Anthologie de New York

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omniprésent au cours du récit : « payé » et « argent » p.18, « quinze dollars par mois » p.150, « 6 dollars et 16 cents » p.184, « millionnaires » p.305, « un nickel » p.401, « trois cents » p.505. Cette obsession de l’argent est doublée d’une ambition démesurée pour la majorité des personnages, qui, la plupart du temps, n’arrivent finalement pas à obtenir ce qu’ils souhaitent. Par exemple, Bud Korpening fuit la campagne pour réussir à New York, mais finit par mettre fin à ses jours, faute d’emploi, de logement et donc d’argent, et ne réalise pas son souhait. De même le souhait d’ascension sociale se retrouve chez quasiment tous les personnages, mais peu réussissent cependant, voire redescendent dans cette échelle sociale. C’est le cas de Joe Harland, considéré autrefois comme le Roi de la Bourse, ou encore le Sorcier de Wall Street, et qui se retrouve sans rien à la suite de mauvais placements boursiers, qu’il attribue à la perte d’une cravate, réduit à demander de l’argent à un ancien employé, nommé Felsius. Ainsi l’argent et la réussite sont les principales raisons de vivre et d’espérer des personnages, et leur absence conduit à leur mort (Bud Korpening) ou à leur déchéance (Joe Harland). On peut voir dans ce New York tourné vers l’argent et vivant pour lui un prélude à la crise qui toucha les Etats-Unis en 1929. En effet, pour gagner de l’argent, les personnages ont recours à la spéculation (comme le faisait Joe Harland lorsqu’il était ce que l’on peut de nos jours considérer comme un trader), créant ainsi une bulle spéculative explosant en 1929 et conduisant à la ruine de nombreuses personnes ayant placé de l’argent en bourse ou à la banque (manque de liquidités). On peut donc considérer que l’argent et la réussite sont le nerf de la vie des personnages de Manhattan Transfer, mais également des individus vivant au cours des Années Folles. Enfin, nous allons étudier la façon dont le récit est construit. c) Les techniques narratives : On peut tout d’abord remarquer que le début du livre est un début in medias res, c’est-à-dire que le récit s’ouvre directement sur une action, avec la naissance d’Ellen, dont on ignore alors le nom, symbolisant peut être la naissance d’un nouveau type de personnage, différent du personnage classique dont on connaît tout par le biais d’un narrateur omniscient, comme cela peut se voir chez Balzac, mais plutôt un personnage dont on ne sait que ce qui est essentiel dans l’économie du récit. D’autre part, on peut observer que Manhattan Transfer est constitué d’une suite de séquences, mimant ainsi ce qui se fait au cinéma. Par ailleurs la plupart des critiques parlent de « littérature cinématographique » pour caractériser Manhattan Transfer. Les séquences ont parfois un rapport avec celles qui les précèdent : on peut donc parler de transitions, comme au cinéma, avec les fondus enchaînés. On peut également remarquer un autre point commun avec le cinéma, qui est l’alternance des points de vue dans l’œuvre. En effet, la narration oscille sans cesse entre des points de vue interne, externe et omniscient. Cela peut par exemple se voir page 49, où le narrateur passe du point de vue externe au point de vue interne : « Fifi

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