Madagascar : nouvel eldorado des compagnies minières et pétrolières

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III. QUAND MADAGASCAR BASCULE DANS L’INDUSTRIE MINIERE... 1. Le prix humain et écologique des grands projets miniers Si le secteur minier est très lucratif pour les multinationales étrangères, les bénéfices pour les populations du pays d’accueil sont bien moins évidents, et le développement du secteur des industries extractives n’a pas ou peu d’effets positifs en termes de réduction de la pauvreté et de développement durable dans les pays du Sud112. Les impacts sociaux et environnementaux des grands projets miniers sont considérables Les zones d’extraction ou de transformation sont défrichées sur de grandes surfaces et d’énormes quantités de matériaux et de terre sont déplacées pour extraire les minéraux recherchés. Les écosystèmes et les conditions de vie des communautés qui en dépendent sont directement touchés. L’exploitation minière consomme généralement des quantités d’eau très importantes pour séparer les minerais ou métaux valorisables du sable ou de la roche qui les contiennent ou lors du processus de transformation. C’est une industrie très consommatrice d'énergie, aggravant ainsi le changement climatique. L’industrie minière est aussi grande consommatrice de produits chimiques, utilisés pour extraire ou transformer les métaux (acide sulfurique, cyanure...), avec des risques importants de pollutions des sols, de l’air et des eaux de surface ou souterraines, ce qui provoque ensuite des problèmes sanitaires (cancers respiratoires, maladies de la peau, etc. . Les populations installées sur le périmètre d’exploitation sont déplacées et doivent renoncer à leurs activités économiques traditionnelles - telle que l’agriculture -, sans que la nouvelle mine puisse absorber tous les emplois qu'elle fait disparaître. En fait, les projets miniers constituent le plus souvent des « enclaves de production », sans liens avec le reste de l’économie (importations des biens d’équipement, absence de transfert de technologies, exportation de la production sans transformation, rapatriement des bénéfices). Ces « enclaves » favorisent une intégration externe à l’économie mondiale au détriment de l’intégration interne et d’un développement durable endogène. Premières victimes de ces impacts souvent irréversibles, les populations locales sont de plus en plus réticentes à l’arrivée ou le maintien d’une multinationale minière sur leur territoire : en témoigne la multiplication des conflits sociaux, que ce soit en Amérique Latine (ex : Minera Alumbrera en Argentine, Tintaya et Conga au Pérou), en Asie (ex : Weda Bay en Indonésie) ou en Afrique (ex : Mopani en Zambie). Dans certains pays, ces mobilisations font face à des répressions parfois sanglantes, comme récemment en Afrique du Sud (mine de Lonmin), et les militants peuvent être la cible de menaces allant jusqu’à des assassinats, comme au Mexique. Encadré : Emploi et secteur minier La création d’emploi est souvent l’argument principal avancé par les compagnies minières et les autorités pour convaincre les populations locales d’accepter le développement d’un projet. Mais le secteur des industries extractives demande beaucoup de capitaux et peu de main d'œuvre, à l’inverse des mines informelles ou artisanales qui ont employé à Madagascar jusqu’à 500 000 artisans et saisonniers113.

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Rémi Pélon, « A la recherche des trésors de la Grande Île : les ressources minérales », in Banque mondiale, Madagascar : vers un agenda de relance économique, juin 2010, p. 130 (http://siteresources.worldbank.org/INTMADAGASCARINFRENCH/Resources/Mines.pdf). - 35 - Madagascar : nouvel eldorado des compagnies minières et pétrolières

Les Amis de la Terre, 2012


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