La quete numero 162 mars 2014

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SOMMAIRE 06

Quand on est d'la basse ville...

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Une réussite fragile

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Portrait de famille

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Les irréductibles carburent à la passion

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Un centre-ville vrai

14-15 Microcosmes urbains 16

Le duché de Saint-Roch

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Photo : Simon-Charles Couture-Labelle

DOSSIER

12-13 NOTRE CENTRE-VILLE

EN PHOTO !

Du nouveau au printemps

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Taxi, taxi

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De la peur au fun

CHRONIQUES

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Saint-Roch, le gourmand

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« Les bourgeois, c'est comme les cochons »

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Les vieilles affaires

Québec, septembre 2013

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Nuit de folie

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Éloge de la vieillesse

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La métisse avec une pointe d'exaltation sur la joue

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Austin et l'ironie

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la grippe et nous

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Pour une vision à long terme

AUTEURS 31

LES JEUX 28

Le jeu de La Quête

29

La langue dans sa poche

Photo : Simon-Charles Couture-Labelle

24-25 La Chine, les oiseaux,

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PAGE COUVERTURE Photo : Simon-Charles Couture-Labelle et Luc-Antoine Couturier Conception graphique : Karyne Ouellet

RÉALISER L’ESPOIR Camelots recherchés

L’Archipel d’Entraide, organisme à but non lucratif, vient en aide à des personnes qui, à un moment

donné Hey toi! de leur existence, sont exclues du marché du travail ou vivent en marge de la société. Ces laissés Tu as 18compte ans ou plus. pour cumulent différentes problématiques : santé mentale, itinérance, toxicomanie, pauvreté, Tu veux te faire quelques dollars? etc. Dans la foulée des moyens mis en place pour améliorer le sort des plus défavorisés, l’Archipel d’Entraide lance, en 1995, le magazine de rue La Quête. Par définition, un journal de rue est destiné personnes en difficulté, notamment des sans-abri. La Quête permet ainsi aux camelots de reprendre confiance en leurs capacités, de réaliser qu’à titre de travailleurs Pour plus d’informations autonomes ils peuvent assumer des responsabilités, améliorer leur quotidien, socialiser, bref, Appelle-nous au certain pouvoir sur leur vie. reprendre un Travaille à ton compte. Pas d’horaire. à la vente - sur de la rue rue !par des Vends le magazine La Quête

418 649-9145 poste 33 Ou L’Archipel d’Entraide, composée d’une équipe d’intervenants expérimentés, offre également des Viens nous rencontrer au services d’accompagnement 190, rue St-Joseph Est (coin Caron)communautaire et d’hébergement de dépannage et de soutien dans la recherche logement par le biais de son service Accroche-Toit. Dans l’église d’un Jacques-Cartier

Depuis sa création, La Quête a redonné l’espoir à quelques centaines de camelots. SUIVEZ-NOUS SUR

laquete.magazinederue

ÉDITEUR Archipel d'Entraide ÉDITEUR PARRAIN Claude Cossette COORDONNATRICE Francine Chatigny CONSEILLÈRE À L’ÉDITION Martine Corrivault RÉDACTRICE EN CHEF Valérie Gaudreau RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE Isabelle Noël CHRONIQUEURS Martine Corrivault, Claude Cossette, Aline Essombé, Diane Morin

UNE TRIBUNE POUR TOUS

JOURNALISTES Étienne Boudou-Laforce, Jean Louis Bordeleau, Arthur Darrasse, Véronik Desrochers, Thomas Duchaine, Marie-Michèle Genest, Rabéa Kabbaj, Andréane Lespérance, Andrée-Anne Lévesque Aubé, Mathieu Massé, Marc-Antoine Paquin, Chloé Patry-Robitaille

Envie de faire connaître votre opinion, de partager vos poésies, de témoigner de votre vécu. Nos pages vous sont grandes ouvertes. Envoyez-nous vos textes par courriel, par la poste ou même, venez nous les dicter directement à nos bureaux.

AUTEURS Laurence Ducos, Mathieu Meunier, Stéphane Okemvélé-Mégnier, Bernard Songe, Christiane Voyer

Faites-nous parvenir votre texte (500 mots maximum) avant le 11 du mois pour parution dans l’édition suivante. La thématique d'avril  : Paroles.

AUTEURS DES JEUX Hélène Huot, Jacques Carl Morin, Ginette Pépin

FAIRE DES SOUS EN DEVENANT CAMELOTS Les camelots récoltent 2 $ de profit sur chaque exemplaire vendu. Autonomes, ils travaillent selon leur propre horaire et dans leur quartier. Pour plus d’informations, communiquez avec Francine Chatigny au 418 649-9145 poste 31 Nous vous encourageons fortement à acheter La Quête directement à un camelot. Toutefois, si aucun d’eux ne dessert votre quartier, vous pouvez vous abonner et ainsi nous aider à maintenir la publication de l’unique magazine de rue de Québec.

RÉVISEURES Marilou Cloutier, Nathalie Dion, Éva-Saïda Saheb-Ettaba, Louise Fortier, Sylvie Landry, Nicole Paquet, Marie-Claude Savoie, Paméla Tanguay et les étudiants du cours Réécriture et Révision II des programmes de rédaction et révision professionnelles de l'Université Laval sous la supervision de leur enseignante, Anne Fonteneau PHOTOGRAPHE Simon-Charles Couture-Labelle, Luc-Antoine Couturier, Jean-Félix Giguère-Groulx, Camille Amélie Koziej-Lévesque, François Mercier INFOGRAPHISTE Karyne Ouellet AGENTE DE PUBLICITÉ SOCIALE Geneviève Thompson IMPRIMEUR Imprimerie STAMPA inc. (418) 681-0284

COUPON D’ABONNEMENT 10 PARUTIONS PAR ANNÉE Camelots recherchés

Nom: Adresse: Travaille à ton compte. Pas d’horaire. Ville: Vends le magazine de rue La Quête postal: PourCode plus d’informations

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Hey toi! Tu as 18 ans ou plus. Tu veux te faire quelques dollars?

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Téléphone: La Quête est appuyée financièrement par : Stratégie des partenariats de lutte contre l’itinérance (SPLI)

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Nous reconnaissons l’appui financier du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du Canada pour les périodiques, qui relève de Patrimoine canadien

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MOT DE LA COORDONNATRICE

Photo : Simon-Charles Couture-Labelle

VIVRE DANS SAINT-ROCH

Longtemps boudé, le quartier SaintRoch a retrouvé ses lettres de noblesse et se voit maintenant reconnu comme une destination touristique digne de ce nom. Pour cette édition printanière, l'équipe de La Quête a eu l'idée de vous offrir une visite guidée de ce faubourg à la fois l'un des plus vieux et le plus revitalisé de Québec. L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE La géographie d'un territoire détermine son occupation et son histoire. Ironiquement, l'Histoire a fait en sorte que lorsqu’on évoque la Basse-Ville de Québec, dont fait partie Saint-Roch, on pense d'abord à sa situation socioéconomique plutôt qu'à sa topographie. Cet état de fait alimente, depuis toujours, la dualité Haute-Ville - Basse-Ville. Andrée-Anne Lévesque-Aubé a voulu savoir si, à force d'être revitalisé, Saint-Roch arrivera à détrôner un jour la Haute-Ville bien perchée ! Deux décennies à peine. C’est ce qu’il a fallu pour faire du quartier le plus pauvre du Canada, le quartier branché qu’est le Nouvo Saint-Roch. Mais sa vitalité demeure fragile si l'on en croit les interlocuteurs, des architectes qui s'intéressent vivement à son développement, auxquels s'est adressé notre reporter Arthur Darrasse. Ce sont les résidents qui font vivre un quartier, disent-ils, et actuellement l’offre de logement ne permet pas d'en accueillir plus. Des pistes de solutions sont sur la table... DES GENS Pour densifier la population de SaintRoch, l’administration municipale voudrait bien voir des familles s’y installer en plus grand nombre. Cependant, les logements (encore!) de grandeur convenable pour accueillir parents et enfants se font rares s’est fait dire notre journaliste, Rabéa Kabbaj. Elle a néanmoins rencontré des couples qui non seulement ont déniché l’endroit parfait à habiter

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avec leur progéniture, mais qui sont aussi ravis de leur mode de vie. Vivre dans Saint-Roch, c’est accepter de côtoyer la pauvreté et la marginalité au quotidien, ce que l’on nomme poliment la mixité sociale. Malgré toute la bonne volonté des acteurs politiques de bien gérer cette « cohabitation forcée », certains redoutent qu'ils puissent y arriver. Notre journaliste Mathieu Massé a été prévenu que parmi les solutions, il n'est malheureusement pas question de trouver des moyens d'enrayer la pauvreté. Même ceux qui ne souhaitent pas voir le quartier devenir trop épuré sont contents de pouvoir y circuler de façon sécuritaire. Marc-Antoine Paquin nous ramène à l’époque pas si lointaine où fréquenter le cœur de Saint-Roch était presque un pari risqué. Mais les choses ont bien changé, Claude peut l'affirmer. Ce chauffeur de taxi, posté devant la bibliothèque Gabrielle-Roy, a gentiment accepté de faire monter à bord Jean Louis Bordeleau pour une petite tournée à titre d'initié. Pour sa part, Véronik Desrochers est allée à la rencontre de l'off-duchesse Franie-Éléonore Bernier. La revengeresse explique pourquoi elle est si fière de son duché.

Peu - voire pas du tout - fréquentés par les jeunes branchés et autres technos fraîchement débarqués, le resto JacquesCartier et le bar Au Dauphin sont victimes de préjugés. Loin d'irriter les habitués de ces commeerces, ces idées préconçues deviennent la frontière qui leur permet de rester « comme en famille » et de ne pas avoir à partager « en plus   leurs lieux privilégiés. Marie-Michèle Genest les a rencontrés. SAINT-ROCH, ROYAUME DU CAMELOT ! Ici, on me pardonnera mon manque de subjectivité, mais pour moi Saint-Roch ne serait pas Saint-Roch sans ses nombreux et - assidus - camelots de La Quête! Chaque matin, chaque soir, mon parcours me permet de croiser l'un ou l'autre d'entre eux. Parfois, je les observe de loin. Ils sont à l'œuvre : patientant, souriant, jasant, grelottant. À leur manière, ils ajoutent une teinte bien particulière au tableau du centre-ville. Merci de les encourager ! Bonne lecture ! FRANCINE CHATIGNY

DES LIEUX Récemment installés dans le quartier, des commerces « à succès » font la manchette et leur « raison sociale » pend aux lèvres de ceux qui promeuvent avec fierté le Nouvo Saint-Roch. Leur apport est indéniable, mais le Saint-Roch authentique compte des irréductibles qu'il serait impardonnable de négliger ! Le trio Denis Musique, Musique Richard Gendreau et Twigg Musique figure au palmarès de ces commerces qui traversent le temps. Thomas Duchaine a cherché à connaître comment ces témoins des bas et des hauts du quartier ont su affronter les intempéries.

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QUAND ON EST D’LA BASSE VILLE ... « Quand on est d’la basse ville, on est pas d’la haute ville », chantait Lelièvre en 1975. Près de 40 ans plus tard, le SaintRoch revitalisé fait-il envie aux gens de la Haute ? Retour sur l’histoire d’un quartier en constante mutation.

Photo : Luc-Antoine Couturier

Plus qu’un simple logis, notre lieu de résidence nous définit. Dans les perceptions populaires, la ville, le quartier voire l’immeuble où l’on vit porte une identité socioéconomique marquant notre appartenance à une certaine communauté. À Québec, être de la Basse-Ville a longtemps voulu dire être défavorisé. UNE TOPOGRAPHIE QUI DIVISE Il faut remonter au XVIIe siècle pour comprendre d’où vient l’image qui colle à la Basse-Ville. À l’époque, le secteur abritait des travailleurs irlandais et francophones peu instruits, s’entassant dans des logements presque insalubres.

cette frontière naturelle qui sculpte la ville, s’est rapidement imposée comme un mur délimitant les secteurs scolaires et les paroisses. Il a fallu attendre l’arrivée de l’automobile, pour que les pentes abruptes, auxquelles s’accommodaient mal les charrettes et les tramways, ne soient plus une limite au voisinage.

L’important contraste entre la haute et la basse ville de Québec est avant tout le fruit de son réseau hydrographique. Le UN SECTEUR EN MUTATION fleuve et la rivière St-Charles facilitant l’approvisionnement et l’expédition, c’est La dichotomie entre la Haute et la Basseen Basse-Ville que se sont installés com- Ville a marqué l’imaginaire des citoyens merces et industries. La Haute-Ville, peu de Québec tout comme de ses artistes qui, propice à ce genre d’activités, est quant de Lelièvre à Roger Lemelin, ont témoià elle devenue l’hôte du gouverneur, des gné des clivages sociaux qui divisent la religieuses et des jésuites. Pour l’histo- capitale. Il est aujourd’hui intéressant de rien Réjean Lemoine, on assistait déjà là se questionner sur la prégnance de cette à une séparation liée à la géographie de la division. ville, une tendance qui s’est poursuivie à Si au cours des années 70 et 80, l’étalemesure que la ville s’est développée. ment urbain, qui n’a laissé dans Saint« Il y a toujours eu le caractère ouvrier Roch que les familles les plus pauvres, a en Basse-Ville avec les donné lieu à un épisode constructions navales et Serait-ce la fin que où les problèmes de cripar la suite l’industrie de minalité, de drogue et de la dichotomie la chaussure et les grands prostitution ont terni sa entre la Haute et la magasins, tandis qu’en réputation déjà fragile, Basse-Ville ? Haute-Ville c’était les la tendance semble auinstitutions plus nobles jourd’hui s’inverser grâce comme le Parlement et le Séminaire. Les au projet de revitalisation. Commerces élites étaient en haut, le peuple était en haut de gamme et restaurants de fine cuibas », explique-t-il. sine ont maintenant pignon sur rue. La « Non seulement la topographie de Qué- popularité du quartier auprès des classes bec est contraignante pour la localisa- moyenne et fortunée est telle, qu’on tion des activités, mais elle limite aussi craint son embourgeoisement. le nombre de liens physiques entre les deux secteurs », renchérit le codirecteur du Centre interuniversitaire d’études québécoises, Marc St-Hilaire. La falaise,

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Serait-ce la fin que la dichotomie entre la Haute et la Basse-Ville ? Réjean Lemoine en doute. « Il existe encore une coupure,

mais qui n’est pas de la même nature que celle qui pouvait exister dans les années quarante, par exemple ». « La nouvelle image de Saint-Roch comme lieu tendance n’attire pas les mêmes personnes que l’image de quartier urbain du faubourg St-Jean-Baptiste », fait remarquer M. St-Hilaire. Le géographe remarque que les nouveaux arrivants sont davantage branchés, des professionnels de l’informatique ou de la vie artistique, par exemple. Pauvre, riche, dangereuse, branchée la Basse-Ville ? Tout est une question de perception. ANDRÉE-ANNE LÉVESQUE AUBÉ

UN DÉTERMINISME GÉOGRAPHIQUE ? En 1930, Raoul Blanchard développait la Loi d’altitude, expliquant la propension des gens aisés à s’établir en Haute-Ville. La Basse-Ville était-elle prédestinée à devenir un quartier industriel où allaient vivre des ménages à faibles revenus ? « C’est sûr que pour avoir un port, il faut être au bord de l’eau, convient M. St-Hilaire. L’aménagement urbanistique qui est fait à l’occasion de cette activité n’est toutefois pas déterminé par la topographie, mais par les acteurs sociopolitiques et économiques ». À Paris, les secteurs les plus huppés sont en basse ville. Il en est de même à La Paz en Bolivie où plus on est haut, plus il fait froid.

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REVITALISATION URBAINE :

UNE RÉUSSITE FRAGILE Le quartier Saint-Roch est considéré comme un modèle de réussite en matière de revitalisation urbaine. Les vingt dernières années l’ont transfiguré. Endroit malfamé et délabré au départ, il est devenu un lieu vivant et dynamique, voire un moteur culturel de la Capitale-Nationale.

UN PEU D’HISTOIRE L’engouement pour les banlieues et la construction des grands centres commerciaux à Sainte-Foy dans les années 50 porte un dur coup à ce quartier commerçant. Entre 1941 et 1961, la population de Saint-Roch chute de moitié. Les grands projets de rénovation urbaine des décennies suivantes ne feront qu’enfoncer le quartier dans le marasme. Quand l’équipe du maire Jean-Paul L’Allier arrive au pouvoir, en 1989, SaintRoch est le quartier le plus pauvre du Canada. «  J’avais un appart dans le quartier, c’était pas le Saint-Roch qu’on connaît aujourd’hui  », affirme Pierre Martin, l’architecte qui a rénové l’édifice La Fabrique. Le quartier est envahi par les bandes organisées, la prostitution et la drogue. À l’époque, un gigantesque complexe commercial doit y être construit. Convaincu que ce projet ne répond pas aux besoins du quartier, M. L’Allier impose contre vents et marées son projet de jardin. L'inauguration de ce dernier en 1993 marque le virage vers la revitalisation de Saint-Roch. De nombreux chantiers vont suivre. La rénovation de l’édifice La Fabrique et du complexe Méduse attire une population d’artistes qui vont insuffler une énergie nouvelle à ce quartier exsangue. On retire le toit du mail SaintRoch. Les promoteurs recommencent à s’intéresser au quartier. «  On avait des bâtiments extraordinaires, il y avait beaucoup de potentiel. […] Je faisais des projections, je regardais le potentiel et j’allais voir des promoteurs pour les convaincre », raconte Pierre Martin. Dès lors, un cercle vertueux s’entame, la population revient peu à peu, les commerces redeviennent prospères, plusieurs entreprises technologiques s’y établissent. « Ç’a été comme un effet d’entraînement, on a pu travailler sur l’aménagement

de nos rues », explique Martin Dubois, chargé de cours à l’École d’architecture. « On est passé d’un endroit malfamé à un endroit branché en deux décennies ! », ajoute-t-il. UN QUARTIER ENCORE FRAGILE

où très peu d’entre eux habitent. Cela ne signifie toutefois pas, selon lui, que le quartier reviendra à l’état d’il y a 20 ans. « Les nouvelles constructions vont avoir un impact sur Saint-Roch, c’est sûr; les gens vont venir consommer», conclut-il.

Si Pierre Martin entrevoit également la « Malgré ces réussites, ce serait une er- possibilité que Saint-Roch se transforme reur de penser que la construction de en quartier d’affaires, surpeuplé le jour Saint-Roch est acheet désert la nuit, il vée », soutient Pierre «… Saint-Roch est encore refuse de penser Martin. Selon lui, très fragile …» Pierre Martin qu’il n’est pas posle quartier manque sible d’y remédier. cruellement de loge«  Y a eu tellement ments. « Il faut être très prudent, il faut d’efforts mis dans Saint-Roch qu’on pas penser que c’est fini. Saint-Roch est peut pas laisser tomber comme ça  », encore très fragile. […] Ce qui manque, affirme l’architecte. Selon lui, la soluc’est les logements pour que les gens tion consiste à densifier, à bâtir en haurestent », martèle-t-il. En effet, depuis le teur et à construire davantage de condos. renouveau du quartier, les logements sont Toutefois, l’apparition de plus grands

Photo : Simon-Charles Couture-Labelle

Cette revitalisation ne s’est pas faite sans effort. De nombreux acteurs issus d’horizons divers ont mis la main à la pâte pour la rendre possible. Mais certains pensent que le travail est inachevé et qu’il reste beaucoup à faire pour que le quartier conserve son éclat actuel.

La fierté de Saint-Roch : le jardin. À remarquer, la coopérative Méduse à l’extrême droite.

rares et les loyers sont chers ; beaucoup de jeunes préfèrent s’installer à Saint-Sauveur, quartier plus résidentiel et moins coûteux. Pour Martin Dubois, il s’agit d’une situation plus ou moins inévitable; Saint-Roch ne possède pas l’espace nécessaire pour offrir davantage de logements. Pour trouver des habitations, les gens commencent à se rabattre sur les quartiers adjacents déjà engagés dans un processus de revitalisation. Il croit que, peu à peu, SaintRoch va devenir un endroit où les gens viennent travailler ou magasiner mais

édifices ne séduit pas tout le monde, et le règlement de zonage qui fixe la hauteur maximale des immeubles limite les possibilités. Si le projet de construction d’une tour à la place Jacques-Cartier soulève des inquiétudes, il suscite l’enthousiasme de Pierre Martin. « Je trouve ça extrêmement intéressant parce qu’on rentre au cœur de l’action, c’est un projet extraordinaire ! », s’exclame-t-il. À son avis, il pourrait bien s’agir d’un projet phare capable de créer une dynamique générale de densification qui propulsera le quartier dans une nouvelle ère d’aménagement urbain. ARTHUR DARRASSE

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Le Flyé

SETTE

E COS

CLAUD

« LES BOURGEOIS, C’EST COMME LES COCHONS » Sylvain Lelièvre était un gars gentil : il venait de la Basse-Ville ;-) Jacques Brel était plus méchant : il chantait « Les bourgeois, c’est comme les cochons… » Terrible. « On allait boire nos vingt ans […] Moi, moi, je me prenais pour moi […] On leur montrait notre cul et nos bonnes manières en leur chantant : Les bourgeois, c’est comme les cochons… » C’est que Brel n’aimait pas les compromis : c’était un artiste, un idéaliste. Lui n’a jamais voulu se transformer en bourgeois, contrairement – hélas ! – à bien des jeunes de vingt ans qui habitent la Basse-Ville de Québec. UN « NOUVO » SAINT-ROCH Oui, Saint-Roch est en train de s’embourgeoiser. On restaure des édifices à coups de centaines de milliers de dollars, on en construit des neufs à coups de millions, et le prix du mètre carré des terrains ne cesse d’augmenter. Cela pousse vers la périphérie les gens qui n’ont pas les moyens de payer ces coûts élevés exigés par les investisseurs et leur impératif « prix du marché ». De plus, les DINKS (Double Income, No Kids [double revenu, sans enfant]) et autres nouveaux bourgeois envahissent peu à peu le quartier. Mais à qui appartient donc ce quartier ? À ceux qui l’habitaient naguère, ou seulement à ceux qui sont capables d’en payer le prix maintenant ? Doit-on nettoyer la place de tous ces itinérants, de ces artistes, de ces foyers sans le sou et de tout autre démuni ? Des administrateurs municipaux rêvaient, en investissant dans de l’équipement urbain, de faire de Saint-Roch un quartier mixte où les étudiants, les jeunes travailleurs et les occupants du quartier pourraient cohabiter. Des efforts ont été faits pour soutenir des coops d’habitation et pour construire des habitations à loyer modique, qui ont généré des places pour les citoyens à faible revenu, mais ils n’ont pas été suffisants. Petit à petit, ce sont les partisans du naissant jet set de Québec qui ont envahi les lieux : experts des technologies informatiques, jeunes cadres, avocats et autres professionnels à succès. Les entreprises qui les

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emploient se sont mises à acheter des locaux pour y installer leurs bureaux. Les services prisés par tous ces « gens d’argent » ont suivi : restos à la mode, boutiques tendance et autres. Un malaise s’est ensuivi. Les nantis n’aiment pas voir des gens simples s’arrêter sur le pas de leur porte, et les gens ordinaires, eux, se sont sentis dépossédés par les nouveaux arrivants et ont été fâchés de constater que le luxe qui s’affichait n’était pas pour eux. Les bourgeois et les petits pourront-ils vraiment continuer de cohabiter sans problème ? Je ne crois pas : ils n’ont pas besoin des mêmes genres de services, n’ont pas les moyens de se payer les mêmes biens. Y a-t-il une guerre de clans à l’horizon, les Saint-Rochois de tradition contre les « nouvo bourgeois » ? « L’UNION FAIT LA FORCE » Non, il n’y aura pas de guerre, car si une simple agitation s’amorçait, elle serait tuée dans l’œuf : les dominants ne lésinent pas sur les moyens pour conserver le terrain gagné. Les nouveaux arrivants sont instruits, ils ont une bonne situation financière et entretiennent des contacts serrés avec les détenteurs du pouvoir, ce qui leur permet d’occuper les lieux par l’astuce ou par l’argent. Et les petits se retrouveront marginalisés dans leur propre quartier. À moins qu’ils ne fassent front solidairement, car, on le sait, « l’union fait la force ». Étienne de la Boétie rappelait que quand les citoyens se tiennent et refusent de se laisser dominer, la minorité des dominants se retrouve dépassée. Serait-il déjà trop tard ? Saint-Roch deviendra-t-il, comme le Vieux-Québec, un quartier pour touristes aussi bien étrangers que locaux ? Ou les Saint-Rochois se lèveront-ils pour réclamer leur droit à demeurer chez eux ? CLAUDE COSSETTE

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PORTRAIT DE FAMILLE Au fil des dernières décennies, la revitalisation de Saint-Roch s’est accompagnée d’une volonté municipale affichée d’y voir s’installer davantage de familles. Toutefois, si le quartier rayonne culturellement et rend compte d’une certaine mixité sociale, le Saint-Roch familial, lui, quoiqu’en progression, n’a pas fini de se dessiner. passage à cause des logements subven- garderie n’est pas des plus évidents, les tionnés. Quand les situations financières familles rencontrées se disent globales’améliorent, des visas, des citoyenne- ment satisfaites de s’être établies dans tés canadiennes, ils Saint-Roch. C’est le quittent. Parce que si cas de Véronic Thi« Il y a dix, quinze ans, tu considères qu’il n’y on n’aurait jamais ache- baudeau, maman d’un a pas de garderies, il n’y petit garçon d’un an té dans Saint-Roch… » a pas de cliniques, il y et habitant le quartier Véronique Thibaudeau a très peu d’épiceries. depuis trois ans. « Il y Il n’y a pas de marchés a dix, quinze ans, on de fruits et légumes, il y a juste des dé- n’aurait jamais acheté dans Saint-Roch, je panneurs qui vendent de la liqueur. Il y crois justement à cause de la revitalisation a un parc qui est le seul. Ben tout ça mis du quartier qui était juste débutante. Là ensemble ! ». présentement quand on a visité, on a vu bon, il y a une cour intérieure qu’on trou-

Photo : Jean-Félix Giguère-Groulx

Pour M. Mbaï-Hadji Mbaïrewaye, président du Conseil de quartier de SaintRoch, bien que les nombreuses actions entreprises par la Ville pour revitaliser le quartier aient porté leurs fruits, des efforts doivent encore être déployés notamment sur le plan du logement, pour encourager le maintien et l’installation des familles dans Saint-Roch. « Tout ce qui est fait jusque-là c’est bon. [...] Je pense que la Ville a beaucoup investi dans ce quartier. [...] Mais il reste beaucoup de choses à faire encore ». Selon M. Mbaïrewaye, la question du logement est à cet égard prépondérante, dans la mesure où l’offre actuelle en la matière ne répond pas aux besoins des familles. « Au Conseil de quartier, on constate que les appartements susceptibles d’accueillir les familles, avec des dimensions de 4 et demi, 5 et demi, ça n’existe pas beaucoup. [...] Actuellement, c’est vrai qu’il y a beaucoup de jeunes étudiants dans Saint-Roch et de jeunes couples. Mais on se rend compte que dès que ces jeunes couples veulent fonder une famille, ils quittent Saint-Roch pour aller ailleurs, parce qu’il n’y a pas l’offre de logement à leur goût ». SERVICES MANQUANTS MAIS RICHE VIE DE QUARTIER Ce constat est partagé par plusieurs organismes communautaires qui travaillent à améliorer le quotidien et à enrichir la vie de quartier des familles. Ceux-ci pointent du doigt en outre le manque de commodités et de services nécessaires aux familles. « Ce que les gens disent de façon plus informelle c’est que les familles sont plus de passage dans Saint-Roch, c’està-dire qu’ils vont peut-être moins avoir tendance à s’enraciner dans le quartier à cause qu’il n’est pas tout à fait aménagé pour les familles. Souvent, ils vont opter pour un quartier qui va être plus adapté pour eux » explique Anne-Marie Bonneville de la Table de quartier l’Engrenage de Saint-Roch. Pour Martine Danjou, coordonnatrice au sein de l’association Parents-Espoir, le manque de services constitue un frein à l’établissement des familles de façon durable. « Le fait qu’il y ait beaucoup d’immigrants, les gens viennent ici de

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La populaire fête d’Halloween organisée, chaque année, par la Table de quartier l’Engrenage.

De son côté, Florence Thériault du regroupement Commun’Action 0-5 ans affirme que pour la majorité des familles qu’elle côtoie, vivre dans Saint-Roch constitue un choix. «  L’aménagement physique des lieux est peut-être plus difficile, mais l’aménagement social est très positif. Culturellement, il y a pleins de points positifs » assure-t-elle. Un milieu communautaire bien développé dans le quartier et dont les différents organismes se consultent pour proposer toujours plus d’activités aux familles, à l’instar de la table de concertation Enfance-Famille, réunissant entre autres les regroupements cités. ÉLEVER SON ENFANT DANS SAINT-ROCH Même si elles signalent qu’y trouver un logement assez spacieux ou une place en

vait pas dans Montcalm au prix qu’on cherchait, il y a le jardin Saint-Roch au coin de la rue, il y a les services sur la rue Saint-Joseph, pharmacie, épicerie et tout ça. Donc c’est ça, oui, aujourd’hui on est une famille dans Saint-Roch et on s’en porte très bien » résume-t-elle. Parents de quatre enfants en bas âge et vivant dans Saint-Roch depuis plus d’une dizaine d’années, Sophie Lapierre et son conjoint Steeve sont ravis de la centralité du quartier qui rend tout accessible à pied. « On fait toutes nos activités dans le quartier. C’est vraiment rare qu’on prenne la voiture et qu’on aille ailleurs. [...] On marche dans les rues ici, il y a toujours des choses à faire, des choses à voir », explique Sophie. RABÉA KABBAJ

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LES IRRÉDUCTIBLES CARBURENT À LA PASSION

« On aime ce qu’on fait, je pense que c’est ce qui nous a permis de passer au travers des épreuves passées, et nous avons toujours le feu sacré  », affirme Denis Goulet, propriétaire de Denis Musique. « La passion pour la musique est toujours là, on sera jamais riches, mais on est heureux », souligne pour sa part René Robert, directeur général chez Musique Richard Gendreau. Ces commerçants se sont tous réunis dans le quadrilatère formé par les rues du Pont, de la Chapelle, Saint-Joseph et le boulevard Charest. Denis Musique s’y installe d’abord en 1980, puis Musique Richard Gendreau en 1981 et Twigg Musique au début des années 1990. C’est permettre à leurs magasins de garder en l’accessibilité au quartier qui les a d’abord réserve des instruments de qualité, ce attirés. Sur le plan financier, accessibilité à qui a fidélisé leur clientèle. « Les magades loyers abordables, et aussi, sur le plan sins de destination comme nous, Denis géographique, accessibilité à des axes Musique ou encore Laliberté, ont semblé moins sensibles routiers importants que d’autres à cette « Avec la fin des programmes et à une bonne desépoque trouble », de subvention, on voit déjà serte du transport résume M. Robert. en commun. Sedes entreprises quitter » lon René Robert, Denis Goulet Puis survient une ce dernier élément autre période de réétait particulièrement important pour cession au début des années 1990. C’est à Richard Gendreau, le fondateur, décédé ce moment que Twigg Musique, qui parà l’été 2011. « Il voulait vraiment que son tagera d’abord un local avec Musique Rimagasin soit accessible pour les jeunes, chard Gendreau, s’installe dans le quartier. c’est pourquoi la proximité des auto- C’est l’époque où les projets de rénovation bus était importante pour lui », explique du quartier, amorcés depuis des années, M. Robert. se concrétisent avec l’inauguration du Peu après l’installation de Denis Musique et de Musique Richard Gendreau, la récession frappe. « Ce fut une descente aux enfers », se souvient René Robert. Un bâtiment sur trois était placardé, on appelait le coin plywood city ». « Ça ressemblait à Beyrouth », se souvient de son côté Denis Goulet. C’était aussi l’époque où la désinstitutionnalisation s’accélérait à Québec. « Le mail (Centre-Ville ou SaintRoch) était devenu le refuge pour pas mal de personnes qui n’avaient pas d’autre endroit où aller », explique René Robert. « Beaucoup de commerces et de citoyens ont quitté, et le quartier s’est appauvri davantage », ajoute-t-il. Pour Denis Goulet et René Robert, malgré cette situation, les loyers bas avaient l’avantage de

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jardin de Saint-Roch en 1993. C’est l’ère de la revitalisation urbaine, réalisation phare du maire L’Allier, qui prend son envol. Le toit du Mail Centre-Ville est partiellement démantelé en 2000 et définitivement en 2007, la rue Saint-Joseph respire à nouveau l’air frais et les programmes de subvention pour attirer de nouveaux commerces, bureaux et institutions battent leur plein. Chez les irréductibles de la musique, de nouveaux visages font leur apparition, surtout durant les heures de repas. « C’est une époque qui marque la diversification de notre clientèle », raconte Yvan Moreau, conseiller chez Twigg Musique. Le quartier connaît un essor sans précédent et le « Nouvo Saint-Roch » est

Photo : Thomas Duchaine

Depuis le début des années 1980, le quartier Saint-Roch abrite un pôle de commerçants d’instruments de musique qui a su se maintenir malgré les grands bouleversements qui ont marqué l’histoire récente du quartier. Depuis les grandes récessions de 1980-1982 et de 1990-1992 jusqu’aux grands travaux de rénovation urbaine de l’ère L’Allier, les Denis Musique, les Musique Richard Gendreau et les Twigg Musique ont toujours pignon sur rue. La clé de leur succès ? La passion.

sur toutes les lèvres. Or, sans s’inquiéter outre mesure, les irréductibles de la musique constatent que tout cela n’est pas sans conséquence et qu’il reste du travail à faire pour consolider la santé socioéconomique du quartier. « Avec la fin des programmes de subvention, on voit déjà des entreprises quitter », souligne Denis Goulet. « Sur des coins de rue aussi importants que du Pont et Charest, par exemple, il y a de grands locaux vides », ajoute-t-il. Selon lui, la rareté des places de stationnement et les hausses importantes des taxes municipales dans les dernières années constituent également de nouveaux défis. Par ailleurs, aujourd’hui, la concurrence ne vient plus uniquement des centres commerciaux de Sainte-Foy. «  Elle émerge de pôles à l’intérieur de la ceinture urbaine  » explique René Robert. Beauport, Lebourgneuf, Duplessis, ça corse la donne ». Il ne faut pas non plus négliger l’impact d’Internet. « Mon compétiteur, il n’est plus seulement de l’autre côté de la rue, désormais il est partout », explique Denis Goulet. Malgré ces nouveaux défis, l’heure n’est pas au découragement. La potion magique fait toujours effet. Saint-Roch changera probablement encore de visage dans l’avenir, mais parions que, tant qu’il y aura des musiciens, on trouvera, au cœur de Saint-Roch, des irréductibles prêts à les servir. THOMAS DUCHAINE

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Photo : Simon-Charles Couture-Labelle

UN CENTRE-VILLE VRAI

L’arrivée de nouvelles classes sociales dans le quartier SaintRoch au cours des dernières décennies crée une grande mixité au centre-ville. La Quête s’est posé la question suivante : Comment s’accomplit la cohabitation des de ces classes dans Saint-Roch ? « Au début du 20e siècle, Saint-Roch était vraiment un quartier commercial riche avec des boutiques de luxe », explique Alex Tremblay, de la Société historique de Québec. C’est dans les années 1940-1950 que commence l’exode des populations plus nanties de Saint-Roch.

autres quartiers, qui vont revenir y vivre. Ces gens-là sont souvent plus âgés, ou sont à la retraite. Donc, oui, on va parler d’un certain phénomène d’embourgeoisement, mais je crois que c’est surtout un retour vers la ville », précise M. Gilbert. L’historien juge toutefois qu’une autre tendance vient changer la donne dans le quartier. Les transformations effectuées dans ce secteur en ont fait un lieu très trendy. « C’est très à la mode de dire qu’on habite dans Saint-Roch et cela attire une certaine clientèle qui aime beaucoup paraître ou se faire voir », ajoute M. Gilbert. UNE MIXITÉ TRÈS POSITIVE

La cohabitation des différentes classes sociales entraîne une nouvelle dynaAu cours des années 1960-1970, les mique de mixité sociale dans le centre néaffaires des boutiques et la popularité vralgique de la Basse-Ville. Anne-Marie du quartier déclinent tranquillement en Bonneville, coordonnatrice à la table de quartier l’Engrenage raison de l’essor des de Saint-Roch, croit centres commerciaux Tous les centres-villes se que tous les centresqui sont construits caractérisent par la villes se caractérisent à Sainte-Foy. «  Le diversité de leur populapar la diversité de leur quartier va alors detion. Saint-Roch ne fait population. Saintvenir un peu plus pas exception. Roch ne fait pas expopulaire, un peu ception. plus pauvre, rappelle l’historien. Mais sous l’impulsion du maire L’Allier dans les « C’est normal qu’il y ait une mixité années 1990, le quartier va se réembour- sociale dans un centre comme SaintRoch. La chose sur laquelle il faut trageoiser peu à peu ». vailler, c’est la cohabitation des différents Dale Gilbert, qui a obtenu un doctorat acteurs sociaux qui s’y trouvent », dit au Département d’histoire à l’Université Mme Bonneville. Laval, abonde dans le sens de M. Tremblay et estime qu’un important retour à Sans être toujours facile, la cohabitation la ville s’effectue depuis une vingtaine est assez harmonieuse selon la coordond’années. « Ce sont souvent ceux qui ont natrice de l’Engrenage. Elle pointe du grandi en ville, à Saint-Roch, qui sont doigt le manque de connaissances qui partis vivre dans les banlieues ou dans les alimente parfois des peurs qui n’auraient

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normalement pas lieu d’être. « La cohabitation, ça passe par une connaissance mutuelle. Plus les gens connaissent les différentes réalités du quartier, plus ils se sentent en sécurité et, évidemment, plus les gens se sentent en sécurité, mieux la cohabitation se passe  », indique Mme Bonneville. L’histoire et le vécu teintent la perception qu’ont la plupart des habitants du quartier. Chose certaine, Anne-Marie Bonneville affirme que ces résidents ont un sentiment d’appartenance très puissant envers Saint-Roch. LA PAUVRETÉ TOUJOURS PRÉSENTE Quant à savoir ce qui se passera à l’avenir dans Saint-Roch, Dale Gilbert ne se proclame pas devin, mais il laisse supposer que, pour le moment, rien ne freine cette tendance de retour à la ville des plus riches aux dépens des plus pauvres. « Malheureusement, le mauvais côté de cette histoire est que ça n’aide pas à soulager la pauvreté. Ce n’est pas par mauvaise volonté, les gens qui viennent habiter dans Saint-Roch ne viennent pas chasser les plus pauvres, a voulu nuancer M. Gilbert, mais c’est par effet de spéculation que ça finit par se produire de toute manière. C’est un effet un peu pervers, mais par la force des choses, cela arrive quand même. » MATHIEU MASSÉ

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NOTRE CENTREVILLE EN PHOTOS !

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QUELQUES SCÈNES QUOTIDIENNES DU QUARTIER

PHOTOS : SIMON-CHARLES COUTURE-LABELLE

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MICROCOSMES URBAINS

Photo : Geneviève Thompson

Gastronomique. Hype. Branché. Ces termes ne seraient probablement pas les premiers employés pour décrire le restaurant Jacques-Cartier, la friperie La Manne à linge ou le bar Le Dauphin. Invisibles aux yeux d’une partie de la population, ces institutions forment pourtant un petit univers autour duquel gravitent de nombreux inconditionnels. Parcours dans un monde ordinaire.

« Bonjour, ma belle Loulou ! », lance affec- électroménagers qui se mêlent aux airs de se perdre dans de longues discussions. tueusement Gilles à la serveuse, après être pop que crache une radio. Je scrute les C’est qu’elle court de tous les bords, la entré par la porte arrière du restaurant. lieux. Nappes et rembourrages de chaises pétillante Louise, endossant à la fois le Il salue au passage les trois occupants dépareillés arborant des motifs de fleurs rôle de serveuse, de plongeuse et de cuide la table du fond et me gratifie d’un pastel, bibelots kitch qui surplombent sinière. Mais son travail va bien au-delà bonjour enthousiaste, bien que j’en sois l’aire de travail, néons qui peinent à éclai- de telles fonctions. Louise est aussi une à ma première visite. L’établissement rer; on l’aura compris, on n’est pas dans confidente, une psychologue sans Ordre existe depuis une quarantaine d’années, un épisode de « Décore ta vie ». sur laquelle ses clients comptent pour ilet pourtant, je suis luminer leur journée. « On est comme une famille ici » De toute façon, toujours passée on n’y vient pas DES FRINGUES POUR HABILLER Loulou du restaurant devant sans jamais pour la déco, L’ESTOMAC Jacques-Cartier y prêter attention. et le restaurant Il faut dire que Jacques-Cartier est bien plus qu’un en- Saint Roch est le patron de plusieurs la devanture n’est pas très tape-à-l’œil, droit où l’on sert de la nourriture ré- professions, dont celle de fripier. Une contrairement aux commerces voisins, petite visite s’imposait donc à La Manne l’atelier de coiffure Caboche et la coopé- confortante et quelque peu grasse. C’est à Linge, ancrée sur la rue du Pont. Peu surtout un arrêt dans le temps, un lieu rative les Grands Rangs, qui a pignon sur de gens le savent, mais la friperie est rue St-Joseph depuis un peu plus d’un an. propice aux potins et aux confidences. affiliée au Café Rencontre du centre« On le sait quand un ‘’ étranger ’’ arrive », Des gens du quartier viennent s’y réfu- ville. D’ailleurs, tous les profits vont à me dit en riant la serveuse Louise, qui gier quotidiennement afin de briser leur l’organisme comconnaît le nom et les habitudes alimen- solitude et trouver « Des fois, je me demande si munautaire qui sert taires de chacun de ses clients. Son éner- du réconfort dans le monde préfère pas s’haquelque 250 repas l’odeur du café filtre gie et sa joie contagieuse me donnent enpar jour. La Manne biller plutôt que manger » vie d’être son amie illico et de m’installer ou dans le sourire de à linge offre égaleRenée Huot la serveuse. « On est au comptoir, à côté de la pile de Journal ment un service de comme une famille de Québec. dépannage vestimentaire pour les gens ici », affirme cette dernière, le regard acJ’avale ma soupe alphabets et tomates centué par le crayon bleu marin qui sou- qui sont réellement dans le besoin. sous le buzz incessant des appareils

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ligne ses grands yeux. Mais pas le temps

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L’envers du décor d’une friperie représente un immense travail. Chaque jour, le contenu des 67 bacs répartis sur le territoire de la Ville doit être amassé et trié. Une tâche colossale accomplie par une équipe de 5 salariés et de 6 bénévoles. « La surconsommation, c’est là que tu la vois. Des fois, je me demande si le monde préfère pas s’habiller plutôt que manger », s’interroge la gérante de la boutique, Renée Huot. Et lorsqu’on sait que les tablettes des banques alimentaires de la province sont de plus en plus dégarnies, les revenus qu’engendre la friperie sont d’une importance capitale.

Et pour continuer d’être à la page, la friperie fait présentement peau neuve et ouvrira en grande pompe le 7 mars prochain, affublée d’un style plus urbain et éclaté, sous le nom de la Friperie du Café Rencontre. Malgré ce changement de look, certaines choses demeurent invariables. « Je me fais un point d’honneur de garder les prix accessibles, c’est important pour nous de garder l’esprit communautaire », promet Renée Huot. UN SAUT AU DAUPHIN Il est 17h15, et une rangée de grosses Labatt bleue s’étalent sur le comptoir, où sont accoudés la majorité des gens présents dans le bar. La serveuse semble être le centre de l’attention d’une clientèle principalement masculine. Mais bientôt, elle quittera en prenant soin de

Il n’y a pas si longtemps, le fait de s’habiller dans les friperies rimait avec pauvreté et s’avérait une expérience plutôt honteuse. Mais le retour du vintage dans les dernières années a complètement changé la perception des boutiques de fripes. Leur popularité s’est accrue, surtout chez les jeunes en quête de vêtements et d’ac-

Photo : Geneviève Thompson

Photo : Geneviève Thompson

cessoires de qualité à un prix dérisoire. « Je trouve ça le fun que les jeunes tripent là-dessus », affirme Renée Huot, applaudissant au passage les valeurs écologiques de la nouvelle génération.

saluer tout ce beau monde pour laisser la place à la barmaid de nuit, elle aussi accoutrée d’un short sexy et de bottes de cowboy. De son côté, seul derrière un bar qui prend la forme d’un immense piano à queue, Dan chante des tubes issus d’un répertoire varié mais quelque peu démodé. Alors que la plupart des clients semblent indifférents à sa performance vocale, trois dames d’un certain âge investissent la piste de danse pour se trémousser sur une chanson aux accents latino. Plus tard, ces trois amies âgées de 53, 75 et 77 ans, m’avoueront qu’elles participent au karaoké un dimanche soir sur deux. « Nous partons à deux heures et demie du matin en taxi ! », me confientelles en sirotant leur limonade elles ont délaissé le houblon il y a quelques années-, fières de démontrer qu’elles ont encore le cœur jeune. Si vous dites à votre entourage que vous passez la soirée au bar Le Dauphin, il se peut que vous ayez droit à quelques regards inquiets ou interrogateurs. On peut dire que cet endroit ne jouit pas de la meilleure réputation en ville. Toutefois, un habitué de la place atteste ne jamais avoir été témoin d’une seule bagarre. Il est vrai qu’il fréquente le lieu assez tôt en soirée. Quoi qu’il en soit, le bar Le Dauphin fait fi des tendances et attire une clientèle hétéroclite et intergénérationnelle. Ici, pas de fauteuils en velours, de teintes bleutées ou de musique lounge. On se trouve plutôt dans un lieu de culture populaire, où règnent encore les machines à sous et les matchs de lutte à la télé. C’est le genre d’endroit où il n’existe pas de faux-semblants. Bref, un monde bien ordinaire. MARIE-MICHÈLE GENEST

Je suis fière de souligner l’essor et tout le dynamisme du quartier Saint-Roch Annick Papillon

Députée de Québec 275, boulevard Charest Est, Québec (Québec) G1K 3G8 • Tél : 418-523-6666 • Annick.Papillon@parl.gc.ca

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LE DUCHÉ ST-ROCH «  Saint-Roch, comment fais-tu pour avoir de si grands bras ? » se demande Franie-Éléonore Bernier, Off duchesse de SaintRoch. Pour accueillir tant de diversité, de solidarité, de proximité ? La Quête l’a interviewée à propos de son duché.

Photo : François Mercier

Franie a décidé de s’embarquer dans la folle aventure de la Revengeance des duchesses pour le défi que cela représentait. Caméraman et monteuse de professions, elle a l’habitude de se trouver derrière les projecteurs, jamais devant ! Nouvellement emménagée dans SaintRoch, celle qui avait suivi les précédentes éditions de la Revengeance a décidé de faire le saut. « C’est une bonne façon de m’impliquer dans un quartier, de le découvrir », dit-elle. LA REVENGEANCE

Franie-Éléonore Bernier, Off duchesse de Saint-Roch, élue Reine par un tirage au sort !

Donner le goût de s’impliquer dans son quartier, voilà un des buts de la Revengeance des Duchesses. Marjorie Champagne, cofondatrice de l’évènement, souhaite redonner un clocher aux citoyens qui peuvent se sentir un peu perdus dans ce monde de « fusions municipales et de mondialisation ». Elle souhaite valoriser la vie de quartier en axant sur le micro plutôt que le macro. « Chaque être humain a besoin de ça pour pouvoir grandir et se sentir enraciné quelque part pour pouvoir s’impliquer », explique la reine mère de l’événement.

DUCHESSE DANS ST-ROCH

La Revengeance, c’est d’abord une idée qui a germé il y a cinq ans dans la tête de Marjorie. « Au départ, c’était une folie  », admet-elle. «  On voulait détourner l’image du carnaval, casser le moule que les gens de Québec se faisaient des duchesses ». Aujourd’hui, l’initiative citoyenne et bénévole a pris de l’ampleur. « Les gens se sont approprié le projet et ont compris où on voulait aller ». Les duchesses sont choisies à l’aveugle, sans C.V., selon les critères et les valeurs que la Revengeance veut mettre de l’avant : la différence, l’authenticité et la créativité. Chacune d’elle alimente de son imagination un blogue pendant deux semaines, au terme desquelles une reine est couronnée par tirage au sort. Le nombre de capsules est proportionnel au nombre de votes.

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Ce qui la touche dans le quartier, c’est aussi le caractère hétéroclite de sa population. « Il y a de toutes les classes sociales, c’est multiculturel  ». La cohabitation d’une multitude de genres de personnes la fascine. Elle souhaite que les gens respectent cette diversité et combattent les préjugés. Elle rappelle d’ailleurs qu’il ne faut pas oublier la pauvreté.

Lors de la soirée d’ouverture du blogue de la Revengeance, chaque duchesse présentait un numéro de son cru. Danse, chant et improvisation musicale furent au rendez-vous. Franie pour sa part a concocté un film haut en rebondissements et en suspense. Mettant en scène le quartier et les différents commerçants dans son court métrage fausse- La rue St-Joseph, le parc Saint-Roch. ment glauque, elle a suscité beaucoup de Voilà ses endroits fétiches du quartier, réactions chez les spectateurs. Dans l’as- bien qu’elle regrette encore la disparition sistance, chaque visage reconnu était du cinéma. Dans son blogue, elle fait également un clin d’œil salué d’éclats de rire « Les commerçants et les à Gabrielle Roy. et de cris enthouhabitants de Saint-Roch sont D’abord la grande siastes. Un véritable vraiment cool » femme, mais aussentiment d’apparsi la bibliothèque tenance emplissait Franie-Éléonore Bernier qu’elle considère quiconque était déjà allé acheter du steak au Eumatimi, un comme la mère du quartier, chaleulivre chez Pantoute ou une bière à la Kor- reuse, accueillante, un refuge pour tout le monde, même les plus démunis. rigane. « Les commerçants et les habitants de Saint-Roch sont vraiment cool », affirmet-elle, se souvenant de l’aide et de la gentillesse dont tout le monde a fait preuve. Aucun commerçant n’a dit non. Cela l’a convaincue qu’elle vivait dans un superbe quartier rempli de solidarité. Elle a voulu rendre hommage à ces « acolytes ou super héros qui chaque jour se lèvent le matin pour répondre aux gens et qui sont toujours souriants ».

VÉRONIK DESROCHERS

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DU NOUVEAU AU PRINTEMPS

Malgré notre insistance, elle ne pouvait au moment de l’entrevue à la mi-février, donner des détails sur des projets qui sont en attente de financement à la Ville de Québec. Mais elle promet des projets concrets pour continuer à dynamiser le secteur. « Il faut qu’on use d’imagination pour aller chercher des stratégies pour valoriser le quartier, pour valoriser la consommation locale aussi, donc c’est ce qu’on fait actuellement ». Même si elle garde le secret, Catherine Raymond évoque cependant des stratégies de promotion qui valoriseront le milieu de vie, la propreté, la sécurité, l’information aux touristes, etc. « Ce sera quelque chose qui va donner une plus value au quartier et qui va vraiment améliorer la qualité de vie de tout le monde. J’ai vraiment hâte qu’on l’annonce ». Pour cette nouvelle venue, il s’agit de solutions concrètes où tout un chacun y trouvera son compte, autant la population que les gens d’affaires et les clients. « Je pense que ça va démontrer notre bonne volonté. On ne veut pas transformer, remaquiller et tasser les gens, on veut travailler ensemble ». DES COMMERÇANTS PRÊTS À AVANCER Catherine Raymond est d’avis que les commerçants sont contents de s’être établis dans le quartier, mais qu’ils ont actuellement besoin de plus. « Ils ont le goût de passer à une autre étape, ils ont envie de se propulser un peu plus encore et je pense qu’on est prêt à leur offrir quelque chose d’intéressant qui va valoriser le quartier dans toutes ses fonctions, pas seulement au niveau commercial ». Elle soutient que ce qu’il manque toujours au milieu, c’est davantage de travailleurs pour faire « vivre le centre-ville dans des périodes plus difficiles comme l’hiver ». Afin d’attirer les entreprises, la directrice croit qu’il faut donc des boutiques, restaurants et cafés pour tous les goûts et tous les budgets. Hautement consciente de la mixité du quartier, elle

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Photo : Simon-Charles Couture-Labelle

Depuis l’automne dernier, la Société de développement commercial (SDC), centre-ville de Québec, est dirigée par Catherine Raymond. La nouvelle venue a des idées plein la tête qu’elle veut arrimer avec la réalité du quartier.

croit qu’il s’agit d’une question d’équilibre en ramenant l’idée d’une diversité d’offres de services. L’idée est aussi d’attirer régulièrement de nouvelles clientèles dans le Nouvo Saint-Roch pour que celles-ci constatent l’évolution constante du quartier. Catherine Raymond est prudente en ce qui concerne le fait de rendre le quartier animé 24 heures par jour. « Il faut faire attention parce qu’il ne faut pas que ça nuise à la qualité de vie des résidents ». Mme Raymond mise aussi sur l’arrivée de nouveaux résidents dans le quartier. « On a déjà une belle population qui est quand même assez importante, mais ça peut toujours être plus. Ça, ce n’est pas un problème, pour accueillir des gens, SaintRoch est capable en masse encore ! » Elle souligne cependant l’importance du respect des résidents actuels. « Ce qui est important, c’est de ne pas évacuer des gens qui sont déjà ici pour en amener des nouveaux, ça, c’est une autre stratégie pour laquelle on est un petit peu moins à l’aise ». MIXITÉ ET RESPECT Depuis sont entrée en fonction en octobre dernier, celle qui a aussi été directrice générale de la SDC du centre-ville de Trois-Rivières admire le climat de respect qui règne dans le Nouvo Saint-Roch. « J’ai travaillé dans les années 90 à l’ancien Holiday Inn qui est devenu le Pur, et moi j’ai tellement vu une différence. Je peux vous en parler, je trouve que la cohabitation, c’est tellement agréable, je trouve tellement le monde fin ». Par contre, elle est consciente que rien n’est parfait et qu’il y a encore du travail à faire pour combattre les préjugés. Lorsqu’on la questionne à savoir si les itinérants sont favorables à cette évolution du Nouvo Saint-Roch, Catherine Raymond explique qu’elle leur parle régulièrement lorsqu’elle les croise sur la

rue et qu’elle n’a jamais eu de mauvais commentaires à ce propos. Elle se dit cependant très ouverte à écouter ceux qui auraient le besoin d’échanger, car pour elle, il s’agit de l’affaire de tous. Elle n’exclut d’ailleurs personne. Des programmes d’incitation pour que des artistes émergents s’installent dans le Nouvo Saint-Roch seraient aussi une idée selon elle. « Je pense que cette clientèle a peut-être encore besoin d’être incitée, parce que des artistes on n’en a jamais assez ». UN PRINTEMPS NOUVO Catherine Raymond s’intéresse aussi à la revitalisation des façades de certains immeubles. Elle souhaite aussi se pencher sur la question du logement social. Enfin, la SDC souhaite diminuer le nombre de locaux commerciaux vacants et avoir plus de bureaux au rez-de-chaussée des immeubles. « Ce sont de beaux défis, on va travailler fort », clame celle qui semble n’avoir rien échappé, malgré le fait qu’elle ait vécu à l’extérieur de la ville au cours des dernières années. En espérant que ces projets verront le jour en même temps que les premiers bourgeons… CHLOÉ-PATRY ROBITAILLE DEPUIS 2004... Dans une entrevue accordée au quotidien Le Soleil, alors qu’il s’apprêtait à quitter ses fonctions à la tête de la Société de développement commercial (SDC) du centre-ville, Stéphan Sabourin évoquait la fierté que Saint-Roch se soit imposé, en moins de dix ans, dans le circuit touristique de Québec, notamment grâce à l’illumination de la rue St-Joseph en hiver. L’offre variée de boutiques et de bonnes tables, ainsi que la conversion de lieu malfamé en lieu populaire, tels le Bureau de poste et la Korrigane, sont également remarquables.

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TAXI, TAXI

Photo : Simon-Charles Couture-Labelle

Claude, ça fait 40 ans qu’il parcourt Saint-Roch. Dans son taxi, il fait des allers-retours un peu partout à partir du poste situé devant la bibliothèque GabrielleRoy, coin de la Couronne et de St-Joseph. Le métier est tranquille la plupart du temps. Ça ne se corse que quelques fois. Conduire un taxi dans Saint-Roch, c’est travailler dans une zone « locale », selon un autre chauffeur, Adam. En plus, il s’agit d’un emploi où on n’arrête pas. En moyenne, 5 ou 6 voitures sont déployées en permanence dans le quartier qui ne compte pas dix mille habitants. « Cette zone ressemble à la zone de la place D’Youville. Les touristes, c’est le matin, quand ils transitent vers l’aéroport. Dans la journée, c’est souvent des fonctionnaires, des employés de la fonction publique, en général des clients avec des coupons prépayés de taxi. On prend les gens quand il fait froid, ou quand ils manquent leur autobus. Dans SaintRoch, les clients c’est un « mixage », parce que tu ne vois pas de clients [paumés] au Château », raconte Adam. En effet, malgré la vague de nouveaux commerces, les artistes qui viennent s’y installer et les étudiants qui y emménagent de plus en plus, Saint-Roch reste un quartier relativement pauvre. UN QUARTIER CHAUD QUI REFROIDIT Le quartier Saint-Roch a eu ses moments « rock’n’roll », mais ça devient de plus en plus tranquille. Claude donne l’exemple de la prostitution. « Il y en a moins qu’il y en avait. Aujourd’hui, si un client en demande, il faut aller chercher loin. Avant, on pouvait voir une travailleuse du sexe à chaque coin de rue. On ne voit plus ces choses-là. La drogue, la même affaire. Il y en a, mais plus cachée. C’est fait plus discrètement. » Ce genre d’activité se fait donc de plus en plus rare. Encore, « ça racole un peu dans le coin des rues de la Salle et du Roi, vers Le Dauphin », bavarde Adam. Pour Claude, cela fait qu’il y a « moins de personnes qui traînent dans les rues. Ils apparaissent, mais c’est quand ils vont à une autre place. »

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Une passagère raconte avec une pointe concurrente. « St-Joseph devient une rue de fatalisme que le monde interlope de pharmacies ! », se moque Adam. Cette « ça a monté dans Limoilou. [Dans Saint- évolution commerciale ajoute au quarRoch], la classe moyenne a embarqué, ça tier, selon le chauffeur de taxi. « Il faut devient vraiment des places où les « Avant, on pouvait voir une plus résidentiel. » gens se rassemblent. travailleuse du sexe à chaque Là, c’est animé. Par Une chose est enrapport à la tabacoin de rue. On ne voit plus tendue  : depuis la gie d’avant… c’est ces choses-là. » fin du mail Saintmieux ! » Claude, Chauffeur de taxi Roch, ce n’est plus la même chose. Il y a aussi les lumières suspendues au-dessus de la rue La clientèle qui fait du trouble et qui ne St-Joseph qui sont venues ajouter une paye pas, ce serait surtout celle des 16-17 touche de luminosité. « C’est pas maans. « Quand ils sont 3 ou 4, ils partent gique, mais c’est mieux que rien », relatisans payer. Moi, je barre les portes et on vise le chauffeur de taxi. arrête le jeu », dit Adam. Une panoplie de commerces sert toutes « Sur Grande Allée, le soir, la clientèle les classes sociales et tous les goûts. Il y sort des bars, et parfois elle pense qu’elle a le Bureau de Poste avec des repas pour peut ne plus respecter personne », lance 5 dollars « qui roule », selon un chauffeur, Claude qui a vécu deux vols à main mais aussi, non loin, le Clocher Penché armée dans sa carrière : l’un en Basse- qui verse dans l’autre extrême gourmet. Ville, l’autre en Haute-Ville. Un « mixage » comme dit Adam. Et puis, c’est la clientèle de nuit ça. « Ha- Plus à l’est, autour de la rue du Parvis, bituellement, assure Adam, ce sont des les gens fréquentent le Boudoir. On y vit gens normaux que je transporte. » Outre dans l’aisance. Plus au nord, le milieu ceux en état d’ébriété, des gens mauvais, devient plus difficile : « beaucoup de gens « c’est rare ». sur le bien-être social », confie une autre POUR TOUTES SORTES DE MONDE Signe que les temps changent, le quartier présente de nouveaux visages. Devant la bibliothèque Gabrielle-Roy, une tabagie devient un café. Là, un café Dunkin Donut devient un Jean Coutu, érigé à quelques pas d’une pharmacie

passagère. Mais, en fin de compte, résume Adam, « il faut pas faire le snob. Celui qui fait du taxi et qui fait le snob, il change de travail ». JEAN LOUIS BORDELEAU

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DE LA PEUR AU FUN

Photo : Simon-Charles Couture-Labelle

Le quartier Saint-Roch n’a pas toujours été considéré comme étant « classe ». C’est connu. Il y a 20 ans, il connaissait ses pires années. Des années de peur et de mépris. Aujourd’hui, il vit comme jamais. Les bombes et les crimes ont laissé place aux œuvres d’art et à la famille.

Entre 1994 et 2002, une guerre sans merci fait rage au Québec. Un total de165 personnes seront tuées, parmi lesquelles des citoyens innocents dont le petit Daniel Desrochers, 11 ans. Durant ces 8 années, les policiers devront enquêter sur 181 tentatives de meurtres et 16 disparitions; tous des crimes reliés aux motards criminalisés qui s’affrontent dans une lutte à ne plus finir pour le contrôle du trafic de la drogue au Québec. Un climat de terreur s’est installé dans la province et Québec n’a pas été épargné. Le quartier St-Roch, surnommé alors par plusieurs Plywood City, a été la scène de plusieurs assassinats. « Il y a eu des attentats. Une bombe a notamment explosé au coin de la rue de la Couronne », se souvient François Moisan, du service de police de la ville de Québec. À l’époque, il travaillait aux communications pour la Ville, et s’apprêtait à devenir responsable du projet de revitalisation du quartier Saint-Roch. À ce moment, Saint-Roch était sans contredit le quartier « le plus difficile » de Québec. Mais la revitalisation a changé la donne. Tranquillement. Les piqueries sont devenues des résidences, et le « sentiment de sécurité » s’est peu à peu installé. Finalement, c’était ça le nœud de la guerre : les gens devaient s’y sentir en sécurité.

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« ON A FAIT DU BEAU AVEC DU ABANDONNÉ » Création d’un jardin, arrivée de galeries d’art, installation d’institutions comme l’École des arts visuels de l’Université Laval et l’ENAP, le plan était clair. Il fallait faire oublier les années difficiles et enterrer les lieux associés à la criminalité, tout en incitant les gens à venir s’y installer. C’est connu, plus il y a de gens qui vivent dans un secteur, plus il y a de fenêtres qui regardent sur la rue et plus la criminalité descend. « On a réussi à prendre le dessus sur les éléments qui faisaient en sorte que ça n’allait pas bien. La perception des gens a changé », explique M. Moisan. Pour lui, la meilleure preuve de ce changement d’attitude de la population, c’est sa mère. « Elle avait complètement arrêté d’aller dans Saint-Roch, mentionne-t-il, mais il y a une dizaine d’années, elle m’a dit un jour à quel point elle trouvait la rue St-Joseph belle et le fun. Elle était restée avec l’idée que c’était dangereux, mais sa perception est venue à changer et elle va y faire son tour quelques fois par saison. C’est un signe pour moi ». Reste que les sans-abris et la prostitution sont toujours présents dans St-Roch. Il ne faut pas se leurrer. Encore une fois, tout n’est qu’une question de perception. « Il n’y a pas moins de gens moins traditionnels dans Saint-Roch. Ils sont seulement

en pourcentage moins important. Les gens se sont rendus compte que la mixité sociale, ça marche. Un centre-ville, c’est un lieu pour tout le monde ». Le quartier n’est plus l’ombre de ce qu’il a déjà été. Pour François Moisan, la volonté de la population a été très importante dans l’aventure. « J’ai toujours trouvé que la population était derrière nous. Elle souhaitait que ça fonctionne. Elle voulait se réapproprier le quartier. Cette volonté populaire là, elle a encouragé les gens à venir ». Aujourd’hui, on ne parle donc plus de Saint-Roch comme étant un lieu problématique. Une opinion que partagent les forces policières et la population. « Les gens ne pensent plus aux bombes et aux motards, ils pensent aux nouvelles technologies et à un vrai centre-ville », assuret-il. Mais y a-t-il plus d’interventions policières dans Saint-Roch qu’ailleurs à Québec ? « C’est toujours le secteur centre qui demande le plus d’attention policière, c’est souvent dû à la densité de la population, note M. Moisan. On ne peut pas dire que c’est le quartier. C’est la densité, le centre-ville qui font en sorte qu’il y a plus de monde qui passent par là, donc plus d’interventions policières ». MARC-ANTOINE PAQUIN

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La Journée internationale des femmes est l’occasion de célébrer nos victoires comme travailleuses et comme femmes. Il faudrait y ajouter « …et comme filles ». Oui, je crois que nous devons apporter une attention particulière aux jeunes filles, à notre responsabilité et notre engagement envers elles.

Car si les luttes et revendications des femmes ont mené à des gains déterminants pour rétablir des rapports justes et équitables avec les hommes au cours des dernières décennies, il ne faut pas présumer que, enfin, le dossier est clos et que l’heure est au triomphalisme. Le fait est que le sexisme a pris de nouveaux chemins de traverse avec l’apparition du Web, des réseaux sociaux téléphoniques, de la multiplication d’appareils de télécommunication dont la maîtrise et l’usage virtuel nous échappent. Ajoutons-y l’agressivité de campagnes publicitaires équivoques sur la mode vestimentaire destinée aux filles, et la participation de toutes jeunes enfants à des concours douteux, rééditant une image réductrice de la femme que nous avons tant combattue !

Nous devons accroître notre vigilance et tout faire pour contrer ces nouvelles attaques qui mènent au débordement du consumérisme, au leurre d’enfants, voire à la prostitution juvénile.

Parce que les droits des filles comptent !

Agnès Maltais Députée de Taschereau Ministre responsable de la Condition féminine

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SAINT-ROCH, LE GOURMAND Des pains frais, une grande variété de poissons, de la viande dont on connaît la provenance, du café frais torréfié, des saucisses sans gluten, des produits bio locaux et des saveurs d’ailleurs, sans compter les bonnes tables... tout ça sur un tronçon de 500 mètres de la rue St-Joseph. Le nouveau SaintRoch, un lieu de rencontre pour gourmets et gourmands. Outre le fait que le quartier se développe, sa popularité auprès des restaurateurs et des marchands dépend, selon Jean-François Mondou propriétaire de JEF Poissonnerie, de beaucoup de facteurs. « Avant, c’était le quartier St-Jean-Baptiste qui était vraiment populaire, maintenant c’est Saint-Roch », estime-t-il.

Le poissonnier évalue qu’une bonne partie de ses clients habitent le quartier. Toutefois, de plus en plus proviennent d’autres secteurs de la Capitale. Et la tendance se confirme depuis la première édition de Cuisinez St-Roch, en septembre 2013. « Ce qu’il y a de bien, c’est que cette nouvelle clientèle revient avec des amis, qui eux reviennent à leur tour  ! », dit Jean-François Mondou qui se réjouit d’un tel effet d’entraînement. CUISINEZ ST-ROCH, L’ÉVÉNEMENT L’événement visait davantage à faire connaître les produits alimentaires disponibles et les commerces qui les distribuent que les restaurants du quartier. Cela n’a cependant pas empêché quelques chefs, notamment ceux du Cercle, de Pizza Gemini et de l’Affaire est Ketchup, pour ne nommer que ceux-là, d’offrir des ateliers culinaires.

Photo : Jean-François Morissette

« L’offre est diversifiée et complémentaire », constate le marchand. L’avantage d’avoir autant de variété apporte de bonnes bases pour prospérer et durer. Les commerçants ont tous des forces différentes et ils arrivent à mettre ça en commun pour rendre « l’offre intéressante auprès de la clientèle ».

présents, ce n’est pas parce qu’ils n’étaient pas intéressés. Dans 9 cas sur 10, c’était surtout une question de logistique et de manque de main-d’œuvre pour la journée », assure le poissonnier. Depuis l’événement, l’achalandage s’est accru et pas seulement dans sa poissonnerie. L’organisateur estime que les autres commerçants qui ont participé à cette première édition sont eux aussi ravis des retombées de l’événement. LES JEUNES ET SAINT-ROCH

Les commerçants et restaurateurs de la rue Saint-Joseph ne sont pas les seuls à se réjouir du dynamisme gourmand de l’artère. Les clients aussi. Comme Mélissa, jeune étudiante universitaire, ne de« Ce qu’il y a de bien, c’est «  Le but de Cuisimeurant pas dans que cette nouvelle clientèle nez St-Roch était de Saint-Roch mais revient avec des amis, qui changer les habituqui y passe beaueux reviennent à leur tour  ! », des alimentaires des coup de temps. Elle dit Jean-François Mondou gens, de les inciter à considère qu’avec manger local et à enses multiples comcourager les commerçants de St-Roch », merces, restaurants, salles de spectacle dit Jean-François Mondou, l’un des et bars, le quartier St-Roch a beaucoup à organisateurs de l’événement. Mission offrir. « Je ne demeure pas dans le quaraccomplie selon lui ! tier, mais j’aimerais beaucoup venir m’y installer », affirme la jeune étudiante. Ce La première édition rassemblait une vingque le quartier offre avec ses commerces taine de commerçants de la rue St-Joseph et sa diversité semble lui plaire. « St-Roch, et des alentours, mais ce n’est pas tous les ce n’est plus ce que c’était et je trouve ça commerçants qui ont participé à l’évévraiment le fun de faire mes commissions nement. « Pour ceux qui n’étaient pas

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en encourageant les commerçants locaux ». Les grands supermarchés, très peu pour elle ! Le discours est néanmoins différent pour Jonathan qui reste également à Ste-Foy. Il affirme qu’il trouve la rue très intéressante, mais que c’est plutôt difficile pour lui de se déplacer toutes les semaines en Basse-Ville pour faire ses commissions. Il ajoute que lorsqu’il passe dans le coin, il arrête parfois acheter quelques trucs, mais c’est plus occasionnel. « C’est un peu comme un mode de vie de vouloir manger local et d’encourager les commerçants d’ici, mais pour l’instant, je n’ai pas nécessairement le temps et les moyens », conclut-il. ANDRÉANE LESPÉRANCE

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Chronique

AULT ORRIV

INE C MART

LES VIEILLES AFFAIRES...

Avez-vous reçu une vraie lettre, récemment ? Une vraie, écrite à la main, par quelqu'un que vous aimez bien ? Et vous, quand en avez-vous envoyé une ? Bon, vous dites que ça ne se fait plus : pour donner de ses nouvelles, on a l'Internet, Skype et tous les gadgets électroniques qui relèguent même le traditionnel téléphone au rayon des « vieilles affaires ». Avez-vous pensé que ces moyens de communication, d'importantes tranches de la population n'y ont pas accès ou ne les maîtrisent pas? Vous plaignez ces gens exclus des nouveaux modes de vie parce qu'ils ne bénéficient pas des bienfaits du modernisme appliqué contemporain ? On verra plus tard comment les choses évolueront, lorsque les gadgets seront à leur tour devenus de « vieilles affaires ». Ou que votre ordinateur vous trahira en perdant vos précieuses données non sécurisées. Au Québec, les vieilles affaires, on connaît ça. La province se réclame d'une vocation touristico-historique fondée sur les reliques d'un passé dont, souvent, on ne se souvient que vaguement, si on l'a déjà étudié. Nos villes plus anciennes ont toutes un « vieux » quartier : Vieux-Montréal, Vieux-Trois-Rivières, Vieux-Lévis, Vieux-Québec, où l'on trouve le plus de « vieilles affaires » : maisons, institutions, vieilles pierres, des témoins de l'histoire locale. Mais au nom de l'efficacité et de la modernité, on tend désormais à délimiter ces zones et à les renommer en effaçant le mot « vieux ». On a ainsi à Québec, un « nouvo Saint-Roch » plutôt qu'un « vieux Saint-Roch »... où, apparemment, il ne subsistait que peu de choses intéressantes. Il aurait fallu y regarder de près, ce qui aurait exigé des moyens pour réaliser des choix : rénover, ça coûte cher, on rase tout et reconstruit. À terre les « vieilles affaires » ! Le quotidien de chacun de nous conte aussi de ces « vieilles affaires » auxquelles nous tenons pour des motifs qui relèvent autant de la raison que des sentiments. Des objets qui rappellent quelqu'un ou évoquent un événement; un meuble fabriqué par le petit frère disparu, un tricot de grand-maman, des photos de collègues d'études, d'événements de jeunesse, des programmes de spectacles artistiques ou sportifs, certificats, trophées, autant

de fragments de vie utiles pour la mémoire et encombrants à l'heure du grand ménage et des déménagements. Pourtant, même à l'ère du « voyager léger » qui exige qu'on choisisse entre save et delete, on aime encore « sauvegarder » ces petits riens qui évoquent une partie de soi et de ceux que l'on aime. Comme une preuve que l'on a vécu avant, autre chose, et autrement. Au début des années 1980, quand l'informatique a commencé à s'immiscer un peu partout dans les relations humaines, certains éducateurs prévoyaient que rapidement les nouveaux outils allaient modifier la structure même du cerveau des enfants. Il suffit d'observer, 30 ans plus tard, avec quelle aisance les bébés de la maternelle naviguent à travers ces techniques qui parfois déroutent encore leurs parents. En matière de télécommunications, papis et mémés ont fini par apprendre à se débrouiller pour rejoindre leurs petits-enfants mais dans leur cuisine, les dessins affichés sur la porte du réfrigérateur témoignent encore du plaisir qu'éprouvent les uns et les autres à échanger des messages tangibles. Les vrais changements surviennent plus tard, quand les chers petits qualifient de « vieilles affaires » tout ce qui semble étranger à leur univers. L'écriture manuscrite y passe comme le livre, la musique dont on ne joue pas, les vieux films sur VHS, la télévision et les gens plus âgées que soi. En cela, les adolescents ne constituent pas une classe à part mais ils ont l'excuse de vouloir réinventer le monde Mais les « vieilles affaires » qui survivent ont quelque chose de rassurant, ne serait-ce que parce qu'elles revivent parfois, comme les antiquités, au gré des modes. Quand on se cherche des repères pour prendre une décision, pour retrouver la trace d'une émotion, reconnaître un visage, retracer un chemin parcouru par d'autres, on trouve parfois dans les « vieilles affaires ». Comme cette lettre de l'oncle qui, vivant au loin, en 1940, écrit à sa mère pour lui apprendre qu'il se marie dans trois jours. C'est peut-être la seule qu'il ait jamais écrite mais on l'a conservée et aujourd'hui, elle parle à ceux qui la lisent... MARTINE CORRIVAULT

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Chronique

DIANE

MORIN

LA CHINE, LES OISEAUX, LA GRIPPE ET NOUS Depuis sept ans, je suis l’actualité nationale et internationale concernant la grippe, les maladies infectieuses, la préparation à une pandémie ou à une catastrophe de façon active. Les plans pour faire face à une pandémie sont conçus pour les citoyens moyens qui ont un appartement, un téléphone, un peu d’argent et un réseau d’amis. Étant responsable d’un organisme communautaire qui vient en aide à des personnes extrêmement démunies, je suis convaincue que les mesures prévues ne répondront pas à leurs besoins spécifiques et qu’il faut prévoir des ajustements importants aux mesures conçues pour les citoyens moyens. Il faut faire ces ajustements avant qu’une urgence ne se déclenche. C’est mon leitmotiv et voilà pourquoi je ne me gêne pas pour en parler régulièrement dans cette chronique.

lettes propagées dans l’air peuvent suffire à infecter les humains entre eux. Les noms des virus de la grippe A se rapportent justement aux deux types de protéines qu’ils portent sur leur surface : H pour l’hémagglutinine (comportant 16 variétés); N pour la neuraminidase (comportant 9 différents types). Il y a donc au total 144 types de grippe A qui ont tous été détectés chez les oiseaux, bien que certains furent également décelés chez d’autres espèces.

Photo : Archives Web

J’en ai vu passer des menaces, mais j’avoue que cet hiver la grippe donne un bon « show ». J’ai envie de partager mes observations avant que les gouvernements provinciaux et territoriaux adoptent de nouveaux plans de pandémie. Entendons-nous bien, nous ne sommes pas en période de pandémie, mais plusieurs nouvelles grippes de type A circulent en même temps, ce qui en principe conduit les autorités à augmenter leur vigilance. C’est fou comment le paysage grippal peut changer en quelques années, mais avant revoyons quelques grandes lignes sur les virus associés à la grippe. VIROLOGIE 101 La grippe de type A est une grippe aviaire qui affecte surtout les oiseaux et la volaille. Toutefois, ce type de grippe traverse parfois la barrière des espèces et affecte des mammifères, dont les humains. Lorsqu’un individu (oiseau, humain, etc.) est affecté par deux virus de grippe différents, ceux-ci peuvent échanger du matériel génétique et créer de nouveaux virus avec de nouvelles propriétés. Si la souche du virus est nouvelle et qu’il n’y a pas d’immunité acquise dans la population, il y aura alors un risque sérieux de pandémie. Les virus de grippe A ont 8 gènes constitués de protéines (6 internes et 2 à la surface). Les deux protéines de surface servent au virus à s’accrocher aux cellules de son hôte. Ce sont des récepteurs. Certains s’accrochent profondément dans le système respiratoire de l’hôte, comme dans le cas du H5N1, ce qui rend sa propagation difficile de personne à personne. Il faut pour ce faire des contacts étroits et prolongés. Certains autres récepteurs s’accrochent facilement au système respiratoire supérieur, comme dans le cas de la grippe AH1N1. C’est à ce moment que de simples goutte-

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DES VIRUS DE GRIPPE DIFFICILEMENT DÉTECTABLES PARMI LA VOLAILLE Cette démultiplication des menaces pose d’importants problèmes de surveillance, car tous ces virus en circulation en Chine sont difficilement repérables parmi la volaille. Les Chinois ont une population nombreuse avec des défis alimentaires gigantesques. Ceux-ci, tout comme d’autres asiatiques, sont friands de volailles achetées vivantes. Il s’agit là d’une dangereuse situation de proximité entre les humains et la volaille (mais aussi avec les oiseaux de compagnie) propice aux infections humaines. Alors que le H5N1 provoquait une maladie grave parmi les volailles et se transmettait rapidement d’un oiseau à l’autre au sein d’un troupeau infecté au début de l’épidémie, il en est différent aujourd’hui. Le virus H5N1 circule toujours parmi la volaille chinoise, mais sans signe apparent, car il peut se propager chez les oiseaux vaccinés sans causer de maladie évidente. Ce qui en l’occurrence le rend difficile à détecter parmi la volaille. Le virus H5N1 a causé 654 cas d’infection humaine confirmée par l’OMS et possède un taux de mortalité se situant autour de 60 % des cas étudiés.

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Le H9N2 a évolué en un virus respiratoire bénin chez les poulets qui s’est propagé à travers l’Eurasie. Il est difficilement détectable chez son hôte. Il semblerait que la nouvelle variante de H10N8 soit aussi faiblement pathogène chez le poulet et ait provoqué les trois premiers cas d’infection humaine à la fin de 2013 et au début de 2014, dont un décès. Le H7N9 est asymptomatique chez les poulets, et donc difficile à détecter. Il circule depuis seulement un an et a provoqué près de la moitié du nombre total d’infections humaines dues au H5N1 en onze ans. Chez l’humain, il a un taux de mortalité entre 25 et 30 % des cas étudiés et la maladie est plus longue que dans le cas du H5N1. La prolifération du virus H7N9 dans les marchés d’oiseaux vivants dans le sud de la Chine, notamment au Guangxi, a « augmenté de manière significative le risque », qu’il ne se propage aux pays voisins (Vietnam, Myanmar, République démocratique populaire lao), selon la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture). Le H7N9 pose de plus en plus de problèmes aux Chinois et la seule mesure ayant des chances de pouvoir contenir la menace semble être la fermeture des marchés de volailles vivantes dans les zones touchées. Certaines régions affectées ont d’ailleurs fermé certains marchés, mais l’industrie exerce son influence non seulement pour les faire rouvrir mais aussi pour empêcher les autorités de divulguer les cas individuels. RÉVISION DES PLANS DE PANDÉMIE AU CANADA Tout cela semble être des préoccupations bien loin de nous. Et pourtant, une jeune Canadienne revenue d’un voyage de Chine est décédée du virus du H5N1 durant les fêtes, sans qu’elle ait été en contact avec des oiseaux ou de la volaille. Ce premier cas de H5N1 en Amérique du Nord nous rappelle qu’avec les moyens de transport actuel, une maladie infectieuse peut être facilement importée par un voyageur partout sur la planète. Si H5N1 n’a toujours pas causé de pandémie et que la pandémie de H1N1 était somme toute bien mineure, causant peu de mortalité, il n’en demeure pas moins que les virus de grippe continuent de muter et de se transformer, posant des défis nouveaux pour lesquels il faut se préparer. Dans un contexte de crise de crédibilité des autorités sanitaires mondiales et de crise d’insolvabilité de nombreux états, il est de bon aloi que des citoyens se gardent informés de ces questions et ne laissent pas les lobbys économiques exercer seuls leurs influences. Les autorités canadiennes achèvent la révision de leur plan de pandémie et devraient le soumettre aux provinces et aux territoires au printemps ou au début de l’été prochain. Le Canada a aussi décidé d’attendre les études américaines sur le vaccin contre le H7N9 avant de prendre un alignement. Mais on sait déjà qu’il faudra prévoir deux doses par personne pour obtenir une réponse de protection, et que l’ajout d’un adjuvant sera nécessaire. Cela posera, à n’en pas douter, des problèmes de logistique, de priorisation, d’organisation et de coût.

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ACCÈS AU VACCIN POUR LE COMMUNAUTAIRE S’il est un point sur lequel les organismes communautaires devraient faire front dans un plan de pandémie, c’est bien sur l’accès au vaccin pour les employés et les usagers, au même titre qu’un CLSC ou une résidence pour personnes âgées. Sans accès au vaccin, le maintien des services sera compromis. Sans équité entre le réseau public et les organismes communautaires, je vois mal comment maintenir les nombreuses trajectoires de services et les ententes de services qui impliquent le communautaire, tout comme les pratiques qui caractérisent le réseau de services de santé et des services sociaux québécois, comparativement au reste du Canada. DIANE MORIN

SURVOL DES NOUVELLES SOUCHES EN CIRCULATION La grippe était particulièrement active cet hiver, voici quelques faits. - C’est la première année que la grippe A H1N1 est dominante comme grippe saisonnière chez les humains. Elle circule en même temps que la grippe A H3N2. Toutes deux sont présentes en Amérique du Nord mais aussi en Chine. - H5N8 se répand chez les oiseaux et la volaille en Corée du Sud, causant d’importants ravages. - Les virus de grippe H9N2, H5N1, H7N9, H10N8 circulent chez les oiseaux et la volaille en Chine. - H5N1, H7N9, H10N8 ont traversé la barrière des espèces et infecté les humains sans qu’ils aient muté de façon à se propager de manière efficace entre les personnes : - H5N1 (en1997 avec une réémergence à partir de 2003) - H7N9 (une première vague au printemps 2013 et une seconde vague en cours actuellement en Chine) - H10N8 (depuis la fin 2013 en Chine) - H5N1, H7N9 et H10N8 ont des protéines de surface différentes mais leurs 6 gènes internes sont identiques au H9N2. Ce qui fait dire à Robert Webster, un expert de la grippe aviaire, que H9N2 est le catalyseur. C’est en quelque sorte la MÈRE des virus de grippe actuellement en circulation en Chine. Et la MÈRE pourrait avoir créé d’autres variantes qui n’ont pas encore été détectées.

CRÉDITS : Sharon Sanders et les autres membres de l’équipe de FluTrackers.com Michael Coston d’Avian Flu Diary Makoto au Japon sur Twitter Helen Branswell (Presse canadienne, Globe and Mail, CTV News) Deborah Mackenzie New Scientist Lisa Schnirring et Robert Ross du CIDRAP Multiples chercheurs publié dans The Lancet Agence de santé publique du Canada Site Web de l’OMS Gregory Hartl sur Twitter

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RESSOURCE ESPACE FAMILLES

L’ENTRAIDE POUR TOUS Précédemment connu sous le nom de Solidarité Sainte-Ursule, Ressource Espace Familles est un de ces organismes au service de la communauté. Petite visite guidée. L’organisme, qui fêtera bientôt ses dix ans, s’est donné pour mission de favoriser le regroupement et la qualité de vie des citoyens de l’arrondissement SainteFoy - Sillery - Cap-Rouge, et ce, autour d’enjeux liés à la famille, la pauvreté, les saines habitudes de vie et l’immigration. Comment? Par des activités de socialisation, du soutien et de l’aide concrète. Mais l’organisme va encore plus loin que la simple mobilisation des individus, il est également question de mobiliser les acteurs collectifs. En effet, l’organisme vise une concertation entre les organismes du milieu, permettant ainsi d’entretenir des liens durables avec le reste de la communauté. Pour la petite histoire, l’aventure de Ressource Espace Familles débute en 2005 alors que différents acteurs du milieu se rencontrent afin de mieux se connaître et mettre en commun les forces présentes dans le quartier. Il en ressort une volonté de se mobiliser autour d’actions concrètes, visant l’amélioration du milieu de vie. À partir de là, Ressource Espace Familles prend forme et cherche à promouvoir une participation citoyenne active à la vie communautaire et un sentiment d’appartenance aux différentes communautés locales. UN TRIO DE SERVICES Ressource Espace Familles s’articule autour de 3 axes d’intervention : la fa-

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mille, l’immigration et la mobilisation citoyenne. Pour le volet famille, il existe par exemple le programme Mômes et compagnie qui offre des activités pour les parents et les enfants d’âge préscolaire 0-5 ans. Il peut s’agir d’activités de stimulation, de cercles de lecture, d’ateliers de psychomotricité, de conférences et de discussions. « Pour les familles qui utilisent les services, cela permet de socialiser entre parents, d’échanger des trucs, du vécu, cela permet également aux enfants de socialiser entre eux ». [les CPE n’étant pas accessible à tous!], laisse entendre Eric Carle, responsable des communications. Pour le volet immigration, qu’en est-il ? D’abord, il faut savoir qu’à Sainte-Foy, on retrouve une concentration importante de personnes immigrantes. Près de 12 % des résidents ferait partie des communautés culturelles. De sorte que l’accueil des personnes immigrantes est vite devenu un enjeu primordial pour Ressource Espace Familles. À cet égard, on ne peut passer sous silence l’activité Tricot, qui remporte un vif succès chez les membres, en permettant aux femmes immigrantes de tricoter et socialiser par le fait même. Les gens retirent beaucoup d’une telle activité mise sur pied par l’organisme. M. Carle affirme que « Les gens au tricot sont très heureux de socialiser, ce sont des gens qui arrivent ici et qui sont un peu seuls. Et à ce moment-là, ils se retrouvent avec des gens avec qui ils peuvent parler et s’ouvrir ». Rajoutons que l’organisme participe à une émission sur les ondes de CKIA FM qui permet aux personnes immigrantes d’obtenir une tribune et de raconter leur histoire. Une initiative qui contribue à renforcer l’intégration de ces nouveaux arrivants.

En ce qui a trait à la mobilisation citoyenne, l’organisme participe à Familles à bord ! et Jeunesse en santé. Familles à bord ! est un regroupement de partenaires qui a pour mission de créer des conditions favorables au développement des familles dans un contexte de mixité sociale et culturelle afin d’optimiser l’égalité des chances pour une entrée scolaire réussie. Jeunesse en santé est quant à lui un regroupement de partenaires soutenu par Québec en forme, qui a pour mission de créer un mouvement collectif et dynamique pour les jeunes de 0 à 17 ans autour de modes de vie sains. Qu’est-ce qui attend l’organisme dans l’avenir ? Un projet de jardin communautaire prendra forme sous peu. L’organisme s’affaire également à la production d’une vidéo corporative. Pour la suite, on souhaite plus que tout un financement régulier, puisque pour l’heure l’organisme n’a pas de financement récurrent et s’en tient aux bailleurs de fonds et par le biais de projets. De ce fait, la plus grande réussite de l’organisme, au-delà d’être un formidable lieu pivot pour accueillir tout un chacun (les familles, les nouveaux arrivants, les personnes en difficulté), c’est le fait d’être toujours là, année après année. De poursuivre sa belle mission. Pour plus de détails sur Ressource Espace Familles, je vous encourage vivement à appeler au 418-681-9740. ÉTIENNE BOUDOU-LAFORCE

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PAGE COMMUNAUTAIRE ÉGLISE NOTRE-DAME-DEJACQUES-CARTIER : NOUVEAU PROPRIO, NOUVELLE VOCATION

Courtoisie: Coop La Nef

Le 3 février dernier, la députée de Taschereau et ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale, Agnès Maltais, annonçait que son gouvernement contribuerait à hauteur de 50 000 $ dans le projet d’acquisition et de reconversion de l’église Notre-Dame-de-Jacques-Cartier par la Coopérative de solidarité NotreDame-de-Jacques-Cartier. «  Les églises ont été payées par le peuple, il est normal qu’il y ait un retour vers la communauté », a déclaré Mme Maltais. La directrice de la Coopérative, Sylviane Pilote, a profité de l’occasion pour dévoiler la nouvelle dénomination de l’organisme, soit La Nef, Coopérative de solidarité Notre-Dame-de-Jacques-Cartier. Elle a également saisi l’occasion de réaffirmer la mission d’assurer, dans un esprit de coopération et d’engagement social, la mise en valeur du patrimoine de proximité de l’église Notre-Dame-de-JacquesCartier.

La Nef, qui souhaite devenir un acteur incontournable du développement communautaire et un modèle de médiation culturelle, planche déjà sur plusieurs projets visant à participer à la dynamisation du quartier et à la création d’un sentiment d’appartenance et d’une synergie avec les citoyens.

Quant à Véronica Rioux, présidente de La Nef, elle a annoncé que l’offre d’achat du bâtiment situé à l’angle des rues Caron et Saint-Joseph dans le quartier Saint-Roch avait été acceptée par la Fabrique NotreDame-de-Saint-Roch et que les autorités diocésaines avaient elles aussi consenti à cette transaction dont la somme s’élève à 50 000 $...

Ne cherchez pas la différence, faites-la !

« La Nef contribuera au dynamisme du quartier Saint-Roch grâce à sa salle multifonctionnelle qui permettra de rassembler la communauté et les organismes », a précisé la ministre. En effet, cette salle multifonctionnelle marquera la nouvelle vocation du bâtiment, qui deviendra un lieu de rassemblement et de services communautaires, culturels, caritatifs et solidaires. Déjà, l’église abrite, à titre de membres utilisateurs, dix organismes communautaires, notamment : La Fondation Saint-Roch, l’Accorderie de Québec, Agir en santé mentale, Entraide Saint-Roch, le Centre Solidarité Jeunesse, le Réseau Accorderie, la Société Saint-Vincent de Paul, l’Archipel d’Entraide (incluant le service Accroche-Toit et le magazine de rue La Quête) et Communagir.

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LE CENTRE DE PARRAINAGE CIVIQUE DE QUÉBEC

Le Centre de parrainage civique de Québec est présentement à la recherche de bénévoles voulant profiter d’une expérience de parrainage enrichissante. En effet, le Centre vous propose de faire partie de la vie d’une personne présentant une incapacité physique ou intellectuelle ou un problème de santé mentale en développant un lien d’importance avec elle. Offrez à quelqu’un une denrée rare et précieuse : votre temps. Contactez l’équipe du Centre de parrainage civique de Québec pour en savoir plus : 418 527-8097 www.cpcq.ca L’AUMÔNERIE COMMUNAUTAIRE DE QUÉBEC Plusieurs personnes me demandent si je suis un curé, quand je me présente comme le président de cet organisme devant un groupe. Je réponds que je suis seulement un pieux laïc. L’Aumônerie communautaire de Québec est reliée aux services d’aumônerie des centres de détention du fédéral. Nous travaillons à

la réinsertion sociale des libérés conditionnels résidant dans les maisons de transition : accompagnement, recherche de travail, loisirs, famille, etc. Ces services sont rendus par des bénévoles recrutés et formés par notre organisme. Le recrutement et la formation des bénévoles et des stagiaires sont sous la responsabilité de Caroline Pelletier (418-271-6120). Nous offrons des services d’accompagnement, de cercles de soutien et de responsabilité. Le Mitan situé au 525 rue St-François, sous l’église St-Roch, offre du lundi au jeudi un local de rencontres pour des personnes ex-judiciarisées. L’animateur Denis Côté (418-527-3700), de même que des stagiaires et des bénévoles y rencontrent les personnes désireuses d’y jaser de leurs besoins et les relient à des services spécialisés, s’il y a lieu. Le local sert également de siège social pour les réunions des administrateurs et des comités de l’organisme. Les bénévoles qui œuvrent dans notre organisme comme administrateurs ou intervenants doivent faire montre de leur croyance et de leur engagement en la réhabilitation des personnes judiciarisées. Vous pouvez aller visiter notre site web : www.aumcom.org ou communiquer par courriel pour en connaître davantage : Le mitan@oricom.ca; caroline.pelletier.101@gmail.com; roblec2@ videotron.ca. Au plaisir de vous rencontrer ! ROBERT LECLERC, PRÉSIDENT DE L’ACQ

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LE JEU DE LA QUÊTE LE JEU DE LA QUÊTE PAR JACQUES CARL MORIN ET GINETTE PÉPIN par Jacques Carl Morin

CeJEU jeuCONSISTE consiste àÀremplir lesLES rangées horizontales ainsi que lesQUE colonnes 1 et 20 à l’aide CE REMPLIR RANGÉ­­­­­­­ES HORIZONTALES AINSI LES COLONNES 1 ET 20des À définitions, indices ou INDICES lettres mélangées ouMÉLANGÉES déjà inscrites. Chaque case grisée représente L’AIDE DES DÉFINITIONS, OU LETTRES OU DÉJÀ INSCRITES. CHAQUE CASE GRISÉE R ­ EPRÉSENTE QUIlettre EST Àd’un LA FOIS DERNIÈRE D’UN MOT ET LA une lettre qui est à laUNE fois LETTRE la dernière motLA et la premièreLETTRE lettre du suivant. PREMIÈRE LETTRE DU SUIVANT. 1

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9 10 Verticalement :

VERTICALEMENT :

Fondateur des caisses 1-1Fondateur des caisses populaires.

populaires.

5- Tout ce qui sert à la parure des femmes (ROSAUT). Qualifie un emploi qui ne dure qu’une partie de l’année. Au figuré, une personne cupide et impitoyable en affaires.

20- Dispositif pour assourdir le son d’un moteur.

Période qui suit l’accouchement, pendant laquelle la maman 20- Dispositif pour assourdir le son d’un moteur.6refait ses forces. Glace légère à base de jus de fruit. Herbe à Nicot.

HORIZONTALEMENT :

1- Qui est en position verticale. Dernière gare d’une ligne de transports. Résumé d’un film.

7- Femmes célibataires. Le préfet de discipline dans un ordre professionnel. Petit de la chèvre.

2- Indispensable dans la sauce béarnaise. Personne qui fait un récit. Bord plié une fois ou deux fois.

8- D’après la Bible, s’oppose au bon grain. Ancien quotidien de Québec. Vérité évidente et banale (MUSETRI).

Horizontalement :

1- Qui est en position verticale. Dernière gare d’une ligne de transports. Résumé d’un film.

3- Pressentir, se douter de quelque chose (drorobuse). Côté 9- Réponse des Québécois aux référendums. Qui est parvenu à d’une monnaie opposé à la face principale. État d’un être vivant l’âge de 90 ans. Petite échelle d’intérieur pliante. 2- Indispensable dans la sauce béarnaise. Personne qui fait un récit. Bord plié une fois ou qui dort. 10- Mélange incohérent et disparate (SISIGLANMOD). Tamis. deux fois. 4- Descendant d’Abraham. Se dit d’un avion conçu pour être Nom populaire de la marmotte. moins détectable. Communauté constituée par les peuples fran3- Pressentir, se douter de quelque chose (drorobuse). Côté d’une monnaie opposé à la face cophones.

principale. État d’un être vivant qui dort.

4- Descendant d’Abraham. Se dit d’un avion conçu pour être moins détectable. Communauté constituée par les peuples francophones.

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PAR HÉLÈNE HUOT

La langue dans sa poche par Hélène Huot

DES MOTS POUR RIRE PAUVRES FAMILLES!

DES MOTS POUR RIRE

S’agit-il de vendre les familles au rabais ? De s’en débarrasser comme on le fait de témoins gênants ? Ou encore d’organiser en famille une grande vente de débarras ? Une chose est sûre, les temps sont durs pour les familles !

DES MOTS POUR JOUER

S’agit-­‐il de vendre les familles au rabais? De s’en débarrasser comme on le fait de témoins gênants? Ou encore d’organiser en famille une grande vente de débarras? Une chose est sûre, les temps sont durs pour les familles! [Photo Antoine Godbout, Québec, 2005]

Photo: Antoine Godbout, Québec, 2005

PAUVRES FAMILLES !

Nathalie 14-2-12 07:08 Supprimé: C

Une résidence d’État, qu’on appelle aussi « résidence officielle », est une demeure qui appartient à un État et qui sert à abriter un chef d’État ou un chef de gouvernement dans l’exercice de ses fonctions ou pendant la durée de son mandat. Faites le lien entre les résidences (mots de la 1re colonne) et leur pays d’appartenance (mots de la 2e colonne). a. Le Belém b. Le Château de Bellevue c. Downing Street d. L’Élysée e. Le Kantei f. La Maison Blanche g. La Moneda h. Los Pinos i. Le Quirinal j. Sussex Drive

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1. Allemagne 2. Canada 3. Chili 4. États-Unis 5. France 6. Italie 7. Japon 8. Mexique 9. Portugal 10. Royaume-Uni

DES MOTS POUR PARLER 1. Que signifie l’expression « Rater (ou manquer) le coche » ? 2. Une voix de Stentor est une voix puissante, très forte. Stentor est un personnage tiré : a. de la mythologie grecque; b. des fables de La Fontaine; c. de la commedia dell’arte. 3. « À la bonne heure » signifie : a. à l’heure prévue; b. dès que possible; c. tant mieux. 4. On peut lire dans le Journal de Québec du 8 décembre 2013 que l’auteur de la populaire série américaine « Homeland » nous propose une trépidante préquelle ». Qu’est-ce donc qu’une préquelle ? 5. Depuis 1987, le billet de un dollar canadien est remplacé par une pièce où figure un oiseau. Quel est le nom de cet oiseau ? 6. Le mot « poorgeois » est un néologisme qui désigne les riches qui camouflent leur fortune en portant des vêtements défraîchis et troués. D’où vient ce mot ? 7. Plusieurs Québécois portent le nom de Moreau. Mais qu’est-ce qu’un moreau ? a. un cheval noir; b. une baie de la famille des myrtilles; c. un échassier voisin du héron. 8. Les mots « pléthore » et « panoplie » ont exactement le même sens. Vrai ou faux ? 9. Les noces de palissandre marquent 65 ans de mariage. Qu’est-ce que le palissandre ? a. un bois dur et odorant; b. une clôture formée de petits pieux; c. un oiseau d’Amérique du Sud. 10. L’adresse est-elle mentionnée « au dos » ou « à l’endos » du formulaire ? J’attends de vos nouvelles… Vous aimez les mots. Vous avez des commentaires à formuler ou des suggestions à faire concernant cette chronique La langue dans sa poche. Rien de plus simple. Écrivez-moi à hu-go@sympatico.ca. Cela nous permettra d’échanger sur des questions qui vous intéressent et d’enrichir par le fait même les futures chroniques. Merci à vous ! Les réponses page 37.

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BoitePainPub:Mise en page 1 11-03-28 09:22 Page1

Participer activement au développement de notre milieu. LA BOÎTE À PAIN

CAFÉ NAPOLI

289 Saint-Joseph Est, Québec (St-Roch) Lundi au samedi 6 h 30 à 20 h Dimanche 6 h 30 à 17 h 30 Tél. : 418 647-3666

396, 3e Avenue, Québec (Limoilou) Lundi au mercredi 6 h 30 à 18 h 30 Jeudi et vendredi 6 h 30 à 19 h Samedi et dimanche 7 h à 18 h 30 Tél. : 418 977-7571

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Photo: Camille-Amélie Koziej Lévesque

Québec, septembre 2013 (pour changer, un texte pas tordu par l’amour) Il file pas…et pourtant… Il file pas. Il a des idées de petitesse. Il a envie d’être premier minisss. Il croit qu’il faut diminuer l’absorption d’information. Dans le fond, ce n’est qu’un autre mois de septembre dans le monde. Il fait de la sauce spaghetti et écoute de la musique sans parole. Plus tard… Les paroles, qu’il n’écoute pas, sont arrivées à bon port. Peut-être le même que Moustaki, disparu ce printemps, voulait quitter en appelant à son secours le vent du large. Il a coupé peu à peu les liens de transmission. Il rentre dans un refuge, une coquille, que son ego de Bernard l’Hermite a cherché puis trouvé.

Il aimerait bien, parfois, être le fromage gratiné sur une croûte dorée, fondre sous le palais d’une épicurienne. Peu à peu il s’éloigne de la tempête. Surtout de celle qui a voulu s’immiscer dans sa tête. Il a gardé sa cervelle opérationnelle mais fait entrer un peu des brumes de la mer des Sargasses.

Tweet @ songer Et si, l'on récitait des vers Et si, l'on mâchouillait des blés, Picoté par les dents d'la mer, Absorbé par un coup de blé.

Il navigue au son et à l’écho. Doucement il se relâche, relaxe, dort un peu plus chaque jour et tout est de moins en moins important. L’urgence qui hier encore le tarabustait s’est dissipée par son nez, ses oreilles, ses yeux, sa bouche et ses entrailles. Même que, présentement, il tire une grande satisfaction de simplement sentir son crayon glisser sans entrave sur le papier comme s’il n’attendait que ça, comme s’il communiait, amoureux BERNARD SONGE

Note pour Karyne : Mettre cette pub le plus petit possible. Tu peux jouer avec les éléments si tu veux.

La Quête est diffusée pAr téléphone viA

La Quête est diffusée par téléphone via

inc AudiothèQue pour personnes de l’iMpriMé du Québec inc Audiothèque pour PersonneshAndicApées Handicapées de l'Imprimé du Québec

Québec 418 627-8882 Montréal 514 627-8882 Ailleurs au Québec 1-877 393-0103 Québec 418 627-8882 • Montréal 514 627-8882 • Ailleurs au Québec 1-877 393-0103

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Photo: Camille-Amélie Koziej Lévesque

Nuit de Folie - Je souhaiterais vous déconseiller une destination touristique en particulier, me déclara mon voisin de train.

- Je m’étais profondément endormi, lorsque soudain, je fus réveillé en sursaut par Caligula.

Je me trouvais dans le train à destination de Toronto. Mon côté rêveur m’incitait à penser que j’étais assis dans l’OrientExpress, ou encore dans le train Bleu.

Je vis tout d’abord un homme vêtu d’une tenue romaine, qui m’apostropha en hurlant : « Misérable ! Tu vas embrasser mon cheval, mon cheval que j’aime tant ! » Je croyais confusément que c’était le fantôme de Don Quichotte qui n’appréciait pas ma présence dans sa chambre préférée. Pas du tout ! Il sortit son poignard de sa ceinture, me tailla la gorge, et vous pouvez constater que j’ai conservé de cet épisode de ma vie cette encoche dans mon cou.

- Et pourquoi donc ? lui rétorquai-je. Ai-je l’air de quelqu’un que l’on peut niaiser aisément ? Mon voisin éclata de rire. - La destination touristique à laquelle je pense, mon cher, n’est pas une destination dont on revient facilement. - La mort, la folie ? - Pire…Le Désir. - Faites-vous allusion à ce Tramway nommé désir ? - Je ne vois pas ce que vous voulez dire… Je vais vous raconter ce qu’il m’est arrivé au début de ce troisième millénaire. J’avais à peine vingt ans, votre âge, et j’étais parti tout seul, avec mon sac à dos, sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Tout se passa très bien, jusqu’à ce que j’arrive en Espagne. Un soir, j’avais trouvé refuge dans une auberge, dans laquelle paraît-il, avait séjourné Don Quichotte en personne! Je trouvais cela très plaisant, très original, moi qui aime tant la littérature… - En effet…

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Maintenant que je me réveille, je ne sais plus ce quoi je dois penser de tout cela. Étais-je dans le train de Lac-Mégantic, ou bien dans celui de Madrid ? Quel rôle y ai-je joué ? Pourquoi suis-je enfermé dans une cellule d’isolement en hôpital psychiatrique ? Je ne me souviens de rien. Je crois que, quand on ne se rappelle pas son histoire, et bien, on s’en invente. Au moins, pour pouvoir dormir. LAURENCE DUCOS

Mon voisin ne mentait pas. Je me mis à frissonner. - Alors il me demanda de me mettre à genoux devant l’effigie de son cheval, qu’il avait fait consul. Je refusai et le frappai au visage. Notre bataille causa tant de bruit que l’aubergiste fit irruption dans ma chambre. Il était allé voir une jeune femme sur mon palier, qui appelait au secours depuis des heures : elle prétendait que quelqu’un d’invisible était dans sa chambre, et que cette entité mystérieuse lui avait dévoré son repas et arraché les pages de tous ses livres, pour enfin occuper son lit. - Votre histoire est effrayante. Pour moi, vous vous êtes trouvé dans l’Auberge Rouge de Balzac. Je vous demande de me laisser trouver le sommeil. Mon voisin se tut, et je m’endormis.

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Photo: Camille-Amélie Koziej Lévesque

Éloge

de la vieillesse Mon père, qui a eu cent ans l'été dernier, m'a dit un jour cette phrase pleine de sagesse : « Tu sais, que ce soit la jeunesse ou la vieillesse, c'est un état d'esprit ! Une personne de 80 ans peut se sentir jeune et un jeune de 20 ans peut se sentir vieux. Un des grands secrets, c'est de toujours avoir des projets ! » Comme mon père, beaucoup de personnes âgées ont des histoires, des anecdotes et des expériences de vie à nous raconter et à partager. Malheureusement, elles subissent parfois de l'indifférence et de la moquerie, ce qui peut être perçu comme de l’âgisme. Mais nous oublions souvent que, nous aussi, nous vieillissons et que nous ne voudrons pas, tout comme elles, être victimes de ces mêmes préjugés qui, hélas, entretiennent un conflit des générations. J’ai compris cela quand j’ai travaillé auprès des personnes âgées. Ce qui m’a sauté aux yeux, si elles n'avaient plus de famille, ce fut leur grande solitude et leur isolement. J’ai aussi constaté à quel point elles se sentaient inutiles ! J'ai de l'admiration pour les écoles et les organismes sociaux qui instaurent des rencontres entre des jeunes et des « vieux » dans le but d’échanger, d’ap-

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prendre à se servir d'Internet, de cuisiner, de faire la lecture et de l’aide aux devoirs, de jouer à des jeux de société, etc. Je lève aussi mon chapeau à des gens comme Gilles Kègle et les Missionnaires de la Rue qui s'occupent avec beaucoup d'amour des personnes âgées en leur montrant qu'elles sont dignes d'être visitées par le temps qu’ils prennent à les écouter se raconter, tout en leur tenant la main. Il y a, dans les yeux de ces personnes aînées, de la reconnaissance, et ce, même si elles sont sans ressources. Lors de la tragédie à L'Isle-Verte où une trentaine d’habitants de la Résidence du Havre ont perdu la vie, le curé de la paroisse, Gilles Frigon, a déclaré avec beaucoup d'émotion : « C'était du bon monde. Ils ont travaillé toute leur vie, ont élevé leur famille. C'était du monde d'une générosité débordante. » M. Frigon avait un amour sincère pour ces gens à qui il rendait visite régulièrement. Il a également ajouté : « C'était des personnes qui avaient la foi, qui priaient pour leurs enfants. Même si certaines avaient la maladie d'Alzheimer, elles se souvenaient, par exemple, de leurs prières du Notre Père et du Je crois en Dieu. » À leur façon, je pense que ces gens se sentaient utiles et trouvaient un sens à leur vie en priant

pour les autres. C'est beau parce que cela leur permettait de voir le positif malgré leurs maladies et leurs limites. J'ai un profond respect pour ces personnes âgées qui prient pour les autres, car j'ai remarqué, en les côtoyant, qu'elles ont une belle lumière dans les yeux et que cela donne un sens à leurs souffrances physiques et morales. Dans notre société où la performance et la compétitivité nous font aller à toute vitesse, la spiritualité phare de ces personnes aînées nous fait prendre conscience de l’importance de ralentir. Elles nous rappellent également que nous ne perdons pas notre temps lorsque nous les visitons et les écoutons raconter leurs enrichissantes expériences de vie. Comme le dit le proverbe africain : « Quand un vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui brûle ». CHRISTIANE VOYER

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Photo: Camille-Amélie Koziej Lévesque

La métisse avec une pointe d'exaltation sur la joue Ta beauté en noir et blanc est l'œuvre d'un artiste qui sait mêler les genres ainsi que les gens. Tu es une chaude tasse de café au lait Ton chocolat et ton lait vanillé ne sont pas laids Tu es un pont entre la forêt et le dessert Tu es, à toi seule, deux déserts

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Tu as en toi deux mères Ton sang entre deux mers Un beau vers par Césaire et Voltaire Une Mélissa, une métisse sans chercher leur trait il n'y a pas que cela qui nous plait Une œuvre recherché pour sa beauté

Tu es une un Potsdam de dames Une Sanza, une mosaïque qui possède l'arme ainsi que l'âme Une métisse issue du monde et du tiers-monde pour créer l'outre-monde Parfois il arrive STÉPHANE OKEMVÉLÉ-MÉGNIER

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Photo: Camille-Amélie Koziej Lévesque

Journal de rue Austin et l’ironie

Je me trouvais entre deux emplois. Entre deux vies. J’avais besoin de prouver mon existence. Le seul remède que je connaissais pour apaiser cette inquiétude était le vélo. J’ai donc pris l’avion un vendredi soir pour débarquer à Austin, au Texas. Après une rasade d’air chaud, je me suis acheté un vélo à la boutique de Lance Armstrong. On avait volé le mien quelques mois plus tôt, et mon deuil achevait de s’émietter. J’avais lu quelque part qu’un café s’adossait à la boutique : raison de plus pour y faire un détour. Avant de pédaler dans le désert, je voulais découvrir Austin, cette ombre douceâtre dans le gros Texas ensoleillé. J’ai couché à l’auberge de jeunesse, et j’y ai rencontré des voyageurs aux yeux brillants. Le lendemain, j’ai marché à travers la ville, et m’y suis senti bien, après seulement douze secondes, grâce à la musique, aux cafés et à cette atmosphère de « laisser-vivre » qui transpire de partout. Et toujours la musique, qui semble sortir des craques de trottoir. Avec ses nombreux festivals, la chaleureuse capitale du Texas est incontournable pour les mélomanes de ce monde. Le plus ironique au sujet de cette bulle apaisante, c’est qu’elle se trouve dans un gros État bête, reconnu pour son conservatisme. Nombreux l’ont qualifiée d’enclave libérale. Peu importe l’allégeance politique, le marcheur et le cycliste tombent sous le charme de cette ville. Austin, ça fait quatre ans. Elle s’est blottie confortablement dans mes souvenirs. Une petite douceur que je dépoussière quand la grisaille du quotidien se dissout dans ma tête. Lors de mon passage, il n’y avait pas de magazines de rue. Du moins,

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mes recherches pour dénicher un camelot avaient été infructueuses. Mais depuis 2011, le Challenger a décollé. Je l’ai attrapé au vol quelque part sur le web. Dans l’édition de décembre dernier, un texte tout simple a retenu mon attention : une chronique qui dépeint l’arrivée d’un nouveau sans-abri dans les rues d’Austin comme un événement heureux, magique, espéré depuis longtemps. Usant d’une ironie décapante, le chroniqueur y décrit la joie et la satisfaction de la population d’Austin face à ce nouvel « arrivage ». Leur ville a été choisie pour accueillir « un autre sans-abri, une autre bouche à nourrir, diabétique en plus ! » Il poursuit en décrivant la scène du débarquement de l’individu sur les trottoirs de la ville, où un véhicule des services correctionnels le laisse « sur un sentier de pétales de roses avec les échos des bouteilles de champagne qui expulsent leur bouchon en arrière-plan ». Les hommes ne peuvent contenir leurs larmes et les femmes, déchaînées, crient. Quand j’ai eu terminé la lecture du texte, je me suis senti tout drôle d’avoir laissé ma face arborer subtilement quelques sourires, entre deux phrases corrosives. Puis, j’ai constaté la force de l’ironie. Parfois, l’ironie parle plus fort que les statistiques. Et si on la mélange avec des chiffres ? Selon des données de 2006 dénichées dans un rapport sur l’itinérance au Québec, on estimait qu’au plus dur de l’hiver, 250 personnes avaient besoin d’être logées à Québec. J’ai comme l’impression que ce nombre a augmenté. Bienvenue à tous et à toutes ! MATHIEU MEUNIER

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Ressources Aide sociale ADDS Association pour la défense des droits sociaux 301, rue Carillon, Québec Tél. : 418 525-4983 Relais d’Espérance Aider toute personne isolée et en mal de vivre à retrouver la confiance, l’espoir et la joie de vivre 1001, 4e Avenue, Québec Tél. : 418 522-3301 Rendez-vous Centre-ville Centre de jour 550, rue Saint-Joseph, Québec (sous-sol de l'église Saint-Roch, porte verte) Tél. : 418 529-2222 Rendez-vous Centre-ville Centre de jour 401, rue Saint-Paul Québec Tél. : 418 694-9316 maison@lauberiviere.org Aide aux femmes Centre femmes d'aujourd'hui Améliorer les conditions de vie des femmes 1008, rue Mainguy, Québec Tél. : 418 651-4280 c.f.a@oricom.ca www.ctech.ca/cfa

Tel-Aide Québec Tél. : 418 686-2433 www.telaide.qc.ca Tel-Jeunes Tél. : 1 800 263-2266 http://teljeunes.com Entraide Carrefour d’animation et de participation à un monde ouvert (CAPMO) 435, rue du Roi, Québec Tél. : 418 525-6187 poste 221 carrefour@capmo.org Fraternité de l'Épi 481, rue de La Salle Québec Tél. : 418 529-0007 Hébergement Maison de Lauberivière Pour hommes et femmes démunis ou itinérants 401, rue Saint-Paul, Québec Tél. : 418 694-9316 maison@lauberiviere.org www.lauberiviere.org L'Armée du Salut et La maison Charlotte Hébergement hommes et femmes 14, côte du Palais, Québec Tél. : 418 692-3956

Centre Naître ou ne pas Naître Écoute et aide matérielle pour les femmes enceintes 1379, chemin Sainte-Foy, Québec Tél. : 418 683-8799 centre.naitre@videotron.ca www.centrenaitre.org

Maison Revivre Hébergement pour hommes 261, rue Saint-Vallier Ouest, Québec Tél. : 418 523-4343 info@maisonrevivre.org www.maisonrevivre.ca/portail

Violence Info Sensibilisation, information et intervention pour contrer la violence conjugale et la maltraitance envers les aînées. CSP du Temple, Beauport Tél. : 418 667-8770 violenceinfo@bellnet.ca

SQUAT Basse-Ville Hébergement temporaire pour les 12 à 17 ans 595, rue Saint-François Est Québec Tél. : 418 521-4483 info@squatbv.com www.squatbv.com

Alphabétisation

Gîte Jeunesse Hébergement temporaire pour garçons de 12 à 17ans Résidence de Beauport 2706, av. Pierre Roy, Québec Tél. : 418 666-3225 Résidence de Ste-Foy 3364, rue Rochambau, Québec Tél. : 418 652-9990

Alphabeille Vanier 235, rue Beaucage, Québec Tél. : 418 527-8267 alphabeille@qc.aira.com Alpha Stoneham 926, rue Jacques-Bédard, Québec Tél. : 418 841-1042 alphastoneham@ccapcable.com www.alphastoneham.com Atout-lire 266, rue Saint-Vallier Ouest, Québec Tél. : 418 524-9353 alpha@atoutlire.ca http://atoutlire.ca/accueil Lis-moi tout Limoilou 798, 12e Rue, Québec Tél. : 418 647-0159 lismoitout@qc.aira.com La Marée des mots 3365, chemin Royal, Québec Tél. : 418 667-1985 Détresse psychologique Centre de crise de Québec Tél. : 418-688-4240 ecrivez-nous@centredecrise.com www.centredecrise.com Centre de prévention du suicide 8180, boul. Pierre-Bertrand Nord, Québec Tél. : 418 683-4588 www.cpsquebec.ca Communautés solidaires 5, rue du Temple, Québec Tél. : 418 666-2200 info@communautessolidaires.com www.communautessolidaires.com

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Réinsertion sociale Maison Dauphine Pour les jeunes de 12 à 24 ans 14, rue Dauphine, Québec Tél. : 418 694-9616 www.maisondauphine.org YWCA Hébergement et programme de prévention de l’itinérance et de réinsertion sociale pour femmes (La Grande Marelle) 855, av. Holland, Québec Tél. : 418 683-2155 info@ywcaquebec.qc.ca www.ywcaquebec.qc.ca Prostitution La Maison de Marthe 75, boul. Charest Est, CP 55004 Québec (Québec) G1K 9A4 Tél. : 418 523-1798 info@maisondemarthe.com www.maisondemarthe.com P.I.P.Q. Projet intervention prostitution Québec 535, av. Des Oblats, Québec Tél. : 418 641.0168 pipq@qc.aira.com Soupe populaire Café rencontre Centre-Ville Déjeuner et dîner 796, rue St-Joseph Est, Québec Tél. : 418 640-0915 info@caferencontre.org hwww.caferencontre.org

Maison Lauberivière (Souper) 401, rue Saint-Paul, Québec Tél. : 418 694-9316 centredejour@lauberiviere.org Soupe populaire Maison Mère Mallet (Dîner) 745, Honoré-Mercier, Québec Tél. : 418 692-1762 Santé mentale La Boussole Aide aux proches d’une personne atteinte de maladie mentale 302, 3e Avenue, Québec Tél. : 418 523-1502 laboussole@bellnet.ca hwww.laboussole.ca Centre Communautaire l'Amitié Milieu de vie 59, rue Notre-Dame-des-Anges, Québec Tél. : 418 522-5719 info@centrecommunautairelamitie.com www.centrecommunautairelamitie.com Centre d’Entraide Émotions 3360, de La Pérade, suite 200, Québec Tél. : 418 682-6070 emotions@qc.aira.com www.entraide-emotions.org La Maison l'Éclaircie Troubles alimentaires 2860, rue Montreuil, Québec Tél. : 418 650-1076 info@maisoneclaircie.qc.ca www.maisoneclaircie.qc.ca Le Pavois 2380, avenue du Mont-Thabor Québec (Québec) G1J 3W7 Tél. : 418 627-9779 Téléc. : 418 627-2157 Ocean Intervention en milieu Tél. : 418 522-3352 Intervention téléphonique Tél. : 418 522-3283 Parents-Espoir Soutien et accompagnement des parents 363, de la Couronne, bureau 410 Québec (Québec) G1K 6E9 Tél. :418-522-7167 Service d'Entraide l'Espoir 125, rue Racine, Québec Tél. : 418 842-9344 aide@service-dentraide-espoir.org www.service-dentraide-espoir.org Relais La Chaumine 850, 3e Avenue, Québec Tél. : 418 529-4064 violenceinfo@bellnet.ca www.relaislachaumine.org TOXICOMANIE Al-Anon et Alateen Alcoolisme Tél. : 418-990-2666 www.al-anon-quebec-est.org Amicale AlfA de Québec 815, av. Joffre, Québec Tél. : 418647-1673 amicalealfa@sprint.ca Point de Repère 530, rue Saint-Joseph Est, Québec Tél. : 418 648-8042 www.pointdereperes.com VIH-SIDA MIELS-Québec Mouvement d’information et d’entraide dans la lutte contre le VIH-sida 625, avenue Chouinard, Québec Tél. : 418 649-1720 Ligne Sida aide : 418 649-0788 miels@miels.org www.miels.org

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MERCI À TOUS NOS PRÉCIEUX PARTENAIRES ! PARTENAIRES OR Centraide Lunetterie New Look Agnès Maltais, Ministre responsable de la Condition féminine PARTENAIRES ARGENT Annick Papillon, Députée de Québec La Boîte à pain La Carotte Joyeuse La centrale syndicale de Québec CKRL FM 89,1 Érico, Choco-Musée Les impressions Stampa Services 211

Morin, Desrochers, Beaulieu Naïmi pharmacien Quincaillerie St-Jean-Baptiste PARTENAIRES INCONDITIONNELS (depuis plus de 5 ans!) Le Bal du Lézard L’Inter-Marché Saint-Jean Maison Revivre Michel Yacoub PARTENAIRES AD VITAM AETERNAM Claude Gallichan, chiropraticien Yves Boissinot

PARTENAIRES BRONZE Audiothèque de Québec Épicerie Européenne Maison J.A. Moisan

DES MOTS POUR JOUER a —> 9 : Le Belém, Portugal b —> 1 : Le Château de Bellevue, Allemagne c —> 10 : Downing Street, Royaume Uni d —> 5 : L’Élysée, France e —> 7 : Le Kantei, Japon f —> 4 : La Maison Blanche, États-Unis g —> 3 : La Moneda, Chili h —> 8 : Los Pinos, Mexique i —> 6 : Le Quirinal, Italie j —> 2 : Sussex Drive, Canada RÉPONSES DES MOTS POUR PARLER 1. « Rater (ou manquer) le coche » signifie : laisser passer une occasion de faire une chose utile ou avantageuse. Le coche (mot qui date du 16e siècle) désignait autrefois une voiture de transport des voyageurs, tirée par des chevaux et conduite par un cocher. Rater le coche voulait dire arriver en retard, rater le départ de la voiture, comme on dirait aujourd’hui manquer le train ou le bus. 2. A. Stentor est le crieur de l’armée des Grecs lors de la guerre de Troie; il est brièvement mentionné dans l’Iliade. 3. C. Tant mieux. 4. Une préquelle est une œuvre (littéraire, télévisuelle ou autre) dont l’histoire précède une œuvre antérieurement créée. La préquelle a une certaine parenté avec le flash back mais elle constitue une œuvre en soi. On dit aussi : un préquel ou un prequel. 5. Il s’agit d’un plongeon huard, un des oiseaux aquatiques de la famille des plongeons. Les plongeons capturent des poissons en

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nageant calmement à la surface de l’eau et s’enfoncent soudainement sous l’eau; cette habitude leur a valu le nom de « plongeons ». 6. Ce mot-valise vient de « poor » (pauvre) et de « geois » (bourgeois). 7. A. Un cheval noir luisant.

5- Tout ce qui sert à la parure des femmes (ROSAUT). Qualifie un emploi qui ne dure qu’une partie de l’année. Au figuré, une personne cupide et impitoyable en affaires.

8. Faux. Certes, les mots « pléthore » et « panoplie » expriment

lesquideux une idée d’abondance, de grande quantité, de à 6-tous Période suit l’accouchement, pendant laquelle la maman refait ses forces. Glace légère base de jus de fruit.Toutefois, Herbe à Nicot. grand nombre. le premier comporte une nuance péjo: une quantité tropdegrande, surabondance, nombre 7-rative Femmes célibataires. Le préfet disciplineune dans un ordre professionnel.un Petit de la chèvre. excessif.

8- D’après la Bible, s’oppose au bon grain. Ancien quotidien de Québec. Vérité évidente et banale (MUSETRI)..

9. A. Le palissandre est un bois exotique, dur et odorant, d’une

9-couleur Réponseviolacée. des Québécois aux référendums. Qui est parvenu à l’âge de 90 ans. Petite échelle d’intérieur pliante.

10.Mélange L’adresse est mentionnée au dos (ouTamis. au verso) du formulaire. 10incohérent et disparate (SISIGLANMOD). Nom populaire de la marmotte. LES MOTS CROISÉS

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Chronique

ALINE

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LUTTE CONTRE L’ITINÉRANCE : POUR UNE VISION À LONG TERME Les organismes communautaires du Québec vont bénéficier d’une année de répit dans le dossier du financement SPLI. Le programme fédéral sera reconduit sur une année, en attendant que ne soit entérinée la prochaine entente Canada-Québec portant sur le sujet. Mais les tables de concertation, elles, subiront des compressions. À QUOI PEUT BIEN SERVIR UNE TABLE DE CONCERTATION ? L’itinérance est un enjeu complexe. Plusieurs organismes offrant différents services ont ouvert leurs portes afin de répondre aux divers défis posés par les problèmes liés à ce phénomène. Ainsi sont nés des organismes venant en aide aux jeunes, aux femmes, aux hommes, aux personnes âgées, etc. Bien que l’enjeu soit le même, les réalités sont très diverses, et il est vite apparu à ceux et celles qui œuvraient auprès de ces différents publics qu’il était pertinent de se réunir pour réfléchir à des moyens d’action commune et à long terme. Les tables de concertation servent donc à mettre en commun l’expertise du milieu tout en permettant à terme de s’accorder sur un projet commun. Les tables de concertation nomment les enjeux auprès des instances locales et gouvernementales. Ayant une vue d’ensemble sur la situation, elles jouent le rôle de représentation auprès des décideurs, rôle qui se veut crucial. Bien que les organismes en services directs aient pu conserver l’octroi de leur financement durant encore une année, il est curieux que les tables de concertation, interlocuteurs clés permettant de cerner les enjeux liés à l’itinérance, soient écartées de la SPLI.

réponses, ce que le RAIIQ, en partenariat avec le Réseau SOLIDARITÉ Itinérance du Québec (RSIQ), n’a eu de cesse de revendiquer depuis 2013. STRATÉGIE DE L’IMMÉDIAT Il est normal et souhaitable que les organismes offrant des services directs, c’est-à-dire de l’intervention auprès des personnes, continuent de recevoir du financement de la part d’Ottawa. Mais les services offerts répondent très souvent à des besoins pressants à court ou moyen terme, pour des personnes qui se retrouvent dans des logiques de survie. Il serait important que l’on sorte de l’urgence pour enfin réfléchir et offrir des solutions durables aux personnes itinérantes et à risque. C’est dans cette optique que les groupes communautaires de différentes régions de la province se sont réunis pour mettre sur pied des structures capables de porter leurs revendications communes auprès des instances décisionnelles. Il ne reste plus qu’à espérer que l’Entente Canada-Québec soit entérinée dans l’intérêt des populations itinérantes et à risque de la province, et en faveur de solutions durables. ALINE ESSOMBÉ

MISE EN CONTEXTE Depuis 1999, le gouvernement fédéral avait mis en place un programme de soutien aux organismes communautaires qui luttent d’une manière ou d’une autre contre le phénomène de l’itinérance au pays. Celui-ci a été modifié au fil des ans pour devenir ce que l’on nomme aujourd’hui la SPLI, la Stratégie de Partenariat de Lutte contre l’Itinérance, dont le but était de soutenir toutes les initiatives qui visaient à aider les personnes itinérantes au pays. La Stratégie était particulière car elle permettait à chaque région de définir elle-même ses propres besoins, et de demander un soutien en conséquence. Cependant, en mars 2013, le gouvernement fédéral a rendu public son nouveau budget 2014-2019, en spécifiant que la lutte à l’itinérance se jouera désormais selon de nouvelles stratégies. D’abord, et bien que reconduite, le budget alloué à la SPLI a été réduit en plus d’être orienté vers le Logement d’abord. Or, l’itinérance est bien plus complexe et nécessite une diversité de

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