Atlas.Mtl du 23 août 2018

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Lancement (officieux) de la campagne électorale Québécoise 2018

Les quatre chefs face aux jeunes

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Deux poids, deux mesures?

L'Arrondissement Villeray-Saint Michel-Parc Extension refuse aux maghrébo-montréalais le droit de tenir leur rassemblement annuel au Parc Jarry

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Célébrations Editeur : Abdelghani Dades. Directeur Général Rachid Najahi. Rédaction : Abdelghani Dades, Wahid Megherbi, Reda Benkoula Publicité : Pub Smart Conception et Réalisation Graphique : Atlas Média Atlas.Mtl est un produit du. GROUPE ATLAS MEDIA Inc Editeur de. * La Voix des Marocains à Montréal et du site web: www.atlasmedias.com

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À l’occasion de la célébration de l’Aïd el kébir, le bimensuel Atlas.Mtl et le Groupe Atlas Media présentent leurs meilleurs vœux à l’ensemble de leurs lecteurs et partenaires

Aïd moubarak saa’ïd

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Célébrations

Aïd Al Adha

Une fête pleine de sens L'Aïd el Kébir ou Aïd al Adha, l’une des principales célébrations musulmanes, est également appelée fête du sacrifice. Elle est célébrée chaque 10ème jour du 12ème mois de l’année hégirienne. Avec Aïd el Fitr, qui célèbre la fin du mois de Ramadan, l’Aïd el kébir est la fête la plus généralement célébrée par les musulmans. Les origines de la fête du sacrifice L'Aïd-el-Kébir, qui souligne la fin du pèlerinage à la Mecque, est célébrée chaque année en la mémoire du prophète Abraham - appelé également l'ami fidèle de Dieu - et du sacrifice qu'il a fait pour Dieu, afin de montrer sa foi : en effet, Dieu l'aurait mis à l'épreuve et lui aurait demandé de sacrifier Ismaël, son unique fils. L’injonction faite à Abraham, particulièrement difficile, représente bien plus qu'un simple obstacle dans la vie. Lui et son fils font alors ensemble le choix de respecter la requête de Dieu, et le prophète d'Abraham se prépare à procéder à l’immolation. Mais alors qu'il était sur le point de passer à l'action, l'Ange Gabriel apparait et met un bélier à la place d'Ismaël, afin de récompenser le prophète d'avoir choisi Dieu en lui rendant son enfant vivant. Abraham a été confronté à une terrible décision qu'était de choisir entre deux amours, et ce jour est ainsi chaque année célébré par le sacrifice d'un animal. Aïd el Kébir : rites et traditions La religion musulmane, célèbre plusieurs fêtes dont les dates varient d'une année à l'autre. En effet, celles-ci dépendent de l'année lunaire. L'Aïd-el-Kébir n'échappe pas à cette règle.

Le jour officiel est annoncé seulement quelques jours avant, car il annonce également la fin d'un grand pèlerinage à la Mecque. Si sa date est variable et connue tardivement, les musulmans arrivent tout de même à célébrer cette fête tous en même temps. Globalement, bien que la tradition prévoit qu'un sacrifice ait lieu tous les ans à cette date, les musulmans ne sont pas obligés de le mettre en oeuvre, notamment s'ils n'ont pas les moyens de se procurer un animal. Cependant, dans certains pays, il s'agit bel et bien d'une obligation. Le déroulement de la fête Le jour de l'Aïd-el-Kébir, une prière est organisée une vingtaine de minutes après que le soleil se soit levé. Ce n'est qu'après cette dernière, dans la matinée, que l'animal doit être tué, afin d'être considéré comme un sacrifice. Plusieurs espèces peuvent être

choisies, il peut s'agir aussi bien d'un bovin, d'un ovin, d'un caprin, ou alors d'un camélidé, et celui-ci doit être sélectionné en fonction de certaines caractéristiques précises, notamment au niveau de l'âge et de ses conditions physiques, par exemple ne pas être malade.

une partie de sa viande est réservée aux personnes dans le besoin, une autre partie à l'entourage (amis, voisinage...), et la dernière partie est partagée

Majoritairement les musulmans choisissent de sacrifier une chèvre ou encore un mouton. L'acte doit être réalisé en famille, mais plusieurs familles peuvent le faire ensemble. Le sacrifice, quant à lui, doit être réalisé par le chef de famille, qui doit bien traiter l'animal et veiller à faire souffrir le moins possible ce dernier. Ensuite, ce sont trois journées de festivités qui prennent place, mais la durée peut varier en fonction des pays. Concernant l'animal tué,

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dans la famille, afin de respecter les valeurs de cette fête, à savoir l'entraide et le partage


À la Une

Deux poids, deux mesures?

L'Arrondissement Villeray-Saint Michel-Parc Extension refuse aux maghrébo-montréalais le droit de tenir leur rassemblement annuel au Parc Jarry C’est avec regret que les organisateurs de la grande rencontre annuelle des montréalo-canadiens originaires du Maghreb, une initiative d’un collectif mobilisant des associations, organismes et institutions canadiennes à référent marocains et canadiens, traditionnellement organisée à la fin de chaque mois de juillet au Parc Jarry (Arrondissement VilleraySaint Michel-Parc Extension), annoncent que cette manifestation a été annulée pour cette année 2018. Depuis le mois d’août de l’année écoulée en effet, les associations et organismes partenaires dans l’organisation de cette activité – qui avait réuni plus de 40 000 personnes lors de sa dernière édition en date du 29 juillet 2017 ont en vain tentés de rencontrer les responsables municipaux en vue de dresser le bilan de l’édition 2017 et de préparer l’édition 2018 de l’événement. À cette date, on leur a fait savoir que «la plupart des cadres concernés par la

question étaient en vacances»; de ce fait une première réunion-bilan n’a pu avoir lieu que le 9 novembre 2017; moment auquel la proximité des élections municipales rendait cette rencontre quasiment inutile. Les organisateurs ont néanmoins demandé, règles de bonne gouvernance obligeant, qu’un compte-rendu de cette réunion soit élaboré, prévoyant notamment une date pour une nouvelle rencontre. Cette demande est restée sans suite.

Il a ensuite fallu attendre jusqu’au 23 avril 2018, malgré plusieurs relances à propos de la demande de réservation du parc pour le mois de juillet 2018 pour que les responsables de l’arrondissement concernés fournissent enfin une réponse, en fait une fin de non-recevoir, fondée sur une liste d’une vingtaine de prétendues failles en matière d’organisation et de sécurité qui auraient été constatées lors de la précédente édition. Les organisateurs ont aussitôt répondu en démontrant par écrit, le

caractère erroné – voir fallacieux - des «motifs» invoqués pour justifier le refus d’utilisation du Parc Jarry. Cet écrit resté sans réponse. Les organisateurs ont alors commencés à considérer les retards et atermoiements de l’Arrondissement, significatifs d’une évidente mauvaise volonté, comme des manœuvres dilatoires. Étant donné l’ambiance qui prévalait à ce moment dans l’administration de l’Arrondissement VilleraySaint Michel-Parc Extension, les organisa-

teurs se sont adressés à la Ville Centre. Une rencontre a eu lieu à ce niveau mijuin 2018, avec des membres du Conseil de Ville et du cabinet de la Mairesse, afin de tenter de trouver une solution au problème posé. Bien que les échanges qui ont eu lieu lors de cette rencontre aient été peu amènes, la réunion a permis de convenir : - de la nécessité d’un report de l’activité afin de ne pas en compromettre l’organisation;

- de l’aide de la Ville Centre afin de trouver un nouveau lieu à même d’accueillir l’événement ou de mener une médiation afin d’aplanir les obstacles dressés par l’administration de l’Arrondissement Villeray-Saint Michel-Parc Extension. Suite à cette rencontre, une nouvelle date, soit le 9 septembre 2018, a été choisie par les organisateurs. La Ville Centre a proposé plusieurs choix de lieux (dont Suite à la page 7

Fête marocaine

Exigences à respecter

Voici la liste des «exigences» imposées pour pouvoir prétendre utiliser le Parc Jarry (spécifiquement pour ce que le document de l’Arrondissement VielleraySaint Michel-Parc Extension appelle «la Fête marocaine»)

agent de sécurité pour 250 participants. Le promoteur devra donc fournir un contrat pour 160 agents de sécurité bien identifiés sur le site.

1. Signer un protocole d’entente avec l’arrondissement dans lequel il s’engage à respecter l’ensemble des conditions énumérées ci-bas avec preuve à l’appui

4. Fournir un contrat pour location de clôtures en nombre suffisant pour contenir l’ensemble des participants et exercer un contrôle aux entrées du site

2. Pour l’édition 2018 l’organisation cherche à réunir 40 000 participants. Selon le Sergent Simon Trudelle à la planification opérationnelle, le promoteur doit respecter un ratio d’un

3. Avoir un site clôturé avec accès contrôlé

au site)

fabricants.

7. Fournir un contrat avec un organisme de gestion des matières résiduelles (ex : consortium eco-logique)

12. Aller en location pour des barricades pour mettre en place un couloir de sécurité devant la scène

8. Fournir un contrat de location d’extincteurs pour leur événement (pour génératrices et cuisson)

13. Fournir un contrat pour 20 toilettes chimiques

9. Avoir un endroit identifié pour les enfants perdues

5. Avoir des points de fouilles aux entrées avec détecteurs de métal

10. S’engager à respecter un horaire strict de circulation de véhicules sur le site

6. Gérer le stationnement de l’Esplanade (fournir un horaire de bénévoles qui seront affecté

11. Avoir des bénévoles identifiés aux structures gonflables et respecté les normes de sécurité exigées par les

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14. Fournir un contrat pour les tentes avec un dispositif d’ancrage sécuritaire 15. Fournir un contrat pour éclairage d’appoint en soirée pour la sécurité des usagés

Notre principale remarque -

De telles «exigenc-

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es» ont-elles été demandées aux organisateurs de la Fête de la Saint Jean et de la Fête nationale turque qui ont pu utiliser le Parc Jarry? Sinon, pourquoi seule la «Fête marocaine» s’est-elle vue imposer des demandes aussi drastiques en matière de sécurité et d’Hygiène? Serions-nous plus dangereux et plus à risque et, aussi, plus sales que le reste de nos concitoyens? Par ailleurs, comment expliquer l’indifférence des élus de l’arrondissement, pourtant parfaitement informés, devant l’arrogance de leurs fonctionnaires?


Politique

Deux poids, deux mesures?

L'Arrondissement Villeray-Saint Michel-Parc Extension refuse aux maghrébo-montréalais le droit de tenir leur rassemblement annuel au Parc Jarry Suite de la page 6

le parking du Stade Olympique, le vieux port de Montréal ou le parc Jean Drapeau) qui se sont avérés peu pratiques et a donc fini par revenir à une tentative de médiation avec les fonctionnaires de l’Arrondissement. Une rencontre s’en est suivie avec les fonctionnaires de l’Administration de l’Arrondissement Villeray-Saint Michel-Parc Extension le vendredi 17 aout 2018 pour, selon les propos tenus par ces derniers «uniquement répondre à la demande de la Ville Centre», mais à l’évidence pas pour rechercher une solution au problème posé puisque, en fait de dialogue, une liste d’une trentaine de conditions et exigences drastiques a été remise aux organisateurs de l’événement. Ces exigences exorbitantes exigeaient, entre autres : - la mobilisation de pas moins de 160 agents de sécurité, soit d’une facture de plus de 50 000$, - une fermeture complète du site du parc déboursé par les organisateurs avec un budget de location de clôtures de plusieurs milliers de dollars, - et diverses autres conditions toutes plus onéreuses les unes que les autres… Un commentaire verbal émis par l’un des fonctionnaires rencontrés («Oubliez le Parc Jarry, une fois pour toutes!») laisse néanmoins penser que, même une fois toutes les conditions et exigences de

l’Arrondissement remplies et satisfaites, d’autres prétextes auraient surgis pour empêcher la tenue de l’événement. Cette brutale fin de nonrecevoir appelle les remarques et remarques suivantes :

1- Ce sont dorénavant les fonctionnaires qui dirigent l’Arrondissement VilleraySaint Michel-Parc Extension sans aucun égard pour les avis, décisions et orientations des élus et de la Ville Centre; ce qui met assurément notre démocratie sous caution, 2- Au moment même où le Parc Jarry était refusé à la communauté maghrébine pour son événement annuel phare; il était accordé successivement à la célébration de la Fête de la Saint-Jean Baptiste, puis pour la célébration de la Fête Nationale Turque (sans vraisemblablement aucune condition similaire aux exigences radicales imposées à la fête maghrébine); ce qui ne manquera pas de soulever quelques doutes sur l’équité et la justice dans les décisions de notre administration municipale. À tout le moins, cette différence de traitement est de nature à stigmatiser le segment maghrébin de la population de Montréal en laissant supposer qu’il est plus à risque que tout autre groupe ethnique concitoyen. Elle sera certainement, une fois connue, source de frustration et de désenchantement chez cette population, par ailleurs déjà largement

discriminée. Cette frustration est d'autant plus vive que la Fête organisée au Parc Jarry sans interruption depuis 2017, outre qu'elle n'a jamais donné lieu à aucun incident notable, a toujours été fortement appréciée par les politiciens de toutes appartenances, aux trois niveaux de gouvernement. Dans l’immédiat, l’attitude de l’administration de l’Arrondissement VilleraySaint Michel-Parc Extension a amené les organisateurs à annuler l’édition 2018 de leur événement et à entamer dès à présent la préparation de l’édition 2019; en espérant toutefois que d’ici là, la Ville de Montréal remette de l’ordre dans ses affaires, veille avec plus de soin à l’équité dans ses décisions entre les différents segments de sa population et rétablisse l’incontournable équilibre entre élus et salariés municipaux dans la gestion de la cité

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Voyages

Dernier tour de piste pour le dernier B747 de Royal Air Maroc Royal Air Maroc (RAM) pourrait mettre hors de service son dernier Boeing B747. D’après Airlineroute en effet, la compagnie nationale marocaine retirera son B747 d’ici la mi-septembre. Actuellement déployé sur la route CasablancaMontréal, le Boeing B747-400 immatriculé CN-RGA stoppera la desserte canadienne le samedi 15 septembre. Entré en service en 1993/1994 (24- 25ans), le fameux jumbo-jet de la compagnie marocaine a toujours impressionné par sa silhouette et sa capacité (16 sièges classe Business et 476 en classe Économie). Au fil du temps, les frais de maintenance de l’avion qui a parcouru pratiquement tous les continents, grimpent et ses quatre moteurs d’ancienne génération sont trop gourmands. Depuis son lancement, RAM a exploité 04 modèles de la famille B747s (747-100, 747-200, 747-400,747SP). Jusqu’en a la fin de la production en 2009, Boeing a produit 442 exemplaires du B747-400. Qui pour remplacer le B747 ?

nouvel élan à l’entreprise».

En croire Abdelhamid Addou, P.D.G. de Royal Air Maroc, l’acquisition de nouveaux avions s’inscrit «dans une stratégie de développement qui vise à donner un

En décembre dernier, Royal Air Maroc a passé une commande ferme pour quatre Boeing 787-9 équipés de moteurs General Electric GEnx-AB. Le premier avion,

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selon Airlineroute, devrait entrer en service le 21 décembre 2018 et sera déployé sur Montréal et New York en alternance avec les 787-8 (la compagnie dispose déjà de cinq appareils de ce type).

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Politique Québécoise

Lancement (officieux) de la campagne électorale Québécoise 2018

Les quatre chefs face aux jeunes Alors que le début de la campagne électorale législative Québécoise était annoncé pour le 23 août suivant, les chefs des quatre principaux partis politiques de la Province ont fait face, dès le vendredi 17 août 2018, dans les locaux de l’Université Concordia de Montréal a des dizaine de jeunes de 18 à 35 ans, lors d’une discussion organisée par l'Institut du Nouveau Monde et le quotidien Le Devoir, qui constitue de ce fait le premier débat des chefs, un véritable coup d’envoi officieux, de l’élection 2018. Durant cet exercice qui a duré un peu plus d’une heure, chaque chef a eu à répondre à cinq questions, tirées au sort au fil de la soirée. Le directeur du Devoir, Brian Myles, qui animait la soirée, a tiré au sort les 20 questions sur des sujets aussi variés que le mode de scrutin, la participation citoyenne aux processus électoraux, les droits de scolarité, l'accès à la justice, le système de santé, les cryptomonnaies ou encore le bonheur. Au bout du compte, les réponses ont fini par apporter un véritable aperçu de la campagne électorale qui s’annonce.

Débats et réactions Et si l’on en croit la réaction de la foule rassemblée à l’Université Concordia, l’idée de la Coalition avenir Québec de refuser la citoyenneté aux immigrants qui échoueraient à un test de français suscitera bien des débats durant la campagne. François Legault a été hué en présentant cette promesse, et ses trois adversaires l’ont souligné à grands traits après la soirée. Le chef de la Coalition avenir

Québec (CAQ) a fait valoir que « si on est sérieux [avec la protection du] français, il faut exiger que tous les nouveaux arrivants parlent français » après trois ans. « La salle a réagi à l’une des propositions les plus inacceptables qui a été faite récemment au Québec », a commenté Jean-François Lisée (Parti québécois) en point de presse après l’événement organisé par l’Institut du nouveau monde (INM). « C’est une proposition qui, au moins auprès de la jeunesse, ne

recueille presque aucun support », a pour sa part constaté Philippe Couillard (Parti libéral du Québec). « Ça ne tient pas la route, et ce n’est pas à la hauteur de ce que le peuple québécois a toujours fait, c’est-à-dire d’accueillir les nouveaux arrivants, de les intégrer et ensuite, bien… on est tous Québécois », a ajouté Manon Massé (Québec solidaire). François Legault reconnaît « que ça ne plaît pas à tout le monde : mais je peux vous

dire qu’il y a plusieurs jeunes qui sont venus me voir après la soirée et qui m’ont dit qu’ils étaient d’accord avec moi. » Il a rappelé que le Parti québécois propose de son côté de « mettre des tests de français obligatoires avant l’arrivée des immigrants ». Les quatre chefs étaient réunis sur une même scène dans le cadre de l’École d’été de l’INM. Ils ont répondu à une vingtaine de questions soumises par des jeunes et touch-

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Enjeux Parité à l’Assemblée nationale: vers une avancée spectaculaire Les données et informations disponibles en matière de candidatures pour les législatives 2018 le démontrent : 45,7 % de femmes sont candidates, sous les couleurs des quatre principaux partis, dans cette campagne électorale pour les législatives québécoises du 1er octobre prochain. En nombre absolu, c’est un record de tous les temps, et ce, même si toutes les places ne sont pas encore pourvues.

base par les formations qui a été de tout temps considéré comme le plus déterminant. Ceci entraînant cela, comment assurer une députation comprenant au moins 40 % de femmes, un pourcentage associé à la zone paritaire, quand dans les faits les partis peinaient lors des derniers tours à présenter au plus 170 femmes sur un bassin de 500 candidats ? Le bond franchi cette année est de l’ordre de l’avancée spectaculaire.

Ce constat met donc fin à des décennies – pour la première fois et plus de 78 ans après l’obtention du droit de vote pour les femmes - d’une culture de recrutement plus portée vers les hommes que les femmes.

Les débats des deux dernières années sur la question cruciale de la sous-représentation des femmes en politique expliquent sûrement une part du tout récent déblocage. Les partis politiques ont saisi qu’est révolue cette époque où l’on pouvait invoquer le bassin de recrutement pas assez généreux : les femmes sont plus éduquées que jamais — et que les hommes ! — et elles abondent dans les

De tous les obstacles recensés pour expliquer la stagnation de la présence des femmes en politique, c’est le recrutement effectué à la

sphères menant traditionnellement vers la politique. Ne leur restait qu’à effectuer leur propre changement de culture. En outre, partout sur la planète, la tendance est aux gains des femmes en politique. Pour chaque petite victoire, certains reculs agissent toutefois comme des appels à l’éternelle vigilance. En Ontario, le premier ministre conservateur, Doug Ford, a nommé 7 femmes sur son conseil de 21 ministres (33 %), alors que sa prédécesseure libérale, Kathleen Wynne, en comptait 13 sur un conseil de 29 personnes (45 %). Rien n’est gagné. Au Québec, le test de la parité au sein des mises en candidature semble réussi. Nous espérons maintenant que le prochain gouvernement du Québec adoptera le

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principe de la parité véritable au moment de constituer son Conseil des ministres, ainsi que s’y sont engagés QS, la CAQ et le PQ. Cela est plus que réaliste : en son temps, le premier ministre Jean Charest avait la parité parfaite dans son cercle des ministres. Alors, et alors seulement, commencera l’ultime examen de la parité : que la présence des femmes à l’Assemblée nationale se traduise par des changements dans les politiques publiques en faveur de l’intégration et de l’équité, et ce, par pur respect d’une société diversifiée comptant… 50,6 % de femmes.

Les chantiers où les retards s’accumulent sont nombreux : qu’on pense aux dernières données de l’ISQ sur l’équité salariale révélant qu’à profession égale, même dans les métiers et professions traditionnellement féminins,

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et malgré le fait qu’elles sont plus scolarisées, les femmes empochent un revenu nettement inférieur à celui des hommes. Pour qu’elle ne soit pas que façade, la parité parlementaire devra aussi s’arrimer à une parité dans les fonctions (leader, présidence de commissions, etc.). Elle devrait s’accompagner d’un changement dans la culture politique, plus sensible aux questions de discrimination et de harcèlement, et de conciliation travail-famille. C’est la toute première première ministre du Québec, Pauline Marois, qui appelait récemment à un « basculement » en matière de partage du pouvoir politique, espérant voir autant de femmes que d’hommes diriger le Québec. À trois jours du déclenchement des élections, tous les espoirs sont permis.


Immigration & emploi

Lancement (officieux) de la campagne électorale Québécoise 2018

Les quatre chefs face aux jeunes Suite de la page 10 ant un large éventail de sujets. C’est sans conteste la promesse — réitérée sur scène par les trois partis d’opposition — de réformer le mode de scrutin qui a la plus fait chauffer le baromètre des applaudissements. « Dans la situation dans laquelle on est, chaque vote ne compte pas, a lancé Manon Massé. Il n’y a que les votes des gagnants qui comptent […]. Faites de la pression sur nous » pour que la réforme se fasse, a-t-elle demandé. M. Lisée et M. Legault sont venus lui serrer la main pour renouveler un pacte déjà scellé en mai dernier : celui de mettre en place un nouveau mode de scrutin proportionnel mixte pour les élections de 2022. Philippe Couillard a défendu sa position en point de presse. « Chaque fois qu’il y a une réforme électorale ou

une proposition de [nouveau] modèle électoral, ce sont les régions qui écopent », a-t-il fait valoir. Quelques sujets abordés…

La formule retenue pour la soirée empêchait les affrontements directs : ce n’était pas un débat (il y en aura quelques-uns durant la campagne, qui prend son envol officiel jeudi), mais une discussion. Ou plus largement : l’occasion pour les quatre politiciens d’entendre parler des préoccupations des Québécois de 18-34 ans… et d’offrir quelques réponses. La formule ? Vingt-cinq questions avaient été soumises par des jeunes, retenues par l’INM et présentées au chef pour qu’ils se préparent. Mais chaque chef n’a eu à répondre qu’à cinq questions, tirées au sort au fil de la soirée animée par le directeur du Devoir, Brian Myles. C’est donc dire que personne ne répondait à la même question.

Le hasard a souvent fait en sorte de diriger les bonnes questions vers le bon chef : François Legault qui hérite de celle sur l’aide aux jeunes entrepreneurs (un de ses sujets préférés) ; Philippe Couillard qui doit défendre la gestion du système de santé et parler de la fatigue des infirmières ; Manon Massé qui parle d’évasion fiscale ou de bonheur collectif ; le chef péquiste, Jean-François Lisée, qui se fait demander s’il entend « donner le monopole électrique à des entreprises de minage étrangères chinoises »… « Jamais ! » a-t-il posé d’emblée. Le spectre des sujets abordés était passablement large : plusieurs touchaient l’économie (avenir du Fonds des générations, financement des Forums jeunesse, intégration des immigrants au marché du travail, inclusion économique des jeunes, évasion fiscale), d’autres concernaient l’éducation (les écoles vétu-

stes, la santé mentale des étudiants (Philippe Couillard a renouvelé sa promesse de mettre en place une politique nationale en ce sens), la démocratie, la question nationale, le français… Une invitation à l’implication

Les chefs ont adopté un ton convivial, échangé quelques blagues (Jean-François Lisée qui a sommé François Legault de bien l’écouter avant de faire un plaidoyer contre les baisses d’impôt) : une formule décontractée avant de prendre la route d’une campagne qui s’annonce ouverte. « On a des visions différentes pour faire avancer le Québec, mais on n’est pas des ennemis », a rappelé M. Legault en conclusion. Les quatre chefs ont lancé le même message en fin de soirée : celui de l’importance de l’implication des jeunes dans la vie politique. « La démocratie, c’est fragile », a rappelé M.

Couillard. Les 18-35 ans représentent 27,7 % de la population en âge de voter. Ils sont toutefois moins nombreux que leurs aînés à exercer leur droit de vote : avec de grandes variations d’une région à l’autre, le taux de participation des jeunes aux élections de 2014 a été d’à peine 50 % (le taux général de participation a été de 71,4 %). « Historiquement, les jeunes de 18 à 34 ans ont toujours moins voté, mais depuis une trentaine d’années, l’écart se creuse de plus en plus », notait le Directeur général des élections du Québec (DGEQ) en avril À cela, la directrice générale de l’INM, Julie CaronMalenfant, avait une réflexion proposée en début d’événement. « Ce n’est pas seulement que les jeunes s’intéressent à la politique, il faut que la politique s’intéresse aux jeunes. »

Enjeux Pourquoi des élections à date fixe? Les formations politiques québécoises composent pour la première ce 1er octobre 2018, avec le principe d’une élection à date fixe. Un changement qui a modifié la manière de mener la précampagne électorale, disent-ils. Avec l’adoption de la loi instaurant des élections à date fixe (en juin 2013), l’Assemblée nationale a enlevé aux commentateurs politiques un sujet de discussion récurrent et d’autant plus fertile qu’il s’appuyait sur des rumeurs : à quand les prochaines élections ? Finies, les conjectures ! À une variable près : il a fallu attendre le congrès des jeunes libéraux pour connaître la date exacte du déclenchement de la campagne (ce sera jeudi). Pour le reste, le 1er octobre 2018 est entouré sur le calendrier de tous les partis depuis plus de quatre ans. Ça n’a pas empêché quelques rumeurs de déclenchement hâtif, mais voilà : on y est. « Ça a clairement modifié notre façon de nous préparer et de mener la précampagne électorale, disait jeudi au Devoir un stratège caquiste. Ça fait un an qu’on a commencé la scénarisation de la campagne, ce qu’on voulait faire avant, ce qu’on fera durant les premiers jours. Quand tu peux prévoir — et même si on sait que bien des choses vont changer au cours de la campagne —, il y a des avantages stratégiques intéressants. »

«Ça a clairement modifié notre façon de nous préparer et de mener la précampagne électorale. Ça fait un an qu’on a commencé la scénarisation de la campagne, ce qu’on voulait faire avant, ce qu’on fera durant les premiers jours» déclarait ainsi un stratège caquiste. C’est là un constat que dressent aussi des stratèges péquiste et solidaire (les libéraux n’ont pas répondu). « Les avantages d’avoir une élection à date fixe dépassent largement les inconvénients », dit l’une. « Ça me semble plus juste pour tous les partis », ajoute l’autre. Professeur de science politique à l’Université Laval, Marc-André Bodet estime globalement qu’avoir une élection à date fixée d’avance « élimine une incertitude et un certain arbitraire dans le jeu politique, en plus de permettre aux partis d’opposition de mieux se préparer. Quand on pèse le pour et le contre, je pense que c’est un progrès ». Précampagne Les formations ont utilisé différemment cette nouvelle donne quand est venu le temps de planifier la précampagne estivale. « On a regardé ce qui s’est fait au fédéral en 2015 [la campagne avait été déclenchée le 2 août], et on a vu que le poids média des chefs avait augmenté de 30 % à cette époque, dit

le caquiste. C’est beaucoup. Ajouté au fait qu’on pense que ce n’est plus vrai que les gens sont complètement débranchés de l’actualité en été, on s’est dit que ça valait la peine d’être très présents tout l’été. » Annonces de candidatures faites au compte-gouttes, candidats disponibles pour réagir à l’actualité, la CAQ a cherché à occuper le plus d’espace possible. Son chef, François Legault, n’a pas pris de vacances (et il l’a claironné). Au Parti québécois, Jean-François Lisée a certes sillonné le Québec en début d’été, mais il s’est pour sa part accordé une pause ensuite. Il a rappelé cette semaine qu’il a cinq enfants qui vivent principalement en Europe, et que c’est « une saine habitude de vie » que de passer un peu de temps avec sa famille. « C’était aussi une façon de donner une pause aux Québécois, soutient une stratège péquiste. En été, l’intérêt des gens pour la politique n’est pas aussi fort, on parle un peu dans le vide. Alors on s’est dit qu’on n’allait pas brûler temps et énergies : on a choisi d’être plus discrets, tout en maintenant une activité sur le terrain, notamment avec Véronique Hivon [vice-chef désignée]. Puis, il y a eu la campagne de publicité la semaine dernière : on arrive en douceur. C’est l’avantage de la date fixe : on peut planifier ça. »

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À Québec solidaire, au-delà de la seule précampagne estivale, le fait d’avoir une élection à date fixe a permis différentes choses, indique une stratège du parti : travail sur l’organisation des associations locales à l’extérieur de Montréal, financement mieux structuré, recrutement de candidats en avance sur les autres partis (en début de semaine, il ne manquait qu’une quinzaine de candidats à confirmer pour QS, contre une trentaine pour les autres partis). « Il y a aussi un avantage dans l’élaboration de concepts [publicitaires ou de contenu], indique cette source. On va dévoiler ça bientôt, mais de savoir la date de l’élection permet de ne pas être pris au dépourvu, de bien articuler le message. » Désavantages Mais il n’y a pas que du bon non plus, notent les observateurs. Collègue de M. Bodet à l’Université Laval, Éric Montigny voit certes plusieurs bons côtés au changement législatif — notamment la possibilité pour les partis d’affiner leur stratégie préélectorale par rapport à celle de la campagne officielle (le message), de même que l’opportunité pour les partis de tester leur machine et les enjeux qu’ils jugent importants. « Mais on voit aussi avec le parti au pouvoir présentement qu’il y a un mélange des genres entre message gouvernemental et électoral, dit-il. On

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voit une série d’annonces qui font partie d’un plan coordonné sur plusieurs semaines. C’est très structuré, ça implique plusieurs ministres et on voit une intention de cibler des projets dans des circonscriptions qui vont être chaudes — comme l’annonce de l’ajout d’un toit au vélodrome de Bromont [dans la circonscription qui était le fief du libéral Pierre Paradis]. » Cette succession d’annonces par le gouvernement Couillard est aussi pointée du doigt par les trois stratèges interrogés. « Je suis pas mal sûr qu’on va se rendre compte après coup que le budget publicitaire du gouvernement a explosé dans les semaines précédant l’élection », pense l’un d’eux. Mais c’est peut-être là un point incontournable, ajoute Marc-André Bodet. « Dans un régime parlementaire, le vrai choix est toujours entre le statu quo [le parti au pouvoir] et les alternatives. Il faut que les électeurs y pensent bien avant d’opter pour une alternative et ses conséquences. Il faut donc donner les moyens au gouvernement de montrer ce qu’il a accompli. » Le DGEQ a déjà indiqué avoir demandé à son équipe « d’exercer une veille » concernant les dépenses préélectorales. L’analyse du portrait pourrait amener des recommandations de modifications à la Loi, a-t-il dit.


Politique Québécoise

Enjeux : Le Québec sous l’empire de l’essaimage politique…

Le système partisan est-il en train de voler en éclats? Les pièces se mettent en place sur l’échiquier politique à l’approche de la campagne électorale provinciale, et certaines d’entre elles ont changé de teinte de bleu. D’anciens députés, candidats ou conseillers du Parti québécois (PQ) ont fait savoir au cours des dernières semaines qu’ils défendront désormais les couleurs de la Coalition avenir Québec (CAQ). Un changement de camp qui s’explique en partie par les récents sondages, mais aussi par un réalignement probable des forces politiques au Québec, plaide un politologue.

Les annonces se sont succédé au cours de l’été. En juin, c’était la présentation de Christine Mitton, une ancienne attachée de presse de Jacques Parizeau et de Louise Harel, comme candidate de la CAQ dans Laval-des-Rapides. Presque au même moment, on que Manuel Dionne, l’ancien attaché de presse de Bernard Drainville, se joignait au cabinet du chef François Legault en tant que directeur adjoint des relations médias. Le mois suivant, c’était au tour de Martyne Prévost, une ancienne candidate péquiste, de retourner sa veste pour porter les couleurs de la CAQ. Puis, début août, l’ex-ministre péquiste Jean-François Simard confirmait qu’il fera partie de l’équipe Legault lors de la prochaine campagne électorale, lui qui avait signé en 2011 le manifeste de fondation de la CAQ, sans représenter le parti depuis. Les mouvements d’un parti à un autre ne sont pas

exceptionnels, et le PQ n’a pas le monopole des défections. On n’a qu’à penser aux ministres libéraux Gaétan Barrette et Dominique Anglade, deux anciens caquistes, ou à la candidate caquiste Marguerite Blais, une ancienne ministre libérale. Les nombreux départs d’exsouverainistes vers la CAQ, qui mène actuellement dans les sondages, soulèvent néanmoins d’intéressantes questions au sujet des forces en présence, note le professeur de science politique de l’Université Laval Éric Montigny. « Éclatement » en vue…

Pendant des décennies, la question de l’indépendance a été au coeur des campagnes électorales provinciales, mais ce ne sera pas le cas cette année, puisque le PQ a décidé de reporter le débat à 2022, fait remarquer le chercheur spécialisé dans l’analyse des partis politiques. « Traditionnellement, ce qui tenait le PQ ensemble, c’était le ciment de la souveraineté. Et comme il y a une érosion de ce ciment, il ne faut pas se surprendre de voir des gens qui se questionnent sur leur orientation politique. » M. Montigny croit que l’absence du clivage « ouinon » et la présence de quatre partis politiques pouvant récolter une part considérable du vote feront du scrutin du 1er octobre une élection déterminante, qui pourrait entraîner un « grand éclatement du système partisan québécois ». « Est-ce que nous sommes dans une période de transi-

tion ? Est-ce que le multipartisme va durer ? Ou estce qu’on va revenir à une configuration avec deux partis plus forts ? Ça va se décider le 1er octobre mais, manifestement, il y a un changement. » À son avis, la montée en puissance de la CAQ, vers qui plusieurs candidats affluent désormais, pourrait faire perdre au PQ son statut de parti dominant, ce qui constituerait un changement structurel rarissime. Selon le politologue, il faudrait remonter à la création du PQ en 1968 ou à la fondation de l’Union nationale en 1935 pour trouver des comparables dans l’histoire politique du Québec. Visions opposées Dans l’immédiat, le PQ préfère se concentrer sur ses propositions, sans évacuer complètement la souveraineté de son discours. « On ne tentera pas d’interpréter les raisons qui amènent des gens vers d’autres formations politiques », répond par courriel l’attachée de presse de l’aile parlementaire du PQ,

Valérie Chamula Pellerin, lorsqu’invitée à réagir aux départs récents d’anciens péquistes pour la CAQ. « Cela dit, les candidates et les candidats du Parti québécois sont des gens de conviction. Lors de la campagne électorale, nous allons proposer des solutions crédibles aux Québécois. » « Les souverainistes savent que nous nous sommes engagés à mener le Québec à son indépendance en deux mandats, ajoute-t-elle. François Legault, de son côté, a clairement énoncé son intérêt fédéraliste. Il a même dit que le débat sur la question nationale était clos, alors que cette décision appartient démocratiquement à la population du Québec. Les Québécois feront leur choix ! » La CAQ, elle, ne voit pas de problème avec le fait d’accueillir des candidats du PQ, souvent qualifié de « vieux parti », alors qu’elle souhaite incarner le changement. « La CAQ existe depuis six ans et demi. La plupart des gens qui y militent ont donc déjà

Élections du 1er Octobre 2018

milité dans un autre parti, que ce soit l’ADQ, le PQ, le PLQ ou encore un parti au fédéral », fait valoir le porte-parole Ewan Sauves, en soulignant que la CAQ est une « véritable coalition ». « Les Québécois ne veulent plus parler de souveraineté, poursuit-il. Ils veulent une équipe qui travaille ensemble pour faire plus et faire mieux pour le Québec d’abord, mais à l’intérieur du Canada. Après 15 années de gouvernement libéral, les électeurs constatent que seule la CAQ répond à leurs vraies préoccupations. » Selon le professeur Montigny, la CAQ est effectivement une coalition, dont le défi sera de faire preuve de cohésion, malgré la diversité des candidats présents autour de la table. « Si des gens se joignent au parti en ne partageant pas les fondements de cette coalition, il peut y avoir des problèmes », note-t-il.

Ne restez pas spectateurs! Assurez-vous que vous êtes inscrits sur les listes électorales 12

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Politique Québécoise

Il fallait s’y attendre!

La CAQ lance la laïcité dans la campagne électorale… La Coalition avenir Québec (CAQ) a tenté de relancer le débat sur la laïcité de l'État, quelques heures seulement avant le déclenchement des élections provinciales. Accusant les libéraux de « pelleter le dossier par en avant », la CAQ a promis de déposer une loi proclamant la laïcité de l'État la première année d'un éventuel mandat.

« Les libéraux, depuis 10 ans – depuis le rapport BouchardTaylor – ont refusé d’aborder cette question-là et d’enfin mettre des balises qui sont très claires », a déploré le député de Borduas, Simon Jolin-Barrette en entrevue à Gravel le matin. « Nous, à la CAQ, c’est ce qu’on s’engage à faire. » Il accuse les libéraux de vouloir noyer le poisson avec leur loi favorisant le respect de la neutralité religieuse de l’État depuis son adoption en octobre 2017. Cette loi permet le port de signes religieux par les employés de l’État en position d’autorité. Elle ordonne toutefois que les services de l’État doivent être dispensés et reçus à visage découvert. «C'est une coquille vide qui ne règle absolument pas la question des signes religieux au niveau de l’administration publique, au niveau des personnes en autorité» affirme Simon Jolin-Barrette La CAQ estime que les Québécois souhaitent régler cette question qui revient péri-

odiquement dans l’actualité et elle tient à rappeler sa position à l’aube du déclenchement des élections. Laïcité et signes religieux Un gouvernement de la CAQ abrogerait cette loi pour déposer un projet de loi interdisant le port de signes religieux aux personnes en position d’autorité – juges, policiers, gardiens de prison et procureurs – et aux enseignants. « On se retrouve avec le consensus de Bouchard-Taylor plus les enseignants, puisque ceux-ci se retrouvent en position [d’autorité] avec les enfants, plaide-t-il. Et, l’éducation, dans le fond, c’est le prolongement de la notion de l’État au niveau de la laïcité. »

des employés de la fonction et les services devraient s’y

Laïcité contre neutralité

Le rapport Bouchard-Taylor Le rapport Bouchard-Taylor a été publié en 2008 par le philosophe Charles Taylor et le sociologue Gérard Bouchard, qui se sont penchés sur la question des accommodements consentis aux minorités culturelles et religieuses. Le rapport proposait d'interdire le port de signes religieux aux magistrats, aux procureurs de la Couronne, aux policiers, aux gardiens de prison, ainsi qu'aux présidents et vice-présidents de l'Assemblée nationale. Charles Taylor a toutefois indiqué, en février 2017, qu'il n'endossait plus cette recommandation.

Le port de symboles religieux « asservissant la femme » serait également interdit à l’ensemble

de l’État dans la Charte québécoise des droits et libertés.

effectuer à visage découvert. Un gouvernement caquiste enchâsserait également la laïcité

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Avec leur loi, les libéraux ont choisi la neutralité de l’État plutôt que la laïcité de l’État, selon le député de Borduas. « La neutralité de l’État […] c’est l’État qui ne prend pas parti en faveur d’une religion ou d’une autre, tandis que la laïcité de l’État, c’est dire que l’État est laïque et on sépare le religieux du politique », précise-t-il. En s’appuyant sur le consensus dégagé autour du rapport Bouchard-Taylor en 2007 et l’histoire récente du Québec, la CAQ fait le pari que les Québécois sont en faveur de la laïcité de l’État. «Avec la Révolution tranquille,

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les Québécois ont décidé de faire une véritable séparation entre le religieux et l’État» ajoute Simon Jolin-Barrette « Là, on se retrouve 50 ans plus tard où le débat est ramené pour toutes sortes de considérations et je pense que c’est important de légiférer une bonne fois pour toutes pour régler la situation et qu’on puisse enfin passer à autre chose », poursuit-il. Loin de diviser la population, une législation sur la laïcité de l’État québécois aurait pour effet d’assainir le climat social. « Je pense que de clarifier la situation et d’avoir un cadre législatif clair, ça va permettre de simplifier où loge la société québécoise », conclut-il.


Politique fédérale

Maintenant que la page Martine Ouellet est tournée…

Un an pour recréer le Bloc québécois

Le Bloc québécois est déterminé à en finir avec la crise qu’il traverse depuis l’hiver. Le parti remet en question son programme, son image, et même son nom, en plus de devoir se choisir un nouveau chef. Une transformation qui doit se terminer à moins d’un an des prochaines élections fédérales, en octobre 2019.

« Ce n’est pas si serré pour partir sur de nouvelles bases. S’il y a une mobilisation dans toutes les circonscriptions, ça ne posera pas de problème », déclare l’ancien chef de la formation indépendantiste, Gilles Duceppe. Réunis en conseil général il y a quelques jours, quelque 200 militants bloquistes ont donné leur aval au « chantier de refondation », proposé par l’aile jeunesse de leur parti, qui doit se mettre en branle cet automne. Si M. Duceppe avoue ne pas se ranger derrière l’idée de changer le nom ou le logo du Bloc québécois, il se dit « favorable » au vaste remue-méninge. « Le principal, c’est le contenu, c’est de retrouver un programme de parti cohérent comme celui qu’on avait jusqu’à tant que les décisions de Martine Ouellet changent la donne », dit-il. Si la formation est prête à faire table rase pour mettre le chaotique chapitre de l’ex-chef démissionnaire derrière elle, son orientation indépendantiste et son mandat de défense des intérêts du Québec à Ottawa, eux, ne sont pas négociables. Ces enjeux avaient scindé le parti en deux « clans » cet hiver, initiant un bras de fer entre les partisans de Mme

Ouellet et ses détracteurs.

« Les gens ont décidé de regarder les choses en profondeur, de tout réanalyser en mettant tout sur la table, note le chef parlementaire du parti, Xavier Barsalou-Duval. C’est une réflexion qui est pertinente. Mais personnellement, je suis très attaché au nom du Bloc québécois. » À partir de la mi-octobre — une fois les élections provinciales terminées —, colloques régionaux et consultations en ligne seront organisés à travers le Québec pour rameuter les forces indépendantistes. Le chantier culminera par un congrès extraordinaire en janvier (aucune date n’a encore été fixée) afin d'entériner les propositions. La course à la chefferie sera ensuite lancée pour se clore avec un scrutin les 8 et 9 mars. Les bloquistes en règle obtiennent un laissez-passer pour livrer leurs idées sur la nouvelle mouture du parti, mais les citoyens souhaitant se joindre à la refondation devront se procurer une carte particulière. La proposition n’est toutefois pas passée comme lettre à la poste samedi, faisant sourciller une partie des délégués. Certains ont trouvé la démarche « suicidaire » à l’approche des élections fédérales de 2019, craignant même la disparition du Bloc tel qu’ils le connaissent. « On peut s’améliorer, ajouter des annexes à une fondation à bâtir, mais je ne pense pas qu’on doive se redéfinir en entier au risque de ne plus se retrouver », s’inquiète le député de Terrebonne, Michel

Boudrias. Celui qui a réintégré les rangs du Bloc après le départ de Mme Ouellet, en juin, a néanmoins appuyé le projet samedi, séduit par sa « souplesse ». Main tendue Les artisans de la refondation n’ont pas caché leur volonté de ramener dans le giron de la formation les cinq députés dissidents formant désormais Québec debout. Dans la foulée des déchirements à propos de Martine Ouellet, sept des dix élus siégeant à Ottawa avaient claqué la porte. Depuis, deux ont fait marche arrière — M. Boudrias et le député de Mirabel, Simon Marcil. « Je veux leur retour, a lancé devant les militants la présidente du Forum jeunesse, Camille Goyette-Gingras. Je serais extrêmement heureuse de retrouver mes dix députés. » Aux yeux du nouveau président du Bloc québécois, Yves Perron, le projet de refondation

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est « un gros plus » pour les convaincre de rentrer au bercail. « J’ai beaucoup d’espoir qu’on va finir par travailler ensemble dans le même parti », dit-il en entrevue avec Le Devoir, ajoutant que des discussions se poursuivent. Est-ce que la refondation a été évoquée lors de ces pourparlers ? « Je ne veux pas trop embarquer là-dedans, mais le pouls était positif, répond M. Perron. On verra, mais la balle est dans leur camp. » Chez Québec debout, on observe « de loin, sans vouloir s’immiscer », révèle le chef par intérim de la nouvelle formation, Rhéal Fortin. Si le Bloc a intégré dans sa refondation les « quatre mêmes grands objectifs que nous », le député de Rivière-du-Nord ferme la porte à un retour des dissidents, pour l'instant. « Aujourd’hui, la réponse est non. Mais éventuellement, Dieu seul le sait », conclut-il. Pour sa part, Gilles Duceppe espère que la proposition de

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réunification encouragera les députés à regagner les rangs de leur ancien fief à Ottawa, puisqu’ils auront désormais le « champ libre pour proposer de modifier le programme comme ils l’entendent ». Unification Mario Beaulieu (l’actuel chef par intérim) a par ailleurs cédé ses fonctions de président à M. Perron, qui est aussi président de l’association bloquiste dans Berthier-Maskinongé. Il était la figure de proue du mouvement demandant le départ de Martine Ouellet. Gilbert Paquette, un fidèle de l’ancienne chef ayant démissionné en juin, a conservé son poste de vice-président. « C’est un pas en avant dans la réunification du Bloc », avait réagi au micro Mario Beaulieu, provoquant une vague d’applaudissements. D’autres détracteurs de l’ancienne chef ont aussi obtenu des postes au sein du Bureau national, sorte de conseil d’administration du parti.


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Politique fédérale

Élections 2019

Justin Trudeau candidat libéral dans Papineau Sans surprise, Justin Trudeau a été investi dimanche comme candidat libéral de la circonscription montréalaise de Papineau en vue des élections fédérales de 2019. M. Trudeau représente ce comté depuis le 14 octobre 2008. Il a été réélu en 2011 et en 2015. La circonscription de Papineau est une forteresse libérale. Elle ne leur a échappé qu’une seule fois, en 2006, lorsque la bloquiste Vivian Barbot avait défait le ministre Pierre Pettigrew. M. Trudeau a profité de l’assemblée pour lancer une ode à son comté et à ses électeurs, allant jusqu’à dire que ce sont eux, et non son père Pierre Trudeau (premier ministre du pays de 1968 à 1979 et de 1980 à 1984), qui lui ont véritablement appris à faire la politique. « C’est en apprenant à se connaître que j’ai découvert le genre de politicien que je voulais être et que je devais être », leur a-t-il lancé.

Le chef libéral a aussi dit qu’il recommandait aux candidats à la députation de « suivre le modèle de Papineau », les exhortant à rencontrer les gens, à frapper aux portes, à poser les bonnes questions et à écouter les réponses.

« C’est en rencontrant les parents […] que j’ai compris les besoins des familles de la classe moyenne et de celles qui travaillent fort pour en faire partie, a-t-il souligné. C’est en jasant avec les retraités […] que j’ai saisi l’importance de soutenir les aînés. C’est en échangeant avec les jeunes immigrés […] que j’ai réalisé les défis de l’intégration. » Même s’il s’est vanté d’être un politicien positif, M. Trudeau n’a pu s’empêcher de formuler quelques vannes négatives envers le Parti conservateur, « qui est toujours le même parti de Stephen Harper ». « C’est le parti qui, pour obtenir des gains électoraux, exploite la peur et les inquiétudes bien réelles des Canadiens. C’est le parti qui pense erronément que si on donne davantage aux riches,

l’économie va bien se porter pour tout le monde. C’est le parti qui se méfie de la diversité qu’abrite notre pays et accepte les commentaires désobligeants à son sujet », a-t-il énuméré. M. Trudeau n’a pas jugé bon de

glisser un mot sur ses autres adversaires néo-démocrates ou bloquistes. Il en a aussi profité pour tester ce qui semble être les prochains slogans électoraux du parti. « Ensemble, faisons du Canada

un pays meilleur pour tous les Canadiens », s’est-il exclamé sous les applaudissements nourris de ses partisans.

«L'intolérance n'a pas sa place au Canada» Trudeau s'explique après un vif échange avec une citoyenne sur les demandeurs d'asile Justin Trudeau estime justifiée la façon dont il a rabroué une citoyenne qui l'interpellait dernièrement, sur les coûts liés à l'accueil des demandeurs d'asile. Lors d'un point presse en début de semaine écoulée, le premier ministre a expliqué que l'intolérance n'a pas sa place au Canada. « Il y a des gens qui continuent de créer un sentiment de peur […] pour des gains politiques », a-t-il déploré. « Jamais on ne devrait accepter la peur et la division comme un outil politique. Vouloir réunir les gens, c’est ce qui rend

le Canada fort », a-t-il poursuivi. M. Trudeau a par la suite voulu rassurer les Canadiens en réaffirmant que les règles continuent de s’appliquer à chaque nouvel arrivant, quelle que soit la manière dont il entre dans le pays. « Je vais toujours souligner fermement que [l’intolérance] n’a pas sa place dans le discours politique au Canada », a-t-il martelé. « Votre racisme n'a pas sa place ici »

Jeudi, une citoyenne l'avait apostrophé lors d'un rassemblement à Sainte-Anne-de-Sabrevois, près de Saint-Jean-sur-Richelieu. « Quand allez-vous nous remettre les 146 millions qu’on a payés pour vos immigrants illégaux? », questionnait la femme d’un certain âge. Le premier ministre lui a alors répondu en haussant fortement le ton : « cette intolérance par rapport aux immigrants n’a pas sa place au Canada […] Vous n’avez pas votre place ici », a-t-il pour-

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suivi. « Le Canada a été bâti par des vagues d’immigration qui ont été accueillies par les Premières Nations, qui nous ont montré comment bâtir une société forte », a-t-il ajouté, avant de lancer : « Madame, votre racisme n’a pas sa place ici ». La scène a été filmée et mise en ligne sur différentes plateformes. Elle a suscité de nombreux commentaires sur les réseaux sociaux. En mars, les ministres québécois

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de l’Immigration, David Heurtel et des Relations canadiennes, Jean-Marc Fournier, avaient demandé à Ottawa le remboursement de la totalité des montants engagés pour l’accueil des réfugiés en 2017. Par la suite, le gouvernement fédéral avait accepté d'étudier cette demande et avait créé un groupe de travail pour se pencher sur la question. Les ministres québécois estimaient alors que ce montant s’élevait à 146 millions de dollars.


Conjoncture

La bonne santé financière du Québec par les chiffres

1,45 milliard de $ de revenus supplémentaires! Les estimations préliminaires pour l’année financière 2017-2018 affichent une amélioration du solde budgétaire de près de 1,5 milliard de dollars par rapport à ce qui était prévu en mars 2018.

L’« amélioration » du solde budgétaire de près de 1,5 milliard par rapport à ce qui était prévu dans l’ultime budget Leitão (mars 2018) s’explique notamment par une augmentation des revenus autonomes (+834 millions) — dont des revenus supérieurs à l’impôt des particuliers et aux impôts des sociétés totalisant 617 millions —, en raison de la « bonne performance » de l’économie québécoise. Un surplus de 2,3 milliards $ L’année financière 20172018 se soldera par un surplus de 2,3 milliards de dollars, selon les nouvelles estimations préliminaires du ministère dirigé par Carlos Leitão.

D’autre part, le gouvernement québécois a pu compter sur des revenus supplémentaires de 357 millions de dollars de la part des sociétés d’État. Parmi elles, Hydro-Québec — et par ricochet, son actionnaire, l’État québécois — ont tiré profit des températures froides des premiers mois de 2018 et d’une hausse des exportations d’électricité. En revanche, le ministère des Finances a dû faire face à une baisse non prévue des transferts fédéraux de 302 millions de dollars. Les organismes publics ont aussi dépensé 568 millions de dollars de moins que ce qui était planifié. Bref, l’année financière 2017-2018 se soldera par un surplus de 2,3 milliards de dollars, selon les nouvelles estimations préliminaires. Le gouvernement québé-

cois disposera de 950 millions de dollars supplémentaires par année, indique également le rapport préélectoral sur l’état des finances publiques du Québec. Prévisions maintenues

Après une hausse de 3,0 % en 2016, le produit intérieur brut (PIB) réel au Québec se tassera à 2,1 % en 2018, à 1,7 % en 2019 et à 1,5 % en 2020, prévoit le ministère des Finances. « Malgré la montée des tensions protectionnistes dans plusieurs régions au cours des derniers mois, la croissance des exportations se poursuivra, soutenue par la bonne tenue des économies des principaux partenaires commerciaux du Québec », souligne-t-il. Les risques pesant sur l’économie du Québec demeurent : un ralentissement économique mondial généralisé ; un resserrement plus rapide que prévu des politiques

monétaires dans le monde ; une montée des restrictions du commerce à l’échelle mondiale ; une évolution des prix du pétrole différente de celle prévue ; un ralentissement plus marqué du secteur résidentiel canadien. En conférence de presse, la vérificatrice générale du Québec, Guylaine Leclerc, a d'ailleurs qualifié de « plausibles » les prévisions relatives au cadre financier et à la dette retenues par le

gouvernement libéral pour les années financières 2018-2019, 2019-2020 et 2020-2021. « Étant donné que les prévisions se fondent sur des hypothèses concernant des événements à venir, les résultats réels seront différents de l’information présentée dans le rapport préélectoral, et les écarts pourraient être significatifs », précise-t-elle.

Que faire de cet argent? Il est important de débattre de ces choix en campagne électorale. La réserve de stabilisation, un coffre au trésor où s’accumulent les surplus budgétaires, atteindra 8,6 milliards de dollars en 2023. Estil prudent ou exagéré que le gouvernement maintienne une telle réserve? Est-il approprié de maintenir un strict contrôle de la croissance des dépenses en santé et en éducation, notamment, et de con-

tinuer à voir cette réserve se gonfler? Le Québec a déjà fait le choix de détourner certains revenus vers un fonds dédié, le Fonds des générations. C’est près de 3 milliards de dollars qui vont au Fonds pour réduire la dette à long terme. Estil correct d’avoir un autre fonds en parallèle, la réserve de stabilisation, et d’y accumuler des som-

mes aussi importantes?

Colombie-Britannique ».

La vérificatrice générale explique que les provisions de 550 millions de dollars représentent 0,5 % des dépenses consolidées, ce qui place le Québec « dans la fourchette constituée par les marges de prudence incluses dans les prévisions budgétaires du gouvernement du Canada et des gouvernements de l’Ontario et de la

Nous avons beaucoup discuté, dans les dernières années, de la pertinence de garder le Fonds des générations. La question se pose encore en période électorale : doit-on encore allouer de 2,5 à 3 milliards au Fonds des générations, tous les ans?

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Donc, dans ce contexte, compte

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tenu que le gouvernement a déjà de bonnes provisions pour prudence et que ses projections tendent à sous-estimer ses revenus à venir, doit-on vraiment maintenir une réserve de 6, 7, voire 8 milliards de dollars? Qu’en pensezvous?


Conjoncture

Les comptes du gouvernement sont bons

estime Guylaine Leclerc, vérificatrice générale Le cadre financier du gouvernement Couillard, qui affiche des surplus plus importants que prévu pour les trois prochaines années, tient la route, conclut la vérificatrice générale Guylaine Leclerc.

marge de manoeuvre lui permettait alors d'annoncer que sa promesse sur la gratuité de la garderie pour les enfants de 4 ans serait réalisée dès la première année d'un prochain mandat libéral.

Québec dégage des surplus annuels plus élevés de 950 millions de dollars par rapport à ses prévisions. Il doit ainsi puiser beaucoup moins, et seulement cette année d'ailleurs, dans sa réserve de stabilisation pour arriver à l'équilibre budgétaire. Cette réserve, constituée des surplus accumulés année après année, dépasse maintenant les six milliards de dollars.

« Nous avons recensé certains facteurs qui peuvent affecter la réalisation des prévisions, mais leur impact n'est pas suffisamment significatif pour modifier notre conclusion », note Mme Leclerc. Elle précise que certains de ses facteurs auraient pour effet d'augmenter les surplus. « Cependant, comme des incertitudes non négligeables liées à l'économie pourraient annuler en grande partie cet effet positif, nous maintenons notre conclusion quant à la plausibilité des prévisions », affirme-t-elle.

« Pour l'année 2018-2019 à 2020-2021, les prévisions économiques ainsi que les prévisions du cadre financier et de la dette sont plausibles dans tous leurs aspects significatifs », écrit Guylaine Leclerc dans son tout premier rapport préélectoral sur l'état des finances publiques. Grâce à son éclairage, un prochain gouvernement ne pourrait déclarer qu'il y a un trou ou une impasse dans les finances publiques, un refrain bien connu au lendemain des élections. Québec a conclu l'année 2017-2018 avec un surplus largement supérieur à ses prévisions en raison d'une meilleure performance de l'économie : 2,3 milliards, comparativement aux 850 millions anticipés. Le premier ministre Philippe Couillard l'avait confirmé dans une récente entrevue à La Presse, sans toutefois donner de chiffres. Cette

Québec table sur une croissance du PIB réel de 2,1% en 2018, 1,7% en 2019, 1,5% en 2020 et 1,3% en 2021. « Les principales prévisions économiques » du gouvernement « sont comparables à celles du secteur privé puisqu'elles se situent à l'intérieur d'une fourchette acceptable », selon la vérificatrice générale. Elle conclut que les prévisions de revenus sont « plausibles », donc « dignes de foi », pour les trois prochaines années. Il en va de même pour les prévisions en matière de dépenses. Le gouvernement prévoit une croissance moyenne des dépenses - excluant le service de la dette - de 3,7% en moyenne au cours de cette période (dont 4%

pour la Santé et 4,5% pour l'Éducation). C'est supérieur à la moyenne pour les années 2011-12 à 2016-17 (2,8%). La VG salue la marge de prudence d'environ 500 millions que le gouvernement s'est ménagée afin de faire face à des dépenses imprévues. Il y a toujours un différend avec le bureau du vérificateur général et le ministère des Finances au sujet de l'application d'une norme comptable sur les paiements de transfert. L'actuelle pratique du gouvernement « a eu pour effet une surévaluation des surplus de 215 millions au 31 mars 2017 » et également une « sous-évaluation de la dette » de 9,6 milliards, selon la VG. Elle n'a pas tenu compte de cet élément dans l'appréciation générale du cadre financier du gouvernement. La dette brute s'élève à 205 milliards de dollars. Son poids par rapport au PIB doit diminuer dans les prochaines années, passant de 47,5% cette année à 45,1% en 2020-21. Le gouvernement verse 2,5 milliards cette année dans le Fonds des générations pour réduire le poids de cette dette - 2,7 milliards en 2019-20 et près de 3 milliards en 2020-21. Après le versement au Fonds, le budget est équilibré en 2018-19, affiche un léger surplus de 14 millions en 2019-2020 et un plus important, 471 millions, en 2020-21. «Bon» pour le Québec, dit

Couillard Le rapport qu'a déposé lundi la vérificatrice générale démontre que l'équipe libérale est l'une des meilleures de l'époque moderne du Québec en ce qui a trait à la gestion des finances publiques et de l'économie, a déclaré Philippe Couillard. De Scott, en Beauce, où il réunissait une centaine de ses candidats, trois jours avant le déclenchement des élections, M. Couillard a plaidé pour qu'on ne brise pas l'élan des libéraux. «C'est des bonnes nouvelles pour le Québec», s'est-il réjoui. «Il ne faut surtout pas briser cet élan. Il faut aller encore plus loin, [...] parler de la vie des gens, de ce qui peut rendre leurs vies meilleures, maintenant qu'on s'est donné les moyens de parler de ça aussi.»

M. Couillard a rappelé que c'est son gouvernement, par souci de transparence en 2015, qui a donné le mandat au Vérificateur général de dresser désormais le portrait objectif des finances publiques du Québec avant la tenue de chaque élection générale. Il s'agit donc d'une première, un geste qualifié par Mme Leclerc «d'important exercice démocratique». Le premier ministre a aussi martelé que, grâce à son gouvernement, le Québec est maintenant mieux «armé» pour faire face à l'incertitude qui règne sur les marchés mondiaux. «Si on n'avait pas fait cet exercice d'équilibre [budgétaire], on n'aurait pas eu les moyens de donner aux entreprises ce qu'il faut pour affronter cette période d'incertitude», a-t-il affirmé.

Cadre financier des partis politiques

Sur un pied d'égalité!... Tous les partis politiques ont maintenant les mêmes assises pour bâtir leur Réunis en caucus à Scott, en Beauce, les libéraux se sont félicités des conclusions de la vérificatrice générale. « Ce n'est pas arrivé par hasard, ce sont des années de travail constant », a déclaré le premier ministre Philippe Couillard. À la Coalition avenir Québec, le

porte-parole en matière de finances, François Bonnardel, ne fait pas grand cas de ce rapport pour le moins positif. « Je ne suis pas surpris du résultat, affirme-t-il. J'ai vu ce film dès le début du mandat quand on a eu une compression des dépenses majeure, en dessous des coûts de système. [...] Soudainement, on a les bonbons électoraux et une croissance additionnelle qui a commencé à augmenter. »

Aux dires du Parti québécois, la vérificatrice générale a confirmé « l'austérité que les Québécois ont vécu ces dernières années ». Pire, selon le PQ, cet examen illustre un manque à gagner de 868 et de 739 millions de dollars en 20192020 et 2020-2021, si Québec reconduit les programmes gouvernementaux. Dans le cas contraire, cela se traduirait en théorie par d'autres compressions, pense le porte-parole péquiste en

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matière de finances, Nicolas Marceau. «Tout ce qu'elle [la vérificatrice générale] dit, c'est que les additions sont correctes [...] et que les prévisions de croissance économique correspondent à ce que les économistes pensent qu'il va arriver, mais elle ne fait pas d'interprétation de ces chiffres» a estimé Nicolas Marceau, porteparole en matière de finances et ex-ministre des Finances du Parti

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québécois En 2015-2016, la croissance des dépenses de missions, c'est-à-dire les champs d'activité fondamentaux d'un gouvernement, a chuté à 1,1 %, puis a rebondi à 5,9 % l'année dernière. Elle s'établira en moyenne à 3,7 % d'ici 20202021.


Argent

Ce que nous coûte vraiment l’évasion fiscale Le paradis des uns peut engendrer l’enfer des autres. La majorité des entreprises impliquées dans la déforestation au Brésil et dans la surpêche dans le reste du monde utilise des pavillons de complaisance et des flux financiers opaques liés aux paradis fiscaux.

Une étude récemment mise en ligne par Nature Ecology & Evolution montre que 70 % des navires impliqués dans la pêche illégale ou non réglementée sont enregistrés dans des paradis fiscaux. Ces vaisseaux ne représentent que 4 % de la flotte enregistrée sous des pavil-

lons de complaisance. L’enquête montre aussi qu’entre 2000 et 2011, 68 % des capitaux étrangers investis dans neuf grandes compagnies de production de soya et de viande bovine dans des zones coupées à blanc de la forêt amazonienne du Brésil ont transité par un ou plusieurs territoires à la fiscalité quasi inexistante et opaque. Au total, sur les quelque 45 milliards en capitaux étrangers transférés là, environ 20 milliards l’ont été par cette mécanique réputée pour encourager l’évasion fiscale.

70 % des navires impliqués dans la pêche illégale ou non réglementée sont enregistrés dans des paradis fiscaux. « L’objectif de cet article est de regarder les paradis fiscaux avec un nouvel oeil, en regardant leurs liens possibles avec l’environnement », résume Alice Dauriach, une des six cosignataires de l’enquête diffusée lundi. L’assistante de recherche travaille au sein du groupe sur la dynamique de l’économie et l’environnement (Global Economic Dynamics and the Biosphere, ou GEDB) rattaché à l’Académie royale des sciences de Suède. Secrets des îles Les paradis fiscaux abritent et font circuler des capitaux internationaux non réglementés d’une économie mondiale souterraine. Il en existe des dizaines allant des îles tropicales aux plus petits États européens. L’Agence du revenu du

Canada les définit comme des zones sans impôts (ou presque), assurant le secret bancaire et fiscal à leurs clients. Ces généreuses mesures opaques servent surtout à soustraire des revenus à l’impôt ou à blanchir de l’argent. Des enquêtes journalistiques ou universitaires lèvent parfois le voile sur certaines réalités de cette économie parallèle. Les mégafuites de données des Panama Papers et des Paradise Papers ont récemment servi à établir certains liens entre le financement opaque et certains dommages environnementaux, par exemple pour rapprocher l’évasion fiscale liée aux îles Vierges britanniques et la production de l’huile de palme en Indonésie, une activité menant là aussi à la déforestation.

68 % des capitaux étrangers impliqués dans la déforestation au Brésil ont transité par un ou plusieurs territoires à la fiscalité quasi inexistante et opaque. L’enquête suédoise utilise plutôt des données publiques, notamment en provenance de la banque centrale du Brésil. Voici d’autres révélations de cette étude pionnière : Pêcheries Environ le tiers de la pêche commerciale à grande échelle est considérée comme de la surexploitation par l’ONU. Cette exploitation totaliserait entre 11 et 26 millions de tonnes de captures annuelles illégales ou non déclarées. Cette surpêche menace la biodiversité et la sécurité alimentaire de plusieurs régions du globe. Les pavillons de complaisance des navires pratiquant cette activité dévastatrice sont surtout fournis par le Belize et le Panama. Des inscriptions proviennent aussi du Costa Rica, du Liberia, des Bahamas et d’une douzaine d’autres États. Foresteries L’enquête documente la provenance des capitaux de neuf compagnies travaillant dans le secteur du soja et du boeuf dans la forêt amazonienne du Brésil. Ces deux secteurs d’activités fermières contribuent à la déforestation. En fouillant dans les données de la banque centrale du Brésil, les chercheurs ont retracé environ 35 milliards de capitaux étrangers transférés entre octobre 2000 et août 2011. De ce total, 24 milliards ont transité par un paradis fiscal, en fait 68 % du lot. Une des compagnies étudiées a reçu 90 % de son financement des îles Caïman. Par comparaison, les estimations laissent croire qu’à peine 17 % des autres investissements étrangers au Brésil transitent par cette économie souterraine. Que faire ? L’explication précise et éprouvée du recours à ce stratagème financier reste difficile à valider. Par sa nature même, la mécanique financière paradisiaque demeure secrète et opaque.

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« Nous avons plus d’idées concernant la pêche, poursuit Mme Dauriach. Des études ont montré que les paradis fiscaux peuvent servir à rendre plus opaque l’identité des propriétaires de certains navires. » De même, l’hypothèse évidente de l’évasion fiscale comme objectif de ces activités de pêche et de production agricole devra être documentée de manière précise et indubitable. Cette stratégie pour réduire les impôts dus est par contre bien documentée dans d’autres secteurs. Le groupe GEDB souhaite que des recherches élargissent l’enquête aux activités minières, par exemple, ou au commerce illégal des espèces menacées de disparition. Le besoin de constituer des banques de données fiables saute aux yeux. « Plus il y a de données, plus il y a de transparence, plus on peut faire de recherches, résume la spécialiste. Cette transparence pourrait venir par exemple en forçant les entreprises multinationales à faire des déclarations d’activités financières pour chaque pays où elles sont actives au lieu de présenter des sommes globales. » Reste à considérer comment lutter contre ces pratiques. Les États sont interpellés par les chercheurs pour prendre en compte la question environnementale dans leur lutte contre l’évasion fiscale. « Dans le débat international actuel sur les paradis fiscaux, il faut aussi penser à la dimension environnementale, dit Alice Dauriach. Nous proposons donc qu’une organisation internationale, liée à l’ONU par exemple, puisse conduire des enquêtes plus larges sur le rôle des paradis fiscaux dans la dégradation de l’environnement. »

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Voyages

Ce que nous coûte vraiment l’évasion fiscale

Ottawa ne se donne pas les moyens de lutter contre l’évitement fiscal Le gouvernement canadien ne se donne pas les moyens d’attraper les personnes fortunées et les grandes entreprises qui rusent avec l’impôt, disent ceux-là mêmes qui sont chargés de cette mission à l’Agence du revenu du Canada (ARC).

Seulement 16 % des fiscalistes de l’ARC estiment qu’elle « dispose actuellement de capacités de vérification adéquates pour s’assurer que les lois fiscales [sont] appliquées équitablement partout au pays », a rapporté vendredi leur syndicat, l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC), sur la base d’une consultation réalisée auprès d’un large échantillon d’entre eux. Disant faire encore les frais des compressions budgétaires passées alors que les contribuables délinquants qu’ils sont censés traquer disposent de moyens financiers et professionnels « illimités pour exploiter en leur faveur le flou juridique et les zones grises du commerce international », huit répondants à la consultation sur dix pensent notamment que « la formation

et la technologie de l’ARC ne sont pas adaptées à la complexité des stratagèmes d’évitement fiscal ». Pire qu’on ne le croit! « Nos membres sont particulièrement bien placés pour juger la situation de l’intérieur, et ce qu’ils voient est très inquiétant », a déclaré en entretien téléphonique au Devoir la présidente de l’IPFPC, Debi Daviau.

Apparemment plus encore que ne le croit déjà la population canadienne. Un peu moins de 80 % des 1000 Canadiens interrogés le mois dernier par la firme de sondage Environics à la demande de l’IPFPC (marge d’erreur de 3 %, 19 fois sur 20) se sont dits d’accord avec l’affirmation qu’il « est plus facile pour les entreprises et les particuliers fortunés d’échapper ou d’éviter les responsabilités fiscales que pour les Canadiens moyens ». Or, cette proportion grimpe à 90 % parmi les répondants à la consultation réalisée auprès des membres de

l’IPFPC travaillant pour l’ARC. Réalisée du 20 février au 6 mars auprès des presque 12 000 membres du groupe Vérification, finances et science de l’ARC, la consultation de l’IPFPC consistait en un sondage Internet auquel ont répondu 2170 personnes, pour un taux de réponse de 19 %. Ne suivant pas les méthodes reconnues en matière, entre autres, d’échantillonnage, de pondération des résultats et de marges d’erreur, elle ne peut pas être considérée comme un sondage scientifique. Son dévoilement arrive alors que la négociation de l’actuelle convention collective s’est conclue récemment et que celle de la prochaine commencera à l’automne ou au début de 2019. Ingérence politique Les lacunes à l’ARC découlent en grande partie des compressions budgétaires des années de gouvernement conservateur de Stephen Harper, explique Debi Daviau. Ses successeurs libéraux ont bien réinjecté des

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ressources financières depuis trois ans, mais le budget annuel de l’ARC reste encore à court de 500 millions, en dollars constants, par rapport à ce qu’il était en 2012-2013. Des équipes d’enquête spécialisées qui avaient été démantelées n’ont, par exemple, jamais été reconstituées. Ce manque à gagner est « insensé », dit l’IPFPC, quand, selon les données du ministère des Finances, « chaque dollar investi dans la lutte contre l’évasion fiscale internationale et les stratagèmes d’évitement fiscal sophistiqués rapporte 10 $ ». Presque la moitié des répondants à la consultation menée à l’ARC (45 %) disent que « l’ingérence politique compromet la capacité de l’ARC à réaliser son mandat ». Cette affirmation fait notamment référence à l’immense pouvoir d’influence auprès des élus des grandes entreprises et des riches particuliers lorsqu’on envisage de mettre un terme à certains de leurs privilèges fiscaux. Or, estiment plus de 80 % des répondants, « les crédits d’impôt, les exonérations et les

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échappatoires fiscales profitent démesurément aux entreprises et aux Canadiens riches comparativement au Canadien moyen ». Certains vont plus loin. Plus du tiers des répondants sont prêts à confirmer non seulement que les réductions d’effectifs à l’ARC ont réduit les capacités d’enquête sur les cas d’évitement fiscal les plus complexes commis par les plus riches, mais aussi que les algorithmes informatiques adoptés pour compenser les réductions d’effectifs ont eu pour effet de concentrer la surveillance sur les contribuables de la classe moyenne et leurs erreurs souvent commises de bonne foi. « Des progrès ont été réalisés ces dernières années, mais il reste encore beaucoup à faire », conclut Debi Daviau, dont le syndicat promet de dévoiler plus tard deux autres rapports qui creuseront certains enjeux et formuleront des recommandations.


Argent

Ce que nous coûte vraiment l’évasion fiscale Québec serre la vis au commerce en ligne Le projet visant à mieux percevoir la TVQ sur les objets achetés en ligne à l’étranger débutera officiellement à l’automne, confirme le gouvernement, et il consistera notamment à ajouter des employés de Revenu Québec au centre de tri de Postes Canada situé à Montréal. Destiné à capter des sommes qui échappent au fisc depuis des années, faute de ressources pour traiter la masse grandissante de colis, le pro-

jet pilote sera d’une durée initiale de 12 mois, a indiqué au Devoir l’attachée de presse du ministre des Finances, Audrey Cloutier.

Pour améliorer la collecte, huit employés de Revenu Québec seront ajoutés aux agents des services frontaliers qui travaillent au grand centre de tri de l’arrondissement de SaintLaurent, un des trois complexes du genre au Canada. Le personnel sera « prêté »

au gouvernement fédéral, mais leur salaire sera assumé par Revenu Québec.

représente des pertes d’environ 158 millions par année pour le trésor public.

Constatant la croissance fulgurante du commerce en ligne et le flot des colis que cela peut générer en provenance de l’étranger, le ministère des Finances a estimé par le passé que la taxe de vente est actuellement prélevée sur seulement 10 % des achats de biens corporels qui passent par le centre de tri, une situation qui

Les employés de Revenu Québec auront la responsabilité de faire « la saisie de données, afin de s’assurer de la perception des taxes et de l’exactitude des données, en collaboration avec l’Agence des services frontaliers », a indiqué une porte-parole de Revenu Québec, Geneviève Laurier.

Le désir de mieux percevoir la taxe de vente sur les biens achetés sur des sites Internet étrangers a été exprimé l’an dernier, mais il s’est véritablement matérialisé au mois de mars, dans le dernier budget du ministre des Finances, Carlos Leitão. On y indiquait simplement que l’objectif consistait à démarrer un projet pilote au printemps « afin d’améliorer la capacité de traiter les colis du centre de tri de Postes Canada situé à Montréal ».

158 : C’est la somme, en millions, que Revenu Québec estime perdre chaque année en TVQ non perçue sur le commerce en ligne Même si le ministre a laissé entendre dans les semaines suivant son budget que Québec n’allait peut-être pas devoir débourser d’argent, en raison de la responsabilité fédérale sur les questions frontalières, l’embauche de personnel par Revenu Québec semble s’inscrire dans l’esprit de la stratégie sur les paradis fiscaux et l’équité fiscale publiée à l’automne 2017 par le gouvernement Couillard. À l’époque, Québec disait être prêt à pousser à la roue, sans toutefois s’avancer sur les détails.

« Le Québec a informé le gouvernement fédéral qu’il était prêt à contribuer financièrement afin d’améliorer la perception des taxes aux frontières par l’Agence des services frontaliers du Canada », avait alors écrit le gouvernement dans un document de 260 pages portant notamment sur l’impôt des sociétés, les paradis fiscaux et l’économie numérique. «Des travaux exploratoires sont en cours à cet égard. Le Québec est confiant dans le fait que des changements et des solutions

puissent être mis en place de manière coordonnée à court terme.» Agents frontaliers

Le centre de tri de Postes Canada situé dans l’arrondissement de Saint-Laurent compte présentement 23 agents des services frontaliers, affirme le président du Syndicat des douanes et de l’immigration, Jean-Pierre Fortin. L’ajout d’employés provenant de Revenu Québec « va aider un peu

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» à la perception des taxes, a estimé M. Fortin, mais le droit d’ouvrir les colis pour vérifier le contenu appartient strictement aux agents. Il s’est dit déçu que la stratégie mise en place ne se traduise pas par l’embauche d’agents douaniers supplémentaires. Le prélèvement de la taxe de vente passe en premier lieu par un « meilleur contrôle » à la frontière, a dit le ministre Leitão lors de l’étude des crédits à la Commission des finances pub-

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liques en avril. « Mais ce n’est pas exclusivement ou seulement ça », avait-il ajouté, en évoquant, par exemple, des ententes spécifiques avec des entreprises. « Ça pourrait se faire aussi. Un n’exclut pas l’autre, et je pense même que c’est complémentaire. » Invitée à commenter les développements concernant le projet pilote, Postes Canada a suggéré de contacter Revenu Québec.


Santé

Le code postal indicateur de l’état de santé?

Dis-moi où tu habites, je te dirais comment tu vas… L’aménagement de nos villes a un impact à long terme sur notre santé. C’est le postulat de base d’une équipe de l’Université de Montréal qui cherche à recruter pas moins de 10 000 personnes pour évaluer leur santé en fonction de leur code postal. À Montréal, les chercheurs veulent évaluer l’ensemble de la ville, car beaucoup de choses y sont en constant changement: des nouvelles pistes cyclables, du nouveau mobilier urbain, des arbres, des passages piétonniers, des ruelles… « La façon dont nous nous déplaçons et participons à la vie quotidienne influe sur notre risque d’avoir des problèmes de santé, comme les maladies cardiaques, le diabète et certains cancers », indique Yan Kestens, professeur au Département de médecine sociale et préventive l’Université de Montréal. Selon lui, notre code postal est un « puissant indicateur de notre santé » et il entend le démontrer grâce au projet Interact, une recherche pancanadienne qui étudie l’impact des investissements en infrastructures sur la santé de la population. Quatre villes serviront de « laboratoires vivants » pour les prochaines années : Vancouver, Victoria, Saskatoon et Montréal.

« Un nouveau corridor vert sera évalué à Vancouver, tandis qu’à Victoria on veut regarder l’impact d’un réseau de pistes cyclables. À Saskatoon, les chercheurs vont s’intéresser à l’élaboration d’un parcours d’autobus rapide », énumère le professeur Kestens. À Montréal, l’approche est différente, dit-il. « On veut évaluer l’ensemble de la ville, car beaucoup de choses sont en constant changement dans la métropole : de nouvelles pistes cyclables, du nouveau mobilier urbain, des arbres, des passages piétonniers, des ruelles, etc. » Pour arriver à colliger toutes ces données, l’équipe de Yan Kestens a besoin d’un « gros échantillon » de personnes. « Nous serons en recrutement jusqu’en octobre et ce qu’on veut, c’est recruter 10 000 personnes sur l’île de Montréal, à Laval, à Longueuil et à Brossard. À ce jour, nous en avons déjà près de 1000, donc ça va bien », explique-t-il. Pour faciliter le recrutement, des avis ont été affichés sur les réseaux sociaux et des lettres ont été directement envoyées à des citoyens. « Nous sommes aussi en contact avec les arrondissements et avec des organisations comme Vélo Québec. »

L’objectif est de rejoindre des gens de « tous les milieux », notamment des personnes défavorisées et des personnes âgées. « C’est important pour nous parce que nous voulons aussi recruter des gens qui ne sortent pas souvent pour avoir un portrait plus près de la réalité », fait valoir le professeur. Ceux qui veulent devenir des « citoyens scientifiques » disposent de trois options de participation. « Ils peuvent simplement remplir un questionnaire en ligne, télécharger une application sur leur téléphone intelligent ou bien

se prêter au jeu en portant un appareil spécial. » Remplir le formulaire prend environ une heure, tandis que l’application enregistre des données pendant 30 jours, comme la position GPS et l’accéléromètre, c’est-à-dire vos déplacements quotidiens à pied. L’appareil spécial, comparable à un téléavertisseur, enregistre la dépense énergétique en plus des autres données recensées par l’application. « Les développements technologiques récents nous permettent de récolter des données individuelles précises », explique Yan Kestens.

Une fois les 10 000 participants recrutés, l’équipe de recherche de Yan Kestens compte interroger les participants de nouveau tous les deux ans, et ce, jusqu’en 2021. « On aimerait voir les effets potentiels liés à l’embourgeoisement. Par exemple, on veut voir si les investissements en infrastructure forcent les gens pauvres à déménager », précise le professeur Kestens. Les personnes intéressées peuvent se rendre sur le site Internet d’Interact pour participer à l’étude.

Ahuntsic-Cartierville

Enfin une nouvelle clinique… Après trois fermetures de cliniques qui ont plongés nombre d’habitants de l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville, qui ont plongé nombre de citoyens dans l’embarras, enfin ne bonne nouvelle : 8 nouveaux médecins de famille prennent leurs quartier dans les lieux. Ils exerceront désormais dans les locaux du GMF cœur de l’Ile, au 241 rue Fleury Ouest Améliorer le taux de prise en charge Selon les dernières statistiques du MSSS, ce territoire présente le pire taux de prise en charge au Québec (63.46%). Les besoins sont criants avec environ 16000 patients inscrits sur le Guichet d’Accès aux Médecins de Famille (GAMF). Ces patients seront au cœur de l’attention des nouveaux venus dont l’objectif

ultime, disent-ils, « est de prendre en charge le plus grand nombre de ces patients».

Prendre en charge un grand nombre de patients ne se fait pas du jour au lendemain tiennent-ils cependant à préciser. « Afin de minimiser les désagréments de démarrage, notre implantation s’effectuera sur une période de 6 mois, se terminant en Février 2019. Un service de priorisation des patients est déjà en place via le GAMF. Nous privilégierons les patients communément appelés « vulnérables », dont celles et ceux de moins de 5 ans, les femmes enceintes, ou ceux avec certains types de maladie. Ceci ne veut pas dire que nous ignorerons les autres. Dans les semaines à venir, nous allons implanter un service d’urgence unique dans son genre.

Outre la prise en charge et les services d’urgence, toute une panoplie de services paramédicaux seront greffés, au fur et à mesure, à notre offre de service. Nous allons effectuer des suivis de grossesse, de la pédiatrie, de la santé mentale, de la gériatrie et de tout autre aspect de la médecine de famille». Vision et valeurs L’équipe médicale, qui a organisé une cérémonie d’ouverture en présence des deux députées dont les comtés se partagent le territoire couvert par la nouvelle clinique – Mmes Christine saint Pierre et Marie Montpetit -, Mme Émilie Thuillier mairesse de l’Arrondissement et un grand nombre de citoyens concernés, ont diffusés un communiqué dans lequel sont présentés les objectifs à moyen terme de leur initiative.

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En voici la teneur : «Une vision : Devenir la pierre angulaire de la première ligne (prise en charge et urgence) des arrondissements Ahuntsic et Montréal-Nord, en révolutionnant l’offre des soins et surtout l’expérience des patients. Une mission : Optimiser, organiser et offrir les services médicaux de première ligne, principalement l’urgence et la prise en charge multidisciplinaire, à la communauté d’Ahuntsic et de MontréalNord, afin de permettre aux patients de rester autonomes, engagés et en contrôle de leur santé. Nos services seront adaptés aux besoins et permettront de désengorger et d’éliminer les attentes aux urgences de SacréCœur et Fleury. Des Valeurs : Chez nous le

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patient sera au cœur d’une équipe de soins. Nous croyons fortement dans le concept de l’autonomisation (Empowerment), qui consiste à promouvoir un engagement ferme du patient envers sa santé. Notre rencontre d’aujourd’hui n’est qu’un simple exemple de notre engagement communautaire qui avec le travail d’équipe font partie intégrante de nos valeurs. Nous sommes en train de créer des canaux de communication avec tous les intervenants de notre réseau local de service afin d’améliorer l’accès aux soins. Nous voulons maintenir les plus hauts standards de pratique en innovant et en créant une atmosphère adaptée aux besoins des patients d’Ahuntsic et de Montréal-Nord.»


Sécurité

Montréal et ses animaux

Encore une attaque de pitbull!

La Ville de Montréal devait adopter lundi 20 août 2018 son règlement sur l'encadrement des animaux domestiques. Cette question figurait déjà à l'ordre du jour de la séance du conseil, mais a refait surface dans l'actualité la veille, lorsqu'un chien a mordu deux enfants d'une même famille dans l'arrondissement Montréal-Nord.

nasié».

La mairesse Plante soutient que la nouvelle réglementation en appellera à la responsabilisation des propriétaires de tous les types d'animaux. Elle invite les citoyens à composer le 3-1-1 lorsqu'ils aperçoivent un animal au comportement problématique ou agressif.

Les deux victimes, un garçon âgé de 7 ans et sa soeur de 4 ans, ont dû être amenées à l'hôpital dimanche mais étaient hors de danger lundi.

Dimanche matin, à l'intérieur d'un appartement du boulevard SaintMichel, le chien aurait d'abord attaqué et mordu la fillette de 4 ans, lui infligeant d'importantes blessures à la tête.

Pour ce qui est du chien, la SPCA de Montréal confirme avoir la garde d'un mâle, d'une race non précisée, qui lui a été confié par le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). La SPCA dit attendre de nouvelles instructions des autorités.

La famille n'aurait pas contacté les policiers à ce moment, mais aurait réussi à enfermer le chien à l'intérieur de l'appartement. L'enfant aurait été conduit à l'hôpital par des proches peu après l'attaque, a rapporté le porte-parole du SPVM, Manuel Couture.

Lundi matin, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a indiqué ne pas vouloir se substituer au SPVM. Elle a tout de même ajouté «qu'on peut en arriver à la conclusion que ce chien-là va être eutha-

Vers 15 h, le chien serait parvenu à sortir de l'appartement pour une raison qui demeure inconnue. Il aurait aussitôt attaqué un gamin de 7 ans, le frère de l'autre enfant, lui causant une blessure très impor-

tante à un bras. Un citoyen s'est interposé et dès que le chien a libéré le gamin, il aurait tenté de s'en prendre à d'autres enfants. Plusieurs citoyens ont composé le 9-1-1 vers 15 h 15, signalant cet événement.

Des policiers arrivés sur les lieux ont pris en charge la bête à l'aide d'une barre à chien et l'ont confiée à la SPCA. L'enfant blessé au bras a été transporté en ambulance vers un hôpital. Sa vie n'est pas en danger. Les policiers n'ont pas identifié la race de l'animal, mais assurent

qu'il s'agit d'une bête de bonne taille. Une enquête est en cours. Un rapport sera transmis à la Ville de Montréal. Selon les renseignements recueillis par le SPVM, la famille des victimes aurait accepté d'héberger le prédateur canin.

Après l'effondrement à Gênes

Quel risque présentent les infrastructures québécoises? L'effondrement d'un pont autoroutier à Gênes, dans le nord de l'Italie, soulève de nombreuses questions, tandis que les autorités tentent toujours de localiser des survivants de cette tragédie ayant fait au moins une trentaine de morts. La chute du tablier de cette construction réalisée dans les années 1960 laisse-t-elle présager de nouveaux problèmes pour les infrastructures québécoises, érigées en grand nombre à la même époque?

Les images sont frappantes : une travée complète du pont Morandi, longue de 80 mètres, s'est retrouvée au sol, 45 mètres plus bas, recouvrant de débris des installations industrielles et une partie de la rivière Polvecera, qui circule en contrebas.

Au Québec, impossible de ne pas établir un parallèle, à plus grande échelle, avec l'effondrement d'une partie de la travée du viaduc de la Concorde en 2006. À l'époque, l'événement avait fait cinq morts et six blessés, et surtout mis au jour de graves problèmes de construction et d'entretien des infrastructures routières. L'ingénieur Normand Tétreault, président et fondateur de Soconex, une entreprise spécialisée en réparation de béton, estime qu'il faudra attendre les résultats des enquêtes menées à Gênes avant de se prononcer sur la cause de l'effondrement. M. Tétreault a toutefois souligné que l'accident a été d'une très grande envergure : « La structure est complètement détruite », a-t-il

souligné.

Le pont Morandi était « sous surveillance », en raison de problèmes remontant apparemment à sa construction, à la fin des années 1960, et des travaux de réfection étaient en cours. Normand Tétreault croit que le cas génois est similaire à celui du pont Champlain, lui aussi sous surveillance, mais que les comparaisons s'arrêtent là. «[Le pont Champlain] est instrumenté : chaque fois qu'une charge est appliquée sur le tablier du pont, des instruments installés sur les 150 poutres soutenant le pont enregistrent les mouvements» ditil. Cette mesure permet d'assurer le maintien de la circulation sur le

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pont le plus achalandé au pays, a précisé M. Tétreault, ainsi que la mise au point de « sept ou huit méthodes d'entretien » par la société responsable de l'exploitation des ponts Champlain et Jacques-Cartier. Les haubans sont-ils risqués?

Le professeur Bruno Massicotte, de Polytechnique Montréal, a pour sa part souligné que le pont Morandi était en partie haubané, c'est-à-dire que des câbles métalliques contribuaient à renforcer sa structure, comme l'est le pont de l'autoroute 25, reliant Montréal à Laval, et bientôt le nouveau pont Champlain. « Si c’est bien fait, il n’y a pas de risque, s’il y a des problèmes d’entretien ou des problèmes de

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conception, c’est là que les risques peuvent survenir », observet-il, en rappelant que l'entretien de tous ces ouvrages est « primordial ». Il met par ailleurs en garde contre l'hypothèse déjà avancée que le pont Morandi aurait pu être victime d'un violent orage. « J’imagine que si le pont a 50 ans, ce n’est pas la première tempête qu’il voit. [...] Un orage, même s’il est violent, ce n’est pas normalement la cause de l’effondrement d’un pont », observe-t-il. « Ça peut être ça. Mais si on était rendu là, c’est parce qu’il y avait des problèmes majeurs. » « L'enquête sera très longue », a-t-il lui aussi souligné.


Sécurité

Quoi faire ou ne pas faire face à des policiers

Une vidéo destinée aux jeunes du secondaire et portant sur les comportements à adopter en cas d’interpellation policière est actuellement en production au ministère de l’Éducation pour répondre aux recommandations du coroner dans l’enquête sur le décès de Fredy Villanueva, a appris Le Devoir. La vidéo « est en élaboration à l’intention du milieu scolaire […] l’outil en préparation s’adresse aux élèves du 1er cycle du secondaire », a indiqué le ministère de l’Éducation. Le ministère n’a précisé ni le moment où il prévoit diffuser la vidéo ni dans le cadre de quel cours il compte le faire. L’enregistrement, qui mettrait en scène des policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) et de jeunes comédiens, ne ferait toutefois aucune allusion à la mort de Fredy Villanueva, abattu lors d’une intervention policière à Montréal-Nord, en août 2008, alors qu’il était âgé de 18 ans. « C’est une vidéo qui embrasse large. Elle explique aux jeunes comment réagir lors d’une interpellation ainsi que leurs droits lorsqu’ils sont interpellés, arrêtés ou qu’ils reçoivent un constat

d’infraction », explique une source qui a travaillé sur le projet. Cette dernière souligne que le ministère, qui coordonnait un comité de travail auquel participaient entre autres le ministère de la Sécurité publique et l’École nationale de police du Québec, voulait éviter les amalgames que susciterait un scénario rappelant les événements de 2008. « Le but, c’est que les jeunes de partout dans la province [s’y] retrouvent », souligne la source. Approche éducative L’outil audiovisuel a été créé pour répondre aux recommandations du coroner André Perreault, qui a présidé l’enquête sur les causes et circonstances du décès de Fredy Villanueva.

l’arrestation d’un tiers. Il soulignait l’importance de faire réaliser aux jeunes la perception que les policiers peuvent avoir lors d’une telle intervention, et conseillait d’informer les jeunes sur les conséquences que pourrait entraîner le refus d’une personne d’établir son identité à la demande d’un agent de la paix qui l’informe qu’elle a commis une infraction. « Actuellement, c’est souvent dans les films américains que les jeunes ont leur premier contact avec la police […] Comme psychoéducateur, une vidéo me semble pertinente et je suis certain qu’elle pourra être très utile pour sensibiliser les adolescents », commente Denis Leclerc, président de l’Ordre des psychoéducateurs du Québec.

Dans son rapport, publié en 2013, le coroner Perrault adressait trois de ses 22 recommandations au ministère de l’Éducation. Il y proposait de promouvoir, dès le début du secondaire, la façon de se comporter avec un policier.

Rémi Boivin, professeur à l’École de criminologie de l’Université de Montréal, estime également que la vidéo produite par le ministère mérite d’être perçue comme un outil éducatif et non comme un message qui ferait reposer la responsabilité du bon déroulement d’une intervention policière sur les jeunes.

Le coroner estimait également qu’il fallait sensibiliser les jeunes aux risques d’intervenir lors de

« L’essentiel des recommandations du coroner Perreault touchait les corps de police et à

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travers celles-ci, le coroner a ajouté un volet de sensibilisation pour s’assurer d’avoir fait le tour de tout ce qu’il est possible de faire pour qu’un tel événement se reproduise », souligne-t-il. M. Boivin rappelle que la nature des interactions entre policiers et citoyens dépend de la perception que chacun a de l’autre. « Une mauvaise compréhension de part et d’autre peut mener à une escalade du conflit et c’est ce que tout le monde veut éviter », explique-t-il. Rappel des événements « Fredy Villanueva ne méritait pas de mourir », écrivait le coroner dans un volumineux rapport. « [Sa mort] est le résultat d’une multitude de circonstances qui, chacune prise isolément, ne saurait justifier logiquement ce résultat », poursuivait-il. Rappelons qu’au moment de l’événement, Fredy Villanueva, son frère Dany Villanueva et d’autres amis étaient réunis dans le stationnement d’un parc de Montréal-Nord. Les patrouilleurs Jean-Loup Lapointe et Stéphanie Pilotte ont aperçu le groupe de jeunes jouer aux dés et les ont interpellés en vertu du règlement

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municipal qui interdit de jouer à des jeux de hasard sur le domaine public. À l’approche des policiers, Dany Villanueva s’est éloigné du groupe. Lorsque les policiers ont voulu l’interpeller, il a protesté et a ensuite résisté à son arrestation. Dany Villanueva s’est retrouvé au sol après que l’agent Lapointe a tenté de le maîtriser, amenant ses amis et son frère à s’approcher pour tenter de l’aider. Craignant pour sa sécurité, l’agent Lapointe a décidé de faire feu. En quelques secondes, quatre coups ont été tirés, atteignant trois jeunes, dont Fredy Villanueva, qui est décédé quelques heures plus tard. « La preuve ne permet pas de conclure que Fredy Villanueva a tenté ou a eu l’intention de désarmer l’agent Lapointe », note le coroner, qui souligne toutefois que Dany Villanueva a fait preuve de témérité et qu’« il aurait dû savoir qu’un tel comportement était susceptible d’inciter son frère et ses camarades à se mettre de la partie ».


Qualité de vie

Transport intelligent

Un véhicule autonome 100% québécois? Le Québec a-t-il ce qu’il faut pour devenir un chef de file dans le domaine du transport intelligent et autonome ? Absolument, estiment les observateurs et acteurs de l’industrie. Mais pour arriver à se démarquer sur le vaste échiquier international, c’est vers le transport collectif que la province devrait se tourner. Un passif historique La voiture autonome ne sera sans doute jamais québécoise, l’industrie automobile canadienne ayant depuis bien longtemps préféré la région des Grands Lacs, en Ontario, à la vallée du SaintLaurent. Cela ne devrait toutefois pas empêcher les acteurs d’ici de réussir à tirer leur épingle du jeu et à se tailler une place de choix dans cette grande course vers l’autonomisation des transports. « Nous avons, au Québec, une longue tradition de transport collectif et spécialisé, rappelle Sarah Houde, la directrice générale de Propulsion Québec, la grappe industrielle des transports électriques et intelligents. On peut penser, par exemple, à Bombardier, à Nova Bus ou à Lion, pour ne nommer que ceuxlà. Pourquoi ne pas nous appuyer sur cette force industrielle existante — qui est aussi un de nos piliers économiques — pour développer du transport intelligent bien de chez nous ? » D’autant que les autres technologies nécessaires à l’autonomisation, comme les lasers, les détecteurs ou l’intelligence artificielle, sont également disponibles au Québec, ajoute la gestionnaire. « Même notre sous-sol minier regorge des ressources qui sont utilisées pour fabriquer les différentes composantes de ces véhicules. »

Selon elle, tous ces savoir-faire combinés pourraient permettre, d’ici quelques années, le déploiement d’une navette autonome 100 % québécoise. « La question n’est pas de savoir si nous serions capables », renchérit Mario Landry, de l’Institut du véhicule innovant, un centre de recherche qui travaille en collaboration avec les petites et moyennes entreprises actives dans ce domaine en pleine ébullition. « Nous avons les compétences et les acteurs clés pour mettre sur pied un véhicule intelligent 100 % québécois. Tout ce qu’il manque, maintenant, c’est l’argent pour le faire. » Un avis que partage le directeur général du technopôle IVEO, un organisme qui se présente comme un « catalyseur d’innovations » dont l’objectif est d’établir des liens entre les différents acteurs de la mobilité intelligente. « Le Québec n’aura jamais une filière automobile comme l’Ontario, reconnaît Benoît Balmana, qui est à la tête du groupe depuis un peu plus de deux ans. Par contre, notre écosystème est composé de joueurs capables de développer des véhicules uniques qui ont le potentiel de répondre aux enjeux de mobilité d’aujourd’hui avec les technologies de demain. » Mobilité partagée C’est donc en misant sur une mobilité partagée que le Québec arriverait à se démarquer, une vision qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle de nombreux chercheurs d’ici et de l’étranger, dont ceux de l’Institut des politiques de transport et de développement, une organisation internationale à but non lucratif, et de l’Université de Californie à Davis.

Dans un rapport publié en mai 2017, ces derniers insistaient, notamment, sur l’importance de la mobilité partagée pour que la révolution de l’autonomisation des transports soit un succès. « À peu près tous les experts s’entendent pour dire que la mobilité du futur doit être collective, lance sans hésitation Sarah Houde, de Propulsion Québec. À l’heure actuelle, nos voitures sont stationnées plus de 90 % du temps, elles nous coûtent cher… Ce n’est pas quelque chose d’agréable en ville. Alors, vous imaginez un monde où on pourrait vraiment s’en passer ? Un monde où on pourrait requérir, sur demande, les services d’une navette autonome ? Ce serait un peu comme avoir un chauffeur privé, une sorte de “cocktail transports” de niveau supérieur. » « L’idée est que ces véhicules soient offerts en complément du transport collectif traditionnel, renchérit pour sa part Benoît

Balmana, d’IVEO, qui travaille avec déjà une quinzaine de municipalités du Québec. De ramener les gens sur le réseau, puis de laisser ce dernier faire son travail. » Selon lui, ces véhicules intelligents pourraient d’ailleurs permettre enfin aux villes de contourner différents problèmes de mobilité auxquels elles se butent depuis de nombreuses années. On peut ainsi penser aux secteurs mal desservis en raison de la faible densité, à la fréquence en dehors des heures de pointe ou encore au fameux « dernier kilomètre ». C’est justement ce qui sera testé, en partie, dans le cadre du projetpilote de Candiac, sur la Rive-Sud de Montréal, et qui sera déployé à la fin du mois d’août, rappelle l’ingénieur de formation. « Ce projet sur route pourrait bien être un exemple de ce que l’avenir nous réserve. » Frein réglementaire Reste maintenant à s’assurer que

le cadre réglementaire ne nuise pas à l’implantation de ces projets de transport nouveau genre. Déjà, les modifications apportées au Code de la sécurité routière, ce printemps, dans le cadre de la plus récente refonte, permettent, depuis, le lancement de différents projets-pilotes de mobilité intelligente. En vertu de la loi, ces derniers doivent toutefois être approuvés à la pièce par le ministre des Transports lui-même. « Les projets-pilotes nous donnent la possibilité d’effectuer des tests et d’apprendre de nos erreurs, concède Benoît Balmana. On sent une ouverture de la part des pouvoirs publics, mais il faut quand même qu’ils comprennent qu’on ne pourra pas toujours fonctionner par dérogations et par autorisations. Si on veut rester dans la course et devenir un incontournable dans ce secteur d’activités, il va falloir être prêts à adapter nos réglementations. Et on va sans doute devoir le faire plus vite qu’on pense. »

Dans quelle ville est-il le plus agréable d'habiter? De Vienne à Kaboul, en passant par Melbourne et Vancouver Vienne a détrôné la ville australienne de Melbourne pour la première fois dans le classement de l'Economist Intelligence Unit (EIU), qui évalue chaque année la qualité de vie des métropoles de la planète. Sur les 140 villes recensées, la capitale autrichienne se retrouve au coude-à-coude avec Melbourne depuis des années. Cette dernière s’est taillé une place au sommet du classe-

ment au cours des sept années précédentes. Mais le bas taux de criminalité et la diminution des attaques lancées par des militants ou des groupes terroristes en Europe de l’Est en 2018 ont permis à Vienne de se hisser au premier rang.« Les dernières années, les villes européennes ont vu leur score diminuer en raison de la menace terroriste, qui a mené à l'augmentation des mesures de sécurité. Mais en 2018, on note

un retour à la normale », souligne l’EIU dans son rapport, publié mardi. « L’une des catégories où Vienne s’illustre particulièrement bien est celle du taux de criminalité. Elle est en réalité l’une des villes les plus sécuritaires en Europe », explique Roxana Slavcheva, une analyste qui a participé au rapport.

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L’Economist Intelligence Unit évalue la qualité de vie en se basant sur différents facteurs, dont la sécurité, la stabilité, les infrastructures, les transports, la qualité de l’environnement, l’offre culturelle, l’accès aux soins de santé et à l’éducation. Le Canada fait bonne figure, les villes de Calgary, de Vancouver et de Toronto se retrouvant respective-

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ment en 4e, 6e et 7e place. À l’opposé, la ville de Damas, en Syrie, se classe au dernier rang, précédée par la capitale du Bangladesh, Dacca, et Lagos, au Nigeria. Le rapport n’inclut toutefois pas certaines villes où la qualité de vie se trouve affectée par la guerre, comme la capitale irakienne Bagdad ou celle de l’Afghanistan, Kaboul.


Culture

Les Journées Culturelles Tijanes au Centre Culturel Marocain de Montréal du 31 août au 2 septembre 2018 Après une saison estivale marquée par les festivités de la fête du Trône, place, en cette période de la rentrée de la session d’automne, au spiritualisme au Centre culturel marocain Dar Al Maghrib à Montréal. Et ce à l’occasion de la deuxième édition des journées culturelles dédiées à Cheikh Ahmed Tidiane Chérif.

L’évènement est organisé par le Collectif des Dahiras Tidianes de Montréal, Toronto, Québec, Sherbrooke, Ottawa, Troisrivières, Gatineau, Rimouski et Moncton avec la collaboration du Centre Culturel Marocain Dar Al Maghrib. L’établissement abritera du 31 au 02 septembre les meetings des adeptes de la Tarika Tijania, vivant au Canada. L’ouverture du Centre culturel marocain Dar Al Maghrib à cette grande activité des Tidianes se justifie à plus d’un titre. La rencontre s’inscrit dans le positionnement de la stratégie culturelle de l’établissement qui se veut rassembleur et empreint d’ouverture et de rapprochement entre les peuples. Il s’agit aussi de mettre en exergue ce que représente la ville de Fès, haut lieu de savoir, de saints et de soufisme, pour les adeptes et les disciples de la Tariqua Tidjania. L’Afrique, à elle seule, compte 300 millions de Tijanes et chaque année ce

sont des milliers qui font le déplacement pour la visite du mausolée de Sidi Ahmed Tijani. Du Sénégal particulièrement, ce sont près de 10.000 Sénégalais qui viennent annuellement à Fès pour rejoindre la confrérie Sidi Ahmed Tijani en tant que pèlerins. A tous le Maroc exprime une grande sollicitude permanente. Aussi en accueillant cet évènement, il s’agit de réitérer cet intérêt et de souligner l’importance qu’accorde le Royaume du Maroc à la protection de ses valeurs et ses traditions. Une identité que le Centre culturel marocain Dar Al Maghrib à Montréal se donne pour mission de préserver dans le pays d’accueil. Moments forts La deuxième édition des journées culturelles dédiées à Cheikh Ahmed Tidiane Chérif sera marquée par de nombreux moments forts. Il s’agit pour les participants de redécouvrir les valeurs et la philosophie prônées par la voie soufie de la Tijania. Et ce en revisitant les enseignements de Cheikh Ahmed Tidiane, fondateur de cette voie musulmane basée sur l’éducation spirituelle.

Dans cette optique sont programmées des expositions, des wazifas, des hadaras, des conférences, des allocutions et des litanies,

Conférenciers de renom

Pour animer ces réunions, seront présents des conférenciers de renoms. Il s’agit de Son Éminence Serigne M'Baye Sy Mansour, khalife général des Tidianes. Pour rappel, Son Éminence Serigne M'baye Sy Mansour est le fils de Serigne Mansour Sy Ibn Seydi Elhaj Malick Sy de Tivaoune (Sénégal). Il est le 7ème Khalife Général des Tidianes du Sénégal. Il sera accompagné lors de cette deuxième édition des journées culturelles dédiées à Cheikh Ahmed Tidiane Chérif d’une importante délégation composée d’éminents conférenciers. Il s’agit de Abdoul Aziz MBaye, de Oustaz Ahmed Ba et du Pr Souleymane Bachir Diagne. Tous sont des leaders inspirants qui ont partagé leur enseignement à travers le monde. Le temps de cet évènement, le Centre culturel marocain à Montréal sera un des temples de la confrérie soufie Tijania. Tout au long que durera cette manifestation, deux meetings se tiendront au Centre culturel marocain Dar Al Maghrib à

Montréal. Le premier est prévu le samedi 1er septembre de 11h à 17h15. Le deuxième est programmé le dimanche 02 septem-

bre de 15h à 19h15. De nombreux participants sont attendus.

Documentaires

«Comme un caillou dans la botte» «Comme un caillou dans la botte» est un documentaire écrit et réalisé par Hélène Choquette, qui montre la réalité des marchands ambulants sénégalais, des migrants économiques, qui arpentent les rues des grandes villes touristiques d’Europe. Le documentaire sera diffusé à l’émission 1001 VIES, le samedi 25 août à 19 h, sur ICI Radio-Canada Télé.

Filmé entre l’Italie et le Sénégal, fort de contrastes, «Comme un caillou dans la botte» démontre comment la situation de ces migrants économiques ne cesse de se compliquer avec la crise financière italienne et la vague déferlante de réfugiés demandeurs d’asile. Pour aborder la montée du racisme en Italie, le documentaire revient sur l’assassinat de deux marchands ambulants sénégalais par un militant d’extrême droite à

Florence en 2011. Alors que dans le film, certains marchands avouent vivre depuis dans la peur, un autre d’entre eux, Idy Diene, 54 ans et également d’origine sénégalaise, tombait sous les balles d’un Italien sur le pont Vespuce le 5 mars 2018. Cinq jours plus tard, plusieurs milliers de personnes participaient à une marche antiraciste organisée à la mémoire de la victime dans le quartier historique de Florence. Cet événement tragique

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démontre l’ampleur des tensions raciales en Italie où tous les jours elle est tangible à travers des incidents de moindres importances, mais tout autant préoccupantes. Présenté en première au Festival international du film de Vancouver (VIFF), en sélection officielle Regards d’ici au Festival international de cinéma Vues d’Afrique, et récemment en présentation spéciale au

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Festival de Films de Taormina en Sicile, « Comme un caillou dans la botte» sera également diffusé à documentary Channel le 14 octobre à 21 h. Une projection spéciale aura lieu le samedi 15 septembre au Centre Culturel Marocain, organisée par le Centre Afrika de Montréal dans le but de financer une projection au Sénégal en début 2019.


Immigration

Regroupement familial

Le système de loterie aboli

Le gouvernement Trudeau élimine un système de loterie impopulaire permettant aux immigrants de faire venir au pays leurs parents et leurs grands-parents et augmente le nombre de demandes de parrainage qu'il acceptera l'an prochain.

Le ministre de l'Immigration, Ahmed Hussen, vient d’annoncer des modifications au programme de parrainage des parents et des grands-parents, qui prévoient le remplacement du processus de sélection aléatoire des demandes de parrainage par un processus fondé sur le principe du premier arrivé, premier servi. Le gouvernement acceptera également plus de demandes de parrainage de parents et de grands-parents en 2019. Le plafond actuel de 17 000 demandes sera porté à 20 000 l'an prochain. Le processus de sélection aléatoire a suscité des critiques lorsqu'il a été implanté l'an dernier, de nombreux parrains potentiels ayant estimé qu'il était injuste. Ottawa répond maintenant aux commentaires reçus par M. Hussen lors d'une «tournée d'écoute» à travers le pays l'an dernier. Le ministre a reconnu que les Canadiens avaient «effectivement exprimé certaines préoccupations concernant la loterie». À compter de 2019, les immigrants souhaitant parrainer un parent ou un grand-parent pourront en faire la demande en remplissant en ligne un «formulaire d'intérêt». Au lieu de sélectionner au hasard des personnes de cette liste pour le parrainage, comme c'est le cas actuel-

lement, les candidatures seront plutôt honorées en fonction du moment de leur réception, jusqu'à ce que le seuil de 20 000 soit atteint.

«Il s’agit d’un système plus équitable qui bénéficiera à tous ceux qui sont intéressés», a affirmé M. Hussen. «Bien sûr, une fois que nous aurons reçu les formulaires d’intérêt des parrains et que nous aurons atteint le plafond, nous reviendrons en arrière et regarderons qui est réellement qualifié, car il y a certaines exigences à respecter», a-t-il ajouté. Le système de demande de parrainage fait l'objet de critiques depuis longtemps. Avant 2017, les demandes étaient classées par ordre de priorité en fonction de l'origine géographique et avaient, dans certains cas, de meilleures chances de réussite si les familles pouvaient se permettre de payer des avocats spécialisés en immigration. M. Hussen a estimé que le système de loterie actuel est plus équitable que le système qui était en place au moment de l'arrivée des libéraux au gouvernement, mais il estime que le fait d'implanter un système fondé sur le principe du premier arrivé, premier servi améliorera encore ce programme. Un système critiqué Arghavan Gerami, une avocate d'Ottawa spécialisée en droit de l'immigration et des réfugiés, a plusieurs clients qui ont satisfait à toutes les exigences de parrainage cette année, mais qui n'ont pas été

sélectionnés à la loterie. Les familles qui cherchent à faire venir leurs parents ou leurs grandsparents au Canada pour les aider à prendre soin de leurs enfants, ou pour des raisons culturelles ou personnelles, ont été frustrées par le caractère aléatoire de l'actuel processus de sélection et souhaitaient un changement, a dit Mme Gerami. Mais il est important que le gouvernement soit transparent sur la façon dont ce nouveau système sera géré, a-t-elle ajouté. «Pour moi, ce sera encore très difficile en termes de transparence de montrer qui ont été les premiers 20 000 à postuler», a-t-elle soutenu.

«Les gens vont dire: "Pourquoi ne suis-je pas choisi? Allez-vous publier comment vous avez sélectionné les 20 000 premiers?" Parce que, fondamentalement, cela va se résumer à quelques secondes dans une minute donnée, selon le nombre de candidats qui auront envoyé une manifestation d'intérêt», a souligné Me Gerami. La décision du gouvernement d'augmenter le nombre de dossiers acceptés dans ce programme résulte d'une demande toujours grandissante. En 2017, un peu plus de 100 000 formulaires d'intérêt à parrainer ont été remplis en ligne, selon les données gouvernementales. Seules 10 000 personnes

avaient été invitées à soumettre des demandes, mais le gouvernement a porté ce nombre à 17 000 cette année. Me Gerami se demande pourquoi il y a un plafond à ce programme, compte tenu du niveau élevé d'intérêt et de la demande des personnes souhaitant parrainer des membres de leur famille vivant à l'étranger. M. Hussen a indiqué qu'il existe des plafonds pour pratiquement tous les programmes de résidence permanente, lesquels sont déterminés en étroite consultation avec les provinces et les territoires.

Projet pilote : 5 semaines additionnelles de prestations à des travailleurs saisonniers Des travailleurs des industries saisonnières pourront bénéficier de cinq semaines de prestations supplémentaires et d'autres nouvelles mesures annoncées par le gouvernement fédéral.

Ottawa entend mettre en œuvre un projet pilote visant à offrir jusqu’à cinq semaines supplémentaires de prestations d’assurance-emploi aux travailleurs des industries saisonnières admissibles et qui commencent à toucher des prestations entre le 5 août 2018 et le 30 mai 2020 dans 13 régions ciblées. Le fédéral veut aussi offrir sur deux ans, avec les provinces et les territoires, des subventions salariales et des programmes de

formation professionnelle et d’aide à l’emploi destinés aux travailleurs des industries saisonnières.

l’assurance-emploi ciblées pour les cinq semaines de prestations supplémentaires sont les suivantes:

Le ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social, Jean‑Yves Duclos, a annoncé ces changements au régime d’assurance-emploi lundi matin, à Escuminac, au Nouveau-Brunswick.

Le coût total des changements annoncés est estimé à quelque 230 millions de dollars, soit la somme annoncée dans le budget de 2018 pour aider les travailleurs des industries saisonnières.

Le gouvernement estime qu’environ 51 500 travailleurs des industries saisonnières auront accès aux cinq semaines de prestations supplémentaires, dont près de 7000 au NouveauBrunswick. Les régions économiques de

La possibilité pour des saisonniers de toucher des prestations durant cinq semaines de plus réjouit, Fernand Thibodeau, porte-parole du comité d’action de l’assurance emploi des travailleurs saisonniers, dans la région économique de Restigouche-Albert, au Nouveau-Brunswick. C’est une

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petite victoire pour nous, dit-il.

Qu’est-ce qu’on fait avec ces gens-là pour qu’ils soient [admissibles] d’assurance-emploi convenable? Ça, je me pose vraiment la question, affirme Fernand Thibodeau.

J’espère que notre gouvernement provincial, quand il va recevoir l’argent [...], qu’il prenne le temps de nous écouter nous aussi, que ce n’est pas juste leur vision à eux autres avec de la formation qu’ils veulent donner. Nous, on a d’autres choses, d’autres solutions qui répondent vraiment aux besoins des travailleurs saisonniers. [...] Je pense que ce qu’on a besoin ici présentement, c’est du développement d’emploi, ajoute Fernand Thibodeau.

Quant aux subventions salariales et aux programmes de formation professionnelle et d’aide à l’emploi, il espère que les travailleurs seront consultés.

L’idéal, selon lui, serait des projets d’emplois communautaires qui donneraient plus d’heures de travail aux saisonniers.

Il s’interroge cependant sur le sort des travailleurs qui n’arrivent pas à être admissibles aux prestations d’assuranceemploi, faute d’avoir pu accumuler un nombre suffisant d’heures de travail assurables.

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