ZUT Hors-Série — HEAR

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On ne compte plus les partenariats avec les entreprises mis en place dans le cadre de la section Design textile à Mulhouse. DMC, Garnier-Thiébaut, La Cerise sur le Gâteau, Mittwill, Meyer Sansbœuf, Philéa Textile… Si ces contacts se justifient par la présence historique d’industries textiles dans la région, de créateurs et de structures s’attachant à préserver ce patrimoine dans la région, ils s’intègrent surtout dans une démarche pédagogique chère à la HEAR. Christelle Le Déan, l’une des trois enseignantes de l’atelier textile aux côtés de Mirjam Spoolder et Dagmara Stephan, explique : « Chaque année, nous avons de nouvelles possibilités en termes de partenariats. Il en découle divers projets qui font partie intégrante de la pédagogie. Il s’agit d’aller chercher des métiers, des savoir-faire, des techniques pour permettre aux étudiant.e.s de développer des méthodologies, de comprendre des contextes. Développer leur curiosité et leur montrer que l’industrie n’est pas un monde impénétrable est très important, car de plus en plus, elles et ils seront amené.e.s à traiter avec différentes typologies de clients, et même à changer de métier en cours de route. » Dès son arrivée à la HEAR, Christelle Le Déan, fervente pratiquante du « cousu main », sous entendu du “faire”, s’est rapprochée du Pôle Alsace Textile pour répondre à ces besoins. Ainsi, depuis plusieurs années et de manière régulière, les étudiant.e.s de la 1ere à la 5e année sont amené.e.s à visiter des entreprises, se saisir des outils de production, réfléchir à de nouveaux usages, créer des pièces en fonction des matières premières données à l’école (et qui permettent d’année en année de structurer les ateliers) et même, parfois, à développer leurs propres projets en profitant des compétences et machines de certaines entreprises qui n’hésitent pas à leur ouvrir leurs portes sur demande. Chaque partenariat donne naissance à un ou plusieurs échanges de ce type et est suivi sur le long terme. Exemple avec Héloïse Monfourny qui a, en 3e année, visité la corderie Meyer-Sansboeuf, récupéré, questionné et travaillé cette matière jusqu’à sa 5e année. Pour son diplôme, elle a détourné les usages de ces cordes et fa-

Les étudiant.e.s présentent leurs travaux et recherches autour de la marque La Cerise sur le Gâteau à sa créatrice, Anne Hubert. Photo Christophe Schmitt

briqué son propre outil pour créer des filets qui se confondent en accessoires de mode. Christelle Le Déan poursuit : « Pousser les limites et contraintes techniques, favoriser le détournement et l’hybridation », tout en prenant conscience des réalités professionnelles. Lors de ces visites encadrées par des salarié.e.s, les étudiant.e.s découvrent autant les conditions de travail que des outils dont ils apprennent à se servir pour créer, notamment des motifs comme ce fut le cas chez Garnier-Thiébaut, fabricant de linge de maison, ou Mittwill, converteur textile. Avec Anne Hubert de La Cerise sur le Gâteau, la démarche a été poussée à son paroxysme : la créatrice mulhousienne est venue présenter sa marque, les étudiant.e.s ont visité son atelier, puis, ils et elles ont produit des pièces en lien avec l’ADN de la marque, présentées enfin à la créatrice. Céline Teixeira, en 3e année, a choisi de se concentrer sur les inspirations d’Anne Hubert liées à son histoire familiale. L’étudiante, d’origine portugaise, s’est penchée sur la blouse typique portée par les femmes en cuisine, qu’elle a revue, corrigée et « ancrée dans son époque ». Et pour les entreprises ? Anne Hubert témoigne : « Il faut dire que les

entreprises sont souvent un peu larguées par rapport à la création. Ces initiatives apportent une ouverture d’esprit, d’autres modes de réflexions qui nous sortent de nos automatismes. C’est rafraîchissant d’être confrontés à des étudiants qui ne sont pas encore pervertis par la réalité. Après, selon moi, créer un produit n’est pas une finalité, il faut prendre ces expériences comme de la pédagogie partagée. Ces démarches ne doivent pas être calculées : fournir tissus et matières, laisser libre cours à la création, et tous se laisser surprendre. » D’autres étudiant.e.s sensibilisé.e.s à la nécessité de se confronter au monde professionnel répondent à des concours (AlsaceTech, adressé aux écoles du territoire notamment) ou creusent leur propre sillon. Chloé Stenger et Louna Desvaux, en 3e année, travaillent sur le textile durable et la revalorisation des chutes et rebuts. Elles ont monté leur collectif (Tisseuses d’idées) et partiront avec le soutien de la HEAR et de la Région faire un tour du monde documenté des initiatives en la matière. Autre intérêt des partenariats : l’embauche d'étudiant.e.s. Manon Garcia del Barrio a cette année été recrutée par Velcorex, quand Charles-Henri Liégeard intégrera Mittwill pour travailler en tant que commercial cet été... Création et professionnalisation sont, ici, deux mots qui vont bien ensemble.


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