par Claire Tourdot
par Benjamin Bottemer
KAFKA : LA MÉTAMORPHOSE, ciné-concert/musique de chambre, en présence du pianiste Mikhaïl Rudy et projection d’images animées des Frères Quay, le 23 mars à l’Arsenal, à Metz. www.arsenal-metz.fr
JOCHEN GERNER, CHLOROFORME MAZOUT, exposition du 7 février au 29 mars à la galerie My Monkey à Nancy www.mymonkey.fr
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Une inquiétante étrangeté Le pianiste Mikhaïl Rudy réinvente la nouvelle fantastique de Kafka La Métamorphose en lui donnant pour bande-son les compositions de Janàcek. Les frères Quay illustrent ce monde onirique par une création originale. Mikhaïl Rudy nous lance une invitation au dialogue entre musique et cinéma d’animation, musique et littérature ; il a imaginé un cinéconcert où les arts se mêlent et fusionnent, tendent vers l’œuvre d’art totale, chimère des artistes du XIXe et du XXe siècle comme Leoš Janáček. Comme une évidence, la musique du compositeur tchèque rencontre les mots de Kafka, son compatriote. Tous deux partagent le même univers Mitteleuropa emprunt de folklore, de questionnements existentiels et d’étranges rêveries. Cet imaginaire sombre est illustré par une création originale des frères Quay, fervents admirateurs de la culture de l’Europe Centrale et dont le travail s’est pour beaucoup appuyé au fil des années sur la composition musicale. L’image animée réinvente le destin cauchemardesque de Gregor Samsa, transformé en insecte répugnant et rejeté par sa famille. Par cette interpénétration de la musique, du cinéma et de la littérature, un nouvel éclairage est porté simultanément sur l’ensemble des créations : « Les images doivent pouvoir flotter indépendamment de la musique pour permettre de mieux « voir » la musique et de mieux « entendre » les images » explique Mikhaïl Rudy. Une parenthèse (dés)enchantée, aux croisements inattendus, où tous les sens sont en éveil. D
Matière noire Bande dessinée, illustration, édition, incursions dans le champ de l’art moderne et contemporain... Jochen Gerner s’intéresse à l’image au sens large, et surtout à ce qui s’y cache. On connaît son nom à travers ses dessins de presse dans le Monde, Libération ou le Nouvel Observateur. Mais Jochen Gerner, membre de l’OuBaPo (Ouvroir de Bande-dessinée Potentielle) est avant tout un adepte de l’expérimentation et du détournement. Dans Chloroforme mazout, il expose notamment des sérigraphies de planches d’Hergé et de Franquin. Dans celles du Lotus bleu, il efface ; pour les Idées Noires, il recouvre. « Comme le chloroforme, qui endort, fait disparaître, j’ai retiré des choses dans ce passage où Tintin est justement attaqué au chloroforme, explique Jochen Gerner. Avec Mazout, j’ai ajouté du noir au dessin déjà dense de Franquin. » Des récits d’aventures parus sous forme de comics juste après la Seconde Guerre mondiale sont croisés, au propre comme au figuré avec le travail de Sol Lewitt, une poule empaillée renfermant les dessins de l’artiste et des cartes militaires s’ajoutent à une matière qui n’est là que pour être déroutée. « Ce n’est pas du piratage, plutôt une tentative de révélation. Toute l’exposition aborde la frontière entre figuratif et abstraction. Je fais émerger des références, les fils invisibles entre l’avant-garde de l’art contemporain et la bande dessinée, de laquelle je fais ressortir ce qu’elle a de plus beau pour moi : son vocabulaire. » D
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