêt ne donne définitivement pas envie de tomber en panne, puis soudain un immense barrage nous fait espérer qu’on y est bientôt. Mais la route continue de s’enfoncer toujours plus loin. On commence à perdre espoir, puis on tombe presque par hasard sur la paillote qui abrite le bar/buvette dont on nous avait parlé. On prend un café qu’on n’a pas volé et on apprend que le patron est savoyard, ça vous fait une belle jambe, mais nous, ça nous parle… Puis on saute dans le petit train « promène touristes » qui nous fait traverser la passerelle, et ce coup-ci, on y est, sur l’île de Vassivière avec son centre international d’art contemporain. Le p’tit train s’arrête, on traverse un dernier champ à pieds et on aperçoit enfin la surface de la lune. Otro, sculpture skatable en béton phosphorescent et à l’as10

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Morgan Fabvre pivot fakie Photo par Paul Labadie

pect lunaire, commande publique du ministère de la culture et de la communication et de la région Limousin. Pourquoi pas ? Si c’est nos impôts qui payent en plus, on aurait tort de se priver. On droppe enfin, et instantanément on se déteste, parce que ce truc est horriblement dur à skater, parce qu’on se rend compte que nos capacités d’adaptation en milieu lunaire sont limitées. Le craddle est particulièrement traître. Puis on finit par comprendre un peu, juste un peu, le soleil se couche et tout s’éclaire, comme par magie. C’est toujours aussi dur à skater, mais totalement génial. Un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité… Oui, bon, faut pas exagérer non plus, mais allez y faire un tour pour vos prochaines vacances avec vos super potes et vot’ batmobile, vous nous en direz des nouvelles. - FD

« Otro » est une oeuvre d’art réalisée par Koo Jeong A, visible et skatable sur l’île du lac de Vassivière, à cheval entre la Creuse et la Haute-Vienne.


NICK TRAPASSO

ALL STAR TRACTION RUBBER

SOCKLINER

ABRASION RESISTANT SUEDE

THE TRAPASSO PRO II ENGINEERED FOR

DESTRUCTION


i n s ta g r a m : @ s u p r a f o o t w e a r s u p r a f o ot w e a r . c o m

erik ellington: frontside flip


the e lli ngton dedicated to the pursuit of perfection in skateboarding


LE JEUNE

Max Renaud 50-50 tout du long, à Rueil-Malmaison (92) Photos par Johan Verstappen

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Age : 16 ans Lieu de naissance : Suresnes (92) Lieu de résidence actuel : St Germain en Laye (78) Années de skate : 5 Skateur de référence : Leo Romero Vidéo de référence : La Element « Future Nature » Première board : Mon cousin anglais m’avait filé une vieille board de son garage, je connais pas la marque, ça devait être le Décathlon anglais. Où seras-tu et que feras-tu dans 15 ans ? Je me vois soit en France, soit en Amérique, et je skaterai après le taf. Sponsors : PW skateshop, Qhuit


We A c t i vi st B EN N Y FA I R FA X S H OT AT S O U T H B A N K , L O ND O N B Y G I OVA N N I R ED A

FOR MORE ON THIS S UP ERLATIVE S PA CE w es c . c om


LE VIEUX

Hedi Hamdi Nose pick à Bagnolet (93) Photos par Kab

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Age : 27 ans ! Non, 37 ! Lieu de naissance : L’Isle Adam (95) Lieu de résidence actuel : St Jean d’Aults (73) Années de skate : J’ai commencé vers 12 ans avec un skateboard pourri… Sérieusement vers 16 ans. 17 ans, peut-être même. Skateurs de référence : Je sais pas, j’en n’ai pas vraiment. Plus les gens avec qui je skate, mes potes Jon, Steph et tous les gars du zoo ! Vidéos de référence : La SOP Posse ! Je n’ai pas vu toutes les vidéos, mais The End m’a marqué. Ou la « Lick » de H-Street. Première board : Je crois qu’on m’avait filé une Lucero. Ensuite j’ai acheté une Jeff Kendall, Santa Cruz. Où étais-tu et que faisais-tu il y a 15 ans ? J’habitais encore à Parmain (95) et je crois que je terminais mes études de prothésiste dentaire…


JOE GAVIN - KICKFLIP • PHOTO: SAM ASHLEY


– ERIK ELLINgTON / LIzaRD KINg / TERRy KENNEDy / TOM pENNy / WINDSOR JaMES SpENCER HaMILTON / bOO JOHNSON / KEvIN ROMaR / DaNE vaugHN / CHEWy CaNNON – KR3WDENIM.COM


– KEVIN ROMAR – K-SLIM CHINOS DISTORTION FLEECE –


L’matos

1 Un marcel VANS/Skateboarder Mag pour laisser dépasser les tatouages 2 une board SKATE MENTAL jaune, rouge, bleue et blanche (et noire) en 8 pouces 3 une chaussure NIKE SKATEBOARDING Challenge Court pour jouer au tennis en skate / 4 une casquette VOLCOM avec un élastique tout autour / 5 un sac à dos DC pouvant contenir aussi bien des livres et cahiers qu’un sac de couchage et une petite tente / 6 un caleçon CLEPTOMANICX en taille M (‘tention ça taille grand) 7 un cube en mousse «Marseille» gagné à la fête foraine l’autre jour 8 une chaussure SUPRA Cuban utilisable avec ou sans lacet / 9 un pantalon de type Chino de chez MATIX / 10 la planche de Peter Watkins de chez BLACK LABEL en 8,5 pouces / 11 une chaussure droite CIRCA, pro-model de David Gravette 12 une paire de chaussettes SAVATE en coton / 13 une chaussure VANSSkateboarder Magazine à l’ancienne / 14 une chaussure droite GRAVIS bleu-marine.

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Anchor products only available at select retailers. Disponible en exclusivite chez Circle, Nozbone, Official et Zeropolis. BIEBEL / JOHNSON / MARIANO / CARROLL / HOWARD / WELSH / ALVAREZ / GILLET / BRADY / JENSEN FERNANDEZ / TERSHY / ESPINOZA / HAWK / WALKER / PEREZ / lakai.com / info@agencencore.com


1 une casquette THE QUIET LIFE pour l’hiver / 2 une chaussure droite DC Mikey Taylor tout ce qu’il y a de sobre / 3 une board Trauma prête pour le futur en 8,1 pouces / 4 une chaussure OSIRIS Chino low blanche comme neige / 5 un sac photo de beau-gosse de chez GRAVIS / 6 une cassette vidéo «apprendre le skateboard», qui comme son nom l’indique, est faite pour apprendre le skateboard / 7 une board PALACE en bois d’arbre et en 8 pouces de large / 8 une chemise VOLCOM avec quelques lettres imprimées dessus / 9 un bonnet CHEELAX à l’envers / 10 une chaussure droite CONVERSE Ka-one vulc simple et efficace / 11 deux chaussettes SAVATE fabriquées en France / 12 un briquet / 13 une chaussure LAKAI Pico XLK piquée à Akim Chérif pour le shooting / 14 une petite bouteille d’alcool fort rapportée de République Tchèque dont le contenu est douteux / 15 un t-shirt VOLCOM avec une photo de notre pote Jelle Keppens imprimée dessus.

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www.adidas.com/skateboarding

Š 2012 adidas america, inc. adidas, the trefoil logo and the 3-stripes mark are registered trademarks of the adidas group.


dylan rieder / gravisskateboarding.com


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WWW. SOMA S K AT E .COM (sur l’ordinateur)



Charles Collet BS smith, Lyon Photo par Fabien Ponsero

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numéro XXXI

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Eniz Fazliov FS blunt, Mallorca Photo par Jelle Keppens

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Idris Jani switch flip, Paris Photo par Guillaume Périmony

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Nicolas Eustache ollie, Thomery Photo par Nohan Ferreira

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Victor Pellegrin crooked grind à Umag (Croatie) Photo par Loïc Benoît

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IN SEARCH OF THE PONTUS Converse France par Tura

à Malmö

En vérité, on ne l’a pas cherché, Pontus. On avait son numéro de téléphone, il était même prévenu qu’on arrivait, mais le titre sonnait bien. Et une fois sur place, je peux vous dire que ça n’a pas pris longtemps pour qu’on l’appelle. Quand je dis « on », c’est Paul Grund, Kévin Rodrigues, Rémy Taveira, Luidgi Gaydu (team manager), Ludovic Azémar (pour la vidéo), et moi (pour le plaisir). Ça peut paraître évident comme ça, mais c’est toujours important d’avoir une bonne équipe pour voyager. Y’en avait bien un qui passait son temps à ronchonner et essayer de faire croire qu’il était cool, mais bon, vu que c’était moi, je n’ai pas eu à me plaindre.

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Kevin Rodrigues wallride tirette

Wallride, oh yeah oh yeah oh yeah Tout a commencé lors de notre première session à TBS, quand un “ Wall ride ! Oh yeah oh yeah oh yeah ! ” fut entonné, probablement par Pontus, et instantanément repris par l’ensemble du groupe. Si vous ne voyez pas ce dont il s’agit, je vous invite à aller visionner immédiatement la «Polar promo» sur Youtube. Chaque session s’accompagnait ainsi de cette mélodie comme signe de ralliement et d’hommage à notre guide suprême. Pontus nous a raconté que pendant un mois après la sortie de cette petite vidéo, tous les skateurs de la ville s’étaient mis à siffloter ça, parfois jusqu’au bar pour commander une pinte. Un truc du genre : «Une bière, oh yeah oh yeah oh yeah !».

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Paul Grund alley oop BS flip

TBS

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Kevin Rodrigues step hop

Malmeu

Ça se prononce comme ça (ö = eu), donc à l’avenir, que je ne vous entende plus dire «Malmo». Ça va vous paraître dingue, pourtant ça n’a rien d’incroyable : on y est allés en train. TGV jusqu’à Cologne et puis train de nuit jusqu’à Copenhague (après, c’est 20 minutes jusqu’en Suède). Sur place, deux chambres en auberge de jeunesse nous attendaient. La différence avec un hôtel, c’est que la salle de bain est la même pour toutes les chambres et qu’on dispose d’une cuisine, qu’on ne s’est pas privés d’utiliser. Autant d’un point de vue légal que de celui des habitants, le skate à Malmö est plus que toléré. La municipalité a compris le skate, le tourisme que ça génère, et l’importance d’avoir des bons skateparks tout en laissant la pratique dans la rue libre. Et il est rare de se faire jeter d’un spot par des petits vieux qui n’ont rien d’autre à faire... Un style radicalement différent de Barcelone, mais qui pourrait presque permettre à la ville de postuler pour le titre de Mecque du skateboard #2. Située tout au sud du pays, à 600 kilomètres de Stockholm, la ville posséderait, en toute logique, le climat le moins rude. M’enfin, ça reste la Scandinavie quand-même. L’hiver, c’est au skatepark de Briggeriet et nulle part ailleurs que ça se passe. Malmö est également la capitale de la délinquance en Suède. Une statistique à laquelle les nombreux touristes-planchistes étrangers doivent largement contribuer. Parce qu’ils n’ont pas l’air bien méchant, les mecs de Malmö...

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Paul Grund Ollie

Le système B

Contrairement à notre beau pays la France où nos concitoyens peuvent s’adonner aux joies de l’alcoolisme sans aucune restriction, la Suède a décidé que les boissons alcoolisées au delà de 3,5° ne pourraient être vendues que dans ses magasins d’Etat, délicatement nommés “Systembolaget”. Impossible donc de s’acheter une bonne vieille bouteille de rouge ou une sale 8-6 après 18h ou le week-end, en dehors des bars bien entendu. Pour les habitués de la petite canette du soir, ce détail aura eu le mérite de leur faire prendre conscience que l’on pouvait aussi faire sans, et que tout se passait aussi bien. Cela dit, le sujet revenait souvent dans les discussions comme une chose impérative à faire dans la journée : aller acheter des bières au Systembolaget (sous-entendu : parce que celles du supermarché du coin, à 3,5°, c’est pas assez pour s’mettre bien). Dans tous les cas, s’il vous manque encore un peu de poil au menton, on vous demandera une pièce d’identité afin de s’assurer que vous avez bien au moins 20 ans.

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Paul Grund FS 180

Michel Marhinger

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Entre deux séjours à Christiania (le quartier des hippies et des shitos à Copenhague), Michel est venu passer quelques jours avec nous. Avec Michel, tout est plus lent. Les conversations ralentissent avec son débit de 4 mots à la minute, les sessions s’éternisent avec sa capacité à toujours être le dernier à rentrer ses tricks. Tout ça ajouté à sa propension à foutre le cafard à tout le monde dès qu’il y a un problème a fait qu’au bout de quatre jours, on était presque contents de le voir partir. Sauf que notre ami autrichien n’est pas chez Antiz pour rien, et que lorsqu’il s’agit de faire du skate, que ce soit une courbe, un rail, un gap, un park, un curb, n’importe quoi, Michel skatera avec le même acharnement, et repartira la plupart du temps avec un hammer en poche. Dans la voiture, Michel récitera les paroles de n’importe quelle chanson qui passe à la radio, de Maiden à Biggie en passant par Avril Lavigne puisqu’il semblerait qu’une seule écoute lui suffise pour mémoriser les paroles, sans rire. Et une fois à la maison, Michel s’accommodera d’un simple tapis en guise de matelas et n’émettra que des commentaires positifs sur la bouffe qui passera dans son assiette. Un vrai hobo, et un bon guest, le Murl !


Rémy Taveira BS air

Steppe Side

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Pontus Alv FS grab

Pontus

Pensez ce que vous voulez de Pontus, de sa tendance à beaucoup parler de lui ou à montrer ses attributs à tout vent, sa dévotion envers le skate est si grande qu’il mérite le respect. Rien qu’essayer d’imaginer les tonnes de béton qu’il a remuées depuis toutes ces années foutrait mal au dos à un maçon portugais. Steppe Side 1, Steppe Side 2, Sibbarp, TBS (Train Bank Skatepark) et tout le reste ont laissé des traces indélébiles dans le paysage skate européen, voire universel, sans parler de ses deux vidéos qui en auront affecté (infecté ?) plus d’un… Malgré une période intense avec Polar et l’organisation de la fameuse “Wallie World Cup” au Bright, Pontus nous a trouvé une voiture de location pour une bouchée de pain, nous a prêté la sienne, nous a montré tous ses spots secrets, nous a emmenés faire la fête chez lui, nous a orientés, dépannés, conseillés, trimballés, supportés… Et il trouvait toujours le temps, après ses journées au bureau à se battre avec ses clients et fournisseurs, pour venir skater avec nous. Il a même débauché Kévin de chez 5Boro, c’est dire s’il a vraiment tout compris !

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Rémy Taveira ollie

Copenhague

Copenhague et Malmö ne sont séparées que d’un petit bras de mer au dessus duquel passe un pont de 7 kilomètres. Nous nous sommes donc accordés une journée sur la berge d’en face, après nous être acquittés d’une taxe de 40 euros pour emprunter le pont en voiture. A 80 euros l’aller-retour, on vous conseille de bien remplir la banquette arrière ou de prendre le train (20 euros l’A/R environ)... Copenhague est une agglomération d’un million d’habitants. A côté, Malmö fait petite ville de province avec ses 300 000 habitants. Un peu plus avant-gardiste et plus riche, la capitale danoise offre toutes sortes de spots, assez différents de ce que l’on peut trouver en Suède. Son nouveau skatepark complètement dingue est à visiter absolument, juste pour se rendre compte de ce que des mairies sont capables de dépenser pour le skate, mais aussi pour carver sous l’over-vert du bowl, et se dire que le moindre grind tout là-haut est vraiment impossible. Et pourtant… Nous n’y avons passé qu’une journée, juste assez pour se dire qu’il fallait absolument que l’on y retourne l’année prochaine...

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Nassim Guammaz crail air

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Downtown Showdown Amsterdam 3-4 août 2012

Photos par Tura Texte par Fredd

Qu’est-ce que c’est beau Amsterdam ! Ses paisibles canaux, les péniches, les vieilles bâtisses, les fleurs, les amas de vélos... Alors que mes camarades et moi nous promenions dans ces petites ruelles inondées de soleil à la recherche d’une terrasse ombragée où déjeuner, une question me taraudait l’esprit : comment font les gens normaux pour continuer à vivre dans un tel enfer ? J’ai demandé à un chauffeur de taxi s’il n’en avait pas marre de voir tous ces cons de touristes venus en masse dans l’unique but de se défoncer la gueule et d’aller aux putes. Il m’a répondu du tac au tac : « Ben non, c’est cool. Où est le problème ? » Le problème mon con, c’est qu’elle est à gerber ta putain de ville ! Enfin… Je me suis contenté de répondre : « Ah ben tant mieux alors ! », mais le cœur y était. Vous l’aurez compris, je déteste cette ville, et je vous invite à en faire autant. Ceci dit, le Vans Downtown Showdown à Amsterdam c’était vachement bien. Et voilà pourquoi…

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« Je suis vraiment trop sensible pour ces conneries. » Déjà, il y avait Suicidal Tendencies en concert et rien que pour ça, franchement, ça valait le déplacement. Suicidal c’est la bande-son du skate, tout le monde connaît, tout le monde n’aime pas, évidemment, mais tout le monde ne peut que respecter et reconnaître l’influence qu’a eue le groupe sur le skateboard. Enfin, je crois, je ne connais pas tout le monde non plus. Il y a forcément des gens qui s’en foutent totalement et c’est bien dommage pour eux, parce qu’ils ne connaîtront jamais le bonheur de se faire défoncer la gueule dans « le pit » par des gros costauds fanatiques. Sinon, pour en revenir à la partie sportive de l’événement, vous connaissez tous le principe de l’émission ? Vans invite des marques à dessiner leur module. Puis les teams s’affrontent sur lesdits modules et bien sûr, tous les fonds sont reversés à Kaïras Sans Frontières. Alors Moustène, qu’est-ce que tu nous as préparé comme concept de ouf cette année ? Cette année, les modules étaient dessinés par Flip, Palace (de ouf !), Blueprint et Antiz. Chez Flip, Geoff Rowley en personne a imaginé un module tout à fait banal mon frère, mais surdimensionné, du coup, il n’était absolument pas banal. Du tout. Palace, eux, ils ont fait fort : un cendrier géant avec un paquet d’OCB skatables, c’est pas du meilleur goût, mais c’était franchement génial. Et voir Penny skater la chose, ça valait son pesant de cacahuètes. Blueprint avait fait une péniche en l’honneur des marins qui chantent dans le port d’Amsterdam et qui boivent et reboivent et qui reboivent encore à la santé des putains d’Amsterdam... Vous voyez quoi, c’était classique, mais efficace. Antiz, en grands romantiques qu’ils sont, avaient dessiné un moulin, hommage poignant au folklore et à la campagne hollandaise, j’en ai la larme à l’œil. C’était franchement le plus beau module. Et je ne dis pas ça parce que je les aime bien, c’était le plus beau module un point c’est tout. D’ailleurs, dans l’ensemble c’était 48

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vraiment les meilleurs modules de tous les DTSD. Et c’était aussi, relation de cause à effet de ouf, la meilleure édition du Downtown Showdown (malgré ces putain de coffee shops et les filles de l’Est et d’ailleurs aux passeports confisqués, en vitrines). C’était donc très bien, sauf que ce contest m’a ouvert les yeux sur une facette de ma personnalité que je ne soupçonnais pas. Je suis vraiment trop sensible pour ces conneries. Déjà, comme je le disais juste avant que je m’interrompe moi-même, les putes en vitrines, ça m’a totalement chamboulé, puis le documentaire sur la Bones Brigade, en avant-première, avec les mecs qui pleurent à la fin comme dans une émission de Delarue (avant qu’il nous quitte, paix à son âme), mais en pire,

Guillaume Mocquin est toujours un plaisir à voir skater. Et à Amsterdam, il ne nous a pas déçus, que ce soit dans le bowl en béton, ou sur les modules Flip et Antiz, il était chez lui... Ce FS nose grind tail grab par dessus le channel par exemple, c’était vraiment super balèze. Un vrai champion le Guillaume.


Y’avait deux Gallois dans cette session bowl organisée un peu en marge de l’événement, Jake Collins et « Sox ». Ils était incroyables. Le premier a fini par se mettre une tarte et s’est cassé le bras, donc ils sont allés finir la fête à l’hôpital ; Mocquin et Remy Taveira ont super bien skaté aussi et puis le DJ était super bon, il a même passé le « 7 heures du matin » de Jacqueline Taïeb… Josh « Manhead » Young n’a rien à voir avec ces gens-là, mais ce FS nosegrind valait son pesant de peanuts aussi.

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« je suis allé aux putes et ça m’a bien requinqué. » S’il y avait une justice, Sylvain Tognelli aurait dû gagner sur ce module. Il y a fait les deux meilleurs tricks à mon goût. Ollie in to nose manual tout du long et ce five-0 ollie par dessus le trou to five-0 to fakie. Mais bon, c’est vrai que ce Luan Oliveira n’est pas mauvais non plus… La tête du juge !

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Ben Nordberg, c’est un putain de génie, mais il en fait vraiment trop… J’ai une drôle d’impression de voir un porno gay sur internet quand je le regarde skater. Après, j’me sens coupable. Vous voyez ce que je veux dire ? Comment ça vous n’avez jamais regardé de pornos gay ? Même pas une fois ? Ben, allez vite regarder la part’ Flip de Ben Nordberg, c’est pareil, en un peu moins crâde quand même. Ce BS noseblunt sur le module Antiz était fou ! Il a fait ça comme si de rien n’était, un vrai scandale.

c’était encore beaucoup trop d’émotion pour mon petit cœur. Comme si ça n’était pas suffisant, les pubs Vans romantiques et les interviews de mecs qui parlent de la Half Cab pendant dix minutes diffusées sur écrans géants, c’était trop de dramaturgie pour moi. Et puis, finalement, Ben Nordberg avec son p’tit haut échancré, son pantalon moulant, son corps luisant et ses cheveux au vent qui m’a ignoré tout le week-end… C’est bien simple, le lendemain, je me suis enfermé dans ma chambre d’hôtel de luxe, j’ai tiré les rideaux et j’ai écouté Daniel Guichard. Après, bien entendu, je me suis allumé un gros jocko, je suis allé aux putes et ça m’a bien requinqué. Bon, je tergiverse un peu, tout cela ne vous regarde pas vraiment, ce qu’il faut que vous sachiez sur le week-end c’est que le concert de Suicidal était fantastique, celui de Ray Barbee et Tommy Guerrero aussi (il paraît… je l’ai loupé), que le contest était franchement génial, que Cardiel en DJ c’est toujours aussi triste et que Cab est sympa (voir l’interview un peu plus loin dans ce magazine). Ah, et que la Bones Brigade et Jean-Luc Delarue étaient faits pour s’entendre.

C’est pas qu’il m’intimide ou quoi que ce soit, mais je ne sais vraiment pas quoi dire à propos de cette photo de Mark Froelich. Rien à redire en tout cas, il est impeccable son BS nosebunt slide sur le module Blueprint. Il est bon pour ce genre de tricks sur le nose et en back. Wunderbach quoi.

Allez, à l’année prochaine bande de bâtards ! soma

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Propos de G. Basdevant, J. Boileau et autres, librement interprétés par C. Queyrel Photos par Guillaume Ducreux (cette page) et Fred Ferand

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Selon vous, qu’est-ce qui a fait le succès de Woodstock ? -La boue. Bob Dylan sur CBS Radio Network, 1971

Lost inFrench Limousin Old School Skate Jam numéro sept

Parmi la catégorie pourtant riche, des fiascos cinématographiques, “Don Quichotte” caracole fièrement en tête. Orson Welles par exemple, s’y est brûlé les ailes pendant des années sans parvenir à le finir de son vivant. Mais à ce jeu-là, la palme revient sans conteste à Terry Gilliam et son “The Man Who Killed Don Quixote“. Dans la liste des catastrophes qui ont ponctué ce tournage, l’épisode du déluge engloutissant le matériel et bouleversant le décor naturel reste à ce jour indépassable. Un documentaire, “Lost in La Mancha“ sorti en salle deux ans plus tard sera la chronique de ce naufrage. En arrivant sur les lieux de la septième FOSSJ le dimanche matin, on pouvait se demander si ce documentaire n’était pas le meilleur témoignage de ce qui s’était passé depuis l’inauguration de la veille…

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Plus d’info : french.ossj.free.fr www.escaut.org/urban-scale/otro www.brusk.be www.ciapiledevassiviere.com

Île de Vassivière, samedi 7 juillet 2012, matin. La sculpture en béton de l’artiste coréenne Koo JeongA intitulée Otro est tout juste finie. La couche de peinture phosphorescente appliquée la veille est immaculée. Ce projet atypique, réalisé par L’Escaut Architectures en collaboration avec l’association Brusk (tous deux basés à Bruxelles) est une commande publique du Ministère de la Culture et de la Communication et de la Région Limousin. L’œuvre doit être inaugurée l’après-midi même, en présence des responsables du Centre International d’Art et du Paysage et des élus locaux. Otro

Depuis les esquisses qui datent de 2008-09, le projet a été optimisé et (re)modelé en vue de répondre aux exigences des usagers de la glisse, skate, roller et BMX compris. Cette valeur d’usage est venue se superposer à un propos artistique qu’on qualifiera rapidement de plus propre à l’auteur : impression du paysage sous la neige lors d’un séjour sur place, projection d’un imaginaire onirique et fantasmagorique, etc. À priori donc, le mariage de la carpe et du martien. Plaisir d’esthète

Pour pénétrer dans la sculpture skatable, un passage nous invite à emprunter un plan incliné qui s’enfonce dans un tunnel. Un boyau dont la forme ne peut manquer d’évoquer ce que Gustave Courbet a sobrement légendé, “L’origine du monde“. Passage à l’acte

Malgré les craintes concernant la météo du weekend, le ciel s’est dégagé le samedi après-midi au moment même où la plupart des skateurs arrivaient sur le site. Pendant les quatre, cinq heures qui ont suivi, on a alors assisté à l’une des plus belles sessions que la FOSSJ et que le skate français (disent les plus enthousiastes des alcoolisés) aient connu. Une frénésie collective s’est mise à animer les volumes et les surfaces d’une sculpture dont on ignorait, quelques instants auparavant, qu’elle permettrait ce genre d’extravagance. Le désir de se lancer à l’assaut était une réponse à l’appel de ces formes, comme si l’émotion qu’elles suscitaient devenait tout à coup le moteur du corps. Autrement dit, le passage d’une émotion esthétique à une motion pulsionnelle, cher à ce bon vieux Sigmund Freud, lui aussi grand amateur d’art et de lignes en tout genre…

Thierry « Dury » Durieu FS air © F. Ferand

Vie, mort et résurrection d’une œuvre d’art

Le propre du skateboard est de mettre en mouvement des corps, d’accélérer et d’en amplifier les déplacements dans l’espace. Comme une sculpture se patine sous l’effet d’un traitement de sa surface, l’œuvre de Koo Jeong-A, soudain exposée aux assauts des skateurs, a enregistré ces transformations sur une très courte durée. Ce processus naturel a 54

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Jérôme Chevallier BS ollie © F. Ferand


« De là à rejoindre la secte des fidèles de Raël, il n’y a qu’un pas… »

Jean Terrisse FS grind nose grab © G. Ducreux

été une expérience vécue à corps perdu par les skateurs, et dont les effets ne pourront plus se détacher de l’œuvre. Son devenir en est à jamais affecté en retour et ses futurs commentateurs devront désormais se résoudre à l’intégrer à leurs études. Un cas d’école. Retour sur terre

Le retour sur place le dimanche matin après une nuit de déluge fut une autre épreuve. Le spectacle était à la mesure du déchaînement céleste qui s’était abattu sur ce coin tranquille du Limousin. La tempête de grêle et les orages de la nuit avaient laissé un terrain littéralement désolé. Les bowls étaient devenus d’immenses piscines de boue et le spectacle tenait plus d’une FOSSJ septique qui aurait débordé que de l’image idyllique d’une sculpture intégrée dans un paysage champêtre qu’elle offrait encore, quelques heures auparavant… La possibilité d’une île

Sur le terrain du clonage cher à Michel Houellebecq, nous ne pouvons qu’être solidaires de ses prises de position. À la nuance près que pour nous, il ne s’agit pas d’humains mais de terrains qu’il faudrait cloner ! Si d’aventure le modèle expérimenté à Vassivière pouvait faire des émules et que nos campagnes françaises se couvrent d’étranges fantasmes de béton, les skateurs n’auraient certainement pas d’objections majeures à faire. De là à rejoindre la secte des fidèles de Raël, eux aussi sensibles au clonage et dont certaines architectures utopiques ne sont d’ailleurs pas sans évoquer Otro, il n’y aurait finalement qu’un pas à franchir… Une piste pour l’édition 2013 ? soma

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« INTO THE WILD »

par Tura

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LE TOUR SANS FIN Episode 3

Bordeaux – St Léon – Périgueux Limoges – Vassivière – Lyon Après Nantes-Bordeaux en février, on est donc repartis de la capitale girondine en compagnie cette fois de Jérôme Chevallier (qu’on ne présente plus) du Belge Bram De Cleen (parce que c’est notre pote, à Paul et moi, et que tout ça, de toute façon, c’est juste une histoire de potes) et du champion de rhétorique lillois Valentin Bauer. Nous avons pris la route vers l’est, histoire de ne pas faire comme tout le monde (surtout éviter la Côte Basque en été...) avec dans l’idée d’aller à un moment ou à un autre à Vassivière. Pour cette troisième édition, notre moyen de locomotion allait être le break de Jérôme, 400 000 kilomètres au compteur, sa remorque et ses deux chiens. Avec nos tentes et nos sacs de couchage, on s’était donné rendez-vous à Bordeaux, à midi, le 23 juillet...

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Lundi 23 juillet

Valentin et moi sommes au rendez-vous, fixé à midi chez Riot. Sauf que le lundi, Riot n’ouvre qu’à 14 heures. Alors on se replie au Molly Malone’s (le pub juste à côté) en attendant Bram qui fait la grasse mat’ chez Alex Richard, Paul qui arrive de Barcelone en covoiturage et Jérôme qui sera notre chauffeur pour la semaine. Histoire de tuer le temps, Val m’initie à Instagram. Je me dis qu’à défaut d’un bloggage quotidien, ça peut être vachement plus simple (Somaskate #toursansfin) vu que je me suis récemment équipé d’un téléphone intelligent. De toute façon, je n’ai pas emporté mon ordinateur, j’ai bien l’intention de faire en sorte que ce tour soit un peu les vacances… Bram et Alex nous rejoignent en terrasse, il fait déjà 30° et il est prévu le même temps pour toute la semaine. Morgan Fabvre et Fred PlocqueSantos passent par là à peu près par hasard et se motivent pour venir skater avec nous. Jérôme et ses deux chiens Choco et Ali débarquent, et Paul finit lui aussi par arriver. Le temps d’aller s’acheter une tente à Auchan et on décide d’aller skater les petits volcans en briques, à une demi-heure du centre-ville. Une idée de Bram, qui s’avère pas mauvaise puisque la moitié du spot est à l’ombre. Bonne session, qui se termine en slappy sur le trottoir d’en face. Toujours bon de finir la session en slappy.

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Valentin Bauer ollie, Périgueux. Ce trick est du vol, un skateur local l’avait déjà fait, mais comme ça n’était jamais paru et qu’on est des enfoirés, on l’a refait. On n’a quand-même pas la conscience tranquille, alors citons au moins le nom du vrai héros : Pierre Bonami. On te doit une photo Pierre...


« j’ai bien l’intention de faire en sorte que ce soit les vacances ! » On retourne en ville faire quelques provisions, et on passe voir Seb Daurel dans son chantier à Darwin (l’ancienne caserne Niel). Aidé par Cédric Crouzy et Samy Idri, Seb est en train de finir un nouveau spot en béton dans un des nombreux hangars voués à la destruction dans quelques années. Alors on se rabat sur son bowl en bois à côté de la Skate House en l’attendant. Deuxième session courbe de la journée, qui dure jusqu’à la tombée de la nuit. On pique-nique sur place et vers 23h, Seb nous invite à poser les tentes dans son jardin. On évite les moustiques en montant les tentes dans le noir et on finit par se coucher, épuisés et salés.

Bram De Cleen fakie pivot flip fakie, Bordeaux. Après avoir annoncé tréflip nose pick fakie et avoir bataillé pendant plus d’une heure et demie, en vain, Bram s’est mis à essayer ce trick et en 10 minutes, c’était plié.

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Alex Richard fastplant, Limoges. Alex et le Tour Sans Fin, c’est une longue histoire. 3 épisodes et 3 fois présent au moins une journée. Un putain de squatteur, et bien elevé, en plus.

« A défaut d’une douche, on pourra se rincer dans la rivière »

Mardi 24 juillet

Le soleil cogne déjà à 10h, à l’avenir on pensera à poser les tentes à l’ouest d’un arbre si l’on veut faire la grasse mat’. Seb est déjà reparti bosser, alors on décide de continuer notre route, en direction de Périgueux. Bonne idée de rouler en début d’après-midi, quand il fait trop chaud pour skater. A une vingtaine de kilomètres de Périgueux, il y a un ditch/park en béton au bord d’une rivière qui mérite le détour, à St-Léon-sur-l’Isle. On trouve facilement, et à peine a-t-on garé la voiture que l’on est déjà tous à l’eau. Il fait tellement chaud que personne n’a envie de skater le park, mais on se dit que ça pourrait être l’endroit idéal pour planter les tentes ce soir… On file à Périgueux, un contact sur place nous a parlé d’un spot couvert (donc à l’ombre). Un café et une glace plus tard, on retrouve Yoris et Victor dans les locaux de l’asso ABF (All Boards Family, les mecs du «Skate à l’Ouest»), où ils ont monté une mini et quelques modules. On y skate un peu et ils nous emmènent faire la visite des spots de street. On commence par un rail posé à côté d’un plan-incliné dans une école, puis une grande place avec des ledges en bois, un carrefour avec des petits plans inclinés en briques, et on se termine sur le fameux « rond-point des poissons » où Valentin s’entaille le coude et le genoux sur la mosaïque. On remercie Yoris et Victor pour la visite, on s’accorde un repas dans un petit resto que l’on vous déconseille («Le snack de La Pataterie») et on décide de retourner à St-Léon planter les tentes. A défaut d’une douche, on pourra se rincer dans la rivière demain matin…

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Jérôme Chevallier BS nose blunt, St-Léon-sur-l’Isle. N’importe quel trick en haut de cette sorte de craddle est un exploit (courbe foireuse, béton plein de cracks...). Alors quand Jérôme a annoncé BS noseblunt, on a cru à une blague...

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« Il s’agit de se mettre dans le sens du courant et de profiter du paysage »

Mercredi 25 juillet

Jérôme Chevallier FS ollie, Limoges Ouais, Jérôme est une sorte d’icône avec son short vert, sa chemise à fleurs, sa casquette et ses chaussures dépareillées !

La nuit se passe sans encombre, on a même pensé à mettre les tentes du bon côté des arbres. Au réveil, le ciel est aussi vide de nuage que les batteries de nos téléphones niveau autonomie. C’est un peu bizarre au début, et puis au bout de quelques heures on parvient presque à oublier. On a nos tentes, un skatepark en béton à 10 mètres, un point d’eau potable, une rivière… De quoi de plus pourrait-on avoir besoin ? Des toilettes ? Ouais, des toilettes…et du PQ ! Reste la rivière. Alors d’après le bouquin «Comment chier dans les bois ?» (si si, c’est un vrai bouquin), d’un point de vue écologique, chier dans un point d’eau est un peu la dernière chose à faire, mais quand on n’a pas le choix… Il s’agit donc de se mettre dans le sens du courant et de profiter du paysage. Je vous épargne les détails, et si vous n’avez jamais expérimenté la chose, sachez juste que ce n’est pas désagréable et c’est toujours l’occasion de rigoler en suivant du regard vos anguilles filer dans l’eau… Bref, on n’a même pas encore skaté le park, alors je motive les troupes pour essayer de faire une photo sur le corner/craddle. C’est

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Morgan Fabvre wallride nollie, Limoges (enfin, pas loin). Un élan incliné, un mur pourri, une replaque qui donne des croutes aux genoux et un filet d’eau dans le fond. Pas de quoi faire peur à Morgan.

Jérôme qui s’y colle. Après BS disaster en évitant les trous en bas de la courbe, Jer annonce BS noseblunt. Il est midi et demie, et rien que de rester assis à le regarder nous fait suer à grosses gouttes. Alors avant de reprendre la route, on retourne faire quelques sautper’ dans l’eau. Les vacances, quoi. On plie les tentes et on rattache la remorque, direction Limoges où l’on a rencardé Morgan, Fred et Alex chez Woodies skateshop. On arrive pile à la fermeture du shop, alors Cédric (le boss) nous emmène faire le tour des spots alentour. Alex trouve un fast plant sur un bon gap, et on passe presque deux heures sur une courbe naturelle en plein centre-ville. Il est 23 heures quand Cédric décide de nous inviter à manger un gros plat de pâtes chez lui (on est huit quand-même) et à passer la nuit dans son salon… L’occasion de recharger nos batteries et même de prendre une douche. La meilleure de l’année !

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Jérôme Chevallier noseblunt slide En bon gars du Sud, Jérôme n’est jamais contre une petite session en short par 35° dans un ditch rugueux à souhait...

Loïc Durand melon fakie, Vassivière Ca fait des années qu’on entend parler de Loïc, alors quand on l’a vu à l’oeuvre, on a compris pourquoi...

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« Le genre de ditch qui filerait des boutons à Léo Valls. » Jeudi 26 juillet Avant d’aller à Vassivière, on a tous envie d’aller jeter un œil au fameux «ditch de Limoges» (en vérité à 45 minutes de là). Le genre de ditch qui filerait des boutons à Léo Valls. En plein jour, en plus ! Une fois sur place, Jérôme évite les croûtes et rentre deux tricks NBD sur l’arête, pendant que Bram et Morgan trouvent un wallride à faire de l’autre côté du barrage. Tout ça est tellement Soma, tellement Tour Sans Fin, qu’il est temps d’aller faire un peu de courbe au nouveau bowl sur l’île de Vassivière (qui ferait probablement vomir de dégoût Léo). Posé au milieu d’un grand pré au bord du lac du même nom, le seul moyen d’éviter l’insolation est d’aller dans l’eau, ce qu’on s’empresse de faire à peine arrivés (c’est le vacances, oh !). Le bowl est en fait «une œuvre d’art skatable», imaginée par Koo Keong, une artiste asiatique qui aurait eu dans l’idée de réaliser un truc visible depuis la lune, même la nuit, puisqu’il est recouvert d’une peinture phosphorescente. Loïc Durand, local de l’étape, prend le temps de faire quelques airs pour la photo et Jérôme trouve quelques nouvelles lignes improbables. Il reste des bières chaudes, deux melons et des cacahuètes dans la voiture, ça sera notre repas de ce soir, il faut qu’on attende la nuit pour voir ce que donne le bowl. Et effectivement, la peinture renvoie une lumière verdâtre, juste assez pour rouler, mais trop peu pour imaginer faire autre chose que des kickturns ou éventuellement des pivots fakie ou des BS disasters, si vous vous appelez Morgan… Bonne expérience en tout cas, mais bon, il est 23 heures, et on ne sait toujours pas où l’on va dormir… Paul a un ami qui tient une auberge pas loin, et il y aurait moyen d’y passer la nuit… Un coup de fil plus tard et on est en route. On arrive à minuit sur une place où vient de se terminer la fête annuelle du village. La buvette est en train d’être démontée mais il reste des crêpes pour nous. L’accueil est chaleureux. C’est fou comme tout est plus simple, plus humain à la campagne… Guillaume est en fait un ancien skateur parisien, connu sous le surnom de «Aqua» par les mecs du Troca, qui vient d’ouvrir «L’Auberge du Sauvage» (on est à Rempnat, si vous passez dans le coin…) avec son pote Clément. Les chambres n’ont pas été meublées, alors on pose nos petits matelas, et on a même droit à une douche…

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Vendredi 27 juillet

Il y a eu un gros orage pendant la nuit mais on n’a rien vu ni entendu. Le soleil brille toujours autant. On se demande où on pourrait bien aller aujourd’hui. Après consultation, on est tous d’accord pour aller à Lyon. Ça pourrait être parfait pour terminer la semaine et pour repartir, la prochaine fois. Avant de prendre la route, Guillaume et Clément nous proposent d’aller déjeuner à Tarnac, haut lieu libertaire français, dans une cantine locale où chaque jour, n’importe qui peut venir cuisiner. Aujourd’hui, un couple d’Allemands a préparé des spetzles. Si vous êtes Alsaciens, vous savez de quoi il s’agit et que c’est exactement ce qu’il nous fallait pour remplir nos estomacs. En apprenant qu’on est une bande de skateurs, le barman insiste pour emprunter une board. On se dit qu’on n’a pas trop envie de le voir se casser un truc sauf que le type rentre flip et tré flip direct. En l’espace de 5 minutes, on fait partie du paysage et on aurait bien envie de rester. Mais l’aventure nous appelle, l’horizon nous attend, la route nous réclame, enfin… on se casse, quoi. On passe l’après-midi à bouillir dans la voiture et Lyon nous accueille avec une heure et demie d’embouteillages. Ça sent la fin des vacances. On pose nos affaires dans le bureau d’Antiz, on va manger un couscous pas loin, mais tout le monde a quand-même envie de skater un peu. La nuit est tombée, alors on dédiera cette session à Léo. On tente notre chance au nouveau spot de Charpennes, celui de la couv’ avec Gonz. Bram et Valentin trouvent chacun un truc à y faire, et même un truc ensemble. En fin de soirée, on reçoit un SMS de Loïc (notre hôte pour la nuit) qui nous dit que finalement, il a de la visite ce soir, alors on se trouve un petit coin dans le bureau Antiz au milieu des piles de boards pour dormir. Pour la douche, ce sera une autre fois.

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« En l’espace de 5 minutes, on fait partie du paysage. » Bram De Cleen wallride crooked grind Pour info, Bram mesure un mètre nonante cinq...

Samedi 28 juillet

Maintenant que l’on sait que l’on arrêtera le tour ici, on a un peu perdu notre motivation. On n’a pas skaté autant que l’on aurait pu, mais on a tellement sué que l’on est épuisés. Enfin bon, il fait un peu moins chaud, on est à Lyon, alors on se force un peu. On trouve un gros ledge du côté de Confluence et on se rend compte que depuis qu’on est là, on n’a croisé aucun skateur et les passants nous jettent des regards et des commentaires haineux. Même dans le moindre bled perdu du fin-fond de la France, on trouvait des gens à qui parler, avec qui échanger. Il va donc vite falloir qu’on revienne, pour vite repartir de là… Rendez-vous dans quatre mois, avec une nouvelle équipe. Il paraît qu’on ira vers le sud...

Un grand merci à Cédric de Woodies à Limoges pour le gîte et le couvert, à Seb Daurel pour toute son oeuvre, à Guillaume pour l’accueil à l’auberge du Sauvage à Rempnat, Loïc Benoît pour pas grand chose mais quand-même, à Yoris Couegnoux et Victor Borie, Jérôme et la All Board Family pour tout.

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Vincent Dallemagne ollie over to five-o, Paris. SĂŠquence par Yoann Kim 68 

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numéro XXXI

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Maxime Génin switch FS bigspin boardslide, Bordeaux Séquence par Manuel Schenck

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Samy Idri ollie up rock to fakie, Nïmes Séquence par Cédric Crouzy

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Matisse Banc noseslide & ollie in, Lyon Séquence par Loïc Benoît

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Karim Chérif boardslide, Paris Séquence par Tura

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Tintin au cph pro Les aventures de Tintin Texte et photos par Damien Marzocca

Marzocca, le petit reporter

Si vous en doutiez encore, ces quatre pages vont finir de vous convaincre que Copenhague est une excellente destination pour l’été, surtout vers la période du CPH Pro. Pour ceux qui planeraient complètement, sachez que cette ville se trouve au Danemark, et que c’est en haut sur la carte, en Scandinavie. C’est un endroit où les vélos sont plus dangereux que les voitures pour les “piétons” que nous sommes. Les gens y mesurent deux mètres cinquante en moyenne et il y a un fleuve qui traverse la ville, le long duquel il fait bon flâner. Copenhague se situe seulement à une demi-heure de train de Malmö et de ses spots faits main, les filles sont jolies (les mecs aussi oui), Christiania est toujours là et depuis deux ans il y a quand même le plus grand skatepark en béton d’Europe, en plus d’une bonne tonne d’autres trucs géniaux à skater. C’est bien simple, envoyez-y “Tintin Marzocca, le petit reporter” pour couvrir le CPH pro et il y restera une semaine de plus, avec l’intention de faire tout un tas de trucs, mais au final, il ne fera qu’un article sur le contest. En même temps, ça tombe bien, c’est tout ce qu’on lui demandait… - FD

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Raven Tershy FS grind en air max, un bras dans le plâtre et coquard en prime.


« vous aurez de quoi vous faire de bonnes frayeurs » Le CPH Pro est la plus grosse concentration de pros en Europe. Il en vient de partout, des Européens bien sûr mais aussi des Américains, des Australiens et même des Brésiliens. Comme à Munster ou Dortmund à l’époque, mais en moins gros quand même. Et c’est un peu moins fou-fou qu’au Grand-Bornand aussi. Comme à Lausanne alors ? Un peu comme à Lausanne oui, mais en moins gros, parce que c’est la crise, faudrait peut-être pas l’oublier.

Ishod Wair BS overcrooked

Le street park indoor fait peau neuve à chaque édition et cette année donc c’était assez polyvalent, avec un peu moins de transition qu’en 2011 pour laisser place à quelques “hubbas“, une table avec rail et surtout un curb spécial wallies du plus bel effet. Le jeune, grand, souriant et talentueux Evan Smith notamment lui a mis une bonne claque comme vous pouvez le voir ici. À noter que ce wallie bs tail slide 180° flip out a été rentré après un wallie bs nose blunt slide “pour se chauffer”… Assez déconcertant le gars. Dans le même sillon, un type comme Austyn Gillette aura mis la larme à l’œil à plus d’un spectateur. Mais rassurez-vous, il y avait aussi des machines à tout rentrer qui font un peu moins rêver. N’oublions pas qu’il s’agit d’une compétition sportive ! Ainsi, Nyjah Huston, Chris

Cole et Ryan Decenzo, pour ne s’en prendre qu’à eux, n’étaient pas venus pour enfiler des perles, ni même pour sucer des glaçons. Pas non plus là pour acheter du terrain… ou enculer des mouches. Enfin bref, vous voyez, ils sont super efficaces, toujours plus techs, toujours plus gros, toujours plus de maîtrise. Super super balèzes… Mais passons à autre chose : Busenitz ! Comme tout le monde le sait, il est La Classe incarnée, pourtant, il n’a pas gagné

Rune Glifberg FS stalefish

le contest. Mais il a bien évidemment remporté l’épreuve de sprint. C’est marrant comme dans le skate, pour faire moins “sport“, pour donner un petit côté humain à un contest, il suffit d’organiser une course de vitesse. Dennis a donc laissé parler ses évidentes origines jamaïcaines et poussé plus vite que tout le monde, et notamment Brad Staba en finale, ce qui faisait bien plaisir. Au niveau des autres animations du week-end, on retiendra le “Ring Of Spitfire” qui n’aura pas duré bien longtemps en raison de soucis techniques. Il y a aussi eu une méchante Jam session de pool avec un Ishod Wair en feu. Autant en street qu’en courbe, ce mec ne s’arrête jamais de skater, ni de sourire. Et le meilleur pour la fin, c’était bien évidemment le soma

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Evan Smith wallie BS tailslide flip to fakie

contest de Bowl qui s’est déroulé dans le gigantesque snake conçu et imaginé par Rune Glifberg, le local hero. Le bowl est aussi impressionnant que ses grands frères d’Oregon, avec une partie over-vert que vous n’arriverez même pas à atteindre dans vos rêves skateboardistiques les plus fous, et une grosse partie de quatre mètres de profondeur avec coping de pool. Largement de quoi vous faire de bonnes frayeurs si jamais vous décidez d’aller y faire un tour. Selon mes confrères, c’était un peu moins impressionnant que l’an passé. Mais bon, quand Rune Glifberg décide de s’envoler, ça ne déconne pas. Et quand Brad McClain commence à envoyer la purée sans protecs à grands coups de tricks plus techniques les uns que les autres, ça ne rigole pas non plus ! Personnellement, j’en ai eu pour mon compte. Si le niveau a été jugé un peu moins ouf qu’en 2011, c’est à mon avis parce que Raven Tershy le champion en titre, blessé, n’a pas pu skater. Enfin… Je l’ai quand même vu défoncer le bowl quelques jours plus tard en sneakers de running totalement inskatables. Il avait aussi un bras dans le plâtre, un très chouette œil au beurre noir et une arcade sourcilière pétée pour faciliter la chose. Heureusement, il arrivait tout droit de Christiania, il était donc bien anesthésié et il a donc pu “se promener“ dans le bowl à base de fs grinds dans l’over-vert, juste pour le plaisir. Ça m’a complètement scotché, et c’est sans doute ce qui m’aura le plus marqué lors de mon séjour à Copenhague. Comme quoi, les contests, c’est très bien, mais ce qui se passe autour vaut souvent tous les runs de “Nyjah Ortiz” au monde.

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Park 1. Chris Cole 2. Ryan Decenzo 3. Ishod Wair 4. Nyjah Huston 5. Shane O’Neill 6. Walker Ryan 7. Taylor Bingaman 8. Austyn Gillette 9. Wes Kramer 10. Dennis Busenitz Bowl 1. Brad McClain 2. Rune Glifberg 3. Josh Stafford 4. Sam Beckett 5. Nicky Guerrero 6. Curren Caples 7. Lance Mountain 8. Jake Collins 9. Alex Perelson 10. Taylor Bingaman


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STEVE CABALLERO Légende ordinaire Steve Caballero a tout du chic type. Le prototype même du voisin sympathique, souriant, aimable, le genre bon père de famille, sans histoire, qui va à l’église le dimanche. Limite Ned Flanders. Il arbore une barbe grisonnante et rassurante et sa casquette de vieux est constamment visée sur la tête. Il aime les vieilles voitures, collectionne les figurines de super héros, dessine des dragons, bref, il a le profil parfait du psychopathe fou dangereux qui cache bien son jeu. Sauf que le gars est une célébrité dans le monde du skateboard. S’il y en a un qui peut se targuer d’être une légende du skateboard, c’est bien lui. Le gars est pro depuis 32 ans, son model de chaussure est reconduit tous les ans depuis vingt ans, il était le meilleur de la Bones Brigade originelle (ceux qui pensent que c’était Hawk ou Mullen sont invités à refermer ce magazine et à aller se pendre) (ceux qui pensent à Tommy Guerrero, je leur tire mon chapeau, mais bon, faut regarder les choses en face les mecs : Cab il était quand même un cran au-dessus). Bref, une carrière exemplaire, sans la moindre anicroche et là, en 2012, il est toujours au top, il vient même de remporter la Protec pool party et n’a aucune envie de raccrocher les crampons. Une vraie putain d’légende. Mais en même temps, je me demande quelle valeur ça a vraiment d’être une légende quand, il ne faut pas se

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voiler la face, personne en dehors des skateboarders ne connaît votre existence ? Regardez Usain Bolt, le mec a tout gagné, jamais personne n’a couru aussi vite que lui sur 100m et 200m, il passe son temps à battre ses propres records, collectionne les médailles d’or aux J.O., mais le CIO estime qu’il va un peu vite en s’autoproclamant « légende », et qu’il faudra pour cela qu’il fasse ses preuves en 2016… (Oui, je m’y connais un peu en athlé et alors ?). Bon, j’admets volontiers que cette parenthèse sportive peut sembler déplacée ici, mais reconnaissez que c’est bizarre, Cab est l’un des gars qui mérite le plus son statut de légende alors que le grand public ne sait même pas à quoi il ressemble. Pourtant, on bouffe du Hawk, du Mullen et du Sheckler à toutes les sauces… Ça m’étonnerait pas qu’un de ces beaux matins, il pète les plombs le Cab et qu’il butte tout le monde dans son lotissement… Ce jour-là, vous ne pourrez pas dire qu’on ne vous avait pas prévenus. En attendant d’entendre parler de lui aux infos, Cab et moi on est allés boire un coup l’autre jour à Amsterdam. Ouais mon pote, Cab et moi, au bistrot, comme deux vieux copains, parlant du bon temps. Et voilà ce qui est ressorti de cette rencontre au sommet…


Photo par Loïc Benoît Intro et entretien par Fredd

Pourquoi est-ce que tu as choisi le skateboard et comment l’as-tu découvert ?

Pourquoi, en 1976, j’ai choisi le skate ? Parce que c’était fascinant, c’était un challenge aussi et ça avait l’air drôle tout simplement. Cette impression de se déplacer en volant… C’était assez populaire quand j’ai commencé. Dans mon quartier, les gamins avaient tous soit un vélo, soit un skateboard. J’ai ensuite vu des magazines de skate au supermarché et là j’ai commencé à me rendre compte de ce que c’était vraiment que le skateboard. Il y avait des photos de rampes, de skatepark… J’ai voulu faire la même chose que ces gars sur les photos. C’était vraiment difficile pour moi quand j’ai commencé, mais j’aimais ça et j’ai tout de suite trouvé ça drôle et motivant. Quel âge avais-tu ?

Douze ans.

Et tu es passé pro à quel âge ?

Je suis passé pro en 1980, donc j’avais 16 ans.

C’est plutôt rapide, non ? Ça n’a pas été « difficile » trop longtemps…

Je suis devenu bon assez rapidement, oui. Quand le skatepark de Winchester a ouvert et que j’ai commencé à vraiment m’entraîner, à essayer d’apprendre des tricks, j’y allais tous les week-ends et je m’entraînais chez moi la semaine. C’est un sport où assez rapidement je me suis dit que je pouvais être bon. J’en avais essayé plusieurs autres, comme le basket-ball, le football, le soccer [le vrai foot - ndlr], mais ça ne me convenait pas… Pour le basket, c’est sûr qu’il y avait comme un problème…

J’étais un peu petit pour le basket-ball, c’est vrai, ah ah ! En tout cas, j’ai senti que je n’étais pas fait pour les sports d’équipe. J’ai essayé le BMX aussi. La « race », parce qu’à l’époque, il n’y avait pas encore de tricks. Il fallait juste arriver le plus vite au bout. Mais j’étais tellement petit que même quand j’étais dans un groupe de mon âge, ils étaient tous plus grands, ils avaient de plus grandes jambes et bref, c’était difficile. Quand j’ai essayé le skateboard, je me suis senti bien immédiatement. Être petit n’était plus une contrainte. C’est donc allé très vite pour toi, tu n’as jamais eu besoin d’avoir un boulot en dehors du skateboard, n’est-ce pas ?

J’ai commencé à gagner de l’argent grâce au skateboard à 16 ans. Quand j’ai commencé à participer à des compétitions professionnelles. Puis bien-sûr, quand j’ai eu mon premier pro model. Mais j’ai aussi gagné de l’argent grâce à la musique avec mes groupes (the Faction, Odd Man Out…) et aujourd’hui je fais aussi de l’illustration. J’ai vu que tu avais fait une déco de skis !

Oui, j’ai eu l’opportunité de faire des skis pour Rossignol, c’était cool. J’ai aussi fait des décos pour Powell & Peralta, Consolidated, pour Golden Dragon aussi. Golden Dragon ?

C’est une sous-marque de Powell qui propose des boards

« Du vrai street ? Ça remonte... » complètes, pour les débutants. Je suis d’ailleurs « assistant brand manager » pour Golden Dragon.

L’illustration est ce que tu comptes faire après ta carrière de skateur pro ? Même si elle semble ne jamais s’arrêter ?

Je n’ai rien prévu. Je ne sais pas quand ma carrière de skateur pro va s’arrêter en effet, j’essaye de faire durer… [rires] Qu’est-ce qui a changé pour toi entre le moment où tu as commencé à la fin des années 70, début 80 et aujourd’hui ?

La différence principale en ce qui me concerne, c’est que c’est plus dur pour moi ! Mon corps ne récupère plus aussi vite qu’avant, il est de plus en plus difficile de skater et de se maintenir à un certain niveau. Ça demande beaucoup plus de discipline, d’entraînement. Je dois faire attention à ce que je mange, faire beaucoup d’étirements, boire beaucoup d’eau, faire d’autres sports, prendre soin de mon corps. Quels autres sports ?

Je fais du mountain bike, de la moto-cross, du yoga… À mon age [47 ans], si je me fais mal, j’ai besoin d’avoir une bonne hygiène de vie pour ne pas mettre trop de temps à récupérer. Mais j’ai encore des efforts à faire dans ce domaine, ça demande beaucoup de travail de rester en forme. C’est un travail constant. Tu skates encore beaucoup ?

J’essaye de skater au moins trois fois par semaine, mais c’est parfois seulement deux. Je dois jongler avec ma vie de famille. Je suis marié, j’ai deux enfants… même trois… Donc tout cela rentre en jeu, ma vie ne peut pas tourner uniquement autour du skateboard, plus maintenant. Je dois faire attention à entretenir une bonne relation avec ma femme. On vient d’ailleurs d’ouvrir une galerie tous les deux. Moitié boutique, moitié galerie. Ça s’appelle « Bela la vie », c’est à Campbell en Californie, où j’habite. Ma femme adore Paris, alors elle voulait ouvrir une galerie dont le thème principal serait la France. Elle y vend des bijoux, des trucs pour femmes… Et de mon côté, tous les mois je présente une expo. Avec toutes mes connexions, tous les artistes que j’ai rencontrés au cours des années, j’ai réussi à me constituer une grosse liste de contacts dans le domaine artistique. Les expos sont bookées un an à l’avance, ça tourne bien. Il te faut des artistes français pour rester dans le thème de la boutique.

Je n’en connais pas tant que ça en France, mais si l’occasion se présente…

Pour en revenir au skate, à quand remontes ta dernière session de street ?

C’était aux Berrics. De vrai street !

Du vrai street ? Ça remonte alors…

Bon, on va dire que ça compte les Berrics…

On a fait un « text yo’self… » avec Powell-Peralta, là-bas,

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il y a un an. Et j’ai fait un autre truc encore avec le team Powell à Double Rock pour le site Thrasher. Je ne fais plus vraiment de street aujourd’hui. J’ai arrêté d’en faire autour de 2000.

Oui, il skate super bien. Maintenant il y a aussi Sergie Ventura et Sluggo en masters…

Merci. Oui, je faisais encore pas mal de rails à l’époque, je filmais pour la vidéo Bones « Class of 2000 ». Mais c’était la fin, après ça, je n’avais plus envie de me faire mal. Je me suis donc remis à skater de la Vert’ et depuis je n’ai skaté pratiquement que des rampes et des bowls. Je me concentre là-dessus. J’ai recommencé à faire pas mal de contests…

Je trouve ça génial. Le fait que cela passe à la télé apporte beaucoup au skate. Cela apporte de la légitimité au sport. La compétition aide à repousser les limites du sport à plusieurs niveaux. Cela pousse les gars à progresser et à être consistant. Parce qu’en street, on n’est pas toujours consistant. Une vidéo ne reflète pas la réalité, on ne réalise pas le temps qu’il faut pour rentrer un trick. Quand tu regardes une compétition, là c’est la réalité. Et de voir la consistance avec laquelle ces gars skatent aujourd’hui, c’est incroyable. Je n’arrive pas à croire le niveau que ces gars ont atteint ces dernières années. J’adore voir ça. L’aire de street aux X-Games cette année était géniale. Cela ressemblait à de vrais spots de street, c’était comme un décor de cinéma, on aurait pu se croire dans une cour d’école, c’était parfait.

Je me souviens du FS boardslide sur le rail de Conforama à Lyon, c’était à peu près à cette période. C’était vraiment balèze !

Oui, il y a tous ces contests aujourd’hui avec des catégories « masters » ou « legends ».

Oui, c’est marrant. Mais ça demande beaucoup d’endurance, beaucoup d’efforts de participer à ces compétitions, d’autant qu’il y a beaucoup de nouveaux qui arrivent dans ces catégories aujourd’hui. Des plus jeunes… Je crois que la limite c’est 38 ou 40 ans alors comme j’en ai 47, c’est difficile de rivaliser. Le niveau augmente. Chris Miller est toujours incroyable…

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Il fait toujours des backflips, Sluggo ?

Oui, oui, toujours. C’est fou !

Et quel est ton point de vue sur les contests de street d’aujourd’hui, les très gros, les Street League, les XGames…


« Une vidéo ne reflète pas la réalité, quand tu regardes une compétition, là c’est la réalité. » C’est vrai que c’est impressionnant.

Oui, et ça rend super bien à la télé. Ces gars sont tellement bons, Paul Rodriguez, Ryan Sheckler, Nyjah… Ils ne sont pas mauvais, oui…

Tu vois les gars aujourd’hui [au Downtown Showdown à Amsterdam], ils sont très bons, ils font de trucs incroyables eux aussi, mais ils ne sont pas consistants.

Il y a une poignée de gars qui est vraiment au-dessus du lot, quand-même…

Oui, et c’est la consistance qui fait la différence.

Quel est le dernier trick que tu aies appris, ou réappris ?

Ré-appris… Il y a les BS boneless et les BS blunts, j’y ai pas mal travaillé. J’ai passé pas mal de temps dernièrement à réapprendre des tricks… Mais laisse- moi réfléchir à un trick nouveau… Les feeble grinds ! J’ai appris il n’y a pas longtemps, j’en avais jamais fait. Les feeble grinds ? Vraiment ?

On les faisait to fakie, mais je n’en avais jamais fait en repartant droit. Et tu penses que c’est plus dur en normal ?

Oui. On a appris en fakie à l’époque, alors c’est plus dur pour moi de réussir à tourner mon corps pour repartir en avant…

Si tu le dis… Quel est le dernier trick que tu aies perdu ?

Le stalefish ! Trop dur de grabber, je n’arrive plus à me plier suffisamment. J’ai le même problème avec les tucknee inverts. Faut que je fasse des étirements… Peutêtre que ça reviendra un jour, mais ça va demander de la discipline… En fait, il y a pas mal de tricks que je ne peux plus faire parce que je ne suis plus assez souple pour grabber… En dehors du Caballerial, quel autre trick as-tu inventé ?

Les frontside boardslides, en pool. Lipslide to smithgrind. Switch invert. À l’époque on appelait ça backward invert, un opposite foot handplant quoi… Les FS gaytwist aussi. Qui a trouvé le nom « gaytwist » ?

Lance Mountain et Neil Blender. Neil Blender forcément…

Forcément oui… BS boneless aussi et le fs boneless en vert. Varial invert… Et voilà, je crois que c’est tout.

Pas mal, pas mal. C’est une bonne liste. D’ailleurs, en parlant d’innovateur, hier soir à la première du doc sur la Bones Brigade tu as balancé un peu sur Mark Gonzales…

maltraiter un peu. C’est des bons souvenirs…

Quelle fut ton implication dans le designe de ta chaussure ? Je parle du premier model, la Cab.

Ce qui s’est passé, c’est que quand ils m’ont proposé de faire une chaussure, ils pensaient à quelque chose de proche de la Air Jordan, parce que c’est ce que je skatais à l’époque. Alors j’ai dessiné quelque chose et ils avaient commencé à travailler sur une chaussure de leur côté qui était assez similaire, donc j’ai changé quelques trucs ici et là. C’était une collaboration entre Vans et moi. Pour la Half Cab par contre, c’était mon idée. Parce que tout le monde coupait les Cab de toute façon…

Oui c’était la mode à l’époque. Et comme je suis quelqu’un de très à cheval sur la mode, je me suis mis à les couper moi aussi, et là je me suis dit « mais pourquoi je fais ça ? ». J’ai appelé Vans et je leur ai dit : « hé, j’ai une super idée. On va couper la chaussure là où tout le monde la coupe, on met une photo de moi en half cab et on l’appelle la « half Cab ». On la sort en plusieurs couleurs et on voit comment ça marche… ». Et aujourd’hui, vingt ans plus tard, c’est toujours une des chaussures les plus populaires. Je crois qu’ils en sont assez contents chez Vans en effet…

Oui, c’est assez unique qu’elle ait réussi à traverser les époques, et qu’elle soit toujours dans la tendance, qu’elle plaise toujours autant.

Tu n’en a pas marre parfois ? Ça fait vingt ans quand même…

Non, il y a toujours de nouvelles couleurs, des nouvelles collaborations, de nouvelles matières, de nouveaux artistes… Tu les collectionnes ?

J’ai une assez grosse collection. Je ne les ai pas toutes, parce qu’il y en a que je n’ai même jamais vues. C’est difficile de rester au courant de tout ce qu’ils sortent. Il faudrait que j’aie un espion chez Vans qui me tienne au courant de tout ce qui sort avec mon nom dessus… J’habite à sept heures de route, je vais à L.A. de temps en temps, mais je ne peux pas tout surveiller. Mais tu n’en as toujours pas marre…

Non, toujours pas.

Bon ben à dans vingt ans alors, pour les quarante ans de la Half Cab…

Ha ha, oui voilà, à dans vingt ans !

[rires] Oui… Je l’aime beaucoup et j’ai beaucoup de respect pour lui, mais c’est vrai qu’à l’époque, il avait énormément d’énergie et parfois il était un peu… Comment dire ? Fatiguant ?

Oui, c’est ça. Il était fatiguant. Alors il nous arrivait de le

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Le dinosaure « skatez des plus grosses roues ! » Les chroniques musique, les interviews de groupes, généralement on évite. Mais quand on nous a contactés pour rencontrer J Mascis à Paris pour la promo du nouveau Dinosaur Jr I bet on sky, là on a pas hésité. Parce que l’influence du groupe dans le skate depuis 20 ans est immense, mais aussi parce que l’on est tout simplement de bons fans de base. Merde, Dinosaur Jr quand même ! Restait maintenant à faire parler J Mascis, aussi légendaire pour sa musique que pour son manque d’intérêt pour les dictaphones. Sympa quand-même, et puis la petite lueur dans les yeux quand on lui parle de skate fait plaisir... - par Valéry blin Que fais-tu en Europe ces temps-ci ?

J MASCIS : J’ai fait quelques concerts et je suis là pour la promo de I Bet On Sky. Je reviens juste de Londres où je suis allé pour un film. Et je repars pour Los Angeles ou Portland, je ne sais pas encore. Plus de concerts en Europe pour l’instant. Est-ce que tu as conscience de l’importance de la musique de Dinosaur Jr dans le milieu du skate ?

Hum… J’en suis pas sûr. Je sais que notre musique a été utilisée dans beaucoup de vidéos de skate… Ouais c’est cool. Et comment tout ça a commencé ?

Je sais pas trop… Neil Blender est venu à un de nos concerts durant la tournée de l’album Bug. Et on est devenus amis. Tout vient de Neil je pense. Tu as vu certaines des vidéos dans lesquelles ta musique est utilisée ?

J’en ai vu quelques-unes… La dernière que j’ai vue c’est Mind Field la vidéo d’Alien Workshop.

Est-ce que les marques de skate te demandent l’autorisation pour utiliser un de vos titres ? Et est-ce que tu vérifies le résultat final avant d’accepter ?

Non, je ne sais pas. Je ne peux pas te dire comment ça s’est passé. Je n’étais pas au courant pour la plupart des vidéos… Neil me demande parfois mon accord sur certains projets. Mais personne ne nous a jamais envoyé les montages pour avoir notre autorisation. Du moment que le skate est bon, c’est cool. Comment tu expliques ce lien si fort entre Alien Workshop et Dinosaur Jr ?

ans à la fin des années 70, l’époque de Tony Alva tout ça…

Tu as de bons souvenirs du tournage du clip d’Over it il y a quelques années ? (On le voit skater vraiment bien, mais c’est en fait Kyle Leeper qui le double pour les tricks - NDLR)

Ouais… C’était marrant. Je n’avais pas skaté autant depuis très longtemps. Le cameraman était incroyable. (Mike Manzoori, NDLR) Il pouvait skater en arrière tout en tenant la caméra, c’était incroyable ? Quels souvenirs as-tu de la soirée Thrasher l’an dernier à Paris à la Gaieté Lyrique ? Tu as pensé quoi de la prestation des autres groupes, sincèrement ?

C’était cool… C’était quoi les autres groupes déjà ? (rires) Je ne les ai pas vus. Même pas le groupe de Jake (Phelps, le rédac chef de Thrasher - NDLR) Quand j’étais jeune, je le “connaissais”, c’était un grand skinhead de la scène hardcore de Boston. Il était venu me voir à la fin d’un concert de mon groupe Deep Wound pour me dire qu’il avait aimé comment je jouais de la batterie. Il m’avait fait peur. On peut le voir dans le documentaire All Ages. Je ne l’avais pas recroisé depuis que j’avais 15 ans. J’ai un peu flippé quand je l’ai revu à Paris… (rires)

Les mecs d’Alien sont partis dans l’Ohio et à cette époque ils avaient demandé à Neil Blender d’investir dans la marque mais il n’a pas voulu… Bref, je les ai alors rencontrés grâce à lui et j’ai toujours été intéressé par les aliens moi aussi. Donc on avait ce truc en commun…

A ton avis, quel titre de ton nouvel album pourrait être utilisé dans une vidéo de skate ?

Ah ouais c’était cool, j’ai enregistré l’intro pour la vidéo.

Oh, je ne sais pas. (rires) Peut-être… skatez des plus grosses roues !

Pour leur dernière vidéo, Mind Field, ils sont carrément venus filmer chez toi…

On te voit d’ailleurs skater avec Omar Salazar. Tu skates encore un peu ?

Hum… (Silence) J’imagine bien le premier de l’album, peut-être, Don’t pretend you didn’t know. Juste pour le groove de la chanson, ça pourrait être bien pour du skate. Pour conclure, tu as un dernier mot pour les skateurs français qui liront cette interview ?

Ouais ! (rires) Un petit peu…

C’est quoi ton meilleur trick aujourd’hui ?

Je ne sais pas, peut-être celui que je fais dans cette vidéo, le daffy. Je n’ai pas skaté de rampe depuis très longtemps, mon trick préféré c’était le backside air. J’ai commencé vers 12 86

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I Bet On Sky de Dinosaur Jr, nouvel album www.dinosaurjr.com


samuel partaix - frontside boardslide, melbourne / photo : loïc benoit mus bennacer × akim cherif × gregoire cuadrado × lionel dominoni lisa jacob × martin keller × mathieu lebail × jon monié samuel partaix × kevin rodrigues × rémy taveira × sylvain tognelli nozbone skateshop, 295 rue du faubourg st antoine 75011 paris - metro nation - 01 43 67 59 67 la boutique en ligne nozbone.com / le blog nozbone-skateshop.com


EN VRAC La liste non-exhaustive des videos parts mises en musique par Dinosaur Jr

Duane Pitre, Rob Dyrdek et Steve Claar dans Footage (G&S)

sur The Wagon (Green Mind) Mike Vallely dans Speed Freaks (Speed Wheels) sur Freak Scene (Bug)

Neil Blender et Steve Claar dans

Speed Freaks (Speed Wheels) sur Let It Ride (Bug) Rudy Johnson dans Video Days (Blind) sur Just like heaven (Fossils) Rob Dyrdek dans Memory Screen

(Alien Workshop) sur The Lung (You’re living all over me) Duane Pitre dans Memory Screen (Alien Workshop) sur Budge (Bug) Donny Barley dans Eastern Exposure 3 sur On the Brink (Without a sound) Brian Anderson dans Jump Off A Building (Toy Machine) sur Yeah We Know (Bug) Paul Zitzer dans Static sur Puke And Cry (Green Mind) Reese Forbes dans Element World Tour (Element) sur Little Fury Things (You’re living all over me) Anthony Papallardo dans Mosaic (Habitat) sur Forget The Swan (Dinosaur) Omar Salazar dans Mind Field (Alien Workshop) sur Creepies (Farm deluxe edition) et Almost Ready (Beyond) Grant Taylor dans Mind Field sur Grab It (Without A Sound) Mikey Taylor dans Mind Field sur Crumble (Beyond) - VB

Et un petit topo sur Neil Blender Il est fort probable que la grande majorité de nos lecteurs ait du mal à comprendre la fascination qu’on a, nous autres vieillards, pour Neil Blender. Il faut dire que le gars était pro au début des années 80 et qu’à la fin de celles-ci, il avait déjà quitté le devant de la scène. Entre temps, il avait inventé une demi-tonne de tricks comme le lien air, le bean plant, le hurricane, le fastplant… Et nommé une demi-tonne d’autres manœuvres comme le no comply, le gay twist, etc, etc. C’était donc un excellent skateboarder, fait indiscutable, sinon, il n’aurait pas été pro, il aurait juste fait un magazine de skate… Mais au-delà de cela, Neil Blender est un personnage hors norme, ultra créatif, dont l’influence sur le skateboard est immense. Il a été l’un des premiers à dessiner lui-même les décos de ses promodels (ses planches s’arrachent aujourd’hui à prix d’or sur eBay), il était aussi capable, en plein run d’un contest de « street », de sortir une bombe de peinture de sa poche pour dessiner sur un obstacle, puis reprendre son run comme si de rien n’était. Il a également été très fortement impliqué dans la création d’Alien Workshop. Il a dessiné et continue de dessiner des décos pour des dizaines de marques (dont dernièrement une série pour Black Label), il a fait des pochettes d’albums pour Dinosaur Jr, des bédés pour les mags, et tout un tas de trucs tout aussi remarquables et qui vont à l’encontre totale de ce qu’un mec comme Dyrdek est en train de faire aujourd’hui, ce qui est assez paradoxal quand on sait qu’il vient justement de racheter Alien Workshop… Mais ceci est un autre problème, et en attendant que le monde s’écroule pour de bon, allez chouffer des vidéos de Neil Blender sur youtube, tout de suite ! - FD 88

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Neil Blender, lui-même, quelque part dans les années 80, shooté par son pote Lance Mountain. La classe, quand-même, de se faire prendre en photo par Lance Mountain.

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WWW.CRIMELAROCHELLE.COM


EN VRAC Le bouquin qui fait soi-même En cette fin d’année 2012, on peut raisonnablement commencer à en avoir marre d’entendre parler de « DIY ». C’est que la chose a le vent en poupe. Le diailleouaille, c’est tendance mon pote. On enfile une veste sans manche de travailleur from Detroit, un bonnet de marin pécheur, on arbore des tatouages de taulards, on plonge les mains dans le béton et hop, à nous les parus dans les mags de skate ! Ça, grâce notamment à des mags comme le nôtre (Kingpin aussi, et d’autres…), vous en avez bouffé du spot construit à l’huile de coude et à la franche camaraderie. Et à vrai dire, à force, on en aurait presque marre. Et pourtant, nous n’avons que de très bonnes choses à dire sur ce bouquin. Alors oui, bien sûr, les gars qui éditent ce livre sont nos amis, et de très bons potes de sessions, mais même s’ils n’avaient été que de sombres hypsters en mal de reconnaissance, nous n’aurions toujours pas réussi à penser le moindre mal de ce DIY là. Le livre est simplement magnifique, alors rangez donc cette mauvaise foi au placard, au moins pendant cinq minutes et accordez-nous encore un peu de votre attention. Il s’agit là de 160 pages de photos d’un certain Richard Gilligan, photographe irlandais, qui a parcouru l’Europe et les U.S. à la recherche de ses spots renégats en béton qui fleurissent en lisière des villes. Gilligan, qui peut être un très bon compagnon de session lui aussi, a donc photographié des spots, vides, sans skateurs. Des spots souvent éphémères, construits avec les moyens du bord, généralement sans autorisation et sans le moindre glamour. On n’est pas en Californie ici… Les photos sont donc à l’image des spots, brutes, sans paillettes, froides et terriblement belles en même temps. Bref, c’est chouette, c’est du « DIY » et vous pouvez vous faire une idée de la chose en allant sur leur blog (www.1980editions.com/diy-blog). - FD

DIY de Richard Gilligan 44 euros chez 19/80 éditions

Les surprises videomusicalogiques Le skateboard en vidéo partage avec le patinage artistique un goût certain pour la musique synchronisée avec les cascades. Une vidéo sans musique, vous en conviendrez, c’est rare. Ça existe, mais c’est rare. On parle de vraies vidéos là, comme avant l’internet… Bref, la musique et le skate main dans la main, ça ne n’étonne plus personne, encore que, parfois ça peut encore surprendre... Voilà dix musiques de vidéos garanties sans Dinosaur Jr, Wu Tang ou Suicidal qui ont eu leur petit effet (de surprise) à l’époque… - FD 90

soma

« Nights in white satin » The Moody Blues - Heath Kirchart dans la TWS Sight Unseen « Traneing in » John Coltrane - Mark Gonzales dans

la Blind Video Days « Avalanche » Leonard Cohen - Lisa Jacob dans la vidéo Nozbone Rendez-vous « Haunted and nervous » Sizzla & Anthony B - John Cardiel dans la TWS Sight Unseen « Everybody » Backstreet Boys - Sluggo dans la RDS FSU « Highway to heaven » la chorale des enfants de l’église de Times Square - Lenny Kirk dans la Alien Workshop Time Code

« Un autre monde » Téléphone - Jérémie Daclin dans la Cliché Bon Appétit « What a wonderfull world » Louis Armstrong - Rodney Mullen dans la Plan B Questionnable « J’ai du chagrin Marie » Michel Polnareff - Chocolate vidéo Oui will Rock You « Sonate au clair de lune » Beethoven - Pat Brennen dans la Powell Celebrity Tropical Fish Mentions spéciales pour la muisque de la vidéo Planet Earth Animal Farm entièrement composée de la BO de Star Wars, ainsi qu’à la musique de la vidéo Rhythm Genesis composée exclusivement de techno merdique…


toni brossard – switch FS noseslide photo mathieu claudon

jonathan jean-philippe thomas renaux – alex hermann – benoit renaux paul denau – joseph biais franky eyoum

64/68 rue st honoré 01 40 41 98 69 métro louvre rivoli/les halles w w w. s t a r c o w p a r i s . c o m


EN VRAC Le bouquin de photos

Beyond, c’est le nom d’un skate shop en Finlande qui vient de sortir ce bouquin dans lequel on retrouve la vidéo «Yours Truly» (en DVD) qui circulait encore sur le net il y a quelques semaines. Un recueil rafraichissant de photos de skate sans chichi, avec que des noms et des spots inconnus, et une seule phrase pour texte : « Ce livre est l’histoire illustrée des riders Beyond, de leurs sessions, de leurs voyages et le plus important, des bons moments qu’ils ont passé ensemble.» Qu’est-ce qu’il y aurait d’autre à dire ? - DT Disponible pour 10 euros sur www.beyondstore.fi/tuote/yours-truly-beyond-dvd-photobook

Le Pro-tarlé (le retour)

« Kevin Rodrigues, il a vraiment un nom à se faire sponso Chocolate ! » - Franc Bruneau AKA Semelle de plomb, ancien habitué du Trop Parlé de Sugar, ex de Bastille et bifleur à temps partiel

Le bouquin de dessins Olivier Benoît, Flag pour les intimes, est un skateur nîmois de la première heure, il avait déjà une rampe dans son jardin que t’étais même pas né, fils. Aujourd’hui, il vit à Marseille, skate toujours et vient de sortir un bouquin compilant plus de vingt ans de dessins, gribouillages et peintures en tout genre. C’est assez perturbant à vrai dire. Quand j’ai reçu le bouquin, j’avoue m’être posé deux ou trois questions sur mon pote Flag… Ce qu’il est

important de préciser ici, c’est qu’il n’est ni un enfant de six ans, ni un psychopathe fou dangereux. Tout du moins, il n’a pas encore été officiellement diagnostiqué en tant que tel. Après ce bouquin, la sentence va peutêtre tomber, en effet… Bref, on vous tiendra au courant. En attendant tapotez www.dreamabonds.blogspot.fr sur votre Bontempi, puis cliquez sur « shop ». - FD

10 euros, 100 pages, format A5, papier de qualité supérieure, pas cher mon frère. À ranger à côté de la collection de Soma sur l’étagère. 92

soma


TOF: Florian El Gabteni.

Vincent Coupeau CREA MS k a t e sho p. c om


10 RAISONS d’adorer ou détester Eric Koston

Vous avez remarqué comme c’est la mode de détester Eric Koston, en ce moment ? Certes, on en a bouffé pas mal ces derniers temps, on frôle même parfois l’overdose, mais bon… C’est quand-même très symptomatique de la post-adolescence : on finit toujours par détester ses idoles. Immigré thaïlandais devenu aujourd’hui millionnaire, Koston incarne parfaitement le rêve américain. Et qu’on l’aime ou qu’on le déteste, il est évident qu’il a toujours été plus ou moins le meilleur. C’est bien là l’un des seuls faits incontestables à son sujet.. Texte et séquence par Tura Photo par Guillaume Périmony

Le détester...

Parce que faire des “dork tricks”, c’était

marrant quand il faisait encore des bons gros hammers. Parce qu’après les Koston 3, chez Es, c’est devenu n’importe quoi. Parce qu’il pousse comme une pétasse, et qu’il n’a jamais appris à pousser autrement qu’en mongo lorsqu’il est en switch. Parce que ça nous a tous fait bizarre quand il a quitté Lakai... Parce que lui et son pote Steve Berra ont inventé des règles débiles pour les OUT. Parce qu’on n’en peut plus de voir sa tronche partout. Parce qu’il aime trop le basket. Parce qu’il est devenu trop “politiquement correct”. (De nouveau pote avec Paul Rodriguez ?) Parce qu’il y a trop de raisons de l’adorer. C’est donc devenu cool de le détester. Parce que place aux jeunes !

L’adorer...

Parce que ses parts dans Mouse (1997), Menikmati (2000) et Yeah Right ! (2002) sont juste complètement dingues, à tous les niveaux. Parce qu’il a toujours su prendre des risques : quitter H-Street (au moment où sortait son pro-model), quitter 101 (la marque de Natas Kaupas) pour aller monter Girl avec ses potes… Parce qu’il n’est pas sponsorisé par un energy drink. Donc il sait que c’est de la merde. Parce que son déguisement de GG Allin dans “Chomp on this” était impeccable. Au passage, ça et sa crise au début de sa part dans “Yeah Right !” ont bien démystifié le personnage, qui est soudain devenu plus humain. Parce qu’il a fait switch tré sur les 7 (6) de l’EMB en 1991, BS noseblunt sur Hubba Hideout et inventé le Fandangle... Parce qu’il sait tout faire, et qu’il faisait déjà tout il y a 20 ans, dont des 540 en Vert’. Parce qu’il a de l’humour et qu’il est plein d’autodérision. Ce qui n’est vraiment pas donné à tout le monde. Parce qu’il a réussi à s’embrouiller avec P-Rod, pour des histoires de sponsors, il y a 10 ans. Parce que les Koston 1 chez Es étaient techniques et sobres à la fois, et parfaites pour skater. Parce qu’il a la putain de classe !

Pourquoi faire des vrais tricks quand on peut faire des dork tricks ? Tirette à Bercy. 94

soma


toni brossard – switch FS noseslide photo mathieu claudon

jonathan jean-philippe thomas renaux – alex hermann – benoit renaux paul denau – joseph biais franky eyoum

05659452/65 6138

rue st honoré 01 40 41 98 69 métro louvre rivoli/les halles w w w. s t a r c o w p a r i s . c o m


K E L L E N

J A M E S

B AC K S I D E

O L L I E

@ O S I R I S _ S H O E S FAC E B O O K . C O M /O S I R I S S H O E S @ O S I R I S s h o e s


t h e F O R

n y c 8 3

M O R E ,

m i d

O S I R I S S H O E S . C O M

#KELLENSM4L


JUSTIN BROCK

C ON T ROL



Kevin Rodrigues - slappy BS smith - malmö Photo : Tura

« Je me heurte parfois à une telle incompréhension de la part de mes contemporains qu’un épouvantable doute m’étreint : suis-je bien de cette planète ? Et si oui, cela ne prouve-t-il pas qu’eux sont d’ailleurs ? » - Pierre Desproges / Chronique de la haine ordinaire


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