ANALYSES & PROPOSITIONS FICTIVES POUR LA COLLECTION "ÉCRAN TOTAL"

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Magazine BE STREET

Informations

Exemple possible de mise en page : Vis à vis double page.

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HIERARCHISATION : Ordre d’importance donnée par la TAILLE et la PLACE des différents blocs, ainsi que la couleur.

2 3

4 Analyse

= L’information la plus importante + traduction française.

Intéressant :

* Hiérarchisation des éléments *Composition centrale et compréhension immédiate *Informations importantes mises en exergue (jaune)


Magazine SECURITE .....

Une couleur = Un thème

Système d’onglets

Analyse

AIDE A LA LECTURE

Intéressant :

* Les reprises du thème dans la compositions de la page * Une couleur vaut une idée *composition générale et simplicité visuelle


Magazine SECURITE .....

Sobriété et élégance : Impression de qualité du magazine, péciosité.

Epuration visuelle

Composition générale

Constante visuelle, signe réccurent : Se situe à chaque fin de paragraphe. Régularise, construit la composition.

Intéressant : Lignes directives

Analyse

Blanc actif (large marge), visibilité, espace.Composition pertinente dans sa lecture et compréhension facile..

* Epuration visuelle *Rappel du thème dans la composition et blanc actif * signes réccurents


Magazine ???????..... Impression Générale : Registre de l’annonce, évènements à venir, confrontation et compréhension immédiate.

Vis à vis :

Centralisation

Système de pictogramme : Un Picto équivaut à un thème.

MENU

Couleurs : CYAN et MAGENTA

(Impression) Ici le dessin renvoie à un univers trop enfantin ?

Analyse

: Un Mois : Un autre Mois : Texte

Intéressant :

* Les onglets qui guident la lecture (repères) * Le système de pictogramme pour une meilleure compréhension


Magazine New London (By Eurostar)

Oganisation d’une mise en page plein pot sur double page

TYPO: Constante visuelle. TYPO qui annonce la couleur de la thématique (une couleur : un sujet)

1 2 3

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Reprise artile de Presse ?

Intéressant :

* Référence à des formes textuelles connues *Diférentes constantes visuelles (typo et formes) *Méthode de hiérarchisation des informations

Analyse


Guide régional des lieux d’Art Contemporain

TITRE

TEXTE

TEXTE

TEXTE

TEXTE signes plastiques forts : visuel / esthétique / invariable / constante visuelle

TEXTE

Informations informationsinformationsinformations informations informationsinformationsinfo... Mise en place de «vignettes informatives» - hiérarchisation des des informations.

Lecture horizontale «en cascade»

Analyse

Intéressant :

* l’emploi de formes graphiques fortes. * Hiérarchisation par blocs.


PRO POSI TIONS 1/8+

Epuration visuelle : Donner à voir en venant à l’essentiel ... Une couleur = un thème ? COULEURS IMPRIMERIE BASIQUE ?

9/03 Milan

KUNDERA

Discours prononcé lors de la remise du prix Jerusalem 1985

« [...] Le mot kitsch ... ... désigne l’attitude de celui qui veut plaire à tout prix et au plus grand nombre. Pour plaire, il faut confirmer ce que tout le monde veut entendre, être au service des idées reçues. Le kitsch, c’est

la traduction de la bétise des idées reçues dans le langage de la beauté et de l’émotion... Vu la nécessité impérative de plaire et de gagner ainsi l’attention du plus grand nombre, l’esthétique des mass média 16

Analyse

embrassent et infiltrent toute notre vie, le kitsch devient notre esthétique et notre morale quotidienne.

»


Tonique : une couleur vaut un thème, un sujet, une idée, un texte diddérent.

9/03 Milan

KUNDERA

Enregistrement d’une émission pour Canal+

Au cœur du processus d’industrialisation des jeux télévisés Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais diversetanecdotesmédiatiques,peopolisation des invités, dont certains sont eux-mêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement. Mais le constat principal reste celui de la mise en œuvre de pratiques manipulatoires chronométrées, de la mise à bas de toute spontanéïté et sincérité, de la bêtification du public consi16

Analyse

déré comme un kleenex, flatté lorsqu’on en a besoin, parqué lorsque les caméras s’éteignent. Les vigiles sont des vigiles, les studios sont des studios, les lumières sont des lumières, les techniciens sont des techniciens, mais attention, le présentateur n’est pas un présentateur, les invités ne sont pas des invités, le public n’est pas un public et le chauffeur de salle n’est pas un chauffeur de salle. Toutes ces personnes, qui parfois aiment, mangent, pleurent ou sont malades, sont des avatars, pièces absolument calibrées, drivées,briefées,cloneshagardsetconsentants de citoyens qui, d’ordinaire, sont censés réfléchir avant de mettre un bulletin dans l’urne. Trois personnages sont emblématiques de cette décérébration collective : le chauffeur de salle, le présentateur et le stéphanebern. Le chauffeur de salle moque gentiment le public qu’il est chargé de faire réagir à certains moments donnés et pas à d’autres. Voilà, tout est dit. Ce qui reste, ce sont des vannes faciles, un appel à la coolitude, l’incantation que ce jeu « est vraiment sympa, non ? » et une permanente exhortation à « faire le plus de bruit possible », sur ordre. La fausse spontanéité millimétrée du public pour saluer les bonnes réponses du jeu, les saillies humoristiques des invités ou les scores abscons, c’est le vrai naufrage de la télévision, comme le big-mac est le naufrage de l’industrie de l’alimentation, le paradoxe du triomphe de l’indécence du produit le mieux fini de la chaîne. Et lorsque le chauffeur de salle, entre deux enregistrements, fait « jouer » certains spectateurs à prendre les places des invités et du présentateur, ce sera l’acmée

de la soumission du public, entrepenant d’applaudir un simulacre bis ou un simulacre au carré, c’est selon ...

»


Guy DEBORD chap. 30 La société du spectacle 1967

L’aliénation. 3)

« L’aliénation du spectateur au profit de l’objet contemplé (qui est le résultat de sa propre activité inconsciente) s’exprime ainsi : plus il contemple, moins il vit ; plus il accepte de se reconnaître dans

les images dominantes du besoin, moins il comprend sa propre existence et son propre désir. L’extériorité du spectacle par rapport à l’homme agissant apparaît en ce que ses propresgestes ne sont plus

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Analyse

à lui, mais à un autre qui les lui représente. C’est pourquoi le spectateur ne se sent chez lui nulle part, car le spectacle est partout. »


Guy DEBORD chap. 30 La société du spectacle 1967

Les « digital natives » la génération multi-écrans

3)

Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le passage de la cassette audio au CD, de la cassette vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas migré, tout était là. Bien sûr tout le monde les scrute à la loupe et se demande comment ils vont fonctionner dans l’avenir. En tête les entreprises qui se questionnent sur les impacts de leur arrivée dans quelques années sur le marché du travail. Mais le phénomène va bien au-delà: sociologues, anthropologues, hommes politiques, scientifiques, en24

Analyse

seignants, historiens découvrent que ces enfants font partie de la première génération qui est capable d’apprendre des choses aux générations précédentes. Même s’ils sont très proches des « Y » en terme de consommation de produits numériques, leur comportement est déjà très marqué. Étant père de quatre garçons dont trois sont des « Y » dans la vingtaine, mon petit dernier qui a onze ans m’intrigue, me questionne et je suis en passe de me demander si nous ne sommes pas en présence du premier type d’espèce que l’on pourrait nommer « Homo numericus ». Puisque que j’ai la chance d’avoir un spécimen sous la main, voici quelques points et anecdotes tirés de mes observations: - Mac ou pc: aucune importance pour lui. Il utilise aussi un XO OLPC mais rarement car il ne peut y faire tout ce qu’il veut et y utiliser ses applications préférées. A noter qu’il n’imprime presque jamais. - Courriel: Il ne l’utilise presque pas. La phrase qui tue: « le courriel c’est pour les vieux » - Recherche sur Internet: il est capable de trouver tout ce dont il a besoin ce qui contredit certains experts qui décrivent les jeunes comme de mauvaisutilisateursdesmoteursderecherche.Égalementdépendammentde ses besoins il ira soit sur Google, soit sur Wikipédia. - Commerce électronique: il est déjà un consommateur en ligne. Je suis obligé de sortir ma carte de crédit pour faire des achats pour lui sur Internet. - Sur le web: il est multi-tâche c’est à dire qu’il utilise plusieurs applications en même temps. Youtube pour les vidéos, son réseau social Chapatiz et Piczo plus MSN. Il passe de l’un à l’autre et communique en même temps avec plusieurs communautés. - Le portable: c’est l’outil le plus important avec le laptop. Le SMS est très utilisé. A noter que je suis impréssioné par la rapidité d’exécution parfois sans regarder l’écran, l’emplacement des touches est connu par coeur. - MSN: une des applications primordiales, plus de 105 amis, c’est la ligne directe avec sa communauté. J’ai remarqué aussi que l’écriture de style « langage chat » n’affecte pas l’écriture classique. Il fait très bien la différence.


Idée « [...] La jeune fille est un

Thème / sujet / titre possibles de l’article

absolu : on l’achète parce qu’elle

« [...] La jeune fille est un

a de la valeur, elle a de la valeur

absolu : on l’achète parce qu’elle a de la valeur, elle a de la valeur parce qu’on l’achète.Tautologie de la marchandise. »

parce qu’on l’achète. Tautologie de la marchandise. »

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13 Pourquoi la télévision n’informe pas ?

TIQQUN Premiers matériaux pour une théorie de la jeune fille Editions Mille et une nuits 2001 Au lieu de la pagination, mettre thème, idée, sujet ou autre ?

Pourquoi la télévision n’informe pas ?

Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu.

10 Analyse

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Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappeléquelques

réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système

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et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu.

TIQQUN Premiers matériaux pour une théorie de la jeune fille Editions Mille et une nuits 2001


Pourquoi la télévision n’informe pas ? « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu.

Et c’est précisément ce qui est enseigné dans les écoles de journalisme, qui garantissent l’obtention de la carte de presse. Une douzaine d’écoles en France sont directement financées par les principaux groupes de médias, et la carte de presse est elle-même décernée par des journalistes professionnels. Il n’existe pour ainsi dire pas de contrôle extérieur et indépendant de la profession de journalistes. Et de fait, le milieu est extrêmement homogène, en partie à cause du prix élevé d’entrée dans ces écoles, et grâce à une autorégulation inconsciente du milieu social des journalistes entre eux. L’exercice de la revue de presse, très enseigné dans ses écoles et qui permet de savoir de quoi on va parler en lisant les autres titres, illustre ce milieu anthropophage. « Personne ne lit plus les journaux que les journalistes eux-mêmes », disait pierre Bourdieu dans son ouvrage Sur la télévision2.

Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité. Mais qu’estce finalement que cette « actualité » ?

La télévision, comme média très hétéronome, est fortement soumise à la loi du marché (l’audimat). Elle tend à favoriser le commercial contre l’autonome, c’est-à-dire contre les valeurs de la profession journalistique. Par son pouvoir de déformation du champ médiatique elle va pousser les autres médias à faire comme elle.

Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité. Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit. Au-delà de la loi du « mort-kilomètrique » (qui veut que l’on s’intéresse davantage à deux morts dans sa ville, qu’à deux cent mille morts à l’autre bout du monde), le choix de ce qui « fait l’actualité » est capital vu le peu de temps dont dispose

Etre indépendant se dit forcément par rapport à quelque chose. Les médias dits indépendants le sont-ils vraiment, dès lors qu’ils sont subventionnés ou se financent par la pub ? Mais s’il y a une chose dont dépendent tous les programmes de télévision (information ou divertissement), c’est de l’audimat. Les sacro-saints chiffres donnés par Médiamétrie mesurent la part d’audience d’une émission, non pas pour juger de sa qualité, mais pour quantifier le nombre de cerveaux disponibles

10

Analyse

un présentateur. Aussi, montrer des événements banals a le double intérêt de ne pas aborder les sujets plus sérieux et d’attacher les téléspectateurs à une histoire. La détresse d’une mère n’ayant aucune nouvelle de sa fille disparue n’apporte aucune information nouvelle, mais attache sentimentalement le téléspectateur à son écran pour le garder jusqu’au bout. Cette technique appelée story-telling est massivement utilisée dans les médias d’information et donne lieu à une dérive de produire de l’information là où il n’y a rien de nouveau.

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Les « digital natives » la génération multi-écrans Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le passage de la cassette audio au CD, de la cassette vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas migré, tout était là.

Les « digital natives » la génération multi-écrans Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le passage de la cassette audio au CD, de la cassette vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas migré, tout était là.

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Analyse

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TOTAL ÉCRAN

LES « DIGITALES NATIVES » la génération multi-écrans

TOTAL ÉCRAN

Unedesconférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person Unedesconférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky,

inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont

tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008

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LES « DIGITALES NATIVES » la génération multi-écrans

TOTAL ÉCRAN

Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le passage de la cassette audio au CD, de la cassette vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas migré, tout était là. Bien sûr tout le monde les scrute à la loupe et se demande comment ils vont fonctionner dans l’avenir. En tête les entreprises qui se question-

Analyse

nent sur les impacts de leur arrivée dans quelques années sur le marché du travail. Mais le phénomène va bien au-delà: sociologues, anthropologues, hommes politiques, scientifiques,enseignants,historiens découvrent que ces enfants font partie de la première génération qui est capable d’apprendre des choses aux générations précédentes. Même s’ils sont très proches des « Y » en terme de consommation de produits numériques, leur comportement est déjà très marqué. Étant père de quatre garçons dont trois sont des « Y » dans la vingtaine, mon petit dernier qui a onze ans m’intrigue, me questionne et je suis en passe de me demander si nous ne sommes pas en présence du premier type d’espèce que l’on pourrait nommer « Homo numericus ». Puisque que j’ai la chance d’avoir un spécimen sous la main, voici quelques points et anecdotes tirés de mes observations: - Mac ou pc: aucune importance pour lui. Il utilise aussi un XO OLPC

mais rarement car il ne peut y faire tout ce qu’il veut et y utiliser ses applications préférées. A noter qu’il n’imprime presque jamais. - Courriel: Il ne l’utilise presque pas. La phrase qui tue: « le courriel c’est pour les vieux » - Recherche sur Internet: il est capable de trouver tout ce dont il a besoin ce qui contredit certains experts qui décrivent les jeunes comme de mauvais utilisateurs des moteurs de recherche. Également dépendamment de ses besoins il ira soit sur Google, soit sur Wikipédia. - Commerce électronique: il est déjà un consommateur en ligne. Je suis obligé de sortir ma carte de crédit pour faire des achats pour lui sur Internet. - Sur le web: il est multi-tâche c’est à dire qu’il utilise plusieurs applications en même temps. Youtube pour les vidéos, son réseau social Chapatiz et Piczo plus MSN. Il passe de l’un à l’autre et communique en même temps avec plusieurs communautés. - Le portable: c’est l’outil le plus important avec le laptop. Le SMS est très utilisé. A noter que je suis impréssioné par la rapidité d’exécution parfois sans regarder l’écran, l’emplacement des touches est connu par coeur. - MSN: une des applications primordiales, plus de 105 amis, c’est la ligne directe avec sa communauté. J’ai remarqué aussi que l’écriture de style « langage chat » n’affecte pas l’écriture classique. Il fait très bien la différence. - Blogs: il utilise Piczo et blogger. Il est capable de tout configurer seul. Je ne suis jamais intervenu pour l’aider, tous les conseils viennent des amis. - Réseaux sociaux: Chapatiz et Piczo. Il choisi ceux où sont ses amis. Facebook est pour les « vieux » aussi. - Musique: il télécharge un peu de musique sur Limewire mais sans abuser. Je ne suis pas trop favorable mais je me rends compte aussi que l’industrie est dépassée.Touslesjeuneslefont.Jepense que la musique va devenir gratuite dans les prochaines années, d’ailleurs il me demande pourquoi la musique est gra-

tuite à la radio et sur Youtube. Que lui répondre? - Jeux vidéos: XBOX mais pas de façon addict. Il va s’ennuyer s’il ne joue pas avec des amis. Par contre World Of Warcraft est un must pour lui. On est dans le social gaming. - Cinéma: le grand écran reste toujours une sortie appréciée pour les nouveautés avec force son et effets spéciaux. - Télévision: les émissions sont triées sur le volet: match de hockey et de soccer live, émissions pour les jeunes ( Wrack TV ), reportages et documentaire ( Historia). La télé est un des écrans mais n’est plus le principal. - L’école: aucune attente en ce qui concerne les TIC. Pour lui les enseignants sont largués sur ce dossier. Il me dit parfois s’ennuyer, que c’est long, que l’école n’avance pas assez. Il apprécie quand même beaucoup la bibliothèque et la lecture. - Chicane: parfois lors de manipulation sur l’ordinateur, j’ai tendance à vouloir intervenir pour lui montrer mais il me rembarre en me disant que je suis lent. Il est dans le « je sais ». Il a raison car il comprend beaucoup plus rapidement les fonctionnements. Petit conflit de génération

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«CITATION»

« L’aliénation du spectateur au profit de l’objet contemplé (qui est le résultat de sa propre activité inconsciente) s’exprime ainsi : plus il contemple, moins il vit ; plus il accepte de se reconnaître dans les images dominantes du besoin, moins il comprend sa propre existence et son propre désir. L’extériorité du spectacle par rapport à l’homme agissant apparaît en ce que ses propres gestes ne sont plus à lui, mais à un autre qui les lui représente. C’est pourquoi le spectateur ne se sent chez lui nulle part, car le spectacle est partout. » Guy

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DEBORD

chap.

30

La

société

du

spectacle

1967

Décryptage Story On est en mars, c’est le matin, et j’arrive au terme d’une séance

de décryptage dans une classe de CM1 lorsqu’une jeune fille lève la main :

« Mais alors, c’est que des menteurs. », dit-elle.

On venait de passer une heure à essayer de comprendre comment était fabriquée une quotidienne de la star academy. Et cette remarque me confirma que j’avais atteint quelques-uns de mes objectifs. D’un autre côté, l’idée qu’elle puisse croire qu’il y ait des méchants et des gentils à la télévision m’agaçait un peu. Je me lançais donc dans le discours suivant afin de modérer ses ardeurs:

« Oui …mais non, tous le monde manipule à la télévision, après ce qu’il faut essayer de savoir c’est pourquoi ils font ce genre d’émission »

C’était peine perdue. L’idée que c’était « que des menteurs  » avait fait tilt dans la tête de cette jeune personne et malgré mon discours, je sentais bien que je venais de briser quelque chose dans son imaginaire et que ce n’était pas réparable pour l’instant. TEXTES : Julien PAUGAM

Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais divers et anecdotes médiatiques, peopolisation des invités, dont certains sont eux-mêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement. Mais le constat principal reste celui de la mise en œuvre de pratiques manipulatoires chronométrées, de la mise à bas de toute spontanéïté et sincérité, de la bêtification du public considéré comme un kleenex, flatté lorsqu’on en a besoin, parqué lorsque les caméras s’éteignent. Les vigiles sont des vigiles, les studios sont des studios, les lumières sont des lumières, les techniciens sont des techniciens, mais attention, le présentateur n’est pas un présentateur, les invités ne sont pas des invités, le public n’est pas un public et le chauffeur de salle n’est pas un chauffeur de salle.

13 Enregistrement d’une émission pour Canal+ Au cœur du processus d’industrialisation des jeux télévisés

Analyse

DECRYPTAGE STORY


«CITATION»

10

« [...] L’analyse sociologique se heurte souvent à un malentendu : ceux qui sont inscrits dans l’objet de l’analyse, dans le cas particulier des journalistes, ont tendance à penser que le travail d’énonciation, de dévoilement des mécanismes, est un travail de dénonciation, dirigé contre des personnes ou, comme on dit, des «attaques», des attaques personnelles, ad hominem (cela dit, si le sociologue disait ou écrivait le dixième de ce qu’il entend lorsqu’il parle avec des journalistes, sur les «ménages» par exemple, ou sur la fabrication — c’est bien le mot — des émissions, il serait dénoncé par les mêmes journalistes pour son partipris et son manque d’objectivité). Les gens, de façon générale, n’aiment guère être pris pour objet, objectivés, et les journalistes moins que les autres. Ils se sentent visés, épinglés, alors que, plus

Décryptage Story On est en mars, c’est le matin, et j’arrive au terme d’une séance

de décryptage dans une classe de CM1 lorsqu’une jeune fille lève la main :

« Mais alors, c’est que des menteurs. », dit-elle.

On venait de passer une heure à essayer de comprendre comment était fabriquée une quotidienne de la star academy. Et cette remarque me confirma que j’avais atteint quelques-uns de mes objectifs. D’un autre côté, l’idée qu’elle puisse croire qu’il y ait des méchants et des gentils à la télévision m’agaçait un peu. Je me lançais donc dans le discours suivant afin de modérer ses ardeurs:

« Oui …mais non, tous le monde manipule à la télévision, après ce qu’il faut essayer de savoir c’est pourquoi ils font ce genre d’émission »

on avance dans l’analyse d’un milieu, plus on est amené à dédouaner les individus de leur responsabilité, — ce qui ne veut pas dire qu’on justifie tout ce qui s’y passe —, et mieux on comprend comment ça fonctionne, plus on comprend aussi que les gens qui en participent sont manipulés autant que manipulateurs. Il manipulent même d’autant mieux, bien souvent, qu’ils sont eux-mêmes plus manipulés et plus inconscients de l’être. J’insiste sur ce point, tout en sachent que, malgré tout, ce que je dis sera perçu comme une critique ; réaction qui est aussi une manière de se défendre contre l’analyse. Je crois même que la dénonciation des scandales, des faits et des méfaits de tel ou tel présentateur, ou des salaires exorbitants de certains producteurs, peut contribuer à détourner de l’essentiel, dans la mesure où la

Je ramais jusqu’à la sonnerie, ne voulant pas la laisser s’enfermer dans le « Mais alors, c’est que des menteurs » : « il faut essayer de comprendre si on veut nous informer, nous divertir ou nous vendre des choses… » Vu la tête de la jeune fille à la sortie de la classe, j’avais dû ramer une bonne distance. Le fait d’avoir quelque peu détourner l’attention de certains d’entre eux de ce type de programme fut apparemment une satisfaction pour certains parents. En effet, peu de temps après cette intervention, un débat fut organisé dans le même cadre. Une maman (peut-être celle de la jeune fille) m’interrogea alors :

« Ah, c’est vous qui avez cassé le mythe de ma fille »,

C’était peine perdue.

souriait elle.

L’idée que c’était « que des menteurs  » avait fait tilt dans la tête de cette jeune personne et malgré mon discours, je sentais bien que je venais de briser quelque chose dans son imaginaire et que ce n’était pas réparable pour l’instant.

N’allez pas croire que les Pieds dans le PAF est une association de terroristes de la télévision, prête à tout pour embrigader nos chères têtes blondes dans une guerre contre le méchant vendeur de cerveaux disponibles. Non, c’est plus simple, la télévision est une construction, nous, nous la déconstruisons. Et il s’avère que

On est en mars, c’est le matin, et j’arrive au terme d’une séance de décryptage dans une classe de CM1 lorsqu’une jeune fille lève la main : « Mais alors, c’est que des menteurs. », dit-elle. On venait de passer une heure à essayer de comprendre comment était fabriquée une quotidienne de la star academy. Et cette remarque me confirma que j’avais atteint quelques-uns de mes objectifs. D’un autre côté, l’idée qu’elle puisse croire qu’il y ait des méchants et des gentils à la télévision m’agaçait un peu. Je me lançais donc dans le discours suivant afin de modérer ses ardeurs: « Oui …mais non, tous le monde manipule à la télévision, après ce qu’il faut essayer de savoir c’est pourquoi ils font ce genre d’émission » C’était peine perdue. L’idée que c’était « que des menteurs » avait fait tilt dans la tête de cette jeune personne et malgré mon discours, je sentais bien que je venais de briser quelque chose dans son imaginaire et que ce n’était pas réparable pour l’instant. Je ramais jusqu’à la sonnerie, ne voulant pas la laisser s’enfermer dans le « Mais alors, c’est que des menteurs »:

Les fins de saison sont, pour les techniciens de TF1, assez pénibles à raconter.

« il faut essayer de comprendre si on veut nous informer, nous divertir ou nous vendre des choses… » Vu la tête de la jeune fille à la sortie de la classe, j’avais dû ramer une bonne distance. Le fait d’avoir quelque peu détourner l’attention de certains d’entre eux de ce type de programme fut apparemment une satisfaction pour certains parents. En effet, peu de temps après cette intervention, un débat fut organisé dans le même cadre. Une maman (peut-être celle de la jeune fille) m’interrogea alors : « Ah, c’est vous qui avez cassé le mythe de ma fille », souriait elle. N’allez pas croire que les Pieds dans le PAF est une association de terroristes de la télévision, prête à tout pour embrigader nos chères têtes blondes dans une guerre contre le méchant vendeur de cerveaux disponibles. Non, c’est plus simple, la télévision est une construction, nous, nous la déconstruisons. Et il s’avère que cela provoque régulièrement de vives réactions parce qu’elle est ancrée dans notre quotidien et qu’elle rythme de nombreuses vies.

13 Enregistrement d’une émission pour Canal+ Au cœur du processus d’industrialisation des jeux télévisés

Analyse

cela provoque régulièrement de vives réactions parce qu’elle est ancrée dans notre quotidien et qu’elle rythme de nombreuses vies. Dans le cas présent, voici comment j’ai procédé pour le décryptage de cette quotidienne. La star academy, vous savez, c’est cette émission où une dizaine de candidats est enfermée dans un château avec plein de caméras partout. Ils doivent s’entraîner à devenir des stars pendant que le public les observe et les élimine à coup de SMS. Une quotidienne de la star academy, c’est un résumé d’environ vingt minutes de la journée qu’ils viennent de passer. Il y en a donc toute la semaine jusqu’au vendredi soir plus le show de 21h en direct autrement appelé : « le prime ». Le gagnant est le dernier à ne pas s’être pas fait éliminer. Pour faire un décryptage de cette émission, lorsque je m’adresse à des enfants, je choisis généralement une quotidienne de fin de saison.

DECRYPTAGE STORY


juxtaposition et superposition d’éléments aux formes différentes et disparates (comme les textes)

« [...] L’analyse sociologique se heurte souvent à un malentendu :

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ceux qui sont inscrits dans l’objet de l’analyse, dans le cas particulier des journalistes, ont tendance à penser que le travail d’énonciation, de dévoilement des mécanismes, est un travail de dénonciation, dirigé contre des personnes ou, comme on dit, des «attaques», des attaques personnelles, ad hominem (cela dit, si le sociologue disait ou écrivait le dixième de ce qu’il entend lorsqu’il parle avec des journalistes, sur les «ménages» par exemple, ou sur la fabrication — c’est bien le mot — des émissions, il serait dénoncé par les mêmes journalistes pour son parti-pris et son manque d’objectivité). Les gens, de façon générale, n’aiment guère être pris pour objet, objectivés, et les journalistes moins que les autres. Ils se sentent visés, épinglés, alors que, plus on avance dans l’analyse d’un milieu, plus on est amené à dédouaner les individus de leur responsabilité, — ce qui ne veut pas

dire qu’on justifie tout ce qui s’y passe —, et mieux on comprend comment ça fonctionne, plus on comprend aussi que les gens qui en participent sont manipulés autant que manipulateurs. Il manipulent même d’autant mieux, bien souvent, qu’ils sont eux-mêmes plus manipulés et plus inconscients de l’être. J’insiste sur ce point, tout en sachent que, malgré tout, ce que je dis sera perçu comme une critique ; réaction qui est aussi une manière de se défendre contre l’analyse. Je crois même que la dénonciation des scandales, des faits et des méfaits de tel ou tel présentateur, ou des salaires exorbitants de certains producteurs, peut contribuer à détourner de l’essentiel, dans la mesure où la corruption des personnes masque cette sorte de corruption structurelle (mais faut-il encore parler de cette corruption ?) qui s’exerce sur l’ensemble du jeu à travers des mécanismes tels que la concurrence pour les parts de marché, que je veux essayer d’analyser. Je voudrais donc démonter une série de mécanismes qui font que la télévision exerce une forme particulièrement pernicieuse de violence symbolique. La violence symbolique est une violence qui s’exerce avec la complicité tacite de ceux qui la subissent et aussi, souvent, de ceux qui l’exercent dans la mesure où les uns et les autres sont inconscients de l’exercer ou de la subir. La sociologie, comme toute les sciences, a pour fonction de dévoiler des choses cachées ; ce faisant, elle peut contribuer à minimiser la violence symbolique qui s’exerce dans les rapports sociaux et en particulier dans les rapports de communication médiatique. »

Pierre BOURDIEU Sur la télévision Editions LIBER raisons d’agir décembre 1996

TOTAL ECRAN

« [...] L’analyse sociologique se heurte souvent à un malentendu : ceux qui

sont inscrits dans l’objet de l’analyse, dans le cas particulier des journalistes, ont tendance à penser que le travail d’énonciation, de dévoilement des mécanismes, est un travail de dénonciation, dirigé contre des personnes ou, comme on dit, des «attaques», des attaques personnelles, ad hominem (cela dit, si le sociologue disait ou écrivait le dixième de ce qu’il entend lorsqu’il parle avec des journalistes, sur les «ménages» par exemple, ou sur la fabrication — c’est bien le mot — des émissions, il serait dénoncé par les mêmes journalistes pour son parti-pris et son manque d’objectivité). Les gens, de façon générale, n’aiment guère être pris pour objet, objectivés, et les journalistes moins que les autres. Ils se sentent visés, épinglés, alors que, plus on avance dans l’analyse d’un milieu, plus on est amené à dédouaner les individus de leur responsabilité, — ce qui ne veut pas dire qu’on justifie tout ce qui s’y passe —, et mieux on comprend comment ça fonctionne, plus on comprend aussi que les gens qui en participent sont manipulés autant que manipulateurs.

Il manipulent même d’autant mieux, bien souvent, qu’ils sont eux-mêmes plus manipulés et plus inconscients de l’être.

MÉDIA Analyse

J’insiste sur ce point, tout en sachent que, malgré tout, ce que je dis sera perçu comme une critique ; réaction qui est aussi une manière de se défendre contre l’analyse

...

Pierre BOURDIEU Sur la télévision Editions LIBER raisons d’agir décembre 1996

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« [...] L’analyse sociologique se heurte souvent à un malentendu :

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ceux qui sont inscrits dans l’objet de l’analyse, dans le cas particulier des journalistes, ont tendance à penser que le travail d’énonciation, de dévoilement des mécanismes, est un travail de dénonciation, dirigé contre des personnes ou, comme on dit, des «attaques», des attaques personnelles, ad hominem (cela dit, si le sociologue disait ou écrivait le dixième de ce qu’il entend lorsqu’il parle avec des journalistes, sur les «ménages» par exemple, ou sur la fabrication — c’est bien le mot — des émissions, il serait dénoncé par les mêmes journalistes pour son parti-pris et son manque d’objectivité). Les gens, de façon générale, n’aiment guère être pris pour objet, objectivés, et les journalistes moins que les autres. Ils se sentent visés, épinglés, alors que, plus on avance dans l’analyse d’un milieu, plus on est amené à dédouaner les individus de leur responsabilité, — ce qui ne veut pas

dire qu’on justifie tout ce qui s’y passe —, et mieux on comprend comment ça fonctionne, plus on comprend aussi que les gens qui en participent sont manipulés autant que manipulateurs. Il manipulent même d’autant mieux, bien souvent, qu’ils sont eux-mêmes plus manipulés et plus inconscients de l’être. J’insiste sur ce point, tout en sachent que, malgré tout, ce que je dis sera perçu comme une critique ; réaction qui est aussi une manière de se défendre contre l’analyse. Je crois même que la dénonciation des scandales, des faits et des méfaits de tel ou tel présentateur, ou des salaires exorbitants de certains producteurs, peut contribuer à détourner de l’essentiel, dans la mesure où la corruption des personnes masque cette sorte de corruption structurelle (mais faut-il encore parler de cette corruption ?) qui s’exerce sur l’ensemble du jeu à travers des mécanismes tels que la concurrence pour les parts de marché, que je veux essayer d’analyser. Je voudrais donc démonter une série de mécanismes qui font que la télévision exerce une forme particulièrement pernicieuse de violence symbolique. La violence symbolique est une violence qui s’exerce avec la complicité tacite de ceux qui la subissent et aussi, souvent, de ceux qui l’exercent dans la mesure où les uns et les autres sont inconscients de l’exercer ou de la subir. La sociologie, comme toute les sciences, a pour fonction de dévoiler des choses cachées ; ce faisant, elle peut contribuer à minimiser la violence symbolique qui s’exerce dans les rapports sociaux et en particulier dans les rapports de communication médiatique. »

« [...] Le mot kitsch désigne l’attitude de celui qui veut plaire à tout prix et au plus grand nombre. Pour plaire, il faut confirmer ce que tout le monde veut entendre, être au service des idées reçues. Le kitsch, c’est la traduction de la bétise des idées reçues dans le langage de la beauté et de l’émotion... Vu la nécessité impérative de plaire et de gagner ainsi l’attention du plus grand nombre, l’esthétique des mass média embrassent et infiltrent toute notre vie, le kitsch devient notre esthétique et notre morale quotidienne. »

Milan KUNDERA Discours prononcé lors de la remise du prix Jerusalem 1985

Pierre BOURDIEU Sur la télévision Editions LIBER raisons d’agir décembre 1996

« [...] L’analyse sociologique se heurte souvent à un malentendu : ceux qui

sont inscrits dans l’objet de l’analyse, dans le cas particulier des journalistes, ont tendance à penser que le travail d’énonciation, de dévoilement des mécanismes, est un travail de dénonciation, dirigé contre des personnes ou, comme on dit, des «attaques», des attaques personnelles, ad hominem (cela dit, si le sociologue disait ou écrivait le dixième de ce qu’il entend lorsqu’il parle avec des journalistes, sur les «ménages» par exemple, ou sur la fabrication — c’est bien le mot — des émissions, il serait dénoncé par les mêmes journalistes pour son parti-pris et son manque d’objectivité). Les gens, de façon générale, n’aiment guère être pris pour objet, objectivés, et les journalistes moins que les autres. Ils se sentent visés, épinglés, alors que, plus on avance dans l’analyse d’un milieu, plus on est amené à dédouaner les individus de leur responsabilité, — ce qui ne veut pas dire qu’on justifie tout ce qui s’y passe —, et mieux on comprend comment ça fonctionne, plus on comprend aussi que les gens qui en participent sont manipulés autant que manipulateurs.

Il manipulent même d’autant mieux, bien souvent, qu’ils sont eux-mêmes plus manipulés et plus inconscients de l’être. J’insiste sur ce point, tout en sachent que, malgré tout, ce que je dis sera perçu

MÉDIA Analyse

TOTAL ECRAN

comme une critique ; réaction qui est aussi une manière de se défendre contre l’analyse  Je crois même que la dénonciation des scandales, des faits et des méfaits de tel ou tel présentateur, ou des salaires exorbitants de certains producteurs, peut contribuer à détourner de l’essentiel, dans la mesure où la corruption des personnes masque cette sorte de corruption structurelle (mais faut-il encore parler de cette corruption ?) qui s’exerce sur l’ensemble du jeu à travers des mécanismes tels que la concurrence pour les parts de marché, que je veux essayer d’analyser. Jevoudraisdoncdémonterunesériedemécanismesquifontquelatélévisionexerce une forme particulièrement pernicieuse de violence symbolique.

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La violence symbolique est une violence qui s’exerce avec la complicité tacite de ceux qui la subissent et aussi, souvent, de ceux qui l’exercent dans la mesure où les uns et les autres sont inconscients de l’exercer ou de la subir. La sociologie, comme toute les sciences, a pour fonction de dévoiler des choses cachées ; ce faisant, elle peut contribuer à minimiser la violence symbolique qui s’exerce dans les rapports sociaux et en particulier dans les rapports de communication médiatique. »

Pierre BOURDIEU Sur la télévision Editions LIBER raisons d’agir décembre 1996

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Les « digital natives »

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Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition :

« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le passage de la cassette audio au CD, de la cassette vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas migré, tout était là. Bien sûr tout le monde les scrute à la loupe et se demande comment ils vont fonctionner dans l’avenir. En tête les entreprises qui se questionnent sur les impacts de leur arrivée dans quelques années sur le marché du travail. Mais le phénomène va bien au-delà: sociologues, anthropologues, hommes politiques, scientifiques, enseignants, historiens découvrent que ces enfants font partie de la première génération qui est capable d’apprendre des choses aux générations précédentes.

Reprise du «slash» : Elément informatique emblématique

« [...] Le mot kitsch désigne l’attitude de celui qui veut plaire à tout prix et au plus grand nombre. Pour plaire, il faut confirmer ce que tout le monde veut entendre, être au service des idées reçues. Le kitsch, c’est la traduction de la bétise des idées reçues dans le langage de la beauté et de l’émotion... Vu la nécessité impérative de plaire et de gagner ainsi l’attention du plus grand nombre, l’esthétique des mass média embrassent et infiltrent toute notre vie, le kitsch devient notre esthétique et notre morale quotidienne. »

la génération multi-écrans

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« Le mot Kitsch ...»

Milan KUNDERA Discours prononcé lors de la remise du prix Jerusalem 1985

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Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition :

« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le passage de la cassette audio au CD, de la cassette vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas

Les « digital natives »

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migré, tout était là. Bien sûr tout le monde les scrute à la loupe et se demande comment ils vont fonctionner dans l’avenir. En tête les entreprises qui se questionnent sur les impacts de leur arrivée dans quelques années sur le marché du travail. Mais le phénomène va bien au-delà: sociologues, anthropologues, hommes politiques, scientifiques, enseignants, historiens découvrent que ces enfants font partie de la première génération qui est capable d’apprendre des choses ...

« [...] Le mot kitsch désigne l’attitude de celui qui veut plaire à tout prix et au plus grand nombre. Pour plaire, il faut confirmer ce que tout le monde veut entendre, être au service des idées reçues. Le kitsch, c’est la traduction de la bétise des idées reçues dans le langage de la beauté et de l’émotion... Vu la nécessité impérative de plaire et de gagner ainsi l’attention du plus grand nombre, l’esthétique des mass média embrassent et infiltrent toute notre vie, le kitsch devient notre esthétique et notre morale quotidienne. »

Une des conférences du récent Webcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition :

« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le passage de la cassette audio au CD, de la cassette vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas migré, tout était là. Bien sûr tout le monde les scrute à la loupe et se demande comment ils vont fonctionner dans l’avenir. En tête les entreprises qui se questionnent sur les impacts de leur arrivée dans quelques années sur le marché du travail. Mais le phénomène va bien au-delà: sociologues, anthropologues, hommes politiques, scientifiques, enseignants, historiens découvrent que ces enfants font partie de la première génération qui est capable d’apprendre des choses ...

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« Le mot Kitsch ...»

Milan KUNDERA Discours prononcé lors de la remise du prix Jerusalem 1985

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la génération multi-écrans

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«

L’aliénation du spectateur au profit de l’objet contemplé (qui est le résultat de sa propre activité inconsciente) s’exprime ainsi : plus il contemple, moins il vit ; plus il accepte de se reconnaître dans les images dominantes du besoin, moins il comprend sa propre existence et son propre désir. L’extériorité du spectacle par rapport à l’homme agissant apparaît en ce que ses propres gestes ne sont plus à lui, mais à un autre qui les lui représente. C’est pourquoi le spectateur ne se sent chez lui nulle part, car le spectacle est partout. »

Guy DEBORD chap. 30 La société du spectacle 1967

idée : Entremelement, JUXTAPOSITION, création «d’écran hybride»

« Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations.

Pourquoi la télévision n’informe pas

Analyse

13


Pourquoi la télévision n’informe pas « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme

Analyse

dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité. Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité.

13


Attention, trop de compléxité dans la composition renvoie à l’univers du «magazine»

Le caractère fondamentalement tautologiqueduspectacledécoule du simple fait que ses moyens sont en même temps son but. Il est le soleil qui ne se couche jamais sur l’empire de la passi-

M DI E A-

MEDIA

REPRISE DE LA NOTION DE FRAGMENTATION

vité moderne. Il recouvre

toute la surface du mondeetbaigne indéfiniment dans sa propre gloire.

13 Variété possibles de mises en pages

Le caractère fondamentalement tautologique duspectacle découle du simple fait que ses moyens sont en même temps son but. Il est le soleil qui ne se couche jamais sur l’empire de la passivitémoderne.Ilrecouvretoute la surface du monde et baigne indéfiniment dans sa propre gloire.

22 Analyse


O INRF A- S P UE TIQ Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais divers et anecdotes médiatiques, peopolisation des invités, dont certains sont eux-mêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement. Mais le constat principal reste celui de la mise en œuvre de pratiques manipulatoires chronométrées, de la mise à bas de toute spontanéïté et sincérité, de la bêtification du public considéré comme un kleenex, flatté lorsqu’on en a besoin, parqué lorsque les caméras s’éteignent.

Enregistrement d’une émission pour Canal+ Au cœur du processus d’industrialisation des jeux télévisés

Les vigiles sont des vigiles, les studios sont des studios, les lumières sont des lumières, les techniciens sont des techniciens, mais attention, le présentateur n’est pas un présentateur, les invités ne sont pas des invités, le public n’est pas un public et le chauffeur de salle n’est pas un chauffeur de salle. Toutes ces personnes, qui parfois aiment, mangent, pleurent ou sont malades, sont des avatars, pièces absolument calibrées, drivées, briefées, clones hagards et consentants de citoyens qui, d’ordinaire, sont censés réfléchir avant de mettre un bulletin dans l’urne. Troispersonnagessontemblématiquesdecettedécérébration collective : le chauffeur de salle, le présentateur et le stéphanebern.

EXEMPLES POSSIBLES DE COUVERTURE

ECRAN TOTAL ECRAN TOTAL

ECRAN TOTAL Analyse


O INRF A- S P UE TIQ Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais divers et anecdotes médiatiques, peopolisation des invités, dont certains sont eux-mêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement.

Mais le constat principal reste celui de la mise en œuvre de pratiques manipulatoires chronométrées, de la mise à bas de toute spontanéïté et sincérité, de la bêtification du public considéré

Au cœur du processus d’industrialisation des jeux télévisés

Trois personnages sont emblématiques de cette décérébration collective : le chauffeur de salle, le présentateur et le stéphanebern. Le chauffeur de salle moque gentiment le public qu’il est chargé de faire réagir à certains moments donnés et pas à d’autres. Voilà, tout est dit. Ce qui reste, ce sont des vannes faciles, un appel à la coolitude, l’incantation que ce jeu « est vraiment sympa, non ? » et une permanente exhortation à « faire le plus de bruit possible », sur ordre. La fausse spontanéité millimétrée du public pour saluer les bonnes réponses du jeu, les saillies humoristiques des invités ou les scores abscons, c’est le vrai naufrage de la télévision, comme le big-mac est le naufrage de l’industrie de l’alimentation, le paradoxe du triomphe de l’indécence du produit le mieux fini de la chaîne. Et lorsque le chauffeur de salle, entre deux enregistrements, fait « jouer » certains spectateurs à prendre les places des invités et du présentateur, ce sera l’acmée de la soumission du public, entrepenant d’applaudir un simulacre bis ou un simulacre au carré, c’est selon. Pour les misérables spectateurs-acteurs, alors, le fait de perdre au jeu du ni oui - ni non, sera simplement un rappel à plus d’humilité dans leurs critiques adressées à ceux qui perdent dans le vrai simulacre.

MEDIA

comme un kleenex, flatté lorsqu’on en a besoin, parqué lorsque les caméras s’éteignent. Les vigiles sont des vigiles, les studios sont des studios, les lumières sont des lumières, les techniciens sont des techniciens, mais attention, le présentateur n’est pas un présentateur, les invités ne sont pas des invités, le public n’est pas un public et le chauffeur de salle n’est pas un chauffeur de salle. Toutes ces personnes, qui parfois aiment, mangent, pleurent ou sont malades, sont des avatars, pièces absolument calibrées, drivées, briefées, clones hagards et consentants de citoyens qui, d’ordinaire, sont censés réfléchir avant de mettre un bulletin dans l’urne.

Enregistrement d’une émission pour Canal+

Le caractère fondamentalement tautologiqueduspectacledécouledu simple fait que ses moyens sont en même temps son but. Il est le soleil qui ne se couche jamais sur l’empire de la passivité moderne. Il recouvre toute la surface du monde et baigne indéfiniment dans sa propre gloire.

13 Analyse


Guy DEBORD

On est en mars, c’est le matin, et j’arrive au

terme d’une séance de décryptage dans une classe de CM1 lorsqu’une jeune fille lève la main : « Mais alors, c’est que des menteurs. », dit-elle.

On venait de passer une heure à essayer de comprendre comment était fabriquée une quotidienne de la star academy. Et cette remarque me confirma que j’avais atteint quelques-uns de mes objectifs. D’un autre côté, l’idée qu’elle puisse croire qu’il y ait des méchants et des gentils à la télévision m’agaçait un peu. Je me lançais donc dans le discours suivant afin de modérer ses ardeurs: « Oui …mais non, tous le monde manipule à la télévision, après ce qu’il faut essayer de savoir c’est pourquoi ils font ce genre d’émission » C’était peine perdue. L’idée que c’était « que des menteurs » avait fait tilt dans la tête de cette jeune personne et malgré mon discours, je sentais bien que je venais de briser quelque chose dans son imaginaire et que ce n’était pas réparable pour l’instant. Je ramais jusqu’à la sonnerie, ne voulant pas la laisser s’enfermer dans le « Mais alors, c’est que des menteurs »: « il faut essayer de comprendre si on veut nous informer, nous divertir ou nous vendre des choses… » Vu la tête de la jeune fille à la sortie de la classe, j’avais dû ramer une bonne distance.

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Guy DEBORD

Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais divers et anecdotes médiatiques, peopolisation des invités, dont certains sont eux-mêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement. Mais le constat principal reste celui de la mise en œuvre de pratiques manipulatoires chronométrées, de la mise à bas de toute spontanéïté et sincérité, de la bêtification du public considéré comme un kleenex, flatté lorsqu’on en a besoin, parqué lorsque les caméras s’éteignent.

Les vigiles sont des vigiles, les studios sont des studios, les lumières sont des lumières, les techniciens sont des techniciens, mais attention, le présentateur n’est pas un présentateur, les invités ne sont pas des invités, le public n’est pas un public et le chauffeur de salle n’est pas un chauffeur de salle. Toutes ces personnes, qui parfois aiment, mangent, pleurent ou sont malades, sont des avatars, pièces absolument calibrées, drivées, briefées, clones hagards et consentants de citoyens qui, d’ordinaire, sont censés réfléchir avant de mettre un bulletin dans l’urne. Troispersonnagessontemblématiquesdecettedécérébration collective : le chauffeur de salle, le présentateur et le stéphanebern. Le chauffeur de salle moque gentiment le public qu’il est chargé de faire réagir à certains moments donnés et pas à d’autres. Voilà, tout est dit. Ce qui reste, ce sont des vannes faciles, un appel à la coolitude, l’incantation que ce jeu « est vraiment sympa, non ? »

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Analyse


Pourquoi la télévision n’informe pas « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle

« Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du

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complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même sys-

tème et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu.

serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins

Rapport texte / images

« [...] L’analyse sociologique ... ... se heurte souvent à un malen-

tendu : ceux qui sont inscrits dans l’objet de l’analyse, dans le cas particulier des journalistes, ont tendance à penser que le travail d’énonciation, de dévoilement des mécanismes, est un travail de dénonciation, dirigé contre des personnes ou, comme on dit, des «attaques», des attaques personnelles, ad hominem (cela dit, si le sociologue disait ou écrivait le dixième de ce qu’il entend lorsqu’il parle avec des journalistes, sur les «ménages» par exemple, ou sur la fabrication — c’est bien le mot — des émissions, il serait dénoncé par les mêmes journalistes pour son partipris et son manque d’objectivité). Les gens, de façon générale, n’aiment guère être pris pour objet, objectivés, et les journalistes moins que les autres. Ils se sentent visés, épinglés, alors que, plus on avance dans l’analyse d’un milieu, plus on est amené à dédouaner les individus de leur responsabilité, — ce qui ne veut pas dire qu’on justifie tout ce qui s’y passe —, et mieux on comprend comment ça

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fonctionne, plus on comprend aussi que les gens qui en participent sont manipulés autant que manipulateurs. Il manipulent même d’autant mieux, bien souvent, qu’ils sont eux-mêmes plus manipulés et plus inconscients de l’être. J’insiste sur ce point, tout en sachent que, malgré tout, ce que je dis sera perçu comme une critique ; réaction qui est aussi une manière de se défendre contre l’analyse. Je crois même que la dénonciation des scandales, des faits et des méfaits de tel ou tel présentateur, ou des salaires exorbitants de certains producteurs, peut contribuer à détourner de l’essentiel, dans la mesure où la corruption des personnes masque cette sorte de corruption structurelle (mais faut-il encore parler de cette corruption ?) qui s’exerce sur l’ensemble du jeu à travers des mécanismes tels que la concurrence pour les parts de marché, que je veux essayer d’analyser. Je voudrais donc démonter une série de mécanismes qui font que la télévision exerce une forme parti-

culièrement pernicieuse de violence symbolique. La violence symbolique est une violence qui s’exerce avec la complicité tacite de ceux qui la subissent et aussi, souvent, de ceux qui l’exercent dans la mesure où les uns et les autres sont inconscients de l’exercer ou de la subir. La sociologie, comme toute les sciences, a pour fonction de dévoiler des choses cachées ; ce faisant, elle peut contribuer à minimiser la violence symbolique qui s’exerce dans les rapports sociaux et en particulier dans les rapports de communication médiatique.

»

Pierre BOURDIEU Sur la télévision Editions LIBER raisons d’agir décembre 1996

« Le caractère fondamentalement tautologique du spectacle découle du simple fait que ses moyens sont en même temps son but. Il est le soleil qui ne se couche jamais sur l’empire de la passivité moderne. Il recouvre toute la surface du monde et baigne indéfiniment dans sa propre gloire. » Guy DEBORD chap. 13 La société du spectacle 1967

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Rapport texte / texte


DECRYPTAGE STORY Julien PAUGAM Animateur au sein de l’association 44 Pieds dans le PAF.

On est en mars, c’est le matin, et j’arrive au terme d’une séance de décryptage dans une classe de CM1 lorsqu’une jeune fille lève la main : « Mais alors, c’est que des menteurs. », dit-elle.

On venait de passer une heure à essayer de comprendre comment était fabriquée une quotidienne de la star academy. Et cette remarque me confirma que j’avais atteint quelques-uns de mes objectifs. D’un autre côté, l’idée qu’elle puisse croire qu’il y ait des méchants et des gentils à la télévision m’agaçait un peu. Je me lançais donc dans le discours suivant afin de modérer ses ardeurs: « Oui …mais non, tous le monde manipule à la télévision, après ce qu’il faut essayer de savoir c’est pourquoi ils font ce genre d’émission » C’était peine perdue. L’idée que c’était « que des menteurs » avait fait tilt dans la tête de cette jeune personne et malgré mon discours, je sentais bien que je venais de briser quelque chose dans son imaginaire et que ce n’était pas réparable pour l’instant. Je ramais jusqu’à la sonnerie, ne voulant pas la laisser s’enfermer dans le « Mais alors, c’est que des menteurs »: « il faut essayer de comprendre si on veut nous informer, nous divertir ou nous vendre des choses… »

Vu la tête de la jeune fille à la sortie de la classe, j’avais dû ramer une bonne distance.

Le fait d’avoir quelque peu détourner l’attention de certains d’entre eux de ce type de programme

fut apparemment une satisfaction pour certains parents. En effet, peu de temps après cette intervention, un débat fut organisé dans le même cadre. Une maman (peut-être celle de la jeune fille) m’interrogea alors : « Ah, c’est vous qui avez cassé le mythe de ma fille », souriait elle. N’allez pas croire que les Pieds dans le PAF est une association de terroristes de la télévision, prête à tout pour embrigader nos chères têtes blondes dans une guerre contre le méchant vendeur de cerveaux disponibles. Non, c’est plus simple, la télévision est une construction, nous, nous la déconstruisons. Et il s’avère que cela provoque régulièrement de vives réactions parce qu’elle est ancrée dans notre quotidien et qu’elle rythme de nombreuses vies.

Dans le cas présent, voici comment j’ai procédé pour le décryptage de cette quotidienne.

La star academy, vous savez, c’est cette émission où une dizaine de candidats est enfermée dans un château avec plein de caméras partout. Ils doivent s’entraîner à devenir des stars pendant que le public les observe et les élimine à coup de SMS. Une quotidienne de la star academy, c’est un résumé d’environ vingt minutes de la journée qu’ils viennent de passer. Il y en a donc toute la semaine jusqu’au vendredi soir plus le show de 21h en direct autrement appelé : « le prime ». Le gagnant est le dernier à ne pas s’être pas fait éliminer. Pour faire un décryptage de cette émission, lorsque je m’adresse à des enfants, je choisis généralement une quotidienne de fin de saison. Les fins de saison sont, pour les techniciens de TF1, assez pénibles à raconter.

Référence aux écrans avec les carrés et rectangles

ECRAN TOTAL

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idée : EMPLIR les pages au maximum et jouer sur les formes (bloc rectangulaires), juxtaposition, transpositions et union ... Couvertures ...

Analyse


Enregistrement d’une émission pour Canal+ Au cœur du processus d’industrialisation des jeux télévisés

Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais divers et anecdotes médiatiques, peopolisation des invités, dont certains sont euxmêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement. Mais le constat principal reste celui de la mise en œuvre de pratiques manipulatoires chronométrées, de la mise à bas de toute spontanéïté et sincérité, de la bêtification du public considéré comme un kleenex, flatté lorsqu’on en a besoin, parqué lorsque les caméras s’éteignent. Les vigiles sont des vigiles, les studios sont des studios, les lumières sont des lumières, les techniciens sont des techniciens, mais attention, le présentateur n’est pas un présentateur, les invités ne sont pas des invités, le public n’est pas un public et le chauffeur de salle n’est pas un chauffeur de salle. Toutes ces personnes, qui parfois aiment, mangent, pleurentousontmalades,sontdesavatars,piècesabsolumentcalibrées, drivées, briefées, clones hagards et consentants de citoyens qui, d’ordinaire, sont censés réfléchir avant de mettre un bulletin dans l’urne. Trois personnages sont emblématiques de cette décérébration collective : le chauffeur de salle, le présentateur et le stéphanebern. Le chauffeur de salle moque gentiment le public qu’il est chargé de faire réagir à certains moments donnés et pas à d’autres. Voilà, tout est dit. Ce qui reste, ce sont des vannes faciles, un appel à la coolitude, l’incantation que ce jeu « est vraiment sympa, non ? »

Analyse

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Enregistrement d’une émission pour Canal+ Au cœur du processus d’industrialisation des jeux télévisés

Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais divers et anecdotes médiatiques, peopolisation des invités, dont certains sont euxmêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement. Mais le constat principal reste celui de la mise en œuvre de pratiques manipulatoires chronométrées, de la mise à bas de toute spontanéïté et sincérité, de la bêtification du public considéré comme un kleenex, flatté lorsqu’on en a besoin, parqué lorsque les caméras s’éteignent.

Et lorsque le chauffeur de salle, entre deux enregistrements, fait « jouer » certains spectateurs à prendre les places des invités et du présentateur, ce sera l’acmée de la soumission du public, entrepenant d’applaudir un simulacre bis ou un simulacre au carré, c’est selon. Pour les misérables spectateurs-acteurs, alors, le fait de perdre au jeu du ni oui - ni non, sera simplement un rappel à plus d’humilité dans leurs critiques adressées à ceux qui perdent dans le vrai simulacre.

Les vigiles sont des vigiles, les studios sont des studios, les lumières sont des lumières, les techniciens sont des techniciens, mais attention, le présentateur n’est pas un présentateur, les invités ne sont pas des invités, le public n’est pas un public et le chauffeur de salle n’est pas un chauffeur de salle. Toutes ces personnes, qui parfois aiment, mangent, pleurentousontmalades,sontdesavatars,piècesabsolumentcalibrées, drivées, briefées, clones hagards et consentants de citoyens qui, d’ordinaire, sont censés réfléchir avant de mettre un bulletin dans l’urne.

Il sait que ce n’est que l’ingrédient visuel et sonore sur lequel il s’appuie, techniquement, pour rythmer ses interventions. Il sourit faussement, il pose de fausses-vraies questions aux faux-invités/vrais-employés, il joue la carte du consensus permanent à coup de fausses indignations et de faux rires en réaction à de fausses blagues spontanées. Le stéphanebern est emblématique de cette vaste supercherie télévisuelle qui voit des présentateurs devenir producteurs, puis écrivains, puis acteurs, puis chanteur, puis invité permanent de toute une série d’émissions dont il aurait pu être le présentateur et dans lesquelles il vante ses propres vertus. En boucle donc tourne le spectacle d’invités qui s’exonèreront de leur permanence sur les écrans, au mieux par exemple par une saillie politiquement correcte contre l’homophobie dans le foot — au pire par une répétition sans fin des mêmes phrases courtes, auxquelles ils font semblant de croire — on pense là aux invités politiques.

Trois personnages sont emblématiques de cette décérébration collective : le chauffeur de salle, le présentateur et le stéphanebern. Le chauffeur de salle moque gentiment le public qu’il est chargé de faire réagir à certains moments donnés et pas à d’autres. Voilà, tout est dit. Ce qui reste, ce sont des vannes faciles, un appel à la coolitude, l’incantation que ce jeu « est vraiment sympa, non ? »

Analyse

Et une permanente exhortation à « faire le plus de bruit possible », sur ordre. La fausse spontanéité millimétrée du public pour saluer les bonnes réponses du jeu, les saillies humoristiques des invités ou les scores abscons, c’est le vrai naufrage de la télévision, comme le big-mac est le naufrage de l’industrie de l’alimentation, le paradoxe du triomphe de l’indécence du produit le mieux fini de la chaîne.

Le présentateur, lui, n’a aucune espèce d’empathie avec le public.

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ENGAGER UNE SIGNALETIQUE :

parcours et rappel de toutes fonctions possibles sur les incrans et en informatique. MULTIPLES DIRECTIONS

« [...]

L’analyse sociologique se heurte souvent à un malentendu : ceux qui sont inscrits dans l’objet de l’analyse, dans le cas particulier des journalistes, ont tendance à penser que le travail d’énonciation, de dévoilement des mécanismes, est un travail de dénonciation, dirigé contre des personnes ou, comme on dit, des «attaques»,desattaquespersonnelles, ad hominem (cela dit, si le sociologue disait ou écrivait le dixième de ce qu’il entend lorsqu’il parle avec des journalistes, sur les «ménages» par exemple, ou sur la fabrication — c’est bien le mot — des émissions, il serait dénoncé par les mêmes journalistes pour son parti-pris et son manque d’objectivité). Les gens, de façon générale, n’aiment guère être pris pour objet, objectivés, et les journalistes moins que les autres. Ils se sentent

Enregistrement d’une émission pour Canal+ Au cœur du processus d’industrialisation des jeux télévisés

Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais divers et anecdotes médiatiques, peopolisation des invités, dont certains sont eux-mêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement. Mais le constat principal reste celui de la mise en œuvre de pratiques manipulatoires chronométrées, de la mise à bas de toute spontanéïté et sincérité, de la bêtification du public considéré comme un kleenex, flatté lorsqu’on en a besoin, parqué lorsque les caméras s’étei-

REFERENCE AU MAGAZINE CITIZEN K

Analyse

gnent. Les vigiles sont des vigiles, les studios sont des studios, les lumières sont des lumières, les techniciens sont des techniciens, mais attention, le présentateur n’est pas un présentateur, les invités ne sont pas des invités, le public n’est pas un public et le chauffeur de salle n’est pas un chauffeur de salle. Toutes ces personnes, qui parfois aiment, mangent, pleurent ou sont malades, sont des avatars, pièces absolument calibrées, drivées, briefées, clones hagards et consentants de citoyens qui, d’ordinaire, sont censés réfléchir avant de mettre un bulletin dans l’urne. Trois personnages sont emblématiques de cette décérébration collective : le chauffeur de salle, le présentateur et le stéphanebern. Le chauffeur de salle moque gentiment le public qu’il est chargé de faire réagir à certains moments donnés et pas à d’autres. Voilà, tout est dit. Ce qui reste, ce sont des

vannes faciles, un appel à la coolitude, l’incantation que ce jeu « est vraiment sympa, non ? » et une permanente exhortation à « faire le plus de bruit possible », sur ordre. La fausse spontanéité millimétrée du public pour saluer les bonnes réponses du jeu, les saillies humoristiques des invités ou les scores abscons, c’est le vrai naufrage de la télévision, comme le big-mac est le naufrage de l’industrie de l’alimentation, le paradoxe du triomphe de l’indécence du produit le mieux fini de la chaîne. Et lorsque le chauffeur de salle, entre deux enregistrements, fait « jouer » certains spectateurs à prendre les places des invités et du présentateur, ce sera l’acmée de la soumission du public, entrepenant d’applaudir un simulacre bis ou un simulacre au carré, c’est selon. Pour les misérables spectateurs-acteurs, alors, le fait de perdre au jeu du ni oui - ni non, sera simplement un rappel à plus d’humilité dans leurs critiques

adressées à ceux qui perdent dans le vrai simulacre. Le présentateur, lui, n’a aucune espèce d’empathie avec le public. Il sait que ce n’est que l’ingrédient visuel et sonore sur lequel il s’appuie, techniquement, pour rythmer ses interventions. Il sourit faussement, il pose de fausses-vraies questions aux faux-invités/vrais-employés, il joue la carte du consensus permanent à coup de fausses indignations et de faux rires en réaction à de fausses blagues spontanées. Lestéphanebernestemblématique de cette vaste supercherie télévisuelle qui voit des présentateurs devenir producteurs, puis écrivains, puis acteurs, puis chanteur, puis invité permanent de toute une série d’émissions dont il aurait pu être le présentateur et dans lesquelles il vante ses propres vertus. En boucle donc tourne le spectacle d’invités qui s’exonèreront de leur permanence sur les écrans, au mieux par exemple par une saillie

visés, épinglés, alors que, plus on avance dans l’analyse d’un milieu, plus on est amené à dédouaner les individus de leur responsabilité, — ce qui ne veut pas dire qu’on justifie tout ce qui s’y passe —, et mieux on comprend comment ça fonctionne, plus on comprend aussi que les gens qui en participent sont manipulés autant que manipulateurs. Il manipulent même d’autant mieux, bien souvent, qu’ils sont eux-mêmes plus manipulés et plus inconscients de l’être. J’insiste sur ce point, tout en sachent que, malgré tout, ce que je dis sera perçu comme une critique ; réaction qui est aussi une manière de se défendre contre l’analyse

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ECRAN TOTAL

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idée : bandes et ESPACES de Marc

Au cœur du processus d’industrialisation des jeux télévisés

VAYER

Enregistrement d’une émission pour Canal+

Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais divers et anecdotes médiatiques, peopolisation des invités, dont certains sont eux-mêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement. Mais le constat principal reste celui de la mise en œuvre de pratiques manipulatoires chronométrées, de la mise à bas de toute spontanéïté et sincérité, de la bêtification du public considéré comme un kleenex, flatté lorsqu’on en a besoin, parqué lorsque les caméras s’éteignent.

Analyse

Les vigiles sont des vigiles, les studios sont des studios, les lumières sont des lumières, les techniciens sont des techniciens, mais attention, le présentateur n’est pas un présentateur, les invités ne sont pas des invités, le public n’est pas un public et le chauffeur de salle n’est pas un chauffeur de salle. Toutes ces personnes, qui parfois aiment, mangent, pleurent ou sont malades, sont des avatars, pièces absolument calibrées, drivées, briefées, clones hagards et consentants de citoyens qui, d’ordinaire, sont censés réfléchir avant de mettre un bulletin dans l’urne. Troispersonnagessontemblématiquesdecettedécérébrationcollective : le chauffeur de salle, le présentateur et le stéphanebern. Le chauffeur de salle moque gentiment le public qu’il est chargé de

ECRAN TOTAL

1ère et 4éme de couv’

Nous avons déjà oublié le nom du jeu télévisé auquel nous avons participé comme bon public ; le nom de ces jeux est interchangeable et, des chaînes de télévision du service public aux chaînes de télévision gérées par des structures privées — dont certains marchands d’armes —, le spectacle proposé est toujours le même : vacuité des questions posées, mélange des genres entre actualité politique, fais divers et anecdotes médiatiques, peopolisation des invités, dont certains sont eux-mêmes des people, lobotomie navrante du présentateur et soumission du public, infantilisé jusque dans les temps morts de l’enregistrement.

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Couvertures possibles

E C R A N T O T A L


idée :

« Lignes directionnellles »

Diriger le regard ...

Pierre BOURDIEU

Sur la télévision

Editions LIBER raisons d’agir décembre 1996

Ceux qui sont inscrits dans l’objet de l’analyse, dans le cas particulier des journalistes, ont tendance à penser que le travail d’énonciation, de dévoilement des mécanismes, est un travail de dénonciation, dirigé contre des personnes ou, comme on dit, des «attaques», des attaques personnelles,

ad hominem (cela dit, si le sociologue disait ou écrivait le dixième de ce qu’il entend lorsqu’il parle avec des journalistes, sur les «ménages» par exemple, ou sur la fabrication — c’est bien le mot — des émissions, il serait dénoncé par les mêmes journalistes pour son parti-pris et son manque d’objectivité). Les gens, de façon générale, n’aiment guère être pris pour objet, objectivés, et les journalistes moins que les autres. Ils se sentent visés, épinglés,

Analyse

« [...] L’analyse sociologique se heurte souvent à un malentendu :

alors que, plus on avance dans l’analyse d’un milieu, plus on est amené à dédouaner les individus de leur responsabilité, — ce qui ne veut pas dire qu’on justifie tout ce qui s’y passe —, et mieux on comprend comment ça fonctionne, plus on comprend aussi que les gens qui en participent sont manipulés autant que manipulateurs.

tel ou tel présentateur, ou des salaires exorbitants de certains producteurs, peut contribuer à détourner de l’essentiel, dans la mesure où la corruption des personnes masque cette sorte de corruption structurelle

Il manipulent même d’autant mieux, bien souvent, qu’ils sont eux-mêmes plus manipulés et plus inconscients de l’être.

qui s’exerce sur l’ensemble du jeu à travers des mécanismes tels que la concurrence pour les parts de marché, que je veux essayer d’analyser. Je voudrais donc démonter une série de mécanismes qui font que la télévision exerce une forme particulièrement pernicieuse de violence symbolique.

J’insiste sur ce point, tout en sachent que, malgré tout, ce que je dis sera perçu comme une critique ; réaction qui est aussi une manière de se défendre contre l’analyse. Je crois même que la dénonciation des scandales, des faits et des méfaits de

(mais faut-il encore parler de cette corruption ?)

La violence symbolique est une violence qui s’exerce avec la complicité tacite de ceux qui la subissent et aussi,


MEDIA

Les « digital natives » la génération multiécrans

UnedesconférencesdurécentWebcomquiaeuleplus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ». De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le passage de la cassette audio au CD, de la cassette vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas migré, tout était là. Bien sûr tout le monde les scrute à la loupe et se demande comment ils vont fonctionner dans l’avenir. En tête les entreprises qui se questionnent sur les impacts de leur arrivée dans quelques années sur le marché du travail. Mais le phénomène va bien au-delà: sociologues, anthropo-

Analyse

ECRAN TOTAL / total écran

logues, hommes politiques, scientifiques, enseignants, historiens découvrent que ces enfants font partie de la première génération qui est capable d’apprendre des choses aux générations précédentes. Même s’ils sont très proches des « Y » en terme de consommation de produits numériques, leur comportement est déjà très marqué. Étant père de quatre garçons dont trois sont des « Y » dans la vingtaine, mon petit dernier qui a onze ans m’intrigue, me questionne et je suis en passe de me demander si nous ne sommes pas en présence du premier type d’espèce que l’on pourrait nommer « Homo numericus ». Puisque que j’ai la chance d’avoir un spécimen sous la main, voici quelques points et anecdotes tirés de mes observations:

- Mac ou pc: aucune importance pour lui. Il utilise aussi un

XO OLPC mais rarement car il ne peut y faire tout ce qu’il veut et y utiliser ses applications préférées. A noter qu’il n’imprime presque jamais.

- Courriel: Il ne l’utilise presque pas. La phrase qui tue: « le courriel c’est pour les vieux »

- Recherche sur Internet: il est capable de trouver tout ce dont il a a besoin ce qui contredit certains experts qui décrivent les jeunes comme de


T O T A L ECRAN ECRAN TOTAL/

Couverturespossibles

ECRAN TOTAL

Analyse


«SORTIR DU CADRE»

le concept d’écran TOTAL étant lui même original, il sort des conventions ...

Pourquoi la télévision n’informe pas ... « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel

Analyse

évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité.

Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité. Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit. Au-delà de la loi du


Pourquoi la télévision n’informe pas ... « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations.

Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel

Analyse

évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité.

Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un

enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité. Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit.

« mort-kilomètrique » (qui

veut que l’on s’intéresse davantage à deux morts dans sa ville, qu’à deux cent mille morts à l’autre bout du monde), le choix de ce qui « fait l’actualité » est capital vu le peu de temps dont dispose un présentateur. Aussi, montrer des événements banals a le double intérêt de ne pas aborder les sujets plus sérieux et d’attacher les téléspectateurs à une histoire. La détresse d’une mère n’ayant aucune nouvelle de sa fille disparue n’apporte aucune information nouvelle, mais attache sentimentalement le téléspectateur à son écran pour le gar-

technique appelée story-telling der jusqu’au bout. est massivement utilisée dans les médias d’information et donne lieu à une dérive de produire de l’information là où il n’y a rien de nouveau. Et c’est précisément ce qui est en-

seigné dans les écoles de journalisme, qui garantissent l’obtention de la carte de presse. Une douzaine d’écoles en France sont directement financées par les principaux groupes de médias, et la carte de presse est elle-même décernée par des journalistes professionnels. Il n’existe pour ainsi dire pas de contrôle extérieur et indépendant de la profession de journalistes. Et de fait, le milieu est extrêmement homogène, en partie à cause du prix élevé d’entrée dans ces écoles, et grâce à une autorégulation inconsciente du milieu social des journalistes entre eux. L’exercice de la revue de presse, très enseigné dans ses écoles et qui permet de savoir de quoi on va parler en lisant les autres titres, illustre ce milieu anthropophage. « Personne ne lit plus les journaux que les journalistes eux-mêmes », disait pierre

Bourdieu dans son ouvrage Sur la télévision2. La télévision, comme média très


TYPES POSSIBLES DE COUVERTURES

ECRAN TOTAL / TOTAL ECRAN

T O TA L ECRAN TOTAL ECRAN

Analyse

/

TOTAL ECRAN


ENCADRER ET CONFRONTER LES DIFFERENTS BLOCS Référence à citizen K

Décryptage Story On est en mars, c’est le matin, et j’arrive au terme d’une séance de décryptage dans une classe de CM1 lorsqu’une jeune fille lève la main :

« Mais alors, c’est que des menteurs. », dit-elle. On venait de passer une heure à essayer de comprendre comment était fabriquée une quotidienne de la star academy. Et cette remarque me confirma que j’avais atteint quelques-uns de mes objectifs. D’un autre côté, l’idée qu’elle puisse croire qu’il y ait des méchants et des gentils à la télévision m’agaçait un peu. Je me lançais donc dans le discours suivant afin de modérer ses ardeurs: « Oui …mais non, tous le monde manipule à la télévision, après ce qu’il faut essayer de savoir c’est pourquoi ils font ce genre d’émission » C’était peine perdue. L’idée que c’était « que des menteurs » avait fait tilt dans la tête de cette jeune personne et malgré mon discours, je sentais bien que je venais de briser quelque chose dans son imaginaire et que ce n’était pas réparable pour l’instant. Je ramais jusqu’à la sonnerie, ne voulant pas la laisser s’enfermer dans le « Mais alors, c’est que des menteurs »:

DECRYPTAGE STORY qu’elle est ancrée dans notre quotidien et qu’elle rythme de nombreuses vies.

Décryptage Story On est en mars, c’est le matin, et j’arrive au terme d’une séance

de décryptage dans une classe de CM1 lorsqu’une jeune fille lève la main : « Mais alors, c’est que des menteurs. », dit-elle. On venait de passer une heure à essayer de comprendre comment était fabriquée une quotidienne de la star academy. Et cette remarque me confirma que j’avais atteint quelques-uns de mes objectifs. D’un autre côté, l’idée qu’elle puisse croire qu’il y ait des méchants et des gentils à la télévision m’agaçait un peu. Je me lançais donc dans le discours suivant afin de modérer ses ardeurs: « Oui …mais non, tous le monde manipule à la télévision, après ce qu’il fautessayerdesavoirc’estpourquoiils font ce genre d’émission » C’était peine perdue. L’idée que c’était « que des menteurs » avait fait tilt dans la tête de cette jeune personne et malgré mon discours, je sentais bien que je venais de briser quelque chose dans son imaginaire et

Analyse

23 que ce n’était pas réparable pour l’instant. Je ramais jusqu’à la sonnerie, ne voulant pas la laisser s’enfermer dans le « Mais alors, c’est que des menteurs »: « il faut essayer de comprendre si on veut nous informer, nous divertir ou nous vendre des choses… » Vu la tête de la jeune fille à la sortie de la classe, j’avais dû ramer une bonne distance. Le fait d’avoir quelque peu détourner l’attention de certains d’entre eux de ce type de programme fut apparemment une satisfaction pour certains parents. En effet, peu de temps après cette intervention, un débat fut organisé dans le même cadre. Une maman (peutêtre celle de la jeune fille) m’interrogea alors :

« Ah, c’est vous qui avez cassé

le mythe de ma fille », souriait elle. N’allez pas croire que les Pieds dans le PAF est une association de terroristes de la télévision, prête à tout pour embrigader nos chères

têtes blondes dans une guerre contre le méchant vendeur de cerveaux disponibles. Non, c’est plus simple, la télévision est une construction, nous, nous la déconstruisons. Et il s’avère que cela provoque régulièrement de vives réactions parce qu’elle est ancrée dans notre quotidien et qu’elle rythme de nombreuses vies. Dans le cas présent, voici comment j’ai procédé pour le décryptage de cette quotidienne. La star academy, vous savez, c’est cette émission où une dizaine de candidats est enfermée dans un château avec plein de caméras partout. Ils doivent s’entraîner à devenir des stars pendant que le public les observe et les élimine à coup de SMS. Une quotidienne de la star academy, c’est un résumé d’environ vingt minutes de la journée qu’ils viennent de passer. Il y en a donc toute la semaine jusqu’au vendredi soir plus le show de 21h en direct autrement appelé : « le prime ». Le gagnant est le dernier à ne pas s’être pas fait éliminer.

Pour faire un décryptage de cette émission, lorsque je m’adresse à des enfants, je choisis généralement une quotidienne de fin de saison. Les fins de saison sont, pour les techniciens de TF1, assez pénibles à raconter. En effet, lorsqu’on veut faire une émission jeune, avec des images qui arrivent dans tous les sens, des rebondissements, des retournements de situation, des pleurs, des rires, des confidences…bref tous les ingrédients d’une bonne histoire, c’est plus facile avec une dizaine de candidats qu’avec deux ou trois. Ainsi l’histoire étant plus difficile à rythmer, les professionnels de l’audiovisuel bricolent beaucoup plus avec les images et ça se voit.

On est en mars, c’est le matin, et j’arrive au terme d’une séance de décryptage dans une classe de CM1 lorsqu’une jeune fille lève la main : « Mais alors, c’est que des menteurs. », dit-elle. On venait de passer une heure à essayer de comprendre comment était fabriquée une quotidienne de la star academy. Et cette remarque me confirma que j’avais atteint quelques-uns de mes objectifs. D’un autre côté, l’idée qu’elle puisse croire qu’il y ait des méchants et des gentils à la télévision m’agaçait un peu. Je me lançais donc dans le discours suivant afin de modérer ses ardeurs: « Oui …mais non, tous le monde manipule à la télévision, après ce qu’il faut essayer de savoir c’est pourquoi ils font ce genre d’émission » C’était peine perdue. L’idée que c’était « que des menteurs » avait fait tilt dans la tête de cette jeune personne et malgré mon discours, je sentais bien que je venais de briser quelque chose dans son imaginaire et que ce n’était pas réparable pour l’instant. Je ramais jusqu’à la sonnerie, ne voulant pas la

laisser s’enfermer dans le « Mais alors, c’est que des menteurs »: « il faut essayer de comprendre si on veut nous informer, nous divertir ou nous vendre des choses… » Vu la tête de la jeune fille à la sortie de la classe, j’avais dû ramer une bonne distance. Le fait d’avoir quelque peu détourner l’attention de certains d’entre eux de ce type de programme fut apparemment une satisfaction pour certains parents. En effet, peu de temps après cette intervention, un débat fut organisé dans le même cadre. Une maman (peut-être celle de la jeune fille) m’interrogea alors : « Ah, c’est vous qui avez cassé le mythe de ma fille », souriait elle. N’allez pas croire que les Pieds dans le PAF est une association de terroristes de la télévision, prête à tout pour embrigader nos chères têtes blondes dans une guerre contre le méchant vendeur de cerveaux disponibles. Non, c’est plus simple, la télévision est une construction, nous, nous la déconstruisons. Et il s’avère que cela provoquerégulièrementdevivesréactionsparce

Dans le cas présent, voici comment j’ai procédé pour le décryptage de cette quotidienne. La star academy, vous savez, c’est cette émission où une dizaine de candidats est enfermée dans un château avec plein de caméras partout. Ils doivent s’entraîner à devenir des stars pendant que le public les observe et les élimine à coup de SMS. Une quotidienne de la star academy, c’est un résumé d’environ vingt minutes de la journée qu’ils viennent de passer. Il y en a donc toute la semaine jusqu’au vendredi soir plus le show de 21h en direct autrement appelé : « le prime ». Le gagnant est le dernier à ne pas s’être pas fait éliminer. Pour faire un décryptage de cette émission, lorsque je m’adresse à des enfants, je choisis généralement une quotidienne de fin de saison. Les fins de saison sont, pour les techniciens de

TF1, assez pénibles à raconter. En effet, lorsqu’on veut faire une émission jeune, avec des images qui arrivent dans tous les sens, des rebondissements, des retournements de situation, des pleurs, des rires, des confidences…bref tous les ingrédients d’une bonne histoire, c’est plus facile avec une dizaine de candidats qu’avec deux ou trois. Ainsi l’histoire étant plus difficile à rythmer, les professionnels de l’audiovisuel bricolent beaucoup plus avec les images et ça se voit. Quand je parle de professionnels de l’audiovisuel, je parle surtout des monteurs et des journalistes, car ce sont eux qui sont au bout de la chaîne. En gros, le journaliste (je dis journaliste parce qu’ils sont souvent issus des rédactions de journaux télévisés) est chargé de construire le résumé et le monteur de le rythmer.

« Le caractère fondamentalement tautologique du spectacle découle du simple fait que ses moyens sont en même temps son but. Il est le soleil qui ne se couche jamais sur l’empire de la passivité moderne. Il recouvre toute la surface du monde et baigne indéfiniment dans sa propre gloire. » Guy DEBORD chap. 13 La société du spectacle 1967


Les « digital natives » la génération multi-écrans

Pourquoi la télévision n’informe pas « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations.

Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les jour-

Une des conférences du récentWebcom qui a eu le plus de succès était celle de Marc Prensky, inventeur dès 2001 du terme « Digital native ».

nalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu.

De quoi parle-t-on? Wikipédia donne cette définition:« A digital native is a person who has grown up with digital technology such as computers, the Internet, mobile phones and MP3». Les avis divergent sur les dates à prendre en compte, je serais plutôt tenté de dire que ce sont tous les enfants nés après 1997 dont les plus âgés ont 11-12 ans en 2008. A l’instar de la génération précédente, dite Y, qui a vécu le pas-

Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité. Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ?

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les impacts de leur arrivée dans quelques années sur le marché du travail. Mais le phénomène va bien au-delà: sociologues, anthropologues, hommes politiques, scientifiques, enseignants, historiens découvrent que ces enfants font partie de la première génération qui est capable d’apprendre des choses aux générations précédentes. Même s’ils sont très proches des « Y » en terme de consommation de produits numériques, leur comportement est déjà très marqué. Étant père de quatre garçons dont trois sont des « Y » dans la vingtaine, mon petit dernier qui a onze ans m’intrigue, me questionne et je suis en passe de me demander si nous ne sommes pas en présence du premier type d’espèce que l’on pourrait nommer « Homo numericus ». Puisque que j’ai la chance d’avoir un spécimen sous la main, voici quelques points et anecdotes tirés de mes observations: - Mac ou pc: aucune importance pour lui. Il utilise aussi un XO OLPC mais rarement car il ne peut y faire tout ce qu’il veut et y utiliser ses applications préférées. A noter qu’il n’imprime presque jamais. - Courriel: Il ne l’utilise presque pas. La phrase qui tue: « le cour-

IN MEDIA RES Pourquoi la télévision n’informe pas « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité. Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité. Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit. Au-delà de la loi du « mort-kilomètrique » (qui veut que l’on s’intéresse davantage à deux morts dans sa ville, qu’à deux cent mille morts à l’autre bout du monde), le choix de ce qui « fait l’actualité » est capital vu le peu de temps dont dispose un présentateur. Aussi, montrer des événements banals a le double intérêt de ne pas aborder les sujets plus sérieux et d’attacher les téléspectateurs à une histoire. La détresse d’une mère n’ayant aucune nouvelle de sa fille disparue n’apporte aucune information nouvelle, mais attache sentimentalement le téléspectateur à son écran pour le garder jusqu’au bout. Cette technique appelée story-telling est massivement utilisée dans les médias d’information et donne lieu à une dérive de produire de l’information là où il n’y a rien de nouveau. Et c’est précisément ce qui est enseigné dans les écoles de

Analyse

sage de la cassette audio au CD, de la cassette vidéo au dvd, qui a vu l’arrivée des premiers laptop, des premiers téléphones mobiles, de l’Internet haute vitesse, nos petits natifs ont grandi entouré de toute cette quincaillerie: ils n’ont pas migré, tout était là. Bien sûr tout le monde les scrute à la loupe et se demande comment ils vont fonctionner dans l’avenir. En tête les entreprises qui se questionnent sur

journalisme, qui garantissent l’obtention de la carte de presse. Une douzaine d’écoles en France sont directement financées par les principaux groupes de médias, et la carte de presse est elle-même décernée par des journalistes professionnels. Il n’existe pour ainsi dire pas de contrôle extérieur et indépendant de la profession de journalistes. Et de fait, le milieu est extrêmement homogène, en partie à cause du prix élevé d’entrée dans ces écoles, et grâce à une autorégulation inconsciente du milieu social des journalistes entre eux. L’exercice de la revue de presse, très enseigné dans ses écoles et qui permet de savoir de quoi on va parler en lisant les autres titres, illustre ce milieu anthropophage. « Personne ne lit plus les journaux que les journalistes eux-mêmes », disait pierre Bourdieu dans son ouvrage Sur la télévision2. La télévision, comme média très hétéronome, est fortement soumise à la loi du marché (l’audimat). Elle tend à favoriser le commercial contre l’autonome, c’est-à-dire contre les valeurs de la profession journalistique. Par son pouvoir de déformation du champ médiatique elle va pousser les autres médias à faire comme elle. Etre indépendant se dit forcément par rapport à quelque chose. Les médias dits indépendants le sont-ils vraiment, dès lors qu’ils sont subventionnés ou se financent par la pub ? Mais s’il y a une chose dont dépendent tous les programmes de télévision (information ou divertissement), c’est de l’audimat. Les sacro-saints chiffres donnés par Médiamétrie mesurent la part d’audience d’une émission, non pas pour juger de sa qualité, mais pour quantifier le nombre de cerveaux disponibles à recevoir les messages publicitaires qui suivront. D’ailleurs on ne parle plus de la « ménagère de moins de 50 ans », mais de « responsables des achats » au sein du foyer3. Il est illusoire de croire que ces chiffres représentent réellement les attentes des téléspectateurs, lorsque l’on sait qu’il est calculé à l’aide de boîtiers spécifiques que des téléspectateurs acceptent d’avoir à leur domicile. Or selon Bertrand Labasse, chercheur au Centre national pour le développement de l’information (CNDI), « pour accepter d’être dans le panel, il faut avoir un goût particulièrement prononcé pour la télévision. Ce qui laisse penser que ces personnes sont prédisposées à regarder TF1»4.

riel c’est pour les vieux » - Recherche sur Internet: il est capable de trouver tout ce dont il a besoin ce qui contredit certains experts qui décrivent les jeunes comme de mauvais utilisateurs des moteurs de recherche. Également dépendamment de ses besoins il ira soit sur Google, soit sur Wikipédia. - Commerce électronique: il est déjà un consommateur en ligne. Je suis obligé de sortir ma carte de crédit pour faire des achats pour lui sur Internet. - Sur le web: il est multi-tâche c’est à dire qu’il utilise plusieurs applications en même temps. Youtube pour les vidéos, son réseau social Chapatiz et Piczo plus MSN. Il passe de l’un à l’autre et communique en même temps avec plusieurs communautés. - Le portable: c’est l’outil le plus important avec le laptop. Le SMS est très utilisé. A noter que je suis impréssioné par la rapidité d’exécution parfois sans regarder l’écran, l’emplacement des touches est connu par coeur. - MSN: une des applications primordiales, plus de 105 amis, c’est la ligne directe avec sa communauté. J’ai remarqué aussi que l’écriture de style « langage chat » n’affecte pas l’écriture classique. Il fait très bien la di

20 « [...] La jeune fille est un absolu : on l’achète parce qu’elle a de la valeur, elle a de la valeur parce qu’on l’achète. Tautologie de la marchandise. » TIQQUN Premiers matériaux pour une théorie de la jeune fille Editions Mille et une nuits 2001


EMPLIR et souligner POURQUOI ?

la télévision n’informe pas « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais,

moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité. Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité. Or cette information

Guy DEBORD

chap. 30 La société du spectacle 1967 « L’aliénation du spectateur au profit de l’objet contemplé (qui est le résultat de sa propre activité inconsciente) s’exprime ainsi : plus il contemple, moins il vit ; plus il accepte de se reconnaître dans les images dominantes du besoin, moins il comprend sa propre existence et son propre désir. L’extériorité du spectacle par rapport à l’homme agissant apparaît en ce que ses propres gestes ne sont plus à lui, mais à un autre qui les lui représente. C’est pourquoi le spectateur ne se sent chez lui nulle part, car le spectacle est partout. »

ECRAN TOTAL /total écran

couverture : Analyse

Guy DEBORD

chap. 30 La société du spectacle 1967 « L’aliénation du spectateur au profit de l’objet contemplé (qui est le résultat de sa propre activité inconsciente) s’exprime ainsi : plus il contemple, moins il vit ; plus il accepte de se reconnaître dans les images dominantes du besoin, moins il comprend sa propre existence et son propre désir. L’extériorité du spectacle par rapport à l’homme agissant apparaît en ce que ses propres gestes ne sont plus à lui, mais à un autre qui les lui représente. C’est pourquoi le spectateur ne se sent chez lui nulle part, car le spectacle est partout. »


Exemple de COMPOSITION

LA

22

PAS

N’INFORME

POURQUOI TELEVISION

« Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité.

Analyse


Typedecouverturespossibles ECRAN

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TOTAL

TOTAL

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PAS

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TOTAL

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N’INFORME

POURQUOI TELEVISION

« Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques.

Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seule-

Analyse

ment par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité.

Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité. Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit. Au-delà de la loi du « mort-kilomètrique » (qui veut que l’on s’intéresse davantage à deux morts dans sa ville, qu’à deux cent mille morts à l’autre bout du monde), le choix de ce qui « fait l’actualité » est capital vu le peu de temps dont dispose un présentateur. Aussi, montrer des événements banals a le double intérêt de ne pas aborder les sujets plus sérieux et d’attacher les téléspectateurs à une histoire. La détresse d’une mère n’ayant aucune nouvelle de sa fille disparue n’apporte aucune information nouvelle, mais attache sentimentalement le téléspectateur à son écran pour le garder jusqu’au bout. Cette technique appelée storytelling est massivement utilisée dans les médias d’information et donne lieu à une dérive de produire de l’information là où il n’y a rien de nouveau. Et c’est précisément ce qui est enseigné dans les écoles de journalisme, qui garantissent l’obtention de la carte de presse. Une douzaine d’écoles en France sont directement financées par les principaux groupes de médias, et la carte de presse est elle-même décernée par des journalistes professionnels. Il n’existe pour ainsi dire pas de contrôle extérieur et indépendant de la profession de journalistes. Et de fait, le milieu est extrêmement homogène, en partie à cause du prix élevé d’entrée dans ces écoles, et grâce à une autorégulation


Idée : les ECRANS en blocs de textes disparates

Guy DEBORD chap. 30 La société du spectacle 1967

«

L’aliénation du spectateur au profit de l’objet contemplé (qui est le résultat de sa propre activité inconsciente) s’exprime ainsi : plus il contemple, moins il vit ; plus il accepte de se reconnaître dans les images dominantes du besoin, moins il comprend sa propre existence et son propre désir. L’extériorité du spectacle par rapport à l’homme agissant apparaît en ce que ses propres gestes ne sont plus à lui, mais à un autre qui les lui représente. C’est pourquoi le spectateur ne se sent chez lui nulle part, car le spectacle est partout. »

POURQUOI la télévision n’informe pas « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu.

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Analyse

Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire,

l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité. Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité. Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit. Au-delà de la loi du « mort-kilomètrique » (qui veut que l’on s’intéresse davantage à deux morts dans sa ville, qu’à deux cent mille morts à l’autre bout du monde), le choix de ce qui « fait l’actualité » est capital vu le peu de temps dont dispose un présentateur. Aussi, montrer des événements banals a le double intérêt de ne pas aborder les sujets plus sérieux et

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Pourquoi la télévision n’informe pas « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel

évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité. Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité. Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit. Au-delà de la loi du « mort-kilomètrique » (qui veut que l’on s’intéresse davantage à deux morts dans sa ville, qu’à deux cent mille morts à l’autre bout du monde), le choix de ce qui « fait l’actualité » est capital vu le peu de temps dont dispose un présentateur. Aussi, montrer des événements banals a le double intérêt

de ne pas aborder les sujets plus sérieux et d’attacher les téléspectateurs à une histoire. La détresse d’une mère n’ayant aucune nouvelle de sa fille disparue n’apporte aucune information nouvelle, mais attache sentimentalement le téléspectateur à son écran pour le garder jusqu’au bout. Cette technique appelée story-telling est massivement utilisée dans les médias d’information et donne lieu à une dérive de produire de l’information là où il n’y a rien de nouveau. Et c’est précisément ce qui est enseigné dans les écoles de journalisme, qui garantissent l’obtention de la carte de presse. Une douzaine d’écoles en France sont directement financées par les principaux groupes de médias, et la carte de presse est elle-même décernée par des journalistes professionnels. Il n’existe pour ainsi dire pas de contrôle extérieur et indépendant de la profession de journalistes. Et de fait, le milieu est extrêmement homogène, en partie à cause du prix élevé d’entrée dans ces écoles, et grâce à une autorégulation inconsciente du milieu social des journalistes entre eux. L’exercice de la revue de presse,

Pourquoi la télévision n’informe pas « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité »

Analyse

de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles,ellespeuventaussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seule-

ment par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité. Mais qu’estce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité. Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit. Au-delà de la loi du « mort-kilomètrique » (qui veut que pour accep-


ECRAN

TYPES POSSIBLES DE COUVERTURES

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Et si on changeait de sens ?

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Pourquoilatélévision n’informe pas « Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! » C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations. Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont

évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu. Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité.

Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ? Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place

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Pourquoilatélévision n’informe pas écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité.

« Si la télévision disait la vérité, ça fait longtemps qu’elle serait interdite ! »

Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit. Au-delà de la loi du « mort-kilomètrique » (qui veut que l’on s’intéresse davantage à deux morts dans sa ville, qu’à deux cent mille morts à l’autre bout du monde), le choix de ce qui « fait l’actualité » est capital vu le peu de temps dont dispose un présentateur. Aussi, montrer des événements banals a le double intérêt de ne pas aborder les sujets plus sérieux et d’attacher les téléspectateurs à une histoire.

C’est ce qu’affirmait Coluche dans l’un de ses sketchs et c’est aussi l’hypothèse qui est questionnée ici. D’où viennent les informations données à la télévision? Qui les produit ? Pour qui ? Et dans quel intérêt ? Sans alimenter une énième théorie du complot, cet article souhaite simplement rappelé quelques réalités, trop souvent absentes... des informations.

ou enlèvement qui ont eu lieu au même moment à un autre endroit. Au-delà de la loi du « mort-kilomètrique » (qui veut que l’on s’intéresse davantage à deux morts dans sa ville, qu’à deux cent mille morts à l’autre bout du monde), le choix de ce qui « fait l’actualité » est capital vu le peu de temps dont dispose un présentateur. Aussi, montrer des événements banals a le double intérêt de ne pas aborder les sujets plus sérieux et d’attacher les téléspectateurs à une histoire.

Que ce soit le « jité » de 20h, le « flash » de la matinale, Compléments d’enquêtes sur France 2 ou Harry Roselmack en immersion sur TF1, les infos que l’on y voit répondent au même système et contraintes inhérentes à la massification du médium télévisé. Ces contraintes sont

La détresse d’une mère n’ayant aucune nouvelle de sa fille disparue n’apporte aucune information nouvelle, mais attache sentimentalement le téléspectateur à son écran pour le garder jusqu’au bout. Cette technique appelée story-telling est massivement utilisée dans les mé-

La détresse d’une mère n’ayant aucune nouvelle de sa fille disparue

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dans son ouvrage Sur la télévision2. La télévision, comme média très hétéronome, est fortement soumise à la loi du marché (l’audimat). Elle tend à favoriser le commercial contre l’autonome, c’est-à-dire contre les valeurs de la profession journalistique. Par son pouvoir de déformation du champ médiatique elle va pousser les autres médias à faire comme elle. Etre indépendant se dit forcément par rapport à quelque chose. Les médias dits indépendants le sont-ils vraiment, dès lors qu’ils sont subventionnés ou se financent par la pub ? Mais s’il y a une chose dont dépendent tous les programmes de télévision (information ou divertissement), c’est de l’audimat.

21 évidemment politiques ou économiques. Mais, moins visibles, elles peuvent aussi venir de microcosme dans lequel évoluent les journalistes ou encore de l’absence de contrôle dont jouit ce milieu.

dias d’information et donne lieu à une dérive de produire de l’information là où il n’y a rien de nouveau.

Une étude rapide des journaux (et pas uniquement télévisés) montre que les faits divers y ont une place écrasante. Il est courant qu’un enlèvement, un accident ou un meurtre fasse l’ouverture de l’actualité.

Et c’est précisément ce qui est enseigné dans les écoles de journalisme, qui garantissent l’obtention de la carte de presse. Une douzaine d’écoles en France sont directement financées par les principaux groupes de médias, et la carte de presse est elle-même décernée par des journalistes professionnels. Il n’existe pour ainsi dire pas de contrôle extérieur et indépendant de la profession de journalistes. Et de fait, le milieu est extrêmementhomogène,enpartieà cause du prix élevé d’entrée dans ces écoles, et grâce à une autorégulation inconsciente du milieu social des journalistes entre eux. L’exercice de la revue de presse, très enseigné dans ses écoles et qui permet de savoir de quoi on va parler en lisant les autres titres, illustre ce milieu anthropophage.

Or cette information occulte nécessairement tous les autres meurtres

« Personne ne lit plus les journaux que les journalistes eux-

Rappelons qu’en matière de politique, les trois quarts des Français interrogés1 s’informent principalement par la télévision et un quart seulement par la presse écrite. Ce qui démontre, s’il était nécessaire, l’importance capitale des journaux télévisés dans notre rapport à l’actualité.

Mais qu’est-ce finalement que cette « actualité » ?

Analyse

mêmes », disait pierre Bourdieu

Les sacro-saints chiffres donnés par Médiamétrie mesurent la part d’audience d’une émission, non pas pour juger de sa qualité, mais pour quantifier le nombre de cerveaux disponibles à recevoir les messages publicitaires qui suivront. D’ailleurs on ne parle plus de la « ménagère de moins de 50 ans », mais de « responsables des achats » au sein du foyer3. Il est illusoire de croire que ces chiffres représentent réellement les attentesdestéléspectateurs,lorsque l’on sait qu’il est calculé à l’aide de boîtiersspécifiquesquedestéléspectateurs acceptent d’avoir à leur domicile. Or selon Bertrand Labasse, chercheur au Centre national pour le développement de l’information (CNDI), « pour accepter d’être dans le panel, il faut avoir un goût particulièrement prononcé pour la télévision. Ce qui laisse penser que ces personnes sont prédisposées à regarder TF1»4. Les exemples pourraient se multiplier concerncant le manque d’objectivité de l’information proposée


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