Dossier ICT – Le virage du changement
Regards croisés Chaque mois, des professionnels de la Place répondent directement à des questions posées sur des sujets clés de leur secteur d'activité. ― Portrait : Sara Giubelli (Maison Moderne)
Avoir la volonté de créer de la valeur plutôt que de s’enrichir.
3 QUESTIONS À Geoffroy de Schrevel CEO (Gambit Financial Solutions)
Quel regard portez-vous sur l’approche fintech de la stratégie Digital Lëtzebuerg ? « La prise de conscience par les autorités luxembourgeoises, selon laquelle la révolution fintech est inéluctable, est indispensable. Les déplacements de création de valeur seront massifs, et les positions de marché qui seront prises dans les cinq prochaines années seront structurantes. Je vois la Digital Lëtzebuerg comme l’affirmation d’un nouveau visage de l’industrie financière du Luxembourg : moderne, transparente, hautement créatrice de valeur. Le secteur public dans son ensemble, y compris les autorités de régulation, doit participer à l’effort. Ces dernières le font déjà ! Non pas en se montrant complaisantes vis-à-vis des fintech, mais en acceptant que de nouveaux outils technologiques émergent afin d’amener, d’une manière innovante, un bénéfice supplémentaire en matière de protection des investisseurs et de gestion des risques. La gestion discrétionnaire digitale et sa manière de gérer le KYC (know your customer) en sont un exemple. Quels sont les points clés devant permettre la réussite d’une démarche fintech ?
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― Novembre 2015
« Tout d’abord, identifier un problème avant de venir avec une solution. L’engouement autour des fintech est lié à un changement de paradigme culturel qui bascule le rapport de force vers les clients au détriment, non pas des fournisseurs, mais d’inefficacités ou d’absence d’offres sur le marché. Pour avoir une chance de réussir, une fintech doit avoir bien clairement identifié un manque, une frustration des clients finaux. Seconde condition, bien connaître les éléments clés du marché et du métier auxquels elle va s’attaquer. Sans une expertise métier forte, la fintech restera au milieu du gué. Enfin, la passion et la persistance. Les fondateurs doivent avoir la volonté de créer de la valeur plutôt que de s’enrichir. Ils proposent quelque chose de nouveau, qui forcément suscite du scepticisme voire de la crainte. La fintech a la tâche de convaincre à la fois ses clients et les capital-risqueurs. Comment avez-vous adapté votre approche et vos solutions aux transformations digitales ? « Nous sommes partis d’un constat simple : la banque privée faisait plus de la distribution de produits
financiers et de l’optimalisation fiscale que du véritable conseil en investissement. En période de vaches grasses et faute d’alternatives, cela se passait bien. Mais l’éclatement de la bulle internet et surtout la crise des subprimes en 2008 ont fortement remis en cause ce mode de fonctionnement. En nous basant sur la recherche fondamentale savamment menée chez HEC-Université de Liège, nous sommes venus, en 2007 déjà, avec un paradigme tout à fait ‘disruptif’ à l’époque : mettre le client, et non plus le produit financier, au cœur du conseil en investissement dans la banque privée. Nous avons ensuite présenté cette solution aux banques de réseau afin d’en faire bénéficier les clients mass affluent. Depuis 2014, nous l’avons proposée aux banques internet, et aujourd’hui un acteur majeur déploie notre innovation ‘Birdee’ sous la forme d’un robo-advisor. La mutation digitale a toujours été au cœur de notre développement, et nous avons un pipeline de R & D de plus de deux ans. Nous sommes pour nos clients un accélérateur de transformation digitale, mais aussi un accompagnateur, grâce à notre expertise métier. »