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Mars 2011

Anticipation d’une hausse des taux d’intérêt directeurs de la BCE /// Le point de vue de Natixis Asset Management. "A l’issue de son comité du 3 mars 2011 la BCE, par la voix de son président J-C. Trichet, a prévenu qu’une hausse de ses taux d’intérêt directeurs serait possible dès le mois prochain…"

1/ Décryptage macroéconomique

par Philippe Waechter, Directeur de la Recherche Economique Les raisons Macroéconomiques sous tendant l'orientation de la BCE La hausse du prix des matières premières La première est très clairement la hausse du prix des matières premières qui se retrouve dans la hausse des prévisions d'inflation de la BCE pour 2011 mais sans se transmettre à 2012. Lors de l'exercice de prévisions de décembre, le taux d'inflation au milieu de la fourchette fournie par la BCE était de 1,8 %, il passe à 2,3 %. Pour 2012, ce chiffre de milieu de fourchette passe de 1,5 % à 1,55 %. Au-delà du prix des matières premières, la BCE évoque un risque haussier de l'inflation à moyen terme si l'activité redémarre provoquant des pressions sur les prix en raison d'une demande plus forte mais aussi en raison des hausses de fiscalité qui pourraient être nécessaires dans le cadre de la consolidation budgétaire. Le redémarrage de l’activité

Activité et Politique monétaire dans la zone euro 65.00

L'activité a redémarré. En conséquence, la politique monétaire est trop accommodante avec un taux refi à 1 %. On peut ici s'appuyer sur le graphique ci-contre qui présente une grande régularité et qui lie l'activité retracée par l'enquête PMI/Markit pour la zone euro et la variation sur 6 mois du taux refi. L'enquête reflète ainsi les inflexions de l'activité et la BCE ajuste son taux refi à celles-ci. Ce graphe est intéressant car il suggère qu'en raison de la crédibilité acquise et entretenue par la BCE, le taux d'inflation ne s'éloignera pas trop du seuil

2 1.5

60.00

1 0.5

55.00

0 50.00

-0.5 -1

45.00

-1.5 -2

40.00

35.00 1999

-2.5

Indice synthétique global - Enquête PMI/Markit avancée de 2 mois Taux de refi de la BCE - différence sur 6 mois (ech. droite) 2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

-3 2009

2010

Source : Datastream – Natixis Asset Management

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de 2 % et qu'en conséquence, les orientations de la politique monétaire sont principalement conditionnées par l'activité.

Taux de refi de la BCE - nominal et réel

La perception d'une politique vraiment trop accommodante

monétaire

5.00

Nominal 4.00 3.00

Les membres de la BCE étaient dans une 2.00 situation de plus en plus inconfortable en 1.00 raison de la perception d'une politique monétaire vraiment trop accommodante. C'est 0.00 ce qu'a exprimé récemment le gouverneur de -1.00 la banque de Hollande, Nout Wellink, qui Réel (hors inflation) -2.00 indiquait que puisque la reprise était là il fallait 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 rapidement durcir le ton. En conséquence le taux de la BCE était trop bas pour Source : Datastream – Natixis Asset Management éventuellement peser sur la conjoncture. On peut appréhender ce phénomène par le biais du taux refi réel de la BCE retracé dans le graphique ci-contre.

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Pourquoi nous ne partagions pas cette analyse ? Tous les éléments évoqués sont connus mais cela n'était pas notre scénario. 3 facteurs nous incitaient à souhaiter le maintien d'une politique monétaire accommodante. Un niveau d’activité encore limité Le premier point est que le niveau d'activité est Zone euro - Évolution du PIB encore limité. Celui-ci, pour l'ensemble des pays 2100 Taux de croissance annualisé de la tendance calculé sur 2000 - T1 2001.8 8: % de la zone euro, y compris l'Allemagne, est 2050 Croissance depuis le point bas (T2-09):1.7 %(taux annuel) 2000 encore inférieur à ce qu'il était avant la récession. 1950 La zone euro a subi un choc brutal et persistant 1900 qui a été suffisamment fort pour que le 1850 rattrapage simplement sur le niveau d'activité 1800 1750 antérieur ne soit pas encore effectué. L'écart 1700 entre le dernier trimestre 2010 et le point haut 1650 Mesure de l'output gap -5.8 % (écart à fin 2010 entre le niveau du PIB et la Tendance du 1er trimestre 2008 est de -2,9 %. Cela traduit 1600 une demande interne peu robuste. La 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 consommation s'améliore modérément mais Source : Datastream – Natixis Asset Management l'investissement est encore très dégradé. C'est ce profil et l'hétérogénéité de la croissance entre les pays de la zone qui nous incitaient à la prudence et à ne pas valider la régularité du 1er graphique ci-dessus. Une dynamique limitée du marché du travail La deuxième raison est que le marché du travail connaît encore une dynamique limitée. L'emploi repart difficilement à la hausse. La baisse du taux de chômage au mois de janvier (9.9 % après 10 % depuis avril 2010) est encore insuffisante pour suggérer une reprise forte et marquée du marché du travail.

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La formation des prix Le dernier facteur est la formation des prix. Lorsque l'on observe le taux d'inflation en zone euro, on constate que si effectivement les contributions des matières premières (alimentaires et énergie) deviennent plus marquées, celles du taux sous-jacent restent réduites. Si l'objectif est la stabilité du taux d'inflation mais que la hausse des prix de l'énergie et des produits alimentaires est exogène, alors le seul moyen est de peser sur l'inflation sous-jacente et donc sur les salaires. Une telle solution n'alimenterait pas la demande interne et ne permettrait pas une meilleure autonomie de la croissance de la zone euro.

2/ Point de vue de la gestion par la Direction de la Gestion Taux

Vers une hausse des taux d’intérêt directeurs de la BCE A l’issue de son comité du 3 mars 2011, la BCE, par la voix de son président J-C. Trichet, a prévenu qu’une hausse de ses taux d’intérêt directeurs serait possible dès le mois prochain afin de contenir la remontée de l’inflation observée ces derniers mois. Cette évolution nous surprend, nos prévisions indiquaient un statu quo monétaire pour 2011. L’absence de tensions sur les coûts unitaires salariaux et l’intensité de la crise en zone euro semblaient favoriser une politique plus prudente d’autant que la Réserve Fédérale américaine devrait poursuivre une politique très expansionniste vraisemblablement jusqu’au mois de juin prochain. En conséquence, la hausse de l’Euro et la remontée des taux risqueront de peser sur la conjoncture européenne dans la seconde partie de l’année. Les linguistes spécialistes de la rhétorique BCE ont ainsi noté l'absence du terme "approprié" en référence au niveau actuel des taux, ainsi que de "vigilance forte" de la part des membres du conseil de politique monétaire vis-à-vis du risque d'inflation de moyen terme décrit comme orienté à la hausse compte tenu du niveau de croissance actuel. L'utilisation de vocable "vigilance forte" a presque toujours précédé (sauf en une occasion) une hausse de taux le mois suivant. Quels impacts ? Il est évident que le changement de ton observé depuis plusieurs semaines aura des conséquences en termes de taux d'intérêt, probablement dès le deuxième trimestre 2011. La prévision d'inflation de la BCE pour 2012 est néanmoins parfaitement en ligne avec l'objectif puisque la Banque prévoit une inflation moyenne de 1,7 % en 2012 (en milieu de fourchette). Les linguistes avaient placé à 1,8 % le seuil fatidique pour un cycle de hausse. M3 (+ 1,5 % en glissement annualisé) et le crédit ne croissent (+ 2,5 % en glissement annualisé) que faiblement. Selon nous, contrairement aux propos de J-C. Trichet, une première hausse déclencherait nécessairement des anticipations d'un cycle de resserrement avec probablement un rythme linéaire de 25pb par trimestre. Seul un accident majeur viendrait l'interrompre. Morgan Stanley et Crédit Suisse ont modifié leurs projections de taux repo désormais à 1,75 % en fin d'année. A noter que ce rythme mettrait un objectif immédiat à 2 % pour le Schatz voire 2,15 % pour inclure une prime de risque et enclencherait un mouvement d'aplatissement de la courbe.

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Aucun changement n'a en revanche été apporté à la politique d'octroi de liquidité aux banques : les LTRO(1) 3 mois sont prolongées (taux révisable lié aux MRO(2) si la BCE venait à modifier ses taux ou à repasser à des enchères) et auront lieu les 27 avril, 26 mai, 29 juin prochains. Les STRO(3) (1 mois) et MRO(2) (1 semaine) restent illimitées et au taux de refinancement jusqu'au 12 juillet. Il est clair que la BCE fait peu de cas des récessions (voire dépressions) grecque, portugaise et irlandaise. La BCE ne s'intéresse pas au policy mix global de la zone euro (sous prétexte d'indépendance) ni même, et cela est beaucoup plus grave, à la stabilité financière de la zone. Le problème du resserrement aujourd'hui est l'asymétrie de la politique : la plupart des banques qui seront affectées par la hausse des taux sont celles qui sont exclues du marché interbancaire unsecured, et qui voient leur base de dépôt diminuer, ce qui les rend très dépendantes des repos avec la BCE (les banques grecques financent près de 20 % de leur bilan avec la BCE, 12 % en Irlande, 9 % au Portugal). D'autre part, si le taux de défaut des ménages en Espagne reste relativement contenu, la hausse ne sera pas anodine compte tenu de l'indexation des prêts immobiliers dont la grande majorité est à taux variables dans ce pays. Le problème est le même en Irlande, sauf que les défauts sont déjà élevés. En résumé, nous pensons que nous devons prévoir un cycle de hausse qui s'arrêtera au premier accident (+ 25pb en avril, juillet et octobre vers 1,75 % fin 2011, 2,75 % fin 2012). Le retour du risque systémique, déjà perceptible dans les tensions sur l'interbancaire, est possible. Le seul élément susceptible de remettre en cause le cycle de resserrement est la lutte de pouvoir entre la BCE et les gouvernements. Compte tenu du calendrier politique très chargé en mars, la BCE agiterait la menace du resserrement pour forcer les gouvernements à agir fortement en faveur d'une solution budgétaire au problème de solvabilité souveraine (extension des garanties communes, transferts fiscaux). Cependant, l’impact de l’annonce de la BCE sur les marchés de taux est resté limité sur la partie longue de la courbe. Les taux allemands à 10 ans, après avoir évolué de 3,25 % à 3,33 %, sont aujourd’hui revenus proches de leur niveau initial. Seuls les taux à 2 ans se sont tendus de 1,58 % à 1,79 %, intégrant 2 hausses de taux de la BCE supplémentaires. Perspectives de marchés Marché obligataire En termes de gestion, nous ne modifions donc pas notre vue légèrement négative à un mois sur le taux à dix ans allemand. En ce qui concerne la partie courte de la courbe des taux euro, une éventuelle tension supplémentaire sur les taux pourrait même nous amener à envisager une position à l’achat sur les niveaux de 2 % sur le 2 ans allemand dans nos portefeuilles obligataires. Marché monétaire Pour ce qui concerne les OPCVM monétaires, le process intègre par nature les moyens en réponse à de telles interventions des Banques Centrales. Les OPCVM indexés EONIA auront une performance qui suivra naturellement - si elle se produit- la hausse de l’EONIA. Les OPCVM à allocation taux fixe/taux variable, verront sans doute celleci évoluer dans le sens d'une plus forte proportion d’actifs indexés sur l’EONIA. L'évolution de l'écart EONIA / Euribor 3 mois déterminera par ailleurs la performance relative par rapport à l'EONIA des OPCVM indexés sur la référence à 3 mois.

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(1)

LTRO : Longer-Term Refinancing Operations MRO : Main Refinancing Operations (3) STRO : Short Term Rental Overlay (2)

RĂŠdigĂŠ le 07/03/2011 par les Directions Gestion Taux et Recherche Economique de Natixis Asset Management

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