NOVO N°7

Page 19

par nicolas querci

par nicolas querci photo : klaus stöber

Par l’opération du Saint-Esprit, une exposition de Christian Zeimert, du 19 mars au 3 avril à la Chaufferie, à Strasbourg 03 69 06 37 78 – www.esad-stg.org

En présence, exposition jusqu’au 16 mai au CEAAC, à Strasbourg 03 88 25 69 70 – www.ceaac.org

focus

Au nom du Rire, du Lard et du Calembour Peintre de l’humour noir, peintre « calembourgeois », peintre Panique, libertaire, anarchiste, satiriste, ironiste, Christian Zeimert fait partie de cette bande de joyeux drilles qui a émergé dans le sillage de Topor au début des années 60, sans autre mot ordre que l’éclatement des conventions, au moyen du rire, de la dérision, du jeu et de la provocation. À rebours des fats qui prennent leur art très au sérieux et qui se voient comme des êtres surnaturels, Christian Zeimert oppose une œuvre autodérisoire consciente de sa futilité et de son ridicule. Ses toiles sont des œuvres de l’esprit au sens noble du terme et jouent sur la polysémie des titres, qu’il s’amuse à prendre au pied de la lettre : dans Nicolas Poussin et ses frères, il met littéralement en scène… un poussin et ses frères poussins en train de picorer la terre, un ver et des tubes de peinture. Toutefois il ne se contente pas de faire le pitre ou de filer des bons mots (on peut également l’entendre digresser sur France Culture, dans l’émission Des Papous dans la tête), auquel cas il ne serait qu’un amuseur. Christian Zeimert est avant tout un peintre doté d’une technique impressionnante qui fait de lui un dessinateur et un coloriste hors pair. C’est encore quelqu’un qui a énormément appris (notamment auprès de Gromaire), qui a étudié les maîtres et qui possède une connaissance intime de l’histoire de l’art lui permettant de parodier les tableaux les plus connus – et de rendre hommage, d’un clin d’œil, à tous ceux qui l’ont précédé. D

Microfictions L’exposition du CEAAC propose une réflexion sur la construction de la mémoire collective, comme pour souligner que la mémoire et le souvenir ne sont pas des choses que l’on impose, que l’on décide, que l’on décrète, mais qui agissent par accumulation d’événements invisibles que le travail des artistes tente de révéler et de fixer. Tacita Dean s’intéresse au processus de maturation du fruit en filmant deux poires coincées dans deux bouteilles d’eau-de-vie, créant une nature morte en mouvement où seul le changement de lumière indique le passage du temps. L’Allemand Wolf von Kries présente une suite de quinze séquences filmées d’événements apparemment sans importance et sans lien entre eux, pour former une sorte d’archive personnelle, poétique et méditative. La photographie de Becky Beasley qui ouvre l’exposition représente une étagère en construction, montrant ainsi ce qui d’ordinaire sert à montrer. La pièce du Belge Leon Vranken explore la même voie en offrant au regard une vitrine de musée, vide, entaillée en plusieurs endroits, fragile, où seuls l’air, la lumière, la poussière pénètrent. Privée de son contenu, la vitrine devient un objet en soi, encombrant, inutile. Les installations de Katinka Bock et de Dan Peterman élargissent la notion d’archive, en additionnant pour l’une les branches d’arbres laissées par une tempête, pour l’autre les matières plastiques correspondant à la consommation annuelle de 57 Américains. Autant de façons de souligner que la mémoire est un processus lent, inconscient, irréversible, dans lequel chaque seconde occupe un rôle unique, décisif, et contient sa part d’éternité. D

19


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.