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CONJONCTURE ANCIEN : UN MARCHÉ À DEUX VITESSES

Une fois n’est pas coutume, au 3ème trimestre, c’est Paris qui a vu son marché ralentir et ses prix augmenter moins vite, pendant que la province entretenait un joli dynamisme.

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LA PIERRE, UNE VALEUR QUI

RASSURE ET FAIT ENCORE ET TOUJOURS L’UNANIMITÉ DANS LE CŒUR DES FRANÇAIS

L’attrait spécifique des Français pour l’immobilier s’est particulièrement illustré durant un 3ème trimestre ultra dynamique qui a vu de nouveaux acquéreurs arriver sur le marché.

Une offre toujours rare et une demande accrue provoquent mécaniquement une hausse du prix du m² de 1,5 % sur les 3 derniers mois, l’affichant ainsi à 2 900 € en moyenne nationale. Cette augmentation reste toutefois assez contenue au regard des +5,3 % enregistrés sur un an. Le fameux espace vert, qui avait tant manqué aux Français durant ce confinement, est désormais un critère prioritaire, voire indispensable, surtout lorsqu’il s’agit d’achats à beaux budgets dans la capitale. Ainsi, des biens qui n’étaient pas prisés précédemment tels que les rez-de-jardin commencent à être vus d’un œil nouveau et à séduire les acquéreurs. Si les Français n’ont pas perdu leur envie d’acheter, les banques et leur politique restrictive, elles, les limitent.

Brice Cardi, Président du réseau l’Adresse, d’analyser : « Il est dommage que les banques ne jouent pas assez le jeu avec des conditions de financement qui pénalisent beaucoup. Désormais, ce ne sont plus seulement les ménages modestes ou les primo-accédants, comme je le redoutais en début d’année, qui sont éloignés de l’achat immobilier, mais également les cadres. En effet, si ces derniers sont déjà investisseurs, ils ont de grandes chances de voir leur crédit comptabilisé mais de ne pas voir soustraire les loyers estimés de leurs investissements, leur faisant donc rapidement atteindre la limite des 33% d’endettement à ne pas dépasser. Cette situation nous amène à constater, au sein du réseau l’Adresse, près de 3 fois plus de refus de financement qu’auparavant… » Le Président du réseau de poursuivre : « Avec des taux si bas, il est dommage de rester sur une durée d’emprunt de 25 ans au regard de l’espérance de vie.

LA PROVINCE EN PLEINE FORME !

Cette dynamique haussière résulte presque exclusivement du dynamisme affiché par le marché en province, où les prix ont augmenté de près de 1 % (0,9 %) entre le 2ème et le 3ème trimestre 2020 et de 5,4 % sur 1 an, portant le m² à 2 365 €.

Seul bémol : si la tendance n’est pas à la négociation, il faut se positionner de plus en plus rapidement sur les biens intéressants, sous peine de les voir partir très vite.

Quant à l’impact du télétravail sur les acquisitions immobilières et la possible redistribution des territoires que cela pourrait impliquer, Brice Cardi, le Président du réseau, analyse :

« Si les Français ont bel et bien envie de vert et d’espace extérieur, l’avenir nous dira s’il s’agit véritablement d’un changement de vie et d’un exode des villes vers les campagnes ou s’il s’agit simplement de profiter des avantages du télétravail en s’offrant une résidence secondaire où il fait bon se ressourcer le temps des week-ends, vacances et jours de home office ».

ILE-DE-FRANCE : L’ELDORADO

DE L’ESPACE VERT POUR LES PARISIENS EN MAL D’EXTÉRIEUR

S’il est habituel de voir les Parisiens s’établir dans la 1ère couronne de l’Ile-de-France afin d’y trouver un pouvoir d’achat supérieur, le phénomène s’est clairement accentué et concerne désormais également les familles aisées qui ne veulent faire aucun compromis sur l’espace extérieur et se reportent sur les communes limitrophes de la capitale afin de s’offrir une petite maison avec jardin.

Et même si le marché immobilier d’Ile-de-France poursuit son augmentation, prenant 0,4 % ces 3 derniers mois, nous notons néanmoins une décélération dans la hausse.

Une distinction est également à faire entre la 1ère couronne, dont les prix sont en légère hausse, et la 2ème couronne qui, elle, voit ses prix se maintenir.

Cependant, malgré près de 4 % (3,9 %) d’augmentation sur un an, le pouvoir d’achat y est toujours plus qu’intéressant au regard du prix du m² fixé à 3 736 € ! En termes de tendance, impossible de savoir ce qu’il en adviendra sur les prochains mois. Toutefois, il est intéressant de garder en tête l’exemple de Montreuil montrant qu’une fois le plafond atteint, les prix n’augmentent plus. Ainsi, si en tant que marché de report idéal, la ville de Montreuil a connu la plus forte hausse de prix en 2019, la tendance est actuellement à la stabilité, voire à une légère baisse de prix sur les biens ne bénéficiant pas du fameux espace vert.

VERS UNE STABILITÉ,

VOIRE UNE BAISSE À PARIS ?

Des mois, des années même que la capitale n’avait pas vu cela : des prix qui se stabilisent et n’augmentent quasi pas (+ 0,2 % sur le 3ème trimestre 2020 par rapport au trimestre précédent).

Après une nouvelle année de hausse (+ 6,1 % sur 1 an, portant le m² à 10 633 €), cette stabilité est un marqueur fort à relever. « Le comportement des acquéreurs a changé : les biens disposant d’une belle superficie et dont le budget d’acquisition est conséquent restent désormais sur le marché s’ils ne sont pas impeccables et ne disposent pas d’espace vert. Cette nouvelle tendance, combinée à une absence sur le marché de la capitale d’investisseurs étrangers, conduit à une hausse des délais de vente ainsi qu’un stock de biens à acquérir plus important que l’année précédente à la même période. » décrypte Brice Cardi. L’absence d’investisseurs étrangers risque fort d’impacter le marché parisien, jusqu’à potentiellement faire baisser ses prix, mais pourrait également en bouleverser d’autres où les prix sont également élevés, comme Nice ou Bordeaux, et les orienter à la baisse. Le marché de la location de longue durée à, quant à lui, bénéficié de l’absence de touristes dans la capitale et vu revenir les logements qui avaient déserté ses rangs. « Tout ce qui tend vers une plus grande fluidité du marché locatif parisien va dans le bon sens. De ce fait, le récent jugement de la Cour de Justice Européenne en faveur de la loi française sur la question de la location de courte durée est positif ! ». Destiné à lutter contre la pénurie de locations de longue durée sur le marché parisien, ce jugement impose aux investisseurs qui désirent acquérir un logement pour le dévouer à un usage unique de location de courte durée, d’acheter un bien dont la destination n’est pas encore celle de logement, les obligeant alors à effectuer des travaux pour obtenir la destination tant convoitée. Suite page 10

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Si Paris est un indicateur du marché immobilier au national, au vu du contexte, il convient encore d’attendre pour savoir si la tendance à la stabilité va se maintenir et si elle débouche sur une baisse des prix. « Cela serait logique et en adéquation avec l’environnement économique et social du pays », observe malgré tout Brice Cardi.

QUELLES PERSPECTIVES POUR LES MOIS À VENIR ? La politique restrictive des établissements de crédit impacte encore plus le volume des ventes qui a déjà forcément baissé du seul fait du confinement. « La baisse de volume sera de l’ordre de 15 à 20 % par rapport à l’année précédente. Pour autant, il faut relativiser et se rappeler que 2019 était une année historique en termes de nombre de transactions » rappelle le Président de l’Adresse. Autre raison de garder le moral pour l’immobilier ancien : l’aide à la rénovation énergétique de logements MaPrimRenov’ qui peut aller jusqu’à 20 000 €, soit environ 10 % du budget moyen d’acquisition d’un bien. « C’est un bon dispositif qu’il est essentiel de faire connaître, sans quoi il n’aura aucune chance de réussite, à l’image de ce qui était précédemment arrivé au CITE. Pour ce faire, il en va du devoir de conseil de l’agent immobilier d’en parler à ses clients. En revanche, il est important de soutenir le secteur du neuf car il est le levier de régulation du marché immobilier global. Il est donc important de s’assurer qu’il n’ait pas de défaillance. »

TAUX : LA DEMANDE DE CRÉDIT DIMINUE

Pour le cinquième mois consécutif, le taux moyen des crédits immobiliers était en baisse fin novembre 2020. Mais les conditions d’octroi s’étant durcies, la demande chute.

Selon les chiffres de l’Observatoire Crédit Logement/CSA, les taux* sont tombés à 1,20 % en novembre. Pour mémoire, ils s’affichaient à 1,11 % en décembre 2019 et avaient remonté pour atteindre les 1,27 % en juin dernier. Cependant, ces conditions avantageuses cachent de plus en plus mal le durcissement des conditions d’octroi. Les banques ont en effet accru leur sélectivité, tant par volonté de ne conserver que les dossiers les moins risqués que par atteinte des quotas annuels. Du coup, de nombreux ménages se voient désormais éloignés du marché de l’acquisition, dont, naturellement, les foyers les plus modestes et les primo-accédants, mais pas uniquement …

Par conséquent, la production de crédits poursuit sa chute libre : entre janvier et novembre 2020, le nombre de prêts accordés a diminué de 18 % par rapport à la même période de 2019 et leur montant total est en baisse de 15,7 %. La durée moyenne d’emprunt a légèrement régressé mais elle se maintient à des niveaux élevés, jamais enregistré auparavant : 233 mois contre 235 en octobre.

Inversement, le coût des opérations réalisées par les ménages progresse deux fois plus vite qu’en 2019 (+ 4,7 % sur les onze premiers mois de 2020 contre + 2,2 % en 2019). Même si les revenus des ménages qui réalisent ces opérations augmentent nettement plus vite que par le passé (+ 2,6 % sur les onze premiers mois de 2020 en glissement annuel contre + 0,4 % en 2019), le coût relatif des achats se maintient à un niveau élevé : 4,6 années de revenus en novembre 2020 contre 4,4 années un an plus tôt.

Enfin, dans la logique de la politique des établissements financiers, le niveau de l’apport personnel s’élève aussi très rapidement depuis la fin de l’année dernière (+ 11 % en glissement annuel alors qu’il avait diminué de 5,2 % en 2019)

*Hors rachats ou renégociations de crédits et prêts relais.

CONJONCTURE NEUF : LA DÉPRIME S’INSTALLE

Après l’effondrement consécutif au premier confinement, le léger rebond des mises en chantier enregistré au 3ème trimestre 2020 est loin de suffire à inverser la tendance. D’autant que les permis de construire sont en chute libre

Selon les derniers chiffres du Ministère de la Transition Ecologique, 93 100 logements ont été commencés entre août et octobre 2020. C’est 3,8% de mieux que sur la même époque de l’année précédente. Mais sur l’ensemble des douze derniers mois, le résultat est moins flatteur : -5 % pour les mises en chantier, -12 % pour les permis de construire, déterminant pour le futur du secteur. « L’épidémie n’est que le révélateur d’une crise du logement neuf sur laquelle nous alertons depuis des mois » commente Alexandra François-Cuxac, présidente de la FPI. « Faute de permis de construire, nous peinons à proposer aux ménages des logements qu’ils peinent eux-mêmes à financer. Il faut agir d’urgence, sur l’offre comme sur la demande ».

NI OFFRE, NI DEMANDE !

Et les résultats du dernier baromètre de la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI) sont édifiants. Côté offre, les mises en vente avaient très fortement baissé au 2ème trimestre (-53,8 % par rapport au T2 2019, soit -20 000 logements). La chute s’est poursuivie, avec des mises en vente en baisse de 37,5 % au troisième trimestre, par rapport à la même période de 2019. Sur neuf mois, la baisse atteint 40 % (-36 000 logements) et tous les territoires sont concernés.

Côté demande, moins de 20 000 logements ont été réservés par des particuliers entre début juillet et fin septembre, soit une baisse de 28,5 % par rapport au T3 2019. Sur neuf mois, la dégringolade atteint 29,5 % (-34 000 logements) et affecte uniformément accession à la propriété et investissement locatif. Sur ces deux marchés, les candidats acquéreurs sont confrontés au manque d’offres et au resserrement des obtentions de crédits, gonflant ainsi le taux d’annulation des réservations. UN ESPOIR MALGRÉ TOUT Pour les professionnels, l’annonce par le Gouvernement de son intention de prolonger le Prêt à Taux Zéro (PTZ) et le dispositif Pinel sur 2022 va dans le bon sens et devrait contribuer à rassurer les acquéreurs. Du côté de l’offre, les blocages sont, pour la FPI, avant tout politiques : volonté de limiter l’engagement financier des ménages dans l’immobilier et discours négatif sur le logement neuf qui raréfie les permis de construire.

Alexandra François-Cuxac veut cependant encore y croire : « La reprise est à portée de main si les pouvoirs publics prennent le sujet à bras le corps. Il faut travailler avec le secteur bancaire pour desserrer les contraintes sur le crédit et, surtout, avec les élus locaux pour partager une ambition bâtisseuse au service de la ville durable et abordable. Et il faut préserver ce qui marche : le Pinel et le PTZ. Au pire de la crise, soyons pragmatiques et volontaires ! ».