Solidarité 2/12

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Grâce à des contrôles de qualité, les paysan-ne-s reçoivent une rémunération convenable pour leur lait.

Kade Ninaj (à droite) a pu améliorer la qualité de son lait, grâce notamment à des méthodes de désinfection.

La qualité offre des perspectives Solidar Suisse s’emploie à développer le secteur laitier au Kosovo. Objectif: réduire le taux de chômage dans les zones rurales. Texte: Katja Schurter. Photos: Brigit Ruprecht Les zones rurales du Kosovo n’offrent guère de sources de revenus et le chômage y est élevé. La guerre, à la fin des années nonante, a mis à mal l’économie laitière traditionnelle, qui se reconstruit à grand-peine: d’une part, la production indigène ne parvient pas à concurrencer les produits subventionnés des pays voisins; d’autre part, elle souffre d’un problème d’image dû à la qualité du lait. Contrôles indépendants Comme l’Etat ne fixait aucune exigence, les laiteries contrôlaient elles-mêmes le lait pour en fixer le prix. «D’où une grande méfiance chez les paysan-ne-s», raconte

Donika Nila, qui travaille pour le projet pilote, soutenu par Solidar Suisse, visant à améliorer la qualité du lait. Deux fois par mois, elle visite les exploitations participant au projet, prélève des échantillons de lait pour les faire analyser par un laboratoire indépendant et dispense des conseils sur l’hygiène et les techniques de traite. Donika nous emmène chez Vlora et Dukagjin Deda, dont les 40 vaches produisent chaque jour 700 litres de lait, récupérés dans un circuit fermé. L’étable est grande et claire, les vaches très propres. Ici, les exploitants n’ont guère besoin de conseils. Vlora Deda nous montre fièrement les bêtes, dont cer-

taines ont été primées. Le couple est très content de la mise en place des contrôles indépendants: «Les disputes au sujet du prix n’en finissaient pas.» Améliorer l’hygiène Les conseils de Donika Nila sont toutefois très utiles aux plus de 70 % de paysan-ne-s qui ne possèdent que cinq à neuf vaches, qu’ils traient à la main. Pour améliorer la qualité du lait, la jeune femme leur distribue aussi du désinfectant et leur explique comment nettoyer les récipients à lait. «Le plus urgent consiste à accroître l’hygiène, explique-t-elle. Certaines fermes n’ont pas l’eau courante, ni

Donika Nila dispense des conseils en matière d’hygiène.

Promouvoir le lait grâce au dialogue Solidar favorise le dialogue entre producteurs, laiteries et autorités, afin de faire évoluer le secteur laitier et de le doter d’une réglementation claire. Grâce aux nombreux conseils dispensés, les associations paysannes et les groupements de laiteries préconisent aujourd’hui des réformes, qui profiteront à tous les acteurs du secteur, ainsi qu’aux consommatrices et aux consommateurs. Et même les autorités sont de la partie: la mise sur pied de contrôles indépendants du lait cru occupe une place de choix dans la nouvelle stratégie de développement du Ministère de l’agriculture. www.solidar.ch/lait

l’équipement requis pour traire et entretenir l’étable.» De plus, les centres de collecte de lait sont trop peu nombreux, de sorte que les producteurs des villages éloignés ne peuvent pas y amener tout leur lait, alors que les capacités des laiteries demeurent sous-utilisées.

«Le lait nous fait vivre» Naguère, les paysan-ne-s du hameau de Has versaient leur lait dans des bidons en plastique, qu’ils amenaient en tracteur à la laiterie du village le plus proche. Pour leur simplifier la vie, l’association paysanne Krusha a ouvert en mai 2011, avec l’appui de Solidar Suisse, un centre de collecte à Has. Les 20 productrices et producteurs locaux y livrent désormais leur lait, qui est refroidi puis transporté à la laiterie. La qualité du lait s’est ainsi sensiblement accrue. La ferme de Kade Ninaj, l’une des productrices, ne res-

Effets pervers du marché «vert» Une partie du lait est ainsi écoulé sur le marché «vert». Les petits paysans le vendent au bord de la route ou sur les marchés locaux: la vente directe leur rapporte un meilleur prix, mais l’hygiène laisse à désirer et les contrôles de qualité sont «Le dumping nuit à la inexistants. «Ils ne sont pas qualité du lait et à l’image sûrs de pouvoir vendre tout leur lait. De plus, ils doivent du secteur.» aller au marché en bus. En été, une partie du lait tourne pendant le transport», commente Donika semble en rien à celle du couple Deda. Nila, en relevant les inconvénients de ce Six vaches se tiennent dans une étable système. Le projet vise dès lors à at- petite et sombre, dépourvue d’eau couteindre tous les paysan-ne-s, afin qu’ils rante et de machine à traire. «Mon mari et ne soient plus obligés de vendre leur lait moi sommes sans emploi, soupire Kade sur le marché «vert». Notre guide affirme Ninaj. Nous trayons nos six vaches à la encore: «En pratiquant des prix de dum- main. Le lait nous fait vivre, nous et nos ping, ils nuisent à leurs collègues. Et la deux enfants. Grâce au centre de colmauvaise qualité de leur lait nuit à l’image lecte, nous pouvons désormais en livrer du secteur.» Aujourd’hui, 1600 produc- davantage.» trices et producteurs sur 4000 prennent part au projet visant à améliorer la qualité du lait.


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