Agronews, Edition Réunion-Mayotte/océan Indien, N°8

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AGRONEWS Édition Réunion-Mayotte / océan Indien

le journal du cirad en outre-mer

DOSSIER

ONE HEALTH, UNE SEULE SANTÉ POUR L'HOMME ET L'ANIMAL

Numéro 8 # JUILLET 2018


EDITO

SOMMAIRE

R.

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La recherche agronomique, levier des politiques publiques ©

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DOSSIER

One health, une seule santé pour l'homme et l'animal

D

éjà trois ans, depuis la signature en 2015 de nos engagements, pour mener à bien nos activités de recherche et d’innovation. Trois ans pour faire avancer les connaissances et lever des verrous scientifiques et techniques, au service des agricultures d’aujourd’hui et de demain, de La Réunion, Mayotte et en océan Indien. Ce nouveau numéro d’AGROnews est l’occasion de dresser un premier bilan et de saluer tous les partenaires qui ont contribué à nos activités. Merci à nos bailleurs – Europe, Etat, Odéadom, AFD, Région, Conseils départementaux de La Réunion et de Mayotte et autres – sans qui rien ne serait possible.

(pages centrales, numérotées de I à IV)

LE CIRAD À LA RÉUNION

INNOVATION

Page 3 Extension du pôle de protection des plantes. Fin des études et début du chantier

Page 11 Marion Collinet à la tête du laboratoire d’analyses agronomiques

RECHERCHE

Pilotage de la fertilisation azotée. L’azote diagnostiqué par spectrométrie proche infrarouge

Page 4 Sous serre. Des acariens pour protéger les poivrons

Face aux grands enjeux sanitaires, aux défis de bio-économie circulaire, d’adaptation nécessaire aux changements globaux, de transition agro-écologique et de protection de notre biodiversité, le champ de la recherche et des transformations par l’innovation est vaste. Mais il nous faut agir vite car les impacts sont là et posent déjà problèmes majeurs sur nos territoires.

Lutte biologique dans les cultures maraîchères. Découverte de deux punaises indigènes

Les acteurs publics sont confrontés à la réalité de ces situations changeantes et doivent prendre les bonnes décisions au quotidien. La recherche se pose en partenaire pour expliquer objectivement les situations, éclairer les débats, modéliser les situations, établir des scénarios de sortie de crise ou trouver des solutions adaptées à la situation de demain.

Page 6 Victoria contre champignons. Aider l’ananas à lutter contre les taches noires

Le Cirad œuvre dans ce sens ; nous multiplions les approches innovantes et de rupture dans les domaines de la santé, de la production agricole, de l’aménagement du territoire et, plus globalement, de la protection de nos territoires ultramarins, toujours pour un développement rural plus harmonieux et durable. Ces recherches portent leurs fruits et nous sommes fiers aujourd’hui de vous en présenter les avancées les plus marquantes à La Réunion et à Mayotte. Dans ce 8e numéro d’AGROnews, nous consacrons un dossier central aux progrès réalisés dans le domaine de la santé animale et humaine dans une approche « One Health ». Cette approche est développée en collaboration étroite avec nos partenaires régionaux dans l’océan Indien, échelle à laquelle il faut agir pour prévenir les risques. Cette approche régionale de l’ensemble de nos activités via nos réseaux de coopération en océan Indien vous sera d’ailleurs présentée, dans un prochain numéro spécial. En attendant, bonne lecture ! Eric Jeuffrault, directeur régional du Cirad pour La Réunion-Mayotte et les pays de la COI (hors Madagascar) Les projets du Cirad à La Réunion sont financés par l’Union européenne (Feader et Feder), la Région, l’État et le département de La Réunion

MINISTÈRE

Page 5 Lutte biologique contre la vigne marronne. « Douze fois moins onéreuse que la lutte mécanique et chimique »

La canne analysée en continu. Quand l’infrarouge mesure le sucre Page 12 Sélection variétale. Ernestine, l’oignon nouvelle génération Variétés résistantes. De futures aubergines résistantes au flétrissement Page 13 Outils d’aide à la décision. Des Idéa à la pelle Pour étaler la période de production. Diversifier les variétés de mangue

Expérience virtuelle. Une maquette 3D d’un manguier pour optimiser sa production

À MAYOTTE

Page 7 Agro-écologie. Mieux accompagner la transition de l’île

Page 14 Érosion des sols. Lutter contre l’envasement du lagon

Page 8 Santé. Lamp : l’outil de diagnostic tout terrain du futur

Contre les mouches des fruits. Le succès des filets anti-insectes

Bio-économie circulaire. Transformer la biomasse en engrais Page 9

Page 15 Défi animal. Soutenir les filières d’élevage Santé publique. La fièvre de la Vallée du Rift n’est plus un problème à Mayotte

Biomasse-énergie. Du gaz à partir des débris de bois Page 10 Fertilisation. Le phosphore et l’azote avec jugeote

EN CHIFFRES FOCUS Page 16

Directeur de publication et coordination : Eric Jeuffrault

Photo de couverture : René Carayol © Cirad

Conception éditoriale et relecture : Sophie Della Mussia

Conception graphique et réalisation : Patricia Doucet

Textes : Laurent Decloitre, Renaud Levantidis avec la contribution d’Enric Frago, Jean-Marie Lopez, Nadège Nanguet, Frédéric Normand, Pierre Todoroff, Jonathan Vayssières et de l’ensemble des équipes du Cirad et de ses partenaires cités dans le journal.

Impression : Impact Imprimerie, Saint-Gély-du-Fesc (34). Imprimé sur Cocoon offset 90 g en fibres recyclées avec des encres végétales

Direction régionale du Cirad pour La Réunion-Mayotte et les pays de la COI (hors Madagascar) Station de la Bretagne - 40, Chemin de Grand Canal - CS 12014 97743 Saint-Denis Cedex 9 - Ile de La Réunion Tél. standard : +262 (0)2 62 72 78 00 - Tél. direction : +262 (0)2 62 72 78 40 Fax : +262 (0)2 62 72 78 01 Courriel : dir-reg.reunion@cirad.fr - Site web : http://reunion-mayotte.cirad.fr

Le Cirad est membre du RITA Réunion

Le Cirad est membre fondateur de MUSE

DES

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AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET EUROPÉENNES

AGRO NEWS > Edition Réunion-Mayotte / océan Indien • Numéro 8 - juillet 2018


Le cirad à la réunion

[4]

Le pôle de protection des plantes va faire l'objet d'une rénovation et d'un agrandissement.

[3] [1]

[2]

Le Pôle de protection des plantes, à Saint-Pierre, doit s’agrandir de quatre nouveaux espaces. Les études, lancées en 2016, laissent place au chantier qui débutera début 2019.

EXTENSION DU PÔLE DE PROTECTION DES PLANTES

Fin des études et début du chantier

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our faire face à la croissance des activités et à l’augmentation des effectifs au sein du Pôle de protection des plantes (3P), le Cirad a décidé, en partenariat avec la Région Réunion et l’Etat, d’investir dans une réhabilitation et une extension de ses bâtiments. « L’existant sera revisité pour conserver une cohérence scientifique, technique et partenariale d’ensemble », précise Eric Jeuffrault, directeur régional du Cirad à La Réunion-Mayotte. Vont ainsi sortir de terre quatre modules. Au total, 1 000m2 de nouveaux laboratoires ainsi que 1 100m2 de locaux tertiaires (bureaux et salle de conférence bioclimatiques). [1] Un premier espace sera dédié à la biologie moléculaire. Cette discipline est devenue incontournable en santé des plantes, pour caractériser la diversité génétique des plantes cultivées ou naturelles, pour identifier les bioagresseurs afin de mieux les contrôler, ou encore pour

exploiter des gènes de résistances des plantes cultivées vis à vis de ces derniers. L’espace sera doté de nouveaux outils scientifiques, tels qu’un séquenceur capillaire haut débit et de nouveaux automates,… [2] Un deuxième module sera destiné à la conservation des ressources génétiques, notamment en lien avec les activités du Centre de Ressources Biologiques Vatel ou de l’Herbier Universitaire de la Réunion, soit plusieurs milieux d’échantillons historiques ou conservés pour la diffusion. Il s’agira de proposer à la communauté scientifique un accès aux ressources génétiques dans un espace unique, conçu pour conserver durablement ces précieuses ressources. L’espace comprendra une salle de collections sèches à température ambiante, une salle d’observation et de numérisation, une salle de préparation avant mise en collection et une

chambre froide pour les collections humides en alcool. [3] Le troisième espace se consacrera à l’écologie « chimique ». Les composés chimiques naturels (phéromones…) sont essentiels à toute interaction entre les insectes, leurs plantes-hôtes et leurs ennemis naturels. L’étude de ces interactions ou « écologie chimique » permet non seulement d’explorer et de maintenir la biodiversité sur l’île de La Réunion, mais également d’élaborer de nouvelles méthodes de lutte contre les insectes ravageurs ou les espèces exotiques envahissantes. Elle nécessite des compétences pluridisciplinaires en biochimie, neurophysiologie et écologie. [4] Enfin, une salle de conférence modulaire pourra accueillir jusqu’à 140 personnes, permettant ainsi l’organisation de colloques internationaux. En savoir plus sur le 3P : https://3p.cirad.fr/

La parole à nos partenaires

« Une rechercheinnovation permanente »

« Le grand défi posé à l’agriculture mondiale consistera à nourrir 9,7 milliards d’individus en 2050 selon l’ONU. A La Réunion, la satisfaction des besoins d’une population en forte croissance, plus d’un million d’habitants en 2037 selon l’INSEE, est également une priorité des pouvoirs publics et des acteurs agricoles. Mais il ne s’agit pas que d’un défi démographique. La question est également de savoir dans quelle mesure nous pouvons améliorer notre système agricole afin de permettre aux Réunionnais de se nourrir sainement. L’objectif est de garantir une agriculture respectueuse de l’environnement et de notre santé. Par ailleurs, les dangers sanitaires provenant de l’extérieur et qui font courir des risques économiques énormes à nos exploitants agricoles doivent être contenus ; de même, les effets attendus du changement climatique sur les pratiques agricoles doivent être anticipés. Une condition essentielle à la réussite et au développement de notre agriculture réside dans une recherche-innovation permanente. Elle doit prendre en compte les exigences des consommateurs, la préservation d’un environnement vulnérable et la nécessité d’assurer un revenu décent à nos agriculteurs. La collectivité départementale accompagne les acteurs du monde rural et agricole. À cet égard, nous encourageons vivement le Cirad, au travers d’un partenariat renforcé avec les acteurs locaux et régionaux, à œuvrer dans ce sens. »

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Didier ROBERT, Président du Conseil régional de La Réunion

Nous travaillons ces dernières années avec l’équipe régionale à doter La Réunion d’un nouveau modèle de développement qui permette de concilier économie et écologie. Un modèle de bio-économie compétitive où la prise en compte de la préservation de l’environnement est considérée non pas comme une contrainte mais comme une opportunité. Cet état d’esprit imprègne chacune de nos actions dans l’ensemble de nos champs de compétence. La Région a engagé des mesures volontaristes et des investissements importants pour faire avancer La Réunion sur les sujets de l’innovation, du développement des énergies renouvelables, de l’adaptation au changement climatique ou encore de la préservation de notre biodiversité exceptionnelle.

© Consei régional Réunion

© Conseil départemental Réunion

Cyrille MELCHIOR, Président du Conseil départemental de La Réunion

« Un développement durable pour nos territoires »

Sur cette voie d’une évolution positive pour l’avenir et pour les générations futures, le travail de recherche agronomique du Cirad constitue un élément indispensable pour réussir à élaborer des politiques publiques qui assurent à terme un développement durable pour les territoires. Nous pouvons réussir collectivement à amener notre île au niveau de développement dont elle a besoin tout en préservant son environnement et son authenticité. C’est le pari que je fais et que nous sommes en train de relever, avec l’équipe régionale et avec l’ensemble des acteurs.

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LUTTE BIOLOGIQUE DANS LES CULTURES MARAICHÈRES

Des acariens pour protéger les poivrons

Découverte de deux punaises indigènes

une découverte à La Réunion. L’acarien était présent dans les serres et semblait s’en prendre aux thrips. Aussi, le Cirad a-t-il mené de nombreux tests, en milieu contrôlé, pour le vérifier. D’abord dans des boîtes de Pétri, puis dans des bouteilles en plastique accrochées sur des plants de poivron, dans des cages et enfin sous serre. « Les poivrons sont moins attaqués et il y a plus de biomasse sur chaque plant », constate Enric Frago. Des résultats prometteurs qui doivent encore être consolidés avant que la biofabrique La Coccinelle puisse se lancer dans une production de masse à destination des producteurs de concombres et de poivrons. Le contrôle biologique des aleurodes, autres grands ravageurs des serres de tomate, avec des guêpes parasitoïdes et des punaises prédatrices, est déjà une réalité pour les maraîchers réunionnais. Ces premiers travaux sur les acariens représentent donc une étape supplémentaire dans la protection biologique intégrée des cultures.

Amblyseius swirskii. © A. Franck, Cirad

LA PROTECTION BIOLOGIQUE, UN ENJEU POUR L’ÎLE

La protection biologique des cultures sous abri est un enjeu à La Réunion. D’une part, les consommateurs recherchent des légumes et fruits sans pesticide ; d’autre part, de plus en plus de produits phytosanitaires sont interdits. Enfin, des résistances à plusieurs substances chimiques sont apparues chez les insectes et les ravageurs. Mais pour que la lutte biologique soit efficace à La Réunion, il faut que l’île ait sa propre production d’arthropodes : comme ce sont des organismes vivants, l’importation d’auxiliaires exotiques pourrait comporter des risques pour la biodiversité réunionnaise.

Proprioseiopsis mexicanus est un acarien indigène déjà présent naturellement dans les serres réunionnaises. © A. Franck, Cirad

C’est pourquoi, depuis plus de cinq ans, la biofabrique Coccinelle, l’institut technique Armeflhor, la FDGDON* et le Cirad collaborent afin de trouver dans la faune native de l’île des auxiliaires avec un fort potentiel régulateur des populations d’insectes ravageurs.

© A. Franck, Cirad

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roprioseiopsis mexicanus et Amblyseius swirskii sont-ils les futurs sauveurs des serres réunionnaises ? Ces deux acariens s’en prennent aux thrips des genres Frankliniella et Thrips, deux ravageurs qui attaquent les poivrons sous abri et dont les exploitants ont bien du mal à se débarrasser. « Des premiers tests en laboratoire et dans les serres montrent que ces acariens pourraient être des bons candidats pour contrôler les thrips », s’enthousiasme Enric Frago, chercheur au Cirad au Pôle de protection des plantes. L’Amblyseius est déjà connu en Europe et utilisé dans le biocontrôle ; mais sera-t-il aussi efficace en milieu tropical ? Quant au Proprioseiopsis, c’est

Leur découverte dans les cultures maraîchères de La Réunion a été fortuite, mais leur intérêt a très vite été perçu. Orius naivashae et Cyrtopeltis callosus, deux espèces de punaises, sont des prédateurs « potentiellement intéressants dans des programmes de lutte biologique intégrée ». L’Orius a été observé à Montvert-les-Bas, sur des poivrons où il s’alimentait de Thrips, un ravageur bête noire des agriculteurs. La punaise a d’ailleurs déjà été étudiée en Afrique du Sud et d’autres espèces d’Orius sont déjà utilisées comme agent de lutte biologique sous serre en France métropolitaine notamment. Quant au Cyrtopeltis, l’espèce a été découverte sur des plants de Datura, à Ligne Paradis et à Saint-Leu. Mais la biologie de cette punaise est « complètement inconnue, et les connaissances taxonomiques sur ces deux familles sont très fragmentaires ».

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Le Cirad et la biofabrique La Coccinelle viennent d’identifier deux espèces d’acariens prédateurs, qui pourraient lutter contre les thrips, ravageurs des poivrons sous serre.

Orius naivashae a été observé sur des poivrons en train de s’attaquer à des Thrips.

Pour autant, les entomologistes de La Coccinelle, du Cirad et de l’Inra estiment à ce jour que les deux espèces font partie de la faune autochtone de l’île et seraient passées « inaperçues pendant longtemps ». Des prospections supplémentaires seront nécessaires pour connaître leur distribution et leur abondance exactes. L’utilisation en lutte biologique des deux espèces nécessite de vérifier leur régime alimentaire, leurs performances reproductives, etc. Ces éléments conditionneront non seulement leur efficacité dans le contrôle des ravageurs mais aussi d’éventuels dégâts sur la culture elle-même. Si des chercheurs sud-africains ont conclu que l’Orius présente un intérêt potentiel pour lutter contre les Thrips, ces punaises sont aussi des prédateurs assez généralistes capables aussi de s’alimenter de pollen ou de sucs végétaux. Cependant, des dégâts sur cultures n’ont jamais été signalés avec les espèces du genre Orius. En revanche, la prudence est de mise avec le Cyrtopeltis. En effet, ce dernier appartient à une tribu de Miridae, les Dicyphini, dont certains membres sont connus pour leur zoophytophagie. Ce comportement permet à certaines espèces, comme Nesiocoris tenuis, de s’alimenter à la fois en consommant des insectes ou en piquant les plantes, et ils peuvent provoquer des dégâts sur les cultures. En revanche Nesidiocoris volucer, autre membre des Dicyphini, ne s’attaque lui jamais aux plantes et est désormais élevé par La Coccinelle comme agent de lutte biologique. Dans ces conditions, la recherche, autour de ces deux punaises, ne fait que commencer. Mais qui sait, un jour, elles remplaceront les produits chimiques dans nos serres !

*Fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles

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© A. Franck, Cirad

Les dernières découvertes d’espèces indigènes susceptibles d’être utilisées dans des programmes de protection biologique à La Réunion sont prometteuses. Cyrtopeltis callosus a été découvert sur des plants de Datura à une densité de l’ordre de dix adultes par plant, auxquels il faut ajouter différents stades larvaires.

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RECHERCHE

SOUS SERRE

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RECHERCHE

LUTTE BIOLOGIQUE CONTRE LA VIGNE MARRONNE

« Douze fois moins onéreuse que la lutte mécanique et chimique » © C. Dedans

Cathleen Cybèle vient de soutenir une thèse* à l’Université de La Réunion, qui dresse le bilan de la lutte biologique contre la vigne marronne, une ronce envahissant les milieux naturels réunionnais. QUELLE ÉTAIT LA SITUATION DANS LES ANNÉES 80-90 ?

L’ONF luttait chimiquement et mécaniquement contre la ronce Rubus alceifolius, une plante exotique envahissante à La Réunion, connue sous le nom de vigne marronne et raisin marron. Cette lutte était peu efficace, aussi l’office a-t-il demandé à l’Etat français l’autorisation de se lancer dans la lutte biologique. En 1996, le Cirad remporte l’appel d’offres et propose l’introduction d’une tenthrède de Sumatra, la Cibdela janthina. POURQUOI CET INSECTE, QUE LES RÉUNIONNAIS VONT VITE SURNOMMER LA « MOUCHE BLEUE » ?

LE CIRAD A-T-IL PRIS TOUTES LES PRÉCAUTIONS AVANT DE LA LÂCHER DANS LA NATURE ?

Oui, la tenthrède a été étudiée des années d’abord dans son pays d’origine puis en laboratoire de confinement, pour vérifier notamment ce que mangeait ses larves. La préfecture a autorisé le lâcher en 2006, mais celui-ci n’a été effectif qu’un an plus tard. Comme il y avait beaucoup de ressources – des milliers d’hectares de vigne marronne, l’insecte a vite pullulé et beaucoup de Réunionnais ont pu l’observer.

© A. Franck, Cirad

L’insecte adulte est très remarquable par sa couleur bleue métallique, mais ce sont les larves qui se nourrissent exclusivement de Rubus et sont particulièrement friandes de la vigne marronne. L’insecte d’origine tropicale est moins efficace au-dessus de 800 mètres d’altitude et de ce fait, il ne s’attaquerait pas à une espèce endémique de Rubus vivant dans les hauts de La Réunion. C’est au stade larvaire que la tenthrède Cibdela janthina dévore la vigne marronne.

PUIS LA POLÉMIQUE A DÉBUTÉ…

Les apiculteurs ont cru que la mouche bleue concurrençait les abeilles en train de butiner, notamment les letchis et les baies roses. Le Cirad a alors mené des tests. Il a été prouvé que les deux insectes cohabitaient sans se gêner et que la baisse de production de miel en 2008-2009 n’était pas liée à la présence des adultes de tenthrèdes. J’ai comparé les surfaces de Rubus sur deux communes de l’Est, la Plaine-desPalmistes et Saint-Benoît, entre 1997 et 2016, à moins de 800 mètres d’altitude. Si l’on en était resté à la lutte mécanique, la superficie occupée par la vigne marronne aurait progressé de 3,5 % (en hectare par an) en forêt, alors qu’avec la lutte biologique, la surface a au contraire diminué de 4,9 %. Près des champs de canne, le différentiel est plus impressionnant encore : la progression aurait été de 5,3 % sans la mouche bleue ; grâce à l’insecte, on a assisté à une diminution de 17,2 %. Le projet de lutte biologique contre la vigne marronne a donc bien fonctionné, on le voit clairement sur les cartes. Par ailleurs, la lutte biologique s’est avérée douze fois moins onéreuse que la lutte mécanique et chimique.

© A. Franck, Cirad

DIX APRÈS, QUEL EST LE BILAN DE L’OPÉRATION ?

Au stade adulte, la tenthrède Cibdela janthina ressemble à une « mouche bleue » d’où son dénominatif à La Réunion.

AUJOURD’HUI, ON NE VOIT PLUS DE TENTHRÈDE…

C’est normal la vigne marronne a diminué, les tenthrèdes ont moins à manger, elles ne se multiplient donc plus autant. Y-A-T-IL UN RISQUE QU’ON RETROUVE LA VIGNE MARRONNE, FAUTE DE PRÉDATEUR ?

* Analyse socio-économique de la gestion et du contrôle des plantes envahissantes dans l’archipel des Mascareignes. Thèse soutenue à l’université de La Réunion en mai 2018.

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© G. Lebreton, Cirad

La tenthrède est toujours là mais aujourd’hui en dessous de 800 m en équilibre avec sa plante hôte la vigne marronne, il faut maintenant poursuivre l’étude de la reconstitution des forêts et faire de la restauration avec des plantes endémiques là où elles ont disparu. Hélas, d’autres plantes exotiques envahissantes sont aujourd’hui préoccupantes : la liane papillon, l’ajonc d’Europe et là aussi, il faudra penser à la lutte biologique mais en tenant compte des enseignements de la crise de la « mouche bleue ». Après le passage de Cibdela janthina, la vigne marronne est totalement défoliée et finit par mourir.

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RECHERCHE

VICTORIA CONTRE CHAMPIGNONS

« Aider l’ananas à lutter contre les taches noires »

LE POINT LLET, I H C C R A AVEC M CIRAD U A R U E H CHERC SSA, A N G I V N O ET MAN TE N A R O T C O D

La maladie des taches noires est très répandue sur l’ananas. Le Queen Victoria y est particulièrement sensible à La Réunion. Marc Chillet, chercheur au Cirad, et Manon Vignassa, doctorante, étudient les moyens de le stimuler pour mieux lutter contre les champignons destructeurs à l’origine de la maladie.

© L. Decloitre

Une fois ouverts, les ananas présentent parfois des parties marron, qui rebutent le consommateur réunionnais. De quoi s’agit-il ? On parle de la maladie des taches noires. Deux champignons, présents dans les sols, en sont responsables : le Fusarium ananatum et le Talaromyces stollii. Notre Queen Victoria y est très sensible. Comment faire pour lutter contre cette infestation ? Grâce à nos recherches, on sait que les taches noires apparaissent davantage en hiver austral dans les zones pluvieuses qu’en été dans les zones sèches. De même, la maladie est plus fréquente si l’on pousse trop l’ananas avec des engrais azotés. Ces premiers éléments sont précieux pour les exploitants. Mais il n’y a pas moyen d'éradiquer la maladie ? Les Américains ont créé une variété d’ananas très résistante, le MD2. Mais il ne présente pas les mêmes qualités gustatives que notre ananas péi. On s’attache donc à rendre le Victoria apte à se défendre contre l’agresseur. Comment comptez-vous y parvenir ? Nous étudions les interactions entre les pathogènes et l’hôte. Pour simplifier, d’un côté, les champignons envoient des enzymes destructeurs, de l’autre, l’ananas sécrète des polyphénols pour se défendre. Notre objectif est de parvenir à stimuler ces mécanismes de défense. On peut le faire avec des produits de synthèse, très proches de ce que produisent les végétaux euxmêmes, comme le méthyl jasmonate ou l’acide salicyclique. Autre voie : étudier l’écologie microbienne existant dans les cavités florales de l’ananas, là où attaquent les champignons. Et chercher s’il y des organismes naturellement présents qui pourraient venir en aide à l’ananas.

La maladie des taches noires de l’ananas est causée par deux champignons, présents dans les sols. © Cirad

Vous pensez obtenir des résultats concluants ? Tout à fait. L’analyse biochimique des différentes molécules devrait nous permettre de proposer des solutions aux exploitants dans un futur proche.

EXPÉRIENCE VIRTUELLE

Une maquette 3D d’un manguier pour optimiser sa production >

L’organisation spatiale des branches et feuilles du manguier joue un rôle majeur dans son développement et la production de fruits. Partant de là, des chercheurs du Cirad tentent de décrypter la mise en place de cette architecture. À cet effet, ils ont élaboré une représentation virtuelle d’un manguier. « Nous avons digitalisé entièrement un arbre adulte », précise Frédéric Boudon. Une seconde méthode a été employée, utilisant la technologie LiDAR, en partenariat avec l’entreprise réunionnaise Arcad Ingénierie pour scanner le manguier et son environnement. Grâce à ce genre de maquettes, les chercheurs peuvent simuler et étudier l’interception de la lumière par les feuilles et mesurer la photosynthèse, essentielle pour le rendement et la qualité des fruits. D’autres expérimentations virtuelles en cours ont pour but de simuler les effets de la taille sur la croissance végétative, la floraison et la production de fruits. A terme, l’idée est de proposer un outil virtuel pédagogique d’aide à la conduite du manguier et de prédiction de sa production.

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Un scan laser du même manguier obtenu par la technologie Lidar. Des millions de points sont générés et échantillonnent la surface de l’arbre.

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Reconstruction de la structure ligneuse du manguier. Les couleurs indiquent l’âge des pousses.

Simulation de l’interception de la lumière par les différentes feuilles et branches du manguier. Ces informations permettent de calculer la photosynthèse réalisée dans chacune des parties de l’arbre et donnent des indications sur sa croissance future et sa production.

Au pied de l’arbre se trouve l’appareil qui émet les 3 champs magnétiques orthogonaux permettant de déterminer une position dans l’espace.

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RECHERCHE

AGRO-ÉCOLOGIE

Mieux accompagner la transition de l’île

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ous les exploitants agricoles, ne serait-ce qu’en raison des contraintes réglementaires ou économiques, ont tendance à réduire leurs intrants chimiques. C’est le cas des agrumiculteurs de La Réunion, rencontrés ces deux dernières années par Marie Dupré, thésarde au Cirad. L’agronome de 25 ans s’intéresse à la transition agro-écologique ; elle a constaté que des exploitants « se passent des produits de synthèse, de façon progressive ou en rupture totale avec leurs anciennes pratiques culturales », mais que d’autres « abandonnent au contraire le bio et reviennent au conventionnel ». Cette diversité de formes de transition dépend en fait des contraintes propres à chacune des 31 exploitations qu’elle a étudiées.

chercheurs au Cirad, et Marie Dupré se sont attelés à la réalisation d’un outil à destination des décideurs locaux. L’algorithme vise à prévoir les conséquences des mesures publiques sur les différentes filières agricoles, justement en matière d’ « écologisation » des exploitations. Sachant qu’une même aide peut avoir des répercussions différentes selon les agriculteurs et le contexte du marché… L’objectif principal, très pragmatique, est de parvenir à la marge brute maximale pour l’exploitant, en jouant notamment

Il s’avère que tous, ou presque, exploitent d’autres cultures, en complément de leurs agrumes : bananes, canne à sucre, ananas, mangues etc… Et là encore, difficile de classifier les différents comportements : dans une parcelle, les agriculteurs tentent le pari de l’agroécologie, dans une autre, ils sécurisent la production avec des intrants de synthèse… Cela dépend des surfaces, des cultures, du prix de vente, des pics de production, des employés disponibles, de l’altitude, bref d’un nombre important, et variable, de facteurs.

agricoles, justement en matière

Pour mieux comprendre ces dynamiques, hétérogènes, de transition agro-écologique, Thierry Michels, Pierre-Yves Le Gal,

© Cirad

Pour mieux accompagner la transition agro-écologique de La Réunion, une équipe du Cirad s’est attelée à la réalisation d’un outil à destination des décideurs locaux. Cet outil prévoit, en fonction des comportements des agriculteurs, les impacts des mesures en faveur de l’agro-écologie.

Marie Dupré termine une thèse au sein du Cirad dans laquelle elle développe un outil à destination des décideurs locaux pour favoriser la transition agro-écologique de l’île.

L’algorithme vise à prévoir les conséquences des mesures publiques sur les différentes filières d’ « écologisation » des exploitations. sur les surfaces cultivées en bio ou en conventionnel, en ananas ou en agrumes. Le modèle prend aussi en compte d’autres spécificités, comme la sensibilité environnementale du producteur et ses contraintes de main d’œuvre. Enfin, l’outil permet d’avoir une vision au niveau de l’ensemble de la filière sur l’île, avec des indicateurs économiques, environnementaux et sociaux. Présenté à la Daaf, au Conseil départemental et à la Chambre d’agriculture, l’outil pourrait bien être adapté à d’autres filières réunionnaises…

EN BREF Réussir la production durable de mangues

Cet ouvrage collectif présente des synthèses récentes sur la génétique, les variétés, la croissance végétative et la reproduction du manguier. Il fait le point sur les pratiques culturales, y compris en production biologique, sur la gestion des fruits post-récolte, et sur les maladies et ravageurs. Deux chapitres ont été rédigés par des équipes du Cirad. L’un sur l’analyse du cycle de vie des systèmes de production de mangues, et l’autre sur la croissance végétative et le développement du manguier, rédigé par Frédéric Normand à partir de résultats obtenus entre autres à la Réunion. Paru chez Burleigh Dodds Science Publishing.

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Les agrumiculteurs de La Réunion ont réduit leurs intrants chimiques en gérant différemment l’enherbement de leur verger.

Sélectionner des portegreffes pour le manguier

Les producteurs de mangue ont demandé au Cirad d’évaluer de nouveaux porte-greffes* pour le manguier, le seul utilisé actuellement étant Maison Rouge. L’objectif est d’obtenir des arbres moins vigoureux, plus petits et productifs. Cinq porte-greffes d’intérêt ont été identifiés avec les producteurs à partir de résultats obtenus en Inde et en Australie. * Le porte-greffe est la partie racinaire d’un arbre fruitier greffé. Les graines, importées d’Australie La variété, dont on récolte les fruits, est greffée, une sorte de collage naturel, sur le porte-greffe. Ce dernier peut affecter la vigueur, fin 2016, ont donné des plants sur la productivité ou la tolérance de l’arbre à des stress ou des maladies lesquels seront greffées les varié- du sol. tés José et Cogshall début 2018. Ils seront plantés pour évaluation chez deux producteurs à Saint-Gilles et sur la station Cirad de Bassin-Plat à Saint-Pierre.

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RECHERCHE

Des essais inter-Dom sont en cours pour valider la méthode LAMP qui ouvre des perspectives importantes en matière d’épidémio-surveillance (surveillance des maladies).

SANTÉ

Lamp : l’outil de diagnostic tout terrain du futur Lamp est un outil de diagnostic au champ pouvant être développé pour tout organisme nuisible (bactérie, virus, champignon, insecte, nématodes…).

D

iagnostiquer en temps réel une maladie sur le site même d’une épidémie est un préalable au déploiement rapide de mesures de contrôle adaptées. « La méthode Lamp – Loop mediated isothermal amplification – est idéale pour une détection au champ : elle ne nécessite pas de matériel sophistiqué ni de personnel qualifié, elle est performante, très rapide et peu coûteuse », explique Isabelle Robène, phytopathologiste au Cirad.

R. Carayol © Cirad

Cette technique amplifie un fragment d’acide nucléique spécifique de l’agent pathogène recherché. En moins d’une demi-heure, plusieurs centaines de millions de copies de fragments d’ADN sont générés à partir de l’échantillon et vont

servir d’indicateurs de la présence de l’agent pathogène. « Les premiers essais Lamp ont été menés avec succès sur l’agent pathogène Ralstonia solanacearum, dans le but est de disposer d’un outil capable d’évaluer rapidement l’état sanitaire des tubercules semences de pomme de terre », révèle Isabelle Robène. L’outil Lamp est également utilisé actuellement pour tracer sur le terrain et comprendre le phénomène de résistance au cuivre, qui émerge chez le genre bactérien Xanthomonas. Des essais inter-Dom sont en cours pour valider la méthode Lamp qui ouvre des perspectives importantes en matière d’épidémiosurveillance (surveillance des maladies).

BIO-ÉCONOMIE CIRCULAIRE

Valoriser les biomasses en agriculture

Un projet qui cherche à impliquer un panel large d’acteurs, afin de mieux raisonner l’utilisation des biomasses à l’échelle de l’île. Pour cette première année, les membres du projet souhaitaient obtenir une photographie

EN BREF

« Cet objectif est quasiment atteint », précise Mathieu Vigne, coordinateur du projet avec son collègue Jonathan Vayssières. Près de 8000 acteurs issus de trois secteurs (agricoles, urbains et industriels) ont été identifiés. Parmi les biomasses valorisées ou valorisables en agriculture, les biomasses produites par le secteur agricole lui-même représente plus d’un million de tonnes, principalement sous forme d’effluents, de paille de canne ou de fourrages. Les sous-produits issus des activités agro-industrielles représentent quant à eux un gisement de près de 900 000 tonnes, principalement sous forme de bagasse (plus de la moitié). Enfin, les déchets urbains

Le Cirad fête la Science

Lors de la Fête de la science 2017, évènement incontournable pour la promotion des sciences, six chercheurs et doctorants du dispositif en partenariat « One Health océan Indien » ont représenté le Cirad. Au programme, un jeu de l’oie revisité sur les maladies animales, des séances d’observation d’insectes vecteurs de maladies à la loupe binoculaire ou encore la découverte d’une bande-dessinée sur le métier de chercheur. Entre divertissement et pédagogie, petits et grands ont pu s’initier avec entrain et curiosité à la prévention des maladies infectieuses et zoonotiques dans © R. Levantidis, Cirad l’océan Indien.

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© F. Guerrin, Cirad

des transferts de biomasses actuels et des acteurs concernés.

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Effluents d’élevage, déchets verts, résidus de culture… Jusqu’à ce jour, ces sous-produits sont parfois sous-utilisés. Pourtant, ils peuvent être valorisés en agricultureet transformés, en engrais organique par exemple. Grâce à cet apport, les fermes pourraient réduire le recours à des intrants importés. C’est le pari lancé en 2017 par le Cirad et ses partenaires dans le cadredu projet Gabir, qui vise à favoriser la gestion circulaire et durable des biomasses disponibles sur l’île de La Réunion.

totalisent plus de 300 000 tonnes : déchets verts, déchets ménagers organiques et les boues de station d’épuration. Une caractérisation de la teneur en matière sèche et en nutriments (N, P, K) de ces biomasses est en cours afin de mieux évaluer leurs potentiels agronomiques et zootechniques.

Modéliser grâce à Ocelet

L’évolution d’un territoire, la propagation d’espèces végétales invasive, l’estimation de populations de moustiques, la dynamique d’un trait de côte, la diffusion de pathogènes dans des cultures, ... A la base de toutes ces problématiques se trouvent des processus qui doivent être étudiés à la fois dans le temps et dans l’espace. Le Cirad développe depuis quelques années un outil logiciel, nommé Ocelet, spécialement dédié à la modélisation et la simulation de processus dans des espaces géographiques. Cet outil, en partie construit à La Réunion, est mobilisé dans de nombreux projets de recherche, à La Réunion, à Mayotte, à Madagascar, mais aussi en métropole et en Afrique de l’Ouest. Actuellement Ocelet est par exemple utilisé dans le

Les pailles de canne sont transportées vers les Hauts pour les élevages de bovins.

projet Gabir pour chercher à améliorer la valorisation de biomasses dans l’agriculture locale.

One Week, One Health

Une cinquantaine de chercheurs du Cirad ainsi que leurs partenaires se sont retrouvés en octobre dernier à La Réunion pour une semaine d’échanges sur les programmes de santé « One Health » et « EcoHealth ». Plusieurs ateliers ont été organisés, avec notamment une initiation aux méthodes participatives en épidémiologie. Des séminaires ont initié la réflexion sur l’étude de l’antibiorésistance et les moyens de mieux la gérer de façon intégrée. Cette rencontre « One Week » se tiendra annuellement dans une zone d’intervention du Cirad. L’Asie est ciblée pour 2018.

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une seule santé pour l’homme et l’animal

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nviron 60 % des maladies infectieuses chez l’homme proviennent de l’animal. L’initiative One Health ou « Une seule santé » est une approche intégrée de la santé qui met l’accent sur les interactions entre les animaux, les humains et leurs environnements. En encourageant les collaborations entre tous les acteurs liés à la santé, cette démarche favorise un meilleur contrôle et une prévention plus adaptée contre les épidémies à venir. Elle est consacrée depuis 2007 par la FAO, l’OIE et l’OMS*.

Dans l’océan Indien, les réseaux de veille sanitaire en santés publique et animale se sont regroupés depuis 2013 à travers le réseau SEGA One Health de la Commission de l’Océan Indien. Et en 2014, à l’initiative du Cirad, le dispositif de recherche et d’enseignement en partenariat (dP) One Health a vu le jour. Ensemble, ils opèrent depuis une véritable mutualisation des moyens pour mieux faire face au risque épidémique dans le sud-ouest de l’océan Indien.

Le dP ONE HEALTH-OI travaille au renforcement des connaissances et des capacités sur les maladies zoonotiques et la résistance aux antibiotiques, à l’interface entre santé humaine, santé animale et environnement. Pour protéger les différentes filières d’élevage et les populations locales des maladies infectieuses, le collectif, regroupant 120 professionnels* répartis dans huit pays (France-Réunion, Mayotte, Maurice, Madagascar, Seychelles, Union des Comores, Afrique du Sud, Tanzanie, Mozambique), développe des

études opérationnelles, des outils de veille et de diagnostic innovants. Objectifs : identifier les sources infectieuses et comprendre les voies de transmission, pour mieux prévenir et gérer les maladies infectieuses qui menacent la zone.

PLUS D’INFO

*FAO : Organisation des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture OIE : Organisation mondiale pour la santé animale OMS : Organisation mondiale pour la santé

www.onehealth-oi.org

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* Directions des Services Vétérinaires de Madagascar, Maurice, Seychelles, Réunion, Mayotte ; DNESPV ; Institut Pasteur de Madagascar, FOFIFA DRZV, INRAPE, CHU La Réunion, ARS-OI, LVD Réunion, GDS Réunion, GDS Mayotte, OIE, IRD, COI, OMS, DVSSE Madagascar, DGS Comores, DGS Seychelles, DGS Maurice, Cirad.

Textes : Renaud Levantidis, Laurent Decloitre

Dossier > one health , une seule santé pour l'homme et l'animal

Dossier > ONE HEALTH, UNE SEULE SANTÉ POUR L'HOMME ET L'ANIMAL

One Health,


© J. Gathany, CDC

one health

« Allier santé animale, humaine Et environnement » R. Carayol © Cirad

EN QUOI CONSISTE LE CONCEPT « ONE HEALTH » ? Il s’agit d’une approche commune entre chercheurs, médecins, vétérinaires, mais aussi spécialistes de l’environnement, pour garantir la santé animale et humaine. Sans cela, il serait très difficile d’identifier les sources d’infection, les modes de transmission et de propagation, et les moyens pour les contrer. C’est aujourd’hui chose faite, de façon officielle, entre les pays de la zone océan Indien. En 2014, le dispositif One Health en partenariat a été officiellement adopté.

Eric Cardinale, coordinateur au Cirad du dispositif en partenariat « One Health » océan Indien.

COMMENT CELA SE PASSE-T-IL À LA RÉUNION ? C’est un travail partenarial, qui concerne le Cirad, l’ARS, le CHU, l’IRD, le laboratoire vétérinaire départemental, le GDS, la Daaf… Nous travaillons ensemble sur la résistance aux antibiotiques ou sur les nouveaux outils technologiques, nous organisons des formations… Il en est ainsi dans les pays membres de la commission de l’océan Indien.

© Cirad

EN QUOI L’ARS EST-ELLE CONCERNÉE PAR LES MALADIES ANIMALES ? Certaines d’entre elles peuvent être transmises à

François Chieze, directeur de la veille et de la sécurité sanitaire à l’ARS-OI

l’homme, comme la fièvre de la vallée du Rift ou la peste. Dans notre environnement régional, les zoonoses constituent un risque important. Le concept d’« une seule maladie », One Health en anglais, est primordial. C’est dans ce contexte que la Commission de l’océan Indien a créé le réseau de surveillance épidémiologique et de gestion des alertes (Séga), auquel nous participons, tout comme le Cirad. Grâce à cette surveillance concertée, nous disposons d’un grand nombre de données, utiles pour la recherche mais aussi pour mener des actions.

COMMENT ACCOMPAGNER LES PAYS DE LA ZONE OCÉAN INDIEN ?

Nous sommes à un moment clé qui implique de passer au stade opérationnel. Nous pouvons mobiliser nos propres équipes de QUEL EST L’OBJET DE VOTRE RECHERCHE EN PARTENARIAT AVEC LE CIRAD ? Nous travaillons sur la réalisation d’un état

des lieux régional concernant l’antibiorésistance chez l’animal, notamment au sein des élevages. Les premiers travaux se sont intéressés à la résistance aux bétalactamines chez les entérobactéries car ce phénomène est en forte expansion au sein des populations humaines de la zone. L’un de nos objectifs est d’étudier comment cette antibiorésistance se diffuse entre animal et homme, et de mieux comprendre le danger sanitaire que représente ce réservoir.

L. Decloitre © Cirad

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Aedes albopictus, le moustique tigre, est vecteur de la dengue. Début mai 2018, 2 598 nouveaux cas étaient confirmés à La Réunion.

Olivier Belmonte, pharmacien biologiste au CHU

AU CHU, ON S’INTÉRESSE AUX HUMAINS, PAS AUX ANIMAUX…

L’antibiorésistance est un phénomène global qui concerne la médecine vétérinaire et humaine. La transmission de bactéries résistantes peut se réaliser, après contact direct, entre l’animal et l’exploitant. Mais le risque le plus élevé concerne la transmission indirecte, via l’alimentation.

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II

QUELS SONT LES DOMAINES SPÉCIFIQUES À LA RECHERCHE ?

Nous étudions les arboviroses, comme la maladie de la langue bleue chez les bovins, en partenariat avec les entomologistes. Nous nous penchons sur le cas des culicoïdes, ces moucherons qui peuvent causer des grands dégâts dans les élevages. Autre filière concernée : les volailles avec la prévalence de Salmonella, que nous suivons en partenariat avec le GDS de La Réunion. Un autre pan de la recherche concerne les résistances aux antibiotiques, sujet étudié en collaboration avec l’ARS et le CHU. Avec l’agence, nous avons par ailleurs modélisé les dynamiques des populations de moustiques, afin d’aider à mieux lutter contre Aedes albopictus, responsable notamment de l’épidémie actuelle de dengue.

terrain, les instituts de recherche, comme Pasteur, les universités, les hôpitaux… L’idée est de faire travailler ensemble médecins, vétérinaires, chercheurs ; agir seul n’aurait aucun sens. QUELLES SONT VOS PRIORITÉS ? Un des sujets majeurs reste le suivi de l’épidémie pesteuse à Madagascar. Un autre concerne la résistance des bactéries aux antibiotiques. Selon l’OMS, au niveau mondial, l’antibiorésistance provoquera d’ici 2050 autant de morts que le cancer, soit 10 millions par an. À La Réunion, 5 ou 6 % des patients humains hospitalisés sont victimes de l’antibiorésistance. Dans certains pays de la zone, c’est d’autant plus problématique que cela implique de changer de traitement médical, ce qui augmente les coûts, exige davantage de technicité et retarde la guérison. Fort heureusement, nous travaillons ensemble avec une belle coordination des pays de la zone. COMMENT SE DÉROULENT VOS RECHERCHES ? Le Cirad se charge des prélèvements, du recueil d’informations dans les élevages. Nous procédons aux analyses dans notre laboratoire de microbiologie. L’interprétation des résultats est ensuite réalisée en collaboration. Ce partenariat est l’occasion d’associer des compétences complémentaires sur des questions transversales. Il en ressort que la proportion de bactéries résistantes aux antibiotiques et notamment aux classes thérapeutiques utilisées chez l’homme est élevée au sein des élevages de la région. QUE PRÉCONISEZ-VOUS ? La question de la maîtrise de l’évolution

de ce phénomène est complexe. Les conditions socio-économiques, sanitaires, médicales, réglementaires sont très hétérogènes entre les différents pays de la région. Globalement, il faut agir sur la gestion des antibiotiques dans les élevages, de façon à ce que les exploitants ne les utilisent qu’à bon escient, en curatif, pas en préventif notamment. Il faut aussi mener une réflexion sur les classes d’antibiotiques utilisées et essayer d’éviter de donner les mêmes que celles préconisées aux patients humains.

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BŒUFS ET CERFS ATTAQUÉS

AlboRun sur la piste des moustiques

Les orbivirus préfèrent la fin de l’été >

Le modèle AlboRun permet d’obtenir des cartes de prédictions de densités de moustiques tigres adultes. Du vert, zones à faibles densités prédites, au rouge, zones à fortes densités (janvier 2018).

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C’est pour cette raison que les chercheurs du Cirad ont imaginé AlboRun, un outil informatique capable de combiner observations de terrain et données climatiques

complexes. « Nous avons développé deux approches complémentaires pour modéliser la productivité des gîtes en fonction des conditions météorologiques, détaille Annelise Tran. L’une mécaniste, basée sur les connaissances de son cycle de vie, l’autre statistique, basée sur les faits observés ». Grâce aux efforts mutuels de l’ARS-OI, de l’IRD et du Cirad, les résultats sont là. « Nos analyses montrent qu’il est possible de prédire les abondances des différents stades du moustique tigre (œufs, larves, adultes) à partir des données de pluies et de températures quotidiennes ». Les prédictions ont été validées en les confrontant aux observations de terrain sur différents sites. « C’est un outil puissant pour permettre d’identifier et hiérarchiser les zones et les périodes où la surveillance et le contrôle doivent être ciblés », se félicite Jean-Sébastien Dehecq de l’ARS.

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ares sont les vaccins contre les maladies transmises par les moustiques. Le contrôle de ces vecteurs est donc essentiel pour prévenir les épidémies en zones tropicales. « Depuis le chikungunya de 2005-2006, il y a un grand besoin d’outils de cartographie opérationnelle pour optimiser les actions des services de lutte antivectorielle », confie Annelise Tran, chercheuse au Cirad en télédétection. Mais le moustique tigre (Aedes albopictus), responsable des multiples recrudescences de dengue, ne se laisse pas pister facilement. « Il est réparti de manière hétérogène sur le territoire, préférentiellement dans les jardins mais aussi dans des zones plus éloignées des habitations comme les ravines ».

la virologiste a lancé une étude visant à caractériser la dynamique de circulation de ces virus à La Réunion. Il en ressort un pic de circulation entre les mois de février et de mai. Encore chaude et humide, la fin de l’été austral est favorable à la réplication des virus et de leurs vecteurs, des petits moucherons hématophages appelés Culicoides. Si cette étude a mis à jour la période de circulation des virus, elle a aussi mis en évidence des facteurs de risque d’infection. « Nous avons noté que des températures minimales élevées favorisent l’infection, ce qui peut expliquer la quasi-absence de ces virus dans les élevages situés

au-delà de 1 400 m d’altitude », remarque Catherine Cêtre-Sossah. Le froid comme facteur protecteur ? Pas seulement. « La complémentation de l’alimentation avec des vitamines semble aussi réduire de risque d’infection ». Claire Garros, entomologiste au Cirad, relève un autre point également : la dynamique des populations des vecteurs de ces virus, les culicoides, en fonction des paramètres environnementaux. Ce sujet fait l’objet d’une thèse en partenariat entre le Cirad et le GDS* Réunion. Avec un objectif double : sensibiliser les éleveurs et développer un outil prédictif pour identifier les zones et les périodes d’abondance de ces vecteurs.

Au total, 324 bovins et 685 cerfs ont été suivis entre 2015 et 2017 dans l’étude de la dynamique de circulation des orbivirus à La Réunion.

R. Carayol © Cirad

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© Cnes

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haque année, les « bavites » ne cessent d’infecter les cheptels réunionnais. Derrière ce surnom local tiré des symptômes de salivation excessive, se cachent deux orbivirus : BTV (Bluetongue virus) et EHDV (Epizootic Haemorrhagic Disease Virus). « Ils provoquent des symptômes de gravité variable, explique Catherine Cêtre-Sossah, chercheuse au Cirad, pouvant aller de la fièvre à l’anorexie. Ils entraînent parfois la mort de l’animal infecté ». Pour lutter contre ce fléau,

Les nouvelles connaissances acquises sur les orbivirus et leurs vecteurs, les culicoides, contribuent à la mise en place de mesures de lutte adaptées. © J.B. Ferré, EID-Méditerranée

Parole d'agriculteur

© P. Achard

Jérôme Huet, éleveur et président du GDS* Réunion « Chaque année, nos troupeaux subissent des pertes liées aux bavites. Les recherches et les ateliers de sensibilisation du Cirad nous permettent de mieux comprendre à quoi nous faisons face. La journée d’informations sur les Culicoides organisée en septembre dernier en est un bon exemple. Le Cirad nous a expliqué à quoi ressemblent ces moucherons et comment ils interviennent dans la transmission de ces maladies. En tant qu’éleveur, je peux mieux m’impliquer dans la santé de mes animaux. En tant que président du GDS Réunion, je suis particulièrement satisfait du partenariat que nous avons mis en place. » * GDS : groupement de défense sanitaire

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III

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OUTIL PRÉDICTIF


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RÉSISTANCE AUX ANTIBIOTIQUES

Une lutte aux multiples facettes

S

ujet brûlant autant qu’essentiel pour la santé publique, la résistance des bactéries aux antibiotiques livre peu à peu ses secrets. Après en avoir fait l’état des lieux sur l’ensemble des îles de la Commission de l’Océan Indien, Noellie Gay, doctorante en épidémiologie au sein du dispositif de recherche et d’enseignement en partenariat (dP) One Health-OI, a étudié les facteurs favorisant son occurrence dans les élevages. « Nous nous sommes concentrés sur des bactéries du tractus intestinal, les entérobactéries résistantes aux bétalactamines*, indicateurs clés pour retracer l’évolution des résistances chez les animaux », explique-t-elle. Entre 2016 et 2017, des prélèvements ont été réalisés dans 30 élevages de

bovins, de porcs et de volailles. « Les données montrent des taux de résistance conséquents chez les poulets et les porcs mais l’interdiction de recours aux antibiotiques depuis 2006 permet une évolution favorable de la situation ». La présence de bactéries résistantes serait associée à un usage d’antibiotiques pour raisons thérapeutiques, à la présence d’animaux domestiques dans l’exploitation ou encore à des visites récurrentes d’autres éleveurs. « Nous avons aussi mis en évidence des facteurs protecteurs, ajoute Noellie Gay, doctorante au Cirad. Parmi eux, la qualité de l’eau semble jouer un rôle prépondérant, ainsi que la mise en œuvre adéquate des mesures de nettoyage et de biosécurité. ».

Le rat, nouveau modèle d’étude pour l’antibiorésistance humaine

conclusions tangibles. L’objectif est d’avoir une population suffisante, d’environ 200 rats prélevés sur l’ensemble du territoire réunionnais, particulièrement en milieu urbain.

Et qu’en est-il de l’antibiorésistance chez l’homme ? « En 2016, nous avons réalisé une étude au CHU Felix Guyon, mais elle n’a donné qu’une image partielle de la situation, limitée au secteur hospitalier », remarque Noellie Gay. Afin de mieux appréhender la prévalence de bactéries résistantes dans la population générale, Noellie compte sur… les rats ! « Étant des animaux qui vivent à proximité des humains, ils seraient de bons indicateurs des niveaux de résistance dans l’environnement qu’ils occupent. » À ce jour, il manque encore nombre de données pour tirer des

A terme, il s'agira d'évaluer la présence des bactéries résistantes chez l'humain et de développer des alternatives efficaces aux antibiotiques.

Devenu impératif en santé animale comme en santé humaine, le contrôle de l’antibiorésistance est une problématique mondiale à laquelle n’échappe pas la zone sud-ouest de l’océan Indien. Une nouvelle étape vient d’être franchie avec la mise en évidence des facteurs de risque de cette résistance bactérienne au sein des élevages réunionnais, malgaches et mahorais.

D’autres chercheurs du dP visent aussi à récolter des données communautaires. « Nous travaillons notamment sur la résistance des souches bactériennes responsables

d’infections urinaires », précise Jean-Marc Collard, chercheur bactériologiste à l’institut Pasteur de Madagascar et président du dP One Health – OI. « Les taux d’isolement des bactéries résistantes aux fluoroquinolones et aux céphalosporines de 3ème génération sont substantiels », s’alarme-t-il. * Pénicilines et céphalosporines

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R. Carayol © Cirad

CONTRE L’ANTIBIORÉSISTANCE, LA PISTE DES PLANTES MÉDICINALES Une des principales pistes est de réduire la consommation d’antibiotiques et de contrôler leur usage. Avec 10 millions de morts attendus par an d’ici 2050 si rien n’est fait, l’OMS a lancé l’alerte. En médecine vétérinaire, le plan Ecoantibio mis en place par le ministère de l’Agriculture en 2012 a déjà permis d’obtenir

des résultats spectaculaires à cet égard : la consommation d’antibiotiques a été réduite de 37 % en 5 ans. « Les efforts continuent avec le plan Ecoantibio 2, nous venons d’ailleurs de déposer un projet dans son sillage pour La Réunion », note Éric Cardinale, coordonnateur du dP One

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Health-OI. Un axe particulièrement prometteur de ce projet consiste au développement de traitements alternatifs, ce sur quoi le Cirad travaille déjà, grâce à son partenariat avec l’association pour les plantes aromatiques et médicinales de La Réunion. Pour l’Aplamedom, il resterait entre

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300 000 et 500 000 espèces de plantes à découvrir, ce qui laisse présager un nombre conséquent de nouvelles molécules à identifier. « Nous avançons sur plusieurs fronts à la fois. Il faut souligner la force de l’approche interdisciplinaire et intersectorielle One Health pour aborder

cette problématique. Nous avons de bons espoirs que cette interface soit pérenne et permette, avec l’appui des ministères de la Santé, de mieux contrôler l’émergence de la résistance aux antibiotiques », conclut Jean-Marc Collard, président du dP One Health-OI.

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RECHERCHE

© M. Hoareau

Le Cirad a aidé à mettre sur pied une installation de gazéification sur l’exploitation agricole de M. Hoareau.

BIOMASSE-ÉNERGIE

Du gaz à partir des débris de bois Avec l’appui du Cirad, deux mini-centrales de gazéification, alimentées par des plaquettes forestières, vont être mises en service à La Réunion dans les prochains mois. L’objectif est de produire, à partir de la biomasse, un gaz pour fournir électricité et chaleur.

« Les rendements électriques sont intéressants même à petite puissance. On peut donc créer des unités décentralisées, sur le territoire, à proximité de gisements de biomasse ».

L

a Réunion souhaite parvenir à l’autonomie électrique en 2030, et se passer de combustibles fossiles. Parmi les énergies renouvelables, la biomasse, peu utilisée à ce jour, présente de grandes opportunités. Il s’agit de matières organiques d’origine agricole (résidus de cultures, déjections animales), forestière (bois) ou urbaine (déchets verts), dont certaines peuvent être transformées et valorisées en énergie. La bagasse sert déjà à alimenter les deux centrales thermiques de Bois-Rouge et du Gol, en complément du charbon, pour fabriquer de l’électricité, mais d’autres filières doivent émerger. « Attention cependant à ne pas entrer en concurrence avec d’autres filières de valorisation », prévient François Broust, chercheur au Cirad. La paille de canne est par exemple en grande partie employée pour fertiliser les champs et empêcher la pousse de mauvaises herbes. « Notre but est d’aider à la constitution d’une filière de production, transport, transformation de biomasse en tenant compte des impacts environnementaux, sociaux, économiques », précise l’expert.

Le Cirad oriente principalement ses recherches sur la gazéification, qui est une alternative possible à la combustion (cf encadré). Ce procédé produit un mélange gazeux qui peut être converti en électricité via un moteur à gaz. Le processus de cogénération produit également de la chaleur utile pour sécher la matière première, dont le taux d’humidité doit être inférieur à 20 %, voire davantage pour d’autres usages agro-industriels. L’intérêt est multiple, comme le souligne François Broust : « Les rendements électriques sont intéressants même à petite puissance. On peut donc créer des unités décentralisées, sur le territoire, à proximité de gisements de biomasse, ce qui réduira les transports ».

Des premières unités expérimentales et pilotes La SPL Énergies Réunion (SPLER) a fait appel au Cirad pour son expertise scientifique et technique en gazéification, en vue du lancement d’une première unité

Deux procédés bien distincts La production d’électricité dans les centrales thermiques actuelles consiste à brûler intégralement la biomasse pour produire de la chaleur (combustion). Cette chaleur permet de générer de la vapeur sous pression qui alimente des turbines/génératrices d’électricité.

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expérimentale financée par la Région Réunion. La mini-centrale d’une puissance électrique de 30 kW sera installée sur une antenne du lycée agricole de Saint-Paul, à Piton Saint-Leu. Elle sera approvisionnée en bois bûche qui sera broyé, séché et calibré sur la plateforme. D’autres biomasses seront testées dans un deuxième temps. Parallèlement, le Cirad appuie un agriculteur de Petite France, dans les hauts de Saint-Paul, qui a également bénéficié de subventions publiques pour acquérir une unité pilote de gazéification, projet labellisé « Pôle d’Excellence Rurale » et soutenu par la SPLER. L’électricité sera revendue à EDF et la chaleur dégagée doit à terme alimenter des alambics pour la distillation de Papam (Plantes à Parfum Aromatiques et Médicinales) comme le géranium. Éric Martin, ingénieur d’études au Cirad, aide actuellement l’exploitant à monter l’installation. Le Cirad va suivre et comparer les deux installations et leurs performances respectives, en vue de partager ces retours d’expérience dans le monde agricole.

La gazéification est une autre transformation thermochimique, sorte de combustion incomplète opérée en limitant la quantité d’air. Le gaz produit peut être valorisé en énergie (brûleur, moteur ou turbine à gaz) avec un meilleur rendement énergétique. La gazéification – comme la combustion – génère comme résidus solides des cendres minérales qui peuvent être épandues et valorisées comme fertilisants.

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recherche

FERTILISATION

Le phosphore et l’azote avec jugeote

Le Cirad cherche à augmenter l’efficience d’utilisation des fertilisants, qu’il s’agisse d’engrais conventionnels ou organiques. Si les recherches ont montré que l’azote et le phosphore se comportaient très différemment dans le sol, elles ouvrent surtout la voie à une amélioration importante du conseil aux agriculteurs en matière de fertilisation.

M. Bravin © Cirad

A

A La Réunion, avant la replantation de canne à sucre, des engrais organiques comme des litières de volailles et lisier de porcs, sont épandus.

ntoine Versini et Matthieu Bravin, chercheurs au Cirad, travaillent à mieux comprendre comment l’azote et le phosphore interagissent avec le sol et les plantes pour améliorer l’efficience des pratiques de fertilisation. « L’azote, essentiel à la croissance des plantes, a la fâcheuse manie d’être très mobile », alerte Antoine Versini. Aussi, une grande partie de ce que l’agriculteur déposera dans ses champs risque de se volatiliser sous forme ammoniacale. Dans les parcelles expérimentales du nord de l’île du Cirad et d’eRcane, on ne retrouve dans les cannes à sucre que 25 % en moyenne de l’azote initiale des engrais. « En clair, trois quarts de l’azote ne sont pas utilisés ». Le Cirad, avec la Chambre d’agriculture, propose des outils permettant d’ajuster la dose d’engrais organique azoté à apporter pour satisfaire les besoins des cultures.

Augmenter l’efficience des engrais,

est le cas de nombreux sols réunionnais, le phosphore initialement présent dans le sol et celui apporté par la nouvelle fertilisation seront trop fortement retenus par le sol et les plantes ne pourront pas l’utiliser », explique Matthieu Bravin. Plutôt que d’augmenter la dose de fertilisant phosphaté à apporter, il convient plutôt de veiller à maintenir dans son sol un pH faiblement acide, en le redressant si nécessaire par chaulage en parallèle de la fertilisation phosphatée. « Sur ce point, les engrais organiques pourraient présenter un intérêt crucial par rapport aux engrais minéraux ». Les recherches ont montré que les engrais organiques, en plus d’apporter de l’azote et du phosphore, redressent le pH du sol et favorisent ainsi la mise à disposition des éléments pour la culture. Le recours à des matières organiques mais aussi à des plantes fertilisantes, comme les légumineuses, sont des alternatives prometteuses aux pratiques de fertilisation traditionnelle.

c’est en utiliser moins et donc réduire à la fois l’impact sur l’environnement et les dépenses R. Carayol © Cirad

des exploitants.

Le diagnostic foliaire par spectrométrie infrarouge permet d’optimiser les pratiques de fertilisation du point de vue des rendements.

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A l’inverse de l’azote, le phosphore est très peu mobile dans le sol. L’efficience du phosphore tient donc beaucoup à la composition et aux propriétés du sol. « Si ce dernier est fortement acide comme cela

En plus d’être produits localement, les engrais organiques présentent un intérêt crucial par rapport aux engrais minéraux en favorisant la mise à disposition de l’azote et du phosphore pour la culture.

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Depuis le 12 février, Marion Collinet est la nouvelle responsable du laboratoire d’analyses agronomiques du Cirad, situé à la Bretagne (Saint-Denis). La chimiste de formation est chargée de la gestion de la plateforme technique, qui comprend un laboratoire de service, dédié aux analyses des sols, plantes, eaux et résidus organiques, et un laboratoire de recherche, dédié à l’étude de la dynamique des matières organiques et des contaminants.

5 830 analyses de sols et de plantes sont réalisées chaque année par le laboratoire d’analyses agronomiques du Cirad.

« C’était un vrai défi personnel et professionnel de prendre ce poste,

avec à la fois une nouvelle thématique de travail, la chimie appliquée à l’agronomie, et un changement géographique important », confie Marion. La nouvelle responsable a pour objectifs d’assurer un fonctionnement optimal de la plateforme, de produire des analyses de qualités et de développer de nouvelles méthodes analytiques, en accord avec les besoins des partenaires du Cirad et des équipes de recherche. « Je souhaite apporter ma petite pierre à ce grand objectif commun qui est de bâtir une agriculture durable », espère Marion.

PILOTAGE DE LA FERTILISATION AZOTÉE

Quand l’infrarouge mesure le sucre

L’azote diagnostiqué par spectrométrie proche infrarouge

Grâce à des mesures en spectroscopie, il est désormais possible de déterminer la qualité de la canne à sucre en des temps records.

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agner du temps et de la précision. C’est essentiel lors de la campagne de coupe de la canne à sucre, quand les cachalots déversent leur cargaison en flux tendu. Grâce à une méthode innovante mise au point par le Cirad, en collaboration avec eRcane, il est aujourd’hui possible de mesurer en continu les teneurs en fibres, en sucre et en humidité d’un lot de cinq kilos de cannes fraîches. Le tri des variétés est donc facilité lors de l’analyse de quelque 10 000 échantillons pendant les six mois de récolte. En usine, la technique permet de suivre la qualité du sucre directement sur la ligne de production, en fonction de la couleur et de la granulométrie.

Pour y parvenir, Fabrice Davrieux, spécialiste de l’analyse « non destructive » et ses collègues du Cirad ont utilisé la méthode de spectroscopie proche infrarouge (Spir). Elle repose sur le principe que chaque composant d’un milieu absorbe plus ou moins la lumière en fonction de sa longueur d’onde. « Les spectres d’absorption obtenus sont spécifiques des composants élémentaires des produits et donc de leur qualité », précise le chercheur. Cette technique permet une caractérisation précoce de la qualité des productions et élargit le champ des prédictions des performances agronomiques.

eRcane se sert désormais du Spir pour mesurer en direct la qualité de la canne fraîche broyée. © eRcane

Complémentaire à l’analyse de sol, le diagnostic foliaire (sur les feuilles) permet de savoir si la canne à sucre a besoin ou non d’engrais azoté. La méthode d’analyse conventionnelle pour déterminer les besoins en azote de la canne à sucre prend de quelques semaines à deux mois. Un temps trop long pour bien gérer ses apports en engrais. Aussi, le Cirad a-t-il développé une technique innovante : elle consiste à piloter la fertilisation azotée de la canne à sucre avec le diagnostic foliaire par spectroscopie proche infra-rouge (Spir). « En travaillant sur des feuilles fraîches de canne, les temps d’analyse sont réduits à un ou deux jours », s’enthousiasme Géraud Moussard, le technicien en charge du projet. La méthode consiste à envoyer un faisceau lumineux et à mesurer la lumière réfléchie, non absorbée par la plante. Ces informations brutes passent ensuite par des traitements mathématiques et un étalonnage pour pouvoir les interpréter. Grâce au travail des équipes du Cirad, d’eRcane et du centre technique interprofessionnel de la canne à sucre (CTICS), cette méthode permet désormais de connaître en moins de 48 h la teneur en azote de la canne. Rapide et peu onéreuse, cette méthode d’analyse s’est vue décerner le Trophée de l’innovation agricole, lors des journées Agrofert’îles de juin 2017.

EN BREF

Le sol de La Réunion cartographié

Le Cirad vient de mettre en ligne sur la plateforme Aware une carte d’occupation du sol de La Réunion obtenue à partir d’images satellites acquises entre 2016 et 2017. La précision du rendu est remarquable, puisqu’elle dépasse les 88 % globalement, et atteint

même 96 % pour les surfaces de canne à sucre et 92 % pour les prairies. Le traitement des données est en revanche plus difficile sur les surfaces occupées par les cultures maraîchères et les vergers (61 et 73 %). https://reunion-mayotte.cirad.fr/ actualites/2018/cartographieaware

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Cartographier les récoltes de canne à sucre

Le Cirad développe depuis 2015 une méthode de traitement des images satellitaires radar pour détecter l’état de coupe des parcelles de canne à sucre, même sous nuages. L’outil vient d’être amélioré en combinant images optiques du satellite Sentinel-2

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LA CANNE ANALYSÉE EN CONTINU

Le diagnostic foliaire par spectrométrie infrarouge permet de connaître la teneur en azote de la canne en moins de 48 h et d'adapter la fertilisation azotée. R. Carayol © Cirad

et images radar du satellite Sentinel-1 dans une chaîne de traitement automatique. L’outil Mash, pour MApping of Sugarcane Harvest, produit ainsi une cartographie à haute fréquence de la récolte de canne à sucre et des statistiques de surfaces récoltées, avec une actualisation de moins de 6 jours.

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INNOVATION

Marion Collinet à la tête du laboratoire d’analyses agronomiques

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Ernestine, l’oignon nouvelle génération Les équipes du Cirad à La Réunion ont créé une nouvelle variété d’oignon.

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éronique a une forte teneur en matière sèche : 16 %. L’oignon péi se conserve très bien. Mais cette variété locale ne donne que de petits bulbes, soit un rendement moyen de 15 tonnes par hectare. En l’an 2000, le Cirad a donc introduit à La Réunion plusieurs variétés dont trois de l’IPA*, plus performantes avec des potentiels de rendement de 40, voire 50 tonnes à l’hectare ! Mais ces variétés à fort rendement contiennent moins de matière sèche. L’oignon se conserve mal et pourrit… Le Cirad s’est alors attelé à la tâche de créer une variété hybride dotée des qualités de conservation de Véronique et de rendement des variétés IPA. Quinze ans après, quatre lignées sont au point, dont une particulièrement performante : Ernestine.

Cet oignon se conserve mieux que l’IPA (il contient 15 % de matière sèche) et a un meilleur potentiel de rendement que Véronique, de l’ordre de 30 tonnes à l’hectare. L’an dernier, Ernestine est entrée dans la cour des grands, inscrite au catalogue officiel français des variétés de plantes cultivées. Une demande de certificat d’obtention végétale est en cours de dépôt. « Il nous faut désormais faire la promotion de la variété avec des tests de démonstration et de dégustation qui seront mis en œuvre cette année », précise Dominique Dessauw, chercheur au Pôle de protection des plantes du Cirad. Les bulbes seront encore plantés dans ce but, chez un agriculteur de Saint-Pierre et à l’Armeflhor, avant d’être enfin commercialisés en 2020.

Ernestine, de son petit nom, a un meilleur rendement à l’hectare que la variété locale et se conserve mieux que la variété brésilienne.

*Instituto Agronômico de Pernambuco au Brésil

Nicolas Talibart, le démiurge de l’oignon puis les a fécondées, « au pinceau », avec le pollen des IPA. Entre chaque opération, il recouvrait les fleurs d’un petit sac pour éviter que Véronique ne s’autoféconde. Les plants ont donné des graines, hybrides, que le démiurge de l’oignon a ensemencées la saison suivante. En 2003, il a récolté les bulbes, qu’il a triés et sélectionnés en fonction de leur poids, forme et couleur. Douze ans plus tard, après deux cycles d’autofécondation manuelle et quatre cycles de sélection récurrente sur les descendances d’hybrides, Ernestine a été sélectionnée parmi six nouvelles variétés créées.

© Cirad

C’est Nicolas Talibart, technicien supérieur au Cirad, qui a obtenu et baptisé du nom de sa grand-mère l’oignon « Ernestine ». En 2001, il a planté les deux variétés locales et brésiliennes en plein champ. Lorsque les oignons ont fleuri, il a ôté, « une à une et à la pince à épiler », les étamines des inflorescences des plants de Véronique,

© Cirad

INNOVATION

SÉLECTION VARIÉTALE

BIENTÔT DE NOUVELLES VARIÉTÉS

De futures aubergines résistantes au flétrissement Les aubergines de La Réunion, ‘Bringelle Rond’ et ‘Bringelle Saucisse’, sont très appréciées du consommateur mais sensibles au flétrissement bactérien, maladie pouvant causer la mort des plantes. Cette maladie provoquée par une bactérie du sol, Ralstonia solanacearum, occasionne des pertes importantes pour les producteurs réunionnais. Pour éviter ce triste sort, des cultivateurs procèdent à des greffes sur le ‘Bringellier marron’, une aubergine sauvage résistante de La Réunion ; mais l’opération est compliquée et coûteuse. Aussi, le Cirad travaille-t-il sur la création de nouvelles variétés résistantes. Pour cela, les chercheurs croisent naturellement la variété résistante AG91-25, créée par l’Inra aux Antilles, avec les variétés locales, plus adaptées à notre climat, aux pratiques Le Cirad a introduit le gène majeur de résistance au flétrissement bactérien dans les bringelles de La Réunion par croisements naturels. © Cirad

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culturales et au goût des Réunionnais. « Ensuite, détaille Cyril Jourda, docteur en génétique et génomique des plantes au Cirad, nous exposons les plantes issues des croisements à la bactérie en serre de confinement, et nous sélectionnons celles qui sont résistantes ». Parallèlement, des marqueurs génétiques permettent de caractériser et de suivre les gènes de résistance, identifiés par les chercheurs en laboratoire. « Il s’agit d’un schéma classique de rétrocroisement couplé à une sélection assistée par marqueur », précise Jacques Dintinger, généticien au Cirad. Avec l’Armeflhor, le Cirad a procédé de la sorte sur six cycles de croisements. Cette première étape vient de s’achever. Désormais, l’Armeflhor va travailler sur les propriétés agronomiques, morphologiques et organoleptiques adaptées à la demande locale, pour parvenir à des aubergines résistantes, homogènes et stables. D’ici 2022-2023, une nouvelle variété pourrait être commercialisée.

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INNOVATION INNOVATION

R. Carayol © Cirad

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orsqu’un jeune agriculteur veut s’installer, il doit parfois fournir, pour compléter son dossier auprès des différentes institutions, un diagnostic de son exploitation. Une évaluation complexe qu’un outil d’aide à la décision vient simplifier. L’application, imaginée en métropole et reconfigurée localement par le Cirad, avec l’ensemble des acteurs du monde agricole pour répondre aux conditions de La Réunion, vient d’être mise en ligne*. Idéa Run est un tableau qui croise un ensemble d’indicateurs sur la « durabilité » des exploitations. L’outil se base sur les trois piliers du développement durable : agro-écologique, socio-territorial et économique. « Une fois les données rentrées par l’agriculteur, ce dernier connaît ses forces et faiblesses et les points à améliorer », résume Thierry Michels, agronome au Cirad. L’agriculteur peut agir sur des

leviers techniques voire même revoir sa stratégie globale d’exploitation. L’outil a déjà été testé auprès d’une soixantaine d’exploitations de l’île et les techniciens de la chambre d’agriculture sont demandeurs de formation. « Idéa Run est fondé sur l’idée que pour être approprié par les acteurs, un outil doit associer ces derniers à son développement, précise Thierry Michels. L’élaboration s’est donc faite de manière participative, associant les acteurs des filières agricoles réunionnaises depuis les objectifs de durabilité jusqu’aux variables et indicateurs destinés à les évaluer ». Idéa Run est notamment utilisé par le lycée agricole de Saint-Paul, en Licence Pro « Agriculture Durable », et en BTS Développement de l’agriculture des régions chaudes.

Fruit market bientôt sur les étals D’autres applications sont régulièrement mises à disposition des filières agricoles, comme Victoria, pour la filière de l’ananas (voir AGROnews N°7) ou encore Agref. Agref permet de synthétiser un nombre important de données agro-économiques et, entre autres, « de calculer les marges aux différentes étapes de la filière de production végétale », précise Thierry Michels.

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Des Idéa la pelle

Après Victoria, Agref, Phyto’aide, Idéa Run est l’un des derniers outils d’aide à la décision que le Cirad a mis à disposition des exploitants agricoles via les organisations de producteurs et la chambre d’agriculture.

© L. Decloitre

OUTILS D’AIDE À LA DÉCISION

Thierry Michels du Cirad imagine des outils d’aide à la décision en concertation avec les différentes filières agricoles de l’île.

Le chercheur du Cirad travaille actuellement sur la conception d’une nouvelle « clé à molette » : Fruit Market pour aider les coopératives à mieux gérer la distribution de leurs productions sur les différents marchés de commercialisation.

* https://cosaq.cirad.fr/outils-d-aide-a-la-decision/ idea-run

POUR ÉTALER LA PÉRIODE DE PRODUCTION

Diversifier les variétés de mangues Bienvenue à Tommy Atkins ! Depuis 2017, la mangue d’origine américaine est sur les étals, aux côtés des Nam Doc Maï et Heidi, deux autres variétés étudiées et introduites par le Cirad à La Réunion. La production locale reposait jusque là sur deux variétés seulement : José, le fruit 100 % local, et Cogshall ou mangue américaine. Or, plus on dispose de variétés différentes, certaines précoces, d’autres tardives, plus la période de production, et de consommation, est étalée, au plus grand bonheur des exploitants et des consommateurs !

La mangue Heidi, introduite d’Afrique du Sud à La Réunion par le Cirad, est commercialisée depuis 5 ans. © F. Normand, Cirad

Le Cirad a donc cherché à diversifier la gamme du fruit oblong, sachant qu’il existe plus de 1000 variétés de mangues dans le monde et que tout de même presque « 80 sont nées ici à La Réunion » précise

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Frédéric Normand, chercheur au Cirad. « Elles représentent une grande diversité de forme, de taille, de couleur et de saveur ». C’est dans ce contexte que le Cirad a introduit de nouvelles variétés, les a plantées et évaluées dans les années 2000. De la vigueur de l’arbre à sa sensibilité aux maladies et ravageurs, en passant par le rendement au cours des années, la qualité des fruits : tout a été décortiqué. Des visites des vergers et des dégustations pour présenter les nouvelles variétés ont été organisées pour les producteurs, avec des fiches de présentation variétale mises à disposition. Résultat : Nam Doc Maï, Heidi et depuis peu, Tommy Atkins, agrémentent nos desserts ! Pour accéder aux fiches variétales : https://cosaq.cirad.fr/content/download/4354/32357/version/1/file/fiches+vari%C3%A9tales+mangues+2017.pdf

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À MAYOTTE

ÉROSION DES SOLS

En raison des pluies tropicales, les zones urbanisées ou victimes de la déforestation à Mayotte subissent une importante érosion. Or, les sédiments arrachés au sol contribuent à l’envasement du lagon. Le BRGM, le Cirad, l’Irstea et leurs partenaires étudient le phénomène pour mieux l’anticiper.

Lutter contre l’envasement du lagon

Troisième plus grand lagon du monde, le lagon de Mayotte est fortement menacé par l’envasement causé par l’érosion. © J. Huat, Cirad

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e bassin versant de Mtsamboro au nord de Mayotte, en voie de forte urbanisation, a produit pas moins de 4,8 t/ha de sédiments sur la période 2015-2017. Une érosion importante que le BRGM, le Cirad, l’Irstea, avec la CAPAM et l’association Les Naturalistes de Mayotte, ont pu mesurer dans le cadre du projet de lutte contre l’érosion des sols et l’envasement du lagon de Mayotte (Leselam).

L’Irstea et le Cirad ont effectué des mesures hydrométéorologiques et sédimentaires sur les bassins versants de Dzoumogné, Mtsamboro et Hajangoua*. Les premiers résultats montrent la très forte contribution des zones d’habitat à l’érosion des sols et à l’envasement du lagon. Sur le bassin d’Hajangoua également urbanisé, le taux d’érosion a été de 2,4 t/ha – un niveau moyen – contre seulement moins de 0,1 t/ha – un niveau très faible – sur celui de Dzoumogné, exclusivement agroforestier.

« D’ici 2020, nous allons poursuivre les mesures pour consolider ces premiers résultats, caractériser et modéliser les mécanismes biophysiques en jeu afin de développer un outil de prévision de l’érosion applicable à l’ensemble des bassins versants de l’île », précise Jean-Marie Lopez, agronome spécialiste de la gestion de l’eau au Cirad. Les informations issues des observations de terrain et des simulations du modèle seront transmises aux différents acteurs de la société mahoraise en vue d’un plan d’actions de remédiation.

* Le dispositif de mesure comprend un réseau de stations automatiques hydrologique, pluviométrique, météorologique et sédimentaire ainsi qu’une douzaine de parcelles d’érosion de 100 m2 situées sous forêt, sur padza et en zones agricole et d’habitat rural.

Bertrand WYBRECHT, directeur adjoint de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt de Mayotte

« Dans un département où la pression démographique est extrêmement élevée - près de 700 habitants/km2 - et où les modes de vie évoluent très rapidement, la mise au point de nouvelles références techniques en agriculture et en élevage et leur diffusion rapide dans les exploitations est essentielle. Le Cirad joue, au travers des projets du Réseau d’Innovation et de Transfert Agricole (RITA), un rôle majeur de pilote du continuum recherche – formation – innovation sur le territoire mahorais. L’animation de la relation entre les chercheurs, les professionnels agricoles et l’enseignement agricole public a permis entre 2015 et 2017 de mettre au point et de diffuser des innovations au service, en particulier, d’une agriculture plus productive et moins dépendante des produits phytosanitaires et des engrais de synthèse. Gageons que la nouvelle phase du RITA qui vient de s’ouvrir pour 3 ans permettra de poursuivre ce travail au profit des agriculteurs et des consommateurs mahorais ! »

Fatimatie BINTIE DAROUECHI RAZAFINATOANDRO, Conseillère départementale de Tsingoni

« Redynamiser les filières agricoles »

« La collaboration du Conseil Départemental de Mayotte avec le Cirad prend sa source en 1995 sous forme de conventions tripartites Etat/Conseil Général/Cirad, puis à travers le Réseau d’Innovation et de Transfert Agricole (RITA) en 2014. Cette collaboration a permis de mettre en place des mesures efficaces de lutte contre l’érosion des sols, de vulgariser les notions de plantes de services et d’amendement organique auprès des petits producteurs, et surtout de mettre à disposition de tous un matériel végétal sain, sélectionné à la station agronomique de Dembéni. Aujourd’hui, les priorités du Conseil Départemental ont évolué. L’intensification agro-écologique des cultures vivrières pour augmenter leur productivité et la labélisation des cultures dites de rente et d’exportation sont deux des leviers pour redynamiser les filières agricoles mahoraises. Ces priorités sont intégrées dans les travaux du RITA, à travers les projets Innoveg et Bioferm. Le Conseil Départemental se félicite par ailleurs de l’implication du Cirad dans les projets de regénération du parc agrumicole de Mayotte et de production de rejets de bananiers par la technique du PIF (plants issus de fragments de tige). La formation continue des techniciens de la station agronomique de Dembéni est également assurée par le contact permanent de nos techniciens avec les ingénieurs et chercheurs du Cirad. Ce renforcement des compétences est indispensable pour qu’ils puissent être pleinement acteurs dans le transfert aux agriculteurs des résultats obtenus. »

CONTRE LES MOUCHES DES FRUITS

Le succès des filets anti-insectes Dacus ciliatus est une mouche qui s’attaque aux fruits de la famille des cucurbitacées (courgette, concombre, melon …) les rendant impropres à la consommation par pourriture. Les traitements insecticides s’avérant inefficaces, le Cirad, le lycée agricole de Coconi, la chambre d’agriculture et la coopérative des agriculteurs du centre (Coopac) ont testé et diffusé une méthode de gestion agro-écologique de ce ravageur. Il s’agit d’utiliser des filets anti-insectes sur des abris bas, pour empêcher les femelles de cette mouche de pondre sur les jeunes fruits d’une culture de courgettes. Parallèlement, un augmentorium a été installé dans lequel sont déposés les fruits

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Avec les filets, les pertes de curcurbitacées sont réduites de 60 à 70%.

piqués, que les exploitants doivent ramasser. Ce système permet d’accroître la production de parasitoïdes (Psyttalia insignipennis). Le dispositif permet de s’affranchir des traitements insecticides et de réduire les pertes de fruits piqués de 60 à 70 %. Le gain de rendement est alors appréciable (plus de 2 kg/m2) et permet de rentabiliser l’abri en quelques cycles de production.

© J. Huat, Cirad

© Daaf Mayotte

« Le Cirad, partenaire incontournable du dispositif de recherche-innovation à Mayotte »

© Conseil départemental Mayotte

La parole à nos partenaires

La même technique avec l’usage de filets est en cours d’adaptation pour lutter contre la mouche de la tomate, Neoceratitis cyanescens, et la mineuse des feuilles Tuta absoluta. « Les perspectives sont prometteuses », assure Joël Huat.

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DÉFI ANIMAL

Soutenir les filières d’élevage

«

Qui n’a pas entendu parler de grippe aviaire ou encore de fièvre aphteuse ? » Selon Éric Cardinale, responsable de l’équipe Cirad Santé animale de l’océan Indien, les risques sanitaires liés au fort développement des filières d’élevage de Mayotte ne sont pas à prendre à la légère. « Le climat tropical humide et la possible introduction de maladies en provenance des pays voisins font que le risque d’épizooties est conséquent », alerte-t-il. Par ailleurs, suite à sa départementalisation en 2011, Mayotte doit désormais obéir aux règles sanitaires strictes de la loi française. Cinq études ont été réalisées de 2016 à aujourd’hui. « Nous avons identifié les causes majeures de mortalité des ruminants, procédé à l’analyse des élevages de volailles, et mis en place une surveillance épidémiologique », détaille le

chercheur. « Ce travail n’aurait pu voir le jour sans nos partenaires, la coopérative des éleveurs de Mayotte (Coopadem) et la coopérative mahoraise d’aviculture (Comavi), en lien avec la DAAF dans le cadre du Rita, Réseau d’innovation et de transfert agricole ».

À MAYOTTE

Les filières d’élevage se transforment à un rythme soutenu à Mayotte. Face aux risques sanitaires, le Cirad soutient les éleveurs dans le développement de leur profession.

Quelques salmonelles non règlementées ont été repérées dans des élevages avicoles, attestant de potentielles failles techniques, et certaines maladies cutanées chez les ruminants seraient évitables par des traitements adéquats. Jour après jour, les professionnels font des efforts, notamment en matière de biosécurité, de qualité d’aliment et de méthodes de travail. Eric Cardinale est confiant : « Notre attention est aujourd’hui mieux ciblée grâce à cette approche commune ».

© Cirad

Le Cirad cherche à préserver les élevages mahorais de possibles épizooties.

CONSERVER ZEBUS, MOUTONS ET CHEVRES LOCALES Les races locales de ruminants sont aujourd’hui menacées à Mayotte par les croisements avec les bovins, moutons et chèvres importés. Or, ces races constituent un réservoir de gènes d’adaptation précieux, à préserver pour faire face aux contraintes climatiques, alimentaires et sanitaires. La coopérative agricole des éleveurs et la chambre d’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture de Mayotte se sont associées au Cirad au sein du projet DEFI ANIMAL (2015-2017) pour caractériser ces animaux, d’un point de vue génétique et démographique*. Les résultats obtenus confirment l’originalité de la race zébu et de la race ovine à Mayotte et la nécessité de conserver ces deux races. La population de zébus est présente à Mayotte depuis 800 à 900 ans. Cette race représente, avec celle de Madagascar, les populations de zébus les plus proches génétiquement des races indiennes du berceau d’origine dans la vallée de l’Indus, dont ils sont originaires. Quant au mouton mahorais, il est proche de la race Red Massaï (Afrique de l’Est) et de races originaires du Moyen-Orient. Son arrivée à Mayotte coïncide avec celle de la race zébu. L’analyse génotypique a révélé des populations homogènes, peu métissées et peu consanguines, et ayant développé des capacités d’adaptation propres à l’environnement contraint de l’île.

SANTÉ PUBLIQUE

La fièvre de la Vallée du Rift n’est plus un problème à Mayotte

© Cirad

*Ces recherches et le transfert d’innovation (RITA) s’inscrivent dans la promotion d’un modèle d’exploitation familiale agro-écologique et bioéconomique, plus autonome et économe, valorisant les ressources locales, respectueux de l’environnement, et améliorant le revenu des éleveurs.

En l’absence de nouvelles introductions d’animaux virémiques, les risques de persistance de la FVR resteraient inférieurs à 10 %.

Fièvre, avortements et forte mortalité. Tel est le tableau clinique alarmant de la fièvre de la vallée du Rift (FVR), transmise par une grande diversité de vecteurs et touchant les humains comme les animaux. Lorsqu’un cas humain est détecté à Mayotte en 2007, le Cirad s’est immédiatement impliqué avec ses partenaires. « Avec la coopérative des éleveurs mahorais (CoopADEM) et le groupement de défense sanitaire (GDS) de Mayotte, des études rétrospectives et prospectives ont été déployées dans la population animale pour élucider les raisons de cette émergence, raconte Raphaëlle Métras, vétérinaire épidémiologiste. Il fallait comprendre l’épidémiologie de la maladie sur le territoire, appréhender le potentiel épidémique de l’île et conseiller les stratégies de surveillance à mettre œuvre par le réseau SESAM (système d’épidémiosurveillance animale à Mayotte). »

En 2017, Lisa Cavalerie présente sa thèse sur la persistance de la FVR à Mayotte sur la période 2012-2013. « Une diminution continue du nombre d’animaux ayant été exposés au virus a été observée, déclare la doctorante. Par ailleurs, notre modèle estimait que la probabilité de transmission de la maladie par des vecteurs était cinq fois plus faible qu’attendue ». En l’absence de nouvelles introductions d’animaux virémiques, les risques de persistance de la FVR resterait en effet inférieurs à 10 %.

Les résultats ont montré que la maladie circulait déjà probablement chez les ruminants domestiques de l’île depuis 2004, mais sans manifestation clinique identifiée. « L’émergence de 2007 résultait vraisemblablement de l’épidémie de FVR de la corne africaine en 2006-2007. Des mouvements récurrents d’animaux entre l’Afrique continentale, l’Union des Comores et Mayotte auraient contribué à maintenir la circulation du virus sur l’île

À ce jour, la surveillance en santé humaine a été arrêtée, le dispositif ne concerne que la santé animale. Lisa Cavalerie, désormais docteur en épidémiologie, précise qu’une récente démarche d’épidémiologie participative a permis d’évaluer les problèmes sanitaires spontanément rapportés comme les plus importants par les éleveurs mahorais : « La FVR n’en fait pas, ou plus partie ».

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© Cirad

jusqu’en 2010 », explique le Dr. Métras. Une hypothèse confirmée par de nouvelles études menées après 2010. « En effet, très peu de jeunes animaux positifs, nés directement sur place, ont été détectés au cours des cinq dernières années », ajoute-t-elle.

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* 2017

LE CIRAD À LA RÉUNION EN CHIFFRES*

RESSOURCES 22 Me de budget annuel

RECHERCHE 96 publications de rang A

92 communications orales

184 permanents dont 73 chercheurs 102 techniciens scientifiques et assistants

ENSEIGNEMENT 41 t hèses en cours dont 7 bourses Cifre

PARTENARIAT 70 institutions partenaires locales, dont 9 accueillies 16 institutions partenaires à l'étranger 251 missions vers 40 pays étrangers

100 stagiaires encadrés 200 h eures de cours et travaux pratiques 6 s éminaires et écoles-chercheurs organisés

http://reunion-mayotte.cirad.fr/ > Rubriques : P ublications et ressources

Le musée Stella Matutina accueille jusqu’au 31 juillet, en entrée libre, Escales Outre-mer. Cette exposition inédite, soutenue par le Cirad, met à l’honneur la biodiversité ultramarine.

Les photographies « macro » d’insectes d’Antoine Franck du Cirad y ont été sélectionnées. Parrainée par l’Agence Française de la Biodiversité, soutenue par quatre minis-

tères, dont celui des Outre-mer, l’exposition a déjà été vue par plus de 100 000 visiteurs en métropole. Elle est portée dans sa version internationale par l’IUCN.

Réalisation de cette exposition : OcéaIndia / Stéphanie Légeron

© A. Franck, Cirad

FOCUS

& Enseignement et formation

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