Solidarité 4 14

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Numéro 4, novembre 2014

POINT FORT Sri Lanka KOSOVO Un festival du film exigeant

Le magazine de


2 ÉDITORIAL Chère lectrice, cher lecteur, Solidar trouve ses racines dans l’aide humanitaire qui repré- Elle engendrerait en effet le retrait de fonds affectés dans les sente encore aujourd’hui l’une de nos trois priorités. Il y aurait de domaines de la santé et de l’éducation et œuvrant pour que les nombreuses bonnes raisons de transformer cet éditorial en de- femmes puissent décider elles-mêmes de leur vie. Il est prouvé mande d’aide d’urgence, d’autant plus que le présent numéro que la principale condition requise pour réduire le taux de nataest consacré à notre travail au Sri Lanka lité en Afrique est le renforcement de la depuis le tsunami de 2004. position des femmes. C’est également la L’actualité nous a donné une raison imraison pour laquelle, au niveau mondial, le taux de natalité décline de manière signiportante de ne pas aller dans cette direcficative pour chaque année supplémention: l’initiative Ecopop sera soumise au vote en novembre. Elle nous fait croire taire que les femmes passent à l’école. qu’il suffit simplement de freiner autant que possible l’immigration en Suisse pour Et rappelons encore ce principe démorétablir l’équilibre écologique. Afin de ne cratique pour terminer. Notre Constitution pas être catalogués dans la droite popune contient que des règles qui doivent être applicables sur le long terme pour la liste, les auteur-e-s de l’initiative assoSuisse. Quiconque souhaite inscrire dans cient leur revendication à une approche Esther Maurer la Constitution les modalités de la planifiaux conséquences dévastatrices pour la Directrice de Solidar Suisse politique de développement: 10% du cation familiale en Afrique – comme voubudget suisse de la coopération devrait draient le faire les initiants d’Ecopop – être affecté à des mesures de planning familial dans les pays les doit être bien prétentieux et tyrannique! plus pauvres d’Afrique. Cette revendication est méprisante pour le genre humain et va à Dites vous aussi NON à l’initiative Ecopop. l’encontre de tout travail de coopération pensé sur le long terme. Esther Maurer

REVUE DE PRESSE

03.07.2014 Brésil 2014: où sont les protestations sociales? Joseph Blatter, président de la FIFA, a confié à Rio sa joie de constater le bon déroulement du Mondial 2014 au Brésil, affirmant que l’organisation de la compétition était «un succès». La Coupe du monde «est un succès, un succès de ce pays et un succès pour ce sport», a estimé Blatter adressant ses «compliments au peuple brésilien qui a accepté cette coupe du monde» et saluant l’effritement de la grogne sociale. Est-ce vraiment le cas? L’interview d’Alexandre Mariéthoz, porte-parole de Solidar Suisse.

20.06.2014 Evénements sportifs: toujours plus délirants? Les protestations contre le gigantisme de la FIFA portent des fruits. Lors des préparatifs du Mondial 2010, les syndicats sud-africains du bâtiment ont vu affluer près de 30 000 nouveaux adhérents. Au Brésil, dans quatre villes accueillant des matches de la Coupe des confédérations, des marchand-e-s de rue ont pu vendre leurs produits à des supporters, dans des zones à l’origine exclusivement réservées aux sponsors de la FIFA. Solidar Suisse a soutenu ces activités menées par des organisations de la société civile.

12.06.2014 Sans travail des enfants, pas de survie Au Pakistan, 12 millions d’enfants travaillent. Pour que les enfants puissent être scolarisés, Solidar Suisse crée des écoles dans les bidonvilles de Lahore. Les enfants y suivent des cours à proximité de leur travail. Vouloir éradiquer le travail des enfants au Pakistan, sans s’attaquer à ses véritables causes, serait illusoire et reviendrait à combattre un symptôme. Les parents ont besoin du revenu de leurs enfants. Il importe, dès lors, de les sensibiliser à l’importance de la formation, notamment à celle des jeunes filles, ainsi qu’aux risques et aux effets néfastes du travail des enfants.


3 POINT FORT Sri Lanka

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Solidar est présente au Sri Lanka depuis le tsunami de 2004. Le point sur notre action

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Les conditions de vie dans les plantations de thé au Sri Lanka: bas salaires et habitations précaires 8 Les victimes de catastrophes et de la guerre ont besoin d’une aide matérielle et sociale 10 POINT DE VUE Toni Frisch: comment l’aide humanitaire peut-elle porter ses fruits après des catastrophes de grande ampleur? 11

POINT FORT Solidar Suisse au Sri Lanka depuis le tsunami: de l’aide d’urgence à la coopération au développement en passant par la reconstruction. Qu’avons-nous accompli?

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PORTRAIT Subajini Rajendram s’engage pour les travailleuses et travailleurs migrants sri lankais 18 CULTURE Le festival DOKUFEST au Kosovo rassemble au-delà des frontières et des conflits 13

POINT DE VUE Quels sont les critères d’une aide utile et respectueuse dans le cadre de catastrophes de grande ampleur?

ACTUALITÉ Au Mozambique, les enfants meurent de la malaria: la prévention peut réduire les risques de contagion 15

ACTUALITÉ

Deux directeurs d’écoles bilingues du Burkina Faso en visite en Suisse 17 CHRONIQUE

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CONCOURS

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BRÈVES

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Au Mozambique, la malaria est responsable de 40% des décès d’enfants de moins de cinq ans. Les campagnes et les moustiquaires ont réduit les risques de contagion.

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CULTURE Le festival DOKUFEST est un élément moteur dans les domaines de la culture et de la formation au Kosovo.

IMPRESSUM Editeur: Solidar Suisse, Quellenstrasse 31, Postfach 2228, 8031 Zürich Tél. 021 601 21 61, E-mail: contact@solidar.ch, www.solidar.ch CP 10-14739-9 Lausanne. Membre du réseau européen Solidar Rédaction: Katja Schurter (rédactrice responsable), Rosanna Clarelli, Eva Geel, Alexandre Mariéthoz, Cyrill Rogger

Layout: Binkert Partner, www.binkertpartner.ch / Spinas Civil Voices Traduction: Milena Hrdina, Interserv SA Lausanne, Jean-François Zurbriggen Correction: Carol Le Courtois, Marianne Roth Impression et expédition: Unionsdruckerei/subito AG, Platz 8, 8201 Schaffhausen Paraît quatre fois par an. Tirage 37 000 ex.

Le prix de l’abonnement est compris dans la cotisation (membres individuels 70.– par an minimum, organisations 250.– minimum). Imprimé sur papier recyclé et respectueux de l’environnement. Photo de couverture: après la fin de la guerre au Sri Lanka, les victimes construisent une nouvelle existence. Photo: Malith Jayakody. Dernière page: l’achat d’une carte cadeau Solidar vous permet de soutenir nos programmes de développement internationaux.


4 Après le tsunami et la guerre civile, les habitants du nord du Sri Lanka construisent les bases de leur nouvelle vie.

SRI LANKA Solidar mobilise ses forces au Sri Lanka depuis dix ans. Notre engagement a été déclenché par le tsunami dévastateur qui a détruit de nombreuses régions de l’Asie du Sud-Est en 2004. Nous profitons aujourd’hui de ce triste anniversaire pour vous inviter à réfléchir à la forme que devrait prendre une aide efficace en cas de catastrophe de grande ampleur. Parallèlement, nous posons un regard approfondi sur notre travail au Sri Lanka: de l’aide d’urgence à la coopération au développement, en passant par la reconstruction; du soutien apporté aux victimes de déplacements forcés, à celui accordé aux employé-e-s des plantations ou aux migrant-e-s potentiel-le-s. Photo: Malith Jayakody


POINT FORT

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6 APRÈS LA VAGUE ET LA GUERRE... LA PAIX? Le 26 décembre 2004, un violent tsunami a détruit les côtes de l’Asie du Sud-Est. Comment a réagi Solidar et où en sommesnous dix ans plus tard? Texte: Zoltan Doka, Photos: Jürgen Störk et Malith Jayakody

Nous avons appris la nouvelle du tsunami le 26 décembre. Il devint rapidement évident que l’ampleur des destructions était gigantesque. L’équipe de l’aide humanitaire de Solidar Suisse, alors appelée Œuvre suisse d’entraide ouvrière (OSEO), s’est immédiatement réunie au siège principal de Zurich pour déterminer la manière dont nous pouvions apporter notre aide. En quelques jours, nous avions décidé d’œuvrer dans le Nord du pays avec nos partenaires allemands et norvégiens du réseau Solidar, actifs depuis des années au Sri Lanka. Le chaos après la catastrophe Solidar a tout d’abord apporté une aide à la survie pour les victimes du tsunami. Des biens ménagers nécessaires de toute urgence ont ensuite été distribués, des maisons et des infrastructures municipales restaurées et la fourniture en eau et en installations sanitaires assurée. Mais nous n’étions pas les seuls. Comme

toujours lors des opérations humani- Reconstruction taires, il régnait au début un réel chaos Après l’aide d’urgence assurant la survie qui rendait difficile l’évaluation de l’am- des victimes, arriva la phase de reconspleur du sinistre et les prises de décision truction et ses questions techniques spéquant aux actions pouvant aider au mieux cifiques: l’infrastructure existant avant les victimes. Il nous a fallu un certain la catastrophe doit-elle être rebâtie à temps avant d’obtenir la vue d’ensemble l’identique? Ou doit-on saisir l’occasion nécessaire pour développer des mesures de l’améliorer? Qu’en est-il du droit à la adaptées en accord avec la population. terre? Dans le Nord du Sri Lanka, il Cette situation chaotique rendait éga- n’existe aucun plan cadastral et les pallement difficiles la coordination avec miers délimitant les terrains ont été déles autres organisations humanitaires sur le terrain. Une organisation humanitaire Il régnait alors un devrait-elle quitter le pays cessez-le-feu dans au début d’une guerre afin de ne le cadre de la guerre pas être prise en otage? civile entre le gouvernement srilankais et les Tigres de libération de l’Îlam Tamoul (LTTE). La catas- truits. Comment les gens peuvent-ils trophe a placé le conflit en arrière-plan de nouveau bénéficier d’un revenu? pendant un certain temps. Des premières Comment traiter le traumatisme lié à cette catastrophe (voir l’article page 10)? négociations timides ont même eu lieu.


POINT FORT 7 Solidar a aidé la population touchée en soutenant la reconstruction après le tsunami (à gauche) et en créant de nouvelles bases d’existence à la fin de la guerre civile (à droite).

Nous avons éclairci ces questions pas à pas grâce à de nombreuses discussions avec les acteurs et actrices et les bénéficiaires. Des projets furent élaborés et les moyens nécessaires mis en place. Six nouveaux villages pour environ 10 000 personnes devraient être reconstruits, à une distance suffisante des côtes pour assurer la sécurité. Reprise de la guerre civile Les premiers signes d’un nouveau renforcement du conflit apparaissaient cependant déjà à l’horizon. Les radicaux des deux côtés avaient malheureusement pris le dessus. Aux attentats isolés du début, qui furent tous l’objet de ripostes, succéda une situation s’envenimant de manière croissante. Les victimes du tsunami ne furent alors plus les seules à se retrouver dans le besoin: de plus en plus de personnes furent touchées par la guerre. La situation sécuritaire devenait critique, ce qui rendait difficiles les trajets vers le site du projet. Les ONG internationales dans le Nord du Sri Lanka tombèrent sous le coup d’une suspicion généralisée de la part du gouvernement et des LTTE, qui contrôlaient alors la région. Nous nous demandions souvent si nous devions continuer dans de telles conditions. Une organisation humanitaire devait-elle quitter le pays aux prémices d’une guerre afin de ne pas être le jouet des parties intéressées? Ou devait-elle rester par solidarité avec la population civile? Solidar

Suisse a décidé de rester. Jusqu’au jour où le gouvernement a contraint toutes les ONG et l’ONU à quitter le Nord du Sri Lanka. Nous nous sommes alors retirés à Colombo et avons poursuivi nos projets à l’extérieur de la région contrôlée par les LTTE. Et nous avons dû assister, comme tous les autres, aux conséquences de la guerre sur le Nord du pays: morts et ravages. L’impuissance des organisations humanitaires était généralisée. Aide aux personnes déplacées A la fin de la guerre, Solidar Suisse s’est engagée pour les réfugié-e-s de guerre retenu-e-s dans des camps ou errant dans le pays. Nous avons construit des installations de gestion des déchets dans les camps de réfugié-e-s afin d’empêcher la propagation de maladies. Mais tous nos projets et investissements d’avant la guerre étaient réduits en cendres. Lorsque les personnes ayant fui purent revenir dans leurs villages, nous avons acheté des milliers de vélos pour leur permettre de retrouver un semblant de mobilité. Pas à pas, nous avons développé de nouveaux projets afin de créer de nouvelles sources de revenus pour les personnes rentrant chez elles. De petites contributions financières ont ainsi permis de remettre en état des ateliers, des magasins et des ateliers de couture. Car la volonté de la population de se relever était inépuisable. Mais le travail est devenu encore plus difficile: si nous pouvions

nous déplacer librement avant la guerre, le Nord était désormais sous le contrôle strict de l’armée, sans la permission de qui rien n’était possible. De l’aide humanitaire à la coopération au développement Où en sommes-nous aujourd’hui? En collaboration avec la Direction du développement et de la coopération (DDC), nous avons construit des maisons, renforcé des communautés sur le plan économique et aidé la population à envisager de nouveau des perspectives d’avenir. L’aide humanitaire classique se transforme désormais progressivement en coopération au développement. Dix ans plus tard, nous sommes toujours présents au Sri Lanka et avons connu des hauts et des bas avec les Sri Lankais-es. Mais l’on ne saurait néanmoins parler de réelle paix dans le pays. Il n’existe certes plus de conflits, mais le gouvernement n’a pas encore réussi à permettre une coexistence détendue entre Cingalais-es et Tamoul-e-s. Il faudra donc encore longtemps avant que les plaies de la guerre ne soient guéries. En outre, les tensions augmentent dans le Sud du pays en raison de l’exclusion sociale et économique. Reste à savoir si nous avons obtenu des résultats. La réponse est oui. En effet, malgré tous les obstacles, Solidar a aidé des milliers de personnes à retrouver une source de revenus. www.solidar.ch/fr/tsunami


8 VERS UN THÉ MOINS AMER Solidar veut améliorer la condition des travailleuses des plantations de thé dans les montagnes sri lankaises. Texte: Christof Hotz, Photos: Hamish John Appleby «Ma fille doit réussir à l’école et apprendre un bon métier», déclare la jeune cueilleuse de thé Yoganathan Pushparani d’une voix ferme. «Je ne veux pas qu’elle devienne cueilleuse de thé comme moi!» La jeune femme, âgée d’un peu moins de 30 ans, travaille sur la plantation Alma Estate dans les montagnes sri lankaises. Il y fait froid et la mousson apporte du brouillard, de la pluie et des températures de 18 degrés, alors que le thermomètre grimpe jusqu’à 30 degrés à Colombo. La plantation de thé s’étend à perte de vue le long des pentes de la montagne. Le vert clair des théiers brille malgré le brouillard et contraste avec la couleur rougeâtre du sol. Un paysage paradisiaque avec des oiseaux gazouillant et un petit ruisseau, dans lequel il est pourtant préférable de ne pas boire car il est pollué par des bactéries et des pesticides. Une charge de travail irrégulière La journée de travail des cueilleuses de thé touche à sa fin. Elles ont récolté des

feuilles fraîches – toujours les deux Elles nous donnent volontiers des infeuilles supérieures et un bourgeon – formations, comme elles le font souvent, pendant huit heures et les ont jetées sur ce que leurs supérieurs exigent dans le panier qu’elles portent sur le dos. d’elles. La hiérarchie est claire: le resL’objectif était aujourd’hui de 20 kilos. ponsable, le contremaître, puis les cueilLes plus adroites peuvent récolter jusqu’à leuses. C’est ce qu’exigent aussi bien la 25 kilos, ce qui améliore quelque peu leur tradition coloniale que celle des castes salaire. Lorsqu’il n’a pas plu depuis longdes Tamoul-e-s indien-ne-s, qui reprétemps, l’objectif journalier est de 15 ou sentent la majorité des travailleur-se-s 16 kilos et les cueilleuses travaillent seulement deux semaines dans le mois. Tou«Je ne veux pas que ma fille tefois pendant la haute saidevienne cueilleuse de thé son, les équipes – constituées comme moi!» presque exclusivement de femmes car les hommes travaillent soi-disant avec moins de minutie, des plantations de thé. Les colonisace qui influe sur la qualité et la quanteurs anglais les emmenèrent d’Inde vers tité de la récolte – ramassent les feuilles le Sri Lanka, car les indigènes ne voujusqu’au coucher du soleil. Sans un seul laient pas travailler dans les plantations. jour de repos. Les Tamoul-e-s indien-ne-s possèdent leurs propres langues et culture et reDes hiérarchies rigides présentent aujourd’hui une minorité Fatiguées, les cueilleuses de thé rade 4% sur les hautes terres autour de mènent leurs paniers désormais vides. Kandy.


CHRONIQUE

THEMA 9

La cueilleuse de thé Yoganathan Pushparani aimerait déménager du baraquement qu’elle doit actuellement partager avec dix familles.

An der WM sollen StrassenhändlerInnen ihre Waren rund um die Stadien nicht verkaufen dürfen.

Hans-Jürg Fehr Président de Solidar Suisse

Stabilité et chaos

Des logements exigus Yoganathan Pushparani a dû quitter l’école au cours de sa neuvième année scolaire: «Ma mère alla travailler comme employée de maison au Proche-Orient et j’ai dû garder mes frères et sœurs.» Aujourd’hui encore, elle le regrette, car il est très difficile de quitter la plantation et de s’adapter à un nouvel emploi. Depuis six ans, elle vit et travaille ici avec son mari et leurs trois enfants. La jeune femme espère pouvoir bientôt construire sa propre petite maison avec un potager. Pour le moment, ils vivent avec ses beaux-parents dans deux chambres étroites, dans

Solidar dans les plantations de thé L’organisation partenaire de Solidar, l’ISD (Institute of Social Development, Institut du développement social), s’engage pour les personnes marginalisées qui vivent et travaillent dans les plantations de thé. Elle les informe sur leurs droits et les aide à s’organiser pour qu’elles puissent améliorer leurs conditions de vie et de travail. De plus, elle soutient le processus de certification UTZ des plantations, qui garantit le respect des normes fondamentales du travail de l’Organisation Internationale du Travail (OIT). www.solidar.ch/plantations

une longue baraque dans laquelle logent jusqu’à dix familles. Ils tirent l’eau potable d’un puits et les latrines communes sont situées à quelques mètres. Un maigre salaire La cueilleuse gagne, à temps plein et si elle atteint les objectifs, en moyenne 20 000 roupies par mois (environ 144 francs suisses). Ce salaire est inférieur au salaire sri lankais moyen de 30 000 roupies (216 francs suisses). Le logement et l’eau sont gratuits. Lorsque les théiers produisent trop peu pour une récolte quotidienne, le salaire est diminué. En cas de maladie, les travailleur-se-s ont accès aux soins médicaux mais ne sont payé-e-s que pour les jours travaillés. C’est la raison pour laquelle Yoganathan Pushparani va travailler même avec de la fièvre ou si elle tousse. Solidar Suisse souhaite améliorer les conditions de vie et de travail des cueilleuses de thé et de leurs familles, notamment dans le but d’offrir à leurs enfants des possibilités de formation. L’organisation partenaire locale ISD (voir encadré) anime des ateliers sur l’hygiène, la sécurité au travail et l’égalité des sexes, et offre également une aide concrète. Les personnes vivant dans les plantations, notamment les femmes, ont besoin d’un soutien important. Yoganathan Pushparani met fin à notre conversation, qui s’est déroulée après une longue journée de travail intensif, en ces termes: «Je dois retourner auprès de ma famille. Les enfants attendent le souper!»

La Libye s’enfonce un peu plus dans le chaos, la Syrie et l’Irak subissent une guerre civile et même l’Europe n’est pas à l’abri de conflits armés, comme le montre l’exemple ukrainien. Face à tant de dévastation et de morts par milliers, nombreux sont ceux qui espèrent un retour rapide à l’ordre et à la tranquillité dans ces pays. Ce souhait est facile à comprendre, mais provient d’une analyse erronée. Les conflits n’ont pas éclaté par manque de stabilité, mais bien car il existait une «certaine stabilité». Les dictateurs Khadafi, Saddam Hussein, Assad et Mubarak incarnaient certes ordre et tranquillité d’un point de vue extérieur, mais il s’agissait de l’ordre de la terreur et de la tranquillité du cimetière. Les gens ne mouraient pas dans des camps, mais sous la torture et les gaz toxiques. Il s’agit de l’essence même de la dictature: elle n’autorise pas les conflits sociaux et les réprime par la force. Ces conflits ne sont donc pas résolus et se chargent au contraire de tension. Une telle stabilité ne dure qu’un temps. La fin d’une dictature n’est jamais immédiatement suivie de la paix intérieure: de trop nombreuses factures restent impayées. La transition vers la démocratie nécessite beaucoup de temps et s’accompagne de nombreuses effusions de sang et de désordre. Mais elle ouvre toutefois une perspective vers la paix, une résolution civilisée des conflits et une réelle stabilité. Il est ainsi important que la Suisse soutienne de tels processus et assiste les forces démocratiques dans les Etats en mutation. La «participation politique et la démocratie» constituent donc des priorités stratégiques de Solidar.


10 POINT FORT Dans des groupes d’entraide encadrés, des femmes victimes de traumatisme échangent et se soutiennent mutuellement.

UNE NOUVELLE VOLONTÉ DE VIVRE Pour pouvoir reprendre pied, les victimes de guerre et de catastrophes ont besoin d’une aide matérielle et sociale. Texte: Aline Dessarzin et Katja Schurter, Photo: Solidar Les victimes du tsunami et les personnes déplacées par la guerre civile, auxquelles Solidar vient en aide au Sri Lanka, sont souvent traumatisées par ce qu’elles ont vécu. Elles sont pauvres et n’ont pas de revenus. Elles se sentent donc souvent impuissantes et délaissées face à leurs problèmes. Les difficultés de la vie quotidienne telles que le chômage et le financement de l’éducation des enfants leur pèsent tout autant que la tristesse causée par la perte de leurs proches. Les problèmes psychologiques de chaque individu se répercutent sur sa famille et son environnement social, notamment sous la forme de violence et d’alcoolisme, et engendrent dépression et retrait social. Un nouveau départ grâce au travail de deuil L’expérience de Subajini Thas est un exemple frappant. Avant la guerre, elle vivait dans le Nord du Sri Lanka avec son

dernier hommage. Elle se sentait responsable et désemparée: «Ça fait tellement mal de l’avoir laissé seul, sans funérailles», déclara-t-elle. Rasaradnam Nesamalar l’aida à parler de ses sentiments et à les exprimer sous la forme de dessins, ainsi que dans une lettre à son défunt mari. Après plusieurs entretiens, Subajini Thas reprit courage et voulut retrouver un travail. Avec l’aide de l’assistante sociale, elle analysa les possibilités qui s’offraient à elle et décida de se joindre à un groupe de femmes aidant les pêcheurs à réparer leurs filets. Elle parvint alors à subvenir de nouveau aux besoins de sa famille. L’assistante sociale attira son attention sur la possibilité de s’adresser à Solidar pour demander une aide afin d’acheter du matériel scolaire. Finalement, Subajini Thas put renvoyer ses enfants à l’école. Aide humanitaire et assistance sociale imbriquées Outre les séances de conseils individuels, le personnel d’assistance sociale anime également des séances de groupe. Des groupes d’entraide se sont créés dans chaque village dans lequel Solidar Suisse met en place des projets d’aide humanitaire. Pour les femmes qui élèvent seules leurs enfants, dont les maris ont perdu la vie pendant la guerre, les groupes représentent un lieu important pour échanger et se soutenir mutuelle-

mari et leurs trois enfants, qui tous allaient à l’école. Pendant la guerre, elle perdit son mari et fut elle-même blessée, ainsi que sa petite fille. Après la guerre, elle fut tout simplement dépassée par la situation: Subajini Thas portait le deuil de son mari, elle n’avait plus de revenu et ne pouvait prati«Ca fait tellement mal quement plus financer la de l’avoir laissé seul, sans scolarisation de ses enfants. Lorsque l’assistante sociale funérailles.» Rasaradnam Nesamalar rendit visite à cette famille, elle trouva Subajini Thas dans un état apa- ment. Elles obtiennent également des thique, mal coiffée et portant des vête- conseils très pratiques sur la gestion de ments en lambeaux. Elle était triste et la vie quotidienne. Par exemple comment furieuse. Après avoir raconté son histoire, cultiver efficacement leur jardin, élever elle déclara: «Ma vie n’a plus aucun sens.» de la volaille, tisser des tapis ou planter La discussion sembla cependant la cal- des cocotiers. Les revenus ainsi obtenus mer un peu. Lors de la deuxième visite de peuvent constituer une première étape l’assistante sociale, Subajini Thas racon- vers la création d’une nouvelle existence ta la mort de son mari. Elle était rongée pour elles-mêmes et leurs familles. par le fait de ne pas avoir pu lui rendre un www.solidar.ch/reconstruction


POINT DE VUE 11

RESPECT ET DURABILITÉ Comment les opérations humanitaires peuventelles porter leurs fruits après des catastrophes de grande ampleur? Voici quelques réponses. Texte: Toni Frisch, ancien directeur de l’aide humanitaire et directeur adjoint de la DDC

Après des catastrophes faisant de nombreuses victimes, comme un tremblement de terre ou un tsunami, la pression exercée sur les médias, les politiques et les donateurs est très forte. Tous souhaitent pouvoir communiquer sur des opérations d’aide d’urgence spectaculaires et rapides. Les organisations humanitaires doivent résister à cette pression, afin de pouvoir réaliser une évaluation rapide et concrète de la situation, suivie immédiatement par des mesures ciblées.

Je considère comme une évidence le respect des principes humanitaires de neutralité et d’impartialité, les bonnes pratiques et l’application des normes de qualité reconnues. Cependant, j’ai également conscience que trop de personnes pas assez qualifiées, s’autoproclamant humanitaires, ne pensent malheureusement pas ainsi.

Une aide efficace à long terme Dans les premières heures ou journées suivant une catastrophe de grande ampleur, les organisations d’aide, que ce Prise en compte des victimes La collaboration avec la population soient l’ONU, la Croix Rouge, les orconcernée et les autorités doit être au ganisations gouvernementales ou les ONG, doivent engager une réflexion à la fois sur les beLes dommages et soins à moyen terme et les problèmes survenant lors de la souffrance après une la phase d’urgence. J’irais catastrophe sont même encore plus loin. largement sous-estimées. La volonté de la population d’aborder de telles questions cœur de l’analyse des besoins et de la pla- n’est jamais aussi forte qu’à ce moment. nification. Ces mesures doivent aussi être Les erreurs ayant provoqué l’effondreintégrées dans une coordination nationale ment des maisons lors de tremblements et internationale. Il serait impensable que de terre ne doivent pas être reproduites. des œuvres de bienfaisance étrangères Nous devons «mieux reconstruire» et, en prennent des mesures sans notre accord fin de compte, nous devons déjà réfléchir et notre collaboration en cas de catas- au moment où nous quitterons le pays. trophe en Suisse. Il en va de même pour Plus l’aide d’urgence dure, plus les prinnous qui apportons notre aide à l’étranger. cipes d’une coopération au développe-

ment durable doivent s’appliquer. Il s’agit cependant en tout temps de respecter nos partenaires et de les considérer comme nos égaux. Car nous apportons un soutien à leurs familles et à la reconstruction de leur pays et de leur avenir. Des répercussions importantes à long terme Les répercussions d’une catastrophe majeure sur un pays, sa population et son gouvernement, les dommages et la souffrance, sont souvent largement sous-estimées par l’opinion publique. Personne n’imagine que la reconstruction dure dix ou vingt ans. Les victimes d’une catastrophe et les organisations d’aide sont souvent critiquées de manière trop désinvolte et souvent même sans que l’on s’efforce de rechercher des informations objectives. Il est donc de plus en plus nécessaire d’expliquer et de justifier les actions réalisées. Car en fin de compte l’enjeu réside également dans la mise à disposition des ressources financières nécessaires. Les organisations humanitaires doivent prouver que les fonds publics et les dons sont utilisés de manière ciblée et efficace et qu’ils parviennent à bon port.


12 BRÈVES Organisation des travailleurs en Chine Enseignant-e-s, chauffeurs de taxi ou ouvrières: en Chine, des personnes cessent régulièrement leur travail pour obtenir des hausses de salaire et de meilleures conditions de travail. Ces mouvements de protestation vont souvent de pair avec des licenciements. Lorsque les personnes organisant des grèves sont licenciées, la résistance est tuée dans l’œuf. L’interdiction de syndicats libres empêche aussi de défendre correctement les intérêts des ouvrières et ouvriers dans les fabriques. Avec des délégué-e-s du syndicat Unia, Solidar

Suisse a animé en juillet 2014 à Hong Kong un atelier de deux jours, pour des militant-e-s chinois et des délégué-e-s d’ONG, sur le dialogue social et les formes d’organisation syndicale. L’objectif était de développer une compréhension mutuelle et d’apprendre les uns des autres. Il s’agit maintenant de concevoir un programme de formation pour permettre aux travailleurs chinois de mieux défendre leurs intérêts. En Suisse, Solidar met à disposition des sections d’Unia une présentation pour qu’elles puissent informer leurs membres des abus dans les conditions de travail en Chine. www.solidar.ch/chine

tations bon marché de fromage en provenance de Hongrie, de Bulgarie ou de Roumanie partiellement à base de lait ou sans lait du tout – évince le fromage kosovar traditionnel du marché indigène. Des laiteries et des exploitants laitiers du Kosovo ont conduit avec succès une campagne contre ces produits de mauvaise qualité. Kosovo: interdiction de la Depuis septembre 2014, ces imitations de vente de fromage artificiel Certains produits d’importation contrefaits fromage – souvent coupées avec de l’huile posent des difficultés à l’économie laitière de palme – ne peuvent plus être vendues du Kosovo. Le fromage artificiel – des imi- sous l’appellation «fromage».

Mondial 2014 – un désastre social Trois mois après la fin de la Coupe du Monde au Brésil, les conséquences de l’événement pour le pays laissent songeur, comme le montre une étude de Solidar Suisse. Le Mondial le plus cher de tous les temps a coûté 13,3 milliards, l’impulsion économique se monte seulement à 1,7% du produit intérieur brut – un jeu à somme nulle. Dans le même temps, les pertes fiscales s’élèvent à 462 millions de dollars à cause des privilèges fiscaux accordés à la FIFA.

L’espoir de créer des places de travail sur le long terme s’est avéré aussi illusoire. Seuls des emplois à court terme dans les secteurs de la construction et du tourisme ont été constatés. L’amélioration prévue des infrastructures n’a été que partiellement réalisée et plus d’un tiers des projets pour favoriser la mobilité a été annulé. Le Mondial laisse derrière lui quatre «Eléphants blancs», des constructions pharaoniques sans utilité pour le pays. 250 000 personnes ont été déplacées de leurs foyers et parmi les 350 000 vendeurs et vendeuses de rue, beaucoup ont perdu leur moyen de subsistance suite aux interdictions de vente autour des stades. Mais cela, la FIFA n’en a cure. Elle s’attend à un gain record d’environ 3 milliards de dollars. www.solidar.ch/bresil

El Salvador: lier l’aide au développement aux semences de Monsanto En mai de cette année, le gouvernement américain a souhaité lier une aide de 227 millions de dollars à une condition: que le gouvernement salvadorien n’achète plus aux producteurs locaux les semences destinées à son programme de soutien à la petite paysannerie, mais à la multinationale Monsanto. En 2011, le gouvernement du Salvador avait modifié la procédure d’adjudication pour encourager la production agricole et la souveraineté alimentaire du pays. Cette approche avait permis d’aider des centaines de milliers de petits paysans qui s’étaient vu remettre des semences indigènes. Elle avait du même coup remis sur pied la production semencière nationale. Mais la méthode contrevient semblet-il au traité de libre-échange CAFTA signé entre le Canada, l’Amérique du Nord et les pays d’Amérique centrale. Des campagnes de protestation nationales ont eu lieu en juin 2014, auxquelles des organisations partenaires de Solidar ont également pris part. Dans le cadre du projet Agricultura, Solidar aide en effet de petites organisations paysannes à mettre en place des banques de semences rassemblant des variétés traditionnelles de maïs, de haricots et de légumes. Les semences sont moins chères et mieux adaptées aux conditions naturelles et les paysans et paysannes peuvent les reproduire euxmêmes. L’opinion publique américaine a aussi fait pression sur son gouvernement. Avec succès, puisque les Etats-Unis ont retiré leurs conditions pour ce versement. www.solidar.ch/salvador_projets


KULTURELL 13

UN FESTIVAL QUI A DU STYLE Le DokuFest de Prizren attire un public international et contribue à la réconciliation au Kosovo. Texte: Barbara Burri, Photos: DOKUFEST Le Kosovo est loin d’avoir une grande tradition cinématographique, et pourtant! Depuis treize années, il accueille le DokuFest, un festival qui a su se faire une place dans le monde du film documentaire et du court métrage. Organisé à Prizren, petite ville pittoresque à l’architecture ottomane, il se distingue surtout par l’histoire de sa création. Lors de la première édition, en 2002, soit à peine trois ans après la guerre du Kosovo, Prizren ne comptait plus un seul cinéma opérationnel. Les initiateurs du festival ont donc été obligés d’improviser: ils ont projeté des films sur les murailles d’une forteresse byzantine et installé des cinémas dans les cavernes d’un hammam turc ou sur une estrade près de la rivière Bistrica. Ces solutions de fortune confèrent aujourd’hui encore un style très particulier au festival. Contribution à la réconciliation En août, durant une semaine, quelque 10 000 personnes affluent désormais vers la ville, dont plus de 40% d’étrangers et beaucoup d’habitants de la région. Si le festival est parvenu, en treize ans à peine, à passer du statut d’événement destiné aux amateurs éclairés à celui de rendez-vous culturel très couru, il ne le doit pas seulement à son cadre pittoresque. La sélection de films est en effet tout aussi convaincante. Outre des productions internationales, les films des Balkans y figurent en bonne place. Comprenant des catégories telles que «Human Rights Film Factory», le festival entend lancer le débat sur les droits

humains et contribuer à la normalisation des relations dans les Balkans. Voilà pourquoi les films sont le plus souvent suivis de débats et d’ateliers. Lors de l’une des premières éditions, le jury a d’ailleurs décerné le premier prix à un film serbe. «Stories we tell» est un autre projet parallèle au festival. Il permet à des adolescent-e-s kosovar-e-s de différentes régions de raconter leur histoire en images, afin d’attirer l’attention sur leur situation. Aller de l’avant malgré les obstacles Les organisateurs et organisatrices du DokuFest ont toujours réussi à surmonter les problèmes propres au Kosovo. Outre la destruction des infrastructures, les défis de l’après-guerre signifient: interruptions quotidiennes de courant, manque de savoir-faire technique, méfiance à l’égard des institutions ou encore absence d’industrie locale, notamment cinématographique. Malgré ces difficultés, le festival n’a cessé de croître et d’évoluer. Aujourd’hui, quelque 2400 films sont proposés, dont 230 seront projetés. Alors que l’événement était entièrement géré par des bénévoles à ses débuts, un noyau de professionnels travaille désormais toute l’année à sa préparation. Le DokuFest est ainsi devenu l’un des moteurs de la culture et de la formation au Kosovo et s’inscrit dans une politique culturelle durable. www.dokufest.com


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Règles du jeu Complétez les cases de la grille avec les chiffres de 1 à 9, afin qu’il n’y ait aucune répétition et aucun doublon dans chaque colonne, ligne et carré de 3x3. La solution se trouve dans les cases grises lues horizontalement, selon la clé ci-dessous: 1=C, 2=E, 3=H, 4=S, 5=P, 6=A, 7=T, 8=O, 9=R. Envoyez la solution à Solidar Suisse via le talon-réponse ci-joint, sur une carte postale ou par e-mail à contact@solidar.ch, sujet «sudoku». 1er prix: une corbeille à papier 2e prix: un porte-document 3e prix: un panier à fruits Les prix proviennent d’un groupe de producteurs et de productrices de Palmyra, dans le nord du Sri Lanka. Avec l’appui de Solidar, ces anciens déplacés de la guerre se sont rassemblés afin de reconstruire leur existence. La date limite d’envoi est le 15 décembre 2014. Le nom des gagnant-e-s sera publié dans Solidarité 1/2015. Le concours ne donne lieu à aucune correspondance ni à aucun recours. Le personnel de Solidar Suisse n’a pas le droit d’y participer. La solution de l’énigme parue dans Solidarité 3/2014 était «travail digne». Monika Hladik, de Niederrohrdorf, a gagné un sac; Bernhard Sauer, de Saint-Prex, six sous-verre; Markus von Holzen, de Matten, un ouvre-lettre. Nous remercions le centre de formation pour femmes «Père Celestino» du Burkina Faso pour les prix offerts. Merci également à tout-e-s les participant-e-s.

LE FRUIT DE VOTRE TRAVAIL …

… permettera la concrétisation d’un projet qui vous tient à cœur, si vous en décidez ainsi dans votre testament. Un don de condoléance ou un legs assure un soutien crucial aux personnes défavorisées et leur offre une véritable chance de salut. Pour en savoir plus, visitez la page solidar.ch/testaments ou adressez-vous directement à Stéphane Cusin: 021 601 21 61, stephane.cusin@solidar.ch


ACTUALITÉ 15

LE PALUDISME TUE! Au Mozambique, nombre de gens meurent du paludisme. Des mesures de prévention visent à éviter les infections. Texte: Francisco Palma Saidane, Photos: Andres Schwaiger

En traversant la région rurale de Sussundenga, dans le centre du Mozambique, nous croisons sans cesse des femmes et des hommes portant sur leur dos des enfants, pourtant en âge de marcher seuls, mais très apathiques et le regard vague. Nous nous arrêtons à la hauteur de l’un des marcheurs: Seveni Dito porte son fils Inacio au dispensaire de Muninga, à quelque dix kilomètres de là. «Il doit avoir le paludisme», explique-t-il en évoquant l’état de son fils et accepte volontiers notre proposition de l’emmener. Le test

L’efficacité de votre don Un don de 50 francs finance la distribution de cinq moustiquaires, qui protègeront 15 personnes (cinq mères et dix enfants) contre une infection par le paludisme.

Seveni Dito porte son fils atteint de paludisme au dispensaire (à gauche). Une moustiquaire protège Dorca Chizemo et ses enfants contre la maladie (ci-dessus).

préparation de produits antimoustiques à partir de plantes locales, actions de nettoyage visant à détruire les lieux de reproduction des moustiques ou construction de latrines rudimentaires. De plus, environ 10 000 moustiquaires ont été distribuées, plus spécialement aux femmes enceintes ou ayant des nouveau-nés. Dorca Chizemo, 24 ans, en a reçu une. «J’ai été une fois infectée et je souffre

est positif et Inacio reçoit un médicament contre la maladie. A cette période, le paludisme est à l’origine de 80% des consultations au dispensaire. Nous sommes en ef«Comme la plupart des pauvfet à fin mars, saison des res d’ici, je n’avais pas de quoi pluies au Mozambique, et le nombre des cas de paluacheter une moustiquaire.» disme atteint son maximum. depuis régulièrement de poussées de fièvre; j’ai pu éviter cela à mes deux enUne infection dangereuse Le Mozambique est l’un des pays sub- fants grâce à la moustiquaire», explique-tsahariens les plus touchés par le palu- elle. disme: la maladie est responsable de Grâce à ces diverses mesures, le nombre 40% des décès parmi les enfants de des nouvelles infections dans la région moins de cinq ans. Le manque d’installa- visée par le projet a baissé de 22% entre tions sanitaires et l’eau potable insalubre 2010 et 2012. Mais il faut poursuivre les ne font qu’accroître leur mortalité. efforts, comme le souligne Dorca: «La Solidar Suisse a entrepris de promouvoir moustiquaire est efficace contre l’infecdes mesures de prévention. Relayées par tion par le paludisme, mais je dois la parla radio ou des comités anti-paludisme, tager avec mon mari et nos enfants. Une des campagnes informent la population seule moustiquaire pour toute la famille, sur les moyens d’éviter une infection: cela ne suffit pas!»


16 BRÈVES Philippines: de l’aide d’urgence à la reconstruction Solidar Suisse a apporté une aide d’urgence à l’île de Panay aux Philippines, juste après le passage du typhon dévastateur Haiyan en novembre 2013. Plus de 2500 familles ont reçu des sets de réparation comprenant tôle ondulée, clous, mastic d’étanchéité, cordes et outils, sans oublier des instructions techniques pour bâtir un abri d’urgence. En juin, Solidar est arrivée au terme de la phase d’aide d’urgence et se concentrera ces deux prochaines années sur la reconstruction dans trois communes de l’île. Au total, 3100 familles seront aidées à construire

La Bolivie autorise le travail des enfants Le 6 août 2014, une loi autorisant officiellement le travail des enfants dès l’âge de 10 ans – s’ils travaillent à leur propre compte, par exemple comme cireurs de chaussures – est entrée en vigueur en Bolivie. Les emplois contractuels sont autorisés dès 14 ans et le travail ne doit pas avoir d’impact sur la

Les 25 ans de la FEDEVACO Les 12 et 13 septembre 2014, la Fédération vaudoise de coopération (FEDEVACO) a célébré son 25e anniversaire à Morges. Plus de 3000 personnes ont pris part à cette fête. Solidar y tenait un stand et a fourni des informations sur ses projets de développement dans le monde et ses campagnes en Suisse. Un film a illustré la situation des vendeuses et vendeurs de rue au Nicaragua (www.solidar.ch/ nicaragua_droitsdutravail). La FEDE-

un logement durable ou à le consolider pour qu’il résiste aux prochains typhons. Les personnes concernées organiseront la reconstruction comme elles l’entendent et recevront une assistance sous forme de matériel et de savoir-faire. www.solidar.ch/philippines

Sécheresse en Amérique centrale

fréquentation de l’école. La loi viole la convention de l’ONU relative aux droits de l’enfant, raison pour laquelle l’Organisation internationale du travail a annoncé le réexamen de la loi. C’est avant tout le syndicat des enfants et des jeunes qui s’engage pour le droit au travail des enfants. Cette loi tient-elle ainsi compte d’une réalité sociale – pauvreté oblige, plus de 800 000 enfants sur 4,1 millions de moins de 18 ans travaillent en Bolivie – ou encourage-t-elle l’exploitation des enfants? «La tentative de réguler une réalité sociale au lieu de lutter contre ses causes pourrait condamner les enfants boliviens à rester dans le cycle de la pauvreté», estime Martín Pérez, coordinateur de Solidar en Bolivie.

VACO réunit 41 œuvres d’entraide actives dans la coopération au développement dans le canton de Vaud – dont Solidar Suisse – et rend un financement coordonné possible. Pour l’heure, elle coopère avec 39 communes et cinq départements du canton.

Une sécheresse persistant depuis mai 2014 a détruit la quasi-totalité du premier semis de maïs dans certaines régions du Nicaragua et du Salvador. Il faut s’attendre à des rendements en recul de plus de 60% mettant en danger la sécurité alimentaire de centaines de milliers de petits producteurs. Les organisations partenaires de Solidar sont aussi touchées: comme un second semis s’est avéré nécessaire, les coopératives agricoles du nord du Nicaragua se sont retrouvées à court de semences. Solidar a donc dégagé des moyens financiers supplémentaires pour que ces coopératives puissent rapidement approvisionner leurs membres en semences et leur proposer des crédits à des taux avantageux. Fait positif à relever: les variétés indigènes de maïs et de haricots ainsi que les systèmes de culture écologique encouragés par Solidar ont mieux résisté à la sécheresse que la production usuelle. www.solidar.ch/nicaragua_projets

Denknetz Le 29 novembre 2014, le Réseau de réflexion critique Denknetz célèbre son dixième anniversaire en organisant une grande fête au Volkshaus de Zurich. Celle-ci débute à 16 heures avec un atelier, le vernissage de la brochure anniversaire et des discours (voir www.solidar.ch/agenda). Le concert de Les Reines prochaines auxquelles on doit le leitmotiv de la fête «penser seul est criminel» mettra la touche finale à l’événement.


ACTUALITÉ 17

Meschach Sayoré (à gauche) et Arzouma Zare (à droite) ont été impressionnés, lors de leur visite en Suisse, par la participation des étudiant-e-s.

«LA BARRIÈRE S’ESTOMPE» En partenariat avec Solidar Suisse et la HEP Vaud, deux directeurs d’écoles bilingues ont découvert notre système scolaire. Texte: Alexandre Mariéthoz. Photo: Jacques Pilloud Depuis neuf ans, la HEP Vaud organise un échange interculturel Suisse – Burkina Faso. Après que des enseignant-e-s suisses en formation ont découvert le système d’éducation bilingue, initié par Solidar Suisse (voir encadré), deux directeurs d’une école bilingue au Burkina

Un modèle fructueux Solidar Suisse a initié, au Burkina Faso, un modèle d’éducation bilingue. Les élèves suivent leurs parcours scolaire dans leur langue maternelle et en français. Résultats: moins de redoublements et un taux de réussite plus élevé à la fin du primaire. www.solidar.ch/burkina-faso

Faso, Meschach Sayoré et Arzouma Zare, sont venus en Suisse pour faire connaissance avec le système scolaire vaudois.

Le français, une langue étrangère M. Sayoré y voit un certain parallèle avec les classes bilingues au Burkina Faso. «L’éveil y est possible, car les élèves travaillent ensemble dans leur langue maternelle, qui est largement utilisée dès le début du cursus scolaire. Dans une école bilingue, la barrière s’estompe entre l’élève et son maître. Et l’élève participe davantage. Nos observations en Suisse nous permettront d’approfondir cet aspect de l’éducation bilingue.» M. Sayoré ajoute que «pour nous, Burkinabè, le français est une langue étrangère. C’est un peu comme si, chez vous, l’enseignement était dispensé en arabe.» Fait souvenu méconnu, au Burkina Faso, il existe environ 60 dialectes locaux. Ils sont «totalement différents du français», précise M. Zare, fasciné d’apprendre qu’au-delà de ses quatre langues officielles, la Suisse compte, dans sa partie germanophone, une vingtaine de dialectes. Cruel manque d’enseignant-e-s Un exemplaire du «Matin» traîne sur la table du tea-room où nous partageons un café. La première page évoque la suppression par Oskar Freysinger, ministre valaisan de l’enseignement, de 90 postes dans l’éducation. Interrogé à ce propos, M. Zare s’exclame: «De telles suppressions nous étonnent. Chez nous, il manque cruellement d’enseignant-e-s.» M. Sayoré ajoute: «Cette nouvelle nous

Tri des déchets Leurs premières impressions? «Le Suisse est souvent collé à sa montre, observe M. Sayoré. J’ai aussi constaté que les déchets «C’est comme si, chez vous, sont triés.» Il est également impresl’enseignement était dispensé sionné par l’équipement en arabe.» des classes: «Ici, les élèves ont la chance d’utiliser des ordinateurs. Au Burkina Faso, je ne surprend dans un pays qui gagne autant connais aucune école avec du matériel grâce aux banques et aux exportations informatique.» Autre facteur d’étonne- d’armes.» ment: la participation des élèves. Arzou- M. Zare conclut, philosophe: «Partout ma Zare juge «l’éveil de l’élève très avan- dans le monde, l’écolier est un investissecé. Les enfants osent participer et poser ment pour l’avenir. Nous voulons tous ofdes questions.» frir un avenir meilleur à nos enfants.»


18 TROMPÉES, EXPLOITÉS, ABANDONNÉES Subajini Rajendram s’engage pour que les travailleuses et travailleurs migrants sri-lankais sachent à quoi s’attendre. Texte: Mario Pilz, Photo: Solidar

«Les victimes de déplacement qui sont revenues dans leur village à la fin de la guerre civile luttent toujours pour satisfaire leurs besoins fondamentaux. Ce n’est pas rare qu’elles s’endettent pour y parvenir.» Subajini Rajendram explique ainsi le fait que de plus en plus de personnes du Nord du Sri Lanka tentent leur chance en migrant. Cette sociologue de 35 ans, diplômée en promotion de la paix, dirige le projet Solidar pour les migrant-e-s potentiel-le-s dans la province de Mullaitivu. «Ils doivent connaître les risques et les possibilités s’offrant à eux lorsqu’ils décident ou non de migrer». C’est ainsi qu’elle résume les objectifs de son travail. Contraints à la migration Subajini Rajendram revient juste d’une rencontre avec l’organisation féminine lo-

cale Woman’s Rural Development Society (WRDS). Solidar a formé cette organisation pour qu’elle puisse aider et conseiller ses membres en matière de migration. «Kamalthasan Tharshini est rentrée chez elle», déclare, ravie, Subajini Rajendram. Cette femme de 23 ans voulait travailler en tant qu’employée de maison à Dubaï parce que son mari n’avait pas d’emploi fixe et que sa famille avait besoin d’un salaire supplémentaire. Un agent douteux lui promit de lui trouver un emploi à Dubaï et l’emmena à Colombo. Lorsque Kamalthasan Tharshini devint méfiante et voulut rentrer chez elle, il la retint pendant cinq jours contre son gré. Elle ne pouvait établir aucun contact avec sa famille et l’agent la menaçait de devoir payer 140 000 roupies (environ 1000 francs suisses) si elle refusait de se rendre à Dubaï. Lorsque les membres de la WRDS


PORTRAIT 19 Subajini Rajendram informe la population au nord du Sri Lanka sur les méthodes courantes de recrutement et les dangers liés à la migration.

apprirent cela, elles aidèrent la famille de la prisonnière à porter plainte. La police réagit et libéra la jeune femme. Violences contre les migrantes et exclusion sociale Ce n’est malheureusement pas un cas isolé. «Kamalthasan Tharshini a eu de la chance de se méfier alors qu’elle était encore au Sri Lanka», déclare Subajini Rajendram. «De nombreuses femmes souhaitant migrer ne se rendent compte qu’une fois arrivées que les promesses de l’agent ne reflètent pas la réalité. Au lieu de cela, elles ne touchent pas leur salaire et elles sont confrontées à des durées de travail excessives, ainsi qu’à des violences physiques et sexuelles. Certaines découvrent également un travail tout autre que celui convenu et elles sont privées de leur passeport pour les empêcher de

rentrer chez elles.» Les employeurs, qui sont renvoyés dans leur pays d’origine», donnent 150 000 à 200 000 roupies explique Subajini Rajendram. L’office sri(1100 à 1450 francs suisses) aux mi- lankais du travail à l’étranger est respongrant-e-s placé-e-s avant leur départ, ne sable de la régulation et de la protection veulent en effet pas perdre l’argent qu’ils des migrant-e-s. Il met à disposition des ont investi dans le recrutement de leur contrats standards pour les candidats à la main-d’œuvre. La volonté de mettre fin à migration et négocie avec les gouverneces abus, qui touchent également les ments des pays de destination. Cepenhommes, motive Subajini Rajendram dans dant, les services officiels du Nord du son travail. Le fait que de nombreux-ses migrant-e-s ne prévoient pas à l’avance «Certaines trouvent égalela manière dont leur famille ment un travail tout autre que restée au pays s’organisera celui convenu.» pendant leur absence constitue un autre problème. Il peut ainsi arriver que pendant Sri Lanka sont limités et les migrant-e-s l’absence de leur mère, les enfants soient qui se rendent à l’ambassade en cas délaissés ou même maltraités. «La migra- de problème dans le pays de destination tion des femmes est en général moins sont souvent simplement renvoyés sans bien acceptée que celle des hommes. Par recevoir aucune aide. Pour Subajini nécessité, certaines femmes migrent par- Rajendram, le problème le plus grave est fois contre la volonté de leur famille, ce la prolifération du placement par des qui renforce la difficulté d’une quelconque agences frauduleuses. «Elles exploitent planification», déclare-t-elle. Si les femmes sans vergogne la situation de détresse et atteignent moins souvent leur destination l’ignorance des migrant-e-s pour s’enrichir de migration que les hommes, cela est à leurs dépens.» également dû au fait que les hommes accordent moins de soins à l’envoi de Aide aux migrant-e-s fonds à leur femme que l’inverse. Solidar aide également les familles migrantes à potentiel-le-s réaliser cette planification. Solidar Suisse travaille en collaboration Des agences de recrutement avec des organisations de la société cifrauduleuses vile pour informer les candidats à la miL’objectif de nombreux-ses migrant-e-s gration du Nord du Sri Lanka sur les sri lankais-es est le Proche-Orient. Les pratiques courantes de recrutement et femmes travaillent souvent en tant qu’emles risques encourus. Ces organisations reçoivent une formation pour pouvoir inployées de maison et les hommes en tant qu’ouvriers non qualifiés, notamment sur former leurs membres sur la migration des chantiers. Les jeunes hommes lors de rencontres et pour les aider en migrent également clandestinement par cas de problème. De plus, les représenbateau en direction de l’Australie afin d’y tants des autorités reçoivent une formademander l’asile. «Leur espoir d’améliorer tion approfondie et la coordination des la situation économique de leur famille est organisations de base est encouragée. aussi souvent réduit à néant. Au lieu de www.solidar.ch/srilanka_migrantes cela, ils meurent lors de la traversée ou


«J’avais sept ans quand mes parents sont morts. La famille élargie de mon oncle m’a alors accueillie. Mais elle n’était pas riche. Grâce au programme de formation professionnelle de Solidar Suisse, j’ai pu devenir coiffeuse et j’ai même mon propre petit salon aujourd’hui.» Fatimata Traoré de Bobo-Dioulasso

OFFREZ UNE PAIRE DE CISEAUX Offrez cette carte à Noël pour permettre à une jeune femme du Burkina Faso de suivre une formation de coiffeuse qui assurera sa subsistance.

OU… … une machine à coudre, pour permettre à une famille du Sri Lanka d’ouvrir un atelier de couture dans son village. … une émission de radio, pour informer les cueilleuses et les cueilleurs de canne à sucre en Bolivie de leurs droits et leur permettre de négocier des salaires décents. … une poignée de graines, et une famille de petits paysans au Salvador pourra travailler ses champs sans devoir acheter des semences et des pesticides hors de prix.

Comment procéder: • Commandez les cartes cadeaux de Solidar, chacune valant 50 francs, à l’aide du talon réponse ci-joint ou en ligne sur www.solidar.ch/cadeau • Vous recevrez rapidement les cartes désirées et un bulletin de versement. • Inscrivez votre nom et celui de la personne destinataire sur la carte.

Chaque carte vous permet de soutenir les programmes de développement de Solidar Suisse dans le monde entier en faveur de personnes défavorisées.

Pour toute commande reçue avant le 22 décembre 2014, nous vous garantissons une livraison avant Noël. En cas de questions, veuillez appeler le 021 601 21 61 ou écrire à contact@solidar.ch


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