Extrait de Stratégies Logistique 182

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NUMÉRO

182 Avril/Mai 2020

INTRALOGISTIQUE

Le micro-fulfillment décolle GUIDE D’ACHAT

Numéro 182 - Avril/Mai 2020 - ISSN 1249-2965 - Prix du numéro : 22 €

Solutions de traçabilité

Covid-19 : Les supply-chains testent leur résistance

@stratlog strategieslogistique.com


SOMMAIRE 3 Édito 6 Crise du Covid-19

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26 Tendances

La logistique monte au front

12 Maritime

Stratégies Logistique > n° 182 > Avril/Mai 2020

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44 Solutions de traçabilité

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36 L’opportunité d’un plan de relance vertueux, durable et logistique

32 Logiciel

14 Entreprise

g strategieslogistique.com

EN COUVERTURE

P. 36

16 Immobilier 18 Reportage Augustin,

Stratégies Logistique > n° 182 > Avril/Mai 2020

Covid-19 : Les supply-chains testent leur résistance

Photo de couverture : © Adobe Stock

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© Michel et Augustin

Michel et Augustin s’est imposé sur l’épicerie et l’ultrafrais, grâce un marketing décalé et des ingrédients de qualité. À l’instar de la production, la marque a opté pour l’externalisation de sa logistique et de ses transports.


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CRISE DU COVID-19

© Stratégies Logistique

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La filière logistique monte au front La crise sanitaire du coronavirus frappe la logistique de façon très contrastée. Si les logisticiens et les transporteurs de l’agroalimentaire et de la pharma y ont gagné en aura médiatique, à juste titre, nombreux sont les sinistrés, tant du côté des chargeurs que de leurs prestataires. En trois semaines, la désorganisation des flux sans précédent a fait place à la stabilisation des acheminements. Premier point d’étape* d’une crise sanitaire devenue systémique.

U * Rendez-vous aussi en pages 36 à 43 pour une première analyse prospective de l’après-Covid-19.

ne crise comparable à celle de 1929, la pire récession depuis 1945… Les images employées par Bruno Lemaire pour décrire l’impact économique de l’épidémie de coronavirus pouvaient paraître alarmistes. Trois semaines après l’entrée en vigueur du confinement, les estimations de la Banque de France et de l’Insee concordent sur

l’ampleur historique de cette crise : les deux institutions ont calculé que le PIB annuel reculerait de 3 points par mois de confinement. Soit une chute du PIB de 6 % au 1er trimestre 2020, plus que les -5,3 % des grèves de mai 1968.

L’industrie au ralenti Dans un point de conjoncture du 9 avril, l’Insee mesure la perte d’activité

à -42 % dans les branches marchandes : « Certains services sont quasiment à l’arrêt (hébergement et restauration), tout comme certaines branches industrielles. À l’inverse, les industries agroalimentaires, pour ne citer qu’elles, fonctionnent à un niveau relativement proche de la normale ». La consommation des ménages a chuté dans le même temps de 35 %.

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Au niveau international, l’OMC prévoit que le commerce mondial des marchandises devrait chuter entre 13 % et 32 % en 2020, alors qu’il avait reculé de 0,1 % en 2019 (en volume). Selon l’organisation internationale, « presque toutes les régions enregistreront des baisses à deux chiffres du volume des échanges en 2020, les exportations les plus touchées étant celles de l’Amérique du Nord et de l’Asie ». Il est probable que le commerce chutera plus brutalement dans les secteurs ayant des chaînes de valeur complexes, notamment l’électronique et les produits automobiles, ajoute l’OMC. De fait, dans un climat économique 2020 déjà dégradé par l’effet du Brexit et des taxes américaines, les mesures sanitaires drastiques imposées le 17 mars en France ont achevé d’ébranler les supply-chains de l’industrie française. Aux difficultés d’approvisionnement, se sont ajoutées la panne brutale de la demande nationale et internationale, ainsi que l’indisponibilité de la maind’œuvre. La crise sanitaire devenait dès lors une crise systémique, un aléa sousestimé (voir pages 36 à 43).

Volume du commerce mondial des marchandises, 2000-2022

Cellule de crise public-privé

Perte d’activité par rapport à la normale

Source : secrétariat de l’OMC

(indice 100 en 2015)

lule opérationnelle pilotée par la Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), pour identifier les points de blocage sur les chaînes logistiques. Cheville ouvrière du ministère des Transports, la DGITM tient un point téléphonique, quotidien dans un premier temps, avec les organisations professionnelles du transport routier et de la logistique, ainsi que les représentants des filières agroalimentaires et

Acheminements alimentaires stabilisés

de l’industrie, notamment via l’AUTF (Association des utilisateurs de transport de fret), et des ministères du Travail et de l’Économie. Ce dialogue « a permis de lever plusieurs freins largement médiatisés : contrôles assouplis des conducteurs, ouverture des lieux de restauration, sanitaires et douches sur les axes routiers, autorisation de circuler et de travailler dans les entrepôts le dimanche, etc. », se félicite Fabrice Accary, directeur général de l’AUTF.

(au 7 avril 2020)

Industrie Dont industrie agroalimentaire

-43 % -5 %

Construction

-88 %

Transports (voyageurs et fret) et entreposage

-64 %

Commerce et réparation

-56 %

Stratégies Logistique > n° 182 > Avril/Mai 2020

Source : Insee

Alors que les plans de continuité d’activité se déclenchent dans les supplychains, les organisations et associations professionnelles se mobilisent. Deux jours avant l’entrée en vigueur du confinement, s’est tenue la première cel-

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Inédites sous cette forme, cette organisation et ces relations directes entre pouvoirs publics et professionnels s’est structurée en parallèle avec la mise en œuvre d’une cellule de crise dédiée à la chaîne logistique alimentaire, rassemblant des industriels agroalimentaires et des enseignes de la distribution. L’enjeu : garantir l’approvisionnement des points de vente en intégrant les 30 millions de repas par jour supplémentaires qui étaient consommés à l’extérieur auparavant ! Deux semaines après la ruée dans les magasins, l’essentiel des décisions destinées à maintenir la robustesse des acheminements de l’ensemble de la filière agroalimentaire a été pris. Les décrets et arrêtés nécessaires ont été


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CRISE DU COVID-19 publiés, et tous les acteurs de la filière, industriels, logisticiens, transporteurs et distributeurs ont travaillé ensemble pour consolider le système d’acheminement. La stabilisation des volumes s’établit à un niveau supérieur d’environ 20 % à ce qu’ils sont habituellement hors crise.

Le prix du transport routier inquiète Ce sujet ne semble pas soulever de difficultés particulières, d’autant que l’absentéisme est en recul de manière sensible dans l’industrie et la logistique, selon l’AUTF. « Les gens reprennent le travail, rassurés par le fait qu’il va y avoir des masques », témoigne Fabrice Accary. L’absentéisme dans la filière agroalimentaire était estimé, notamment dans les entrepôts, à un taux moyen de 15 %, avec des disparités régionales importantes de 5 à 35 %.

Tensions tarifaires dans la logistique alimentaire Les chargeurs grincent des dents face à la hausse de la facture transport. Symbole de ces tensions, le groupe STEF a dû renoncer à augmenter de ses tarifs de 8,5 % au titre d’une « contribution exceptionnelle pour continuer à maintenir [son] activité ». La mesure avait soulevé une bronca sur les réseaux sociaux de la part de nombreux clients. Finalement, le spécialiste de la logistique sous température dirigée a annoncé « surseoir à cette mesure ». Les chargeurs seront néanmoins contactés par leur prestataire logistique, afin de mettre en place un niveau d’offre et de tarif adapté à leurs contraintes et difficultés. STEF pourra par exemple leur proposer des approvisionnements un jour sur deux plutôt que quotidiens. La hausse de tarif pendant la crise restera modérée, assure le groupe. Chez les autres transporteurs, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Et parfois avec une hausse bien plus importante. De façon générale, l’AUTF estime que le déséquilibre actuel des flux de transport routier conduit à des hausses de prix entre 5 et… 100 %.

Parallèlement, la question des prix du transport routier a pris de l’ampleur au sein des comités de gestion de crise. Plusieurs annonces d’augmenta-

L’e-commerce « gagnant » de la crise ? Selon la Fevad, 94 % des sites français du B to C, B to B et C to C sont toujours ouverts, mais 76 % ont enregistré un recul des ventes depuis le 15 mars (étude réalisée du 23 au 25 mars). Plus d’un tiers d’entre eux a dû réduire son activité. 8 % des enseignes de magasins ont même interrompu leur activité e-commerce, deux fois plus nombreuses que les pure players. Plus d’une entreprise sur trois estime qu’elle ne pourra pas résister économiquement plus de trois mois. Les plus fortes hausses de commandes sont enregistrées dans l’alimentaire, la téléphonie-informatique, les produits culturels et éducatifs, tandis que les ventes reculent dans la mode et l’équipement. Les sites marchands ont déclaré à 40 % avoir déjà des difficultés d’approvisionnement. 85 % notent aussi un allongement des délais pour livrer les colis aux cyberacheteurs.

tions tarifaires, parfois substantielles, ont été faites par des prestataires logistiques (voir encadré ci-dessus). Certains chargeurs s’en sont inquiétés, parfois directement auprès de la ministre des Transports, à l’instar des PME fournisseurs de la grande distribution. Une autre difficulté logistique est en train d’apparaître dans les ports maritimes, celle de l’engorgement des terminaux à conteneurs par des conteneurs y restant stockés du fait de l’arrêt de certaines supply-chains (lire notre article en page 12).

Préparer la reprise Début avril, l’administration a demandé aux entreprises de dresser la liste des mesures qu’elle devra prendre pour les aider à sortir de la crise… le moment venu.

À la demande de l’AUTF faite à l’administration sur les pistes envisagées à terme pour le déconfinement puis pour la relance économique, les pouvoirs publics ont répondu par une question : « Qu’attendez-vous de l’État pour vous aider le moment venu dans ces démarches ? », indique Fabrice Accary. Pour y répondre, l’association professionnelle sollicite ses adhérents en vue de dresser un inventaire des mesures, législatives ou non, de nature à les aider à sortir de la crise. Cela, dans la perspective d’un rééquilibrage des flux, et notamment des flux maritimes, qu’il faut envisager comme relativement long après la sortie du confinement. Un temps qui paraîtra d’autant plus long que la trésorerie s’épuise. n LB/SC/ED

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MARITIME

Terminaux portuaires encombrés

Si l’activité portuaire se poursuit en France, l’arrêt de certaines supply-chains encombre les terminaux de conteneurs.

L

es agents maritimes, les consignataires et les commissionnaires de transport demandent aux chargeurs/importateurs de ne pas interrompre les flux de livraison des marchandises, et donc de réceptionner et enlever les conteneurs bloqués sur les terminaux. En effet, la fermeture d’usines, de magasins et entrepôts a provoqué l’arrêt de chaînes logistiques entières, y compris des services de gestion des acheminements de conteneurs maritimes à l’import. Dans bien des cas, les commissionnaires se retrouvent sans directives de la part des chargeurs et ne savent pas quoi faire de la

© PortSynergy EuroFos

marchandise, qui reste là où elle se trouvait au moment de l’arrêt de l’activité. Au risque d’engorger les plateformes, s’ajoute celui de manquer de conteneurs vides dans la chaîne logistique, sans compter le paiement de frais supplémentaires.

d’en tenir la comptabilité matières. Selon la DGDDI : « Ces dispositions, qui n’ont pas vocation à perdurer, pourront être étendues aux opérateurs non OEA au cas par cas, au regard du contexte local, sous réserve que lesdits opérateurs bénéficient déjà d’une autorisation d’IST ».

Délais de stockage allongés

L’activité portuaire se poursuit

En réponse, la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) a décidé, jusqu’à nouvel ordre, de permettre aux marchandises déjà dédouanées et non évacuées des installations de stockage temporaire (IST) d’y séjourner jusqu’à leur sortie définitive. Le délai maximum de séjour des marchandises non dédouanées est allongé de 90 à 120 jours. Quant aux opérateurs disposant du statut d’OEA (opérateur économique agréé), ils peuvent stocker des marchandises non-Union en suspension de droits, taxes et mesures de politique commerciale dans des lieux non agréés préalablement par la douane, sous réserve d’en informer les douanes et

Du point de vue opérationnel, l’ensemble des ports maritimes français ont pris des mesures permettant d’assurer en sécurité et sûreté le fonctionnement logistique et industriel. « Il y a une bonne coordination entre les opérateurs publics et privés pour adapter l’organisation du travail, afin que le personnel continue de travailler en évitant les contacts. Cela garantit ainsi que l’ensemble des services sont fonctionnels », assure JeanPierre Chalus, délégué général de l’Union des ports de France (UPF). Pour le moment. Car « la situation évolue de jour en jour et nul ne peut pas savoir ce qu’il en sera demain », admet-il. n LB/TB

Les ferries transmanche sur le pied de guerre

L

e port de Calais est en première ligne pour assurer le transit de marchandises prioritaires. Sur la ligne Calais-Douvres, P&O Ferries a renforcé ses opérations de fret, pour assurer le lien vital de marchandises entre la France et le Royaume-Uni. « Le Royaume-Uni dépend de P&O Ferries pour une grande partie de ses aliments frais, ainsi que des importations de médicaments et d’autres fournitures vitales », souligne un communiqué de la compagnie de ferries. En moyenne, P&O Ferries transporte 25 000 chargements de fret entre la France et la Grande-Bretagne.

Le processus d’enregistrement et de chargement a été modifié pour éviter tout contact direct. Les protocoles de nettoyage ont été intensifiés sur les navires, qui sont également passés de la climatisation à l’air frais. De son côté, la compagnie bretonne Britanny Ferries a suspendu plusieurs de ses traversées entre la France, l’Espagne, le Royaume-Uni et l’Irlande, et ne transporte plus que des marchandises. « Une activité réalisée à perte, alors que 80 % de son chiffre d’affaires de 444 M€ provient du transport de passagers. On va attendre du gouvernement français

© P&O Ferries

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et du gouvernement britannique qu’ils nous compensent », a indiqué Christophe Mathieu, Pdg de l’entreprise. Seuls cinq navires sur les douze que compte la compagnie maritime sont actuellement exploités pour transporter du fret, essentiellement depuis l’Angleterre vers la France. n n° 182 > Avril/Mai 2020 > Stratégies Logistique


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Les chargeurs perdent la bataille des consortia maritimes

L’exemption aux règles de concurrence dont bénéficient les consortia et les alliances maritimes dans la ligne régulière est prolongée de 4 ans, jusqu’au 25 avril 2024.

T

© DR

el est le verdict rendu le 24 mars par la Commission européenne malgré l’opposition de plusieurs organisations du transport et de la logistique, dont l’European Shipper’s Council rassemblant les chargeurs. Reconduit sans modification, le règlement d’exemption autorise « les accords conclus entre compagnies maritimes dans le but d’exploiter en commun des services et de participer à des coopérations opérationnelles permettant de réaliser des économies d’échelle et de mieux utiliser l’espace sur les navires ». Les armateurs peuvent ainsi acheter ou échanger des capacités sur les navires des partenaires, mutualiser des chargements, des conteneurs, des installations portuaires ou encore des moyens opérationnels, à hauteur de 30 % des volumes transportés du marché. Ce règlement, qui ne doit permettre en théorie qu’à « l’ajustement des capacités en réponse aux fluctuations de l’offre et de la demande », pourrait servir à fixer des prix, s’attribuer certains marchés ou fixer des capacités.

Une analyse qui interpelle Pour justifier sa décision, la Commission estime que le règlement « génère des gains d’efficacité pour les transporteurs qui peuvent mieux utiliser la capacité des navires et offrir plus de connexions ». Et de conclure : « les gains d’efficacité se traduisent par une baisse des prix et une amélioration de la qualité des services offerts aux consommateurs ». Étonnamment, compte tenu de la très forte volatilité des taux de fret dans le maritime, la Commission évalue à 30 % la baisse du prix pour le transport d’un conteneur (EVP) au cours des dernières années, sans impact sur la qualité de service. n ED Stratégies Logistique > n° 182 > Avril/Mai 2020

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