TOURS DE PASSE-PASSE

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TOURS DE PASSE-PASSE. Le Grand Cordel MJC.


Tours de passe-passe est avant tout une série de déambulations, véritable quête d’espaces vierges, en sursis, délaissés, ou réaménagés, mais qui exprime la notion de frontière au sein du tissu urbain. Les repérages ont été orientés par l’exploration de ces zones qui s’imbriquent et dessinent le quartier n°6 de Rennes. C’est sous le mode d’une errance contrôlée que plusieurs promenades ont été effectuées. Dans la ville, les espaces sont clôturés les uns des autres. Seules les voies de communications permettent de lier les différents lieux d’habitation, de commerce, de travail... Pourtant, il existe des chemins secondaires, plus ou moins empruntés, non répertoriés sur les cartes mais qui permettent cependant de relier un point à un autre au sein du quartier. Tours de passe-passe met en place une série de parcours hors des sentiers battus. Les lieux sont arpentés sous le mode de l’exploration en terre inconnue. Les passages empruntés sont des chemins créés par le piétinement, des barrières déplacées, des portails ouverts, des clôtures arrachées, des grillages découpés. Le but de ces repérages est d’observer la trace d’une présence humaine au sein des différents espaces explorés. Une documentation est mise en place au fil des balades... Dans un second temps, Tours de passe-passe met en scène diverses interventions. Les travaux in-situ tentent justement de déjouer les règles et les codes établis dans la ville. Le quartier est perçu tel un terrain de jeu avec ses obstacles à franchir, ses limites à dépasser...


Le quartier n°6 de rennes est encore découpé en 4 zones. Les explorations débutent vers Baud-Chardonnet et se poursuivent sur le Campus de Beaulieu jusqu’aux Longs Champs en passant par le quartier Jeanne d’arc. Ce sont des espaces avec leur particularités respectives. Délimitée entre la rivière et les lignes SNCF, Baud-Chardonnet est une zone industrielle en reconversion où se côtoient friches , jardins familiaux et nouveaux logements... Ce quartier est l’objet d’une réanimation urbaine. Un nouveau pont se construit justement afin de mieux relier cet espace au niveau du Campus de Beaulieu. Cette zone en mutation offre justement de multiples possibilités d’interventions qui ont été réalisées durant l’été et qui mettent en scène la trace d’une vie passée et condamnée. Actuellement, se promener dans ce quartier relève d’une véritable vocation archéologique avec ses vestiges industriels, ses ruines urbaines... Dans un même temps, de nouveaux espaces et passages apparaissent et disparaissent au fur et à mesure des transformations liées à l’aménagement du territoire. La traversée pour la traverser. Base nautique, rue Jean-Marie Huchet. Au fond de la base nautique, il existe un passage pour accéder à un terrain vague. C’est une sorte de pont mobile avec une corde tendue entre deux arbres qui permet de déplacer l’embarcation entre les deux rives.


Ci-dessous: Sous les gravats, la plage. Boulevard Villebois-Mareuil. C’est un ancien centre technique de Rennes encore partiellement occupé par les ouvriers. Depuis quelques années déjà, les bâtiments sont peu à peu abandonnés, puis squattés, et enfin détruits. Ces lieux gardent une trace des activités et des passages successifs. Les grillages sont régulièrement découpés... Ci-contre: Les glaneurs de L′Extrème. Le dormeur n′était pas mort. Rue de la Corderie. Une fois le bâtiment abandonné, des hommes viennent récupérer les métaux précieux (cuivre, fer, aluminium...) La structure du bâtiment est peu à peu mise à nu jusqu’à l’arrivée des engins de démolition. Le lieu sert de refuge à un SDF le temps d’une sieste.



En fonction des lieux visités et de leur état, des collages, et des installations ont été mis en place. Des squelettes arpentent les cabanes de jardin abandonnées, des ossements ont été déposés au milieu de gravats, un australopithèque rôde dans la chaufferie d’une usine désaffectée... Ces interventions jouent d’une forme de présence fantomatique dans ces lieux voués à la disparition. Le but est de confronter le passé et le devenir de ce quartier, à l’instant présent. La dimension éphémère des espaces d’interventions et des sujets peints a été prise en compte. L’abandon est évoqué par le collage de squelettes comme fossilisés dans les cabanes de jardin où la nature a repris ses droits. Les démolitions entraînent l’apparition d’ossements parmi les gravats, un australopithèque a trouvé refuge dans la chaufferie d’un ancien bâtiment industriel... urban archeology. Boulevard Villebois-Mareuil. Acrylique sur papier et carton. Le crâne d’un australopithèque Afarensis a été déposé sur le tas de gravats visible depuis le Boulevard.


Sauvons LES SINGES! Jardin ouvrier, Baud-Chardonnet. Acrylique sur papier


Un australopithèque a trouvé refuge dans une ancienne chaufferie. Le local technique est accessible par une échelle. C’est un abris de fortune qui renvoie à l’idée de cabane et d’habitat précaire que peut représenter ces lieux pour les populations qui squattent habituellement ces espaces à l’abandon.


Le dernier australopithèque robustus. Rue de la corderie. Acrylique sur papier.



Ci-contre: J′ai vu un trou, alors je m′y suis fourré. Rue de la corderie. La trappe d’un poste de transformation électrique mis hors tension a été forcée. La fente devient le seul point d’accès ouvert pour pénétrer dans le bâtiment. L’air est chaud et irrespirable à l’intérieur, et sur les murs moites, il reste de vieilles plaques Danger de mort, et des instructions pour la réanimation... Ci-dessous: poste de Méditation. Rue de la corderie. Acrylique sur papier L’ancien poste EDF du centre technique est transformé en lieu de méditation. L’espace étroit offre peu de recul mais semble le seul endroit protégé des tumultes de la démolition des bâtiments voisins. Aux alentours, le quartier subit une rénovation urbaine et les plaques d’instructions illustrent la réanimation. La réincarnation du quartier est personnifiée dans la figure du Bouddha.


Ci-dessous: Dernière démarque. Avenue François Château.

Ci-contre: Passages en force. Avenue François Château. C’est l’un des axes de communication les plus importants du quartier. Le réaménagement des berges offre un remodelage de la configuration des lieux. Un pont est érigé pour relier plus aisément le Campus de Beaulieu à Baud-Chardonnet. La nouvelle route est en construction et des barrières délimitent le chantier. Pourtant les gens continuent de courir le long de la rivière en côtoyant les ouvriers et leurs engins. Ce trajet est emprunté quotidiennement par les piétons et les cyclistes... Peu à peu, le tracé de la nouvelle route s’efface. Le badaud est obligé d’enjamber les barrières et les obstacles des chantiers de voirie pour retourner sur le chemin officiel au niveau du carrefour et pouvoir repartir vers le Boulevard de Vitré.



Hello my name is human. Avenue François Château. Acrylique sur papier contrecollé sur présentoir en carton. «La plaque de Pioneer est une plaque métallique embarquée à bord de deux sondes spatiales lancées en 1972 et 1973, sur lesquelles un message pictural de l’humanité est gravé à destination d’éventuels êtres extraterrestres : un homme et une femme représentés nus. Il s’agit en fait d’une sorte de « bouteille à la mer interstellaire », les chances pour qu’elle soit retrouvée étant extrêmement faibles. Les sondes Pioneer furent les premiers objets construits par des humains à quitter le système solaire. Les plaques sont attachées aux sondes de manière à être protégées de l’érosion des poussières interstellaires ; si bien que la NASA s’attend à ce que la plaque (et la sonde elle-même) survive plus longtemps que la Terre et le Soleil.» Source Wikipedia


Les silhouettes reproduites à taille humaine ont été placées le long de la nouvelle route en construction dans cet espace quasi lunaire.


Point de rassemblement. Campus de Beaulieu. Les deux silhouettes sur leur présentoir en carton ont été placées à différents endroits du Campus. La fragilité du support a fait que les silhouettes ne résistaient pas au moindre coup de vent et tombaient. Cette intervention a été filmée par Myriam Crampes. Le montage final est une sorte de bêtisier montrant les chutes successives des deux personnages au milieu des étudiants, à travers les différents bâtiments de l’Université.



Ci-dessous: Université d′été. Campus de Beaulieu. Ci-contre: Quelques moments de solitude. Avenue Professeur Charles Foulon. Le Campus de Beaulieu est constitué de plusieurs bâtiments reliés entre eux par des routes et autres passages secondaires (coursives, allées, voies piétonnes, escaliers...) De ces axes de circulation principaux sont nés des raccourcis: des chemins façonnés par le piétinnement des étudiants durant l’année. Une fois le Campus vidé pendant la période estivale, ces sentiers apparaissent comme un parcours de randonnée urbaine à travers l’Université.



Zone de décantation. Avenue Professeur Charles Foulon. Au sein du quartier, il existe plusieurs points d’eau à peine répertoriés sur la carte (fossés, étangs, marres...) Sortes de frontières naturelles dans le tissu urbain, ces zones humides sont souvent délaissées au profit de la végétation. Coincée, entre l’avenue Professeur Charles Foulon, une propriété privée, et les Cités Universitaires Mirabeau, cette zone de décantation est à peine visible de la route. Pourtant, la clôture est endommagée à différents endroits. L’accès aux berges se fait à travers la végétation. Si, à première vue, le lieu semble hostile, il n’en est pas moins romantique.



La cité dort. Résidence universitaire Mirabeau. C’est l’été et les étudiants ne sont pas encore rentrés. La Cité Universitaire n’est pas seulement inoccupée, elle semble abandonnée. Le site est désertique, tous les volets sont clos, il n’y a pas âme qui vive, la végétation encombre les accès. À l’entrée de la cité, un panneau de chantier indique que le lieu est en rénovation... En général, pour ce type d’ouvrage, il s’agit d’une modernisation de l’intérieur, les fenêtres et les portes sont retirées, seule la structure du bâtiment est conservée.



promenade urbaine. Les Longs Champs. L’exploration du quartier se poursuit dans le quartier résidentiel des Longs Champs. C’est une zone pavillonnaire constituée de logements type HLM et de lotissements. En parallèle des axes routiers et des voies piétonnes qui permettent leur imbrication entre eux dans le tissu urbain, d’innombrables chemins secondaires se dessinent au fur et à mesure de la promenade. Ce sont des raccourcis, encore une fois façonnés par les passages successifs des résidents eux-mêmes. Ces sentiers parfois escarpés mènent à des culs de sacs, des fossés, des clôtures... Le parcours se transforme en véritable randonnée urbaine jonchée de pièges à éviter, d’obstacles à contourner, de grillages à escalader...






randonnée urbaine. Quartier 6. Acrylique sur papier et carton. De vrais-faux panneaux sont installés et un parcours est effectué au sein du Quartier 6.


Plan O. Les Longs Champs. Le quartier des Longs Champs se caractérise par deux étendues d’eau qui forment une sorte de frontière entre les zones résidentielles et l’imposant Centre Commercial. Si la pêche et la baignade sont interdites, les berges sont aménagées de telle sorte qu’il est possible de faire le tour de ces deux plans d’eau.



LES BAIGNEURS. Les Longs Champs. Acrylique sur papier et carton. Plusieurs silhouettes de nageurs sont déposées sur les étangs et dans un fossé avec la participation non officielle des égoutiers du secteur nord de la ville de Rennes. L’intervention a été filmée par Myriam Crampes.



PISCINE PRIVÉE. Rue du Clos Courtel. Acrylique sur papier. Situé à la sortie de Rennes, un bassin de rétention du quartier des Longs Champs est transformé en piscine privée. L’intervention a été filmée par Nicolas Malgonne et l’équipe de CanalSIX.tv du Grand Cordel. Les photos en «action» ont été prises par Arthur Giguelay.



Le repère de King Loup. Centre commerciale Les Longs Champs. Lorsque le Centre Commerciale ferme ses portes, le parking se vide également. Le soir et le dimanche, l’endroit reste désert. Éclairé par les néons, la lumière blafarde donne au lieu une configuration étrange, un sentiment d’insécurité règne à ces moments. Au loin, des présences semblent surgir de nulle part. Le parking devient un repère... La notion de frontière s’exprime alors par le besoin de contourner ce type de non-lieux perçu comme un coupe-gorge...



INSÉCURITÉ RENFORCÉE. Centre commerciale Les Longs Champs. Acrylique sur papier. En soirée, le parking du Centre Commercial devient le repère de King Loup. Des schémas de prises de judo sont reproduits à taille humaine sur les murs... Le passage est signalé dangereux.


ROULÉ-BOULÉ. Beaulieu. Acrylique sur papier. Un ancien réfectoire est transformé en dojo le temps d’une séance d’échauffement. L’affiche «viila piégée» est placée à l’extérieur du bâtiment. Le visiteur est prévenu.


Ici prochainement. Quartier Jeanne d’Arc. C’est vers Jeanne d’Arc que la découverte du Quartier 6 s’achève en zigzaguant à travers les rues. En terme d’urbanisme, c’est très hétérogène: le vieux et le neuf se côtoient, se jouxtent, s’imbriquent. Des barres d’immeubles surplombent des petits pavillons, des maisons d’ouvriers s’avoisinent à de luxueuses demeures. Tous les styles architecturaux semblent représentés... C’est un collage de formes et de volumes. Le moindre centimètre carré est occupé, ce qui confère au quartier une sensation de densité assez forte. Ici prochainement tend à montrer l’importance de chaque surface. Certaines parcelles sont en proie à des plans de rénovation urbaine. Ici prochainement marque ce temps où la destruction d’un bâtiment est prévue pour faire place à de nouveaux projets immobiliers. C’est une sorte de frontière temporelle entre le passé et le devenir d’un bâtiment, d’un pâté de maison tout entier.



PRIVATISATION RENFORCÉE. Rue Beaumarchais. Acrylique sur papier. La façade d’une maison est recouverte de panneaux avant démolition. Les affiches sont toutes arrachées dans la nuit. Lors du collage, le voisin d’en face a ouvert sa fenêtre pour se plaindre de l’agression visuelle que lui procurait la profusion de pictogrammes...



Le choc d′une civilisation. Rue du Moulin de Joué. Le Castel Garbo est une villa construite en 1906. Un siècle plus tard, le lieu a fait l’objet d’un projet immobilier. Dorénavant appelé Castel Nova, le château est encerclé d’immeubles récents. C’est probablement le meilleur exemple au sein du quartier où le «neuf et le vieux» se côtoient au sein d’un même lieu-dit. Si les logements des nouvelles constructions sont déjà habités, la bâtisse du siècle dernier est quant-à elle littéralement laissée à l’abandon. Les fenêtres sont murées, il y a des graffitis le long de la façade...

THE BELLE ÉPOQUE. Rue du Moulin de Joué. Acrylique sur papier. Des dessins de Playmobiles sont reproduits à taille humaine et collés sur le château en vis à vis des nouveaux logements.



Ne pas courir dans les couloirs. Lycée Jeanne d’Arc. Situé au cœur du quartier, le Lycée Jeanne d’Arc est à l’image de son lieu d’implantation. L’établissement est un véritable collage architectural qui a subit de maintes rénovations. L’ancien et le moderne se relient par des cages d’escaliers et un dédale de couloirs, où derrière chaque porte, un décor différent apparaît. C’est un véritable labyrinthe pour le visiteur qui n’est pas un usager quotidien du lieu.



Jeux interdits. Boulevard Charles Péguy. Entourée de barrières de chantiers, une aire de jeux est condamnée. Classée hors norme, la petite forteresse est désertée de ses habitués... L’édifice présente un danger pour les enfants, des filets de protection ont été tendus afin d’éviter toute intrusion et empêcher toute utilisation. C’est une citadelle imprenable.



Une demie-journée d′astreinte. Centre Hospitalier Guillaume Régnier. Les Frères Ripoulain sont en résidence au Centre Hospitalier Guillaume Régnier dans le cadre des Ateliers de Rennes et du programme Culture à l’hôpital. Voici l’occasion d’effectuer une visite des lieux en leur compagnie. Véritable ville dans la ville, le Centre est encore une fois à l’image du quartier par sa diversité architecturale. Les bâtiments anciens sont l’identité visuelle du lieu. Le logo du Centre reprend les deux tourelles que l’on aperçoit Avenue Général Leclerc. C’est donc une ville avec ses axes de circulations parmis les différents pavillons et services. Les Frères Ripoulain interviennent dans les interstices du lieu, écrivent à la bombe des phrases entendues au cours de leur séjour.



Signé Mathieu Tremblin. Plaine de Baud. Un rendez-vous est fixé entre Mathieu et d’autres graffeurs pour une session dans la Plaine de Baud. Les friches industrielles et les terrains vagues dessinent la topographie du lieu. Encore une fois, il s’agit d’emprunter les passages dérobés, escalader des murs, franchir des barrières, passer à travers des grillages...



Sortie sans achats. La plaine de Baud. En dehors des heures d’ouverture, la déchèterie est prise d’assaut de toutes parts. Des trous dans le grillage font office d’entrée pour les glaneurs. L’un de ces visiteurs accepte de se faire prendre en photo au moment du passage délicat à travers la clôture.



Le bon coin. La plaine de Baud. Véritable paradis à ciel ouvert, la déchèterie se transforme ainsi en foire d’empoigne. On y croise toute sorte de personnes qui viennent chercher leur bonheur parmi les rebuts de la société. Les glaneurs descendent dans les bennes pour les fouiller. C’est une véritable chasse au trésor qui débute dès la fermeture officielle du site et une course contre la montre entre les rondes des vigiles...



Papa bricole. Rue de la Corderie. David Renault a prévu une installation sur une voiture abandonnée dans les jardins familiaux de la Plaine de Baud. L’épave se trouve là depuis des années et la végétation a entièrement recouvert le site. L’accès se fait à travers les broussailles et les ronces. Tapi devant sa carcasse, papa bricole et s’énerve car l’installation ne fonctionne pas comme prévue... Les performances in-situ génèrent systématiquement de bonnes ou de mauvaises surprises.



Arzhel Prioul allias Mardi Noir. tours de passe-passe. Carnet de bord. Le grand cordel mjc. Rennes, quartier 6. Relecture: Claire Michaud. RepĂŠrages et interventions: Juillet - Novembre 2012. Exposition au Grand Cordel: 3 DĂŠcembre 2012 - 19 Janvier 2013.


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