NOVO N°27

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Par Sylvia Dubost

C(h)or/ espaces

Au cœur de son travail, la chorégraphe allemande Sasha Waltz a placé les rapports entre le corps et l’espace. Son 50e anniversaire coïncide avec les 20 ans de sa compagnie, et sa ville natale, Karlsruhe, lui rend hommage avec une exposition magistrale. C’est l’une des artistes contemporaines les plus importantes. Depuis ses débuts dans les années 90, elle a enchaîné les pièces marquantes, d’abord en héritière de la danse-théâtre de Pina Bausch, avec des chroniques sociales très berlinoises (Allee der Kosmonauten), puis avec son cycle sur le corps, dont le magistral Körper. Depuis, elle se frotte aussi à l’opéra (avec Didon et Enée, opéra-ballet aquatique) et à l’architecture, avec une passionnante série d’Architectural Dialogues créés pour des espaces bâtis par d’autres, comme le Maxxi de Zaha Hadid à Rome ou le musée du Judaïsme à Berlin. Co-directrice de la Schaubühne de 1999 à 2004 avec Thomas Ostermeier, Sasha Waltz est une créatrice d’images saisissantes, dans des espaces scénographiques impressionnants où se croisent l’harmonie et la destruction. Pour la première fois, un musée présente des installations issues de ces pièces, comme le fameux mur de corps de Körper devenu sculpture vidéo. Une exposition que viennent régulièrement habiter des performances, courts objets extraits de ses pièces. Cela n’aurait pu être qu’un collage, mais Sasha Waltz a su créer une vraie dramaturgie qui met les objets et les corps en tension et révèle toute la dimension plastique de son œuvre.

Au commencement était l’espace : estce vrai pour chacune de vos pièces ? Oui, il est toujours premier et toujours décisif. Parfois, je peux partir d’une musique, mais il n’y a pas de danse tant qu’il n’y a pas d’espace scénographique. Qu’est-ce qui vous a intéressé dans ce projet d’exposition ? Je travaillais à ces « objets » – des scènes de Médée, Didon et Énée et Körper transformées en installations – depuis plusieurs années. Je ne savais pas comment montrer ce que je voulais montrer, alors je les laissais et les reprenais régulièrement. Pour Körper, j’avais cette vidéo, et je voulais retrouver les dimensions des corps et de la scène mais je ne trouvais pas de solution. En discutant avec Peter Weibel, le directeur du musée, j’ai trouvé intéressant de développer une véritable exposition, ce que je n’avais jamais fait. Et cela m’a poussé à terminer plusieurs de ces installations. Le rapport à l’œuvre n’est pas le même dans une exposition que dans une salle de spectacle, face à des corps vivants. Avez-vous essayé de le retrouver ? Je trouvais passionnant qu’on puisse éprouver ici aussi bien les espaces que les corps. Il y a par exemple cette salle où

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