Else #6 // November 2013

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else

by Elysée Lausanne

issue 6, 2013

applied

Book

Collected

Contemporary

FOCUS

found

HAUNTED

History

object

Serial

still

magazine

photography

06 > 9 7 7 2 2 3 5 043008

CHF 14.00 | EUR 12.00 www.elsemag.ch  ELSE 6


Jacques Henri Lartigue Picasso, 1955 Collection PKB

We share your love for art because we understand its worth. By tradition. PKB Privatbank Lugano Bellinzona Genève Zürich Antigua Panamá

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Editorial L'autre de l'art En 2011, ELSE a été lancé avec le désir de se jouer de la photographie, de rompre avec la belle image puisque son statut de document ou d’œuvre d’art semblait une question largement obsolète. Il ne restait plus, dans le champ culturel, qu’une photographie comme œuvre. Mais, déjà à cette époque, il s’agissait d’une œuvre sans ce chef qui lui fut si longtemps attribué comme préfixe. Non pas que les chefs-d’œuvre aient disparu de l’histoire de la photographie, disons plutôt qu’ils ont été désactivés pour laisser place à des images recontextualisées, replacées dans leur contexte de production ou de diffusion. Elles se sont alors affirmées comme objets culturels. Tandis qu’aujourd’hui se théorise et se précise le concept de vernaculaire, que Werner Kühler— régulièrement accueilli dans ces pages—lui-même n’hésite plus à faire son coming out, il apparaît de manière flagrante que ce n’est pas la masse de ces autres images qui nous attirent tant, mais bien leur activation par les acteurs de la photographie— artistes, collectionneurs, critiques, commissaires— dans le champ de l’art. Ces corpus sont, pour reprendre le terme de Clément Chéroux, l’autre de l’art. C’est la revanche de l’archive, le palais encyclopédique, la dialectique du document dessaisi de son statut premier—une fonction informative— et propulsé au cœur de nouvelles cosmologies. Hier encore aux marges, ces ensembles réinventés font aujourd’hui l’objet d’une attention particulière. Depuis trois ans déjà, ELSE en est l’un des ardents défenseurs.

The Other of Art In 2011, ELSE was launched with an aspiration to play with photography, to break away from the pretty image, since the issue of its status as documentary or art piece seemed to be largely obsolete. All that was left in the cultural field was a photograph perceived as a piece. Yet, already at the time, it was a piece stripped of that master that had for so long been associated as prefix. It is not that masterpieces have vanished from the history of photography; rather, let us say that they have been deactivated to leave room for re-contextualized images, replaced in their production or dissemination context. They thus asserted themselves as cultural objects. As the concept of vernacular is now being theorized and clarified, and as Werner Kühler himself—a regular guest in these pages—no longer hesitates to proceed with his coming out, it blatantly appears that it is not the mass of these other images that attracts us so much as their activation by actors from the field of photography— artists, collectors, critics, curators—into the field of art. These sets are, in Clément Chéroux's own words, the other of art. It is the revenge of the archive, the encyclopedic palace, the dialectic of the document stripped of its primary status—its informative function—and thrown into the core of new cosmologies. Yesterday marginalized, these reinvented sets are the focus of sustained attention today. For the past three years, ELSE has been one of their ardent advocates.

Sam Stourdzé

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CatĂŠgories

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Contemporary 1

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History 1


Sommaire 1 p. 6

Johanna Diehl, Ukraine Memories Contemporary | History 2 p. 14

JJ Levine, Switch Contemporary | Serial 3 p. 20

Jean-Daniel Berclaz, Points de vue Applied | Contemporary | Focus | Serial 4 p. 24

Il était une fois deux fois Found

5 p. 30

Les Blow-ups de Blow-Up Applied | Collected 6 p. 38

Haus am Gern, Autoportrait comme couple d’artistes XVIII Contemporary | Haunted | Serial 7 p. 42

Wundergarten der Natur : Broken Kindles par Sebastian Schmieg et Silvio Lorusso Book | Object 8 p. 46

Peter Piller, Umschläge Applied | Book | Collected | Contemporary 9 p. 54

L’Ellipse Applied | Book 10 p. 60

Aurélien Froment, À Cheval Contemporary | Focus | Haunted | Serial 11 p. 68

Avant que ça n’arrive, Les collisions de Nicolas Descottes Contemporary 12 p. 76

The Operators' Invisible Hands, Apparition of a distance, however near it may be by Paul Soulellis Applied | Book | Found 13 p. 80

Type 42 ou la capture de l’écran Collected | Haunted | Serial | Still 14 p. 86

Natan Dvir, Coming Soon Contemporary | Haunted | Serial

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Contemporary history 1

Johanna Diehl Ukraine Memories PrĂŠsentĂŠ par Jean-Christophe Blaser

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Comtemporary

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History


Johanna Diehl, Ukraine Memories

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Comtemporary

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History


Johanna Diehl, Ukraine Memories

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Comtemporary

History

Qui devinerait ce qui se cache derrière l’inventaire architectural de Johanna Diehl ? La diversité des objets répertoriés (plus ou moins modernes), leur état (plus ou moins détériorés, plus ou moins réhabilités)… rien ne laisse soupçonner l’existence d’une typologie dans le style de Bernd et Hilla Becher. Des deux monstres sacrés de la photographie allemande, on retrouve, certes, l’approche analytique, froide, débarrassée de toute présence humaine, mais rien de plus. Et pourtant… Les architectures visitées par Johanna Diehl sont toutes d’anciennes synagogues reconverties en salles de sport, entrepôts, fabriques ou théâtres. Elles sont toutes localisées en Ukraine et ce fait, quand on en prend conscience, rend l’absence de personnages dans les photographies particulièrement significative : l’Ukraine ne constituet-elle pas, avec la Pologne et la Lituanie, une sorte de triangle de la mort où, depuis le XVIe siècle, bien avant l’invasion nazie et la monstrueuse tentative de faire le vide qui l’accompagna, des pogroms étaient régulièrement organisés et des communautés juives exterminées. Il ne faut pas oublier que c’est sous le règne de Nicolas II, dont les milieux conservateurs ont aujourd’hui tendance à faire un saint et un martyr, que le sionisme fut fondé, en réponse à la situation dramatique vécue par les Juifs sous le tsarisme (comme il ne faut pas oublier la vague de pogroms consécutive à la renaissance nationale de la Pologne, en 1918, et à la reconquête par ses armées de territoires situés à l’Est). La création de l’Union soviétique allait procurer un répit aux Juifs, du moins jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, mais au prix d’une certaine déculturation. On se souvient de la fièvre antireligieuse et iconoclaste et des spectaculaires campagnes de destruction d’églises qui suivirent la révo­lution de 1917. Les lieux de culte autres que chrétiens ne furent pas non plus épargnés. Ceux d’entre eux qui échappèrent au dynamitage perdirent leur vocation religieuse initiale, furent désacralisés et transformés en bâtiments utilitaires. L’inventaire de Johanna Diehl a ceci de remarquable qu’il permet de reconstituer l’histoire de communautés disparues. Il réunit des traces que les Soviétiques persistèrent à enfouir ou à brouiller après 1945, sans considération particulière pour la mémoire des Juifs, principales victimes du nazisme.

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Who would guess what lies behind Johanna Diehl’s architectural inventory ? The diversity of listed objects (more or less modern), their state (more or less damaged, more or less rehabilitated)… nothing reveals the existence of a typology along the lines of Bernd and Hilla Becher’s. Related to the two German photography giants is a clear analytical approach, cold, bare of any human presence, but nothing else. And yet, the architectures that Johanna Diehl visited are all former synagogues converted into sports facilities, storing spaces, factories or theaters. They are all located in Ukraine, and when one thinks about it, this makes the absence of any human presence in the images rather significant : as Ukraine, with Poland and Lithuania, form a kind of death triangle since the 16th century, in which long before the Nazi invasion and the monstrous void that went with it, pogroms have regularly been organized, and Jewish communities exterminated. One should not forget that it was under the rule of Nicholas II, whom conservative circles today tend to depict as a Saint Martyr, that Zionism was founded as a response to the particularly dramatic situation experienced by the Jews under the Tsarist regime (consider the wave of pogroms consecutive both to Poland’s national revival in 1918, and to the military retrieval of the Eastern territories). The establishment of the Soviet Union was going to provide Jews with some respite, at least until World War II, yet at the expense of some degree of cultural integration. Remember the antireligious and iconoclast fever and the spectacular cam­ paigns of church destructions that followed the 1917 revolution. Religious buildings other than Christian were not spared either. Those that were spared lost their initial religious vocation, were deconsecrated and turned into utilitarian buildings. Johanna Diehl’s inventory is remarkable in that it allows for a reconstitution of history. It compounds traces that the Soviets took great care to conceal or scramble after 1945, without any particular consideration for the memory of the Jews, Nazism’s main victims.


Johanna Diehl, Ukraine Memories

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Contemporary Serial 2

JJ Levine Switch

Présenté par Véronique Terrier Hermann

JJ, deux initiales pour un artiste qui se présente lui-même comme non-conformiste et artiste du genre. Vivant à Montréal, JJ Levine participe pleinement de la communauté transgenre. Depuis quelques années, il a décidé de photographier exclusivement ses proches, chez eux, dans leur quotidien, tel le journal d’une communauté liée par les mêmes questions d’identité. L’ensemble des photographies révèle alors autant de portraits intimistes qu’une forme d’évidence, de simplicité du quotidien, presque de banalisation de ces identités transgenres. Mais ici, pour cette dernière série Switch, le travail se fait tout autre. La mise en scène de ces couples de bal de fin d’études, la pose artificielle, la façon datée du studio de photographe, le décor un peu sommaire et systématique, et même les artifices cachés… tout nous interpelle afin de créer un effet de trouble. Chaque couple est invité à poser pour un portrait double, qui brouilleet discrédite les apparences. Tantôt femme, tantôt homme, le coupleinverse les rôles, dans une image en miroir assez perturbante. On cherche la reconnaissance dans les détails du visage ; tel dessin des sourcils, de la bouche, des yeux foncés ou du nez attestera que celui-ci est effectivement celle-là dans la seconde photographie. Mais ressemblance et reconnaissance se parasitent, défient les codes préétablis, jusqu’à faire résistance à une apparence du genre. Entre cette expression si populaire en Asie, « Same same but different », et, pour les plus nostalgiques, le refrain de la chanson Cherchez le garçon (Taxi Girl, 1980), mais aussi en écho aux débats qui ont agité la France dernièrement, la série Switch s’impose avant tout comme une réelle contribution artistique et singulière aux études sur le genre.

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Anita Cruz-Eberhard, Digital Ikebanas

JJ, two initials for an artist who introduces himself as a non-conformist and gender artist. Living in Montréal, JJ Levine fully participates to the transgender community. For a few years now, he has decided to photograph only his intimate circle, at their home, in their daily life, like the diary of a community linked by similar identity issues. The set of photographs reveals intimate portraits and a form of evidence, the simplicity of the quotidian, almost a normalization of these transgender identities. But here, with the series Switch, the work is different. The staging of these couples dressed up for the Prom Ball, their artificial pose, the dated studio, the rather basic and systematic background, and even the hidden artifices… everything here creates a feeling of uneasiness. Each couple is invited to pose for a double portrait that blurs and discredits appearances. Woman or man, the couples swap roles in a rather disturbing mirror image. One seeks to identify the evidence that this one actually becomes that one in the second photograph, though details on the faces, the line of an eyebrow, or that of a mouth, dark eyes or nose. But resemblance and recognition interfere with each other, defying pre-established codes to the point where they resist an appearance of gender. Midway between this very popular Asian expression, “Same same but different”, and, for the more nostalgic among us, the song Cherchez le garçon (Looking for the Boy, Taxi Girl, 1980), but also echoing to the debates that recently created turmoil in France, the series Switch is first and foremost a real artistic and singular contribution to gender studies.


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Contemporary focus

Serial

Jean-Daniel Berclaz Points de vue Présenté par Jean-Christophe Blaser

Jean-Daniel Berclaz est un extrémiste. Il fait partie de ces artistes qui ont tiré l’art à l’extrême limite de ce qui est envisageable, jusqu’au point où se pose la question : est-ce encore de l’art ? Une question à laquelle vous et moi avons souvent tendance à répondre par la négative quand nous visitons une exposition, tant les propositions des artistes d’aujourd’hui semblent tirées par les cheveux. Mais une question qui, à l’âge contemporain, est peut-être la seule vraiment pertinente, vu la sacralisation étouffante dont l’art a été l’objet tout au long du 20e siècle. Le projet qui a fait connaître Berclaz il y a quelques années, et qui s’intitule Le musée du point de vue, a consisté à faire de vernis­­sages, donc d’un épiphénomène de la vie artistique, un médium à part entière, au même titre que la peinture ou la vidéo. A ce jour, quatre-vingt vernis­sages ont été organisés sur des sites choisis pour leur panorama, leur histoire… dans des musées improvisés, sans murs et ouverts sur le paysage. Le projet, qui joue sur deux registres, celui du relationnel et celui du contextuel, a connu plusieurs développements. L’un d’eux, un inventaire mondial des pictogrammes signalant des points de vue et autres belvédères, a été entrepris avec l’aide de centres topographiques ou d’amis en voyage. Le matériel collecté (photographies, plans, cartes…) a été scanné et retravaillé par Berclaz. Qu’en résulte-t-il ? Le même vocabulaire de dispositifs optiques se retrouve presque partout : appareils photo, jumelles, miradors, yeux et soleils. Suivant les lieux et les pays, le propos se fait plus précis, comme avec cette queue de baleine censée informer de la présence de cétacés. C’est en Afrique toutefois que le plus haut niveau de sophistication semble être atteint : le même pictogramme peut se décliner de plusieurs manières selon que le point de vue se situe au bord de la mer, sur une montage, dans un virage ou sur une route toute droite…

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Jean-Daniel Berclaz is an extremist. He belongs to the kind of artists who have stretched art to the extreme limit of what is conceivable, to the point where the following question must be raised : is it still art ? A question to which you and I often reply by the negative when we visit an exhibition, considering how farfetched some of the artists’ propositions can be. But a question that could very well be, in this contemporary age, the only really relevant one in light of the stifling sacralization of art trough the 20th century. The Museum of the Point of View, the project that brought Berclaz to fame a few years ago, consisted in turning the organization of vernissages—thus an epiphenomenon in artistic life—into a medium in itself, just like painting or video. To this day, eighty vernissages have been organized in locations chosen for their panorama, their history… in improvised museums, without walls, open onto the landscape. The project, playing upon both the relational and the contex­ tual, experienced several developments. One of them, a world inventory of pictograms signaling panoramic viewpoints and other vistas, was undertaken with the support of topographical centers or travelling friends. The collected material (photo­graphs, plans, maps…) was scanned and retouched by Berclaz. The result ? Everywhere, a similar lexicon of optical de­vices : photo cameras, binoculars, watchtowers, eyes and suns. According to locations and coun­ tries, the purpose may be more precise, as with the whale tail supposed to inform of the presence of cetaceans. However, it is in Africa that the highest level of sophistication seems to have been reached : the same pictogram can describe a variety of instances, depending on whether it is placed by the sea, on a mountain, along a curve, or a straight road…


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Jean-Daniel Berclaz, Points de vue

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Il était une fois deux fois Présenté par Werner Kühler

On imagine l’appareil acheté ensemble, peu après la rencontre, juste avant le premier voyage. Il ne sera pas celui de Monsieur, ni celui de Madame, mais bien l’appareil du couple. Il va les accompagner partout : en lune de miel ou en week-end, à Paris, au bord de la mer ou lors du carnaval. Il s’immisce jusque dans la chambre nuptiale. Il est l’indispensable compagnon de la vie à deux. Il passe de main en main. On se photographie chacun son tour. Lui a parfois tendance à laisser la dragonne de l’appareil obstruer une partie de l’image. Elle cadre beaucoup trop haut, lui coupant quasi systématiquement les jambes. Mais toujours, au milieu de l’image, il y a l’autre, devant un décor qui témoigne des transports de l’amour. Bref, c’est une affaire entre eux deux. L’appareil est leur objet transitionnel. Il sera bientôt remplacé par un petit enfant et le rituel photographique cessera.

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Couple italien anonyme, vers 1980

Supposedly, they bought the camera together, just prior their first trip. It won’t be Mr.’s, nor Mrs.’, but really the couple’s camera. They’ll take it along every­ where : on their honeymoon or for the weekend, to Paris, the seaside or during Carnival. It even ventures into the nuptial chamber. It is the indispensable companion of the living together. It goes from hand to hand. Photographing each other in turns. He tends to let the wrist-strap obstruct vision. She tends to center a bit high up, almost always cutting off his legs. But the other is always in the middle of the image, in settings that bear testimony to their loving feelings. In short, it is a story between the two of them. The camera is their transitional object. A small child will soon replace it, and the photographic ritual will cease.


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Il ĂŠtait une fois deux fois

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Il ĂŠtait une fois deux fois

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Collected

Les Blow-ups de Blow-Up Présenté par Michel Giniès et Christoph Schifferli

D’ordinaire, les photos d’exploitation représentent les acteurs ou certaines scènes emblématiques d’un film. Blow-Up n’échappe pas à la règle avec des portraits de Veruschka, de Vanessa Redgrave ou encore de David Hemmings. Pourtant, Antonioni a certainement voulu rajouter une touche de mystère dans la campagne promotionnelle de son film. A travers un jeu de huit photographies, la production a mis en scène des objets usuels directement liés au film mais difficilement reconnaissables, parce que photographiés en mode macro, puis très largement agrandis. A la sortie de Blow-Up, ces images ont été publiées dans les journaux sous forme d’un concours invitant le lecteur à reconnaître les objets photographiés. En cas de succès, il gagnait des places pour aller voir le film. Jusqu’alors, la black still—l’amorce de film—était connue car elle avait été publiée dans l’ouvrage de Philippe Garner et David Mellor consacré à Blow-Up. Après plusieurs années de quête, je suis parvenu à réunir six images, tandis que Christoph Schifferlli en compte sept. A nous deux, nous possédons un ensemble complet que nous présentons ici pour la première fois, avec des tirages dans leur version européenne—plein cadre—ou dans leur version américaine—avec les crédits du film. Il faut le talent d’Antonioni et les leçons bien apprises de la Nouvelle Vision pour que le dialogue s’installe entre une amorce de film, un disque microsillon, une trace de rouge à lèvres, la charnière d’une paire de lunettes, les dents d’un peigne, une ampoule, la grille d’un téléphone et une cigarette. Michel Giniès Film stills usually represent actors or some emblematic scenes from a movie. Blow-Up makes no exception to the rule with portraits of Veruschka, Vanessa Redgrave or David Hemmings. However, Antonioni certainly wanted to add a touch of mystery to his film’s promotional campaign. Through a set of eight photographs, the production staged common objects related to the film, yet hardly recognizable because photographed in macro mode and then extensively enlarged. These images were published in magazines when Blow-Up was released, in the form of a contest inviting readers to identify the photographed objects. Success won them complimentary seats to watch the movie. The black still­— the very first frame of the movie­— was already known at the time, as Philippe Garner and David Melle had published it in their book about Blow-Up. After several years of research, I managed to gather six images, while Christoph Schifferlli owns seven of them. Between the two of us, we have now collected a complete set, featured here with prints in their original European version­— full frame­— and their American version­— with film credits. Indeed, it takes Antonioni’s talent, and the lessons properly learned from New Vision, to successfully establish a dialogue between a black still, an LP, a trace of lipstick, the hinge of a pair of glasses, the teeth of a comb, a bulb, a telephone handset and a cigarette. Michel Giniès

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Haus am Gern Autoportrait comme couple d’artistes XVIII Présenté par Clément Chéroux

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On dit des fourmis qu’elles sont en mesure de soulever jusqu’à soixante fois leur propre poids. A proportions égales, si l’homme était capable de telles prouesses, il pourrait tenir à bout de bras jusqu’à trois tonnes. Les fourmis déplacent des montages. Elles ont donc, a fortiori, la capacité de supporter le poids des ombres. C’est ce qu’ont voulu vérifier Rudolf Steiner et Barbara Meyer Cesta, un duo d’artistes suisses qui, sous le nom de Haus am Gern, proposent, depuis 1998, une réflexion sur la création en couple. Ils ont commencé par repérer des fourmilières particulièrement actives. Puis, par un jour de forte chaleur, se sont postés devant celles-ci, le dos au soleil, de telle sorte que leurs ombres portées viennent se projeter sur le dôme de brindilles qui constitue l’habitat des hyménoptères. Ces insectes qui ne sont guère luminophiles se sont progressivement regroupés dans la zone sombre formée par la masse humaine. Selon les fourmilières qui, à la manière des émulsions gélatino-argentiques, sont plus ou moins sensibles, il a fallu garder la pose entre 10 et 30 minutes et lutter, au propre comme au figuré, contre les fourmis dans les jambes. Une fois l’ombre de fourmis bien formée, il suffisait de faire un pas de côté et de la photographier dans un temps relativement court avant qu’elle ne se décompose sous l’effet de la lumière. Rudolf Steiner et Barbara Meyer Cesta ont ainsi pu constater que les fourmis étaient bien en mesure de porter les ombres portées.

Ants are said to be able to carry up to sixty times their own weight. On equal scale, if human beings were capable of such a prowess, they could carry up to three tons. Ants move mountains. They thus have, a fortiori, the capacity to support the weight of shadows. This is what the Swiss artist duo Rudolf Steiner and Barbara Meyer Cesta—known as Haus am Gern and sug­gesting a reflection about couple creation since 1998—sought to establish. They started by spotting particularly active anthills. Then, on a hot day, they stood before one, their backs to the sun so that their shadows would be cast over the dome of twigs, habitat of the hymenopterans. These insects are particularly sensitive to light, so they gradually gathered in the dark zone formed by the human mass. Since each anthill has its own sensibility to light, as variable as that of gelatin silver emulsions, it was necessary to stand still anywhere between 10 to 30 minutes and struggle, both literally and figuratively, against ants running up the legs. Once the ant shadow was well formed, they would step aside to photograph it relatively quickly before it was broken down under the effects of light. Rudolf Steiner and Barbara Meyer Cesta were able to observe that ants were indeed able to support cast shadows.

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Haus am Gern, Autoportrait comme couple d’artistes XVIII

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Wundergarten der Natur : Broken Kindles par Sebastian Schmieg et Silvio Lorusso Présenté par Yannick Bouillis

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Sebastian Schmieg et Silvio Lorusso, 56 Broken Kindle Screens, 2012


Depuis les années 70 s'est nouée une relation technique nouvelle à l'image : aux côtés de l'appareil photographique (la photographie) et de la caméra (le cinéma) est apparu l'ordinateur comme producteur d'images : du Computer art au Net art, c'est tout un ensemble d'images nouvelles qui se sont trouvées ainsi produites selon une modalité différente—aujourd'hui si peu pensée par le monde de l'image. On pourrait pourtant reprendre assez facilement les schèmes de pensée structurant l'histoire de la photographie pour penser ce lien entre image et ordinateur (et ses accidents contemporains comme les tablettes et les smart phones) : apparition d'une technologie (l'ordinateur et ses ambitions originelles), évolution de cette technologie (celle des ordinateurs et des supports logiciels de ces ordinateurs), problématique de l'image documentaire (comment reproduire le réel sur ordinateur ?), saisie par le monde de l'art (projet E.A.T., bien sûr), continuité des oppositions (image documentaire par ordinateur vs esthétique produite par les ordinateurs), rapport ambigu de l'art contemporain à cette nouvelle discipline (tout comme la photographie)… Il y aurait même une urgence à penser ces images depuis l'irruption des ordinateurs et d'Internet dans la sphère privée : l'ordinateur n'est-il pas aujourd'hui le lieu premier de l'image au quotidien ? Le travail de Sebastian Schmieg semble continuer aujourd'hui l'ambition qui avait animé le projet Experiments in Art and Technology (E.A.T), initié notamment par Robert Rauschenberg et Robert Whitman : montrer la possibilité d'une expérience esthétique dans ce qui paraissait alors le plus insensible et le plus dangereux : l'ordinateur (avec HAL, l'ordinateur de 2001 L'odyssée de l'espace, comme archétypique). Mais comme Karl Blossfeld en son temps avait su montrer le beau à l'œuvre dans la nature, nature que la science et le positivisme avaient réduite à un ensemble de lois et de mécanismes, Schmieg, sélectionnant des images produites par des Kindle brisés, montre que tout ne pourra se réduire à de la technologie, quand bien même notre monde serait de plus en plus technologique.

Since the 70s, a new technical relation was tied to the image : next to the photographic camera (photography) and the camera (cinema), appeared the computer as producer of images : from Computer Art to Net Art, it is thus a whole set of new images that were produced according to a different mode —so little reflected upon by the visual world today. However, one could easily call upon the thinking schemes structuring the history of photography to think this link between image and computer (and its contemporary accidents such as tablets and smart phones) : establishment of a technology (the computer and its original ambitions), evolution of that technology (comput­ ers and their associated software), problematic of the documentary image (how to reproduce the real in the computer ?), seized by the world of art (EAT project, of course), continuance of the oppositions (digital documentary image vs aesthetics produced by computers), ambiguous link of Contemporary Art to this new discipline (just as with photography)… It might even be urgent to reflect upon these images since the irruption of computers and Internet in the private sphere : isn’t the computer the primary venue today for the image in every day life ? The work of Sebastian Schmieg seems today to further the ambition that had fueled the project Experiments in Art and Technology (EAT), initiated notably by Robert Rauschenberg and Robert Whitman : to show the possibility of an aesthetic experience with what seemed then the most insensitive and most dangerous : the computer (with HAL, the computer in 2001 Space Odyssey, as an archetype). But just as Karl Blossfeld in his time had successfully revealed beauty in Nature, nature that science and positivism had reduced to a set of laws and mechanisms, Schmieg, selecting images produced by damaged Kindles, shows that not everything can be reduced to technology, in spite of the fact that our world would be increasingly technological.

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Wundegarten der Natur : Broken Kindles, par Sebastian Schmieg et Silvio Lorusso

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Peter Piller Umschläge Présenté par Kevin Moore

Peter Piller n’est pas seulement un artiste, c’est aussi un accumulateur, un archiviste et un reclassificateur. En réunissant et réorganisant la lie du photojournalisme—des photographies trouvées qui servent d’illustrations du plus petit dénominateur commun dans des parutions périodiques banales, Piller révèle, selon ses propres termes, « un tableau d’ensemble ». Ses regroupements de pavillons de banlieue, de filles posant au pied d’un arbre, de sites de batailles de la Première Guerre mondiale, de personnes touchant des voitures, toutes tirées des Archives Peter Piller amassées par l’artiste vingt ans durant, cristallisent quelque chose d’existentiel en invoquant les fondements étranges, comiques et parfois tragiques de nos histoires humaines les plus typiques. Sa récente série intitulée Umschläge (Couvertures) est basée sur la revue militaire est-allemande Armeerundschau (Revue des Armées), et propose de manière prévisible et pesante des photos d’armes sur la première de cou­ verture, et une pin-up sur la dernière de couverture. Par le simple étalement de ces couvertures, Piller met en lumière un tas « d’histoires » enterrées apparemment fortuites et tellement absurdes qu’elles pourraient servir de base à un reality show télévisé contemporain—des histoires de « recherche et de sauvetage de bébé », de « missiles à guidage thermique » et autres projections érotiques impudiques des pulsions et des fantasmes du mâle machiste. La meilleure de ces couvertures attire l’attention sur un amalgame d’armes et d’objets proprement photographiques, réunissant des viseurs de tir et des objectifs photographiques, un pistolet et un phallus, et d’innocentes ou séduisantes jeunes femmes à la désirable zone de tir. Piller parle de son travail comme d’un exercice « d’incompréhension créative » mais, dans le cas d’Umschläge, il est difficile de se dire que les rédacteurs et les graphistes aient pu être aussi naïfs—leurs lecteurs, peut-être.

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Peter Piller is a hoarder, an archivist, and a reclassifier, in addition to being an artist. By gathering and reorganizing the dregs of photojournalism—found photographs serving as lowest-common-denominator illustrations in undistinguished periodical publications, Piller conjures, in his own words, “the bigger picture.” His groupings of suburban homes, girls posing next to trees, World War I battle sites, people touching cars, all drawn from the Archiv Peter Piller, and amassed by the artist over the past 20 years, crystallize into something existential, calling forth the eerie, comic, and sometimes tragic underpinnings of our most typical human narratives. His recent series Umschläge (meaning “covers”) is based on the East German military magazine Armeerundschau (Army review), and features in ploddingly predictable fashion pictures of weaponry on the cover and a pinup girl on the back. Through the simple act of splaying these covers, Piller reveals a host of buried seemingly unintended “stories,” so absurd that they might serve as the basis for some contemporary reality TV show—stories of “babe search and rescue,” “heat seeking missiles,” and other unabashedly erotic projections of macho male urges and fantasies. The best of these call attention to a conflation of weapons and photography itself, fusing gunsight with camera lens, gun with phallus, and innocent or seductive female with desired soft target. Piller has said that his work is an exercise in “creative misunderstanding,” but in the case of Umschläge one doubts that the original editors and designers could have been so naïve—their readers, possibly.


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L’Ellipse Présenté par Martin Crawl

On se souvient de l’installation de Pierre Huyghe créée en 1998 et intitulée L’Ellipse. Sur l’écran de droite, un homme sort d’un appartement : c’est Bruno Ganz qui, dans le film de Wim Wenders, L’ami américain, sorti en 1977, vient de recevoir un appel d’un tueur à gages lui donnant rendez-vous de l’autre côté de la Seine. L’action se poursuit sur l’écran du milieu : Ganz, plus vieux d’une vingtaine d’années, traverse la Seine à son rythme. On passe alors au troisième écran, où Ganz, aussi jeune qu’au début, entre dans l’immeuble où l’attendent son destin et la suite de l’histoire (j’évoque tout cela de mémoire). Ce qu’a voulu dénoncer et à la fois célébrer Huygue, c’est une figure cinéma­ tographique devenue si commune qu’elle ne provoque même plus le moindre sursaut dans la salle : l’ellipse—cette manière de contracter le temps en ne figurant pas (faisant confiance au spectateur capable de la reconstituer tout seul) une partie de l’action. C’est une très belle pièce, très émouvante, très forte. Vingt ans plus tard, Huyghe a embauché le même acteur que Wenders et lui a demandé de faire ce qui n’a jamais été joué, jamais été filmé, traverser simplement la Seine de manière à ce que l’ensemble de l’action, de l’intérieur d’un immeuble à l’intérieur de l’autre, s’effectue en temps réel, sans coupe. Peut-être Huyghe aurait-il pu parvenir au même effet de manière moins spectaculaire—en présentant par exemple les planches reproduites ici. Elles sont extraites d’une sorte de répertoire photographique de postures dont la finalité est évidente : faire économiser au peintre le cachet du modèle et l’ennui de sa conversation dans l’atelier. Tous les gestes, ou peu s’en faut, sont représentés, avec un rendu évidemment photographique de la manière dont les muscles sont sollicités par tel mouvement de supination ou de giration. Les modèles ne sont pas moins variés, hommes, femmes, enfants, vieillards. On devrait pouvoir recréer le monde à partir de l’album, ou le représenter en entier. Pas tous les gestes, à la réflexion, et pas la création dans son ensemble : seulement ce qui a déjà été peint, parfois maladroitement sans doute. Et pas pour nous tous, mais à l’intention exclusive des peintres. On voit le rapport avec Huyghe. Comme la partie centrale de son installation, ce sont les néces­ saires images intermédiaires qu’on n’aurait jamais dû voir. C’est une ellipse d’un autre genre, entre l’histoire de l’art d’avant la réalisation de l’album et l’art qui la suit. Une couture normalement invisible. Et une autre manière de trier le monde.

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Remember Pierre Huygue’s installation created in 1998 and entitled L’Ellipse. On the right-hand screen, a man leaves an apartment : he is Bruno Ganz, who, in Wim Wender’s movie released in 1977, The American Friend, has just received a phone call from a hit man asking him to meet him across the Seine. The action continues on the middle screen : Ganz, twenty years older, crosses the Seine at his own pace. Then, on the third screen, Ganz, as young as he was in the beginning, walks into the building towards his destiny and the rest of the story (this is at least how I remember it). What Huygues wanted to denounce, and also celebrate, is a cinematographic figure that has become so common that it no longer generates any reaction in movie theaters : the ellipse—the way time is contracted to suppress part of the action (trusting the viewer’s capacity to reconstitute it by himself). It is a beautiful piece, very moving, very powerful. Twenty years later, Huygue hired Wender’s actor and asked him to perform what had never been done, never been filmed, simply to cross the river so as to perform the thread of the plot, from the inside of one building to the inside of the other building, in real time, without any cuts. Huygue could have reached a similar effect in a less spectacular manner by simply presenting the plates reproduced here. They come from a photo­ graphic repertory of postures, whose purpose is obvious : to save the artist the expense of a model and the boredom of studio conversation. All gestures, or nearly so, are represented, with a clear photo­graphic rendering of the way muscles are solicited in such movements as supination or gyration, with dif­ ferent models, men, women, children, elderly. The world could be recreated with this album, or represented in whole. Not all gestures, actually, and not creation as a whole : only that which has already been painted, sometimes even clumsily. And it is not intended for all of us, but for the exclusive use of painters. The link with Huygue is clear. As for the central part of his installation, they are the necessary intermediate images that we should never have seen. It is an ellipse of another kind, between Art History prior to the album’s production and the art that follows it—usually an invisible seam, and a different way to sort out the world.


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Applied

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L’Ellipse

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L’Ellipse

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Aurélien Froment À Cheval Présenté par Véronique Terrier Hermann

Avec sa série de photographies sur le Palais du Facteur Cheval, Aurélien Froment nous balade quelque part entre les velléités encyclopédiques du 19e siècle, telle la Scienza dell’arte de Giovanni Morelli (ensemble de dessins de mains et de pieds des peintures pour une anatomie comparée en histoire de l’art), et le vaste inventaire des sculptures du monde entier, magnifiées et mémorisées par la photographie pour le Musée imaginaire de Malraux (1947), sans oublier les planches photographiques du bertillonage et autres projets de recensement photographique. La méthode choisie est celle de l’indexation et du relevé systématique des éléments, des sculptures, des extrémités, en fait de tout ce qui fait saillie, jaillit de la masse, de l’architecture du Palais d’Hauterives. L’esthétique, pour sa part, semble empruntée à celle de Jacques-André Boiffard, lorsqu’à force de cadrage serré, gros plan, ombre et lumière, il fait surgir de nulle part un objet rendu dans toute sa particularité, sa vilenie, « le gros orteil » (Bataille, Documents, n° 6, 1929). Toutefois, ici, le drap noir de la chambre photographique s’inverse et s’enroule autour des objets afin de les déposséder de leurs attaches. Nus, seuls, affrontant notre regard, ils semblent toutefois se moquer d’une possible recon­ naissance. Tour à tour lion/singe, pieuvre/serpent, cheval/chèvre, etc., ils apparaissent figés dans un entre-deux, comme si la photographie les avait surpris au milieu de leur mutation. Ainsi arrachés du réel de leur profusion, ces indices, figures, mutants, nous donnent une vision inédite de l’iconographie du Facteur Cheval et témoignent de son monde fait d’obsessions et d’imaginaire. Mais, à la fois, Aurélien Froment souligne à quel point ils échappent à la verbalisation, à notre mémoire de visiteurs et peut-être même à l’entendement.

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With this series of photographs about the Palace of Facteur Cheval, Aurélien Froment takes us somewhere between the encyclopedic impulses of the 19th century, such as Giovanni Morelli’s Scienza dell’arte (a set of drawings of hands and feet from paintings, for a compared anatomy in art history), and the vast inventory of sculptures from all over the world, magnified and memorized through photography for Malraux’s Imaginary Museum (1947), or again Bertillon and his photographic plates, or other photographic census projects. The method chosen here is cataloguing, and the systematic summary of elements, sculptures, extremities, actually, of anything that protrudes, springs out from the mass, the architecture of the Hauterives Palace. Their aesthetic quality seems borrowed from that of Jacques-André Boiffard, when he uses close-ups, shade and light to reveal the distinctive features, the vileness of objects, “The Big Toe” (Bataille, Documents, n° 6, 1929). Yet, here, the black cloth of the photographic view camera is reversed and rolled around the objects in order to remove their strings. Bare, alone, confronting our gaze, they nonetheless seem to mock any possible form of recognition. In turn lion/monkey, octopus/snake, horse/goat, etc., they seem to be frozen in an inter-space—as if photography had caught them by surprise during their transformation. Thus snatched from the real of their profusion, these signs, figures, mutants, give us an original vision of Facteur Cheval’s iconography and bear testimony to his world of obsessions and imagination. Yet, Aurélien Froment shows how these are immune to verbalization, to our memory as visitors, and maybe even to any form of understanding.


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Avant que ça n’arrive, Les collisions de Nicolas Descottes Présenté par Sam Stourdzé

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Avant que ça n’arrive, Les collisions de Nicolas Descottes

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Avant que ça n’arrive, Les collisions de Nicolas Descottes

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Dans les centres de simulation des accidents, on répète la catastrophe, on en fait l’apprentissage. On provoque, on étudie in vitro, on simule pour apprendre à réagir, pour limiter les drames. On brûle, on explose, on emboutit. L’esthétique du désastre est révélée par sa mise en scène. C’est un désastre que l’on peut regarder en face parce qu’il est factice, exempt de sang et de victimes. Seules les carcasses métalliques chauffent, s’oxydent, se rouillent, anéanties sous un déluge de neige carbonique, dans un théâtre des opérations sans acteurs. Comme les carambolages d’Arnold Odermatt célébraient l’enchevêtrement des tôles froissées, érigées en ex-voto à la gloire de la modernité, les collisions de Nicolas Descottes s’annoncent comme un rite de passage, où les éléments se seraient unis pour provoquer la résurrection du métal sous une forme sculpturale. Dans la séquence finale de Zabriskie Point d’Antonioni, Daria (Daria Halprin), comme dans un rêve, contemple l’explosion de la maison faisant littéralement voler en éclat la matérialité des choses de la vie. Poussée à l’extrême, répétée à l’infini, l’explosion devient une figure poétique. Il y a dans les collisions de Descottes cette même force de destruction, celle qui se change en mélodie des formes et des structures, avec une dialectique rassurante : la répétition du risque, c’est la garantie de sa maîtrise, la préfiguration de l’événement, l’illusion du contrôle.

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In car crashes testing centers, disasters are reproduced, experienced. They are provoked, assessed in vitro, simulated, in order to learn how to react, so as to contain dramas. Burning, exploding, crashing. This staging reveals the aesthetics of disaster. It is a disaster that can be looked upon frontally because it is fake, bloodless and victimless. Only the metallic carcasses heat up, oxidize, rust, crushed under a torrent of dry ice, in a theater of operations bare of any actors. Just like Arnold Odermatt’s pileups celebrated the entanglement of crushed metal erected as ex-voto to the glory of Modernity, Nicolas Descottes’ collisions appear as a rite of passage in which elements would unite to provoke a resurrection of the metal in a sculptural form. In the final sequence of Antonioni’s film Zabriskie Point, Daria (Daria Halprin), as if in a dream, contemplates the explosion of the house, literally shattering the materiality of the realities of life. Pushed to the extreme, endlessly repeated, the explosion becomes a poetic figure. Descottes’ collisions hold that same destructive force, that which evolves into a melody of forms and structures, with a reassuring dialectic : the repetition of risk is the guarantee of its control, the prefiguration of the event, the illusion of control.


Avant que ça n’arrive, Les collisions de Nicolas Descottes

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The Operators’ Invisible Hands, Apparition of a distance, however near it may be by Paul Soulellis Présenté par Joachim Schmid

Une part croissante de la production d’information est filtrée par Google. C’est lorsqu’il est invisible que le modèle économique de la société semble fonctionner le mieux. Elle semble produire des informations naturellement. Bien sûr, ce n’est pas le cas, et, bien sûr, il n’y a pas que les algorithmes qui sont à l’œuvre, mais aussi des êtres humains. Nous ne sommes pas censés les remarquer, mais, parfois, nous trouvons des traces de leur présence. Ce sont des hommes et des femmes qui travaillent sur des outils qui permettent de numériser tous les ouvrages consultables sur Google Books. Une main tourne la page, l’autre appuie sur le bouton, encore et encore. Les humains font des erreurs. Un léger retard ici, un peu de négligence là—et une main prend une photographie de l’autre main. Une page est en partie masquée par la main d’un opérateur. La société emploie des robots de recherche pour déceler et éliminer ces ratés. Nous ignorons si ces robots sont bons, rapides ou performants, mais nous savons qu’ils ne sont pas parfaits. Nous le savons parce Paul Soulellis a découvert certaines de ces images indésirables avant que les robots n’aient eu le temps de les supprimer. Sa série Apparition of A Distance, however near it may be est un ensemble de clichés issus de Google Books qui montrent les mains de personnes anonymes qui accomplissent le travail dont nous dépendons en tant que lecteurs. Ces images ne sont pas censées exister, et la société s’évertue à les effacer au plus vite. Une raison évidente est que ces mains numérisées involontairement masquent l’information. Une autre raison pourrait être que ces mêmes mains donnent des informations indésirables sur l’équipe qui manipule les machines, ce qui pose la question de la race et du genre. Utilisez la fonction recherche Web de Google pour en apprendre plus sur les conditions de travail dans les usines de numérisation de cette société.

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Paul Soulellis, Apparition of a distance, however near it may be, 2012

Google filters an increasing portion of our information input. The company’s business model appears to work best when its activity is invisible. It seems to provide natural information. Of course it doesn’t, and of course there are not only algorithms at work but humans as well. We are not supposed to notice them but sometimes we encounter traces of their presence. They are the humans who operate the devices that scan all those volumes we can study in Google Books. One hand turns the page while the other one presses the button, again and again. Humans make mistakes. A tiny delay here, a bit of negligence there—and one hand takes a picture of the other one. Part of a page is covered by a scanner operator’s hand. The company employs search robots that are supposed to find and eliminate these glitches. We don’t know how good, how fast, and how successful these robots are, but we know that they are not perfect. We know because Paul Soulellis found some of these unwanted pictures before the robots had a chance to withdraw them from circulation. His series Apparition of A Distance, however near it may be is a collection of snapshots from Google Books showing the hands of anonymous people who do the job we readers depend on. These pictures are not sup­ posed to exist, and the company spares no effort to erase them as promptly as possible. The obvious reason is that the unintentionally scanned hands obscure information. Another reason may be that these very same hands pro­ vide unwanted information about the staff that operates the scanners, raising questions about race and gender. Use the Google web search function to learn about the working conditions in the company’s scan mills.


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The Operators' Invisible Hands, Apparition of a distance, however near it may be, by Paul Soulellis

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Type 42 ou la capture de l’écran Présenté par Sam Stourdzé

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Type 42 ou la capture de l’écran

Nous sommes dans les années 1960 aux Etats-Unis. Il—mais ça pourrait être elle—utilise un film polaroïd à développement instantané, le Type 42. Le nom de la pellicule est la seule information certaine dont nous disposons concernant un ensemble de plus de 900 photographies qu’un amateur a laissées derrière lui. Pour le reste, on observe, on déduit, on spécule… Il photographie l’apparition des femmes sur l’écran de sa télévision. Il cadre serré pour éviter de montrer la bordure de l’écran. Il déclenche dès qu’un visage apparaît, généralement en gros plan, les yeux ouverts. L’aspect fantomatique de figures floues et distordues résulte de la combinaison de la fugacité des images en mouvement, de l’écran curve et vitré et d’un appareil photo installé légèrement en biais. Le nom en lettres capitales, marqué à l’encre rouge, renforce le caractère obsessionnel de l’entreprise, tandis que la présence occasionnelle de trois nombres dans le coin supérieur ne renseigne nullement sur la date de naissance des modèles, mais bien sur leurs mensurations (en inches). L’observateur contemporain ne peut s’empêcher de s’interroger sur les raisons de cette accumulation frénétique. Et si c’était le projet d’une encyclopédie des actrices de son temps ? Pourquoi alors se servir de photos floues, il aurait été si simple—comme tout fan de base —de contacter l’actrice, son agent ou son studio pour demander une photo­ graphie. Elle aurait même été dédicacée ! Et si ce n’était pas des photos de télé mais celles d’un écran de cinéma ? On aurait alors mis la main sur l’incroyable collection du projectionnistephotographe qui, à force de revoir les mêmes films, se serait lancé dans l’improbable repérage des images sur lesquelles déclencher son appareil. L’hypothèse est tentante, mais quelques photographies montrent les bords du téléviseur… A l’évidence, il faut s’imaginer qu’un homme—finalement, il y a peu de chances que ce soit une femme—, à une époque où l’idée même d’un arrêt sur image n’existait pas encore (les premiers magnétoscopes arriveront quelques années plus tard), a installé son appareil photo face à l’écran de sa télévision, incapable de regarder le programme qui se joue devant lui, tant il est concentré à guetter le meilleur moment pour capturer ses images. Car finalement, c’est d’une capture dont il s’agit. Pas celle d’un écran, mais la capture de femmes par celui qui voulait vivre entouré d’elles. Toutes celles qu’il avait choisies une à une, comme des idoles, parvenant même à les extraire du poste, pour qu’elles restent, à jamais et instantanément, prisonnières à ses côtés.

We are in the 60s in the United States. He—but it could very well be a she— uses a Type 42 Polaroid roll film. The name of the film is the only available information we can be certain of concerning this set of over 900 photographs left behind by an amateur. As for the rest, we can only observe, deduce, and speculate… He photographs the appearance of women on his television screen. He opts for close frames to avoid showing the edge of the screen. He shoots just when a face appears, generally a close-up, eyes open. The spectral aspect of the blurred and distorted figures stems from a combina­ tion of elements, the fleetingness of moving images, the curved and glass screen, and the slanted position of the camera. The name in capital letters, in red ink, reinforces the obsessive character of the endeavor, while the occasional presence of three numbers in the upper corner certainly does not indicate the models’ birth date, but actually their measurements (in inches). The contemporary observer cannot but interrogate the reasons for such frantic accumulation. And what if it were an encyclopedia of actresses from the period ? Why then use these blurred images when it would have been so easy to contact— as any basic fan would—the actress, her agent or her studio, to ask for a photograph. It would even have been signed ! And what if they were not television shots, but cinema shots ? This might then be the incredible collection of a projectionist-photographer who, after viewing and reviewing the same movies, would have decided to initiate an improbable tracking of images to be shot. A tempting assumption indeed, if it were not for a few photographs showing the edges of the television screen. For sure, one must imagine that a man—it is really unlikely that it would be a woman after all—at a time when the idea of frozen frames did not exist (the first VCRs appeared only later) settled his camera in front of the television screen, unable to watch the program on view. After all, we are talking about screenshots. Not of a screen actually, but of women, done by someone who wanted to live surrounded by them. All the ones that he chose, one by one, as idols, even managing to extract them from the television set, so that they remain, forever and instantly, prisoners by his side.

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Natan Dvir Coming soon PrĂŠsentĂŠ par Erik Kessels

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Avec Coming Soon, le photographe israélien Natan Dvir prouve qu’il est encore possible de trouver d’excellentes idées de photographies dans une ville dynamique et débordante d’images. Il utilise les grandes toiles tendues sur les murs des boutiques en rénovation comme décor. Les grandes marques de créateurs poussent comme des champignons et se développent rapidement dans les villes du monde entier, étalant leur image sur d’énormes façades. Les rues deviennent alors la toile sur laquelle travaille Dvir. Il recherche le décor approprié et l’interaction parfaite entre la publicité et les gens qui passent devant. L’idée de la photographie dans la photographie brouille la distinction entre ce qui est réel et ce qui est mis en scène. La netteté des images publicitaires recomposées confère aux images de Dvir leur aspect tout aussi net, et en quelque sorte surréaliste. Une image géante de Zara en noir et blanc devient le décor pour une femme qui attend un taxi, à côté, un vendeur de glaces ambulant. Deux hommes assis sur un banc devant une gigantesque image pour Tommy Bahama d’une femme bronzant au soleil. Les hommes prennent le temps d’étudier la femme géante allongée devant eux. Et puis il y ces quatre mannequins qui posent de manière professionnelle et nous regardent droit dans les yeux tandis que les passants ne leur prêtent pas la moindre attention. La parfaite maîtrise de Natan Dvir révèle de remarquables interactions entre des personnes fausses et des personnes réelles.

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With Coming Soon, the Israeli photographer Natan Dvir proves that in a busy city full of imagery, you can still find brilliant ideas to photograph. He uses the canvasses stretched over shops under construction as his own canvas. The big designers’ brands pop-up and expand rapidly in cities all over the world, displaying their image over huge facades. These high streets become the canvas on which Dvir works. He does this by finding the right scenery and the perfect interactions between the advertising and the people walking in front of it. Because there’s a photograph in the photograph, you often don’t really know what is real and what is staged. The sharpness of the composed advertising images makes Dvir’s images also very sharp, and somehow surreal. A huge black and white Zara poster becomes the background for a woman waiting for a taxi, and besides her, an ice-cream cart. Two men on a bench face a huge Tommy Bahama image of a woman sunbathing. The men take their time to study the enormous woman in front of them. And on another occasion, four models posing professionally look us straight in the eyes, while some people pass by them without paying any attention. With a wonderful execution of these photographs Natan Dvir shows us a remarkable interaction between fake people and real people.


Natan Dvir, Coming Soon

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Natan Dvir, Coming Soon

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Biographies Jean-Daniel Berclaz Fondateur du Musée du point de vue, un projet débuté en 1997 qui fonctionne comme une œuvre collective mettant en évidence le processus de création en faisant participer le public et les artistes le temps d’une exposition. 80 vernissages d’un point de vue ont été réalisés en Europe et au Canada.

Founder of the Musée du point de vue a collective project initiated in 1997 whose purpose is to highlight the creative process by inviting audiences and artists to participate to an exhibition. 80 vernissages have been organized in Europe and Canada.

Jean-Christophe Blaser Conservateur au Musée de l’Elysée et cocommissaire de l’exposition reGeneration : 50 photographes de demain. Commissaire indépendant d’expo­ sitions de photographie et d’art contemporains, il est président de Kunstart qui gère le Centre d’art de Neuchâtel.

Curator at the Musée de l’Elysée and co-curator for the exhibition reGeneration : 50 Photographers of Tomorrow. Independent curator for photography and contemporary art exhibitions, he manages Kunstart that runs Neuchâtel Art Center.

Yannick Bouillis Après des études de philosophie, Il devient journaliste puis marchand de livres rares et contemporains. Il est aujourd’hui spécialisé dans les questions de photographie et nouveaux médias et s’intéresse aux nouvelles médiations dans l’art. Basé entre Arles et Amsterdam, il est le créateur et directeur d’Offprint Paris et d’Amsterdam Art Book Fair.

After studying philosophy, he is journalist before becoming a dealer in rare contemporary books. He specializes on issues related to photography and new media, interested in innovative mediations in art. Based in Arles and Amsterdam, he is the founder and director of Offprint Paris and Amsterdam Art Book Fair.

Martin Crawl Vit et travaille à Paris. La série Where to be when the past is over a été présentée à Arles dans le cadre de l’exposition From Here On (2011). La série Portrait of the Artist as a Daring Young American a été exposée à Paris Photo (2011). Il a notamment publié un texte dans le catalogue de l’exposition Derrière le rideau, L’Esthétique Photomaton (2012).

Lives and works in Paris. The series Where to be when the past is over was shown in Arles, as part of the exhibition From Here On (2011). The series Portrait of the Artist as a Daring Young American was exhibited at Paris Photo (2011). He has also published a text in the catalogue released for the exhibition Derrière le rideau, L’Esthétique Photomaton (2012).

Clément Chéroux Conservateur pour la photographie au Centre Pompidou. Historien de la photographie, docteur en histoire de l’art, il dirige la revue Etudes photo­ graphiques. Il a été commissaire de nombreuses expositions, dont La subversion des images : surréalisme, photographie, film (2009), Edvard Munch : l’œil moderne (2011), Derrière le rideau, L’Esthétique Photomaton (2012).

Photography curator at the Centre Pompidou. A photography Historian and Doctor in art history, he runs the magazine Etudes photographiques. He curated numerous exhibitions, including, La subversion des images : surréalisme, photographie, film (2009), Edvard Munch : l’œil moderne (2011), Derrière le rideau, L’Esthétique Photomaton (2012).

Nicolas Descottes Photographe et vidéaste, il interroge la notion de simulation comme construction d’une réalité fictionnelle à travers des séries de photographies commencées en 2005 dans des centres de recherche sur la gestion des catastrophes. Il a participé à un grand nombre d’expositions en Europe et à diverses publications. Johanna Diehl Travaille à Berlin. Elle a étudié la photographie à l’Académie des arts visuels de Leipzig. Elle a participé à plusieurs expositions internationales et a reçu de nombreux prix, et plus récemment la bourse Stiftung Kunstfonds Bonn. La série Ukraine va être publiée en 2014. Le travail de Johanna Diehl va être présenté à Paris Photo par la galerie Wilma Tolksdorf.

Berlin-based artist. She studied photography at the Academy of Visual Arts in Leipzig. She has participated in several international exhibitions and received numerous awards, most recently a scholarship by Stiftung Kunstfonds Bonn. The Ukraine Series will be published in 2014. Diehl’s work will be represented at the Paris Photo 2013 by Galerie Wilma Tolksdorf.

Natan Dvir Photographe israélien basé à New York qui enseigne au Centre international de la photographie. Ses projets ont fait l’objet d’expositions dans le monde entier et de publications dans des magazines internationaux. Il a reçu de nombreux prix, dont la Photographie de l’année, le Prix international de la photographie et le Prix du festival de photographie de New York.

Israeli photographer based in New York and a faculty member at the Interna­ tional Center for Photography. His projects were exhibited worldwide and published by international magazines. He is the recipient of a number of international awards, including Picture of the Year, International Photography Award, and New York Photography Festival Award.

Aurélien Froment Artiste qui vit et travaille à Dublin. Son travail prend pour prétexte des lieux réels où l'on prête aux images le pouvoir de transformer le monde. Il réalise des films et des installations qui revisitent ces lieux dans une perspective critique et esthétique. Son travail a été présenté lors de la 55e Biennale de Venise. Pour la série présentée dans ce numéro, il tient à remercier Émilie et Sébastien Chlasta-Galard, Marie-José Georges et l'équipe du Palais idéal du Facteur Cheval.

Based in Dublin, he is an artist who uses the pretext of real venues in which images are endowed with the power to transform the world. He produces films and installations that revisit these venues from a critical and aesthetic perspective. His work was presented during the 55th Venice Biennale. For the series presented in this issue, he wishes to thank Émilie and Sébastien Chlasta-Galard, Marie-José Georges and the Palais idéal du Facteur Cheval team.

Michel Giniès Photographe de presse, il se spécialise dans la photographie d’artistes. Ses images ont été publiées dans de grands magazines internationaux. En 1995, il commence une collection de photographies rares de cinéma. En février 2014, il participera comme prêteur et photographe à l’exposition Paparazzi au Centre Pompidou Metz.

Press photographer specialized in portraiture of artists. His images have been published in major international publications. In 1995, he started a collection of rare cinema stills. In February 2014, he will be involved both as lender and photographer with the exhibition Paparazzi at the Centre Pompidou Metz.

Erik Kessels Directeur de création chez KesselsKrammer, une agence internationale de communication indépendante. Il a publié plusieurs ouvrages de photographie vernaculaire chez KesselsKramer Publishing, dont la série In Almost Every Picture. Il est l’un des éditeurs du magazine alternatif Useful Photography. Il a été commissaire de nombreuses expositions, 24hrs of Photos et Album Beauty (2012), et a coorganisé From Here On (2011).

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Photographer and video maker, he questions the notion of simulation as a construction of a fictional reality through photographic series initiated in 2005 at different research centers working on disaster management. His work is included in numerous exhibitions in Europe and various publications.

Creative Director at KesselsKramer, an independent international communi­­ cation agency. He published several books of vernacular photography through KesselsKramer Publishing, including the series In Almost Every Picture. He is co-editor for the alternative magazine Useful Photography. Kessels curated many exhibitions, 24hrs of Photos (2012) and Album Beauty, and co-curated From Here On (2011).


Werner Kühler Photographe et collectionneur allemand. Après des études dans une école d’art à Düsseldorf, il décide de ne pas devenir artiste, mais de pratiquer, au gré des occasions ou des commandes, tout l’éventail de la photographie appliquée. Il collectionne la photographie vernaculaire depuis une quinzaine d’années. JJ Levine Artiste de Montréal qui fait du portrait intimiste. Ses photographies explorent les problématiques liées à l’identité de genre, la sexualité, l’identité de soi et aux espaces queer. Il a présenté ses œuvres dans des centres d’artistes autogérés, des galeries commerciales, des festivals d’art, et lors de confé­ rences académiques au Canada, aux Etats-Unis et en Europe. Kevin Moore Commissaire d’exposition et chercheur indépendant vivant à New York, ses récentes expositions et publications incluent Jacques Henri Lartigue, L’invention d’un artiste (2012 ; 2004 pour l’édition américaine), Words Without Pictures (2009), Starburst : Color Photography in America 1970—1980 (2010), Robert Heinecken (2012) et Alchemical (2013).

German photographer and collector. After studying at a Düsseldorf Art School, he decides not to become an artist, but rather to practice, on occasion or on commission, the full range of applied photography. He has been collecting vernacular photography for fifteen years.

Artist from Montreal who does intimate portraiture. His photographs explore issues related to gender identity, sexuality, self-identity and queer space. He presented his works at artist-run centers, commercial galleries, art festivals, and on the occasion of academic conferences across Canada, the United States and Europe. Independent scholar and curator, living in New York, his recent exhibitions and publications include Jacques Henri Lartigue : The Invention of an Artist (2004 ; 2012 for the French edition) ; Words Without Pictures (2009) ; Starburst : Color Photography in America 1970—1980 (2010) ; Robert Heinecken (2012) ; and Alchemical (2013).

Peter Piller Professeur à la Hochschule für Grafik und Buchkunst à Leipzig, il travaille sur la réinterprétation et la représentation de photographies et d’images d’archives, qu’il classe et réagence dans des installations ou des livres d’artistes. Depuis 1998, il constitue une vaste collection d’archives dont la majorité provient de journaux locaux, de cartes postales ou d’images trouvées sur Internet.

Professor at Hochschule für Grafik und Buchkunst in Leipzig, he works on the re-interpretation and re-presentation of photographs and archival images ; he classifies and rearranges them through installations or artist books. Since 1998, he has built a vast archival collection, the majority of which comes from local newspapers, postcards or is found on the Internet.

Christoph Schifferli Né en 1950 à Zurich, il a étudié la sinologie et l’histoire économique à Paris ; en 1980, il effectue des recherches en Asie, ainsi que diverses activités dans le secteur technologique et l’édition. Depuis 1983, il est principalement engagé dans le domaine du multimédia et Internet. Il collectionne la photo­ graphie et les livres d’artistes des années 1980.

Born in 1950 in Zurich, he studied Sinology and Economic History in Paris ; in 1980 he undertakes research in Asia, and works in various positions in publishing and technology. Since 1983, he has mostly focused on multimedia and Internet. He collects photography and artists’ books from the 1980’s.

Sebastian Schmieg Il travaille avec la photographie trouvée et des applications logicielles person­ nalisées pour créer des pièces qui interrogent comment les technologies contemporaines façonnent les réalités en ligne et hors ligne. Son travail a été exposé à la galerie Bitforms à New York, File à Sao Paulo, 319 Scholes à New York et Pixelache à Helsinki.

He works with found photography and custom software to create pieces that examine the way contemporary technologies shape online and offline realities. His work has recently been exhibited at Bitforms Gallery, New York, File, Sao Paulo, 319 Scholes, New York, and Pixelache, Helsinki.

Joachim Schmid Artiste basé à Berlin qui travaille avec la photographie anonyme depuis le début des années 1980. Son travail est exposé de par le monde et a intégré de nombreuses collections. En 2007, Photoworks et Steidl ont publié une monographie intitulée Joachim Schmid : Photoworks 1982—2007. En 2012, les éditions Johan & Levi ont publié le livre Joachim Schmid e le fotografie degli altri. Paul Soulellis Artiste et directeur créatif travaillant à New York. Son travail éditorial explore les notions de lieu, d’image et d’identité. Récemment, il a créé la Library of the Printed Web, un projet curatorial autour des artistes qui utilisent la capture d’écran pour développer des images imprimées à partir de contenus du Web. La collection a été présentée au vernissage de la 55e Biennale de Venise et à la NY Art Book Fair 2013. Rudolf Steiner Depuis 1998, il collabore avec Barbara Meyer Cesta sous le label Haus am Gern. Il a eu de nombreuses expositions personnelles, entre autre à la Kunsthalle de Berne ou au Foto-Forum de Saint-Gall. Ses œuvres ont été montrées dans le cadre d’expositions telles que les Rencontres d’Arles ou à la Kunsthalle, ou très récemment à Apexart, à New York. Sam Stourdzé Directeur du Musée de l’Elysée et rédacteur en chef d’ELSE, il étudie les mécanismes à l’œuvre dans la circulation des images, avec pour champ de prédilection les rapports entre photographie, art et cinéma. Véronique Terrier Hermann Docteure en histoire de l’art, professeure à l’Ecole supérieure des beaux-arts de Nantes, elle travaille plus particulièrement sur les liens qu’entretient l’art contemporain avec le cinéma et le documentaire. Elle participe au programme de recherche Start Making Sense !, Cinéma et art contemporains transforment l’essai, à la Head-Genève.

Berlin-based artist who has been working with found photographs since the early 1980s. His work has been exhibited internationally and is included in numerous collections. In 2007, Photoworks and Steidl published a comprehen­ sive monograph, Joachim Schmid : Photoworks 1982—2007. In 2012, Johan & Levi Editore published the book Joachim Schmid e le fotografie degli altri. New York based artist and creative director. His editorial work explores location, image and identity. Recently, he created the Library of the Printed Web, a curatorial project organized around artists who use screen captures to develop printed matter from web content. The collection has been presented at the opening of the 55th Venice Biennale and at the NY Art Book Fair 2013.

He has been collaborating with Barbara Meyer Cesta since 1998 under the label Haus am Gern. He has been extensively exhibited, including in solo shows at Bern Kunsthalle or at Foto-Forum in St. Gallen. His works have also been shown at the Rencontres d’Arles or at the Kunsthalle, or more recently at Apexart in New York. Director of the Musée de l’Elysée and Chief Editor for ELSE magazine. He studies the mechanisms at work in the dissemination of images, with a focus on the links between photography, art and cinema. Holding a Doctorate in Art History and Professor at the Ecole supérieure des beaux-arts in Nantes, her research focuses more specifically on the links between contemporary art and cinema and documentary. She is involved in the research program Start Making Sense !, Cinema and Contemporary Art Convert the Try, at Head-Geneva.

ELSE 6


Rue d’Italie 49 • 1800 Vevey - Switzerland Tél +41 (0) 21 923 32 00 • Fax +41 (0) 21 923 33 99 www.hoteltroiscouronnes.ch • info@hoteltroiscouronnes.ch


14.17 NOV 2013 GRAND PALAIS

Avec le soutien de / With the support of

WWW.PARISPHOTO.COM

96 PHOTO © ALEX PRAGER. COURTESY OF THE ARTIST, M+B, LOS ANGELES AND YANCEY RICHARDSON, NEW YORK — ART DIRECTION CLÉO CHARUET


Crédits

1 Johanna Diehl, Ukraine, 2013 Courtesy Galerie Wilma Tolksdorf and the artist

Impressum

ELSE est une publication du Musée de l’Elysée. ELSE est publié grâce au soutien généreux du Cercle du Musée de l’Elysée. Le Musée de l’Elysée est une institution du Canton de Vaud.

2 JJ Levine, Switch, 2009 © JJ Levine

Editeur Musée de l’Elysée 18 avenue de l’Elysée 1006 Lausanne, Suisse

3 Jean Daniel Berclaz, Points de vue © jd Berclaz 4 Couple italien anonyme, vers 1980 Collection privée, Paris

Directeur de publication  |  Rédacteur en chef Sam Stourdzé

5 Les Blow-ups de Blow-Up Collection Michel Giniès, Paris Collection Christoph Schifferli, Zurich 6 Haus am Gern, Autoportrait en couple d’artistes XVIII (Des animaux qui de loin ressemblent à des humains), 2012 © Haus am Gern 7 Sebastian Schmieg et Silvio Lorusso, 56 Broken Kindle Screens, 2012 © Silvio Lorusso et Sebastian Schmieg 8 Peter Piller, Umschläge, 2011­— 2012 © Peter Piller and Andrew Kreps Gallery, New York 9 L'Ellipse Collection privée

Comité éditorial Jean-Christophe Blaser Yannick Bouillis Florent Brayard Clément Chéroux Joan Fontcuberta Erik Kessels Christoph Schifferli Joachim Schmid Véronique Terrier Hermann Secrétariat de rédaction Elsa Frémont Traduction  |  Relecture Frédérique Destribats

10 Aurélien Froment, Relevé de façade, 2013 © Aurélien Froment 11 Nicolas Descottes, Collisions © Galerie Cortex Athletico 12 Apparition of a distance, however near it may be, 2012 © Paul Soulellis 13 Type 42, vers 1960 Courtesy Delmes & Zander / Galerie Susanne Zander, Cologne 14 Natan Dvir, Coming Soon, 2008—2013 © Natan Dvir Couverture : Natan Dvir, Coming Soon, 2008-2013 Remerciements Merci à tous les artistes, à tous les auteurs, aux équipes du Musée de l’Elysée et de IDPURE, ainsi qu’à tous ceux qui, par leur aide et leur soutien, ont permis à ce numéro de voir le jour, et plus particulièrement à Pascale et Jean-Marc Bonnard Yersin.

Publicité  |  Relation Presse Julie Maillard julie.maillard@vd.ch Abonnements Manuel Sigrist manuel.sigrist@vd.ch Conception  |  Réalisation This is Not www.thisisnot.ch Caractères Suisse Int’l, swiss typefaces www.swisstypefaces.com Impression  |  Conseils techniques Courvoisier-Attinger Arts Graphiques SA Dominique Freymond www.courvoisier.ch Distribution Elsa Frémont elsa.fremont@vd.ch Swiss : www.olf.ch World : www.ideabooks.nl

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Les auteurs sont seuls responsables de leurs contributions. En aucun cas, ELSE ne peut être tenu responsable pour les textes, documents et photographies publiés dans le présent volume. La reproduction de tout ou partie de la présente publication, sous toute forme que ce soit, est strictement interdite sans l’autorisation écrite et préalable de l’éditeur.

© 2013, droits réservés / Musée de l’Elysée Imprimé en Suisse

ISSN : 2235-0438

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Philippe Halsman Astonish Me !

État de Vaud

Une exposition au Musée de l'Elysée du 29 janvier au 11 mai 2014

Musée de l’Elysée 18, avenue de l’Elysée CH - 1006 Lausanne www.elysee.ch

Philippe Halsman, Marilyn Monroe, Jump, 1959 © 2013 Philippe Halsman Archive

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