Artistes Juifs de l'École de Paris (extrait)

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Ouvrage réalisé sous la direction de Somogy éditions d’art Coordination et suivi éditorial : Stéphanie Méséguer, Sarah Houssin-Dreyfuss et Anne-Marine Billot, assistées de Camille Aguignier, Céline Guichard, Christine Marchandise et Anne Malary Conception graphique : Paul Raymond Cohen Adaptation graphique : Larissa Roy Contribution éditoriale : Emmanuelle Graffin, Emmanuelle Montagnese et Sandra Pizzo (français), Natasha Edwards (anglais) et Yulia Farault (russe) Fabrication : Michel Brousset, Béatrice Bourgerie et Mélanie Le Gros Index : Astrid Bargeton (français), Natasha Edward (anglais) et Yulia Farault (russe) Contribution à la traduction : Brad Scott Photographies : Jean-François Humbert, Mike Jayet, Philippe Fuzeau, Mathieu Ferrier

ISBN 978-2-7572-0701-7 Dépôt légal : avril 2015 Imprimé en Italie (Union européenne)

© Somogy éditions d’art, Paris, 2015 © Denoël, Paris, 2000, pour la première édition de cet ouvrage, parue sous le titre Peintres juifs à Paris, École de Paris, 1905-1939.


Niesz awer & priNc

ARTISTES JUIFS DE L’ÉCOLE DE PARIS 1905-1939 Jewish Artists of the school of PAris еврейские художники ПАрижской ШкоЛЫ Sous la direction de

Nadine Nieszawer Expert de l’École de Paris 1905-1939 Deborah Princ – Arthur Princ – Boris Princ Marie Boyé Taillan – Paul Fogel Traduction du français vers l’anglais Deborah Princ Traduction du français vers le russe Oleg Semenov PréfAce PrefAce ПредисЛовие

Claude Lanzmann


Nadine Nieszawer tient à remercier tous ceux qui l’ont aidée dans la réalisation de cet ouvrage : Monsieur Claude Lanzmann ; Madame Vivienne Fenster et Monsieur Ariel Fenster ; Milo Princ, Céline Nieszawer, Alfred Levy, Isabelle Sobelman, Piotr Barsony, Lili Sztajn, Paul Fogel, Olivier Rubinstein, Gérard de Verbizier, Olivier Philippe, Maître Guy Loudmer, Didier Schulmann, Marc Restellini, Irina Kronrod, Patrick Masson, Stéphanie Méséguer, Paul-Raymond Cohen, Jacob Lifshin ; les artistes, les familles d’artistes, les conservateurs de musées, les spécialistes, les collectionneurs, les marchands, les commissaires-priseurs… de cette passionnante École de Paris 1905-1939 ; tous ses amis d’Artcurial pour leur soutien inconditionnel, en particulier Maître Francis Briest. Nos pensées vont à Suzanne Lubitch, Gisèle Rozenbaum-Garfinkiel et Tereska Torres.

À Flavie et Jacques

Les auteurs remercient la Fondation pour la Mémoire de la Shoah et la Fondation du Judaïsme Français.

Avec le soutien de la Fondation du Judaïsme Français

www.ecoledeparis.org


« Nous étions toute une génération, des enfants du heder jusqu’aux  étudiants talmudistes, épuisés par tant d’années à la seule analyse des textes. Nous emparant de crayons et de pinceaux, nous avons commencé à disséquer la nature, mais aussi à nous disséquer. Qui étions-nous ? Quelle était notre place parmi les nations ? Qu’en était-il de notre culture ? À quoi devait ressembler notre art ? Tout cela s’ébaucha dans quelques petites villes de Lituanie, de Russie blanche et d’Ukraine pour se prolonger à Paris. » El Lissitzky, Rimmon/Milgroïm, no 3, Berlin, 1923



CLAUDE LANZMANN

PRÉFACE

« Jean Adler, déporté le 27 mars 1942, convoi no 1, assassiné à Auschwitz. […] Bernard Altschuler, déporté le 27 mars 1944, convoi no 70, assassiné à Auschwitz. Ses œuvres ont disparu. […] Georges Ascher, convoi no 60, assassiné à Auschwitz. L’œuvre de Georges Ascher fut détruite dans son atelier lors de son arrestation… » Entrée après entrée, nom après nom, c’est toujours le même déchirement, la même douleur qui croît au fil des pages de la très belle et bouleversante anthologie Artistes juifs de l’École de Paris 1905-1939, qu’on doit à la patience, à la piété, à l’intelligence et au savoir de Nadine Nieszawer. Cet ouvrage est d’abord un mémorial, qui ne peut être parcouru distraitement. On ne le feuillette pas. Quelque chose – comme une loi – impose qu’il soit, dans la sécheresse et la pudeur de ses notations, lu intégralement. Omettre un nom est ressenti comme une trahison. Ce qui saisit d’effroi et s’éprouve presque physiquement au cours de la lecture, c’est l’immensité, la massivité de la perte. Cent soixante-dix-huit artistes, célèbres ou obscurs, jeunes ou âgés, débutants ou maîtres, sont ici rassemblés. Soixante et onze d’entre eux (soit 40 %) périrent asphyxiés dans les chambres à gaz de Pologne. De cette Pologne précisément que la plupart, dans une migration ininterrompue, avaient fuie entre 1905 et 1939 – comme ils avaient quitté la Lituanie, l’Ukraine, la Biélorussie, la Hongrie, la Bulgarie, la Tchécoslovaquie, l’Allemagne, toute cette Europe centrale et orientale des persécuteurs –, choisissant en pleine conscience de s’établir à Paris, foyer d’incandescence créatrice qui les aimanta tous. Nadine Nieszawer dit très bien dans son introduction ce que ces jeunes Juifs des shtetl et des villes de l’Est attendaient de Paris, ce que Paris leur apporta et comment eux-mêmes, par leur vaillance, leur travail, leur talent, leur soif de connaissance, leur rigueur et leur liberté, leur aptitude aussi à repousser les limites, contribuèrent à inscrire leur toute neuve peinture juive au cœur même de la modernité de l’art. On sait qu’à chacune de ses étapes le processus de destruction des humains fut accompagné d’une destruction parallèle des propriétés et des biens. Autrement dit, d’une implacable succession de vols, qui se poursuivait même après la mort, avec l’arrachage des dents en or. S’agissant d’art, les premiers spoliés ne furent pas les collectionneurs mais les artistes eux-mêmes, dont les œuvres, détruites, dérobées, dispersées à l’instant même de leur arrestation, ont sans doute disparu à jamais. Une biographie impossible, lacunaire, tragiquement brève quelquefois (trois lignes), une photographie de l’artiste ou d’un seul de ses tableaux ou sculptures sont tout ce qui demeure d’une vie de créateur, d’une œuvre en cours d’accomplissement. Ces traces, recherchées, exhumées et voulues par Nadine Nieszawer, nous sont aujourd’hui précieuses comme la sueur et le sang. Beaucoup des noms et des artistes qui figurent dans cette anthologie ne seraient jamais parvenus jusqu’à nous, seraient donc restés pour toujours inconnus, sans ce livre d’art, livre sur l’art, qui est indissociablement acte de nomination et de transmission. /7


AVANT-PRO POS

Cette histoire a débuté très tôt. Mon père, Jacques Nieszawer, était marchand de tableaux. Il achetait principalement les œuvres des peintres juifs de l’École de Paris, qu’il appelait les Yid’n. Cette peinture, intimement liée à son histoire, lui était familière. Lorsqu’il rentrait à la maison avec une de ces toiles, il la posait devant lui, s’asseyait dans un fauteuil, la regardait longuement. Puis il cherchait l’histoire du peintre dans deux ouvrages écrits en yiddish sur les artistes juifs. D’abord dans l’Aronson, Scènes et visages de Montparnasse, puis dans le Fenster, Nos artistes martyrs. Mon père est mort accidentellement le 28 juillet 1987. Naturellement, j’ai continué à m’intéresser à cette peinture. Mais je ne lis pas le yiddish. Aronson et Fenster ne pouvaient rien me raconter de la vie de ces peintres. À partir de 1988, Paul Fogel, passionné de yiddish, a traduit ces textes. Plus tard, Marie Boyé Taillan, m’a assistée pour mener à bien la première édition française, chez Denoël en 2000, sous la direction d’Olivier Rubinstein. « Artistes Juifs de l’École de Paris 1905-1939 » La nouvelle version, complétée et traduite en anglais et en russe a pu voir le jour grâce à l’enthousiasme de Nicolas Neumann des Éditions Somogy en 2015. Le directeur artistique de la première publication, Paul Raymond Cohen, nous a rejoints et nous a apporté tout son savoir-faire. Je les remercie tous. La transmission se poursuit… Mes fils Arthur et Boris ont bien connu  l’histoire de leur grand-père… Ils se sont engagés dans l’aventure de « L’École de Paris ». Arthur Princ est expert en art moderne, spécialiste de la sculpture, et Boris Princ est aujourd’hui marchand d’art. Quant à Deborah Princ, son épouse et partenaire, elle a su traduire et coordonner avec talent le nouveau dictionnaire trilingue de nos artistes. Qui étaient ces artistes ? S’il fallait trouver un point commun entre tous, ce serait la croyance au vieux proverbe allemand « Vivre comme Dieu en France », que la tradition orale  yiddish a popularisé en « Heureux comme un Juif à Paris » : Azoy gliklich wi a yid in Paris. Paris était le centre du monde. Venus de l’Est européen, entre 1905 et 1939, ils fuyaient l’antisémitisme de leur pays, cherchant une terre d’accueil où leur désir artistique pourrait s’exprimer librement. Ces artistes se sont installés à Montparnasse, se sont frottés à l’avant-garde foisonnante de l’époque, recréant un shtetl qui se réunissait dans les cafés du quartier, et ont formé ce qu’on appelle l’École de Paris. Nombre d’entre eux côtoyaient les écrivains et poètes juifs qui publiaient dans les revues et journaux yiddish. Dans les ouvrages consacrés à l’École de Paris, il est rarement fait état de leur judaïsme. On associe ces artistes à leurs pays d’origine, qu’ils avaient fuis, où l’accès aux Beaux-Arts leur était limité, voire interdit, en raison du « numerus clausus ». Ces femmes et ces hommes qu’un même espoir de vie animait ont été arrêtés net par la solution finale. Beaucoup ont péri dans les chambres à gaz, leurs œuvres ont été détruites, et ceux que la mort a épargnés n’ont jamais pu retrouver le rêve commun. /9


AVANT-PRO POS

Ces cent soixante-dix-huit artistes ne représentent pas, bien évidemment, la totalité des artistes juifs de cette époque. Ils étaient plus de cinq cents dans le Paris de l’entre-deux-guerres. Notre choix s’inspire de ces deux livres traduits du yiddish, le Fenster et l’Aronson, auxquels s’ajoutent d’autres artistes. Ce choix est subjectif, ces artistes forment un réseau d’amitié, on peut dire que de proche en proche ils se connaissaient tous. Une structure identique s’applique à toutes les notices, sans distinction de notoriété. Les biographies retracent les origines familiales, la formation artistique, l’arrivée à Paris et la situation de chacun pendant la Seconde Guerre mondiale. Pour la majorité des artistes déportés, les biographies sont souvent incomplètes car nulle trace ne reste d’eux. Les extraits choisis rapportent des propos tenus par l’artiste lui-même, un critique d’art ou un proche. La bibliographie rassemble, chronologiquement, les principaux ouvrages consacrés à  chacun, les articles de presse et les catalogues d’exposition.


DE PARIS 1905 -1939

ION

Paris, capitale du monde de l’Art

NADINE NIESZAWER , EXPERT DE L’ÉCOLE

INTRODUCT

Paris est un aimant pour les artistes du monde entier. D’Amérique Morgan Russell arrive en 1906, Man Ray en 1921 et Alexander Calder en 1926. Du Canada, James Morrice en 1908. Du Japon, Tsuguharu Foujita en 1913, Sei Koyanagui en 1920 et Toshio Bando en 1921. De Grèce, Demetrios Galanis en 1900 et Georges Gounaro en 1919. D’Italie, Gino Severini en 1906, Giorgio De Chirico en 1911, Massimo Campigli en 1919, Mario Tozzi en 1920 et Filippo De Pisis en 1925. Du Mexique, Angel Zarraga en 1904, Diego Rivera en 1912 et le Chilien Manuel Ortiz de Zarate en 1906. D’Argentine, Helena Cid en 1925. De Norvège, la famille Krogh en 1889. De Suède, Isaac Grünewald en 1908. De Chine, Yu Sanyu en 1921. D’Angleterre, Harry Bloomfield en 1912. De Hollande, Kees Van Dongen en 1897 et Piet Mondrian en 1912. De Tunisie, Gilani Abdul Wahab en 1911. D’Espagne, Pablo Picasso en 1900, Juan Gris en 1906, Francesco Borés  en 1925 et Antoni Clavé en 1927. De Russie, Michel Larionov en 1906, Alexander Archipenko en 1908,  Jean Pougny en 1910, Anton Pevsner en 1911, Kazimir Malevitch en 1912,  Vladimir Tatline en 1913 et Natalia Gontcharova en 1914. De Bulgarie, Georges Papazoff en 1924. D’Allemagne, Franz Marc en 1903, Max Pechstein en 1907, les Russes Alexej Jawlensky en 1905 et Wassily Kandinsky en 1906. Cet ensemble d’artistes n’est pas limitatif. Il montre l’ampleur de ce mouvement issu des quatre coins du monde. Le Salon d’automne de 1905 expose Henri Matisse, André Derain, Maurice  de Vlaminck. Une nouvelle peinture émerge qui a pour nom le fauvisme. En 1906, à Montmartre, au Bateau-Lavoir, Picasso invente l’après-Paul Cézanne : le cubisme est né. Avant la Première Guerre mondiale, l’Europe connaît un formidable bouillonnement des avant-gardes artistiques, dont le grand rendez-vous est à Paris. Les frontières ne comptent plus, Paris est le siège d’expériences les plus troublantes et les plus radicales en matière picturale, un laboratoire de l’art international.

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INTRODUCT ION

Qu’appelle-t-on l’École de Paris ?

L’École de Paris est un terme créé par le critique d’art André Warnod en 1925, dans la revue Comœdia, pour définir le groupe formé par les peintres étrangers à Paris. L’École de Paris ne désigne pas un mouvement ou une école au sens académique du terme, mais un fait historique. Dans son esprit, ce terme était destiné à contrer une xénophobie latente plutôt qu’à fonder une approche théorique. Il faut dire qu’à l’époque la critique artistique ne cache pas son nationalisme. Les revues artistiques expriment le mépris et la peur face à la place de plus en plus considérable prise par les artistes étrangers et notamment juifs dans le paysage artistique français. Louis Vauxcelles écrit dans Le Carnet de la semaine en 1925 : « Une horde de barbares s’est ruée sur Montparnasse, descendant [dans les galeries d’art de la] rue La Boétie, venant des cafés du XIVe arrondissement, poussant des cris rauques germano-slaves de guerre… Leur culture est tellement récente ! Quand ils parlent de Poussin, est-ce qu’ils connaissent le maître ? Ont-ils vu un jour un Corot ? Ou lu un poème de La Fontaine ? Ce sont des peuples  « d’ailleurs » qui ignorent au plus profond de leurs cœurs le respect devant ce que Renoir a appelé la douceur de l’École française – le tact qui est la vertu de notre race. » Le même Louis Vauxcelles, critique prolixe des peintres juifs, écrira des monographies pour les éditions Le Triangle, dans la collection Artistes juifs, en accord avec les artistes. Dans celle consacrée à Marek Szwarc, en 1931, on lit : « (…) telle une ruée de sauterelles, une invasion de coloristes juifs s’abat sur Paris – sur le Paris de Montparnasse. Les causes de cet exode : la révolution russe, et ce qu’elle a entraîné avec elle de misères, pogroms, exactions, persécutions ; les malheureux jeunes artistes se réfugient chez nous, attirés par le rayonnement de l’art français contemporain. (…) Ils vont constituer un des éléments constitutifs de ce que la jeune critique appellera l’École de Paris. Nombre de talents seront à considérer en cette cohue de métèques. »

Les débuts de l’École de Paris : 1905-1914 Nos artistes viennent de l’Est : Russie, Pologne, Allemagne, Bulgarie, Tchéco slovaquie, Roumanie, Hongrie. Ils se sont familiarisés avec les grands maîtres français du  XIXe siècle, ils connaissent les impressionnistes par l’intermédiaire de leurs professeurs comme Josef Pankiewicz à Cracovie, Ilia Repine à Saint-Pétersbourg, Adolf Fényes à Budapest et Lovis Corinth à Berlin. Âgés d’une vingtaine d’années pour la plupart, ils ont été des acteurs de l’émancipation juive, un mouvement de réveil social et intellectuel en Europe qui se caractérise par la perte du religieux et l’engagement politique. Pour la première fois des artistes juifs se sont trouvés en parfaite coïncidence avec le contexte cosmopolite des grandes capitales de l’époque, Vienne, Berlin, et surtout Paris. /12


INTRODUCT ION

Contexte historique

1791 : les Juifs de France deviennent citoyens français. 1881 : en Russie, assassinat du tsar Alexandre II par l’étudiant Grinevitski, de l’organisation révolutionnaire La Volonté du peuple. 1881 : des pogroms se déchaînent à Elisabethgrad, Odessa, Kiev et Varsovie. 1881 : forte immigration vers la France et les États-Unis. Sous l’Empire tsariste, diffusion des Protocoles des Sages de Sion, « faux politique » fabriqué à Paris à la fin du xIxe siècle par la police tsariste, l’Okhrana. 1881 : Victor Hugo préside un comité d’aide aux victimes des pogroms, auquel se joint l’archevêque de Paris. 1894-1906 : l’affaire Dreyfus. 1895 : manifestations antisémites lors de la dégradation du capitaine Dreyfus. Theodor Herzl y assiste. Bouleversé, il rédige durant l’année avec Max Nordau L’État juif. Octobre 1897 : sous l’Empire tsariste, dans la clandestinité, à Vilnius, création du parti socialiste et yiddishiste, le Bund : Union générale des ouvriers juifs de Lituanie, de Pologne et de Russie. 6-7 avril 1903 : sous l’Empire tsariste, pogrom de Kichinev sur l’initiative du ministère de l’Intérieur, mené par le journal Bessarabets et aidé par la police. 1905 : création du parti politique sioniste travailliste, le Poalé Sion, parti ouvrier juif social-démocrate dont les sections locales sont à Varsovie, Vilnius, Dvinsk, Poltava, Odessa, Ekaterinoslav. Janvier 1905 : Dimanche rouge, premier mouvement révolutionnaire à Saint-Pétersbourg. Le Bund et le Poalé Sion sont en première ligne. 9 décembre 1905 : en France, loi de séparation de l’Église et de l’État. 1er août 1914 : l’Allemagne déclare la guerre à la Russie et à la France. Février-octobre 1917 : la Révolution russe. Une guerre civile ravage le pays.

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23 février 1918 : création de l’armée rouge par Trotski (Lev Davidovitch Bronstein, dit). 11 novembre 1918 : armistice. 1919 : indépendance de la Pologne. Le maréchal Pilsudski est promu chef de l’État. 1919, 1920, 1921 : pogroms d’Ukraine, de Pologne et de Roumanie. Immigration des Juifs vers les États-Unis, la France et la Palestine. Janvier 1924 : dès la mort de Lénine, Staline opère une « chasse aux Juifs » dans l’Union des Républiques socialistes soviétiques. 1925 : parution de Mein Kampf en Allemagne. 1931 : en France, vagues antisémites. L’importance des ligues nationalistes/fascistes s’amplifie avec l’Action française, les Jeunesses patriotes, les Croix-de-Feu, le Francisme. 1933 : Hitler, leader du parti nazi, est nommé chancelier du Reich. 1934 : premiers camps de concentration : Dachau, Oranienburg, Emsland. Internement des opposants politiques. Août 1935 : en Pologne, Colonel Beck au pouvoir. Antisémitisme d’État. 1935-1936 : près de 150 pogroms se déchaînent dans tout le pays. 17 juillet 1936 : en Espagne, soulèvement du général Franco. 1936 : en France, le gouvernement du Front populaire présidé par Léon Blum dissout les ligues nationalistes/fascistes. 1937 : parution de Bagatelles pour un massacre, de Louis-Ferdinand Céline. 11 mars 1938 : l’Anschluss, rattachement de l’Autriche au IIIe Reich allemand. 8-13 novembre 1938 : Nuit de cristal. Nuit de violence antijuive, dans toute l’Allemagne et l’Autriche. 1938-1939 : arrivée massive en France de réfugiés d’Allemagne, d’Autriche, de Pologne, juifs et non juifs. 27 avril 1939 : fin de la guerre d’Espagne. 23 août 1939 : pacte germano-soviétique. 1er septembre 1939 : l’Allemagne envahit la Pologne. 3 septembre 1939 : la Grande-Bretagne et la France déclarent la guerre à l’Allemagne.


25 septembre 1939 : Hitler et Staline se partagent la Pologne. Septembre 1939 : en France, arrivée des premiers internés dans les camps du Sud-Ouest à Milles, Argelès, Gurs, Le Vernet : républicains espagnols, réfugiés allemands et autrichiens. Juin 1940 : Paris est occupé par l’armée allemande. 3 octobre 1940 : Pétain et ses ministres signent le premier statut des Juifs, définissant « le Juif » selon le nombre de grands-parents appartenant à la « race » juive. 4 octobre 1940 : loi de Vichy autorisant l’internement des étrangers de « race » juive. 29 mars 1941 : création du Commissariat général aux questions juives, successivement sous la responsabilité de xavier Vallat et de Louis Darquier de Pellepoix. Recensement des Juifs. 14 mai 1941 : première rafle : 3 747 Juifs étrangers sont convoqués dans les commissariats parisiens et internés dans les camps de Pithiviers et de Beaunela-Rolande. 2 juin 1941 : vote du deuxième statut des Juifs leur interdisant l’accès aux professions de la banque et du spectacle. 22 juillet 1941 : vote de la loi visant à « éliminer toute influence juive dans l’économie nationale ». Les biens juifs sont confiés à des administrateurs provisoires. « Aryanisation des biens juifs. » 15-20 août 1941 : 4 232 femmes et hommes juifs sont arrêtés et internés à Drancy. 3 octobre 1941 : attentats contre sept synagogues parisiennes 12 décembre 1941 : troisième rafle de Juifs à Paris, arrêtés par la police française et internés à Compiègne. 14 décembre 1941 : début des déportations vers les camps d’extermination. 20 janvier 1942 : conférence de Wannsee (Berlin) qui décide la « Solution finale ».

27 mars 1942 : premier convoi de déportés des camps de Compiègne et de Drancy vers Auschwitz. 7 juin 1942 : obligation du port de l’étoile jaune pour les Juifs. 1er juillet 1942 : Radio-Londres (en français) dénonce le massacre des Juifs polonais et l’existence des chambres à gaz. 2 juillet 1942 : René Bousquet, secrétaire général du ministère de l’Intérieur pour la police, organise la rafle du Vel’d’Hiv’, en accord avec Danneker, qui dirige le service antijuif de la Gestapo. 16-17 juillet 1942 : la grande rafle du Vel’d’Hiv’. 9 000 policiers français, gendarmes et gardes mobiles se déploient dans Paris. La population juive a été recensée dans des fichiers (fichier Tullard). Le Vélodrome d’hiver reçoit 13 152 personnes, dont 4 115 enfants, sans eau, ni nourriture, ni installation sanitaire pendant 5 jours. 20 juillet 1942: internements dans les camps de concentration français de Drancy, Beaune-la-Rolande, Pithiviers, déportations vers les camps d’extermination. 26 août 1942 : rafle des Juifs dans la zone Sud. 25 août 1944 : libération de Paris. Janvier-mai 1945 : libération ou évacuation des camps par les armées soviétiques et américaines. 25 janvier : Struthof 27 janvier : Auschwitz-Birkenau-Monowitz 4 avril : Ohrdruf/Kommando de Buchenwald 11 avril : Buchenwald et Dora 15 avril : Bergen-Belsen 22 avril : Oranienburg-Sachsenhausen 23 avril : Flossenbürg 7 avril-4 mai : Neuengamme 29 avril : Dachau 30 avril : Ravensbrück 5 mai : Mauthausen 8 mai : Theresienstadt (Térézin) 80 000 Juifs de France sont morts dans les camps et hors des camps. Six millions de Juifs ont été assassinés par les nazis. 14 novembre 1945 : ouverture du procès de Nuremberg. 1er octobre 1946 : verdict de Nuremberg. Novembre 1946 : en Pologne, pogrom de Kielce, 42 Juifs sont assassinés sur les 250 survivants revenus des camps de la mort. 14 mai 1948 : création de l’État d’Israël.

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INTRODUCT ION

Hersch FENSTER BARANOW (GALICIE) 1892 – PARIS 1964

Issu d’un milieu modeste, Hersch Fenster est né à Baranow dans la région de Cracovie, en Galicie. Il étudie au heder puis à l’école secondaire. Pendant la Première Guerre mondiale, il est étudiant à Vienne et obtient son diplôme d’enseignement supérieur de pédagogie. Lors d’un séjour à Tarnow, il rencontre Léa Gelernter, qu’il épousera en 1928 à Paris. Son activité littéraire commence dans le journal de langue allemande Abend-Post à Vienne de 1919 à 1921. Il y écrit des poèmes et des histoires. Il travaille également pour les journaux yiddish de Varsovie, dont Literarishe Bletter (Les feuilles littéraires). En 1922, il part étudier à Vienne. Léa le rejoint, elle a alors dix-sept ans. À Vienne, Hersch Fenster milite pour l’organisation sioniste Poalé Sion et dans un mouvement anarchiste. Il s’installe à Paris en 1922. Il occupe diverses fonctions, dont celle de secrétaire de Shalom Asch, lorsque celui-ci habitait Meudon. Tout en continuant ses études littéraires à la Sorbonne, Fenster est aussi professeur de yiddish pour des enfants de familles bundistes, il donne également des cours d’anglais et de français aux étrangers. Il fréquente à Montparnasse le sculpteur Naoum Aronson, et des peintres comme Mané-Katz, Isaac Antcher, Isaac Dobrinsky, Alfred Aberdam, Léon Weissberg, Ephraïm Mandelbaum, Jacob Macznik. Sa table sera toujours ouverte aux artistes et intellectuels juifs arrivés à Paris et issus de tous les milieux sociaux. En 1937, il fonde le Foyer amical pour les réfugiés juifs au 41 de la rue Richer, dans le IXe arrondissement. Jusqu’en 1940, on y sert des repas, les fêtes y sont célébrées, on assiste à des représentations de théâtre ou on y vient juste pour discuter. Pendant l’Occupation, en 1940, Hersch Fenster part se réfugier avec sa femme et sa fille Vivienne, en Dordogne, à La Force, près de Bergerac. En 1941, convoqué par la police française, il est interné dans un camp du Cantal.  À la suite d’un accident de sa fille, il obtient une permission exceptionnelle et revient auprès de sa famille. Quelque temps après, alors qu’il est sommé de retourner au camp, les gendarmes menacent de venir le chercher. Il part pour Grenoble puis Saint-Gervais en Haute-Savoie, où sa famille le rejoint. Là, il est arrêté par les gendarmes, mais grâce à l’intervention de soldats italiens qui occupent la région, il échappera à la déportation. /28

Hersch Fenster. Archives Fenster.


Il se réfugie clandestinement en Suisse où il est interné dans un camp. Léa, son épouse, et Ariel, son fils né le 18 avril 1943, sont internés dans un autre camp. Vivienne, elle, est accueillie par une famille avec laquelle elle est toujours en relation. La guerre terminée, la famille se retrouve à Paris, rue Ledion,  dans l’appartement qu’elle habitait depuis 1932. En 1945, Fenster crée  « La cuisine populaire », une sorte de soupe populaire pour les Juifs rescapés, qui se transforme en un lieu de rencontre culturel yiddish. En Suisse déjà, Hersch Fenster a le projet, s’il reste en vie, d’honorer la mémoire des artistes martyrs en leur consacrant un ouvrage. Dès 1946, il entreprend de rassembler des documents. Il enquête au camp d’internement de Drancy, rend visite aux familles rescapées, les questionne, retourne sur les lieux d’arrestation, interroge les concierges d’immeuble, consulte avec beaucoup de difficulté des documents à la préfecture de Police. Il reçoit des lettres de témoignage, rassemble les photos des œuvres, les portraits des artistes. Son livre, Nos artistes martyrs, écrit en yiddish, sera préfacé par Marc Chagall.

Avril 1939, soirée de Seder au foyer amical en l’honneur de Boris Schwartz, acteur yiddish américain. Au premier plan, assis à gauche : Chil Aronson, non identifié, Boris Schwartz, Hersch Fenster et sa fille Vivienne ; quatrième debout à gauche, Jacob Macznik et Léa, femme de Fenster. Archives Fenster.

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CHIL ARONSON NAKOW (POLOGNE) 1898 – PARIS 1966

Aronson est né dans une famille hassidique qui accepte, néanmoins, que ses quatre fils suivent parallèlement une éducation libérale. En 1903, sa famille s’installe à Varsovie, quant à lui, il fréquente l’école polonaise et visite les musées. Sa passion pour l’art se développe. Autodidacte, il commence à peindre à l’aquarelle mais s’arrête rapidement. Il écrit son premier article dans Illustrirte Woche (La Semaine illustrée), journal yiddish de Varsovie, et fréquente le monde des écrivains et journalistes. La découverte des tableaux de Chagall, Epstein, Feder, Krémègne, venant de France et qu’il nomme « peinture française », va orienter sa vie. En 1929, il arrive à Paris et devient directeur d’une galerie d’art située au 12 de la rue Bonaparte, où il expose des peintres juifs de l’École de Paris. De 1928 à 1937, il écrit sur l’art italien et l’art juif, des biographies, dans différentes revues polonaises et américaines en yiddish, également pour une encyclopédie en yiddish. Il devient le spécialiste des peintres juifs et crée en 1937 une association d’artistes juifs à Paris. Pendant la guerre, il se réfugie à Montauban, Toulouse et Nice. Après la guerre, en plus du journal Unzer Wort (Notre parole), il collabore  à des journaux yiddish qui ont vu le jour à Paris : Naïe Press (Presse nouvelle),  de tendance communiste, et Pariser Tsaïtchrift (Revue parisienne) Le livre Scène et visages à Montparnasse, publié en 1963, est un recueil d’articles de Naïe press à partir de récits et d’entretiens avec les artistes. Son œuvre fut de réunir les vies d’artistes juifs de Montparnasse. C’est une description non académique, le ton y est libre et spontané, à l’image de l’auteur. Aronson est un homme très enthousiaste, ouvert, animé d’un profond intérêt pour les artistes juifs, qui selon lui, sont des acteurs de la renaissance juive. Il a mis en évidence le bouleversement dont il était contemporain : le peuple du Livre – pour qui l’art était tout entier concentré dans la lettre, dans la page liturgique, le but étant le service divin par la prière et l’étude  – s’ouvrait aux arts graphiques. Il a questionné l’origine de cette nouvelle impulsion.

Benn, portrait de Chil Aronson. Documentation Aronson.

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D’autre part, parlant et écrivant le yiddish, langue sans frontières, ni géographiques ni sociales, il a éduqué le regard d’une génération à cette peinture, il a été un intermédiaire, un pont entre le peintre et le profane. Véritable amoureux de l’art, il est à l’origine de vocations de collectionneurs. François Szulman, artiste peintre, l’a bien connu et le décrit comme un homme bon, cultivé, sensible, plein d’humour et doué d’un certain culot pour imposer ses idées.

En 1963, l’Association des artistes peintres et sculpteurs juifs de France. Assis : Indenbaum, Perelmann, Aberdam ; debout, de gauche à droite : Mané-Katz et sa fiancée, Schreter, Kikoïne, Pressmann, non identifié, Sterling, non identifié, Borvine Frenkel. Documentation privée.

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Léon ZAMARON et les artistes juifs LANDAVILLE (FRANCE) 1872 – PARIS 1955

La plupart des artistes évoqués dans cet ouvrage sont arrivés en France entre 1910  et 1925. Ils venaient pour la majorité de Pologne, de Russie ou d’autres pays de l’Est. Bien entendu aucun n’avait de papiers, et si certains voulaient rester apatrides, d’autres ont demandé la nationalité française. Beaucoup ont rencontré sur leur route Léon Zamaron. Léon Zamaron fut commissaire de police de 1906 à 1932 à l’Inspection générale. Il a pris sous sa protection un grand nombre d’artistes, non seulement en les aidant au cours de leurs démarches administratives, obtention de visas, permis de séjour, demandes de naturalisation, mais en leur apportant une aide matérielle. Il passait avec certains des contrats (mensualités contre toiles) et en aidait financièrement d’autres, soit directement, soit par le biais de l’AAAA (Aide amicale aux artistes), qu’il dirigeait avec Rachel Kahn. Il a rassemblé très tôt dans sa fabuleuse collection un grand nombre de toiles d’artistes juifs et a encouragé beaucoup d’entre eux en les introduisant auprès de galeries, de marchands et de collectionneurs. Il a aidé Modigliani, Soutine, Kikoïne, Krémègne, Zadkine, Epstein,  Hayden, Marek Szwarc, Marevna, Landau, Szyk, Mondzain, Mendjiski, Païles, Léopold Lévy, Weinbaum et certainement beaucoup d’autres. Il a aussi collectionné leurs œuvres. Nous publions quelques lettres adressées à Léon Zamaron par ces peintres juifs qu’il a aimés… et dont nous avons respecté l’orthographe. Le 29 juin 1918 Monsieur N’ayant pas de belles choses à vous montrer pour le moment, et étant très occupé aussi, je ne puis venir vous voir. Je vous serais très reconnaissant, si vous voulez bien envoyer à ma chère femme les 50 F que vous me devez. Excusez moi de vous les réclamer. Je vous serre cordialement la main et croyez moi votre dévoué Kikoïne 2 Passage Dantzig Paris

Léon Zamaron, commissaire de police.

PARIS LE 25 11 1930 Cher ami Zamaron Quelques mots pour vous remercier de nous avoir encore aidé cette fois ci et cela tombait très bien car nous avions juste 16 Frabcs dans la poche et des dettes partout. J’ai gardé caché trois quatre toiles, pour si j’ai de la chance d’avoir un de ces matins Bernheim pour lui montrer Nous vous sommes très reconnaissant et ne savons comment vous remercier amities Pailes Vous avez du oublier votre crayon à l’atelier

N.B. : aussitôt que j’aurai un tableau de fait je vous l’apporterai

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INTRODUCT ION

Cher ami Zamaron Il est venu aujourd’hui à l’atelier Monsieur Emile Bernheim de votre part, il a acheté 5 toiles et il m’a commandé un Nu, car il a été emballé sur votre Nu. Je suis très content car cela tombe tout à fait bien, et en même temps il m’a promis de faire voir mes toiles à des amateurs. Cher monsieur Zamaron je ne sais pas comment vous remercier, vous êtes maintenant un ami. Encore une fois merci et recevez l’assurance de toute mon amitié à bientôt Pailes

LE 10 JUIN 1923 Cher ami Je suis épisé par mon travail que je ne suis pas capable de pouvoir même écrire raisonnablement quelques lignes pourtant il faut bien que je vous ecriv d’une chos e très précise et pour ainsi dire un peu urgent. Je suis au bout de mon travail, c’est à dire que je compte dans 10 jours terminér ma dernière toile, et le maximume que je puise encore rester ici c’est quinze jours (vous savez bien dans quel condition matériel que je suis ici, c’est dire à crédit, et je ne peu pas en abuser) donc dans cette epoque il faut absolument que je rentre àParis, et il me faut pour mes frais de voyage et embalage et expedition de mes toiles un peu d’aregents et je suis toujours sans un sous, je compté que la somme que j’ai besoin ici pour mon départ est 600 fr, je vous serai donc bien reconnaissant que vous ayez la bontée de m’envoyer cette somme que je partire d’ici sans retard. je vous rmercier d’avance cher Monsieur Zamaron et recevez mes amitier tres cordial mes meilleurs souvenire a Madame zamaron Votre Mondzain St Tropez le 16 Septembre Cher monsieur Depuis longtemps je n’ai pas eu de vos nouvelles et j’attribue votre silence aux péripéties de ce beau voyage, dont vous m’avez parlé dans vos lettres précédentes.

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Mais l’idée me vient qu’une lettre peut-être de vous s’est perdue en route, ce qui arrive bien souvent. Veuillez bien me dire si vous êtes toujours à paris ou si vous avez passé les Pyrénées Je me permets en même temps de vous demander si je puis compter encore pour la petite somme convenue pour ce mois. Je suis en plein travail, j’ai cinq à six toiles entrain que je serai obligé d’abandonner si les 200 F providentiels ne viennent remplir ma bourse aplatie. Excusez moi de parler de ces misères, que vous devinez être de première importance pour moi. le temps nous favorise toujours, il fait beau et chaud comme en plein mois d’août, aussi je travaille dehors toute la journée. Je me plais de plus en plus dans ce beau pays et je serai heureux de pouvoir prolonger le plus possible mon séjour à St Tropez. Si vous êtes en Espagne permettez moi de vous accompagner dans ce pays fabuleux avec toutes mes pensées respectueusement dévouées. Landau Cher Monsieur Depuis six jours je suis au lit.J’ai une crise de rhumatisme et je ne sais pas quand cela passera… Je suis sans argent et je vous serai très reconnaissant si vous pouvez m’avancer un peu plus d’argent. Quand je me lèverai, je vous apporterai des toiles de ma dernière époque. Excusez moi, cher Monsieur, de vous avoir dérangé et recevez mes salutations très empressées Marek Szwarz 207 bd raspail (atelier 18 Impasse du maine) Vence 9 4 24 Cher Monsieur Zamaron Me trouvant à Vence avec ma femme depuis un mois et ne pouvant aller à Paris que dans quelques mois. Je viens de faire réponse à Mr le chef de service des étrangers qui me convoque à me présenter au sujet de ma naturalisation le 11 Avril à 9 h 45 bureau 85 bis de transmettre la demande à Nice. Pouvez vous cher Monsieur Zamaron m’aider un un peu à devenir Français Je vous remercie bien à l’avance et recevez mes biens sincères salutations Weinbaum

Bibliographie Olivier Philippe, Zamaron, un flic ami des peintres de Montparnasse, Éditions Arcadia, 2007.


Bibliographie de l’introduction Marc Chagall, Ma vie, éd. Stock, Paris, 1931. Berthe Weill, Pan ! … dans l’œil … ou Trente ans dans les coulisses de la peinture contemporaine 1900-1930, Paris, 1933. Léo Kening, Un musée d’art « Makhmadim », 1950, papier privé. Youki Desnos, Les Confidences de Youki, éd. Arthème Fayard, Paris, 1957. Florent Fels, Le Roman de l’art vivant, éd. Arthème Fayard, Paris, 1959. J.-P. Crespelle, Montparnasse vivant, éd. Hachette, 1962. René Gimpel, Journal d’un collectionneur, éd. Calmann-Lévy, Paris, 1963. Edouard Benezit, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, éd. Grund, Paris, 1976. Katia Granoff, Œuvres complètes, éd. Christian Bourgois, Paris, 1980. Kenneth E. Silver, Romy Golan, The Circle of Montparnasse. Jewish Artists in Paris, 1905-1945, The Jewish Museum, New York, 1985. Billy Klüver, Julie Martin, Kiki et Montparnasse 1900-1930, éd. Flammarion, Paris, 1989. Avram Kampf, Chagall to Kitaj, Jewish Experience in 20th Centuary Art, Lund Humphories, Londres, 1990. Myriam Anissimov, Yves Kobry, Paris, Tête d’affiche, no 19, juillet 1992, consacré à l’histoire des Juifs à Paris. Annette Wieviorka, Jean Baumgarten, Rachel Ertel, Itzhok Niborski, Mille ans de cultures ashkénazes, éd. Liana Levi, Paris, 1994. François Bédarida et Laurent Gervereau, La Déportation, le système concentrationnaire nazi, éd. Musée d’Histoire contemporaine BDIC, 1995. Marcel Ruby, Le Livre de la déportation, éd. Robert Laffont, Paris, 1995. Valérie Bougault, Paris Montparnasse, éd. Pierre Terrail, Paris, 1996.

Roger Berg, Histoire des juifs à Paris, éd. du Cerf, Paris, 1997. Henri Minczeles, Histoire générale du Bund, éd. Denoël, Paris, 1999. Marc Restellini, Billy Klüver, Julie Martin, Kiki, reine de Montparnasse, catalogue d’exposition, Japon, 1999. Jeanine Warnod, La Ruche des arts d’Alfred Boucher, catalogue d’exposition, hôtel de ville de Nogent-sur-Seine, mai-octobre 2000.

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Peintres juifs de l’École de Paris 1905-1939

Marc Chagall au bord de la Seine en 1959. Photographie d’Ervin Marton. Celui-ci arrive de Hongrie en France en 1937. Pendant la guerre, il participe au combat des FTP-MOI et reçoit la médaille de la Libération. À part ses travaux qui s’inscrivent dans la tradition de la photographie humaniste, il s'est fait aussi remarquer pour ses portraits des personnalités de la culture parisienne des années 1950 et 1960. Documentation privée.

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94 – PARIS 1963

LWOW (GALICIE) 18

Alfred ABER DAM

Alfred Aberdam grandit à Lwow (alors dans l’Empire austro-hongrois) au sein d’une famille aisée, et auprès d’un père cultivé. Après son baccalauréat, il organise dans sa ville natale plusieurs conférences sur les maîtres italiens et flamands, et sur les premiers peintres juifs, dont Josef Israëls (1824-1911). Abandonnant la théorie pour la pratique, Aberdam part en 1913 pour Munich étudier la peinture à l’Académie des beaux-arts. La Première Guerre mondiale met fin à son apprentissage : il est mobilisé dans l’armée autrichienne puis envoyé sur le front oriental. Blessé dès le début de la guerre, il sera capturé par les Russes et interné à Irkoutsk, en Sibérie. En 1917, Aberdam est nommé commissaire du peuple aux Beaux-Arts par le soviet local qui lui confie la charge de réorganiser l’enseignement artistique. L’année suivante, à Moscou, il se lie d’amitié avec le poète Vladimir Maïakovski. Après des séjours successifs à Leningrad et Vienne, Aberdam rentre à Lwow. Entre 1920 et 1922, il étudie aux Beaux-Arts de Cracovie, où enseigne Josef Pankiewicz, et obtient le premier prix de peinture en 1922.

Alfred Aberdam, Nature morte, 1935. 89 × 116, hst. Collection privée.

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Alfred ABER DAM

Sa carrière de peintre débute à Varsovie en avril 1922, où il participe à la 4e exposition de Peinture et de Sculpture présentée au siège de la Communauté juive, suivie en octobre à Lwow de l’exposition collective du Cercle des amateurs de l’art juif. À partir de cette date, il envoie des articles et des correspondances à des revues artistiques de Lwow, notamment Chwila et Nasz Przeglad. En 1923, de passage à Berlin, il rencontre Menkès et Weingart dans l’atelier du sculpteur Alexander Archipenko. En 1924, il se fixe à Paris dans le quartier de Montparnasse. À la fin de l’année 1925, une exposition est organisée à la galerie Au Sacre du Printemps, chez Jan Sliwinski, 5, rue du Cherche-Midi, en compagnie de ses trois amis galiciens, Léon Weissberg, Sigmund Menkès et Joachim Weingart. Le Groupe des Quatre est né. Jusqu’en 1937, grâce à son ami Marcel Slodki, il aurait bénéficié de commandes de collectionneurs suisses. Sous l’Occupation, Aberdam trouve refuge à Paris chez la pianiste Anna Radlinska. En 1944, il participe à la création de la Société des artistes juifs à Paris, présidée par le sculpteur Léon Indenbaum. Aberdam en devient secrétaire, Marc Sterling et Zygmund Schreter, trésoriers. Leurs objectifs : créer un musée juif à Paris et un périodique consacré à la culture juive. Cette association organisera vingt meetings. Le premier aura lieu le 15 septembre 1944. Après la guerre, Alfred Aberdam retrouve son domicile parisien, visite le Midi de la France, la Suisse et plus tard Israël, où plusieurs expositions lui seront dédiées. En 1960, trois ans avant sa mort, il peint une œuvre magistrale, une grande toile qu’il intitule : Triomphe de la Nuit – Auschwitz.

Expositions collectives Galerie Marcel Bernheim, Paris. « Aberdam, Menkès, Weingart, Weissberg », galerie Au Sacre du Printemps, Paris, 1925, 1926. Salon d’automne, Paris, 1925-1927, 1946. Salon des Tuileries, Paris, 1927-1929. Galerie Bonaparte, Paris, 1929. Salon des indépendants, Paris, 1934. Salon de la Libération, Paris, 1945. Beaux-Arts de Bezalel, Jérusalem, 1952. « L’École de Paris-Boulogne », musée des Années trente, Boulogne-Billancourt, 1988. « Montparnasse atelier du monde, ces artistes venus d’ailleurs», Forum des arts, Palais de la Bourse, Marseille, 1992. « Kikoïne et ses amis de l’École de Paris », couvent des Cordeliers, Paris, 1993. « Une passion allemande pour l’art juif. La collection Lammel », Musée juif de Belgique, 2014. Expositions personnelles Galerie Van Gujen, Paris. Galerie Bonaparte, Paris. Galerie Worms, Paris. Galerie Katia Granoff, Paris, 1929, 1952.

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Rétrospective, galerie des Beaux-Arts (Georges Wildenstein), Paris, 1949. Tel Aviv Museum of Art, 1949, 1962, 1970. École des beaux-arts de Bezalel, Jérusalem, 1952. Galerie Lara Vincy, Paris, 1955. Galerie Saint-Placide, Paris, 1956. Molton Gallery, Londres, 1961. Musée du Petit Palais, Genève, 1970. Galerie Abel Rambert, Paris, 1990. Extraits choisis « De nouveaux peintres arrivent pour enrichir de leur contribution le rêve vivant de la galerie. […] Alfred Aberdam m’attirait par la poésie étrange et raffinée de ses compositions. Il transfigurait des statues d’un marbre brisé en une chair mutilée et vivante, et des misérables taudis en palais de corail et de cristal. Récemment chez Wildenstein, j’ai pu voir quels progrès formidables il avait faits. » Katia Granoff, Histoire d’une galerie, Paris, 1949. « L’unique reproche possible à l’adresse des peintres juifs serait leur goût pour l’intime. L’aspect le plus défavorable en est qu’ils aient joué une part si faible dans les luttes de l’art moderne. Est-ce bien ou mal, je ne saurais vraiment pas le dire. Je crois cependant que le conservatisme n’a jamais de bons résultats. Cela mène à poser la question pourquoi les peintres juifs


98 – PARIS 1980

SAKI (UKRAINE) 18

Michel ADLE N

De 1915 à 1922, Michel Adlen suit des cours de peinture à Vienne où il expose pour la première fois. En 1923, il est à Berlin et participe à plusieurs expositions d’art graphique. La même année, il arrive à Paris et son œuvre s’imprègne d’une influence cubiste pendant une brève période (1925). Il prend la nationalité française et réalise, à partir de 1929, des illustrations pour divers contes et romans. En 1932 paraît un album de ses lithographies, préfacé par André Salmon. En 1936, il participe à l’Exposition internationale de gravure sur bois à Varsovie. Les musées de Moscou et de Kiev font l’acquisition de ses gravures dès 1928. En 1937, il collabore à la revue Nos artistes. En 1955, Armand Lanoux publie une monographie sur Adlen. Un album d’estampes paraît en 1960 sur le thème du cirque : Clown de Paris. En 1963, Pierre Mac Orlan lui préface son dernier album, Île-de-France. Peintre de la banlieue parisienne et de la ville, Michel Adlen s’éteint le 21 janvier 1980 dans son atelier.

Expositions collectives Salon d’automne, Paris, 1927, 1929, 1930. « Gravures sur bois », Varsovie, 1936. Galerie des Pendus, Paris, 1939. Salon populiste, Paris, 1949. Salon des indépendants, Paris, 1946, 1950. Expositions personnelles « Monotypes », galerie de l’Institut, Paris, 1954. Galerie Zak, Paris, 1956, 1960. Galerie de Seine, Paris, 1950, 1952. Galerie Modern Art, Munich, 1958. Galerie Paul Marquet, Saint-Yrieix, 1961. Chez Terrat, La Napoule, 1964. Mairie de Saint-Yrieix, 1966, 1973. Galerie Bénézit, Paris, 1967, 1964, 1970, 1972. Galerie Montparnasse 47, Paris, 1979. Extraits choisis « Le dessin d’Adlen est d’une étrange pureté. Le trait est dépouillé pour réaliser une composition nourrie. C’est par le sentiment même qu’il a d’un paysage qu’il en élimine les éléments parasites. » André Salmon, préface de l’album Banlieues, éd. C.A. Girard, Paris, 1932.

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Archives Fenster.

« Adlen est fidèle aux paysages qu’il aime : il est loyal et n’emprunte rien aux hommes pour animer les berges dont la personnalité naturelle n’accepte la rumeur des guinguettes que dans la présence inévitable des nécessités dominicales. » Pierre Mac Orlan, préface de l’album Île-de-France, éd. Manuel Bruker, Paris, 1963. Bibliographie Armand Lanoux, Michel Adlen, éd. Presse du Temps présent, Paris, 1956. Chil Aronson, Scènes et visages de Montparnasse, Paris, 1963, p. 446-449. Aberdam, Adlen, Borvine Frenkel, Kolnik, Nos artistes, no 1, décembre 1957. Daniel Beresniak, « Un figuratif : Michel Adlen », La Vie juive, février 1960. Album de lithographies Grands Musiciens, éd. Le Goupil, Paris, 1925. Album de lithographies Banlieues, préface d’André Salmon, éd. C.A. Girard, Paris, 1932. Album d’estampes Clown de Paris, éd. Presse du Temps présent, Paris, 1960. Album de lithographies, Île-de-France, préface de Pierre Mac Orlan, éd. Manuel Bruker, Paris, 1963.


Michel Adlen, Jeune Fille. 46 × 36, hst. Collection privée.

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1949

E)

(GRANDE-BRETAGN NE

1895 – ALDBOUR

TUSZYN (POLOGNE)

Jankel ADLE R

Jankel Adler est le septième d’une famille religieuse de dix enfants. Son père était meunier à Tuszyn près de Lodz. En 1912, il étudie la gravure à Belgrade, puis entre l’année suivante dans une école d’art à Barmen, en Allemagne. Il poursuit ses études jusqu’en 1914 à l’académie des Arts décoratifs de Düsseldorf avec Gustav Wiethüchter. Pendant la guerre, il s’engage dans l’armée russe, se fait capturer par l’armée allemande mais sera rapidement relâché. En 1918, il se rapproche du groupe Der Sturm. De retour en Pologne, Adler expose à Lodz et à Varsovie. En 1919, à Lodz, il participe à la création du cénacle Yung-Yiddish, avec l’écrivain fondateur Moyshe Broderzon. Il part pour Düsseldorf en 1920. Il rencontre Otto Dix en 1922, année où il participe à la création du groupe Die Kommune, ainsi qu’à l’Exposition internationale des artistes révolutionnaires à Berlin. Il obtient un grand succès avec les fresques du planétarium qu’il peint en 1925 et, après un séjour en Espagne (1930), revient en 1931 étudier à l’académie de Düsseldorf avec Paul Klee. Il dessine une affiche révolutionnaire au moment des élections de février au Reichstag, après l’arrivée d’Hitler au pouvoir. Fuyant le nazisme, Adler quitte l’Allemagne et arrive en France en 1933. Les années suivantes (1935-1937) sont marquées par de nombreux voyages en Italie, Roumanie, Yougoslavie, Tchécoslovaquie, Russie et Pologne. Une grande rétrospective de son œuvre a lieu à Varsovie en 1935. En 1937, Jankel Adler se fixe quelque temps à Paris, fréquente l’Atelier 17, dirigé par Stanley William Hayter. Il séjourne à Cagnes-sur-Mer avant de s’engager dans l’armée polonaise. Lors des affrontements de la Seconde Guerre mondiale, il sera démobilisé pour raison de santé en 1941 puis évacué dans la banlieue de Londres en 1943. Adler ne retournera jamais en Allemagne. Ayant perdu une grande partie de sa famille en déportation, il refusera d’exposer dans ce pays et terminera ses jours en Angleterre.

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Jankel Adler, Autoportrait. 61 × 48, csp. Documentation privée.


Expositions collectives Association of Artists and Art Lovers, Lodz, 1918. Polish Arts Club, Varsovie, 1920. Novembergruppe, Berlin, 1923. Deutsche Künstlerbund, Cologne, 1929. Chalette Gallery, New York, 1959.

Galerie Charles Lienhard, Zurich, 1959. Galerie Michael Hasenclever, Munich, 1977, 1988. Tel Aviv Museum of Art, 1985. Galerie Remmert und Barth, Düsseldorf, 1985, 1995. Städtische Kunsthalle, Düsseldorf, 1985 (exposition itinérante, Tel-Aviv, Lodz).

Jankel Adler, Nu debout, 1935. 73 × 24, hsp. Collection privée.

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(FRANCE) 1932 1878 – NEMOURS E)

SOBOLEVKA (UKRAIN

Alexandre A LTMANN

Alexandre Altmann fait ses études aux Beaux-Arts d’Odessa. Il quitte Odessa en 1905 et, à pied, gagne Paris où il trouve un atelier à la Ruche. Il fait alors la connaissance d’Émile Schuffenecker. En 1910 Altmann connaît une certaine notoriété à la suite de l’exposition de son tableau L’Inondation de Paris. Il s’installe alors rue des Périchaux, près de la Ruche et bénéficie de commandes officielles pour plusieurs bâtiments publics (ministère des Affaires étrangères, palais du Luxembourg, etc.). En 1920, il s’installe à Nemours. À la fin de sa vie, Altmann séjourne régulièrement à Saint-Jean-de-Luz au Pays basque, et sur la Côte d’Azur, à Cannes. Une rue de Crécy-la-Chapelle (Seine-etMarne) porte le nom du peintre (en l’honneur d’Alexandre et de son petit-fils Gérard Altmann, lui aussi peintre).

Expositions collectives Salon des indépendants, Paris, 1908, 1909, 1912. Salon d’automne, Paris, 1909-1912. Salon des Tuileries, Paris, 1923. « Montparnasse atelier du monde. Ces artistes venus d’ailleurs, hommage à Kisling », forum des arts, palais de la Bourse, Marseille, 1992. « La Ruche, le centenaire d’une cité d’artistes », musée du Montparnasse, Paris, 2002. « Paris-Marseille… de la Cannebière à Montparnasse », musée du Montparnasse, Paris, 2003. « Alexandre et Gérard Altmann », mairie de Crécy-la-Chapelle, octobre 2003. « Sur les traces de Marc Chagall », Kunst-Museum Ahlen, Allemagne, 2003. « Les artistes russes hors frontière », musée du Montparnasse, Paris, 2010.

Dans l’atelier, 1910. Documentation privée.

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Extraits choisis « Je connaissais Altmann, avant la guerre. Un camarade m’avait conduit chez lui, dans le quartier de Vaugirard, près de la Ruche, cette pépinière de barbouilleurs, de sculpteurs, de musiciens. Le peintre était alors au mieux de sa forme. J’entends qu’il ne ratait jamais l’occasion d’accueillir ses visiteurs comme s’ils n’eussent réellement plus su où manger et dormir. […] « Imaginez un personnage fluet et volubile, aux cheveux crépus, aux yeux pétillants d’intelligence et de moquerie, élégant mais à sa manière, fantasque avec esprit de suite et toujours prêt à vous donner la lune ou sa chemise, son portefeuille, sa maison, ses souliers. […] Il s’habillait d’ailleurs à la façon d’un phénomène. Et – je l’écris sans malveillance – c’en était un. Tour à tour garçon de salle, apprenti tailleur, brosseur, livreur, commis d’épicerie, vagabond, violoneux de grand’route, gardien d’enfant, ouvrier peintre, le courageux petit bonhomme avait tout entrepris afin d’être un beau jour


célèbre. » Francis Carco, Bohème d’artistes, éd. Albin Michel, Paris, 1940, p. 84-85. « Cette Marine avec voilier et maisons résume une harmonieuse gamme de coloris que nous retrouvons dans toute l’œuvre de Altmann et notamment sur ses célèbres paysages des environs de Paris. » Catalogue de l’exposition « Montparnasse atelier du monde, ces artistes venus d’ailleurs, hommage à Kisling », forum des arts, palais de la Bourse, Marseille, juin 1992-janvier 1993, p. 178. Bibliographie André Warnod, Les Berceaux de la jeune peinture, éd. Albin Michel, Paris, 1925, p. 159, 245. Francis Carco, Bohème d’artistes, éd. Albin Michel, Paris, 1940, p. 82-88. Gérald Schurr, Les Petits Maîtres de la peinture 1820-1920. Valeur de demain, t. II, éd. de l’Amateur, Paris, 1982, p. 138.

Alexandre Altmann, Catalogue de l’exposition L’Inondation de Paris, « Montparnasse atelier du monde, ces 1910. artistes venus d’ailleurs, hommage à 130 × 110, hst. Kisling », forum des arts, palais de la Collection privée. Bourse, Marseille, juin 1992janvier 1993. Sylvie Buisson, catalogue de l’exposition « La Ruche, le centenaire d’une cité d’artistes », musée du Montparnasse, éd. Atlantica, Paris, 2002. Catalogue de l’exposition « Paris-Marseille… de la Cannebière à Montparnasse », éd. musée du Montparnasse, Paris, 2003. Catalogue de l’exposition « Sur les traces de Marc Chagall », éd. Kunst-Museum, Ahlen, Allemagne 2003. Andreï et Vladimir Hofmann, Georgy Khatsenkov, catalogue de l’exposition, « Les Artistes russes hors frontière », éd. musée du Montparnasse, Paris, 2010.

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1999 K

1908 – NEW YOR

KAUNAS (LITUANIE)

Arbit BLATA S

Les parents d’Arbit Blatas, négociants en pianos, ne s’opposent pas à la carrière artistique du jeune Arbit, qui étudie le dessin à Pottava dans le palais du gouverneur de Lituanie, transformé en lieu éducatif pour enfants. En 1924, il part pour Berlin suivre des cours de dessin à l’École des beaux-arts. L’année 1925 marque son arrivée à Paris. Il s’installe à Montparnasse, rue de la Gaîté, et fait la connaissance de Sylvia Satenstein, qui deviendra sa femme en 1933. À la suite d’une exposition à la galerie Mouradian-Vallotton en 1934, le marchand Pierre Matisse lui propose d’exposer à New York. En 1935, grâce à Krémègne, l’artiste découvre Céret, Collioure et Banyuls. Pendant la Seconde Guerre, Blatas émigre aux États-Unis. Il prendra plus tard la nationalité américaine. La guerre terminée, Blatas partage sa vie entre l’Europe et les États-Unis. En 1967, suivant les conseils d’André Malraux, le musée de l’Orangerie acquiert une sculpture en bronze représentant le peintre Soutine (actuellement dans un jardin du xIVe arrondissement). Remarié à Regina Resnik, chanteuse lyrique et metteur en scène, Blatas dessine entre 1975 et 1984 décors et costumes d’opéra. En 1990, l’artiste fait don de quarante et un portraits des artistes de l’École de Paris au musée des Années trente de Boulogne-Billancourt, conservés dans une salle qui lui est dédiée. Actif jusqu’au dernier jour, l’éternel voyageur polyglotte (il parlait russe, polonais, français, anglais, italien, allemand, yiddish et hébreu) avait souhaité au printemps 1998 retourner dans sa ville natale de Kaunas, à l’occasion de la grande rétrospective qui lui était consacrée. Arbit Blatas s’éteint le 27 avril 1999 à son domicile de Manhattan.

Expositions collectives Salon des Tuileries, Paris, 1929-1939. Salon d’automne, Paris, 1937. Galerie Zborowski, Paris, 1938. 6e Salon du portrait contemporain, galerie de Paris, Paris, 1938. Salon populiste, Paris, 1939.

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Documentation musée des Années trente, BoulogneBillancourt.

Portland Art Museum, Oregon, U.S.A., 1944. Associated American Artists, Los Angeles, 1949. Fine Arts Associated, New York, 1957. City Center, New York, 1958. Montclair Art Museum, Montclair, U.S.A., 1963. « Blatas et l’École de Paris », église San Samuele, Venise, 1982.


« Blatas et l’École de Paris », musée Bourdelle, Paris, 1986. « Kikoïne et ses amis de l’École de Paris », couvent des Cordeliers, Paris 1993. « Modigliani, Soutine et leurs amis de Montparnasse », Musée Juif Hongrois, Budapest, 2003. « Hello, Paris ! The Path of Litvak Artists », M. Zilinskas Art Gallery, Kauna, 2014.

Expositions personnelles Galerie Van Leer, Paris, 1933. Galerie Mouradian-Vallotton, Paris, 1933, 1939, 1952. Pierre Matisse Gallery, New York, 1934. Galerie de l’Élysée, Paris, 1936, 1937, 1945, 1946, 1951. Redfern Gallery, Londres, 1939. French Art Gallery, New York, 1945, 1948. Bignou Gallery, New York, 1946. Galerie André Weil, Paris, 1948. Wildenstein Gallery, New York, 1948.

Arbit Blatas, Dorothée, la fille de l’artiste. 82 × 66, hst. Collection privée.

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Marc CHAG ALL

(FRANCE) 1985

87 – SAINT-PAUL-

DE-VENCE

(Moyshe Sh agal, dit) VITEBSK (BIÉLORUS SIE) 18

Marc Chagall est l’aîné d’une famille de neuf enfants. Issu d’un milieu modeste, il grandit dans un shtetl de Biélorussie. Son enfance est imprégnée de culture et de tradition religieuses. Dès 1906, il étudie la peinture dans sa ville natale à l’atelier de Yéhouda Pen, peintre juif qui lui inculque les premiers éléments de son art. En 1907, il part pour Saint-Pétersbourg où il s’inscrit à l’École impériale d’encouragement des arts, qu’il quitte en 1908. Chagall rencontre Vinaver, le très influent mécène et député à la Douma. Vers la fin de l’année, il se rend à Saint-Pétersbourg, à Zvantseva, école de tradition libérale et avant-gardiste dirigée par Léon Bakst. En 1909, il fait la connaissance de Bella Rosenfeld, cadette d’une famille de bijoutiers et étudiante à Moscou. Entre eux naît aussitôt un amour profond et exclusif. À Saint-Pétersbourg, quelques amateurs d’art commencent à s’intéresser à son œuvre. Grâce au soutien du mécène Vinaver, Chagall arrive à Paris en 1911 et s’installe à la Ruche, où vivent déjà Jean-Paul Laurens, Alexander Archipenko, Fernand Léger et Modigliani. Il rencontre aussi Max Jacob, André Salmon, Guillaume Apollinaire et se lie d’une grande amitié avec Blaise Cendrars. Il fréquente les académies de la Palette et de la Grande Chaumière et expose pour la première fois en 1912 au Salon des indépendants. En 1912, grâce à l’invitation du sculpteur Moïse Kogan, de Robert Delaunay et d’Henri Le Fauconnier, il rencontre Herwarth Walden, directeur de la galerie Der Sturm, qui lui organisera sa première exposition personnelle en 1914 à Berlin. En 1913, Chagall participe au Salon des indépendants d’Amsterdam. En 1914, il fait un voyage à Vitebsk pour rendre visite à sa famille et à sa fiancée, mais la guerre l’empêche de retourner en France. En 1915, il épouse Bella qu’il n’a jamais cessé d’aimer; leur fille Ida naîtra un an plus tard. En novembre 1916, il présente quarante-cinq œuvres au Valet de carreau, association de peintres constituée à Moscou à l’automne 1910. Après la révolution d’Octobre, en 1917, Chagall est nommé commissaire des Beaux-Arts de Vitebsk par Lounatcharsky, rencontré à Paris et ministre de la Culture et des Arts de Russie. Chagall rêve alors de transformer sa ville natale en centre artistique. Il dirige ensuite la nouvelle académie d’art de Vitebsk, inaugurée le 28 janvier 1919, qui accueille comme professeurs El Lissitzki, Vladimir Tatlin, Jean Pougny, Anton Pevsner, son frère Naum Gabo et le créateur du suprématisme, Kasimir Malevitch. À la suite de désaccords politiques avec Malevitch, Chagall est démis de ses fonctions. En 1920, Chagall quitte définitivement Vitebsk et part s’installer à Moscou où il rencontre Alexeï Granovsky, directeur du théâtre juif Kamerny pour lequel il réalise des décors de théâtre. Chagall se souvient dans Ma vie: « Ah, pensais-je, voilà l’occasion de renverser le vieux théâtre juif, son naturalisme psychologique, ses barbes collées. Là, sur les murs, au moins, je pourrai me mettre à mon aise et projeter librement tout ce qui me semble indispensable pour la renaissance du théâtre national.» En 1921, il est à Moscou avec sa famille et enseigne le dessin dans les colonies d’orphelins de guerre. Au cours de l’été 1922, il quitte la Russie et commence à écrire son récit autobiographique Ma vie, qui paraîtra en France en 1931. En 1923, il regagne Paris via Berlin où il s’initie aux techniques de la gravure et tente en

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vain de récupérer les tableaux confiés à Walden. J.P. Crespelle raconte dans Montparnasse vivant: « Ses affaires réglées à Berlin, il n’avait plus qu’une hâte: retrouver Paris et Montparnasse. Dans chacune de ses lettres Cendrars lui écrivait: “Tu es célèbre, Vollard t’attend.”» À Paris avec Bella et Ida, Chagall retrouve son atelier à la Ruche, mais les toiles qu’il avait laissées avant de partir ont disparu. Il y en avait plus de cent cinquante. Elles furent vendues pendant son absence. Il visite la Bretagne en compagnie de Sonia et Robert Delaunay, la Côte d’Azur, l’Auvergne. En 1926, le marchand d’art Ambroise Vollard lui demande d’illustrer Les Âmes mortes de Gogol, les Fables de La Fontaine puis la Bible, ce qui lui donne l’occasion de se rendre en Palestine en 1931. En 1933 a lieu à Bâle une grande rétrospective de son œuvre. Chagall séjourne en Hollande en 1932, en Espagne en 1934, en Pologne en 1935 et en Italie en 1937. En 1937, il devient citoyen français et, cette même année, quatre de ses œuvres figurent à Munich dans l’exposition « Art dégénéré». La Seconde Guerre mondiale survient. Chagall et sa famille se réfugient à Blois avant de rejoindre André Lhote à Gordes en Provence. Au cours d’une visite à Marseille, il est pris dans une rafle, puis relâché sur l’ordre du consul des États-Unis. Conscient du danger, il quitte la France pour New York via l’Espagne le 7 mai 1941, grâce à l’intervention de Varian Fry, citoyen américain, qui avait pour mission de sauver les intellectuels et les artistes menacés par les nazis. Seul, sans moyens ni soutien, Varian Fry va pendant treize mois aider quatre mille personnes et en sauver près de deux mille parmi lesquelles Max Ernst, André Breton, André Masson et Marc Chagall. Dans la postface du livre La Liste noire, on lit: «Pour illustrer l’application de ces lois, Fry raconte le sort de son plus célèbre “client” juif, l’artiste Marc Chagall qui fut arrêté à la fin du printemps 1941. Fry a appris que Chagall a été arrêté non parce qu’il est connu des autorités comme un grand peintre dont l’art est considéré comme “dégénéré” mais parce qu’il est juif.»

Marc Chagall, Le Juif errant, 1924. 72 × 57, hst. Collection privée.

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Marc CHAG ALL

À New York, en 1941, il expose à la galerie Pierre Matisse. Il retrouve les Ballets russes et réalise pour Massine décors et costumes pour un ballet. Puis il effectue un voyage au Mexique Le 2 septembre 1944, Bella meurt. Les deux années qui suivent sont difficiles. Chagall, solitaire, s’installe dans une petite ferme à quelques heures de New York. Il se remet péniblement au travail et crée en 1945 les décors et costumes pour L’Oiseau de feu à l’Opéra de New York, commandés par Balanchine. En 1946, il regagne Paris pour quelques mois, le temps d’assister à la première rétrospective de son œuvre au musée d’Art moderne, et repart aussitôt à New York. En 1948, il revient définitivement en France, son atelier est dévasté. En 1952, il épouse Valentine Brodzky et s’installe dans le Midi. Il répond à de nombreuses commandes d’État, notamment la décoration murale du Parlement de Jérusalem, le plafond de l’Opéra de Paris (1963) et les peintures murales de l’Opéra de New York, mais aussi les vitraux de la cathédrale de Metz, de la cathédrale de Reims et ceux de la synagogue de Hadassa à Jérusalem. En 1970 une rétrospective de son œuvre a lieu au Grand Palais à Paris. En 1973, l’inauguration du musée national Message biblique Marc Chagall à Nice consacre définitivement sa gloire. Chagall meurt à l’âge de quatre-vingt-dix-sept ans à Saint-Paul-deVence.

Principales expositions collectives Salon des indépendants, Paris, 1912. Salon d’automne, Paris, 1912. « Paintings and Sculpture by Jewish Artists », galerie Lemercier, Moscou, 1917. Salon des Tuileries, Paris, 1924. « Les maîtres de l’art indépendant », Petit Palais, Paris, 1937. « XXth International Exhibition of Watercolors », Art Institute, Chicago, 1941. « Artists in Exile », Pierre Matisse Gallery, New York, 1942. « European Artists in Exile », Whitney Museum of American Art, New York, 1945. « French Paintings since 1900, French Private Collections in France », The Royal Academy of Arts, Londres, 1963. « Le legs Vollard », musée des Beaux-Arts Léon-Dierx, Saint-Denis, La Réunion, 1970. « Impresario – Ambroise Vollard », Museum of Modern Art, New York, 1977 (exposition itinérante). « The Circle of Montparnasse. Jewish artists in Paris, 1905-1945 », Jewish Museum, New York, 1985. « La Grande Aventure de Montparnasse », Kanagawa, Japon, 1988 (exposition itinérante). « Artistes en exil – États-Unis », galerie d’art du conseil général des Bouches-du-Rhône, Aix-en-Provence, 1999.

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« L’École de Paris 1904-1929. La part de l’Autre », musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 2000. Taft Museum of Art, Cincinnati, 2001. Museum of Modern Art, New York, 2002. « Modigliani, Soutine et leurs amis de Montparnasse », Musée Juif Hongrois, Budapest, 2003. « L’École de Paris », musée du Montparnasse, Paris, 2004. Kunstmuseum, Bâle, 2004, 2011. Ben Uri Gallery, Londres, 2005, 2010, 2012. National Museum of Art of Ukraine, Kiev, 2007. The Jewish Museum, New York, 2009. « Futur antérieur, l’avant-garde et le livre yiddish (1914-1939) », musée d’art et d’histoire du Judaïsme, Paris, 2009. Musée national du Message biblique Marc-Chagall, Nice, 2009, 2011, 2012, 2013. « L’École de Paris 1905-1932 », musée des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou, 2011. Philadelphia Museum of Art, Philadelphie, 2011. « Artistes de l’École de Paris d’origine biélorusse », musée national des Beaux-Arts de la république de Biélorussie, Minsk, 2012. « The Desire for Paris », musée de Mané-Katz, Haïfa, 2012. « Chaïm Soutine and his Contemporaries from Russia to Paris », Jewish Museum, Manchester, 2013


Principales expositions personnelles Galerie Der Sturm, Berlin, 1914. Galerie Le Portique, Paris, 1918, 1928, 1931. Galerie Barbazanges-Hodebert, Paris, 1924. Galerie Katia Granoff, Paris, 1926. Galerie Bernheim-Jeune, Paris, 1930, 1961. Galerie Le Centaure, Bruxelles, 1930. Galerie Flechtheim, Berlin, 1930. Kunsthalle, Bâle, 1933. Pierre Matisse Gallery, New York, 1941, 1977, 1979, 1981, 1982. Galerie Vendôme, Paris, 1944. Museum of Modern Art, New York, 1946, 1978. Musée national d’Art moderne, Paris, 1947, 1995. The Tate Gallery, Londres, 1948. Galerie Rosengart, Lucerne, Suisse, 1949. Galerie Maeght, Paris, 1950. Kunsthaus, Zurich, 1950, 1967. Kunsthalle, Berne, 1951. Bezalel National Museum of Art, Jerusalem et Tel Aviv Museum of Art, 1951, 1987. « Œuvre gravé », Bibliothèque nationale, Paris, 1957. Palais des Beaux-Arts, Bruxelles, 1957. Kunstverein, Hambourg, 1959. Haus der Kunst, Munich, 1959. Musée des Arts décoratifs, Paris, 1959. Galerie Klipstein & Kornfeld, Berne, 1960. O’Hana Gallery, Londres, 1961. Art Center, La Jolla, Californie, 1962. Musée Rath, Genève, 1962. Le Centaure, musée d’Ixelles, Bruxelles, 1963. Kyoto Municipal Museum of Art, 1963. Galerie Gérald Cramer, Genève, 1964. Galerie Berggruen, Paris, 1967. Musée des Augustins, Toulouse, 1967. Beilin Gallery, New York, 1967. Kunsthalle, Cologne, Allemagne, 1967. Donation Marc et Valentina Chagall, musée du Louvre, Paris, 1967. Musée du Grand Palais, Paris, 1969. The Solomon R. Guggenheim Museum, New York, 1975, 1992. Staaliche Kunstammlungen, Dresde, Allemagne, 1976. Musée d’Art moderne de Céret, 1978, 1995. Fuji Television Gallery, Tokyo, 1979. Galerie Maeght, Zurich, 1981. Moderna museet, Stockholm, 1982. Galerie Daniel Lelong, Paris, 1983. Galerie Beyeler, Bâle, 1984.

Musée national d’Art moderne, centre Documentation Georges-Pompidou, Paris, 1984. Jeanine Warnod. Fondation Maeght, Saint-Paul-deVence, 1984. Royal Academy of Arts, Londres, 1985, 1998. Philadelphia Museum of Art, 1985. Musée des Beaux-Arts de Montréal, 1989. Galerie Enrico Navarra, Paris, 1989, 1993. Museo Nacional de Artes Visuales, Montevideo, 1989. Museo Nacional de Bellas Artes, Buenos Aires, 1989. Hokkaïdo Museum of Modern Art, 1989 (exposition itinérante). Fondation Pierre Gianadda, Martigny, 1991. Musée du pays de Sarrebourg, 1991, 1992. Palazzo dei Diamanti, Ferrare, Italie, 1992. The Israel Museum, Jérusalem, 1993. Galerie Piltzer, Paris, 1993. Musée des Beaux-Arts de Berne, 1995. Musée juif de Belgique, Bruxelles, 1995. Jewish Museum, New York, 1996. Musée national Message biblique Marc Chagall, Nice, 1997. Musée d’Art moderne et contemporain, Liège, 1998. Musée national du Message biblique Marc-Chagall, Nice, 2000, 2003, 2005, 2007, 2008.

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Marc CHAG ALL

The Jewish Museum, New York, 2001, 2013. Musée et Archives juifs de Hongrie, Budapest, 2001. Tokyo Metropolitan Art Museum, Tokyo, 2002. The Israel Museum, Jérusalem, 2002. Musée juif, Amsterdam, 2002. Musée d’art et d’histoire du Judaïsme, Paris, 2002, 2005, 2011. San Francisco Museum of Modern Art, San Francisco, 2003. South African Jewish Museum, Le Cap, 2003. Galeries nationales du Grand Palais, Paris, 2003, 2013. Musée du Luxembourg, Paris, 2003, 2013. Musée juif, Gênes, 2004. Musée juif, Francfort, 2004. Musée national de la Culture et de l’Histoire de Biélorussie, Minsk, 2005. Albertina Museum, Vienne, 2005. The State Russian Museum, Saint-Pétersbourg, 2005. BA-CA Kunstforum, Vienne, 2006-2007. Complesso del Vittoriano, Rome, 2007. Fondation Pierre-Gianadda, Martigny, 2007. Pera Museum, Istanbul, 2009. Museu Nacional de Belas Artes, Rio de Janeiro, 2009. Seoul Museum of Art, Séoul, 2010. Art Institute, Chicago, 2010. Museo dell’Ara Pacis, Rome, 2010. Art Gallery of Ontario, Toronto, 2011. Musée d’art et d’histoire du Judaïsme, « Chagall et la Bible », 2011. The National Art Museum of the Republic of Belarus, Minsk, 2012. Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid, 2012. Tretyakov Gallery, Moscou, 2012. Kunsthaus, Zurich, 2013. Tate, Liverpool, 2013. Hungarian National Gallery, Budapest, 2013. National Gallery of Canada, Ottawa, 2013. Dallas Museum of Art, Dallas, 2013. La Piscine-musée d’Art et d’Industrie André-Diligent, Roubaix, 2013. Extraits choisis « Que de Juifs dans l’histoire de la peinture moderne ! Pissarro, Modigliani, Soutine, et combien de plus jeunes ! Aucun ne l’est aussi complètement, aussi publiquement que

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Marc Chagall. Nous pouvons le compter parmi les “hommes représentatifs” de ce temps, étant bien entendu que le peintre serait fâché si nous le considérions simplement comme un “peintre juif”. Chagall est un grand Juif… et un grand peintre. » Paul Fierens, Marc Chagall, éd. G. Grès, Paris, 1929, p. 10. « La vie à Montparnasse, c’était merveilleux ! Je travaillais toute la nuit. Quand dans un atelier voisin un modèle insulté se mettait à pleurer, quand les Italiens chantaient en s’accompagnant à la mandoline, quand Soutine revenait des Halles avec un lot de poulets faisandés pour les peindre, je restais seul dans ma cellule de planches debout devant mon chevalet, éclairé par une misérable lampe à kérosène. Depuis une semaine, l’atelier n’avait pas été balayé. Des châssis, des coquilles d’œufs, des pots vides de bouillon à deux sous étaient éparpillés sur le plancher. La lampe brûlait et moi avec. Je peignais furieusement. C’est là, entre ces quatre murs que j’ai lavé mes yeux, que je suis devenu un peintre. » Marc Chagall, Ma vie, Stock, Paris, 1931. Bibliographie Gustave Coquiot, Vagabondages, éd. Ollendorf, Paris, 1921. Florent Fels, Propos d’artistes, éd. La Renaissance du livre, Paris, 1925. André Salmon, Chagall, éd. des Chroniques du jour, Paris, 1928. Waldemar George, Marc Chagall, Gallimard, Paris, 1928. Paul Fierens, Marc Chagall, éd. G. Grès, Paris, 1929. Marc Chagall, Ma vie, Stock, Paris, 1931. René Schwob, Chagall et l’âme juive, éd. Corréa, Paris, 1931. Ambroise Vollard, Souvenirs d’un marchand de tableaux, Albin Michel, Paris, 1937. Raïssa Maritain, Marc Chagall, La Maison française, New York, 1943. Una E. Johnson, Ambroise Vollard éditeur, 1867-1939, Wittnborn and Co, New York, 1944. Léon Degand, Chagall, peintures, 1942-1945, éd. du Chêne, Paris, 1947. Bella Chagall, Lumières allumées, éd. Trois Collines,Genève, 1948. Robert Rey, La Peinture moderne ou l’art sans métier, Presses universitaires de France, Paris, 1948. Charles Estienne, Chagall, éd. Somogy, Paris, 1951. Jacques Lassaigne, Marc Chagall, éd. Skira, Genève, 1952. Lionello Venturi, Chagall, étude biographique et critique, Albert Skira, Genève, 1956. Jacques Lassaigne, Chagall, éd. Maeght, Paris, 1957. Jacques Damase, Chagall, éd. Gérard & Cie, Vervier, 1963. Franz Meyer, Catalogue raisonné, Marc Chagall, Flammarion, Paris, 1964.


Jean Cassou, Chagall, Thames & Hudson, Londres, 1965. Rénata Négri, Marc Chagall, Hachette, Paris, 1967. Raymond Cogniat, Chagall, Flammarion, Paris, 1968. Werner Haftmann, Marc Chagall, gouaches, dessins, aquarelles, éd. du Chêne, Paris, 1975. Werner Haftmann, Marc Chagall, éd. du Cercle d’Art, Paris, 1975. Sidney Alexander, Marc Chagall a Biography, éd. G.P. Putnam’s Sons, New York, 1978. Charles Sorlier, Marc Chagall, éd. Draeger, Paris, 1979. Jean Milo, Vie et survie du Centaure, Éditions nationales d’Art, Bruxelles, 1980. André Malraux, Robert Sorlier, Robert Marteau, Marc Chagall et Ambroise Vollard, éd. Galerie Matignon, Paris, 1981. André Verdet, Marc Chagall, éd. Daniel Lelong, Repères, Paris, 1983. Pierre Provoyeur, Chagall, le messager biblique, éd. Cercle d’Art, Paris, 1983. Michel Makarius, Chagall, période russe et soviétique, éd. du Regard, Paris, 1988. Sylvie Forestier, Les Chagall de Chagall, Albin Michel, Paris, 1988. Aleksandre Kamenskij, Chagall, Période russe et soviétique, 1907-1922, éd. du Regard, Paris, 1988. Jean-Louis Prat, Marc Chagall, éd. Enrico Navarra, Paris, 1989. Andrew Kagan, Chagall, Abbeville Press, New York, 1989. Charles Sorlier, Chagall le patron, librairie Séguier, Paris, 1989. Andrej Andreevic Voznesenskij, préface Sylvie Forestier, Chagall, éd. Larousse, Paris, 1989. Charles Sorlier, Marc Chagall, le Livre des livres : the Illustrated Books, éd. M. Trinckvel, Paris, 1990. Daniel Marchesseau, Marc Chagall, Gallimard, coll. Découvertes Paris, 1995. Didier Schulmann, Joséphine Matamoros, Sylvie Forestier, Marc Chagall, Les Fables de La Fontaine, éd. RMN, Paris, 1995. Oser Warszawski, Marc Chagall, Le Shtetl et le magicien, éd. Lachenal et Ritter, Paris, 1995. Pierre Schneider, Meret Meyer, Chagall à travers le siècle, Flammarion, Paris, 1995. Marc Chagall, derrière le miroir, coll. Carnets de voyage, éd. Maeght, Paris, 1997. Jacob Baal-Teshuva, Marc Chagall 1887-1985, éd. Taschen, Köln, 1998. Michel Bepoix, François Bazzoli, Martine Soria, Sur les quais, Varian Fry et les candidats à l’exil, Marseille, 1940-1941, éd. Actes Sud, Arles, 1999. Varian Fry, La Liste noire, Plon, Paris, 1999, p. 261. Guillaume Apollinaire, « Les Arts : Marc Chagall », Paris-Journal, 2 juin 1914.

Florent Fels, « Marc Chagall», Les Nouvelles littéraires, 14 juin 1924. André Salmon, « Marc Chagall », L’Art vivant, 15 novembre 1925. Waldemar George, « Marc Chagall », Nouvelle Revue française, Paris, 1928. James Johnson Seweeney, catalogue de l’exposition Marc Chagall, Museum of Modern Art, New York, 1946. Jean Cassou, catalogue de l’exposition « Marc Chagall, Peintures 1908-1947 », musée national d’Art moderne, Paris, 17 octobre22 décembre 1947. Jacques Guerin, François Mathey, catalogue de l’exposition Marc Chagall, musée des Arts décoratifs, Paris, juin-octobre 1959. Jean Leymarie, catalogue de l’exposition « Marc Chagall et la Bible », musée Rath, Genève, 30 juin-26 août 1962. Bernard Dorival, catalogue de l’exposition « Le message biblique de Marc Chagall », donation Marc et Valentina Chagall, musée du Louvre, Paris, 1967. Dominique Bozo, Kurt Schwitters, Claude Esteban, catalogue de l’exposition « Marc Chagall, œuvres sur papier », musée national d’Art moderne, centre Georges-Pompidou, Paris, 1984. Jean-Louis Prat, Gilbert Lascault, catalogue de l’exposition « Rétrospective de l’œuvre peint », Fondation Maeght, Saint-Paulde-Vence, 7 juillet-15 octobre 1984. Susan Conptom, catalogue de l’exposition Marc Chagall, Royal Academy of Art, Londres, 11 janvier 1985-31 mars 1985. Kenneth E.Silver, Romy Golan, catalogue de l’exposition « The Circle of Montparnasse. Jewish Artists in Paris, 1905-1945 », Jewish Museum, New York, 1985, éd. Universe Books, New York, 1985. Edna Moshenson, catalogue de l’exposition « Centième anniversaire de la naissance de Marc Chagall », Tel Aviv Museum of Art, novembre 1987. Jean Hubert-Martin, catalogue de l’exposition « Œuvres des collections du musée national d’Art moderne, centre Georges-Pompidou », musée des Beaux-Arts de Montréal, 28 octobre 1988-26 février 1989. Christina Burrus, catalogue de l’exposition Marc Chagall, Fondation Pierre Gianadda, Martigny, 1er mars-9 juin 1991. Eugenija Petrova, Elena V. Basner, Alexandre Lissov, Marcelin Pleynet, catalogue de l’exposition « Chagall Vitebsk, SaintPétersbourg, Paris », galerie Plitzer, Paris 5 mars-8 mai 1993. Suzanne Pagé, catalogue de l’exposition « Les Années russes, 1907-1922 », musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 13 avril17 septembre 1995, éd. Paris Musées, 1995. Suite de la bibliographie p. 552

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1944

USCHWITZ

91 – DÉPORTÉ À A

LODZ (POLOGNE) 18

Henri EPSTE IN

Henri Epstein perd son père, libraire, à l’âge de trois ans et grandit auprès de sa mère qui encourage son précoce penchant pour la peinture. Il entreprend une formation à l’école de dessin de Jakub Kacenbogen à Lodz, avant d’intégrer les BeauxArts de Munich, où il étudie jusqu’à l’âge de dix-neuf ans. Après une première visite à Paris en 1912, il repart servir l’armée polonaise. Il s’installe enfin à la Ruche, où il reste de 1913 à 1938, et fréquente les cours de l’académie de la Grande Chaumière. Si Epstein débute sous le signe des fauves, il opte ensuite pour une facture expressionniste. En 1921 il illustre le livre de Gustave Coquiot Vagabondages (éditions Ollendorff) et Les Rois du maquis, de Pierre Bonardi, en 1926 (éd. André Delpeuch). Il a probablement participé à la première revue d’art juif, parue à la Ruche, Makhmadim, puis à La Renaissance, revue dans laquelle il écrivait des articles en yiddish. Epstein achète une ferme près d’Épernon, qui devient son lieu de création et un refuge sous l’Occupation. Le 23 février 1944, trois agents de la Gestapo l’arrêtent à Épernon. Tous les efforts de sa femme (la fille du peintre Georges Dorignac) et de ses amis sont restés vains : interné à Drancy le 24 février 1944, Henri Epstein est déporté le 7 mars 1944. Convoi no 69. Assassiné à Auschwitz.

Expositions collectives Salon des indépendants, Paris, 1920, 1922-1925,1928. Salon d’automne, Paris, 1921. Salon des Tuileries, Paris, 1927-1931. « Russian Émigré Artists in Paris », The Redfern Gallery, Londres, 1953. « Œuvres d’artistes juifs morts en déportation », galerie Zak, Paris, 1955. « Mané-Katz et son temps », musée du Petit Palais, Genève, 1969.

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Amedeo Modigliani, « À Epstein 1918 », 1918. Csp. Archives Fenster.

« La Ruche et Montparnasse 1902-1909 », musée Jacquemart-André, Paris, 1978. « Memorial in Honour of Jewish Artists Victims of Nazism », University of Haifa, Eshkol Tower, 1978. « The Circle of Montparnasse, Jewish Artists in Paris, 1905-1945 », Jewish Museum, New York, 1985. « La Grande Aventure de Montparnasse 1910-1930 », musée municipal de Kawasaki, Japon, 1988. « L’École de Paris-Boulogne », musée des Années trente,


Boulogne-Billancourt, 1988. « Montparnasse atelier du monde, ces artistes venus d’ailleurs, hommage à Kisling », forum des arts, palais de la Bourse, Marseille, 1992. « Eighteen Artists Who Perished in the Holocaust », University of Haifa, 1996. « L’École de Paris 1904-1929. La part de l’Autre », musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 2000. « La Ruche, le centenaire d’une cité d’artistes », musée du Montparnasse, Paris, 2002. «Modigliani, Soutine et leurs amis de Montparnasse», Musée Juif Hongrois, Budapest, 2003. « Peintres polonais en Bretagne, 1890-1939, » Musée départemental breton, Quimper, 2004.

« Artistes d’Europe, Montparnasse déporté », musée du Montparnasse, Paris, 2005. « Montparnasse déporté: The End of l’École de Paris », musée Yad-Vashem, Jérusalem, 2006. « L’École de Paris 1905-1932 », éd. musée des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou, 2011. « Chaïm Soutine and his Contemporaries from Russia to Paris », Ben Uri Gallery, Londres, 2012. « La collection Jonas Netter, Modigliani, Soutine et l’aventure de Montparnasse », pinacothèque de Paris, Paris, 2012. Expositions personnelles Galerie Barbazanges-Hodebert, Paris, 1929. Galerie Le Portique, Paris, 1930. Galerie Berri-Raspail, Paris, 1946. Galerie Chalom, Paris, 1975.

Henri Epstein, Maternité, circa 1915. 54 × 65, hst. Collection privée.

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MAIDANEK 1943 À

STOLP (POMÉRANIE ) 1878 – DÉPORTÉ

Otto FREUN DLICH

Otto Freundlich est le fils d’Emil Freundlich, directeur d’une entreprise de transport. Il reçoit jusqu’en 1901 une formation commerciale dans le domaine du bois chez son frère à Hambourg. En 1904, Otto Freundlich vit à Munich où il se consacre à la théorie musicale. Deux ans plus tard, il étudie l’histoire de l’art à Florence et réalise ses premières peintures. Il découvre la sculpture à Berlin en 1907. Il est l’élève d’Arthur Lewin Funcke. En 1908, il arrive à Paris et sera accueilli par Rudolf Lévy, originaire d’Allemagne comme lui. Il s’installe à Montmartre, au Bateau-Lavoir, pendant un an avant de regagner Montparnasse. Il y fera la connaissance de Picasso, Georges Braque, Juan Gris, André Salmon, Guillaume Apollinaire au « Lapin agile». Précurseur, il réalise ses premières toiles abstraites en 1911. Pendant les dix ans qui suivent son installation à Paris, Otto Freundlich voyage entre Berlin, Paris et Munich, prenant part à de nombreuses expositions dont la « Nouvelle Sécession à Berlin », en 1910 et 1911. Il projette d’ouvrir une école d’art privée. En 1917, il travaille pour la revue pacifiste Die Aktion (L’Action), qui lui consacre un numéro spécial en septembre 1918. Se passionnant pour différents domaines de la création (vitrail, tapisserie, mosaïque…), il participe avec Max Ernst à la première exposition Dada à Cologne en novembre 1919 puis adhère au groupe Cercle et Carré fondé par Michel Seuphor. Il devient par la suite membre actif du groupe Abstraction-Création à Paris. En 1920, Walter Gropius veut faire rentrer Freundlich, en tant que professeur, au Bauhaus, mais l’administration refuse. A cette époque, il rencontre son ami Raoul Hausmann. En octobre 1921, Walter Benjamin l’invite à participer à son projet de revue Angelus Novus. Le 11 mars, il donne une conférence, « Transformation du monde visible». Il est extrêmement actif et lutte pour ses idées. Au Congrès international des artistes progressifs, il s’en prend violemment au commerce de l’art et aux organisations d’artistes, participe à l’organisation de l’Exposition internationnale des artistes révolutionnaires à Berlin, participe avec ses dessins à la loterie pour les affamés de Russie dans la galerie d’art Altmann. En 1930, il rencontre Jeanne Kosnick-Kloss, peintre et sculptrice, dont il partagera la vie. En 1934, il rédige un texte théorique sur la peinture Die Wege der Abstrakten

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Archives Fenster.


(Les Chemins de l’art abstrait) avant de fonder en 1936 l’académie privée Le Mur, dans le dernier atelier qu’il occupe à Paris, rue Denfert-Rochereau. Il élabore des projets de sculptures architectoniques, Sculptures Montagnes, échange des œuvres avec Kurt Schwitters. Lorsque la guerre éclate, Freundlich, sujet allemand, est arrêté par l’armée française et interné à Francillon. En février 1940, il est transféré à

Otto Freundlich, Tête d’homme, Paris, 1911. Archives Fenster.

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Otto FREUN DL I CH

Bassens, en Gironde. Libéré en mai, il se réfugie à Saint-Paul-de-Fenouillet dans les Pyrénées-Orientales. Dénoncé, Otto Freundlich est arrêté le 23 février 1943. Le 4 mars 1943, il est déporté vers la Pologne. Convoi no 50. Le 9 mars 1943, dès son arrivée au camp de Lublin-Maidanek, il est assassiné par les nazis. L’exposition itinérante « Entartete Kunst » (Art dégénéré), organisée par les nazis en 1937 à Berlin puis dans toutes les grandes villes allemandes et à Vienne, présentait et dénonçait l’art moderne. De nombreux artistes juifs en faisaient partie. La sculpture de Freundlich L’Homme nouveau, datant de 1912, figurait sur la couverture du catalogue. Parmi les œuvres détruites après la fin de l’exposition figuraient quatorze œuvres d’Otto Freundlich. Les œuvres d’Otto Freundlich sont conservées au musée Tavet de Pontoise.

Principales expositions collectives Kunstausstellung, Kaufhaus Wertheim, Berlin, 1905. Berliner Secession, Berlin, 1909, 1910, 1918. Galerie Sagot, Paris, 1909. Moderne Kunstkring, Amsterdam, 1911. Galerie Flechtheim, Düsseldorf, 1913. Galerie Tanner, Zurich, 1915. Galerie J. B. Neuman, Berlin, 1919. Salon des indépendants, Paris, 1924, 1926, 1928, 1929, 1930. « Art abstrait, 2e groupe », Éditions Bonaparte, Paris, 1929. Galerie Herter, Zurich, 1929. « Kunsthaus, art abstrait et surréaliste », Zurich, 1929. Salon des surindépendants, Paris, 1930. « Cercle et Carré », Paris, 1930. « Groupe 40 », galerie de la Renaissance, Paris, 1931. IIIe Salon des artistes musicalistes, galerie de la Renaissance, 1932. « Œuvres d’artistes juifs morts en déportation », galerie Zak, Paris, 1955. « Otto Freundlich, Jeanne Kosnick-Kloss », centre culturel allemand-Goethe Institut, Paris, 1968. « Memorial Exhibition to Jewish Artists who Perished in the Holocaust », pavillon Helena Rubinstein, Tel Aviv Museum of Art, 1968. « Vingt-deux œuvres de Otto Freundlich et treize œuvres de Jeanne Kosnick-Kloss », musée de Pontoise, mai 1969. Galerie Messine, Paris, 1982. « Montparnasse atelier du monde, ces artistes venus d’ailleurs, hommage à Kisling », forum des arts, palais de la Bourse, Marseille, 1992. « L’École de Paris 1904-1929. La part de l’Autre », musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 2000.

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« Humanisme et expressionnisme, la représentation de la figure humaine et l’expérience juive », musée Tavet-Delacour, Pontoise, 2008. « Artistes d’Europe, Montparnasse déporté », musée du Montparnasse, Paris, 2005. « Montparnasse déporté: The End of l’École de Paris », musée Yad-Vashem, Jérusalem, 2006. Principales expositions personnelles Graphisches Kabinett Nierendorf, Berlin, 1924. « Atelier d’Otto Freundlich », Paris, 1925. Galerie Dr Becker und Newman, Cologne, 1931. Studio Maywald (avec Jeanne Kosnick-Kloss), Paris, 1937. Galerie Bucher-Myrbor, Paris, 1938. Galerie Colette Allendy, Paris, 1952. Galerie Rive droite, Paris, 1954. Galerie Saint-Germain (avec Jeanne Kosnick-Kloss), Paris, 1958. Rétrospective « Otto Freundlich », Wallraf-Richartz Museum, Cologne, 1960. Galerie Claude Bernard, Paris, 1962. Rétrospective, centre culturel allemand-Goethe Institut, Paris, 1968. Musée de Pontoise, 1969 (présentée depuis en permanence). Israel Museum, Jérusalem, 1978. Musée de Pontoise, 1978, 1993. Galerie Jean Chauvelin, Paris, 1981. Musée départemental d’Art contemporain, Rochechouart, 1988. Galerie Franka Berndt Bastille, Paris, 1990. Extrait choisi « Je me dirigeais vers cette ville de Paris qui, pour nous autres, artistes d’Europe centrale, demeurait avant tout la patrie de Manet et de Monet, de Cézanne, des grands impressionnistes et de Rodin. Tout mon bagage se composait de deux faux cols de


rechange et d’une couverture. Quant aux lettres de recommandations qui devaient me servir de viatique, elles se bornaient à un bonjour verbal que j’apportais de Berlin au jeune peintre allemand Rudolf Lévy, alors élève de Matisse. La seule adresse parisienne qu’on m’eût donnée était le café du Dôme. […] Arrivé à Paris, je me rendis tout de suite au café du Dôme et m’adressais là à André (sic), ce garçon qui fut l’ami intime de tous les grands peintres de cette époque ; je lui demandais de m’indiquer M. Lévy. “Le voilà”, me répondit-il. […] Je devrais d’ailleurs exprimer ici à Rudolf Lévy toute la reconnaissance que je lui dois pour son accueil des plus amicaux. C’est lui qui en effet s’efforça tout de suite de me trouver une chambre d’hôtel. […] Je me trouvais à cette époque dans une telle détresse que j’en étais réduit à faire toutes mes courses d’un bout de la ville à l’autre, en utilisant le moyen de transport le plus économique c’est-à-dire en allant à pied. […] Nous jouissions de tout assez sobrement. Mais nous rentrions néanmoins chez nous dans un état d’ivresse bien spécial. Toute la jeunesse du temps respirait l’air d’une véritable création artistique. » Otto Freundlich, 1931. Extrait du journal d’Otto Freundlich, publié dans Prisme des Arts, 8 janvier 1957. Bibliographie Michel Seuphor, L’Art abstrait, ses origines, ses premiers maîtres, éd. Maeght, Paris, 1949. Hersch Fenster, Nos artistes martyrs, Paris, 1951, p. 190-195. Chil Aronson, Scènes et visages de Montparnasse, Paris, 1963, p. 241-243. Michel Seuphor, Dictionnaire de la peinture abstraite, Hazan, Paris, 1967. René Drouin, La Donation Freundlich au musée de Pontoise, 2e éd. Pontoise, 1974. Serge Klarsfeld, Le Mémorial de la déportation des Juifs de France, éd. Beate et Serge Klarsfeld, Paris, 1978. Alain Bonfand, Christophe Duvivier, Edda Maillet, Jérôme Serri, Guy Tossato, Musée départemental d’Art contemporain, Rochechouart, Haute-Vienne, éd. La Différence, Paris, 1988. Joël Mettay, Le Pas perdu, à la recherche d’Otto Freundlich, éd. L’Aphélie, Céret, 1993. Jean Gacon, « Pour l’anniversaire de mon ami Otto Freundlich », Le Lunain, octobre 1938, no 16. Borvine Frenkel, Adlen et Kolnik, Couverture du catalogue Nos artistes, no 4, février 1960. de l’exposition

Pola Eichenbaum, catalogue de l’exposition, « Memorial Exhibition to Jewish Artists who Perished in the Holocaust », pavillon Helena Rubinstein, Tel Aviv Museum of Art, 1968. Catalogue de l’exposition « La Donation Freundlich au musée de Pontoise », mai 1969. Maillet Edda, catalogue de l’exposition, galerie Franka Berndt Bastille, Paris, 16 mai-23 juin 1990. Jérôme Serri, Christophe Duvivier, catalogue de l’exposition « Otto Freundlich et ses amis », musée de Pontoise, éd. musée de Pontoise, Pontoise, 1993. Catalogue de l’exposition « Montparnasse atelier du monde, ces artistes venus d’ailleurs, hommage à Kisling », forum des arts, palais de la Bourse, Marseille, juin 1992-janvier 1993. Jean-Louis Andral, Sophie Krebs, catalogue de l’exposition, « L’École de Paris 1904-1929. La part de l’Autre », éd. Paris Musées, Paris, 2000. Catalogue de l’exposition « Artistes d’Europe, Montparnasse déporté », éd. musée du Montparnasse, Paris, 2005. Éliane Strosberg, catalogue de l’exposition « Humanisme et expressionnisme, la représentation de la figure humaine et l’expérience juive », musée Tavet-Delacour, éd. Somogy, Pontoise, 2008.

« L’Art dégénéré »

René Massat, catalogue de l’exposition Otto Freundlich, galerie Rive droite, Paris, 22 juin-24 juillet 1954.

(Berlin), Otto Freundlich, L’Homme nouveau. Sculpture. Documentation privée.

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1876 – DRANCY 19

QUIMPER (FRANCE)

Max JACOB

Les parents de Max Jacob sont à la fois tailleurs et antiquaires. Max Jacob fait ses études au lycée de la Tour-d’Auvergne, à Quimper, puis, réformé du service militaire, il part pour Paris en 1897 et réalise ses premières peintures à l’huile. À la même époque, féru d’écriture, il rédige les rubriques artistiques du Moniteur des Arts et de La Gazette des Beaux-Arts sous le pseudonyme de Léon David. En 1901, il rencontre le jeune Picasso et s’installe avec lui boulevard Voltaire. Max Jacob est à la fois poète, romancier, auteur dramatique, critique d’art et peintre. Il réalise quelques huiles mais peint surtout à la gouache des vues de Bretagne, des scènes de cirque. Il effectue plusieurs petits métiers (clerc d’avoué, précepteur, employé de commerce au magasin Paris-France) avant de publier son premier ouvrage, Histoire du Roi Kaboul Ier et du marmiton Gauwain, aux éditions Picard et Kahn. Il fréquente les peintres et poètes du BateauLavoir, s’installe au no 7 de la rue Ravignan, puis au Bateau-Lavoir en 1912. Il se lie d’amitié avec Van Dongen, Francis Carco, Roland Dorgelès. Au printemps de 1913, Max Jacob est à Céret avec Picasso. En 1914, il décide de se convertir au christianisme, se fait baptiser le 18 février 1915 à la chapelle Notre-Dame-de-Sion à Paris et demande à Picasso d’être son parrain. À partir de 1916, il fréquente Montparnasse et publie plusieurs ouvrages dont Le Cornet à dés, Le Phanérogame, Les Alliés sont en Arménie. En 1921, Max Jacob quitte Paris pour se retirer au monastère de Saint-Benoît-sur-Loire. Entre 1924 et 1926, il effectue plusieurs voyages en Italie et en Espagne puis rejoint Paris en 1928. En 1933, il est fait chevalier de la Légion d’honneur. En 1936, il retourne définitivement vivre à Saint-Benoît-sur-Loire, « à l’ombre d’une église». En 1942, l’étoile jaune est placée sur le magasin familial à Quimper. L’année suivante, son frère est déporté à Auschwitz peu de temps avant sa petite sœur. Le 24 février 1944, Max Jacob est arrêté par la police française à Saint-Benoît-sur-Loire où il vit retiré du monde. Transféré le 28 février au camp de Drancy et le 2 mars à l’infirmerie du camp, Max Jacob meurt le 5 mars d’une congestion pulmonaire. Il avait soixante-huit ans. Il a marqué la poésie française.

Expositions collectives Salon des indépendants, Paris, 1907, 1908. « Max Jacob, Serge Férat, gouaches, dessins », galerie Percier, Paris, 1924. « Portraits d’artistes par eux-mêmes », galerie Javal et Bourdeaux, Paris, 1929. « La musique par les peintres », galerie d’Art contemporain, Paris, 1929. Galerie Bonjean, Paris, 1931.

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Max Jacob à Saint-Benoîtsur-Loire, 1943. Documentation privée.

« Memorial Exhibition to Jewish Artists who Perished in the Holocaust », pavillon Helena Rubinstein, Tel Aviv Museum of Art, 1968. « The Circle of Montparnasse. Jewish artists in Paris, 1905-1945 », Jewish Museum, New York, 1985. « Max Jacob et Picasso », musée Picasso, Paris, 1994. « La Ruche, le centenaire d’une cité d’artistes », musée du Montparnasse, Paris, 2002. « Modigliani, Soutine et leurs amis de Montparnasse »,


Max Jacob, La Pavlova. 26 × 35, technique mixte. Collection privée.

Musée Juif Hongrois, Budapest, 2003. « L’École de Paris », musée du Montparnasse, 2004. « Artistes d’Europe, Montparnasse déporté », musée du Montparnasse, Paris, 2005. « Montparnasse déporté: The End of l’École de Paris », musée Yad-Vashem, Jérusalem, 2006. Expositions personnelles Galerie Boulevard de Clichy, Paris, 1914. Galerie Térisse, Paris, 1919. Galerie Bernheim-Jeune, Paris, 1920. Galerie Percier, Paris, 1926,1927,1928. Galerie Georges Petit, Paris, 1926, 1930. Galerie Briant, Paris, 1928. Galerie Bonjean, Paris, 1930. Galerie Christian Dior, Paris, 1936. Galerie Monique de Groote, Paris, 1951. Musée des Beaux-Arts de Quimper, 1961. Musée des Beaux-Arts d’Orléans, 1964, 1989, 1994, 2014. Musée de Montmartre, Paris, 1976. Nicole Rousset Altounian, Paris, 1977. Galleria d’Arte moderna, Rome, 1983. Galerie de la Poste, Paris, 1988. Musée des Beaux-Arts de Quimper, 2004.

Extraits choisis « (…) Je n’ai pas fait de cubisme : 1o parce que n’entendant parler que de cela j’étais bien aise de penser à autre chose ; 2o parce que ce n’était pas mon tempérament ; 3o parce que j’aurais voulu y être premier et que je n’étais pas capable de l’être ; 4o parce que Picasso avait choisi comme élève non moi, mais Braque; 5o parce que au fond je m’y connaissais en littérature et non en peinture ; 6o parce que je fais mes œuvres avec le fond de mon ventre et que le fond de mon ventre est “Opéra-Comique” ; 7o parce que je suis un homme de l’époque impressionniste par formation ayant quarante-six ans d’âge et que le cubisme est une surajouture de ma vie ; 8o parce que le cubisme plaisait à ma pensée et non à ma main et que je suis un homme sensuel ; 9o parce que le cubisme me paraît laid très souvent et que j’aime le… joli, hélas ! 10o parce que je suis un vieux poète virgilien ; 11o je ne sais pas pourquoi ; 12o au fait, j’ai fait beaucoup de dessins cubistes ; 13o tout ça c’est la faute à Picasso… » Extrait d’une lettre de Max Jacob à René Rimbert, in Lina Lachgar, Max Jacob, éd. Henri Veyrier, Paris, 1981, p. 95.

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GOMEL (BIÉLORUSSIE ) 1892 – PARIS 19

Michel KIKO ÏNE

Peu après sa naissance, les parents de Michel Kikoïne s’installent à Rejitsa, petite ville dans les environs de Vitebsk, où son grand-père maternel était rabbin et son père, Peretz Kikoïne, conseiller dans une banque. En 1904, la famille déménage à Minsk, où Kikoïne fait des études de commerce pendant trois ans et rencontre Soutine, alors apprenti chez un tailleur. En 1908, Kikoïne et Soutine entrent à l’académie du peintre Kruger, puis les deux peintres étudient aux Beaux-Arts de Vilnius. Ils y rencontrent Krémègne. Kikoïne arrive à Paris en 1912, s’installe chez son cousin Joseph et s’inscrit aux Beaux-Arts dans l’atelier de Cormon. En 1914, il épouse Rosa Bunimovitz, qu’il a connue au lycée de Minsk et qui donnera naissance à deux enfants : Claire et Jacques. La même année Kikoïne s’installe à la Ruche. Chagall et Krémègne s’y trouvent déjà. Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, il se porte volontaire dans l’armée. Sa première exposition particulière a lieu en 1919 à la galerie Chéron. Kikoïne est remarqué par les amateurs d’art : le Dr Montlaur, critique d’art, publie un article sur sa peinture et M. Descaves, son premier collectionneur, lui achète quinze toiles et quarante dessins. Entre 1922 et 1923, lors d’un séjour à Céret puis à Cagnes-sur-Mer avec Soutine, il s’imprègne de la lumière et peint des paysages expressionnistes. En 1926, il achète une maison à Annay-sur-Serein, dans l’Yonne. En 1927, il quitte la Ruche pour s’installer à Montrouge, puis regagnera Montparnasse en 1933. En 1939, Kikoïne est mobilisé à la Réserve, près de Soissons, et peint des gouaches sur la vie de garnison. En 1941, il se réfugie avec sa famille dans les environs de Toulouse. À la Libération, il rentre à Paris qu’il ne quittera que pour quelques voyages en Israël, notamment en 1950 où il participe à plusieurs expositions. Durant les dix dernières années de sa vie, il séjourne fréquemment au bord de la Méditerranée, à La Garoupe chez sa fille, et produit des marines. Le premier prix du Salon des peintres témoins de leur temps lui est attribué en 1964. Kikoïne meurt dans son atelier parisien le 4 novembre 1968.

Michel Kikoïne, Autoportrait, 1930. 73 × 54, hst. Collection privée. Documentation privée.


Expositions collectives Salon d’automne, Paris, 1919-1921, 1923, 1938. Salon des indépendants, Paris, 1920, 1922. Galerie Zborowski, Paris, 1921. Galerie Bernheim-Jeune, Paris, 1923. « Art moderne français », Moscou, 1928. Salon des échanges, Paris, 1929. Galerie Clausen, Paris, 1934. Galerie Fransk Malerkunst, Copenhague, 1934. « Groupe des artistes de ce temps », musée du Petit Palais, Paris, 1939. Pavillon des expositions des peintres et sculpteurs juifs en Israël, Tel-Aviv, 1958. « Francis Smith et ses amis », musée Galliera, 1963. « Mané-Katz et son temps », musée du Petit Palais, Genève, 1969. « The Circle of Montparnasse. Jewish artists in Paris, 19051945 », Jewish Museum, New York, 1985. « Kikoïne, Yankel, Chana Orloff », musée Bourdelle, Paris, 1988. « L’École de ParisBoulogne », musée des Années trente, BoulogneBillancourt, 1988. « Montparnasse atelier du monde, ces artistes venus d’ailleurs, hommage à Kisling », forum des arts, palais de la Bourse, Marseille, 1992. « Kikoïne et ses amis de l’École de Paris », couvent des Cordeliers, Paris, 1993. « L’École de Paris 1904-1929. La part de l’Autre », musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 2000.

« La Ruche, le centenaire d’une cité d’artistes », musée du Montparnasse, Paris, 2002. « Modigliani, Soutine et leurs amis de Montparnasse », Musée juifhongrois, Budapest, 2003. « Sur les traces de Marc Chagall », Kunst-Museum, Ahlen, Allemagne 2003. « L’École de Paris », musée du Montparnasse, 2004. « Humanisme et expressionnisme, la représentation de la figure humaine et l’expérience juive », musée Tavet-Delacour, Pontoise, 2008. « Les artistes russes hors frontière », musée du Montparnasse, Paris, 2010. « L’École de Paris 1905-1932 », musée des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou, 2011. « Artistes de l’École de Paris d’origine biélorusse », musée national des Beaux-Arts de la république de Biélorussie, Minsk, 2012. « The Desire for Paris », musée de Mané-Katz, Haïfa, 2012.

Michel Kikoïne, Nature morte. circa 1915. 73 × 60, hst. Collection privée.

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M

STASZOW (POLOGNE ) 1900 – PARIS 19

Jésékiel KIR SZENBAU

Kirszenbaum est né en Pologne dans une famille religieuse. Dès l’enfance, il passe tout son temps à crayonner et à peindre. À douze ans, celui que l’on surnomme « l’artiste » devient dessinateur d’enseignes pour magasins. En 1920, Kirszenbaum arrive à Berlin. Il continue à peindre et donne des leçons d’hébreu pour gagner sa vie. Attiré par la renommée de Paul Klee et de Wassily Kandinsky, il se rend à Weimar en 1923. Pendant trois trimestres, il y suit les cours du Bauhaus puis rejoint Berlin, où durant quelques années il sera dessinateur de presse, signant sous le pseudonyme de Duvtivani. Son rêve se réalise enfin en 1933, lorsqu’il arrive à Paris et se consacre à la peinture. Il peint des huiles, des aquarelles inspirées de scènes bibliques et du shtetl. Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, Kirszenbaum échappe aux nazis, mais sa femme sera déportée. « Depuis, je vis dans la douleur, dans l’amertume. Je ne suis pas un saint, je n’ai plus aucune confiance dans les hommes ni dans ma propre vie… » Ses œuvres antérieures à 1940 seront détruites. En 1948, il se rend au Brésil, où il rejoint sa sœur rescapée des camps, et participe à plusieurs expositions. Il désespère de retourner en France, pays qui lui inspire une nostalgie lancinante. « Pour des êtres comme nous, dont l’esprit est fait d’un tissu particulièrement sensible, il n’y a que Paris et la France où même la plus triste solitude participe encore à la symphonie impérissable des esprits… » De retour à Paris en 1949, Kirszenbaum obtient la nationalité française. Il rencontre la baronne Alix de Rothschild qui, douée d’une sensibilité artistique et

Jésékiel Kirszenbaum, Le Pêcheur, Le Violoniste, 1930 (double face). 99 × 74, hst. Collection privée.

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Jésékiel KIR SZENBAUM

reconnaissant son art, se fait un devoir de le secourir. Il exécute trois panneaux monumentaux : les prophètes Elie, Jérémie et Moïse. Il la nommera son « ange bienfaiteur ». Il illustre les livres de I.L. Peretz, écrivain yiddish dont les histoires révèlent l’essence même du mouvement hassidique. Les années 1950 et 1951 sont ponctuées de voyages au Maroc et en Italie. Kirszenbaum meurt en 1954 des suites d’un cancer.

Expositions collectives Salon d’automne, Paris, 1933. « Paris-Marseille… de la Cannebière à Montparnasse », musée du Montparnasse, Paris, 2003. « Artistes d’Europe, Montparnasse déporté », musée du Montparnasse, Paris, 2005. « Montparnasse déporté: The End of l’École de Paris », musée Yad-Vashem, Jérusalem, 2006.

Expositions personnelles Weimar, Allemagne, 1923. Berlin, 1927. Utrecht, 1931. Amsterdam, 1932. Limoges, 1945. Maison de la Pensée française, Lyon, 1946. Galerie des Quatre Chemins, Paris, 1947, 1962. São Paulo, Brésil, 1948. Rio de Janeiro, Brésil 1948. Galerie André Weil, Paris, 1951. Galerie Au Pont des Arts, Paris, 1953. Galerie Karl Flinker, Paris, 1961. Musée d’Art d’Ein Harod, Ein Harod, Israël, 2013. Musée de la Diaspora, Tel Aviv, Israël, 2014. Extraits choisis « Kirszenbaum a contribué dans une très large mesure à l’avènement d’une peinture judaïque dont l’esprit est intimement lié à celui des conteurs et des poètes yiddish. Comme d’autres illustrateurs de l’Ancien Testament, il a subi la puissante attraction de La Légende dorée. Au lieu de s’opposer, la Synagogue et l’Église se confondent dans l’œuvre de ce voyant qui regarde l’univers avec des yeux éblouis. » Waldemar George, catalogue de l’exposition « Kirszenbaum », galerie André Weil, Paris, 1951. « Kirszenbaum est un des derniers artistes – souhaitons-le pour l’honneur de l’espèce humaine – dont la carrière d’artiste se sera

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Documentation privée.

confondue avec la fatalité du juif et obligatoirement mêlée aux pires horreurs de l’histoire. Le résultat aura été la dispersion ou la destruction de toute une partie de son œuvre et le pathétique qui marque la production suivante. […] Il ne pouvait être qu’un expressionniste, et l’expressionnisme est le style nécessaire des artistes qui ont connu la condition et le destin de Kirszenbaum. Cette condition, ce destin les pressent ; cette condition, ce destin sont leur art. […] Cet art qui appelle l’amour ne saurait être autre chose – une chose très grande – qu’un message humain. » Jean Cassou, Frédéric Hagen, catalogue de l’exposition « J.-D. Kirszenbaum », galerie Karl Flinker, Paris, 7-28 février 1961. Bibliographie Chil Aronson, Scènes et visages de Montparnasse, Paris, 1963, p. 425-429. Borvine Frenkel, Adlen et Kolnik, Nos artistes, no 4, février 1960. Waldemar George, catalogue de l’exposition « Kirszenbaum », galerie André Weil, Paris, 1951. Jean Cassou, Frédéric Hagen, catalogue de l’exposition. « J.-D. Kirszenbaum », galerie Karl Flinker, Paris, 7-28 février 1961. Catalogue de l’exposition « Paris-Marseille… de la Cannebière à Montparnasse », éd. musée du Montparnasse, Paris, 2003. Catalogue de l’exposition « Artistes d’Europe, Montparnasse déporté », éd. musée du Montparnasse, Paris, 2005. Nathan Diament, J. D. Kirszenbaum (1900-1954). La génération perdue, éd. Somogy, Paris, 2013.


(FRANCE) 1953

CRACOVIE (POLOGNE ) 1891 – BANDOL

Moïse KISLI NG

Moïse Kisling, fils de tailleur, commence son apprentissage aux BeauxArts de Cracovie, dans la classe de Josef Pankiewicz, défenseur des impressionnistes, qui oriente ses élèves vers Paris plutôt que vers Munich. En 1910, Kisling arrive à Paris et s’installe rue des Beaux-Arts. Sa mère lui envoie un peu d’argent jusqu’au jour où un mécène russe inconnu, grâce à l’intervention de l’écrivain yiddish Shalom Asch, lui assure pendant un an une mensualité de 150 francs. Kisling fréquente les artistes de Montparnasse, se lie avec Picasso, Juan Gris, Max Jacob, Manolo. En 1912, il rencontre à Céret son premier marchand, Adolphe Basler, qui lui achète toute sa production pour 300 francs par mois. À son retour de Céret, en 1913, il s’installe dans un atelier situé au no 3, rue Joseph-Bara. Réputé pour ses réceptions du mercredi, son atelier est le lieu de rendez-vous de Modigliani, Soutine, Derain et Juan Gris. L’immeuble abrite également Pascin, les Krogh, père et fils, et plus tard Zborowski. La concierge, Mme Marie Salomon, régente la maison d’une « main de fer » et terrorise tout le monde sauf Kisling. On le voit aux célèbres soirées de la baronne Hélène d’Œttingen, qui sera le centre littéraire et artistique de Montparnasse jusqu’en 1914. La Première Guerre mondiale surprend Kisling en Belgique, qu’il visite avec Basler. Il revient spécialement pour s’engager dans la Légion étrangère. Il est blessé en 1915, lors de la bataille où Blaise Cendrars perd un bras. Réformé, il regagne Montparnasse et découvre avec surprise qu’un jeune soldat américain mort au combat lui a légué la somme de 25 000 francs. Il visite l’Espagne, rentre à Paris, rencontre Zborowski. En 1919, la galerie Druet organise sa première exposition. Sa peinture a du succès et les vedettes de l’époque sont ses modèles : Falconetti, Valentine Tessier, Arletty, Cocteau, Colette, Marie Laurencin et Kiki de Montparnasse. Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, Kisling part vivre à Sanary dans sa propriété puis s’embarque en 1940 pour New York, où sa peinture est également appréciée. Il rentre en France en août 1946 et retrouve Sanary. Il y vivra jusqu’à sa mort, le 29 avril 1953.

Moïse Kisling, Portrait d’une jeune fille, 1928. 55,5 × 46, hst. Collection privée.

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Moïse KISLI NG

Principales expositions collectives Salon des Tuileries, Paris, à partir de 1912. Salon d’automne, Paris, 1912, 1913, 1920-1925, 1928-1933, 1938. Salon des indépendants, Paris, 1913, 1914, 1921, 1922. 6, rue Huyghens, Paris, 1917. Biennale de Venise, 1921, 1932. Whitney Museum of American Art, New York, 1941. Palais du Luxembourg, Paris, 1956. Palais de la Méditerranée, Nice, 1960. Salon des peintres témoins de leur temps, musée Galliera, Paris, 1963. Galerie de Paris, Paris, 1964. « 50 peintres de Renoir à Kisling », pavillon Helena Rubinstein, Tel Aviv Museum of Art, 1964, 1966. « Modigliani, Utrillo, Kisling », galerie des Arts de Tokyo, 1980. « The Circle of Montparnasse. Jewish artists in Paris, 1905-1945 », Jewish Museum, New York, 1985. « Portraits et paysages chez Zborowski », mairie du VIe arrondissement, Paris, 1989. « Montparnasse atelier du monde, ces artistes venus d’ailleurs, hommage à Kisling », forum des arts, palais de la Bourse, Marseille, 1992. « Kikoïne et ses amis de l’École de Paris », couvent des Cordeliers, Paris, 1993. « Autour de Bourdelle, Paris et les artistes polonais, 1900-1918 », musée Bourdelle, Paris, 1997. « L’École de Paris 1904-1929. La part de l’Autre », musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 2000. « Paris in New York, French Jewish Artists in Private Collections », Jewish Museum, New York, 2000. « La Ruche, le centenaire d’une cité d’artistes », musée du Montparnasse, Paris, 2002. « Modigliani, Soutine et leurs amis de Montparnasse », Musée Juif Hongrois, Budapest, 2003. « Paris-Marseille… de la Cannebière à Montparnasse », musée du Montparnasse, Paris, 2003. « Sur les traces de Marc Chagall », Kunst-Museum, Ahlen, Allemagne 2003. « Peintres polonais en Bretagne, 1890-1939 », Musée départemental breton, Quimper, 2004. « L’École de Paris », musée du Montparnasse, 2004. « Humanisme et expressionnisme, la représentation de la figure humaine et l’expérience juive », musée Tavet-Delacour, Pontoise, 2008.

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« Les artistes russes hors frontière », musée du Montparnasse, Paris, 2010. « L’École de Paris 1905-1932 », musée des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou, 2011. « The Desire for Paris », musée de Mané-Katz, Haïfa, 2012. « La collection Jonas Netter, Modigliani, Soutine et l’aventure de Montparnasse », pinacothèque de Paris, Paris, 2012. Principales expositions personnelles Galerie Druet, Paris, 1919. Galerie Paul Guillaume, Paris, 1924. Tannhauser Galerie, Munich, 1927. Galerie C.A. Girard, Paris, 1931. Galerie Guy Stein, Paris, 1937. Galerie Da Silva, Marseille, 1940. James Vigeveno Galleries, Los Angeles, 1942. Galerie Guénégaud, Paris, 1945. Galerie Puget, Marseille, 1950. Galerie Drouant-David, Paris, 1951, 1953. Château-musée, Cagnes-sur-Mer, 1953. Redfern Galleries, Londres, 1957. Crane Gallery, Manchester, 1957. Musée du Petit Palais, Genève, 1972, 1983. Palais de la Méditerranée, Nice, 1973. Galerie Cernuschi, Paris, 1973. Rétrospective « Kisling », Salon d’automne, galerie nationale du Grand Palais, Paris, 1984. Galerie Daniel Malingue, Paris, 1991. Musée de Lodève, Lodève, 2008. Extraits choisis « Pour un musée français d’art moderne. Quels sont les dix artistes actuellement vivants qui doivent y entrer les premiers. Kisling qui est un des plus illustres habitants de Montparnasse est un aimable fantaisiste – sinon quand il peint du moins quand il écrit – qu’on en juge : […] À mon avis, les dix peintres qui doivent y entrer les premiers : Simon Lévy Léopold Lévy Rudolf Lévy Maxime Lévy Irène Lévy Flore Lévy Isidore Lévy Claude Lévy


Benoit Lévy et Moïse Kisling. » Georges Charensol, « Pour un musée français d’Art moderne », L’Art vivant, no 16, 15 août 1925. « Kisling, garçon courageux, qui n’a pas craint de travailler pour former son expression avec des moyens qui n’étaient pas à la mode, il s’est servi de blaireaux pour réaliser des morceaux qui n’avaient que l’apparence de choses “pompiers”. Il est un des meilleurs portraitistes de son époque. » Henri Matisse, « Un message de Henri Matisse à la Terre retrouvée », La Terre retrouvée, 15 mai 1953. « Je veux vous dire franchement qu’à mon point de vue il n’y a ni art juif, ni art polonais. La Pologne se trouve entre l’Allemagne et la Russie ; elle a été influencée ou par Munich et Vienne ou par Moscou, et si la Pologne, dans son histoire, a montré quelques bons peintres, ils étaient influencés par l’art français. […] Quant à l’ambiance juive, c’est très difficile de se prononcer. Je ne vois aucun rapport entre J. Israël le Hollandais et l’Allemand Libermann. Je ne vois aucun rapport entre Modigliani et Soutine, entre Chagall et Pascin, et je ne vois aucun rapport entre moi et les autres que je viens de citer. […] Je crois que la meilleure solution qu’on ait trouvée jusqu’à présent est de nous fourrer tous sous le même drapeau qui se nomme l’École de Paris. » Moïse Kisling, décembre 1951, lettre parue dans « Œuvre: Moïse Kisling», La Vie juive, mai 1953, p. 23.

Henri Hayden, Portrait de Kisling, 1914. 81 × 65, hst. Collection privée.

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Bibliographie Jacques Guenné, Portraits d’artistes, éd. M. Seheur, Paris, 1927. Florent Fels, Kisling, éd. Le Triangle, coll. Artistes Juifs, Paris, 1928. Georges Gabory, Moïse Kisling, éd. Gallimard, Paris, 1928. André Salmon, Kisling, éd. des Chroniques du jour, Paris, 1928. Waldemar George, Art polonais moderne, éd. Bonaparte, Paris, 1929, p. 14-15. Chil Aronson, Scènes et visages de Montparnasse, Paris, 1963, p. 278-285. Joseph Kessel, Kisling, éd. Jean Kisling, Paris, 1971. Henri Troyat, Kisling, éd. Jean Kisling, Turin, 1982. Billy Klüver & Julie Martin, Kiki et Montparnasse, 1900-1930, éd. Flammarion, Paris, 1989. Henri Troyat, Claude de Voort, Kisling, éd. Jean Kisling, 1996. Jacques Lambert, Kisling Prince de Montparnasse, éd. De ParisMax Chaleil, Paris, 2011. Florent Fels, « Kisling », Action, octobre 1921. Waldemar George, « Kisling », L’Amour de l’Art, janvier 1922. Jacques Guenne, « Portraits d’artistes : Kisling », L’Art vivant, 15 juin 1925. Georges Charensol, « Pour un musée français d’Art moderne. », L’Art vivant, no 16, 15 août 1925. Émile Tériade, « Kisling », L’Art d’aujourd’hui, no 11, 1926. Georges Gabory, Moïse Kisling, coll. Les Peintres nouveaux, no 30, Gallimard, Paris, 1928. Henri Matisse, « Un message de Henri Matisse à la Terre retrouvée », La Terre retrouvée, 15 mai 1953. E. Namenyi, « Œuvre : Moïse Kisling », La Vie juive, mai 1953, p. 23. Adlen, Borvine Frenkel, Kolnik, Maxa Nordau, Nos artistes, no 3, janvier 1959. Oscar Guez, « Moïse Kisling, Le prince de Montparnasse », fiche biographique, musée du Petit Palais, Genève. André Salmon, catalogue de l’exposition « Kisling », galerie Druet, Paris, 1919. André Salmon, catalogue de l’exposition « Kisling », galerie Paul Guillaume, Paris, 28 mars-10 avril 1924. Florent Fels, catalogue de l’exposition « Kisling », Crane Gallery, Manchester, 1957. Georges Peillex, catalogue l’exposition « Kisling et son temps », palais de la Méditerranée, Nice, mars-avril 1973. Kenneth E. Silver, Romy Golan, catalogue de l’exposition « The Circle of Montparnasse, Jewish Artists in Paris, 1905-1945 », Jewish Museum, New York, 1985, éd. Universe Books, New York, 1985, p. 104-105. Marc Restellini, Christian Parisot, catalogue de l’exposition

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« Portraits et paysages chez Zborowski », mairie du VIe arrondissement, Paris, 2-31 mars 1989. Catalogue de l’exposition « Montparnasse atelier du monde, ces artistes venus d’ailleurs, hommage à Kisling », forum des arts, palais de la Bourse, Marseille, juin 1992-janvier 1993. Catalogue de l’exposition « Autour de Bourdelle, Paris et les artistes polonais, 1900-1918 », musée Bourdelle, Paris, 1997, éd. Paris Musées, p. 115-116. Jean-Louis Andral, Sophie Krebs, catalogue de l’exposition, «L’École de Paris 1904-1929. La part de l’Autre », éd. Paris Musées, Paris, 2000. Romy Golan, Susan Chevlowe, catalogue de l’exposition « Paris in New York, French Jewish Artists in Private Collections », éd. Jewish Museum, New York, 2000. Sylvie Buisson, catalogue de l’exposition « La Ruche, le centenaire d’une cité d’artistes », musée du Montparnasse, éd. Atlantica, Paris, 2002. Catalogue de l’exposition « Modigliani, Soutine et leurs amis de Montparnasse », Musée Juif Hongrois, éd. Vince, Budapest, 2003. Catalogue de l’exposition « Paris-Marseille… de la Cannebière à Montparnasse », éd. musée du Montparnasse, Paris, 2003. Catalogue de l’exposition « Sur les traces de Marc Chagall », éd. Kunst-Museum, Ahlen, Allemagne 2003. Catalogue de l’exposition « Peintres polonais en Bretagne, 18901939 », Musée départemental breton, éd. Palantines, Quimper, 2004. Jeanine Warnod, catalogue de l’exposition « L’École de Paris », éd. Arcadia, Paris, 2004. Éliane Strosberg, catalogue de l’exposition « Humanisme et expressionnisme, la représentation de la figure humaine et l’expérience juive », musée Tavet-Delacour, éd. Somogy, Pontoise, 2008. Catalogue de l’exposition « Kisling », musée de Lodève, Lodève, 2008. Andreï et Vladimir Hofmann, Georgy Khatsenkov, catalogue de l’exposition, « Les Artistes russes hors frontière », éd. musée du Montparnasse, Paris, 2010. Catalogue de l’exposition « L’École de Paris 1905-1932 », musée des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou, 2011. Svetlana Reingold, catalogue de l’exposition, « The Desire for Paris », musée de Mané-Katz, Haïfa, 2012. Marc Restellini, catalogue de l’exposition, « La Collection Jonas Netter, Modigliani, Soutine et l’aventure de Montparnasse », éd. pinacothèque de Paris, 2012.


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Louis MARC OUSSIS

41

VIE

1878 OU 1883 –

CUSSET (FRANCE) 19

(Ludwik Ka zimierz Mar kous, dit) VARSO

Louis Marcoussis, fils de Gerszon Markous, industriel cultivé de Varsovie, part en 1901 étudier la peinture à l’Académie des beaux-arts de Cracovie dans l’atelier du peintre impressionniste Jan Stanislawski. Il fréquente le groupe Jeune Pologne, formé d’écrivains et d’artistes férus de culture française. Grâce au pécule accordé par son père, Marcoussis se rend à Paris en 1903. Il travaille trois mois à l’académie Julian, étudie ensuite dans l’atelier de Jules Lefebvre et fait la connaissance de Roger de La Fresnaye et de Robert Lotiron. Son père, en proie à des difficultés financières, ne pouvant plus l’aider, Marcoussis collabore aux revues La Vie parisienne et L’Assiette au beurre afin de gagner sa vie. En 1904, il visite l’Espagne et séjourne à Saint-Sébastien chez son oncle Milner. En 1910, il rencontre Guillaume Apollinaire, qui lui conseille d’adopter le pseudonyme de Marcoussis, emprunté à un village des environs de Montlhéry. Il le présente à Georges Braque et à Pablo Picasso. Marcoussis adhère au cubisme et expose avec le groupe de la Section d’Or. Il intègre le répertoire des formes cubistes: guitares, pipes, bouteilles et verres sur un guéridon, cartes à jouer, paquets de tabac. Il fréquente le café de L’Ami Émile, place Ravignan à Montmartre, et se lie avec Max Jacob, Juan Gris, Albert Gleizes et Francis Picabia. Le 13 juillet 1913, il épouse Alice Halicka. Le jeune ménage s’installe au 61, rue Caulaincourt et y demeurera jusqu’en 1939. Lors de la Première Guerre mondiale, Marcoussis s’engage dans l’armée française et se voit honoré du grade de lieutenant et de la croix de guerre. En 1919, 1921 et 1923, Marcoussis voyage en Pologne, et c’est à cette époque qu’il commence à s’intéresser à la technique du fixé sous verre, qu’il exploitera jusqu’en 1929. Le 3 mars 1922, Alice Halicka donne naissance à leur fille Madeleine. En 1927, Marcoussis séjourne en Bretagne, à Kérity puis à Tréboul, près de Douarnenez, où Max Jacob vient le voir de Quimper. La même année il passe quelque temps à Toulon. Marcoussis se dégage alors du cubisme pour se rapprocher du surréalisme. Il peint la série des Grands Coquillages (1927) ainsi que celle des Natures mortes. Entre 1931 et 1937, il délaisse la peinture pour se consacrer à la gravure qu’il enseigne dès 1933 à l’académie Schläepfer, à Montparnasse. Il réalise une série d’eauxfortes pour Alcools d’Apollinaire en 1934 et revient à la peinture en 1937. La fin de sa vie est marquée par des voyages, aux États-Unis (1934-1935) et en Italie (1938). Le 12 juin 1940, il se réfugie à Cusset, dans l’Allier, avec sa femme et sa fille. Louis Marcoussis commence à ressentir les premiers symptômes du mal qui l’emportera le 22 octobre 1941. Sur sa tombe, Alice Halicka fait graver ces vers d’Apollinaire: Nous ne nous verrons plus sur terre / et souviens-toi que je t’attends…

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Louis Marcoussis, Autoportrait. Archives Fenster.


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Expositions collectives Salon d’automne, Paris, 1905. Salon des indépendants, Paris, 1906-1926. Salon de la section d’or, Paris, 1912. Exposition internationale d’art moderne, galerie Sélection, Bruxelles, 1920. Galerie Der Sturm, Berlin, 1920. Salon des Tuileries, Paris, 1924-1929. « Raoul Dufy, J.-F. Laglenne, Jean Lurçat, Louis Marcoussis », galerie Berthe Weill, Paris, 1925. « Quatorze peintres », galerie Jeanne Bucher, Paris, 1928. « Les premières années du cubisme », Myrbor, Paris, 1928. « Exposition d’œuvres de maîtres de la peinture contemporaine », galerie Danthon, Paris, 1928. « Gravures », palais des Beaux-Arts de Bruxelles, 1936. « Le cubisme, 1911-1918 », galerie de France, Paris, 1945. « The Cubist Circle », galerie de l’Université, Université de Californie, Riverside, 1971. « The Circle of Montparnasse. Jewish Artists in Paris, 1905-1945 », Jewish Museum, New York, 1985. « Max Jacob et les artistes de son temps », musée des Beaux-Arts d’Orléans, 1989. « Montparnasse atelier du monde, ces artistes venus d’ailleurs, hommage à Kisling », forum des arts, palais de la Bourse, Marseille, 1992. « Herbin, Lemordant, Kupka, Gris, Marcoussis», musée des Beaux-Arts de Rennes, 1994. « Autour de Bourdelle, Paris et les artistes polonais, 1900-1918 », musée Bourdelle, Paris, 1997. « L’École de Paris 1904-1929. La part de l’Autre », musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 2000. «Paris in New York, French Jewish Artists in Private Collections», New York, 2000. « Modigliani, Soutine et leurs amis de Montparnasse », Musée Juif Hongrois, Budapest, 2003. « L’École de Paris », musée du Montparnasse, 2004. « Peintres polonais en Bretagne, 1890-1939 », Musée départemental breton, Quimper, 2004. « Humanisme et expressionnisme, la représentation de la figure humaine et l’expérience juive », musée Tavet-Delacour, Pontoise, 2008.

« L’École de Paris 1905-1932 », musée des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou, 2011. Expositions personnelles Galerie Pierre, Paris, 1925. Galerie Jeanne Bucher, Paris, 1929, 1930. Galerie Georges Bernheim, Paris, 1929. Dessins et aquarelles, galerie Percier, Paris, 1930. Knoedler Gallery, New York, 1933, 1935. Galerie d’Art du Faubourg, Paris, 1948. Galerie Roland, Londres, 1951. Galerie Kriegel, Paris, 1962. Musée national d’Art moderne, Paris, 1964. Louis Marcoussis, Musée des Beaux-Arts, Le Havre, 1966. Toulon, 1926, 1928. Galerie Motte, Paris, 1969. 80 × 65, hst. Bibliothèque nationale, Paris, 1972. Collection privée. Galleria Peccolo, Livourne, 1993.

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Sculpteurs juifs de l’École de Paris 1905-1939

Chana Orloff sculptant Le Prophète, vers 1915.

« Je plane avec ce plus lourd que l’air qui est la sculpture. » Léonard de Vinci

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(Joseph Con stantinovs /358

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1892 – PARIS 19

JAFFA (PALESTINE)

Constantino

vitch, dit)

Joseph CON STANT ky ou

Joseph Constant naît en Palestine en  1892  et  grandit  à  Odessa,  en Ukraine. Dans sa jeunesse, il travaille avec son père, qui est ferronnier, et participe avec lui aux événements révolutionnaires de 1905. En 1912, il s’inscrit aux Beaux-Arts d’Odessa, où il étudie d’abord la peinture. Il est nommé inspecteur des beaux-arts lors de la révolution russe de 1917. En 1919, son père et son frère sont tués lors d’un pogrom. Constant et sa femme fuient alors la Russie et embarquent  à  bord  du  Ruslan,  qui  les conduit, avec de nombreux autres artistes, en Palestine. À Tel-Aviv, il se lie avec le peintre Alexandre Frenel. Il voyage  en Égypte, en Turquie et en Roumanie, puis arrive à Paris en 1923, où il suit des études d’art. Au début de sa carrière, Constant peint : il est réputé pour ses tableaux animaliers. Il utilise le crayon, le fusain et l’encre, et produit également des huiles et des aquarelles sur toile. Dans les années 1930, il se consacre principalement à la sculpture animalière. Il travaille la terre, la pierre, le bronze, mais privilégie le bois. Il visite quotidiennement le Jardin des Plantes, où il puise son inspiration. Il appartient à un groupe d’artistes israéliens appelés les animalistes. À Paris, il développe une seconde carrière en tant qu’écrivain et signe plusieurs ouvrages en français sous le pseudonyme de Michel Matveev. Son livre le plus connu, Les Traqués, publié en 1933, est une histoire tragique décrivant le voyage de Juifs en quête d’un refuge à travers l’Europe. En 1936, il obtient le prix des Deux Magots pour Étrange Famille. Il raconte aussi la vie des artistes juifs russes à Montparnasse dans La Cité des peintres, paru en 1947. Joseph Constant et son ami Alexandre Frenel sont reconnus comme les artistes de l’École de Paris qui ont introduit le réalisme et l’impressionnisme français en Israël. Ils sont les premiers à rejeter l’hégémonie de l’École d’art Bezalel de Jérusalem. Les deux artistes sont aussi réputés pour leur vie de bohème, qui se démarque des idéaux et de la réalité de la société pionnière qui les entourent. Dans les années 1950, Constant voyage régulièrement en Israël, passant son temps entre son atelier de Montparnasse et celui de Tel-Aviv puis de Ramat Gan ; ce dernier lieu est devenu une galerie de sculptures.

Documentation Étude Ader Nordmann.


Bibliographie Chil Aronson, Scènes et visages de Montparnasse, Paris, 1963, p. 462-467. E. Bénézit, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs…, Gründ, Paris, 1999. Thierry Roche, Dictionnaire biographique des sculpteurs des années 1920-1930, Beau Fixe, Lyon, 2007.

Joseph Constant, Les Hérons. H : 120 cm, bois. Collection privée.

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Jacques LIPC HITZ (Ch

IENIKI

(LITUANIE) 1891 –

CAPRI (ITALIE) 1973

aim Jacob L ipchitz, dit) DRUSK

Jacques Lipchitz naît dans une famille francoaméricaine. Son père est entrepreneur en bâtiment. Influencé par ce dernier, il commence des études d’ingénieur. Cependant, encouragé par sa mère, il part développer son talent artistique en France. En 1909, il arrive à Paris et se fait appeler Jacques.  Il emménage à la Ruche. Il étudie aux Beaux-Arts et à l’académie Julian, et prend des cours de dessin à l’académie Colarossi. Il visite les musées, se lie d’amitié avec  Archipenko, Picasso, Gris et d’autres cubistes. En 1912, ses œuvres sont exposées au Salon national des beaux-arts puis au Salon d’automne. En 1913, il réalise ses premières sculptures cubistes. Son ami Modigliani peint un portrait de lui et de sa femme, Berthe Kitrosser, exposé aujourd’hui à l’Art Institute de Chicago. En 1920, une première exposition personnelle a lieu à la galerie Léonce Rosenberg et Maurice Raynal publie la première monographie sur Lipchitz. Soutenu par ses amis, le sculpteur rompt son contrat qui le lie à Rosenberg et rachète ses œuvres. Il réalise un portrait de Gertrude Stein. Entre 1915 et 1925, Lipchitz travaille sur des sculptures cubistes en pierre. Le célèbre docteur Barnes – le collectionneur qui a découvert Soutine – lui achète de nombreuses œuvres. C’est en 1924 qu’il obtient la nationalité française. En 1925, il s’installe à Boulogne-sur-Seine dans une maison qu’il a fait construire par Le Corbusier sur un terrain acheté en commun avec le sculpteur Oscar Miestchaninoff. En 1927, dans l’ouvrage de Roger Vitrac sur Jacques Lipchitz paru aux éditions Gallimard, on peut lire ces réflexions du sculpteur sur l’art : « En guise de pensée sur l’art, je ferai plutôt une confidence. Une chose a obscurci à mes débuts ma joie d’œuvrer : une opinion. Et c’est celle fameuse, de Léonard de Vinci, sur les sculpteurs et la sculpture. Vous la connaissez, n’est-ce pas ? Elle m’a montré avec évidence l’esclavage dans lequel nous tient la matière, l’impossibilité pour nos mains de suivre les palpitations de notre cœur et la course folle de notre imagination. J’étais triste jusqu’au jour où la Providence m’a inspiré ces choses “aériennes, transparentes, qui puissent se voir et nous émouvoir de tous les côtés à la fois”. Je plane

Documentation Aronson.

Jacques Lipchitz Documentation Aronson.

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Jacques LIPC HITZ

avec ce plus lourd que l’air qui est la sculpture. Puisse l’ombre de Léonard modifier son jugement. » En 1928-1929, apprenant la mort de son père et de sa sœur,  Lipchitz  produit  Le Couple, qu’il renommera plus tard Le Cri. En 1930, Jeanne Bucher organise la première rétrospective de son œuvre, à la galerie de la Renaissance, à Paris. Cinq ans plus tard, une exposition importante a lieu à la Brummer Gallery, à New York. En 1937, lors de l’Exposition internationale à Paris, il reçoit la médaille d’or pour sa sculpture de Prométhée. Lorsque les nazis occupent Paris en 1940, Lipchitz s’enfuit aux États-Unis grâce à l’aide de Varian Fry : ce dernier sauvera de nombreux artistes lors de la Deuxième Guerre mondiale, mais seul Lipchitz entretiendra tout au long de sa vie une correspondance avec lui. À New York, la Buchholz Gallery, qui deviendra la Curt Valentin Gallery, expose ses œuvres. L’artiste s’installe à Hastings-on-Hudson, dans l’État de New York, tandis que Berthe Kitrosser décide de rester à Paris. Ils divorcent. À partir des années 1950, de nombreuses expositions sont organisées en l’honneur de Lipchitz. En 1954, une rétrospective a lieu au musée d’Art moderne de New York. Il reçoit aussi des commandes en Israël et aux États-Unis – tel Paix sur la Terre, une sculpture de près de 15 mètres de hauteur dévoilée à Los Angeles en 1969. En 1963, il retourne en Europe et travaille chaque année quelques mois en Italie. Il est enterré à Jérusalem. Sa seconde femme, Yulla Halberstadt, sculptrice, achève la sculpture colossale Notre arbre de vie, dont il a reçu la commande, et l’installe sur la plus haute colline de Jérusalem.

Expositions collectives, personnelles et bibliographie p. 554 /370

Portrait de Jacques Lipchitz par Amedeo Modigliani. Documentation Aronson.


1968

TEL-AVIV (ISRAËL)

(UKRAINE) 1888 –

CONSTANTINOVSKA

Chana ORLO FF

Chana Orloff naît en Ukraine. Elle a huit frères et sœurs. Son père était instituteur, devenu commerçant à cause des lois antijuives. C’est en 1905, afin d’échapper aux pogroms, que sa famille émigre à Petah Tikva, première colonie juive de Palestine. À leur arrivée, le père travaille comme ouvrier agricole et Chana fait des travaux de couture. Elle arrive à Paris en 1910 et travaille chez la couturière Jeanne Paquin, qui l’encourage à développer son talent artistique. Chana Orloff suit alors des cours à l’École nationale des arts décoratifs, puis étudie la sculpture à l’Académie russe de Montparnasse. Elle se lie avec de nombreux artistes tels que Picasso, Foujita, Rivera, Soutine, Pascin, Zadkine. En 1912, elle présente Jeanne Hébuterne à Modigliani. Ce dernier lui fera son portrait. En haut du papier en forme de losange, sur une enveloppe dépliée, il écrit en hébreu : « Chana, fille de Raphaël ». En 1913, ses œuvres sont présentées au Salon d’automne puis au Salon des Tuileries et au Salon des indépendants. En 1916, elle expose pour la première fois aux côtés de Matisse, Van Dongen et Rouault à la galerie BernheimJeune que dirige le critique d’art Fénéon. En 1917, elle épouse le poète Ary Justman. Il meurt deux ans plus tard, mobilisé à la fin de la guerre. Chana Orloff reste seule avec son fils âgé de un an. Elle travaille alors beaucoup  et développe des thèmes que l’on retrouvera tout au long de sa carrière, comme la maternité, les animaux. Grâce à ses amis Edmond et Madeleine Fleg, elle côtoie l’élite parisienne, brosse et sculpte le portrait de nombreuses personnalités. C’est en 1923 qu’elle réalise celui d’Ida Chagall. En 1925, elle obtient la nationalité française et est décorée de la Légion d’honneur. La même année, elle se fait construire une maison-atelier, dessinée par Auguste Perret, Villa Seurat, à Paris dans le 14e arrondissement. Ce lieu est resté intact et peut toujours se visiter. En 1927, Édouard Des Courières signe la première monographie sur Chana Orloff, qui paraît chez Gallimard. Dans cet ouvrage, l’artiste répond ainsi aux questions de l’auteur: « Je suis tout d’abord attirée par le côté décoratif, plastique, si vous préférez, et le caractère… Je voudrais que mes œuvres soient aussi vivantes que la vie… Je commence par faire plusieurs dessins, très poussés, du modèle. Puis je passe à la sculpture, et alors j’envoie promener le modèle, dont je n’ai plus

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Documentation Aronson.

Chana Orloff Documentation Aronson.


besoin… […] Les sculpteurs contemporains que j’aime? Maillol et ses beaux volumes, Pompon aussi. Je ne crois pas qu’on puisse aller plus loin que Pompon dans la voie qu’il s’est tracée… Les peintres? Picasso, si exceptionnel, Braque qui a tant de vraie grandeur, Segonzac, si puissant, Moreau et son beau dessin, Pascin, si subtil… Le plus grand artiste actuel, c’est peut-être Charlot, ce magicien qui nous fait tout oublier. N’est-il pas merveilleux que nous vivions à l’époque de cet homme? » Elle voyage fréquemment en Israël et aux  États-Unis. En 1930, le maire de Tel-Aviv, Meir Dizengoff, rend visite à Chana Orloff dans son atelier parisien, où ils discutent de la création du musée de Tel-Aviv. En 1935, sa première exposition y remporte un très grand succès. En 1937, elle participe à l’exposition Les Maîtres de l’art indépendant au Petit Palais. Rentrée à Paris avec son fils après l’exode de 1940, Chana Orloff continue à travailler malgré une vie difficile. En décembre 1942, elle est prévenue de son arrestation imminente et part se réfugier en Suisse avec son fils et le peintre Georges Kars, qui se suicidera après la guerre. À Genève, elle travaille grâce à ses amis, qui lui prêtent atelier et matériaux et lui commandent des portraits. Entre 1942 et 1945, elle réalise plus d’une cinquantaine de sculptures.  En 1945, une exposition sur son œuvre a lieu à la galerie Moos à Genève. Après la Libération, elle retourne à Paris et découvre que sa maison et son atelier  ont été pillés et que ses sculptures ont été détruites. Dès 1949, elle se rend très fréquemment en Israël. Cette même année, elle réalise le buste de David Ben Gourion. De nombreuses expositions et rétrospectives ont lieu en Europe, aux États-Unis et en Israël, et Chana Orloff connaît alors la consécration. Dans les années 1950-1960, elle reçoit plusieurs commandes de monuments liés à l’histoire d’Israël. Elle meurt en 1968 à Tel-Aviv, alors qu’elle s’y rendait pour une exposition au musée de la ville, organisée en son honneur.

Portrait de Chana Orloff par Amedeo Modigliani. Documentation Aronson.

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1890 – PARIS 19

SIE)

VITEBSK (BIÉLORUS

Ossip ZADK INE

Ossip Zadkine naît à Vitebsk dans une famille juive d’origine écossaise et passe son enfance à Smolensk. Son père est enseignant de grec et de latin. Il grandit dans un pays de forêts, ce qui explique son attirance pour le bois, qui sera le matériau essentiel de son œuvre. Zadkine se passionne très jeune pour l’art, bien que son entourage ne l’y encourage pas. Il rêve de devenir musicien, mais son père s’y oppose violemment et brise son violon. En 1898, il copie le portrait d’un Cosaque tandis que son père joue à côté avec ses amis. Tous s’arrêtent pour regarder le jeune Ossip en train de dessiner. À partir de ce jour, il ne lâchera plus son crayon et dessinera de nombreux portraits de famille. En 1902, Zadkine tombe accidentellement dans un ruisseau et découvre qu’il a glissé sur une terre glaise d’une grande blancheur. À partir de ce moment, il travaille la terre glaise sans relâche, au désespoir de son père. En 1905, celui-ci décide de l’envoyer en Angleterre afin qu’il apprenne l’anglais chez des cousins qui ne parlent pas le russe. Il suit alors des cours d’art à Sunderland. En 1906, il quitte ses cousins et part à Londres pour gagner sa vie grâce à des petits emplois chez des ébénistes. Il s’inscrit dans une école d’art, visite le British Museum et étudie la sculpture classique. Il retourne à Smolensk en 1908 et produit sa première sculpture. L’année suivante, il retourne en Russie. Son père accepte enfin l’orientation artistique de son fils et lui conseille d’étudier à Paris. En 1909, Zadkine arrive à Paris. Il étudie aux Beaux-Arts et s’installe à la Ruche, où on le surnomme Joe Zadkine. En 1910, il entreprend un dernier voyage à Smolensk, durant lequel il rencontre Chagall à Vitebsk. En 1911, ses statues et dessins sont exposés au Salon d’automne et au Salon des indépendants. Il intègre le mouvement cubiste et fréquente les étudiants russes du Quartier latin. En 1912, il habite rue de Vaugirard, à Montparnasse, et étudie la sculpture romaine. Il se lie avec les poètes d’avant-garde Paul Éluard, Man Ray et Erik Satie. Ils feront partie de la commission qui provoquera la scission du mouvement dada. En 1914, grâce au soutien du collectionneur Paul Rodocanachi, il ouvre un atelier rue Rousselet. En 1919, il publie des poèmes dans la revue de Pierre Albert-Birot. Il se passionne pour le cubisme, mais s’en détachera plus tard. Pendant la Première Guerre mondiale, Zadkine est brancardier et produit des dessins et des aquarelles représentant cette dure réalité, affirmant que la guerre l’a détruit « corporellement et spirituellement ». Il ne cessera de la représenter. En 1920, l’artiste organise une exposition dans son atelier que seuls ses amis de la Rotonde visiteront. La même année, il épouse la peintre Valentine Prax. Le couple choisit Foujita et sa femme, Fernande Barrey, comme témoins. En 1921, la première monographie sur son œuvre est publiée. La même année, il est naturalisé français et l’une de ses œuvres est achetée par le musée de Grenoble. C’est son premier achat par un musée français. Zadkine peint beaucoup d’aquarelles et de gouaches. Il sculpte également des statues en bois ou en pierres déconstruites.

Documentation Aronson.


En 1923, il déménage au 100, rue d’Assas, où il vit jusqu’à sa mort ; l’adresse deviendra par la suite le musée Zadkine. En 1924, il expose à Tokyo et l’année suivante à Bruxelles. Il vend peu et refuse de s’attacher à un marchand, gagnant sa vie en donnant des cours de sculpture à Paris. Dans les années 1930, Zadkine voyage en Italie et aux États-Unis. L’été, il sculpte dans sa maison des Arques, dans le Lot. Son œuvre est exposée à Paris, au Petit Palais et au musée d’Art moderne. En 1933, le palais des Beaux-Arts de Bruxelles organise sa première exposition personnelle. Il se rend à New York pour la première fois en 1937, où il assiste à l’ouverture d’une exposition en son honneur à la Brummer Gallery. En 1938, il participe à la Biennale de Venise. En 1941, fuyant l’Europe nazie, il part aux États-Unis. Il travaille à New York et expose à la galerie Pierre Matisse en 1942 avec d’autres artistes en exil. De retour à Paris en 1945, il enseigne la sculpture à l’académie de la Grande Chaumière et rapatrie ses œuvres réalisées aux États-Unis. Durant ses dernières années, il produit de très nombreuses œuvres. En 1964, Ionel Jianou publie son catalogue raisonné. Ossip Zadkine meurt à Paris en 1967. Il est enterré au cimetière du Montparnasse.

Ossip Zadkine, Torse de femme, 1935. H : 43 cm. Sculpture en bois. Documentation Artcurial.

Expositions collectives Salon d’automne, Paris, 1911, 1919, 1923, 1990. Salon des indépendants, Paris, 1911, 1914. Salon des Tuileries, 1926. Freie Sezession, Berlin, 1914. De Onafhankelijken, Amsterdam, 1914. Allied Artists Association, Londres, 1914. « L’École de Paris 1904-1929. La part de l’Autre », musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 2000. « La Ruche, le centenaire d’une cité d’artistes », musée du Montparnasse, Paris, 2002. « Modigliani, Soutine et leurs amis de Montparnasse », Musée Juif Hongrois, Budapest, 2003. « Sur les traces de Marc Chagall », Kunst-Museum, Ahlen, Allemagne, 2003. « L’École de Paris », musée du Montparnasse, Paris, 2004. « Humanisme et expressionnisme, la représentation de la figure humaine et l’expérience juive », musée Tavet-Delacour, Pontoise, 2008. « L’École de Paris 1905-1932 », musée des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou, 2011. « Artistes de l’École de Paris d’origine biélorusse », musée national des Beaux-Arts de la république de Biélorussie, Minsk, 2012. « Hello, Paris ! The Path of Litvak Artists », M. Zilinskas Art Gallery, Kaunas, 2014. Expositions personnelles, bibliographie p. 560

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GLOSSAIRE

ARTES : Groupe d’artistes polonais, créé à Lwow en 1929 par les peintres Janisch, Wysocki et Krzywoblocki, bientôt rejoints par d’autres artistes. Entre 1930 et 1932, il organise onze expositions où s’affirme, sans programme théorique particulier, la volonté de continuer le travail de l’avant-garde. Le rationalisme constructiviste y est critiqué, tandis que se manifeste un intérêt pour le surréalisme qui transparaît dans les œuvres à partir de 1932. Va s’y ajouter l’influence d’une culture « urbaine » (enseignes, vitrines, mannequins), puis de la culture ouvrière. À partir de 1933, la radicalisation politique des membres les plus influents aboutit à une dénonciation de l’« idéalisme » du surréalisme, et à une évolution vers un art réaliste et « engagé », qui va trouver dans le réalisme socialiste déjà à l’œuvre en URSS une sorte de modèle. Une telle évolution, qui n’est pas adoptée par tous ses membres, aboutit à la dissolution du groupe en 1936. BEZALEL : École d’art à Jérusalem fondée en 1906 par Boris Shatz, né à Vorno (Russie) en 1867 et mort à Denver (U.S.A.) en 1932. Première école des Beaux-Arts constituée par des artistes juifs venant en majorité d’Europe de l’Est. Aujourd’hui les Beaux-Arts de l’État d’Israël. BLOK : Groupe de constructivistes polonais, actif à Varsovie. Il publie sa propre revue théorique, Blok, qui propose, à côté des reproductions d’œuvres, des photographies de machines, « outils transformant le psychisme de l’homme contemporain ». En 1924, le manifeste Qu’est-ce que le constructivisme ? ouvre la voie à deux tendances : alors que Strzemínski insiste sur l’importance de l’autonomie de la forme artistique, Szczuka est partisan d’une fusion de la forme dans l’architecture fonctionnelle. Aussi la troisième et dernière exposition organisée par le groupe, en 1926, n’offre-t-elle plus, sous le titre d’Exposition internationale d’Art moderne, la diversité stylistique des premières : les œuvres picturales y sont remplacées par des projets architecturaux.

BUND : Le Bund est le parti des Juifs socialistes. Il a été constitué en 1897, sous l’appellation Union universelle

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des travailleurs juifs. Il défend la doctrine politique de la lutte de classe et prend une part très active dans le mouvement révolutionnaire russe des années 1905 et 1906. Il est en opposition avec tous les autres partis juifs, qu’il accuse d’être soit « clérico-conservateurs », soit bourgeois. Le Bund ne s’occupe pas des intérêts du peuple juif en tant que tel, et est opposé à toutes les variétés de sionisme. Dans ses réunions et dans ses publications, c’est le yiddish qui est utilisé. DIBBOUK : âme diabolique. ENTARTETE KUNST : Expression ordinairement traduite par « art dégénéré ». Exposition organisée à Munich, en 1937, par Goebbels, ministre de la Propagande et de l’Éducation du peuple. Rassemblant plus de six cents chefs-d’œuvre, systématiquement réquisitionnés au cours d’une action d’« épuration des Temples de l’Art » dans toutes les collections publiques d’Allemagne, elle se tient d’abord à Munich puis circule jusqu’en 1941 dans neuf villes d’Allemagne et d’Autriche. À Munich, elle est gratuite, interdite aux mineurs, et jouit d’une fréquentation record de deux millions de visiteurs. C’est le peintre Adolf Ziegler qui eut l’« honneur » de dépouiller les musées de leurs œuvres d’avant-garde postérieures à 1910 : il s’agit de « libérer » l’art moderne de son « aspect malsain », de son « infériorité raciale », afin de purifier l’art germanique de toute tendance bolchevique ou anarchiste et de le restaurer dans sa pureté, sa dignité et son rôle d’exemple moral vis-à-vis du peuple. L’exposition, qui rassemble la plus grande collection d’expressionnisme jamais montrée (Marc, Turm der blauen Pferde, 1913-1914, disparu ; Kirchner, Strassenszene, 1913-1914, MOMA, New York), s’attaque aussi bien au dadaïsme (Grosz, Schwitters), à la Neue Sachlichkeit (Dix), au Bauhaus (Schlemmer, Kandinsky) ou au constructivisme (Mondrian, Lissitzky). Les œuvres d’artistes juifs y sont dénigrées en vrac. Les tableaux qui tapissent littéralement les murs sont accompagnés du nom de leur auteur, de leur titre, du prix payé lors de leur acquisition, et du nom de leur musée d’origine. Les toiles, auxquelles sont associés des dessins et des sculptures de malades mentaux provenant de la collection Prinzhorn, sont regroupées non par style, mais par thèmes polémiques. FORMISTE : Groupe de peintres cubistes de Cracovie en vogue jusqu’en 1922. HALLOUTZ : pionnier-bâtisseur.



Jewish Artists of the School of Paris 1905-1939

“We were a band of children at the heder, already detached from Talmudic studies for an entire generation but fed on the leaven of analysis. Having only just taken up pencil and brush, we immediately started dissecting not only the world around us but ourselves. Who were we? What was our place in the concert of nations? What was our culture? And what should our art be? All this was settled in a few towns in Lithuania, Belarus, and Ukraine, and continued in Paris.” El Lissitzky, Rimmon/Milgroïm, No.3, Berlin, 1923

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PREFACE by C laude Lanzma nn

“Jean Adler, deported on March 27, 1942 on convoy number 1, murdered in Auschwitz. […] Bernard Altschuler, deported on March 27, 1944 on convoy number 70, murdered in Auschwitz. His work has disappeared. […] Georges Ascher, convoy number 60, murdered in Auschwitz. Georges Ascher’s work was destroyed in his studio when he was arrested.” Entrance after entrance, name after name, the same heartbreak and pain grows over the pages of the deeply beautiful and moving anthology Jewish Artists of the School of Paris 1905-1939, which we owe to Nadine Nieszawer’s patience, devotion, intelligence, and knowledge. This work is first and foremost a memorial that cannot be merely glanced through. Something—like a law—dictates that this work, in its dryness and humility, must be read in full. Leaving out a name would amount to a betrayal. The waste’s breadth and vastness is striking, and can be felt almost physically while reading the book. 178 artists, famous or obscure, young or old, novices and masters, are gathered here. Seventyone of them (that is over 40 per cent) died suffocating in gas chambers in Poland. Many of them had left that same Poland between 1905 and 1939 as part of an uninterrupted immigration movement, as they left Lithuania, Ukraine, Belarus, Hungary, Bulgaria, Czechoslovakia, Germany, that is the Central and Eastern Europe of their persecutors, and chose mindfully to settle in Paris, home of a creative incandescence that attracted all of them. In her introduction, Nadine Nieszawer states very well what these young Jews, coming from shtetls and Eastern European cities, expected from Paris, what Paris brought them, namely that Paris enabled them to contribute and embed their new Jewish painting in the developing modernity in art. Through their courage, their work, their talent, their thirst for knowledge, their rigor, and their freedom, they finally pushed back the boundaries. It is known that at every step, the destruction of human beings was accompanied by a parallel destruction of properties and possessions. In other words, it was followed by an implacable succession of robberies, which continued even after death, with the pulling out of gold teeth. When it comes to art, the first persons who were robbed were not the collectors but the artists themselves, whose works were destroyed, stolen, and dispersed from the moment they were arrested, and which probably disappeared forever. The biographies are impossible, incomplete, tragically short, sometimes just three lines; a photograph of the artist or of one of his paintings of sculptures is

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sometimes all that is left of the life of a creator, of a work in the course of its accomplishment. These traces researched, unearthed and wanted by Nadine Nieszawer, are today as precious to us as sweat and blood. Many of the names and artists that appear in this anthology would never have reached us, and would have therefore remained unknown forever without this art book, this book on art, which is inseparable from an action of nomination and Jewish transmission.


FOREWORD by

Nadine Niesza

wer

This story began very early. My father, Jacques Nieszawer, was an art dealer. He mainly bought artworks by the painters of the School of Paris, whom he called the Yid’n. This painting, which was intimately linked to his life history, was familiar to him. Whenever he returned home with one of these paintings, he used to put it down in front of him, sit on a chair and look at it for a long time. Then, he looked for the painter’s life history in two books on Jewish artists written in Yiddish. First in Aronson’s book Scenes and Faces at Montparnasse, and then in Fenster’s work Our Martyred Artists. My father died in an accident on July 28, 1987. Naturally, I continued to take an interest in this painting. However, I do not read Yiddish. Aronson and Fenster could not tell me anything about these painters’ lives. Paul Fogel, who is passionate about Yiddish, translated these texts in 1988. Later, Marie Boyé-Taillan, a young art historian, assisted me with the first edition of the book, published by Denoël in 2000, under the direction of Olivier Rubinstein. In 2014, a new extended edition was published by Somogy, thanks to the support of Nicolas Neumann. The artistic director of the first publication, Paul Raymond Cohen, joined us and helped us with his great savoir-faire. I thank them all. With this edition, the transmission goes on… My sons Arthur and Boris Princ know the story of their grandfather very well. They participated in the new edition of Jewish Artists of the School of Paris 1905-1939. Arthur Princ is an expert in modern art, specializing in sculpture. Boris Princ is an art dealer. His wife and partner Deborah translated and coordinated with talent the new trilingual dictionary of our artists.

garde ferment of the time. They recreated a shtetl and met in the neighborhood cafés. They formed what is known as the School of Paris. Many of them were in close contact with Jewish writers and poets who published their work in Yiddish journals and magazines. The books dedicated to the School of Paris rarely mention the artists’ Judaism. These artists are often associated with their country of origin, from which they had fled, where access to the fine arts was limited or even prohibited due to the numerus clausus. These men and women, driven by the same hope of life, were suddenly stopped by the Final Solution. Many perished in the gas chambers, their work was destroyed, and those who survived never found again the common dream that united the artists. These 178 artists obviously do not include all of the Jewish artists of that time. Indeed, over 500 of them lived in Paris between World War I and World War II. The selection of artists in this work mainly stems from the two books in Yiddish mentioned above by Fenster and Aronson. The choice of the artists in this work is subjective. These artists formed a friendship network and it is probable that they all knew each other. All of the artists’ histories have been treated in the same way, regardless of their fame. The biographies trace each artist’s family origins, their artistic training, their arrival in Paris and their situation during World War II. The biography of most of the artists who were deported is often incomplete as no trace of them remains. The selected extracts report comments made by the artists themselves, art critics, close friends, or relatives. The bibliography gathers chronologically the main works, press articles, and exhibition catalogues devoted to each artist.

Who were these artists? These artists had in common the belief in the old German proverb “Living like God in France,” which the Yiddish oral tradition popularized in “Happy as a Jew in Paris”: Azoy gliklich wi a yid in Paris. Paris was then the center of the world. Artists came from Eastern Europe between 1905 and 1939, fleeing from the anti-Semitism present in their countries, looking for a place that would welcome them and enable them to freely express their artistic desire. These artists settled in Montparnasse, mixing in the avant-

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INTRODUCTION

School of Paris 1

905-1939

by Nadine Nie szawer Expert on the

Paris, Capital of the Art World Paris was a magnet for artists from all over the world. Morgan Russel, Man Ray, and Alexander Calder arrived in Paris from America in 1906, 1921, and 1926, respectively. James Morrice arrived from Canada in 1908. Tsuguharu Foujita, Sei Koyanagui, and Toshio Bando arrived from Japan in 1913, 1920, and 1921, respectively. Demetrios Galanis and Georges Gounaro arrived from Greece in 1900 and 1919, respectively. Gino Severini, Giorgio De Chirico, Massimo Campigli, Mario Tozzi, and Filippo De Pisis arrived from Italy in 1906, 1911, 1919, 1920, and 1925, respectively. Angel Zarraga and Diego Rivera arrived from Mexico in 1904 and 1912, respectively; Manuel Ortiz de Zarate arrived from Chile in 1906. Helena Cid arrived from Argentina in 1925. The Krogh family arrived from Norway in 1889. Isaac Grünewald arrived from Sweden in 1908. Yu Sanyu arrived from China in 1921. Harry Bloomfield arrived from England in 1912. Kees Van Dongen and Piet Mondrian arrived from Holland in 1897 and 1912, respectively. Gilani Abdul Wahab arrived from Tunisia in 1911. Pablo Picasso, Juan Gris, Francesco Borés, and Antoni Clavé arrived from Spain in 1900, 1906, 1925, and 1927, respectively. Mikhail Larionov, Alexander Archipenko, Jean Pougny, Anton Pevsner, Kazimir Malevich, Vladimir Tatlin, and Natalia Goncharova arrived from Russia in 1906, 1908, 1910, 1911, 1912, 1913, and 1914, respectively. Georges Papazoff arrived from Bulgaria in 1924. Franz Marc, Max Pechstein, and the Russian artists Alexej Jawlensky and Wassily Kandinsky arrived from Germany in 1903, 1907, 1905, and 1906, respectively. This group of artists is not restrictive. It shows the vast scale of this movement of artists who came from all over the world. The 1905 Salon d’Automne (Autumn Salon) exhibited the work of Henri Matisse, André Derain, and Maurice de Vlaminck. A new style of painting emerged, which was called Fauvism. In 1906, at the Bateau-Lavoir in Montmartre, Picasso invented the post-Paul Cezanne artistic movement: Cubism was born. Before World War I, the artistic avant-gardes were very present and active in Europe, and Paris was their meeting place. Borders no longer mattered, Paris was the laboratory of international art; it was the theater of the most thrilling and radical experiments in pictorial matter.

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What is the School of Paris? The term School of Paris (Ecole de Paris) was coined by art critic André Warnod in 1925 in the journal Comœdia, where he defined the group of foreign painters in Paris. The School of Paris does not designate a movement or a school strictly speaking, rather an historical fact. In his mind, this term was intended to combat the underlying xenophobia rather than to establish a theoretical approach. Indeed, at that time, art critics did not hide their nationalism. Artistic journals expressed their disregard and fear in view of the increasingly important position of foreign artists, and notably the Jewish artists, on the French artistic scene. In 1925, Louis Vauxcelles wrote in the Carnet de la Semaine: “A barbarian horde has rushed upon Montparnasse, descending on [the art galleries of] rue La Boétie from the cafés of the 14th arrondissement, uttering raucous Germano-Slavic screams of war… Their culture is so recent! When they speak about Poussin, do they know the master? Have they ever really looked at a Corot? Or read a poem by La Fontaine? These are people from ‘somewhere else’ who ignore and in the bottom of their hearts look down on what Renoir has called the gentleness of the French School—that is, our race’s virtue of tact.” That same Louis Vauxelles, prolix critic of the Jewish painters, wrote monographs for the publishing house Le Triangle in the Jewish Artists collection, in agreement with the artists. In 1931, in the monograph on Marek Szwarc, he wrote: “[…] like a cloud of locusts, an invasion of Jewish colorists has rushed upon Montparnasse. The causes of this exodus: the Russian Revolution and the miseries, pogroms, atrocities, and persecutions it led to; the unfortunate young artists have taken refuge [in France], attracted by the radiance of contemporary French art. […] They will make up one of the constituent elements of what the young critics will call the School of Paris. Many talented persons should be considered among this crowd of dagos.” The Beginnings of the School of Paris: 1905-1914 The artists we are talking about came from Eastern Europe (Russia, Poland, Germany, Bulgaria, Czechoslovakia, Romania, or Hungary). They familiarized themselves with the 19th-century French masters and knew about the Impressionists through their professors, like Josef Pankiewicz in Krakow, Ilya Repin in Saint Petersburg, Adolf Fényes in Budapest, and Lovis Corinth in Berlin. Most of them were in their twenties and participated in the Jewish emancipation process, a social and intellectual awakening movement in Europe characterized by the loss of faith in religion and increasing political engagement. For the first time, Jewish artists were in tune with the cosmopolitan movement between the major capitals of that time, such as Vienna, Berlin and, especially, Paris. World War I scattered the artists and led Rudolf Lévy, Walter Bondy, and Otto Freundlich to return to Germany. Léopold


Gottlieb left for Poland where he joined Marshal Pisuldski’s army. Marc Chagall, Mané-Katz, and Savely Schleifer went back to Russia. Many artists volunteered to serve in the French army: Kisling was declared unfit for service after he was wounded in 1915; Apollinaire’s friend Marcoussis was decorated; as for Mondzain, he wore military uniform until July 1918. Some of them who were declared unfit for service because of their health conditions, such as Modigliani and Soutine, volunteered for army chores. Jules Pascin left for London in order to avoid serving in the Bulgarian army. During the war, the artists who stayed in Paris without any income or aid stood by each other. From 1915, at her studio located at 21 avenue du Maine, Marie Vassilieff ran a canteen for artists that was always full during the war. Those who ate there spoke many different languages. World War I marked the entrance of the Montparnasse Jewish artists into the Parisian scene. In December 1915, Germaine Bongard, the sister of the couturier Paul Poiret, sponsored a series of exhibitions at her store located in rue de Penthièvre. The opening presented works by Modigliani, Kisling, Picasso, Léger, Matisse, and Derain. They were gradually less and less considered fringe artists. Their participation in the war provided them with a sort of “certificate of good conduct” and opportunities thus opened up for them. In December 1917, Zborowski organized Modigliani’s first exhibition at Berthe Weill’s gallery in the rue Taitbout. In her memoirs, Berthe Weill wrote about this event: “Sunday we hung and Monday December 3rd 1917 was the opening. Sumptuous nudes, angular faces, tasty portraits, select gathering […]. The owner of the gallery is asked to go and see the police chief. I went up. Packed office… I asked: “Have you asked me to come up? —Yes! And I order you to take all this filth down. […] What is wrong with these nudes? […]— These nudes… these nudes have h-h-h-air!” In 1919, the Druet gallery, on the Right Bank, devoted an exhibition to Kisling who was then only twentyeight years old. Three Stages of Immigration Eugène Zak left Warsaw for Paris in 1900, Mela Muter in 1901, Jacques Gotko arrived from Odessa in 1905, and Adolphe Feder from Ukraine in 1908, the same year as the

German artist Otto Freundlich arrived in Paris. Samuel Granowsky arrived in 1909, just as Maurice Mendjizki who came from Lodz. When he left Russia, Marc Chagall first spent four years in Paris, from 1910 to 1914. Istvan Farkas arrived from Budapest in 1912, Mané-Katz from Ukraine in 1913. The artists who settled between 1900 and 1912 had time to put in place a network of friends and relations necessary to flourish. Other artists followed them, fascinated by Montparnasse. Vladimir Naïditch joined them from Moscow in 1920, Zygmunt Landau from Poland in 1920, and Alexandre Fasini from Ukraine in 1922. Russian artist Ossip Lubitch arrived in 1923, Belorussian painter Isaac Antcher in 1924, and Polish artist Esther Carp in 1925. Issachar Ryback arrived from Ukraine in 1926 and Jacob Macznik from Poland in 1928. As soon as Hitler came to power in 1933, artists fled from Nazi Germany: Lithuanian painter Moses Bagel and Polish artists Jankel Adler, Jésékiel Kirszenbaum, and Jacob Markiel arrived in Paris. In Poland, Sam Ringer, was forced to work and build the Auschwitz extermination camp. He was then deported successively to nine different camps, and finally came to Paris in 1947 where he joined the Ecole des BeauxArts (school of fine arts). Their Territory: Montparnasse “In Montparnasse, for twenty years, under the cloak or under the tables on the terraces of La Rotonde, Le Dôme, or La Coupole, dealers bought and sold Derain’s sketches, Utrillo’s watercolors, Modigliani’s drawings, and Picasso’s work that miraculously slipped out of the artists’ portfolios.” Florent Fels, The Romance of Living Art, 1959 “June 23, 1914 Montparnasse Nowadays Montparnasse has replaced Montmartre. Climb for climb, it is always the Mountain, art on the peaks. The daubers no longer feel at ease in modern Montmartre, hard to climb, filled with fake artists, fantastical industrialists, and opium smokers showing off. On the contrary, in Montparnasse, you can now find the real artists, dressed like Americans. […] “How pleasant is this country, where the whole sky is for external use; country of outdoor coffee houses and terraces; of the Lilas (…), La Rotonde, (...) Le Dôme.” Guillaume Apollinaire, Chroniques d’art 1902-1918 The Three Main Cafés of Carrefour Vavin, 1905-1939 The culture myth of Montparnasse was born in its cafés. Cafés were the places where artists, models, collectors, dealers, and critics used to meet, chat, introduce a newly arrived friend, strike deals, and decide on an exhibition. Above all, cafés were a daily comfort haven for destitute artists. Three places celebrated the spirit of the School of Paris in Montparnasse:

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еврейские художники Парижской школы 1905–1939

«Мы были целым поколением детей из хедера и студентовталмудистов, утомлённых долгими годами, проведенными за одним лишь анализом текстов. Взяв в руки карандаши и кисти, мы начали познавать природу, одновременно познавая самих себя. Кем же мы были? Каково было наше место среди народов? Что происходило с нашей культурой? Каким должно было быть наше искусство? Наша история зародилась в нескольких городках Литвы, Белоруссии и Украины, и продолжилась в Париже. (...)» Эль Лисицкий, Rimmon/Milgroïm, № 3, Берлин, 1923 г.


на

ПРеДИСЛОВИе

Клода Ланцм а

«Жан Адлер, депортированный 27 марта 1942 года эшелоном № 1, убит в Освенциме. (…) Бернар Альтшулер, депортированный 27 марта 1944 года эшелоном № 70, убит в Освенциме. Его произведения исчезли. (…) Жорж Ашер, эшелон № 60, убит в Освенциме. Работы Жоржа Ашера были уничтожены в его мастерской во время его ареста». Статья за статьёй, имя за именем, всё та же щемящая тоска, та же боль наполняют страницы этой потрясающей и волнующей антологии «Еврейские художники и скульпторы Парижской Школы 1905–1939 гг.», которой мы обязаны терпению, состраданию, уму и знаниям Надин Нешавер. Эта книга — памятник воспоминаний, её нельзя просто рассеянно просмотреть. Её нельзя просто пролистать. Есть что-то, некий закон, требующий, чтобы она, наполненная холодностью и сдержанностью записей, была прочитана полностью. Пропустить хотя бы одно имя было бы предательством. Безграничность, массивность гибели вызывает ужас и ощущается почти физически во время чтения. В книге собрано сто семьдесят восемь художников и скульпторов, известных и безвестных, молодых и старых, начинающих и признанных мастеров. Семьдесят один из них (то есть 40 %) погиб в газовых камерах в Польше. Именно отсюда, из Польши, большая часть из них эмигрировала в 1905–1939 годах — так же как из Литвы, Украины, Белоруссии, Венгрии, Болгарии, Чехословакии, Германии, всей Центральной и Восточной Европы, где они подвергались гонениям — выбрав своим городом Париж, пристанище их творческого пыла. Надин Нешавер очень хорошо объясняет во введении, что именно эти молодые евреи из штетлов и городов Восточной Европы ждали от Парижа, что Париж дал им, и как они сами, благодаря мужеству, труду, таланту, жажде знаний, неутомимости и свободе, способности раздвигать границы смогли ввести эту новую еврейскую живопись в самое сердце современности искусства. Мы знаем, что на каждом этапе процесс уничтожения людей сопровождался одновременным уничтожением их имущества. Другими словами, беспощадными кражами, которые продолжались даже после смерти, когда у трупов вырывали

золотые зубы. В искусстве первыми «ограбленными» оказались вовсе не коллекционеры, а сами художники и скульпторы, во время арестов которых их работы уничтожались, разворовывались или вывозились в неизвестном направлении. Биография, которую невозможно представить, с пробелами, подчас трагически скудная (в три строчки), фотография мастера или единственной его картины или скульптуры — вот всё, что осталось от жизни творца, от так и не завершённого развития творчества. Эти сведения, которые Надин Нешавер искала, воскрешала и в которых нуждалась, несут для нас сегодня то же значение, как пот и кровь. Многие из имён, представленных в этой антологии, никогда не дошли бы до нас и так и сгинули бы в безвестности без этой художественной книги, книги об искусстве, которая является одновременно актом памяти и просветительства.

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ПРеДИСЛОВИе

Эта история началась давно. Мой отец Жак Нешавер был торговцем картинами. Он покупал, в основном, произведения еврейских художников Парижской школы, которых он называл Yid’n. Эта живопись, тесно связанная с его жизнью, была хорошо ему знакома. Вернувшись домой с одной из картин, он ставил её перед собой, садился в кресло и долго смотрел на неё. Потом искал подробности жизни автора в двух книгах о еврейских художниках, написанных на идише. Сначала в Scènes et visages de Montparnasse Аронсона, затем в Nos artistes martyrs Фенстера. Мой отец погиб в результате несчастного случая 28 июля 1987 года. Я, естественно, продолжала интересоваться этой живописью. Но я не читаю на идише, и Аронсон и Фенстер ничего не могли мне поведать о жизни художников. Начиная с 1988 года эти тексты переводил увлекающийся идишем Поль Фожель. Позднее молодой искусствовед Мари БуайеТайан оказала мне неоценимую помощь в подготовке первого издания на французском языке, вышедшего в 2000 году в издательстве «Деноэль» под редакцией Оливье Рубинштейна. В 2014 году вышло новое дополненное издание, огромный вклад в подготовку которого внесли Николя Неман и Вероник Бальмель из издательства «Соможи». К нам присоединился и художественный редактор первого издания Поль-Реймон Коэн, вложив в работу свой бесценный опыт. Я благодарна каждому из них. Преемственность продолжается... Моим сыновьям Артуру и Борису Пренкам хорошо известна история их деда... Они тоже стали частью ''приключения'' Парижской школы. Артур Пренк является экспертом в сфере современного искусства и специализируется на скульптуре. Борис Пренк продаёт предметы искусства в ТельАвиве. А Дебора, его супруга и партнёр, с большим талантом составила и организовала выпуск нового трехъязычного словаря, посвящённого нашим художникам и скульпторам. Кто эти художники и скульпторы? Их можно объединить старой немецкой пословицей «Жить как Бог во Франции», которую еврейская молва переделала в «Счастлив, как еврей в Париже»: Azoy gluckor wi a yid in Paris.

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Париж был центром мира. Они приехали из Восточной Европы в 1905–1939 годах, спасаясь от антисемитизма в своих странах, чтобы обрести в Париже землю обетованную, где их жажда творчества должна была быть утолена. Эти художники и скульпторы обосновались на Монпарнасе. Они сошлись с бурно развивавшимся в то время авангардом, сформировав штетл художников, собиравшихся в окрестных кафе, и создали явление, которое получило название Парижской школы. Многие из них общались с еврейскими писателями и поэтами, публиковавшимися в журналах и газетах на идише. В многочисленных произведениях, посвящённых Парижской школе, редко говорится об их принадлежности к иудейству. Часто этих художников ассоциируют со странами, где они родились и откуда бежали, где доступ к изучению изящных искусств был для них ограничен, почти запрещен из-за numerus clausus. Этих женщин и мужчин, объединённых надеждой на лучшую жизнь, остановило окончательное решение еврейского вопроса. Многие сгинули в газовых камерах, их произведения были уничтожены, а те художники, которые смогли спастись, так и не вернулись к общей мечте. Конечно же, 178 имён не представляют всех еврейских художников и скульпторов этой эпохи. Между двумя войнами в Париже их насчитывалось более пятисот. Наш выбор объясняется материалами из трудов Фенстера и Аронсона, переведённых с идиша, к которым было добавлено несколько имён. Новое издание позволило нам добавить список из тридцати скульпторов с указанием дат их прибытия в Париж, биографии и введение были переведены на английский и русский языки. Выбор субъективен: все эти художники были связаны дружбой, в этом кругу все знали друг друга. Все биографические описания построены по одной схеме, независимо от степени известности художника или скульптора: семейное происхождение, художественное образование, приезд в Париж и судьба каждого во время Второй мировой войны. В биографиях многих депортированных художников часто бывают пробелы, так как о них сохранилось мало сведений. Избранные выдержки содержат высказывания самих художников, художественных критиков или близких людей. Собранная библиография объединяет в хронологическом порядке основные произведения, посвященные художникам, статьи в прессе и каталоги выставок.


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Эксперт Пар ижской школ ы 1905–1939

дин Нешавер

Париж, мировая столица Искусства Париж притягивает к себе художников со всего мира как магнит. Из Америки туда приехали Морган Расселл в 1906, Ман Рэй в 1921 и Александр Колдер в 1926 годах. Из Канады — Джеймс Моррис в 1908 году. Из Японии — Цугухару Фудзита в 1913, Сеи Коянаги в 1920 и Тошио Бандо в 1921. Из Греции — Димитриос Галанис в 1900 и Жорж Гунаро в 1919. Из Италии — Джино Северини в 1906, Джорджо де Кирико в 1911, Массимо Кампильи в 1919, Марио Тоцци в 1920 и Филиппо де Пизис в 1925. Из Мексики — Анхель Саррага в 1904, Диего Ривера в 1912 и чилиец Мануэль Ортис де Сарате в 1906. Из Аргентины — Элена Сид в 1925. Из Норвегии — семья Крог в 1889. Из Швеции — Исаак Грюневальд в 1908. Из Китая — Ю Саньу в 1921. Из Англии — Гарри Блумфилд в 1921. Из Голландии — Кеес Ван Донген в 1897 и Пит Мондриан в 1912. Из Туниса — Жилани Абдул Вахаб в 1911. Из Испании — Пабло Пикассо в 1900, Хуан Грис в 1906, Франсиско Борес в 1925 и Антони Клаве в 1927. Из России — Михаил Ларионов в 1906, Александр Архипенко в 1908, Жан Пуни в 1910, Антон Певзнер в 1911, Казимир Малевич в 1912, Владимир Татлин в 1913 и Наталья Гончарова в 1914 году. Из Болгарии — Жорж Папазофф в 1924. Из Германии — Франц Марк в 1903, Макс Пехштейн в 1907, русские Алексей Явленский в 1905 и Василий Кандинский в 1906. Этот список художников можно продолжать и дальше. На Осеннем салоне 1905 года были представлены работы Анри Матисса, Андре Дерена, Мориса де Вламинка. Появилось новое направление в живописи — фовизм. В 1906 году на Монмартре, в мастерской Бато-Лавуар Пикассо шагнул дальше Поля Сезанна: так зародился кубизм. Перед Первой мировой войной по Европе гремели авангардные направления искусства. Париж был центром встреч художников-авангардистов.

Границы более не имели значения, Париж стал центром сосредоточения самых восхитительных и радикальных опытов в живописи, лабораторией международного искусства. Что такое Парижская школа? Термин «Парижская школа» был впервые употреблён художественным критиком Андре Варно в 1925 году в журнале Comœdia для определения сообщества иностранных художников в Париже. Парижская школа — это не движение или школа в академическом значении, а историческое явление. Этот термин был, скорее, призван отвергнуть скрытую ксенофобию, чем стать основой теоретического подхода. Стоит отметить, что в эту эпоху художественная критика не скрывала своего национализма. В художественных журналах выражалось презрение и боязнь по отношению к иностранным, в особенности, еврейским художникам, которые занимали все более важное место во французской художественной среде. Луи Воксель написал в Le Carnet de la semaine в 1925 году: «Орда варваров заполонила Монпарнас, они спустились [в галереи искусств на] рю Ла Боэси, пришли из кафе XIV округа, издавая германославянские рычащие вопли войны… Их культура слишком молода! Когда они говорят о Пуссене, знают ли они мастера? Видели ли они когда-нибудь хоть одну картину Коро? Или прочли хоть одну поэму Лафонтена? Это народы «извне», которые ничего не знают об уважении к тому, что Ренуар назвал мягкостью французской школы — тактом, который является добродетелью нашего народа». Тот же Луи Воксель, многословный критик еврейских художников, напишет для издательства Le Triangle, в коллекции «Еврейские художники» несколько монографий с согласия самих художников. В монографии, написанной в 1931 году и посвященной Мареку Шварцу, мы читаем: «(…) как нашествие саранчи, вторжение еврейских колористов обрушилось на Париж — Париж Монпарнаса. Причины этой массовой иммиграции: русская революция и принесенные ею нищета, погромы, незаконные поборы, гонения. Несчастные еврейские художники укрылись у нас, привлечённые блеском современного французского искусства. (…) Они — составляющие элементы того, что молодая критика назовёт Парижской школой. В этой шумной толпе переселенцев стоит принять во внимание многочисленные таланты». Начало Парижской школы: 1905–1914 гг. Наши художники приехали с Востока: из России, Польши, Германии, Болгарии, Чехословакии, Румынии, Венгрии. Они познакомились с великими французскими мастерами XIX века, они узнали импрессионистов

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благодаря своим учителям, таким как Юзеф Панкевич в Кракове, Илья Репин в Санкт-Петербурге, Адольф Фениес в Будапеште и Ловис Коринт в Берлине. Большинству из них было около двадцати лет. Они стали движущей силой еврейской эмансипации, движения социального и интеллектуального подъёма Европы, которое характеризовалось утратой религиозности и политической ангажированностью. Впервые еврейские художники совпали во времени с космополитической обстановкой в главных столицах эпохи: Вене, Берлине и, особенно, Париже. Война 1914–1918 годов рассеяла художников: Рудольф Леви, Вальтер Бонди и Отто Фрейндлих отправились в Германию, Леопольд Готтлиб присоединился в Польше к армии маршала Пилсудского. Марк Шагал, Мане-Кац, Савелий Шлейфер вернулись в Россию. Многие записались добровольцами во французскую армию: Кислинг был комиссован в 1915 году после ранения, Маркусси, друг Аполлинера, был награждён медалью, Мондзен прослужил вплоть до июля 1918 года. Многие уволенные из армии по состоянию здоровья, например, Модильяни и Сутин, пошли добровольцами в рабочие бригады. Жюль Паскин отправился в Лондон, чтобы уклониться от службы в болгарской армии. Во время войны художники, оставшиеся в Париже без пособий и помощи, объединились. С 1915 года Мария Васильева открыла в своей мастерской в доме 21 в тупике авеню Мэн столовую для художников, которая на протяжении всей войны была полна народа, и где звучали многие языки мира. Первая мировая война вывела еврейских художников с Монпарнаса на парижскую сцену. В декабре 1915 года Жермен Бонгар, сестра известного модельера Поля Пуаре, организовала несколько выставок в своём магазине на рю Пантьевр. На первой из них были представлены работы Модильяни, Кислинга, которые соседствовали с картинами Пикассо, Леже, Матисса и Дерена. Эти художники начали приобретать известность. Те, кто вернулся с фронта, получили «сертификаты хорошего поведения», благодаря которым перед ними открывались новые перспективы. В декабре 1917 года Зборовский организовал первую выставку Модильяни в галерее Берты Вейл на рю Тэбу. В своих мемуарах Берта Вейл рассказывает:

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«В воскресенье мы развешивали картины, а в понедельник 3 декабря 1917 года состоялся вернисаж. Великолепные ню, угловатые лица, сочные изображения, избранная публика. (…) Владелицу галереи просят зайти к комиссару. Я поднимаюсь. Конторское помещение набито битком... Я спрашиваю: „Вы просили меня подняться? — Да! И я приказываю Вам снять немедленно весь этот мусор. (…) Но что в них такого, в этих ню? … — Эти ню… у них ввв…волосы! “[sic]». В 1919 году галерея Дрюэ, расположенная на правом берегу Сены, посвятила выставку работам Кислинга, которому на тот момент было двадцать восемь лет. Три этапа иммиграции… Эжен Зак прибыл в Париж из Варшавы в 1900 году, Мела Мутер в 1901, Жак Готко приехал в Париж из Одессы в 1905, Адольф Федер из Украины в 1908, в том же году, что и немец Отто Фрейндлих. Самюэль Грановский — в 1909 году, так же как и Морис Менджиски, прибывший из города Лодзь. Покинув Россию, Марк Шагал прожил, начиная с 1910 года, четыре года в Париже. Иштван Фаркаш прибыл из Будапешта в 1912, Мане-Кац из Украины — в 1913. Художники, обосновавшиеся в Париже в 1900–1912 годах, смогли создать круг дружеских отношений, необходимых для их становления. За ними последовали другие художники, очарованные Монпарнасом. Вскоре к ним присоединились: Владимир Найдич из Москвы в 1920, Зигмунт Ландау из Польши в 1920, Александр Фазини из Украины в 1922. Осип Любич из России приехал в 1923 году, Исаак Анчер из Белоруссии в 1924, Эстер Карп из Польши в 1925, Иссахар Рыбак из Украины в 1926, Якоб Мачник из Польши в 1928. Когда Гитлер пришёл к власти в 1933 году, художники бежали из нацистской Германии: литовец Мозес Багель, поляки Янкель Адлер, Иезекииль Киршенбаум и Яков Маркель приехали в Париж. Сам Рингер после того, как его заставили работать на строительстве концлагеря Освенцим, а затем прогнали по девяти разным лагерям, в конце концов, добрался до Парижа в 1947 году и поступил в Школу изящных искусств. Территория: Монпарнас «На Монпарнасе в течение двадцати лет из-под полы, под столиками на террасах кафе La Rotonde, Le Dôme, La Coupole спекулянты продавали и покупали эскизы Дерена, акварели Утрилло, наброски Модильяни, эпюры Пикассо, чудом выскользнувшие из папок художников». Флоран Фельс Le Roman de l’art vivant. «23 июня 1914 года Монпарнас


Монпарнас уже заменил Монмартр. Альпинизм на смену альпинизму — все та же гора, искусство на высоте. Начинающим художникам неспокойно на современном Монмартре, куда так сложно вскарабкаться, где так много фальшивых художников, предпринимателей-фантазёров и курителей опиума. На Монпарнасе же сейчас — настоящие художники, одетые на американский манер. (…) Вот она, дивная страна, где всякое небо хорошо для прогулок, страна свежего воздуха и террас: террасы Closerie des Lilas (…), La Rotonde(…), Le Dôme.» Гийом Аполлинер Chroniques d’art 1902–1918. Три главных кафе перекрёстка Вавен, 1905–1939 гг. Миф Монпарнаса был рождён в кафе. В кафе встречались художники, натурщики и натурщицы, коллекционеры, торговцы, критики. Они общались, представляли только что приехавших друзей, заключали сделки, обсуждали организацию выставок. Но, прежде всего, для этих художников, устроившихся кое-как, кафе было пристанищем, где всегда можно было найти поддержку. Три кафе Монпарнаса тесно связаны с Парижской школой. Кафе Le Dôme открылось в 1898 году. В 1903 году еврейские художники, говорившие по-немецки — Вальтер Бонди, Рудольф Леви, Бела Шобель, Жюль Паскин и др. — сделали его своим излюбленным местом, в традициях мюнхенских кафе. Там они повстречались с маршанами, такими как Альфред Флехтхейм и Анри Бинг. Начали появляться также группы голландских и скандинавских художников. В июне 1914 года Альфред Флехтхейм организовал в своей галерее в Дюссельдорфе выставку Les Dômiers. Он сказал об этих художниках: «Это были иностранные художники, которые жили в Париже, встречались в одном кафе и любили Париж». La Rotonde — старинное заведение, которое в 1911 году возглавил Виктор Либион. Этот человек, исключительно щедрый по отношению к творцам, принимал художников и поэтов всех школ. Они были изгнанниками, но чувствовали себя как дома в La Rotonde, переходя от столика к столику,

оставаясь часами в тепле, получив кофе с молоком в кредит или в обмен на рисунок. Среди посетителей разных национальностей большинство представляли русские евреи. La Rotonde посещали Кремень, Сутин, Кикоин. Ковбой Самюэль Грановский иногда подрабатывал там помощником по хозяйству в обмен на выпивку, так же как и Михаил Ларионов, Наталья Гончарова, Адольф Федер. В À Paris, cafés d’artistes et leurs légendes Сильви Бюиссон цитирует Илью Эренбурга: «Нищета и ужас погромов, а не только стремление к успеху заставили русских покинуть страну». Эренбург объяснял, что кафе La Rotonde значило для тех, кто жил в трущобах и скверных гостиницах: «Мы приходили в La Rotonde, привлечённые общением друг с другом. Нас притягивали вовсе не шум, не какие-то новые дерзкие художественные теории, а просто… чувство общих невзгод, которое нас объединяло». В 1920 году Либион был вынужден продать La Rotonde из-за финансовых затруднений. Он внёс немалый вклад в развитие сообщества художников благодаря своему тёплому отношению и мягкосердечности. Рассказывают, что Андре Сальмон в течение многих лет добивался того, чтобы памятник Бальзаку на бульваре Распай был заменён на памятник Либиону. Кафе La Coupole было открыто в декабре 1927 года бывшими управляющими Le Dôme Фро и Лафоном. Это кафе было создано в момент апогея «духа Монпарнаса», духа сумасшедших лет: кафе, ресторан, американский бар и танцпол. Около тридцати художников расписали стойки и стены, среди которых были Фернан Леже, Георг Карс, Отон Фриез, Мария Васильева, Давид Сейферт и Натан Грюнсвейг. А ещё был бальный зал Бюлье в доме 33 на авеню Обсерватуар. В 1847 году бывший фонарщик Франсуа Бюлье купил старый бальный зал La Closerie des Lilas, известный как «сад Бюлье», а потом переименованный в бальный зал Бюлье. Союз русских художников, основанный в 1905 году, и объединение дружеской помощи художникам часто проводили там благотворительные костюмированные балы в пользу нуждающихся художников. Это было модно. Балы посещал весь Париж. Академии Это эпоха первых академий, которые практиковали «свободное» обучение, непохожее на то, что предлагалось в Школе изящных искусств. Академии давали художникам, которые не могли сразу попасть в Школу изящных искусств, возможность рисовать с натуры в ожидании следующего приёма в Школу. Академия Коларосси, самая старая академия, была

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