Stratégies Logistique n°196 - Spécial 25 ans

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strategieslogistique.com @stratlog Numéro 196Septembre 2022ISSN 1249-2965Prix du numéro : 22 € NUMÉRO SPÉCIAL
Les 25 innovations qui ont révolutionné LA SUPPLY CHAIN
ans

Le chant des sirènes

Le magazine que vous tenez entre les mains a 25 ans ce mois-ci. Un quart de siècle et une histoire assez mouvementée, puisqu’il a traversé la bulle internet, la crise des subprimes en 2009, puis la pandémie de la Covid. Mais ce qu’il faut retenir de cette histoire est la résilience du titre, toujours là pour vous donner une information la plus objective possible. Nous avons voulu retracer dans ce numéro les événements marquants de ces 25 dernières années au travers de 25 articles répartis en 4 catégories, préfacées par l’interview d’une personnalité du monde de la logistique et de la supply chain. Le même exercice 25 ans plus tôt aurait été bien différent. L’e-commerce et les outils de pilotage n’étaient qu’embryonnaires. La rubrique « Transport » ne relevait pas encore d’une revue généraliste de supply chain que nous sommes devenus. Et l’intralogistique avait pour nom transitique et ne désignait certainement pas ce fourmillement d’innovations qui ont déferlé, grâce notamment à l’informatique. Bref, la période qui s’étend de la fin du siècle dernier à aujourd’hui a fait sortir la thématique que nous vous proposons d’un âge plutôt médiéval vers une ère moderne, plus mature. Maturité que la récente crise sanitaire a sans doute accélérée. Cette dernière crise a également fait émerger de nouveaux acteurs dans le domaine des médias, attirés par le chant des sirènes répétant inlassablement le caractère essentiel, voire fondamental de la logistique pour nos sociétés. Notre secteur y a certes gagné en visibilité (notre numéro en commun avec Challenges était vendu en kiosque, une première !) ce qu’il a perdu en clarté. La mode actuelle consiste principalement à vanter des louanges plutôt que de se risquer à émettre une critique, ou tout du moins à proposer un angle plus original. L’occasion pour nous de rappeler que Stratégies Logistique n’a pas l’intention d’emprunter cette pente facile. Ces 25 ans font en tout cas de notre titre le plus ancien en France dans le domaine de la supply chain. Un atout pour nous qui cherchons à construire notre notoriété sur le temps. Encore faut-il que cet argument soit partagé par tous. Le chant des sirènes est tellement beau !

Ces 25 ans d’âge font de notre titre le plus ancien en France dans le domaine de la supply chain. »

«

DÉCOUVRIR PARTAGER-COMPRENDRE APPROFONDIR ACHETER
Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022 3
ÉDITO

DÉCOUVRIR

D’INNOVATIONS

INTRALOGISTIQUE

Du goods-to-man au goods-to-robot

Le li-ion sonne le glas du thermique

La déferlante des AMR

Le code-barres se réinvente

RSE, la pénibilité n’est plus une fatalité

Les entrepôts font la chasse au carbone

TRANSPORT

Conteneurs, la course au gigantisme

Les flottes tournent la page du diesel

Le smartphone, pivot de la digitalisation

L’avènement des commissionnaires 2.0

Préludes au camion autonome

Et la douane devint électronique

E-COMMERCE

La logistique urbaine, pas encore majeure

des options à la carte

Le B to C nous emballe… un peu trop

L’omnicanal a son chef d’orchestre

3D : une 4e dimension écoresponsable

La micrologistique essaime en ville

PILOTAGE

La supply chain au cœur de la stratégie

chargeurs, les vecteurs de l’expérience client

WMS, les clés de la performance

l’outil du management

De la traçabilité à la visibilité

Les start-up dopent l’innovation

Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022 5
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10 Développement durable 12 Entreprise e-commerce,
transport
14 Infrastructures/ retail Cargo,
16 Intralogistique
18 RH
g TOUTE L’INFO SUR : strategieslogistique.com
Édito
L’évènement Maritime : enfin la détente sur les flux Asie
logistique,
routier, etc.
CMA CGM, VGP, Cyrillus, C&A, etc.
Ifoy, Amazon, Paack, etc.
E-Valley accueille un centre de formation Aftral
Logistique > n° 196 > Septembre 2022
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LHD,
Machines
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NUMÉRO
TMS
APS,
innovation 25 ANS
SPÉCIAL

Maritime : enfin la détente sur les flux d’Asie

Après leur envolée historique, les taux de fret maritime sur les routes Est-Ouest entament une décrue durable. L’annonce surprise du groupe CMA CGM d’une remise de 750 € par conteneur 40 pieds ne suffira pas à contenir les doléances des chargeurs vis-à-vis des compagnies maritimes.

Contraction des volumes transportés entre la Chine et l’Europe, baisse de la consommation en Europe, porte-conteneurs bloqués dans les ports, incertitude géopolitique liée à la guerre en Ukraine : plus de deux ans après la pandémie, les flux de marchandises entre l’Asie, l’Europe et les États-Unis semblent condamnés à l’ère du stop-and-go. Il y a tout de

même une bonne nouvelle pour les chargeurs : la baisse tendancielle des taux de fret maritime sur le marché spot s’inscrit dans la durée. Sur un Shanghai-Rotterdam, le tarif pour un conteneur de 40 pieds est passé de 9 280 $ le 7 juillet à 8 833 $ le 11 août (source Drewry). « Nous sommes à 8 000 $ par conteneur de 40 pieds aujourd’hui, contre 18 000 à 20 000 $ pour les liaisons entre les États-Unis

et la Chine au printemps 2021, quand les supply chains étaient en risque extrême », explique Nicolas Sepulchre de Condé, directeur du développement commercial du prestataire logistique In2log.

Supply chains décentralisées

De fait, depuis la fin du nouvel an chinois en février, il y a beaucoup moins de marchandises bloquées en Asie pour des

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© Stratégies Logistique

raisons de transport. La perte de capacité estimée à 30 % en 2020-2021 sur les lignes Asie-États-Unis, qui était due aux blocages des porte-conteneurs, a pu être résorbée. En réalité, la congestion dans les ports est assez cyclique. Si l’on regarde le nombre de porte-conteneurs en attente dans le port américain de Long Beach, ils sont passés de 120 en attente à une cinquantaine aujourd’hui. « Il va pourtant falloir que les opérateurs s’habituent à des congestions portuaires ponctuelles en Chine, au regard de la recrudescence du Covid-19 et des variants. On risque de connaître encore un transit time compliqué au second semestre 2022, compte tenu de cette congestion portuaire », pronostique Nicolas Sepulchre de Condé. La réouverture du port de Shanghai est effective depuis le 1er juin, après deux mois de confinement strict en raison de la politique zéro covid du gouvernement chinois. Les dépistages de masse sont de retour, notamment à Shanghai et Tianjin. 20 % du pays serait toujours concerné par des confinements plus ou moins stricts.

En parallèle, les tensions sur les chaînes d’approvisionnement ont changé de paradigme. « Nous sommes passés d’une supply chain just-in-time à une supply chain just-in-case, avec des stocks tampons, poursuit le directeur du développement commercial d’In2log.

Bruxelles veut plus de régulation

Une lettre conjointe a été adressée le 22 juillet à la commissaire européenne en charge de la concurrence, Margrethe Vestager, par dix organisations professionnelles*, dont l’ESC (European Shippers Council) et le Clecat (Comité de liaison européen des transitaires du marché commun). Elles exigent le lancement immédiat de la révision du règlement d’exemption par catégorie des consortiums de l’Union européenne pour l’industrie du transport de conteneurs. Ce règlement – qui expire en avril 2024 –exempte de facto les compagnies maritimes de conteneurs de bon nombre des freins et contrepoids du droit de la concurrence de l’UE, et leur permet d’échanger des informations commercialement sensibles pour gérer le nombre et la taille déployés ainsi que la fréquence et le moment des départs sur les routes commerciales du monde entier. Dans leur lettre à la Commission, les signataires soulignent les révélations et les recommandations des enquêtes menées aux États-Unis par la Federal Maritime Commission, qui ont abouti en mai à l’adoption d’une nouvelle loi sur la réforme du transport maritime, répondant à de nombreux griefs des utilisateurs et des services fournisseurs des compagnies maritimes de conteneurs. « En théorie, les consortiums étaient faits pour faire baisser les prix et générer des services. C’est tout le contraire qui se passe aujourd’hui », résume Jean-Michel Garcia.

* Clecat, Feport, ESC, EBU, GSF, ETA, UIRR, Fiata, IAM, FIDI.

en charge de la concurrence.

Si un problème de concurrence survient et perturbe la chaîne, une partie des flux sera impactée mais pas l’intégralité. » Aujourd’hui, les supply chains sont moins centralisées : « Les fabricants se dotent d’une seconde source d’approvisionnement pour leurs produits, diversifiant ainsi leurs fournisseurs. La mise en place de doubles hubs, l’un sur la partie Europe du Nord et l’autre sur celle du Sud, par exemple, leur évite des goulets d’étranglement. L’objectif est de multiplier le nombre de ports de destination ».

Coup de pouce de CMA CGM

Le spectre de l’inflation complique un éventuel retour à la normale. En France, le gouvernement d’Élisabeth Borne a sommé les grandes entreprises de participer à l’effort de lutte contre la spirale inflationniste pour favoriser le pouvoir d’achat des consommateurs. Après avoir proposé fin juin une remise de 550 € par conteneur 40 pieds, le groupe CMA CGM a augmenté la réduction des taux de fret à 750 € par conteneur 40 pieds pour l’ensemble des importations en France métropolitaine et en outre-mer. D’abord destinée à 14 grandes enseignes de la grande distribution en métropole, cette remise s’étend à l’ensemble de ses clients en France, grands groupes comme TPE et PME.

En outre, une baisse de 100 € par conteneur 40 pieds pour

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« On risque de connaître encore un transit time compliqué au second semestre 2022, compte tenu de cette congestion portuaire. »
Nicolas Sepulchre de Condé, directeur du développement commercial de In2log. Margrethe Vestager, commissaire européenne

L’ÉVÉNEMENT

toutes les exportations fran çaises est aussi instaurée pour soutenir la compétitivité des entreprises à l’export. Définies en étroite concertation avec le ministère de l’Économie, des Finances et de la Souve raineté industrielle et numé rique, les clients de CMA CGM et la CPME, ces mesures sont entrées en vigueur le 1 2022 pour une durée d’un an. « Il faudra vérifier que cette réduction sera bien répercutée sur le chargeur », prévient Jean-Michel Garcia, délégué aux transports internationaux de l’AUTF.

Auditionné le 20 juillet au Sénat par les commissions des affaires économiques et du développement durable, Rodolphe Saadé, le P.-D.G. de CMA CGM, s’est exprimé ex cathedra. « Je suis la seule compagnie maritime à faire ce que je fais, a-t-il déclaré. J’entends le fait que les tarifs sont très élevés, mais il faut regarder ce que font mes concurrents. Pour l’instant, ils n’ont pas bougé, peut-être parce qu’ils ne sont pas Français. » Et d’ajouter : « En moyenne, le transport maritime représente 4 % du prix d’un produit vendu au consommateur. Pour un conteneur au départ de Shanghai à destination de l’Europe rempli de 8 000 paires de baskets, le coût du transport maritime est de l’ordre de 1 € par paire. Les fluctuations de prix dans le transport maritime dépendent exclusivement de l’offre et de la demande ».

Contrats long terme et souveraineté économique

À l’évidence, tous les grands chargeurs ont été échaudés par le manque de capacité au cours de l’année 2021. « En 2022, ils ont donc signé des contrats fixes à long terme, d’un à trois ans, décrypte Nicolas Sepulchre de Condé. En contrepoint, le marché a retrouvé de la capacité de transport sur les bateaux, c’est ce qui fait baisser le taux spot, qui passe en dessous du taux des contrats à long terme. Cette baisse s’inscrit dans la durée. Le différentiel entre le taux spot et le taux des contrats à long terme est de l’ordre de 10 % en moyenne. »

Quelle sera la stratégie des compagnies maritimes par rapport à cet écart qui est en train de se creuser ? Est-ce qu’elles voudront maintenir coûte que coûte les taux de contrats long terme facturés aux chargeurs ? Ces questions se posent avec acuité pour les mois qui viennent. « D’après Rodolphe Saadé, 17 % de la perte de capacité est inhérente à la congestion portuaire, observe Jean-Michel Garcia. Or, les flux

n’ont pas explosé et la consom mation est à peu près la même. Les ports sont responsables de leur capacité d’accueil et du dé veloppement de leur hinterland. Mais les compagnies maritimes sont responsables des escales qu’elles font ou ne font pas. Cela contribue aux congestions. »

« Au reste, certains chargeurs se sont vus proposer par les Chinois de nouveaux incoterms pour bénéficier de tarifs intéres sants et de places supplémen taires sur les navires, relève Jean-Michel Garcia. C’est une alerte majeure pour la souve raineté. Si l’on ne maîtrise plus nos flux, certaines compagnies vont davantage se développer en raison du manque de services et des annulations d’escales. » Conséquence directe du manque de matériel et d’une pénurie de main-d’œuvre, les ports français deviennent des ports de transbordement. « Les flux sont de facto mélangés et les compagnies maritimes ne donnent pas la bonne informa tion, déplore le délégué aux transports internationaux de l’AUTF. La marchandise est soit en stationnement sur le quai, soit il faut la mettre en stockage extérieur, soit il y a des frais de surestaries et de détention. Les factures s’accumulent ; elles sont acquittées par le chargeur dans un premier temps, ou par le consommateur final lorsque ce n’est plus possible. On paie une non-qualité de service.

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» n Louis Guarino
« Les compagnies maritimes sont responsables des escales qu’elles font ou ne font pas. Cela contribue aux congestions. »
Jean-Michel Garcia, délégué aux transports internationaux de l’AUTF.
« En moyenne, le transport maritime représente 4 % du prix d’un produit vendu au consommateur. »
Rodolphe Saadé, P.-D.G. de CMA CGM. © Sénat

Le fret fluvial en manque d’eau

Confrontée à une sécheresse record, Voies navigables de France (VNF) a dû fermer plusieurs canaux cet été. « Avant de transporter des bateaux, le réseau fluvial transporte de l’eau », souligne l’opérateur en charge de 6 700 kilomètres de voies d’eau sur 8 500. Les axes de grand gabarit, qui accueillent des bateaux transportant plus de 1 000 t de marchandises, sont restés opérationnels, leurs niveaux étant régulés par des barrages mobiles. La desserte des grands ports maritimes a pu également être assurée. La situation est sous haute surveillance dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais. Sur le canal du Midi, les bateaux sont regroupés aux écluses. Sur une partie du canal de Bourgogne, la

navigation a été interrompue le 16 juillet. Idem sur l’embranchement de Nancy. Sur le canal de la Marne au Rhin et sur le canal des Houillères et de la Sarre, les niveaux d’eau ont été abaissés sur de nombreux secteurs pour préserver au maximum la ressource.

Inquiétudes sur le Rhin

En Allemagne, le faible niveau des eaux du Rhin a rendu la circulation du fret difficile. Les cargos ne peuvent emporter que 25 à 35 % de leur charge habituelle. La panne d’un convoi de 1 600 t a même fait craindre un temps le blocage total du trafic. La principale voie navigable d’Allemagne assure 10 % du transport de marchandises du pays, sachant que le réseau ferroviaire est déjà saturé. La navigabilité du Rhin interroge,

Renault en avance sur ses objectifs CO2

La direction supply chain de Renault annonce avoir réduit de 6,9 % en trois ans les émissions de CO2 liées à ses transports de marchandises en Europe. Elle dépasse ainsi son objectif initial, fixé dans le cadre de Fret 21 à 5,3 % entre 2018 et 2021. Depuis 2015, la réduction atteint 15 %. Plusieurs leviers ont été actionnés depuis 10 ans. L’augmentation de la part du ferroviaire face au TRM a permis par exemple d’éviter 2 600 t de CO2 sur l’achemine-

ment des pièces depuis l’Europe de l’Est vers la France. Les taux de chargement des camions ont été optimisés par des outils développés en interne. Les équipes de l’ingénierie ont travaillé à réduire

et « ce n’est qu’une question de temps avant que les installations de l’industrie chimique ou sidérurgique ne soient mises à l’arrêt, que les huiles minérales et les matériaux de construction n’atteignent pas leur destination », s’inquiétait Holger Lösch, de la Fédération des industries allemandes dans Les Échos. Le Rhin n’est pas le seul fleuve d’Europe durement touché par les conditions climatiques hors normes, rapporte le journal. Le transport maritime sur le Danube en Europe de l’Est et le Pô en Italie est fortement restreint. n

la quantité d’emballages et à densifier le packaging. Le groupe cherche également à rapprocher ses fournisseurs de ses sites de production, avec par exemple le pôle industriel ElectriCity qui réunit un écosystème de fournisseurs. La performance énergétique des transporteurs est suivie de près, associée à des objectifs de performance.

La direction supply chain s’est engagée à réduire de 30 % son empreinte carbone par véhicule d’ici à 2030 dans le monde. n

Emballages : BMW verdit son intralogistique

Le groupe allemand réduit l’empreinte environnementale des emballages de manutention. La part de contenants réutilisables issus de matériaux recyclés doit notamment passer de 20 à 35 % cette année. BMW utilise chaque année 360 000 bacs en PPE (polypropylène expansé) pour

transporter des pièces automobiles. Les rolls conteneurs seront remplacés par des modèles repliables en plastique recyclé à 90 %. BMW explore également l’emploi de matériaux biosourcés. L’objectif global est de réduire les émissions de CO2 dans la supply chain de 20 % par véhicule comparé à 2019. n

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR PARTAGER-COMPRENDRE APPROFONDIR ACHETER
DURABLE
DÉVELOPPEMENT
© VNF

Fret à voiles : une ligne transatlantique en 2024

Les porte-conteneurs à propulsion vélique de la start-up nantaise Zéphyr & Borée ont remporté l’appel d’offres lancé début février par l’Association des chargeurs pour un transport maritime décarboné, qui compte 17 membres et a été créée sous l’égide de France Supply Chain et de l’AUTF. L’objectif est de créer une liaison maritime décarbonée entre l’Europe du Sud et les ÉtatsUnis dès 2024, avec deux liaisons hebdomadaires. L’Association des chargeurs vise à réduire l’impact environnemental de 90 % sur cet axe, tout en gardant un équilibre entre le lead time, le service et le coût.

d’hydrogène, la propulsion éolienne semble être aujourd’hui la plus efficace, la plus rentable et la plus aboutie techniquement. Zéphyr & Borée n’abandonne pas la propulsion thermique pour autant. Afin de garantir la même ponctualité et les mêmes délais que les navires traditionnels, la jeune société propose un système hybride à moteur et à voile, afin de réduire l’impact carbone de 20 à 40 % sans augmenter le prix.

Bientôt une coopérative

En septembre 2019, Zéphyr & Borée avait été retenue par ArianeGroup pour transporter les éléments de son nouveau lanceur jusqu’à Kou-

122 M€ pour Flying Whales

La société française Flying Whales, qui développe un programme de dirigeables pour charges lourdes, vient de lever 122 M€ auprès de l’État français et de French Tech Souveraineté (Bpifrance et la principauté de Monaco) dans le cadre de France 2030. Entourée d’un consortium d’une quarantaine d’entreprises, la start-up est optimiste : « Le programme aéronautique et sa déclinaison industrielle sont en très bonne voie », a commenté Sébastien Bougon, P.-D.G. de Flying Whales.

remplissage complet des bateaux avant la fin de cette année. Si les volumes espérés sont atteints – en juillet, les navires étaient remplis à 80 % sur les deux lignes – Zéphyr & Borée construira à terme entre 10 et 12 navires.

Pouvant embarquer 600 EVP, les porte-conteneurs sélectionnés se sont notamment démarqués par l’utilisation du vent à plus de 50 % pour la propulsion principale et par la réduction de moitié des émissions carbonées par rapport au standard du marché. Même s’il existe les technologies de batteries ou

La start-up fait également partie d’une nouvelle compagnie maritime structurée sous forme de coopérative, Windcoop, afin d’importer des épices de Madagascar pour le compte de la société Arcadie, acteur majeur des épices bios en France. Le projet prévoit la construction, début 2023, d’un porte-conteneurs à voiles de moyenne taille (85 m de long et tonnage de 1 400 t).

Pour mémoire, l’Organisation maritime internationale a fixé des objectifs une réduction de l’empreinte carbone des transports maritimes de 40 % d’ici 2030 et de 70 % d’ici 2050. n

Verdir sa flotte grâce à une appli

La Fabrique de la Logistique lance l’application gratuite Verdir ma Flotte pour aider les transporteurs dans la transition énergétique de leurs véhicules. Lancé par l’Ademe, cet outil compare le coût et les émissions de CO2 en fonction des besoins et des usages. Après avoir renseigné le châssis du véhicule (porteur ou tracteur), son prix, les frais d’exploitation, ses caractéristiques, le kilométrage et le chargement, la calculette estime le TCO (coût global de possession).

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rou, en Guyane. Un premier navire est en construction en Pologne. Il

NOMINATIONS

SOGARIS

Guillemette Karpeles et Frédéric Schmidt rejoignent le développeur de logistique urbaine Sogaris.

E-commerce : la livraison gratuite a toujours la cote

Directrice générale de RATP Real Estate depuis 2016, Guillemette Karpeles devient directrice exécutive du pôle Développements stratégiques, projets et maîtrise d’ouvrage de Sogaris. Responsable du département immobilier depuis 2015 de l’assureur SMA, Frédéric Schmidt devient directeur exécutif du pôle Investissements, asset management, property management et relation clients.

APRC

Producteur d’immobilier d’entreprise, APRC Group renforce son comex avec l’arrivée d’Olivier Barge

Il rejoint la holding en tant que directeur opérationnel, tout en prenant la direction générale de sa filiale APRC. Olivier Barge cumule des expériences immobilières au sein de Bouygues Construction, Goodman, et dernièrement Prologis. Il anime également la commission Innovation d’Afilog.

INFFLUX

Frédéric Cousin a été promu directeur commercial et marketing d’Infflux, éditeur français de la suite logicielle unifiée BEXT, comprenant WMS, WCS, TMS et App. Il a commencé sa carrière en 1993 au sein de Decathlon avant de travailler chez le façonnier textile Tritex, puis chez le prestataire logistique New Vogue Logistique (qui était utilisateur des solutions Infflux).

Le cabinet de conseil et de courtage en transport ColisConsult a publié sa seconde étude des pratiques de livraison de 530 e-commerçants français. Parmi les résultats de ce palmarès « Meilleure livraison e-commerce 2022 », il ressort qu’un tiers des 530 sites audités proposent des retours gratuits. En outre, la plupart ont abaissé leur seuil de gratuité pour la livraison à domicile et en point relais. Ainsi, toutes catégories d’articles confondues, le seuil de gratuité moyen est passé de 87 € en 2021 à 78 € pour la livraison à domicile et de 64 € en 2021 à 59 € pour la livraison en point relais.

Selon Matthieu Erly, directeur de ColisConsult, les e-consommateurs « attendent toujours et encore un transport gratuit ou pas cher, qu’importent les contraintes du vendeur, et qu’importe l’inflation marquante des coûts de transport, boostée par celle du pétrole. Ils sembleraient même préférer acheter le même produit un peu plus cher mais sans frais de port. »

Cette même étude livre indirectement un palmarès des transporteurs préférés des e-commerçants, en livraison à domicile ou en point relais. Quand il est mentionné, le transporteur proposé est Colissimo dans 79 % des cas, en légère progression, loin devant Chronopost à 52 % (en baisse de 1 point) et Mondial Relay à 33 % (en hausse). Viennent ensuite DPD (23 %), UPS (16 %) et DHL (14 %). Trois des transporteurs du top 4 appartiennent au groupe La Poste. Pour réaliser ce classement, ColisConsult a audité chacun des 530 sites élus « Meilleurs sites pour acheter en ligne » en 2022 par le magazine Capital et l’institut Statista. Leur base de données était constituée de plus de 10 000 sites marchands en France, divisés en 8 secteurs d’activité. Les sites de l’alimentation ne représentent que 4 % du panel, l’électroménager et le multimédia, 8 %. La mode et accessoires est le secteur le plus représenté avec 28 %, suivi des équipements auto et maison à 21 %, puis le bien-être et la beauté à 14 %, le sport, 13 % et les loisirs, 12 %. n

Seuils de gratuité offres relais et offres domicile

n Bien-être et beauté n Alimentation n Loisirs n Mode et accessoires n Sport n Électroménager et multimédia n Équipement auto et maison

Création d’Alpes Supply Chain

Née de la volonté d’acteurs de la supply chain situés en Haute-Savoie, la nouvelle association Alpes Supply Chain affiche la volonté de « créer un écosystème local pour booster les synergies entre acteurs ». Ses adhérents se verront proposer ateliers, formations et visites de sites. La Haute-Savoie compte plus de 1 300 entreprises industrielles et 600 transporteurs/logisticiens. n

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR PARTAGER-COMPRENDRE APPROFONDIR ACHETER ENTREPRISE
Source
ColisConsult
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NAO logistique 2022 : + 8 % pour les ouvriers et employés

Les négociations annuelles obligatoires (NAO) pour la logistique ont débouché sur un accord prévoyant la revalorisation en linéaire (ensemble des coefficients) à + 8 % pour les ouvriers et employés et + 5 % pour les cadres. Ces augmentations s’appliquent au 1er septembre chez les entreprises adhérentes aux organisations professionnelles signataires (FNTR, FNTV, Union TLF et OTRE). Cet accord, signé par les syndicats CFDT, CFTC et CFE-CGC, toucherait 600 entreprises et 49 000 salariés. 68 % des employés de la logistique travaillent dans des entreprises de plus de 50 salariés. L’encadrement représente 16 % des effectifs, répartis entre 5 % de cadres et 11 % d’agents de maîtrise (chiffres SNATT CFE-CGC). L’accord n’était pas joué d’avance puisqu’en avril dernier, face aux syn-

dicats, les organisations patronales ne souhaitaient pas envisager la hausse demandée de 3 % des minima de branche, TLF demandant en outre du temps pour la mise en conformité sur les aspects de santé. « Cette nouvelle revalorisation maintient les écarts conventionnels en prenant en compte les hausses successives du Smic liées à l’inflation. […] La signature de cet accord témoigne de l’engagement des partenaires sociaux pour préserver l’attractivité du secteur », s’est félicitée Union TLF. À temps plein, le premier coefficient d’un opérateur emballeur (ouvrier) correspond actuellement à un salaire annuel de 19 752,56 € à l’embauche, celui d’un assistant inventaire (employé) de 20 105,65 €, celui d’un technicien de maintenance d’entrepôt logistique (cadre) de 22 605,90 €. n

Transport routier : inflation record en juillet

Les prix du transport routier de marchandises en France ont encore grimpé de 2,2 % en juillet par rapport au mois de juin, selon la place de marché Upply. « La moyenne des taux de fret routier en juillet a flirté avec le seuil de résistance que nous estimons à 1,70 € par kilomètre roulé », note Upply. En particu-

lier, le ralentissement de l’économie française en juillet devrait entraîner le diesel et les volumes à la baisse. Les taux de fret de juillet intègrent l’augmentation du gazole enregistrée au mois de juin. Sur un an, les prix progressent de 16,5 % au mois de juillet, accentuant l’écart entre 2022 et les années précédentes. n

Les défaillances de transporteurs en forte augmentation

elon Altares, le secteur des transports et de la logistique a enregistré au deuxième trimestre 2022 une hausse de 98 % des défauts par rapport au deuxième trimestre 2021. 263 procédures collectives ont été ouvertes dans des entreprises du TRM entre le 1er avril et le 30 juin contre 133 en 2021. Les

entreprises de transport de proximité sont très touchées, +132 % de défaillance, tandis que le transport longue distance résiste mieux, avec une hausse de 54 %. Les défaillances de PME ont triplé en un an. Tous secteurs confondus, les niveaux restent inférieurs à ceux de 2019, année de référence pré-Covid. n

NOMINATIONS

MEDLINK PORTS

Laurence Borie-Bancel, présidente du directoire de CNR, a été élue présidente de l’association Medlink Ports, regroupant les principaux acteurs du système portuaire et du fret sur l’axe Méditerranée-RhôneSaône. Élue pour un mandat de deux ans, elle succède à Cécile Avézard, directrice territoriale Rhône-Saône de VNF. Elle poursuivra le développement et le verdissement de ce corridor stratégique tout en dynamisant le fret.

AVIDSEN

Avidsen, PME française de solutions connectées pour l’habitat et le bâtiment, Nicolas Tudoux au poste de directeur supply chain. Membre du comité de direction, il pilotera une équipe de cinq personnes afin de déployer la supply chain du groupe en France et en Europe.

Nicolas Tudoux a travaillé sur les flux logistiques pendant 18 ans, principalement chez Michelin et Dentsply Sirona.

CHRONOPOST

Benoît Frette a été nommé au poste de président de Chronopost, la filiale de DPDgroup, branche du groupe La Poste. Avec une expérience de 25 ans au sein de la société, il a notamment contribué à l’émergence de Chronopost Healthcare, Chronofresh et Shop2Shop. Succédant à Martin Piechowski, il prend la tête d’une entreprise de 4 500 collaborateurs qui a distribué plus de 235 millions de colis en 2021.

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La Suisse valide Cargo sous terrain

Le projet Cargo sous terrain (CST) a reçu la validation officielle du gouvernement suisse pour le transport de marchandises. La société exploitante, qui rassemble entre autres DSV, DPDgroup, Rhenus Logistics, Swisslog et Gilgen Logistics, va ain-

si pouvoir démarrer la construction des 500 kilomètres de tunnels à trois voies prévus d’ici 2045, reliant différents hubs logistiques. Le premier tronçon, moyennant un investissement d’un peu plus de 3 Md€, pourrait être mis en service en 2031, en reliant sur 70 kilomètres

les communes de Härkingen-Niederbipp et de Zurich. L’ensemble du projet pourrait coûter 35 Md€. n

CMA CGM se renforce dans le spatial

L’

armateur marseillais a déclaré avoir franchi le 5 août 2022 le seuil de 5 % du capital et des droits de vote de l’opérateur de satellites français Eutelsat. Ce renforcement, qui résulte mécaniquement du rachat par Eutelsat de l’opérateur britannique OneWeb, conforte les ambitions spatiales de CMA CGM.

En juin 2021, le groupe avait signé un partenariat de 5 ans avec le Cnes, articulé autour de quatre thématiques : le routage maritime intelligent et les opérations portuaires, l’hydrogène et les nouvelles énergies, les possibilités du spatial au profit de la logistique et la logistique orbitale : « D’un côté, l’industrie spatiale a besoin d’exper-

Paris repense sa logistique

La Mairie de Paris a présenté sa stratégie de logistique urbaine 2022-2026, issue d’une réflexion d’un an et demi avec près de 300 acteurs privés et publics du domaine du transport routier de marchandises. Les objectifs sont multiples : désengorger le cœur de ville, limiter l’empreinte carbone, favoriser le commerce local et simplifier la vie du consommateur. Le plan prévoit notamment la création de 1 000 zones de livraison supplémentaires et de 1 000 places de stationnement vélo cargo, la mise en place de livraisons silencieuses en horaires décalés, ou encore la création de nouveaux espaces de logistique urbaine et sites multimodaux. Pour favoriser la transition écologique, la Ville refond les aides à l’achat de vélos cargos, vélos électriques et camionnettes électriques, et encourage le dévelop-

tise en matière de transport et de logistique. D’un autre côté, le partenariat permet au groupe de bénéficier des technologies mises au point par le Cnes, que ce soit en matière d’optimisation des opérations ou de transition énergétique », expliquait alors CMA CGM. Un autre partenariat dans le spatial a été noué en novembre 2021 avec Thales. n

pement de véhicules utilitaires électriques partagés. Un maillage de bornes électriques et de stations hydrogène est également prévu. Pour améliorer les conditions de travail des livreurs, une Maison des coursiers sera créée, ainsi qu’un maillage d’aménités (accès aux sanitaires, à des fontaines à eau et à l’électricité), assortis d’une charte sociale et environnementale signée avec les plateformes. À noter que 500 000 colis sont livrés chaque jour à Paris. n

VGP rachète la friche Petroplus de Rouen

VGP, développeur et investisseur de parcs logistiques et industriels en Europe créé en 2019, fait une entrée remarquée en France avec un projet d’acquisition des 32 hec-

tares de terrain de l’ex-usine de raffinage Petroplus à Petit-Couronne (Seine-Maritime). Son partenaire Valgo y a réalisé d’importants travaux de dépollution pendant 6 ans. Environ 150 000 m2

de bâtiments devraient sortir de terre pour accueillir des projets industriels et logistiques en bordure de Seine et à proximité de l’autoroute A13. Les travaux devraient démarrer en 2023. n

DÉCOUVRIR PARTAGER-COMPRENDRE APPROFONDIR ACHETER 14
/ RETAIL n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique
INFRASTRUCTURES

Cyrillus externalise avec Dispeo

enseigne de mode, qui a quitté le giron du groupe Vertbaudet, a choisi d’externaliser sa logistique auprès de Dispeo, filiale du groupe Hopps, spécialiste de la logistique e-commerce et omnicanale. Cyrillus a choisi le 3PL pour optimiser sa logistique à la fois au service de ses clients en ligne (40 % du chiffre d’affaires est aujourd’hui réalisé en e-commerce) et de ses 56 magasins situés en France et en Eu-

L’

rope. Dispeo assurera désormais la logistique de l’ensemble des produits Cyrillus (incluant au-delà

C&A sous-traite à Zalando

Le détaillant de vêtements néerlandais C&A va confier à Zalando Fulfillment Solutions (ZFS) la logistique des ventes réalisées sur la marketplace. C&A va bénéficier d’un accès direct au réseau logistique de Zalando, tandis que Zalando (10 Md€ de CA en 2021) va étendre sa

sphère d’activité dans la logistique. Déjà client de la solution d’unification des stocks des boutiques Connected Retail, C&A (5,12 Md€ de CA en 2021 pour 1 300 magasins dans 18 pays d’Europe) va ainsi sous-traiter à Zalando une sélection du Zalando Fashion Store en Allemagne, aux Pays-Bas, en

du textile les articles de mobilier et de décoration vendus par la marque) : réception et contrôle qualité, stockage, préparation des commandes, transport et retours des marchandises.

En e-commerce, l’externalisation devrait diviser par trois le délai entre la commande et la réception, et en retail, les magasins devraient être livrés au jour le jour pour des réassorts ou les mises en rayon immédiats. n

Belgique, en Autriche, en France et en Italie. Dans le quotidien économique allemand Handelsblatt, la P.-D.G. de C&A, Giny Boer, avait annoncé l’objectif d’atteindre 50 % de ventes en ligne d’ici 2025. Récemment, le distributeur de mode a également annoncé un partenariat avec Amazon. n

Dunlopillo confie ses tournées à PTV

Le fabricant de matelas a choisi le logiciel PTV Route Optimiser pour planifier ses tournées, optimiser l’usage de ses moyens internes et externes tout en rationalisant le coût d’exploitation. Avec 500 magasins distributeurs en France et près de 110 000 matelas vendus

par an, Dunlopillo a apprécié notamment la gestion de grilles tarifaires, de véhicules multiples et de chargement des véhicules, mais également l’aspect multisite. Matelas, sommiers, oreillers et têtes de lit Dunlopillo sont designés et fabriqués depuis 2020 dans l’usine de Limay, dans les Yvelines. n

E.Leclerc : extension de la SCA Normande

Le groupement d’achat a inauguré deux nouveaux entrepôts, l’un dédié aux produits d’épicerie et l’autre aux produits frais, sur sa plateforme logistique de Lisieux, à Glos dans le Calvados. Ces nouveaux 30 000 m2, contre 7 500 m2 à l’origine, répondent à la multiplication des points de ventes : 40 hypermarchés et 60 drives en Normandie, ainsi que 25 magasins outre-mer (La Réunion, Martinique, Guadeloupe). Cette extension, fortement

automatisée, a coûté 82 M€, dont un tiers dans le logiciel, avec un accent sur la RSE. n

15 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022

IFOY 2022 : six lauréats

Jungheinrich, Locus Robotics, Noyes Technologies, robominds, SSI Schäfer et Synaos ont remporté le concours international de l’intralogistique.

Les finalistes ont une fois de plus présenté des matériels et solutions qui façonneront à long terme l’avenir de l’intralogistique », s’est félicitée la présidente du jury des IFOY Awards (International Intralogistics and Forklift Truck of the Year), Anita Würmser, Cette année, 12 constructeurs et éditeurs étaient en compétition pour décrocher un prix, après avoir passé avec succès une semaine de tests de terrain en mars dernier. Quatorze de leurs matériels et solutions avaient été retenus pour leur ergonomie, leur sécurité, leur efficience ou leur adéquation avec les attentes du marché.

1. Véhicules spéciaux : Jungheinrich

Pour le jury, le gerbeur électrique à deux étages ERD 220i de Jungheinrich établit de nouvelles normes en matière de sécurité, de protection latérale et de compacité. Les performances sont également de premier ordre face à la concurrence.

2. AGV/AMR : Locus Robotics

La plateforme de pilotage d’AMR coordonnant employés et robots mobiles Locus Robotics AMR Solution permet aux retailers, industriels et logisticiens d’améliorer l’efficacité de leur flotte de robots mobiles autonomes. Son haut degré d’innovation et sa pertinence sur un marché du commerce en ligne en croissance rapide ont emporté la décision du jury.

3. Start-up de l’année : Noyes Technologies

Le système de stockage robotisé Noyes Storage pour la logistique urbaine, compact et hautement flexible, est arrivé en tête sur les critères de pertinence pour le marché, d’avantage pour le client, de degré d’innovation et de fonctionnalité/exploitation.

4. Robots : robominds

Le système d’exploitation pour robots d’intralogistique robobrain.NEUROS répond aux attentes du marché, a estimé le jury. Ce système d’exploitation robotique fiable et neutre vis-à-vis des fabricants prend en charge les processus basés sur l’IA.

5. Solutions d’entrepôt intégrées : SSI Schäfer

Le projet Flat Pack Picking déployé chez Ikea à Dortmund combine un système automatisé de préparation de commandes d’articles lourds et volumineux avec quatre robots portiques, assurant une palettisation optimisée. Grâce à ce projet, 3 000 commandes supplémentaires peuvent être traitées chaque semaine.

6. Spécial de l’année : Synaos

Le système de localisation de véhicules en temps réel à base d’analyse Synaos IMS s’adapte à tout type de chariots de manutention, ce qui facilite la transformation numérique des gestionnaires d’entrepôts, a souligné le jury. n

DÉCOUVRIR PARTAGER-COMPRENDRE APPROFONDIR ACHETER 16 INTRALOGISTIQUE n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique
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© IFOY Award

Amazon lance de nouveaux robots

La R&D d’Amazon multiplie les innovations pour robotiser ses entrepôts. L’AMR Proteus (photo) se déplace parmi les employés, contrairement aux fameux AMR porte-étagères rachetés à Kiva en 2012. Il peut notamment aider les employés pour la manutention des GoCarts, ces

caisses à roues utilisées pour déplacer les colis. « Notre vision est d’automatiser la gestion des GoCarts sur l’ensemble du réseau », prévoit Amazon. Autre robot autonome, Cardinal est un bras articulé qui utilise l’IA et la vision par ordinateur pour sélectionner un colis et le déposer dans un GoCart pour la

prochaine étape. Le tri des colis se produit plus tôt dans le processus d’expédition, accélérant le temps de traitement. n

Paack déploie 270 robots Geek+ à Madrid

Le logisticien dubaïote Paack, spécialiste de l’e-commerce, a fait appel au chinois Geek+ pour équiper son centre de distribution à Madrid de 270 AMR. Desservant près de 60 villes, la plateforme de 27 000 m2 est divisée en deux sections : une mezzanine pour le tri et un espace de préparation de commandes au rez-de-chaussée.

Les robots de tri de la mezzanine transfèrent les colis jusqu’aux rayonnages du rez-de-chaussée,

Polyflame robotise avec Scallog

Importateur français de briquets et d’accessoires pour fumeurs, Polyflame Europe a centralisé il y a deux ans sa logistique à Croissy-Beaubourg (Seine-et-Marne) dans un entrepôt de 9 000 m². La préparation de commandes au détail a été robotisée avec la solution goods-to-man Flexypick de Scal-

log. Huit robots Boby déplacent 130 étagères mobiles sur 500 m² vers 2 stations goods-to-man, le tout étant interfacé au WMS Logitrack de l’éditeur Lisa. Flexypick traite dans un premier temps 25 % des lignes de commandes, sur un tiers des 3 500 références stockées, soit 100 lignes traitées par heure. « Nous sommes sur la

où des robots de préparation de commandes déplacent les colis vers les opérateurs. La solution combine des robots de prélèvement de commande et des robots de tri pour le dernier kilomètre et le cross-docking. Paack travaille notamment avec Shopify, Magento, PrestaShop, etc., et des 3PL tels que ID Logistics, XPO Logistics, Kuehne+Nagel, Logvad, etc. n

bonne voie pour une réduction de 10 % des coûts de préparation de commandes et un ROI en moins de trois ans », affirme Daniel Boughanim, président de Polyflame. n

17 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022

E-Valley accueille un centre de formation Aftral

Des salles de formations, un entrepôt pédagogique et une aire d’évolution extérieure ont été réhabilités au sein de la zone logistique.

Hier, c’étaient les bureaux du colonel, au sein de la base aérienne 103 Cambrai-Épinoy. Aujourd’hui, ces 300 m² ont été réhabilités en salles de formation Aftral, dotées entre autres de deux simulateurs de conduite poids lourds. L’organisme compte y former près de 3 500 stagiaires par an, notamment des Caces pouvant répondre à la demande des entrepôts mais aussi aux besoins du chantier du canal Seine Nord pour la conduite d’engins de travaux publics. Ce centre de formation proposera également des formations transport et logistique de bac+2 à bac+5, dispensées via son école Isteli, dès la rentrée 2023.

Pour recruter des candidats, l’Aftral proposera deux parcours d’immersion grâce à un casque 3D. Des personnes en recherche d’emploi pourront par exemple tester les métiers de préparateur de commandes et de cariste d’entrepôt. Le dispositif a été imaginé par Cambrésis Emploi via son dispositif Maison de l’emploi.

Barycentre de la logistique régionale

« À travers la présence d’e-Valley, avec l’arrivée du Canal Seine Nord en 2028 et au vu de la pyramide des âges, les besoins en recrutement vont continuer à croître », constate Loïc Charbonnier, P.-D.G. d’Aftral.

« C’est pourquoi nous mobilisons ici toute l’ingénierie pédagogique d’Aftral, qu’il s’agisse de formation initiale de permis conducteur ou des métiers d’opérateur, préparateur de commandes, agent d’entrepôt,

Un entrepôt pédagogique de 1 300 m² a été aménagé.

ainsi que tous les Caces, grues et chariots ».

Cette offre de recrutement et de formation devrait soutenir le développement à venir d’e-Valley, vu comme un parc logistique d’envergure (320 hectares à terme), mais aussi comme un cluster : « il s’agit de créer une synergie entre la formation, les entreprises de logistique, implantées et à venir, et les agences d’intérim (Manpower, Adecco et Synergie étant déjà installées) », résume Fabrice Galloo, directeur du développement du projet e-Valley. « À Cambrai, e-Valley constitue déjà le barycentre de la logistique régionale : les nombreuses marques d’intérêt pour le projet nous prouvent que notre démarche de « smart logistic city », avec des prix compétitifs et un ensemble de services comme la formation, fonctionne. »

Parmi les développements à venir, un projet de géolocalisation des camions sur le site avec l’outil Waze, une expérimentation sur le fret aérien par drones avec Airbus, mais aussi la création d’une structure de recherche et de développement avec le lancement le 10 juin de la chaire Tec’Log D (transport, économie circulaire et chaînes logistiques durables), en présence notamment de Joseph Sarkis, spécialiste américain de la logistique à l’Institut polytechnique de Worcester aux ÉtatsUnis. Et Fabrice Galloo de conclure : « La chaire travaillera sur trois axes : la mécanisation des entrepôts ; le big data, l’intelligence artificielle et la blockchain ; la cybersécurité pour l’informatique, les personnes et les marchandises ». Des sujets qui pourront être mis en application grandeur nature. n

DÉCOUVRIR PARTAGER-COMPRENDRE APPROFONDIR ACHETER 18 RH n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique

Stratégies Logistique fête ses 25 ans. Ce dernier quart de siècle aura vu la logistique changer de dimension et passer à l’ère de la supply chain. Mondialisation du sourcing, essor de l’e-commerce, explosion du nombre de colis, livraisons ultra-express, entrepôts XXL automatisés, digitalisation, etc. Cette accélération des cadences, des volumes et des services s’appuie de nombreuses innovations. Nous en avons retenu 25 selon quatre grandes thématiques. Toutes marquent un progrès, un point d’inflexion, voire une rupture dans l’exécution et le management des supply chains.

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 20
LA LOGISTIQUE À LA SUPPLY CHAIN : 25 ANS
DE
D’INNOVATIONS
Quelques dates clés (en France) 1992 La « supply chain » émerge Lancement d’amazon.fr 1995 2000 Premier drive (Auchan Leers) Premières suites logicielles de supply chain 2001 2002 Premiers goods-to-man Porte-conteneurs Emma-Mærsk, 15 500 EVP 2006 2010 Premiers OMS Premières tours de contrôle SOMMAIRE INTRALOGISTIQUE .................................................. Pages 24 - 37 TRANSPORT ............................................................. Pages 38 - 47 E-COMMERCE Pages 48 - 61 PILOTAGE Pages 62 - 69 25e INNOVATION Pages 70 - 73
Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022 21 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com Premier VUL électrique 2011 2014 Essor des plateformes de transport Norme RSE (ISO 26000) 2015 2016 Tests de conduite autonome Décloisonnement TMS/WMS 2020 2021 Livraisons du quart d’heure Exotec, première licorne de la robotique 2022 © Adobe Stock

1. INTRALOGISTIQUE

À l’instar des usines, les entrepôts sont passés de la mécanisation à l’automatisation et à la robotisation. Clés de voûte de la performance logistique, leur montée en cadence s’appuie sur une série d’innovations technologiques, notamment les systèmes goods-to-man puis les robots mobiles autonomes, couplés à des solutions de traçabilité dans et hors les murs. Les processus manuels n’ont pas disparu pour autant. L’innovation vise aussi à améliorer les conditions de travail, gage de l’attractivité des métiers de l’intralogistique. Autre priorité RSE, la prise en compte des enjeux environnementaux, tant énergétiques qu’écologiques, a aussi émergé avec force.

LE POINT DE VUE DE L’EXPERTE

Après avoir dirigé la filiale de Savoye a-SIS, Chantal Ledoux a cofondé Boa Concept en 2012 dont elle assure la direction.

Quelle place tient la technologie dans l’essor de l’intralogistique depuis 25 ans ? Considérée dans les années 1990 comme un mal nécessaire, la logistique a acquis ses lettres de noblesse au cours des 25 dernières années pour devenir à l’heure actuelle un atout concurrentiel majeur. Cette évolution s’est appuyée sur des évolutions technologiques, mais s’est aussi alimentée de ces évolutions : c’est parce que la technologie permettait d’aller plus loin que la logistique prenait de plus en plus d’importance dans les systèmes de production et de distribution. Ce cercle vertueux a concerné aussi bien la logistique de transport que l’intralogistique.

Quelle innovation a créé la plus forte rupture dans l’intralogistique ?

Au premier plan, la science du traitement des données et l’informatique en général ont été le tremplin permettant à l’intralogistique d’émerger d’une zone obscure où se triaient et se produisaient des documents papier, pour devenir un département à part entière connecté en temps réel au système

d’information de l’entreprise. Dès lors, l’informatique a permis d’intégrer aux différents processus intralogistiques des outils de plus en plus sophistiqués : des simples terminaux portables pour les opérateurs aux systèmes de stockage automatisés, aux systèmes de préparation de commandes, aux convoyeurs et robots de transfert (AGV ou AMR suivant les types de charges), et maintenant aux systèmes de picking robotisés. Au travers de logiciels spécialisés comme les WMS, OMS et autres TMS, c’est aussi l‘informatique qui a permis d’organiser et optimiser les opérations logistiques, et qui en retour collecte les masses d’informations qui donnent à chaque entreprise des capacités d’analyse uniques pour orienter ses politiques.

L’informatique restera le plus fort facteur de progrès technologique ? Oui, c’est peut-être dans l’informatique que vont se retrouver les évolutions technologiques majeures des prochaines années : la participation des systèmes logistiques au big data qui constitue une part de plus en plus importante de la valeur de l’entreprise.

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 24
«
L’informatique a été le tremplin permettant à l’intralogistique d’émerger »
25 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com 26 Du goods-to-man au goods-to-robot 28 Le li-ion sonne le glas du thermique 30 La déferlante des AMR 32 Le code-barres se réinvente 34 RSE, la pénibilité n’est plus une fatalité 36 Les entrepôts font la chasse au carbone
25 ans d’innovations INTRALOGISTIQUE
SOMMAIRE

Préparation de commandes Du goods-to-man au goods-to-robot

Le goods-to-man marque une révolution copernicienne dans l’entrepôt : les opérateurs ne se déplacent plus dans les rayonnages pour préparer les commandes, ce sont les marchandises qui viennent à eux. Un concept qui vaut

Tout a commencé dans les années 1980 avec des réseaux de convoyeurs motorisés identiques à un réseau de chemin de fer. Le bac ou le colis de préparation s’arrêtent dans des « gares » correspondant à des zones de préparation de commandes définies selon la typologie des produits (fréquence d’achat, taille, poids, volume, famille de produits, etc.).

Le premier système à gares mis en place en France par Savoye remonte à 1985, mais il ne comportait pas de système de précolisage. Il faut attendre 1990 et la création de l’éditeur Logarithme pour disposer du premier WMS calculant le nombre, la taille et la composition des colis avant leur constitution. « Avec ces systèmes, on ne préparait plus des commandes mais directement des colis, ce qui permettait de supprimer la reprise des commandes dans des colis », explique Chantal Ledoux, codirigeante de Boa Concept. L’arrivée des logiciels a donc été décisive !

Avec le système à gares, l’opérateur optimise ses déplacements, mais il continue de se déplacer dans sa zone de prélèvement d’articles. Avec le goods-to-man, l’opérateur ne bouge définitivement plus. En Europe, le premier système de ce type a été mis en place en 2002 par Knapp en Autriche (application pharma),

1985

Premier système à gares 1990 Système à gares avec précolisage 2002

Premier goodsto-person en Europe 2004 Premier goodsto-person en France 2021 Premier goodsto-robot

puis il sera installé en France deux ans plus tard chez Office Depot. C’est le début d’un mouvement qui est loin d’être terminé : dans l’Hexagone, entre un quart et la moitié des entrepôts en seraient équipés selon les sources. Largement de quoi voir venir…

Simplification mécanique

se passent d’ascenseurs en grimpant eux-mêmes dans les alvéoles de stockage pour alimenter les postes de préparation de commandes, d’où une simplification drastique de la mécanique, une réduction de l’entretien et une flexibilité améliorée de l’infrastructure.

Vers le goods-to-robot

*Alstef Group a cessé de commercialiser le système d’AutoStore en 2022.

Ce système, rebaptisé goodsto-person car beaucoup d’opérateurs sont des opératrices, s’appuie sur la densification et l’automatisation du stockage avec l’utilisation de miniloads. Une technologie très lourde au départ (chaque grue pèse plus d’une tonne !) qui n’a cessé de se perfectionner et de se diversifier. Le stockage proprement dit est passé d’une profondeur à deux, trois, voire quatre profondeurs. La technologie miniload a évolué vers des systèmes à navettes associées à des ascenseurs en extrémité d’allées. Depuis quelques années, les robots d’Exotec

Une diversification du goodsto-person est arrivée d’outreAtlantique avec le rachat de Kiva par Amazon en 2012. Plus de transstockeur cette fois, mais un robot portant une étagère pour la mettre à disposition d’un opérateur. Révolutionnaire, la technologie est apportée en France par Scallog, société française fondée en 2013. Son succès se mesure aujourd’hui au nombre de robots vus dans les allées des salons professionnels. Elle est également venue de Norvège, avec la mise en place par Alstef* du premier AutoStore en France en 2016, un système très compact où les robots mobiles se déplacent sur une grille.

Enfin et surtout, le goods-toperson favorise l’automatisation des autres postes de l’entrepôt, notamment la robotisation de la palettisation ou le déchargement des camions. Ce ne sont plus les idées qui manquent. Ni les capitaux ! Désormais, l’avenir du concept se trouve ainsi dans le goodsto-robot. n GS

Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 26
n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies
INTRALOGISTIQUE
de l’or aujourd’hui !

Transition énergétique

Le li-ion sonne le glas du thermique

Dans les chariots de manutention, les batteries lithium-ion font oublier les batteries au plomb et surpassent désormais les moteurs thermiques.

l’instar des véhicules routiers, l’électrifica tion a gagné le secteur des chariots de manutention. Elle est née à la fin des an nées 1990 avec des premiers modèles équipés de batteries au plomb mais dont l’usage restait limité par rapport aux engins à moteur thermique. « En 2012, 70 % des chariots frontaux étaient commercialisés en version thermique », com mente Lucas Toussaint, chef de produit énergie chez Junghein rich. La bascule s’est opérée en 2016, année à partir de laquelle la part des ventes de chariots électriques a dépassé celle des versions thermiques en France. Commercialisée dès 2011 par Jungheinrich, la technologie des batteries lithium-ion, avec ses performances comparables voire supérieures à celles des chariots thermiques et une empreinte carbone neutre, a donné le coup de grâce au thermique.

L’atout de la charge

En 2022, pour un chariot thermique vendu en France, il s’est vendu 2 chariots lithium-ion, selon Rudolph Ganzel, directeur du pôle économique d’Evolis. Par rapport au plomb-acide, les batteries li-ion ont une longévité plus importante et offrent un meilleur TCO. Elles supportent un chargement rapide, partiel ou intermédiaire appelé biberonnage, par exemple pendant les pauses des caristes. En trente minutes de charge, le chariot peut en règle générale retrouver entre 50 % et 70 % d’autonomie, sans réduire

sa longévité. Ce n’est pas le cas des batteries au plomb qui doivent subir des cycles complets de rechargement de plus de 8 heures en continu. Une seule charge des batteries suffit pour plusieurs équipes de travail sur une journée.

Le lithium-ion est aussi plus sûr, il est dépourvu d’acide et ne produit pas d’émanations contrairement au plomb. Selon Evolis, son usage a permis de réduire de 5 % la fréquence des accidents liés à la maintenance des chariots entre 2013 et 2020. « Les chariots électriques contribuent ainsi à réduire la pénibilité des opérations et le nombre d’accidents du travail ou de TMS des salariés », observe Rudolph Ganzel.

Plus cher mais plus rentable

Au cours des dernières années, tous les constructeurs ont intégré à leurs gammes des modèles li-ion, souvent plus ergonomiques grâce à des formats

2010 Premiers chariots de manutention frontaux électriques 2016 50 % des chariots neufs sont électriques (en France)

2022 Deux chariots li-ion vendus contre un thermique (en France)

plus compacts que ceux avec des batteries au plomb. Chez Jungheinrich, ils représentaient 98 % des ventes en 2021. Le coût d’acquisition de 5 000 € à 10 000 €, plus élevé qu’un modèle thermique, n’est plus un frein pour les entreprises qui privilégient l’aspect écologique et une meilleure rentabilité sur le long terme. « Dans le cas d’un chariot frontal d’une capacité de levage de 2 tonnes, les frais d’électricité sur toute la durée de vie, soit environ 10 000 heures de fonctionnement, oscillent entre 3 500 € et 5 000 €, tandis qu’ils peuvent atteindre 25 000 € si le véhicule fonctionne au gaz », explique Lucas Toussaint. L’entretien des moteurs thermiques est aussi plus cher et plus long que celui des chariots li-ion.

À l’avenir, les batteries lithiumion pourraient être remplacées par des batteries solides (solid state battery) au lithium-métal, lithium-souffre, sodium-ion, ou encore par des piles à combustible à hydrogène. n

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2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 28
n° 196
Septembre
INTRALOGISTIQUE
À

Automatisation La déferlante des AMR

Apparus voici 10 ans, les robots mobiles autonomes bousculent les systèmes intralogistiques mécanisés en offrant plus de flexibilité aux entrepôts.

Après la mécanisation puis l’automatisation à l’aide de chariots autoguidés (AGV) ou de systèmes de stockage autonomes, l’arrivée de la robotique était la suite logique pour absorber la croissance des flux, l’omnicanalité et le besoin de flexibilité des entrepôts. Elle a fait ses débuts en 2012, lorsqu’Amazon rachète Kiva Systems et sa technologie de robots autonomes AMR qui sera progressivement déployée dans tous ses sites logistiques. En 10 ans, pas loin de 80 startup ont émergé aux quatre coins du monde, rejointes par les fabricants historiques de chariots ou de systèmes automatisés qui ont lancé leur gamme de robots vendus en moyenne 25 000 € l’unité. Le marché connaît une très forte croissance et la valeur des ventes devrait passer de 3 Md$ en 2021 à 18 Md$ d’ici 2027, soit 2,4 millions de robots utilisés selon une étude de LogisticsIQ. En France, la licorne Exotec, créée en 2015, a déployé 3 000 robots Skypod et affiche en 2021 un CA de 105 M€, multiplié par 5 en seulement 2 ans. Et ce n’est rien comparé aux géants chinois Geek+ ou Quicktron ; capables de produire 10 000 AMR chaque année, ils les déploient par milliers partout dans le monde.

Lidar et IA au cœur des robots

La grande nouveauté apportée par les robots mobiles réside dans leur capacité à évoluer dans les allées, parmi les êtres humains, sans créer d’acci-

Le marché des AMR devrait passer de 3 Md$ en 2021 à 18 Md$ d’ici 2027.

dent et sans être conduits ou guidés par des opérateurs. Cette autonomie provient d’une combinaison des Lidar (radars à base de lasers), des capteurs et des caméras qui permettent à l’AMR de reconnaître son environnement avec l’intelligence logicielle qu’ils embarquent dans leur système de navigation 3D intégré.

2012 Amazon rachète Kiva Systems

2015 Création d’Exotec 2021

Près 80 start-up fabriquent des AMR, rejointes par les constructeurs de systèmes

Ils sont capables d’identifier puis de prélever les bacs ou de soulever les étagères et de les déplacer à une vitesse proche de 2 m par seconde sans suivre un trajet imposé. En quelques secondes, le robot calcule son itinéraire et peut l’adapter à tout moment en fonction des obstacles qu’il rencontre. Dans l’Hexagone, on en trouve chez Cdiscount, Decathlon, Uniqlo, Carrefour, E.Leclerc, Rhenus Logistics, entre autres. Faciles à déployer pour la gestion des stocks ou les phases de

préparation des commandes, les AMR peuvent fonctionner H24 et apportent la flexibilité aux entreprises face aux pics d’activités. « Les robots, qui ne nécessitent pas la mise en œuvre d’infrastructures importantes, sont par exemple particulièrement utiles pour le déchargement automatique des camions, pour le stockage et le déstockage de produits via des systèmes goodsto-person de navette 3D, ou pour prélever 5 ou 6 bacs et les amener à un poste de travail », commente Philippe Létard, directeur chez Wavestone. Ils pallient le manque de main-d’œuvre ou permettent de réduire la pénibilité des opérations des manutentionnaires. Pour cette raison, on les appelle souvent cobots, ou robots collaboratifs. Ils accompagnent ou suivent les préparateurs en transportant les marchandises directement à leur poste de travail. n RC

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n° 196 > Septembre 2022
© Amazon

Traçabilité Le code-barres se réinvente

L’étiquetage des colis et palettes a révolutionné la logistique, mais avec des disparités de format. Deux standards poussés par GS1 changent la donne.

En 1974, le premier codebarres sur un produit de consommation était scanné dans un magasin aux États-Unis. Déployé ensuite sur quasiment tous les produits vendus en grande distribution, il va progressivement se propager dans le secteur de la logistique, mais avec des disparités de pratiques de codification selon les pays. Pendant des décen nies, les fournisseurs doivent encore marquer de façon spé cifique les unités logistiques en fonction des pays destinataires, notamment vers l’Allemagne. La situation se décante au début des années 2000, avec l’abandon du code-barres continu à deux dimensions (ITF) et l’introduction de la symbologie EAN 128, permettant l’impression d’un numéro séquentiel de colis SSCC (Serial Shipping Container Code) qui facilite le suivi des unités logistiques. Face à la croissance exponentielle des volumes de fret dans le monde entier, le SSCC permet aux logisticiens d’identifier de façon unique l’ensemble des objets circulant dans les supply chains.

Des PGC aux colis internationaux

Progressivement, le SSCC devient indispensable dans les relations entre les industriels et les distributeurs du secteur des produits de grande consommation. L’étiquette logistique, comme préconisée par GS1, contient ainsi un SSCC, un GTIN (Global Trade Item Number de GS1, ex-code EAN, qui identi-

fie les produits, les lieux, les colis, etc.), une date limite de consommation et un numéro de lot. Couplée à l’avis d’expédition électronique envoyé au départ de la marchandise, cette étiquette permet de retrouver les informations de traçabilité. Néanmoins, sa création n’empêche pas la circulation d’étiquettes dans des formats propriétaires qui obligent à un ré-étiquetage des colis en fonction du réseau et/ou du pays de destination. Ce manque d’interopérabilité nuit à la visibilité sur les opérations de transport, sans compter le surcoût pour gérer ces multiples formats.

Un nouveau standard pour la logistique

C’est pour y remédier qu’en 2017, le Comité européen de normalisation désigne le SSCC comme solution pour identifier les colis internationaux grâce à l’utilisation d’une seule étiquette logistique, lisible par tous les opérateurs. Des progrès restent pourtant encore

2000 Introduction du numéro de colis SSCC 2017 Le Comité européen de normalisation choisit le standard GS1 SSCC 2020 Nouveau standard Scan4Transport

Étiquettes

Scan4Transport et SSCC.

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INTRALOGISTIQUE
à accomplir pour fluidifier les opérations de transports. Afin d’y parvenir, c’est en 2020 que GS1 a construit avec les acteurs internationaux de la supply chain un nouveau standard : Scan4Transport*. Élaboré en Australie, il permet d’enregistrer les données de base nécessaires à l’exécution d’une tâche en lien avec le transport, en scannant un code-barres 2D (GS1 Datamatrix ou GS1 QR code), présent sur une étiquette de transport standardisée. Cette étiquette logistique digitale peut fournir des données standardisées sur le produit et son origine, les informations sur la recyclabilité, l’ensemble du trajet d’acheminement, la date et l’heure précise d’arrivée. Elle répond ainsi aux enjeux croissants de la logistique autour du premier et dernier kilomètre, du tri, mais aussi de l’adresse et de l’autorisation d’enlèvement. Après sa diffusion en Australie, ce standard a pour vocation à se déployer au niveau mondial. n * Plus d’informations sur https://www.gs1au.org/scan4transport

RSE

La pénibilité n’est plus une fatalité

Au-delà la norme RSE de 2010, les technologies intralogistiques ont largement contribué à améliorer les conditions de travail des opérateurs.

avènement de la distribution omnicanale a bousculé les codes de l’intralogistique. De nouveaux processus logistiques ont dû être définis et mis en œuvre afin d’améliorer la qualité de service, réduire les coûts logistiques et limiter la pénibilité du travail dans les centres logistiques. La mécanisation, l’automatisation et la robotisation s’imposent de plus en plus dans ce nouveau panorama de l’exécution logistique, complexe et en temps réel. Ces leviers de croissance et de productivité jouent aussi un rôle prépondérant dans l’amélioration des conditions de travail dans les entrepôts. Les normes réglementaires, à l’instar de l’ISO 26000 de 2010 qui guide la démarche RSE, ne sont ainsi plus les seuls moteurs de réduction de la pénibilité du travail.

L’

Automatisation et robotisation

Par nature répétitives, les opérations logistiques sollicitent énormément les opérateurs et peuvent à terme générer des troubles musculosquelettiques (TMS). Ainsi, chariots élévateurs, transstockeurs, miniloads et systèmes goodsto-man permettent de modérer l’usage de la force humaine. Les robots de préparation de commandes suppriment les tâches physiques et répétitives des préparateurs. La prévention de la pénibilité au travail reste donc un enjeu clé pour les entreprises, notamment dans

* Comment réduire lapénibilitédans nosentrepôts?

Publication de France Supply Chain diffusée d’ici début octobre.

À ce titre, FM Logistics et Groupe Rocher ont même piloté un recueil de bonnes pratiques* pour réduire la pénibilité des activités d’entreposage, sous l’égide de France Supply Chain. Une trentaine de sociétés (industriels, retailers, logisticiens, etc.) ont été interrogées afin d’identifier des solutions dans trois activités : préparation de commandes, gerbage/dégerbage et réception/expédition.

Prise de conscience RSE

Ces trois dernières années, la croissance des secteurs du retail et du commerce en ligne a catalysé la prise de conscience RSE des entreprises autour des conditions de travail de leurs collaborateurs logisticiens. Il est devenu essentiel d’engager sa responsabilité sociétale face aux enjeux de productivité et de qualité de service des opérations logistiques. Les grands leaders de l’e-commerce tels qu’Amazon, Cdiscount, Vee-

pee ou Alibaba ont repensé le pôts pour faciliter le travail des équipes de préparateurs, et pour ce faire ont notamment intégré des systèmes goods-toman dans leurs process logistiques. La pénibilité du travail liée aux déplacements dans les entrepôts est ainsi très fortement réduite.

Toutefois, passer d’un entrepôt manuel à un site mécanisé implique une évolution des compétences et l’intégration de nouveaux métiers, et attirer de nouveaux talents dans les métiers logistiques en cette période de pandémie et de désorganisation sociale devient de plus en plus compliqué pour les entreprises. Elles doivent être plus attractives, faire preuve d’imagination et de persuasion pour relever ce nouveau défi sociétal, sachant que la perspective de travailler et d’évoluer dans un environnement robotisé et innovant est souvent un critère déterminant de choix pour un jeune collaborateur. n

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INTRALOGISTIQUE
© XPO Logistics

RSE

Les entrepôts font la chasse au carbone

L’impact carbone de la consommation énergétique des bâtiments a été réduit de 40 à 50 % en 20 ans. Mais des progrès restent à faire sur l’artificialisation des sols et la construction.

La prise en compte des enjeux environnementaux de l’immobilier logistique est apparue significativement à la fin des années 2000, dans le contexte de l’affirmation de la démarche HQE portée en premier lieu par les acteurs de l’immobilier tertiaire. Des acteurs importants tels que Segro, Stef, Argan, Barjane ou Gazeley ont porté les premières opérations certifiées HQE à partir de 2008.

Périmètres de l’impact carbone

L’impact carbone d’un bâtiment logistique comprend plusieurs aspects, dont les principaux sont l’artificialisation des sols, l’impact de la construction et les consommations énergétiques. Jusqu’ici, les leviers principaux ont été actionnés autour des consommations énergétiques, dimension carbone la plus tangible, à travers l’augmentation des épaisseurs d’isolant, le gain d’efficacité important offert par l’éclairage à LED, la mise en place de meilleurs systèmes de régulation du chauffage des cellules, les progrès techniques des installations de production de froid, etc. On peut estimer que l’impact carbone lié aux consommations d’énergie d’un bâtiment récent est 40 à 50 % plus faible qu’il y a 20 ans. Depuis deux ans émergent des projets neufs, équipés d’alternatives aux traditionnelles chaufferies gaz (systèmes de pompe à chaleur reliés ou non à une installation de géothermie,

2007

Débuts du photovoltaïque en toiture généralisé

2008

Premières opérations immobilières certifiées HQE

2021 Charte d’engagements réciproques en faveur de la performance économique et environnementale de l’immobilier logistique

chaufferie biomasse, etc.). Ce virage permet de diminuer encore l’impact carbone du volet énergie des sites.

Prise en compte de l’impact global Mais les consommations énergétiques peuvent ne représenter qu’un tiers de l’empreinte carbone totale sur l’ensemble de la vie d’un site. L’appréhension de l’ensemble de l’enjeu doit donc prendre tout d’abord en compte l’impact de l’artificialisation des sols, qui modifie fortement le cycle de stockage/déstockage carbone d’un milieu, à travers le choix des implantations, l’implantation sur une friche industrielle étant bien plus vertueuse que la consommation de terrains naturels ou agricoles.

Ensuite, l’impact des produits de construction doit être considéré plus fortement, à travers l’analyse de leur cycle de vie (fabrication, transport, mise en œuvre, fin de vie). Les

La consommation de terrains naturels ou agricoles n’est plus de mise, les nouveaux entrepôts sont désormais implantés sur des friches industrielles.

contraintes portant sur les bâtiments logistiques sont fortes, mais l’impasse sur ce volet ne peut être faite et des données existent. Cette prise en compte de l’ensemble des impacts est en cours d’assimilation par les acteurs, à l’image de Goodman qui opte pour une approche méthodique et scientifique sur l’ensemble de son périmètre d’action.

En parallèle des progrès techniques récents, des acteurs majeurs du secteur de l’immobilier logistique communiquent fortement sur leur « performance carbone ». Il apparaît que ce volet de communication doit être à présent consolidé et fiabilisé, afin d’éviter les mentions trompeuses ou incomplètes autour du concept de « neutralité carbone », qui reste un fantasme dénué de toute réalité physique à l’échelle d’un projet ou même d’une entreprise. n

Jérémie Pouponnot, directeur des opérations de Payet, membre d’Afilog

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Septembre

2.

TRANSPORT

Plus fractionné, plus rapide, plus lointain. Le transport de marchandises a profondément évolué ce dernier quart de siècle. Pour acheminer les flux croissants de Chine, le maritime a engagé ses porte-conteneurs dans une course au gigantisme. À l’inverse, la distribution, toujours plus capillarisée, a porté la part modale du routier à près de 89 %. Dès lors, les camions et autres VUL ont multiplié les innovations pour réduire leurs émissions de CO2 et faciliter la conduite. Omniprésent dans les véhicules, le numérique a aussi révolutionné l’achat et l’organisation des transports, relayé par les smartphones, tandis que les processus douaniers ont été fluidifiés.

LE POINT DE VUE DE L’EXPERT

vrai

Éric Ballot est professeur en systèmes de production et logistique à Mines ParisTech. Il est également directeur de la chaire Internet physique.

Quels ont été les facteurs de progrès du transport de marchandises depuis 25 ans ? De multiples innovations ont modifié en profondeur le transport. Je pourrai citer le développement des TMS, des systèmes de tracking, des places de marché, la redécouverte du vélo sur le dernier kilomètre, le début de l’autonomisation des véhicules ou encore les livraisons en 10 minutes, si l’on peut appeler cette dernière un progrès. En fait, le vrai changement vient de l’évolution de la demande en transport. La taille des envois et leur densité ont fortement diminué : là où on livrait une palette, on livre 5 cartons, là où on livrait 5 cartons ; on livre les articles un par un. La demande est passée de camions complets à lots, de trains à camions. Ce mouvement remonte au juste-à-temps des années 1980 et 1990. L’e-commerce l’a accéléré et continue d’impacter profondément la logistique.

Qui sont les acteurs de ces innovations ?

Les constructeurs innovent, certains logisticiens aussi, mais pas tous. On se souvient par exemple de FM Logistic dont les entrepôts mutualisés ont

marqué la fin des années 1990. Parmi les innovations marquantes, le développement des réseaux de colis express et celui d’Amazon. Étant à la fois commerçant et logisticien, Amazon a une longueur d’avance grâce à des systèmes informatiques ultra-précis.

Où se situent les prochaines innovations du transport ?

Je citerais la lutte contre le changement climatique et la résilience des réseaux que l’on n’a toujours pas faite. Il s’agit, entre autres, de stocker dans plusieurs endroits même si cela remet en cause les modèles de gestion de stock. Pareillement, changer de véhicule, même électrique, n’est pas une révolution environnementale : la bonne question est comment mieux utiliser les ressources. Passer de moyens légers à des moyens plus lourds est beaucoup plus efficace. Il faut reconstruire les termes de la massification. Il faut aussi améliorer l’efficacité des ruptures de charge, tant au niveau de la manutention que de la traçabilité et du business. Cela suppose une interopérabilité entre tous les systèmes existants : c’est l’objet de l’internet physique. Propos recueillis par SC

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«
Le
changement vient de l’évolution de la demande en transport »
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la course au gigantisme
flottes tournent la page du diesel
smartphone, pivot de la digitalisation 44 L’avènement des commissionnaires 2.0 45 Préludes au camion autonome 46 Et la douane devint électronique 25 ans d’innovations TRANSPORT
SOMMAIRE Conteneurs,
Les
Le

Transport maritime Conteneurs, la course au gigantisme

En 25 ans, les compagnies maritimes spécialisées dans la conteneurisation ont bataillé pour devenir aussi gigantesques que leurs navires.

Au milieu des années 1990, la Chine s’impose comme l’atelier de la planète avant d’adhérer à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en 2001. Dès lors, pour acheminer le volume croissant de biens manufacturés de l’empire du Milieu vers les marchés occidentaux, les armateurs conteneurisés ont commencé à voir de plus en plus grand. En 1997, le premier armement mondial de l’époque, Mærsk, annonce la construction d’un navire de 6 600 EVP. Les observateurs de l’époque s’interrogent sur les limites que ces navires pourraient atteindre.

Du côté des ports, la fin des années 1990 préfigure ce que sera le transport maritime conteneurisé du siècle à venir. L’Asie s’impose déjà sur le monde de la conteneurisation : Hong Kong et Singapour dominent le trafic portuaire avec plus de 11 MEVP traités chaque année. Aujourd’hui, le premier port conteneurisé mondial, Shanghai, annonce un trafic de 47,03 MEVP et la Chine truste les premières places mondiales portuaires. Sur les dix premiers ports conteneurisés, seuls Singapour et Busan ne sont pas chinois. Le premier port européen, Rotterdam, se place en 11e position.

Domination de trois alliances

Cette progression très soutenue du trafic conteneurisé aiguise les appétits. Les armateurs se lancent dans une

phase de consolidation dès le début des années 2000. Ils doivent faire face à l’hostilité des chargeurs et des commissionnaires à l’encontre des regroupements commerciaux entre armateurs, appelés conférences maritimes. En 2006, la Commission européenne décide d’abroger l’exemption aux lois antitrust dont bénéficiaient les conférences maritimes. Mais si les négociations entre armateurs sur les conditions commerciales sont désormais interdites, rien ne les empêche de s’unir dans des alliances de mise en commun de capacité. Des regroupements vont se créer au fil des années pour n’être plus qu’au nombre de trois aujourd’hui. Ces trois alliances disposent d’une force de frappe sans équivalent avec 84 % de la flotte mondiale regroupée !

Naissance de géants

Des grands noms de la conteneurisation vont se faire « avaler ». Ainsi, Sealand, arma-

teur américain à l’origine de la conteneurisation, va passer dans le giron de Mærsk. Les deux groupes européens, le britannique P&O Container Line et le néerlandais Nedlloyd fusionnent. Ils seront ensuite repris par Mærsk. D’autres noms connus connaissent un sort identique, à l’image de Contship et UASC (United Arab Shipping Company) qui passent dans le groupe Hapag-Lloyd. Le premier armement français, CMA CGM, ne reste pas inactif. Il va se déployer en reprenant plusieurs armateurs dont Delmas, un des majors sur l’Afrique.

Chaque rachat permet d’agrandir sa flotte en capacité mais aussi de créer des géants. Au début des années 2000, Mærsk annonce une capacité de transport dépassant le million d’EVP. Aujourd’hui, l’armement danois affiche une capacité de 4,2 MEVP. Et s’il a longtemps caracolé en tête, il n’est que deuxième derrière le groupe suisse MSC qui le dépasse de 182 137 EVP. n HD

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n° 196 > Septembre 2022
TRANSPORT
Regina Mærsk
6 600 EVP 2006 Emma Mærsk
15 500 EVP 2012 CMA CGM Marco Polo
16 020 EVP 2019 MSC
23 756 EVP
1996
,
,
,
Gülsün,
Le CMA CGM Marco Polo, long de 396 m, a détrôné pour un temps l’Emma Mærsk © CMA CGM Marco Polo & Fairplay/kees torn

Transition énergétique Les flottes tournent la page du diesel

Dix ans après le premier Kangoo Z.E., grâce à des gammes et des autonomies de plus en plus étendues, le véhicule utilitaire électrique devient un standard.

Dans le secteur des véhicules industriels, la décennie 2010 a été marquée par l’avènement des motorisations électriques afin de réduire les émissions de CO2 du transport routier. Si les tout premiers véhicules électriques remontent à plus d’un siècle, l’utilitaire électrique débute véritablement en 2010, lorsque Renault lance le Kangoo Z.E. Le modèle est issu du concept Pangea, présenté en 1997, doté d’une remorque qui assure la motorisation hybride électrique et GPL de ce prototype. Il donnera naissance au Kangoo Elec’Road, commercialisé entre 2002 et 2005 et doté d’un petit moteur électrique de 22 kW, puis au Kangoo Z.E. avec une batterie lithium-ion.

Évolution progressive À son lancement en 2011, Renault revendique 270 km d’autonomie. En réalité, il était difficile de faire plus de 150 km. Néanmoins, la sphère logistique réalise à l’époque la viabilité des motorisations électriques pour le transport des marchandises. À partir de 2012, La Poste en commandera près de 10 000 et disposera alors de la plus importante flotte de véhicules électriques au monde. Progressivement, de nouveaux modèles arrivent sur le marché, offrant des gabarits et des charges utiles supérieurs, jusqu’à s’étendre aux petits porteurs. En 2018-2019, Renault, Volkswagen et Mercedes lancent respectivement leur Master, e-Crafter et eVito.

L’écart de prix d’achat entre motorisation électrique et thermique se réduit. Il est actuellement de 30 à 40 %.

2011 Renault lance le Kangoo Z.E.

2018-2019

Renault, Volkswagen et Mercedes lancent respectivement leur Master, e-Crafter et eVito

2020 Prototype du Volta Zero, VU électrique de 16 t

Depuis, les technologies de véhicules électriques ont évolué, et les coûts d’achat, bien qu’estimés entre 30 % et 40 % supérieurs à ceux d’un utilitaire thermique, baissent progressivement. Aujourd’hui, face à la mise en place de ZFE dans les villes et à la fin du moteur thermique dans les véhicules neufs d’ici 2035, l’avenir des flottes logistiques semble définitivement électrique. Amazon, DHL, Geodis et Gefco font partie des entreprises qui ont déjà converti une partie de leur flotte à l’électrique.

La course à l’autonomie Face à la demande croissante, les constructeurs historiques, auxquels s’ajoutent des start-up telles que Volta Trucks, Gaussin ou Quantron, cherchent à optimiser le rapport poids/ autonomie des utilitaires, notamment via l’allègement des carrosseries, afin d’offrir une

charge utile identique à celle des versions thermiques et une autonomie suffisante sur de courtes distances qui avoisine les 200 km en situation réelle. Cependant, des constructeurs tels que Ford ou Volkswagen annoncent près de 500 km d’autonomie sur leurs derniers utilitaires électriques.

En outre, de nouvelles générations de batterie lithium-ion permettent aux véhicules de rouler plus loin, avec des temps de charge réduits. L’entreprise chinoise CATL promet pour 2023 une batterie lithium-ion dopée au silicium offrant une autonomie de 1 000 km avec une charge rapide en 10 minutes. D’ici 2030, les batteries actuelles pourraient ainsi être remplacées par des modèles plus performants avec des temps de charge réduits et moins chers.

Au point même de s’étendre aux véhicules plus lourds et de longue distance. n RC

Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022 41 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com
© Renault

Traçabilité

Le smartphone, pivot de la digitalisation

En moins de 10 ans le format smartphone et l’OS Android sont devenus les piliers incontournables de la digitalisation du transport et de la logistique.

Qui aurait pu prédire, quand Steve Jobs pré sente le premier iPhone en 2007, que le smartphone révolutionnerait aussi les usages en logistique considéré par ses détracteurs comme un gadget grand pu blic, le concept de téléphone connecté à un magasin d’appli cations s’est finalement répan du à tous les univers, jusqu’à devenir l’outil informatique mobile privilégié des logisticiens et des transporteurs. C’est surtout Google, avec son système d’exploitation Android déployé sur 85 % du marché, qui a transformé la mobilité professionnelle dans l’entrepôt et à bord des camions. À partir de 2014, le smartphone puis la tablette sous Android y ont ainsi détrôné les PDA, terminaux mobiles de lecture de données et autres ordinateurs embarqués sous Windows ou systèmes propriétaires, déployés depuis le milieu des années 1990. Depuis 2019, tous les nouveaux appareils commercialisés, notamment par Zebra, Honeywell ou Datalogic disposent exclusivement d’Android.

Smartphone et apps pour tous les usages

Dans le transport, le smartphone tend aujourd’hui à remplacer l’ordinateur de bord des systèmes télématiques.

En 2019, le groupement Astre a par exemple déployé l’application Clyd de Telelogos pour

gérer 3 000 smartphones utilisés par les adhérents, et plus de 10 000 à terme. Presque tous les conducteurs disposent d’un smartphone qui héberge les applications de gestion des tournées, d’affichage des temps de conduite ou de trackand-trace. Ils accèdent en outre à des applications tierces de guidage, de recherche de fret, de réservation de parkings sécurisés ou d’indices des prix du carburant, pour ne citer que quelques exemples.

Les logisticiens du dernier kilomètre, les start-up de livraison urbaine décarbonée équipent leurs livreurs de smartphones durcis, dont les applications sont connectées aux systèmes d’information mais aussi aux outils de commandes et de suivi des e-commerçants. En 2021, GLS a ainsi déployé 3 000 smartphones Zebra auprès de ses livreurs et des sous-traitants en remplacement d’anciens terminaux jugés obsolètes. « Android, qui a facilité le développement sur mesure de notre application GLS

2000

© GLS

En 2021, GLS a déployé 3 000 smartphones auprès de ses livreurs et des sous-traitants.

App, permet de construire le programme en fonction des besoins réels remontés par les livreurs, avec à la clé un fort taux d’adoption et une fidélisation accrue des salariés. Android ouvre aussi la porte à de nouveaux développements, avec des évolutions de l’application tous les 3 mois en moyenne », témoigne Mathieu Barthet, directeur transformation et projets de GLS France.

Un outil évolutif, ergonomique et moins cher L’aspect intuitif du smartphone robuste, l’ergonomie d’un terminal sans bouton avec un seul écran tactile, des performances dignes de PC fixes et l’ajout progressif des plus récentes technologies d’imagerie intelligente ou de télécommunication ont largement contribué à l’adoption du smartphone au sein de la logistique. Le mobile Android est également moins onéreux (entre 200 € et 400 € pour un smartphone robuste), plus simple à administrer, plus durable et évolutif grâce aux mises à jour régulières du système. Il offre aux responsables informatiques la possibilité d’étendre le champ fonctionnel des logiciels métiers de type WMS, TMS et ERP, grâce à des modules additionnels accessibles sous forme d’applications mobiles. n RC

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 42 TRANSPORT
Apple lance l’iPhone 2014 Android gagne les terminaux mobiles professionnels 2019 Les grands constructeurs utilisent exclusivement Android

Achat de transport L’avènement des commissionnaires 2.0

Après les bourses de fret en ligne, les plateformes digitales révolutionnent l’achat de prestations de transport. Place à une relation directe et automatisée.

Le phénomène a débuté à la fin des années 1990, avec la démocratisation d’Internet dans les entreprises et la migration des bourses de fret sur le Web, à l’image de Teleroute (ex-Lamy) qui installe son premier serveur web en 1999, ou de l’allemand Timocom qui adopte un modèle full web dès 2006. En 2010, la bourse en ligne B2PWeb, financée par les groupements de transporteurs, associe à la dépose de fret et de camion un ensemble de services digitaux et finira par devenir leader sur le marché hexagonal. Mais la vraie rupture par rapport aux process d’achat traditionnels remonte à 2016, avec l’arrivée de commissionnaires digitaux, de plateformes d’intermédiation et de places de marché de cotation en ligne. Ces solutions offrent un plus large choix aux expéditeurs, qu’elles mettent directement et souvent gratuitement en relation avec les transporteurs, contrairement aux bourses de fret qui fonctionnent en vase clos. Selon une enquête de l’AUTF parue en 2019, 32 % des chargeurs utilisaient des plateformes collaboratives et des commissionnaires numériques pour gérer et piloter leurs transports. Ces acteurs, tels que sennder, Fretlink, Chronotruck, Ovrsea, Ontruck, XPO Connect ou Upply, apportent de nouveaux réseaux de transporteurs, qu’ils équipent d’outils informatiques et d’applications mobiles afin de digitaliser la relation avec les donneurs

d’ordre. Sur chaque plateforme, ce sont plusieurs milliers, voire dizaines de milliers, de véhi cules disponibles pour opérer d’abord les flux spots, et de plus en plus les flux réguliers. Leur succès impressionne, à l’image d’Upply, filiale de Geodis, qui revendiquait au printemps 2021 une hausse de +3 300 % du nombre de transactions depuis son démarrage en 2019. Entre 2020 et 2021, la start-up est passée de 3 000 entreprises utilisatrices à 5 000, avec une répartition de 2 000 chargeurs et 3 000 transporteurs.

Des gains bilatéraux

Ces commissionnaires 2.0 fournissent aux artisans transporteurs, aux TPE mais aussi aux grands comptes un accès direct aux commandes des donneurs d’ordres, court-circuitant les intermédiaires. Dès lors, des gains économiques apparaissent pour les deux parties. Les chargeurs bénéficient de tarifs calculés par des

2010 B2PWeb se lance 2016 Nouvelles plateformes d’intermédiation

algorithmes et réactualisés en nonce des économies jusqu’à 70 % sur les coûts d’expédition par rapport à une bourse de fret grâce à l’optimisation du remplissage des camions. Les plateformes garantissent aussi aux chargeurs la disponibilité des transporteurs. En 2020, Nestlé Purina France a ainsi choisi d’utiliser Fretlink pour sécuriser le plan de transport et la disponibilité des transporteurs face aux pics d’activité. Depuis, l’entreprise affiche un taux de prise en charge de ses transports planifiés de 100 %. De leur côté, les transporteurs accèdent à plus de fret pour optimiser leurs tournées. En outre, via la digitalisation, les plateformes ont généralisé les services de track-and-trace et de visibilité avec prédiction d’horaire estimé de livraison (ETA), l’analyse des flux et la cotation, et même l’intégration de TMS avec optimisation des plans de transport et des tournées. n RC

Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 44
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TRANSPORT
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sennder

Aides à la conduite Préludes au camion autonome

Les systèmes d’aide à la conduite se multiplient, devenant des équipements de série au service d’une meilleure sécurité routière et de l’écoconduite.

Engagés depuis des décennies dans une course à l’innovation technologique, les constructeurs de poids lourds intègrent constamment de nouveaux systèmes d’aide à la conduite (ADAS, advanced driver assistance system). Le premier objectif est de renforcer la sécurité routière. Ces systèmes améliorent également le confort de conduite et contribuent à réduire la consommation de carburant.

Deux décennies d’avancées

Tout s’accélère dans les années 2000. Entre 2000 et 2003, l’UE finance à hauteur de 3 M€ le projet Advisors, afin d’étudier le potentiel des ADAS en termes d’impact sur le comportement de conduite, la sécurité routière et l’environnement. Les camions se dotent de radar de mesure de la distance et de la vitesse de rapprochement des obstacles (appelés Lidar), afin de maintenir une distance de sécurité même sans l’attention du conducteur ou d’enclencher le freinage automatique d’urgence (AEB).

Conçu par les équipementiers automobiles au début des années 2000, le régulateur de vitesse adaptatif (ACC) utilise les mêmes technologies pour gérer la vitesse du camion sans action du conducteur sur les commandes. En 2005, une étude du centre Allianz allemand montre que 7 % des accidents de poids lourds peuvent être évités grâce à cet ACC. Il est obligatoire sur les PL depuis 2015.

2000 Premiers radars embarqués 2014 ESP obligatoire 2015 Régulateur de vitesse adaptatif obligatoire 2016 Premiers tests de conduite autonome

tion se généralisent à bord des camions. À l’aide d’une caméra frontale ou latérale et de capteurs infrarouges, associés à un correcteur électronique de trajectoire (ESP, ESC, DSC), la technologie LKA (assistant de sortie de voie) permet au camion de modifier de lui-même la trajectoire par un léger coup de volant afin de le maintenir dans la file de circulation. Les caméras filment en outre les panneaux de signalisation et affichent les limites en vigueur sur le tableau de bord. Depuis 2020, un règlement de l’Onu donne un cadre technique et sécuritaire à ces systèmes sur lesquels reposent les voitures autonomes.

Clé de voûte de la conduite autonome D’autres capteurs placés à l’extérieur ou à l’intérieur du camion détectent la présence de piétons et de véhicules dans les angles morts, des signes de fa-

tigue, d’inattentions ou de perte

Notons également l’interconnexion des technologies embarquées avec la géolocalisation GPS des véhicules et l’aide à la navigation qui tient compte des données cartographiques ou d’infotrafic pour alerter le conducteur ou adapter le comportement du véhicule. Ainsi, le régulateur de vitesse prédictif (PCC) peut adapter l’utilisation de l’énergie potentiellement nécessaire en fonction de la déclivité de la route.

MAN

Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022 45 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com
Selon le constructeur MAN, l’ensemble de ces technologies permet aujourd’hui de rouler de 0 à 90 km/h sans toucher à l’accélérateur ni aux freins. Les ADAS, dont la majorité est proposée de série sur les camions des principales marques européennes dès 2020, sont désormais la clé de voûte des systèmes de conduite autonome, développés et testés depuis 2016 à bord de poids lourds dans le cadre du projet European Truck Platooning Challenge. n RC ©

Dédouanement Et la douane devint électronique

replongé

Il y a 20 ans à peine, débutait la dématérialisation du dédouanement au travers du NSTI (nouveau système de transit informatisé) lancé par la Commission européenne. De l’expéditeur au destinataire, toute la chaîne d’information est télétransmise en passant par les différents bureaux de douane intervenant dans le processus d’acheminement. Cette première ayant été un succès, un certain nombre d’États membres ont entrepris la dématérialisation de leurs processus de dédouanement. Dans ce concert, la France a élaboré Delta (dédouanement en ligne par transmission automatisée), qu’elle a mis en service en 2007. Les déclarants ont dû s’approprier cette technologie nouvelle qui s’accompagnait de changements importants dans la codification des informations. À cette occasion, l’administration couvrait l’ensemble du territoire et des procédures.

Frontière intelligente

Delta a définitivement sonné le glas de la déclaration en douane sur support papier. Seul le message électronique est reconnu par l’administration et conservé sur ses serveurs. À partir de cette phase, l’administration procède peu à peu à la révision des processus déclaratifs. En 2021, dans le cadre du Brexit, elle va jusqu’à imaginer le concept de « frontière intelligente », permettant d’anticiper la création de la déclaration et de la valider automatiquement lors de l’embarquement de la

marchandise à destination de notre territoire. Nul doute que ce concept puisse être étendu, voire généralisé, à un large ensemble d’opérations maritimes ou aériennes. De source sûre, nos administrations y travaillent dans un concert européen.

L’impact de l’Europe

La technologie influant sur les comportements, il apparaît peu à peu que les contrôles physiques peuvent être dissociés des aspects administratifs. C’est ainsi que le concept du DCN (dédouanement centralisé national) fait son apparition. Il permet de rattacher administrativement toutes les opérations d’une entreprise auprès d’un seul bureau de dédouanement et d’organiser les contrôles éventuels à d’autres endroits. Ce processus devrait être étendu à terme au territoire de l’UE.

En outre, le CDU (Code des douanes de l’Union), mis en application en 2016, oblige les administrations à repenser le dédouanement, à harmoniser et moderniser leurs SI en faisant la part belle à

1975 Première informatisation avec le Sofi (système ordinateur pour le fret international) 1988 Le DAU (document administratif unique) uniformise le support douanier dans l’UE 2004 NSTI, nouveau système de transit informatisé

2007

La France lance Delta, supprimant la déclaration sur papier

la donnée, le nouvel or noir. C’est ainsi qu’en 2021, le paquet TVA e-commerce entre en vigueur, et avec lui des évolutions fiscales et douanières majeures : un jeu de données ultra-réduit à transmettre électroniquement aux administrations avec la garantie d’un dédouanement plus fluide.

Dans cette même dynamique, Delta IE, supplantant Delta G, verra le jour début 2023 et avec lui une nouvelle structure du message déclaratif.

Après la dématérialisation, la délocalisation Où s’arrêtera-t-on ? On constate une certaine réduction de l’activité comptable au travers du transfert de la gestion de la TVA sur les importations à la DGFIP. Cette TVA, précalculée par l’outil de dédouanement Delta, sera en effet directement incluse par les opérateurs dans leur déclaration fiscale. Bref, on a le sentiment de vivre une série dans laquelle ressurgissent toujours de nouveaux éléments, pour le meilleur profit de notre pays. n Alban Gruson, P.-D.G. de Conex

2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 46 TRANSPORT
n° 196 > Septembre
Conex s’est
dans les péripéties que le domaine de la douane et les déclarants ont connues… et ne cesseront sans doute pas de vivre à l’avenir.
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3. E-COMMERCE

La fulgurante croissance de l’e-commerce a débuté à la fin des années 1990. Cette révolution du commerce physique, toujours en cours, n’aurait pas été possible sans la (e-)logistique. L’innovation de l’un alimente celle de l’autre, et réciproquement, de la commande à la livraison jusqu’aux retours produits. Parmi les innovations plus visibles, la recomposition des flux du dernier kilomètre, qui soulève les défis de la logistique urbaine et apporte aux clients une variété d’options de livraison sans cesse élargie. Le boum des colis s’appuie aussi sur des machines et des logiciels toujours plus sophistiqués.

LE POINT DE VUE DE L’EXPERT

Jérôme Libeskind, fondateur de Logicités, est expert en logistique urbaine et e-commerce. Son dernier ouvrage : Silalogistiquem’étaitcontée.

Quelle place la logistique occupe-t-elle dans l’essor de l’e-commerce ?

Bien plus que pour le commerce physique, la logistique fait partie de l’e-commerce, et en particulier du marketing. Les e-marchands construisent leur offre autour d’abonnements, de livraisons gratuites ou en une heure, de retours gratuits, etc. L’e-commerce a donné toute son importance à la logistique. Et si son colis arrive en retard, c’est un motif d’insatisfaction immédiat du consommateur ! C’était déjà un peu le cas de la VPC : les « 48 heures chrono » de La Redoute en 1984, c’était déjà faire rentrer la livraison du dernier kilomètre dans l’offre commerciale.

Quel innovateur a fait le plus progresser l’e-logistique ? Amazon ?

Oui, Amazon est de loin le plus grand laboratoire d’innovation qui existe dans le domaine. Son budget R&D impressionne : Amazon y consacre près de 10 % de son CA, cela représente la moitié du budget de la recherche en France. Aucun autre commerçant n’atteint ce niveau. L’innovation fait partie de son

modèle. De ce fait, les équipes d’Amazon ont des moyens que les autres n’ont pas pour inventer les solutions de demain.

Quelles innovations émergentes transformeront l’e-commerce dans la prochaine décennie ? Nous allons vers un e-commerce plus durable, qui accorde plus de place aux biens de seconde main et à la proximité. L’occasion requiert une logistique qui fiabilise les process et les produits pour le consommateur : il faut vérifier les produits, les remettre en état, etc. Il s’agit aussi de les faire durer plus longtemps, les réparer, les remettre dans des circuits : il faudra plus que jamais de la logistique. Un des enjeux sera aussi de tracer les produits : pourquoi aller chercher une paire de chaussures dans un entrepôt à 500 km si elle est en stock dans un magasin à 10 km de chez soi ? Il y aura un travail de partage de données sur le stock, ce qui passe la technologie.

Propos recueillis par SC

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 48
«
L’e-commerce a donné toute son importance à la logistique »
49 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com 50 La logistique urbaine, pas encore majeure 52 LHD, des options à la carte 54 Le B to C nous emballe… un peu trop 56 L’omnicanal a son chef d’orchestre 58 Machines 3D : une 4e dimension écoresponsable 60 La micrologistique essaime en ville SOMMAIRE 25 ans d’innovations E-COMMERCE

Dernier kilomètre

La logistique urbaine, pas encore majeure

Le concept de la logistique urbaine a un quart de siècle. Approvisionner mieux et plus vite les centres-villes reste un défi pour les acteurs publics et privés.

Vers la fin des années 1990, les premières enquêtes sur le transport de marchandises en ville ont permis de collecter des données sur les flux logistiques à Bordeaux, Dijon et Marseille. C’est aussi à cette période que plusieurs pays, en premier lieu l’Allemagne, ont imaginé développer des modèles de consolidation des flux en milieu urbain. La « City Logistik » avait comme ambition de constituer un maillage de 70 centres de distribution urbaine. Cette idée, abandonnée pour de multiples raisons dont l’impact financier, arrivait sans doute trop tôt. Vingt-cinq ans après, la logistique urbaine se pose les mêmes questions : comment réduire le nombre de véhicules de livraison en consolidant mieux les flux, afin d’optimiser l’occupation de la voirie et de maîtriser les pollutions atmosphériques et sonores ? Comment rendre les livraisons urbaines plus efficientes ? Comment adapter le cadre réglementaire pour inciter aux changements, notamment vers des livraisons décarbonées ?

Nouvelles réglementations

Si les questions sont les mêmes, le contexte a évolué. Les livraisons urbaines représentent 10 à 15 % des véhicules-km, mais près de 40 % des émissions de polluants locaux et de GES liées aux transports. La ville

s’est profondément transformée et les flux logistiques se sont complexifiés, notamment avec l’e-commerce. Le cœur de ville devient apaisé et dédié aux piétons et aux mobilités douces. Les périphéries, que l’on nommait il y a 25 ans les banlieues, s’étendent et constituent des territoires de plus en plus vastes à desservir. La bonne nouvelle est que les acteurs publics s’emparent de cette question d’approvisionnement local. La logistique urbaine est apparue, d’abord timidement, puis de façon plus marquée dans les textes législatifs, et elle se généralise aujourd’hui dans les documents de planification. Elle figure dans les délégations de certains élus locaux, comme c’est le cas à Lyon ou à Nice. Les collectivités locales, souvent au niveau des communautés d’agglomération et des métropoles, mettent en place des réglementations contraignantes et des orientations adaptées.

Après des décennies d’oubli, la cyclologistique a retrouvé ses lettres de noblesse.

Nouveaux horizons pour le privé

Le plus frappant, au-delà de l’action publique, est la prise de conscience des enjeux par des acteurs privés qui desservent les territoires. Les groupes de transport et de logistique s’associent avec des start-up, parfois locales, afin de mettre en œuvre les solutions les plus innovantes, de plus en plus technologiques. Certaines font leur retour, comme la cyclologistique. D’autres ouvrent de nouveaux horizons, comme les drones ou les véhicules autonomes. Capteurs, IoT, blockchain, applications numériques, etc. ajoutent à la logistique urbaine une couche d’informations qui laisse présager des optimisations basées sur les datas.

Dans cette effervescence, des risques de dérive sont présents. Le principal d’entre eux est social. La crise sanitaire a montré toute l’importance des acteurs du dernier kilomètre, mais elle a aussi vu se développer des modèles sociaux nouveaux, générés par les plateformes, qui interpellent. Nul doute que les années qui viennent mettront plus que jamais cette question sur le devant de la scène. n Jérôme Libeskind

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 50 E-COMMERCE
2015 Loi LTECV, préfiguration des ZFE 2018 Pacte pour la logistique du Grand Paris 2019 Loi d’orientation des mobilités 2021 Loi climat et résilience 2024 ZFE généralisées
© Geodis

Livraison hors domicile Des options à la carte

La croissance rapide de l’e-commerce avec son 1 milliard de colis par an interpelle. Pour satisfaire la promesse client, des milliers de véhicules parcourent quotidiennement les zones urbaines, périurbaines et rurales, afin d’acheminer les colis tant attendus aux domiciles des econsommateurs. À chaque fois, le livreur doit trouver un emplacement de stationnement, souvent en double file, contacter le consommateur et lui remettre son colis. Malgré les textos et les applications de contact avec le destinataire, des colis ne seront pas livrés lors du premier passage. Autre particularité de l’e-commerce, certains secteurs comme l’habillement et la chaussure génèrent des colis en retour en grand nombre.

Retour aux origines Depuis longtemps, des alternatives existent avec la livraison hors domicile. Dès les années 1980, les points relais sont apparus, à l’initiative des vépécistes. Les premiers temps, ces points relais se situaient chez des particuliers. Il est étonnant de voir aujourd’hui que les réseaux de Pickme et GLS, qui permettent de livrer des colis chez des voisins, se rapprochent de l’origine des points relais. Ces start-up répondent plus que jamais aux attentes des consommateurs, des e-marchands, mais aussi des collectivités locales qui souhaitent inciter à la consolidation des flux.

Un peu plus tard, dans les années 2000, sont apparues

de livraison utilisés par les e-acheteurs en 2021

dans un lieu de retrait :

% en point relais

% en agence postale

% en consigne

% en magasin :

% e-reservation

d’autres solutions hors domicile : le click-and-collect, qui pour de nombreux consommateurs a été une découverte pendant la crise du Covid, et les consignes de retrait de colis. C’est aussi il y a près de 25 ans que le premier drive de la grande distribution, un drive Auchan, a vu le jour à Leers. Plus récemment, ce modèle s’est décliné en drive piéton et maintenant en drive multi-enseignes robotisé avec le principe imaginé par Delipop.

Optimisations logistiques

La multiplicité des modèles de livraison hors domicile répond à plusieurs exigences. Sur un plan logistique, elles permettent toutes une consolidation des flux, et en conséquence une réduction des coûts. Le consommateur fait lui-même les derniers mètres pour récupérer sa commande, que ce soit un colis ou une commande

de courses alimentaires. Mais c’est aussi une solution qui évite l’échec à la livraison, et surtout qui répond à des attentes de maîtrise de l’impact environnemental de l’e-commerce, pour autant que le consommateur ne fasse pas un trajet spécifique en voiture.

En un quart de siècle, les solutions proposées se sont multipliées. Certes, elles n’ont pas détrôné la livraison à domicile qui reste la forme de livraison préférée des consommateurs, mais leur part de marché est amenée à augmenter dans les années qui viennent. Les différents réseaux de livraison se développent rapidement, et les acteurs publics prennent conscience de l’impérieuse nécessité de mieux consolider les flux afin de réduire l’impact environnemental de l’e-commerce. Le début d’une histoire, multiple en solutions et passionnante ! n Jérôme Libeskind

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 52 E-COMMERCE
Si la livraison à domicile reste l’option préférée, les modèles de LHD se multiplient au bénéfice des consommateurs, des marchands et de la logistique.
1980 Premiers points relais de la VPC 2000 Ouverture du premier drive Auchan à Leers 2009 Darty dépose la marque click-and-collect 2021 Premier drive piéton
de Delipop
80 %
79
3
67
59
10
7
25
23
6
robotisé
Modes
à domicile :
% à domicile
% au travail
%
% click-and-collect
Source : baromètre Fevad/Médiamétrie, novembre 2021.

Emballages de transport Le B to C nous emballe… un peu trop ?

La révolution de l’e-commerce a fait bondir la consommation de matières et les volumes transportés. De nouvelles technologies et pratiques vertes émergent.

En 1997, il y a 25 ans, Amazon, créé peu de temps avant par Jeff Bezos, est introduit en bourse au Nasdaq. En 2021, l’entreprise génère un chiffre d’affaires de 470 Md$ et emploie dans le monde 1,6 million de personnes. Cette histoire hors du commun est le témoin de la fulgurante croissance de l’ecommerce. Mais l’envers de la médaille, c’est l’impact environnemental de cette révolution. Si le commerce a toujours été en constante transformation, notamment au XIXe siècle avec les grands magasins ou dans les années 1960 avec les hypermarchés et les centres commerciaux, l’e-commerce a une particularité essentielle, celle de fragmenter les flux.

Surconsommation d’emballage

Les achats des particuliers se déclinent en de multiples colis de petite taille, avec dans chacun d’entre eux un ou plusieurs produits. Ils génèrent des emballages en grand nombre, et surtout, un phénomène naturel d’augmentation du volume transporté. Le suremballage, le calage, ou tout simplement le vide dans les colis, ont comme conséquences une consommation effrénée de matière et un volume transporté plus important. Selon Fortune Business Insights, le marché de l’emballage e-commerce dans le monde passera entre 2020 et 2028 de 43 Md$ à 141 Md$. Cela se traduit par une consommation accrue de

carton et de matériaux de calage, trop souvent en plastique. Selon l’Ademe, en France, 137 000 tonnes d’emballages ont fini à la poubelle en 2018. Citéo estime que 64 % des emballages carton et seulement 28 % des emballages plastique sont aujourd’hui effectivement recyclés en France.

Se posent alors de nombreuses questions : quel matériau utiliser pour emballer et protéger le produit durant son transport ? L’emballage de transport peut-il être supprimé, réduit, réutilisé ? Les bonnes pratiques et les innovations ne manquent pas. Les machines d’emballage permettent ainsi d’adapter la taille du colis au produit (voir l’innovation machines d’emballage 3D en page 58). Le réutilisable se développe également dans plusieurs pays. En 2013,

1995 Création d’Amazon 1999 Création de Cdiscount 2019 L’e-commerce dépasse les 100 Md€ de CA (en France) 2021 Plus d’un milliard de colis e-commerce livrés (en France)

2021 Charte d’engagements pour la réduction de l’impact environnemental de l’e-commerce

Selon la start-up française Hipli, son colis réutilisable évite jusqu’à 25 kg de déchets.

la société finlandaise Repack a mis au point un emballage e-commerce réutilisable. Ce modèle a inspiré plusieurs entreprises, dont Hipli et LivingPackets en France.

Bonnes pratiques et engagements

Mais tout ne dépend pas des solutions techniques. C’est aussi aux e-marchands d’intégrer dans leurs process les solutions les moins impactantes sur le plan environnemental, de réduire les suremballages et de faire preuve d’initiative. La charte d’engagement pour la réduction de l’impact environnemental du commerce en ligne, signée par plusieurs acteurs de la profession, témoigne d’une prise de conscience des e-commerçants, tout au moins un certain nombre d’entre eux.

Gageons que les consommateurs, qui il y a 25 ans découvraient cette nouvelle forme de commerce, sauront faire le choix de solutions vertueuses.

Ils sont de plus en plus nombreux à choisir la vente de produits en vrac, l’achat de produits de seconde main ou les produits alimentaires en circuit court. Ils seront vraisemblablement de plus en plus nombreux à ne pas accepter des modèles de consommation trop énergivores et trop générateurs d’emballages. n Jérôme Libeskind

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 54 E-COMMERCE

OMS

L’omnicanal a son chef d’orchestre

Dernier né des progiciels de la logistique, l’OMS (Order Management System) assure à l’e-acheteur un parcours sans couture de la commande à la livraison.

Dépassant 14 % des ventes de détail de produits selon la Fevad (soit 66,7 Md€ en 2021), l’e-commerce a trouvé la formule idéale pour satisfaire les consommateurs en ligne : la vente omnicanale. Sur mobile, tablette, ordinateur ou en magasin, le client peut choisir, commander et prendre possession de son achat dans le lieu de son choix (à domicile, en magasin, etc.) : voir l’innovation livraisons à la carte page 52. Un achat commencé sur Internet pourra se poursuivre en magasin et viceversa, le passage d’un canal de vente à un autre s’effectuant en toute transparence.

Logiciel multigestionnaire

Les frontières ont aussi été abolies entre canaux de distribution. Les entrepôts répartis sur le territoire chez les grands retailers, les réserves des magasins des enseignes en réseau et les places de marché sont vus comme un stock unique, avec les modalités de livraison associées à chaque article. Le client peut ainsi connaître précisément la disponibilité du produit convoité, le temps qu’il faudra pour le recevoir en fonction de ses préférences de livraison, les options de retour, etc. À cela s’ajoute toute une panoplie d’outils marketing pour gagner encore en satisfaction client. Cette mécanique complexe a été rendue possible par l’OMS. Le logiciel de gestion des commandes omnicanales s’est répandu à partir de 2010, au fur et à mesure de la montée en

puissance des ventes en ligne et des alternatives à la livraison à domicile : e-réservation, clickand-collect, ship-from-store, etc. « Le nerf de la guerre de l’expérience omnicanal c’est l’OMS », résume Sébastien Lefébure, directeur général Europe du Sud d’un éditeur pionnier, Manhattan Associates.

Pilote des différents scénarios omnicanaux, le logiciel échange avec l’ERP, les logiciels de paiement et de gestion de caisse, les WMS, voire les TMS. Il a notamment fait la différence au pic de la crise Covid en facilitant l’écoulement des stocks des magasins fermés : « les marchands qui n’avaient pas de stocks unifiés se sont retrouvés au printemps 2021 avec deux fois plus de stock dans le magasin qu’en 2019 », témoigne Romulus Grigoras, directeur général de OneStock.

Amélioration de la marge

Les gains sont multiples. L’OMS minimise en outre le risque de rater une vente en assurant la

disponibilité maximale des produits, la fiabilité des délais, etc. Le taux de conversion augmenterait ainsi jusqu’à 30 % chez les enseignes équipées. Le logiciel calcule l’optimum entre des dizaines de règles (distance entre points de stock et de livraison, groupement de commandes, taux de rotation, capacité de traitement des points de vente, type d’article, promotions, gestion des retours, etc.) selon l’objectif assigné : le plus souvent minimiser les délais, parfois les coûts logistiques et plus rarement l’impact environnemental de la livraison.

Capable d’améliorer de plusieurs points la marge de magasins en mal de fréquentation, l’OMS a le vent en poupe : le marché européen devrait progresser annuellement de 25 à 30 % ces prochaines années selon les éditeurs. Compte tenu de sa complexité, le logiciel s’adresse avant tout aux enseignes en réseau et aux pure players utilisant plusieurs entrepôts. n SC

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 56 E-COMMERCE
1995 Décollage de l’e-commerce 2010 Premiers OMS 2020 Boum du clickand-collect
Le ship-fromstore est l’un des canaux de vente piloté par l’OMS.
© Adobe Stock

Emballage Machines 3D : une 4e dimension écoresponsable

Alors que les formeuses de cartons et les barquetteuses existent depuis les années 1980, l’automatisation de l’emballage a débuté il y a une vingtaine d’années avec les machines 2D qui adaptent la hauteur des cartons à leur contenu. Un saut technologique supplémentaire a été franchi à partir de 2015, avec les systèmes de cartonnage en trois dimensions qui modèlent des cartons à la dimension exacte des produits. Cette sophistication croissante répond à l’essor de l’e-commerce. Les emballages d’expédition font l’objet de toutes les attentions des marchands et des logisticiens, confrontés à des volumes croissants de colis de petits gabarits et à des objectifs de réduction de l’empreinte carbone sur tous les maillons.

En France, après de premières expérimentations menées dès 2014 par La Poste et le Cirtes (centre français de fabrication additive), l’entreprise Sparck Technologies (ex-Quadient et ex-Neopost) est l’une des premières à avoir conçu une machine d’emballage 3D qui sera déployée chez C-Logistics à partir de 2016. Entre 2013 et 2020, Marchesini, Kern, DS Smith, CMC Machinery, KernPack, Socco System, Bosch Rexroth ou Savoye ont développé, commercialisé ou intégré des machines 3D pour les logisticiens de l’e-commerce,

parmi lesquels GXO Logistics, Interdiscount, Amazon (qui a investi dans CMC Machinery fin 2021) ou encore Mathon.

Un concentré de technologies

Les machines 3D sont un concentré de technologies qui permettent de confectionner les emballages autour des produits sur une chaîne automatisée. Elles comprennent un scanner laser qui mesure le volume en trois dimensions et numérise les produits placés sur un convoyeur mécanique. Un ordinateur avec logiciel de CAO et intelligence artificielle modélise le carton sur mesure. Un bras robotisé effectue ensuite la découpe puis le pliage du carton au bon format. Un second système robotisé assure la fermeture du carton ou la pose de coiffe puis d’étiquette, tandis que la machine

2013 Prototype Neopost testé en Hollande chez Docdata 2015 Premiers tests en France 2016 C-Logistics se dote d’une CVP 500

intègre des capteurs de pesée ou une balance embarquée pour identifier le poids du colis final. Ces machines tirent profit des progrès de l’imagerie 3D grâce à des caméras matricielles et des faisceaux laser, ainsi que des algorithmes de calculs géométriques qui offrent une grande précision de modélisation des objets.

Un concentré d’optimisations

Outre la vitesse de confection, l’enjeu consiste à chasser le vide dans les cartons tout en optimisant l’utilisation des matières premières. Les machines 3D innovent aussi en permettant de s’affranchir de consommables de calage, le tout à des cadences élevées afin d’accélérer le traitement des flux e-commerce dans les entrepôts. Une machine 3D peut concevoir des milliers de formats différents de cartons. Chez Cdiscount, une machine telle que la CVP Everest de Sparck Technologies peut traiter jusqu’à 1 100 colis par heure. Elle réduit de 30 % en moyenne le volume des colis entre 10 et 40 cm, de 20 % l’utilisation de consommables et de matière première pour un gain de 30 % de charge dans les camions. De quoi rentabiliser un investissement de plus d’un million d’euros par machine ! n RC

Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 58 E-COMMERCE
n° 196 > Septembre 2022 >
La dernière génération des machines de colisage assure des cadences très élevées tout en minimisant l’impact environnemental.
Le prix d’une machine d’emballage 3D dépasse le million d’euros.

Dernier kilomètre

La micrologistique essaime en ville

Ultime étape du rapprochement des entrepôts des consommateurs, les MFC livrent les citadins plus vite. Leur montée en cadence s’appuiera sur l’automatisation.

Les MFC (Micro Fulfillment Center) ou microcentres de préparation de commandes ont enrichi récemment le vocabulaire des logisticiens de l’e-commerce. Nouveaux venus au sein de la famille des espaces logistiques urbains, ces micro-entrepôts de quelques dizaines à quelques centaines de m², parfois automatisés, essaiment au cœur des agglomérations pour desservir des zones de livraison restreintes. Leur développement s’est accéléré en 2020 dans le B to C alimentaire. Les confinements au pic de la crise Covid ont en effet poussé les consommateurs vers l’achat en ligne, en particulier les citadins qui ont pris goût à livraison du quart d’heure, assurée par coursier.

Les enseignes ont aussi pu tester le modèle en préparant et en livrant les commandes depuis leurs magasins. Les dark stores, version MFC de l’épicerie de quartier, ont depuis fait florès avec le boum du quick commerce. Le format micro se prête aussi à l’ecommerce B to B, par exemple pour la livraison express de pièces détachées.

Entre l’entrepôt et le drive

Les origines des MFC croisent celle des drives de la grande distribution alimentaire. « Les premiers drives s’appuyaient souvent sur du picking en magasin, qui atteint ses limites de productivité dès que le volume de commandes devient important. Les grands distributeurs

ont alors commencé à tester plusieurs modèles autour du concept MFC, notamment le drive piéton » explique Loïc Euzen, directeur France et Europe du Sud d’AutoStore, qui a une solide expérience dans la grande distribution.

Deux grands modèles de distribution alimentaire cohabitent aujourd’hui : d’un côté de grandes plateformes centralisées desservant une vaste zone, telles celles du groupe Casino automatisées par Ocado qui couvrent la région parisienne, de l’autre un modèle de préparation plus local, décentralisé dans de multiples MFC. « Le MFC devrait gagner du terrain, compte tenu des coûts de transport croissants et du renforcement des contraintes pour livrer en centre-ville », estime Loïc Euzen.

L’automatisation décolle

À l’instar des grands entrepôts de préparation de commandes, la montée en cadence des MFC ouvre un marché prometteur à l’automatisation. Interact

Analysis prévoit que 7 300 MFC automatisés seront installés d’ici 2030 dans le monde contre seulement 86 fin 2021 (les MFC peuvent aller jusqu’à 4 500 m² aux États-Unis). Le nombre modeste d’installations actuellement mises en œuvre rappelle que le seuil de rentabilité est plus difficile à atteindre avec de petites surfaces : « Il faut un minimum de 300 à 400 commandes avec un panier de plusieurs articles alimentaires pour que l’automatisation soit plus pertinente que la préparation manuelle. Cependant, les paramètres peuvent vite changer : charges immobilières, niveau de service visé, difficulté à trouver des ressources humaines, etc. ». La compétition est déjà féroce entre trois profils de solutions. Les systèmes robotisés tels que ceux proposés par exemple par AutoStore, Exotec ou Scallog, les systèmes à shuttle ou miniload tels ceux de Dematic, Mecalux ou TGW, et des solutions développées par des start-up comme Fabric ou Takeoff (partenaire exclusif de Knapp). n SC

> Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 60 E-COMMERCE
n° 196 > Septembre 2022
1990 Premières pharmacies automatisées 2013 Premier drive automatisé 2016 Premier drive piéton 2020 Premiers MFC automatisés
Les États-Unis sont en avance sur la préparation de commande automatisée. Ici, un dark store taille US. © Autostore

4. PILOTAGE

La naissance du supply chain management et l’accélération de la logistique ont un carburant : la donnée. Rien n’aurait été possible sans la puissance de l’informatique pour traiter les flux croissants de marchandises. Les APS pour prendre vite les bonnes décisions, les WMS pour gérer des entrepôts omnicanaux, les TMS pour livrer en J+1, les solutions de visibilité pour tenir la promesse client, autant de briques logicielles qui ont permis un pilotage précis, fiable, efficient des chaînes logistiques. Et nous ne sommes qu’au début de l’exploitation de leurs capacités collaboratives. L’effervescence innovatrice doit aussi beaucoup à un tissu de start-up que d’aucuns qualifient de « Supply Tech ».

LE POINT DE VUE DE L’EXPERT

Quel rôle la technologie a-t-elle joué dans l’essor de la supply chain ?

La technologie a joué un rôle d’accélérateur, plus particulièrement ces dix dernières années, en soutenant l’innovation et en attirant de nouveaux talents. Les innovations se sont principalement articulées autour de trois axes. Premier axe, une meilleure utilisation des données à grande échelle, notamment grâce à l’IA et au big data (algorithmie avancée, recherche des facteurs de corrélation sur des volumes gigantesques de données, hypersegmentation des données, utilisation de modèles probabilistes, etc.), au machine learning et à la scénarisation de la recherche de solutions. Deuxième axe, le renforcement de la traçabilité des données et des flux dans le monde entier, avec les « control towers » qui y sont associées. Troisième axe enfin, l’automatisation et la robotisation des flux physiques (mécanisation des entrepôts), ainsi que des flux d’information (RPA, chatbots, etc.).

Quelle innovation a créé la plus forte rupture ? Il me semble difficile de hiérarchiser ces innovations,

car les enjeux et les cas d’utilisation peuvent être très différents selon les environnements ou les typologies d’entreprises dans lesquelles elles sont mises en œuvre. Si je devais tout de même en faire ressortir une, je mettrais en exergue l’IA, le big data et le machine learning. Je pense que les impacts de ces innovations technologiques ne sont pas encore tous identifiés, et que ces innovations seront à l’origine dans les années à venir de nouvelles applications que nous imaginons à peine aujourd’hui.

Quelle technologie émergente devrait marquer le plus les 25 prochaines années ? Comme développé ci-dessus, sûrement le triptyque IA, big data et machine learning ! Il me semble que les jumeaux numériques vont aussi permettre d’ouvrir de nouvelles perspectives afin de simuler les flux et les processus supply chain optimisés de demain. Ils sont particulièrement adaptés pour trouver des solutions à des problématiques dans notre monde de plus en plus complexe, incertain et volatil, en intégrant notamment des modèles probabilistes plutôt que déterministes comme le MRP.

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 62
«
L’IA, le big data et le machine learning seront à l’origine d’applications à peine imaginables aujourd’hui »
Guillaume Allemand, directeur général de Citwell.

SOMMAIRE

WMS, les clés de la performance

63 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com
66
67
68
64 La supply chain au cœur de la stratégie 65 TMS chargeurs, les vecteurs de l’expérience client
APS, l’outil du management
De la traçabilité à visibilité 69 Les start-up dopent l’innovation
25 ans d’innovations PILOTAGE

Management La supply-chain au cœur de la stratégie

De fonction logistique cantonnée au transport et aux stocks, la supply-chain a gagné le management de l’entreprise. France Supply Chain veille au grain…

Aujourd’hui, le terme « supply chain » est très largement employé dans les entreprises, même si la confusion avec la logistique, une sous-partie, n’est pas totalement dissipée. Laurent Grégoire, responsable logistique puis supply chain de groupes internationaux entre 1981 et 2015 et président de l’Aslog dans les années 1990 (devenue France Supply Chain en 2020), a été parmi les premiers à franchir le pas sémantique : « 2022 marque le 30e anniversaire de l’expression supply chain dans les débats au sein de l’Aslog. Je me souviens d’une réunion de la commission logistique de l’Afnor au printemps 1992, où nous avions débattu de ce terme inventé en 1981 mais réellement utilisé à partir des années 1990. »

Périmètre variable Yann de Feraudy, actuel président de France Supply Chain, souscrit : « Le changement a débuté dans les années 1990 avec la logistique industrielle. Souvent, la bascule de directeur logistique à directeur supply chain sur une carte de visite se produit quand la personne fait de la planification. Dans le négoce, elle discute avec différents fournisseurs, dans l’industrie, elle a la main sur l’approvisionnement des usines. Quand on planifie plusieurs maillons de la chaîne, schématiquement fabrication–entreposage–transport, alors on rentre dans une vraie supply chain ».

Le périmètre et les missions de cette « vraie » supply chain

La supply chain dans la littérature

Occurrence du terme « supply chain » dans le corpus Google Books francophone.

varient énormément selon les organisations et les secteurs d’activité, avec des fondamentaux : « J’ai participé à des débats sans fin autour de la question de savoir si la supply chain devait appartenir au Comex. Pour être efficace, elle doit avant tout être au cœur de la stratégie de l’entreprise, en sachant qu’elle ne fait pas la stratégie, pas plus que le régiment du train ne fait la stratégie du champ de bataille ! ».

Durabilité et résilience Depuis 25 ans, la fonction a mûri, ses objectifs de performance ont évolué en direction de la RSE. Ces dernières années, des directeurs/trices des opérations apparaissent, qui intègrent les achats, note Yann de Feraudy. « Avant, les critères principaux étaient la capacité et le prix. Désormais, s’ajoutent les critères RSE presque en premier : respect des engagements environnementaux, sociaux, réglementaires, etc. ». Ainsi, les « sup-

1981 Invention du terme supply-chain 1995 Premières directions supply-chain dans les grandes entreprises 2020 L’Aslog devient France Supply Chain

ply » à l’avant-garde sont notamment celles qui incluent leur bilan carbone dès la conception. « C’est une chose de mettre en avant le scope 1 et 2. Mais pour beaucoup d’entreprises industrielles, le scope 3 représente 80 % de leurs émissions carbone ! »

En 2020, la crise Covid bouscule les priorités des directions supply. La résilience devient un maître mot : « Tout le monde a compris que ce qui prévalait depuis 30 ans et plus, bâtir des chaînes extrêmement longues, étendues et très profondes, nuit à leur visibilité et à leur maîtrise. La pandémie a mis en évidence des fragilités. Pour autant, raccourcir les chaînes est intéressant, à condition de savoir de qui, de quoi elles sont faites. Si j’achète en Allemagne pour m’apercevoir qu’un sous-traitant critique est en Chine… ». Puis, la guerre en Ukraine éclate alors que les calculs de schémas logistiques plus résilients ne sont pas terminés : les changements s’accélèrent pour la supply ! n SC

Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 64 PILOTAGE
n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies
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TMS chargeurs Les vecteurs de l’expérience client

Plus qu’un outil d’optimisation de coûts, le TMS apporte anticipation, réactivité et visibilité sur le maillon transport. Certains chargeurs restent à convaincre.

Apparus dans les années 1980, les premiers TMS étaient destinés aux transporteurs. En 1987, l’éditeur toujours en activité Microtrans se distinguait en lançant un TMS chargeurs : « aucun autre éditeur ne proposait une telle offre à l’époque. Les entreprises commençaient à peine à informatiser la gestion et la compta, le transport n’était pas une priorité. On ne s’en préoccupait qu’en cas de crise », témoigne Marie-Pierre Durand, responsable commerciale de l’éditeur. Orientés produits plutôt que palettes, les algorithmes des TMS chargeurs calculent bien différemment les coûts.

Révolutions technologiques

Mais alors que les TMS transporteurs faisaient florès, la version chargeurs restera un marché de niche jusqu’en 2000. La révolution des technologies web et internet, apportant convivialité, flexibilité et puissance, a alors permis de répondre aux attentes d’un secteur en restructuration. Les transporteurs se sont fait logisticiens tandis que les schémas de transport se sont complexifiés, internationalisés, multipliant les modes d’expédition. Des directions transport (ou logistique) Europe, voire Monde, sont apparues. « Quand on doit négocier des tarifs de transport au niveau Europe, Excel ne suffit pas. Cela peut fonctionner avec un budget de 5 M€ par pays, mais pas plusieurs pesant 30 M€ ! », souligne Marie Pierre Durand. Dans de nombreux secteurs, industriels

Panorama des TMS chargeurs en France

Notre recensement annuel (non exhaustif) montre l’élargissement du périmètre fonctionnel des solutions. Cercles proportionnels au nombre de clients. Estimations en pointillé ou données NC.

en particulier, le coût des transports a pesé lourd dans le choix de s’outiller. Le transport est le premier budget logistique, et après les salaires, le deuxième ou troisième poste de dépense selon l’activité.

Plateformes collaboratives

Depuis quelques années, la maîtrise des coûts et l’efficacité opérationnelle ne sont plus les seules priorités des chargeurs. « Comprenant que le transport devient un enjeu d’expérience client, l’attention se porte sur la visibilité des opérations et le partage d’information entre fournisseurs, chargeurs, clients et le transporteur », relève Jérôme Bour, P.-D.G. de l’éditeur DDS Logistics. La montée des cadences demande aussi au logiciel d’anticiper l’organisation du transport dès l’entrepôt, avant même de préparer les commandes, au point que certains éditeurs décloisonnent WMS et TMS sur une plateforme unique en mode SaaS. L’IA dope

2000

Décollage des TMS chargeurs

2015

Boum des plateformes digitales collaboratives

2020

La fusion TMS et WMS s’accélère

les performances du calcul d’itinéraires ou de la détection d’anomalies et, signe des temps, l’accent mis sur la mesure des émissions carbone. Plus d’une trentaine d’éditeurs proposent des solutions complètes, de la conception du plan de transport jusqu’au contrôle des factures. Cette complexité de l’offre expliquerait en partie que les TMS chargeurs n’ont pas le succès du WMS. Le taux d’équipement ne dépasse pas 25 % en France contre 80 % pour les WMS, estime Xerfi. Sans compter qu’une bonne part des chargeurs choisissent d’externaliser leur maillon transport. En outre, à partir de 2015 de multiples plateformes collaboratives connectant chargeurs et transporteurs sont venues leur faire concurrence, vantant une meilleure efficacité et un ROI plus rapide. Une solution trop simple pour digitaliser un maillon aussi complexe, selon les éditeurs historiques. La concurrence s’exacerbe… n SC

Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022 65 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com

WMS

Les clés de la performance

Centre névralgique de supply chains omnicanales, le logiciel de l’entrepôt est en quête perpétuelle de richesse fonctionnelle et de performance.

Imaginerait-on aujourd’hui se passer d’un logiciel de gestion des entrepôts ? D’un stock de 50 références SKU à plus d’un million comme dans les pièces détachées, chaque entrepôt trouvera un WMS adapté à ses besoins. En sortie de crise sanitaire, l’équipement, et souvent le renouvellement de son WMS, tend même à devancer d’autres projets d’intralogistique. De fait, ce logiciel cœur de métier équipe déjà 80 % des entreprises selon Xerfi. Il trouve ses origines au tournant des années 1990, précisément en 1987 selon Alain Elfassi, actuel directeur général adjoint de GSA Logistics, qui a participé à la conception du WMS Geode. On mesure les progrès accomplis : « Au début, il fallait montrer l’intérêt de ce qui allait s’appeler le WMS. Les entrepôts n’étaient pas bien considérés, personne n’imaginait qu’ils puissent devenir un centre de profit ». Sans informatique, sans code-barres, la gestion des emplacements se faisait alors sur un tableau Kardex : une fiche en T sur la palette, l’autre sur le tableau à l’endroit où avait été rangée la palette. À présent édité par Sage, Geode, renommé X3 Warehousing, a conquis plus de 500 sites à travers le monde.

E-commerce, la nouvelle donne

Les WMS d’aujourd’hui supervisent toujours l’espace de stockage, et a minima les opérations d’entrée/sortie de marchandises, tout en assurant la gestion des stocks. Mais en 25 ans,

Panorama des WMS en France

les opérations ont bien changé. L’e-commerce a fortement accéléré les cadences et les volumes, passant d’une gestion par palettes à des commandes unitaires. Le multicanal impose souvent des flux aux règles de gestion différentes sous un même toit. Ces commandes aux formats hétérogènes, modifiées jusqu’au dernier moment (cutoff), sont générées par des WMS toujours plus performants. Les plus avancés anticipent même les aléas de la chaîne en aval, le tout en dialoguant avec des systèmes intralogistiques toujours plus sophistiqués : aux solutions pick-to-light, put-to-light ou vocales, des technologies 4.0 sont apparues ces dernières années, utilisant l’IoT ou la 3D.

Optimisation et performance

En parallèle, la gestion poussée des RH se répand (Labour Management). Et comme d’autres progiciels, l’intelligence artificielle (IA) optimise certaines

De la TPE jusqu’aux géants de l’ERP, le marché est pléthorique. Cercles proportionnels au nombre de clients chargeurs. Estimations en pointillé ou données NC. Recensement non exhaustif.

fonctionnalités comme l’analyse des données, le slotting prédictif ou la préparation de commande waveless. Déjà largement passée dans le Cloud, cette quête de performance peut tirer parti de la dernière architecture logicielle à microservices, qui combine puissance et flexibilité. Même si certains éditeurs prônent encore une solution hébergée chez le client, invoquant la fiabilité requise par cette application critique, la migration du parc semble inéluctable.

Cette cascade d’innovations s’accompagne d’un travail sur l’ergonomie. Le responsive design, les architectures full web facilitent l’adoption des terminaux mobiles par les opérateurs tout exploitant davantage de données. Ce foisonnement de technologies se double de celui des éditeurs. Des spécialistes de la supply chain, dédiés à un WMS aux suites complètes, jusqu’aux fabricants de systèmes automatisés en passant par les ERP, le choix est vaste. n SC

> Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 66 PILOTAGE
n° 196 > Septembre 2022
Premiers
2010 Versions
2017 Architecture
1990
WMS
mobiles
microservices (cloud native)

APS

L’outil du management

Autrefois réservés aux planificateurs, les logiciels de prévision/planification sont devenus collaboratifs. Toujours plus puissants, ils assistent le S&OP.

l’heure de l’entreprise pilotée par la donnée, les APS outillent le socle du management de la supply chain : la planification. Que ce soit pour dimensionner les approvisionnements, le transport, la production, la distribution, voire les RH en entrepôt, il faut s’assurer que les ressources de l’entreprise répondront aux ventes prévues avec le meilleur niveau de service, de qualité et de coût. Si Excel reste un outil prisé des planificateurs pour faire parler les données, le tableur star montre ses limites quand la volumétrie augmente ou pour partager l’information. D’un autre côté, les ERP des années 1990 ont longtemps pâti de leur approche transactionnelle, héritée de la gestion de production (MRP 2), une solution éprouvée mais inadaptée pour optimiser des ressources contraintes.

Débuts précoces

Très tôt, des solutions de planification complémentaires aux ERP sont apparues pour combler ces lacunes. En France par exemple, l’APS de DynaSys (devenu QAD DynaSys) a vu le jour en 1985. Fondé par un ancien planificateur, l’éditeur a séduit rapidement des multinationales de l’agroalimentaire. Au cœur de cette innovation, un moteur d’optimisation et de modélisation développé par Ilog (racheté par IBM en 2009). Il utilise dès l’origine des technologies d’intelligence artificielle, bien avant que le terme ne revienne en force dans les années 2010.

Panorama des APS en France

Au début des années 2000, l’offre APS est déjà étoffée, se partageant entre spécialistes de la prévision/planification, des éditeurs de suites supply chain et des ERP qui lancent leurs modules APS. Certains s’orientent vers l’ordonnancement de la production ou l’optimisation des stocks, d’autres vers des secteurs tels que le retail ou la pharma. Outre de multiples fusions-acquisitions au sein de cette grande famille, plusieurs innovations ont accompagné la montée en puissance de la supply chain.

Collaboratif et ML

La recherche d’une plus grande réactivité face à un environnement plus complexe, dont la volatilité a encore été renforcée par la crise Covid, a conduit les éditeurs à proposer de se rapprocher du court terme, à relier le plan stratégique aux opérations quotidiennes. Des APS avancés assistent le S&OP avec des scénarios bâtis à la volée

2000

Les APS se généralisent 2010 Montée du planning collaboratif (super tableurs) 2015 Montée du machine learning

Le marché se partage entre spécialistes, suites de supply chain et ERP. Cercles proportionnels au nombre de clients. Estimations en pointillé ou données NC.

(aléas, lancement de produit, etc.), tout en synchronisant les acteurs de la supply-chain. Le processus inclut même les projections financières, devenant IBP. Parallèlement, des super tableurs collaboratifs et conviviaux ont fait une percée à partir de 2010. Venus de la finance, ces outils décisionnels tirant parti du Cloud font table rase de l’approche préparamétrée des APS traditionnels. Capables de calcul en quasi-temps réel, leur mise en œuvre est rapide.

Autre innovation marquante, la sophistication des algorithmes se poursuit en direction du machine learning. Cette branche de l’IA rend les APS prédictifs, prescriptifs, voire autonomes. JDA parle ainsi d’une troisième génération d’APS, qui non seulement améliore les performances mais permet de confier une part importante des décisions métiers à ces algorithmes auto-apprenants. La robotisation n’est pas qu’une affaire d’intralogistique ! n SC

Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022 67 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com
À

Tours de contrôle De la traçabilité à la visibilité

En l’espace de dix ans, la visibilité en temps réel sur le transport est devenue un standard. Le must reste la vision à 360° des tours de contrôle.

Que ce soit pour informer des délais de livraison ou parer un aléa sur un maillon de la chaîne logistique, la visibilité est devenue un maître mot du pilotage des supply chains. La capacité à suivre ses flux logistiques a fait d’immenses progrès depuis 25 ans grâce au numérique. La traçabilité des marchandises s’appuie sur plusieurs générations d’outils. Des codesbarres des années 1990 aux QR codes et étiquettes RFID des années 2010, puis des capteurs connectés de l’IoT, des systèmes embarqués des camions et même des smartphones, le statut de chaque étape est toujours plus détaillé, du fournisseur jusqu’au client, dans le monde entier et selon tous les modes de transport.

Plateformes de transport

Pour y voir clair dans ce déluge de données, issues de dizaines voire centaines de transporteurs chez les grands chargeurs, des plateformes de visibilité en temps réel du transport (RTTVP pour real time transportation visibility platforms) sont apparues autour de 2015. Agrégeant dans le Cloud les flux issus de chaque transporteur, ces plateformes ont rencontré le succès. Par exemple, l’américain Project44, qui annonce suivre un milliard de livraisons chaque année dans le monde, ou le français Shippeo, connecté à plus de 150 000 transporteurs. L’ère de la visibilité prédictive, autrement dit la capacité à fournir une date, voire une heure

Tour de contrôle transport de Schneider Electric.

précise d’arrivée des livraisons (ETA), a débuté. Le modèle Cloud assure en outre aux chargeurs une mise en place rapide, sans compter que nombre de leurs TMS sont déjà connectés à ces plateformes.

Tours de contrôle

plateformes de visibilité du fret, sans oublier des 4PL qui peuvent proposer ce type de service en marque blanche.

2010

Premières tours de contrôle

2014

Premières plateformes de visibilité transport temps réel

2020 Les ETA se généralisent

Mais le graal de la visibilité ne se limite pas au maillon transport. Les chargeurs attendent une vision à 360° de leur supply chain : état des stocks, capacité des usines, du réseau de distribution, voire évolution de la demande, des ventes et des revenus. Dans le jargon, une solution informatique répond à cette définition : les « tours de contrôle ». Apparues il y a une douzaine d’années, avant les RTTVP donc, elles étaient auparavant l’apanage des grands commissionnaires. Toute une palette d’acteurs les propose : éditeurs de suite de supply chain, TMS, plateformes décisionnelles, ERP mais aussi

Cette variété d’offres conduit à une grande variabilité des fonctionnalités, allant d’un tableau de bord jusqu’à un outil proactif permettant de résoudre les problèmes et bâtir des scénarios alimentant la planification.

Depuis la crise de la Covid, les tours de contrôle ont encore gagné en attrait. Leur capacité à minimiser l’impact d’un aléa sur l’activité de l’entreprise en fait un allié de choix de la résilience.

Pour autant, les grandes entreprises, fréquemment équipées, les cantonnent le plus souvent à une partie de leur supply chain : les transports, la distribution ou les usines pour certains produits. Il s’agit de très gros chantiers de transformation organisationnelle et de gouvernance, sans compter la partie informatique. Le chemin vers la visibilité à 360° reste encore long. n SC

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 68 PILOTAGE

Logistique 4.0

Les start-up dopent l’innovation

Friand d’innovations, les logisticiens soutiennent le développement des jeunes pousses de la logistique, créant leurs propres incubateurs et accélérateurs.

La modernisation de la logistique de la décennie 1990 doit beaucoup à la révolution numérique. De ce bouillonnement high-tech, qualifié un temps de « nouvelle économie », sont nées des centaines de start-up, à commencer par Amazon qui en fut une entre 1995 et 1997, date de son entrée en Bourse. Ce bond en avant technologique s’est prolongé bien au-delà de 2000 – automatisation, plateformes digitales, e-commerce, progiciels métiers, etc. – pour déboucher sur la logistique 4.0 à partir de 2010, une logistique numérique, automatisée et connectée tous azimuts.

Le soutien des grands Symbole tricolore des start-up de la logistique 4.0, le roboticien Exotec a acquis le statut de licorne (valorisation dépassant un milliard d’euros). Son premier grand client, Cdiscount, l’avait propulsé en 2017 sur le devant de la scène. Depuis, une cinquantaine de ses systèmes automatisés de préparation de commandes ont été déployés dans le monde, challengeant des systèmes automatisés à peine âgés d’une dizaine d’années. Les jeunes pousses peuvent compter sur le soutien des grands logisticiens et industriels, en direct ou via des incubateurs. Ce mode d’innovation a largement porté ses fruits, les grandes entreprises innovent rarement seules dans leurs labos de R&D. C’est le cas d’ID Logistics, qui s’est associé à Wyca Robotics en 2018. Avec

Symbole des start-up de la logistique 4.0, les robots autonomes Skypod d’Exotec.

ce spécialiste des robots autonomes et l’intégrateur E-Dentic, le 3PL a mis au point un robot autonome d’inventaire baptisé Astrid. ID Logistics accompagne aussi les start-up à travers son propre programme Campus Innovation, qui a déjà porté près de 80 projets.

Supply Tech

industriels ne sont pas en reste. En 2019, le groupe L’Oréal a lancé l’incubateur MYT (Make Your Technology), dédié à l’industrie et la supply chain du futur.

2010 Logistique 4.0

2021 Programme Supply Tech

2022

Exotec première licorne de la robotique

Les incubateurs maison ont également le vent en poupe. Cdiscount a lancé en 2018 The Warehouse, qui fédère une douzaine de start-up axées sur la « dépénibilité » du travail et sur le développement de la cobotique. CMA CGM, devenu un groupe de logistique complet, a lui aussi lancé son incubateur en 2018. Zebox propulse ainsi des dizaines de jeunes pousses en France et outre-Atlantique dans les domaines de la supply chain, de la logistique, des mobilités et de l’industrie 4.0. Les grands

Jusqu’alors partenaire d’incubateurs tels que Station F ou Founders Factory, L’Oréal transpose la méthode au sein même de ses opérations industrielles. Ce foisonnement devrait se poursuivre. SprintProject a recensé 327 start-up de la logistique en 2021, soit presque un doublement depuis 2019. Une dynamique que le gouvernement entend fédérer au travers de son programme Supply Tech, lancé en novembre 2021 sous l’égide du ministère des Transports et de France Logistique. Une liste d’innovations stratégiques pour 2030 a été établie : automatisation des entrepôts, exploitation et standardisation des données, optimisation des flux et des stocks. n SC

Stratégies Logistique > n° 196 > Septembre 2022 69 g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com

25e innovation

L’avenir s’annonce durable… et sobre

La 25e innovation de ce numéro anniversaire est multiple. Dans un contexte de crise environnementale et énergétique, la supply chain de demain devra être beaucoup plus verte. Plusieurs technologies et process RSE encore émergents à ce jour vont dans cette direction.

Le monde va devoir chan ger face à la crise clima tique et la raréfaction de l’énergie. Les innovateurs de la supply chain ont un rôle de pre mier plan à jouer pour adapter leurs modèles, voire en inventer de nouveaux. Dans chacune des quatre thématiques explorées dans ce numéro, les enjeux transversaux de la RSE, de la résilience, et même de la so briété, commencent à émerger.

Intralogistique : retour de l’hydrogène

Dans les entrepôts, le mouve ment observé depuis 25 ans al lant de la mécanisation vers la robotisation tend vers un objec tif d’automatisation à 100 %. Du quai de déchargement au quai de chargement, les opérations sont réalisées sans interven tion humaine. Ce défi technologique, notamment d’intégration entre différents systèmes, est déjà relevé. Des robots toujours plus « intelligents » et flexibles, combinés à un pilotage informatisé en prise directe avec l’amont et l’aval des flux de l’entrepôt, permettent d’automatiser beaucoup de produits. Au passage, notons que cela ne signifie pas la disparition des RH selon Knapp : « au contraire, c’est un entrepôt plein de technologie où l’homme et la machine collaborent étroitement. Le système de stockage, les postes de travail, les robots et les robots mobiles autonomes sont reliés directement entre eux ».

Dans cette vision, la sobriété énergétique sera un facteur majeur d’innovation. Après les batteries li-ion, l’hydrogène fait son retour pour motoriser les engins de manutention. Cette fois en version verte, le gaz est produit sur place à partir de panneaux photovoltaïques, ou localement via des partenaires énergéticiens. Des projets, notamment chez FM Logistic, fonctionnent déjà. L’hydrogène possède en outre un avantage de compacité et de coût sur les batteries pour stocker l’énergie produite. Les entrepôts producteurs d’hydrogène pourront même fournir du gaz

au-delà des besoins internes, pour alimenter une flotte de camions ou les entreprises environnantes. Les bâtiments eux-mêmes ont leur carte à jouer, de nouveaux entrepôts dits neutres en carbone sortent déjà de terre.

Transports : hydrogène encore

Du côté des transports, certains voient dans les drones une innovation de rupture. Éric Ballot, de Mines ParisTech, pense qu’ils resteront un marché de niche : « les drones ont une autonomie très faible, leur consommation énergétique ra-

n° 196 > Septembre 2022 > Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 70 25E INNOVATION
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menée à la charge est énorme, et ils posent de nombreuses difficultés réglementaires ». Pour cet expert en logistique, passer de moyens légers à des moyens plus lourds reste beaucoup plus efficace. Pour cela, « il faut une interconnexion universelle de tous les services logistiques, pour éviter les ruptures de charge tant au niveau de la manutention que de la traçabilité et du business. Cela suppose une interopérabilité entre tous les systèmes existants : c’est l’Internet physique ». L’agenda de la décarbonation d’ici 2050 posé à tous est un défi immense pour le secteur du transport, par définition énergivore. Tous ses acteurs ont entamé leur transition énergétique depuis plus de dix ans, mais les objectifs actuels demandent des changements massifs que certains jugent insurmontables. Dans le TRM, les leviers d’optimisation des schémas de transport, de massification, de meilleur remplissage, de coopération et de report modal sont actionnés. À ce jour, les innovations technologiques ont porté sur l’électrification des véhicules légers et l’écoconduite. Pour le transport longue distance, une des clés pourrait être, à nouveau, l’hydrogène, encore à ses balbutiements.

E-commerce : vers l’économie circulaire L’essor de l’e-commerce a bousculé les process et les technologies de la logistique ces 25 dernières années. Sa croissance face au commerce physique devrait encore se poursuivre. Son modèle omnicanal amènera à accroître le besoin en surface d’entrepôts, notamment urbains, et en automatisation. Les magasins devraient continuer à prendre du poids dans les schémas logis-

tiques, le « phygital » a encore un bon potentiel d’innovation. L’économie circulaire, voulue par les consommateurs ou imposée par la réglementation, devrait amener encore plus de changement pour les modèles existants de l’e-commerce. On l’a vu, ses innovations d’aujourd’hui s’appuient souvent sur celles du passé, avec le retour des vélos, de la livraison à domicile, des consignes.

jourd’hui confronté à des défis d’une ampleur inédite, dont il est difficile d’anticiper l’évolution. D’ores et déjà, les objectifs de performance sont revus en profondeur, aux coûts et délais classiques s’ajoute la capacité de résilience. Elle se mesure notamment par le risque fournisseur. Les aléas d’acheminement des marchandises conduisent aussi à revoir la politique de stocks, plus nombreux, plus importants, parfois au service d’une stratégie de relocalisation. Cette révolution du pilotage des supply chains s’appuiera sur des outils informatiques à même de renforcer l’efficience des flux, mais aussi leur résilience.

La nouveauté pourrait venir d’un renforcement de l’économie de la seconde main : « une logistique permettant de fiabiliser les produits d’occasion auprès du consommateur devra se mettre en place. Une vérification des produits reposant sur la traçabilité et des solutions de réalité augmentée contribueront à s’assurer de ce qu’il achète », prévoit Jérôme Libeskind, expert en logistique urbaine et ecommerce. L’économie circulaire suppose également une révolution au niveau des emballages, utilisés pour les expéditions et la manutention. Le réemploi et le recyclage d’un nombre croissants d’objets supposent aussi une logistique des retours beaucoup mieux structurée qu’aujourd’hui.

Pilotage : collaboratif et IA Enfin, face aux crises qui se multiplient, le management des supply chains est au-

La collaboration plus étroite entre les partenaires d’une même supply chain en sera l’une des clés. Les solutions existantes, de pilotage comme d’exécution, mettent déjà largement l’accent sur le collaboratif. À l’avenir, les solutions devront être encore plus interopérables (voir l’Internet physique pour les transports), pour donner une meilleure visibilité sur toutes les opérations et faciliter le partage d’informations entre les parties prenantes. Cette plus grande ouverture, dans le Cloud, devra tenir compte d’un aléa croissant : la menace des cyberattaques.

Le pilotage devra également être plus agile, à la fois davantage en prise avec les fluctuations de la demande et réactif face à un environnement plus volatil. Le potentiel de l’IA n’en est qu’à ses débuts en la matière, pour modéliser les supply chains et en optimiser la planification. Gageons que logisticiens et supply chain managers sauront s’emparer de ces innovations comme ils l’ont fait depuis 25 ans. n SC

Stratégies Logistique DÉCOUVRIR 25 ANS D’INNOVATIONS ACHETER 72
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25E INNOVATION
«
Il faut une interconnexion universelle de tous les services logistiques, pour éviter les ruptures de charge tant au niveau de la manutention que de la traçabilité et du business. »

uSiège Social : Gilles Solard - 16 bis rue du Père Maunoir - 35000 Rennes uEditions Presse Pilote –www.strategieslogistique.com – Directeur de la publication : Gilles Solard - gilles.solard@strategieslogisque.com uRédaction – Rédacteur en chef adjoint : Sylvain Chanourdie - sylvain.chanourdie@strategieslogistique.com –Rédaction du site internet : redactionweb@strategieslogistique.com – Ont participé à la rédaction : Renaud Chasle, Franck Chevallier, Hervé Deiss, Érick Demangeon, Alban Gruson, Louis Guarino, Jérôme Libeskind, Jérémie Pouponnot uRéalisation : Sandy Crocco - creastell@orange.fr uPublicité : Joël Duprat, directeur commercial - 06 03 72 20 13 - publicite@strategieslogistique.com uAbonnements : TBS Blue (Presse Pilote) - 6 rue d’Ouessant - 35760 Saint-Grégoire - abonnement@strategieslogistique.com - 01 86 65 14 68. France (TVA 2,1 % incluse) : 1 an : 6 numéros + accès web : 119 euros TTC - Étudiants/demandeurs d’emploi : 71 euros TTC sur justificatif. Étranger : nous consulter. Règlement à l’ordre des Editions Presse PilotePour la CEE, précisez le numéro de TVA intracommunautaire. uStratégies Logistique est édité par les Editions Presse Pilote. Principal actionnaire : Gilles Solard – SAS au

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Impression, 11 rue Marthe Dutheil - 87220 Feytiat. Ce numéro 196 comporte 76 pages. Il inclut une page abonnement en page 4. g PLUS D’INFOS SUR strategieslogistique.com AU SOMMAIRE DU PROCHAIN NUMÉRO Pause logistique PARTAGER-COMPRENDRE Transport Face à la crise énergétique Intralogistique AMR, nouvelle ère intralogistique ? APPROFONDIR Logistique internationale Du just-in-time au just-in-case, quelles stratégies ? ACHETER Logiciels de supply chain INDEX DES ANNONCEURS ABB 29 Access Industrie 31 Acteos 17 All4pack 59 Autostore 49 Boa Concept 25 CFIA 19 Ciuch 22-23-35 Conex 3e de couverture Descartes 63 Idéa 47 Haropa 2e de couverture Hub One 55 Jungheinrich 33 Paris Retail Week 57 Préventica 39-73 Raja 4e de couverture Savoye 71 Sepem 61 Staci 53 Stöcklin 37 Supply Chain Event 9 TGW 27 Transalliance 43 Urby 51
de
000
Pontoise – ISSN 1249-2965 – Imprimé en France : Centre
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