Arts du Nigéria revisités (extrait)

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Arts duNigeria revisités

Nigel Barley

Photographies Studio Ferrazzini Bouchet

Musée Barbier-Mueller Genève II

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Sommaire Introduction

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Planches

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Catalogue

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Bibliographie

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Carte

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Couverture : Sceptre au cavalier (détail). Cité d’Ife. XIIe-XIIIe siècle. Alliage de cuivre, restes de terre. Haut. totale : 61,5 cm. Inv. 1015-179. Planche pp. 12-13. Cat. 10. Frontispice : Ewi d’Ado-Ekiti, roi du sud-ouest du Nigeria. Photo George Osodi c/o Z Photographic Ltd. IV

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Arts duNigeria revisités

Nigel Barley

Introduction On dit souvent qu’une bonne exposition doit « laisser parler les objets », mais le problème pour les conservateurs des musées d’ethnographie est que les objets en question restent souvent désespérément silencieux, quand ils ne disent pas tout simplement ce qu’on cherche à leur faire dire. Dans le monde de la muséologie, on ne cesse d’expérimenter de nouvelles approches et de nouvelles techniques d’exposition. Pour ne parler que de la Suisse, le musée Rietberg a récemment organisé une exposition qui, pour l’essentiel, proposait une vue d’ensemble des différentes façons possibles de présenter des objets ethnographiques. De son côté, le musée de Neuchâtel1 s’est demandé si les institutions de ce genre n’étaient pas « cannibales » et ne devaient pas poser la question provocatrice de Jean Jamin : « Faut-il brûler les musées d’ethnographie ? »

Fig. 1. Fragment de portrait royal en terre cuite datant des XIVe-XVe siècles mis au jour en 1961 sur le site d’Ita Yemoo, Ife. Photo Frank Willett. VI

Avec quelque 4000 objets, la collection africaine du musée Barbier-Mueller est modeste en regard des grandes collections publiques du monde. Elle est toutefois particulièrement riche pour une collection privée, et surtout, elle frappe par l’exceptionnelle qualité esthétique des œuvres qu’elle contient. Il est clair qu’elle est le fruit d’un « œil » personnel et averti. C’est à la fois une chance et un problème, car la muséologie ethnographique reste partagée par des lignes de fracture autour desquelles les mêmes problématiques sont constamment recyclées. La première question que l’on peut se poser est de savoir si les objets ethnographiques doivent être considérés comme des œuvres d’art ou comme des spécimens anthropologiques. La première approche, délibérément humaniste, est subjective mais universalisante ; la secon-


de, quasi scientifique et objective, privilégie la connaissance du contexte local. Si l’on ajoute à cela que, pour notre génération, est art tout ce que l’on décide de considérer comme tel, et que la connaissance ethnographique est de plus en plus le lieu de compromis éthiques, il est clair que chaque point de vue contient en lui-même des contradictions internes. Cela étant, les partisans d’une approche ou d’une autre ont tendance à camper sur leurs positions, tandis que les modes vont et viennent au fil des années. Je me souviens de William Rubin, alors directeur du Museum of Modern Art de New York, disant lors d’une visite des réserves d’objets africains du British Museum : « Montrez-moi des objets africains mais, s’il vous plaît, ne me dites absolument rien sur eux ; sinon, je ne pourrai plus y voir de l’art ». Les objets ethnographiques devaient alors être abordés à la façon des « objets trouvés » de Duchamp, qui, coupés de leur fonction et exposés dans l’espace contraignant du musée, « esthétisaient » le quotidien. On oublie parfois qu’il est assez facile et parfaitement légitime de s’intéresser à l’art africain sans s’intéresser pour autant à l’Afrique. Notons aussi que, dans le British Museum de l’époque, les objets africains étaient conservés dans des boîtes portant les indications « Art », « Outils » et « Divers » selon la classification de son conservateur d’alors, William Fagg. Pionnier dans l’application à l’Afrique des méthodes européennes d’histoire de l’art, ce dernier n’a pas ménagé sa peine ni son ingéniosité pour identifier des artistes, des écoles et des époques dans ce vaste corpus africain censé être anonyme. C’était, pensait-on à l’époque, une façon de libérer les objets de l’oppression de la pensée occidentale ! Naturellement, on retrouve cette même thématique en filigrane dans de nombreuses expositions artistiques purement occidentales. Jusqu’à quel point est-il vraiment nécessaire de connaître la vie, les amis et les amours de Picasso pour apprécier sa peinture ? VIII

Les discussions sur ce qu’il est utile de savoir prennent souvent une dimension morale, et je me souviens d’âpres controverses, lors d’un séminaire consacré au projet de musée du quai Branly, dans lesquelles chaque camp – les ethnographes et les esthéticiens – semblaient partir du principe que leurs adversaires se fourvoyaient et poursuivaient délibérément des intentions suspectes. On reprochait aux ethnographes de refuser aux créateurs indigènes le statut d’artiste et aux esthéticiens d’ignorer l’intérêt d’une bonne connaissance du terrain. Il n’en reste pas moins que, quand il s’agit d’étiqueter des objets dont on ne sait rien ni que faire, les archéologues créent des typologies et prennent des mesures, les anthropologues imaginent des situations et des fonctions sociales, et les conservateurs deviennent subitement descriptifs et esthétiques. Or, à moins de vouloir camper rigidement sur ses positions, il n’y a aucune raison de ne pas laisser cohabiter toutes ces approches sous un même toit. C’est d’ailleurs généralement le cas : la force visuelle des objets provoque chez le visiteur un frisson esthétique qui l’encourage à se projeter par l’imagination dans un autre univers culturel ou temporel. Il y a de nombreuses années, Franz Boas2 faisait remarquer que, dans le monde entier, les objets sont toujours d’une qualité esthétique supérieure à ce qu’exigent les fonctions utilitaires qu’ils remplissent. Les expositions qui ignorent cet aspect se condamnent à être ennuyeuses. Une autre ligne de fracture consiste à séparer les objets traditionnels des objets contemporains, et à privilégier les premiers par rapport aux seconds. Cette vision des choses conduit à supposer un temps immuable au-delà de l’Histoire, une époque où l’Afrique se composait de cultures pures, nettement séparées, qui, malheureusement, auraient été altérées par la modernité. Elle explique aussi la double

contrainte que subit l’artiste africain contemporain, condamné soit à reproduire de façon inauthentique des objets du passé, soit à devenir lui-même un artiste « non africain », et elle ignore le fait que, dans de nombreuses régions d’Afrique, le même sculpteur peut parfaitement créer les mêmes masques pour le marché local et pour le marché étranger. Rares sont les expositions de musée aujourd’hui qui ne se prémunissent pas contre cette critique en incluant délibérément quelques œuvres modernes. Dans le cas de la collection Barbier-Mueller, tous les objets ont un certain âge – parfois même un âge vénérable – mais, en esquissant le contexte ethnographique de leur production et de leur usage, il est possible – en partie du moins – de leur redonner vie et de reconstituer le contexte culturel dans lequel ils s’inscrivaient. Sans prétendre couvrir de façon exhaustive la production culturelle du Nigeria, la collection Barbier-Mueller est très riche sous plusieurs aspects. L’exposition entend présenter à grands traits une sélection de ces objets et, en même temps, remettre en question certains présupposés sur notre vision des images nigérianes.

Le contexte archéologique Les données concernant la chronologie du peuplement du Nigeria sont, pour le moins, très vagues : elles soulèvent plus de questions qu’elles n’apportent de réponses. Les fouilles scientifiques menées sur les sites archéologiques anciens sont parcellaires ou très lacunaires, et il est frappant de constater que de nombreuses fouilles se réduisent aux excavations pratiquées lors de chantiers d’agrandissement des musées qui se trouvaient au-dessus. Il semble néanmoins que la colonisation humaine soit liée à la désertification progressive du centre du Sahel à partir de 4000 av. J.-C.3. Ce mouvement

a encouragé l’expansion des peuples parlant les langues bantoues et disposant d’une technologie du fer, qui ont quitté la région frontalière entre le Nigeria et le Cameroun pour se diriger en majorité vers le sud et l’est. La transition de l’âge de pierre à l’âge de fer sans passer par l’intermédiaire d’un âge de bronze semble être une particularité de la région, mais il est difficile d’établir une relation précise et consensuelle entre les diverses traditions de la céramique et de la fonte du bronze/laiton. Une certaine connaissance des techniques de la céramique est un préalable à la maîtrise de la fonte à la cire perdue, comme on le voit dans une grande partie de l’Afrique de l’Ouest, mais la division sexuelle du travail vient compliquer cette relation apparemment simple, la poterie étant une activité essentiellement féminine et la métallurgie une prérogative masculine. Il n’est donc pas étonnant que les forgerons et les potières constituent une association fondamentale dans de nombreuses communautés montagnardes de l’Afrique de l’Ouest. Au Nigeria, la première tradition connue de sculpture en céramique, habituellement datée entre 800 av. J.-C. et 200 après J.-C., est celle des Nok4, d’après le nom d’un village situé sur l’escarpement du plateau de Jos, où les premières trouvailles fortuites ont été faites entre les années 1920 et 1940 (p…, cat. 4, p…., cat 3). On y a également trouvé de la fonte de fer mais pas de fonte de bronze/laiton, malgré la multitude de figures nok mises au jour lors de l’exploitation des gisements locaux d’étain. Les figurines nok présentent une profusion déroutante de styles, de poses et de formes – elles peuvent être assises, debout, agenouillées ; certaines sont relativement naturalistes, d’autres plus géométriques – mais leur répartition est assez égale dans tout le centre de la région occupée par les Nok, si bien que cette diversité ne peut s’expliquer par des styles régionaux. Parmi les caractéristiques observées, citons le percement IX


des narines, la forme souvent triangulaire des yeux, les lignes incurvées des oreilles et des lèvres. Ces grandes figures creuses sont souvent incomplètes, peut-être, pensent certains, parce qu’elles étaient rituellement brisées. On remarque aussi que la couche d’engobe d’origine, qui créait une surface lisse, a souvent été usée par l’eau, si bien que ces pièces présentent aujourd’hui une surface rugueuse et granuleuse qui contraste avec leur raffinement technique. La relative grosseur de la tête par rapport au reste du corps est un exemple ancien d’un trait que l’on retrouve aujourd’hui dans de nombreuses traditions sculpturales africaines. Ces pièces semblent avoir été réalisées à la fois au colombin (aujourd’hui une technique « féminine ») et par soustraction (aujourd’hui une technique « masculine ») si bien qu’il y a désaccord sur la question de savoir qui les a fabriquées et dans quelle mesure elles peuvent être considérées comme des « portraits ». Beaucoup possèdent des coiffures et des barbes soigneusement modelées, des bijoux et même des anomalies physiques. En dehors des figures humaines, on trouve des animaux tels que des singes, des chauves-souris et des éléphants. À des fins de comparaison, on peut étendre la zone archéologique des Nok à une série de styles anciens en terre cuite qui évoquent la période nok ultérieure, notamment la culture de « Sokoto » (p…, cat. 2, p…, cat. 1) et celle de « Katsina » (p…, cat. 5), dont la production a été mise au jour au cours des dernières décennies sur l’ensemble de la bande constituant le nord et le centre du Nigeria, encadrée par la Benue au sud, le Sokoto au nord, le plateau de Jos à l’est et le Niger à l’ouest. Entre ces styles, certaines caractéristiques se recoupent (p…, cat. 6, p…, cat. 7, p…, cat. 8), mais, compte tenu des énormes mouvements de population qui ont marqué cette région au XIXe siècle (et même avant), il est impossible de savoir à quelle unité politique ou culturelle se rattachait hisX

toriquement cette région, ni si ces figures raffinées étaient associées à des fonctions proches du pouvoir. Quoi qu’il en soit, l’apparition soudaine de traditions aussi développées et pleinement formées semble confirmer l’état rudimentaire de notre connaissance archéologique de la région. Il semble que certaines têtes sokoto étaient fixées sur des socles ayant la forme de pots globulaires. L’exploration thématique du corps et des pouvoirs qu’il renferme a été une préoccupation constante dans la culture matérielle africaine, et elle le reste aujourd’hui, ce qui explique l’existence dans tout le Nigeria d’un grand nombre de vases anthropomorphes.

Ife et le Bénin Pour des raisons de gestion administrative, les autorités coloniales britanniques, désireuses de considérer le Nigeria comme un pays composé d’identités ethniques bien définies, ont imposé leurs classifications à des peuples qui ne partageaient pas forcément leur vision des choses. Autrement dit, avoir une unité politique, linguistique et culturelle claire est un idéal que les Britanniques ont apporté avec eux mais qui n’est pas issu de l’Afrique telle qu’ils l’ont découverte. Preuve en est le traitement des sites archéologiques autour de la ville d’Ife (dans le sud-ouest du pays), aujourd’hui considérée comme la capitale culturelle des Yoruba, et, pour la mythologie, comme le lieu où le dieu Ododuwa est descendu du ciel pour créer la terre et les institutions royales. Notons d’abord que le mot « yoruba » semble lui-même dériver d’un terme hausa désignant le vieux royaume d’Oyo5 et que l’identité yoruba telle qu’elle est actuellement conçue est en grande partie le résultat d’un processus historique et politique qui s’inscrit dans un contexte colonial6. Dans l’affaire, les Yoruba ont été considérés comme

l’un des plus grands peuples du Nigeria, et plusieurs maisonnées royales – tant yoruba que non yoruba – se disent issues de ce centre rituel d’Ife, même si leur engagement envers une origine yoruba a pu varier en fonction de considérations relevant de l’opportunisme politique (de même qu’après la guerre du Biafra7, beaucoup de Nigérians ont subitement cessé d’être des « Igbo »). Les antiquités sont importantes pour confirmer les mythes de création, car elles donnent à l’histoire une réalité concrète ; de ce point de vue, les traditions du métal fondu et de la céramique d’Ife, largement représentées dans les musées, sur les billets de banque et sur les timbres-poste, ont joué un rôle important en projetant ces identités dans le passé et en les fixant dans notre esprit. Quand nous qualifions un objet ancien d’Ife comme « yoruba », nous sommes peut-être très loin de la manière dont son créateur voyait les choses à l’époque. Les sculptures d’Ife en fonte de métal (p…, cat. 10) et en terre cuite (p…, cat. 9) ont été officiellement « découvertes » à deux reprises. Une première fois à la suite de la visite dans la ville de l’aventurier et ethnographe allemand Leo Frobenius, en 1910 (date à laquelle les autorités britanniques l’ont empêché de s’approprier massivement ses découvertes), et une seconde fois à la suite d’une fouille accidentelle en 1938 (fig. 1). Dans les deux cas, les Européens n’arrivaient pas à croire que des images aussi naturalistes aient pu être produites en Afrique et par des Africains, car il était courant de penser alors qu’une telle expression artistique était la marque d’une civilisation avancée et le monopole de l’Occident. Ce genre de préjugé a conduit Frobenius lui-même à invoquer le mythe de l’Atlantide, postulant que ces œuvres avaient dû être réalisées par une colonie totalement imaginaire d’Étrusques de l’Antiquité ; pour lui, cette explication était plus crédible que celle, trop évidente, qui consistait à penser que ces objets avaient été créés par les popula-

tions de la région où ils avaient été découverts. Si l’on connaît bien le rôle important joué par les sculptures et les masques africains dans la réinvention radicale des notions européennes d’art, il n’est pas exagéré de dire que les sculptures d’Ife ont été célèbres pour la raison exactement inverse, à savoir qu’elles s’inscrivent très facilement dans la conception européenne classique et conventionnelle du grand art. Et paradoxalement, c’est ce qui explique leur importance fondamentale dans la réévaluation de la culture africaine en général. Dès lors que ces œuvres d’art, totalement indigènes, sont considérées comme directement comparables à celles de la Renaissance européenne – elles étaient même antérieures voire contemporaines de leurs équivalents européens puisqu’elles remontaient aux XIIe-XVe siècles –, il devient impossible de défendre l’idée d’une supériorité culturelle de l’Occident. Étant donné le peu de données fiables dont nous disposons sur l’archéologie du Nigeria, la tentation est grande de faire se rejoindre les quelques points connus pour dessiner une image simple du passé du pays. Les fameux « bronzes » de Benin City, ville située à quelques centaines de kilomètres d’Ife, en sont un bon exemple. Eux aussi ont été « découverts » une première fois (par des Portugais au XVe siècle), puis oubliés avant d’être redécouverts lors d’une expédition punitive britannique, en 1897, à la suite de laquelle on a pensé que ces objets avaient été fabriqués par les Portugais. Une tradition orale locale rattache l’actuelle dynastie béninoise à Ife, et il était tentant de penser que la tradition béninoise du métal en découlait totalement. Selon la chronologie habituelle de cette tradition, les œuvres naturalistes seraient les plus anciennes et donc les plus proches du naturalisme d’Ife, et diverses similitudes d’ordre iconographique viendraient étayer ce rapprochement. Pour autant, il est très difficile d’imaginer qu’il XI


Fig. 2. Figures en terre, région de la Cross River. Si certains styles de figures en fonte de laiton ont pu être influencés par le modelage en terre cuite, d’autres semblent plus proches des figures en terre crue, qui occupent une grande place dans le sud du Nigeria. (voir cat. 96). Photo K. Nicklin/J. Salmons, 1977.

s’agit d’un emprunt direct. Curieusement, Ife n’a livré aucune trace archéologique d’ateliers anciens de fonte du métal, et les œuvres originaires de cette ville sont essentiellement en laiton (cuivre et zinc) ou en cuivre presque pur. Quelques œuvres béninoises anciennes sont en bronze (cuivre et étain) ; plus tard, elles seront en laiton européen importé et contiendront de plus en plus de zinc (p…, cat. 11, p…, cat. 97). Entre les seules années 1505 et 1507, les Portugais ont exporté à Bénin 12 750 bracelets manille en laiton qui ont servi de matière première. Beaucoup de ces objets ont été rangés parmi les « bronzes » à la suite de décisions prises par des musées soucieux de les faire entrer dans la catégorie des œuvres d’art. Les techniques de fonte sont très différentes selon les alliages, et il est devenu de plus en plus évident que l’on ne pouvait parler d’une relation simple entre deux centres nigérians seulement, ceux d’Ife et de Benin City (pl. 1031-341, cat. 15). D’autres villes Yoruba ont leurs traditions du métal : c’est le cas d’Ijebu-Ode (pl. 10-163, p…, XII

cat. 32, cat. 26, cat. 14) et d’Owo (p…, cat. 30, p…, cat. 29 , p…, cat. 28) pour n’en citer que deux. Si ces traditions sont fermement rattachées à des sociétés urbaines complexes, dirigées par des élites organisées et créant des objets en rapport avec le prestige de la royauté, on connaît aussi plusieurs petites traditions de fonte du métal dans la vallée de la Benue (p…, cat. 101, cat. 1015-92) et sur la frontière avec le Cameroun (pl. 1015-92, cat. 103, p…, cat. 106, cat. 104, p…, cat. 102). Les premiers voyageurs, comme Pacheco par exemple (15051508), notent que les Ijo étaient entièrement nus à l’exception d’épais colliers en cuivre. Il est de plus en plus évident que d’autres centres anciens existaient beaucoup plus au sud, par exemple à Igbo Ukwu au IXe siècle (cat. 95, cat. 25) ; d’autres ateliers, dans le delta du Niger, correspondant à ce que l’on appelle « les industries du bronze de la Basse Vallée du Niger » (fig. 2) (p…, cat. 96, p…, cat. 81, p…, cat. 80, p…, cat. 92, cat. 100), avaient des liens complexes entre eux et avec le Bénin ; ils faisaient par-

tie d’un ensemble dans lequel des objets issus d’un même système de concepts et de symboles ont pu être pillés ou échangés en guise d’expression d’une domination ou d’une soumission politique (fig. 3). Et peut-être les artistes participaient-ils aussi à ces échanges. Ainsi, le parallèle le plus proche que l’on puisse trouver au magnifique sceptre d’Ife (XIIe-XIIIe siècle) de la planche p…, cat. 10 est peut-être la tête du bâton équestre du IXe siècle originaire d’Igbo Ukwu (fig. 4), malgré la distance qui sépare les deux objets dans le temps et dans l’espace – et par leur style. Le problème est aggravé par le fait que, bien que la plupart des pièces en alliage de cuivre figurant dans les collections occidentales aient été initialement trouvées à Bénin, elles ont été réattribuées par les experts occidentaux à différents sites supposés, auxquels de nouvelles pièces étaient ensuite affectées au fur et à mesure de leur découverte. En outre, s’appuyant sur des logiques de linguistique comparée, les spécialistes ont continué de supposer que si un objet originaire de Bénin ou d’Ife n’était pas tout à fait « correct », c’était probablement parce qu’il avait été fabriqué par le peuple d’à côté. Toutes ces conditions ont contribué à créer un savoir mythique entièrement circulaire. Indépendamment des épineuses questions de chronologie et d’origine de ces objets, le problème fondamental de leur signification demeure. Si l’on pense généralement que la technologie de la fonte du laiton est passée d’Ife à Bénin, le processus d’interprétation prend la direction opposée, car la riche documentation ethnographique constituée sur les cérémonies de cour de Bénin sert à éclairer les œuvres d’Ife qui nous arrivent hors contexte. Ainsi, toutes les effigies en argile ou en cuivre d’Ife sont considérées comme faisant partie de rituels commémoratifs royaux, aujourd’hui perdus, semblables à ceux notés à Benin City (p…, cat. 12, p…, cat. 16, p…, cat. 28), de la même fa-

çon qu’au début du XXe siècle tout instrument aiguisé ou contondant ramené de Bénin en Europe était considéré comme « ayant servi à des sacrifices humains ». Ce que les deux traditions semblent avoir en commun, c’est l’utilisation d’une technologie métallurgique exclusivement masculine pour créer des symboles durables de filiation continue par le biais des hommes. Pendant de nombreuses années, les études béninoises ont reposé sur la simple supposition que, quelque part dans le palais royal, se cachait un « vieux bonhomme » – à Bénin, c’était forcément un « vieux bonhomme » – qui connaissait le « secret » des bronzes de Bénin et qu’il suffisait de le persuader de le livrer. Il est clair aujourd’hui que cette personne n’existe pas, ce qui ne veut pas dire que localement ne vivent pas des personnes qui connaissent la véritable signification de ces objets. Toutefois, ceux-ci donnent lieu à des réinterprétations constantes ; de plus, certaines techniques modernes comme la photographie ont modifié la manière dont nous les voyons. Ainsi, dans le Nigeria contemporain, les plaques de laiton qui couvraient jadis les piliers du palais royal de Benin City sont interprétées comme des « photographies » d’événements historiques réels – un peu à la façon des vieux clichés sépia de l’époque coloniale –, et les caméléons, omniprésents dans l’iconographie béninoise, seraient là pour capter sur leur peau photosensible (comme celle d’une pellicule photo) des images des sorcières nocturnes. Même l’oba de Bénin interprète aujourd’hui l’histoire de son pays à la lumière de sa collection de travaux anthropologiques et de vidéos d’émissions télévisées sur les antiquités, tournées dans le palais de ses ancêtres. Dans le champ africain, le domaine de la connaissance est beaucoup plus complexe et entremêlé qu’on ne veut parfois nous le faire croire. La persistance d’une même esthétique dominante8 sur la plus grande partie de la région

Fig. 3. Le remplaçant du roi atah igala de Idah, portant un masque pectoral de la première période de l’art de Bénin (voir cat. 11). Photo T. Shaw.

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Fig. 4. Sommet de bâton épousant la forme d’un cavalier en selle. Igbo Ukwu, IXe siècle. Dessin Helder Da Silva.

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occupée par les Yoruba témoigne du lien qui les unit à Ife. Il se perçoit aussi dans toutes les techniques, du bois et du laiton (p…, cat. 29, p…, cat 30) à l’ivoire (cat. 17) en passant par l’argile. En ceci, les Yoruba se distinguent par exemple des Nupe voisins, qui privilégient les motifs abstraits dans leur poterie domestique (p…, cat. 34, p…, cat. 35) et leur mobilier (cat. 38), mais acceptent sur leurs portes des sculptures figuratives exubérantes (cat. 36), bien que le problème subsiste de définir ce qui est « réellement » nupe. Dans les sculptures d’Ife, les personnes représentées sont en majorité jeunes ou au repos ; elles sont naturalistes mais partiellement idéalisées et classiques, et leurs visages semblent nous regarder d’une façon claire et assurée, avec dignité (p…, cat. 10). Cette remarque vaut aussi en grande partie pour les sculptures de mascarade plus spectaculaires des Yoruba (p…, cat. 20, p…, cat. 21) et pour les objets archéologiques (p…, cat. 9) d’Ife. Même dans les figures des deux jumeaux décédés (ibeji), les enfants sont représentés comme des adultes sages et matures (cat. 33). Pour emprunter les concepts populaires des Yoruba, on pourrait parler d’un mélange de ori – la notion de tête comme destinée – et de iwa – la reconnaissance du caractère essentiel d’une personne ou d’une chose. Les Yoruba ont en effet élaboré un vocabulaire critique pour analyser ces notions, même si, on peut le supposer, la fréquentation d’établissements occidentaux d’enseignement artistique a pu jouer un rôle dans son élaboration. Contrairement au silence des sculptures d’Ife, la statuaire yoruba contemporaine possède une riche littérature orale qui est indispensable pour comprendre le sens et le fonctionnement de nombreux objets (cat. 19). N’oublions pas non plus qu’un mot comme « Yoruba » peut désigner une ethnie, une langue, un style ou un territoire géographique, et que nous continuons de l’utiliser à la manière dont les physiciens utilisent la théorie

Fig. 5. Deux Urhobo portant leur masque. Les participants aux mascarades étaient souvent pris en photo dans des poses statiques qui amélioraient la netteté de l’image mais rendaient mal l’intensité de la performance (voir cat. 39). Photo W. Fagg, 1950.

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Fig. 6. Les participants à anuwe, une mascarade ogoni, durant une pause. Yeghe. Photo K. Murray.

Fig. 8. Un danseur s’est écroulé. Dans certaines mascarades « intenses », le porteur du masque est considéré comme « possédé » et n’est donc pas responsable des actes violents qu’il pourrait commettre. Village d’Alok. Ikom. Photo M. Renaud, 1990. abmarchives barbier-mueller.

Fig. 7. Une mascarade ibibio au milieu des musiciens, des organisateurs, de l’assistance, etc. Photo K. Murray, vers 1940.

quantique, c’est-à-dire en sachant qu’il présente d’importantes défaillances théoriques mais que ce flou même nous permet de continuer à échafauder des hypothèses. Un ensemble de critères engendre presque inévitablement un ensemble contraire : ainsi, Doris9 soutient qu’il existe une esthétique yoruba toute différente, axée sur la brisure, la mort et la laideur, telle qu’on la voit dans les amulettes de protection contre les voleurs et les sorcières, et il est tentant de déceler ce pouvoir du laid et du déformé dans certaines pièces attribuées à Owo10 (p…, cat. 22) et d’y voir un thème dominant dans une série de masques des Ishan (p…, cat. 23), des Ejagham (p…, cat. 46) et des Igbo du sud du Nigeria. On dit que les Urhobo font la distinction entre ce qui est beau aux yeux des hommes et ce qui est beau aux yeux des esprits, et que les critères entre les deux sont inversés (p…, cat. 39). Certains auteurs ont même suggéré11 que l’art de leurs voisins, les Ijo, se caractérisait assez généralement par une « éthique du guerrier » qui utilise dans le domaine spirituel des symboles de violence agressive. Il en est de même plus au nord pour le complexe igbo ikenga (p..., cat. 59) et pour les peuples apparentés parmi les Igala (cat. 74) et les Edo (Bénin), où les idiomes du guerrier chasseur de XVI

têtes et du sacrifice humain servent à contrôler ou à renforcer l’engagement actif de l’Homme dans le monde.

Masques, mascarades et images du Sud La mascarade pose problème pour les musées occidentaux. En règle générale, les conservateurs ont collecté des carcasses de masques (fig. 5 et 6), généralement en bois, et ignoré toutes les décorations éphémères – feuilles, plumes, peinture, etc. –, ainsi que le costume qui cache le corps et constitue le contexte dynamique de l’utilisation du masque (fig. 7). En Afrique, la mascarade est avant tout un spectacle qui mêle musique, percussions, danses, chaleur, soleil, odeurs, poussière et fatigue. Elle associe toutes les personnes présentes et peut contenir une dimension de mystère, de terreur ou d’hilarité qui tire parti de la confusion des foules ou de l’obscurité de la nuit. Les spectateurs peuvent être poursuivis et parfois blessés (fig. 8) - voire même tués lors de mascarades violentes ; disons seulement que la participation du public est parfois très vigoureuse ! Pour un ethnographe qui travaille sur le ter-

rain, collecter les récits des spectateurs d’une mascarade est une expérience salutaire qui le conduit à prendre conscience de l’impossibilité ou de la non-pertinence de toute description factuelle et linéaire de ce qui s’est réellement passé. Le contraste avec l’espace du musée – calme, froid et privilégiant le regard – ne pourrait être plus marqué. Par ailleurs, le bois s’accommode mal du climat humide du delta du Niger, si bien que les objets anciens n’ont pas résisté aux outrages du temps aussi bien que dans les régions plus sèches du pays (fig. 9). Cette réalité est explicitement reconnue par certains groupes qui se débarrassent de l’armature en bois après le spectacle mais conservent soigneusement les parties fragiles et précieuses (par exemple les plumeaux chinois, qui peuvent être réutilisés), comme nous le ferions pour des décorations de Noël (fig. 10). C’est seulement dans les musées occidentaux que les masques, récents ou anciens, peuvent être étudiés à loisir en tant qu’objets sculpturaux. C’est à la fois leur force et leur faiblesse. Par ailleurs, nous devons faire preuve de prudence dans notre tendance à attacher un nom de tribu à un masque africain pour mieux l’identifier12. Un aspect de ce mythe fondateur est que « l’art tribal » est le fait non d’individus

mais de « tribus » où la coutume est reine, de sorte que les images ou les objets deviennent immédiatement les véhicules d’une expérience primitive ou d’un sens culturel plus profond. Or, un peuple peut posséder de nombreux styles (p…, cat. 63, p…, cat. 67, p…, cat. 60, p…, cat. 62, p…, cat. 48, p…, cat. 70), et un même sculpteur peut travailler dans différents idiomes ; il peut même produire des œuvres « authentiques » pour un usage local et des pièces « pour touristes », physiquement identiques mais considérées en Occident comme très différentes. Des mascarades entières peuvent être achetées et vendues par un groupe à un autre groupe, ou simplement piratées et utilisées à d’autres fins par le peuple voisin (p…, cat. 117, p…, cat. 52, p…, cat. 72). De même, les masques peuvent appartenir à des associations qui dépassent les divisions ethniques, ou être limitées à des régions ou à des groupes d’âge spécifiques. Il n’est pas rare que l’on substitue un masque à un autre en cas de besoin13 et, de plus en plus, les mêmes masques sont intégrés dans des fêtes nouvelles, comme les célébrations de Noël par exemple. Enfin, la mascarade peut servir à marquer des différences sociales et culturelles aussi bien qu’à créer une identité14. Ainsi, les Igbo, qui connaissent de nomXVII


Arts duNigeria revisités

Planches

DEBUT DE LA NUMEROTATION NORMALE

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Ci-contre, gauche : statue d’homme. Culture de Sokoto. Datation TL : IVe-IIIe siècle av. notre ère. Examen scanner à rayons X. Terre cuite. Haut. : 69 cm. Inv. 1015-111. Cat. 1. Ci-contre, droite : figure féminine assise. Culture de Katsina. Datation TL : Ier siècle av. notre èreIer siècle de notre ère. Examen scanner à rayons X. Terre cuite. Haut. : 64 cm. Inv. 1015-117. Cat. 2.

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Statue féminine. Culture de Nok. Datation TL : IXe siècle av. notre ère-IIIe siècle de notre ère. Examen scanner à rayons X. Terre cuite. Haut. : 88 cm. Inv. 1015-109. Cat. 3.

31 31


Vues de profil et de 3/4 d’une tête féminine. Cité d’Ife. Datation TL : XIVe-XVe siècle. Examen scanner à rayons X. Terre cuite. Haut. : 25 cm. Inv. 1015-176. Cat. 9.

38 38

39 39


Vues de 3/4 dos et de 3/4 d’un sceptre au cavalier (roi ou grand noble ?). Cité d’Ife. XIIe-XIIIe siècle. Alliage de cuivre, restes de terre. Haut. totale : 61,5 cm. Inv. 1015-179. Cat. 10.

40

41 41


Ci-contre : masque-casque. Yoruba. Calebasse, bois, argile rouge, graines, bichromie (noir et blanc), fibres. Haut. : 27,5 cm. Anc. coll. Josef Mueller, acquis avant 1942. Inv. 1015-57. Cat. 22. Masque facial. Ishan. Bois, fibres, pigments. Haut. : 30 cm. Inv. 1015-171. Cat. 23.

50 50

51 51


Gong cultuel. Yoruba. Laiton ou bronze à patine de fouille verte. Haut. : 31 cm. Inv. 1011-169. Inédit. Cat. 29. Ci-contre : éventail cultuel. Yoruba. Bronze. Long. : 48,5 cm. Anc coll. Hubert Goldet. Inv. 1011-168. Inédit. Cat. 30.

52 52

53 53


Ci-contre : masque. Ijo de l’ouest ou du centre. Bois mi-dur. Long. : 118 cm. Inv. 1012-39. Cat. 41. Masque cimier représentant un génie de l’eau. Ijo de l’ouest ou du centre. Bois mi-dur, pigments rouges (bois rouge). Long. : 67,8 cm. Inv. 1012-35. Cat. 42.

60 60

61 61


Cimier. Ejagham (?). Crâne humain, peau d’animal ( ?), rotin. Haut. : 21 cm. Inv. 1015-90. Cat. 46. Ci-contre : tête. Ejagham. Bois. Haut. : 19 cm. Anc. coll. Jacques et Anne Kerchache. Récente acquisition. Inv. 1015-188. Cat. 47.

64 64

65 65


Ci-contre : masque circulaire. Eket. Bois à patine foncée. Diam. : 28 cm. Anc. coll. Jacques Blankaert, Bruxelles. Inv. 1014-66. Cat. 48. Ci-dessous, gauche : cimier de danse ogbom à figure féminine. Eket. Bois dur, pigments noirs, bras droit manquant. Haut. : 66 cm. Inv. 1014-99. Cat. 49. Ci-dessous, droite : cimier de danse. Eket ou Ogoni. Bois. Haut. : 103 cm. Inv. 1015-174. Récente acquisition. Cat. 50.

66 66

67 67


Cimier. Région de la Cross River, Boki (?). Bois mi-dur à patine brun-rouge, restes de peinture noir-brun, dents en métal. Haut. : 20,5 cm. Inv. 1015-54. Cat. 51. Ci-contre : masque cimier à figure féminine. Ejagham (?). Bois recouvert de peau d’antilope. Haut. : 71,5 cm. Inv. 1012-38. Cat. 52.

68 68

69 69


Ci-contre : masque facial. Igbo. Bois dur, coquillages, polychromie (noir, rouge et blanc), fibres, vestiges de couleur bleue. Haut. : 87 cm. Inv. 1014-2. Cat. 70. Masque facial. Igbo. Bois léger, polychromie (noir, rouge et blanc). Haut. : 24,3 cm. Inv. 1014-124. Cat. 71.

80 80

81 81


Ci-contre : masque-heaume. Igbo. Bois dur, patine noire brillante et croûteuse. Haut. : 40,8 cm. Inv. 1014-83. Cat. 72. Masque-heaume. Région de la rivière Benue. Métal, cire, graines d’abrus. Haut. : 34 cm. Inv. 1015-184. Récente acquisition. Cat. 73.

82 82

83 83


Ci-dessous, gauche : récipient globulaire. Igbo de l’est (?). Terre cuite. Diam. : 38 cm. Inv. 1014-140. Cat. 84. Ci-dessous, droite : bol rituel. Igbo (Izzi). Terre cuite. Haut. : 18,5 cm ; diam. : 19 cm. Inv. 1014-135. Cat. 86. Ci-contre : récipient prisonnier d’une cage ajourée. Igbo (?). Laiton et terre cuite. Haut. : 48,5 cm. Inv. 1014-150. Cat. 87.

90 90

91 91


Tabouret de dignitaire oche ozo. Rive gauche de la Benue, Igbo (Awka-Aguata). Bois. Haut. : 56 cm. Anc. coll. Josef Mueller, acquis avant 1942. Inv. 1014-61. Cat. 89. Ci-contre, gauche : tabouret de dignitaire ozo, oche mpata. Rive gauche de la Benue, Igbo (Awka). Bois. Haut. : 30 cm. Inv. 1014-63. Cat. 90. Ci-contre, droite : tabouret à motifs géométriques sur le plateau et la base. Rive gauche du fleuve Niger, Igbo (Awka). Bois dur. Long. : 45 cm. Inv. 1014-146. Cat. 91.

92 92

93 93


Ci-contre : pot d’ancêtre wiiso. Mukan, Yungur. Terre cuite. Haut. : 58 cm. Inv. 1015-115. Cat. 110. Pot de l’esprit Mbirhlen’nda. Ga’anda. Terre cuite. Haut. : 60 cm. Inv. 1015-160. Cat. 111.

104 104

105 105


Masque buffle. Chamba. Bois dur, pigments et incrustations. Haut. : 70 cm. Inv. 1015-121. Récente acquisition. Cat. 116. Ci-contre : masque-casque augum ou iki. Yukuben ou Kutep ( ?). Bois dur, patine gris-brun, traces d’un semis de graines d’abrus sur le museau, fibres. L. : 63 cm. Inv. 1015-22. Cat. 117.

108 108

109 109


Arts duNigeria revisitĂŠs

atalogue

Auteurs des notices du catalogue : MA : Martha Anderson NB : Nigel Barley MB : Marla Berns KBB : Kathleen Bickford Berzock SPB : Suzanne Preston Blier CB : Claire Boullier HC : Herbert Cole JE : Jan Elsen IH : Iris Hahner FM : Floriane Morin KN : Keith Nicklin AN : Andrea Nicolls SO : Simon Ottenberg JP : Judith Perani UR : Ute RĂśschenthaler GS : Gitti Salami JS : Jill Salmons

4

5


1.

2.

1. Statue d’homme. Culture de Sokoto.

le tabouret, créant une ambiguïté intéressante

par deux axes: le premier, horizontal, entre les

5. Tête janus. Culture de Katsina.

7. Tête d’homme barbu. Culture de

sait pas exactement si cette pièce représente un

Datation TL : IVe-IIIe siècle av. notre ère.

qui laisse penser que ce tabouret était peut-être

deux épaules et le second, vertical, entre le som-

Datation TL : IIIe-IXe siècle de notre

Sokoto. Datation TL : II -III siècle de

homme ou une femme, les coiffes annelées que

Examen scanner à rayons X. Terre cuite.

partiellement enterré. La tête est minutieuse-

met du crâne et la base, c’est-à-dire placé soit

ère. Examen scanner à rayons X. Terre

notre ère. Examen scanner à rayons X.

l’on trouve sur d’autres figures semblent évoquer

Haut. : 69 cm. Inv. 1015-111. Planche

ment travaillée et le corps visiblement orné de

contre la colonne vertébrale, soit au coeur de la

cuite. Haut. : 20,5 cm. Inv. 1015-175.

Terre cuite. Haut. : 33 cm. Inv. 1015-

des personnages féminins. Le visage est marqué

p.

colliers et autres ornements. Les paupières bais-

cavité. Cette ossature, parfois partiellement con-

Planche p.

154. Planche p.

de fines lignes verticales, qui pourraient faire

sées et l’expression sereine contrastent avec ce

servée sous forme de charbon de bois, permet

Les plus grandes statues dites « sokoto », com-

que l’on observe chez les Nok voisins (mais pas

une datation fiable de ces oeuvres lorsqu’elles ne

Cette double tête appartenait vraisemblable-

prises entre 80 et 90 cm de hauteur, sont le plus

chez les Sokoto). Par l’exagération de la tête en

sont pas associées à un site archéologique.

ment à une statue mesurant entre 40 et 70 cm

8. Tête d’homme. Culture de Sokoto.

avoir conservé d’importants liens spirituels avec

souvent des représentations anthropomorphes

proportion des membres et du tronc, cette figure

CB

de haut. Les quelques têtes janus katsina con-

Datation TL : Ier-IXe siècle de notre ère.

cette cité par le biais des sites rituels associés

masculines. Elles sont figurées selon un schéma

constitue l’un des premiers exemples de ce que

nues opposent en général un visage masculin

Examen scanner à rayons X. Terre cuite.

au panthéon des divinités d’Ife, Obatala et la

toujours identique auquel cette statue répond

l’on appellera la « perspective africaine ».

parfaitement. Le corps cylindrique et creux pos-

NB

4.

5.

2

e

6.

référence aux scarifications faciales des populations autochtones, dont bon nombre semble

à un visage féminin. Ici, les physionomies ne

Haut. : 22 cm. Inv. 1015-93. Planche

dynastie royale. Le nez a subi une restauration

4. Vase à tête janus. Culture de Nok.

semblent toutefois pas différenciées, malgré

p.

partielle récente.

sède une base légèrement évasée et laissée ouverte

Datation TL : IIIe siècle avant notre ère.

quelques infimes détails. D’un point de vue

sans figuration des jambes. Sur le tube qui figure

Examen scanner à rayons X. Terre cuite.

formel, cette œuvre offre le témoignage rare

Stylistiquement, les deux têtes sokoto (cat. 7

7.

SPB

le corps, sont plaqués les bras grêles et courts. Les

3. Statue féminine. Culture de Nok.

Haut. : 31,5 cm. Inv. 1015-178. Planche

de deux visages réalisés de façon quasi certaine

et 8) se distinguent à plusieurs titres de celle

mains sont posées sur l’abdomen de part et d’autre

Datation TL : IXe siècle av. notre ère–

p.

par un seul et même sculpteur. Cette observa-

des Nok (cat. 6).

de l’ombilic. Les visages, tel celui-ci, adoptent tous

IIIe siècle de notre ère. Examen scanner à

tion permet d’attester de l’existence de styles

Une étude attentive du corpus nok et de

la même construction caractéristique : le crâne

rayons X. Terre cuite. Haut. : 88 cm.

Les nombreuses sculptures récemment décou-

spécifiques propres à certains artistes qui, il y

son iconographie stylisée montre que l’on a

10. Sceptre au cavalier (roi ou grand

globulaire, le haut front dégagé, les arcades sour-

Inv. 1015-109. Planche p.

vertes dans un état de conservation remarquable

a deux mille ans environ, ont créé ces oeuvres.

ici un fragment de ce qui devait être une fi-

noble ?). Cité d’Ife. XIIe-XIIIe siècle.

Bibl. : Willett, 2004.

ont permis d’appréhender de manière beaucoup

Certes, le sculpteur s’est soumis aux conven-

gure assise appuyant sur ses genoux ses bras

Alliage de cuivre, restes de terre. Datation

et soulignées par un demi-cercle, le nez court aux

Cette statue féminine nok, parmi les plus

plus complète la diversité de la statuaire nok, tant

tions de style propres à l’art katsina, telles que

croisés. L’arête continue du nez, les lèvres qui

TL du noyau de coulée. Analyse de la

narines aplaties, enfin la bouche entrouverte our-

grandes répertoriées, s’intègre parfaitement

sur plan des styles que de l’iconographie. Il est dé-

le visage ovale, les yeux mi-clos, le nez court et

font la moue et les yeux de forme triangu-

composition du métal. Haut. totale :

lée de lèvres plates. La plupart des visages arborent

dans les schémas iconographiques et stylistiques

sormais possible de déterminer toute une typolo-

le menton pointu, autant d’éléments consti-

laire contrastent avec l’arête cassée, les lèvres

61,5 cm. Inv. 1015-179. Planche p.

aussi une barbe qui prend naissance sous la lèvre

définis. La femme est représentée debout sur

gie iconographique, des thèmes récurrents et des

tutifs des canons habituels de ces statues en

serrées et les sourcils incisés et broussailleux

inférieure et des moustaches qui apparaissent aux

un petit socle tronconique, dans une attitude

codes de représentation auxquels se pliaient scru-

terre cuite. Néanmoins, l’artiste a imprimé une

des deux têtes sokoto. Même ainsi, la pièce

Cette pièce extraordinaire a une histoire qui,

commissures des lèvres. La parure, toujours très

statique et strictement frontale. Sa coiffure

puleusement les sculpteurs. Cependant, nombre

marque toute personnelle sur cette œuvre en

centrale est inhabituelle par la manière dont

elle-même, est extraordinaire, ayant été acquise

sobre, comprend un collier et des scarifications

comme ses bijoux ou ses vêtements, subtilement

de figurations restent toujours mal définies et sus-

jouant notamment sur les linéaments du vis-

elle réduit les oreilles à deux éléments cylin-

après un long exil au Togo, où elle était en pos-

abdominales rayonnant autour du nombril. Les

révélés, témoignent d’un goût prononcé pour

citent de multiples interrogations sur leur sujet ou

age. Sa manière se caractérise par des fronts

driques et marque d’une manière très indivi-

session d’une famille d’origine nigériane. La

cheveux coupés ras ou le port d’un bonnet étriqué

l’ornementation corporelle, fréquent dans l’art

leur fonction. C’est le cas de cette œuvre dont on

courts et plats, des sourcils épais contrastant

dualisée le vieillissement et les rides du visage.

datation de l’argile par thermoluminescence per-

mettent en valeur la forme du crâne. D’après les

nok. Coiffée d’un double chignon typique, elle ar-

connaît un autre exemplaire, en tous points simi-

avec les yeux minuscules et les lèvres entrou-

Cependant, il est clair que l’on n’a pas affaire à

met de la faire remonter au XIIe siècle, et l’ana-

quelques données chronologiques existantes, les

bore un collier volumineux mais aussi des brace-

laire : une tête janus coiffant directement un sup-

vertes placées légèrement de biais. Enfin, cer-

des styles distincts ou opposés, et que toutes

lyse du métal révèle qu’il s’agit de cuivre presque

sculptures sokoto seraient plus récentes que les

lets aux poignets et aux chevilles, une parure sur

port. Le thème janus est représenté dans le réper-

tains autres détails, comme le traitement des

ces têtes ont un « air de famille » dont les rela-

pur, comme pour d’autres pièces connues d’Ife.

sculptures nok. Les comparaisons stylistiques et

le buste et un cache-sexe complexe agrémenté

toire iconographique nok par une vingtaine de

sourcils, soulignés par d’épaisses hachures, se

tions restent à expliquer.

On ne connaît pas d’œuvres comparables origi-

iconographiques qui ont été avancées jusqu’alors

d’une peau de bête. Dans la tradition africaine, le

pièces. Elles associent deux personnages du même

rapprochent davantage des caractéristiques des

NB

naires d’Ife, mais on sait que les sceptres en mé-

s’avèrent peu pertinentes et insuffisantes pour

port d’une telle peau animale, souvent celle d’un

sexe ou de sexe opposé, figurés debout ou assis.

sculptures dites « sokoto ».

tal étaient un symbole habituel du pouvoir chez

démontrer de quelconques liens entre ces deux

félin, est un attribut lié au pouvoir ou aux croy-

Dans le cas présent, les deux visages, strictement

Ce vocabulaire stylistique commun entre

les Yoruba et les Edo du Bénin, et les figures

cultures. En revanche, il conviendrait peut-être

ances. Celui ou celle qui l’exhibe est doté d’un

identiques, sont adossés et disposés sur une sorte

« katsina » et « sokoto » amène à s’interroger :

9. Tête féminine. Cité d’Ife. Datation

équestres font partie du répertoire des fondeurs

de s’interroger sur certaines parentés formelles

statut particulier au sein de la société (chasseur,

d’élément biconique creux décoré de hachures et

témoins d’influences culturelles multiples ou

TL : XIVe-XVe siècle. Examen scanner

depuis au moins la production d’Igbo-Ukwu au

unissant les sculptures provenant de Yelwa et cer-

guerrier, sorcier, chef ). Stylistiquement, cette

de motifs en arc de cercle, excluant la représenta-

évolution d’une seule et même production ?

à rayons X. Terre cuite. Haut. : 25 cm.

IXe siècle.

taines pièces sokoto de petites dimensions.

statue appartient au « style classique », daté en-

tion d’un corps. Les appendices placés au niveau

Quoi qu’il en soit, ces éléments nous incitent

Inv. 1015-176. Planche p.

C’est un magnifique travail de fonderie. Le cheval

CB

tre le IXe et le VIIIe siècle avant notre ère. Il se

des tempes s’apparentent à de larges oreillettes

à appréhender les rapports de diverses natures

définit par des compositions équilibrées, sobres

fréquentes sur les statues masculines dotées d’un

qu’entretenaient peut-être ces différentes cul-

e

Cette tête d’Ife en terre cuite, qui date du XIV

tournée, comme conscients de leur image. Le

et symétriques. On note une prédilection pour

casque. Mais elles sont ici tant décollées de l’oreille

tures millénaires africaines.

ou du XVe siècle de notre ère, se distingue par

cavalier porte une coiffure élaborée et présente

2. Figure féminine assise. Culture de

les traits réguliers et certaines caractéristiques

qu’il est envisageable qu’elles aient peut-être fait

CB

une coiffe ancillaire élaborée, composée de

les stries faciales caractéristiques d’Ife, avec cette

Katsina. Datation TL : Ier siècle av. notre

comme le front ample, le « profil grec » ou bien

office d’anses de préhension. De plus, l’ouverture

disques striés et de fils de perles. On voit appa-

particularité toutefois que sa moustache et sa

ère–Ier siècle de notre ère. Examen scan-

encore l’alignement horizontal des yeux. Afin de

centrée au sommet de la sculpture, plus large que

raître ce type de coiffes complexes retombant de

barbe taillée sont en fonte (sur les autres pièces

ner à rayons X. Terre cuite. Haut. : 64

consolider la structure de ces grandes oeuvres

les habituels orifices d’évacuation des gaz de cuis-

6. Tête cornue. Culture de Nok. Datation

côté ou à l’arrière de l’occiput sur plusieurs autres

d’Ife, les barbes étaient probablement faites de

cm. Inv. 1015-117. Planche p.

creuses en terre cuite, les artistes inséraient des

son, semble confirmer la fonction de récipient de

TL : Ier siècle av. notre ère–Ier siècle de

figures en terre cuite, notamment sur une tête et

perles attachées). La queue du cheval est pro-

armatures de soutien en bois dans la cavité pour

ce petit objet qui, associé au thème janus, pourrait

notre ère. Examen scanner à rayons X.

une série d’objets de prestige décorés d’animaux

longée au point de rejoindre le socle (le fondeur

Le naturalisme arrondi et trompeur de cette fi-

éviter leur affaissement pendant la conception,

accréditer un usage rituel.

Terre cuite. Haut. : 30 cm. Inv. 1015-

associés aux lignées royales. Quant aux cheveux

s’en sert pour créer une cheminée dans laquelle il

gure féminine est typique du style katsina. Les

le séchage puis la cuisson. Les sculptures se ten-

CB

103. Planche p.

eux-mêmes, ils sont relevés en une forme dis-

peut couler le cuivre, métal difficile à travailler),

contours du corps se poursuivent jusque dans

ant debout étaient vraisemblablement soutenues

coïdale au sommet du crâne. Alors qu’on ne

et la décoration se compose soit de nœuds, soit

cilières disposées en oblique, les pupilles percées

3.

e

8.

9.

10.

et le cavalier se tiennent droit, la tête légèrement

3


11.

12.

de représentations de bracelets manille noués. La

à d’autres dirigeants nigérians, comme l’Ata

13. Tête commémorative. Cité d’Edo

nus, portaient des bracelets qui, par leurs formes,

poitrine (figure considérée comme ayant le pou-

20. Masque gelede. Yoruba. Bois, pigment.

main droite tient un chasse-mouche et la gauche

d’Idah et l’Eze Nri. Ces masques sont portés

(Benin City). XIXe siècle. Bois et laiton.

ressemblaient à ceux-ci.

voir d’invoquer les puissances divines) ; la partie

Haut. : 46 cm. Inv. 1011-31. Planche p.

probablement la chaîne qui est reliée à la bride.

non pas sur la hanche gauche, comme c’est le

Haut. : 61,5 cm. Anc. coll. Josef Mueller.

NB

inférieure figure des objets du monde matériel

(En Afrique de l’Ouest, les chevaux étaient géné-

cas pour les masques à costumes, mais autour

Inv. 1011-109.

ralement guidés à l’aide d’une seule rêne, comme

du cou (voir fig. ... p. ). On sait qu’il existe de

le faisaient jadis les Portugais). Dans les spéci-

nombreux objets en fonte de laiton dans le sud

Cette tête commémorative est celle d’un grand

16. Défense sculptée. Royaume de

mens issus d’autres traditions nigérianes de la

du Nigeria, mais très peu ont été étudiés, ce qui

chef de Bénin. On commémorait les chefs de

Bénin. XVIII ou XIX siècle. Ivoire.

fonte, le cheval et le cavalier sont tous deux parés

n’est pas le cas de la pièce de l’Ata d’Idah qui,

haut rang défunts au moyen de divers objets

Long. : 130 cm. Anc. coll. Josef Mueller,

de clochettes ; il se pourrait donc que ce sceptre

analysée en détail et photographiée, appartient

placés sur les autels des ancêtres : têtes en bois

acquise avant 1939. Inv. 1011-100.

18. Bracelet. Owo, XVIIe-XVIIIe siècle.

des élaborations exubérantes qui renvoient à la

ait comporté des clochettes accrochées à la plate-

très clairement au style de « cour ». Dans le cas

sculpté, ou têtes rehaussées de bandes de laiton

Planche p.

Ivoire. Diam. : 10 cm. Anc. coll. Josef

société humaine et représentent toutes sortes

forme sur laquelle repose le cheval, le bruit étant

présent, le fer qui avait été inséré entre les scarifi-

martelé rappelant celles en laiton qui étaient la

Mueller. Inv. 1031-27. Inédit.

d’aspects de la vie ordinaire, depuis des actes de

une autre manifestation du pouvoir.

cations du front et les pupilles des yeux a rouillé,

prérogative des dirigeants. Dans le cas présent,

Les défenses sculptées étaient conçues pour

NB

comme souvent dans les objets béninois en fonte

ces bandes ne subsistent que sous la forme de

reposer sur des têtes d’autel en laiton et pour

Ce bracelet ressemble beaucoup à la célèbre

types sociaux. C’est donc une mascarade de ce

d’un certain âge. L’analyse métallurgique révèle

losanges dans les cheveux et sur la base de la fi-

s’appuyer contre le mur en une courbe gracieuse.

paire de la collection Wieckmann à Ulm, ac-

bas-monde et l’une des seules occasions pour les

une teneur en zinc d’environ 15 pour cent, ce

gure, et de scarifications sur toute la longueur du

Illustrant des scènes de la vie à la cour et de

quise dans la première moitié du XVIIe siècle

sculpteurs yoruba de représenter régulièrement

11. Pendentif ou ornement de ceinture.

qui est exactement à quoi on pourrait s’attendre

nez. Une bande autour du cou ayant été perdue,

l’histoire rituelle, elles étaient régulièrement

à Ardra, dans ce qui est aujourd’hui la Répu-

des personnes en mouvement plutôt que dans

Royaume de Bénin. Fin du XVe siècle.

pour une pièce béninoise antérieure au milieu

il ne reste que les agrafes en laiton qui les main-

blanchies avec le jus d’un fruit acide et frottées

blique du Bénin. Le mode d’enchaînement

des poses statiques.

Analyse du métal. Bronze, laiton,

du XIXe siècle.

tenaient en place.

avec de l’huile de palme pour les rendre lui-

des différentes créatures est typique d’Owo,

La partie supérieure de ce masque fascinant

fer. Haut. : 17,9 cm. Anc. coll. comte

NB

NB

santes, ce qui explique les surfaces friables de

circonscription yoruba très influencée par le

semble représenter un défilé de mascarade. À

nombre d’exemples qui ont survécu. L’oba avait

royaume de Bénin.

l’arrière, une petite figurine joue du tambour.

droit à une défense sur tout éléphant tué sur le

NB

Une figure centrale, aux traits faciaux usés et

Baudouin de Grunne. Inv. 1011-104. Planche p.

Bibl. : Ratton, 1880, pp. 66-67 – Anonyme, 1947, p. 359 – Ezra, 1992, p. 162.

13.

15.

ouest qui vise à apaiser les pouvoirs de sorcellerie

NB

des femmes âgées, ménopausées, en les honorant

e

au moyen de chants, de danses et de spectacles. Les superstructures de ces masques se prêtent à

copulation jusqu’à des proverbes et des stéréo-

14. Paire de bracelets. Yoruba, Ijebu-

territoire de Bénin, ce qui constituait la base de

Ode. Laiton. Diam. : 8 cm. Inv. 1031-

son quasi-monopole sur les exportations d’ivoire

288a et b. Inédite.

et les importations de laiton. Ces objets devaient

19. Trois plateaux de divination ifa. Yo-

À sa gauche, on distingue une forme étrange,

une grande part de leur prestige à leur blancheur

ruba. Bois. Diam. : 30,5 cm, 32,8 cm, 43

sans tête (ou avec une tête recouverte d’un tissu)

bébé sur le dos et un tissu par dessus son épaule.

dans les musées occidentaux proviennent de

Probablement vers 1650. Ivoire à patine

l’expédition punitive menée par les Britanniques

d’usage. Haut. : 32 cm. Inv. 1011-107.

Cette belle paire de bracelets ajourés s’inspire

ainsi qu’à la force et à la longévité que symboli-

cm. Inv. 1011-74c, 1011-74d, 1011-167.

et, devant, deux figures portant des lances et

en 1897. Selon Charles Ratton et d’après un

Planche p.

d’un vocabulaire de crocodiles et de grenouilles

sait l’éléphant.

Inédits.

ce qui ressemble à des sifflets de chasseurs yo-

qui se poursuivent en cercle. On leur accroche

NB

On a longtemps cru que ces idiophones étaient

parfois des crotales.

En Afrique de l’Ouest, l’ifa est une forme de

chasse.) Une autre figure à sa droite a été perdue.

en possession – au moins jusqu’en 1947 – soit

des manches sculptés de chasse-mouches, mais

NB

divination surtout pratiquée par les Yoruba

Cette mascarade relève certainement d’un genre

de l’Amapetu du Mahin, à l’est de Lagos, soit

il est aujourd’hui clair, à la suite d’Ezra, qu’il

17. Bâton de divination iroke ifa. Yoruba,

mais qui a été adoptée par des peuples voi-

ancestral d’egungun, qui, dans certaines versions,

de l’Olugbo d’Ugbo, dans une localité yoruba

s’agit d’un type de sceptre que les chefs agitaient

région Oyo. XVIIIe-XIXe siècle. Ivoire.

sins. La première étape consiste à interpréter

contient un danseur non masqué enveloppé d’un

proche. Une de ces pièces (légèrement « amé-

lors de la fête de l’Ughie Oro, événement impor-

15. Bracelet. Royaume de Bénin. XIXe

Haut. : 38,5 cm. Inv. 1011-166. Inédit.

la manière dont les objets dessinent des mar-

tissu et, souvent, des références à des divinités.

liorée ») se trouve aujourd’hui au Metropolitan

tant dans le calendrier rituel béninois, institué

siècle. Cuivre et laiton. Larg. : 11 cm.

Planche p.

ques en retombant sur la partie centrale du

Dans la mesure où l’egungun est surtout centré

Museum of Art. L’autre n’est pas localisée.

par l’oba Esigie (XVIe siècle) pour commémorer

Anc. coll. Josef Mueller. Inv. 1031-154.

plateau, recouvert au préalable de sciure de

sur la ville d’Oyo, dans le nord, peut-être a-t-on

Cette pièce fine, à défaut d’être finement mo-

ses victoires sur ses voisins, les Igala. Ces objets

Inédit.

L’ifa est une forme de divination répandue chez

bois rongé par les termites. Le devin invoque

là le commentaire d’une mascarade locale sur

delée, comporte des deux côtés des points de

sont notoirement difficiles à interpréter parce

les Yoruba et chez d’autres peuples du Nigeria.

alors la divinité Orunmila par le biais du dieu

une institution « étrangère », malgré les chevau-

fixation qui ont cette particularité – inhabi-

que souvent usés à la suite de leur utilisation

Le corps du bracelet est composé d’anneaux de lai-

C’est un système particulièrement complexe et

messager Eshu, magicien dont le visage figure

chements entre les deux.

tuelle, mais non unique – d’avoir des ouvertures

rituelle, mais aussi à cause de leur « profondeur

ton et de cuivre, tandis que les pièces qui les relient

flexible qui fait intervenir de multiples moyens

sur le périmètre extérieur de chaque plateau

NB

verticales plutôt qu’horizontales. Le modelé de

iconique », car ils renvoient à des objets relevant

sont des têtes « portugaises » alternant avec des

d’interprétation : manipulation de noix de pal-

et qui sert normalement à l’orienter. Les mar-

la chevelure est également remarquable avec

des insignes royaux de Bénin. Ce spécimen par-

têtes de léopard. Il existe au Bénin de nombreu-

me ou d’une chaîne qui forment des marques

ques sont alors traduites en référence à des

ses triples cercles concentriques. Ailleurs, qu’il

ticulier semble représenter un oba revêtu d’un

ses formes de bracelets de poignet et de cheville,

sur un plateau, traduction de ces marques en

vers sacrés connus par cœur, et ces vers sont

21. Grand masque-heaume epa. Yoruba

s’agisse de représenter des cheveux ou des poils

costume de perles de corail pris au dieu Olokun

certains étant réservés à des fonctions ou à des oc-

vers sacrés connus par cœur, et de ces vers en

ensuite traduits en fonction de la personne

(Ekiti). Bois dur à patine croûteuse et

d’animaux – comme sur cette tête béninoise

au terme d’un combat. Une autre forme canoni-

casions particulières ; en fait, les seules personnes

une situation concrète concernant la personne

qui consulte. Ici, chose insolite, la décoration

revêtement brun-rouge, blanc et noir.

« déviante » conservée au British Museum, ou

que représente la reine mère revêtue du même

qui n’en portent jamais sont les commerçants euro-

qui consulte. Les bâtons divinatoires, générale-

du plateau du bas ne comporte que le visage

Haut. : 115 cm. Inv. 1011-62. Planche p.

sur des corps de léopards – on n’a généralement

costume de manière à ressembler à l’oba. À l’ori-

péens qui tiennent dans leurs mains les manilles

ment en bois, en laiton ou en ivoire, présentent

d’Eshu, qui regarde à la fois vers l’intérieur et

qu’un seul anneau en saillie autour d’un centre

gine, les mains tenaient un idiophone de même

de laiton qui servaient de matière première dans

presque toujours la structure tripartite que l’on

vers l’extérieur. Parmi les autres motifs favo-

Les Ekiti, au nord-est du territoire yoruba,

massif lui-même circulaire. Stylistiquement, ce

forme et une baguette qui servait à le frapper.

l’industrie métallurgique béninoise. Les femmes

voit ici. Au début d’une séance, le devin frappe

ris, citons les animaux entrelacés et les formes

organisent tous les deux ans, en mars, une fête

masque est « rustique » ; il ne ressemble pas

NB

du dirigeant portaient sur les jambes des bracelets

avec le bout la partie centrale du plateau, pour

nouées. Les plateaux des devins célèbres sont

de masques epa de trois jours qui doit assurer la

munis de clochettes, censés les protéger contre

l’activer. L’extrémité ne porte généralement pas

considérés comme s’enrichissant de nouveaux

fertilité et la prospérité de la communauté. Les

toute intention impure les concernant. Même les

d’ornements. La partie médiane représente une

pouvoirs avec le temps.

masques géants, d’un poids pouvant atteindre

pages de cour, qui par ailleurs étaient totalement

femme enceinte agenouillée, nue et tenant sa

NB

30 kilos, sont sculptés d’une seule pièce; ils sont

que les vassaux adressaient en signe d’allégeance

Bibl. : Ezra, 1992, p. 197.

18.

ruba. (Le gelede représente parfois des scènes de

deux œuvres semblables à celle-ci sont restées

il est possible qu’il s’agisse du genre de masque

17.

surmontée d’une coiffure élaborée, porte un

12. Idiophone. Cité d’Edo (Benin City).

aux pièces raffinées de la « cour » de Bénin, et

4

Le gelede est une mascarade des Yoruba du sud-

tation.

La plupart des œuvres béninoises conservées

article non signé paru dans le magazine Nigeria,

14.

e

qui peuvent correspondre à l’objet de la consul-

16.

19.

5


Nigel Barley a enseigné l’anthropologie à University College, à Londres, avant de rejoindre le British Museum comme conservateur adjoint au département d’Ethnographie où il est resté une vingtaine d’années. Plus particulièrement responsable de l’Afrique de l’Ouest et de l’Indonésie, il a mené des recherches sur le terrain au Cameroun, Nigeria, Maroc, Ghana et Japon ainsi qu’en Indonésie. Se consacrant actuellement à l’écriture, il partage son temps entre l’Angleterre et l’Indonésie. Son ouvrage le plus connu est probablement Un anthropologue en déroute (1983) et son plus récent Requiescat: A Cat’s Life at the British Museum (2013).

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