3 minute read

POLITIQUE

C’est une nouvelle déception judiciaire pour le promoteur Patrice Pastor contre le groupe d’Antonio Caroli sur le dossier de l’Esplanade des Pêcheurs, mais ce n’est pas définitif. Une page cependant importante est tournée sur un point crucial du litige, celui de la conformité de la désaffection. Elle est validée et la décision du Tribunal suprême est sans recours. C’est également une bonne nouvelle pour le Conseil National qui se détache du sparadrap du capitaine Hadock. La cour suprême estime conforme la loi de désaffectation votée par les élus et rendant possible le nouveau projet Caroli.

g Le contexte de la défiance g Une affaire mal engagée dès le départ

Advertisement

Les avocats de la S.C.I Esperanza Pastor ne sont donc pas étonnés par cette décision. Cette partie considère le président du Tribunal Didier Linotte, sa bête noire, comme partial dans cette affaire compliquée. Le Tribunal suprême de la Principauté avait déjà rejeté, le 19 décembre, la demande de la S.C.I. Esperanza de récuser M. Didier Linotte, président du Tribunal, sur l’attribution du projet de l’Esplanade des Pêcheurs. La Cour avait déclaré qu’il n’y avait pas de cause légitime de récusation. La S.C.I Esperanza, dirigée par l’homme d’affaires monégasque Patrice Pastor, avait demandé la récusation de Didier Linotte, président de la Cour suprême. Ceci en raison de la mise en cause de son impartialité dans le litige relatif au projet immobilier de l’Esplanade des Pêcheurs, sur la base de documents publiés par « Les dossiers du Rocher » qui suggèrent des liens entre la société Caroli, maître d’ouvrage du projet, et des proches du Prince Albert II. Le site est d’ailleurs l’objet d’investigations et de poursuites pour savoir qui en est l’instigateur principal et quels sont ses objectifs. Le Prince lui-même a dénoncé une campagne de déstabilisation recouvrant des conflits d’intérêts dont le chantier de l’Esplanade des Pêcheurs.

En leur temps les élus avaient dénoncé le manque d’anticipation du gouvernement sur les conséquences financières de sa rupture de contrat. Cela avait débouché sur une condamnation de l’Etat autour de 150 millions. A l’époque, l’Etat, propriétaire du site, avait signé une convention avec la SAM SAMEGI (du groupe Caroli) et l’archéologue sous-marin Franck Goddio. Le lieu devait ainsi accueillir un Centre de l’Homme et de la Mer. Mais le projet de loi de désaffectation a été retiré peu après, en raison de l’incompatibilité dénoncée par l’Automobile club entre l’organisation du Grand Prix et les projets immobiliers du groupe Caroli. Saisi en 2018, le Tribunal suprême avait condamné l’Etat au versement « d’une somme en principal et intérêts équivalente aujourd’hui à 155 millions d’euros. » Antonio Caroli, PDG de la Société Caroli Immo, s’était dit par la suite « disposé » à chercher une solution à l’amiable avec l’État monégasque. En échange, il renonçait aux 150 millions d’euros que devait lui verser la Principauté en préjudice de l’abandon de son projet immobilier de l’Esplanade des Pêcheurs. Ce 7 septembre, le Prince Albert II de Monaco s’est dit ouvert à ce qu’une « solution amiable soit recherchée, protectrice des finances de l’État et des intérêts de la Principauté ». Après avoir échangé avec Pierre Dartout, nouveau Ministre d’État, et Stéphane Valeri, Président du Conseil National, le Souverain a décidé de la reprise du projet immobilier, mais aménagé. « La S.A.M. Caroli Immo modifiera le projet initial pour un programme de moindre ampleur. Le nouveau projet devra avant tout offrir les surfaces nécessaires pour la pérennisation du Grand Prix de Formule 1 en Principauté et la préservation des accès aux services de secours », précise le Palais Princier dans son communiqué. Le nouveau projet compren- dra un immeuble privé, un autre de logements. Une porte que certains voulaient fermer pour bloquer le projet dès le départ reste ouverte. Cela étant, même les avocats de Mr Caroli, pensent que c’est loin d’être fini. Il reste de nombreux recours… contre le permis de construire, les conditions de l’opération et son financement. Le feu rouge bloquant le départ a été évité mais tous les voyants ne sont pas au vert. g Le nouveau projet

Le nouvel aménagement envisagé doit dégager une surface de 5 800 m² permettant d’assurer la pérennité du Grand Prix et qui pourra être utilisée pour d’autres événements au cours de l’année. L’accès des services de secours devrait également être garanti dans cette nouvelle configuration. Le reste de la surface comprendra un musée de 5 400 m2, qui doit comme prévu accueillir les collections de l’archéologue Franck Goddio. Des milliers de pièces y seront exposées ; le lieu comportera également une unité scientifique et

ECONOMIE de recherches, ainsi que divers pôles d’activités scientifiques et pédagogiques. Un immeuble – en lieu et place de l’ancien Yacht Club – verra aussi le jour, accueillant plusieurs commerces et 23 logements domaniaux. Des jardins publics, une liaison piétonne entre l’esplanade et Monaco-Ville, des locaux de relogement pour les professionnels du port et de la Police Maritime, un parking de 182 places et des commerces, bureaux et logements privés sont également au programme. Le Conseil national a précisé que ce projet devra s’inscrire dans la politique de protection de l’environnement menée par l’Etat. La désaffectation d’une parcelle du terrain nécessaire pour concrétiser le projet, a donc été votée à la majorité. « Cette avancée marque un tournant historique dans la façon d’appréhender les lois de désaffectation du domaine public au bénéfice d’un acteur privé, et donc de défendre les intérêts de l’Etat et des Monégasques », avait déclaré l’alors Président du Conseil national, Stéphane Valeri.