Rapport de stage - Ballets de Monaco

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Rapport de stage

2012

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Un stage aux ballets de Monaco, d’accord.

Tout d’abord, se réveiller tôt pendant les Sauf que la danse je n’y connais rien et puis vacances c’est une expérience à vivre et le rose et les chignons n’étaient pas vraiment plutôt deux fois qu’une. Se réveiller sous un soleil éclatant afin de prendre un train mon bol de soupe. Voilà quelques jours que l’on m’avait vague- pour Monaco et crier sur les réseaux ment annoncé la couleur de ce que seraient sociaux que l’on va danser toute la journée et puis finalement découvrir avec stupeur mes vacances de paques. Je ne m’attendais la magie des ascenseurs monégasques. Il que très peu à ce qu’il allait nous arriver. suffit d’appuyer sur un des cents boutons et cette merveille de technologie vous transporte alors dans le monde féerique de Beausoleil. Comme ça, en une poignée de seconde. Les touches ne sont numérotées que par des chiffres. J’ai fini par en déchiffrer le code en usant de ruses et de techniques imparables. Mais là n’est pas le sujet de mon récit. Il s’agit plutôt de l’expérience. Notre mission en tant que stagiaire consistait à épauler les techniciens des ballets. Et quels techniciens. Epauler ces bras musclés pleins de blagues mais surtout regarder.

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J’ai observé durant cette période ce qu’est le travail d’équipe, le vrai. L’organisation, la méthode, et tous ces autres mots que l’on avait si vite oublié dans les ateliers de notre école. On les oublie parce qu’à force de pensées fatalistes on se dit qu’au pire, si l’on échoue ce sera de notre propre responsabilité et ça n’engage que nous. Sauf que là, dans le cadre d’une manifestation annuelle aussi prestigieuse que celle-ci, l’erreur on y a très peu le droit. Chaque personne est indispensable à la tâche. La date est fixée et c’est si remarquable de voir un travail fini, surtout à cette échelle là. C’est de concrétiser des petits schémas colorés sur du papier qui est curieusement époustouflant. A l’école, j’en reviens, un projet reste un projet, et s’il grandit c’est six fois rien, c’est même mille fois moins. N’allons pas cependant s’émerveiller de tout. La réalité est là. Les conflits humains demeurent. Il y a toujours l’envers

de l’histoire. C’est pourquoi d’ailleurs la besogne a autant de vertu. Alors avec mes camarades, je me pliais à quelques activités manuelles jonglant avec quelques agrafes et deux ou trois papillons. Parlons en du papillon, c’est un nom si mignon pour définir cet objet incontrôlable. A cause de lui, j’ai perdu une

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grande partie de ma dignité. Il m’a défié plusieurs fois, ne voulant pas s’envoler, et s’égarant délibérément de mes doigts à de nombreuses reprise, juste pour me rapetisser ou peut être pour faire le dingue. Le premier jour, nous avons fixé un grand rectangle de pvc sur un châssis pour fabriquer un écran pendant que machin divorçait de sa chemise et se baladait le ventre balan tout transpirant et en donnant des ordres amusants à son équipe. Il faut dire que le travail des hommes était des plus éprouvants. Ils soulevaient à plus force des projecteurs qu’ils hissaient jusqu’aux porteuses servant de support d’accroche des différents éléments de décor, de draperie, de lumière ou de son. Je ne suis heureusement pas un homme et je suis heureuse de ne pas avoir avoué à mon équipe de travail que j’avais subi à la naissance l’opération nécessaire. Nous nous sommes ensuite torturé l’esprit pour trouver un moyen de fixer des lecteurs

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de dvd sous des tabourets de manière à ce que les fils puissent facilement tourner avec les télévisions posées dessus et l’union de nos cerveaux d’artiste fit la force. Quelques jours plus tard, nous avons reçu les toiles de 12 mètres de haut que nous devions dresser dans le hall d’entrée. Pour qu’elles puissent tenir correctement et que le tissu si lourd ne déforme pas des porteuses en bambou, les techniciens l’ont accrochée sur des fermieres en acier. En une petite demi heure le tissu était tendu et l’espace que l’on voulait recréer prenait déjà forme. Ca y est, le bal des chimères était presque présent. Le reste du temps, nous quittions nos outils pour s’assoire confortablement sur les fauteuils de mousse et regarder les filages. Quelques réglages lumières en tapotant sur une machine et les chorég-


raphies avaient une toute autre émotion. Ce qui semblait être un assemblage de mouvements coordonnés devenait une véritable narration. Et plus les jeux de lumières se précisaient plus les sensations prenaient vie. Moi qui suis restée longtemps sceptique des ballets de danse en général, et qui ne jurais que par le théâtre et le cinéma, je fus transportée dans un tout autre univers. J’ai pris conscience du travail du danseur, de sa rigueur d’autant plus qu’ils étaient pour la

plus part très jeunes. Ils semblaient ne connaître ni la fatigue ni la lassitude de la répétition, du geste accompli plusieurs fois d’affiler parfois. Mais voilà, le début des Imprévus approchait à grands pas. On nous a confié plusieurs missions que nous devions exécuter pendant les représentations publiques. Nous étions chargés d’aider à la transition des décors avec les techniciens très rapidement pour que le tout soit fluide. Débrancher des moniteurs, les déplacer, le tout sans gêner les danseurs dans les coulisses et sans les regarder dans les yeux, mais ça c’était ma petite superstition personnelle. Mais attardons nous sur mon moment de gloire. Celui où j’ai admirablement bien nettoyé la scène avec une serpillière et un ballet gigantesque entre deux représentations, sous le feu des projecteurs. Même Sylvianne n’a encore jamais réalisé une telle performance devant autant de personne dans le public. J’ai

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manié le manche avec une telle aisance qu’à mon avis les chorégraphies qui me précédaient ont été détrônées. Lors des deux derniers soirs, un spectacle surprise était organisé par les étudiants de mon école, le bal des chimères. Les costumes et les décors avaient été conçus et fabriqués pour l’occasion par nos mains et les personnages de notre scénographie étaient joués aussi par les étudiants euxmêmes. Nous avions un quart d’heure pour plonger les spectateurs dans une ambiance macabre tournée à la dérision et les faire entrer dans un purgatoire où régnaient des être on ne peut plus singuliers. Avec Franck et Tania nous agissions une fois de plus dans les coulisses, où le challenge était de changer les costumes des protagonistes à la chaîne le plus hâtivement possible. La réaction du public était mitigée mais dans l’ensemble ils finirent par s’amuser de ce carnaval au faux air de spectacle de

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fin d’année. J’ai pris plaisir à voir finalement l’investissement de tous, même si la concrétisation de ce projet ne fut pas facile, nous y sommes arrivés. On fini toujours par y arriver, n’est ce pas ? Je me suis aussi rendu compte lors de la deuxième représentation du bal des chimères que nous étions déjà plus à l’aise que la veille, et que le stress s’était un peu dissipé une fois que nous savions où nous allions. Ce qu’il faut c’est de la préparation. Il n’y avait pas eu beaucoup de répétitions, nous connaissions les grandes lignes du scénario, mais sur scène dans les conditions du show, rien n’est plus pareil, il faut tout prendre en compte et ne négliger aucun détail, comme le temps. Les secondes sont précieuses. En quelques mots, ce fut une expérience enrichissante. J’ai encore beaucoup de choses à apprendre et j’en ai particulièrement pris conscience durant cette longue


semaine. Je me suis d’autant plus intéressée aux arts de la scène. J’ai envie depuis de penser scénographie. Des idées fusent comme jamais dans mon esprit. Le plus dur à la fin ce fut le démontage. Tout dégrafer, délacer, débarrasser pour retrouver le lieu vide que nous avions trouvé en arrivant. Tout ce travail pour quelques heures, quelques instants. Et même les plus belles photo ou vidéo ne restitueront pas parfaitement les performances du show en live. Voilà tout pour ce rapport de stage. Je reprends ma vie d’étudiante dans mon école sans danseuses qui défilent dans les couloirs. Sans technicien perchés aux plafonds.

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