Le français dans le monde N°428

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REVUE DE LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES PROFESSEURS DE FRANÇAIS

// MÉTIER //

N°428 mars-avril 2020

6 fiches pédagogiques avec ce numéro

Au Japon, Montessori pour le français Une bibliothèque numérique testée à Los Angeles

// ÉPOQUE //

Maryam Madjidi : autrice et professeure de FLE venue d’Iran

// MÉMO //

L’autofiction d’un journaliste réfugié syrien

// LANGUE //

Une francophone brésilienne loue la mémoire de Saint-Exupéry

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le français dans le monde

N°427 jANvIER-fÉvRIER 2020

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N°427 jANvIER-fÉvRIER 2020

le français dans le monde

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6 fiches pédagogiques avec ce numéro

N°427 jANvIER-fÉvRIER 2020

6 fiches pédagogiques avec ce numéro

6 fiches pédagogiques avec ce numéro // ÉPOQUE //

// LANGUE //

Un tour du monde du français en quinze pays

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numéro 428

10 Que vous soyez abonné(e) à la version numérique ou papier+ numérique

Suppléments en ligne et PDF des numéros n L’espace « Suppléments en ligne » offre des prolongements aux articles parus dans la revue : l’accès aux clips des artistes présentés dans la rubrique « À écouter » et aux bandes-annonces des films de la rubrique « À voir », des informations complémentaires aux articles parus dans la revue, des prolongements pédagogiques au dossier… Téléchargez le PDF complet des numéros de la revue depuis 2016.

GRAND CHÂTELLERAULT : LE VRAI VISAGE D’UN TERRITOIRE RURAL ÉPOQUE

08. Portrait

Maryam Madjidi, à double titre

10. Région

Grand Châtellerault : le vrai visage d’un territoire rural

Créez en quatre clics votre espace en ligne sur www.fdlm.org pour accéder aux suppléments pédagogiques Pour profiter de fiches pédagogiques, des documents sonores et de leur transcription ainsi que des suppléments en ligne, ne perdez pas une minute pour créer votre Espace abonné sur le site du Français dans le monde.

RÉGION

12. Tendance Art à domicile

13. Sport

Fiches pédagogiques n Les fiches pédagogiques en téléchargement : des démarches d’exploitation d’articles parus dans Le français dans le monde. n Cliquez sur le picto « fiche pédagogique » sur les pages lors de la lecture pour télécharger la fiche d’exploitation de l’article en question. n Rendez-vous directement sur les pages « À écouter » et « À voir » : cliquez sur le nom des artistes ou des œuvres pour visionner les vidéos ou les bandes annonces des films. n Cliquez sur les liens ci-dessous pour télécharger les reportages audio et leur transcription.

La CONFEJES, au service du sport francophone

14. Idées

Hélène L’Heuillet : « Conjuguer le temps à la première personne »

16. Lieu

Les tiers-lieux ont le vent en poupe

17. Exposition

Soulages : l’œuvre au noir

LANGUE

18. Entretien

Gérard Cartier : « Combien de perroquets parmi nos anglomanes ? »

20. Politique linguistique Singapour, Babel asiatique

22. Étonnants francophones

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« “Zepperi”, un conte magique »

23. Mot à mot

Dites-moi professeur

DES FICHES PÉDAGOGIQUES POUR EXPLOITER LES ARTICLES - Région : Grand Châtellerault : le vrai visage d’un territoire rural - Question d’écritures : Autour d’un souvenir - Mnémo : L’incroyable histoire du pluriel des noms composés

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MÉTIER

LES REPORTAGES AUDIO - Francophonie : Le français s’africanise - Culture : Des danseurs hip-hop des Comores - Tendance : Le serpent, animal domestique à la mode - Expression : « Être fier comme Artaban »

28. Réseaux 30. Question d’écritures Autour d’un souvenir

32. Enquête

Les petits Alsaciens disent « Hallo » à l’allemand © Shutterstock

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34. Focus

2000-2020 : des mots qui ont changé la didactique Le français dans le monde | n° 428 | mars-avril 2020


Le français dans le monde sur Internet : http://www.fdlm.org

édito

36. Expérience

« J’ai français ! » : Montessori pour l’apprentissage du français aux enfants

MÉMO

38. FLE en France

40. Astuces de classe

64. À voir 66. À lire 70. À écouter

42. Tribune

INTERLUDES

Organiser une journée professionnelle Quelles sont vos techniques pour motiver les adolescents en classe ? La gestion de l’hétérogénéité

44. Zoom

06. Graphe Langue

SONDO, une bibliothèque numérique pour tous ?

24. Poésie

46. Innovation

50. En scène !

TV5Monde lance une application pour apprendre le français

48. Ressources

Langue monde

Concours de poésie « Ma langue française » Ouf ! Quel cauchemar !

62. BD

Les Nœils : « Le bureau des plaintes »

DOSSIER

ENSEIGNER LES FRANCOPHONIES

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« Avec la francophonie, le travail des enseignants est plus passionnant »................................................................... 54 En Louisiane, le français revit grâce aux écoles....................... 56 Connaissance de la francophonie versus enseignement de la francophonie........................................... 58 Cours de francophonie appliquée .......................................... 60

OUTILS 72. Jeux

La ruche des nasales

73. Mnémo

L’incroyable histoire du pluriel des noms composés

74. Quiz

Un arc-en-ciel en français

75. Test

Complément sur les compléments

E

n 50 ans d’existence, la Francophonie institutionnelle aura réuni de nombreux sommets, mené des centaines de projets, soutenu des milliers de manifestations dans les domaines linguistiques, éducatifs ou culturels. Seule organisation politique internationale fondée sur une communauté linguistique, la Francophonie tente également de peser sur l’ordre mondial en matière de droits fondamentaux, comme le respect des femmes ou la promotion de la jeunesse. Malgré ces nombreuses et souvent fructueuses actions, cette Francophonie peinent à infuser dans les francophonies enseignées en classe de français langue étrangère. Langue française, cultures et civilisations des pays francophones autres que la France demeurent à la marge des cours de français. Pourtant, la langue française s’est décentrée, la norme parisienne ne règne plus sur le lexique du monde entier et de nombreuses sociétés sur tous les continents déclinent au quotidien et selon leurs besoins leurs variétés du français. Le français mérite un enseignement métissé, à l’image de sa pluralité. n

Sébastien Langevin

slangevin@fdlm.org

77. Fiche pédagogique

Langue française et francophonies

n° 3 - mars-avril 2020

revUe de la fÉdÉration internationale des professeUrs de français

dU

79. Fiche pédagogique

Ce numéro du Français dans le monde est livré avec le n° 3 de Francophonies du monde, avec un dossier spécial pour les 50 ans de la Francophonie.

Prochain arrêt : Vacances !

81. Fiche pédagogique Jouer avec l’alphabet

DOSSIER SPÉCIAL

50 ans de francophonie

l’avenir en action focUs actU

entretien

pÉdagogie

Le Musée du quai Branly fête ses vingt ans

Karim Miské filme les décolonisations

À la découverte de la Francophonie

Le français dans le monde, revue de la Fédération internationale des professeurs de français - www.fipf.org, éditée par CLE International – 92, avenue de France – 75013 Paris – Tél. : +33 (0) 1 72 36 30 67 Fax : +33 (0) 1 45 87 43 18 • Service abonnements : +33 (0) 1 40 94 22 22 / Fax : +33 (0) 1 40 94 22 32 • Directeur de la publication Jean-Marc Defays (FIPF) • Rédacteur en chef Sébastien Langevin Conseiller de la rédaction Jacques Pécheur • Secrétaire général de la rédaction Clément Balta cbalta@fdlm.org • Relations commerciales Sophie Ferrand sferrand@fdlm.org • Conception graphique réalisation miz’enpage - www.mizenpage.com Commission paritaire : 0422T81661. 59e année. Imprimé par Estimprim (93210) • Comité de rédaction Michel Boiron, Célestine Bianchetti, Franck Desroches, Juliette Salabert, Isabelle Gruca, Chantal Parpette, Gérard Ribot. Conseil d’orientation sous la présidence d’honneur de Mme Louise Mushikiwabo, Secrétaire générale de la Francophonie : Jean-Marc Defays (FIPF), Paul de Sinety (DGLFLF), Franck Desroches (Alliance française), Cynthia Eid (FIPF), Alexandre Wolff (OIF), Dominique Depriester (MEAE), Marc Boisson (FIPF), Évelyne Pâquier (TV5Monde), Nadine Prost (MEN), Doina Spita (FIPF), Lidwien Van Dixhoorn (RFI), Jean-Luc Wollensack (CLE International).

Le français dans le monde | n° 428 | mars-avril 2020

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ÉPOQUE | portrait Écrivain et enseignante de FLE, Maryam Madjidi est née à Téhéran et arrivée en France à l’âge de six ans. Elle a livré dans Marx et la poupée, premier roman grandement plébiscité, son expérience d’exilée. Rencontre avec une jeune femme qui cultive un entre-deux généreux et sans complexe. PAR SOPHIE PATOIS

MARYAM MADJIDI arge sourire, poignée de mains ferme et franche, parole directe, Maryam Madjidi fait partie de cette catégorie de personnes à l’énergie communicative, voire contagieuse ! La rencontre est immédiate et de plain-pied, tout comme la lecture du récit autobiographique qui l’a fait connaître, Marx et la poupée, livre au titre à la fois intriguant et percutant, distingué par le prix Goncourt du premier roman et le prix Ouest-France Étonnants Voyageurs en 2017. Elle y raconte dans un style qui fait

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mouche l’engagement politique de ses parents à Téhéran dans les années 1980 et son parcours d’exilée iranienne arrivée en France à l’âge de six ans. Plus de deux ans après la publication de ce livre retentissant, Maryam Madjidi semble plus que jamais ancrée dans le monde. « Je ne peux pas dire le contraire, concède-t-elle aujourd’hui, ce serait totalement hypocrite. C’est un grand cadeau de la vie que le succès de ce premier roman ! Cela m’a donné confiance en moi, en mon écriture. Cela m’a permis de voir que ce que j’avais à dire avait touché

beaucoup de personnes. Et bien sûr cela m’encourage, me donne envie de continuer. »

La découverte du FLE

Continuer à écrire certes, mais à enseigner aussi ! Car cette FrancoIranienne qui peut à présent revendiquer sans hésitation une double nationalité et une double culture, voue aussi une partie de sa vie à l’éducation. Elle enseigne le français à des mineurs isolés dans un centre situé à Taverny dans le Val-d’Oise. « C’est un lieu absolument magique, s’enthousiasme la jeune femme, un

grand château situé en haut d’une colline, entouré d’une forêt, acheté en 2002 par la Croix Rouge pour ouvrir un des premiers centres d’hébergement pour mineurs non accompagnés. J’adore ce que je fais, je ne pourrais pas changer de boulot ! J’aime beaucoup le social. » Reconnaissante à l’équipe pédagogique avec qui elle travaille de lui accorder un emploi du temps adapté à sa double activité, Maryam raconte sans se faire prier sa vocation. « La découverte du FLE a été quelque chose de très beau dans ma vie, souligne-t-elle. Je vivais à Paris, j’étais

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© Greg Augendre Cambon

À DOUBLE TITRE L


DR

Maryam Madjidi à l’Institut français d’Espagne à Saragosse, le 8 novembre 2018.

prof de français remplaçante dans des collèges et lycées. Mais je commençais un peu à tourner en rond… À l’été 2011, lors d’un voyage en Chine, j’ai eu un vrai déclic. Là-bas, je me sentais chez moi sans savoir pourquoi ! Sur un coup de tête, dans un acte très romantique d’affirmation absolue de ma liberté, j’ai décidé de ne pas prendre l’avion du retour ! Je suis restée quatre ans. » Un coup de dés plus chanceux que hasardeux puisqu’à la suite de cette décision, elle s’inscrit par correspondance au diplôme de FLE de Paris III (Sorbonne Nouvelle) pour compléter sa formation initiale (master de Lettres modernes) et commence conjointement à donner des cours à l’Alliance française de Pékin. « Les planètes étaient alignées, puisque j’ai alors rencontré une amie qui m’est toujours très chère et qui m’a proposé une chambre à louer chez elle. Quant à mes étu-

diants ils étaient mes “cobayes” : je pouvais mettre en pratique avec eux toute la théorie de mes leçons par correspondance. Par exemple, pour un module sur l’analyse d’images, j’enregistrais leurs réactions (en leur demandant leur accord bien sûr !) et à partir des résultats, je réalisais un devoir. Mes profs étaient ravis et je n’avais pas l’impression d’étudier. C’était pratiquement une formation en alternance ! J’ai rempilé ensuite sur une année de Master car j’avais adoré cette formation. Cette façon d’appréhender, d’étudier le rapport à la langue française, comment on se l’approprie, cela faisait sens pour moi ! »

Il était une fois… le conte est bon !

Et comme dans les contes de fées, semble-t-il, un bonheur n’arrive jamais seul… Maryam, qui confesse écrire poésies et journaux intimes

MARYAM MADJIDI EN 6 DATES

1980 : Naissance à Téhéran (Iran) 1986 : Arrivée en France avec ses parents 2002-2003 : Premier retour au pays natal. « Retrouve » et apprend sa langue maternelle, le persan. 2011 : Devient prof de français à Pékin 2017 : Premier roman, Marx et la poupée (éditions Nouvel Attila) 2019 : Je m’appelle Maryam, livre pour enfants (L’école des loisirs)

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« Je n’ai aucune envie d’appartenir à une seule langue ou une seule culture. Cet entre-deux me plaît. D’aucun lieu et de tous les espaces à la fois, je suis libre !  » depuis qu’elle sait lire, entame la rédaction de Marx et la poupée. « Mon histoire émergeait à travers cette formation et ce travail d’enseignante. Et ce n’est certainement pas un hasard, analyse-t-elle à présent, si j’ai commencé à écrire le roman à Pékin. » Une belle expérience qui lui permet d’exprimer pleinement son identité plurielle. « Je ne suis pas du tout dans la nostalgie, ni dans le désir de faire partie d’un seul et unique espace, insiste-t-elle. Je n’ai aucune envie d’appartenir à une seule langue ou une seule culture. Cet entre-deux me plaît. D’aucun lieu et de tous les espaces à la fois, je suis libre ! Je peux avoir un regard critique sur l’Iran et sur la France car j’aime ces deux pays. » Femme de conviction et d’engagement, Maryam Madjidi apprécie également, au-delà des mots et des histoires, d’emporter l’adhésion, séduire, convaincre… « Je crois que j’ai choisi l’enseignement pour ça, la transmission orale… Un bon prof capte l’attention de ses élèves par la parole. La littérature aussi se transmet oralement, on commence par

nous raconter des histoires. Comment peut-on oublier en grandissant le plaisir du texte parlé ? » C’est d’ailleurs par le « Il était une fois » du conte que démarre Marx et la poupée, pour raconter avec humour et tendresse le sort des déracinés qui ont dû un jour tout abandonner – donner sa poupée comme l’a fait la jeune Maryam ou, à l’image de ses parents communistes, enterrer Le Capital, ce qui explique ce titre intrigant au premier abord. Humour donc, et autodérision comme en témoignent ces exemples de têtes de chapitre : « Comment peut-on être persane ? », « À la recherche de la langue perdue », « La lutte des langues », « Comment peut-on être français ? »… Ironie de l’histoire, alors que le livre a été traduit dans une quinzaine de langues, il n’a pas encore franchi les frontières de l’Iran. « Au départ, cela m’a blessée, avoue Maryam Madjidi. J’avais l’impression que ma langue maternelle me refusait, me rejetait. Mais cela est dû surtout aux conditions économiques et politiques actuelles. Cela se fera un jour, je le sens. » Un passage obligé aussi pour réconcilier les deux mondes et les deux langues qui l’habitent ? « Je parle persan mais je l’écris et le lis très mal. Le rapport que j’ai à cette langue, précise-t-elle, c’est le rapport que j’ai à ma famille, à mes parents, à l’Iran, c’est très intime et sous-terrain. Le persan, c’est ce qui me permet d’établir un lien entre moi et moi, alors que le français, c’est la langue de l’extérieur, de la communication, de l’écriture. » Après une consécration manifeste qu’elle qualifie « comme tous les succès dans la vie, à double tranchant », et la publication récente de Je m’appelle Maryam, version pour enfants de son premier opus, l’écrivain travaille son numéro 2… « Puisqu’il est attendu, il y a plus de risque qu’il y ait déception. Alors, accompagnée de mon éditeur, je me dis : autant y aller ! J’écris un roman qui retracera mes années adolescentes en banlieue parisienne, en me faisant plaisir, en m’éclatant ! » n

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LANGUE | ÉTONNANTS FRANCOPHONES À chaque numéro, le témoignage d’une personnalité marquante de l’émission de TV5Monde présentée par Ivan Kabacoff. Aujourd’hui, Mônica Cristina Corrêa, enseignante de français au Brésil.

« “ZEPERRI”, UN CONTE MAGIQUE » C’était l’été 2004-2005 au Brésil (cette saison commençant en décembre et finissant en mars). Avec ma sœur, on voulait passer quelques jours à Florianópolis, une très jolie ville dans le sud du pays. En dépit d’une importante immigration italienne et allemande au début du xxe siècle, on y sent l’influence portugaise puisque ce sont les Açoriens qui l’ont d’abord colonisée. Nous avions réservé dans une auberge, mais à notre arrivée, celle-ci est complète : nos réservations avaient été annulées ! Il s’ensuivit une discussion (assez chaude) avec la jeune patronne, mais son mari nous a apporté la solution : « La charmante auberge Zeperri vous accueillera », nous a-t-il assuré. Nous avons hésité, car ce n’était pas dans un quartier très branché de « Floripa », mais on n’avait pas le choix. La sonorité de « perri », invraisemblable en portugais, m’a fait immédiatement penser à la langue française. Le patron me l’a confirmé : « Il s’agit du nom d’un aviateur français des années 1920 qui s’est posé ici. On vous expliquera. » Finalement, c’était un chalet charmant au bord d’une plage de sable blanc : une sorte de paradis. Je n’ai pas attendu pour revenir à la charge auprès du patron : « Vous êtes Monsieur Zé ? »

« Les faits de cette histoire étaient éparpillés comme les morceaux d’une ancienne mosaïque » RETROUVEZ DOMINIQUE DANS DESTINATION FRANCOPHONIE

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Sur le tournage de Destination Francophonie.

« Non, me répond-il, je m’appelle Gerson. Zeperri était un pilote français. » J’étais jusque-là persuadée que le nom de son établissement était une composition de « Zé » (surnom qu’on donne à tous les José) et de « Perri »… J’ai insisté : « Mais s’il était français, il ne s’appellerait pas Zé… Je suis professeure de français et je vous assure qu’il n’aurait pas ce prénom. » « Si. D’ailleurs, c’est l’auteur du Petit Prince ! » Je n’en revenais pas… Je lui ai balbutié : « Antoine de Saint-Exupéry ? » « Lui-même, madame : Zeperri », m’a-t-il dit avec une pointe d’orgueil.

Une présence insondable

C’est alors là que moi, qui avais fait des études de français à l’Université de São Paulo, ma ville natale, qui avais fait un doctorat en littérature comparée Brésil-France, moi à qui on avait attribué deux bourses de traduction (pour André Pieyre de Mandiargues en 1998 et George Sand en 2004), qui avais interviewé plusieurs auteurs fran-

cophones (dont Tahar Ben Jelloun, Tzvetan Todorov, Jean-Christophe Rufin, etc.), qui avais créé pour le journal O Estado de S. Paulo un site Internet bilingue en 2000 : « Notre Site Français », c’est là que j’ai fait face à un aspect insondable de la présence française au Brésil… J’avais lu, certes, Saint-Exupéry et je savais bien qu’il était aviateur. Mais je n’aurais jamais pu imaginer qu’il avait mis les pieds sur la lointaine Florianópolis… Le lendemain, j’interrogeais le pêcheur local dont le père se serait lié d’amitié avec « Zeperri ». Malgré les témoignages locaux, les faits de cette histoire étaient éparpillés comme les morceaux d’une ancienne mosaïque. Les relations franco-brésiliennes étant toujours le sujet de mes recherches, « Zeperri » me semblait une espèce de conte magique. Il fallait le sortir des oubliettes. J’habite désormais à Florianópolis depuis 2008. J’y ai construit ma maison, grâce à la « rencontre » avec Zeperri. Dès 2005 j’avais pris contact

avec les héritiers de Saint-Exupéry, dont l’amitié m’est très chère. Surtout, j’ai rencontré son neveu et filleul, M. François d’Agay, qui est venu trois fois ici. On a, avec la Fondation Antoine de Saint-Exupéry pour la Jeunesse et l’Alliance française locale, un projet d’enseignement du français à Campeche, le quartier de la ville où subsiste l’ancienne maison des pilotes. Je bataille, avec les autorités compétentes, pour que cette maison soit réaménagée. J’ai réalisé plusieurs expositions sur « Saint-Ex’ » et l’Aéropostale ; j’ai traduit six de ses œuvres pour une grande maison d’édition au Brésil ; les projets ne cessent pas. En 2014, racontant ce rêve en couleurs de l’amitié d’un Français cultivé avec un simple Brésilien qui pêchait pour gagner sa vie, j’ai écrit l’album illustré L’Aviateur et le Pêcheur, auquel a été décerné le Prix Saint-Exupéry pour la Jeunesse dans la section Francophonie. Mon changement de cap était alors couronné et ma passion pour la culture française renouvelée ! n

Le français dans le monde | n° 428 | mars-avril 2020


LANGUE | MOT À MOT LEXIQUE

BRONZER

Bernard Cerquiglini, éminent linguiste et spécialiste reconnu de la langue française, révèle et explique chaque jour sur TV5Monde une curiosité verbale : origine des mots et expressions, accords pièges et orthographes étranges… Il a aussi accepté de régaler de ses explications gourmandes la curiosité des lecteurs du Français dans le monde.

DITES-MOI

PROFESSEUR ÉTYMOLOGIE

ATOUT

On entend souvent dire de quelqu’un qu’il possède de nombreux atouts ; le mot provient du jeu de cartes. Atout s’est longtemps écrit en deux mots : la préposition à et l’indéfini tout. Le mot apparaît au xve siècle, dans la locution jouer atout, signifiant « prendre des risques », par exemple à la guerre, dans l’assaut d’une fortification. La signification en est claire : on joue à tout, c’est-à-

dire en risquant tout, afin d’emporter (ou de perdre) l’ensemble. À partir du xviie siècle, la locution s’emploie au jeu de cartes. Jouer atout signifie alors : « jouer les cartes qui permettent de rafler la mise ». On en a fabriqué par suite un substantif atout désignant la couleur qui donne la victoire au jeu : elle l’emporte sur les autres. Atout en est venu à désigner une carte de cette couleur : se défaire d’un atout.

C’est de ce dernier sens que dérivent les emplois figurés. Un atout est un facteur de succès. On parlera des atouts d’un pays : sa démographie, l’éducation de sa jeunesse, sa paix civile, son rayonnement. L’atout est une aubaine, comme une bonne carte trouvée dans son jeu. Encore faut-il en savoir user. La liste est longue des individus, des pays, qui avaient tous les atouts en mains, mais ne surent en tirer profit. n

On se rappelle ce slogan de Mai 68 : « Je ne veux pas bronzer idiot. » Il exprimait le refus de vacances grégaires et désœuvrées, un désir de culture et d’action. Dans le français d’aujourd’hui bronzer (ou se bronzer) est un verbe intransitif, synonyme de brunir : bronzer paisiblement au soleil. Penser ainsi expose à bien des déconvenues, dès lors que l’on feuillette autre chose que des magazines à l’approche de l’été. Et il ne s’agit pas de textes archaïques. Dans L’Homme révolté, Albert Camus note, au sujet des Conventionnels de 1793, que leur intention était de « bronzer la liberté ». Que faut-il comprendre ? A fortiori pour des textes du xixe siècle. Je lisais ainsi récemment dans le beau roman Germinie Lacerteux des frères Goncourt : « La vieille femme avait été bronzée par son temps et par son existence. Elle avait l’écorce du cœur dure comme le corps. » C’est une idée de dureté qui semble se dégager. Notre verbe provient en effet de bronze, cet alliage solide de cuivre et d’étain. Il signifie proprement « revêtir d’une couche de bronze » (bronzer une statue), par dérivation « enduire d’une couleur brune » (bronzer un vase), par extension « endurcir » : le malheur a bronzé son cœur, lit-on dans le dictionnaire de l’Académie française. Notre emploi actuel résulte d’une extension hégémonique du deuxième emploi. Bronzer signifie désormais (seulement) : « Acquérir une couleur brune sous l’action du soleil. » C’est sans doute dommage. Pensons à cette belle maxime de Chamfort : « Il faut que le cœur se brise ou se bronze. » Notre moraliste ne bronzait pas idiot. n

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EXPRESSION

PARADIS FISCAL Le grec ancien nommait paradeisos, terme issu de l’iranien, le parc clos où les nobles perses élevaient des bêtes sauvages ; on a ensuite désigné ainsi tout jardin d’agrément : les fameuses terrasses de Babylone étaient un paradeisos. Dans la Bible en grec, le mot désigne le

jardin d’Éden (où se rencontrent Adam et Ève) et le jardin des Bienheureux après la mort (opposé à l’Enfer). C’est au sens chrétien que le terme est passé dans le français du xe siècle. Mais très tôt il a pris des emplois figurés, qui ressourcent l’étymologie : le paradis est un endroit de félicité. On désigne ainsi un

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lieu enchanteur par sa beauté, par les plaisirs qu’il procure, pour le bonheur qu’on y éprouve : « Le vert paradis des amours enfantines », écrit Baudelaire. On comprend par suite l’expression paradis fiscal. Apparue vers 1950, elle se dit d’un pays dans lequel le régime des impôts est si favorable que certains

contribuables y placent leurs revenus pour échapper au fisc. Notons que l’évasion fiscale a souvent lieu dans des îles qu’on traite par ailleurs de paradisiaques ; la boucle est bouclée. Le délinquant fiscal aussi. Car les États, lésés, commençant à réagir. Certains paradis fiscaux risquent de devenir des enfers. n

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MÉTIER | ASTUCES DE CLASSE La motivation des apprenants est un sujet bien connu des enseignants. Quand elle est là, tout va bien, mais si elle disparaît… tout s’écroule ! En atelier j’aime comparer la motivation à un feu de cheminée. Souvent au début d’un projet ou d’une nouvelle activité la motivation/cheminée fait surgir de grandes flammes, mais si l’on oublie de souffler dessus elle s’éteint aussi vite. Avec le public adolescent, il ne suffit pas de surprendre, il faut réussir à faire perdurer l’intérêt et le désir d’apprendre, ce qui n’est pas chose aisée dans une société où tout s’accélère et se renouvelle en permanence. Heureusement, nous ne manquons pas d’imagination et de stratégies pour motiver nos apprenants (et nous motiver nousmêmes par la même occasion !). Voici les témoignages des collègues qui se sont exprimés via la page Facebook de notre revue.

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e cherche des activités qui leur font plaisir, je pense à ce que j’aime et je trouve des moyens de le faire en français. « Ce qui est beau, c’est ce qu’on aime », a dit Jean Anouilh ! J’adore la musique et je commence mon cours avec une belle chanson. J’aime jouer de la guitare, je joue quelque musique entre les activités de grammaire. J’adore le théâtre, j’organise une petite scène à la fin du cours, etc. Je pense que tous les professeurs de français doivent rester positifs et patients. On connaît tous des élèves qui parlent en français avec beaucoup d’erreurs mais qui ont un vrai plaisir à communiquer. Ces élèves-là progressent vite car ils osent. Ukkiyev Elyor, Ouzbékistan

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our motiver mes ados je faisais le « jeu du secret ». Chaque élève écrivait un secret (vrai ou inventé) sur un bout de papier, puis je mélangeais les papiers et je les gardais dans une boîte. Chaque séance en début de cours on lisait un secret, c’était devenu un rituel. Les élèves devaient deviner à qui appartient le secret. Ça les motivait car ils parlaient d’eux et apprenaient petit à petit à se dévoiler et donc à mieux se connaître. Au final on a même monté une pièce de théâtre avec tous les secrets ! Ana León, Cuba

QUELLES SONT VOS TECHNIQUES COMMENT FORMEZ-VOUS DESPOUR GRO

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omme le dit un article de la journaliste Charlene O’Hanlon : « If you can beat’ em, join’ em. » (« Si tu ne peux les battre, rejoins-les. ») Je fais donc tout mon possible pour comprendre les élèves, comprendre leurs besoins, et ensuite je m’adapte. Ils veulent utiliser le portable : je crée des activités avec lesquelles on l’utilise. Ils veulent bouger : je crée des activités à l’extérieur de la salle de classe, dans le couloir ou le jardin du lycée etc. Il faut juste ne pas avoir peur de leur énergie débordante mais bien au contraire, savoir l’utiliser le plus possible. Paris Monterrey, Mexique

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’après mon expér ience il faudra évaluer différents aspects. À l’époque, quand j’étais au Mexique ce que je faisais c’était de jouer à « la lotería ». La première fois je l’ai acheté dans un magasin et j’ai traduit les noms. Mes étudiants se sont beaucoup amusés, ils étaient très motivés. Horace Montoya Velazquez, Mexique

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tiliser des outils qu’ils aiment et maîtrisent parfois mieux que nous ;) Par exemple, créer une carte mentale avec eux en utilisant un logiciel gratuit (ex. : Canva, Prezi). Faire l’activité sur un TBI ou avec l’aide d’un simple vidéoprojecteur. Le but est de rendre la création d’une carte mentale encore plus interactive et collaborative. Les apprenants, à partir d’un thème défini, choisissent le vocabulaire ainsi que tous les éléments visuels pour créer la carte (police, fond d’écran, couleurs, etc.). Pour éviter qu’ils aient trop recours à la langue maternelle, le prof peut s’occuper de faire les manipulations sur le logiciel et bien sûr il valide les choix uniquement s’ils sont donnés en français et approuvés par la majorité de la classe ;) Les élèves doivent donc s’écouter, parler et prendre des décisions ensemble (généralement ils adorent avoir la possibilité de prendre des décisions). On peut par la suite imprimer le résultat et l’afficher dans la classe. Gaëlle Tremas, Hongrie

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e recommande d’apprendre à connaître nos apprenants. En effet, chacun d´entre eux a un caractère, un vécu, une histoire ou un contexte familial totalement différent. Les connaître et les écouter nous permet de savoir quelles stratégies utiliser et comment les motiver. Les profils d’apprentissage constituent, selon moi, un élément primordial dans la planification et l’organisation des cours. Pour ma part je travaille beaucoup avec les adolescents sur les traditions françaises mais aussi sur leurs propres traditions. Il est important, il me semble, qu’ils puissent parler d’eux, comparer leur culture et enfin l’expliquer à des francophones. Chaque année je réalise un projet sur la Toussaint (Día de muertos) sous forme de blog que nous partageons avec des élèves français. Ce projet a un énorme impact positif sur mes élèves qui travaillent avec enthousiasme, motivation et réalisent des choses exceptionnelles.

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oi, en guise de brise-glace, j’ai travaillé avec un exercice de lexique à propos du champ lexical du mot « rire ». Et tout le monde rit. À la fin du cours, je leur dis qu’on peut apprendre le français tout en s’amusant. Puis je pratique aussi la concrétisation de l’enseignement, par exemple quand on travaille sur la recette de cuisine, nous organisons une séance de dégustation, dans laquelle chaque groupe prépare un plat et présente les recettes tout en expliquant les étapes à suivre pour le préparer. C’est vraiment sympa !

Romain Juvenel, Mexique

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Blandine Ravaoarisoa, Madagascar

our moi avant tout il faut créer une certaine confiance envers l’apprenant, bien sûr lui offrir les moyens matériels nécessaires pour qu’ils puissent s’exprimer librement.

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chaque début de cours, je propose des jeux théâtraux ou des jeux brise-glace et des virelangues. C’est comme un échauffement avant de rentrer dans le vif du sujet : la séquence prévue. J’ai remarqué qu’ils sont très motivés après ces petits exercices et ils sont prêts pour attaquer la séance. Trouver des documents authentiques (clips de chansons francophones, pubs, bandes dessinées, théâtre, cinéma) qui concernent leurs centres d’intérêt pour sortir un peu du manuel. Varier les modalités de travail (sous-groupe, grand groupe, binôme, individuel) et les activités. Réaliser des projets pédagogiques, créer des jeux pour systématiser telle ou telle notion grammaticale ou lexicale. Favoriser l’autonomie et intégrer les TICE (recherches, jeux en ligne de français). Enfin, intégrer l’interculturel par exemple dans l’étape de mise en route pour introduire le thème en posant la question « Et chez vous ça se passe comment ? »… Chrystelle Lafaysse, Sénégal

Malika Abbou Azzoug, France

MOTIVER CLASSE  UPES ETLES DESADOLESCENTS BINÔMES ENEN CLASSE  ?? À RETENIR Comme le dit très bien Romain, la connaissance de notre public est le point de départ incontournable pour motiver nos apprenants. Savoir ce qu’ils aiment, ce qu’ils savent bien faire (pour mieux les valoriser) et comment ils apprennent sont des informations indispensables pour un enseignant. Nous devons également savoir transmettre avec enthousiasme et passion (ou au moins le faire croire !), pour encourager l’intérêt des apprenants et les

inciter à participer. Pour cela rien de mieux que de ne pas s’oublier en faisant ce que l’on aime et en cherchant un lien avec le français comme le propose Ukkiyev. Malika rappelle l’importance de la confiance enseignant-apprenants et apprenants-apprenants pour permettre à l’adolescent de s’exprimer et réduire la peur du ridicule et du jugement négatif. S’adapter à son public c’est aussi, dans ce cas ne pas hésiter à utiliser les TICE et l’uni-

vers des ados : jeux vidéo, réalité virtuelle, escape game, etc. Je rajouterai qu’il est important de veiller au rythme du cours, avec des relances fréquentes et une bonne capacité d’improvisation de l’enseignant pour faire face aux phases d’apathie ou de surexcitation du public adolescent. Un public passionnant car possédant une énergie extraordinaire à transformer et utiliser autant que possible pour faire de la classe un véritable lieu d’apprentissage. n

JE PARTICIPE ! Rejoignez FACEBOOK/LeFDLM www.fdlm.org

Un grand merci aux enseignants qui ont participé et à bientôt sur les réseaux sociaux et le site de notre chroniqueur : www.fle-adrienpayet.com

C

e qui motive les adolescents c’est de créer des activités hors classe. Il y a beaucoup d’activités et de projets que l’on peut faire en dehors du cours. Également dans la classe le professeur peut faire plusieurs activités amusantes et instructives pour étudier la langue et aider les élèves à s’exprimer oralement, notamment en utilisant des chansons et des pièces de théâtre. Saida Atif, Maroc

RUBRIQUE ANIMÉE PAR ADRIEN PAYET www.fle-adrienpayet.com Le français dans le monde | n° 428 | mars-avril 2020

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DOSSIER |

ENSEIGNER LES FRANCOPHONIES 52

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RETROUVEZ LA FICHE PÉDAGOGIQUE RFI EN PAGES 77-78 ET LE REPORTAGE AUDIO SUR WWW.FDLM.ORG

Une didactique de l’enseignement de la francophonie se construira lorsqu’il y aura un consensus sur les savoirs à transmettre et les objectifs à atteindre.

On peut ouvrir l’enseignement à la variété. Et puis, il faut être cohérent : la francophonie, c’est la diversité. Comment pourrait-on vanter la diversité et n’enseigner que la norme parisienne ?

L’objectif, c’est de comprendre pourquoi la langue française est parlée sur tous les continents, mais avec un investissement différent.

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Soyez vous-même dans votre langue, n’ayez aucun complexe. Le français que vous parlez est aussi riche, intéressant et intrigant que celui que l’on apprend et que l’on pratique aux quatre coins de la planète.

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lors que nous fêtons ce 20 mars le demi-siècle de la Francophonie institutionnelle, les francophonies se font toujours rares dans les cours de français langue étrangère. La norme linguistique parisienne demeure massivement enseignée, sans faire grand cas des variétés du français parlées dans les autres pays francophones. Bernard Cerquiglini explique pourtant que les structures profondes de la langue bougent peu, que les variations touchent essentiellement la phonétique et le lexique, et que les néologismes se construisent selon des règles communes impli-

cites pour tout locuteur du français : il n’est pas si complexe de faire entrer les francophonies dans les cours de langue ! Pour preuve, les différentes origines des professeurs d’une école en Louisiane qui jouent sur les enseignements, comme le montre notre reportage. Du point de vue des cultures et des civilisations, les connaissances ne sont pas toujours aisément transposables en savoirs académiques : cet « objet » didactique n’est pas facile à cerner. Trois enseignantes en Afrique, en Amérique du Sud et en Europe témoignent néanmoins de leur utilisation des cultures francophones en cours de français, principalement grâce à la littérature. n

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OUTILS | JEUX

PAR HAYDÉE SILVA

LA RUCHE DES

NASALES A1. B2. 1. Aide l’abeille à trouver le chemin jusqu’à sa ruche en coloriant les alvéoles. Les alvéoles doivent être adjacentes et contenir un mot avec une voyelle nasale. Les trois premiers mots du parcours sont « 27. bon », « 34. faim » et « 47. blanc », à toi de continuer ! A1. Identifie dans la grille tous les mots nouveaux pour toi et cherche leur sens dans un dictionnaire. A2. Trouve dans la grille tous les mots qui désignent un lieu. Complète la liste par au moins trois autres noms de lieu qui contiennent une nasale. B1. Trouve l’intrus phonétique dans la liste suivante : client – conscient – Orient – patient – tient. B2. À partir de la grille cidessous, construis un nouveau parcours en appliquant la règle phonétique ou orthographique de ton choix. Échange ton parcours avec tes amis et/ou tes camarades !

SOLUTIONS A1-B2. 27-34-47-53-58-54-42-29-23-18-9-6-10-7-38-16-20-30-37-31-26-32-45-51-56-65-70-73-71. A2. 3-10-14-(20)-23-33-(40)-41-(43)-49-50-62-7072-(73). Exemples : boulangerie, magasin, prison, restaurant, salon, temple, terrain de foot… B1. « Tient » /tj / est le seul mot de la liste qui se prononce avec un e nasal.

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OUTILS | MNÉMO

PAR ADRIEN PAYET – ILLUSTRATION : LAMISSEB

L’INCROYABLE HISTOIRE

DU PLURIEL DES NOMS COMPOSÉS

On ne choisit pas d’être un nom composé, on le devient ! Voici leur histoire. Certains mots qui s’aimaient beaucoup ont décidé de vivre ensemble, c’est le cas pour Ma et Dame, devenus Madame ou pour Bon et Jour devenus Bonjour. D’autres n’ont pas eu cette chance. Si vous saviez le nombre de divorces entre mots ! Ainsi de porte-monnaie, sèche-cheveux, tire-bouchons et plein d’autres désormais séparés, ironiquement, par un trait d’union. Entre les couples de noms, de verbes, d’adjectifs et autres couples mixtes, cela faisait plien de nouveaux mots à accorder. S allait avoir beaucoup de travail… Le Grand Ordonnateur : S, de plus en plus de noms sont devenus composés. J’aimerais que tu marques leur pluriel. S : Aux deux parties du mot ? À chaque fois ? Impossible ! J’ai trop de travail avec les noms simples, je ne vais pas apparaître deux fois dans les noms composés ! Le Grand Ordonnateur : Fais un effort… S : Quand est-ce que je me repose, moi ! Vous voulez m’assassiner ou quoi ?! Tiens, rien que dans « assassiner » j’apparais 4 fois ! S claque la porte et part s’enfermer chez lui ! Mais S était vaniteux. Il aimait qu’on lui fasse des compliments. Des adjectifs passent devant chez lui et lui disent des gentillesses.

— S, tu es sage, savant, la meilleure des lettres ! S ouvre la porte et remercie les adjectifs. Peu après des verbes débarquent en l’invectivant. — S, retourne au travail espèce de fainéant ! Les adverbes aussi lui parlent méchamment. — Tu as assez fait de problèmes ! Les verbes et adverbes mettent S de mauvaise humeur. Il fait sa séance de yoga (S est très souple !) puis va chez le Grand Ordonnateur. À l’entrée du Grand Palais, il croise les Nom savants : Tragi, Anti, Micro, etc. S ne les aime pas, il les trouve ridicules. Micro : Enfin, on rentre dans le droit chemin ! Tragi : Pas besoin d’être savant pour comprendre que chaque lettre doit rester à sa place. S : Sans mon S en début de mot vous n’êtes qu’un « avant » ! Puis S entre dans le bureau du Grand Ordonnateur et dit : J’accepte votre demande, mais j’ai mes conditions. Je veux bien marquer le pluriel des noms et des adjectifs. Ils ont toujours été gentils et loyaux avec moi. Mais je refuse de marquer le pluriel des verbes, des adverbes et de ces clowns d’éléments savants ! Le Grand Ordonnateur : Vous ne trouvez pas cela un peu compliqué ! S : Je trouve cela très bien ! C’est mon dernier mot, sinon je refais grève immédiatement !

ASTUCES MNÉMOTECHNIQUES Le pluriel s’applique aux deux mots pour les noms composés de deux noms, deux adjectifs ou d’un nom et d’un adjectif (ex : les bateaux-mouches)

Pour les noms composé contenant un ou deux verbes, le verbe est invariable (ex : des tire-bouchons)

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Le Grand Ordonnateur : Bon, j’accepte. Vous marquerez le pluriel des noms composés de deux noms comme auteurs-compositeurs, de deux adjectifs comme faux-semblants et d’un nom et d’un adjectif comme grands-parents. S : Parfait. Mais s’il s’agit d’un verbe et d’un nom comme porte-avions je ne marque le pluriel qu’au nom, pas au verbe ! Le Grand Ordonnateur : Et que fait-on pour les noms composés avec une préposition ? Par exemple arc-en-ciel ou chef-d’œuvre ? S : Ce sont des mots magnifiques, c’est vrai ! J’accepte de marquer le pluriel mais seulement au premier nom. Je dois me reposer un peu… Le Grand Ordonnateur : Très bien. Veuillez signer ici. C’est un contrat où vous vous engagez à marquer le pluriel selon cet arrangement et surtout à ne pas refuser de travailler en restant cloîtrer chez vous ! S : D’accord, mais j’aimerais qu’on indique que plusieurs exceptions peuvent exister. S signe le document et sort de la pièce. Au dernier moment le Grand Ordonnateur l’appelle. Le Grand Ordonnateur : Ah, j’oubliais… Que fait-on pour des mots composés étrangers qui ont été francisés, comme week-end, chewing-gum, etc. S : J’accepte de marquer le pluriel mais seulement à la fin ! Parce que je vous aime bien. Le Grand Ordonnateur se dit qu’il devrait sans doute être un peu plus sévère. Mais bon… S était revenu et c’était là une excellente nouvelle. La grammaire pouvait à nouveau fonctionner normalement. Avec ses complexités, certes, mais n’était-ce pas cela qui faisait son charme ? n

FICHE PÉDAGOGIQUE téléchargeable sur WWW.FDLM.ORG Le plus audio sur WWW.FDLM.ORG espace abonnés

Les éléments savants sont invariables (microordinateurs), les adverbes également (les avantpremières)

Si le nom composé contient une préposition, seul le premier nom se met au pluriel (ex : les-arcsen-ciel)

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