Stratégies logistique n°183 - extrait

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NUMÉRO

183

Juin/Juillet 2020

COVID-19

La reprise avant la relance LOGICIEL

Les tours de contrôle donnent de la visibilité GUIDE D’ACHAT

Numéro 183 - Juin/juillet 2020 - ISSN 1249-2965 - Prix du numéro : 22 €

Équipements de stockage

Les AGV se connectent à l’intralogistique 4.0 @stratlog strategieslogistique.com


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3 Édito 6 Crise du Covid-19

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Parmi les modèles logistiques transformés par la crise, la livraison à domicile couplée aux solutions de vente en ligne a fortement progressé, au détriment des points relais et des lockers. À lire en page 32.

Stratégies Logistique > n° 183 > Juin/Juillet 2020

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22 Développement durable

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51 Équipements de stockage

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26 Logiciel Acte II : du déconfinement à la relance

g strategieslogistique.com

32 Tribune

EN COUVERTURE

18 Reportage

P. 38

35 Intralogistique

Les AGV se connectent à l’intralogistique 4.0 Stratégies Logistique > n° 183 > Juin/Juillet 2020

Photo de couverture : © Toyota

16 Entreprise

38 AGV, pièce maîtresse de l’entrepôt 4.0


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CRISE DU COVID-19

Un pilotage des supply-chains à réinventer À l’invitation de l’Aslog*, les responsables supply-chain de Groupe Rocher, LVMH, Michelin, Rexel et Schneider Electric ont tiré les premières leçons de la crise. Protéger les collaborateurs et la trésorerie est la priorité de ces groupes industriels. De nouveaux modes de pilotage dans un environnement incertain se dessinent, réaffirmant le rôle clé de la supply-chain.

L Stéphanie Rott, directrice production et supply-chain groupe, LVMH.

e choc a été brutal dans les grands groupes. Rexel par exemple a enregistré une baisse de 70 % de ses ventes en Europe du Sud, Groupe Rocher a dû faire face à la fermeture de 95 % de ses 6 000 points de vente. La demande en chute libre, conjuguée à des chaînes logistiques en mode dégradé, a bousculé l’organisation, les méthodes et outils des équipes supply-chain.

1. PLUS D’ÉCOUTE

ET DE COLLABORATION

Yann de Feraudy, directeur général adjoint Opérations & IT, Groupe Rocher.

* Webinaire organisé par l’Aslog le 5 mai : « La Supply Chain face au Covid-19 - Visions croisées des grands acteurs de l’économie française ».

Dès le début de la crise, la supply-chain a joué à plein son rôle de coordination pour assurer la continuité et la reprise d’activité. Pour Stéphanie Rott, directrice production et supply-chain groupe de LVMH, il a fallu « faciliter l’intelligence collective sur toutes les opérations ». Trois grands défis se sont rapidement dressés, à l’échelle mondiale de ces multinationales : s’adapter à une demande devenue imprévisible, faire redémarrer chaque maillon de la supplychain et revoir en conséquence le mode de planification de la supply-chain. Les « conf calls » et comex se sont intensifiés pour partager les perceptions, les analyses, et bâtir de nouveaux plans d’action. Yann de Feraudy, directeur général adjoint Opérations&IT de Groupe Rocher, voit dans cette crise l’opportunité d’un retour de l’humain à plusieurs niveaux : « L’écoute de nos équipes, qui ont accompli un travail extraordinaire, a permis d’inventer un modèle de sécurisation des postes de travail. La collaboration et le dialogue entre clients et

fournisseurs se sont aussi transformés dans la difficulté. Certains de nos grands fournisseurs ont fait des gestes commerciaux ».

2. PRIORITÉ À LA

RÉASSURANCE SANITAIRE

Naturellement, l’action prioritaire est de protéger la santé et la sécurité des collaborateurs, en interne aussi bien que chez les partenaires et les clients. Une batterie de procédures et d’équipements sanitaires a été mise en place. « Les éléments de sécurité et de réassurance sont le thème clé du redémarrage. Cela va nous permettre de revenir en capacité, et avec bon niveau de productivité, dans les semaines et mois à venir », souligne Stéphanie Rott. La prise de température à l’entrée des sites figure parmi le top 3 des mesures de réassurance des salariés du groupe de luxe. Les multinationales observent des différences entre les pays, par exemple sur le caractère obligatoire des masques et visières ou encore sur la perception d’un cas de Covid dans un entrepôt entre Europe du Nord et Europe du Sud.

3. S&OP HEBDOMADAIRES

Deuxième grande priorité de ces groupes, la mise en œuvre d’un pilotage très réactif pour maîtriser au plus près les coûts et la trésorerie. La planification de la supply-chain évolue actuellement en terrain inconnu : « Il faut aujourd’hui inventer de nouvelles routines pour piloter la supply-chain. Nous sommes

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passés du mensuel à l’hebdo, voire bi-hebdo ou plus fréquent, pour estimer les besoins et les forecasts », témoigne Stéphanie Rott. Chez Michelin, la direction prend des décisions majeures pour le groupe, à partir d’un S&OP hebdomadaire qu’anime PierreMartin Huet, directeur groupe supply-chain : « Notre pilotage s’appuie sur les informations de chaque région, consolidées au niveau groupe lors d’un S&OP hebdomadaire. Nous surveillons les tendances de vente journalières, les stocks, les scénarios de demande, de reprise des usines, l’impact sur les clients, etc. Il y a un besoin d’alignement colossal de la supply-chain entre les forces commerciales enthousiastes et des directions financières très préoccupées ».

4. GESTION DU CASH AVEC LES STOCKS

Alimenté par de fréquents S&OP, le pilotage du cash fait jouer le levier des stocks dans ces grands groupes. Main dans la main avec la direction financière, la supply-chain joue un rôle clé en la matière. Chez Michelin, le stock, qui représente plus de 4 Md€, est vu comme un réservoir de cash. « Nous pilotons une initiative de réduction des stocks assez importante », témoigne Pierre-Martin Huet.

5. RENFORCEMENT DU DIGITAL

Pour François Martin-Festa, vice-président Digital Customer Experience de Schneider Electric, « cette crise est une opportunité pour les entreprises de repenser certaines priorités. À ce titre, elles doivent se renforcer sur le digital. La supply-chain doit y contribuer, en particulier le digital qui facilite le lien avec les clients quand les infrastructures physiques sont fermées ». De fait, François MartinFesta observe une explosion des visites via les plateformes digitales : « Nous recevons 23 fois plus de visites web que de prises de contact par e-mail, téléphone et sur place. Même s’il est piloté par l’IT ou le marketing, le Web est aussi une vitrine pour la supply-chain, qui peut proposer des informations de livraison, des services, voire bâtir des API pour enrichir le contenu vu par les clients ». Même tendance chez Rexel : « La transformation digitale va se poursuivre durablement, explique Xavier Derycke,

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directeur de la transformation supply-chain Europe. La prise de conscience est forte, les commandes via les webshops et l’EDI ont gagné 8 à 10 % ». Chez LVMH, les ventes s’appuieront davantage sur l’omnicanal : « L’agilité de l’e-commerce a apporté une réponse aux boutiques fermées, se félicite Stéphanie Rott. D’un e-commerce préparé en entrepôt, nous sommes passés par exemple à la préparation de commande depuis le stock de boutiques fermées. Le business d’après-crise sera plus omnicanal ». Le digital, ce sont aussi les logiciels métiers capables d’alimenter les S&OP à partir des données de marché et de la chaîne logistique. Les outils de business intelligence, de prévision-planification tournent à plein régime… avec des modèles inédits.

Pierre-Martin Huet, directeur groupe supply-chain, Michelin.

6. S’ACCOMMODER D’UN SCÉNARIO DE REPRISE INCONNU

Reprise en V, en W, en L…, personne n’a la réponse et il va falloir s’habituer à cette incertitude. « Le sujet n’est pas tant de trouver le scénario de reprise que tout le monde ignore que d’augmenter la résilience de nos supplychains et l’agilité dans le pilotage », tranche Pierre-Martin Huet. Pour François MartinFesta, la crise doit être mise à profit pour simplifier les processus et les pratiques : « Nous procédons à des arbitrages assez profonds de nos priorités et projets. Cette revisite des portefeuilles IT, des projets et des offres, vise à faire plus simple afin de rebondir plus agile ». Yann de Feraudy voit aussi la simplification comme l’une des leçons à tirer de la crise : « Nous devrons apprendre à nous simplifier. Notre réactivité et notre inventivité proviennent de la capacité à trouver des raccourcis. Une réflexion de fond sur la technologie devra également être menée, par exemple le tout automatique dans un entrepôt n’est pas forcément la meilleure solution pour être agiles demain. Il faut aussi réinterroger nos principes de supply-chain, qui nous ont guidés ces 30 dernières années sur le sourcing lointain ». Cette supply-chain agile, résiliente, digitale et également inscrite dans les démarches RSE engagées, s’annonce comme le défi de l’immédiate après-crise sanitaire. n Sylvain Chanourdie

François Martin-Festa, vice-président Digital Customer Experience, Schneider Electric.

Xavier Derycke, directeur de la transformation supply-chain Europe, Rexel.

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Protection des salariés, qui va payer l’addition ?

L’Union TLF et le CNR ont calculé le coût des mesures de protection sanitaire pour les entreprises de transport et de logistique. Une menace supplémentaire sur un secteur fragilisé.

D

ans la sphère du transport, où la masse salariale représente plus de 50 % des charges, les équipements individuels, l’aménagement des locaux et l’adaptation de l’organisation représentent d’importants surcoûts.

Surcoûts pour la production et la productivité Les adhérents de l’Union TLF les ont calculés début mai : les équipements de protection individuelle (EPI) coûtent 2,50 € par jour et par salarié en moyenne, les aménagements des entrepôts logistiques 0,15 € par m2 par mois, et les différentes pertes de productivité (adaptation des process,

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horaires, etc.) jusqu’à -15 %. Il est à noter que l’assurance maladie peut rembourser jusqu’à la moitié des dépenses en matériel de protection, dans la limite de 5 000 €, pour les entreprises de moins de 50 salariés. De son côté, le CNR a fait le calcul pour les routiers. La fourniture des EPI pour les conducteurs et les opérations de nettoyage des cabines représentent un surcoût pouvant aller de 3 € à 32 € par jour et par véhicule, soit de 0,5 % à 6 % du prix de revient standard en fonction du type d’activité. L’observatoire évalue le surcoût d’une situation intermédiaire autour de 13 € par jour, soit environ 2,5 % du prix de revient.

Plan de relance toujours attendu Ces surcoûts « auront des conséquences à moyen et long terme sur l’activité globale, notamment en matière de coûts de manutention et de transport », prévient l’Union TLF, qui à court terme reste dans l’attente d’un plan de relance dédié de la part du gouvernement. Éric Hémar, président de l’organisation professionnelle, a réitéré son appel : « Il faut trouver les solutions pour gérer les surcoûts engendrés par cette crise sans précédent. Nous appelons le gouvernement et l’ensemble des acteurs de la chaîne à nous aider à amortir le choc. C’est vital si l’on veut garder la chaîne logistique debout ». n

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ENTREPRISE

NOMINATIONS

Mars Petcare

L’

actionnaire principal du prestataire logistique suisse, Klaus-Michael Kühne, envisageait une suppression de 20 à 25 % de salariés à l’issue de la crise. La consolidation de l’activité logistique contractuelle de K+N a commencé en France. Le 1er juin, les fonds de commerce de ses entrepôts en Côte-d’Or, Haute-Garonne, Loire-Atlantique et Essonne ont été vendus au spécialiste

© Kuehne+Nagel

La supply-chain de Mars France accueille à sa tête Henri Harfouche. Il succède à Jonathan Jambon, désormais en charge de la stratégie industrielle de Mars Petcare en Europe. Après avoir effectué l’essentiel de sa carrière chez Procter & Gamble au sein de la supplychain France et Benelux, ce Franco-libanais a été directeur de la supplychain de Coty.

Kuehne+Nagel cède 4 sites logistiques à STG du transport frigorifique et de la logistique de produits agroalimentaires STG. Dédiés à l’entreposage et à la distribution de produits frais, ces 4 sites représentent une surface de stockage de près de 55 000 m². Fin 2019, K+N opérait 60 entrepôts en France représentant 1,5 million de m². Le groupe STG conforte ainsi ses positions dans le frais : « Après la reprise de Mitry-Mory en début d’année, cette acquisition installe STG dans la logistique agroalimentaire des produits frais. Déjà présent sur les segments RHF et retail, le groupe STG complète aujourd’hui son offre par la logistique contractuelle au service des industriels de la grande consommation (produits laitiers notamment), dont il devient un acteur majeur en France », se félicite Jean-Paul Onillon, son président-directeur général. n

France Logistique

Constance Maréchal-Dereu a été nommée directrice générale de l’association des acteurs privés de la filière logistique française. Inspectrice des finances depuis septembre 2018, elle a notamment été corapporteur du rapport de Patrick Daher et Éric Hémar, « Pour une chaîne logistique plus compétitive au service des entreprises et du développement durable », remis au Premier ministre en septembre dernier.

4F veut relancer le fret ferroviaire

L

es acteurs du transport ferroviaire de marchandises en France, y compris des chargeurs, se réunissent au sein de l’alliance 4F, « Fret ferroviaire français du futur ». Au cœur de la démarche, un plan de relance à horizon de 10 ans qui sera présenté à l’État avant fin juin. « Avec une part moyenne annuelle de 9 à 10 % dans le

Generix Group France

L’éditeur a nommé Philippe Seguin au poste de directeur général de la nouvelle business unit France. Il a rejoint Generix en 2004, en tant que directeur conseil et services, où il a notamment mené l’évolution des solutions vers le SaaS.

© t3m

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transport terrestre de marchandises depuis dix ans, le fret ferroviaire français stagne en milieu de tableau dans le classement européen du secteur, derrière l’Italie à 14 %, l’Allemagne à 18 %, et loin derrière le duo de tête constitué par l’Autriche et la Suisse avec respectivement 32 % et 35 % », déplorent les acteurs de la filière. Au-delà des mesures de court terme pour aider les entreprises à surmonter les pertes des six derniers mois, la nouvelle alliance 4F ambitionne de doubler la part du ferroviaire dans le transport de marchandises en France, pour passer à 18 % en 2030. Afin d’y parvenir, les membres de 4F comptent sur l’action combinée des opérateurs de fret, du gestionnaire du réseau ferré SNCF Réseau et de l’État. n n° 183 > Juin/Juillet 2020 > Stratégies Logistique


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Yves Rocher intègre le transport à sa politique RSE

E

© Yves Rocher

n 2019, Yves Rocher est devenue une « société à mission », un régime créé par la loi Pacte imposant aux entreprises de définir et d’inscrire dans leurs statuts une « raison d’être ». Pour le créateur de cosmétiques à base de plantes, il s’agit « de reconnecter les hommes à la planète » autour d’une politique RSE étendue. « Jusqu’à présent, le transport n’avait pas bénéficié des mêmes attentions que les produits de la marque, car cela ne faisait pas partie de

notre cœur de métier », admet Sébastien Bellone. « Ce n’est désormais plus le cas », assure le directeur Transport d’Yves Rocher, engagé dans la démarche Fret21 depuis fin avril. Au sein du programme EVE (Engagements volontaires pour l’environnement), initié par le ministère de la Transition écologique et solidaire, l’Ademe et des organisations professionnelles, dont l’AUTF et la CGI (Confédération française du commerce de gros et international), la démarche Fret21 s’adresse plus spécifiquement aux chargeurs. « Elle permet de fixer des objectifs et de disposer d’outils pour calculer objectivement le bilan carbone de nos transports. » Avec l’ambition de réduire de 6 % les émissions de CO2 de ces derniers sur trois ans, la stratégie d’Yves Rocher s’appuie sur trois axes : l’optimisation des chargements, l’emploi d’énergies alternatives et la sélection de prestataires vertueux. n ED

Taux de fret aérien : nouvel indice de référence

C

onnu dans le maritime à travers ses évaluations quotidiennes sur les taux de fret, Baltic Exchange diversifie son offre dans le transport aérien de marchandises avec la création du Baltic Air Freight Index. Ce nouvel indice fournira dans un premier temps des moyennes hebdomadaires sur les taux de fret aériens pratiqués sur 32 liaisons internationales. À l’instar des indices maritimes, le nouvel BAF Index vise à prévenir les éventuels risques et la volatilité des taux de fret lors de la conclusion d’un contrat à terme. Le marché mondial

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NOMINATIONS

ID Logistics Le groupe international de logistique contractuelle a nommé Hervé Montjotin censeur indépendant (administrateur non-votant) au conseil d’administration du groupe. Pdg du groupe SOCOTEC (spécialiste de la gestion des risques) depuis 2016, il a été président du directoire du groupe Norbert Dentressangle (devenu XPO Logistics).

FedEx Express Europe FedEx Express, filiale de FedEx Corp., a nommé Karen Reddington au poste de présidente régionale de FedEx Express Europe et Pdg de TNT. Précédemment présidente de la région Asie-Pacifique, elle sera en charge de plus de 50 000 collaborateurs dans plus de 50 pays.

Gefco Air & Sea

du fret aérien est estimé à 100 Md€ et à 65 Mt par an. Si le mode ne représente qu’un pourcent des volumes transportés à travers le monde, il pèse 35 % en valeur. n

Gefco a nommé Paul-Henri Fréret, à la tête de la division Air & Sea pour renforcer ses secteurs clés que sont l’automobile, l’industrie et la pharma/santé. Paul-Henri Fréret conserve pour le moment sa fonction de vice-président exécutif Asie.

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