Mois européen de la photo 2009 Luxembourg catalogue

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MOIS EUROPテ右N DE LA PHOTOGRAPHIE LU X EM B O U RG 20 0 9


Mois EuropéEn dE la photographiE Berlin, Bratislava, Paris, vienne 2 0 0 8 luxemBourg, moscou, rome 2 0 0 9

Mois Européen de la photographie luxembourg Coordination et direction générale : Paul di Felice, Pierre Stiwer (Café-Crème asbl) direction de la communication et new Media : Sneja Dobrosavljevic nous tenons à remercier : Nadine Abel-Esslingen, Jean Back, Leslie Barnig, Marie-Claude Beaud, Marianne Brausch, Marguy Conzemius, Philippe De Poorter, Guy Dockendorf, Philippe Dupont, Claude Frisoni, Christian Gattinoni, Armand Hein, Danielle Igniti, Monique Kieffer, Josée Kirps, Mike Koedinger, Jo Kox, Enrico Lunghi, Michel Margue, Anouk Meyers, Steph Meyers, Jérôme Netgen, Françoise Pirovalli, Lydie Polfer, Michel Polfer, Alex Reding, Anke Reitz, Marita Ruiter, Lucien Schweitzer, Christiane Sietzen, Corinne Thill, Danièle Wagner, Michèle Walerich les ar tistes suivants pour un engagement par ticulier : David Claerbout, Ori Gersht, Marie-Jo Lafontaine les institutions ou galeries suivantes ; Maison Européenne de la Photographie (Paris), Museum auf Abruf (Vienne), Kulturprojekte Berlin, CarréRotondes (Luxembourg) du Mois Européen de la photographie : Anna Gianesini et Emiliano Paoletti (Rome) Gunda Achleitner, Berthold Ecker, Thomas Licek (Vienne) Oliver Baetz, Thomas Friedrich, Kathrin Kohle (Berlin), Zuzanna Lapitkova, Vaclav Majek (Bratislava), Ekatarina Kondranina, Olga Sviblova (Moscou), Jean Luc Monterosso, Pascal Hoël, Carole Prat, Barbara Wollfer (Paris) remerciements par ticuliers au Centre Culturel de Rencontre Abbaye de Neumünster, au Centre d’Art Nei Liicht - Dudelange, au Centre National de l’Audiovisuel ainsi qu’aux 23 partenaires luxembourgeois. avec le soutien du Ministère de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ainsi que de la Ville de Luxembourg

CourtEsY of thE artist

Crédit photo CouvErturE

M. Bertrand delanoë Maire de Paris M. andrej durkovský Maire de Bratislava M. Michael häupl Maire et gouverneur de Vienne M. Yury luzhkov Maire de Moscou M. paul helminger Maire de la Ville de Luxembourg M. gianni alemanno Maire de Rome M. Klaus Wowereit Maire et gouverneur de la Ville de Berlin

ori gersht ‘BIG BANG’ (VIDEOSTILL) 2006

sous le haut patronnage de :


Mois eUropéen De lA photogrAphie luxembourg 2009

introduction pour cette deuxième édition du mois européen de la photographie au luxembourg, pas moins de 23 musées, institutions, espaces privés et galeries composent un éventail quasi complet des lieux qui se consacrent à la photographie dans ce pays. si la grande majorité des espaces et des musées connus se concentrent sur la capitale, il ne faut pas négliger qu’à côté des partenaires fidèles de longue date comme le centre d’Art nei liicht et le cnA qui se situent à dudelange, nous avons cette fois-ci avec nous la kufa d’esch-sur-Alzette et clervaux - cité de l’image asbl, qui se joignent pour la première fois à cette fédération libre d’espaces privés et publics. certes, on peut regretter l’une ou l’autre absence, mais elles sont rares et occasionnées par l’impossibilité de respecter une contrainte de cet événement: avoir une exposition ouverte au public le week-end du 28 mars, journées officielles d’ouverture du festival. la ville de luxembourg souscrit pour la première fois à l’événement de sorte que le mois européen de la photo au niveau européen bénéficie maintenant de l’appui des maires de six capitales européennes, à savoir berlin, bratislava, luxembourg, paris, rome et vienne.A ces villes, il faut ajouter moscou comme partenaire associé. en 2004, sous l’impulsion de la maison européenne de la photographie et de son directeur jean-luc monterosso, le museum pädagogischer dienst de berlin et le département culturel de la ville de vienne décident de travailler ensemble pour promouvoir la photographie en europe. ces trois villes sont rejointes en 2005 par l’association zone Attive pour la ville de rome, la fotofo society de bratislava, la maison de la photographie de moscou et par café-crème asbl pour le luxembourg. Toutes ces institutions ou associations ont, dans le domaine de la photographie, une expérience de longue date, remontant pour la majorité d’entre elles à la fin des années soixante-dix ou au début des années quatre-vingts. elles bénéficient également de l’appui de leur municipalité respectivement de leur ministère de la culture. depuis 2006, ces villes travaillent étroitement ensemble et contribuent à la mise en place d’expositions autour de la photographie dans le cadre d’échanges internationaux ce qui permet de suivre de près l’évolution de la photogra-

phie et de l’image dans son contexte contemporain sans négliger son histoire et son ancrage dans la société nationale. récemment réunis à vienne, les partenaires ont décidé de continuer l’aventure et de travailler à la mise en place d’un troisième «mois» en 2010/2011. c’est le souhait des organisateurs de convaincre tant les institutions que les professionnels, les artistes et le public au sens large, qu’il est dans l’intérêt de tous de développer des synergies en europe pour promouvoir un art qui a déjà une longue histoire et qui est actuellement pris dans les bouleversements technologiques extraordinaires dont les retombées ne sont pas encore complètement saisies et dont il faut rendre compte. de nouvelles modes esthétiques et technologies bouleversent la production et la diffusion des images créant un environnement passionnant. notre association, fondée en 1984, bénéficie depuis de longues années de la reconnaissance de nombreuses institutions, musées, galeries et artistes en europe et nous sommes fiers de pouvoir présenter le mois européen de la photographie au luxembourg ensemble avec nos partenaires dont certains nous soutiennent depuis longtemps. nous tenons également à remercier les villes, les institutions publiques, les galeries privées, banques ou collectionneurs au luxembourg qui ont spontanément répondu à notre appel et nous ont accompagnés dans la mise en place de cet événement d’envergure européenne. sans eux, cette manifestation n’aurait pas été possible. c’est ainsi que, pour la première fois, le grand public aura accès, sur une période de quelques semaines, à une offre très diversifiée de la création dans le domaine de la photographie. on doit se féliciter de pouvoir réunir sur ces quelques semaines les meilleures initiatives au luxembourg dans le domaine de la photographie et des arts visuels en général.

NOSBAUM & REDING ART CONTEMPORAIN

Pantone 2935c

paul di felice & pierre stiwer pour café-crème asbl, le 15 mars 2009


couverTure eT pAge ci-conTre

ori gersht ‘big bang’ (videostill) 2006


TAble des matières

MUDAM luxembourg - musée d'art moderne grand-duc jean

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mutations II - Moving stills : peter aerschmann / gast bouschet & nadine hilbert / christoph brech / olga chernysheva / david claerbout / ori gersht / mark lewis / tuomo rainio / marc scozzai /jutta strohmaier casino luxembourg - forum d'art contemporain

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great expectations - contemporary photography looks at today’s bitter years : vahram aghasyan / éric baudelaire / frédéric delangle / martin eder / iván edeza / lukas einsele / patrick galbats / dionisio gonzález / peter granser / stanley greene / joachim Koester / laurence leblanc / zwelethu mthethwa / adi nes / suzanne opton / ari saarto / bruno serralongue / melanie smith / jules spinatsch / sada tangara / guy tillim / kai wiedenhöfer musée national d'histoire et d'art

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modèles modèles ? : valérie belin / pierre gonnord / marie-jo lafontaine / luce moreau arendt & medernach

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babylon babies : marie-jo lafontaine musée d'histoire de la ville de luxembourg

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odd, small and beautiful : jeanine unsen bibliothèque nationale de luxembourg

32

element 5 : raymond clement centre culturel de rencontre neumünster

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5 images fondation de l'architecture et de l'ingénierie

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regards sur le kirchberg : paul casaer / pierre filliquet / andré mailänder / joseph tomassini archives nationales de luxembourg das papierene gedächtnis : joseph tomassini

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université du luxembourg

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campus life : vera weisgerber carrérotondes - espace culturel

50

colophon tribute to café-crème magazine centre d'art nei liicht

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faire la peau de l'inconscient - mutations images II : elina brotherus / evelyne coutas / frédéric delangle / laurent goldring / isabelle grosse / Katerina jebb / vera weisgerber galerie clairefontaine

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the chronicles of time : giacomo costa lucien schweitzer - galerie d'art

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mutations - migrations : Jacques bosser / laurence demaison / tom drahos nosbaum & reding - art contemporain

68

timberland ; tina gillen galerie toxic

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miroir, miroir : gast bouschet et nadine hilbert / jean-baptiste bruant / isabelle damé / david de tscharner / olivier dollinger / steve Kaspar / jan van oost / angel vergara / yun aiyoung bgl - espace monterey

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landschaften : marco piono banque de luxembourg

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Œuvres de la collection : dennis adams / ola kolehmainen / marie-jo lafontaine leslie's art gallery

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sisters of mercy : billy&hells centre national de l'audiovisuel

88

3 stories : pieter hugo / mikhael subotzky / paolo woods galerie terre rouge - kulturfabrik

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de passage vers l'est : rené gillain musée the family of man - château de clervaux

96

war graffiti : peter van agtmael clervaux - cité de l'image sur la décharge - roumanie : jordis antonia schlösser

100


luxembourg MUDAM lUxeMboUrg MUsée D’Art MoDerne grAnD-DUc jeAn

3, park draï eechelen Tél. +352 45 37 85 1 ouver t tous les jours de 11h à 18h nocturne le mercredi jusqu'à 20h fermé le mardi www.mudam.lu

l’autofiction du travail de cindy sherman, l’écriture de l’histoire chez hannah collins, l’intuition politique chez shirin neshat, les différentes visions documentaires de bernd et hilla becher, thomas struth et nan goldin, ces approches distinctes d’artistes majeurs du xxe siècle, autour d’un même médium, sont présentes dans la collection mudam. la photographie et surtout les photographes accompagnent l’aventure mudam depuis les débuts et ce de manière active. christian aschman, qui vient de la photographie de mode, a portraitisé le grand duché à l’occasion de la présidence luxembourgeoise du conseil de l’union européenne. dépassant la mission documentaire, pierre-olivier deschamps de l’agence vu, a travaillé pendant plusieurs années sur la mémoire photographique du bâtiment du musée (signé i.m. pei) et ce, depuis le premier coup de pioche. thomas demand, sculpteur de formation et connu pour ses photographies couleur de reconstitutions grandeur nature en papier, a produit une série spécifique au lieu. venant du champ des arts, valérie belin, charles fréger et joël tettamanti ont été invités à réaliser un travail topologique sur la société et le paysage luxembourgeois ; travail qui a été présenté pour l’ouverture du musée, à l’occasion de la dernière édition du mois de la photo. lié directement au programme d’expositions, de publications et de recherches, le travail de mudam en matière de commande et de production d’œuvres photographiques varie et mélange visions, sensibilités et horizons. claude moyen

19 février — 25 mAi

MUtAtions ii moving stills Artistes peTer AerschmAnn / gAsT bouscheT & nAdine hilberT / chrisToph brech / olgA chernyshevA dAvid clAerbouT / ori gershT / mArk lewis / Tuomo rAinio / mArc scozzAi /juTTA sTrohmAier commissaires paul di felice + pierre stiwer

dans le cadre du mois européen de la photographie, initié en 2004 et regroupant aujourd’hui les festivals de paris, berlin, bratislava, luxembourg, moscou, rome et vienne, il était légitime et nécessaire de s’interroger collectivement sur les mutations de notre monde et notamment sur celles de l’image contemporaine. c’est le parti pris qui a conduit à la mise en œuvre en 2006 d’une première exposition intitulée mutations i ; événement centré sur les mutations technologiques et artistiques de la photographie. la seconde édition de cette manifestation se propose de prolonger la réflexion autour du médium vidéo, en poursuivant l’exploration des rapports féconds qu’entretiennent l’image fixe et l’image en mouvement et en esquissant un état des lieux de la création contemporaine en europe. Ainsi mutations ii nous invite à la découverte des nouveaux territoires de l’image fixe et l’image en mouvement à travers les tensions qui les animent. Tension ontologique entre l’instantané et la durée, tension esthétique consécutive à l’hybridation de l’image argentique et d’une imageflux, tension dialectique entre les modalités limitées d’accrochage de l’image photographique et « l’infini des combinaisons perceptives dans lesquelles peuvent se définir et s’articuler les images électroniques 1» et notamment l’installation vidéo. 1 Alexis vaillant, françoise parfait, nikola jankovic, les nouvelles images, 2001, tome 1, aux chroniques de l’AfAA.

ci-dessus

jUttA strohMäier ‘passenger’ (videostills)

2004 courTesy of The ArTisT

pAge de droiTe ori gersht ‘big bang’ (videostill) 2006 courTesy of The ArTisT

04


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de haut en bas

marc scozzai ‘sans titre’ (videostill) 2004

courtesy collection mudam luxembourg © videostill : marc scozzai

christophe brech ‘break’ (videostill) 2004

courtesy sammlung goetz, munich

olga chernysheva ‘windows’ (videostill) 2007 courtesy diehl & gallery one, moskow

06


de haut en bas

gast bouschet & nadine hilbert ‘dreamsequence’ (videostill) 2006-2007

courtesy of the artists

mark

lewis ‘spadina : reverse dolly, zoom, nude’ (videostill) 2005

collection mudam luxembourg © videostill : mudam luxembourg david

claerbout ‘arena’ (vue d’exposition) 2007

courtesy micheline szwajcer

07


08


ci-dessus 2005 courtesy of the artist

tuomo rainio ‘city’ (videostill)

ci-dessous

peter aerschmann ‘5 th street’ (videostill)

2006 courtesy anne de villepoix, paris

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luxembourg cAsino lUxeMboUrg

forUM D’Art conteMporAin

41, rue notre-dame Tél. +352 22 50 45 ouver t tous les jours : 11h - 19h jeudi : 11h - 20h samedi & dimanche : 11h - 18h www.casino-luxembourg.lu

la photographie est utilisée ou associée, d’une manière ou d’une autre, à la plupart des pratiques artistiques contemporaines. ainsi, elle est régulièrement présente dans les projets du casino luxembourg depuis ses débuts : dans des expositions de groupe (jeff wall dans Arrêts sur images, louise lawler dans open house, lucinda devlin dans power, sarah jones dans en attente e.a.) ou des monographies (sam samore, marc trivier, michael light, zbigniew libera, mark lewis, emily bates e.a.) . des expositions thématiques ont également exploré les dimensions plasticiennes ou critiques de la photographie ainsi que ses liens avec la peinture (photopeintries en 1996, The nineties: A family of man? en 1997, veronica’s revenge en 1999) , sans compter les présentations de démarches artistiques où la photographie intervient régulièrement (didier bay, jim shaw, jacques charlier, simone decker e.a.) . kevin muhlen

un catalogue consacré à l'exposition great expectations – contemporary photography looks at today's bitter years a été publié : great expectations – contemporary photography looks at today's bitter years, catalogue d'exposition, casino luxembourg (éd.) : 215 x 175 mm, 108 p., ill. coul., textes français/anglais de paul di felice, enrico lunghi, pierre stiwer et rolf sachsse.

28 mArs — 14 juin

greAt expectAtions

contemporary photography looks at today’s bitter years Artistes vAhrAm AghAsyAn / éric bAudelAire / frédéric delAngle / mArTin eder / ivÁn edezA / lukAs einsele / pATrick gAlbATs / dionisio gonzÁlez / peTer grAnser/ sTAnley greene / joAchim koesTer / lAurence leblAnc / zweleThu mTheThwA / Adi nes / suzAnne opTon / Ari sAArTo / bruno serrAlongue / melAnie smiTh / jules spinATsch / sAdA TAngArA / guy Tillim / kAi wiedenhÖfer commissaires paul di felice + enrico lunghi + pierre stiwer

au krach boursier de 1929. nous voulions donc proposer notre version – ancrée dans le présent – d’une telle démarche à travers le regard d’artistes contemporains. bien sûr, notre échelle est modeste (elle se situe au casino luxembourg et non pas au momA de new york) et notre regard n’est pas rétrospectif (avec toute la subjectivité et l’incomplétude que cela implique, d’autant plus qu’il ne se limite pas à un territoire donné mais qu’il embrasse, par petites touches, une grande partie de la planète, mondialisation oblige). en 1997, avec the 90s: a family of man?, le casino luxembourg avait déjà, à sa manière et dans une démarche analogue, rendu hommage à l’autre chef-d’œuvre de steichen, the family of man, une exposition également réalisée au momA de new york en 1955. l’exposition de 1997, qui montrait différentes « étapes » de la vie humaine vues à travers des œuvres d’art contemporaines, dont certaines étaient choquantes, avait attiré un public nombreux. elle avait pris alors le contre-pied de l’approche humaniste de steichen et d’un universalisme dénoncé plus tard par maints critiques qui voyaient dans son exposition un effet de la propagande américaine à l’époque de la guerre froide. l’exposition the bitter years n’a pas connu, à l’époque de sa conception en 1961, un grand succès auprès du public, comme si l’art, lorsqu’il nous renvoie une réalité peu commode, nous rebutait. on était alors en pleine croissance d’après-guerre, et le rappel lorsque nous avons décidé, au printemps 2007, de concevoir ensemble une exposition se référant à l’exposition the bitter years qu’edward steichen avait consacrée en 1962 à la grande dépression des années 1930, nous étions loin de nous douter qu’elle coïnciderait parfaitement avec la crise financière actuelle. Toutefois, notre projet n’est pas le fruit du hasard. l’euphorie généralisée qui se manifestait dans le monde des affaires (que n’avons-nous été inondés, ces dernières années, d’informations sur l’accroissement du nombre de millionnaires et de milliardaires dans le monde), dans les médias (la publicité nous vantait une consommation sans limites) et dans bien d’autres domaines encore (y compris le marché de l’art) s’accordait mal avec les images percutantes du monde réel qui nous parvenaient de certaines démarches artistiques. nous semblions vivre dans l’illusion que la montée des intégrismes, des inégalités, de la pauvreté et de la peur dans le monde, ainsi que les catastrophes écologiques qui de plus en plus pointaient du nez, n’étaient que des épiphénomènes, des « dommages collatéraux », des inconvénients passagers de la marche triomphante de la mondialisation et de l’économie de marché en passe de devenir l’horizon ultime de toute activité et de toute pensée humaines. et voilà que le monde réel a rattrapé notre projet artistique. l’idée est simple. de son temps, edward steichen avait réalisé une exposition de photographies montrant une réalité dont les Américains n’avaient plus envie de se souvenir en une période d’expansion quasi illimitée de leur bien-être matériel : celle de la misère économique suite

ci-dessus ADi nes ‘hagar’, de la série ‘bible’

2005 courTesy sommer conTemporAry Ar,T Tel Aviv

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des années difficiles après la grande dépression dans les campagnes américaines du middle west ne provoquait guère l’enthousiasme. risquons-nous la même chose avec great expectations ? s’il est plus difficile aujourd’hui de placer l’expression artistique à contre-courant des institutions ou du « système » comme on avait tendance à la concevoir encore dans les années 1960, il lui revient fréquemment une fonction morale, du moins quand il s’agit de mettre en évidence ou de critiquer des façons de voir, des attitudes, des positions, fussent-elles esthétiques ou ouvertement politiques. dans la société néolibérale d’aujourd’hui, les maîtres de la communication ont imposé leur façon de voir ; le marketing, commercial et politique, domine les esprits ou tente du moins de les orienter. il revient alors à l’art une fonction qui n’aspire plus – comme dans les années 1920 et 1930 à travers le constructivisme russe, par exemple – à faire passer des idées révolutionnaires et à contribuer à une idéologie politique et, partant, à installer un nouveau système politique, mais à relativiser les voix dominantes. en l’absence de maîtres à penser qui pourraient contrecarrer le capitalisme moderne qui fonctionne sur le mode de la liberté individuelle et pénètre – et récupère – jusqu’à la moindre parcelle d’opposition pour l’intégrer à son système, il est difficile pour l’artiste de se mettre en travers de la route des grandes machines de la consommation et de la commercialisation – jadis celle des biens, aujourd’hui celle des idées et des sentiments. il faut donc plus qu’une exposition pour permettre un changement de regard sur la situation. or, la réalité ayant rattrapé l’art,


la crise actuelle contribue dès lors à faire voir autrement cette exposition laquelle, eût-elle eu lieu il y a deux ans, aurait probablement été perçue comme un exposé quelque peu moralisateur sur une situation en flagrante contradiction avec le vécu de la majorité des gens d’ici. Comment comprendre dès lors le titre frappé d’une ironie amère ? Il faut le lire en miroir des aspirations et des promesses des dernières années, où la croissance était une donnée naturelle, l’enrichissement inévitable et les nouvelles fortunes mirobolantes. Tous les prospectus promettaient « toujours plus », comme pouvait l’écrire déjà François de Closets dans les années 1960. Face au positive thinking des marchands et autres vendeurs d’utopies se maintenait ou se développait une autre réalité : celles des nouveaux pauvres, des guerres économiques et leurs nombreux morts civils, l’appauvrissement effrayant de pays entiers engendrant des vagues d’immigrés. The Bitter Years de Steichen rappelait une crise économique dont le territoire pouvait être cerné. La crise d’aujourd’hui – et cette exposition veut en rendre compte – est globale. À l’universalisme de Steichen, Great Expectations veut substituer l’idée d’une crise universelle telle qu’elle s’articule dans un domaine particulier des arts visuels.

en haut

vahram aghasyan ‘ghost city’

2005-2007

courtesy of the artist

À la différence de l’approche de Steichen qui regroupait des

photos produites par la Farm Security Administration1, cette exposition couvre l’éventail plus large de la production contemporaine en introduisant

en bas

frédéric delangle ‘ahmedabad’

2006

label expositions, paris

tant une photographie traditionnelle que conceptuelle. L’éventail des œuvres se déploie autour de la photographie documentaire, de guerre parfois, pour aller vers des installations qui regroupent documents écrits, textes et photos, ainsi que des objets réels. Les thèmes sont variés, l’intention étant non pas de donner carte blanche à des artistes pour exposer leur effroi ou leur parti pris politique ou social. Il s’agit aussi, dans notre esprit, de mettre en relation la démarche artistique quant au choix des matériaux et des techniques, avec une réalité sociale ou politique. L’interprétation qu’appellent ces œuvres, intentionnellement coupées d’une localisation géographique trop précise, est laissée au visiteur. (extraits du texte du catalogue) Paul di Felice, Enrico Lunghi, Pierre Stiwer L'exposition a été réalisée avec le soutien de :

1 La Farm Security Administration (FSA) est un organisme américain créé par le ministère de l’Agriculture en 1937, chargé d’aider les fermiers les plus pauvres touchés par la Grande Dépression. C’est par sa section photographique, dirigée par Roy Stryker de 1935 à 1942, que la FSA marque l’Histoire : le projet consiste à faire un bilan objectif des conditions de vie et de travail des Américains ruraux. Parmi les photographes les plus connus : Walker Evans et Dorothea Lange.

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de haut en bas

peter granser ‘Sun city’ 2001

courtesy 14-1 gallery, stuttgart and the artist

ari saarto ‘Sumida Gawa #3, Tokyo’ de la série ‘in situ’ 2005

courtesy of the artist

dionisio gonzålez ‘comercial santo amaro’ 2007 Collection Fonds national d’art contemporain (CNAP), Ministère de la Culture et de la Comunication, Paris courtesy galerie xippas, paris

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de haut en bas

guy tillim ‘avenue patrice lumumba’ 2008

Courtesy Michael Stevenson Gallery, Cape Town © Guy Tillim & Agence VU

Zwelethu Mthethwa sans titre, de la série ‘sugar cane’ 2004-2006

courtey galerie anne de villepoix, paris

laurence leblanc République Démocratique du Congo - Sierra Leone 2005 courtesy agence vu' and the artist

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ci-dessus Iván edeza ‘... De negocios y placer’ (videostills)

2000

courtesy of the artist

ci-dessous suzanne

opton ‘soldier H. jefferson, the length of service undisclosed’

Courtesy Musée de L’Élysée, Lausanne, Susan Reynolds et l’artiste / and the artist

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2008


de haut en bas

éric baudelaire ‘the dreadful details’ 2006

Commande du Centre national des arts plastiques, Paris Collection Fonds national d’art contemporain (CNAP), Ministère de la Culture et de la Comunication, Paris

stanley greene image extraite de la série ‘open wounds’ 1994-2003

courtesy of the artist & agence noorimages

kai wiedenhöfer ‘orange tunnel’ de la série ‘the wall - israeli occupied territories’ 2003-2006

courtesy of the artist

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MUsée nAtionAl D’histoire et D’Art luxembourg

marché-aux-poissons Tél. +352 47 93 30-1 ouver t du mardi au dimanche : 10h - 17h jeudi : 10h - 20h fermé le lundi www.mnha.public.lu

les fonds photographiques principaux du mnhA sont constitués par le fonds historique (de 1860 à 1939) et le fonds documentaire (de 1940 à nos jours) . chacun de ces fonds se compose de plusieurs collections. l’essentiel du fonds historique est constitué par : - des vues du grand-duché : luxembourg ville (la forteresse, les bâtiments, les rues, etc.) et les autres centres habités du grand-duché - des portraits : ce sont des tirages sur papier et quelques exemples de daguerréotype - des albums : il s’agit de souvenirs de voyages, de campagnes militaires, etc. - des diapositives en noir et blanc et de négatifs sur plaque de verre le fonds documentaire regroupe essentiellement des inventaires photographiques. ce fonds est constitué par des vues du grand-duché ; des photographies de fouilles archéologiques ; l’inventaire des objets des différentes sections du mnhA. la collection de photos d’art regroupe des photographies d’edward steichen : 148 tirages offerts au mnhA en 1985 par la george eastman house, international museum of photography and film, rochester et madame joanna steichen. les sujets représentent principalement des portraits de célébrités, à côté de natures mortes et de paysages. la collection comporte également des artistes luxembourgeois et étrangers comme andres serranox, mikka heinonen, christian mosar, bert theis, roger wagner, etc...

27 mArs — 21 juin

MoDèles modèles ?

p os i T i o n s p h oTo g r A p h i q u e s co n T e m p o r A i n e s s u r l e T h è m e d u p o rT r A i T

Artistes vAlérie belin / pierre gonnord / mArie-jo lAfonTAine / luce moreAu commissaires paul di felice + pierre stiwer le titre de cette exposition avec son dédoublement et son point

malgré leur froideur apparente et leur caractère typologique, les

d’interrogation se veut déjà déroutant. s’il indique la perplexité devant la

« baigneuses » des bains de st. josse de marie-jo lafontaine se distinguent

déclinaison plurielle en substantif et adjectif du mot modèle il suggère aus-

par un certain réalisme « intemporel ». derrière la pose classique et la

si une interprétation qui va au-delà de sa définition de représentation, de

rigueur de la composition, contribuant à la neutralité du sujet, se dégage à

référent ou d’idéal à copier.

peine une singularité permettant de personnaliser ces jeunes figures fémi-

selon son origine italienne, le mot renvoie à la reconstruction

nines. le fond bleu des murs sur lesquels sont accrochées les photographies

– modello au xvie s. étant la représentation en miniature-, - mais depuis

ainsi que les textes blancs se référant aux modèles et aux corps plongés dans

valéry il est aussi associé au processus créatif en référence au corps comme

l’atmosphère aquatique des piscines participent de cette ambiance décalée,

modèle selon la méthode de léonard de vinci.

au sein du musée, que l’artiste crée avec maîtrise.

les photographies exposées, certes, appartiennent toutes au

danièle gillemon parle à juste titre de « … portraits insolites

genre du portrait, mais d’emblée l’équilibre corps / modèle est perturbé

qui font davantage figure de caryatides multiculturelles pour une Acropole

par la frontalité et le surdimensionnement des images.

d’aujourd’hui que de photographies sociologiques, banales à force d’avoir

plutôt que de jouer sur l’identification, les sentimentalités et

été exploitées. » 1

les profondeurs psychologiques du portrait, les photographies de valérie

chez pierre gonnord les modèles sont souvent des marginaux

belin et de marie-jo lafontaine dégagent une distanciation critique par rap-

qu’il met en scène dans des photographies qui « semblent évoluer dans un

port à la nature ontologique de la photographie qui ici ne se réduit pas à

temps suspendu » 2 à la manière des saints et des martyres des tableaux des

l’enregistrement du réel. certains éléments (les fonds colorés dans babylone

grands maîtres baroques. majestueusement composés, ses portraits, qui se

babies, les arabesques dans les mariées marocaines, les contrastes…)

caractérisent par leur fond noir et leur clair-obscur recherchés, se donnent à

fonctionnent comme une sorte de mise en abîme formelle où le spectateur

voir dans leur « authenticité » mais à travers une représentation modélisée

ne peut s’approcher qu’en participant à la construction de la représentation.

s’inspirant de l’histoire de l’art.

c’est que l’expérience esthétique, face à ces photographies imposantes, va au-delà des préoccupations liées traditionnellement au portrait. d’un côté, les images nous font plonger dans une sorte « d’entre espace » et « d’entre temporalité » ; de l’autre, comme chez moreau et

Avec « venice prom Time », la jeune artiste luce moreau revisite le portrait classique en y introduisant un nouveau rapport au temps. ici le punctum du dynamisme des éclaboussures efface le studium barthien 3 en réactivant le statisme du genre.

gonnord, elles provoquent un déplacement sémantique à travers la mise en

en 2006, l’exposition « un tableau peut-en cacher un autre »

scène, respectivement ironique ou auratique de modèles issus de l’histoire

au mnhA avait effleuré les questions du modèle en montrant les en-

de l’art.

jeux de la photographie dans le discours de l’iconicité et en dégageant quand valérie belin pose les questions de réalité et d’illusion, de

les spécificités photographiques face à la peinture. Aujourd’hui l’exposition

vivant et d’objet elle le fait aussi bien au niveau des thèmes abordés que des

modèles modèles ? permet d’approfondir le regard croisé sur le réel et sa

choix artistiques.

représentation à travers des positions photographiques contemporaines,

qu’elle se rapproche de la sculpture comme dans black women ou du dessin comme dans les mariées marocaines, sa photographie se veut sans

certes différentes entre elles, mais liées par le même souci de faire de ces portraits des images pensives 4.

émotion et parfaitement contrôlée dans sa réalisation et sa présentation. le contraste en noir et blanc de certaines séries et l’effet de planéité dans

paul di felice

d’autres contribue à faire disparaître les vrais visages dans la représentation ritualisée où dominent masques et parures et où la sérialité typologique efface toute trace anecdotique. le jeu des arabesques qui prédominent dans les compositions des « mariées » nous fait penser à la boutade de matisse « …je ne peins pas une femme mais un tableau ». valérie belin ne prend pas une photo, mais elle la construit. A travers ses séries variées, elle crée une œuvre où le modèle, qui est au centre de la photographie, tient autant de l’humain que de l’avatar.

notes 1 danièle gillemon, le soir du jeudi 18 décembre 2008 2 luc desbenoit, télérama n° 3052 3 roland barthes, la chambre claire, gallimard, 1980 4 jacques rancière, le spectateur émancipé, 2008

pAge de gAuche

vAlérie belin sans titre, série ‘moroccan brides‘ 2000

courTesy of The ArTisT And collecTion mep pAris

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PIERRE GONNORD ‘LEONE’, DE La série ‘REGARDS ‘ 2005 Courtesy Galeria Juana de Aizpuru, Madrid / collection mep paris

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PIERRE GONNORD ‘sonia ii’, DE La série ‘REGARDS 2000 Courtesy Galeria Juana de Aizpuru, Madrid / Collection mep paris

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luce moreau ‘clem', de la série 'venice prom’time‘ 2007

courtesy of the artist

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luce moreau ‘lucie' de la série 'venice prom’time‘ 2007

courtesy of the artist

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marie-jo lafontaine série ‘les baigneuses’ 2007-2008

courtesy of the artist

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luxembourg - kirchberg ArenDt & MeDernAch

14, rue erasme luxembourg, kirchberg Tél. +352 40 78 78 1 ouver t les samedis .& dimanches : 9h - 18h www.arendt-medernach.com

l’architecture du bâtiment d’Arendt & medernach au kirchberg a sûrement été un catalyseur pour l’émergence de la programmation d’expositions de photographie contemporaine au sein du cabinet. la collection d’œuvres d’art qui s’est constituée au cours des différentes propositions artistiques est avant tout le résultat d’une prise de conscience et d’un partage de nouveaux plaisirs esthétiques au niveau des arts visuels. bien qu’elles aient été acquises dans une période précise - entre 2003 et 2008 - les œuvres de la collection n’ont aucunement la prétention de refléter de façon exhaustive les tendances actuelles de la photographie ni d’être représentatives pour un courant artistique et encore moins pour un corpus de photographies sélectionnées selon des critères spéculatifs. la collection témoigne au contraire d’une grande diversité d’expressions et de thèmes ainsi que d’une pluralité d’approches. si la cohérence thématique n’est pas une condition sine qua non, on peut néanmoins y déceler des liens au niveau des contenus qui soulignent la prédilection pour le vivant et le bâti. les œuvres se distinguent donc d’abord par leur singularité et puis par leur rapport à l’architecture, voire aux murs internes de l’étude, à leur capacité de faire vivre une photographie dans le contexte de l’environnement quotidien de l’étude Arendt & medernach.

27 mArs — 21 juin

MArie-jo lAfontAine babylon babies maurice g. dantec extrait de l’introduction parue dans l’ouvrage marie jo lafontaine : babylon babies

voilà : lorsque vous aurez refermé ce livre, j’espère que vous serez habités

si les enfants de babylone indiquent une présence, c’est bien cette intégralité

pour un temps par le peuple des enfants de babylone, j’espère que leurs

de la coupure. s’ils sont engendrés c’est par la nuit contenant le jour dont

yeux couleur cristal liquide viendront hanter vos rêves, j’espère que vous

parle saint jean au tout début de son évangile : « car la lumière luit dans les

comprendrez que leur existence ne tient qu’à un fil, j’espère que vous aurez

ténèbres mais les ténèbres ne l’ont pas saisie » . où plus certainement en-

un peu plus peur de vous-mêmes, j’espère que l’éclat que vous n’aurez pas

core par ce jour enclos par la nuit, qui nous ouvre sur cette fermeture infinie.

su entendre sera celui da la voix des archanges en chute libre vers ce monde.

voilà pourquoi les enfants de babylone semblent là pour attendre de

vous croirez les avoir regardés, mais ce sont eux qui vous auront vus.

vous quelque chose qui sans doute ne viendra pas sans que vous n’ayez

il faudra bien s’y faire : leur anonymat transgénique fait d’eux, d’elles, des

commencé à dissoudre ce qui en vous-même se targue de porter le nom

êtres impersonnels, donc authentiquement singuliers.

« identité ». que vous le vouliez ou non, participer à l’expérience implique

l’art consiste toujours à anéantir le sujet, la pensée poétique vise à délivrer

que n’en sortiez pas intacts. face à leur existence improbable, vous com-

l’être de son assujetissement à lui-même, afin de lui permettre de s’engager

prendrez peut-être qu’elle contient tous les possibles.

dans la production de son devenir.

leur mémoire est absolument neuve et pourtant, osez plonger vos yeux au

voilà pourquoi le travail de marie-jo lafontaine ne me semble pas aller de

fond des leurs, et vous serez obligés de vous dire qu’ils savent tout de vous.

soi, en cette ère de subjectivisme absolu, c’est-à-dire auto-réflexif, entré

vous croirez les avoir regardés, mais ce sont eux qui vous auront vus.

dans sa phase terminale : celle de la déconstruction universitaire comme

les enfants de babylone ne sont donc pas muets. mais leur langage est secret,

identité sans lendemains chaque jour renouvelée. ce travail consiste préci-

ce langage est le secret de tous les secrets. ce langage est plus silencieux

sément à creuser cette différence qui s’engage dans un processus de répéti-

encore que le langage des signes des sourds-muets, toutes les ressources

tion non séquentiel. les enfants de babylone ne sont ni le futur, ni le présent,

informatiques de notre orbicule terrestre ne suffiraient pas pour le décoder.

ni le passé, ils proposent un nouveau visage à l’éternité de chaque instant.

ce langage n’a rien à nous dire, rien de connu, rien qui se rattache vraiment

nous voici face à quelque chose qui s’apparente à une iconostase. les

à ce qui, ici-bas, a osé prendre le nom d’existence. en tant que tel il est le

enfants de babylone ne sont pas des anges, mais ils ne sont plus tout-à-

seul langage impossible, celui qui précisément contient tous les mondes, le

fait humains non plus, ils indiquent que l’homme reste encore à faire, tou-

langage incompossible de l’art.

jours à inventer. ils indiquent la présence invisible d’une narration à l’oeuvre,

vous ne les reconnaitrez pas, mais eux vous auront connus.

derrière le saint tabernacle des apparences. ils indiquent la ligne de fuite d’un

les enfants de babylone ne sont donc pas des clones en série pourvus d’un

monde encore à naître, d’un monde toujours à naître.

code-barre sur la nuque, de simples répliques pop-publicitaires d’une soi-

vous croirez les avoir regardés, mais ce sont eux qui vous auront vus.

disante « génération », la singularité de chacun s’accroît de la proximité de

Aussi, les enfants de babylone ne vous parlent pas, ils sont muets comme des

tous, et c’est par leur regard posé comme au réveil sur notre univers qu’ils

golem, mais pourtant, comme les golem, il est écrit sur leur front, en lettres

sont en situation d’ouvrir pour quelques instants un abysse en nous-mêmes.

invisibles, le mot : vérité.

s’ils vivent quelque part en ce monde, alors c’est que ce monde n’est plus

les êtres ne sont pas là où la société le croit, le néant n’est pas seule

tout-à-fait nôtre, si un sourire ourle leurs lèvres c’est sans doute un signe

nullité passive, il existe un facteur de coupure de flux dans toute authentique

de compassion involontaire à notre égard, si leur regard marque un étonne-

genèse, dans toute prise de parole, dans toute critique phénoménologique,

ment, c’est celui de constater que nous sommes encore là.

dans tout acte créateur, donc dans toute production d’un authentique continuum. le Temps n’est pas une succession d’instants engendrés les uns par les

vous croirez les avoir regardés, mais ce sont eux qui vous auront vus.

autres, comme le cycle des générations humaines, nous croyons qu’ils en est ainsi précisément parce que nous sommes enfermés dans ce cycle. un continuum, un rapport implexe entre temps et espace ne peut se comprendre sans la présence intégrale du néant comme processus opérateur, comme la discontinuité qui produit ce continuum.

pAge de gAuche eT double-pAge suivAnTe

MArie-jo lAfontAine ‘babylon babies‘ 2001 courTesy of The ArTisT

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luxembourg MUsée D’histoire De lA ville De lUxeMboUrg

14, rue du saint-esprit Tél. +352 47 96 45 00 ouver t du mardi au dimanche : 10h - 18h je.udi : 10h - 20h fermé le lundi sauf jours fériés www.mhvl.lu

le musée d’histoire de la ville de luxembourg, situé au cœur de la vieille ville propose des collections permanentes et des expositions temporaires qui illustrent de façon originale l’histoire plus que millénaire de la capitale du grand-duché. le site retenu pour abriter le musée est un ensemble de quatre anciennes maisons bourgeoises comprenant des vestiges remontant jusqu’au moyen age. l’architecture du musée frappe par sa verticalité, reflet de la configuration de la ville caractérisée par le contraste entre ville haute et ville basse. ainsi, le public peut découvrir les expositions sur six niveaux, reliés entre eux par un ascenseur panoramique qui permet au visiteur de traverser toute la stratification urbaine. l’exposition permanente « luxembourg, une ville s’expose », installée sur les niveaux 0 à 2, relate dans sa première partie l’évolution de luxembourg depuis la première occupation du site jusqu’à l’indépendance du pays en 1839. À l’entrée, une installation multimédia raconte la légende de la nymphe mélusine et renvoie aux origines mythiques de la ville. le visiteur explore le développement urbanistique de la ville dans tous ses détails au moyen d’écrans tactiles et de reconstitutions topographiques fidèles. le spectaculaire panorama du marché-aux-herbes, jadis place centrale de la ville, recrée l’atmosphère du 17e siècle. les deux niveaux suivants présentent l’histoire plus récente de la ville en privilégiant les cinq thématiques suivantes : ville et pouvoir, ville en mouvement, ville et environnement, ville et confor t et ville en europe, celles-ci reliant toujours l’histoire et l’actualité. des œuvres d’artistes contemporains (photographies, vidéos, installations) jalonnent le parcours. un espace particulier est réservé à des expositions temporaires sur des aspects spécifiques des collections du musée. les trois étages supérieurs du musée sont réservés à de grandes expositions temporaires sur des sujets sociétaux.

28 mArs — 31 mAi

jeAnine Unsen odd, small and beautiful jeanine unsen, jeune photographe luxembourgeoise qui a repré-

lors de notre dernier entretien, elle a expliqué son rapport avec ce sujet :

senté le luxembourg aux rencontres internationales de la photographie en

« il y a quelque chose des traditions villageoises en moi qui perdure et que je ne

Arles et au festival international de la photographie de pingyao (chine) en

ridiculise aucunement, mais que je relève à travers mes mises en scène photo-

2008 et qui vient de participer à l’exposition « elo » au mudam a relevé un

graphiques. chaque accessoire me rappelle en quelque sorte mon enfance alors

nouveau défi en s’appropriant le sujet du « luxembourg touristique » dans

que paradoxalement ces objets sont fabriqués en tant que souvenirs pour les

le cadre d’une commande du musée d’histoire de la ville de luxembourg

touristes. »

et en référence à l’exposition « greetings from luxembourg » qui a eu lieu dans cette institution en 2008.

en s’inspirant des bibelots du luxembourg touristique et en prolongeant sa démarche commencée avec la série « le portrait de monsieur-x »,

depuis quelques années, jeanine unsen développe ses tableaux

jeanine unsen intègre à la fois des symboles collectifs et des portraits dans

photographiques dans un esprit d’expérimentation permanente au niveau

des contextes scénographiques qui complètent le décor par leur dimension

du contenu et de la forme en créant pour chaque photographie un univers

stéréotypée.

aux décors décalés et en orchestrant des mises en scènes avec des personnages choisis.

devant les photographies de la série « odd, small and beautiful » nous sommes enivrés par la richesse du détail qui nous plonge dans une

chaque prise de vue est le résultat d’un long processus de

atmosphère bizarre entre rigueur et panache. comme les icônes d’un grant

recherche où interviennent d’innombrables accessoires qui forment le

wood ou d’un edward hopper, les personnages de jeanine unsen se figent

cadre de situations incongrues dans lesquelles différents objets et sujets se

dans les décors que l’artiste a soigneusement imaginés.

rencontrent et interagissent, le temps d’une photographie.

l’univers kitsch avec lequel jeanine unsen nous confronte dans

comme l’artiste le précise : « dans ce genre de travail, la phase

cette série semble loin de ce que nous vivons et pourtant chaque photo-

de préparation est la plus difficile et la plus complexe. je collecte, je dessine

graphie renvoie, dans toute son ambiguïté, à l’idée d’enfermement dans une

mon projet, je choisis les personnages dont les portraits seront intégrés dans

quotidienneté luxembourgeoise qui a perdu sa vraie image.

les décors que je mets minutieusement en place. l’important, c’est de maîtriser les nouvelles situations que je crée avant de pousser sur le bouton. »

paul di felice

si dans « deep south », le décor a été défini par la personne dont elle a fait le portrait, dans sa série « odd, small and beautiful » à l’inverse, jeanine unsen part des accessoires de décors qui déterminent le choix des personnages qui vont évoluer par rapport à la situation que l’artiste crée artificiellement dans son studio. entre effet de distanciation et sentiment d’appropriation, cette nouvelle série pose la question fondamentale de l’authenticité et de ses corollaires qui sont l’identité et la représentation. en gardant son style caustique des séries précédentes et en utilisant un langage visuel qu’elle caractérise de « nostalgique critique », elle s’amuse à créer un monde étrange à partir d’objets de la culture touristique en les réaménageant en fonction des correspondances qui naissent entre tous ces éléments.

ci-dessus À gAuche 2007

commande ‘deep south’

ci-dessus À droiTe 2004

‘le portrait de monsieur x - 2’

courTesy of The ArTisT

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ci-dessus et double-page suivante 2009

’odd, small and beautiful’

courtesy of the artist

w w w.jeanineunsen.com

merci à w w w.hellocathy.com

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luxembourg bibliothèqUe nAtionAle DU lUxeMboUrg

37, boulevard roosevelt Tél. +352 22 97 55 - 1 ouver t du mardi au vendredi : 10h30-18h30 samedi : 9h - 12h www.bnl.lu la médiathèque de la bnl offre une sélection de médias non imprimés, soit en consultation sur place soit en prêt à domicile : - une grande sélection de films de fiction, en version originale, par des réalisateurs classiques comme bergman, antonioni, truffaut, ozu, kubrick, et contemporains, tels loach, benigni, kaige, haneke, kaurismäki ; des pièces de théâtre d’éric-emmanuel schmitt, pinter, thomas bernhard, sartre etc., ainsi que des mises en scène de pièces d’auteurs classiques comme molière, shakespeare, lessing ou pirandello - des films documentaires en provenance du monde entier et recouvrant toutes les disciplines: sciences pures, sciences humaines, photographie, peinture, architecture, géographie … en plus, des inédits tels les documentaires de van der keuken, depardon, werner herzog, michael moore ainsi que des documentaires sur des personnalités comme kapuciski, kennedy, steichen, picasso, eco etc. - un fonds de documents sonores parlés comprenant des œuvres classiques de la littérature mondiale, de philosophie, des témoignages d’acteurs éminents de l’histoire du xxe siècle ainsi que des biographies et des interviews de personnalités du monde politique et artistique - des méthodes audiovisuelles d’apprentissage des langues dans son coin de lecture, la médiathèque offre une sélection de livres de photographie et de cinéma en rapport avec l’actualité. l’aménagement de la salle des arts (anciennement « salle mansfeld ») au premier étage audessus de la médiathèque (« aile ancien athénée ») , s’inscrit dans cette logique : elle offre une sélection de plus de quatre mille ouvrages de référence dans les domaines des arts, dont le cinéma/photo (1300 vol.) exclus du prêt, comme tous les ouvrages de référence des salles de lecture, ceux-ci peuvent faire l’objet d’une consultation sur place. le portail bnu (www.bnl.lu) , consultable à distance, vous donne accès à la documentation électronique de la bibliothèque nationale et de l’université du luxembourg . les utilisateurs inscrits à la bnl peuvent faire des recherches dans les périodiques électroniques et les bases de données dans le domaine de la photographie notamment, ainsi que dans les catalogues luxembourgeois et étrangers.

28 mArs — 25 Avril

rAyMonD cleMent element 5 Au coeur de cette grande exposition de photographie, se situe le 5e élément : le bois, un matériau fascinant mis en nouvelle perspective. pour le photographe luxembourgeois raymond clement cette collection unique témoigne de l’importance de son travail avec les arbres et les forêts au cours des 20 dernières années, clichés rassemblés à travers des paysages autochtones et d’autres plus lointains. son regard photographique, vif et poétique en même temps, révèle une beauté cachée qui permet de fusionner réalité, fiction et abstraction. mélangeant photographies en noir et blanc et en couleur clement oriente son regard vers la nature du bois, telle qu’il l’aperçoit. ses arbres à lui, sont ceux qui lui importent pour la continuité de sa voie créative. il dialogue avec eux, sans arrêt, et ils arrivent à se livrer à lui de manière tout à fait particulière. des textes lyriques d’isabelle kronz, lex jacoby et liliane welch ajoutent aux photos une quatrième dimension. un beau livre accompagnera l’exposition.

Wir sind brÜder aus demselben samen doch Keiner von uns ist K ain und Keiner ist abel lex jAcoby

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en coopération avec l'agence ar tforexpor t www.madeinluxembourg.lu


lUst lives, Dies, cAn’t beAr not being tAken to heArt, exAsperAteD At nUDe liMbs, wooing, violAting liliAne welch

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J’ai rêvé de mille protubér ances Des seins où viendr aient se coller Mille bouches avides et borgnes Isabelle Kronz

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Wenn mich das Schweigen im Walde stรถrt s pr e c h e i c h m it d e m W i n d Lex Jacoby

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luxembourg centre cUltUrel De rencontre AbbAye De neUMünster

parvis du ccr neumünster 28, rue münster Tél. +352 26 20 52 1 www.ccrn.lu

le centre culturel de rencontre abbaye de neumünster (ccrn) inauguré en mai 2004 après dix années de travaux, est situé au cœur des vieux quartiers, sur un itinéraire classé patrimoine mondial de l’unesco. bénéficiant d’un décor spectaculaire, cet ensemble architectural a connu 4 siècles d’histoire mouvementée: abbaye bénédictine pendant les xviie et xviiie siècles, prison et caserne après la révolution française, orphelinat en 1805, hôpital militaire des troupes de la confédération germanique à partir de 1815, à nouveau prison après le départ des troupes prussiennes en 1867, pendant l’occupation nazie, et jusqu’en 1985. le site a ainsi connu des modifications nombreuses avec la construction du « criminel » l’actuel bâtiment bruch pendant la période prussienne, puis du « tutesall », aujourd’hui salle robert krieps dévolue au spectacle vivant et cette année cimaise en plein air pour le mois européen de la photographie. associant le charme des vieilles pierres aux équipements les plus sophistiqués, le ccrn, dévolu aux projets culturels, est en même temps un mer veilleux lieu pour de grands événements. sur ses 12 000 m2, ils sont près de 700 à y être organisés chaque année dans ce lieu ouvert à tous qui se veut espace de rencontres permettant « le dialogue des cultures et la culture du dialogue ». la photographie, sous des formes diverses, y tient depuis 5 ans une place importante. jürgen schadeberg, james natchwey, malick sidibé… y ont ainsi exposé, mais les artistes de photomeetings ou du mois européen de la photographie y sont également accueillis.

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présenTATion du mois européen de lA phoTogrAphie luxembourg 2009 sur lA fAÇAde de lA TuTesAll du 28 mars au 31 avril (ci-contre : simulation du projet)

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luxembourg-hollerich fonDAtion De l’ArchitectUre et De l’ingénierie

1, rue de l’Aciérie, luxembourg-hollerich Tél. +352 42 75 55 ouver t du lundi au vendredi : 14h - 18h samedi : 11h - 15h www.kirchbergonline.lu www.fondarch.lu

le fonds du kirchberg est un établissement public. il a été créé en 1961 pour urbaniser les 365 ha du plateau de kirchberg, suite à l’accueil des institutions de l’union européenne par le grand-duché. la première grande transformation urbaine a été , à partir des années 1990, la transformation de la voie de circulation rapide en boulevard urbain, ceci en vue de la densification du bâti et de la mixité des fonctions, car à partir des années 1980, l’urbanisation du kirchberg avait commencé à se densifier du fait de l’installation de banques et de sociétés du tertiaire. c’est toujours le cas aujourd’hui, notamment du fait de l’extension de l’union européenne à 27. de grands établissements culturels comme la philharmonie de luxembourg, le musée d’art moderne (mudam) , des parcs et des possibilités de loisirs ainsi que des établissements du secteur de la santé accroissent l’attrait du plateau. le fonds continue à chercher à diversifier son image en construisant des quartiers d’habitation. de nouvelles améliorations devraient encore s’ensuivre du fait de la desserte du kirchberg par le tramway et l’installation d’une gare périphérique ferroviaire.

l’exposition « regards sur le kirchberg » sera accompagnée de visites guidées grand public, les 28 mars, 4, 11 et 18 avril. l’inscription est obligatoire au 26 43 45 10 info@kirchbergonline.lu

28 mArs — 18 Avril

regArDs sUr le kirchberg pAul cAsAer / pierre filliqueT / André mAilÄnder / joseph TomAssini

Après une première mission sur trois aspects du plateau – les grands chantiers, les espaces extérieurs, les personnes – qui a abouti à l’été 2008 à une première exposition, le fonds du kirchberg poursuit cette année sa documentation photographique avec un autre volet : les bâtiments qui vont prochainement disparaître. cela peut paraître a priori étrange pour un quartier qui a commencé à s’urbaniser il y a à peine soixante ans et dont le développement n’est pas encore terminé ! la raison en est actuellement essentiellement l’élargissement de l’union européenne et donc la densification du tissu urbain : le centre Albert wagner va laisser la place à un nouvel immeuble de la caisse de pensions mieux intégré au quartier européen nord ; les annexes du heichhaus vont être remplacées par la phase ii du nouveau centre de conférences kirchberg. il est d’autant plus justifié de documenter le présent pour les archives du futur que les images - c’est avéré depuis l’apparition de la photographie - acquièrent une valeur mémorielle. cette mission photographique a été confiée au photographe luxembourgeois joseph Tomassini. si ces images ont « l’objectivité » de la commande photographique, vu par un professionnel au regard aiguisé sur la ville, il en va autrement de la vision spontanée des jeunes élèves du photographe. c’est à cause de leur fraîcheur que le fonds kirchberg a choisi de montrer également leur travail à l’occasion du mois européen de la photographie, ensemble avec une sélection des travaux de Tomassini, casaer, filliquet et mailänder.

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ci-dessus

pierre filliquet page de gauche

en haut paul casaer en bas andré mailänder

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ci-contre

 joseph tomassini

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luxembourg Archives nAtionAles De lUxeMboUrg

plateau du saint-esprit Tél. +352 24 78 66 60 ou +352 24 78 66 61 ouver t du lundi au vendredi : 9h-11h45 & 13h17h45 samedi : 9h -11h45 www.anlux.lu

les archives sont la matière vivante de l’histoire en train de se faire et constituent une des plus grandes richesses de notre patrimoine national : produits sans finalité historique, tous ces documents permettent d’authentifier, de prouver, d’écrire l’histoire de notre pays. elles portent les signes qui permettent de comprendre le passé et sont un bien commun à l’ensemble des concitoyens luxembourgeois. depuis 1968, les archives nationales sont installées dans l’ancienne caserne des volontaires au plateau du saint esprit. au fil des années, les capacités de stockage ont été augmentées par l’aménagement des souterrains du nouvel hôtel des postes à luxembourg-gare et d’une partie du parking souterrain du plateau du saint esprit. accessibles depuis le chemin de la corniche, les archives nationales sont ouvertes au public sur présentation soit d’une carte de lecteur soit d’une pièce d’identité. deux salles sont à disposition du public. selon les termes de la loi du 28.12.1988 portant réorganisation des instituts culturels de l’etat, « les anlux ont pour mission de réunir tous les documents d’intérêt historique national ; de conser ver, classer et inventorier les archives publiques en vue de leur utilisation à des fins historiques et administratives ; de conseiller les administrations de l’etat et des communes ainsi que les organismes privés qui en font la demande, sur la conser vation et le classement de leurs archives. elles acceptent en outre des dépôts d’archives privées ». depuis une dizaine d’années, les besoins d’espace des archives nationales pour accueillir un public plus large dans de meilleures conditions et répondre ainsi à la soif de mémoire, toujours plus pressante, des historiens professionnels, jeunes chercheurs, généalogistes amateurs et autres, sont devenus plus importants. par ailleurs, la production d’archives s’est considérablement amplifiée. ceci nécessite un agrandissement des installations actuelles de stockage et de conservation des collections. la décision de la construction d’un nouveau bâtiment pour les archives, prévu à esch-belval, répondra à l’apparition de ces nouveaux besoins. josée kirps

28 mArs — 28 Avril

joseph toMAssini das papierene gedächtnis das gedächtnis wird nicht mehr von innen erlebt und deshalb brauchen wir so viele äußere stützen. pierre nora joseph Tomassinis fotos atmen den geist des realismus. sie erscheinen aleatorisch und emotionslos. objektivität scheint sich in ihnen bahn zu brechen. Aber beim betrachten der bilder sind wir einem Trugbild erlegen. sie lassen ein eigentümliches paradox deutlich erkennbar werden. sie zeigen uns eine Anhäufung von Archivmaterial, die uns zu garantieren scheint, dass wir die vergangenheit und die eigene zeit lückenlos in die zukunft herüberretten können. so viel Archiv war nie! wir wollen uns an alles erinnern können. in wirklichkeit jedoch offenbart die Anhäufung einen verlust des gedächtnisses. wir haben sozusagen die bindung mit der vergangenheit verloren und sammeln deshalb ohne unterschied mit einer fast abergläubischen hingabe jede noch so kleine spur. die fotografien Tomassinis belegen eine metamorphose des Archivs. ursprünglich war die idee des Archivs Ausdruck der eigenen, kollektiven identität, die konstruktion eines selbstbestimmten bildes, das man in die zukunft überführen wollte, heute ist es das genaue gegenteil. die ursachen hierfür sind bekannt: technologischer fortschritt und individualisierung der erinnerung. Als folge dessen haben wir nie dagewesene möglichkeiten zum erhalten, Aufzeichnen usw. und gleichzeitig eine fülle von material, das wir anscheinend unbedingt konservieren müssen. All dies um den preis, dass der leitfaden - und somit das kollektive, das identitätsstiftende, die große erzählung - verloren gegangen ist. das Archiv hat sich damit, wie der französische historiker pierre nora meint, von einem milieu de mémoire in einen lieu de mémoire verwandelt. rené kockelkorn

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wAlferdAnge

Université DU lUxeMboUrg

fAculTé des leTTres, des sciences humAines, des ArTs eT des sciences de l'educATion campus walferdange, route de diekirch walferdange installation à l'extérieur entre bâtiment central et bâtiment vi laboratoire d’arts visuels objectifs du laboratoire d’arts visuels : * recherche en art contemporain * coordination de recherches existantes * etudes comparatives d’œuvres contemporaines * contribution au débat sur l’art contemporain au luxembourg * coopération internationale et promotion des arts visuels au luxembourg * contribution au développement de la pédagogie des arts le laboratoire d’arts visuels se consacre à l’analyse des produits du domaine des arts plastiques, dans la perspective des thèmes chers à l’ur ipse, c’est-à-dire les identités, les politiques, les sociétés et les espaces. il faut comprendre ces thèmes comme des dimensions dynamiques et extensibles : les œuvres d’art ne sont pas vues en tant que phénomènes isolés, mais dans leur contexte sociétal et socioculturel. entre les arts visuels et les quatre thèmes de choix, il existe des rapports actifs, complexes et réciproques qui sont, parmi d’autres, les objets de la recherche du laboratoire. les recherches en arts visuels se basent sur les questions de plasticité, de représentation, d’hybridation et de multiculturalité dans l’art contemporain. elles s’articulent autour des problématiques qui se fondent sur la démarche artistique contemporaine internationale et permettent de questionner les approches singulières qu’apportent ces changements de paradigme visuel-post-visuel dans le contexte du phénomène actuel de la culture « glocale » (locale et globale) . les résultats de la recherche sont diffusés par le biais de séminaires adressés aux étudiants et dans des publications au luxembourg et à l’étranger. le laboratoire (avant sous le nom de sea) organise (en collaboration avec le casino luxembourg forum d’art contemporain) le cycle de conférences : « les mardis de l’art » et, depuis 1998, un séminaire pratique-théorique annuel, intitulé « artworkshop », consacré à la recherche et à l’échange. les œuvres qui sont réalisées pendant ce séminaire sont exposées et/ou publiées. le laboratoire d’arts visuels propose un accompagnement scientifique sur les didactiques et les méthodologies dans la communication des arts visuels à l’école, de même qu’une participation au développement de la pédagogie muséale dans le cadre des institutions d’art contemporain au luxembourg et dans la grande région.

www.uni.lu

28 mArs — 25 ocTobre

verA weisgerber campus life vera weisgerber est une artiste luxembourgeoise qui participe régulièrement, depuis une quinzaine d’années, à des expositions nationales et internationales. depuis sa résidence d’artiste à la rijksakademie à amsterdam, les projets les plus intéressants sont sa participation au projet re-location (luxembourg et roumanie) , sa contribution aux semaines européennes de l’image au havre, sa participation aux rencontres internationales de la photographie en arles et ses expositions individuelles « recurrables » à la galerie dominique lang (dudelange, l) , « xul revisited » au cape (ettelbruck, l) , sa participation à « locked in » au casino luxembourg ainsi que ses expositions récentes « Tumbling dice » et « who is where i am » au mudam (l) .

remarque : cet entretien a eu lieu avant l’installation des œuvres.

vw : oui, il y a les deux. j’apprécie le caractère physique de l’approche lomographique, tout en n’étant pas adepte de ce courant. la spontanéité qu’elle préconise permet d’avoir un rapport au corps lors des prises de vues, c’est en ce sens qu’elle m’intéresse. il y a des situations dans lesquelles le cadrage ne peut qu’être approximatif et devient une affaire d’anticipation et de feeling. mais en général je donne de l’importance au cadrage et à la composition. certains projets demandent un matériel sophistiqué, ou une technique que je ne maîtrise pas. dans ces cas j'ai recours à des spécialistes avec lesquels je réalise les prises de vues et c’est en général une expérience enrichissante pour les deux parties.

lav : tu es connue comme artiste mixed-media, quel est le rôle de la photographie dans ton œuvre ?

lav : est-ce qu’il arrive que certains éléments de ton œuvre aient une seconde vie ?

vw : je considère la photographie comme un outil, selon le sujet et le contexte de l’œuvre j’utilise différents médias, la photographie, la vidéo, le son et des éléments graphiques. le médium n’est pas primordial ; ce sont le contenu et le contexte qui déterminent la forme de l’œuvre.

vw : oui, il existe un certain recyclage. l’idée de réutiliser des travaux m’est venue lors d’un projet portant sur l’échec. des objets qui sous une certaine forme ne fonctionnent pas peuvent être repris des années plus tard, intégrés dans un autre contexte, et trouver alors leur place.

lav : mais tu privilégies l’image, ou est-ce que tu as déjà créé des œuvres sans image ?

LAV : Y a-t-il des thèmes récurrents, un fil rouge dans ton œuvre ?

lAv : laboratoire d’arts visuels (viviane bourg, paul dell, paul di felice) vW : vera weisgerber

vw : jusqu’à maintenant j’ai en effet uniquement réalisé des œuvres avec image. parmi mes installations il y en a pour lesquelles le son est important. pour certaines j’ai intégré d’autres éléments comme par exemple des chaises, une rampe d’escalier, des pierres… mais dans toutes mes œuvres l’image est présente. ma relation à la photographie a débuté singulièrement; je ne l’ai pas choisie comme moyen d’expression, c’était plutôt un parcours de circonstances qui m’y a conduit. a l’académie des arts, je travaillais sur un projet sculptural portant sur des prothèses orthopédiques. au cours de mes recherches je me suis servie de la photographie comme moyen de documentation. dans les usines que je visitais, les fabriquants des prothèses me paraissaient d’un coup comme des sculpteurs, et l’idée initiale de recréer ces « sculptures » moi-même me paraissait sans intérêt. en conséquence j’ai modifié mon discours et choisi parmi les images celles qui transmettaient le plus fidèlement l’aspect sculptural des objets photographiés. j’ai tenté de surmonter la bi-dimensionalité de la photographie en agrandissant les images à des échelles individuelles, en rapport avec le corps, afin que la perception des images puisse devenir autant physique que visuelle. c’était en quelque sorte le début de mon travail autour de la perception dans un espace donné. (…)

ci.dessus

'xul revisited' (videostill) 2008 'recurrables' (videostill) 2007

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lav : dans ton œuvre, on trouve à la fois des images dans lesquelles dominent une composition recherchée et des cadrages apparemment laissés au hasard comme dans les lomographies. Qu’en est-il de cette interprétation ?

vw : oui, absolument. il ne s’agit pas d’un thème ou d’un objet spécifique, mais plutôt d’une approche. depuis longtemps je dirige mon regard sur des éléments qui risquent de passer inaperçus. c’est la marginalité qui m’intéresse, le hors normes, des individus, des groupes sociaux, des détails, qui au premier regard paraissent banals, et je tente de pointer leur présence, de révéler leur beauté, leur poésie…, de les considérer sous un autre angle, de créer des liens inattendus. il y a quelques années j’ai eu l’impression d’avoir fermé la boucle. la manière de procéder s’est forgée et les sujets que j’ai traités forment un ensemble à partir duquel de nouvelles interactions me permettent de progresser constamment. lav : et le projet du campus walferdange, est-ce qu’il s’intègre dans cette boucle ? vw : oui, en un certain sens mes projets sont tous liés par mon approche et par la manière dont je procède. je vais sur place pour voir, percevoir, et pour récolter le maximum d’informations sur le lieu, les activités, l’atmosphère, les manques… c‘est à partir de ces éléments que je développe un concept. c’est ce que j’ai fait pendant quelques semaines au campus.


LAV : Cette commande impose des contraintes de lieu et des difficultés de présentation. Est-ce que cela te stimule ? VW : Oui, c’est un grand défi. Le lieu est complexe et la forme de présentation (5 panneaux installés à l’extérieur) est définie dès le départ. Le défi est de trouver la meilleure façon d’intégrer tous les éléments. LAV : Tu peux nous expliquer ta démarche ? VW : Comme pour tous mes projets, j’ai fait en premier lieu une étude de terrain. Après avoir plus ou moins cerné les lieux, j’ai commencé à entrer en contact avec les gens qui y circulent. J’ai questionné différentes personnes sur les spécificités de l’Université. Et c’est étonnant que l’être humain, lorsque questionné sur les spécificités de son environnement, commence par mentionner des aspects négatifs et des manques. Ayant fait le tour de l’absence des espaces réservés et partagés, des horaires et des codes… j’ai changé mes questions. LAV : Et en quel sens as-tu modifié ta façon de questionner ? VW : J’ai essayé d’avoir des informations sur les itinéraires sur le campus, les habitudes de circuler, les lieux de rencontre, les coins cachés, la logistique… Les photos prises durant cette phase étaient plutôt de type bloc-notes. Ensuite je me suis focalisée de manière plus systématique sur un bâtiment ou sur un thème…Evidemment il y avait toujours des surprises – des scènes cocasses qui m’inspiraient et je me disais « C’est ça ! » Mes recherches et les multiples échanges avec les acteurs de tous les domaines à l’université m’ont permis de cerner la panoplie des activités. LAV : Est-ce que cela ne reste pas une vue de l’extérieur ? VW : évidemment ma vue ne peut être qu’une vue de l’extérieur, mais le fait d’avoir pu circuler librement m’a permis d’avoir un regard qui va au delà des perceptions et expériences individuelles des différents acteurs de la vie à l’université.

DE HAUT EN BAS ET DE GAUCHE à DROITE

'relocation 4. Tranzit House, Cluj (RO)' 'recurrables' (videostill)

2007

'TUMBLING DICE' (VUE D'EXPOSITION) 2007 mudam luxembourg © photo : andres lejona 'ETERNAL RETURN'

2008 (vue d'installation) exposition 'locked in', casino luxembourg © christian mosar

'Who is where I am' J’essaie, à travers l’œuvre, d’amener le spectateur à réfléchir, à créer des liens et à découvrir certains aspects du campus à Walferdange qui sinon passeraient inaperçus.

2003

vera weisgerber & cosmin pop

2008 (Double video MUDAM LUXEMBOURG © Photo: Andres Lejona

projection)

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'ĂŠtudes pour le projet du campus walferdange'

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luxembourg - hollerich cArrérotonDes espAce culTurel

1, rue de l'aciérie luxembourg - hollerich Tél. +352 26 62 20 07 ouver t du mardi au dimanche : 14h - 20h fermé le lundi www.rotondes.lu

les origines de carrérotondes remontent à la création de la coordination générale de "luxembourg et grande région, capitale européenne de la culture 2007". le carrérotondes est un espace ouvert aux différents domaines de la création contemporaine, la jeune création, des approches artistiques novatrices et des nouvelles pratiques culturelles et sociales. il veut créer les conditions pour l'émergence de nouvelles propositions et de nouvelles créations, pour lier l'art, la culture et de la société.

12 mArs — 12 Avril

colophon

tribute to c afé- crÈ me magazine regArd sur 13 Ans de pAges phoTo de cAfécrème mAgAzine ( 1984 -1997 )

comment est née l’idée / le projet café-crème? l’idée de café-crème magazine est née en 1983 suite à un projet d’exposition échoué qui aurait dû regrouper l’architecture, la peinture et la photographie. le premier numéro, sorti en automne 1984, a été créé par paul bretz, paul di felice et pierre stiwer dans l’esprit de présenter des propositions architecturales et artistiques mais aussi le design et la mode sous forme de magazine branché au grand format, un A3. A l’époque, la mode était au grand, voire au très grand format. qui est derrière café crème et quand fut-il créé ? Après le départ de paul bretz ( l’architecte ) en 1985, robert Theisen rejoint l’équipe dans un rôle de photographe d’abord ; puis marcello eusani ( relations publiques et commerciales ). la direction a continué à être assumé par paul di felice et pierre stiwer en étroite concertation avec robert Theisen qui devait lancer l’idée d’un magazine complémentaire ( city magazine ) ainsi que celui de l’agenda culturel ( city Agenda ) vers la fin des années 80. Dans quel contexte cette publication internationale de photographie contemporaine s’inscrit-elle, à qui elle fut destinée? dans un premier temps, le magazine s’est inspiré de la fameuse revue « interview » d’Andy warhol et de tout un ensemble de magazines du début des années 80 où s’exprimait une nouvelle culture urbaine. il n’y avait pas de public cible, il s’agissait de se faire plaisir et de contribuer à la naissance d’une nouvelle culture visuelle où l’image – et la publicité – jouaient un rôle essentiel. quelle était son rôle et son impact et plus généralement quel est le rôle selon vous d’un magazine international consacré à la photographie contemporaine? parallèlement, la création de café-crème édition coïncide avec l’entrée en force de la photographie dans les manifestations artistiques au début des années 80. on se rappelle le grand événement « photo » à la biennale de venise en 1979 et la création du mois de la photographie à paris. Au moment des premières sorties du magazine, la photographie au luxembourg n’avait pas encore atteint le statut d’œuvre d’art. dès le milieu des années 80, nous avons ouvert nos pages à des photographes plasticiens et théoriciens avec lesquels nous avons pu établir des relations dans le cadre de l’édition. il fut ensuite décidé de devenir une revue photo d’art à plein titre. combien de temps a vécu le magazine et pourquoi l’avoir stoppé ? en 1995 – dans le cadre de luxembourg, ville européenne de la culture - nous avons organisé une exposition sur le thème “paysages, lieux et non-lieux” en collaboration avec les galeries nei liicht et dominique lang de dudelange . celle-ci regroupait des œuvres photographiques d’artistes européens issues de collections publiques européennes mais aussi des œuvres d’artistes que nous avions publiés dans notre magazine. une mission photographique sur le paysage urbain, naturel et industriel luxembourgeois eut lieu la même année. suite à cette expérience positive, on nous a demandé de travailler sur le concept d’une réinterprétation de “The family of man” d’edward steichen, une recherche qui nous a pris deux ans. l’ exposition au casino luxembourg, forum d’art contemporain, réalisée en 1997, eut un succès considérable et une visibilité bien au-delà des frontières nationales. en témoigne un article de fond publié dans le wall street journal de new york. le catalogue édité à cette occasion est un ouvrage-clé dans l’histoire de la photographie des années 90. l’ensemble de ces activités a permis à l’association café-crème d’accéder à une reconnaissance internationale. cette année coïncide aussi avec la fin du magazine dont le dernier numéro paraît en janvier 1998. le temps n’était plus aux magazines dont la naissance avait coïncidé avec l’arrivée du mac et de la démocratisation de la mise-en-page à travers les logiciels comme pagemaker ou quark xpress. internet pointait déjà son nez et il fallait clôturer ce qui apparaît aujourd’hui comme avoir été le chant du cygne des magazines d’art expérimentaux. il fut donc décidé de se consacrer à l’organisation d’expositions, à l’édition de catalogues consacrés à la photographie. que faites-vous maintenant? fédérée avec le havre et Arles, notre association organise dès 2000 les semaines européennes de l’image, une biennale consacrée à la photographie contemporaine. A la suite de cette expérience, et fort de nos contacts internationaux, nous avons rejoint en 2006 le « mois européen de la photographie » lancé par la maison européenne de la photographie de paris en collaboration avec berlin et vienne en 2004. nous avons été invités à intégrer le réseau et à coordonner l’événement grâce au réseau international de contacts que nous avions pu établir dans le cadre du magazine café-crème. chacune des 7 villes participantes (berlin, rome, moscou, paris, bratislava, vienne et luxembourg) organise son propre festival mais ensemble ils créent une exposition commune tous les deux ans sur le thème de la mutation en photographie. la troisième édition sera consacrée à l’image sur internet. pierre stiwer / paul di felice , café-crème asbl (interview colophonmars 2009)

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café-crème magazine couverture du numéro 8 automne 1986

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L e s p o rt r a i t s d e Robert Theisen

Visages d’artistes Une caractéristique de notre publication a été la place que nous accordions au portrait de l’artiste et à l’interview. Peut-être inconsciemment inf luencés par le mot fameux d’Andy Warhol que chaque individu devait avoir droit à son quart d'heure de célébrité, nous avions opté, après quelques numéros, d’accorder une place parfois importante au portrait d’artiste. Au début des années quatre-vingts, le magazine de Warhol – justement appelé Interview - avait marqué les media par sa philosophie toute particulière de donner la parole « à tout le monde ». L’idée de mettre en page un personnage, le plaisir de caresser son amour propre, de f latter sa vanité par de belles photos pleine page et la publication de ses « réf lexions » n’était pas exempte d’une arrière-pensée un peu perverse. La réputation de « Coffee table magazine » qui nous poursuivait alors au Luxembourg à travers une autre publication que nous éditions au même moment était alors accentuée par cette façon de consacrer l’artiste. Mais alors que les magazines de stars faisaient la part belle aux paroles souvent insignif iantes des petites et grandes vedettes du showbusiness, nous avions opté assez vite pour une approche plus honnête, peut être naïvement sérieuse, en « consacrant » l’artiste. Tout en évitant de tomber dans le jargon esthético-philosophique ou dans la reproduction des avant-propos fouillés des catalogues, nous avons vu (ou cru voir) dans l’interview – et le portrait – une façon d’intégrer l’individu qui est l’artiste non dans l’œuvre (laquelle peut s’en passer) mais dans nos pages. Une démarche artistique est toujours entreprise, selon nous, par une personne en chair et en os, qui a ses projets, ses ambitions, une histoire. Plutôt que de présenter, comme dans un catalogue, seulement le portfolio d’un photographe, nous avons, par le portrait et l’interview, permis à l’individu – et sa personnalité – de s’exprimer ce qui ne se fait pas dans les autres revues photos ou alors rarement. Toutes ces photos ont été réalisées par Robert Theisen qui, en autodidacte, a su se faire une place dans nos pages. Photographier sans décorum a été une des options de Robert, co-éditeur et photographe durant toutes ces années. Il avait horreur des portraits composés et aucune envie de fouiller la personnalité de l’artiste pour découvrir ses travers ou sa face cachée. Peut - être son métier de psychologie lui permettait-il de se mettre à la disposition de l’artiste avec qui il allait développer très souvent des rapports amicaux audelà de son travail de portraitiste. Il a contribué de façon essentielle à faire de Café-Crème magazine une publication intéressante. Pierre Stiwer (1986)

robert theisen de haut en bas et de gauche à droite

portrait de Marc Viaplana et Mabel Palacin portrait de peter knapp portrait de joan fontcuberta portrait de Sarah Charlesworth page suivante

portraits par robert theisen mis en page

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centre D’Art nei liicht

dudelAnge

25, rue dominique lang, dudelange ouver t du mardi au dimanche : 15h - 19h fermé le lundi www.centredar t-dudelange.lu

le centre d’art nei liicht créé en 1982, fut pendant longtemps le seul et unique lieu au luxembourg a être consacré exclusivement à la photographie. au fil des années, il a su offrir un panorama représentatif de la photographie classique et moderne, luxembourgeoise et internationale. suivant de près l’évolution récente, ses responsables ont fait une large place à la photographie plasticienne et sont à l’origine de maintes expositions aux concepts novateurs et originaux.

28 mArs — 3 mAi

fAire lA peAU De l’inconscient mutations images ii Artistes elinA broTherus / evelyne couTAs / frédéric delAngle / lAurenT goldring / isAbelle grosse / kATerinA jebb / verA weisgerber commissaires christian gattinoni + danielle igniti

pour celle qui reconfigure la topographie de tous mes désirs

dans sa formulation comme dans ses présupposés cette propo-

pour que ce genre de mesure se trouve significative elle l’a rap-

sition se situe dans le prolongement d’une série d’expositions et de publi-

porté aussi aux lieux d’échanges de la marchandise, bassins portuaires de

cations sur les liens entre les productions images actuelles et les sciences

chargement des containers et marché d’intérêt nationaux tels rungis. elle

humaines , notamment la psychanalyse. on peut citer parmi celles-ci « Au

avait déjà constitué un premier corpus d’échantillons d’audience saisis en

corps des cinq sens », « Taille humaine » pour Art sénat 06, ou « who’s

groupe sur les plateaux du « juste prix » ou de la « star Academy ».

afraid of childhood », l’intouchable » lors de la Triennale de Tampere en finlande. dans l’approche de la fluidité des corps elle accompagne un travail

Avec « shaping » elle poursuit en photo et vidéo l’exploration de

critique sur les rapports arts plastiques et danse, deux instances de mise en

cet univers de mise au format des corps avant que des esprits. Alors que

mouvement et en représentation de ces corps.

ses premières photos restaient muettes elle introduit ici une métaphore du bruit et des cris d’enthousiasme orchestré que l’on attend des participants

en mêlant images fixes et vidéo il, s’agit de comprendre à travers

aux enregistrement live, pour un différé maîtrisé.

un choix d’œuvres récentes d’artistes européens comment une certaine image se donne pour tâche d’illustrer ou de tenter de contredire la fameuse sentence de jacques lacan « il n’y a pas de rapport sexuel » . ces œuvres

le casting des modèles

nous projettent dans le hors-tout du corps, au plus près du vernaculaire de la peau, comme du global des peaux de synthèse, illustrant et déphasant

sensible au corps de la signification elina brotherus s’est long-

ainsi le « moi-peau » de didier Anzieu,. serge Tisseron en évoquait aussi

temps prise pour modèle unique, qu’elle joue - dans une de ses premières

l’occurrence dans « psychanalyse de l’image » autour de la matérialisation de

vidéo à la sortie de son université d’helsinki - les apprenties danseuses aux

trois types : un corps de signification, un corps de transformation et un corps

mouvements maladroits, victime du sadisme dictatorial de sa maîtresse à

d’enveloppe.

danser, ou qu’elle mette en scène son quotidien dans des détours à propos desquels michelle debat écrivait :

pour une économie des formatages

« (...) pas de regard frontal, et même pas de visages, juste des fragments de corps témoignant d’un temps oublieux de l’instant et de ses acteurs pour nous

isAbelle grosse 'public 1' et 'public 2' 2008 phoTogrAphie

isabelle grosse vit et travaille à paris elle est représentée en france par la galerie quang (paris) www.isabellegrosse.com

elinA brotherUs 'lesson' (videostills) 1998 video

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du côté de la signification et de sa manipulation idéologique, il y a

rappeler l’universalité de ces moments-là, banals certes, communs à nous tous et

déjà longtemps que dans ses images fixes isabelle grosse cherche à donner

pourtant unique pour chacun. quotidien plus intime lorsqu’elle sort pudiquement

à chaque place sa chose et à chaque être urbain sa place désignée, terme

du bain, les hanches ceintes d’une serviette ou qu’elle offre son visage au miroir

à entendre aussi dans son acceptation anglaise de la famille du mot design.

trop embué pour nous permettre de reconnaître son visage. jamais le regard de

ses œuvres plus récentes tentent de donner corps aux pratiques manipu-

la jeune femme ne croise celui du spectateur comme pour mieux hisser au rang

latoires du « shaping ». elle s’était d’abord posé la question de l’espace vital

de symbole ce qui n’aurait pu être que constat de la vie d’une femme. »

en milieu collectif, sur les lieux de l’échange qu’offrent la rue , ses trottoirs et ses passages cloutés ainsi que dans les zones de loisirs aux périphéries.

poursuivant dans ses récentes pièces vidéo l’interrogation plas-

elle s’est dotée d’un outil d’attribution et de délimitation, une sorte de por-

tique sur la notion de modèle, elle a fait poser des étudiants d’une école

tique numérique de base . elle entoure et cerne au plus près ce qu’en danse

de beaux arts dans une pièce nue où la vidéo traque dans la figure cor-

on évoque comme la kinésphère de l’individu socialisé. rudolph laban la

porelle en mouvement attitudes, postures et caractéristiques du masculin

définissait comme « la sphère autour du corps dont la périphérie peut être

et du féminin, de leurs différences et de leurs ressemblances. elle poursuit

atteinte par les membres aisément allongés sans que le corps sur un seul

pareillement cette menée interrogative dans son livre sur les danseurs pho-

pied ne se déplace du point de support. »

tographiés sur le fond clair d’un studio. ce retournement de corps de dos,


vera weisgerber 'extrait de l'installation au centre d'art nei liicht' 2009 photographie

Vera Weisgerber vit et travaille à Luxembourg.

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elina brotherus 'model studies' (videostill & vue d'installation au kiasma de helsinki, finlande ) 2005 video

Elina Brotherus vit et travaille à Helsinki et Avallon (FR). Elle est representée par GB Agency, Paris. www.elinabrotherus.com

accroupis ou absorbés dans le quotidien ou dans la contemplation paysa-

Mais ce qui reste de l’ordre très privé de l’échantillon de peau du

gère lui aura demandé plusieurs années pour que la peau comme enveloppe

modèle connaît aussi son industrie. Si les japonais et maintenant les chinois

humaine fasse l’objet de ses compositions.

sont actifs sur ce marché, c’est dans une usine américaine de poupées gonflables hyperréalistes que Katerina Jebb a cadré au plus près ces corps hypersexués. En en montrant le moule, elle met à jour la forge simula-

Le musée des gestes corporels

tionniste, elle dénonce la fabrique de fantasmes à la chaîne. Entre latex et peau de synthèse la dynamique se joue moins au profit du désir que de ses

Du côté de l’enveloppe, Vera Weisgerber a longuement interrogé

qualités mercantiles.

les rapports nouveaux par lesquels prothèses et orthèses prolongeaient et maintenaient le corps. Elle a mené cette quête des redresseurs de corps durant deux ans dans des usines des hôpitaux, des pilgrim place, mettant

Traces & effluves

en avant leur esthétique anti-naturelle et leur complémentarité biologique. Puis en tirages et installations photo et vidéo, elle a poursuivi une approche

Pour approcher le corps de la transformation on a beaucoup, trop,

sensorielle du corps comme objet sculptural dans ses manifestations

photographié figure et nudité, mais qui, sinon une femme, pouvait s’attaquer

perceptuelles. Dans cette période, diverses transcriptions visuelles tentent

à la représentation la plus subtile, la plus sensuelle de ce qui circule entre les

déjà de donner une matérialité à la peau et aux représentations du derme et

corps.

des couches sensibles qui les composent. Un crâne photographié en plongée

et dans une lumière crue ouvre la possibilité d’un changement de perspec-

té de l’image. Pari gagné sur sa sensualité. Son monde souvent monochrome,

tive sur la matérialité de l’être sous le titre « au lieu de ». Dès cette époque

n’est hanté que par les fantômes sensibles des objets et de quelques corps

Toute l’œuvre d’Evelyne Coutas s’est construite sur l’immatériali-

la parcellisation modifie l’appréhension identitaire comme l’écrit Agnès

comme autant d’essences rares. Mettant tout son savoir technique à contre-

Izrine in « La danse dans tous ses états » à propos du chorégraphe Xavier

dire Walter Benjamin elle redonne de l’aura à ce qui traverse les surfaces

Le Roy : « L’identité communément admise s’éparpille dans cette algèbre de

fragiles de ses tirages évanescents.

la disparition,tandis que chaque segment de ce corps surexposé foisonne et

Si la pensée de Jankelvitch du « je-ne-sais-quoi et du presque-rien »

fourmille, semblant offrir ainsi une vision intrinsèque, faisant du physique une

devait trouver sa forme iconique mais magnifiée, ce serait dans ces

chambre d’écho avec vue sur l’inconscient. »

surfaces sensibles. Mais ce qui attire et bouleverse le plus reste donc cette mise en avant de l’entre-deux des corps, ces fluides, ces souffles, ces baisers

En se focalisant sur les mains, leurs gestes, leurs dimensions ac-

tracés. Face à ces images elle me permet de revivre l’expérience unique de

tives comme leurs blessures, l’artiste constitue une sorte de corpus pour un

ce trouble que je ressens lorsque tu es près de moi mon amour.

musée des sensations. Son installation nous invite à parcourir ces postures minimales dans une approche lexicale des gestes humains et de leurs conséquences personnelles.

Scènes de grâce en écarts de corps

Le scan des corps de synthèse

Du côté de la transformation, on pourrait dire que dans ses vidéos

Chez Katerina Jebb, ce qui s’opère à vif c’est d’abord ce passage

corps à partir de la logique contrariée de ses mouvements entrepris sans

Laurent Goldring se porte en recherche de nouvelles séquences ADN du de lumière qui tente de longer les corps pour en cerner les contours, en

repère de direction. Suite à ce coma provoqué de la norme image, que

grand format et à l’horizon plus proche du sol. Le groupe de chorégraphes

reste – t-il de sa forge d’art ? Comme venus de l’intérieur du corps ces

plasticiens japonais Dumb Type a déjà produit ce genre de scan de corps. La

nouvelles séquences prennent d’abord forme sur l’écran de contrôle, dans

médiation image par la photographie ou la vidéo joue la préciosité du change

sa distance esthétique. : « ces inframouvements ne conduisent pas à des

de format au plus près de la peau, l’iconique se donne toutes les qualités du

séries de déformations progressives, ils indiquent seulement la possibilité

tactile. La subtilité de cette épiphanie se porte aux couleurs saturées de

d’un autre corps là où la « figure humaine » se délite ».

luminosité d’un éblouissement, celui que l’on ressent dans la proximité

Dans cette perte programmée d’une certaine humanité le sché-

pleine d’évidence d’un corps qui envahit tout votre espace.

ma corporel se défait pour instaurer de nouvelles logiques :

Si l’une des qualités constitutive de cette production est la fluidité,

« un bras par exemple ne s’arrête jamais à l’épaule, il peut se continuer jusqu’à

on en ressent la familiarité avec les corps en suspension que Robert Flynt

la taille, ou s’arrêter à la pointe du coude, mais si on ne travaille pas la forme

insère dans ses tirages aux subtiles couleurs c-print, avant d’en reproduire

de la main, le regard va immédiatement rétablir la vision codée, qui va prendre

l’orchestration sur la scène dansée d’un autre « Body scan » chorégraphié

toute la place. »

par Benoit Lachambre. katerina jebb 'the real doll' & 'incubation of the real doll' 2005 Katerina Jebb vit et travaille à Paris Elle est représentée par la galerie MS Logan / Fred & associates New York www.katerinajebb.com

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evelyne coutas en haut

image extraite des 'thermogrammes' 1991

ilfochrome

en bas

série 'les baisers' 1993 ilfochrome

Evelyne Coutas vit et travaille à Paris. www.evelynecoutas.net

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écarts de ces œuvres qui ne sauraient rester orphelines dans

Il faut ouvrir grand l’obturateur, l’ouvrir longtemps, sur l’indicateur

l’histoire récente de l’art. Les corps sculptés dans la lumière utérine du

des valeurs la hiérarchie des temps de la prise marque pose B, tandis qu’au

studio vidéo fraternisent avec ceux devenus statues de lave au pied du

fronton des appareils anciens, la même pose ne portait que le T du temps

Vésuve pour des pionniers italiens de l’analogie argentique, d’autres gar-

longuement convoqué, le temps déborde ce seul temps technique, en pose

dent distance critique avec les sorties du bordel de l’atelier Bacon, tandis

T le temps fait masse, le temps de la pose T fait l’impasse sur les formes, nous

que d’autres dans leur plénitude arrondie semblent issus du ciseau d’Henry

économisant l’excuse du voyeurisme au temps t moins x de l’acte, les deux

Moore.

corps sont nus sur le champ du lit, au temps t moins toi de nos retrouvailles

En même temps, ils sont plus charnus, plus sexués dans l’indiffé-

sur le champ de notre studio il n’y a d’image que l’attente de l’amour, toutes

renciation de l’organe, ils battent sur un mode inédit : ces corps se res-

les photos sont prises au T plus 2 des corps amoureux

tructurent hors d’une logique fonctionnelle organique qui les projette dans

un destin façon poupées de Bellmer, mais par trop charnels. Totalement

des médicaments, de « coïts », Frédéric Delangle nous entraîne dans une

incarnés ces corps vivent loin de tout drame leur humanité sans tête. Leur

logique nominative qui souhaite prendre en compte avant tout la mécanique

apparente fragilité se trouve contredite par une insolente beauté, quand

des corps, la physique énergétique de leur fusion. Comme si on ne pouvait

ils restent ainsi non socialisables, vierges de toute visée opérationnelle. Les

y lire encore une fois que la défense et illustration de l’aphorisme de Jacques

aperçoit-on intouchables ils se donnent aussitôt de grands airs de séduction

Lacan « Il n’ y a pas de rapport sexuel ».

appelant des caresses qu’on veut elles aussi inédites.

En choisissant le titre aussi froid que générique, comme on le dit

Chaque position d’un des deux membres du couple tenue

Laurent Goldring fait confiance à une certaine logique de la

suffisamment longtemps pour inscrire sa trace s’ajoute au centre du plein

matière propre au support, à sa fluidité contrariée par l’arrêt du geste ar-

cadre de l’image aux autres traces corporelles. Là les « coïts » installent la

tistique. Il travaille dans l’angle mort de la vision, là où ce qui échappe du

polymorphie des corps en présence dans un continuum temporel.

corps peut soit faire chorus soit faire masse dans sa découverte toujours

retardée. Il y a une prise en compte de l’accidentel dans ces œuvres qui

phique pourrait rappeler la construction d’une intimité dramatique. Ici la

signent paradoxalement leur pleine maîtrise dans le cadre. C’est là que la

matérialisation du plan d’opération des corps se déplie en lit, couche ou

logique spécifique au médium, l’intériorité exacerbée du matériau, nous fait

surface au sol, elle les positionne en une ligne que le fouillis des corps a vite

le coup de la grâce. Nous y succombons dans la reconnaissance détournée

fait de transformer en socle, pour une statuaire tout à l’honneur du couple

du corps aimé, dans nos retrouvailles quand il devient pure fluide présence,

peau à peau.

Le positionnement relativement bas de la chambre photogra-

ou sculpture de désir étrangement combinée à l’articulation de notre regard sur sa proximité troublante.

Tous ces artistes - qu’ils démontent le spectacle imposé de la

société des prime time du désir ou qu’ils revendiquent d’autres espaces Donner forme au couple

pour un corps conçu comme relationnel - travaillent à retendre sur le bâti de l’image la peau comme expression d’un inconscient. Il n’est plus donc

D’abord il faudrait le noir, noir de la page, de la chambre et de

d’image originelle et le jeu des citations, des croisements pluri-artistiques, se

laurent goldring ' untitled' (videostills) c. 2002-2003 video

la chambre noire. Il y aurait la chaleur des corps, la couleur chaude des

confère les pouvoirs kinesthésiques de multiplier les mutations d’images sur

lumières d’intérieur, leur teneur chair et sa translation en température de

les transmutations corporelles, là se donne en spectacle vivant une nouvelle

Né à Paris (France) en 1957 Vit, peint, sculpte, dessine et fait des vidéos à Paris Son travail a contribué à d'importantes évolutions dans le champ de la danse contemporaine et a été largement montré un peu partout.

couleurs. Intérieur nuit préciserait le scénario. A moins qu’il ne s’agisse de

topographie du désir.

la fausse nuit simulée des rideaux, il faudrait que le rideau de l’obturateur

s’abaisse pour que la surface soit impressionnée, il pourrait s’agir encore de la nuit américaine du studio, de la chambre d’amour transformée en lieu studieux des corps, transférée au studiolo appliqué des deux corps là abandonnés. Pour les apercevoir et mieux encore les distinguer il faudrait se tenir dans le retrait noir à l’écart de la scène, à distance hors champ de la lumière des corps, dans le temps noir de la page, le terme chambre obscure y définirait autant le lieu d’incarnation des images que celui de l’exercice des corps complices. L’acquiescement de la lumière donne à ces deux corps co-présents leurs dimension selon toutes les gradations de l’expérience, de la rencontre, comment faudrait-il en rejouer les circonstances pour approcher ce désir de fusion ? Frédéric Delangle lui, photographie à la troisième personne ce champ dialogue des deux premières.

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Christian Gattinoni


frédéric delangle 'coït' 2006 photographie

Frédéric Delangle est né en 1965. Il vit en région parisienne. www.fredericdelangle.com

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luxembourg gAlerie clAirefontAine e spAce 2

21, rue du st-esprit Tél. +352 47 23 24 ouver t du mardi au vendredi : 14h30 - 18h30 samedi : 10h - 12h & 14h - 17h www.galerie-clairefontaine.lu

c’est en 1988 que la galerie ouvre son premier lieu d’exposition, l’espace 1, avec une programmation diversifiée qui comprend des artistes contemporains, des grands classiques, mais aussi de jeunes artistes luxembourgeois et étrangers. en 1997 est inauguré l’espace 2, situé à quelques mètres du premier espace, où est montré principalement la photographie classique, la photographie plasticienne ainsi que l’art conceptuel. les deux galeries sont situées au coeur du centre historique de la ville de luxembourg, seulement à quelques pas des musées et du palais grand-ducal. le concept des deux espaces consiste à confronter d’une part des œuvres traditionnelles et établies et d’autre part un art jeune et provocateur. la galeriste dr. marita ruiter a, en plus, lancé quelques projets à long terme, comme le festival de photographie « photomeetings luxembourg » dont la quatrième édition a eu lieu en 2008. en 1997 et 2002, la série des « portraits de luxembourgeois » a été produite et éditée. cette étude de la société luxembourgeoise sera également poursuivie. en collaboration avec des instituts culturels, la galerie fait voyager dans le monde entier des collections de photographies comme « gisèle freund, portraits d’artistes et d’écrivains », « hugo ernst vom hagen, prises de vue aériennes de berlin », « fidel castro et la révolution cubaine 1959-60 ». la galerie clairefontaine participe régulièrement aux foires telles que art basel, art cologne, arco, aipad new york, dfoto, art brussels, fiac, miami etc. la galerie représente des artistes tels que dieter appelt, nobuyoshi araki, gabriele basilico, peter bialobrzeski, jean-marie biwer, giacomo costa, stéphane couturier, roland fischer, franco fontana, gisèle freund, daniel & geo fuchs, horst p.horst, jörg immendorff, mimmo jodice, markus lüpertz, james nachtwey, michael najjar, max neumann, marla rutherford, august sander, roland schauls, edward steichen, hiroshi sugimoto, marie taillefer, massimo vitali, hugo ernst georg vom hagen...

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5 mArs — 11 Avril

giAcoMo costA the chronicles of time


" one aspect of giacomo costa’s work is the extent to which it is so utterly convincing. Two of his works hang side to side above the reception desk in the madrid office of my design practice. one day the lady at the desk noticed a visitor staring intently at his photographs on the wall and looking more and more agitated. finally, unable to contain himself, he asked our receptionist - “when did all of this happen? i never even heard about it!”

" most of the works have an all-pervading sense of darkness and destruction, although there are exceptions. one of these is a vertically stretched metropolis, with many styles and periods, layered one on top of the other, rising like a canyon bathed in sunlight. however the one overriding and unifying theme that binds everything together is that of dense urbanity – virtually all of the images are of the city in one form or another.

" in recounting this anecdote, i am critically aware of the fact that there is so much more depth to the art of giacomo costa’s work than its technical perfection, however impressive that might be. his total mastery of digital technologies and ability to meticulously fuse it with traditional photography is never an end in itself – but rather the means to unlock his apocryphal visions – to unleash a fierce imagination limited only by the four edges of each work.

" i wonder at the coincidence of timing when here in 2008 we are taking stock of giacomo costa’s work. This is precisely the year, when for the first time, there are more people now in cities than in the history of our civilisation. by 2050 it is predicted that 70% of the world’s population will be urban.

" This book covers the twelve years of his creative output. several of the works shown here, including those in madrid, are in the personal domain of our family, so we literally live with them. This is largely consequence of my wife’s foresight in identifying the talent of giacomo costa from her first contact with his work some three years ago. " i never discussed the imagery of these pages with the author, but they evoke science fiction, doom laden prophecies and man-made disasters. They have an eerie quietness, mostly bereft of life and deeply foreboding. Although destruction and decay permeates so many of these works there is often the counterpoint of some other-worldly intervention with an alien, futuristic geometry – the remnants of a later and more idealised urbanity. The monumentality of these interventions recall the heroic visions of a boullée or soleri.

" These portrayals of the city occur not only post-911, but in a period in which the terrorist threat lurks behind our everyday normality. in these unsettling times our pundits conjecture if and when hidden forces might unleash the Armageddon of a nuclear strike or biological attack out of the blue. giacomo costa’s visions, with their infinite perspectives and limitless horizons, are like ruins from a lost civilization, which could be our civilization. " Through his powerful vision they remind us above all of the fragility of our built world and the civic premises that have so far underpinned it. "

norman foster texte extrait de la monographie «giacomo costa, the chronicles of time»

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ci-dessus

aqua n°7

2008

double-page précédente persistenza n°1 2008

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en haut

fusione n째1

2007

en bas

scena n째22

2004

en haut 2008

consistenza n째2

en bas 2008

costruzione n째1

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luxembourg lUcien schweitzer gAlerie d’ArT

24, avenue monterey Tél. +352 23 61 65 6 ouver t du mardi au samedi : 10h - 18h www.lucien-schweitzer.lu

après le succès du premier mois européen de la photographie au luxembourg, la galerie lucien schweitzer a le plaisir de participer à nouveau à cet événement. depuis plusieurs années, la photographie fait partie intégrante de la programmation de la galerie créée en 1989. bien que l’intérêt pour la photographie soit jeune, la galerie compte actuellement des graphes comme georges rousse, patrick maître-grand, laurence demaison, tom andrej pirrwitz, pascal kern ou encore bosser, parmi les artistes permanents.

encore photobaillydrahos, jacques

26 mArs — 30 Avril

MUtAtions-MigrAtions jAcques bosser / lAurence demAison / Tom drAhos

Jacques bosser est un citoyen du monde qui a vécu en Afrique, en Amérique, en Asie et en europe. d’où l’importance de ce qu’il appelle « les interférences culturelles ». les œuvres exposées se référèrent notamment à la mutation profonde de notre culture. le travestissement dans les mangas, le métissage européen par les africains ou encore les mutations politiques ; les mutations culturelles sont au centre de ses préoccupations. dans une époque de la communication directe, où la transformation et la diversité envahissante des images s’imposent, jacques bosser crée des photographies hybrides associant différents codes culturels, tout en témoignant de la globalisation de nos sociétés et cultures.

tom drahos veut « s’engager dans le monde » sans néanmoins en faire une critique. il réalise un commentaire subjectif sans pour autant proposer des solutions. il crée dans ses œuvres « un univers à travers une multiplicité d’images » récupérées, qu’il manipule et associe. elles sont accompagnées par des courtes phrases, dont la force d’impact sonore et visuel est immédiate. le but est de créer des images qui parlent à tous, invitant les spectateurs à réfléchir, à s’engager dans la société contemporaine. le projet « Time of brake », conçu pour le mois européen de la photographie, met en scène l’antagonisme entre la culture occidentale et la culture de l’Êxtrême-orient. la mutation des sociétés vers une société globale, dictée par l’occident, menant à des tensions et à un véritable « clash » des civilisations.

laurence demaison est la seule des trois artistes présentés dans cette exposition à explorer la relation avec son image, le rapport d’ellemême à son propre corps. dévoilant pour nous une oscillation permanente entre dégout et attraction, entre fascination et répulsion. une inquiétante étrangeté prend place dans ses œuvres, mettant à mal notre conception de la beauté héritée de la renaissance. l’obsession de la dissimulation donne naissance à des jeux plastiques, des fragments et des silhouettes. comme des autoportraits mutants, dévoilant un « désir inconscient de fuir un malaise, de devenir quelqu’un d’autre » jAcqUes bosser en hAuT 2008

du repos

en bAs

archange-miguel

2008

pAge de droiTe

calintz

64

2008


65


laurence demaison ci-dessus 2005

phototgraphies n°28

Ă droite

billes noires 2007

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tom drahos en haut 2009

ĂŠrythrĂŠe

en bas

japan 2009

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luxembourg nosbAUM&reDing Art conteMporAin

4 rue wiltheim, luxembourg Tél. +352 26 19 05 55 ouver t du mardi au samedi : 12h - 18h www.nosbaumreding.lu

fondée en 2001 par véronique nosbaum et alex reding, la galerie nosbaum & reding – art contemporain est située depuis septembre 2006 dans le prestigieux centre historique de la ville de luxembourg. depuis ses débuts, la galerie s’est concentrée sur de jeunes et émergents artistes venant du luxembourg et des pays voisins, occasionnellement se tournant vers d’autres pays européens comme l’estonie, la pologne, le portugal et la suisse. le programme de la galerie est fortement axé sur la peinture figurative et conceptuelle, en alternant avec de la photographie, de la sculpture et des installations. c’est la deuxième fois que la galerie participe au mois européen de la photographie à luxembourg, en présentant pour l’édition 2009 une exposition de la peintre d’origine luxembourgeoise tina gillen, dont la photographie est le pivot de sa pratique picturale. la galerie représente yoshitaka amano, marcel berlanger, karina bisch, aline bouvy / john gillis, hugo canoilas, nicolas chardon, damien deroubaix, tina gillen, una hunderi, hubert kiecol, claude lévêque, myriam mechita, jean-luc moerman, manuel ocampo, wawrzyniec tokarski, maja weyermann, mette winckelmann et jens wolf.

19 mArs — 2 mAi

tinA gillen timberland « entre le peintre et le caméraman, nous retrouvons le même rapport qu’entre le mage et le chirurgien. l’un observe, en peignant, une distance naturelle entre la réalité donnée et lui-même; le caméraman pénètre en profondeur dans la trame même du donné. les images qu’ils obtiennent l’un et l’autre diffèrent à un point extraordinaire. celle du peintre est globale, celle du caméraman se morcelle en un grand nombre de parties, dont chacune obéit à ses lois propres. » walter benjamin, l’Œuvre d’art à l’ère de sa reproductibilité technique (1936)

ce passage du célèbre traité de walter benjamin apparaît en exergue d’une réflexion du commissaire d’expositions frank maes sur les rapports entre photographie et peinture dans l’œuvre de la peintre d’origine luxembourgeoise Tina gillen . l’auteur poursuit en précisant qu’au début de sa carrière, l’artiste avait un temps hésité entre les deux disciplines, au point de développer son travail en deux directions avant de se consacrer exclusivement à la peinture. pour autant, Tina gillen ne s’est jamais complètement départie de la photographie, dont elle a au contraire fait le pivot de sa pratique picturale. points de départ d’une recherche iconographique qui prend forme au cours du travail pictural à proprement parler, les prises de vues photographiques – réalisées par l’artiste elle-même, trouvées sur internet ou extraites de magazines – s’avèrent indispensables au processus de réflexion qui caractérise ses œuvres, dans la mesure où, pour parler avec maes, elles « définiss[e]nt dans une grande mesure leurs contexte, perspective, ambiance et motif ». en adjoignant le regard photographique à l’architecture – l’autre axe majeur de sa recherche picturale – Tina gillen renvoie à un couple paradigmatique de la modernité (l’œil du cinématographe rencontrant celui de l’architecte), qui devait façonner l’environnement de l’homme futur. la peinture lui permet alors d’aller à l’essence des choses au moyen d’un processus de fragmentation et d’abstraction de l’image de départ. dans un récent entretien avec eva wittocx, l’artiste résume ainsi sa démarche : « si l’image de départ me sert [...] de prétexte pour commencer le travail, elle se confond avec l’arrière-plan au fur et à mesure que je peins. [...] lorsque je peins, je m’écarte progressivement de l’image de départ pour suivre mon intuition, ce qui me permet de laisser libre cours à mes expériences et émotions. » dans les tableaux de Tina gillen, stylisation, abstraction et déracinement des motifs se conjuguent pour articuler un univers qui, tout en étant généralement dénué de figures humaines, reflète la condition de l’homme dans son environnement. comme l’explique la peintre : « je veux que mes images, en étant ancrées dans la réalité qui est la nôtre, nous apprennent quelque chose sur le monde. » en hAuT 2008

zimmer frei Toutes les citations sont extraites de la récente monographie tina gillen : necessary journey, éditée par oliver zybok, avec des textes de steven jacobs, frank maes, eva wittocx et oliver zybok, hatje cantz, ostfildern-ruit, 2008.

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en bAs 2008

1800m


stadium

2008

Collection privĂŠe, Luxembourg

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en haut à droite

lodge II

2008

au milieu à gauche

gym II

2008

en bas à gauche

k atrina

2008

en bas à droite

interruption

70

2008


en haut à droite 2008

gas station II

Collection privée, Luxembourg

au milieu à gauche canoes 2008 au milieu à droite sunset 2008 en bas à droite 2008

swimming pool IV

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luxembourg gAlerie toxic

2, rue de l'eau l-1449 luxembourg Tél. +352 26 20 21 43 ouver t du mardi au samedi : 14h - 18h www.galerietoxic.com

dans le monde de l'art contemporain à luxembourg, la galerie toxic a fait figure de pionnier. elle a ouvert ses portes en 1995 dans une vieille maison du quartier de la gare. au milieu des années 90, le galeriste avant-gardiste, armand hein, représentait une nouvelle génération, un vent nouveau avec de la vidéo, de la photo, des installations.. en octobre 2006, la galerie toxic s'installe dans des nouveaux locaux au 2, rue de l'eau. la galerie a poursuivi sa démarche de présenter des jeunes talents ainsi que des artistes confirmés, nationaux et internationaux, sans se confiner à une seule forme d'expression artistique. elle propose ainsi tout au long de l'année des expositions comprenant soit de la peinture, des dessins, des vidéos, des installations, des performances et des photographies...) la galerie toxic organise souvent dans son espace des expositions de groupe où elle associe des artistes d'horizons variés et aux pratiques diverses. elle ne se contente pas de présenter une accumulation de pièces ou de personnalités mais elle y instaure une scénographie cohérente et interactive pour susciter un dialogue significatif entre les différents artistes. la galerie toxic participe également à des foires d'art contemporain à l'étranger dans le but de promouvoir les artistes sur le plan international.

6 mArs — 11 Avril

Miroir, Miroir gAsT bouscheT eT nAdine hilberT / jeAn-bApTisTe bruAnT / isAbelle dAmé / dAvid de TschArner olivier dollinger / sTeve kAspAr / jAn vAn oosT / Angel vergArA / yun Aiyoung

le miroir comme reflet du monde ou le début d’un songe. un songe qui finit mal, comme le miroir traversé par une balle de revolver de Jan van oost. miroir comme le reflet mental de la réalité dans les petites toiles « actes et tableaux » d’angel vergara. les reflets mystérieux des photos d’isabelle damé, les stills de la vidéo « hi.xul » de steve kaspar. la vidéo de david de tscharner dans laquelle une plante verte est traversée par des spasmes au rythme d’une musique techno. puis le miroir de la réalité des mégapoles comme mexico city dans les photos de gast bouschet et nadine hilbert. encore miroir d’un monde imaginaire derrière la visière d’un casque de moto où défile la vidéo de yun aiyoung. et puis le songe continue avec les dédoublements de couchers de soleil d’olivier dollinger ainsi que les déambulations nocturnes dans les grands magasins la samaritaine à paris de Jean-baptiste bruant.

isAbelle DAMé mirrored light reflecting 2009

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gAst boUschet et nADine hilbert radio cosmos - mexico city 1998 - 2005


jean-baptiste bruant  photo 1999

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angel vergara actes et tableaux 1991

jan van oost titian 1987

yun aiyoung cm 2008

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steve kaspar Hi.Xul Cycle (extract) 2009

olivier dollinger globalsunset 2009

david de tscharner don't be lighT 2005

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luxembourg bgl e spAce royAl monTerey

27, avenue monterey Tél. +352 42 42-1 ouver t du lundi au vendredi : 9h00 - 16h30 www.bgl.lu

dans le cadre du mois européen de la photographie, en 2006, bgl accueillait l’exposition « the photographic image » de man ray, photographe surréaliste, en ses locaux à l’espace royal-monterey. une exposition reflétant l’engagement traditionnel de bgl de promouvoir l’expression artistique en accompagnant ses adeptes au cœur de la création. la rigueur et le professionnalisme, certes indispensables dans le monde financier, ne sont pas suffisants pour assurer la qualité d’une entreprise. sans dimension humaine, sans culture, sans passion, le métier ne se résumerait qu’à une simple accumulation de chiffres. en effet, l’idée de soutenir la création artistique tient de l’évidence dès lors que l’on accepte de considérer la culture pour ce qu’elle est, c’est-à-dire plus qu’une trajectoire conceptuelle et plus qu’une activité académique, mais bien un pan complet de notre projet de société. c’est avec plaisir qu’en 2009, bgl, entreprise citoyenne, participe, avec l’exposition « landschaften » de l’artiste photographe marco piono, à une nouvelle édition du mois européen de la photographie. bgl reste ainsi fidèle à sa philosophie d’opter pour des partenariats à valeur ajoutée dans l’environnement culturel et sociétal luxembourgeois.

26 mArs — 10 Avril

MArco piono landschaften marco piono, 1959 in hamburg geboren, lebt und arbeitet in berlin und carrara (italien) . seit 1987 ist er als bildhauer, maler und fotograf tätig. durch die zahlreichen einzel - und gruppenausstellungen sowie die teilnahme an internationalen kunstmessen wie art cologne 1995 oder art basel 1998 wurde sein name in der kunstszene ein begriff.

landschaften : es begann mit filmen, die von einem fernsehgerät übertragen

die spiegelung und verdoppelung jedes bildes ist das leitmotiv des künstlers

wurden. plötzlich traten störungen auf! die gesendeten bilder wandelten

und wird von ihm als „polarität“ bezeichnet. so ergänzen sich gegensätze,

sich in große pixel um, und formten ab jetzt das gezeigte neu. marco piono

das weibliche wird zum männlichen, das schöne zum hässlichen. das

wurde auf diese bildstörung aufmerksam. die intensiven farben und klaren

konzept ist im gesamtwerk allgegenwärtig und wird dem betrachter

formen vermischten sich ineinander.

manchmal direkt, manchmal indirekt übermittelt.

durch die minimale lebensdauer dieser kompositionen hatte der künstler

die serie landschaften bekräftigt und vervollständigt die grundlage des

nur wenig zeit – mit einer hochauflösenden kamera die „landschaften“

konzepts. digital gedruckt und hinter Acryl kaschiert wird jedes bild ges-

festzuhalten, zu verewigen.

piegelt, sodass jedes „einzelne“ werk aus zwei fotografien besteht. die polarität besteht allerdings nicht nur in der verdopplung des bildes sondern

Aber was ist eine landschaft? Alles ist nur eine frage der definition!

auch darin, kürzeste momente zu verewigen.

durch den einsatz des künstlerischen Auges kann aus der natur eine landschaft entstehen.

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lucie hoffmann


ci-contre

l andschaft #14 courtesy of the artist double.page suivante

l andschaft #11 courtesy of the artist

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luxembourg bAnqUe De lUxeMboUrg

14, boulevard royal Tél. +352 49 92 41 ouver t du lundi au vendredi : 9h - 16h30 www.banquedeluxembourg.com

la banque de luxembourg a acquis au fil du temps un certain nombre d’œuvres d’artistes contemporains. notre volonté n’est pas tant celle de constituer une collection que d’apporter un contrepoint à l’architecture de nos différentes implantations. si notre attention s’est longtemps portée sur la peinture et la sculpture, nous nous sommes progressivement ouverts à la photographie. nos premières acquisitions furent celle de travaux de la photographe belge marie-jo lafontaine. la dernière en date est l’œuvre « memor y » de georges rousse réalisée à l’occasion de son travail sur les friches industrielles du sud de notre pays. nous sommes heureux aujourd’hui de faire découvrir aux visiteurs du mois européen de la photographie une sélection de nos œuvres photographiques.

28 mArs — 29 mAi

ŒUvres De lA collection de n n is ada ms / o l a ko l e h m a i n e n / m a r i e- j o l af o n ta i n e

MArie-jo lAfontAine série ‘fleurs’ (détail) 1996 les f leurs sont démesurées, glacées par le procédé photographique. la lumière est violente, contrastée, c’est celle d’un huis-clos. rouges, les pétales ; rouge, la jupe carmin de la danseuse de f lamenco d’A las cinco de la Tarde, une vidéo de marie-jo lafontaine qui reprend le titre du poème tragique de federico garcia lorca ; rouge, la muleta du torero d’une autre vidéo. À cinq heures du soir, les plaies brûlaient comme des soleils… les f leurs sont coupées. les pistils jaillissent comme les jambes dansantes des jupons fendus. marie-jo lafontaine est née en 1950 à Anvers (belgique). essentiellement vidéaste, elle travaille la vidéo autant que les installations de moniteurs dans l’espace. dans les années 1980, deux thèmes, le corps humain et la machine, se superposent par analogie dans un univers érotique et violent, avec la marie-salope (1980, une roue hydraulique à godets), round around the ring (1982) et a las cinco de la tarde (1985). magnifié par le traitement subtil de l’image en clair-obscur, lunaire (décontextualisation, profondeur de champ limitée, etc.) et par le montage pensé de manière r ythmique, chaque scénario trouve écho dans des scénographies spectaculaires. dans les larmes d’acier (27 moniteurs, 1986), des athlètes souffrent en s’entraînant à la musculation au son de norma, de bellini, interprété par maria callas. fétichistes de leur musculature, les héros signent de leur épuisement le déclin du désir masculin dont le corps de la femme est l’origine. dans victoria (19 moniteurs, 1988) deux hommes s’affrontent en dansant, entourés d’un public invisible qui par ticipe au duel en frappant des mains. le combat esthétisé ne compor te aucune scène de violence proprement dite. le regard seul soutient le conflit. le dispositif plonge le spectateur au coeur d’une arène de moniteurs disposés en spirale. Autour des années 2000, la violence dans l’oeuvre de marie-jo lafontaine est moins explicite, mais reste potentielle. ivre d’éternité, j’oublie la futilité de ce monde ( 1996 ) nous plonge dans les nuages. loin d’une terre en feu, le combat d’orages et d’éclairs continue, c’est celui des éléments. l’homme n’y a, en apparence, aucune par t. the swing ( 17 moniteurs, 1999 ) nous ramène à un juste milieu. entre ciel et terre, une enfant se balance. elle joue. À la faveur de ses mouvements pendulaires, elle dévoile au spectateur des fragments de son corps innocent. entre innocence et culpabilité du regard, entre terre et ciel déchirés, à chacun de trouver l’équilibre. marie-jo lafontaine est aussi photographe. ses por traits d’enfants, torse nus, frontaux, hors contexte, en noir et blanc (savoir, retenir et fixer ce qui est sublime, 1989) ou en couleur (babylon babies, 2003), exprime-t-ils la nostalgie ambigüe d’un adulte pour une enfance disparue ou bien la critique d’un monde où il n’y a plus de place pour l’enfance ? lost paradise ( 2003 ), une série de très gros plans de fleurs capiteuses et inquiétantes, incline à une réponse pessimiste.

double-pAge suivAnTe

olA kolehMAinen 'what is he doing there’ 2004 c’est la partie centrale de la façade de la banque de luxembourg, boulevard royal, qu’a photographié ola kolehmainen. ce n’est pas une commande et le hasard seul a favorisé la rencontre de l’oeuvre dans une galerie. le constraste est fort entre la rigueur minimaliste du bâtiment de la banque et les ref lets ondoyants des modules de préfabrication des façades qui lui font face. en s’invitant par effets de miroir, il y a plus que les styles qui s’entremêlent : les deux côtés de l’avenue ne font plus qu’un. une ville est contenue dans cette image. le photographe révèle incidemment que la construction échappe à l’architecte dès qu’elle est livrée et que celle des voisins prend ici le pas sur la sienne. une leçon de modestie à laquelle participe l’arbre menu que l’hiver rend plus fragile encore. ola kolehmainen est né en 1964 à helsinki (finlande). formé initialement au journalisme, ola kolehmainen bifurque dans les années 1990 vers les cours de photographie de l’université d’ar t et de design d’helsinki. il devient l’un des représentants d’une approche visuelle qui fait école. bien plus qu’un regroupement d’ar tistes finlandais, l’école d’helsinki représente une culture de la photographie qui met l’accent sur la critique, la collaboration et l’échange d’idées, et dans laquelle théorie et réalité vont de pair. elle a évolué au cours des trente dernières années d’un photojournalisme documentaire à une photographie d’ar t conceptuelle. l’oeuvre d’ola kolehmainen est un travail d’une grande sobriété, dépour vu de l’effet séducteur d’une éventuelle perspective. les vues sont rigoureusement frontales. le cadre est serré, il n’y a aucune échappatoire visuelle vers un ciel dégagé ou un trottoir arpenté par un quelconque piéton qui humaniserait la représentation de sa démarche. le spectateur pourrait être accablé de ne pouvoir qu’imaginer le prolongement à l’infini de ces surfaces uniformes. mais ce travail est aussi d’une grande subtilité. Au choix des surfaces réfléchissant aussi bien l’architecture, les ciels changeants que le spectateur de l’oeuvre – celui-ci se trouvant, de par le procédé technique, intégré par son reflet au processus d’illusion conçu par l’ar tiste – il ajoute une autre constante : le goût pour les espaces sériels, pour la répétition la plus systématique des modules industriels dessinant les façades, escaliers, fenêtres, toits… d’immeubles publics ou de bureaux. modules de béton préfabriqués, tôles embouties, carrelages… contre toute attente, cette architecture internationale de parallélépipèdes et de motifs répétitifs qui s’épuisent dans la standardisation, gagne avec ola kolehmainen une sensibilité par ticulière. il n’est pas de carreau de vitre suffisamment plan pour ne pas déformer le reflet des architectures les plus sinistres en mouvement de fractionnement, de faux raccords, de déformations grotesques, d’envol en oriflammes, qui produisent la fantasmagorie la plus vivante qui soit. l’ar tiste parle de « faire ressentir au spectateur [sa] propre expérience cathar tique de l’espace ». et lorsque s’épuise le reflet, le miroir laissant la place au béton ou à l’acier, il n’est pas rare d’apercevoir l’extrémité ténue d’un arbrisseau dépouillé par l’hiver opposer à l’ordre minéral tout-puissant le désordre organique de ses rameaux minuscules.

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dennis adams 'patriot' et 'i’m sorry' 2002 Le 11 septembre 2001, la frontière entre civilisation et barbarie s’est déplacée au coeur de New-York. Comment représenter l’inconcevable ? En 2002, Dennis Adams crée Airborne. Une série de photos d’apparence paisibles, prises dans le bas de Manhattan. Des objets quotidiens abandonnés, projetés dans le ciel par les vents qui se créent entre les immeubles. Rien ne signif ie le drame. C’est le contexte auquel l’artiste dédie ces photos qui leur conf ère leur potentiel dramatique. Le rouge exacerbé et le titre « I’M SORRY » témoignent seuls de ce retournement. Qui prononce ces condoléances ? L’artiste, un politicien, un meurtrier, le spectateur ? L’oeuvre laisse le sens littéralement en suspens et c’est l’imaginaire du spectateur, confronté à l’intention de l’artiste, qui achève librement l’interprétation.

Dennis Adams est né en 1948 à Des Moines ( États-Unis). L’espace public urbain a très tôt fasciné Dennis Adams, et dans cet espace, plus encore, les frontières entre les quar tiers, brusques ou imperceptibles, intimes et mouvantes mais essentielles à ses yeux. Ces endroits qui déstabilisent la connaissance et la raison permettent de nouveaux langages et lui font quitter très tôt son atelier de New-York. Au cours des années 1970, il s’approprie la séduction de la culture publicitaire pour toucher, mieux que les avantgardes contemporaines, un vaste public. Au dépar t instinctives, ses interventions acquièrent plus tard une signification sociale et archéologique. À par tir des années 1980, il inter vient par des actions discrètes et subtiles dans des abribus et sur des passages piétonniers. Il confronte le spectateur/citadin à son environnement par un léger dérangement de l’ordonnance habituelle des choses qui est une manière de signifier sans violence. Ses oeuvres peuvent paraître inachevées. Elles laissent le sens en suspens et c’est l’imaginaire du spectateur qui achève la signification. Dennis Adams prépare longuement, et sur place, ses inter ventions par des enquêtes historiques et sociales. Aujourd’hui, ses oeuvres mêlent performances, vidéos, projections et photographies. Il s’attache à mettre au jour, au sein de la ville, les processus de la mémoire collective et du contrôle social dans la conception et l’utilisation de l’architecture et de l’espace urbain. Il interroge les opérations d’échanges, de transactions, ou de conversions symboliques. Le travail de Dennis Adams touche à la fois à la critique sociale, à la parodie, et à une tentative utopique de reconstruction de la mémoire.

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bridel leslie’s Art gAllery

66-68 rue de luxembourg, bridel Tél. +352 621 132 890 ouver t du mardi au samedi de 15h à 19h www.ar tgallery.lu

c’est en 2005 que la jeune galeriste leslie barnig décide d’ouvrir sa galerie d’art contemporain à bridel, luxembourg. depuis, la galerie se dévoue entièrement à montrer dans ses deux espaces indépendants, des artistes contemporains émergents nationaux et internationaux. toujours à l’affût de nouveaux talents, la galeriste s’intéresse surtout à la jeune génération américaine et canadienne, qu’elle propose à son public européen. exposant toutes les disciplines artistiques, la galerie garde cependant depuis son ouverture une légère préférence pour la peinture figurative. leslie’s artgallery représente entre autres les artistes suivants : nathan james, brian donnelly, dominka dratwa, grant barnhart, billy & hells, sarah bourdarias, angelou guingon, sarah sutton, kokian, jorge rubert, julien legars, peter michael, catherine ryan, jane zweibel, janne nabb, camilla engmann, cédrix crespel, teiji hayama...

5 mArs — 30 Avril

billy&hells sisters of mercy dans le cadre du mois européen de la photographie luxembourg 2009, la leslie’s Artgallery présente les travaux photographiques du couple d’artistes berlinois billy & hells. s’ils se sont rencontrés en 1989, c’est seulement en 1993 que le couple a choisi de signer leur travail commun sous cette appellation un peu rock et glamour de billy & hells, lors de son installation dans un studio photo munichois. ils ont acquis leur renommée internationale lorsque leurs clichés sont parus dans des revues telles que le süddeutsche, cosmopolitan ou jalouse. vivant depuis 2000 à berlin où règne cette singulière effervescence artistique qui attire comme un aimant moult créateurs, billy & hells réalisent d’étonnants portraits et des photographies de mode où les modèles sont mis en scène dans des ambiances rétro. un parfum romanesque style « Autant en emporte le vent » émane de certains de leurs clichés alors qu’ailleurs les personnages ont des allures de jesse james ou de calamity jane. d’autres images ont un aspect très historiciste presque préraphaélite et semblent revisiter les figures iconiques de maîtres anciens. les femmes ressemblent à des héroïnes cinématographiques fortes d’un potentiel de séduction équivoque. la sensualité affleure nettement dans ces photographies raffinées et narratives. nathalie becker

ci-dessus

schwester alexandra

2008

pAge de droiTe

schwester constanze

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2008


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Schwester, unbekannte Freundin, gütige Mutter, geliebter Engel aller irdischen Schmerzen, seidener Faden des Lebens, selbstlose Dienerin nahe dem Tod, unbefleckte Madonna gezeichnet mit Rot , streitbare Wächterin der endlosen Nacht , schwebendes Licht am Rande der Finsternis, wärmende Hand im rauschendem Weiß, schwertlose Kreuzritterin der Dämmerung, sanftmütige Herrscherin über unbeschreibbares Leid, furchtlose Heldin Deines letzten Traums. Barmherzige

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de gauche Ă droite et de haut en bas schwester constanze 2 2008 schwester maria 2008 schwester sophie 2008 schwester yael 2008 schwester hannah 2008

page de gauche

sisters of mercy

2008

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centre nAtionAl De l 'AUDiovisUel

dudelAnge Pantone 2935c

displAy01

1b, rue du centenaire, dudelange Tél. +352 52 24 24-1 ouver t du mardi au dimanche : 10h - 22h possibilités de visites guidées sur demande Tél : 52 24 24 702 fax : 52 06 55 e-mail : photographie@cna.etat.lu www.cna.lu

le centre national de l’audiovisuel (cna) est un institut culturel créé en 1989 et placé sous l’autorité du ministère de la culture, de l’enseignement supérieur et de la recherche. ses missions sont la sauvegarde, la mise en valeur et la promotion du patrimoine audiovisuel luxembourgeois. depuis fin 2007, installé dans de nouveaux lieux, le cna est devenu un espace d’exposition (display01) et de découverte (display02) , un lieu de projections cinématographiques (cinéstarlight) , de consultation de documents (médiathèque) , mais aussi un centre spécialisé regroupant archives, studios (son et prise de vue) et laboratoires photographiques. cherchant à permettre au grand public de rencontrer des artistes, des styles et des «façons de voir» et de répondre aux besoins des professionnels et des créateurs du domaine de la photographie, le département photographie du cna produit régulièrement des expositions et des projections, organise des stages et des rencontres, passe des commandes, met en place des programmes de soutien à la création et des résidences d’artistes, réalise des publications, lance des projets de recherche et gère un fonds de +/- 400.000 documents photographiques (documents historiques et contemporains) provenant de donations et/ou d’acquisitions.

commissaires : marguy conzémius michèle walerich Avec l’aimable soutien de michael stevenson, cape Town, and yossi milo, new york / magnum photos, foam and klm paul huf Award / paolo woods

28 mArs — 31 mAi

3 stories pieTer hugo / mikhAel suboTzky / pAolo woods trois jeunes photographes nous racontent trois histoires de l’afrique dans le contexte du post-apartheid et de l’influence des développements économiques globaux. dans la continuité de réinvention et de renouvellement de langage qu'un david goldblatt a pu initier, leur approche est plus nuancée que frontale et s’éloigne de représentations stéréotypées. ils suivent de près leur sujet, partagent un bout de chemin, et créent, à travers le portrait individuel, une image surprenante et sensible d’un continent.

Mikhael subotzky — beaufort west

paolo woods — chinafrique

beaufort west est une petite ville au milieu du désert, coupée par la route

en 2007, paolo woods se met en route pour raconter l'aventure des chinois

nationale n1 à mi-chemin entre le cap et johannesburg, traversée tous les

à la conquête du continent africain.

ans par des millions de voitures. ici, comme dans la plupart des villes rurales

A la recherche de matières premières convoitées - cuivre, uranium et bois

d’Afrique du sud, l’activité agricole a diminué considérablement d’une géné-

- pékin a envoyé ses compagnies et ses entrepreneurs les plus aventureux.

ration à l’autre et a donné lieu à un exode vers les grandes villes. beaufort

500.000 chinois émigrés en Afrique tentent leur chance pour faire fortune

west est un endroit désolé, marqué fortement par le chômage, un taux de

dans un continent que l’occident jugeait souvent juste bon à recevoir de

criminalité très élevé. ceux qui restent ou sont revenus ici, ont été rejetés

l’aide humanitaire : certains gèrent de grands conglomérats – tandis que

partout ailleurs. en quittant le centre-ville, on découvre une particularité

d’autres vendent des articles bon marché le long des routes des pays les plus

étonnante, une scène invraisemblable : une prison installée au milieu d’un

pauvres du monde.

giratoire.

Accompagné du journaliste serge michel, paolo woods parcourt quinze

mikhael subotzky après avoir réalisé plusieurs projets photographiques dans

pays, sillonnant tout le continent à la rencontre de ces deux mondes si

des prisons sud-africaines, décide de s’installer à beaufort west pour en

différents, des forêts menacées du congo aux karaokés du nigeria, le long

dresser le portrait. entre 2006 et 2008, il y retourne régulièrement, il vit

des pipelines du soudan et des chemins de fer d'Angola, des hauts ministères

avec les gens, les rencontre, escorté par major, un garçon très populaire en

des capitales aux campagnes sinistrées.

ville. il s’intéresse particulièrement aux problématiques de marginalisation,

chinafrique nous parle aussi d’une ère révolue. les chinois n’ont rien des

d’incarcération, et de désillusion et réalise, à partir de là, un inventaire de la

anciens colonisateurs – ils construisent des routes, des hôpitaux et des

réalité sociale d’une Afrique du sud dans le contexte de l’après-apartheid.

écoles. pour les Africains, il s’agit d’un nouveau phénomène qui se veut ni démocratique ni transparent, une loi au-delà des régimes dictatoriaux. les images de chinafrique sont le portrait rare et surprenant d’une actualité

pieter hugo — the hyena and other Men

et au-delà, le portrait condensé d’un monde globalisé.

the hyena and other men est l’histoire d’hommes qui, accompagnés de hyènes, de pythons et de babouins, gagnent leur vie en faisant des spectacles de rue, face aux foules et qui vendent de la médecine traditionnelle. captivé par une image découverte dans un journal sud-africain représentant des hommes avec leurs hyènes dans les rues de lagos au nigeria, pieter hugo décida d’aller à leur rencontre. quelques semaines plus tard, accompagné d’un reporter local, il les rejoint à la périphérie de Abuja, dans un bidonville, pour partager leur route et mieux connaître leur univers fascinant. peu à peu, il fait la connaissance des marchands d’animaux, de leurs rites traditionnels, et essaie de les photo-

MikhAel sUbotzky

graphier au quotidien. il se rend compte que ce qui l’intéresse dans le sujet, c’est l’hybridation de l’urbain et du sauvage, et la relation paradoxale, parfois très affectueuse, parfois cruelle et brutale, que les marchands entretiennent avec leurs animaux.

pAge de droiTe en hAuT

'beaufort west : samuel, vaalkoppies'

2006

A travers les portraits extraordinaires de cette existence marginale, pris à deux ans d’intervalle (2005 et 2007), nous est révélé un monde qui se caractérise par des relations complexes et des interdépendances, un monde qui fluctue entre traditions, mythes et modernité, domination et soumission.

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pAge de droiTe en bAs

'beaufort west : prison beaufort west'

2006


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paolo woods 'Chinafrique : Nigeria, Lagos'

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2007


paolo woods 'Chinafrique : Zambie' 2008

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pieter hugo 'The Hyena and Other Men: Mallam Mantari Lamal avec Mainasara, Nigeria'

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2005


pieter hugo 'The Hyena and Other Men: Abu Kik an avec Frayo, Asaba, Nigeria' 2007

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esch-sur-AlzeTTe gAlerie terre roUge kUltUrfAbrik

116, rue de luxembourg, esch-sur-Alzette Tél. +352 55 44 93 32 ouver t tous les jours (sauf le lundi) 15h - 19h ouver t jusqu'à 21h les soirs de spectacles

la galerie terre rouge, située au milieu de la cour de l’ancien abattoir de la ville d’esch, est un enfant tardif de mai ‘68. en effet, dès le début du squat d’artistes qui allait devenir la kulturfabrik d’aujourd’hui, des artistes engagés politiquement à gauche, voire à l’extrême gauche, avaient choisi ce lieu central comme lieu d’exposition. c’était la fête de l’esprit collectif et des revendications militantes. aujourd’hui, la galerie terre rouge veut renouer (toutes proportions gardées) avec cet esprit d’ouverture en proposant des expositions d’envergure socio-culturelle ou socio-politique, ainsi que des résidences d’artistes ou de la photographie documentaire.

13 mArs — 29 mArs

rené gillAin de passage vers l'est rené gillain pratique la photographie depuis 20 ans. Au début des années 90, il participe à des stages organisés par le centre national de l’Audiovisuel (cnA). il collabore à plusieurs reprises avec des photographes luxembourgeois de renommée, tels yvon lambert, norbert ketter ou marianne majerus, et perfectionne ainsi son regard de photographe à une vitesse impressionnante. il participe également à des projets/ouvrages collectifs régionaux (« bassin minier. Traces et mutations ») et internationaux (voyages à cuba, en inde, en Andalousie). dès 1996, il a voyagé à plusieurs reprises dans la direction des pays de l’europe centrale et orientale, traçant un périple qui va de l’italie du nord-est (de Trieste plus précisément, ville carrefour par excellence) à la croatie, la slovénie, et jusqu’en biélorussie. il suffi t de regarder ces images pour se rendre compte que l’esthétique du

1991: participation au reportage photographique collectif sur la commune de bascharage (suivi de la publication du livre “liewen an der gemeng käerjheng”) 1994: participation au projet photographique de la minettsdapp kultur am süden asbl. (suivi de la publication du livre “bassin minier – traces et mutations”) 1996: participation à l’exposition collective “photographes luxembourgeois” en thaïlande (bangkok) . org. par le ministère de la culture luxembourgeois 1995/2001: voyages en inde (exposition “essences de l’inde” à la galerie gaasch à dudelange en 2005) 1996/1997: séjours en biélorussie (exposition avec yves bassi au théâtre d’esch en 1999) 1998: expose son travail sur la havane au théâtre d’esch (ensemble avec yvon lambert et marcel wolff)

photographe porte la marque de la riche tradition du photojournalisme et

2004: voyage en grèce

des pratiques documentaires de l’époque mAgnum.

2007: voyage en italie du nord, slovénie et croatie (travail exposé à la galerie terre rouge de la kulturfabrik esch en mars 2009)

l’exposition « de passage vers l’est » présente une série de 45 photos réalisées en noir et blanc où réalisme poétique rime parfois avec douce absurdité.

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repères biographiques :

2009: participation à la projection “portfolio night” (cna) avec un travail sur paris


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clervAux MUsée the fAMily of MAn

château de clervaux, clervaux Tél. +352 92 96 57 e-mail : info@family-of-man.public.lu ouver t du mardi au dimanche : 10h - 18h fermé le lundi, sauf jours fériés visites guidées gratuites tous les dimanches à 15h ou sur demande www.thefamilyofman.lu

The family of man est une collection photographique mythique et de renommée internationale, composée de 503 photographies, créées par 273 auteurs, originaires de 68 pays. l’exposition a été conçue en 1955 par edward j. steichen pour le museum of modern art de new york (moma) . sur l’arrière-fond de la guerre froide, elle célèbre l’unicité de l’espèce humaine à travers la photographie humaniste de henri cartier-bresson, robert doisneau, robert capa, anna riwkin-brick, dorothea lange et beaucoup d’autres. un dispositif singulier de mise en scène guide le spectateur à travers 37 thèmes allant de l’amour à la foi en l’homme, en passant par la naissance, le travail, la famille, l’éducation, les enfants, la guerre et la paix… pendant les années 50 et 60, l’exposition voyage à travers le monde entier et est vue par plus de 9 millions de personnes. après la restauration des œuvres, l’unique copie originale encore existante est installée en permanence au château de cler vaux en 1994. fidèle à l’installation originale de 1955, elle offre au visiteur la possibilité de revivre l’expérience de l’exposition historique, conserve ainsi une mémoire de l’histoire de la photographie et continue à susciter des débats divers. l’exposition a été inscrite dans le registre de la mémoire du monde de l’unesco en 2003.

1er mArs — 7 juin

peter vAn AgtMAel war graffiti

mAgnum phoTos

dans le cadre du mois européen de la photographie, l’exposition the family of man accueille à l’intérieur de son parcours d’exposition la projection contemporaine de la série war graffiti, réalisée par le jeune photojournaliste peter van agtmael. la présentation d’images issues du photojournalisme contemporain dans le contexte de l’exposition The fAmily of mAn est motivée par la création d’un dialogue entre des temporalités et des modes d’exposition différents d’une filiation historique. le traitement spécifique des images dans l’exposition The fAmily of mAn leur confère un statut spécifique : dissociées de leur contexte de création et de publication, elles miment la famille humaine, teinté d’un universalisme conçu comme intemporel. en regardant ces images aujourd’hui, l’histoire qui nous sépare d’elles fait émerger les limites du vœu moderniste de steichen et de sa confiance dans les capacités de l’image à communiquer des valeurs universelles et une identité commune. c’est également ce laps de temps qui nous permet d’introduire une distance entre l’image, la réalité représentée et le spectateur et par là donc de créer un espace pour le discours contemporain. la série war graffiti nous plonge dans les salles de bain de la base aérienne de l’armée américaine Ali Al salem au koweït et nous ouvre le regard sur le griffonnage des soldats - souvenirs, songes, confessions, peurs, espoirs, rages et humour.

le regard du photographe passe par un cadrage radical prescrit par le lieu et nous confronte avec une situation particulière : la réalité que la série war graffiti nous montre est principalement hors cadre. le conflit transparait à travers les lignes et sa présence y est manifeste. l’image photographique est ici invoquée pour rendre visible une trace humaine qui nous livre un point de vue de l’intérieur du conflit. la guerre devient ainsi une réalité qui passe par son absence à l’image et qui est construite dans l’imaginaire collectif. ces traces intimes de soldats anonymes n’ont rien de sensationnel, ni sont-elles captées dans le feu de l’action. ce qui semble être la marque des temps faibles de la vie dans les camps, est transformé par le regard du photographe en métaphore quasi intemporelle d’un conflit, dont la présence s’étend au-delà du simple terrain géographique et du temps définis. le contexte et l’acte photographique font sortir ces empreintes, autrement jugées ordinaires et sans intérêt, de la banalité du quotidien et les transforment en témoignages qui valent d’être entendus ou vus.

anke reitz par son point de vue personnel et engagé, la série réintroduit de l’histoire dans le parcours original de l’exposition de 1955 et crée par là un échange entre deux conceptions du photojournalisme – entre document neutre et document culturel. dans cette documentation, peter van Agtmael transgresse les codes de la rhétorique commune du reportage de guerre et apporte un trouble à notre perception usuelle du conflit en images.

peter van agtmael, américain/néerlandais, né en 1981. il est représenté par magnum photos.

leon levinstein 'couple, new york, 1952' © howard greenberg gallery, nyc

lou bernstein 'untitled, 1949' © irwin bernstein

vue d'ensemble de la collection family of man © cnA / raoul somers

ci-dessus pAge de droiTe eT double-pAge suivAnTe

peter vAn AgtMAel 'war graffiti. iraq. bagdad. 2006' courTesy of The ArTisT / mAgnum phoTos

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clervAux cité De l'iMAge asbl

hÔTel du pArc

hôtel du parc, rue du parc, clervaux Tél. +352 26 90 34 96 info@clervauximage.lu ouver t du mardi au dimanche : 11h - 18h fermé le lundi www.clervauximage.lu

depuis plus de dix ans la célèbre collection «The family of man» est montrée au château de cler vaux. l’exposition a eu une influence directe sur l’identité culturelle et locale de clervaux. À partir de cette base un projet culturel a débuté qui s’est concentré sur le médium photographique. la collection de steichen date de 1955 ; l’idée est née d’attirer le regardsur la photographie contemporaine, de confronter l’époque de steichen avec des productions actuelles. en septembre 2008, l’asbl « cler vaux – cité de l’image » a été fondée. sa mission consiste à mettre en évidence clervaux en tant que « cité de l’image ». l’association propose différents projets autour de l’image photographique. diverses manifestations – expositions temporaires, installations photographiques à ciel ouvert, des ateliers ou bien des promenades thématiques – sont organisées dans le but de relever le rôle de la photographie contemporaine dans le milieu artistique, social et rural. en collaboration avec l’agence de photographes osTkreuz, l’exposition « sur la décharge - roumanie » de jordis Antonia schlösser a été réalisée avec le soutien de la commune de clervaux.

29 mArs — 31 mAi

jorDis AntoniA schlösser sur la décharge - roumanie dans son travail « sur la décharge - roumanie » jordis Antonia schlösser décrit les conditions de vie de 400 roma habitant sur la décharge de cluj (clausenbourg). le travail photographique de jordis schlösser pose la question de l’ambiguïté dégagée par la photographie documentaire : comment des images représentant des conditions de vie aussi désolantes peuvent-elles refléter tant de beauté et de fascination ? le cadrage et la composition, de même que le motif choisi devraient être analysés dans ce contexte. ce langage esthétique ne falsifie-t-il pas la réalité afin de transformer ces images photographiques en de véritables œuvres d’art ? on peut s’interroger sur l’efficacité de telles photographies réussissant à consterner le spectateur. faire des photographies inoubliables tout en revendiquant une position critique par rapport aux circonstances représentées est un défi technique, artistique et éthique pour tout photographe. cependant l’histoire de la photographie, avec ses personnalités telles que dorothea lange et bien d’autres, nous a appris que la mission est bien justifiée. dans la série « sur la décharge » il est peu probable que la beauté sache cacher la désolation et le tragique. bien au contraire, la force d’expression des photos de jordis schlösser résulte primordialement du fait de réunir dans une même image deux aspects aussi puissants qu’opposés; d’un côté la dimension esthétique et de l’autre la démarche critique. c’est en fait la beauté inhérente aux images qui met en évidence la gravité de la situation des 400 personnes vivant sur la décharge de clausenbourg.

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cette série de photographies en noir et blanc suscite une réaction captivante et équivoque auprès du contemplateur : l’étonnement et la fascination précèdent la consternation. les photographies montrent des êtres humains dans des circonstances extraordinaires, inconcevables pour tout spectateur vivant ailleurs. cependant, les images semblent respecter un engagement envers ceux qu’elles représentent, c’est-à-dire les gens vivant sur la décharge. les clichés pris dans cet environnement désolant, abject et toxique montrent des personnages d’une grande individualité qui conservent toute leur fierté. quelle est cette force qui permet à l’homme de confronter ce qui lui arrive ? cette puissance ne peut être traduite par des mots, elle se reflète pourtant dans la beauté et l’expression des images de jordis schlösser. les circonstances de vie décrites sur les photos, nous apparaissent irréelles, l’étrange consternation qui s’en dégage est des plus réelles. le côte à côte de la misère et de la beauté reflète l’existence humaine dans toutes ses dimensions, avec ses fascinations aussi spectaculaires qu’irraisonnables.

annick meyer


double-page ci-contre Et page suivante

jordis antonia schlösser 'sur la décharge - roumanie' 1999 courtesy of the artist / ostkreuz

Jordis Antonia Schlösser, née à Göttingen en 1967, vit et travaille à Paris et à Berlin. En 1998 elle a été sélectionnée pour la « World Press Joop Swart Masterclass » organisée par la « World Press Photo Foundation ». C’est dans ce contexte qu’elle a réalisé la série « Sur la décharge - Roumanie ». Jordis Antonia Schlösser est représentée par OSTKREUZ - Agentur der Fotografen à Berlin, dont elle est membre depuis 1997.

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catalogues semaines européennes de l'image les trahisons du modèles 2000 Tendances et Sensibilités dans la Photographie Contemporaine ISBN 2-9599886-4-7-8 éditions Café-Crème

le bâti et le vivant 2002 La Représentation des Territoires Habités en Photographie ISBN 2-9599886-5-5 éditions Café-Crème

apparemment léger 2004 La Dictature du "light" ou le Poids des Choses ISBN 2-9599886-6-3 éditions Café-Crème

MOIS EUROPéEN DE LA PHOTOGRAPHIE mutations I 2006 / 2007 ISBN 10 digit 88-6965-024-3 ISBN 13 digit 978-88-6965-024-6 éditions Contrasto, Rome, Milan En anglais, textes traduits en allemand, français, italien et slovaque

mutations ii 2008 / 2009 ISBN 978-287978074-0 éditions Café-Crème / Mois Européen de la Photographie En anglais, textes traduits en allemand, français, italien et slovaque

catalogue du Mois Européen de la photographie luxembourg 2006 éditions Café-Crème

contact café-crème asbl Paul di Felice & Pierre Stiwer directeurs Sneja Dobrosavljevic communication & new media www.cafecreme-ar t.lu www.emoplux.lu

BP 2655 L-1026 luxembourg bureau@cafecreme-ar t.lu Tél. +352 691 44 68 56 Tél. +352 691 50 78 78

Conception graphique : Clément Bec-Karkamaz En collaboration avec Paul di Felice & Pierre Stiwer Imprimé au Luxembourg Par Qatena, Leudelange Mars 2009

ISBN: 2 9599886 - 8 - X


Mois EuropéEn dE la photographiE Berlin, Bratislava, Paris, vienne 2 0 0 8 luxemBourg, moscou, rome 2 0 0 9

Mois Européen de la photographie luxembourg Coordination et direction générale : Paul di Felice, Pierre Stiwer (Café-Crème asbl) direction de la communication et new Media : Sneja Dobrosavljevic nous tenons à remercier : Nadine Abel-Esslingen, Jean Back, Leslie Barnig, Marie-Claude Beaud, Marianne Brausch, Marguy Conzemius, Philippe De Poorter, Guy Dockendorf, Philippe Dupont, Claude Frisoni, Christian Gattinoni, Armand Hein, Danielle Igniti, Monique Kieffer, Josée Kirps, Mike Koedinger, Jo Kox, Enrico Lunghi, Michel Margue, Anouk Meyers, Steph Meyers, Jérôme Netgen, Françoise Pirovalli, Lydie Polfer, Michel Polfer, Alex Reding, Anke Reitz, Marita Ruiter, Lucien Schweitzer, Christiane Sietzen, Corinne Thill, Danièle Wagner, Michèle Walerich les ar tistes suivants pour un engagement par ticulier : David Claerbout, Ori Gersht, Marie-Jo Lafontaine les institutions ou galeries suivantes ; Maison Européenne de la Photographie (Paris), Museum auf Abruf (Vienne), Kulturprojekte Berlin, CarréRotondes (Luxembourg) du Mois Européen de la photographie : Anna Gianesini et Emiliano Paoletti (Rome) Gunda Achleitner, Berthold Ecker, Thomas Licek (Vienne) Oliver Baetz, Thomas Friedrich, Kathrin Kohle (Berlin), Zuzanna Lapitkova, Vaclav Majek (Bratislava), Ekatarina Kondranina, Olga Sviblova (Moscou), Jean Luc Monterosso, Pascal Hoël, Carole Prat, Barbara Wollfer (Paris) remerciements par ticuliers au Centre Culturel de Rencontre Abbaye de Neumünster, au Centre d’Art Nei Liicht - Dudelange, au Centre National de l’Audiovisuel ainsi qu’aux 23 partenaires luxembourgeois. avec le soutien du Ministère de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ainsi que de la Ville de Luxembourg

CourtEsY of thE artist

Crédit photo CouvErturE

M. Bertrand delanoë Maire de Paris M. andrej durkovský Maire de Bratislava M. Michael häupl Maire et gouverneur de Vienne M. Yury luzhkov Maire de Moscou M. paul helminger Maire de la Ville de Luxembourg M. gianni alemanno Maire de Rome M. Klaus Wowereit Maire et gouverneur de la Ville de Berlin

ori gersht ‘BIG BANG’ (VIDEOSTILL) 2006

sous le haut patronnage de :


MOIS EUROPテ右N DE LA PHOTOGRAPHIE LU X EM B O U RG 20 0 9


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