Architecture hospitaliere Belgique été - automne

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. LUXEMBOURG CENTRE HOSPITALIER EMILE MAYRISCH Südspidol : innovation et ambition pour répondre aux défis de l’hôpital de demain


SOMMAIRE DOSSIER SPECIAL Japon :l’international comme terre d’échange et d’inspiration au service des acteurs de l’hôpital de demain

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MEDICO-SOCIAL Une architecture du « sensible » pour des établissements connectés et ouverts sur la ville

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PORTRAIT ar-te | archipelago | baev Le souci du bien-être du patient, de l’accueil du visiteur et des conditions de travail du personnel

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SUIVI DE PROJET Hôpital Universitaire de Louvain : Health Sciences Campus : des projets de premier ordre alliant soins de santé, innovation et éducation

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COMMUNICATION – REGARD D’EXPERT La bonne communication : élément essentiel de la stratégie de l’hôpital

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PLATEAU TECHNIQUE Le nouveau centre de traitements des brûlés de l’Hôpital d’Instruction des Armées Percy : une opération de très haute technicité

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ARCHITECTURE & CONCEPTION Pôle santé de l’agence Art & Build : définir l’hôpital de la prochaine décennie

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PROJETS & AMENAGEMENTS Gerflor : des solutions techniques et esthétiques pour répondre aux besoins des professionnels de santé

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REGARDS D’EXPERTS - ARCHITECTURE Centre Hospitalier Chrétien – CHC : nouvel hôpital du Montlégia (Liège), un projet très ambitieux pour un établissement à taille humaine

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GRANDS REPORTAGES Centre Hospitalier Emile Mayrisch : innovation et ambition pour répondre aux défis de l’hôpital de demain

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Grand Hôpital de Charleroi : construire le premier hôpital belge de nouvelle génération

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CHR de la Citadelle : en route vers l’hôpital du futur…

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INTERNATIONAL Principauté de Monaco – Centre Hospitalier Princesse Grace : un nouvel hôpital tourné vers l’avenir

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© Francois Mainil

ar-te | archipelago | baev Le souci du bien-être du patient, de l’accueil du visiteur et des conditions de travail du personnel

PORTRAIT

Clinique Saint-Pierre Ottignies – Aile 800 (baev)

Les bureaux d’architecture ar-te et baev ont décidé de former un groupe intégré à l’échelle du territoire belge. En créant ce groupe, arte et baev apportent ainsi une réponse originale à un défi de développement sur la totalité du pays, ceci pour un bureau d’architecture francophone et un néerlandophone. Situé à Bruxelles, le Bureau Architecture Engineering Verhaegen (baev) a été fondé il y a plus de cinquante ans par Emile Verhaegen. Au fil des années, le bureau a évolué, il s’est agrandi et s’est orienté vers des projets intégrants des éléments de haute technologie. Bien qu’il soit présent dans la plupart des secteurs d’activités, baev est particulièrement reconnu dans le secteur de la santé, de l’enseignement et de la recherche. Les compétences dans l’architecture hospitalière se sont transmises et développées au fil des expériences successives entre des collaborateurs fidèles à l’esprit du bureau. De son côté, basé à Wijgmaal près de Leuven, ar-te est un bureau d’architecture né en 1995 au sein d’un bureau d’ingénieurs. Depuis, ar-te est devenu indépendant et a constitué un réseau puissant dans la région du Brabant flamand et du Limbourg. Le bureau est un des leaders du secteur des soins de santé en Flandre. Certifié ISO 9001, ar-te mise sur la qualité, l’orientation vers le client, l’architecture fonctionnelle et une expertise en matière de gestion de projet. Le groupement de ces deux bureaux rassemble désormais plus de 75 architectes et 45 collaborateurs techniques et administratifs autour d’un projet commun. La relation de confiance et de proximité avec le client fait partie de l’ADN des deux partenaires. Les deux entités conservent donc leur ancrage géographique au plus près de leur clientèle tout en élargissant leur offre de services et leur expertise partagée.

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Propos recueillis auprès de Nicolas Van Oost, ingénieur architecte baev et président d’archipelago, et Dirk D’herde, ingénieur architecte et administrateur délégué d’ar-te. a semblé crucial. Pour ce faire, disposer de la dimension suffisante était indispensable pour nous permettre de tels investissements. Nous avons donc choisi de nous associer avec un partenaire présent sur le territoire francophone. Cette structure devait disposer de compétences complémentaires aux nôtres et partager notre vision et notre approche du métier d’architecte spécialisé en santé. Nous avons reçu des réponses favorables et avons organisé des rencontres avec trois bureaux différents avant de finalement retenir la proposition du Bureau Architecture Engineering Verhaegen (baev). Comment définiriez-vous la philosophie d’ar-te ? Dirk D’herde : En tant qu’architectes spécialisés en santé, nous nous considérons plutôt comme des prestataires de services et non comme des artistes. Aussi, nous attachons une grande importance à la qualité de nos réponses finales et à l’efficience des processus que nous mettons en place pour concevoir et concrétiser nos projets. Nous tentons toujours d’élargir la notion de ‘client’ et de prendre au maximum le contexte en considération. Dans ce sens, le client et ses besoins priment sur le caractère culturel du bâtiment. Quelles sont les forces d’ar-te ? Dirk D’herde : Outre sa philosophie et ses valeurs, notre agence bénéficie d’une grande expérience et est reconnue pour sa fiabilité. Nous comptons aujourd’hui 55 collaborateurs au sein de nos équipes et atteindrons les 60 au cours de l’année.

© Lumecore/Toon Grobet

L’agence d’architecture ar-te… Dirk D’herde : Notre bureau d’architectes existe depuis 20 ans. Il est issu d’une structure plus généraliste regroupant architectes et ingénieurs, elle-même intégrée au Boerenbond, une association du secteur de l’agriculture bien implantée en Flandre. Avoir fait partie de cette organisation à la fois vaste et très diversifiée nous a permis de multiplier les expériences et d’intervenir dans de nombreux domaines afin de répondre au mieux aux demandes de nos clients. Cette adaptabilité et l’élasticité des compétences représentent encore aujourd’hui une partie de l’identité de l’agence ar-te. Jusqu’à la fin des années 90, nous intervenions auprès de maîtrises d’ouvrage qui n’utilisaient pas elles-mêmes les structures commandées. C’est durant cette période que nous avons décidé de nous remettre en question et de redéfinir l’évolution de l’agence vers une organisation plus ciblée et spécialisée. En analysant les opportunités et nos compétences, nous avons décidé de nous spécialiser dans l’hospitalier, la filière gériatrique et l’administratif. Cette stratégie nous a permis d’intégrer le projet de construction du CHU de Louvain en 2005 (Gasthuisberg). Depuis lors, nous développons nos activités dans le médico-social, notamment les hôpitaux et les maisons de soin et de santé. En 2014, nous avons une nouvelle fois revu notre stratégie et notre ambition autour du développement de notre structure. Le secteur de la santé étant très dynamique, investir dans la recherche et l’innovation nous

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UZ Leuven – Services Critiques (ar-te / dJGA)


Architecture hospitalière - numéro 10-11 - Eté-Automne - 2017 - baev | archipelago | ar-te

© Micha Vandormael

UZ Gent – Hôpital des Enfants (ar-te / dJGA)

ZOL Genk – Centre ambulatoire André Dumont (ar-te)


© Francois Mainil

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Le Bureau Architecture Engineering Verhaegen… Nicolas Van Oost : Notre agence existe depuis près de 50 ans et regroupe plus de soixante collaborateurs. Notre priorité est la compréhension des besoins et des programmes spécifiques qui nous sont adressés. Nous devons réfléchir, avec le maître d’ouvrage, à la meilleure façon de traduire ce programme en un bâtiment agréable à vivre et pleinement conforme à son usage. Nous intégrons également dans chacun de nos projets le respect de l’environnement et l’intégration sur site. La philosophie de baev rejoint en de nombreux points celle d’ar-te. Au sein d’archipelago, nous reprenons à ar-te sa segmentation des activités dans le domaine de la santé. Le premier segment est dédié à nos projets hospitaliers. Le deuxième comprend tous les projets publics avec des écoles, des maisons de retraite, des crèches et des logements sociaux, entre autres. Le troisième segment englobe les projets de quartiers généraux, laboratoires de recherche et d’autres investissements privés. Cette notion de segmentation est très intéressante pour baev. Elle apporte une distinction nouvelle dans nos démarches de prospection en définissant une conception verticale d’un projet et trois approches claires nous permettant d’être plus précis et efficaces. Auparavant, au sein de l’agence, nous marquions une vision plus horizontale, et faisions une unique distinction entre les concepteurs et les « réalisateurs » d’un projet. De ce fait, les équipes étaient spécialisées pour différentes phases de mise en œuvre d’une opération. En fondant archipelago, nous avons allié les organisations horizontale et verticale de baev et d’ar-te en développant une approche commune de la conception. Sur la base d’un concept, nous définissons tous les éléments intégrés au projet, que nous soumettons à un entrepreneur. De ces données, nous concrétisons un bâtiment en sollicitant des équipes pluridisciplinaires intégrant, entre autres, des profils spécialisés sur la qualité, les coûts et les délais. Après avoir collaboré pendant 18 mois, nous avons uni nos deux agences le 22 décembre 2016 au sein d’archipelago, tout en conservant les deux sociétés ar-te et baev.

© Francois Mainil

CHU Saint-Pierre – Site César de Paepe (baev)

CHWapi Tournai – Site Union (baev)


Architecture hospitalière - numéro 10-11 - Eté-Automne - 2017 - baev | archipelago | ar-te

Quelle œuvre architecturale symboliserait-elle au mieux l’association de vos deux agences ? Notre rapprochement serait bien représenté par une œuvre de Christo, « Surrounded Islands ». Cet artiste américain est connu pour ses œuvres et projets dans lesquels il emballe des monuments, des structures ou des paysages symboliques. Il a notamment entouré plusieurs îles de tissus tendus qui symboliseraient le mieux notre structure par leur couleur magenta, également utilisée pour la charte graphique d’archipelago. Cette œuvre traduirait également le caractère audacieux de nos deux agences. Quels projets ar-te et baev mettent-ils en œuvre ? « ar-te | archipelago | baev » regroupe l’ensemble du personnel de nos deux agences, mais nous conservons néanmoins nos marques respectives. Ce fonctionnement est essentiel car nos deux structures répondent à des clients différents par leurs secteurs d’activité et leurs langues. Ainsi, les projets de clients néerlandophones sont idéalement abordés par ar-te tandis que les clients francophones sont accompagnés par baev. Cependant, pour certains projets aux ambitions particulièrement larges ou nécessitant des références communes, nous pouvons associer nos deux bureaux afin d’apporter la meilleure réponse. Dans les projets pour lesquels nous nous associons, nous dépassons souvent le stade de la candidature grâce à nos références communes et enrichissons nos réponses par la constitution d’équipes mixtes. Nous avons remporté de la sorte les marchés de maisons de retraite à Florennes et à Ganshoren, ainsi qu’un développement résidentiel à Ruisbroek. De plus, nous investissons en commun dans la

recherche et l’innovation au sein de notre « archipelago academy ». Elle comprend un programme de formation interne visant à disposer de spécialistes au sein de nos deux bureaux durant la conception des projets. Enfin, nous cultivons également nos relations avec le monde académique, notamment en participant à des programmes d’étude et en sponsorisant un doctorat. Comment avez-vous décidé d’accompagner le changement suite à votre association ? Durant sa recherche de partenariat, ar-te a été appuyé par un consultant. Ce dernier a ensuite aidé archipelago à construire son organisation commune durant les 9 premiers mois de notre regroupement. Aujourd’hui, la plupart de nos collaborateurs se connaissent, notamment grâce aux rencontres internes que nous organisons régulièrement. Ces rendez-vous prennent la forme de sessions de travail sur des projets, de sessions de notre ‘archipelago academy’ ou encore d’activités de groupes durant lesquelles nous formons des équipes mixtes entre nos deux agences. Quelles ont été les conséquences de votre regroupement sur votre management des relations humaines ? Les changements sont toujours en cours de réalisation. Avec notre groupe de 120 personnes, nous pouvons largement retravailler et analyser à nouveau les compétences de nos collaborateurs. Nous pourrons ainsi leur proposer les projets les plus adaptés à leurs compétences et leurs aspirations. Lorsque nos équipes étaient plus réduites, nos collaborateurs ne pouvaient pas toujours choisir car toutes nos ressources devaient être employées à un projet. De plus, nos effectifs comptent des collaborateurs rompus à la conception et la construction hospitalière et d’autres qui n’ont que quelques années de métier mais une imagination très large. De leurs échanges éclosent des résultats surprenants qui aboutissent à des projets particulièrement innovants. Nos compétences complémentaires et notre proximité garantissent également aux spécialistes de chaque bureau d’intervenir auprès des équipes engagées dans un projet spécifique pour les appuyer sur des aspects très techniques des opérations. Ces échanges aident nos collaborateurs à parfaire leurs connaissances et valorisent également les compétences de nos profils les plus spécialisés. Ils bénéficient de l’opportunité de présenter devant leurs collègues le fruit de leurs études et de leurs recherches.

© Aimed

Quels sont les profils des collaborateurs d’ar-te et baev ? Parmi les 55 employés du bureau ar-te, nous comptons 35 architectes, 15 techniciens et 5 profils administratifs. L’agence baev, quant à elle, rassemble environ 60 collaborateurs dont une quarantaine d’architectes, une dizaine d’ingénieurs spécialistes et techniciens et une dizaine de postes administratifs. Une grande partie de nos architectes disposent d’une formation d’ingénieur civil d’un caractère scientifique assez poussé. Leurs expériences sur nos nombreux projets et cette formation leur permettent d’être spécialisés dans le domaine de la santé, y compris ses aspects les plus techniques. Nos équipes pluridisciplinaires intègrent aussi des ingénieurs spécialisés en fluides et équipements médicaux, capables de gérer des marchés très spécifiques.

ZOL Genk – Parking (ar-te)

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Comment définiriez-vous votre politique d’ouverture ? En multipliant nos effectifs, nous augmentons parallèlement nos possibilités de prospection. Ainsi, nous disposons d’opportunités plus fréquentes pour nous positionner sur certains projets. Par exemple, les hôpitaux flamands opèrent depuis quelques années le regroupement de leurs activités logistiques sur des plateformes communes. L’agence ar-te est déjà positionnée sur plusieurs de ces projets, déjà achevés ou en cours de réalisation. Alors qu’ils commencent à s’intéresser à ce type d’opérations, les hôpitaux francophones sont très demandeurs du retour d’expérience d’ar-te et nous sollicitent afin d’organiser des rencontres. Dans l'autre sens, baev dispose d'une expertise concrète en matière de construction modulaire préfabriquée dans le secteur hospitalier via des projets réalisés à Bruxelles et en Wallonie. Ce type de construction, qui permet de raccourcir significativement les délais de chantier tout en offrant une infrastructure de qualité et de durabilité comparable aux bâtiments traditionnels, suscite un intérêt croissant dans le domaine de la santé. Nos contacts et nos compétences conjugués facilitent donc l’accés à bien plus de propositions et de projets. Notre rapprochement est particulièrement pertinent dans le domaine de la santé car certains opérateurs exerçant dans les régions flamande et wallonne apprécient de collaborer avec une entité également présente et expérimentée sur ces deux territoires. Comment envisagez-vous l’évolution du secteur de la santé au sein d’archipelago ? Ce domaine va rester au cœur de nos activités mais le type de maîtrise d’ouvrage va évoluer. Auparavant, les maîtres d’ouvrage étaient également utilisateurs. Aujourd’hui, nous voyons un nombre croissant d’acteurs privés s’impliquer dans le management et la réalisation de projets sans être utilisateurs de la structure finale. D’autre part, avec le vieillissement de la population et les besoins de prise en charge, les projets résidentiels et médicosociaux sont toujours très importants. En Flandre, les structures dédiées à la prise en charge des personnes âgées deviennent résidentielles avec des niveaux de soins flexibles en fonction de l’état de dépendance de la personne. Ce fonctionnement est en cours de développement et représente un défi important pour l’exploitation. Les subventions de l’État pour ce secteur tendent à diminuer. Nous comprenons cette mutation et les besoins de prise en charge assurés par les structures privées.

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Cette évolution impliquant différents niveaux de soins au sein d’un unique établissement va-t-elle modifier votre conception de la flexibilité des bâtiments ? Notre vision de la flexibilité va très certainement être impactée par l’évolution de la prise en charge des personnes âgées. Outre la flexibilité, la notion d’agilité apparaît aujourd’hui pour définir la capacité d’un établissement à toujours s’adapter avec succès aux changements d‘activités. Cette agilité de la structure repose sur de nombreuses qualités parmi lesquelles l’extensibilité et l’intégration dans son environnement. Ainsi, l’architecte doit penser le bâtiment de sorte qu’il soit d’une grande agilité dans sa forme mais également vis-à-vis de la ville. Dans le cadre de notre refonte stratégique, nous avons défini une équation nous permettant de mesurer la qualité d’un projet selon un dénominateur et un numérateur. Le numérateur comprend les aspects de programmation (fonctionnalité, réponse aux besoins du client), l'expérience (vécu et

bien-être de l'utilisateur) et la durabilité (qualité environnementale, agilité, évolutivité). Il reprend la philosophie de nos agences de respecter les besoins du client en proposant un outil pleinement adapté à ses attentes. Le dénominateur représente, quant à lui, le TCO (Total Cost of Ownership). Il s’agit d’un quotient traduisant le coût d’un bâtiment pour l’ensemble de son cycle (construction, exploitation, réaffectation ou déconstruction) dont le résultat doit être le plus efficace possible. À ces données s’ajoute le contexte de chaque projet car nous attachons une grande importance à cette notion qui impacte très profondément notre réponse architecturale. L’expérience, la recherche et l’innovation sont des éléments cruciaux pour nous assurer des meilleures réponses. Comment devenir plus efficient en tant qu’architecte spécialisé dans le domaine de la santé ? Il est important de proposer une architecture particulièrement humaine car ces établissements reçoivent une population fragilisée. Le monde hospitalier dramatise l’aspect vécu en architecture, en ce que toutes les expériences que vivent les utilisateurs au sein de l’hôpital sont démultipliées sur le plan émotionnel. De plus, une structure hospitalière est un acteur économique et un employeur important ainsi qu’un lieu de recherche et d’enseignement. Il nous faut donc aussi penser aux professionnels travaillant dans ou autour des espaces que nous concevons, au même titre que les patients et les visiteurs qu’ils accueillent. D’autre part, en tant qu’architectes, notre rôle est de questionner un programme préétabli par la maîtrise d’ouvrage. Nous apportons une plusvalue en nous interrogeant sur ce programme pour le comprendre. Le but est de proposer d’éventuelles solutions plus adaptées au besoin du client, tout en respectant la nécessité, pour l’hôpital, de maîtriser les coûts de son projet. Cette vision approfondie va au-delà du domaine architectural, notamment en matière de qualité énergétique. Ce fonctionnement est un atout qui se traduit par des éléments concrets et pertinents apportés au projet et par la mise en place d’une relation de confiance entre le client et nos équipes. Par ces discussions et une compréhension totale des attentes et des enjeux liés au projet, nos équipes peuvent créer le bâtiment le plus agile et le plus performant. Comment les professionnels de santé vous accompagnentils dans votre conception de l’hôpital de demain ? Nous formons un comité de pilotage pluridisciplinaire autour de chacun de nos projets majeurs. Nous regroupons des spécialistes de secteurs différents pour disposer d’une vision élargie de chacune de nos opérations. Ainsi, nous impliquons philosophes, artistes ou urbanistes, entre autres, pour développer nos réflexions et enrichir l’approche de nos équipes. Dans le cadre des concours, nous sollicitons également des professionnels de santé et utilisateurs d’autres établissements pour recueillir les réactions quant à l’évolution d’un projet. Comment voyez-vous le développement d’archipelago pour les années à venir ? Notre structure est opérationnelle, nous perfectionnons notre organisation horizontale (conception, développement et réalisation) ainsi que notre segmentation (hôpitaux, logements et soins, industrie, bureaux et résidences). Forts de cette synergie, nous poursuivons de grandes ambitions, y compris au plan international.


© ar-te l dJGA

SUIVI DE PROJET

Centre pour Protonthérapie & MRT, ParTICLe l 5.800m² l maître d’ouvrage UZ Leuvenarchitecture archipelago l ar-te avec dJGA l stabilité & techniques STABO

Hôpital Universitaire de Louvain Health Sciences Campus : des projets de premier ordre alliant soins de santé, innovation et éducation L'Hôpital Universitaire de Louvain (Universitaire Ziekenhuizen Leuven) est la référence en matière de soins médicaux de qualité et innovants. Au fil des ans, il s'est développé au point de devenir l’un des plus grands hôpitaux du pays. En 2004, l’établissement a engagé un vaste plan directeur ayant pour objectif de rassembler l’ensemble de ses activités de soins aigus sur son site principal. Avec ce projet, l’UZ Leuven souhaitait ainsi disposer d’un lieu unique dédié à la recherche et à l’activité clinique, un véritable Health Sciences Campus regroupant le plus grand nombre d’acteurs du domaine de la santé, et non uniquement les hospitaliers. Ainsi, au sein de ce campus, toutes les activités envisagées sont soutenues par les acteurs externes à l’hôpital ou à l’université souhaitant participer à des actions de recherche. Une vingtaine de projets a été lancée afin de parvenir à cet objectif. Les projets en cours devraient aboutir à horizon 2020 et 2021. Une dizaine de ces projets seront ainsi achevés. L’établissement lance également la mise en œuvre de nouvelles opérations qui devraient, quant à elle, s’achever entre 2022 et 2025.

Présentation avec le Dr Wim Tambeur, directeur opérationnel

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L’Hôpital Universitaire de Louvain… Wim Tambeur : L’UZ Leuven est un hôpital universitaire qui entretient des activités de soins à la population, de recherche et d’innovation, et d’enseignement. Ces missions sont assez classiques mais nous les avons renforcées et modifiées afin de mieux les intégrer et intensifier les relations entre l’université et l’hôpital. Grâce à cette politique, nous avons pu rapidement définir les points communs entre nos deux institutions. De nombreux travaux d’innovation ont été organisés afin de fluidifier les liens entre recherche et soins au patient.

Quelles sont les activités d’excellence de l’hôpital ? W. T. : Depuis les années 2000, l’hôpital a évolué pour passer de 350 à 150 lits dédiés aux pathologies courantes. Les pathologies les plus aigües ou complexes représentent environ 10 % du volume d’activité de l’hôpital et occupent un tiers de ses capacités. Parmi ces actes, nous retrouvons les transplantations, les pathologies congénitales complexes et l’oncologie. Le taux d’ambulatoire est très satisfaisant pour ces activités. En dehors de la psychiatrie, l’établissement compte 1500 lits pour assurer ses missions de prise en charge de la population.


Architecture hospitalière - numéro 10-11 - Eté-Automne - 2017 - Hôpital Universitaire de Louvain

Cette capacité n’est-elle pas trop élevée au regard de l’évolution du système de santé ? W. T. : Nous avons largement abordé cette question capacitaire en interne. En 2000, les instances de santé ont décrété que les hôpitaux devaient maintenir une capacité maximale de 1000 lits pour gérer au mieux une situation de crise majeure, notamment sur le plan financier. Or, la stratégie de l’hôpital a toujours été de centraliser et de concentrer les activités de prise en charge avec, entre autres, une grande capacité permettant un volume d’actes important et l’acquisition des dernières technologies les plus efficaces. Aujourd’hui, la technologie devient toujours plus accessible et miniaturisée. Mais les activités de recherche et d’innovation nécessitent néanmoins que l’hôpital maintienne de bonnes capacités et un volume de patients suffisant. Aujourd’hui, nous visons la création de notre Health Sciences Campus permettant le rapprochement de l’ensemble des acteurs de la recherche et du domaine clinique.

Comment avez-vous entrepris le virage ambulatoire du centre hospitalier ? W. T. : Nous poursuivons nos efforts dans le domaine de l’ambulatoire car l’activité n’est pas encore assez développée au niveau national. De très nombreuses activités ambulatoires ont été institutionnalisées et concentrées dans les hôpitaux. L’établissement a connu une forte croissance des hospitalisations de jour et continue ses démarches pour nouer de nouveaux liens et renforcer ses relations avec les partenaires du territoire. Le « one-night stay », par exemple, que nous envisageons de développer, demande l’adaptation de nos processus internes mais également des aménagements pour les procédures avant et après hospitalisation. Cependant, cette collaboration est indispensable. L’hôpital unique concentrant toutes les installations de prise en charge des pathologies aigües ne me semble pas être une solution durable.

© © Lumecore/Toon Grobet

Comment envisagez-vous l’optimisation de vos activités ? W. T. : Cette optimisation est une question d’équilibre. Notre volume d’activité nous permet des économies d’échelle qui rencontrent leurs limites dans plusieurs processus médicaux.

Aujourd’hui, l’optimisation ne concerne plus uniquement les soins aigus. Les besoins de la population évoluent avec une part croissante de pathologies chroniques dont les traitements doivent être modernisés.

Services Critiques l 38.000m² l maître d’ouvrage UZ Leuven l architecture archipelago l ar-te avec dJGA l stabilité & techniques STABO

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© ar-te l dJGA

Femmes & Enfants l 37.000m² l maître d’ouvrage UZ Leuven architecture archipelago l ar-te avec dJGA l stabilité & techniques STABO

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Quels sont les enjeux du plan directeur engagé par l’hôpital universitaire de Louvain ? W. T. : Ce plan a été conçu en 2004. Il a pour base notre objectif central de rassembler l’ensemble des activités de soins aigus de l’hôpital sur son site principal. Nous comptons ainsi disposer d’un lieu unique dédié à la recherche et à l’activité clinique : le Health Sciences Campus. Au sein de ce campus, toutes les activités envisagées sont soutenues par les acteurs externes à l’hôpital ou à l’université souhaitant participer à des actions de recherche. Le programme développé par l’hôpital et l’université a été transmis à des architectes pour définir un volume optimal permettant d’accueillir les activités. Nous avons également sollicité des bureaux d’études pour développer une organisation adaptée. Parmi leurs propositions, nous avons retenu une solution particulièrement ambitieuse regroupant l’ensemble des activités organisées sur 17 des 75 hectares que compte le site hospitalier. Cette organisation est basée sur le concept d’urbanisation qui permet de développer un bâtiment très concret, urbain et reconnaissable par la population. Nos premières réflexions ont concerné la segmentation des installations en plusieurs quartiers regroupant de façon très cohérente l’ensemble des activités. Nous avons ainsi divisé notre projet de 17 hectares en quatre espaces distincts. Nous avons également privilégié une grande compacité des structures conçues. Nous préservons ainsi les ressources foncières autour du campus et anticipons d’éventuels besoins d’extension. De plus, la concentration et la proximité entre nos installations encouragent

les rencontres entre chercheurs, patients et cliniciens. Elles nous ont également permis de créer un système de circulation très efficace constituant une place centrale connectant étroitement l’ensemble des structures. Nous nous écartons d’une conception monobloc par une séparation des installations, tout en intégrant de multiples axes de connexion à la fois efficaces et discrets. En outre, les bâtiments construits sont intégrés dans un projet global cohérent mais sont conçus avec des identités différentes. Par cette conception, nous recréons un contexte très urbain avec des connexions et des axes de circulation fluides. Ces accès desservent des architectures distinctes par leur identité mais respectueuses d’un projet d’ensemble cohérent. Nous voulions ainsi proposer un environnement propice au bien-être des patients et accompagnant efficacement les activités de soins. Combien de projets sont-ils inclus dans ce plan directeur ? W. T. : Nous avons conçu 20 projets qui, ensemble, forment le programme global de l’hôpital. Notre volonté est de rebâtir l’hôpital aigu et de concentrer tous les campus de l’établissement sur un site unique. Nous passons ainsi d’un hôpital monobloc à un Health Sciences Campus regroupant non plus uniquement des acteurs hospitaliers mais le plus grand nombre d’acteurs du domaine de la santé. Notre projet actuel vise la concentration de toutes les forces vives de la ville du secteur de la santé dans les domaines de la recherche, de l’enseignement et du soin.


Architecture hospitalière - numéro 10-11 - Eté-Automne - 2017 - Hôpital Universitaire de Louvain

Qui sont les acteurs impliqués dans vos réflexions depuis 2004 ? W. T. : L’hôpital a collaboré étroitement avec l’université pour la rédaction du programme général. Nous avons également échangé avec awg, le bureau fondé par Bob Van Reeth le premier « Vlaams Bouwmeester ». Après son départ, nous avons collaboré tout aussi efficacement avec son successeur qui a rapidement rejoint le comité de pilotage du projet. D’autre part, les professionnels hospitaliers ont largement été impliqués dans le développement des projets. Chaque opération a débuté par une définition des futures organisations menée par un service dédié et l’organisation d’échanges constructifs avec les équipes de terrain. Ce projet global est une opportunité de transformer et de moderniser les pratiques de l’hôpital et non uniquement un moyen de transférer ses organisations actuelles dans de nouvelles installations. Nos réflexions doivent nous permettre d’anticiper les besoins de l’hôpital pour les prochaines années. Certes, l’établissement se développe pour renforcer son plateau technique mais il doit maintenir des processus adaptés aux attentes, aux besoins et à la sensibilité du patient. Tous nos projets placent donc l’humain au cœur des processus du campus.

Quelles étaient les grandes lignes du projet Fase IVa ? W. T. : Ce projet prioritaire vise la concentration de nos activités de soins critiques dans un bâtiment unique. Avec une structure dédiée, nous garantissons un renouvellement facilité des installations. La durée de vie moyenne des infrastructures de telles activités étant plus courte que tout autre espace hospitalier, leur renouvellement est d’une fréquence plus importante. D’autre part, pour renforcer les économies d’échelle permises par nos projets, nous souhaitions raccorder l’existant et les nouvelles installations. Aussi, il était important que le quartier opératoire de ce bâtiment de soins critiques soit étroitement connecté aux blocs opératoires existants. La nouvelle structure accueille, entre autres, le service de néonatologie, lui-même efficacement relié au nouveau bâtiment Mère-Enfant. Les activités de ce service comprenant des soins intensifs extrêmes dans des environnements très techniques, nous avons privilégié des espaces individuels et confortables favorisant le contact entre la maman et son bébé. Nous avons choisi la solution du NIDCAP avec des cocons individuels pour chaque patient placés au centre d’espaces individualisés et protégés. Nous avons séparé les flux professionnels des axes de circulations dédiés à la famille et aux visiteurs. Nous avons largement travaillé les espaces pour réduire le caractère technique des installations, notamment sur le plan acoustique et les autres nuisances pouvant perturber la tranquillité et le bien-être des patientes et des nouveaux-nés. L’un des parents accueillis à l’hôpital et spécialisé dans l’ingénierie acoustique a d’ailleurs largement travaillé en collaboration avec les équipes hospitalières pour réduire les nuisances sonores dans les chambres du service. Enfin, dans le cadre du projet Fase IVa, nous avons choisi de placer le service d’urgences au centre du site, sous les espaces d’accueil principaux, et de connecter ses installations à l’entrée publique générale de l’hôpital.

© UZ Leuven

Comment votre projet développe-t-il les espaces ambulatoires de l’hôpital ? W. T. : Nous avions plusieurs pistes pour développer nos activités ambulatoires. Nous souhaitions concentrer sur un espace assez compact nos 250 box de consultation rapide. Nous avons privilégié des transitions fluides permettant une bonne supervision de nos étudiants et assistants. Pour ce faire, nous avons séparé les circulations patients et les flux professionnels. La conception d’un espace d’accueil central unifié nous a permis de supprimer les salles d’attentes. L’hôpital comprend environ 250 programmes de soins flexibles. Nous avons également mené des réflexions spécifiques pour l’intégration de la lumière naturelle dans ces espaces assez compacts. Pour contenter à la fois les patients et le

personnel, nous intégrons des puits de lumière éclairant l’ensemble des locaux, y compris les installations centrales de nos bâtiments.

Quartier Opératoire PAZA l 6.000 m² l maître d’ouvrage UZ Leuven l architecture archipelago l ar-te avec dJGA l stabilité & techniques STABO

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Comment les activités du pôle Femme-Mère-Enfant sontelles organisées sur le site ? W. T. : Ce bâtiment est assez classique et sera opérationnel en 2018. Il correspond au projet Fase IVb et accueille les fonctions traditionnelles d’un pôle dédié au traitement de la femme et de l’enfant. Il se distingue davantage par ses connexions fonctionnelles avec le service de néonatologie du bâtiment de soins critiques. Ces passerelles nous permettent de développer des standards et des grands axes de parcours de soins au sein de nos installations. Quelles sont les grandes lignes du projet de centre de protonthérapie ? W. T. : L’objectif de ce projet était d’intégrer des appareils à la fois imposants et particulièrement complexes ainsi que l’ensemble des équipements de radiothérapie au sein d’un site très dense. Le projet a débuté il y a moins d’un an et les travaux ont été lancés récemment. Le bâtiment devrait être achevé en 2019. Outre l’aspect très technique de ces projets formant le Health Sciences Campus, comment assurez-vous un environnement accueillant pour les patients, les professionnels hospitaliers, les étudiants et tous les visiteurs ? W. T. : Nous avons largement travaillé les espaces de stationnement et la mobilité du site, notamment avec des places de parking en nombre suffisant. En créant la nouvelle entrée du site, nous avons opté pour un grand espace symbolique servant de place publique. Nous créons un bâtiment dédié à l’accueil, intégré aux côtés du pôle Femme-Mère-Enfant et du bâtiment des soins critiques, et situé au-dessus des installations d’urgences. Ce bâtiment accueillera les patients, les visiteurs et les collaborateurs dans un cadre adapté et chaleureux au caractère très hôtelier. Cette structure d’accueil sera, elle aussi, étroitement connectée aux autres bâtiments du site.

Quels sont les besoins identifiés en matière de conception architecturale, notamment vis-à-vis du traitement des patients et de la recherche de pointe ? W. T. : Notre projet incluant des éléments de pointe sur le plan technologique, nous souhaitions un architecte expérimenté sur le plan technique et capable d’entreprendre des opérations encore inédites jusqu’à ce jour. Nous souhaitions une agence capable de nous accompagner dans nos différents projets innovants et inédits. Un centre de protonthérapie intégré sur un campus hospitalier aussi dense est, par exemple, une première en Belgique. Pour beaucoup de nos démarches, nous ne disposions d’aucun retour d’expérience faisant état d’installations aussi complexes et intégrées sur un campus d’une telle densité avec des circulations et des liaisons fonctionnelles efficaces. Quel est le calendrier prévisionnel pour ces opérations ? W. T. : Les projets en cours devraient aboutir à horizon 2020 et 2021. Nous débutons également la mise en place des projets dont l’ouverture est prévue pour 2022 à 2025. En 2021, une dizaine de nos 20 projets seront achevés. Quelle est votre vision de l’hôpital du xxie siècle ? W. T. : Notre projet global traduit notre vision très ambitieuse de concevoir le campus hospitalier universitaire de demain. Notre site intégrera toutes les installations médicales, y compris les plus techniques, et l’ensemble des fonctions académiques liées au domaine de la santé. L’harmonie entre les différentes identités de nos bâtiments permettra au site de se confondre avec la ville. Elle fera de notre campus un lieu à la fois très fluide, accueillant et ouvert sur son environnement. La santé et la maladie font partie des sujets quotidiens de préoccupation de la population. Aussi, l’hôpital doit être très présent auprès des habitants du territoire. Pour se faire, il doit savoir s’intégrer efficacement et harmonieusement dans le cœur de la ville.

© ar-te l dJGA

Comment le bureau d’architectes archipelago I ar-te a-t-il répondu à vos attentes sur ces différents projets ? W. T. : Nous avons beaucoup retravaillé notre projet initial en collaboration avec archipelago I ar-te. Nous avons su trouver une

philosophie commune et nous nous sommes appuyés sur la grande expérience des équipes du bureau pour définir la conception hospitalière la plus adaptée à nos attentes.

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Centre pour Protonthérapie & MRT, ParTICLe l 5.800m² l maître d’ouvrage UZ Leuvenarchitecture archipelago l ar-te avec dJGA l stabilité & techniques STABO


© aimed

Architecture hospitalière - numéro 10-11 - Eté-Automne - 2017 - Hôpital Universitaire de Louvain

Parking sous-terrain l 52.000 m² | maître d’ouvrage Hospex NV | architecture archipelago l ar-te avec dJGA stabilité & techniques STABO


© ar-te l dJGA

Femmes & Enfants l 37.000m² l maître d’ouvrage UZ Leuven l architecture archipelago l ar-te avec dJGA l stabilité & techniques STABO

Le parti architectural – UZ Leuven « Le plan directeur pour le Health Sciences Campus veut introduire la notion « d’urbanité » sur deux niveaux. » Propos recueillis auprès de Dirk D’herde, ingénieur architecte et administrateur délégué d’ar-te Comment définiriez-vous le plan directeur engagé en 2004 par l’Hôpital Universitaire de Louvain (UZ Leuven) ? Le plan directeur établi par awg a pour ambition de faire face à trois défis. 1. (Re-) connecter le campus Gasthuisberg à la Ville de Louvain. 2. Restructurer le campus en fonction de l’évolution vers l’ambulatoire du monde hospitalier en général, et spécifiquement suivant le rôle académique et économique de l’UZ Leuven. Le plan directeur introduit la notion de quatre quadrants (symbolisés par les quatre « chambres » du cœur humain) : l’hôpital ambulatoire orienté vers la ville, l’hôpital aigu/résidentiel, l’enseignement et la recherche. 3. Introduire une ambiance ‘urbaine’ et variée dans un campus qui s’est développé d’une façon autonome et institutionnalisée pendant presque 25 ans. 38

L’UZ Leuven est un établissement qu’archipelago | ar-te accompagne depuis presqu’une quinzaine d’années.

Comment son identité architecturale a-t-elle évolué au fil du temps ? Le campus a été conçu dans les années 70 sur base d’une structure dendritique qui permet d’absorber des extensions futures, dans une logique de continuité de constructions et de flux. L’hôpital a ainsi connu trois grandes phases. Fin des années 90 l’hôpital était devenu une machine institutionnalisée avec des couloirs interminables, encerclée par d’autres fonctions (enseignement médical, recherche…) et qui n’était plus en équilibre avec l’évolution ambulatoire de la médecine. Quels sont les enjeux architecturaux du Health Sciences Campus, clé de voûte du plan directeur de l’établissement ? Le plan directeur du Health Sciences Campus introduit la notion « d’urbanité » sur deux niveaux. La structure dendritique qui traite l’hôpital comme un unique bâtiment est remplacée par une logique de réseaux urbains dans lesquels des îlots bâtis sont reliés par des espaces publics. Dans cette logique, ces îlots sont considérés comme des « objets architecturaux » autonomes avec un langage et une expression propre.


Architecture hospitalière - numéro 10-11 - Eté-Automne - 2017 - Hôpital Universitaire de Louvain

Quels sont les projets dans lesquels archipelago | ar-te est engagé aujourd’hui ? Nous avons principalement développé des projets situés dans le quadrant de l’hôpital aigu. En premier lieu, un grand parking souterrain (1500 places - 55.000m²) servant de socle aux extensions futures de l’hôpital ainsi qu’un bâtiment dédié aux « services critiques » (35.000m² avec soins intensifs, quartier opératoire, service des urgences…). Par la suite, nous avons également rénové totalement le quartier opératoire existant (7.000m² - 16 salles). Pour l’instant nous sommes engagés dans plusieurs projets en cours d’études ou de réalisation : le pôle « Mère-Enfant » (35.000m²), le centre de protonthérapie (4.500m²), le réaménagement et l’extension du Centre Chirurgical de Jour (7.000m² - 16 salles) et enfin l’extension supplémentaire des Services Critiques (15.000m²). Entretemps, nous avons également étudié une station électrique combinée à un centre informatique (5.000m² - réalisé) ainsi qu’une plateforme logistique hospitalière (25.000m² - en cours de réalisation).

Comment avez-vous réussi à connecter les différents bâtiments entre eux ? L’organisation des flux dans chaque projet s’inscrit dans la « règle » du Gasthuisberg, c’est-à-dire : circulation des patients au niveau 00, circulation des visiteurs au niveau +1 et circulation logistique au niveau +2. Vu le relief du site, ces niveaux de référence sont tantôt souterrains, tantôt aériens, ce qui induit des liaisons par tunnels ou passerelles entre les bâtiments. Quels sont les éléments qui concourent à améliorer l’accueil et le confort des patients et des nouveaux-nés ? Les nouveaux bâtiments se présentent comme des pôles spécifiques avec un accueil propre situé dans un « véritable » hall d’entrée et qui se prolonge dans la zone ambulatoire du pôle. Les chambres sont en majorité individuelles. L’organisation du service NICU facilite l’accès aux parents pour rendre visite à leurs enfants sans devoir traverser la zone de travail des soignants. Et l’amélioration des conditions de travail du personnel ? Les architectes d’intérieur d’ar-te ont mis tout en œuvre pour offrir au personnel des zones et des espaces de travail agréables et confortables, en ligne avec le « nouveau monde du travail », ceci dans un environnement chaleureux baigné de lumière naturelle.

© ar-te l dJGA

Parmi les projets qui s’articulent autour de ce concept de Campus, le programme « Femme – Mère – Enfant » se concrétise avec la construction d’une extension. Quelles sont les grandes lignes de ce projet ? Ce programme rassemble tous les services liés à ces deux catégories de patients. En dehors des services « classiques », nous avons également intégré des services comme le centre de fertilité ou une école dans l’hôpital. Nous avons prévu une connexion avec le bâtiment des services critiques qui offre un accès direct avec,

par exemple, le service NICU. Le bâtiment se distingue par son aspect plus « doux » grâce à des matériaux de façade clairs et un « look & feel » interne dans cette même philosophie.

Femmes & Enfants l 37.000m² l maître d’ouvrage UZ Leuven l architecture archipelago l ar-te avec dJGA l stabilité & techniques STABO

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L'UZ Leuven aura également d'ici 2019 un centre de traitement et de recherche en protonthérapie. Quelles sont les grandes lignes de ce projet ? Le centre de protonthérapie est considéré comme une extension du service de radiothérapie existant, ce qui permet de partager un grand nombre de services de support. La conséquence évidente de cette option est l’intégration du centre dans un contexte organisationnel, spatial et technique très spécifique et déterminant. L’enjeu est alors de créer un environnement à la fois le plus agréable possible pour les patients et pour les collaborateurs du centre, et qui s’intègre au mieux dans ce cadre précis. Quelles sont les spécificités architecturales que requiert l’activité de protonthérapie ? L’activité de protonthérapie se distingue peu de l’activité « classique » de radiothérapie. L’idée de base est de présenter aux patients et aux collaborateurs un environnement rassurant et agréable avant d’entrer dans la zone de traitement proprement dite. Quels sont les enjeux d’un projet aussi technique pour archipelago | ar-te ? L’enjeu principal était d’intégrer les contraintes et données techniques du fournisseur de la technologie de protonthérapie. Nous avons gagné le projet via une procédure en « conception & réalisation » dans laquelle le fournisseur n’était pas encore nommé. Nous avons donc dû travailler avec des données provisoires et des marges d’incertitude. Pendant le développement technique du projet nous avons systématiquement implémenté les données issues de la consultation entre le fournisseur IBA, l’hôpital et un contrôleur externe en sécurité nucléaire. Toute cette opération a été gérée par les concepteurs dans un environnement BIM (Revit) qui a ensuite été développé par l’entrepreneur BAM Contractors. Le nouveau centre se composera de deux parties : un espace pour le traitement clinique des patients et un bunker distinct pour la recherche de haute technologie. Comment avez-vous différencié ces deux parties ? Techniquement ces deux parties sont traitées de la même façon. Evidemment, au niveau des finitions, le bunker pour la recherche est aménagé de manière purement fonctionnelle. L’hôpital n’a pas suivi notre suggestion de prendre les dispositions pour que le bunker dédié à la recherche puisse être converti en bunker thérapeutique.

en matière de sécurité et de radioprotection ont-elles représenté une contrainte dans votre conception ? La géométrie des bunkers, l’épaisseur des parois et les trajectoires de pénétrations sont le résultat d’un processus itératif impliquant de multiples intervenants. Gérer l’interaction entre le niveau résiduel de radiation et la destination ou la durée d’occupation des locaux adjacents a constitué un véritable challenge. Outre l’aspect très technique de ces projets formant le Health Sciences Campus, comment l’hôpital peut-il assurer un environnement accueillant pour les patients, les professionnels hospitaliers, les étudiants et tous les visiteurs ? La structure « urbaine » augmente considérablement la lisibilité et la capacité de s’orienter au sein du campus. Le fait que chaque bâtiment possède un caractère et une expression propres anime l’espace public et atténue l’aspect souvent institutionnel d’un campus hospitalier. Cette différenciation a été poursuivie à l’intérieur. Chaque bâtiment a reçu une identité visuelle et un environnement en relation avec sa fonction spécifique. Enfin, nous avons partout optimisé l’apport de lumière naturelle. Selon vous, quelles sont les clés de la réussite d’un plan directeur aussi ambitieux, sur une si longue période ? D’abord, la clarté et la simplicité des lignes de force du plan directeur comme garantie pour la durabilité. Ensuite, la souplesse dans l’application de ces lignes qui permet une évolution flexible des besoins de l’hôpital et de son contexte de fonctionnement. Pour que cette agilité puisse garantir la pérennité de l’institution, il faut également une organisation capable d’arbitrer le bon équilibre entre le court et le long terme. A ce jour, archipelago | ar-te est fier d’avoir pu développer une dizaine de projets pour mettre en œuvre ce plan directeur. La clé de la réussite d’un plan ambitieux est une collaboration à long terme.

Comment les architectes d’archipelago | ar-te ont-ils réussi la prouesse de faire pénétrer la lumière naturelle dans les bunkers qui se trouvent presque entièrement sous terre ? Vu les contraintes techniques, il n’est pas possible de faire pénétrer la lumière naturelle dans les bunkers eux-mêmes. Nous avons donc prévu un patio en forme de pyramide inversée qui conduit la lumière du jour jusqu’au plateau des bunkers, en son cœur. 40

Dans quelle mesure les exigences extrêmement strictes

© © Lumecore/Toon Grobet

Comment avez-vous abordé la gestion des flux ? La zone des patients se situe au même niveau que le centre de radiothérapie existant. Les patients suivent un parcours commun pour y arriver. Les zones de travail pour le personnel se situent à l’étage supérieur, en liaison directe avec le service.

Tête de réseau et Datacenter l 5.800m² l maître d’ouvrage UZ Leuven l architecture archipelago l ar-te avec dJGA l stabilité & techniques STABO


Architecture hospitalière - numéro 10-11 - Eté-Automne - 2017 - Hôpital Universitaire de Louvain

Hôpital Universitaire UZ Leuven, Campus Gasthuisberg

41 Hôpital Universitaire UZ Leuven, Campus Gasthuisberg l Projets archipelago l ar-te


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