Le Suricate Magazine - Quatorzième numéro

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Le Suricate N° 14

Bi-mensuel

19 mars 2013

Magazine

À la une

Arnaud Tsamere Chose Promise La star de l’humour jouera en avril en Belgique

Mais aussi...

Le XS Festival Interview de Mezzo AFFFril avec le BIFFF

Jack le chasseur de géants Le mixage de deux histoires pour un film d’aventure pour adultes essentiellement.



Sommaire

Un Suricate mag’ à quoi ça sert ? Vers l’infini et au-delà !

Littérature

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La philo c’est la vie Addict/Demain Un sentiment plus fort Du plomb dans la tête Tu mitonnes.../Sherlock Holmes Le guide de l’auto-entrepreneur

Cinéma Jack le chasseur de géants Spring Breakers Cloud Atlas Los Amantes Pasajeros Des abeilles/Warm Bodies Movie 43/Tad l’explorateur Pinocchio/Elefante Blanco Sorties ciné du 20 mars Sorties ciné du 27 mars Actualités cinéma Actualités DVD BIFFF 2013

p. 6 p. 7 p. 8 p. 9 p. 10 p. 11 p. 12 p. 14 p. 15

Interview Mezzo Interview Kvelertak In memoriam Sorties CD’s

Quentin Tarantino Beatles et The Beach Boys

Cotations p. 20 p. 22 p. 23 p. 24

Rien à sauver Mauvais Mitigé Bon Très bon Excellent

Scènes Rencontre avec Arnaud Tsamere Compte-rendu XS Festival La maison de Ramallah Crime et Châtiment/Feu la mère La piste aux espoirs Lettre à vous (Jean Fabre) Hamlet Aura Popularis

p. 28 p. 30 p. 33 p. 34 p. 35 p. 36 p. 37 p. 38

!"# $% ‫*)(اة‬+‫ا‬ *(,# *Espère des subsides du Qatar

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p. 44 p. 45

Happy Birthday Mr Suricate

p. 17 p. 18 p. 19

Musique

p. 40 p. 41 p. 42 p. 43

19 mars 2013

p. 46 p. 48



Edito

Le terrier du Suricate Un « Suricate Magazine », à quoi ça sert ? «Il faut que la presse paraisse, surtout pas qu’elle paresse !» a annoncé un jour l’écrivain contemporain Claude Frisoni. Si, comme pour beaucoup de citations, chacun l’interprète à sa façon, nous avons fait le choix de voir cette phrase comme un appel à l’innovation, à la recherche, à la critique que doit procurer une parution chez un lecteur curieux. Le Suricate Magazine a été créé pour attiser la curiosité des jeunes et des moins jeunes vers le monde culturel. Ce monde, aussi discret que vaste, méritait d’attirer les regards d’un public parfois absent. Bien entendu, de nombreux films à gros budgets remplissent les salles obscures du monde entier mais, qu’en est-il du petit film d’auteur ou de la pièce de théâtre semi-professionnelle ?

Chaque jour, chaque semaine, chaque publication nous amènent leurs lots de nouveautés. Comme une chute d’eau ininterrompue, c’est avec fierté que nos rédacteurs se rendent compte de la fertilité imaginative du monde culturel francophone et international. Cette prospérité artistique doit trouver un porte-voix. Ce rôle, si lourd et important soit-il, nous tentons toutes les deux semaines de l’incarner. Par le biais de la critique, négative ou positive, les pages du magazine vous parlent, vous conseillent et vous font découvrir des talents de demain ou des stars confirmées. Alors, cette fois encore, ouvrez avec nous la boîte de Pandore et laissez vous guider par les conseils avisés d’une vingtaine de passionnés.

M.M.

Ceux-ci se battent pour faire vivre un art à qui peu de gens tendent le micro. Pourtant, ces méconnus du spectacle ou de l’art représentent un vivier composé d’individus de tous horizons dont la richesse et l’inventivité n’ont pour limites que la censure ou l’argent.

Vers l’infini et au-delà ! Après deux numéros avec en couverture des coups de coeur (Antifreeze en théâtre ou Véronique Biefnot en littérature), nous revenons à des noms plus connus ! Appréciez l’interview d’Arnaud Tsamère, venu faire la promotion d’une prochaine tournée en Belgique. Il va aussi y avoir de la lecture dans les mois qui suivent ! Les théâtres terminent doucement leurs saison, mais seront remplacés par les festivals d’été. Un numéro spécial BIFFF arrivera mi-avril après qu’une équipe de choc (Roxane de Quirini, Oliver Eggermont, Cécile Marx, Anastasia Vervueren et moi-même) soit passée par là. Le Suricate Magazine passe aussi par les réseaux sociaux. Pour les gros festivals, vous pourrez retrouver l’actualité de l’évènement en direct sur Twitter (comme pour Les Magrittes du Cinéma 2013). De plus, la page Facebook va être plus intéressante grâce à des infos de toute première fraîcheur, mais surtout à des concours ou des tirages au sort assortis de plusieurs lots culturels (DVD, BD, livres ou CD). Pour ceux qui ne le savent pas encore, un magazine gratuit, et papier, est en projet, et pourrait sortir début septembre, en même temps que la rentrée théâtrale. Elle est pas belle la vie ?

L.S.

Une publication du magazine

Le Suricate © Directeur de la rédaction : Matthieu Matthys Rédacteur en chef : Loïc Smars Directeur section littéraire : Marc Bailly Directeur section musicale : Christophe Pauly Relation clientèle : redaction@lesuricate.org

Crédits Webmaster : Benjamin Mourlon Secrétaires de rédaction : Pauline Vendola, Maïté Dagnelie, Adeline Delabre Marketing et communication : Emilie Lessire Régie publicitaire : pub@lesuricate.org

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Ont collaboré à ce numéro : Roxane de Quirini, Baptiste Rol, Emilie Lessire, Elodie Kempenaer, Cécile Marx, Julien Sterckx, Olivier Eggermont, Anastassia Depauld, Noelia Gonzalez, Stellina Huvenne, Sontiu Falguière, Christophe Corthouts, Lise Francotte, Julien Fontignie, Marylise Dufour, Nele De Smedt

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Cinéma

Jack le chasseur de géants Après avoir connu le succès avec «X-Men» ou le plus récent «Walkyrie», Bryan Singer revient avec l’adaptation libre d’un conte enfantin. Pour les enfants ? Pas vraiment.

©Warner Bros Pictures

La critique

Vous aurez constaté, en confrontant le synopsis du film et le court résumé de l’histoire originelle, que l’adaptation faite par Bryan Singer (X-Men) est très éloignée du récit. Et pour cause, les scénaristes ont travaillé librement sur un mixage de deux récits fortement similaires : «Jack et le Haricot Magique» et «Jack le tueur de géants». Ces deux contes sont liés même si leur écriture commune n’est pas avérée. Dans cette seconde légende arthurienne, l’histoire narrée est beaucoup plus glauque voire quelques fois cruelle. C’est pourquoi, le public connait moins cette dernière pourtant plus ancienne. Au vu du film, ce croisement scénaristique n’est pas déplaisant et permet de redonner une vie nouvelle à cette histoire. Néanmoins, en noircissant sciemment un conte enfantin, Bryan Singer et ses scénaristes ont peut-être misé sur le mauvais cheval. De fait, l’histoire est agréable à suivre, la

qualité technique est au rendez-vous, les acteurs sont bons et leurs personnages charismatiques. Mais, le bas blesse quant on aborde la violence présente dans ce film. Et pour cause, ces légendes historiques ciblent un public jeune. Lorsque l’on se surprend à admirer des scènes d’arrachage de tête, de dégustation d’êtres humains, de laideur extrême des géants et de combats mortels, on se dit qu’il ne valait mieux pas emmener nos petites têtes blondes. Au final, les adultes risquent de bouder un film le pensant enfantin alors qu’ils y trouveraient leur bonheur. Passé cet avertissement à l’égard des plus jeunes, l’histoire est agréable à suivre et non dénuée d’humour. Evidemment, le récit souffre de nombreux stéréotypes très présents dans les légendes arthuriennes mais arrive à nous tenir en haleine. La qualité des effets spéciaux et surtout la prestation impeccable et collégiale des acteurs en sont pour quelque chose. Agrémenté de personnages indiscutablement charismatiques, ce long métrage nous a conquis sans nous surprendre. Si tout y est bien travaillé, l’histoire reste malgré tout linéaire et les retournements de situation cruellement absents. Comme cité précédemment, le casting est l’atout de cette production. En installant Nicholas Hoult (X-Men : Le commencement) dans le rôle de Jack, héros passé de la misère à la gloire, le

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réalisateur a donné une touche de fraicheur au genre fantastique. Quelle joie de retrouver un comédien de talent dans la peau du protagoniste principal. En résumé, Jack le chasseur de géants ne révolutionnera pas le genre fantastique à cause d’un récit trop connu et maladroitement exploité pour pouvoir s’accaparer un jeune public qui ne demande qu’à admirer des légendes ancestrales proprement adaptées à l’écran. Cependant, on ne niera pas que ce film est avant tout un divertissement de très bonne facture.

Matthieu Matthys 20 mars 2013

Depuis deux siècles, un conte populaire a baigné l’enfance de nombreux petits bambins occidentaux et en particulier britanniques. «Jack et le Haricot Magique» est un conte enchanteur où un jeune homme des Cornouailles échange sa vache contre une poignée de haricots magiques. En les plantant, ceux-ci donnent naissance à une tige de haricot grimpant jusque dans les nuages. Décidant de l’escalader, Jack va se retrouver face à de géants ogres.

Jack le chasseur de géants Aventure de Bryan Singer Avec Nicholas Hoult, Ewan McGregor Lorsquʼun jeune fermier ouvre par inadvertance la porte entre notre monde et celui dʼune redoutable race de géants, il ne se doute pas quʼil a ranimé une guerre ancienne… Débarquant sur Terre pour la première fois depuis des siècles, les géants se battent pour reconquérir leur planète et le jeune homme, Jack, doit alors livrer le combat de sa vie pour les arrêter.


Spring Breakers, pari réussi En signant la réalisation de Spring Breakers, Harmony Korine nous prouve que les petites filles ne le restent pas éternellement.

©Belga Films

La critique

Nous retrouvons quatre jeunes filles coincées dans leur campus pour cause d’un manque d’argent ne leur permettant pas de prendre le bus jusqu’au Spring Break. Enfilant les joints et les bongs, elles décident de braquer le fastfood du coin afin de réaliser leur rêve. Arrivées sur les plages édulcorées de Cancun, la fête peut commencer. Le film démarre sur une avalanche de bikinis plus petits les uns que les autres et sur des étudiantes survoltées tentant d’ingurgiter un maximum d’alcool en un minimum de temps, le tout sur fond de Skrillex. Et soudain, ce qui nous restait d’appréhension disparaît. Non, nous ne sommes pas devant une énième comédie romantique aux effluves de pâquerettes et de pot pourri. Le seul doute que nous aurions pu avoir vient de s’envoler et laisse nos yeux prêts pour ce qui

s’avérera être une réussite fluo aux allures plus que déjantées.

Certes, ce ne sont pas les yeux des jeunes filles en fleur qui brilleront de plaisir devant ce nouveau film de Korine, mais les nôtres qui auront à cœur de vouloir le revoir pour encore une fois en dégager toutes les merveilles d’une mise en scène effectuée avec talent.

Les scènes s’enchainent avec une fluidité et un travail de la mise en scène qui impressionnent et imposent le respect. Sexe, drogue et rap. Voici les mots qui pourraient résumer Spring Breakers. Une sorte d’œuvre jouissive où nous suivons les starlettes de Disney Channel dans les tréfonds de la jeunesse Rock’N Roll. Le risque de s’accompagner de ces vierges effarouchées n’a en rien entaché le travail d’un réalisateur qui ne s’arrêtera pas de faire parler de lui. Entre les héroïnes de série pour ados, une actrice détonne pourtant par la nouveauté de son visage. Rachel Korine vient compléter le trio de choc de pseudo Britney Spears. Elle, c’est l’épouse d’Harmony Korine, et si son visage ne vous dit rien, sachez qu’en aucun cas elle ne fait tache parmi les stars adulées des adolescentes. James Franco pour encadrer tout ce beau monde et c’est parti pour une extase cinématographique qui enchaîne les scènes osées et délurées. Enfilant cagoules et minishorts, le groupe d’amies se plait à faire une ronde sur des chansons de Britney Spears, arme à la main ou encore à échanger des rapports de force dans des scènes qui réveillent en nous la tension et le sentiment malsain de ne plus savoir à quoi nous assistons, de perdre pied dans cette réalité dure et brute.

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Korine nous a charmé, nous a embarqué dans ce voyage aux mille et une couleurs où les couettes de petites filles sages s’encanaillent avec des flingues et de la cocaïne en-veux-tuen-voilà.

Roxane de Quirini Spring Breakers 20 mars 2013

Nous l’attendions tous avec un mélange d’impatience et d’appréhension, ce film d’Harmony Korine (Gummo) mettant en scène les nymphettes à la mode dans une histoire qui, avant même la sortie en salle, fait parler d’elle. Quatre jeunes filles qui braquent un fastfood afin de se payer le meilleur Spring Break de leur vie… Le scénario semblait facile, voir un peu plat… Mais voilà, nous parlons d’Harmony Korine. Et avec ce réalisateur, autant que vous le sachiez, rien n’est plat ou facile.

Drame de Harmony Korine Avec James Franco, Vanessa Hudgens, Selena Gomez Pour financer leur Spring Break, quatre filles aussi fauchées que sexy décident de braquer un fast-food. Et ce nʼest que le début… Lors dʼune fête dans une chambre de motel, la soirée dérape et les filles sont embarquées par la police. En bikini et avec une gueule de bois dʼenfer, elles se retrouvent devant le juge, mais contre toute attente leur caution est payée par Alien, un malfrat local qui les prend sous son aile.

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Cloud Atlas, nouvelle folie des Wachowski 6 films en 1 orchestrés par les Wachowski et Tom Tykwer.

©Jérôme Prébois

La critique

À travers une histoire qui se déroule sur plusieurs siècles dans plusieurs espaces temps, des êtres se croisent et se retrouvent d’une vie à l’autre, naissant et renaissant successivement… Tandis que leurs décisions ont des conséquences sur leur parcours, dans le passé, le présent et l’avenir lointain, un tueur devient un héros et un seul acte de générosité suffit à entraîner des répercussions pendant plusieurs siècles et à provoquer une révolution. - Retrouvez tout d’abord le film d’époque avec l’histoire de Adam Ewing, avocat de San Francisco traversant le Pacifique. Se liant d’amitié avec un esclave caché en soute, il réfléchit sur l’esclavage tout en étant de plus en plus malade. - Plusieurs années plus tard (1936), nous suivons Robert Frobisher, jeune compositeur qui cache son homosexualité, qui aide un compositeur de

génie à traduire son inspiration et pourquoi pas tenter d’écrire aussi son chef-d’oeuvre. - 1973, San Francisco, Luisa Rey, jeune journaliste essaye de dénoncer un complot industriel d’une centrale nucléaire et subit les assauts d’un tueur à gage tenace. - Timothy Cavendish, éditeur raté, est «interné» par son frère dans un genre nouveau de maison de retraite. - Clone conditionné, Sonmi-451 est serveuse dans la Nouvelle-Séoul de 2144. Grâce à une aide extérieure, elle va découvrir la face cachée d’un monde pas si idyllique. - Dernière période, en 2321, après la «Chute», un gardien de chèvre et sa tribu lutte pour leur survie dans un monde post-apocalyptique. En plus de s’éparpiller sur six histoires à six époques différentes, Cloud Atlas est aussi une affaire de montage, car toutes les histoires sont mélangées et imbriquées les unes avec les autres. Jamais plus de 20 minutes dans chaque histoire. Mais pas de craintes, malgré la nébulosité des premières images, l’enchainement est parfaitement réussi et la compréhension de l’histoire, sans être aisée, n’est pas non plus insurmontable. A condition de ne pas intellectualiser l’histoire non plus, le scénario, fort philosophique n’est pas le point fort de l’histoire. Les points forts de l’histoire sont plutôt le montage comme dit précé-

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demment mais aussi le côté grand spectacle d’un film budgétisé indépendamment des grands studios américains. Cloud Atlas a un scénario parfois bancal et quelques imperfections, certes. Mais c’est aussi un remarquable culot indépendant, qui tente une approche originale du cinéma à une époque où suites et adaptations sont devenus la base d’un cinéma cherchant le profit. Rien que pour ça, il faut aller voir cette épopée folle.

Loic Smars Cloud Atlas 20 mars 2013

Quatre ans après l’échec de Speed Racer, les Wachowski (frère et soeur maintenant), ne se sont toujours pas rangés dans les cases du Hollywood classique. Ils persistent et signent en adaptant l’inadaptable roman de David Mitchell Cartographie des nuages (Cloud Atlas). Encore une fois après Matrix, Speed Racer ou leur production V pour Vendetta, ils s’engagent loin des sentiers battus en adaptant pas loin de six univers différents en un seul film de 2h40.

Science-Fiction de Andy et Lana Wachowski Avec Tom Hanks, Halle Berry À travers une histoire qui se déroule sur cinq siècles dans plusieurs espaces temps, des êtres se croisent et se retrouvent dʼune vie à lʼautre, naissant et renaissant successivement… Tandis que leurs décisions ont des conséquences sur leur parcours, dans le passé, le présent et lʼavenir lointain, un tueur devient un héros et un seul acte de générosité suffit à entraîner des répercussions pendant plusieurs siècles et à provoquer une révolution.


Los amantes pasajeros, nouvel Almodovar Un scénario un peu loufoque mais incroyablement intelligent signé Pedro Almodovar.

©Paola Ardizzoni/Emilio Pereda

La critique

Quand je dis que Pedro Almodovar s’est fait plaisir, c’est parce qu’il a réalisé ici une comédie chorale qui, comme ce mot l’indique, n’a pas d’acteurs principaux et dans lequel il y a rassemblé de nombreux acteurs espagnols que vous aurez peutêtre déjà eu l’occasion de croiser dans un de ses précédents films (c’est par exemple le cas pour Javier Camara, Penelope Cruz, Lola Duenas, Cecilia Roth) ou dans d’autres films de la même nationalité (La Ballada Trista, Un jour de Chance, Extraterrestre, Yo tambien). De plus, Pedro Almodovar a décidé de ne présenter ce film dans aucun festival, le réservant donc à son public. L’histoire est simple. À la suite d’une erreur technique commise par des agents de piste d’un aéroport, un des trains d’atterrissage est bloqué, et les passagers du vol 2549 à destination de Mexico, se voient tourner en rond au-dessus de Tolède en attendant que les équipes au sol trouvent et préparent une piste pour un atterrissage d’urgence. Constatant qu’il n’y a ni film ni musique, et que l’haleine des stewards sent quelque peu l’alcool, les passagers de la classe

«Affaires» commencent à se poser des questions et très vite, ils commencent tous à envisager leur mort imminente. L’alcool aidant, les passagers de la classe «Affaires», les pilotes et les stewards vont en venir chacun leur tour à révéler ou trahir le secret qui les rongeait jusquelà, et vont tenter de réparer leurs erreurs du haut de leur cinq mille mètres d’altitude. Un don juan qui tente de joindre sa dernière compagne, une célébrité convaincue que c’est un attentat contre elle, des pilotes et stewards qui ne sont pas uniquement collègues de travail, une vierge aux prémonitions morbides, les personnages sont clairement ceux qu’a l’habitude de mettre-en-scène Pedro Almodovar avec ceci de plus qu’ils n’ont pas à être autant plausibles que dans ses films précédents. Ou, comme le dit le réalisateur himself : « le film n’est pas une comédie réaliste, ni surréaliste, ni néoréaliste, c’est une comédie irréaliste et métaphorique ». Des précédents « Almodovar », Les Amants passagers a la thématique en commun : l’amour et la mort. Mais la mort ne prend pas par surprise dans ce film-ci, elle n’est pas non plus la raison d’un deuil à faire, elle est envisagée depuis le début, et seul votre déplacement dans les salles obscures vous dira si elle a belle et bien lieu. Les scènes hautes en couleurs et les situations burlesques, comme celle des stewards exécutant une chorégraphie sur I’m so exited des Pointer Sisters afin de détendre l’atmosphère, sont soutenues par des acteurs ayant le rythme de la comédie dans la peau. Ma préférence va pour Guillermo Toledo qui interprète le

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bourreau des cœurs Ricardo Galan que j’ai, à ma grande et agréable surprise, retrouvé ici et que j’avais déjà eu l’occasion d’adorer plusieurs fois dans Le Crime Farpait de Alex De La Iglesia dans lequel il interprète un rôle similaire. En résumé, le film est drôle, au rythme plutôt soutenu, aux musiques entrainantes, aux mœurs légères, abordant la bisexualité, l’homosexualité et le sexe sous d’autres facettes, comme Pedro Almodovar en a l’habitude.

Baptiste Rol

27 mars 2013

Pedro Almodovar, dont la renommée n’est plus à faire, a décidé de se faire plaisir, et la question que l’on se pose est : est-ce que c’est pour le nôtre ? En effet, le réalisateur est plus habitué aux histoires de famille qui tournent mal ou dont le passé peu glorieux ressurgit. De l’enfant qui meurt, à l’enfant né d’une relation incestueuse, en passant par la prostitution, la drogue, la sexualité débauchée, ses films sont de ceux qui ne passent généralement pas inaperçus dans notre mémoire.

Los Amantes Pasajeros Comédie dramatique de Pedro Almodovar Avec Javier Camara Des personnages hauts en couleurs pensent vivre leurs dernières heures à bord dʼun avion à destination de Mexico. Une panne technique (une sorte de négligence justifiée, même si cela semble contradictoire ; mais, après tout, les actes humains le sont) met en danger la vie des personnes qui voyagent sur le vol 2549 de la compagnie Península.

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Depuis une quinzaine d’années, de nombreuses colonies d’abeilles sont décimées partout dans le monde. Les causes peuvent être multiples : nouveaux virus ? Pesticides ? Industrialisation du secteur du miel ? Les causes de cette hécatombe ne sont pas encore établies mais une chose est certaine, l’abeille est aussi indispensable à notre économie qu’à notre survie !

Des Abeilles et des Hommes de Markus Imhoof sortie le 20 mars 2013 Documentaire (88ʼ)

Avec Fred Jaggi, John Miller, Fred Terry

Ce documentaire, réalisé par Markus Imhoof, est un véritable petit chef-d’œuvre. Il est didactique sans être simplet et nous emmène avec finesse dans un monde que nous connaissons peu. Oui, le miel c’est délicieux et non les abeilles en été autour d’un bon repas dans le jardin ce n’est pas agréable, mais qui sont-elles réellement ? Quelle est leur fonction ? Pourquoi sontelles si importantes pour notre survie ? Un tour du monde nous apprend qu’il n’y a plus d’abeilles en Chine, que des hommes parcourent les Etats-Unis en camion avec 4000 ruches afin d’augmenter la pollinisation des champs d’amandes et d’en augmenter la production, et qu’une petite île australienne abrite des abeilles « pures », c’est-à-dire qui ne sont pas malades et qui Sorte de Roméo et Juliette propice aux temps modernes, Warm Bodies met en scène R, jeune mort vivant pas très joli à voir qui survit parmi ses comparses dans un monde dévasté par un quelconque virus. Entre ses discussions ponctuées de grognements avec ses amis-zombies et sa collecte de chair fraîche, nous ne pouvons pas juger la vie de R comme étant passionnante. Pourtant, un jour, il rencontre Julia et ce qui semblait être un vieil organe putrissant au fond de son corps froid se remet à battre de plus belle.

Warm Bodies de Jonathan Levine sortie le 27 mars 2013 Comédie, Epouvante (97ʼ) Avec Nichalas Hoult, Teresa Palmer, Analeigh Tipton

Adaptation libre du roman d’Isaac Marion, Warm Bodies s’avère moins décevant que ce que nous en attendions. Suivant de près l’œuvre littéraire, il nous donne à voir une comédie amusante et romantique, bouleversant le genre zombiesque. L’originalité de l’œuvre cinématographique et littéraire se trouve dans la narration à la première personne par R. Celle-ci nous permet de nous immerger de façon originale dans ce monde dévasté et donne un point de vue bien différent de tous ceux que nous

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n’ont pas été nourries avec des antibiotiques, en vue de repeupler la terre si elles venaient à disparaitre de la surface du globe ! Comparant l’apiculture d’antan et celle des petits villages avec l’apiculture de masse, ce documentaire souligne, une fois de plus, les incohérences et les abus de l’industrialisation. On plaint les abeilles, on a honte de notre société et de son fonctionnement. Jusqu’où ira-t-on dans la course pour l’or et le pouvoir ? Mais il semblerait que la nature, cette fois, ait décidé de ne pas se laisser faire car une nouvelle race d’abeilles, dites « africanisées », a été découverte. Appelées également abeilles tueuses, elles sont reconnues comme excessivement agressives et beaucoup moins accommodantes. Elles auraient tué, rien que l’année passée, pas moins d’une centaine de personnes à travers l’Amérique ! La nature aurait-elle décidé de réagir ? La suite de cet insoutenable thriller bientôt dans les salles…

Emilie Lessire

avons pu découvrir dans les différents films de morts vivants. Avec une mise en scène soignée, Jonathan Levine signe ici un film qui est, un peu trop rapidement à notre goût, rapproché à la saga à succès de Twilight, l’œuvre étant beaucoup plus fignolée que la comédie vampirique. Le défaut du film réside cependant dans les quelques scènes à caractère kitsh-rosebonbon (qui le différencient du roman). Des cœurs battants dans la poitrine des zombies au « coup de foudre » surjoué, certaines images dénotent totalement avec l’atmosphère plus drôle que romantique que Warm Bodies nous donne à voir. Certes les incohérences sont nombreuses et la fin, différente de celle d’Isaac Marion, est une réelle déception mais le film en lui même reste une œuvre bon enfant qui, si elle ne marquera probablement pas les esprits, nous permet malgré tout de passer un bon moment.

Roxane de Quirini


Movie 43 peut paraître, au premier abord, un film très alléchant, à aller voir de toute urgence, au vu du casting géant que Peter Farelly a réussi a réunir autour de ce projet de film à sketchs. Malheureusement, alors qu'il vend, à Hollywood, un projet qui sort du quotidien, "avec lequel ils ont essayé de faire quelque chose de différent", on n'y voit que la suite des Dumb&Dumber et Stuck On You.

Movie 43 de Peter Farrelly sortie le 27 mars 2013 Comédie (93ʼ) Avec Gerard Butler, Hugh Jackman, Kristen Bell, Kate Winslet, Naomi Watts

Tad lʼexplorateur dʼEnrique Gato sortie le 27 mars 2013 Animation (91ʼ)

Pire, ce film est un navet, avec des scénarios dignes d'adolescents prépubères. Seules trois séquences, complètement noyées dans le torrent de sketchs que les Jackass auraient déboutés, sont à sauver. La première, Homeschooled, nous fait découvrir, en même temps qu'un couple, fraîchement arrivé dans sa nouvelle banlieue, toutes les humiliations que leurs voisins, d'apparence charmante, font subir à leur pauvre gamin. Pour son malheur, ses parents se sont mis en tête de lui donner ses cours à la maison, avec toutes les mauvaises expériences qu'un adolescent moyen subit au collège. Il est à voir pour les visages effarés des voisins, au fur et à mesure des

Tout droit sorti d’une Espagne décidément pleine de surprise, Tad l’Explorateur est un film d’animation pour petits et grands. Réalisé par Enrique Gato pour faire suite à deux courts-métrages sortis en 2004 et 2012, Tad l’Explorateur raconte l’histoire d’un jeune homme passionné depuis toujours d’archéologie mais qui, à part des vieilles chaussures ou des bouteilles de Coca-Cola, n’a jamais rien trouvé et n’est pas très doué. En accompagnant un ami archéologue, il est pris à sa place dans un avion à destination du Pérou et part pour une mission périlleuse. Avec l’aide de Sarah, son contact sur place, d’un perroquet muet et de son fidèle chien et de Bernardo, il va affronter mille dangers pour trouver la Cité Perdue de Païtiti et protéger tous ses amis. Pourra-t-il devenir l’égal de son héros de toujours, l’archéologue médiatique Max Mordon ? Loin des budgets pharaoniques américain de Disney ou Dreamworks, nous assistons à l’essor des films d’animations de qualités venus de pays européens qui, à défaut d’argent, ont des idées. Le Danemark nous a

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confidences des parents, Naomi Watts et Liev Schreiber. Le deuxième sketch, Truth or Dare, met en scène Halle Berry et Stephen Merchant dans un blind date d'un nouveau genre. Halle Berry propose de pimenter les choses en bouleversant complètement les règles et les questions d'usage. Tout cela donne un "Action ou Vérité ?" détonnant dont les conséquences sont à la hauteur des rouages infernaux et adolescents de Peter Farrelly. La dernière petite histoire, Middle School Date, est assez mignonne aux premiers abords, avec deux adolescents, joués par Chloë Grace Moretz et Jimmy Bennett, pendant un rendez-vous, à la maison, sous la surveillance des parents. Tout se passe pour le mieux, jusqu'à ce que la nature, féminine, s'en mêle… Ce film à tiroirs n'aurait dû sortir qu'en DVD. Mais, avec une telle flopée de stars, comme dans les comédies romantiques que les américains adorent, les circuits de distribution ne pouvaient rater une telle opportunité. Pourtant, on s'y ennuie pendant plus de nonante minutes… Adeline Delabre

livré le truculent Ronal the Barbarian et maintenant l’Espagne arrive avec son Tad l’Explorateur. La grande force du film est la dérision des personnages et les trouvailles originales pour chacun d’entre eux. Que ce soit Bernardo toujours prêt à vendre n’importe quoi et n’importe quand, ou le perroquet muet et sa manière de communiquer (à voir à tout prix !) en passant par un Tad, gauche et attachant. Bourrée de références aux grands films d’aventures comme Indiana Jones ou James Bond, l’histoire reste pourtant simple, principalement à destination des enfants. De fait, les méchants sont très méchants et les gentils sont très gentils. Malgré une fin un peu trop faiblarde, Tad l’Explorateur éblouira et enchantera les enfants. Mais l’humour est si décapant et les trouvailles si sympathiques, que le public adulte ne manquera pas de se tordre de rire.

Loic Smars

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Gepetto est un menuisier talentueux mais pauvre. Un jour, il décide de sculpter un pantin de bois qui, par magie, prend vie. Mais Pinocchio est un enfant turbulent qui suit ses envies quel que soit l’endroit où elles le transportent. Par amour, Gepetto pardonnera et essaiera d’éduquer son enfant en lui donnant la liberté qui lui a tant manqué étant enfant. En route pour un monde fantastique où les rêves sont rois…

Pinocchio de Enzo DʼAlo sortie le 27 mars 2013 Animation (80ʼ)

Pinocchio est une nouvelle adaptation très attendue des célèbres aventures du petit garçon en bois du journaliste et écrivain toscan Carlo Collodi. Après La Mouette et Le chat, Enzo D’Alo signe ici un long métrage avec la collaboration artistique du dessinateur Lorenzo Mattoti et bercé par une musique de Lucio Dalla. Après une première mondiale au festival de Venise, Pinocchio a également connu un franc succès en Belgique puisqu’il affichait complet lors de l’ouverture du festival Anima 2013.

à ce monde imaginaire. Bien que moins attachant que dans la version de Disney, on lui retrouve son innocence et sa bonne humeur. Les dessins sont originaux et la bande originale du film est le petit pont qui nous décide à investir, nous aussi, ce monde fantastique où les enfants sont rois. L’histoire de Pinocchio fait des adeptes depuis plus de 100 ans et pas seulement sur grand écran. En effet, une multitude d’adaptations, littéraires, théâtrales, télévisées, cinématographiques et en bandes dessinées, sans compter des centaines de traductions, de versions illustrées ainsi que les mises en musique et en chanson, ont été tirées du conte original. Les Aventures de Pinocchio a également été le deuxième livre le plus vendu en Italie au 20e siècle avec un tirage de 9 à 10 millions d'exemplaires.

Emilie Lessire

On l’a attendu et on a bien fait ! Fidèle au Pinocchio de nos souvenirs, Enzo d’Alo donne un coup de jeune au pantin de bois et C’est en Argentine, dans la banlieue de Buenos Aires, que l’on appelle Elefante Blanco, que se déroule l’histoire. Le film s’ouvre avec une attaque paramilitaire en plein cœur de la jungle réduisant à néant le projet mis en place par le père Nicolas (Jérémie Rénier). Le père Julian (Ricardo Darin) vient le chercher pour le ramener avec lui.

Elefante Blanco de Pablo Trapero sortie le 13 mars 2013 Drame (110ʼ) Avec Ricardo Darin, Jérémie Renier, Martina Gusman

Julian a effectué un travail de longue haleine, en faisant marcher ses relations publiques, afin de construire un hôpital dans la banlieue. Pour l’aider, il est accompagné par Luciana (Martina Gusman), une belle assistante sociale, ne partageant pas la foi de Julian mais partageant son envie d’aider autrui. L’équilibre est ténu et l’arrivée de Nicolas va venir le perturber. Sa foi vacille, est ébranlée en même temps que les tensions, les bouleversements et la violence ne font qu’augmenter dans les bidonvilles. Alors que Luciana lutte avec les ouvriers qui désirent se faire payer, le ministère décide de mettre fin au projet de construction. Il n’en faut pas plus pour que l’équi-

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libre déjà bien ébranlé soit définitivement rompu. Elefante Blanco est un superbe film sur la foi ou plus largement sur le don de soi. Sur la difficulté de toujours aller vers l’autre même quand la fatigue et la lassitude nous donneraient plus envie d’envoyer tout le monde paitre pour un peu de repos. On suit trois personnages en proies à ce doute infime qui bouscule des fois et des principes. Que ce soit le père Julian qui lutte pour préserver l’ordre, qui lutte aussi contre sa maladie, que ce soit le père Nicolas qui lutte avec la culpabilité d’avoir survécu à l’attaque, qui lutte contre les envies de la chair, que ce soit Luciana qui lutte quotidiennement pour améliorer la vie des gens sans parfois y voir une quelconque reconnaissance. Pas d’emphase visuelle, pas d’appesantissement, assez classique, la caméra cerne les échanges, privilégiant l’humain au paysage. Avec comme cadre les bidonvilles de Buenos Aires, il est difficile de ne pas se plonger dans le film.

Elodie Kempenaer



Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Films à l’horizon (sorties du 20/3) Pierre de Patience

Pas

vus

!

La religieuse

Drame, Guerre de Atiq Rahimi

Drame de Guillaume Nicloux

Avec Golshifteh Farahani

Avec Pauline Etienne, Isabelle Huppert

Au pied des montagnes de Kaboul, un héros de guerre gît dans le coma ; sa jeune femme à son chevet prie pour le ramener à la vie. La guerre fratricide déchire la ville ; les combattants sont à leur porte.

XVIIIe siècle. Suzanne, 16 ans, est contrainte par sa famille à rentrer dans les ordres, alors qu’elle aspire à vivre dans « le monde ». Au couvent, elle est confrontée à l’arbitraire de la hiérarchie ecclésiastique : mères supérieures tour à tour bienveillantes, cruelles ou un peu trop aimantes.

Avant d’être un cinéaste, Atiq Rahimi est un romancier à succès, lauréat du prestigieux prix Goncourt en 2008 pour le livre dont ce film est tiré. Qui de mieux que l’écrivain lui-même, afghan de surcroit, pour transposer à l’écran cette histoire dramatique et tristement réaliste.

Même si un nouveau pape a pris la place de Benoit XVI, ce n’est pas pour autant que le monde du cinéma arrête d’égratigner l’Eglise. Si ce film n’est pas un pamphlet pur et simple, il s’attaque néanmoins au mutisme de cette institution. Adapté du roman de Denis Diderot, un film à voir.

Festival Hallucinations collectives du 22 mars au 1er avril 2013 Cette année encore les portes de la Comoedia s’ouvriront pour la manifestation majeure du cinéma de marge de Lyon, le Festival Hallucinations Collectives. Initiative de Zonebis, elle rassemblera pour la sixième fois des premières et avant-premières, des pépites trop rares du cinéma, des invités passionnés, des conférences et nous en passons ! La programmation dévoilée il y a une douzaine de jours, nous fait part d’un panaché de petites merveilles. Une compétition internationale tout d’abord qui rassemble des noms de films qui ont marqué l’année (Citadel, The Body…). Des activités autour des jeux vidéos sont également proposées, une conférence sur son histoire, un Game Jam… Ajoutez à cela une lecture publique, une carte blanche de Nicolas Boukhrief, un concert, une exposition…

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Bref, à Hallucinations Collectives il y en a pour tous et pour tous les goûts ! Le festival s’ouvrira en fanfare avec le récompensé Citadel (Prix du Public du Paris International Fantastic Festival) de Ciaran Foy et se clôturera sur l’énorme chef-d’œuvre de Tsui Hark, Dragon Gates, La légende des Sabres Volants en 3D (et ce sera pour nous la dernière chance de pouvoir admirer cette production sur un grand écran français). Bien sur Le Suricate, lui aussi sera de la partie et ne manquera pas de vous relater ses aventures hallucinées…

Roxane de Quirini


Films à l’horizon (sorties du 27/3) Les Croods Animation de Chris Sanders

Arnaque à la carte

Pas

vus

!

Comédie de Seth Gordon

Une chanson pour ma mère Comédie de Joel Franka

Avec Jason Bateman, Melissa McCarthy, Amanda Peet

Avec Patrick Timsit, Sylvie Testud, Dave

Lorsque la caverne où ils vivent depuis toujours est détruite et leur univers familier réduit en miettes, les Croods se retrouvent obligés d’entreprendre leur premier grand voyage en famille.

Diana mène grand train dans la banlieue de Miami, et s’offre tout ce dont elle a envie. Il n'y a qu'un souci: l’identité qu'elle utilise pour financer ses folies n’est autre que celle d’un chargé de comptes "Sandy Patterson Bigelow" qui vit à l'autre bout des États-Unis.

Quelque part dans les Ardennes, aujourd’hui… C’est parce qu’ils adorent leur maman qui est en train de disparaitre, que les membres de cette famille décomposée décident de lui offrir le plus incroyable des cadeaux d'adieu: Dave, le chanteur, son idole, en personne !

Les studios DreamWorks s’en frottent déjà les doigts, ce long métrage d’animation devrait enchanter les plus jeunes d’entre nous. Sous la houlette de Chris Sanders, qui avait quitté Disney pour le concurrent DreamWorks, c’est l’occasion de réaliser un nouveau chefd’oeuvre après avoir excellé dans la production du film Dragons.

Ce film au budget confortable a bien fonctionné outre-Atlantique. Néanmoins, on se doute que le scénario et les blagues potaches ne doivent pas être des incontournables du genre. Cela dit, Seth Gordon reste sur le succès de Comment tuer son boss ? où l’on retrouvait déjà le très en vogue Jason Bateman. Un film peut-être intéressant.

Si vous vous êtes rendus récemment dans les salles obscures du royaume, vous n’aurez pas pu échapper à la bande annonce de ce film qui promet une belle migraine et une bonne dose d’ennui. Si Dave nous horripilait déjà, le mettre en scène est une flagellation pour nous. En outre, c’est ce film qui a été choisi par Disney pour s’implanter en Belgique.

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19 mars 2013



l’actu cinéma

©D.R.

Retour des vieux «guerriers»

Depuis octobre 2012 et la reprise de Lucasfilm par Walt Disney Company, le monde entier a été mis au courant de la volonté de la compagnie californienne de continuer à produire des films sur Star Wars. Le premier de ceux-ci est prévu pour 2015. Si son titre est encore inconnu à ce jour, le réalisateur qui s’attèlera à trouver une suite logique à la saga sera sans aucun doute J.J. Abrams (Super 8). Le scénario est, quant à lui, en cours d’écriture sous la plume de Michael Arndt oscarisé pour le script de Little Miss Sunshine. Selon les médias d’outre-Atlantique, la présence de Harrison Ford dans la peau de Han Solo ne fait plus de doute et la signature de Mark Hamill (Luke Skywalker) ne serait plus qu’une formalité. Un retour aux fondamentaux qui plairait aux aficionados d’autant que dernièrement, c’est le nom de Carrie Fisher qui a été cité dans la presse américaine. L’actrice était l’égérie de la première saga où elle incarnait la princesse Leïa. M.M.

Box office Belgique 1. Beautiful Creatures 2. Die Hard 5 3. Boule & Bill 4. Hapiness therapy 5. Django Unchained 6. Broken City 7. Frits & Franky 8. Les Misérables 9. Hansel and Gretel 10. Argo Source : Box Office Mojo

DVD - Blu ray

Tintin repartira à l’aventure Enfin une date filtre concernant la sortie très attendue du second volet du film d’animation Tintin créé par Steven Spielberg. C’est l’intéressé lui-même qui a confié l’information au Times of India. Selon toute vraisemblance, ce second opus verra le jour aux alentours de Noël 2015. De fait, le scénario semble être bouclé et le tournage devrait commencer.

©Sony Pictures Releasing

Du 6 au 10 mars 2013

Concernant l’histoire, le réalisateur n’a pas souhaité révéler les albums choisis mais confirme bien que nous aurons droit à la reproduction de deux albums déjà construits comme un diptyque. Selon certaines rumeurs, les titres « Les sept boules de cristal » et « Le temple du soleil » restent les plus probables car Peter Jackson avait avoué s’intéresser de près à ces derniers, bien avant la production du premier film. M.M.

Les Trois Frères la suite Voilà une info qui devrait en ravir plus d’un. Le film Les trois frères sorti sur nos écrans en 1995 devrait connaitre une suite. Depuis quatre ans déjà, le trio Bernard Campan, Didier Bourdon et Pascal Légitimus avait annoncé qu’un nouveau film était en chantier. Finalement, celui-ci n’avait pas passé le stade du projet malgré une attente certaine de la part des fans du film qui avait amené près de sept millions de français dans les salles obscures. Aujourd’hui, le pas semble être fait et, selon certains médias hexagonaux, le tournage du film commencera en mai prochain. Selon ces mêmes sources, le scénario sera signé par Bernard Campan et Didier Bourdon alors que la production sera confiée à Philippe Godeau (Les émotifs anonymes). La teneur de l’histoire reste pour l’instant confidentielle mais si le titre Les trois pères circule avec insistance au sein du milieu cinématographique. Reste à savoir si les trois acolytes arriveront à donner un sens à une histoire qui fêtera bientôt ses vingts bougies. Quant à Antoine du Merle qui incarnait le fameux enfant, clé de voûte de l’histoire, rien à encore été dévoilé sur un éventuel retour de cet acteur devenu adulte mais resté comédien dans des séries télévisées. M.M.

Argo de Ben Affleck

Le 4 novembre 1979, au summum de la révolution iranienne, des militants envahissent l’ambassade américaine de Téhéran, et prennent 52 Américains en otage. Mais au milieu du chaos, six Américains réussissent à s’échapper et à se réfugier au domicile de

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l’ambassadeur canadien. Sachant qu’ils seront inévitablement découverts et probablement tués, un spécialiste de "l’exfiltration" de la CIA du nom de Tony Mendez monte un plan risqué visant à les faire sortir du pays. 19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Ce double DVD est une étude sur la vie du philosophe Levinas, qui s'acheva peu de temps après ses dernières apparitions à l'image. C'est à Paris qu'il meurt en 1995. Dans la première partie de ce DVD Biographie et Philosophie, vous pourrez, à travers un entretien avec Levinas, découvrir sa vie. Il évoque dans cette interview, quelques légers souvenirs d'enfance, tel que la mort de Tolstoï et ses premières confrontations à l'antisémitisme.

Levinas de David Hansel et Isy Morgensztern sorti le 5 février 2013 Documentaire DVD 1 : 126ʼ DVD 2 : 132ʼ

Levinas grandit dans une famille où le fait d'être Juif dépasse le rythme de vie publique, déterminant ses journées et ses semaines. Entre les prières quotidiennes et les lectures approfondies de la bible, le petit Levinas apprend à six ans déjà l'hébreux moderne ainsi que le russe, mais sur des boites de cacao, car faire partie d'une élite intellectuelle n'exclut pas de se permettre des moments de détente absolue. Son destin de cerveau autarcique était déjà tout tracé, un passeur de pensées, un canal à concepts, voilà comment on pourrait qualifier cet homme dont on découvre pourtant dans cet entretien, ses côtés les plus humains. Durham, Caroline du Nord. Le 9 décembre 2001 Michael Peterson, romancier à succès, découvre le corps sans vie de sa femme Kathleen. Après un appel aux urgences locales, désespéré et hoquetant de larmes, impuissant et maculé du sang de sa femme, Michael se retrouve inculpé par le procureur Jim Hardin. A l'aboutissement de ce procès scandaleux, Peterson, écope d'une peine de prison à vie, sans aucune preuve tangible de sa culpabilité.

Soupçons de Jean-Xavier de Lestrade sorti le 30 janvier 2013 Documentaire (130ʼ)

Le réalisateur Jean-Xavier de Lestrade, a dans un premier temps, suivi Michael Peterson et son avocat durant le procès de 2003. Lorsque de nouveaux éléments sont découverts en 2010, l'enquête est ré-ouverte et Jean-Xavier de Lestrade retourne avec son équipe dans l'intimité de la famille Peterson. Soupçons est le témoignage d'une vie qui bascule, d'une descente aux enfers. Il n'est plus à prouver que la justice américaine frôle bien trop souvent la démence. Et dans ce cas précis, elle en est l'illustration parfaite. Assister aux plaidoiries senten-

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Et dans une des parties de ce DVD consacrées aux témoignages, c'est Ariel Wizman, chroniqueur et écrivain français, qui prend le rôle de l'ancien élève et évoque, le rire au coin des yeux, ses quelques souvenirs glorieux en présence du philosophe. Le doute plane cependant quant aux réelles croyances du philosophe. Un être très pieux, grand praticien du judaïsme. Pour les inconditionnels de philo, les aficionados du sport de neurones, et ceux qui aimerait exhiber dans leur DVDthèque autre chose que les trois premières saisons de "Desperate Housewives", c'est vivement que je vous recommande l'achat de ce double DVD.

Cécile Marx

cieuses et bien-pensantes des avocats de l'accusation est un spectacle révulsant. Lorsque l'on prend conscience que ce film de deux heures et dix minutes, représente huit ans d'enfermement loin de tout, loin du contact charnel des êtres aimés, loin de la compréhension des médias qui déroulent sournoisement leur intimité, allant d'affirmations mensongères en prise de partie haineuse, on est inévitablement parcouru d'un frisson de révolte nauséeux. Car ce qui rend Soupçons si fort c'est la proximité entre nous et cette famille. Ils sont vous et moi, qui du jour au lendemain se retrouvent enfermés dehors lorsque leur père l'est dedans. Soupçons oscille entre une évidente compassion pour la famille Peterson, et le devoir de ne pas omettre que derrière le doux regard bleu de Michael se cache peutêtre un assassin. Tueur d'une unique victime dont la mort laissera le dessin d'un immense point d'interrogation.

Cécile Marx


BIFFF 2013, BIFFF de la b**** ! AFFFril arrive et nous revoilà, dans la voiture ...

- Que dit le corbeau ? -

L’ évènement Pardonnez-moi tout d’abord mon écart de langage, heureusement protégé par des astérisques, je l’espère pertinentes. Si ce titre vous a offusqué d’emblée, ne poussez pas plus loin votre curiosité. Car le BIFFF, pour ceux qui ne le savent pas, c’est tout de même des meurtres, du sexe, des monstres et une tonne d’autres déviances. Cette année encore, du 2 au 13 avril, le BIFFF et ses BIFFFeurs envahissent Bruxelles pour 10 jours de fantastique. La plus grande originalité de cette année est le déplacement au Bozar en plein coeur de Bruxelles (+1). Mais beaucoup redouterons sûrement l’adaptation au BIFFF d’une salle qui est fort loin du style de ce genre d’évènement (-1). Mais il y a deux salles, donc plus de films (+1). Nous serons cinq journalistes du Suricate Magazine à essayer de vous faire vivre ce festival. Vous pourrez nous suivre en direct sur Twitter (@SuricateOrg), ainsi que lire l’intégralité du reportage dans notre numéro spécial BIFFF d’avril ou en résumé dans la parution du 2 avril. Mais qui vient à la sÔterie ? L'Ordre du Corbeau accueillera un nouveau membre : Neil Jordan, le réalisateur d’Entretien avec un vampire, Ondine, Crying Games, etc. Mais l’avantage au BIFFF est d’aussi d’avoir les équipes des films ou des gens du milieu dans les jurys. Citons par exemple : Dario Argento (!!!),

Frédéric Fonteyne, Vincent Lannoo, John Hough, Roland Joffé (!!!), Patrick Ridremont, Iain Softley, ... C’est bien, mais on voit quoi comme films ? Le BIFFF c’est évidemment des dizaines d’avant-premières européennes ou internationales. Dès l’ouverture, il faudra aller voir le nouveau film de Neil Jordan, Byzantium et un retour aux vampires dans la salle 1 et The Imposter, le documentaire sur Frédéric Bourdin qui a défrayé la chronique en prenant la place de gens disparus dans la seconde.

« Le BIFFF cʼest des meurtres, du sexe, des monstres et une tonne dʼautres déviances ! »

En fermeture, le dernier film de Chan-Wook Park, Stoker avec, entre autres, Nicole Kidman en salle 1 et en salle 2, The Brass Teapot avec Juno Temple (Killer Joe). C’est aussi plusieurs sections : Belgorama, Inédits, 1ère réa, Fils de Brutes (fils ou fille de Lynch, Cassavetes, Cronenberg ou Hough), BIFFF en herbe pour les plus jeunes (The Host, Jurassic Park 3D, Moon Man, etc.), une nuit du Fantastique, des com-

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pétitions, des courts-métrages, des films de minuit,etc. Et on fait quoi d’autre ? Il y a des Cosplay, des Body Painting, des artistes de rue, des maquillages, une ZombiFFF parade, des Masterclass (Jordan, Argento, etc.), des expos, des rétrospectives à la Cinematek, des Workshops, etc. Cette année encore, les organisateurs ont sorti la grosse artillerie, de nouvelles idées. On était habitué certes à Tour & Taxis mais le défi Bozar est d’autant plus excitant malgré les doutes sur la classe du lieu. Suivez-nous dans les entrailles du Bozar pour découvrir, cette année encore, l’ambiance si particulière du BIFFF ... Films attendus The Host d’A. Niccol sur base d’un roman de Stephenie Meyer, Oblivion avec Tom Cruise, Mama avec Jessica Chastain, Upside Down avec Jim Sturgess et Kirsten Dunst, Maniac et Elijah Wood en psychopathe, Dracula 3D d’Argento, Hellgate avec Cary Elwes et William Hurt, etc. Twitter Live : @SuricateOrg

Loïc Smars

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Entretien

Mezzo prend un nouveau départ C’est l’histoire d’un homme qui, las de sa vie stressante de médecin, a décidé de faire ce que peu de gens oserait faire: vivre son rêve, la musique. En effet, plus d’un patient fut surpris par cette décision d’arrêter son métier pour se consacrer à cette carrière musicale. Pourtant, aujourd’hui, c’est un Mezzo apaisé et détendu que nous avons rencontré lors de son concert au Passage Oublié de Florennes. Voici son histoire...

La rencontre Bonjour, Giuseppe! Merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Tout d’abord, peux-tu nous parler de ton parcours ? J’ai commencé à jouer de la guitare lorsque j’avais une dizaine d’années. Puis, suite à la pression familiale, je me suis mis dans une bulle, et j’ai choisi de faire les études les plus longues, celles de médecine. Je les ai réussi, et sans trop me poser de question, j’ai laissé ma guitare de côté pendant près de dix ans. Ensuite, je me suis installé comme médecin, j’ai ouvert un cabinet médical avec d’autres médecins. Vers l’âge de trente ans, j’ai eu un «burn-out», j’étais marié, j’avais deux enfants. Mais je trouvais que je n’avais pas donné un sens à ma vie. J’ai donc fais une grosse remise en question et j’ai choisi d’aller vers ce qui me correspondait le plus : la musique.

médecine. Ce ne fut pas une décision facile. Elle a surtout été aidée par certains voyages que j’ai fais. Je suis allé plusieurs fois en Afrique, à SaintJacques-de-Compostelle (2000 km) ainsi que dans les montagnes. Cela m’a permis de me remettre face à moi-même et de prendre la bonne décision. En 2011, j’ai fais un premier album (A zéro), on a fait 25 dates en acoustique. Et nous préparons actuellement un deuxième album et une tournée électrique. Lorsque tu as quitté le monde de la médecine, tu as perdu un certain confort de vie. Qu’as-tu ressenti et quelles sont les difficultés auxquelles tu as dû faire face? J’ai ressenti à la fois de la frustration et de l'apaisement. Je pensais que les choses se feraient plus facilement.

Ce ne fut pas une décision prise à la légère. J’ai consulté des spécialistes pour savoir si j’avais un problème psychologique. Ceux-ci m’ont vite rassuré et j’ai alors mis les choses progressivement en place en faisant à la fois la médecine et la musique. Et puis, je me suis vite rendu compte que je ne pouvais décemment pas faire les deux à la fois. Le fait de devoir attendre pour jouer de la musique devenait angoissant. Je devais rester honnête avec moi-même et donc j’ai décidé d’arrêter la

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La frustration était due au fait que j’avais vécu dans un milieu aisé, et que tout à coup, tout devenait difficile. Mais le soulagement était là aussi car je m’était débarrassé de tout un tas de besoins que je croyais nécessaires avant ce changement. Quand je me suis rendu à Saint-Jacques-de-Compostelle, je me suis soulagé de tous mes biens excepté mes guitares et les chambres de mes enfants ainsi que leurs jouets. J’ai vraiment joué le jeu jusqu’au bout pour me rendre compte de ce que c’était que de se retrouver sans rien. Et je me suis rendu compte alors que l’on n’avait pas besoin de grand chose finalement. Par contre, pour pouvoir exister dans ce genre de projet, il faut se donner des moyens. Cela ne sert à rien de se voiler la face. Et ça fait partie de ma frustration car je n’avais pas prévu que cela pourrait être aussi compliqué.


En même temps, tout est toujours compliqué en Belgique...

Quels sont tes projets dans l’immédiat?

Oui, et les critiques, en Belgique, sont très difficiles. Mais en même temps, cela permet aussi aux artistes d’être reconnus à leur juste valeur. Lorsque l’on prend les artistes belges reconnus, ce sont des gens avec des valeurs, parce que justement, les belges sont très difficiles et très critiques.

Je vais continuer cette tournée acoustique avec Sabrina, qui m’accompagne dans la vie et au chant. Nous allons faire encore quelques dates comme celle-ci. Puis je vais préparer une tournée électrique parce que je pense que le fait de ne faire que de l’acoustique ou de l’électrique ne va pas me faire grandir dans ma démarche artis-

Les thèmes évoqués dans tes chansons sont-ils autobiographiques? Ou, te sers-tu de thèmes imagés?

As-tu soumis ton projet à un label?

Il y a un peu des deux. La majorité est autobiographique, mais pas uniquement. Je me suis inspiré de ma vie professionnelle et de la vie autour de moi. Ce premier album était assez thérapeutique. Le prochain album sera plus ouvert et «accessible». Ce soir, tu as joué ce set acoustique en étant très proche du public. C’est quelque chose que tu préfères par rapport aux grandes salles? C’est beaucoup plus stressant pour moi de jouer devant vingt ou cinquante personnes comme on l’a fait ce soir car les gens sont très demandeurs. Je vois leur regard et j’essaie de donner le meilleur de moi-même. Mais après, je ressens comme de l’endorphine, je me sens bien. Je pense que j’ai réussi à donner un petit quelque chose. J’ai toujours ce côté altruiste qui vient de la médecine. Je n’ai pas fait ces choix par hasard, donc ceci explique cela. J’essaie d’être disponible pour les gens tout en gardant une certaine limite. Ma compagne, Sabrina, m’aide beaucoup à garder ce lien avec le public au travers de ma page Facebook par exemple.

pour développer mon projet. J’ai donc choisi des musiciens que je ne connaissais pas. Je souhaite à présent privilégier une approche plus professionnelle et sans doute que des liens d’amitié se tisseront par la suite. Je préfère cette démarche-là et je pense que ce coach avait tout à fait raison. J’essaie de m’enrichir de l’expérience des gens au lieu de devoir vivre cette expérience plusieurs fois pour finir par comprendre. Je ne peux pas me permettre d’attendre vingt ans, j’ai envie d’avancer.

tique. J’ai été habitué à travailler beaucoup pendant que j'exerçais en tant que médecin et je pense que je serai toujours ainsi. Comment as-tu choisi tes musiciens? Sont-ils des amis à qui tu as proposé de rejoindre l’aventure? Disons que c’est plus compliqué que cela. Quand j’ai gagné le 2ème prix de la chanson française à Charleroi, l’un des coach de ce concours m’a dit: « On ne fait pas toujours de la musique avec des amis. Mais c’est en jouant avec des inconnus, qu’ils deviennent souvent tes amis ». Cela m’a fort perturbé, car j’avais fais la démarche inverse et je me suis rendu compte que ce n’était vraiment pas facile à gérer. Et j’ai donc changé mon fusil d’épaule. Cela devenait nécessaire

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Non, car j’ai à la fois peur de l’échec. Mais aussi d’une réponse positive, car je redoute de ne plus avoir la main mise sur ma démarche artistique. Je veux garder une certaine indépendance et ne pas devoir satisfaire les consignes de gens externes. Ceci dit, je sais qu’à un moment donné, il faudra que je m’entoure de gens importants et que je fasse du lâcher-prise. L’idéal serait d’avoir un label qui gérerait certaines tâches et me laisserait développer mon côté artistique de mon côté. Et bien merci beaucoup pour ces réponses sans détour, Mezzo! Nous te souhaitons le meilleur pour ta carrière. Merci et à bientôt! Retrouvez toutes les dates de concerts et l’album de Mezzo sur: www.mezzo.fm

Propos recueillis par Christophe Pauly

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Entretien

a le vent en poupe Acclamé par la presse, certifié disque d’or, Kvelertak a frappé fort dès le début. Les norvégiens ont tourné énormément depuis la sortie du disque et viennent de sortir un deuxième opus: Meir. Nous avons demandé à Erlend Hjelvik, le chanteur, de nous parler de ce nouvel album.

La rencontre Tout d’abord, beaucoup de critiques ont souhaité vous caser dans un genre bien précis. Mais ils se sont retrouvés avec des opinions très différentes au final. Comment décririez-vous votre style musical ? On appelle ça juste du Rock! J’ai constaté que vous aviez trois guitaristes, ce qui est assez particulier. Comment organisez-vous leur différentes parties ? C’est une question difficile pour moi en tant que chanteur, mais je sais que Vidar fait la rythmique. Tandis que Bjarte et Maciek s’échangent les parties lead. Votre premier album, Kvelertak, a été très bien reçu par la critique et a gagné différents prix dont le disque d’or. Quelle a été votre réaction par rapport à ce succès ? Y étiezvous préparés ? Je savais que l’album allait être bon lorsqu’on a fait appel à Kurt Ballou pour enregistrer dans son studio, le Godcity, dans le Massachusets. De plus, John Baizley se chargait de la pochette. Mais je dois dire que je ne pensais pas que cela fonctionnerait aussi bien! Donc, oui, nous avons été assez surpris par ce succès. Mais nous n’avons pas cessé de penser qu’il fallait rester actifs.

Meir, votre second album sort en mars. Etait-ce difficile de faire cet album après un tel succès ?

C’est bizarre que peu de groupes chantent dans leur propre langue, ce serait plus intéressant !

Le plus difficile était de trouver le temps pour l’écrire! Nous avons consulté notre planning et avons demander à notre bookeur de ralentir la cadence pour que ce soit possible. La plus grande partie des morceau a été écrite entre juin et juillet. Donc tout a été écrit dans un laps de temps plus court. Mais tout est venu assez naturellement une fois qu’on a commencé.

Les pochettes de vos albums sont assez particulières. Peux-tu nous en dire quelques mots?

Vous avez enregistré au studio Godcity le studio de Kurt Ballou. Pourquoi ce choix ?

Quels sont vos projets pour les prochains mois ?

Ce studio est superbement équipé. Kurt a une bonne oreille pour déceler la façon dont doivent sonner les choses. De plus, il est honnête et professionnel. Il vous dit de suite si quelque chose cloche et ne vous laisse pas continuer sur une mauvaise prise.

C’est John Baizley du groupe Baroness qui s’en est chargé. Je lui ai donné une traduction des paroles et il s’en est inspiré pour les dessins. Il y a beaucoup d’éléments que l’on peut retrouver en observant la pochette.

Nous allons beaucoup tourner et jouer en festivals également!. Merci d’avoir répondu à nos questions et rendez-vous sur la route!

Ce fut une très bonne expérience de travailler avec lui. Donc, nous avons choisi de refaire la même chose. Pourquoi chantez-vous en norvégien ? Cela m’a semblé plus naturel d’écrire et de chanter en norvégien puisque c’est ma langue maternelle.

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Meir est disponible chez records.

Propos recueillis par Christophe Pauly


In Memoriam R.I.P. Alvin Lee... Bien triste nouvelle dans le monde du Blues-Rock. Alvin Lee, le génial guitariste et chanteur, est décédé ce 6 mars 2013 suite à des complications lors de ce qui étais censé être une « petite » opération chirurgicale. Né le 19 décembre 1944, il fonda 16 ans plus tard le groupe The Jaybirds, avec lesquels il se fit remarquer dans le célèbre Star Club de Hambourg. Après avoir changé plusieurs fois de noms, le groupe connut un succès mondial sous le nom Ten Years After, suite à leur passage inoubli-able au festival de Woodstock en 1969. Encore de nos jours, impossible d’évoquer ce festival sans parler de l’incroyable prestation d’Alvin Lee sur le morceau I’m Coming Home. De groupe prometteur écumant les petits clubs, leur statut se changea en celui de superstar, jouant leur rock électrisant dans les plus grandes salles du monde.

Malgré sa notoriété, Alvin Lee confessa dans les années 70 que l’ambiance plus intimiste des petits clubs de ces débuts lui manquait terriblement. Ce fut une des raison qui le poussa à s’éloigner assez régulièrement de Ten Years After pour tenter diverses autres expériences musicales. Il enregistra avec Ten Years After une dizaine d’albums, dont une bonne partie connut un immense succès dans les charts anglais. Difficile de ne retenir qu’un ou deux albums du groupe, pratiquement chaque opus possédant d’énormes qualités. Par contre, Love Like a Man fut le seul single à se retrouver en haut des Charts. Il composa également toute une série d’albums solo et participa également à pas mal de projets pour lesquels il collabora avec les plus grands ( Mick Taylor, Steve Winwood, George Harrison pour ne citer qu’eux ).

Alvin Lee possédait son propre style de jeu bien caractéristique, inspiré par des guitaristes comme Chuck Berry et Scotty Moore. Surnommé par certains le Speedy Gonzales de la guitare, il était aussi réputé pour ses talents de compositeur que pour sa manière d’enflammer et de ravir ses fans en live avec son jeu complètement électrisant. Salut l’Artiste et merci pour tous ces bons moments musicaux.

Julien Sterckx

...et Clive Burr Les fans du légendaire groupe Iron Maiden sont inconsolables. En effet, Clive Burr, ancien batteur du groupe, est décédé ce 12 mars 2013 des suites d’une longue et éprouvante maladie. Clive Burr avait commencé sa carrière dans le groupe Samson, ou il officiait en compagnie d’un certain Bruce Dickinson. Ensuite, il avait enregistré les trois premiers albums de Iron Maiden, et avait donc largement contribué à la création de la légende du groupe. En 1983, après son départ de Maiden, il avait également participé au 4ème album de Trust, succédant à Nicko

McBrain qui lui s’était alors retrouvé derrière les futs de… Iron Maiden. Il participa ensuite pendant une dizaine d’années à divers projets, sans jamais retrouver le succès qu’il avait connu avec Iron Maiden. Pire, on lui diagnostiqua une sclérose en plaques, l’obligeant à se déplacer en fauteuil roulant.

2000 divers concerts et vente de cds au profit de l’association de Burr. Iron Maiden et ses fans n’ont donc jamais oublié Clive Burr. Je parierais d’ailleurs qu’ils doivent être nombreux dans le monde à écouter Running Free, une petite larme à l’œil.

Ayant d’énormes problèmes financiers à cause du traitement de sa sclérose, ses anciens camarades d’Iron Maiden l’aidèrent à récolter des fonds pour lui et la fondation qu’il avait créé pour l’occasion. Ils organisèrent ainsi dans les années

Julien Sterckx

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19 mars 2013


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Lofofora «Monstre Ordinaire»

At(H)ome

Avec Monstre Ordinaire le quatuor parisien nous livre un 8ème album studio (si on compte son premier maxi 5 titres) de très bonne facture après avoir arpenté la route avec leurs potes de Parabellum et Tagada Jones pour Le Bal des Enragés. Retour sur le nouvel opus des précurseurs du metal français. L’album s’ouvre d’emblée très fort avec Utopiste, un titre très «Lofoforien» : contestataire et revendicateur avec une batterie lourde et des riffs puissants. Tout ce que l’on aime donc! L’envolée lyrique de Reuno (chant) à la fin du morceau contraste cependant avec les habitudes du groupe mais apporte un aspect intéressant à la chanson. On comprend pourquoi les parisiens ont décidé d’ouvrir leurs concerts avec cette chanson depuis la sortie de l’album. Ensuite avec «Les évadés» c’est toute l’influence que Lofofora a eu sur la scène métal française qui saute aux yeux. On aurait presque l’impression d’entendre une chanson de Watcha (très influencé par le groupe parisien). S’ensuit Elixir, le seul titre de l’album à

comporter (comme au bon vieux temps) de forts accents punk avec un tempo plus rapide et toujours ce thème récurent : l’industrialisation et ses (très) mauvais côtés. Le message que Reuno vocifère est d’ailleurs plutôt pessimiste à ce niveau. Avec «Les Conquérants» le groupe dénonce le colonialisme des Amériques, dénonçant le massacre perpétré par les conquistadores espagnols. On arrive alors à ce qui est sûrement le morceau phare de l’album : «La merde en tube». Décriant bien sûr le star system et toutes les «couleuvres à la pelle» que celui-ci nous fait avaler. En 2:51 Lofofora arrive à nous faire bien headbanger et livre là une de ses compositions les plus abouties. Suivent alors «Le Visiteur» et «Ma Folie» qui raviront les fans de la première heure mais sans sortir vraiment du lot. Et tandis que «Un mec sans histoire» sent bon l’esprit dérangé de par son atmosphère lourd et pesant; «Cannibale» nous ramène des années en arrière et son thème

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morbide nous rappelle la grande époque du groupe français. Après «Frustrasong» l’album se conclut par «La beauté et la bête», qui avec ses 7:39 nous fait vibrer du début à la fin avant un final tour à tour dantesque et planant. Le doute n’est plus permis, Lofofora est bien de retour et cet album le montre à tous. Plus lourd, plus sombre et plus metal, il n’en réjouira pas moins les fans de la première heure et permettre peut être à la nouvelle génération de découvrir un peu plus l’univers de ce groupe hors du commun qui fait partie de ceux qu’on ne devrait plus présenter. S’il ne devait en rester qu’un, ce serait Lofofora.

Olivier Eggermont


Bush «Live!»

©Catherine Rigaux

16.03 19.03

Carhartt WIP présente BRANDT BRAUER FRICK feat. OM’MAS KEITH us + MARC MÉLIA be

de

JIL IS LUCKY fr + JULIEN PRAS fr

20.03 MÉLANIE DE BIASIO be • présentation nouvel album 21.03 21.03

JONATHAN JEREMIAH gb + MARCO Z be

MATMOS us + BELLE DU PARVIS be

22.03 I AM KLOOT gb

Ear Music

22.03 BAHAMAS ca FINALE DU CONCOURS DU F. DANS LE TEXTE :

ALINE fr REVERSE STRIP be LE COLISÉE be 23.03 NINA MISKINA be TEME TAN be

Après s’être rangé pendant quelques années et son mariage avec Gwen Stefani (No Doubt), Gavin Rossdale a décidé de reprendre la barre de son premier groupe: Bush. Après un retour marqué par la sortie de The Sea Of Memories, leur premier album en dix ans, Bush dû entamer une grande tournée pour rappeler au monde qui ils sont. Suite à cette tournée, ils nous livrent ici un dvd live qui reprend un concert et un set acoustique.

• coprod. Conseil de la Musique

26.03 WILD BELLE us + TWIN be 27.03 CLOCK OPERA gb 27.03 EWERT AND THE TWO DRAGONS ee 27.03 GERALD GENTY be • présentation nouvel album A NOTRE TOUR : LOMEPAL & CABALLERO, LA EXODARAP, NESHGA, GEORGIO & 30.03 SMALA, BPM, J.C.R. be • coprod. Lezarts urbains/Back in the Days

03.04 TROY VON BALTHAZAR us

Ce qui est troublant au départ, c’est que le groupe d’origine anglaise qui avait ranimé le grunge après la mort de Cobain a choisi ici le Roseland Theater dans l’Oregon pour enregistrer ce live. (Monsieur Rossdale s’étant américanisé depuis lors, ceci explique cela).

04.04

DAUGHTER gb + BEAR’S DEN dk

• SOLD OUT

06.04 CARBON AIRWAYS fr 09.04 PEACE gb 10.04 THE SHEEPDOGS ca 10.04 FICTION gb

Pour ce qui est du contenu, on retrouve bien sûr les titres qui ont fait le succès du groupe comme «Everything Zen», «Swallowed», «Machinehead» ou «Little Things». Mais aussi des titres plus récents comme «The Sound Of Winter», «I Believe In You» ou «All My Life». Et c’est là que l’on comprend pourquoi Bush est tombé un peu dans l’oubli après les années 2000.

12.04

WILLY MOON nz + THE FAMILY RAIN gb

13.04 STORNOWAY gb / BRASSTRONAUT ca 13.04 TEAM GHOST fr 14.04 14.04 17.04

KASHMIR dk + SLEEPERS’ REIGN be

MODDI no + FARAO no

HALF MOON RUN ca

18.04 JOHN GRANT us

Certes, les morceaux sont mélodieux, propres, doux... Mais c’est justement l’inverse que l’on appréciait chez eux. Un son sale et des accords imparfaits, des harmoniques bruyantes et dérangeantes. A la place, on a droit à un set plat et propre, avec pour seule ambiance les filles qui crient après Gavin (qui n’hésite pas à jouer le gigolo dans le public). Attitude très décevante, donc, de la part de celui qui fut autrefois un second Kurt Cobain.

18.04 SOPHIE HUNGER ch 20.04 THEME PARK gb 22.04 CŒUR DE PIRATE ca «piano solo» • Cirque Royal 28.04 GiedRé fr • coprod. Progress Booking 30.05 TRAMPLED BY TURTLES us 03.06 IRON AND WINE us • Cirque Royal 13.10

ANE BRUN no • Cirque Royal

…ET TOUTE LA SUITE DE L’AGENDA 02.218.37.32 – WWW.BOTANIQUE.BE

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©Anne Crahay

Christophe Pauly

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Clarika

Macha Gharibian

«La tournure des choses»

«Mars»

At(h)ome

Bee Jazz

Clarika sort déjà son sixième album. Une nouvelle série de chansons neuves, vivantes, urgentes. Un autoportrait et un panoramique sur notre époque. Un état des lieux au vitriol et une confession ironique. Un nouveau bouquet de chansons qui jouent aussi bien la couleur forte que la demi-teinte. Un sixième album en presque 20 ans. La tournure des choses est un album qui ressemble vraiment à Clarika. C’est le disque d’une habitante d’un pays en crise qui sait que notre confort a un prix, c’est le disque d’une femme qui sait combien il y a une marge entre le discours politique et la vie quotidienne… Sur cet album, on croise un VRP errant sur les routes, une petite ouvrière du textile en Inde, des questions de mère de famille, des agacements d’une femme actuelle, des convictions d’artiste… On y trouve «des chansons un peu plus tristes que moi», dit Clarika. «Je suis contrastée. Pas optimiste, mais je crois dans les gens. Je vis avec mon âge et avec mon temps. J’essaie d’être raccord avec ce que je ressens». Quand elle parle de ses nouvelles chansons, des mots simples et trop souvent galvaudés prennent tout leur sens. Elle y ajoute un néologisme pudique : «la maturitude» parce que «peu de femmes passent le cap, dans ce métier ». Elle a abordé l’écriture de La tournure des choses «sans méthode, sans technique, un flux anarchique». Ce sont ses humeurs qui parlent, des bouffées de compassion ou de colère, des sourires ou des soupirs. Un album aux musiques enjouées et aux paroles fortes, une vraie prise de position. Un album joyeux et grave, serein et réaliste. Une tournure qui ressemble à la chanteuse.

Marc Bailly

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Pianiste de formation classique, chanteuse, fille du musicien Dan Gharibian (fondateur de Bratsch), Macha Gharibian croise les genres et mêle sur scène les influences qui la composent, du jazz à la world et à la folk music. A 20 ans, elle commence à écrire pour le théâtre en créant la musique de Titus Andronicus dans une mise en scène de Simon Abkarian, mêlant ses compositions à des pièces de Rachmaninoff et Messiaen. A 20 ans, elle voyage à New York et cela lui ouvre de nouvelles perspectives musicales. Elle découvre le jazz et l’improvisation avec les musiciens new-yorkais sur la scène jazz. Entre 2006 et 2008, elle est en tournée avec le spectacle «Gens de passage» qui rassemble 19 musiciens sur scène et continue à aller et venir de New York à Paris. En France, elle commence à écrire et à se produire sur scène en puisant et en s’inspirant au piano du répertoire arménien. Elle écrit pour petites et grandes formations, dont une pièce pour orchestre et trois improvisateurs. Mêlant son approche classique et jazz de la musique, elle travaille aussi pour l’image et signe quelques premières musiques de films. Depuis 2010, Macha se produit avec différents musiciens dont les projets vont des musiques traditionnelles au jazz et à la chanson. Elle travaille à nouveau pour le théâtre. Ce premier album reflète complètement sa personnalité et son parcours. Inspiré de ses voyages où planent l’ombre du Mont Ararat, les pulsations de Brooklyn et la «french touch» parisienne. Macha Gharibian nous propose un univers émouvant et très personnel, joue un jazz qui marie avec bonheur folk songs, traditionnels arméniens et musique pop. Ce premier album nous entraine dans une ballade poétique sur des textes qu’elle a signés, de William Blake et de William Parker.

Marc Bailly


Statovarius «Nemesis»

Ear Music

Dieu que le temps passe vite. Nemesis est déjà le 14ème album des vétérans finlandais du heavy metal symphonique. Il faut dire que malgré les multiples remous et changements de Line-up de ces 10 dernières années, le groupe enchaîne les sorties de qualité. Et n’ayez crainte ce Nemesis ne déroge pas à la règle. Sorti en janvier, «Unbreakable» premier single issu de l’album, laissait déjà présager de la qualité du nouvel opus. Cette chanson, entrainante à souhait, étant typiquement le genre de chanson qui vous reste en tête des jours durant, après seulement une ou deux écoutes. Lors de la sortie de Nemesis, les membres de Stratovarius nous ont ressortit l’habituel refrain du « c’est un album plus mature, plus riche, d’un groupe qui évolue et surtout qui plaira aux fans ». Et si je reste généralement assez dubitatif face à de tels arguments

d’habitude, cette fois-ci je ne peux que leur donner entièrement raison. Ce qui fait la richesse de cet album, c’est le mélange entre les sonorités classiques de Stratovarius et une certaine touche de modernité, comme on peut l’entendre sur «Stand My Ground», parfait exemple de ce mix qui fait mouche. Le tout aussi bon «Halcyon Days» et ses passages franchement électro reflète, lui, parfaitement ce côté moderne. Comme d’habitude avec Stratovarius, les ambiances sont fort variées d’un morceau à l’autre. On passe d’un gentil «eurovisionesque» morceau comme «Fantasy» à des ambiances folk sur «Out of The Fog». Sur «One Must Fall» et son message apocalyptique, le ton est beaucoup plus pesant. Quand je vous disais que cet album était varié ! Un autre point positif de l’album, c’est les parties guitares du plus-sinouveau-que-ça guitariste, Matias

Kupiainen. Celui-ci nous pond des riffs diablement efficaces tout au long de l’album, ainsi que quelques solos de maître, comme sur «Castles in the Air». Et Timo Kotipelto dans tout ça ? Il lui a fallu trois semaines pour enregistrer toutes les voix de Nemesis. Et il a eu bien raison de prendre son temps, le résultat étant ici aussi à la hauteur de mes espérances. Il suffit d’écouter «If The Story is Over», la seule ballade de l’album, pour s’en convaincre. Le dernier morceau Nemesis est une parfaite synthèse de tout ce que j’ai décrit plus haut, et conclut donc cet album d’une bien belle manière Nemesis est donc un très bon album qui s’écoute avec beaucoup de plaisir. Et si certains groupes tournent en rond ou vivent de leur passé, Stratovarius a le mérite d’aller de l’avant et de régaler ses fans avec de la musique de qualité.

Julien Sterckx

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19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Scènes

Arnaud Tsamere, une star nouvelle génération Il remplit les plus grandes et les plus prestigieuses salles de l’hexagone, Arnaud Tsamere est le nouvel humoriste adulé par les jeunes et les moins jeunes. Rencontre avec ce talent de la scène...

©Loic Pourageaux

La rencontre Arnaud Tsamere reviendra en Belgique les 24 et 25 avril prochains à Bruxelles et à Liège. À cette occasion, nous avons eu la chance de rencontrer l’un des humoristes les plus en vogue depuis son succès dans l’émission de Laurent Ruquier, On ne demande qu’à en rire. Après avoir fait un trajet interminable entre Paris et notre capitale, l’humoriste paraissait fatigué mais gardait néanmoins la bonne humeur. Face à nous, nous avons découvert un artiste mais surtout un homme véritablement gentil qui, malgré son nouveau statut de star, garde une humilité qui force le respect. Grâce à On ne demande qu’à en rire, c’est une kyrielle de nouveaux humoristes qui ont été dévoilés. Certains remplissent maintenant des grandes salles, ce qui est le cas pour vous. Peuton dire que c’est votre humour décalé que vous a permis de vous démarquer ? C’est compliqué de répondre soi-même à cette question. Cela dit, lorsque ça ne marchait pas encore pour moi, on m’expliquait que mon humour était trop segmentant, qu’il n’était pas fait pour tout le monde. Maintenant que ça marche, je peux affirmer que l’originalité de mes sketchs m’a permis de me démarquer.

Ce n’est peut-être pas très modeste, mais je pense que oui. Beaucoup de producteurs m’avaient dit que mon humour était trop particulier pour fonctionner auprès du public. C’était prendre les gens pour des cons. Lorsque j’ai commencé à amener cet humour dans l’émission de Laurent Ruquier, le public a répondu présent. C’est à ce moment-là que j’ai pu prouver que le public n’était pas débile. Si tu lui proposes autre chose, que tu le présentes bien et qu’il y a de la qualité derrière, le public va suivre.

«Si tu proposes un spectacle de qualité, le public va suivre» Tout comme Jeremy Ferrari, vous fermait-on la porte au nez ? Tout à fait. Jeremy Ferrari, c’était plus violent que moi car il joue avec la provoc’ et l’humour noir. C’étaient des portes fermées à double-tour, on lui claquait la porte en pleine figure. De mon côté, c’était plus insidieux. On me fermait la porte tout en me disant : «ce que tu fais est formidable, tu as beaucoup de talent mais c’est invendable».

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Aujourdʼhui, ces producteurs sont revenus me voir avec l’idée de me produire mais c’est trop tard, fallait se réveiller plus tôt. On a un peu vécu la même chose. C’est peut-être pour cette raison que nous avons pu émerger. Grâce à cette émission, les gens ont pu découvrir des choses que l’on ne montrait pas auparavant. Vous avez co-écrit votre spectacle Chose promise avec François Rollin. On le sait important dans votre parcours mais que vous apporte-t-il qu’on ne retrouverait pas chez Arnaud Tsamere ? Avant l’émission On ne demande qu’à en rire, j’écrivais déjà avec François Rollin. La première écriture du spectacle a été faite avant ma participation dans cette émission. À cette époque, j’avais des doutes sur mes capacités d’auteur. Je pensais, à tort, que j’étais incapable d’écrire seul. C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai écrit mon premier spectacle avec Arnaud Joyet. Lorsqu’on a rencontré François Rollin, que l’on s’est rapproché de lui, on a écrit un nouveau spectacle ensemble. Je crois que j’aurais été incapable d’écrire ce spectacle sans son aide.


LE 24 AVRIL AU CIRQUE ROYAL À BRUXELLES LE 25 AVRIL AU FORUM DE LIÈGE

Ce qu’il m’a apporté à l’époque, c’est une structure solide. C’est un maître en la matière. Vous faites partie de la ligue d’impro, peut-on s’attendre à des sketches improvisés ? Oui, bien sûr. Maintenant que je joue face à des personnes qui me connaissent, le rapport est différent. Le lien est plus chaleureux. Cela me permet d’oser des improvisations. Plus les semaines passent, plus je me permets d’aller loin dans mes délires d’impro. Evidemment, c’est quelque chose qui a évolué avec le temps. Au début, j’évitais cela mais, de nos jours, le public me permet d’improviser. Cela permet de donner un spectacle plus interactif, plus vivant. Bruxelles verra des parties de spectacle que Liège ne verra pas et inversément. Vous venez d’ailleurs de sortir un dvd du spectacle... Oui et avec des bonus ! Je suis très fier du dvd et surtout de ses bonus. Il y a un petit making-off d’une trentaine de minutes filmé par Simon Astier. Il nous a suivi pendant l’enregistrement du dvd. Et il y a également la version commentée du spectacle par François Rollin et Arnaud Joyet. C’est très drôle.

Vous tournez également avec Jeremy Ferrari et Baptiste Lecaplain, le début d’une longue aventure ? Avez-vous des projets ensemble ? Le projet est de reprendre des dates de tournée dans les Zénith avec ce trio là. Par la suite, j’aimerais bien que l’on exploite cette complicité sur un programme télévisé. Rien n’est encore fait mais nous en avons l’envie. La Tournée du trio s’est achevée en février et elle reprendra en 2014.

«La tournée du trio passera par la Belgique» Passerez-vous par la Belgique ? Oui. C’est en projet dans une très grosse salle belge. On a remarqué qu’à nous trois, on arrive à fédérer beaucoup de gens. Enfin, avec un agenda surchargé, continuerez-vous l’émission On ne demande qu’à en rire ?

pour mon image d’y retourner au risque de me faire motter ? Honnêtement, je m’en fous. Pourtant, certains arrêtent... C’est qu’ils ont une bonne raison. Moi, j’y prends du plaisir. Evidemment, je ne vais pas aller faire un sketch dans le journal du hard, je ne vais pas faire tout et n’importe quoi. Mais alors «On ne demande qu’à en rire», que l’on m’explique les contre-indications... La production a réouvert la porte en envoyant un mail aux anciens. Certains reviennent et d’autres pas. Pourquoi ? Parce que certains pensent que c’est une régression mais, pour ma part, je vois que les gens adorent mes passages dans l’émission. Ce n’est donc pas terminé.

Propos recueillis par Matthieu Matthys

J’ai fait un sketch récemment et je pense que j’aurai encore l’envie d’y retourner de temps en temps. Je suis quelqu’un qui fonctionne à l’envie et j’en ai encore l’envie. Je ne me pose pas plus de question. Est-ce que c’est bien

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19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

XS Festival : Maxi Week-End de courtes-créations

La critique 3 jours pour voir 18 spectacles ? Challenge accepted ! Le théâtre National nous propose avec son Extra Small (XS) festival, la possibilité de découvrir en seulement 3 soirées, du cirque, de la danse, du cinéma et évidemment, du théâtre. Tout cela, en un minimum de temps. Chaque courtecréation ne dure (théoriquement) pas plus de 20 minutes, de fait, sur une soirée, si vous ne vous accordez pas de pause, vous pouvez assister jusqu’à 9 spectacles ! C’était du jeudi 7 au 9 mars, chaque jour à partir de 18h30 … Et on vous dit quoi ! Le XS Festival, c’est quoi ? Dans tout le théâtre, de la cave au grenier, vous courrez (parfois littéralement) d’une pièce à l’autre. L’établissement entier est accaparé. En même temps, il en faut de la place pour accueillir près de 80 artistes différents. Qu’ils s’agissent de célébrités dans leur domaine ou de jeunes pousses du milieu, ils se retrouvent tous les soirs pour vous faire découvrir leur art. Et lorsqu’ils ne jouent pas, les acteurs, le personnel de manière générale, se ballade de pièce en pièce, comme vous, spectateur. Ce genre d’initiative revêt un nouveau visage au monde du théâtre d’avant-garde. Parfois considéré comme trop « intellectuel », beaucoup n’ose pas sauter le pas de s’y rendre. Peut-être la peur d’être déçu durant 2h de spectacle... Et c’est là tout le génie du concept : si vous

n’aimez pas une pièce, vous savez qu’elle finira vite. Mais parfois l’inverse est possible aussi, vous adorez une présentation et vous avez l’impression qu’elle se termine bien trop tôt… C’est aussi un avantage pour les acteurs eux-mêmes, car le XS est l’occasion de produire des spectacles plus petits, plus intenses, plus libre et surtout plus audacieux. Il serait impensable de faire jouer tous les soirs une pièce pour seulement deux personnes (comme le fait Lacrimosa), ou bien d’inviter le public dans le couloir du studio son… « Qu’ils s’agissent de célébrités dans leur domaine ou de jeunes pousses du milieu, ils se retrouvent tous les soirs pour vous faire découvrir leur art. » Des coups de cœur… Deux actrices ont éblouies le festival durant ces 3 jours. C’est Isabelle Darras et Julie Tenret qui nous ont présenté deux spectacles d’objets et de marionnettes. Le premier s’intitulant Silence nous emmène dans les péripéties d’un home. Il est impressionnant au niveau du matériel utilisé mais aussi au niveau de la technique de marionnettistes. Sourire et émotion garantie. Quant à Irregular, c’est l’histoire d’un lapin clandestin qui veut rejoindre les rayons des magasins comme toutes les autres

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peluches … A travers cette histoire toute innocente, c’est notre cœur qui est torturé, car la thématique est beaucoup plus profonde. Qu’en estil de nos frontières actuelles ? Et pas seulement internationales, mais aussi, nos propres frontières, les limites de notre imaginaire… C’est la Compagnie Gare centrale qui a produit ce dernier spectacle. Les mêmes qui ont travaillé sur un autre spectacle, intitulé Ressacs, et qui fut un autre coup de cœur du festival. C’est aussi du théâtre d’objet, mais cette fois ce sont Agnès Limbos et Gregory Houben qui jouent. Ils nous racontent les malheurs d’un jeune couple, dans une langue un semi globish, semi belge. Un très beau voyage qui se termine trop vite... Le Réserviste est quant à lui du théâtre comme on l’aime. Sauf que cette fois, c’est nous qui sommes sur scène et les acteurs qui jouent dans les gradins. Chapeau de monter et descendre incessamment durant 20 minutes pour nous raconter l’histoire d’un homme comme tous les autres, assis devant sa télé, qui se veut faire partie de la réserve, au cas où un emploi pour lui se libérerait. Toute la subtilité et la moquerie de cette pièce est dans la mise en scène. Se placer dans les gradins nous montre un reflet de notre propre condition de spectateur. Et oui, le XS c’est aussi un endroit pour réfléchir sur nousmêmes… Merci donc au texte de Thomas Depryck et à la mise en scène d’Antoine Laubin.


Lacrimosa

Dans un autre domaine, Equilibre(s) sur corde et Pa sont deux spectacles qui nous offrent beaucoup de sensations. Le premier nous partage l’histoire d’un couple qui se dispute, s’aime, sur un même espace : celui d’une corde. Comment ne pas perdre l’équilibre ? Se soutenir l’un et l’autre ? Belle performance de cirque proposée par la troupe Les cliquets. Quant au second, il s’agit d’un spectacle de danse coréenne. Rien d’extravagant, tout dans la finesse, Hyun-Jung Wang nous propose seulement sa silhouette. Si au début on a peur de s’ennuyer, très vite on est emportée sans savoir pourquoi par ses « pas »… Enfin le coup de cœur majoritaire du public est le spectacle Nous sommes pareils à ces crapauds qui dans l’austère nuit des marais s’appellent et ne se voient pas, ployant à leur cri d’amour toute la fatalité de l’univers. Rien que ça me direz vous ? Si Ali et Hèdi Thabet sont doués pour choisir de longs titres, ils le sont davantage encore pour allier danse, cirque et musique. Malheureusement, l’essentiel de leur succès est plutôt dû à leur danseur unijambiste, qu’à la qualité de leur spectacle (pourtant réelle). Hedi Thabet est certes un excellent artiste, mais son talent est démultiplié dans nos yeux de par son handicap, et on oublie les deux autres acteurs, Mathurin Bolze et Artemis Stavridi qui sur des chants grecs et tunisiens traversent les péripéties du mariage. … comme des déceptions.

Mais comme pour tout festival, il y a des déceptions. C’est le cas d’AlbertHubert ou l’exercice difficile de la démocratie qui est certes, une comédie amusante avec une très belle mise en scène mais qui perd son charme à cause de l’actrice principale. Celle-ci semble placer sa voix au niveau de la gorge ce qui a pour effet d’une part d’être désagréable à écouter (mais c’était peutêtre l’effet escompté) mais aussi de nous empêcher de comprendre ce qu’elle veut nous raconter. C’est bien dommage car le texte avait l’air prometteur, pour les rares bribes qu’on en saisissait…

« L’idée d’accueillir des conférenciers pour rendre le théâtre plus engagé, s’est retrouvé être un véritable désastre.» Autre déception, « Cognac ». Elle est de ces pièces sans queue ni tête, totalement absurde qui cherche à être comique. Cela marche parfois mais ici on en ressort avec pour seul appréciation un « Mouais » pas très convaincu. Bernard van Eeghem nous séduit peut-être plus avec sa peinture sur drap étendu, comme il le fit une semaine plutôt dans le Hall Horta au Bozar, que par son talent d’écrivain... Enfin l’idée d’accueillir des conférenciers chaque soir pour rendre le théâtre plus engagé, s’est trouvée être un véritable désastre. En même temps, 20 minutes pour parler d’une problématique complexe, avec en

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consigne supplémentaire d’être accessible aux jeunes à partir de 16 ans, c’est inévitablement pour tomber dans le cliché. Des PowerPoints plein de graphiques (parfois non référencés) et un conférencier qui essaye tant bien que mal de passer une idée bien commune… Bref, une belle perte de temps ! Heureusement, des découvertes ! Mais à côté de tout cela, les autres spectacles avaient de quoi séduire leur public ! Lacrima, proposée à la cave, nous raconte les périples de la vie d’un homme, joué par Jan Hammencker, qui a mordu à trop d’hameçons venimeux et qui n’a jamais pu s’en détacher, tout ceci dans une très belle mise en scène accompagnée gestuellement, et même inutilement d’un certain point de vue, par Sayaka Kaiwa. Avec un titre ressemblant, Lacrimosa, théâtre de marionnettes par Bruno Pilz, a enchanté le public. Pas plus de deux spectateurs n’étaient acceptés en salle et ceux-ci vivaient une expérience fascinante de seulement 5 minutes… Vous ne pouviez qu’être séduit ! Chouette est un spectacle qui porte bien son nom et qui aurait sans doute pu porter le nom de « génial » si le concept était plus longuement développé. Une émission télé pro-pose de récompenser les bonnes actions, mais en fait, on en sait pas plus. Belle tentative tout de même du Collectif Rien de Spécial.

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Charlie Dupont

Un autre spectacle qui aurait mérité un peu plus d’explications est -1, produit par Peeping Tom, qui nous accueille à une veillée funèbre pour le moins surprenante. Mise en contexte superbe puisqu’on est accueilli et installé comme participant à la cérémonie. De la même production, En haut à gauche est une pièce en anglais qui nous raconte l’histoire d’une spectatrice au XS festival. Assez drôle… Pour ceux qui comprennent ! Chiennes mérite son succès pour son humour, ses clichés, et le travail réalisé avec les enfants acteurs. Selma Alaoui et Aurore Fattier étaient tout à fait dans le contexte de la journée de la Femme avec ce spectacle clairement défenseur de la libération féminine… Enfin, Même dans mes rêves les plus flous tu es toujours là à me hanter Jean-Luc (qui semblait aussi participer au concours du plus long titre) est un montage vidéo assez spécial, pas très clair mais du moins assez drôle des sœurs h. Le théâtre National proposait aussi deux cartes blanches à la compagnie de cirque Babafish et à la cinéaste documentariste Khristine Gillard. Le but était que chacune rencontre un artiste d’une autre discipline et présente le résultat à l’occasion du festival.

Le premier, Hymen National, a fait l’unanimité avec un très beau spectacle, symbolique pour notre pays, de danse acrobatique. En revanche, Gésir de Khristine Gillard a laissé plus dubitatif. Un danseur qui bouge sur des sons (amplifiés) avec en fond, un écran faisant défiler des profils de visage... Mouais. C’est un style cinématographique vraiment pas très accessible... « Les organisateurs n’ont fait que confirmer que « les plus courtes sont les meilleures ». Pourtant, on aurait aimé que ça dure encore un peu... » Le XS, c’était aussi de l’ambiance et de la convivialité Tout le festival battait au rythme du dj Charlie Dupont durant les 3 soirs. Le bar n’a pas arrêté de tourner, surtout qu’il proposait un menu tajine bon marché et succulent. Les gens couraient partout, ou décidaient parfois de sécher un spectacle pour se prélasser sur les fauteuils et échanger leurs impressions… Les acteurs, les metteurs en scènes, les producteurs circulaient aussi. On pouvait les aborder et les féliciter ou les questionner pour après s’asseoir à côté d’eux durant une autre pièce. Le dernier show nous a été proposé par les Hoochen crew et Funky belgianz pour un battle b-boying. Et c’était une très belle fin, très conviviale, à

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l’image de ces 3 jours, pour le festival. Le XS 2013 a été une réussite. Les organisateurs n’ont fait ainsi que confirmer que « les plus courtes sont les meilleures ». Pourtant, qu’est ce qu’on aurait aimé que ça dure encore un peu… Mais pour cela, il faudra attendre l’année prochaine !

Anastassia Depauld


La Maison de Ramallah d’Antonio Tarantino au Poche

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© Yves Kerstius

La critique Dans le train qui les conduit à Ramallah, un couple de Palestiniens et leur fille partagent la méchouïa et le kebab, reconnaissent les plaines où ils ramassaient autrefois les tomates, se disputent à propos de la petite maison blanche de Ramallah qu'ils ne construiront jamais, s'énervent sur les toilettes qui ne ferment pas et où doivent traîner des micros du Mossad, révisent fébrilement le mode opératoire dicté par l'Organisation, se prennent les doigts dans le scotch en fixant la ceinture d'explosifs... La maison de Ramallah est une pièce qui déroute. Le décor est plus qu’épuré. Un carré surélevé au centre de la scène. Les jeux de lumières aussi. Juste de quoi mettre en évidence les personnages ou à faire les transitions. Quant au texte, dieu merci, il ne l’est pas. Nous pourrions même dire qu’il est dense, emmêlé, répétitif. Si cela déroute au début, on finit par s’y trouver et par y trouver une richesse certaine. Il faut noter que l’auteur de la pièce est italien. Indéniablement, on retrouve cette faconde italienne. La mise en scène est due à Pietro Pizzuti et est tout aussi déroutante que le texte. Le trio saint, le père, la mère et l’enfant. Campés sur leur bout de carré, ils évoluent autour comme ils évoluent dans leurs histoires et leurs souvenirs. Perpétuelle recommencement, ils finissent

par toujours revenir à l’endroit où ils se trouvaient avant. Tout comme l’histoire qui se tisse sur des souvenirs passés au tamis émotionnel de chacun d’eux. Pourtant, l’histoire avance, elle avance comme ce train les menant à Ramallah. Chassécroisé du passé et de l’avenir. D’une part, le père, la mère et la fille triturent encore et encore leurs souvenirs, d’autre part, ils se préparent pour leur mission pour l’Organisation. « La Maison de Ramallah est une pièce qui déroute. Le décor est plus qu’épuré. Un carré surélevé au centre de la scène. Les jeux de lumières aussi. Juste de quoi mettre en évidence les personnages ou à faire les transitions. »

dispose, c’est-à-dire lui-même. Et ce n’est pas peu dire. Le final est surprenant et parle d’une manière autre du thème abordé dans L’attaque de Yasmina Khadra. Il faudra s’accrocher tout de même pour ne pas sortir de la salle (certains n’ont pas résisté) car cette logorrhée peut décontenancer et les monologues de la fille peuvent être très violent verbalement.

Elodie Kempenaer

On est emporté avec plus ou moins de facilité dans ce récit. A travers cette famille de palestinien, on entrevoit un peu l’envers d’un décor historique bien sinistre mais raconté avec drôlerie. Le conflit israélopalestinien vu d’un train. Point de politique réelle mais bien une analyse sur la manipulation et la propagande humaine. Comment le peuple, quelques soient ses intentions, finit par perdre face aux politiques. Comment le peuple se bat avec la seule arme dont il

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts 3 ! 1 / /03 La pièce est tirée du roman de lumières 23

Comédie Claude Volter Crime et Châtiment de Dostoïevski Mise en scène d’Alexis Goslain Avec Chloé Struvay, Sarah Woestyn, Michel de Warzée, Bernard d’Oultremont, Bruno Georis, Mathieu Besnard, Bernadette Mouzon, Jacqueline Bollen, Julien Devisscher, ...

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Théâtre du Parc Feu la Mère de Madame de Feydau Feu la Belgique de Monsieur de Jean-Marie Piemme Mise en scène de Frédéric Dussenne Avec Philippe Jeusette, Valérie Bauchau, Caroline Detez, Othmane Moumen

Dostoïevski. Elle raconte l’histoire de Raskolnikov, un jeune étudiant de SaintPétersbourg sombre, tourmenté, renfermé et que tout ennuie qui va assassiner une vieille prêteuse sur gage. Raskolnikov a interrompu ses études par manque d’argent mais comme il se considère hors du commun, il décide de commettre ce meurtre, acte de transgression morale ultime qu’il justifie doublement, il agit à la fois pour le bien de l’humanité et pour aider sa sœur qui est sur le point d’épouser un rustre pour l’argent. Mais le butin est maigre et il s’aperçoit que la liberté et l’indépendance qu’il recherchait sont perdues à jamais. Il ressent une telle culpabilité qu’il finira par éveiller les soupçons du juge. Dans sa souffrance, il va se rapprocher de ceux qu’il méprisait et il rencontrera une jeune prostituée si dévouée à sa misérable famille qu’il va être ému au point d’accepter de confesser son crime. Les décors reflètent bien l’ambiance de la Russie du 19ème siècle, l’agencement et le jeu des plateformes qui basculent est à la fois ingénieux et surprenant. C’est un décor sobre et noir et le jeu de

C’est en relisant Feu la mère de Madame que Thierry Debroux, directeur du Théâtre du Parc, demande à JeanMarie Piemme d’écrire un segment intitulé Feu la Belgique de Monsieur en référence au canular télévisé de la RTBF en 2006 annonçant la séparation de la Belgique. Il a l’idée de coupler les deux parties et trouve en Frédéric Dussenne, le metteur en scène motivé par l’idée. La première pièce de 35 minutes est Feu la mère de Madame de Feydeau : un soir de fin de semaine, une femme est reveillée par son mari, parti au bal des Beaux-Arts (Quat’z’arts), qui a oublié ses clés. En plein crise de couple, la maisonnée est dérangée par un serviteur qui vient annoncer que la mère de Madame est morte. Ensuite, pendant 45 minutes, on découvre une Belgique dévastée par l’annonce de la séparation de la Belgique. Le Roi est en fuite, déguisé en Tchantché et un couple d’imposteurs ont pris la place du duo royal pour vendre le Palais à un financier chinois.

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accentue cette noirceur de l’ambiance. Malheureusement, les 12 acteurs qui se présentent à nous ne sont pas totalement crédibles dans leur interprétation. La pièce ne brosse qu’à moitié cette descente aux enfers du personnage central. L’acteur qui interprète le rôle de l’étudiant assassin présente à certains moments une bonne prestation pourtant à d’autres moments, il est moins convaincant. Certaines de ces scènes sont lourdes et longues. Par contre, d’autres comédiens comme le juge ou encore le « fiancé » de la sœur jouent parfaitement leur rôle. Le juge est piquant et a le ton juste et le petit ami est absurde à souhait et il fait rire par moment. 2h20 de spectacle qui dans la deuxième partie semblent durer un peu trop longtemps. Il n’en reste pas moins que c’est une adaptation d’une œuvre littéraire difficile à transposer sur une scène et que l’adaptation faite par Alexis Goslain est intéressante.

Noelia Gonzalez

Dans les deux cas, cela s’avèrera faux. D’une part, le serviteur s’est trompé de porte, de l’autre, la un canul télévisuel. Toute la première partie qui adapte un des succès de Feydeau est truculente. Les acteurs mettent beaucoupo de rythme dans leur jeu, primordial dans les textes de l’auteur. La servante et le serviteur sont assez peu exploités et sont souvent bouffés par la place que peut prendre Philippe Jeusette et Valérie Bauchau qui se donnent totalement pour leur rôle (Bauchau tombe jusqu’à la chemise). Après les 40 premières minutes hilarantes, démarre en voix off le canular de la RTBF. On retrouve les quatre protagonistes dans une parodie de la Belgique, bien jouée, parfois drôle mais atteignant souvent la caricature comme dans l’interprétation risible du financier chinois. De notre côté, on a quitté la salle en ne conservant que le souvenir époustouflant du premier acte.

Loïc Smars


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Viage Theater Il était une fois Livret et mise en scène de Fabien Franchitti Chorégraphie de Natasha Henry Compositeur : Arnaud Giroud

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Il était une fois, la comédie musicale 100% belge.

sauté le pas. » nous explique le jeune artiste.

Ce n’est pas un scoop, les européens vivants en Belgique se plaignent souvent du manque de dynamisme culturel dans la capitale de l’Europe. De fait, les spectacles belgo-belges ne se bousculent pas sur les affiches des grandes salles bruxelloises. Seules quelques productions étrangères (surtout françaises) passent le temps de quelques dates dans notre plat pays.

S’appuyant sur une équipe de 37 comédiens et une équipe technique talentueuse, Il était une fois nous emmènera au pays des princesses et des contes signés Charles Perrault ou Grimm. Au milieu de cet univers enchanteur, une jeune fille nommée Betty, passionnée par la philosophie, va rencontrer un jeune homme nommé Beau. Mais sous cette toile se cache Fabula, une puissante sorcière prête à tout pour se venger des autres princesses. Seule Betty peut aider ces dernières.

La comédie musicale Il était une fois (Once upon a time) pourrait bien changer la donne. Ce nouveau spectacle 100% belge prendra place dès décembre prochain au Viage et ce, pour une durée indéterminée. Et pour cause, c’est l’une des priorités du créateur de ce show, Fabien Franchitti. «Nous avons l’ambition de présenter un spectacle qui perdurera dans le temps. Paris, Londres et surtout New York restent les capitales incontestées de ce genre de rendez-vous. Mais dans leurs sillages, d’autres villes dans le monde se sont lancées dans l’aventure avec succès. Bruxelles est l’une des rares villes qui n’a pas encore La piste aux espoirs s’est déroulée du 27 février au 4 mars 2013 dans la ville de Tournai. Une 22e édition qui a rencontré beaucoup de succès !

Tournai La Piste aux espoirs « Des artistes de qualités venus en nombre ! »

Durant le festival, L’Homme Cirque, David Dimitri, a fait l’honneur de sa présence durant cinq représentations. Il a présenté un spectacle à couper le souffle entraînant les spectateurs dans une ambiance surréaliste où se mêlent acrobaties spectaculaires et gags humoristiques. Un mélange gagnant qui lui a valu une pluie d’applaudissements de la part des plus petits comme des plus grands. L’Homme Cirque ne parle pas, il communique au travers de gestes et de mimiques. Les échanges sont intenses et hypnotiques ! Le clou du spectacle est sans nul doute son envolée dans les airs au-dessus du public via son canon. Une très belle prestation qui restera mémorable. Dans un autre genre, l’artiste danois Karl Stets « Cuerdo » a lui aussi charmé le public. Son spectacle destiné à des spectateurs plus âgés a été bien accueilli. Karl Stets travaille sur scène essentiellement avec une corde qu’il manie à la perfection, réalisant une série d’illu-

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Si les romances vous enchantent et si les comédies musicales vous captivent, vous pouvez d’ores et déjà réserver vos places pour ce rendez-vous majeur de la scène belge qui sera présenté en français et en anglais. En outre, des singles des chansons du spectacle mais également des vidéos des coulisses seront lancés dans les prochains mois afin de faire connaitre au public cet évènement ambitieux qui mérite que l’on lui prête attention.

Matthieu Matthys

sions. Il entraîne les spectateurs dans un univers sombre et étrange, le tout parsemé d’une musique digne d’un thriller glauque… Son apparence ne laisse personne indifférent, son allure donne parfois froid dans le dos, surtout lorsqu’il s’emmaillote le visage avec un fil de pêche, ressemblant ainsi à un personnage de film d’horreur, l’hameçon dans la bouche ! On l’aura compris, Cuerdo est un personnage hors du commun qui a fait vibrer la scène de la maison de la culture de Tournai le temps d’une soirée… De nombreuses représentations se sont données durant ces six jours de festival. A en entendre les spectateurs, tous semblent ravis de cette nouvelle édition. L’organisation aura été irréprochable et le choix des artistes aura été d’une grande qualité. La ville des cinq clochers a donc atteint son objectif, elle a permis à son public de découvrir de nouveaux talents inédits venus des quatre coins du monde. La piste aux espoirs est sans nul doute le rendez-vous des artistes du cirque que l’on attend impatiemment l’année prochaine !

Stellina Huvenne 19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts C’est une déclaration comme il était à… Le lundi 11 mars à Ixelles, Chère vous, Je vous écris car la très longue soirée que nous avons passé ensemble ne cesse d’être ressassée par mon esprit et je ne pense pas retrouver le sommeil tant que je ne vous aurez pas décrit mes sentiments pour vous et la manière dont j’ai vécu ce moment pour le moins perturbant. Alors que j’étais assis aux côtés d’autres personnes, l’arrivée que vous et vos amis avez faite a été pour le moins remarquée. Il faut dire que prendre des chaises, et bien plus qu’il ne vous en fallait pour vous neuf, aller vous installer au fond dos à nous, tout cela pour trépigner d’impatience jusqu’à atteindre des comportements qui ne sont pas normaux en société, du moins pas dans la nôtre… enfin il faut dire que vous faisiez tout pour l’être, remarqués. Mais c’est à l’instant où vous vous êtes détaché de ce groupe pour venir nous parler que je suis tombé dans l’état de subjugation duquel je ne puis me sortir. Cette provocation qui est la vôtre, cette pudeur relative, ce phrasé hautain rajoutant à votre accent anglais plus de snobisme qu’il n’en faudrait à dix anglais pour être eux-mêmes, ce grain de voix si particulier, ces manières déplacées, cette manie que vous avez de répéter les mêmes gestes et les mêmes paroles sans cesse. Ces attributs font votre cohérence et ils font que je ne me suis levé de mon siège qu’au bout de six heures. Si vous en étiez resté là, je vous aurai cependant probablement oublié. Non que cette fascination soit chez moi fréquente, mais plutôt que le fanatisme

n’est pas tellement dans mes cordes. Seulement, j’ai eu l’impression de vivre en une nuit, une relation de plusieurs années, et même plusieurs relations de plusieurs années. Sur les huit heures que nous avons passé l’un près de l’autre, je suis passé de la contemplation, à l’admiration, au dégoût et à je ne sais quels autres sentiments étranges, forts et contradictoires. J’ai payé pour vous voir, je me suis vu vous découvrir, je vous ai vu vous énerver, je vous ai vu aimer, vous déshabiller et vous rhabiller de nombreuses fois, avoir faim à en lécher la nourriture sur le sol, être rassasiée de produit à en faire une overdose. Je vous ai vu dans vos moments de fatigue extrême, répétant des gestes à bout de force, dans vos moments de joies et de folies, ou même tremblant nue sur le sol sous le regard des spectateurs halluciné assistant à la scène. Je me suis vu jaloux vous voyant au contact d’autres personnes. Je vous ai trouvé tantôt belle, tantôt repoussante, tantôt excitante, tantôt inaccessible, tantôt extraordinaire, tantôt commune, j’ai été fier de vous voir si combative et déçu de vous voir prendre part à des visions artistiques à mon goût trop sexistes. C’est pour l’ensemble de ces raisons que j’écris cela. Car malgré le grand nombre de spectacle que je vois, c’est la première fois que je suis marqué de la sorte, au point d’en être hanté. Enfin, sauf si l’on compte mon ex copine… et ma dernière aventure… De toute façon ce n’est pas la question, on est toujours l’un ou l’une parmi tant d’autres sur un point. Mais l’important est d’être l’exception sur d’autres points. Prenons un exemple au hasard : moi. Je ne suis que l’un parmi tant d’autres spectateurs que vous avez fasciné l’autre soir, mais je suis peutêtre l’unité qui vous envoie un tel message. Peut-être que parmi tant

d’autres qui en envoie un, je serais l’exception à laquelle vous aller répondre. Ou peut-être encore que parmi tant d’autres à qui vous répon-drez, je serais celui dont le mes-sage ne vous laissera pas indifférente. Et sachez que si les messages de ce genre ne vous laisse jamais indifférente, n’être qu’un parmi tant d’autres sera pour moi un plaisir certain. Je conviens toutefois que mon courrier peut vous paraître soudain, précoce et quelque peu effrayant et que notre relation n’existant pour l’instant qu’à sens unique, commence de manière entièrement dissymétrique, ayant eu de mon côté le temps de vous scruter sous toutes vos coutures et émotions huit heures durant. Ma mémoire est apparemment condamnée à se voir graver des souvenirs immuables par votre metteur en scène contre son gré. Je garde en effet depuis quelques années un très mauvais souvenir d’un de ces spectacles les plus récents que je me délecte à descendre en flèche dès que l’occasion se présente. Cette fois-ci, la gravure sera de nature agréable et je chercherais d’ailleurs à en prolonger les motifs dans une semaine. Ce spectacle a du perdre énormément de son impact en trente ans, seulement l’impact que vous avez eu sur moi restera intact longtemps. Quant au titre du spectacle, il était annonciateur mais quelque peu réducteur, c’est bien un moment de théâtre comme il était à espérer mais, au risque d’en perdre la saveur, c’est bien un moment qu’il ne fallait surtout pas prévoir.

C’est du théâtre comme il était à espérer et à prévoir Reprise du premier spectacle de Jan Fabre pour la 1ère fois depuis 1982. Kaaitheater, 8 et 9 mars 2013 de 19 à 3h

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Baptiste Rol


Ré-interprétation d’Hamlet au Varia

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© Danièle Pierre

La critique Alors qu’un secret pèse sur la famille royale danoise, Hamlet se réfugie dans la démence. Mais n’est ce qu’un jeu ? Ne finit-il pas par perdre réellement la tête ? Ou est-ce le reste du monde qui s’est déraisonné ? L’idée de Michel Dezoteux est d’ériger une trilogie de la folie. Celle-ci commence par Hamlet, fera un détour par l’Art brut et terminera son parcours avec Macbeth. La première adaptation fait ses preuves. Après son succès au Manège de Mons, elle nous donne rendez-vous au théâtre Varia, à Bruxelles. Dès notre entrée en salle, on est surpris du décor. Kitch et moderne pour les meubles. Des radiographies géantes sur les murs. Un labyrinthe comme schéma architectural. Michel Dezoteux avait déjà été récompensé pour ses mises en scène, et il pourrait bien l’être encore ! C’est un professionnel et on n’en doute pas. Le décor c’est du lourd, c’est du Hamlet. Ou plus précisément : c’est le reste du monde. Car seul le héros est vrai derrière sa folie. Les autres ne sont que comédiens, maquillés sur le visage et dans l’âme, de manière burlesque, comme les meubles. C’est pourquoi les acteurs jouent leur rôle de manière démesurée! Car chaque personnage cache ce qu’il est vraiment. Seul Karim Barras nous

offre un Hamlet sincère à la gueule de bois éternelle. C’est « too much » pour certains, le texte est trop contemporain pour d’autres, mais en réalité c’est surtout décalé. On voit les personnages à travers les yeux du héros shakespearien. Ils sont donc à la fois zombie et à la fois grotesque. C’en est même drôle. L’humour a une grande place dans cette adaptation. On ne s’attend pas à sourire en venant à ce genre de pièce, et pourtant... La folie n’est elle pas drôle ? Le rire jaune n’y est donc pas dérangeant. Entre surprises, peurs et joies, on est déstabilisé… Et on aime ça ! « C’est « too much » pour certains, le texte est trop contemporain pour d’autres, mais en réalité c’est surtout décalé. »

Mais voilà, jouer Hamlet, c’est toujours un risque. C’est une longue pièce, et rares sont ceux qui la jouent en entier. C’est pourquoi il ne fut pas étonnant de voir le texte condensé. Un seul point d’attaque y a été choisi : la folie. Mais la pièce est tellement plus qu’un « to be or not to be » (qui lui-même est énorme en signification) et on a l’impression que trop souvent la tragédie a été réduite. Il est dommage de passer à côté des autres sens... Mais c’était à prévoir. Le but de la pièce n’était de s’axer que sur un point, et elle l’a très bien développé. De manière visuelle comme sonore. Le tout est cohérent. Le tout est fou et pourtant bien préparé. C’est une simulation comme l’est au début l’âme d’Hamlet. L’est-ce encore à la fin ? C’est à vous d’en décider ! À voir du 12 au 30 mars 2013 au théâtre Varia.

Anastassia Depauld Pour nous accompagner dans ce périple, on retrouve sur la scène des musiciens de jazz. Ce style de musique est idéal pour un Hamlet : c’est vivant, surprenant, rythmé et lent… C’est le son du fou qui se cherche. C’est la musique de l’improvisation. La seule musique où l’artiste est comédien. Et littéralement, l’un des musiciens se retrouve acteur. Encore un bon choix pour cette tragédie.

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Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Aura Popularis aux Riches-Claires

© Dominique Bréda

La critique Aura Popularis, c'est tout d'abord le vent qui gonfle la voile du Collectif Arbatache. L'énergie débordante de ces comédiens et l'originalité du sujet poussent à converser avec eux à la fin de la pièce. En découle un entretien avec Ilyas Mettioui, porte-parole du collectif, pour découvrir la genèse d'un projet si singulier, où, contrairement aux habitudes, les comédiens sont au commencement du voyage. Ce projet est né de la volonté de ces 14 comédiens, de 23 à 30 ans, de continuer à travailler ensemble, une fois leurs études à l'IAD terminées. Mais, continuer à travailler ensemble nécessite une méthode pour coordonner le tout, pour avancer dans leurs projets. Leur méthode : ne pas être d'accord sur tout, et prendre le temps d'en discuter jusqu'à trouver un consensus. De plus, chacun est libre de participer au projet ; c'est pour cela que des 14 comédiens, ils ne sont plus que treize sur scène. Il leur faudra trouver salle, metteur en scène, thématique et auteur : autant de difficultés à surmonter, mais qui ne les ont pas arrêtés pour autant. La première base de ce deuxième projet est jetée lors d'un spectacle pendant leurs années passées à l'IAD. La directrice des RichesClaires, Mélanie Lalieu, y est

séduite par l'énergie dégagée par le Collectif Arbatache et leur donne carte blanche pour un mois de représentation, lorsqu'ils lui présenteront un "dossier solide". Le collectif part alors à la recherche d'un metteur en scène et son choix s'arrête sur Emmanuel Dekoninck. « Les comédiens ne sont pas que des marionnettes lorsqu’ils montent sur scène ; au contraire, ils ont quelque chose à dire, car ils sont présents sur tout le chemin créatif. » Ilyas Mettioui Ce choix s'avère particulièrement intéressant pour les deux parties : le questionnement par le Collectif concernant la sensation "de se sentir dépassé, dans un monde qui fonctionnait déjà d'une façon avant et qui n'a pas vraiment besoin de nous alors qu'on nous demande de voter" trouve une résonance dans les questionnements et réflexions sur la politique, du metteur en scène. La thématique évolue alors et il en ressort que cette sensation de dépassement est due à un manque d'information, "que ce n'est pas si compliqué que ça de se tenir au courant" et de comprendre les rouages de notre monde. Emmanuel Dekonninck les amène également à se poser la question de leur engagement et les écrits des

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comédiens serviront de base à l'écriture de la pièce : "les comédiens ne sont pas que des marionnettes lorsqu'ils montent sur scène ; au contraire, ils ont quelque chose à dire, car ils sont présents sur tout le chemin créatif, acteurs dans le parcours de création". Pendant ce parcours de création s'est fait ressentir un besoin d'expression corporelle par rapport au seul texte, où les mouvements deviennent vecteurs de communication supplémentaires. C'est sur ce travail qu'intervient la chorégraphe Bérengère Bodin, sur une idée du metteur en scène, encore et toujours. A la suite des conversations, des débats, des ateliers de travail scénique et chorégraphique; et avec la rencontre de Dominique Bréda, orchestrée, encore une fois, par Emmanuel Dekoninck, la pièce prend forme. Le résultat en est bluffant ! De Dominique Bréda, on reconnaît l'écriture incisive et cynique, décrivant les travers de la société, en quelques phrases, quelques tableaux bien sentis. On y retrouve les groupes de paroles, comme dans Purgatoire, mais cette fois-ci, la politique est taboue, et l'émission The Voice y est préférée, car moins engagée. On y retrouve également des explications simples sur tous les sujets économiques qui ont assombri les actualités depuis 2008.


© Dominique Bréda

D'Emmanuel Dekoninck, on découvre la mise en scène de treize comédiens sur la scène du théâtre des Riches-Claires. Le résultat donne des tableaux foisonnants, où la masse donne corps aux pulsations de la société que les acteurs interprètent. Les comédiens interagissent entre eux, sur scène, mais interviennent également de la salle. Les plus observateurs distingueront peutêtre le comédien présent dès les files d'attente, dans le bar du théâtre. Autre point fort de la mise en scène : les jeux de lumière. Plusieurs scènes manqueraient vraiment d'impact sans eux, et la solitude ressentie en est exacerbée.

« Du Collectif Arbatache, on retient une énergie immense, balayant les défis, et des talents individuels au service du groupe. » De Bérengère Bodin, on découvre une chorégraphie relevant le défi le plus surprenant de la pièce. En effet, les différents tableaux sont ponctués, voire conclus par des interludes chorégraphiés, où les corps se repoussent, s'attirent et s'amoncellent. Pour une fois, la danse contemporaine sert aussi bien les sentiments que l'aspect visuel. La réalisation, parfois imparfaite, de ces mouvements apporte une touche aérienne et pleine de sens, que l'on a parfois du mal à ressentir avec les exploits d'une compagnie.

Du Collectif Arbatache, on retient une énergie immense, balayant les défis, et des talents individuels au service du groupe. L'œil a du mal à se détacher d'un seul comédien, mais veut pouvoir suivre le collectif dans son ensemble. L'interprétation de chacun, que ce soit au niveau du texte, du chant, de la danse ou de la musique, forme un tout homogène, sans temps mort. Le Collectif Arbatache et les orfèvres, qui l'ont accompagné, ont triomphé d'un défi immense : expliquer la crise de façon ludique, artistique et surtout très simple, dans un numéro de rock que les chanteurs les plus subversifs n'auraient pas renié. Ils ont aussi réussi à pointer du doigt les conséquences des décisions des mondes politique, citoyen et économique, à en remonter et démonter les rouages de manière que le spectateur puisse trouver son propre questionnement et, finalement, sa propre voix. Dans cette œuvre multiple, chaque maillon prend place et se développe scéniquement, vocalement et musicalement, emportant le public dans le courant de ce souffle populaire. Aura Popularis est une composition réussie, une recette bien équilibrée, où chaque ingrédient artistique se donne réplique et donne corps aux sentiments et idées parfois trop abstraites. Venez-y goûter et laissezvous embarquer par le vent de la faveur populaire, soufflé par cet étonnant collectif ! Que ce soit encore jusqu'à la fin de cette semaine,

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ou à la faveur de la programmation de la nouvelle saison théâtrale, le Collectif Arbatache souffle sur les braises de nos consciences, pour notre plus grand plaisir ! Alors, ce soir ? The Voice ? Aura Popularis ? ou finalement, les deux ?

Adeline Delabre

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Aura Popularis Les Riches-Claires

Mise en scène : Emmanuel Dekoninck Texte : Dominique Bréda Chorégraphie : Bérengère Bodin Avec : Ahmed Ayed, Bruno Borsu, Fabian Finkels, Martin Goossens, Zoé Janssens, Ilyas Mettioui, Mathilde Mosseray, Taïla Onraedt, Camille Sansterre, Iara Scarmatto, Corentin Skwara, Gaël Soudron, Gentiane Van Nuffel

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts !

Littérature

La Philo c’est la vie ou comment la philosophie a le pouvoir de rendre la vie meilleure de Jules Evans Editions Marabout

La critique On est à l’ère des guides spirituels et des manuels d’autosatisfaction. Et si de nombreux psychiatres se sont attelés à nous expliquer « comment être heureux », ce n’est pourtant pas eux les premiers à s’être attaqués à la question. Pour Jules Evans, ce sont les philosophes de l’Antiquité qui se sont d’abord attelés à cette tâche. Après avoir découvert des fondements philosophiques dans la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), notre journaliste entreprend de voir comment à leurs époques, les philosophes appliquaient leur discipline et com-ment aujourd’hui elle est remise au goût du jour… Ce livre veut montrer en quoi la philo n’a rien de si compliqué, ni de si inutile. La grande idée de l’auteur est qu’il faut vivre la sagesse. Il faut l’étudier, certes, mais ne pas la garder comme un savoir. C’est ce qu’il aime dans les figures d’Epicure, de Diogène ou d’Epictète. Ils appliquent leurs propres idées. Leur vie, c’est la philo. L’auteur met en parallèle ces théories de l’Antiquité avec leurs réinterprétations actuelles. Et oui, ce n’est pas parce que Stephen Hawking disait de la philosophie qu’elle était morte, que c’est la vérité ! Jules Evans nous décrit son utilisation dans l’armée américaine, dans les techniques psychiatriques, nous fait entrer dans différentes écoles et différents camps à influence « philosophique »…

Il ne s’agit pas juste de faire l’éloge de ces entreprises basées sur la sagesse antique. Il s’agit de rester critique. C’est pourquoi Jules Evans nous explique aussi les défaillances de certains programmes, voire leur côté sectaire. Il nous sensibilise à la façon dont subtilement on passe de la philosophie au lavage de cerveau. La manière dont l’interprétation peut tuer une philosophie.

« Ce livre veut montrer en quoi la philo n’a rien de si compliqué, ni de si inutile. La grande idée de l’auteur est qu’il faut vivre la sagesse. » Mais parfois, c’est tout le contraire ! Certaines personnes relisent les textes antiques et leur donnent une nouvelle vie. Les philosophes sont tels des phénix, renaissant de leurs cendres, grâce à une nouvelle interprétation. Le chapitre sur Héraclite, par exemple, se termine sur la possibilité d’une vie extraterrestre. Pas sûr que le sage grec y ait pensé de son temps, et pourtant sa sagesse nous y amène aujourd’hui… Les philosophes ne sont donc pas morts et enterrés ! Le livre aborde mille et une thématiques, mille et une questions qui vous toucheront. Pas de réponses à l’horizon, ou disons plutôt, pas une seule réponse.

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C’est un recensement de pratiques qui rendent heureux. A aucun moment Jules Evans ne prône une application méthodique d’un certain programme. Non ! C’est ce qui a fait sans doute de ce livre, un best-seller en Angleterre. Ca et l’aspect commercial, attractif, que Jules Evans maitrise dans son bouquin ou sur son blog (http:// philosophyforlife.org). Ce n’est pas un traité de philosophie mais une recherche journalistique. L’auteur a une bonne plume et il sait ce qui est ennuyeux à lire ou ce qu’il ne l’est pas. On ne décroche pas de son livre parce qu’il est fluide, clair et qu’il nous raconte des histoires personnelles, presque digne de romans. Un peu à la Bellemare avec beaucoup plus de philosophie derrière… Cela se termine, d’ailleurs, de manière un peu trop romanesque. Alors faut-il lire « la philo c’est la vie » ? Sans aucun doute ! Ce livre vous fera une belle introduction à la philosophie voire même vous en apprendra plus. Les cours et les conférences enseignent beaucoup de bon savoir mais lorsqu’on se retrouve face à la question « Et c’est quoi tout ça ? » ils ne nous sont d’aucune aide ! Par contre, Jules Evans sait quoi répondre : c’est la vie !

Anastassia Depauld


Qu’êtes-vous prêt à faire pour avoir ce dont vous avez toujours rêvé ?

Addict de Jeanne Ryan Editions Robert Laffont 360 p.

Vee n’a plus droit de sortie, sauf exception, depuis sa tentative de suicide qu’elle plaide n’être qu’un accident. Un soir, après son travail de maquilleusecostumière pour la pièce de théâtre de son lycée, elle se décide à relever un des défis proposés par Addict, un jeu de télé réalité diffusé sur le net qui offre des cadeaux alléchants à ceux qui osent. Elle voulait pour une fois ne pas être dans les coulisses. C’était seulement pour s’amuser l’histoire d’un soir mais elle est sélectionnée pour la prochaine étape. Elle voulait s’arrêter mais ne pouvait résister aux cadeaux promis. Des défis de plus en plus malsains contre des prix de plus en plus gros, va-t-elle pouvoir aller jusqu’au bout ? Addict nous présente les aspects du

Emma vit à New York. À 32 ans, elle continue de chercher l’homme de sa vie. Matthew habite à Boston. Il a perdu sa femme dans un terrible accident et élève seul sa fille de quatre ans. Ils font connaissance grâce à Internet et bientôt, leurs échanges de mails les laissent penser qu’ils ont enfin droit au bonheur. Désireux de se rencontrer, ils se donnent rendez-vous dans un petit restaurant italien de Manhattan. Le même jour à la même heure, ils poussent chacun à leur tour la porte du restaurant. Ils sont conduits à la même table et pourtant… ils ne se croiseront jamais.

Demain de Guillaume Musso Editions XO 440 p.

Ca y est ! Guillaume Musso est de retour ! Ah ben oui... Et cela fait dix ans que cela dure en plus ! Et invariablement, les chiffres de vente s’envolent. Et certains critiques détestent. Et le public en redemande. It’s the same old song and dance, comme dirait Aerosmith. Sauf que... Non. Désolé, votre honneur, mais a y regarder avec un peu d’objectivité, il n’y a pas grand chose de commun entre Et Après..., le premier succès de l’ancien prof’ d’Antibes et ce Demain, dont la déferlante vient de mettre tout le monde d’accord dans l’univers des têtes de gondole. Enfin, quand je dis « pas grand chose », j’avoue, je mens. L’univers de Guillaume reste le même : un univers populaire, fait de références cinématographiques et musicales, de lieux mythiques et de thèmes qui font vibrer le cœur d’un

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genre humain à toujours vouloir plus et à pouvoir se dépasser dans un contexte contemporain. En effet, Vee qui est habituellement dans l’ombre, devait aller au-delà de ses peurs. Et si elle ne pouvait s’empêcher de continuer le jeu, c’est parce qu’Addict lui promettait exactement ce dont elle avait toujours rêvé mais comment savaient-ils ? Internet. Et oui, elle était espionnée via ses réseaux sociaux ! C’est un roman facile qui vise plutôt les adolescents, mais qui nous démontre tout de même des réalités très vraies qu’on ne voit pas au quotidien. Le parallélisme avec la réalité peut même être un peu flippante. C’est donc un livre très intéressant et très prenant.

Sontiu Falguière

lectorat que l’on dit surtout féminin. Sans oublier des dialogues enlevés, des personnages attachants... Et un sens du rythme qui pousse le lecteur à perdre quelques heures de sommeil pour tourner encore quelques pages. Cela, c’est pour les fondamentaux. Mais Demain est clairement taillé dans un bois plus dur, une écriture plus tranchante et un univers plus sombre que les autres romans de Guillaume Musso. Attention, notre homme ne vire pas James Ellroy et l’hémoglobine ne dégouline pas des pages de cette aventure haletante saupoudrée de fantastique... Mais pour la première fois, les personnages mis en scène dans Demain révèlent des motivations étonnantes, flirtent avec les frontières de la morale... Et se trouvent éclairés sous un jour original. Je ne tiens pas, pour garder toute la surprise aux lecteurs, à avancer plus loin dans une analyse de la mécanique surprenante qui se construit au fil du roman. Mais il me suffit peut-être de dire que le lecteur vorace que je suis, l’auteur au fait des « trucs et astuces » de l’écriture, s’est fait avoir dans les derniers chapitres du récit. Au plein cœur du roman, je pensais, naïvement, que je savais où Guillaume m’amenait. Et le livre refermé je dois avoué : je me trompais. Chapeau l’artiste !

Christophe Corthouts

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts Dans l’épave d’un avion emprisonné sous les glaces du mont Blanc, Suzie Baker retrouve le document qui pourrait rendre justice à sa famille accusée de haute trahison. Mais cette découverte compromettante réveille les réseaux parallèles des services secrets américains. Entraîné par l’énigmatique et fascinante Suzie Baker, Andrew Stilman, grand reporter au New York Times, mène une enquête devenue indispensable à la survie de la jeune femme.

Un sentiment plus fort que la peur de Marc Lévy Editions Robert Laffont 440 p.

Traqués, manipulés, Suzie et Andrew devront déjouer pièges et illusions jusqu’à toucher du doigt l’un des secrets les mieux gardés de notre temps. L’année dernière, Marc Levy nous avait raconté l’histoire d’Andrew Stilman dans Si c’était à refaire, une aventure balancée entre le thriller et la romance, sur un rythme plutôt soutenu... Mais plombée par un final trop évident. Cette fois, moins d’un an plus tard, il retrouve Des p’tits hiboux complètement fous… Un roux, deux à poux, trois cachés dans le houx… Stéphanie Le Begge a mis tout son univers graphique et son humour dans ce livre pour les tous petits, pour leur apprendre à compter et à jouer avec les sonorités.

10 hiboux de Stéphanie Le Begge Editions Thierry Magnier 24 p.

Mignons et pas gnangnans, les hiboux feront aussi plaisir aux parents qui apprécieront les illustrations très originales (réalisées avec des cachets faits dans des gommes), les détails et les textes décalés (mention spéciale pour les 7 hiboux boulottés par le loup) ! « J’aime l’idée que chacun puisse trouver une situation, une idée drôle mais de façon différente », explique la jeune dessinatrice. Stéphanie Le Begge a étudié le graphisme au 75 à Bruxelles et a ensuite repris des études d’illustration à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles : « J’ai adoré mes études qui m’ont aidée à m’affirmer en tant qu’illustratrice et graphiste. Maintenant je travaille en tant que graphiste et à coté je suis indépendante complémentaire. Cela me permet de garder cette liberté d’action, de pouvoir choisir des projets qui me plaisent vraiment. Et de continuer l’illus-

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le même Stilman - journaliste désenchanté, alcoolique, mais foutrement déterminé - dont la trajectoire va croiser celle de Suzie Baker, jeune alpiniste au destin pour le moins surprenant. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la sauce prend ! Marc Levy semble réellement s’amuser à concocter une recette qui rappelle Les hommes du Président, La mort aux trousses, Cliffhanger ou encore Red. Le lecteur amateur de récits populaires s’amusera d’autant plus que l’auteur souvent identifié comme « faiseur de comédies romantiques » balance ici aux orties les ressors trop évidents et les litres de sirop de glucose pour resserrer les boulons de son récit et nous emporter dans des rebondissements piquants ! Nul ne sait si ce Sentiment plus fort que la peur sonne l’arrivée d’un « nouveau » Marc Levy, mais il s’agit là d’un exercice dans lequel on aimerait le voir plus souvent se lancer !

Christophe Corthouts

tration ! Parfois le plus dur est de trouver le temps de tout faire... mais quand j’ai un faire-part imprimé ou un livre édité entre mes mains, j’oublie tout ! Et je ne rêve que d’une chose, recommencer ! ». L’idée de ce petit livre lui est venue un peu par hasard : « J’aime les hiboux et la forme graphique que l’on peut lui donner. A partir du moment où mon cachet est né, cela a été plutôt rapidement pour trouver les différentes pages car je me suis beaucoup amusée en le faisant. Avant la publication chez Thierry Magnier, j’ai d’abord fait des petits livres moi-même et je les vendais sur des marchés de créateurs. Le public avait l’air d’apprécier, j’ai donc cherché à le montrer à des éditeurs ». Et comme Stéphanie a des projets plein la tête, gardons l’œil ouvert, car ça promet d’être… chouette !

Lise Francotte


A New York, deux tueurs professionnels abattent un sénateur alors qu’il se trouve en galante compagnie, avec une mineure. Le scandale ainsi recherché est étouffé par la police mais le FBI s’en mêle. Il semble que les enjeux politiques soient trop importants pour laisser faire la police. Sacrifié par leur commanditaire qui veut à tout prix empêcher que l’on remonte jusqu’à lui, les deux exécuteurs se retrouvent à leur tour pourchassés par des assassins et par la police.

Du plomb dans la tête (intégrale) de Wilson et Matz Editions Casterman 160 p.

Le style et la profondeur du scénario nous plongent dans une ambiance de film policier dès les premières cases - le début d’une ironie tarentinesque est très vite abandonné pour un polar plus classique. L’ histoire, soignée et aidée par des dialogues crédibles, gomme la colorisation un peu rébarbative. La série complète en un volume (Petits poissons, Gros poissons et Du bordel dans l’aquarium) se lit d’une traite tellement le suspense est prenant ! La solidité en béton du récit de Matz (auteur de la série

Lorsqu’un surnaturel décide de s’emparer d’un ancien artefact détenant le pouvoir de libérer le mal et de dévaster le monde, c’est Merit qui se lance à sa poursuite. Mais la jeune vampire est elle-même traquée. L’un de ses ennemis est bien déterminé lui aussi à mettre la main sur le précieux trésor. Dans ce combat, pas de pitié. Pas de règles. Aucune vie ne sera épargnée. La chasse est ouverte.

Les Vampires de Chicago : T6 - Morsure de sang froid de Chloé Neill Editions Milady 2013 420 p.

J’attendais ce tome avec impatience et je dois dire que l’attente valait le coup. L’histoire commence là où le tome 5 se termine, donc pas de pause, on commence sur les chapeaux de roues. Le lecteur que nous sommes rentre directement dans le vif du sujet, ce qui est très appréciable dans ce cas. La relation de Merit avec Ethan monte en puissance même si c’est difficile à croire. Les personnages agaçants (par ex. : le présidium) sont toujours présents et ont plus que leur part dans l’intrigue. J’apprécie particulièrement cette série par les sentiments, les émotions et les épreuves que les personnages traversent et qui les rendent, de ce fait, plus proche de nous. Cette identification est d’autant

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« Tueur ») ferait rêver un producteur de films d’action. Pas étonnant donc que Silvester Stallone himself ait repris le scénario pour en faire un film (déjà dans les salles Du plomb dans la tête, Walter Hill). Pour soutenir le scénario et les dialogues, la plume de l’expérimenté Colin Wilson (Raël, Blueberry, Thunderhawks) nous apporte un dessin particulièrement adapté : détaillé, réaliste et soigné. Le fond de l’histoire, c’est donc une improbable alliance, une association contre-nature entre les survivants d’une tuerie : le flic et le tueur. L’équipe enquête et remonte vers les commanditaires. On y croise manigance politicienne, mafia, complots et corruption... A lire, à offrir, à relire et à partager avec tous les amoureux du genre !

Julien Fontignie

facilitée que l’histoire se déroule dans notre époque. A travers le regard d’Ethan, on s’aperçoit que Merit a pris confiance en elle, et ainsi a gagné en maturité. Ethan est pareil à lui-même si ce n’est que son expérience avec la mort l’a rendu encore plus méfiant mais heureusement, cela n’est pas immuable... Ce tome est rempli de rebondissements qui nous prouvent que les épreuves que traverse une personne ont souvent des effets en série sur la vie de nombreuses personnes. La découverte de nouvelles créatures et des liens entre elles apporte le souffle de nouveauté sur ce tome. Notre vision du monde s’en trouve enrichie. L’auteur mélange, comme de coutume, avec subtilité intrigues politiques, actions, amitiés et relations amoureuses. Son style est toujours aussi fluide et rythmé.

Marylise Dufour

19 mars 2013


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts Jacky Durand est journaliste au service Société de Libération la semaine et chroniqueur gourmand le week-end. Après la rubrique Foodingues, il a poursuivi sa chronique culinaire avec Tu mitonnes !..., deux pages hebdomadaires sur sa passion : la cuisine et les petites histoires qui la font vivre. Il aime le bleu de Gex, le poivre de Kampot sur une tranche de Morbier, les cerises cueillies sur l’arbre et mordre dans un Paris-Brest les jours de pluie. Il aime Simenon, Gorki, Maupassant, Camille, Miles Davis ou Led Zeppelin. Quand il ne travaille pas, il suit les conversations de bistrot, flâne en ville ou à la campagne et pratique la maraude. Tu mitonnes ! ... l’hiver et Tu mitonnes ! ... l’été de Jacky Durand Editions Carnets Nord-Editions Montparnasse 216 p.

Il nous concocte des petits livres qui sont plus que des livres de recettes.

de Sylvain Cordurié, Nespolino et Gonzalbo Editions Soleil - 1800 48 p.

Quelques recettes que vous trouverez au fil des pages : tarte aux noix et au roquefort, cailles et râpées ardennaises, les crêpes Lucie, le jarret de veau braisé au citron confit et aux légumes nouveaux, le saumon poêlé à la crème de lentilles et sa fondue de poireaux, etc. Chaque recette prend place dans de délicieuses nouvelles, véritables tranches de vie poétiques… Plus que des livres de recettes, Jacky Durand nous propose des pépites à consommer sans modération. Ecouter la petite musique des mois au jardin et au marché est une façon de ré-étalonner son quotidien dans la marche naturelle du temps.

Il nous montre que cuisine et bonté ne font qu’un et que tout doit se conclure autour d’une table. Des délicieuses tranches de vie qu’il décline avec générosité et bienveillance. Il nous raconte, sous forme de nouvelles, des

Un livre à lire aussi en plus de l’utiliser pour les recettes…

Mai 1876, Le Royaume-Uni connaît une vague de disparitions inquiétantes. Les communautés intellectuelles et scientifiques en sont les premières victimes. Nulle rançon n’est demandée et les autorités n’ont pas l’ombre d’une piste sur les motivations des ravisseurs.

La BD narre la vie du plus célèbre des détectives, avant qu’il ne soit, à ce stade de l’histoire, accompagné de son fidèle acolyte, le docteur Watson. Il vit une relation dite « amicale » avec un musicien qui se fait enlever de façon mystérieuse. Ni d’une ni deux, Sherlock Holmes part à la recherche de son ami. Au plus l’enquête se précise, au plus Sherlock découvre que la famille Moriarty est impliquée, mais cette famille est très forte pour préserver le secret ; il va falloir aller plus loin et utiliser d’autres techniques pour que Sherlock arrive à ses fins.

S’il arrive à Sherlock Holmes de prêter concours à Scotland Yard, il n’a pas encore choisi sa voie. Il se partage entre ses passions et mène une vie de bohème aux côtés d’un jeune musicien autrichien, violoniste virtuose promis à une grande carrière.

Sherlock Holmes Crime Alleys : T1 - Le Premier problème

recettes qui correspondent à des saisons.

L’enlèvement de ce dernier conduira Holmes à se confronter au crime organisé à l’insoupçonnable noirceur, l’amènera à devenir détective et à combattre les plus grands esprits criminels de son temps dont les Moriarty, père et fils.... Les histoires de Sherlock Holmes sont en vogue ! Alors que plusieurs éditions sont sorties précédemment, la catégorie 1800 de chez Soleil tente aussi sa chance en proposant son premier tome intitulé Le Premier problème. Ces aventures sont prévues en deux tomes.

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Marc Bailly

Le dessin et le style sont très agréables à regarder. Dès les premières pages, on se retrouve plongé dans un univers du 19e siècle qui est, ma foi plutôt bien respecté. L’histoire est bien entendu une extension parmi tant d’autres du célébrissime « British man ». Mais la BD a néanmoins le mérite d’être découverte et de nous faire voyager au cœur d’une enquête à la Holmes. Une occasion en or de savourer une histoire de Sherlock Holmes même si elle ne fait pas partie des grands classiques... on ne s’en lasse pas !

Nele De Smedt


Cinéma / Musique / Scène / Littérature / Arts

Entré en vigueur début 2009, le dispositif de l’auto-entrepreneur est né pour faciliter la vie de tous ceux étudiants, salariés, chômeurs, retraités... - qui souhaitent se lancer dans l’aventure de la création d’entreprise, développer une activité complémentaire ou tester un projet tout en échappant aux lourdeurs administratives.

Le Guide pratique de l’autoentrepreneur de Gilles Daïd et Pascal Nguyên Editions Eyrolles 190 p.

Les auteurs de ce guide pratique offrent un mode d’emploi complet de l’autoentreprenariat et répondent aux questions essentielles : qui est concerné ? Quelle activité exercer ? Quels régimes fiscal et social adopter ? Quelles responsabilités et obligations comptables ? Quels sont les avantages dont bénéficie l’autoentrepreneur, etc. Précis et pratique, ce livre accompagne le futur auto-entrepreneur dans toutes les étapes de son projet : les pièges à éviter et les outils à mettre en place, de nombreux conseils pour gagner en temps et en efficacité, toutes les adresses utiles et les réseaux à solliciter.

dans le choix et la création de votre activité. Il a également l’avantage d’être réparti en chapitres et sous-chapitres clairs et concis avec des couleurs en fonction des informations qui sont données et qui permettent aisément de s’y retrouver. Attention, je tiens ici à attirer tout particulièrement votre attention cher lecteur. Ce livre a été écrit par des auteurs français et est donc adressé à un public… français. Le statut d’autoentrepreneur n’existe tout simplement pas en Belgique. Le pendant le plus proche de ce statut dans notre petit pays est l’indépendant à titre complémentaire. Je conseille donc vivement ce livre aux Français et le déconseille pour les Belges qui trouveront, plus que probablement, d’autres ouvrages plus adaptés pour commencer leur activité en Belgique.

Emilie Lessire

Si vous avez envie d’augmenter vos revenus mais vous ne savez pas trop par quoi commencer, cet ouvrage répondra assurément à toutes vos questions. Bien plus qu’un livre qu’on lit d’une traite, il sera votre allié et vous accompagnera

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19 mars 2013


Happy Birthay Mr. Suricate Quentin Tarantino

©Georges Biard

1963

Le Côté Obscur du Geek ? Une structure scénaristique non-linéaire, une track-list constituée d’obscurs standards et d’extraits des travaux des maîtres de la bande originale, des influences venues du cinéma populaire mondial, des scènes de dialogues parfois excessives... Enfin une dose de fétichisme du pied et de mise en scène absurde de la violence. La check-list est complète. A l’aube de son cinquantième anniversaire, Quentin Tarantino est un metteurs en scène des plus identifiables de sa génération. L’ami Quentin, c’est le côté obscur de cette génération de geeks qui s’est emparée d’Hollywood pendant que les grands studios n’en finissaient pas de se demander comment tirer quelques dollars supplémentaires d’un système de production arrivé aux limites de ce qu’il pouvait offrir au public. Si des créateurs comme J.J. Abrams, Peter Jackson ou encore Josh Whedon sont les enfants de la technologie, fascinés par les outils qui sont aujourd’hui mis à leur disposition pour créer des mondes de plus en plus vastes, Quentin Tarantino s’inscrit à contre-courant de cet investissement au centre d’un « nouveau cinéma » baigné de pixels autant que d’histoires. Dès l’arrivée de Reservoir Dogs, en 1992, une évidence s’impose :

Tarantino est un homme d’images... Mais surtout un homme de mots. Les dialogues de son film de braquage sont une véritable ode à la langue de gangsters... Avec un naturel confondant, le scénariste Tarantino parvient à « sonner juste », tout en inventant presque un langage que les critiques s’empresseront de qualifier de « postmoderne ». Soit une somme de références, picturales et textuelles, qui n’hésite pas à plonger ses racines dans le cinéma lui-même, la culture populaire et les figures du monde de l’entertainment. En fait, ses classes de metteur en scène, Quentin les a faites derrière le comptoir d’un vidéo-club de Los Angeles. Il a dévoré des kilomètres de bandes VHS durant les années 80, à une époque où le succès de la location vidéo était telle que, pour alimenter la machine et la voracité des locataires, une foule de films venus des quatre coins du monde se retrouvent alignés, sous des jaquettes criardes, sur les étagères des boutiques. Des producteurs plus ou moins honnêtes rachètent à vil prix les droits des films italiens, espagnols, français, anglais, belges (si, si, cela s’appelait Rabbid Grannies... en 1988) et leur offre une seconde vie. Dans le même temps, Tarantino va également se baigner dans le western spaghetti, le film de guerre, le film de gangster, le film d’horreur... Il engloutit tout ce qui passe à portée de ses mirettes. Se met-il pour autant à filmer tout ce

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qui passe ? Non. Il écrit. Ce qui fascine le futur réalisateur de Django Unchained, c’est de coucher sur papier ses idées... Et surtout déjà ses dialogues ! Véritable moulin à paroles dans la vie quotidienne, Quentin Tarantino ne peut pas s’empêcher de déverser dans ses scripts des lignes et des lignes de dialogue. Si ses histoires s’astreignent à une structure plutôt classique (même s’il prend un malin plaisir à les dissimuler au montage, il suffit de voir les versions remontées par les fans de Pulp Fiction pour comprendre...) les dialogues eux sont ciselés pour entrer, par la grande porte, dans les compilations de répliques cultes. Mais ce qui va forger la renommée de Quentin Tarantino, au-delà de son indéniable talent, c’est son association avec Bob et Harvey Weinstein, les producteurs à la tête de Miramax, la société de production indépendante la plus florissante à Hollywood dans les années 90. Ce sont les frères Weinstein qui achètent à Tarantino True Romance, un scénario que mettra en scène Tony Scott (et qui sera profondément modifié, à la grande déception de Tarantino) et surtout qui produisent Pulp Fiction, le second long métrage de Quentin... Et celui qui déclenchera le phénomène Tarantino avec sa Palme d’Or, obtenue à Cannes en 1994. Ecrit en collaboration avec Roger Avary, Pulp Fiction remportera également l’Oscar du Meilleur Scénario


©The Weinstein Company

Original... Une statuette que Tarantino remportera une seconde fois, en 2013, dans la même catégorie, avec Django Unchained. Une réussite qui paralyse ? Après la folie cannoise et les hourras des critiques, puis de la foule (Pulp Fiction est le premier film Miramax à atteindre le seuil, symbolique, des 100 millions de dollars de recettes aux Etats-Unis), les faits et gestes de Quentin Tarantino sont épiés. Quasi drapé d’une toge de « nouveau messie du cinéma indépendant », porté aux nues par les critiques internationaux qui voient en lui une sorte d’alternative « sérieuse » à la vague des popcorn movies - même si, paradoxalement, il puise tout autant ses influences à la source d’un cinéma de quartier, populaire et « facile » Tarantino passe par la case « films à sketches », puisqu’il réalise un des segments de Four Rooms avant de livrer son nouveau long-métrage, Jackie Brown. Adapté du roman Rum Punch d’Elmore Leonard (un cador du polar à l’américaine), les aventures de Jackie Brown s’inscrivent dans la veine d’un Pulp Fiction... nourri à la blacksploitation, cette vague de films voulus pour un public noir, initié dans les années ’70. Une influence que le réalisateur Spike Lee reprochera d’ailleurs à Tarantino, le taxant de « racisme » et s’interrogeant sur sa « légitimité » en tant que créateur de personnages noirs. Un débat qui,

dans un sens purement artistique peut paraître outrancier... mais qui, dans le contexte toujours tendu d’une Amérique qui a du mal à se défaire de ses vieux démons, prend des proportions toutes autres. Avec moins de 40 millions de dollars de recettes au box-office US, Jackie Brown est considéré comme un échec pour le wonderboy de l’écurie Miramax et certains s’empressent déjà de coller sur le dos de Tarantino l’étiquette de l’homme d’un seul film (oubliant un peu vite Reservoir Dogs, ou encore les nombreuses contributions de l’auteur à des tas de films à succès des années 90). Pris entre le marteau et l’enclume, gêné aux entournures peut-être par un costume trop étroit que lui a taillé la critique, Tarantino mettra près de six ans à enfin revenir vers le grand écran avec Kill Bill... L’histoire d’une vengeance, scindée en deux films, qui constitue aujourd’hui encore une sorte de somme des influences absorbées par Tarantino durant ses années formatives. Libéré par ce « magnum opus » qui sera aussi l’occasion pour Tarantino de se battre pied à pied avec Harvey Weinstein, le réalisateur s’engage alors dans une période de production régulière... Boulevard de la Mort en 2007, moitié du diptyque « Grindhouse » créé avec son ami Robert Rodri-

guez, puis Inglorious Basterds, projet souvent évoqué, toujours repoussé, qui remporte un succès public certain et enfin Django Unchained, sur les écrans américain pour le jour de Noël 2012 et qui poursuit, dans la veine des Basterds, une réécriture de l’histoire sur les ailes d’un cinéma populaire et décomplexé. Pour autant, aujourd’hui devenu un sorte de « valeur sûre », une estampille qu’il se plait d’ailleurs lui-même à décliner (sous forme de DVD, de productions, mais aussi de programmation filmique au travers la salle de cinéma qu’il a récemment acheté...), Quentin Tarantino n’est pas dénué de défauts. Comme celui, et non des moindres, d’aborder ses propres écrits avec une indulgence... aux limites de l’auto-parodie. Si la scène d’ouverture de Inglorious Basterds file des frissons à chacune de ses visions, il faut avouer que certains autres moments de métrage, comme plusieurs scènes de dialogues de Django Unchained, auraient pu (du ?) finir sur le sol de la salle de montage. L’avenir nous dira si quelqu’un parviendra un jour à brider ce moulin à parole, afin que son style cinématographique, personnel et percutant, accouche enfin d’un chef-d’œuvre équilibré, plutôt qu’une nouvelle démonstration de force d’écriture.

Christophe Corthouts

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19 mars 2013


Happy Birthay Mr. Suricate

1963

Grande Bretagne VS Etats-unis

Alors qu’en Belgique Petula Clark occupe la première place du hit-parade avec Cœur blessé et que Françoise Hardy fait de même en France avec Tous les garçons et les filles de mon âge deux groupes bientôt emblématiques débarquent dans leurs pays respectifs et connaissent leurs premiers succès nationaux. En effet, il y a bientôt cinquante ans sortaient à trois jours d’intervalle le premier album des Beatles et le second album des Beach Boys.

Dans la série des producteurs dans l’erreur, et avec le recul, il est marrant de noter Dick Rowe qui doit sa célébrité au fait d’avoir refusé les Beatles lors d’une audition en 1962 et d’avoir conclu l’entretien en leur expliquant que « les groupes à guitares allaient bientôt disparaître ». On peut noter que la maison de disques en question, Decca, reviendra sur son verdict et fera signer The Rolling Stones et The Who un peu plus tard.

The Beatles - Please Please me

The Beach Boys - Surfin’ USA

Le 22 mars 1963, en Angleterre, sort le premier album des Beatles, quelques mois après la sortie des singles Love me do et Please please me. L’album est composé de huit compositions originales ainsi que de six reprises de standards tels que Twist and Shout.

Le 25 mars 1963, aux Etats-Unis, sort leur second album, après Surfin’ Safari. C’est le premier à arriver dans les premières ventes d’albums aux États-Unis. The Beach Boys est à l’origine un groupe familial. Il est composé des trois frères Wilson, d’un de leurs cousins et d’un ami à eux et le père Wilson en est le manager.

L’album avait pour but de retranscrire l’énergie et le répertoire qui caractérisaient le groupe sur les scènes britanniques et faisaient leur renommé depuis deux ans. Il est enregistré le 11 février, alors qu’ils ont un jour de pause dans leur tournée, et ce en l’espace de trois sessions de trois heures chacune ce qui est bien entendu exceptionnel. Cet empressement est dû à la volonté de surfer sur le succès du single Please Please me paru en janvier afin de les installer définitivement comme un groupe important et à suivre.

Cet album atteindra dès sa sortie la deuxième place dans les ventes nationales. Le titre Surfin’USA, composé par le leader Brian Wilson, inscrit définitivement le groupe comme l’icône d’une génération de surfeurs, image qui les qualifiera et à laquelle on associera leurs mélodies légères et propres à leur identité. Les paroles de la chanson sont très simples et sont une liste de tous les spots de surf de Californie mais aussi d’Australie et d’Hawaii.

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Pour ceux qui ne savent pas trop à quoi s’attendre en écoutant l’album, c’est un peu comme regarder Pulp Fiction mais sans les images. En effet, la bande son de ce film est composé en grande partie de la musique surf. On y retrouve notamment Misirlou, composée par Dick Dale et reprise en autre par les Beach Boys dans Surfin’USA. Vous remarquerez d’ailleurs en parcourant ce magazine que Quentin Tarantino a le même âge à deux jours près que cet album des Beach Boys. La course des charts Ces sorties simultanées marquent le début de la concurrence entre les deux groupes. Les Beach Boys ne pourront pourtant pas rivaliser très longtemps. En effet, au début de l’année 1964 les Beatles détrôneront The Singing Nun de Sœur Sourire de la tête du classement Billboard des ventes d’albums aux Etats-Unis pour y être premier. Deux mois plus tard, il rentreront dans l’histoire du classement en ayant cinq de leur chansons occupant les cinq premières places du classement. Les Beach Boys ne baisseront cependant pas les bras et parviendront enfin à en obtenir la première place en mai 1964 avec leur tube international I Get Around et intègreront aussi les classements britanniques.

Baptiste Rol




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