Une Semaine ARySQUE. Spécial Avignon

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SpĂŠ Juillet 2013

Avignon 2013


Sur le pont à Avignon 50°C sous un soleil de plomb et un planning de marathonienne. La tête comme un toupie, j'héberlue à qui mieux mieux : des milliers d'affiches se serrent les coudes sur les murs calcaire et la place des Corps-saints déborde de guirlandes écarlates qui se croisent et se balancent au-dessus des parasols blancs. Dans ce dédale bigarré, je cherche la trace de MON affiche, celle que j'avais conçue deux semaines plus tôt pour Bien lotis (p.16). Je la trouve enfin, quand un type m'interpelle : "madame, avez-vous déjà songé à vendre vos enfants ?" La mine de plus en plus ahurie, je m'exclame : "mais non bien sûr". Une seconde, je venais d'oublier que j'étais ici en pleine fiction, que rien en ce lieu ne ressemblait vraiment à la vraie vie… J'allais vite comprendre qu'en fait, la vraie vie se dit bien mieux ici qu'ailleurs. Je n'en étais qu'au début du bonheur : je n'avais encore utilisé aucun des cinq tickets d'entrée qui attendaient au fond de mon sac, rangés entre deux pages d'un livre qui n'avait rien de théâtral. Je me suis tellement régalée qu'il faut que je partage. Ce n'est ni in, ni off mais c'est totalement free !

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D'après une histoire vraie

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de C. Rizzo. Jusqu'au 15/07, Gymnase du lycée Aubanel. 18h

Sans un son, huit corps se meuvent. Ils dansent en silence et le silence les accompagne. Ils se lient, se délient, tombent et ressuscitent. Ils se tordent, se chevauchent, se soutiennent et se repoussent… Progressivement, les percussions de Didier Ambact et King Q4 occupent l'espace jusqu'à l'envahir tout entier et c'est un coup aux tripes : nous voici plongés dans une nature brute que le langage naissant n'a pas encore organisé… À regarder ces corps qui se tiennent jusqu'à former clan, à les voir se combattre, succomber et recommencer, on en vient à penser que cette histoire vraie est celle de l'humanité toute entière : ses regroupements, ses conflits, ses génocides, ses renaissances. Mais D'après une histoire vraie est d'abord une chronique méditerranéenne et dans la brutalité quasi animale de ces tableaux vivants, on s'apaise à retrouver la légèreté de quelques pas de danse folklorique venus tout droit des rives de la grande bleue. Il n'empêche : c'est bien l'humain qui vibre ici, l'humain dans son absolue nécessité de l'autre. Un must ! 12


Ping pang Qiu

de A. Liddell. Dernière représentation le 11/07 Espagnol surtitré

Angélica Liddell n'a rien d'angélique : elle est furieusement narcissique, diablement provocatrice et totalement débridée. Bref, on aime ou on déteste Ping pang Qiu.… Moi, j'ai adoré cette frénésie qui nous parle de la Chine totalitaire avec une brutalité subtile : ici, le pamphlet contre le musèlement de l'expression cache une déclaration d'amour tourmenté et derrière l'exhubérance des couleurs et l'âpreté du texte espagnol qui claque comme un fouet, la tendresse domine.

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Alors, quand tout cela tourne à l'orgie dégueulasse bouffe et Coca-cola, on reconnaît la Chine d'aujourd'hui et — surtout si l'on n'est pas au premier rang où atterrisent bon nombre de nouilles chinoises — on jubile ! Parce que Ping Pang Qiu joue quelque chose d'essentiel : la fragilité de l'amour, l'apprentissage de la solitude et ce lien si particulier qui lie politique et esthétique : " Sin Belleza, se mata màs !"*

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* Sans beauté, on tue plus


Sujets à vif*. Programme A

2 performances composent ce programme

1 - Créature. D' de Kabal & E. Pubert, 2 - 19-born - 76-rebels. M. Nyamza & F.Yisa Du 8 au 14/07 - jardin de la vierge du lycée Saint-Joseph. 11 h

1- Assis dans sa boîte en plexi, D'de Kabal est immobile, tout juste respirant. À l'extérieur, une femme naît, littéralement accouchée dans une danse rampante. Elle s'emploiera à réveiller la créature tapie, la caressant à travers la vitre, au son de souffles rappés de plus en plus prégnants. C'est pur, c'est beau, éminemment sensuel. 2 - Juchées sur des boites de conserves dans leurs robes éclatantes, deux femmes noires sud africaines se débarassent peu à peu de leur sentiment d'infériorité. Souvent drôle et toujours grave, la pantomine raconte le combat contre l'apartheid avec grâce et profondeur, nos deux rebelles tenant tête avec brio, aux molosses qui voudraient les faire taire. 14


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Bien lotis

de P. Malone. Mise en scène : L.Vacher Jusqu'au 24 juillet. La Manufacture.12h45

Je vous avais déjà vanté Bien Lotis dans le numéro 43 de la Semaine ARySQUE. Je confirme : la qualité du texte drôle et profond, la mise en scène rythmée qui fait tomber les barrières avec les spectateurs, le jeu vif et enjoué des acteurs qui débordent de tendresse, etc. Un des moments les plus touchants de ces trois jours en Avignon. 16


Par les villages

de P. Handke. Mise en scène : S. Nordey Jusqu'au 13 juillet. Cour d'honneur du palais des papes. 21h 17

En attendant les comédiens, j'ai admiré la cour d'honneur. Quand les comédiens sont entrés, ils ne sont pas parvenus à me distraire du vol des martinets qui dansaient au-dessus de ma tête. À l'entracte, la nuit tombée avait chassé les oiseaux. Alors, je suis partie.



Spéciale dédicace Aux amis de longue date, à leurs enfants et aux nouvelles rencontres qui ont fait de cette virée avignonaise un grand moment de bonheur : merci des Hauts de Hurlevent.

;-)


La semaine prochaine

Rendez-vous vendredi prochain pour le dernier numéro de la Semaine ARySQUE avant l'été. A priori, ce petit magazine devrait retrouver ses chroniques et dessins habituels… a priori.

Tous les numéros d’Une Semaine ARySQUE sont sur

www.arysque.blogspot.fr


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