"Tours, Favellas et autres œuvres monumentales", Alfred Manessier

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Alfred MAnessier Tours, Favellas et autres œuvres monumentales

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APPLICAT–PRAZAN

AlfRed

Tours, Favellas et autres œuvres monumentales

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Fiac, 18-21 octobre 2012

Alfred

Tours, Favellas et autres Ĺ“uvres monumentales

Manessier


« Ces ciels éclairés par-dessous – et ces étranges formes qui se dressent bourrées de monde et de lampes qui s’éteignent peu à peu dans la nuit. Y a-t-il un refoulement (ou défoulement) des rêves nocturnes du dos de cette petite maison toujours inaccessible ? […] – Laisser venir – Passer à grande échelle (comme des psaumes) – le regard vers le haut. » Alfred Manessier

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Pierre Encrevé et Alfred Manessier dans l’atelier d’Émancé, septembre 1989.

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« Il paraissait interloqué devant ce qu’avaient produit ses pinceaux, tout à son idée qu’une fois que le peintre a commencé à poser des couleurs sur la toile c’est elle qui décide, et le conduit il ne sait où. » Pierre Encrevé

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Manessier, Tours et détours Pierre Encrevé

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n connaît l’anecdote de Courbet travaillant « sur le motif » qui demande à l’ami qui l’accompagne d’aller voir ce qu’il peut

bien être en train de peindre : « Un tas de fagots », lui dit-il, après avoir été vérifier. Alors Courbet, regardant sa toile : « Effectivement, c’est un tas de fagots ». Au printemps 1987, comme je commençais à préparer avec lui l’exposition Passions programmée pour l’année suivante, Manessier m’appelle un soir : « Viens donc voir demain ce que j’ai fait, je ne sais pas ce que c’est… » Il était au début de sa série, trois gigantesques tableaux verticaux, de quatre mètres sur deux d’un seul tenant au mur du fond de son atelier d’Émancé, une ancienne grange au bord d’une route de campagne, très grande, très haute, ouverte de larges verrières dans le toit et le mur nord-ouest. « Je croyais peindre des Banlieues, me dit-il, mais il semble que ce soient des Tours… » Deux autres toiles tendues sur des châssis de même dimensions attendaient leur Tour sur le mur d’en face. Il paraissait interloqué devant ce qu’avaient produit ses pinceaux, tout à son idée qu’une fois que le peintre a commencé à poser des couleurs sur la toile c’est elle qui décide, et le conduit il ne sait où. Déconcerté, mais déterminé. « Je ferai les cinq, un ensemble… Avec des dimensions pareilles, on ne pourra les montrer nulle part, personne n’en voudra… ». Plus tard dans la journée, il ajoutait : « Peu m’importe. Même si je savais que mes toiles devaient finir enterrées au fond du jardin, je les ferai. Je dois les faire. » Ces tableaux extrêmes, je suis revenu les scruter plusieurs fois, jamais semblables durant les trois années de leur lente élaboration. Manessier préparait les fonds à plat sur le sol de l’atelier, puis dressait les toiles contre le mur et, juché sur un échafaudage roulant qu’il escaladait allègrement, les peignait au pinceau touche à touche. Et les repeignait, dans une recherche patiente et sans fin de la couleur, la valeur, la brillance diaphane de chaque centimètre carré, sa vibration 9


lumineuse. Par les verrières de l’atelier, on voyait se succéder ces ronds nuages beaucerons qu’il aimait tant au-dessus d’un horizon d’arbres et de jardins, en contraste entier avec ses cinq banlieues élevées en tours étranges traversant la vie nocturne des dortoirs conurbains d’Île-de-France. Lentement au cours des mois, des années, d’avril 1987 à mai 1990, s’est organisée dans son atelier campagnard la succession de ces toiles en une suite « transposant » picturalement l’évolution lumineuse du paysage urbain de la banlieue sud, du soir qui tombe au lever du jour, qui avait si fortement impressionné la mémoire visuelle de Manessier les nuits de l’hiver 1985-1986. L’aventure commence quand il évoque à Émancé, dans ses inséparables Carnets, le 3 avril 1987, « ces ciels nocturnes si étranges, roses, orangés, cerise, rouillés, etc. et dont les bleus nocturnes sont affectés par réfraction. Ces ciels éclairés par-dessous – et ces étranges formes qui se dressent bourrées de monde et de lampes qui s’éteignent peu à peu dans la nuit. […] – Laisser venir – Passer à grande échelle (comme des psaumes) – le regard vers le haut. »1 Manessier laisse venir, et c’est la Tour au crépuscule 2 qui apparaît, provenant directement de cette « impression », tout comme la Tour de Minuit, plongée dans une nuit encore trouée de lampes électriques et la Tour de Noël, parée comme un sapin de lumières de fête multicolores. Mais la Tour hélépole habite le cœur obscur de la nuit, quand, les fenêtres enfin éteintes, il s’est emparé de la ville. À la voir terminée, Manessier la nomme très étrangement hélépole, comme s’il y percevait tout autre chose. La tour, qui symbolisait avec ses sœurs la condition des multitudes humaines des cités-dortoirs dans les illuminations changeantes du paysage urbain, a muté, par surprise, en une terrifiante machine de 10


guerre romaine, comme si la nuit noire projetait sur la ville une menace angoissante. Puis le jour se lève, qui balaie les cauchemars. Avec la Tour à l’aube, la banlieue rendue à la naissance du jour prend les couleurs d’un paysage du Nord, palette restreinte mais luminosité transfigurée, spiritualisée, dans la proximité de certains de ses matins de Pâques. Je ne pense pas qu’un autre ensemble de toiles lui ait jamais autant demandé que celui-ci. Les trois Espaces marins, de mêmes dimensions que les Tours et peints à leur suite en 1991 seront menés à terme en quelques mois. Mais les Tours l’ont longtemps déconcerté, jusqu’à ce que, tout projet externe oublié, leur pure picturalité s’impose à lui comme pleinement sienne. Rien ne rend mieux compte de ce long combat – appuyé sur une maîtrise technique exceptionnelle – avec et pour la peinture que ses Notes concernant ses choix chromatiques. Par exemple, son travail sur Tour à l’aube3 : « 6 mai 1987 : après-midi – apprêt de la toile Banlieue III : en grisperle bleuté clair – (en contraste avec la II : apprêt jaune d’or clair). 12 et 13 mai : attaquer la 3e Banlieue dans les gris. Blanc + bleu touareg + brun de Mars + les valeurs + jaune de Mars avec bleu touareg et blanc. 24 mai : travail toute l’après-midi (rapport ténu du rose et du vert). 10 juin : hier travail sur Banlieue III (aube) – éclairci vert et lilas pâles. 21 août 1989 : reprise de la Tour II (éveil de la Tour). Travail toute la journée. 12 octobre : reprendre la Tour II – élargir – faire respirer – prendre un large pinceau. 19 octobre : travail complètement idiot sur la Tour II toute la journée. 20 octobre : gratté et lavé à l’essence tout le travail d’hier. On est dans les nuages !... la toile prête à disparaître… sur la corde raide. À midi à peu près rétabli. Oublier. Laisser reposer. 11


17 avril 1990 : après-midi, reprise de la Tour II – éclaircir les violets et les verts du haut… et leurs conséquences. 18 avril : Il est bien vrai que les toiles se terminent toutes seules !... En trois heures la Tour II sans doute achevée sans mal ni douleur (et quelles suées en dessous) Thérèse aidant. 19 avril : élargi encore les formes bleues – simplifié à l’extrême “l’éveil de la tour “ ? (titre ?) : elle vient vraiment de s’éveiller !… elle s’étire… Terminé – 12 heures. » Les retrouvant vingt-cinq ans plus tard, toujours à Émancé, ces Tours, prêtes à quitter l’atelier pour retrouver sous les verrières du Grand Palais un lieu à leur mesure et à leur démesure, j’éprouve le même choc incrédule, et d’abord la même perplexité, le regard cherchant difficilement les identifiants de leur « manessiérité ». Puis l’œil s’acclimate et le peintre qui m’est familier apparaît pas à pas dans ces cinq fois huit mètres carrés de toile où la virtuosité picturale polychrome le dispute à la méditation itérative qu’elle engendre, tandis que « le regard vers le haut » qu’il appelait parcourt longtemps ses cinq chants balançant entre l’inquiétude et l’espérance. Le même Manessier et un autre pourtant, révélant des capacités de renouvellement, d’imagination créatrice, d’audace aussi, peu communes, s’obstinant des années sur ces cinq Tours qui lui restaient énigmatiques, plus «avant-gardistes » sans doute qu’il ne s’y attendait – très loin de l’ « art sacré non-figuratif » des années 50, de « l’abstraction lyrique » ou du « paysagisme abstrait » de tradition française dans lesquels on a si souvent voulu l’enfermer. Trois ans pour venir à bout de cet immense ensemble, sans d’ailleurs trouver de réponse à sa question initiale, sinon dans la sagesse du renoncement : « Même le peintre se trompe en se demandant ce qu’il a voulu dire. Seuls les peintures et leurs échos répondent bien quand on a oublié l’auteur, le commentaire… » Et de renvoyer à l’effet de « famille de 12


toiles » : « Il faudra voir un jour les Tours entourées des Favellas, leur cohabitation ; ce qu’elles ont à se dire ? » 4 Ce sera le cas au Grand Palais. Je tendrai l’oreille. Les peintures de Manessier, qui sont toujours à la fois pour lui image et langage, n’ont jamais été abstraites, si on entend par là des œuvres sans références extérieures à elle-même. Dans les années 40, il s’en défendait explicitement, préférant parler d’intériorisation du monde, de transposition, de non-figuration ; puis il s’est accommodé de l’étiquette de l’abstraction lyrique, peu concerné au demeurant par ces taxinomies approximatives. Mais ses toiles ne sont pas davantage liées pour lui à une référence mondaine fixe : chez Manessier la référence est le plus souvent multivoque, transitive, itinérante… Les paysages « déclencheurs » se muent en temps de la Passion et les chemins de Croix en autant de drames contemporains, où les mères de torturés modernes rejoignent celle du Christ, tandis que Martin Luther King, Salvador Allende ou Mgr Romero ne se distinguent plus du crucifié, comme les Tours ou Banlieues de Paris s’échangent souterrainement avec ses favelas5 brésiliennes imaginaires des années 1979 à 1983. Mais aussi bien avec ces premières esquisses de ses favelas que constituent, après coup, ses aquarelles des villages du M’zab et de Ghardaïa en 1976, qui avaient d’abord donné naissance à son rêve d’un port fluvial mexicain où rouillent des carcasses de bateaux abandonnés pour le frontispice destiné à La Puissance et la Gloire de Graham Greene. Les images dénotatives ou connotatives apparaissant sous le pinceau sont aussitôt défaites que proposées, et reprises. Dans le même temps que ses Tours, Manessier réalisait les vitraux de l’église du SaintSépulcre d’Abbeville menant le regardeur des ténèbres de la sixième heure jusqu’à l’aube du troisième jour, en passant par la nuit totale du sépulcre et de la descente aux enfers. Ses Tours, pour lesquelles il rejetait catégoriquement toute suggestion de titres « mystiques », 13


projettent sur la banlieue une version si laïcisée, si désacralisée de la même succession lumineuse qu’il semble ne pas l’avoir lui-même reconnue. Pour Manessier, une toile est un lieu de passage, le peintre est ce passeur qui fait communiquer expériences, espaces et temps, histoires et paysages que rien ne paraît rapprocher : « Ce sont les passages qui m’intéressent… Je ne crois pas que l’univers du peintre constitue un monde à part qui puisse se définir isolément du monde naturel, du monde poétique ou du monde spirituel. Entre toutes les formes de l’expérience humaine, quelque chose circule, qui en assure la profonde unité. C’est ce quelque chose, cette circulation que je m’efforce de faire apparaître. »6 C’est ce quelque chose qui l’amène à sublimer ici, de l’extraordinaire irradiation lumineuse de ses couleurs, l’obscurité nocturne du monde réel des cités de banlieue pour l’ouvrir à la certitude que le matin vient. Monde perdu, monde sauvé. Pierre Encrevé

Cette note, comme les suivantes, est extraite des carnets d’Alfred Manessier et a été publiée par Christine Manessier dans Alfred Manessier, Les Tours et autres peintures, Musée de Soissons, 2005.

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2  Tour qui n’est pas sans rapport avec le seul paysage urbain que Manessier ait peint auparavant, des décennies plus tôt, Longwy la nuit (1951, Museo Civico, Turin), où des couleurs apparentées tentaient de produire « un équivalent plastique » au ciel nocturne incendié par les hauts fourneaux.

Désignée ici d’abord comme Banlieue III puis Tour II, qui est d’abord le nom de la Tour de Minuit.

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Notes du 21 août 1988.

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J’adopte ici pour le terme portugais « favela » l’orthographe conventionnelle bien qu’elle n’ait pas été retenue, je ne sais pourquoi, par Alfred Manessier qui a titré manuscritement ses toiles, au dos, avec deux l : Favellas.

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Cf. Bernard Pingaud, « Parler avec les peintres », L’Arc, Cahiers méditerranéens, Aix-en-Provence, n° 10, printemps 1960.

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Circonstances de l’apparition des Tours Christine Manessier

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epuis leur expulsion de l’atelier de Vaugirard en 1973, mes parents souffraient d’un trop grand isolement à Émancé1, sur-

tout l’hiver, et ce malgré l’acquisition fin 1979 d’un pied-à-terre à Paris près de la mairie du quatorzième (quartier impossible pour se garer : papa devenait fou !). L’été 1985, une maison « banlieusarde à souhait » s’est trouvée à vendre, juste en face de chez moi à Clamart et sur le même trottoir que leur ami Jean Bazaine. La visitant le 30 juillet, mes parents sont aussitôt tombés sous le charme de la partie cachée de cette banale maison mitoyenne en meulière, dissimulant un délicieux jardin en pente s’évasant au fond en un vaste rectangle, où le rêve d’y construire un jour un atelier fut instantané. De plus, dominant un puzzle de charmants jardins avoisinants, la vue était superbe et bien dégagée à l’horizon vers le soleil levant – vue panoramique, se déployant du Sud-Est parisien à l’orée du bois de Clamart, avec juste dans l’axe la silhouette du clocher de l’église de la commune voisine, Châtillon2, son réseau urbain de pavillons, d’immeubles et d’une certaine « tour » dont le souvenir des illuminations nocturnes aidera bizarrement quelques mois plus tard le peintre à ne pas sombrer dans la déprime. Le 3 janvier 1986, Thérèse et Alfred Manessier s’installent à Clamart provisoirement. En effet, la maison vieillotte, surnommée par une amie Belle Allure, nécessite de nombreux arrangements. Néanmoins, la première nuit devant la vue est source d’émerveillement. Et dès le 7 janvier, mon père se met à dessiner. Il prend des notes de la vue « enchanteresse jour et nuit » de sa nouvelle maison : « grand ciel givré au soleil levant. Gris bleutés laiteux et or pâle légèrement orangé. [Plus bas :] arbres bleus et bruns. Quelques toits rouges givrés. [En bas :] herbe verte givrée ». À Clamart, la lumière et le dessin des nuages lui évoquent le Douanier Rousseau. Hélas les travaux commencés le 28 avril 1986 traînent et engendrent 17


de multiples malfaçons. Ils se dérouleront d’une manière si défectueuse, voire litigieuse, que les Manessier seront privés de leur piedà-terre jusqu’au 22 septembre 1987. Or singulièrement, de cette frustration dans ce moment de repli forcé à Émancé, vont étonnament surgir cinq toiles imposantes – Les Banlieues ou les Tours – dont la première approche fut un petit triptyque né des premières nuits passées ce premier hiver à Clamart. Ainsi, ce travail monumental trouve-t-il son origine dans trois modestes esquisses au pastel longtemps punaisées dans l’atelier d’Émancé. Sachez-moi témoin : le rude hiver 1986-1987 durement ressenti, le projet des vitraux de l’église du Saint-Sépulcre d’Abbeville encore au point mort, le fiasco et l’angoisse du chantier de Clamart avaient réellement provoqué chez mon père un état dépressif, accompagné d’une immense difficulté de peindre… jusqu’à un certain soir d’avril 1987 à Émancé : « Après avoir tourné en rond – brusquement – une, deux, trois études de Banlieues ! Le ciel de Clamart, cette lumière si particulière. Ces ciels nocturnes si étranges, roses, orangés, cerise, rouillés, etc. et dont les bleus nocturnes sont affectés par réfraction. Ces ciels éclairés par-dessous – et ces étranges formes qui se dressent bourrées de monde et de lampes qui s’éteignent peu à peu dans la nuit. Y a-t-il un refoulement (ou défoulement) des rêves nocturnes du dos de cette petite maison toujours inaccessible ? […] – Laisser venir – Passer à grande échelle (comme des psaumes) – le regard vers le haut.  »3

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Village situé aux confins de la Beauce.

Le travail préparatoire sur Les Banlieues ou les Tours a été présenté pour la première fois à la Maison des Arts de Châtillon du 11 mars au 8 mai 2005. 2

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Extrait de notes de l’artiste.

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Les Tours

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Tour au crépuscule 1987-1990 Huile sur toile 400 x 200 cm expositions

Osnabrück, Kunsthalle Dominikanerkirche, Alfred Manessier : peinture, vitrail, lithographie, 16 juin - 18 août 1996 Soissons, Arsenal-Musée de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 24 juin - 28 août 2005, cat., rep. coul. p. 31

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Tour de minuit 1987-1990 Huile sur toile 400 x 200 cm expositions

Osnabr眉ck, Kunsthalle Dominikanerkirche, Alfred Manessier : peinture, vitrail, lithographie, 16 juin - 18 ao没t 1996 Soissons, Arsenal-Mus茅e de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 24 juin - 28 ao没t 2005, cat., rep. coul. p. 35

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Tour de Noël 1987-1990 Huile sur toile 400 x 200 cm expositions

Osnabrück, Kunsthalle Dominikanerkirche, Alfred Manessier : peinture, vitrail, lithographie, 16 juin - 18 août 1996 Soissons, Arsenal-Musée de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 24 juin - 28 août 2005, cat., rep. coul. p. 33

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Tour hélépole 1987-1990 Huile sur toile 400 x 200 cm expositions

Osnabrück, Kunsthalle Dominikanerkirche, Alfred Manessier : peinture, vitrail, lithographie, 16 juin - 18 août 1996 Soissons, Arsenal-Musée de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 24 juin - 28 août 2005, cat., rep. coul. p. 39

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Tour à l’aube 1987-1990 Huile sur toile 400 x 200 cm expositions

Osnabrück, Kunsthalle Dominikanerkirche, Alfred Manessier : peinture, vitrail, lithographie, 16 juin - 18 août 1996 Soissons, Arsenal-Musée de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 24 juin - 28 août 2005, cat., rep. coul. p. 37

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favellas et autres Ĺ“uvres monumentales

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Offrande du soir ou Litanies 1960 Huile sur toile 300 x 150 cm Signée et datée en bas à droite Monogrammée, datée et titrée au dos expositions

Venise, XXXIe Biennale de Venise, 1962* Londres, Tate Gallery, Painting and sculpture of a decade, 54/64, avril - juin 1964, cat. n° 156 Soissons, Arsenal-Musée de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 24 juin - 28 août 2005 * En 1962 : le Grand Prix international de Peinture a été attribué à Alfred Manessier ; celui de Sculpture à Alberto Giacometti.

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Hommage II à Dom Helder Camara (Favellas II) 1981 Huile sur toile Signée et datée en bas à gauche Titrée en bas à droite Monogrammée, datée et titrée au dos 260 x 260 cm expositions

Paris, musée de la Poste, Manessier, 18 déc. 1981 - 24 janv. 1982, cat. n° 31 Paris, musée des Arts décoratifs, Sur Invitation, 6 juin - 17 sept. 1984 Antony, Maison des Arts, Alfred Manessier, peintures, aquarelles, lavis, vitraux, 13 janv. - 27 fév. 1994 Meudon, Centre d’Art et de Culture, Alfred Manessier – Combats pour l’Espoir, 17 nov. 2000 - 28 janv. 2001, cat., rep. coul. p. 19 Soissons, Arsenal-Musée de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 25 juin - 28 août 2005 Saint-Riquier, Centre culturel de Rencontre / Abbaye de Saint-Riquier – Baie de Somme, Manessier - Du tragique à la lumière, 1937-1989, 23 juin - 23 sept. 2012, cat., rep. coul.

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Favellas V 1983 Huile sur toile Signée et datée en bas à droite Monogrammée, datée et titrée au dos 230 x 200 cm expositions

Paris, Galerie de France, Alfred Manessier 83, peintures et lavis récents, 19 déc. 1983 - 5 fév. 1984, cat., rep. coul. p. 41 Le Havre, musée des Beaux-Arts André Malraux, Alfred Manessier et l’Union havraise des Arts plastiques, 21 mars - 16 avril 1984, cat. no 18 Halmstad, Mjällby Konstgard, Alfred Manessier - Favellor, 27 mai - 8 juillet 1984 Béthune, La Rotonde, 1927-1986, Présences régionales dans l’art contemporain, 18 oct. - 18 nov. 1986, cat. no 9, rep. coul. p. 59 Lyon, ELAC, Manessier, La Passion, 1948-1988, 19 fév. - 4 avril 1988 ; Besançon, musée des Beaux-Arts et d’Archéologie, 22 avril - 23 mai 1988 ; Luxembourg, Château de Vianden, Festival d’Echternach, 7 juin - 24 juillet 1988 ; Halmstad, Mjällby Konstgard, 31 juil. - 2 oct. 1988  ; Dublin, Royal Hospital Kilmainham, 2 nov. - 4 déc. 1988, cat. no 27, rep. coul. Abbeville, Musée Boucher-de-Perthes, Manessier, œuvres 1927-1989, 23 juin - 30 sept. 1990, cat., rep. coul. p. 50 Paris, Galeries nationales du Grand Palais, Rétrospective Alfred Manessier, 7 oct. 1992 - 4 janv. 1993 ; Rome, Académie de France, Villa Médicis, 10 fév. - 4 avril 1993 ; Budapest, musée des Beaux-Arts, 6 mai -  18 juil. 1993, cat., rep. pp. coul. p. 112 Osnabrück, Kunsthalle Dominikanerkirche, Alfred Manessier : peinture, vitrail, lithographie, 16 juin - 18 août 1996, cat. no 4 Cambrai, Musée de Cambrai, Alfred Manessier, 24 janv. - 17 mai 1998, cat. no 31 Meudon, Centre d’Art et de Culture, Alfred Manessier – Combats pour l’Espoir, 17 nov. 2000 - 28 janv. 2001, cat., rep. coul. p. 21 Soissons, Arsenal-Musée de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 25 juin - 28 août 2005 Saint-Riquier, Centre culturel de Rencontre / Abbaye de Saint-Riquier – Baie de Somme, Manessier - Du tragique à la lumière, 1937-1989, 23 juin - 23 sept. 2012, cat., rep. coul.

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Favellas VI 1983 Huile sur toile Signée et datée en bas à gauche Monogrammée, datée et titrée au dos 230 x 200 cm expositions

Paris, Galerie de France, Alfred Manessier 83, peintures et lavis récents, 19 déc. 1983 - 5 fév. 1984 Le Havre, musée des Beaux-Arts André Malraux, Alfred Manessier et l’Union havraise des Arts plastiques, 21 mars - 16 avril 1984, cat. n° 19 Halmstad, Mjällby Konstgard, Alfred Manessier - Favellor, 27 mai - 8 juil. 1984 Lyon, ELAC, Manessier, La Passion, 1948-1988, 19 fév. - 4 avril 1988 ; Besançon, musée des Beaux-Arts et d’Archéologie, 22 avril - 23 mai 1988 ; Luxembourg, Château de Vianden, Festival d’Echternach, 7 juin - 24 juil. 1988 ; Halmstad, Mjällby Konstgard, 31 juil. - 2 oct. 1988 ; Dublin, Royal Hospital Kilmainham, 2 nov. - 4 déc. 1988, cat. n° 25, rep. coul. Abbeville, Musée Boucher-de-Perthes, Manessier, œuvres 1927-1989, 23 juin 30 sept. 1990, cat., rep. coul. p. 51 Paris, Galeries nationales du Grand Palais, Rétrospective Alfred Manessier, 7 oct. 1992 - 4 janv. 1993 ; Rome, Académie de France, Villa Médicis, 10 fév. - 4 avril 1993 ; Budapest, musée des Beaux-Arts, 6 mai 18 juil. 1993, cat., rep. pp. coul. p. 113 Osnabrück, Kunsthalle Dominikanerkirche, Alfred Manessier : peinture, vitrail, lithographie, 16 juin - 18 août 1996, cat. n° 5 Cambrai, Musée de Cambrai, Alfred Manessier, 24 janv. - 17 mai 1998, cat. n° 32, rep. coul. p. 27 Meudon, Centre d’Art et de Culture, Alfred Manessier – Combats pour l’Espoir, 17 nov. 2000 - 28 janv. 2001, cat., rep. coul. p. 212 Soissons, Arsenal-Musée de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 25 juin - 28 août 2005, cat., rep. coul. p. 13 Saint-Riquier, Centre culturel de Rencontre / Abbaye de Saint-Riquier – Baie de Somme, Manessier - Du tragique à la lumière, 1937-1989, 23 juin - 23 sept. 2012, cat., rep. coul. bibliographie

Bernard Ceysson, Jean-Marie Lhôte, Christine Manessier, Manessier, Lumière du Nord, Tournai : Édition La Renaissance du Livre, 2000, rep. p. 182

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Hommage à Oscar Arnulfo Romero, archevêque de San Salvador assassiné le 24 mars 1980 3 mai 1980 Huile sur toile Signée, datée et titrée en bas à gauche 300 x 200 cm expositions

Paris, Musée de la Poste, Manessier, 18 déc. 1981 - 24 janv. 1982, cat. n° 1 Le Havre, Musée des Beaux-Arts André Malraux, Alfred Manessier et l’Union havraise des Arts plastiques, 21 mars 16 avril 1984 Arras, Centre Noroît, Manessier, peintures et lavis, 1948-1985, 22 mars - 19 mai 1986, rep. coul. p. 8 Lyon, ELAC, Manessier, La Passion, 1948-1988, 19 fév. - 4 avril 1988 ; Besançon, musée des Beaux-Arts et d’Archéologie, 22 avril - 23 mai 1988 ; Luxembourg, Château de Vianden, Festival d’Echternach, 7 juin - 24 juil. 1988 ; Halmstad, Mjällby Konstgard, 31 juil. 2 oct. 1988 ; Dublin, Royal Hospital Kilmainham, 2 nov. - 4 déc. 1988, cat. n° 23, rep. coul. Blois, musée du Château de Blois, L’Art et le crime, l’assassinat politique dans la peinture d’histoire, 9 oct. - 13 déc. 1998 Soissons, Arsenal-Musée de Soissons, Alfred Manessier : les Tours et autres peintures, 25 juin - 28 août 2005 Saint-Riquier, Centre culturel de Rencontre / Abbaye de Saint-Riquier – Baie de Somme, Manessier - Du tragique à la lumière, 1937-1989, 23 juin - 23 sept. 2012, cat., rep. coul. bibliographie

Bernard Ceysson, Jean-Marie Lhôte, Christine Manessier, Manessier, Lumière du Nord, Tournai : Édition La Renaissance du Livre, 2000, rep. p. 180

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Biographie

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1911 5 décembre : naissance d’Alfred Léon Nestor Manessier, au domicile “épicerie-buvette” de ses grandsparents maternels 1, Ovide (ancien tisserand-cordier) et Céline TellierHoubé, rue de la Cavée à Saint-Ouen, village industriel à vocation textile du val de Nièvre en Picardie. Blanche et Nestor Manessier, ses parents, demeurent 68 boulevard de la République à Abbeville. Son père est comptable à I’Usine à gaz. II reçoit le prénom d’Alfred en mémoire de son oncle maternel, décédé le 19 août 1909. Son oncle paternel, Léon Manessier, compagnon du tour de France, maître charpentier, installé 209 boulevard Voltaire à Abbeville, a une fille Marcelle née en 1907.

1912 24 mai : Ovide et Céline Tellier achètent une grande propriété à Abbeville, Faubourg Thuison, au n° 10 de la Grande-Rue, à la lisière du Novion 2 qui coule en contrebas d’un grand verger. Cette installation offre le prétexte d’un regroupement familial autour du petit Alfred qui restera enfant unique.

Alfred ManeSsier 1911-1993

Alfred Manessier dans son atelier d’Émancé, le 27 avril 1991.

1914-1918 La Première Guerre mondiale, déclarée début août, le prive de son père, envoyé au front (Charleville, Épernay, Remiremont). Les permissions sont rares. Incorporé dans le 3e Génie, Nestor sera retenu au-delà de I’Armistice en Lorraine reconquise. Ses poumons seront fragilisés et son caractère obscurci. À son retour, il est presque un étranger pour son fils qui – pendant plus de quatre ans – a été élevé dans I’immense tendresse de ses grandsparents et de sa mère. C’est pendant cette période troublée que I’enfant – initié par son fantaisiste grand-père Ovide, pêcheur averti – s’émerveille en découvrant la nature, sa poésie et ses secrets, les étangs et les marais picards, la lumière du Nord si changeante de l’aube jusqu’à la nuit et selon le cycle des saisons. Vers le printemps 1918, une partie de la famille est obligée de fuir Abbeville, et se réfugie quelques mois dans le Calvados, à Thury-Harcourt. Le petit Alfred y est même inscrit à I’école, où il subit, terrorisé, un instituteur belge qui le menace de son sabot, particulièrement au moment d’apprendre à distinguer la gauche de la droite 3. De retour à Abbeville, il fréquente I’école primaire de Thuison et I’école municipale de musique où il aurait montré des dons pour le violon.

1919 17 juillet : le décès de sa grandmère Céline survient au moment heureux – avec le retour de Nestor – de la paix enfin recouvrée. Un séjour au Crotoy offre à I’enfant I’occasion de découvrir la baie de Somme et le plaisir de premières vacances de détente 4. II n’a pas encore huit ans. Vraisemblablement à la fin de I’année, sa mère, gravement malade, doit faire un long séjour à la clinique du Docteur Chalochet d’Abbeville.

1920-1921 Quelques mois plus tard, BIanche reste toujours faible. Nestor décide 46


d’inscrire son fils à l’internat du lycée de la rue Frédéric-Petit à Amiens 5. Cette séparation provoque chez le jeune pensionnaire la fin de son “paradis d’enfance” et de ses “dons” musicaux. Le directeur du Conservatoire de musique d’Amiens, refusant son inscription dans la classe de violon, lui propose, sans succès, la classe de harpe qui n’attire pas les élèves 6.

1922

1928 7 août : Alfred Manessier peint un rare Autoportrait en clair-obscur.

1929-193010 Manessier est à la fois reçu à I’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris en section de Peinture (qu’il ne rejoindra pas, car son père n’entend pas que son fils puisse devenir peintre) et admissible en section d’Architecture.

11 février : vente de la propriété de Thuison.

1930-1931

18 juin : communion d’Alfred, toujours pensionnaire, à Amiens.

Reçu en section d’Architecture de I’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris, son inscription à la Grande-Masse est enregistrée le 21 octobre 1930.

10 août : ses parents reprennent un négoce de “Vins & eaux-de-vie en gros” situé 15 rue Gresset et 22 rue des Capucins à Amiens. Probable reprise de la vie familiale à la rentrée scolaire en tant qu’externe.

1923 En vacances au Crotoy, Manessier effectue de premières aquarelles que sa mère a I’audace de montrer à un artiste-peintre, Matignon, dont il reçoit les encouragements.

1924-1925 Inscription à I’école régionale des Beaux-Arts d’Amiens 7, où il commence des cours de composition décorative avec Gustave Riquet et des cours de dessin linéaire avec M. Dory. II se lie d’amitié avec Jean Bléhaut, Max Vasseur et sa future femme Yvonne. Noël 1924 : une boîte de peinture à I’huile lui est offerte.

1925 à 1929 II reçoit à l’École régionale des Beaux-Arts d’Amiens une formation artistique complète mais très académique par le suivi régulier de cours supérieurs de peinture, de dessin, de modelage et aussi d’architecture. Plusieurs prix lui sont attribués, dont un prix spécial offert par le ministre de l’Instruction publique et des Beaux-arts et le 1er prix de “Paysages d’après nature” en 1928 ; le 1er prix ex æquo 8 d’aquarelle et le 1er prix de dessin linéaire d’architecture en 1929. Son surnom d’étudiant est “Manéo”. II partage ses loisirs entre la peinture sur le motif, seul ou avec ses amis Pierre Baudouin et Philippe Dassé ; I’aviron avec ses amis Delval et Postel, allant jusqu’à suivre le cours de la Somme d’Amiens à Saint-Valéry. En hiver, il aime patiner sur le plan d’eau glacé au parc de la Hôtoie. II lui arrive d’être figurant ou choriste à la Jeune Comédie du Théâtre qui existait rue des Trois-Cailloux à Amiens.

Vers 1927-28 L’adolescent est troublé par la découverte d’une reproduction de Picasso dans une revue d’art à la bibliothèque de l’École et choqué par le ricanement de ses camarades. Sans doute à cette même époque son parrain, le journaliste Émile Buré 9, lui offre une biographie de Rembrandt, qu’il considérera toute sa vie comme son véritable père spirituel.

10 mars 1931 : il entre en 2e classe dans I’atelier Recoura-Mathon, situé au dernier étage d’un vieil immeuble rue Mazarine ; puis au 5e étage du bâtiment d’angle de la rue JacquesCallot. II se lie avec un “ancien”, Marcel Perroncel, originaire de I’Isère. Durant plusieurs mois, son père I’oblige à rentrer chaque soir à Amiens par le train. Dès son arrivée à Paris, son attirance pour la peinture persiste et pousse I’étudiant en architecture à traverser la Seine presque quotidiennement 11 pour se rendre au musée du Louvre, où Perroncel 12 lui présente un ami venu de Lyon, Jean Le Moal, avec lequel il sympathise vite. En ces années de formation, les deux amis multiplient ensemble découvertes, recherches et expériences. II leur arrive de détourner I’argent destiné à la nourriture pour I’achat de matériel destiné à la réalisation de copies au Louvre d’après Tintoret (Suzanne au bain), Titien, Rubens, Rembrandt (Bethsabée) et Renoir (Les Nymphes). 14 décembre : Manessier assiste, enthousiaste, à la conférence que Le Corbusier donne à la salle Pleyel sur “l’architecture moderne”.

1932 Vraisemblablement cette année-là 13, il découvre avec joie la Hollande, à I’occasion d’un voyage d’études pour visiter la ville d’Hilversum, son nouvel hôtel de ville et rencontrer son architecte Willem Marinus Dudok 14 marqué par Ie mouvement De StijI. Manessier est Ie seul étudiant à remarquer un tableau de Mondrian accroché dans son bureau. 8 mars : arrivée d’un “nouveau”, Pierre Brunerie 15, qui devient un de ses meilleurs amis de I’École. En sa compagnie, il participera à des réunions, Ie soir, de I’Association des écrivains et artistes révolutionnaires. À la mi-juin : Manessier doit interrompre ses études pour raisons de santé (pleurésie). Séjour forcé jusqu’en octobre à Saint-Nizier-duMoucherotte, dans Ie Dauphiné. À son retour, installation précaire à Montrouge (18 rue Perrier). Parallèlement à ses études d’architecture qu’il reprend par obéissance à son père, il fréquente, avec Le Moal, certaines académies libres de Montparnasse.

1933 Entre à la Société des artistes indépendants. Ses vacances se partagent entre la côte 47

d’Opale, où une parente, “cousine Lucie”, I’invite chaque mois d’août dans sa villa Le Muguet (18 rue Saint- Louis) à ParisPlage 16, et la baie de Somme, au Crotoy en septembre où il retrouve son ami Paul Lecat (fils du directeur de I’école), la mer pour naviguer et le motif pour peindre.

1934 2 février-11 mars : participe au cinquantenaire du Salon des Indépendants avec une Nature morte et un Paysage. Son adresse est indiquée : 117 rue Notre-Dame-des-Champs, Paris 6e. André Masson, avant son départ en Espagne, se trouve être son voisin. (Participe aux manifestations de février contre le fascisme.) En mai : rejoint ses amis Le Moal et Rouvre pour quelques jours d’évasion en Provence et de peinture sur le motif autour d’Eygalières. 16 juillet : entrée en 1re classe de I’atelier d’architecture Recoura-Mathon. Certains de ses camarades – frappés par la qualité de ses “rendus” – sollicitent son aide de dernière minute. En novembre : s’inscrit avec Le Moal à I’Académie Ranson où le peintre Bissière vient d’ouvrir un cours d’initiation à la fresque 18, deux après-midi par semaine. Sa conception de l’enseignement est particulière 19 ; se défendant bien d’être “professeur”, il préfère être “conseiller” auprès des jeunes peintres qu’il encourage “à réfléchir sur les expériences cubistes et les engage avant tout à préserver leur indépendance 20”.

1935 18 janvier-3 mars : Manessier expose deux Compositions au Salon des Indépendants. Un moule de sculpture posé par hasard dans le jardin d’entrée de I’Académie Ranson déclenche un premier grand tableau qu’il considère comme fondateur : Les Dieux marins. 15 avril : part au service militaire 21. 23 avril : incorporé à Metz au 507e Régiment de chars de combat (RCC) comme chasseur 2e classe, puis 1re classe. 17 mai : affecté à la Compagnie hors-rang, “Ie plus dur bataillon du régiment” 22, il est secrétaire-comptable au casernement. II lui arrive de dessiner, dans un esprit surréalisant convenant à la situation, des compositions inspirées de canons... ou d’un trognon de chou. En permission à Paris le dimanche 23 juin : visite du premier Salon de l’art mural 23. II avait participé à sa préparation avant son départ à I’armée.

1936 Poursuite de son service militaire à Metz, sans aucun espoir d’un rapprochement de Paris. En mars, son père tombe malade. Son état s’aggrave. Difficile permission pour se rendre à Amiens où, le 14 mars, Nestor Manessier meurt à 52 ans en présence de son fils. Bien que libérable le 15 avril, il sera maintenu sous les drapeaux un long mois 24, en raison des menaces de guerre. Sa hâte d’être auprès de sa mère est grande. Son grandpère Ovide décède le 3 mai à Amiens. Renvoyé dans ses foyers le 15 mai, juste


avant I’arrivée du Front populaire. La reprise de ses études d’architecture pour obtenir son diplôme est difficile. II monte cependant en loge pour un concours à rendre le 11 juillet et deux autres projets 25. Sa présence à Amiens auprès de sa mère devient nécessaire : le commerce familial est au bord de la faillite. C’est dans ce contexte que Manessier devient négociant en vins 26, abandonnant I’architecture à jamais et renonçant momentanément à la peinture (à part quelques esquisses).

1937 En mai 27 : ne résiste pas à rejoindre I’equipe 28 dirigée par Félix Aublet pour la réalisation des décorations monumentales d’Aublet et des Delaunay destinées au Palais des chemins de fer. II vit en direct l’aventure collective de l’Exposition internationale de Paris. Profondément bouleversé par la guerre d’Espagne, il assiste, fasciné, à la mise en place par Picasso de Guernica au pavillon de I’Espagne républicaine. 5 ou 7 juin : Manessier quitte le chantier avant la fin. II lui faut résoudre les problèmes du commerce paternel qui doit être liquidé le 31 décembre. Cette liquidation se fait en accord avec sa mère, qui n’hésite pas à vendre tous ses biens 29 et à quitter Amiens avec son fils afin qu’il puisse risquer une vie de peintre à Paris.

1938 11 janvier : déménagement d’Amiens à Paris 15e, dans un atelier de moulage, 4 rue Franquet. Manessier se remet ardemment à la peinture. Sous le choc de la montée du nazisme 30, il en donne une vision apocalyptique (et prémonitoire) dans une toile – Le dernier cheval – et son dessin préparatoire qui affiche une croix gammée et manifeste un véhément “À bas Hitler”. Les Lunatiques reflètent également sa profonde inquiétude du moment. Ces tableaux figurent à I’exposition Témoignage 31 à la galerie Matières (9 rue des Canettes, à Paris 6e). II rencontre sa future épouse, Thérèse Simonnet, au cours du vernissage le 10 mai. En été, Le Moal I’invite dans son moulin du golfe du Morbihan. II retrouve Thérèse 32 qui séjourne avec Elvire Jan à Larmor-Baden. 15 octobre : leur mariage a lieu en l’église Saint-Pierre de Chaillot à Paris 16e.

1939 En juillet 1939 : le jeune couple s’installe au 203 rue de Vaugirard, à Paris 15e 33. Heureux d’avoir trouvé à louer – grâce à Bazaine – une maison, sans grand confort certes, mais avec un jardinet et surtout un atelier au dernier étage. Claude Simonnet, le frère de Thérèse, alors étudiant à la Sorbonne, demeure avec eux. Ils se lient d’amitié avec leurs voisins Gustave et Raymonde Singier qui les présentent à Charles Walch. Manessier se trouve en vacances au Crotoy (6 rue du Calvaire) lorsqu’il est rappelé sous les drapeaux le 26 août 1939 ; affecté le lendemain au dépôt du 507e Régiment de chars de combat à Marly-en-Moselle. 10 septembre : envoyé au dépôt de Vannes pour y former un régiment de réserve. Lorsque ce régiment doit partir

à Sedan où il sera décimé, Manessier est appelé comme dessinateur au service technique de I’lnfanterie, 1 place Saint-Thomas-d’Aquin à Paris.

et le Bignon, qui lui offre un cadre favorable à la peinture jusqu’aux lendemains de la guerre.

1943

1940 Pendant la “drôle de guerre”, il est cantonné à Saint-Germain-enLaye, dans une villa (4 rue Franklin), dépendant du ministère de la Guerre. 10 juin : exode général. Devant I’avancée allemande, Ie ministère se replie à Bordeaux. 29 juillet : Manessier, démobilisé à Port-Sainte-Marie, dans Ie Lot-et-Garonne, achète une bicyclette et rejoint Blanche et Thérèse (sur Ie point d’accoucher), réfugiées depuis le 11 juillet chez Bissière à Boissiérettes 34 dans Ie Lot. Retiré de la scène artistique parisienne depuis la mi-juillet 1939, Bissière se consacre alors à I’exploitation de ses terres et de ses bois. Son ancien élève I’aide comme bûcheron et garçon de ferme plusieurs mois. 3 août : naissance de son fils JeanBaptiste à la maternité de Cahors. À I’automne : la famille s’installe dans une vieille demeure à Benauge 35, hameau voisin.

1941 Vraisemblablement en avril : une carte interzone envoyée par Bazaine – chargé de la section Arts plastiques au sein de I’Association Jeune France 36 – incite Manessier, sans ressource et chargé de famille, à quitter le Lot. Un poste de moniteur I’attendrait à Paris. Les Manessier font un détour par Mortagne-au-Perche, en Normandie, afin de présenter leur fils à la famille de Thérèse. 10 mai : Manessier, arrivé la veille à Paris, assiste au vernissage de I’exposition Vingt jeunes peintres de tradition française à la galerie Braun. II trouve accrochées plusieurs de ses toiles d’avant-guerre, choisies en son absence par son beaufrère Claude Simonnet 37, Gustave Singier et Jean Bazaine, chargé de I’organisation de I’exposition avec André Lejard. Daniel Apert en est Ie régisseur. Début juin : commence un stage d’un mois et demi comme moniteur au Centre Bournazel à Gennevilliers auprès de jeunes de 14 à 18 ans, avant de rejoindre Ie Bureau d’études des arts plastiques de Jeune France 38.

1942 3 mars : le bombardement de BoulogneBillancourt lui inspire un dessin à l’encre de Chine et une rare toile sur la guerre titrée Apocalypse qu’il détruira. 20 mars : dissolution de I’association Jeune France 39. Reprise de son travail personnel. Aquarelles et huiles (Femme à I’enfant, Femme au petit chat, L’Homme à la branche 40). 30 mai : verse un premier acompte pour l’achat 41, le 2 juin, d’une modeste maison au Bignon, commune de Réveillon (Orne), près de Mortagne où demeure la famille de Thérèse. À partir d’août, la vie du peintre et des siens s’organise entre Paris 48

6 février-4 mars : participe à I’exposition collective Douze peintres d’aujourd’hui 42 à la Galerie de France à Paris, aux côtés de Bazaine, Borès, Chauvin, Estève, Fougeron, Gischia, Lapicque, Le Moal, Pignon, Singier, Villon. Mai : réunion constitutive du futur Salon de Mai 43, à l’initiative de Gaston Diehl. La décision est prise de fonder à la Libération un Salon consacré aux nouvelles générations, dont le nom est proposé par Despierre. En vue de sa préparation, Manessier participera aux réunions clandestines qui ont lieu dans l’entresol discret d’un restaurant de la rue Dauphine. II sympathise avec le sculpteur et graveur Henri-Georges Adam. 18 juin : Camille Bourniquel, étudiant à la Sorbonne et jeune écrivain, vient lui acheter quatre petites toiles. C’est le début d’une solide amitié. En août : les Manessier reçoivent au Bignon Elvire Jan et Camille Bourniquel qui, lui, loge à Mortagne. À la mi-septembre, Bourniquel revient dans le Perche dans I’intention de faire une retraite à la Trappe 44. II loge alors au Bignon. 16 septembre : Manessier, par curiosité, demande d’accompagner son ami à Soligny. Ils y restent trois jours. Cette expérience spirituelle bouleversera sa vie et son œuvre.

1944 Reçoit la visite de René Drouin et Gildo Caputo : un contrat lui est proposé le 15 avril qui prendra fin le 10 octobre 1948. Début juin : dix-huit personnes cohabitent au Bignon. Le sculpteur Étienne-Martin et sa famille viennent s’y réfugier, car Mortagne où ils demeurent est bombardée le 6 juin, jour du débarquement allié. 27 juin-20 juillet : chargé d’une enquête par le maire de Mortagne, Manessier assure la prospection, les relevés et I’aménagement d’anciennes carrières pour abriter la population civile mortagnaise et des environs en cas de bataille. À la mi-août : la région de Mortagne est libérée par le 19e corps de l’armée américaine qui traverse la commune de Réveillon le 15 août. Trois soldats américains sont accueillis plusieurs jours au Bignon. 25 août 1944 ou Les Cloches de NotreDame, première toile événementielle en évocation de la Libération de Paris, sera signée le 8 janvier 1946. Expose Les Pèlerins d’Emmaüs au Salon d’automne de la Libération.

1945 13 avril : naissance de sa fille Christine à Paris. 29 mai : ouverture du premier Salon de mai à la galerie Pierre Maurs (3 avenue Matignon), auquel sont


invités des écrivains 45. Trois hommages y sont rendus à des aînés : Bissière (à I’initiative de Manessier), Hecht et Laurens. Manessier y expose deux gravures et un 120 F : Salve Regina, toile 46 inspirée du chant sacré entendu à la Trappe. Avant juin : création des décors et costumes de Marie-Anne Victoire, pièce de Jacques Tournier, mise en scène de Maurice Jacquemont au Studio des Champs-Élysées. Début juin : à la demande de son ami I’architecte Édouard Albert, il forme équipe avec Le Moal et Singier pour décorer le Centre d’accueil des prisonniers et rapatriés de Thionville. En juillet : quelques jours de vacances à Larmor-Baden en Bretagne (Dimanche breton, Le Phare de Port-Navalo, Port-Lagaden, Le Golfe). L’été se poursuit en famille au Bignon, tout en travaillant, parfois en plein air.

1946 Du 30 novembre au 21 décembre : expose 16 œuvres, dont le Salve Regina, à la galerie René Drouin, 17 place Vendôme à Paris, aux côtés de ses amis Le Moal et Singier. Camille Bourniquel signe les textes du catalogue. En été : Manessier et sa famille séjournent dans le Lot chez Bissière.

1947 19 mai : reçoit à son atelier la visite d’lsabelle et de Georges Rouault 47. Fin août : vacances à I’Hôtel du Commerce au Crotoy, Pour la première fois depuis la déclaration de la guerre, il retrouve “sa chère” baie de Somme, avec une joie nouvelle : la faire découvrir à ses deux enfants. Soir d’été dans la baie de Somme est le premier signe pictural de ce retour.

7 décembre : pose aux Bréseux des deux vitraux du chœur 50 : Paysage doré et Paysage bleu.

et de lithographie à la Galleria Lattes.

1949

Avril : participe à la loterie organisée par Sandberg, directeur du Stedelijk Museum, au profit des sinistrés des inondations catastrophiques en Zeelande. Offre une peinture : David (120 F de 1948).

1er-30 avril : expose à la galerie Jeanne Bucher ses premières lithographies, des aquarelles et des toiles sur le thème de Pâques. Visite la Belgique en compagnie de Philippe Leclercq.

10 mars-4 avril : Pierre Matisse expose Manessier dans sa galerie à New York.

En été : vacances au Crotoy.

Été : vacances au Crotoy, Villa Jacky sur la plage, avec Jean Le Moal et ses deux enfants, Anne et François.

22 novembre-31 décembre : expose trente-deux toiles à la galerie BillietCaputo (30 rue de la Boétie). Parmi elles : Espace matinal, Le Flot en baie de Somme, Port du Crotoy au petit jour, Paysage picard, Les Ponts de Bruges, Le Long du rivage I & II.

En décembre : reçoit le 1er Prix de peinture décerné à la IIe Biennale de São Paulo pour Recueillement nocturne II, Magnificat des moissons, Étoile du matin et deux Couronnes d’épines.

1954

1950 Commence une série d’œuvres en rapport avec la montagne et I’hiver qu’il poursuit jusqu’en 1951 (Hiver, Hiver en montagne 51, Jeux dans la neige 52), suite à un séjour de détente à Saint-Cergue (Suisse) à skier avec Jean-Baptiste. Pâques au Crotoy. Manessier apporte sa réponse à “L’enquête sur la peinture” lancée par la revue Esprit et publiée en juin. Vacances d’été : aux Bréseux pour I’inauguration de I’ensemble des vitraux. La lecture de la correspondance de Mozart à son père et surtout la lettre du 4 avril 1787 lui inspirent une toile : Notre amie la mort ou La Lettre de Mozart à son père. II reprendra ce thème à la fin de sa vie.

Début des vacances à Ciboure, afin de se rapprocher du chantier du lycée climatique d’Argelès-Gazost pour le marouflage, aidé par Le Moal, d’une décoration (Jeux dans la neige) commandée par l’architecte Remondet. Plusieurs tableaux naissent de ce séjour, dont Nuit à Saint-Jean-de-Luz peint en 1955, acheté par la Fondation Sonja Henie et Niels Onstad en Norvège. Au retour : halte à Boissiérettes pour saluer Bissière. Fin des vacances à Locmariaquer.

1955 22 janvier : à Bruxelles pour son exposition au Palais des Beaux-Arts.

1951

26 février : son exposition au Stedelijk van Abbe-Museum d’Eindhoven est I’occasion d’un voyage en compagnie de E. de Wilde à travers la Hollande glacée et enneigée.

Présente au Salon de Mai une toile particulièrement importante dans I’évolution de son œuvre : Longwy la nuit 53.

Vacances d’été : au Crotoy, Villa Marie-Jeanne donnant sur le port. Série d’aquarelles et de dessins sur place.

6 juin : Manessier rend hommage à Rouault pour son 80e anniversaire au Théâtre du Palais de Chaillot. Vacances à I’île d’Oléron. Visite La Rochelle. Peint une série de ports, dont Forteresse et Port à Oléron. Plusieurs études (La Grande Forteresse) donneront un grand format : Turris Davidica.

En octobre : reçoit Ie Grand Prix international de peinture contemporaine de I’institut Carnegie à Pittsburgh pour sa Couronne d’épines (1954) et Ie Prix international de peinture de I’exposition de Valencia, au Venezuela.

1948

14 décembre : vernissage de sa première exposition personnelle à I’étranger à la galerie Apollo de Bruxelles.

Début février : escapade avec Singier de Dieppe à Honfleur (Entrée du port de Dieppe, Étretat, Falaises...)

En février : achète une ferme à Émancé, aux confins de la Beauce. La grange est transformée en vaste atelier où Manessier travaillera jusqu’à la fin de sa vie.

1952

5 juin 54 : vernissage de I’exposition à la Galerie de France, des toiles inspirées de la Hollande. Une lithographie Hiver hollandais constitue la couverture du catalogue. Plusieurs lithographies “hollandaises” seront alors tirées : Février en Hollande, Hollande-Ponts et canaux, Printemps nordique I & II. À cette époque, deux moines de I’abbaye de Ligugé, Dom Coquet et Jacques Dupeux, réalisent des émaux d’après Manessier, dont plusieurs dans la gamme hollandaise.

5 août : le père Avril, prieur du couvent des dominicains du Saulchoir, lui commande une tapisserie pour l’oratoire : Le Christ à la colonne 48, en accompagnement d’un tabernacle sculpté par Henri Laurens. Le tissage est réalisé à Felletin en 1948.

27 avril : après consultation de I’abbé Maurice Morel, Ie chanoine Lucien Ledeur 49, secrétaire de la Commission d’art sacré de Besançon, rend visite à Manessier pour lui proposer la création de vitraux dans une petite église du Doubs, aux Bréseux. 6 juillet : vacances au Crotoy (22 rue Carnot). Nouvelle série d’huiles et d’aquarelles inspirées par la baie de Somme : Barques dans la baie de Somme, Barques grises, Baie de Somme, Marée basse, Le Port bleu, Dimanche matin sur I’estacade... 18 novembre : le père Jacques Laval achète une Passion selon saint Matthieu pour le réfectoire du couvent des dominicains de la Glacière.

Début de son amitié avec les tisserands Plasse Le Caisne connus par Le Moal. Ils deviendront les interprètes privilégiés de la plupart de ses tapisseries et vêtements liturgiques. Pâques au Crotoy : (Jardins de Pâques, Printemps clair). Vacances en Bretagne à Lesconil. 5 décembre : exposition à la Galerie de France. 23 toiles sont accrochées, dont 7 grandes sur Ie thème de la Passion du Christ (Recueillement nocturne I & II, Nuit de Gethsémani, Barrabas, Litanies vespérales, Pour la fête du Christ-Roi). En contrepoint : deux Alléluia.

1953 4 février : se rend avec Gildo Caputo à Turin, pour son exposition de peinture 49

1956

En juillet : à I’occasion de la double rétrospective célébrant Ie 350e anniversaire de la naissance de Rembrandt, les Manessier retournent en Hollande avec Henri-Georges et Yvette Adam. Ils séjournent à Veere, à I’hôtel Campveerse Toren en Zeelande, où Reynold et Marthe Arnould les rejoignent. Retour par la


côte, Ie long de la mer du Nord et de la Manche jusqu’au Havre, avec un arrêt à Varengeville chez Georges Braque. Novembre : ébranlé par les événements de Hongrie, il s’engage dans une nouvelle voie en tant que témoin de l’histoire. Son angoisse s’inscrit dans un grand tableau qui lui a fait presque peur en le peignant : Requiem pour Novembre 1956.

1957 9 fevrier-10 mars : Denise et René Breteau célèbrent le 20e anniversaire de leur galerie en réunissant Bertholle, Beyer, Le Moal, Manessier, Étienne-Martin et Stahly. 16 mars : mort de Brancusi que Manessier, en voisin et ami, avait tant aimé visiter dans son atelier (impasse Ronsin) depuis les années 40. Vacances d’été à Locmariaquer. 2 novembre : les murs de dalles de verre et la mosaïque de la chapelle Sainte-Thérèse de I’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face (Hem) sont achevés. L’édifice a été conçu avec l’architecte Hermann Baur, à l’instigation de Philippe Leclercq, promoteur du projet et de sa réalisation 55.

1958 6 juin : invité à se joindre à Jean Cassou et à Chagall pour évoquer l’École de Paris, il prononce une conférence à l’auditorium du Pavillon de la France de I’Exposition universelle de Bruxelles. Vacances d’été : la pose fin juillet des vitraux de la chapelle Notre-Dame de la Paix, au Pouldu 56, I’entraîne d’abord dans Ie Finistère où la pluie n’a de cesse. Un besoin de soleil et de détente poussent alors les Manessier à la découverte de la région méridionale proche du Verdon, où Camille Bourniquel vient d’aménager, à Moissac-Bellevue, une maison qu’il partage avec Elvire Jan. La provocation graphique des rythmes de la nature est telle que Manessier exécute sur place une série de lavis sur des nappes en papier fournies par I’aubergiste de la Tour, à Aups. De retour à I’atelier, “infidèle” à la lumière du Nord, il commence à peindre des toiles liées aux paysages de Provence : Aube sur la garrigue, Colline à Moissac, Les Remous...

1959 Poursuite du travail sur la Provence dans I’atelier de Paris, puis celui d’Émancé : La Durance, Lumière crépusculaire, Les Maures, Le Mistral, La Montée à Moissac, Le Torrent I & II, Verdon I, II & III, Vers Tourtour... Effectue un deuxième séjour estival dans le Midi : à Moissac-Bellevue, puis au Mas de Chausse dans la Montagnette, chez son ami l’architecte Édouard Albert (La Nuit au mas). 16 septembre : visite la cathédrale de Chartres avec Charles Laughton venu à Émancé. Le célèbre acteur anglais, fidèle de la Galerie de France, compte dans sa collection plusieurs Manessier dont I’Hommage au saint poète Jean de la Croix peint en 1958. 27 novembre : exposition à la Galerie de France : Manessier, œuvres récentes – Haute-Provence, 1958-1959 (28 huiles et 32 lavis).

1960 8-14 avril : voyage à Rome, pour former – avec Raymond Cogniat, Bernard Dorival, Alberto Giacometti et Édouard Pignon – Ie jury du Prix de Paris à décerner à un artiste italien dans Ie cadre de la Viiie Quadriennale d’Art. La délégation française est reçue au Vatican pour une audience sollicitée par Ie pape Jean XXIII. 7-9 juillet : création de 340 costumes et scénographie – pour Ie Ve Festival international de ballets de Nervi à Gênes – de La Comédie humaine, interprétation chorégraphique de Léonide Massine du Decameron de Boccace. 11 juillet : passe quelques jours à Sienne. Visite la Toscane. 27 décembre : son fils Jean-Baptiste, effectuant son service militaire depuis déjà plusieurs mois, est envoyé en Allemagne.

1961 Dans l’angoisse du drame de la guerre d’Algérie 57 : il entreprend de grandes toiles sur Ie thème de la Passion (À été enseveli, Tumulte...). Vacances d’été : au Grand-Duché du Luxembourg, chez son beau-frère Paul FilleuI à Schrassig-Œtrange 58. La visite des usines d’Esch-sur-Alzette provoquera une série de toiles d’inspiration sidérurgique sur Ie feu : Esch les Forges, Le Feu, En Fusion, La Coulée. 7 octobre : à Amiens pour l’accrochage au musée de Picardie de toiles et de la tapisserie L’Estacade du Crotoy 59 tissée par les Plasse Le Caisne en 1960, d’après un petit lavis de 1955. En octobre : son fils Jean-Baptiste est envoyé en Algérie.

(le Prado), Avila. Retour par Burgos. Ce voyage provoque une nouvelle période de peinture : Jardin des oliviers, ou Hommage au Greco, Paysage espagnol, El Tajo sous l’orage... 21 avril : l’exécution de I’Espagnol Grimau vient obscurcir son retour d’Espagne. Vacances en août en Bretagne à Tréboul. 12 octobre : journée au Crotoy et dans la baie de Somme où il retrouve la lumière de son enfance, particulièrement belle en automne.

1964 Poursuite du travail sur l’Espagne : Hommage à Goya, Vent du soir sur Tolède, Vers Jativa... 19 au 24 mars : voyage en Allemagne où deux programmes de vitraux lui sont proposés. Crypte de I’église romane SaintGéréon à Cologne et église Unser Lieben Frauen à Brême de culte protestant. Retour par la Frise, Amsterdam (toujours la même émotion devant Rembrandt et Vermeer), Anvers et Lille. 6 mai : projet de tapisserie pour la salle du conseil du Port autonome du Havre où il retrouve la merveilleuse lumière argentée de la Manche. Septembre : séjour à La Ermita de Luchente en Espagne.

1965 Développement des maquettes de vitraux (Moutier, Brême) à Paris et des peintures espagnoles à Émancé : Torrent vert ou Hommage à Miguel de Unamuno, Terre espagnole, Survol de I’Estrémadure...

En lithographie, Manessier engage un livre de bibliophilie : Présentation de la Beauce à Notre-Dame de Chartres de Charles Péguy. Texte calligraphié aux couleurs de la Beauce.

1-3 avril : premier voyage en Scandinavie (survol du Danemark, de la Suède et de la Norvège) avec Myriam Prévot pour I’inauguration de sa rétrospective à la Kunstnernes Hus d’Oslo en présence du roi Olav. C’est I’occasion de retrouver ses amis Ole Henrik Moe et Henning Gran ; de rencontrer des collectionneurs norvégiens qui, dès 1949, ont été sensibles à certaines de ses œuvres, souvent nées de la lumière du Nord.

8 février : manifeste contre I’OAS et pour la paix en Algérie.

Début mai : court voyage en Espagne. Survol de la Mancha.

19 mars : proclamation du cessez-le-feu en Algérie.

1966

1962 Poursuite du thème de la Passion, dont le polyptyque L’Empreinte ou Les Ténèbres.

16 juin-7 octobre : Jacques Lassaigne choisit de présenter à la XXXIe Biennale de Venise 60 quatorze toiles sur la Passion et la Résurrection. Manessier reçoit le Grand Prix international de peinture et le Prix de I’Institut liturgique catholique. 3 juillet : indépendance de I’Algérie. 5 septembre : à Marseille pour le retour d’Algérie de Jean-Baptiste.

1963 Jean Vilar inscrit au répertoire du TNP La Vie de Galilée de Brecht, mise en scène de Georges Wilson (Galilée). Manessier signe les costumes et son fils le dispositif scénique. Début avril : découvre I’Espagne 61, de Barcelone à Valencia. Pâques à La Ermita de Luchente. Puis visite Tolède, Madrid 50

En Espagne jusqu’au 12 janvier : Manessier se repose 63 tout en dessinant à La Ermita afin de raviver son émotion pour la reprise du travail espagnol. 10 mars : réinstallation de I’atelier d’Émancé centré sur I’Espagne : Nuit à La Ermita, Douceur hivernale, Ombre escarpée, Terre assoiffée, Espace hivernal… et de petits formats. 3 juin-24 septembre : exposition à la Galerie de France réunissant des œuvres des années 1963 à 1966. 20 juin : visite avec les Plasse Le Caisne Ie chantier du nouvel hôtel de ville de Grenoble pour le projet d’une tapisserie dans la salle des mariages. Fin août : voyage éclair en Suède à Lund pour I’installation au Skissernas Museum de ses maquettes de vitraux (Hem, Le Pouldu).


15 septembre-15 octobre : séjour à La Ermita de Luchente. 30 octobre : inauguration des quatre principaux vitraux de I’église Unser Lieben Frauen à Brême. II se rendra régulièrement en Allemagne suivre ce chantier jusqu’en 1979.

1967 13 février : reprise des bombardements par l’armée américaine sur Ie Viêt Nam. 11 mars : vernissage de son exposition à la Maison de la Culture d’Amiens, qui sera suivi d’une discussion avec Jean-Marie Lhôte. 11-30 juillet : voyage au Canada. À Ottawa pour I’étude d’une tapisserie pour Ie National Art Center ; passe quelques jours dans une des mille îles du lac Rideau dans I’Ontario chez Hamilton Southam ; conférence au Pavillon français de I’Exposition universelle de Montréal. 3 août : remise en route de I’atelier d’Émancé. Septembre : séjour à La Ermita, où il développe une série de lavis. 6 novembre : commence la maquette de la tapisserie d’Ottawa.

1968 23 mars : participation à I’affiche collective 64 de la Journée des intellectuels pour Ie Viêt Nam. 4 avril (atelier d’Émancé) : brutalement choqué par I’annonce de I’assassinat à Memphis du célèbre pasteur noir américain, il commence le soir même une grande toile en Hommage à Martin Luther King.

28 janvier : exposition à la Galerie de France de ses œuvres canadiennes (1967 à 1969). Peint une suite d’œuvres en rapport avec la lumière du Nord : Port du Hourdel l’hiver, Port nordique en hiver, Côte nordique, Estacade... En été : aborde la série des Moissons en Beauce. En octobre : séjour avec Elvire Jan à La Ermita ; voyage dans la Mancha après les moissons et en Extremadura. Sensibilisé par Ie climat de forte tension politique : répression du gouvernement contre les militants nationalistes basques.

10 décembre : participe à la manifestation de rue à Paris contre Franco.

5 juin : quitte son atelier parisien où il a travaillé depuis 1939.

1971 L’hiver et la neige lui inspirent une série de Boules de neige. 2 février : engage Ie tirage de lithographies chez Mourlot (énorme travail) qui s’effectue jusqu’en juillet : Viêt-nam I & II, Le Grand Nord I & II, Boule de neige I & II, La Tache rouge, Première neige, Le Procès I & II… À partir de mars (Émancé) : reprise en peinture du Procès de Burgos et des Moissons. 16 avril : apporte son soutien pour la libération d’Angela Davis. Les locataires du 203 rue de Vaugirard à Paris – dont Singier et Manessier – sont menacés d’expulsion par des promoteurs qui convoitent le terrain appartenant à I’Institut Pasteur. 21 août-10 septembre : vacances à Moissac-Bellevue.

4 août : reprise de la peinture à Émancé pour continuer l’ensemble canadien.

1972

27 février : retrouve son atelier d’Émancé pour achever les toiles canadiennes. 22 mars : présentation de la tapisserie Lac secret destinée à Ottawa à la Résidence de I’ambassadeur du Canada à Paris.

4 mai : à Brême pour la pose des derniers vitraux ; I’inauguration de I’ensemble achevé et la présentation des douze tapisseries de Saint Jean de la Croix ont lieu Ie 13 mai.

Novembre : commence une grande toile horizontale dans l’atmosphère du Procès de Burgos qui en porte Ie titre.

3 décembre : exposition au musée d’Art moderne de la Ville de Paris des douze tapisseries (Cantiques spirituels de saint Jean de la Croix) tissées par les Plasse Le Caisne de septembre 1969 au 14 juin 1971 67.

1969

Le travail des aquarelles devient pour Manessier un refuge l’aidant curieusement à échapper au bruit des marteaux-piqueurs qui commencent la démolition du 203 rue de Vaugirard.

15 mai : à son retour via Amsterdam et Haarlem, il trouve une partie du “203” en ruine. Poursuite des aquarelles, dont Port nordique. Les promoteurs font de fausses promesses de relogement. L’expulsion est imminente. Un repli sur Émancé semble I’unique solution.

10 mai : retour précipité à Paris (impossible de peindre) afin de se rapprocher de ses enfants directement concernés par les événements 65. Participe aux manifestations aux côtés des étudiants ; puis aux discussions de certains comités (École des Arts décoratifs).

Novembre et décembre : la conjonction de travaux (vitraux, tapisseries) I’oblige à délaisser la peinture.

1973

Poursuite à Paris d’aquarelles liées au Procès de Burgos, aux Tortures et à la Passion, amorcées en automne. 28 mai-7 juin : quatre eaux-fortes chez Lacourière en illustration du poème de Guillevic (Cymbalum). 4 août : reprise des vitraux de Brême à l’atelier de Chartres, malgré la mort récente de son maître-verrier François Lorin. 22-26 août : décide de passer quelques jours au Crotoy.

16 juillet : reprise de la peinture (Juin en Beauce, Juillet en Beauce...) Début des travaux d’agrandissement de son atelier d’Émancé. Le 11 septembre 1973 : Jour funeste pour le Chili est le titre d’une toile peinte en hommage au président Salvador Allende. 10-17 octobre : à Lisbonne pour le vernissage de sa Rétrospective à la Fondation Calouste-Gulbenkian.

1974 2 mars : réouverture de I’atelier d’Émancé le jour de l’exécution par garrottage du jeune anarchiste catalan Salvador Puig Antich. Cette condamnation le bouleverse. 26 mars-4 avril : à La Ermita de Luchente pour la pause de cinq petits vitraux dans la chapelle. 15 mai : reprise des moissons espagnoles (La Mancha d’octobre ; Chaumes, lumière ; Paille, lumière). 25 juillet-6 août : quelques jours de détente en Bretagne, chez le tisserand Jean-Marie Lancelot. Pêche au congre de nuit. 30 septembre-15 octobre : voyage vers la Dordogne, à travers le Périgord et la Saintonge. Retour par I’île de Ré et le sud de la Bretagne.

1975 3 janvier : visite à la cathédrale de Chartres pour voir le vitrail L’Arbre de Jessé, restauré et remis en place à Noël. Manessier est catastrophé. 14 janvier : vernissage à la Galerie de France d’une exposition importante conçue en deux parties. La première présente 75 aquarelles et une tapisserie, Feu de joie.

26 mai-10 juin : deuxième voyage au Canada pour la pose de sa tapisserie et I’inauguration du National Art Center d’Ottawa Ie 2 juin ; Ie 5 juin, les Manessier retrouvent May et Zao Wou-ki, avec lesquels ils passeront trois jours à New York 66.

2 septembre (Émancé) : entreprend deux toiles sur les tortures liées au Procès de Burgos et aux bombardements sur le Viêt Nam : Passion espagnole et Viêt-nam Viêt-nam. 29 octobre : retour de Brême par la Hollande et la Belgique.

16 mai : naissance, à Guérande, de sa petite-fille Jeanne.

1970

13 novembre (atelier de Paris) : enchaînement des aquarelles commencées il y a un an.

17 juillet-5 août : dans Ie Midi chez Bourniquel. Visite avec Le Moal Ie musée Matisse à Nice, I’exposition

11 janvier : à Brême pour sa rétrospective à la Kunsthalle.

51

26 février : vernissage à la Galerie de France de sa deuxième exposition (25 peintures).


Bonnard à la Fondation Maeght et la maison de Renoir à Cagnes. 28 août-7 septembre : en Bretagne pour une croisière à la voile de Piriac à La Trinité. Au retour peint Nuit au port – Belle-Île-en-Mer. 10 septembre : commence des esquisses dérivant vers ses souvenirs de navigation dans sa jeunesse au Crotoy. 19 septembre-3 octobre : séjour à La Ermita. La situation politique en Espagne est dramatique : on annonce I’exécution de cinq jeunes condamnés à mort par Franco. 9-10 novembre : grande promenade dans la baie de Somme. Fin novembre : entreprend, au moment de la mort de Franco, la toile qu’il porte en lui depuis le garrottage de Salvador Antich Puig – tout en pensant à Marie et à Jésus – et à ces nouveaux martyrs du franquisme : Pour la mère d’un condamné à mort.

1976 Année compromise pour la peinture : les multiples actions à mener pour la “bataille” de Chartres I’obligent à délaisser ses pinceaux. Par ailleurs, sa mère tombe gravement malade en juin. II lui apporte attention et soins. 10 mars : Manessier (secrétaire) fonde avec Bazaine (président) et Jean Lescure (trésorier) I’Association pour la défense des vitraux de France (ADVF). 10-21 avril : voyage en Algérie. Pâques à Ghardaïa dans le Mzab. 25 mai-2 juin : au Sénégal pour sa rétrospective au Musée de Dakar. 2 juillet : présentation des tapisseries de Saint Jean de la Croix à la chapelle de la Sorbonne. Rencontre le recteur Robert Mallet, Picard comme lui, et ardent défenseur de la baie de Somme.

1977 Poursuite des activités de I’ADVF tout au long de I’année. 19 janvier à 20h30 : sa mère s’éteint à Émancé. Son enterrement a lieu à Saint-Ouen (près d’Amiens). Puis, tous se rassemblent pour une marche en baie de Somme. 6 février : réservation au Crotoy d’un appartement donnant sur la baie à partir du 15 mai. 29 avril : réunion autour d’Angela Davis pour I’action et la pression à faire sur les juges du pasteur noir américain Ben Chavis.

26 octobre-26 novembre : à Barcelone pour amorcer les quinze lithographies sur Ie thème de Pâques aux éditions Poligrafa ; préparation des zincs pendant une semaine à La Ermita. En décembre : travaille avec acharnement aux lavis Sables pour retrouver la qualité des sables du Crotoy de son enfance.

1978 1er avril : naissance, à Paris, de son petit-fils Ismaël. 30 avril-13 mai : deuxième séjour à Barcelone. Poursuite du travail sur Ie thème de Pâques. 30 mai : vernissage de la Rétrospective de son œuvre gravé à la Galerie de France. 19 au 22 août : séjour chez son cousin Marcel Davelut à Longueau. Visite incognito son exposition au Palais de I’Europe au Touquet. Redécouvre les marais de la Somme. 30 octobre-19 novembre : passe un dernier séjour à Barcelone pour la signature des bons à tirer des lithographies.

11-23 août : vacances dans le Cotentin. 20-27 octobre : à Berlin pour la pose et I’inauguration du grand vitrail Alléluia. 3 novembre : reprise de toiles abandonnées de la baie de Somme : Nuit en baie de Somme, Soir en baie de Somme.

1981 24 mai : rencontre le pasteur Ben Chavis chez le peintre Kijno. 26-29 juin : en Hollande pour son exposition à La Haye. 1er-31 juillet : vacances bretonnes à Fouesnant. De ce séjour naissent de nouveaux Sables. En août : poursuite du travail vers les paysages de son enfance (Marais picard au petit matin, Marais de Thuison, Marquenterre…). 19 décembre : rétrospective au musée de la Poste à I’occasion de I’émission de son timbre Alléluia.

1982

1979 2-12 janvier : travail intense sur I’Hommage à Dom Helder Camara, toile amorcée fin 1978, évoquant les favelas, bidonvilles du Nordeste brésilien que Manessier ne connaît que par photographie. II peindra cinq autres Favellas jusqu’en automne 1983. 8-14 mars : escale à La Seyne, chez Guy Genon-CataIot, avant de se rendre en Grèce. 18 mars : exposition à I’lnstitut français d’Athènes. 3-5 avril : à Salzbourg pour la rétrospective de son œuvre gravé. Visite avec émotion de la maison natale de Mozart. 25-27 mai : escapade en Picardie. Traverse les villages picards au-delà de Crécy-enPonthieu. Le moulin de Maintenay sur I’Authie lui inspire certainement L’Eau vive. 9 juin : reçoit la visite du chanteur espagnol Paco Ibáñez venu lui demander de rêver avec lui au projet d’une maison du peuple et de la culture sous la forme d’un chapiteau : La Carpa. En juillet : œuvres sur le thème de l’eau, inspirées des étangs et des marais de la Somme : Nocturnes aquatiques I & II, Hortillons au printemps. 28 septembre : achat d’une “boutiqueatelier“ 51 rue Maurice-Ripoche à Paris 14e. L’éloignement de la capitale, depuis I’expulsion de la rue de Vaugirard, lui pose trop de problèmes.

Février : se replonge dans une suite d’études sur la baie de Somme : Bâche au crépuscule, Hiver en baie de Somme, Marée basse, Marée montante, Morte-eau et sables… 11 février : François Enaud, inspecteur général des Monuments historiques, lui demande la création des vitraux de I’église du Saint-Sépulcre d’Abbeville, la ville de son enfance. 27 février : se rend à Abbeville afin de (re)prendre connaissance de cette église et de son quartier. Il se met immédiatement à rêver… Et très vite les maquettes sont créées dans son petit atelier parisien. 8-12 avril : au Touquet pour son exposition à la galerie du Verger. 6 mai : continue la toile Soirée d’automne dans les hortillonnages. 1er-8 septembre : court séjour en Bretagne, de Larmor-Baden à Locronan, pour un projet de vitraux.

1983 Début janvier : continue la série des Hortillonnages en célébrant d’abord I’hiver : Nuit d’hiver dans les marais picards. 20 juin-27 juillet : séjour à Saint-Nic, près de Douarnenez.

15 mai-28 juin : séjour de grande détente au Crotoy. Chaque matin, il copie librement à I’aquarelle les galets ramassés par sa petite-fille. Manessier et sa petite-fille Jeanne au Crotoy en juin 1977. À son retour, met en place une palette neuve afin de traduire la lumière de la baie de Somme retrouvée; malheureusement le temps à consacrer à la peinture sera encore réduit.

1980

1er août : redémarrage des ateliers à Émancé. Les grands lavis Sables dans Ie premier atelier. La peinture dans Ie second. Aube sur les étangs ou l’Hommage à Monet et Aurore sur les étangs sont deux toiles horizontales du moment.

7-9 février : voyage en Hollande avec Pierre Descargues pour I’enregistrement d’une émission “Manessier part à la recherche d’un autre peintre de la lumière : Vermeer“.

5-8 novembre : tournage du film de Pascal Bony Manessier 83 dans les hortillonnages d’Amiens, le long de la Somme à Abbeville ; puis à I’atelier.

1er juillet : le suicide de Myriam Prévot plonge Manessier et les autres peintres de la Galerie de France dans un profond désarroi.

29 mars : entreprend I’Hommage à Oscar Arnulfo Romero – Archevêque de San Salvador – assassiné le 24 mars 1980.

19 décembre : son exposition dans les nouveaux locaux de la Galerie de France rassemble les Galets, les Sables, les Favellas et un choix de toiles liées

52


aux premiers souvenirs dans les marais picards avec son grand-père Ovide.

1984 8 avril : termine une toile qu’il titre Neige en avril sur les hortillonnages. 25-31 mai : envol pour l’exposition présentée par Viveca Bosson dans sa Fondation près d’Halmstad, dans Ie sud de la Suède. 16-17 juin : présentation à Émancé de la tapisserie L’Accueil tissée par les Plasse Le Caisne pour la nouvelle ambassade de France à Washington. 2-31 juillet : vacances à l’île de Ré, aux Portes. Nouvelle série de Galets, dans une lumière tout autre que celle de la baie de Somme. 10 novembre : brusque échappée dans les marais de la Somme jusqu’au Crotoy avant le soleil couchant. Au retour commence Derniers rayons sur la baie de Somme.

1985 22 mai : Jean-Paul Kauffmann et Michel Seurat sont enlevés au Liban par le Djihad islamique. Manessier se sent concerné par ce drame des otages et se montre solidaire, au plus près du combat de Joëlle Kauffmann. 9-14 juillet : à Locronan pour la bénédiction des vitraux de la chapelle Notre-Dame de la Bonne-Nouvelle et le vernissage d’une exposition. 21-31 août : à Saint-Brévin-lesPins. Quelques petites notes à I’aquarelle à poursuivre. 2 septembre : reprise de la peinture sur le thème marin. 15-29 septembre : dernier séjour en Espagne à La Ermita. Don Alfonso Roig est déjà très malade.

1986 3 janvier : déménagement de Paris et aménagement à Clamart d’une petite maison avec jardin (20 rue Pierre-Brossolette), en face de chez Christine (sa fille) et sur le même trottoir que Jean Bazaine. 22 mars : vernissage de son exposition au Centre Noroit à Arras. 25 mars-22 avril : corrections des vitraux du transept nord de la cathédrale de Saint-Dié, dont le vitrail central Mon âme est triste jusqu’à la mort. L’ensemble sera posé et corrigé sur place entre le 12 et le 16 mai. 9 juin : Gilbert Delaine organise une exposition sur la Passion du Christ. Cette demande fortuite est un déclic : Manessier commence une Passion qu’il pense d’abord être Selon saint Matthieu II, mais dont la lumière se révèle être selon saint Jean. 24 juin : idée de poursuivre ce travail selon les quatre évangélistes, Marc, Luc et Matthieu. Série qu’il mène de front jusqu’à I’automne. 22-30 août : quelques jours de détente au Crotoy avec ses deux

petits-enfants. Fin d’année perturbée par l’inachèvement des travaux de Clamart, commencés le 28 avril.

1987

23 octobre-3 novembre : voyage en Irlande pour la dernière étape de I’exposition Passion à Dublin au Royal Hospital Kilmainham. Découverte du Connemara.

Début d’année difficile pour la peinture. Hiver dur à Émancé. Le projet des vitraux d’Abbeville est toujours au point mort. Manessier en est très affecté, presque déprimé.

5 décembre : (dossier d’Abbeville enfin débloqué ?) commence Ie jour de ses 77 ans, dans son nouvel atelier de Clamart, Ie carton d’un vitrail du chœur de I’église du Saint-Sépulcre.

17 février : commence un Hommage à Vincent pour une exposition en 1988 à la Fondation Vincent Van Gogh en Arles.

1989

Début avril : amorce cinq toiles monumentales sur le thème de la Banlieue, en rêvant de la vue de sa maison de Clamart dont il est privé. Il y travaillera chaque été jusqu’en 1990. 19 avril (Pâques) : inauguration à Saint-Dié des vitraux de “la Cathédrale de l’amitié“ (Bazaine). 12–19 août : détente dans Ie “penty” breton de Viveca Bosson, près de Saint-Guénolé où il retrouve Bazaine. 23-30 août : voyage à Fribourg (Suisse). Ultimes corrections de la rose Magnificat et son acrobatique mise en place dans la salle du trésor de la cathédrale Saint-Nicolas. 19 septembre : installation à Clamart où un atelier en bois sera construit I’année suivante. Fin septembre : commence L’Otage, tableau qu’il porte depuis longtemps en lui, en communion de pensée avec les otages toujours détenus au Liban.

1988 19-20 février : à Lyon pour le vernissage de son exposition itinérante Passion – 1948-1988 qui commence à l’Espace lyonnais d’art contemporain (ELAC). 23 mars : commence une nouvelle version de la Passion selon saint Jean II. 1er avril : retrouve Joëlle Kauffmann à Lyon devant L’Otage accroché à l’ELAC pour une conférence de presse en vue de la libération des otages. 22 avril : à Besançon pour la 2e étape de l’exposition Passion au musée des Beaux-Arts et d’Archéologie. Puis, émouvant pèlerinage à l’église des Bréseux et à celle de Pontarlier, dans le Doubs. 4 mai : libération des otages français du Liban. 5-24 mai : malgré la situation dramatique en Nouvelle-Calédonie et la confirmation de la mort de Michel Seurat, Manessier exauce son vœu de peindre un Hymne à la joie à la libération des otages. 6-8 juin : voyage au Grand-Duché de Luxembourg pour la 3e étape de I’exposition sur Ie thème de la Passion au château de Vianden. 22 juillet-9 août : séjour en Suède en équipée avec Pierre Encrevé et sa famille pour la 4e étape de l’exposition Passion dans la Fondation de Viveca Bosson, près de Halmstad. 53

19 janvier : l’atelier de Clamart est propice aux aquarelles : Hortillonnages I’hiver, Hortillonnages en avril, Marais ensoleillé, Lumière sur les hortillonnages. 23 février : reprise de la peinture à I’huile à Émancé. 1er-8 avril : une semaine au Crotoy. L’inauguration des trois premiers vitraux du chœur de I’église SaintSépulcre a lieu Ie 2 avril. 19 mai : reprise de la toile Derniers rayons en baie de Somme. Mi-juin : commence deux toiles sur le lac suédois de Hans et Gunilla Andersson, d’après deux aquarelles. 28 juin-4 juillet : voyage à Issoire pour l’exposition sur ses paysages organisée par Annette Besserve qui lui fait découvrir l’Auvergne. 8-15 juillet : croisière dans les îles anglo-normandes avec les Bourdais. 25-28 août : promenade le long de la Manche (du Touquet à Veulettes). 5 décembre : présente à la Galerie de France Liberté, liberté – Hommage à l’abbé Grégoire.

1990 Début janvier : poursuite de la réalisation des vitraux d’Abbeville (chœur et côté sud) 2–5 avril : à Prague pour son exposition de peinture et de lithographie à la galerie de l’Hôtel de Ville. 7 mai : commence une toile panoramique qu’il poursuit en août : Port de Jersey au petit matin. 23 juin : vernissage de son exposition au musée Boucherde-Perthes d’Abbeville. 1er-30 juillet : vacances à l’île de Ré, aux Portes-en-Ré. Au retour, arrêt en Vendée chez Pierre et Marie-Hélène Encrevé. Balade en bateau dans les marais poitevins. 5-8 septembre : à Paimpol pour visiter l’exposition de ses tapisseries au château de la Roche-Jagu. À la faveur d’un temps d’attente, il contemple la mer devant Bréhat, avant de faire la connaissance de l’écrivain Kenneth White, auteur de la préface du catalogue. Septembre-Octobre : travaille une série de toiles sur les rochers et la mer : Rochers vers Bréhat, Les récifs, Récifs armoricains. 15 novembre : installation à Clamart pour l’hiver. Commence une série d’études sur la baie de Somme et des aquarelles.


1991 26 février-4 mars : séjour à Dinard chez ses amis Bourdais, puis chez son neveu Nicolas Simonnet, alors conservateur du Mont Saint-Michel. 8 juillet : début du tournage du film de Gérard Raynal, Les Offrandes d’Alfred Manessier, qui se terminera dans la baie de Somme fin juin 1992. 16-29 juillet : vacances dans le Cotentin, à Carteret. Août (Émancé) : travaille à la fois au carton du grand vitrail bleu de I’église du Saint-Sépulcre et aux Espaces marins, dernières déclinaisons de la baie de Somme en trois variations monumentales qui viendront clôturer sa rétrospective du Grand Palais.80 5 décembre : fête pour ses 80 ans dans la chapelle des Petits-Augustins de l’École nationale des Beaux-Arts. Reprise, dans son atelier de Clamart – dans une première version angoissante – du thème abordé en 1950 : Mon amie la mort ou La Lettre de Mozart à son père. Thème qu’il continuera d’explorer dans plusieurs toiles plus petites durant l’été 1992 à Émancé.

10-27 juillet : vacances “bien méritées” en Corrèze, en Dordogne et en Aveyron. 28 juillet : de retour vers Émancé, il est victime d’un accident de voiture. L’opération des cervicales qu’il subit à l’hôpital d’Orléans-La-Source lui sera fatale : il meurt le dimanche 1er août à 7 heures du matin. Thérèse son épouse n’est que légèrement blessée. 5 août : les funérailles d’Alfred Manessier ont lieu dans la lumière des vitraux de l‘église du Saint-Sépulcre d’Abbeville, puis au cimetière de Saint-Ouen (près d’Amiens), son village natal. Dans le silence de l’atelier d’Émancé : les toiles sur le thème : Notre amie la mort ou La Lettre de Mozart à son père attendent à jamais sa signature.

2000 8 juillet : Thérèse Manessier, précieuse et fidèle compagne de sa vie et de son œuvre, meurt à Montrouge, chez sa fille, dans sa 93e année.

Chronologie extraite de Manessier, Lumière du Nord, par Bernard Ceysson, Jean-Marie Lhôte, Christine Manessier, Édition La Renaissance du Livre, 2000

1992 Poursuite du chantier d’Abbeville, corrections et pose de nouveaux vitraux tout au long de I’année. 6 octobre : Jack Lang inaugure sa Rétrospective dans I’Espace Clemenceau des Galeries nationales du Grand Palais. 17 octobre : ouverture au grenier et au cellier de Loëns à Chartres de la double exposition de ses vitraux et des tapisseries tissées par les Ateliers Plasse Le Caisne.

1993 Poursuite du chantier d’Abbeville. 6-12 février : à Rome séjourne à la Villa Médicis où sa Rétrospective est présentée. 16 mars : naissance, à Paris, de sa petite-fille Héloïse. 23-25 avril : en Suisse pour sa double exposition à l’abbatialemusée de Payerne et celle au Musée suisse du Vitrail à Romont. 5-7 mai : à Budapest à l’occasion de sa Rétrospective au musée des Beaux-Arts. Dimanche 30 mai : inauguration de l’ensemble quasiment achevé des vitraux de l’église du Saint-Sépulcre d’Abbeville. Le lendemain passe la journée chez le recteur Robert Mallet dans sa propriété de Bray-lès-Mareuil. Courant juin : peint Les Marais de Bray-Lès-Mareuil et commence une deuxième version apaisante (Notre amie la mort selon Mozart). 1er juillet : apporte lui-même à la Galerie de France les 27 aquarelles verticales conçues à la fin de l’hiver et au printemps à Clamart comme une suite d’offrandes pour l’exposition programmée en décembre 1993. 9 juillet : présent au vernissage de l’exposition consacrée à son œuvre tissé, à Felletin dans la Creuse. 54

6 mai 1987 : après-midi – apprêt de la toile Banlieue III : en grisperle bleuté clair – (en contraste avec la II : apprêt jaune d’or clair). 12 et 13 mai : attaquer la 3e Banlieue dans les gris. Blanc + bleu touareg + brun de Mars + les valeurs + jaune de Mars avec bleu touareg et blanc. 24 mai : travail toute l’après-midi (rapport ténu du rose et du vert). 10 juin : hier travail sur Banlieue III (aube) – éclairci vert et lilas pâles.


Notes 1  Ses grands-parents paternels, Alphonse (ancien tailleur de pierre) et Florimonde Manessier-Vauchelle, tiennent également une épicerie-buvette à Pont-Rémy, village situé à 20 km environ de Saint-Ouen, où la famille Manessier, originaire du Pas-de-Calais, est installée depuis trois générations. Leurs deux fils – Léon et Nestor – avaient reçu une solide formation en dessin à l’école des Beaux-Arts d’Abbeville où ils se rendaient à pied, parcourant environ 16 km aller et retour. 2

C’est bien le Novion qui coule à cet endroit d’Abbeville, et non le Scardon comme l’a longtemps pensé Alfred Manessier, jusqu’à titrer un de ses tableaux Le Scardon à Thuison.

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Alfred Manessier en sera quelque part marqué jusqu’à la fin de sa vie. En effet, il montrera souvent des difficultés à faire vite – dans une situation injonctive d’urgence – la distinction de sa gauche et de sa droite.

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Il n’était pas question pendant les quatre années de guerre de se rendre sur la côte, et, si cela fut le cas auparavant, Alfred Manessier – né fin 1911 – était trop petit pour en avoir conscience.

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Manessier fréquentera ce lycée jusqu’à la troisième.

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Suite à ce refus du directeur du Conservatoire de musique d’Amiens, Alfred Manessier a cependant continué, jusqu’à l’âge de seize ans environ, l’apprentissage du violon avec un professeur particulier, Mlle Marthe Constantin.

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Alfred Manessier a régulièrement fréquenté l’école régionale des Beaux-Arts d’Amiens de 1924 à 1930/31. Au début, en marge du lycée jusqu’à la troisième, puis pour y préparer sérieusement le concours d’entrée à l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris à la fois en section Peinture et en section Architecture.

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Avec Pierre Vivien qui deviendra plus tard architecte en chef des bâtiments du Grand Palais à Paris.

9  Émile Buré était aussi le parrain de Blanche, sa mère, et leur cousin par alliance. Il dirigera le quotidien du matin L’Ordre. 10

Dans le Palmarès de la Distribution des prix aux élèves de l’école régionale des Beaux-Arts d’Amiens du 10 juillet 1930, Alfred Manessier est cité trois fois “Hors concours “, en Dessin antique, Modèle vivant et Architecture-Esquisse. Son nom est suivi de la mention “élève de l’École nationale des Beaux-Arts de Paris”.

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L’organisation des études d’architecture devait lui laisser une certaine liberté pour la peinture. En effet, les cours théoriques avaient lieu rue Bonaparte le matin ou l’après-midi et l’atelier extérieur réservé aux “projets“ d’architecture était ouvert librement toute la journée et parfois la nuit, du moment des rendus des projets, avec une visite du “patron“ une fois par semaine.

12  Ce serait devant La Pourvoyeuse de Chardin qu’aurait eu lieu cette première rencontre, vraisemblablement en avril 1931. Jean Le Moal (né en 1909) avait connu Marcel Perroncel (né en 1907) auparavant à l’école des Beaux-Arts de Lyon. 13

Jean-Baptiste Mathon, architecte,1 GrandPrix de Rome et architecte des Bâtiments civils et Palais nationaux, connaissait bien M. Dudok. C’est la raison pour laquelle, il organisait pour ses étudiants des voyages d’études en Hollande à Hilversum. Ces voyages se seraient faits à partir de 1932. er

14  Willem Marinus Dudok est l’auteur, entre autres à Paris, du pavillon néerlandais de la Cité universitaire. 15

Architecte à Quimperlé, Pierre Brunerie a demandé à Manessier et à Le Moal les vitraux de la chapelle du Pouldu en 1958. Il était le père de Joëlle Brunerie-Kauffmann que Manessier soutiendra activement dans son combat pour la libération de son mari, Jean-Paul Kauffmann, otage au Liban, du 22 mai 1985 au 4 mai 1988.

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Manessier adore danser et remporte des prix de tango ou de charleston au casino du Touquet.

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Pierre du Colombier dans la rubrique “Le

Courrier des arts “ du n° 517 du journal Candide, du 8 février 1934, l’a remarqué au dernier Salon des indépendants : “Le Catalogue m’apprend que Manessier est entré en 1933 dans la Société des indépendants, il fait preuve partout d’une singulière maîtrise.” 18

Ils sont prévenus de l’ouverture de ce cours par leur ami étienne-Martin, déjà élève du sculpteur Charles Malfray à l’académie Ranson.

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“Sans doute suis-je demeuré vingt ans à l’académie Ranson et bien des gens sont passés dans mon atelier, mais je ne leur ai jamais rien appris qu’ils n’aient trouvé eux-mêmes.” (Bissière).

20  cf. Michel-Georges Bernard, Jean Le Moal – 20 ans de peinture, Lyon, Elac, 1990 (in biographie p. 32). 21

Il faut replacer cette période dans le contexte angoissant de la montée vers la guerre, avec de grandes tensions internationales, particulièrement début octobre 1935 en raison des événements d’Éthiopie, et en mars 1936 lors de la réoccupation militaire de la Rhénanie par Hitler qui coïncide pour Manessier sur un plan personnel avec le moment tragique de la mort de son père. 22

C’est ce qu’il écrit à ses parents le 24 mai 1935.

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Ce premier Salon s’est tenu du 31 mai au 30 juin 1935, au 64 bis rue La Boétie. Manessier a vraisemblablement fait partie de l’équipe d’exécution de fresques de Bissière. 24

Il restera mobilisable jusqu’au 25 août 1936.

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Un centre d’entraînement hippique, un cinéma, une enseigne pour un coiffeur. 26  Il commence par accorder les premiers congés payés aux employés et doit, pendant le mois d’août, assumer à la fois les tâches de directeur et de livreur. 27  Ayant subi du retard, le travail s’effectua vraisemblablement du 1er mai au 16 juin. 28

L’Équipe d’Aublet était composée de Bissière, chef d’équipe, assisté de : Auboyneau, Bertholle, Bockel, Cahours, Couturat, Decrept, Gourin, Jean Julien, Le Moal, Jean Léon, Joseph Léon, Liausu, Manessier, Martin-Sauvaigno, Moussempes, Reth, Zielinsky et Mme Bissière. 29  Blanche Manessier ne conservera que le mobilier de sa chambre… et certains de ses amis d’Amiens à ce moment-là la traiteront de “folle” de soutenir ainsi son fils dans son désir de devenir peintre. 30

En particulier, l’invasion de l’Autriche par Hitler et son rattachement (Anschluss) à l’Allemagne nazie le 15 mars 1938. 31

Le groupe Témoignage, d’abord constitué à Lyon autour du poète Marcel Michaud, s’ouvre à de nouveaux artistes (dont Manessier) à l’invitation de René Breteau qui rassemble dans sa galerie des peintres (Aléric-Bertholle, Beyer, Charlotte Henschel, Jeanneret, Le Moal, Thomas, Varbanesco, Vielfaur, Wacker, Zelman) ; des sculpteurs (étienne-Martin, Klinger, Stahly) ; des artisans (céramiques de Paul Beyer, Anne Dangar, étienne Noël et Talboutier, disques optiques de Marcel Duchamp, reliures de Claude Stahly-Favre, tissus de Lucie Deveyie et de Vera Pagava, émaux de Verhuven) ; un musicien (César Geoffroy illustré par Pouyaud) ; des poètes (Marcel Michaud, J. Duraz).

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Née le 12 décembre 1907 à Paris 14e. Décédée le 8 juillet 2000 à Montrouge. Élevée par son père, Maurice Simonnet, dans l’amour de la peinture, elle commence à peindre très jeune. Puis fait la connaissance d’Elvire Jan vers 1925. Son voisin, Paul Filleul (qui deviendra son beau-frère), élève à l’académie Julian, lui avait fait rencontrer Jean Bazaine. Thérèse peindra aux côtés de ses amis, ou le plus souvent seule, pendant plusieurs années, jusqu’à sa décision radicale d’arrêter la peinture, incompatible selon elle avec le mariage – décision prise bien avant sa rencontre avec Alfred Manessier.

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Son principal lieu de vie et de travail pendant trente-trois ans. 34  L’adresse de Bissière étant le point de ralliement possible en zone libre choisi par le jeune couple séparé au moment de l’exode. 35

D’après le titre d’une huile sur toile de 1946. Demeure, à l’époque en ruine, qui sera plus tard achetée par Jean-François Jaeger, directeur de la galerie Jeanne Bucher.

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Association née le 22 novembre 1940. “Fondée en zone non occupée et dirigée par le musicien Pierre Schaeffer, l’organisation de Jeune France se déclarait de gauche et opposée au régime“ (cf. Sarah Wilson : “Les Jeunes peintres de tradition française”, in cat. ParisParis, 1937-1957, Centre Georges-Pompidou, 28 mai-2 novembre1981, p. 106).

37  Dans l’impossibilité de joindre vite Manessier alors en zone libre, Claude Simonnet, avant de prendre à la place de son beau-frère la décision d’exposer, en a longuement discuté avec ses amis d’études Jean Kanapa, Yvonne Picard (qui sera déportée) et Bernard Lamblin (qui sera un des premiers collectionneurs de Manessier en 1943 et deviendra professeur de philosophie, puis d’esthétique à l’Institut d’art). 38  Au n° 7 de la rue Mermoz, aux côtés de Jean Bazaine, Léon Gischia, André Lejard et Edouard Pignon. On y compte également Le Moal, Lautrec, Pierre Hussenot, Christiane Mathiolly, Perraudin, René Perrot, Courmes, Mlle Floch, Jacques Chesnay. 39  “ Le gouvernement demandant à l’association de devenir un organisme de propagande officielle. Jeune France décide de se saborder, tandis que, agacé par l’action d’éducation artistique entreprise par l’association en marge ou à l’intérieur des structures traditionnelles officielles, Louis Hautecœur, secrétaire général des Beaux-Arts, aurait refusé d’intervenir auprès du ministre Jérôme Carcopino “ (cf. Laurence Bertrand Dorléac, Histoire de l’Art. Paris, 19401944, Publications de la Sorbonne, 1986, p. 72, note ***). 40

“C’est la vision d’un blessé que j’ai aperçu dans un arbre, ce personnage m’avait fasciné. Lorsque j’ai fait ce tableau, j’avais la vision précise d’un homme ensanglanté, à la fois pâle et rouge, avec un bandeau. C’était pendant la débâcle.” (cf. Laurence Bertrand Dorléac, Histoire de I’Art. Paris, 1940-1944, Publications de la Sorbonne,1986, p. 399).

41  Grâce au capital d’une assurance-vie souscrite par son père à la Société l’Abeille en 1922 payable en 1942, les Manessier – au lieu de dépenser cette somme providentielle au jour le jour – ont préféré, en ces temps troublés de privations et de pénuries alimentaires, l’investir dans l’achat d’un pied-à-terre à la campagne, proche de leur famille, avec la possibilité de cultiver des légumes et de se ravitailler à la source dans les fermes (surtout pour leur petit garçon). 42  Qui sont insultés dans le journal d’extrêmedroite Au Pilori du 4 mars 1943 dans un article intitulé : “L’Art zazou - Douze fumistes d’aujourd’hui”, illustré par une caricature d’un jeune peintre qui pourrait bien être Manessier... 43

Association fondée en 1943, déclarée en décembre 1944, dont Alfred Manessier fut un des membres fondateurs, puis le trésorier au sein du Comité directeur qui regroupe : Adam, Auricoste, Coutaud, Couturier, Despierre, Diehl, Gili, Gischia, Gruber, Le Moal, Manessier, Marchand, Pignon, Singier,Vénard, Vieillard. Il en donnera sa démission dix ans plus tard.

44  La Grande Trappe de Soligny, située à 18 km environ du Bignon. Les deux amis s’y rendent à pied. 45

Parmi lesquels : Camus, Pierre Emannuel, Follain, Frénaud, Guillevic, Prévert, Queneau, Sartre, Tardieu...

46  Toile majeure qui sera achetée le 3 août 1947 par le musée de Nantes. 47

Manessier avait déjà rencontré Rouault chez Charles Walch. Cette visite aurait été provoquée par Philippe Lelercq – industriel du Nord, grand coIlectionneur de Rouault – qui s’est intéressé à Manessier dès 1946 en achetant plusieurs petites huiles à la galerie René Drouin.

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La tapisserie est maintenant accrochée dans la chapelle des Dominicains de Lille.

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C’est le chanoine Lucien Ledeur qui a également convaincu Le Corbusier pour la chapelle de Ronchamp, d’où il était natif, ainsi que son ami d’enfance François Mathey qui deviendra conservateur en chef du musée des Arts décoratifs de Paris. Le père Couturier n’a été nullement à l’origine de ces deux réalisations du diocèse de Besançon, comme il a souvent été déclaré à tort.

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Premiers vitraux non figuratifs mis en place


dans un édifice cultuel. Scandaleux au début, ils deviendront exemplaires et Manessier sera vite considéré comme l’un des principaux rénovateurs de l’art sacré de la seconde moitié du XXe siècle. 51

Petit tableau qui se trouve au musée de Johannesburg en Afrique du Sud.

52  Toile également connue sous le titre Variation des jeux dans la neige, restée au Salomon R. Guggenheim Museum à la suite de l’exposition Younger European Painters – A selection (New York, 2 décembre 1953 - 21 février 1954). 53  “ À cette époque, je trouvais de moins en moins tolérable la transparence, la dispersion, l’éclatement des objets que je devais à l’influence de Lapicque. Aboutissement d’efforts considérables, cette toile m’a permis de m’en libérer. C’est en elle que j’ai commencé à retrouver l’objet en soi, une lumière plus simple, des formes sur un seul plan “ (extrait de Joseph Paul Hodin, Manessier, Ides & Calendes, 1972,p. 64). 54  La confusion de dates de cette exposition, parfois commise auparavant provient du fait que l’étude éditée par la Galerie de France : Manessier, 1955-1956 – La Hollande (texte de E. De Wilde) ait été achevée d’imprimer le 24 décembre 1956. 55

L’inauguration et la bénédiction de la chapelle a lieu le dimanche des Rameaux, le 30 mars 1958, par le cardinal Liénart qui revêtait une chape tissée par les ateliers Plasse Le Caisne d’après un carton du peintre. 56

Programme effectué à la demande de son ami d’études, l’architecte Pierre Brunerie, et partagé avec Jean Le Moal.

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Voir, in Catalogue exposition Manessier, Lyon (Elac, 1988), “Quarante ans de Passion” [Dialogue entre Pierre Encrevé et Alfred Manessier]. – 2. Scansions : “Je pensais à la fois au peuple d’Algérie et à l’angoisse de ces jeunes gens envoyés là-bas pour une guerre absurde, dénuée de tout sens.”

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Paul Filleul était luxembourgeois par sa mère. Ce séjour au Luxembourg favorisait un rapprochement de l’Allemagne où Jean-Baptiste avait été envoyé.

d’Art contemporain Rufino Tamayo à Mexico. 69  Manessier apprend par Mlle Houvet qu’une pellicule de plastique aurait été “tartinée” sur les verres et constate que la patine semble avoir disparu. 70

Devant commencer le 21 novembre 1974, cette double exposition avait été remise début 1975 en raison d’une importante grève des Postes.

71  Cette tragédie avait inspiré à Joan Miró L’Espoir d’un condamné à mort et à Robert Motherwell Spanish Dead. La mort officielle de Franco est annoncée le 20 novembre. 72

Autres membres fondateurs : Paul Acioque, ancien directeur à Saint-Gobain, Bernard Allain, maître-verrier, Marcel Arland, écrivain ; Jean Bertholle, peintre ; Camille Bourniquel, écrivain ; Sonia Delaunay, peintre ; Georges Duby, historien ; Hans Hartung, peintre ; Jean Le Moal, peintre ; Jean Morcelle, peintre ; Maurice Novarina, architecte ; Claude Simonnet, conservateur en chef de la Bibliothèque de Rouen ; Pierre Soulages, peintre ; Jean Tardieu, écrivain.

73  Ce projet ne sera jamais réalisé faute de crédits. 74  France Culture, 3 émissions de 30’, diffusion les 27/02, 7/03 et 14/03. 75  Ben Chavis avait été libéré le 15 décembre 1979. 76

Don Alfonso Roig mourra le 11 mai 1987.

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La première version de La Passion selon saint Matthieu et son esquisse datent de 1948.

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400 x 200 cm.

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Le vernissage avait eu lieu le 7 juillet en son absence. Sa fille le représentait auprès des tisserands Plasse Le Caisne. 80

Commissaire de l’exposition : Claire Stoullig, assistée de Nathalie Leieu.

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Grande émotion partagée de revoir Requiem pour Novembre 1956 – tableau qui appartient à la Staatsgalerie de Stuttgart – accroché pour accueillir le public hongrois.

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Tapisserie qui sera achetée par le Mobilier national.

60  Manessier sera le dernier peintre français à remporter individuellement cette distinction en 1962. En effet, Daniel Buren en 1986 (donc vingt-quatre ans après) et Fabrice Hybert en 1997, obtiendront le Lion d’or du meilleur pavillon national.

R emerciements Que soient ici remerciés toutes celles et ceux qui ont permis la réalisation de ce projet, et notamment : Monsieur Jean-Claude Gandur, Fondation Gandur pour l’Art, Madame Christine Manessier et Monsieur Jean-Baptiste Manessier, Monsieur Pierre Encrevé, Madame Jennifer Flay et Madame Oriana Schwaan, ainsi que toute l’équipe de la Fiac, mes collaboratrices, Mesdames Camille Francart, Elspeth Chabbi et Perla Levy.

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Les Manessier répondent enfin à l’invitation de Don Alfonso Roig (1903-1987) – prêtre, professeur d’histoire de l’art et d’esthétique à l’école supérieure des Beaux-Arts de Valencia, amis de nombreux artistes – rencontré vers 1955 par l’intermédiaire de Jacques Lassaigne. Don Alfonso Roig avait hérité d’un ermitage du XVIIIe siècle entre Gandia et Jativa : La Ermita de Luchente où Manessier séjournera et travaillera de 1963 à 1985.

Applicat-Prazan 16 rue de Seine – 75006 Paris 14 avenue Matignon – 75008 Paris Tél + 33 (0)1 43 25 39 24 – Fax + 33 (0)1 43 25 39 25 galerie@applicat-prazan.com www.applicat-prazan.com ApplicatPrazan

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Manessier ne peindra que quelques rares œuvres en rapport avec la Norvège : Légende norvégienne, huile sur toile, 1966 ; Port norvégien, aquarelle, 1977. 63

Fatigué par les travaux de vitraux et les voyages récents qui l’avaient tenu éloigné de l’atelier et de la peinture.

64  En collaboration avec Masson, Matta, Picasso, Pignon, Rebeyrolle, Soulages et Vasarely.

Création, édition : COMMUNIC’ART 216 bd Raspail 75014 Paris – Tél 33 (0)1 43 20 10 49 contact@communicart.fr Directeur de la création : François Blanc Design : Georges Baur – Coordination : Pascale Guerre

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Jean-Baptiste travaille alors avec Catherine Dasté à la création de spectacles pour enfants au théâtre de Sartrouville ; Christine est étudiante en philosophie à la Sorbonne.

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Au cours de la visite du MoMA (musée d’Art moderne), Manessier a la surprise de trouver accroché – dans la même salle que Guernica, l’œuvre célèbre de Picasso encore en exil – une de ses toiles de 1952 : Pour la Fête du Christ-Roi (200 x 150 cm - Abby AIdrich Rockfeller Fund. n° 197. Date d’acquisition : 04.12.66. Provenance : collection G. David Thompson, Pittsburg ; Vente publique, Parke-Bernet, 23-24 mars 1966, lot n°91).

Crédits photos : Photos œuvres et atelier : Art Digital Studio P. 6 : Marie-Hélène Encrevé P. 46 : Jean-François Bonhomme, Archives Manessier 4e de couverture : Philippe Colignon, Archives Manessier © ADAGP, Paris 2012 Imprimé en Belgique

67  D’après les lithographies sur le même thème datant de 1958.

© Applicat-Prazan, dépôt légal septembre 2012 isbn 978-2-916277-34-9 – 50 €

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Ce tableau se trouve maintenant au musée

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Alfred MAnessier Tours, Favellas et autres œuvres monumentales

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